Franc-Nord vol 5 no. 2 (printemps 1988)

du côté de la «chimiothérapie sylvi- cole»: les sols des érablières sont souvent traités à la chaux, au phosphore et au potassium. Mais qu'y a-t-il de mal dans ces ...
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orénavant, grâce au reboisement et aux traitements sylvicoles, nos forêts seront plus productives. L'industrie du bois sera assurée d'un bois de qualité en quantité suffisante. C'est toute notre économie qui en bénéficiera. Nos forêts seront également mieux protégées. Les exploitants forestiers devront tenir compte des autres utilisations de la forêt: loisirs, chasse, pêche, etc. Nous pourrons tous ensemble mieux profiter de notre forêt.

Québec

DO DO

ARTICLES 6

Prodigieuses libellules Mal aimées et non protégées, les libellules tiennent une place importante pour le contrôle des populations de moustiques et pour l'alimentation des amphibiens, des poissons et des oiseaux. par Michel Savard

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De la chimie dans les érablières Déjà omniprésents en agriculture, les produits chimiques investissent de plus en plus le bastion des érablières. pa.r Serge Beaucher

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Vété des in ... sectes Au Québec, l'année 1988 sera marquée par 1'« été des insectes», alors que deux importants projets de muséologie scientifique consacrés à l'entomologie verront le jour. par Gilles Drouin

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Des fleurs dans les arbres Au printemps, les arbres vous sourient de toutes leurs fleurs. par Gisèle Lamoureux

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Les grandes migrations animales (2e partie): Les beaux voyages migratoires Heureux qui, comme la grande oie blanche, le saumon, l'anguille, le monarque ou la sterne arctique, a fait un beau voyage ... par Jean-Pierre Drapeau

CHRONIQUES 4

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Votre courrier Éditorial

par Gilles Gauthier

Les vrais perdants de la privatisation

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Penser globalement

par André Delisle

Quand les déchets se cherchent une «cour»

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Agir localement

par Gilles Gauthier

Non au délestage des réserves fauniques

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Les actualités Le calendrier

En pages centrales, « Vétat du milieu aquatique au Québec», le troisième d'une série de quatre suppléments. ~ printemps 1988

Photo en page couverture: Un accouplement de libellules (des Coenagrion resolutum). Photo Michel Sava rd

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La campagne de sensibilisation « Le lynx a besoin de vous », lancée parallèlement à la parution de l'article " Sales temps pour le lynx » (FRANC-NORD, Hiver 1988), a engendré un abondant courrier: l'Union québécoise pour la conservation de la nature a en effet reçu plus de 400 réponses à sa campagne, des réponses d 'appui et de soutien financier pour la presque totalité, mais aussi quelques lettres remettant en question les affirmations et les intentions mêmes de cette campagne de sensibilisation. Nous publions ici quelques-unes des lettres reçues. Et nous en profitons pour remercier tous les membres qui ont contribué à la levée de fonds dont les revenus serviront à la production et à la diffusion de l'affiche « Le lynx du Canada : un patrimoine faunique à conserver », à la préparation d ' un mémoire sur le piégeage et aux travaux du Comité faunique de l'UQCN.

Interdire le piégeage du lynx? Comment peut-on encore autoriser le pié geage et la chasse d'animaux en danger? S'ils sont en danger, ne devrait-on pas interdire immédiatement toute forme de capture de ces animaux? Sinon, on joue à l'autruche. Dans le cas du lynx, j'ai vraiment l'impression qu 'on che rche à sauver un animal...pour

qu'un chasseur puisse ensuite l'abattre. Je ne peux pas avaler cela. Quel est le point de vue de l'UQCN à ce sujet?

Louise Julien, Ripon L'LJQCN ne s'oppose ni au piégeage, ni à la chasse, ni à la pêche. L'(JQCN reconnaît le fait que l'espèce humaine dépend pour sa (suite à la page 32)

Union québécoise pour la conservation de la nature « Penser globalement, agir localement» 9141, avenue du Zoo, Cha rlesbourg, GlG 4G4, tél.: (418) 628-9600 Organisme national sans but lucratif, l'Union québécoise pour la conservation de la nature (UQCN) regroupe des individus ainsi que des sociétés oeuvrant dans le domaine des sciences naturelles. L:UQCN favorise la conservation et l'utilisation durable des ressources. Elle fonde son action sur les trois objectifs de la Stratégie mondiale de la conservation : le maintien des processus écologiques essentiels entretenant la vie, la préservation de la diversité génétique et l'utilisation durable des espèces et des écosystèmes. Secrétaire générale: Chantal Dubreuil Coordonnatrice des programmes de conservation: Francine Hone Administration et membership: Lorraine Côté-Ouellet Conseil de direction de l'UQCN: Harvey Mead, président; Jean-Luc Bourdages, vice-président aux parcs et sites protégés; Luc Gagnon, vice-président à l'éducation; André Delisle, vice-président à la commission éditoriale; benis Bergeron (dossiers de conservation) et Gilles Gauthier (dossiers fauniques), vice-présidents à la conservation; Philippe Fragnier, vice-président à la régie interne; Manon La charité, secrétaire; Jacques Proulx, c.a., trésorier.

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Affiliés: Amis de la nature de Georgeville, Association des entomologistes amateurs du Québec, Association québécoise de lutte contre les pluies acides, Association québécoise d'interprétation du patrimoine, Centre atlantique de l'environnement, Centre de conservation de la nature du mont Saint-Hilaire, Centre de la montagne, Centre d'interprétation de la batture, Centre d'interprétation du milieu écologique du mont SaintGrégoire, Centre local d'écologie de Mirabel, Cercle des jeunes naturalistes, Club des naturalistes Catharine Traill, Club des naturalistes de la vallée de la Saint-François, Club des ornithologues de la Gaspésie, Club des ornithologues du Bas-Saint-Laurent, Club des ornithologues amateurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean, Club des ornithologues du Québec, Club d'ornithologie de la Manicouagan, Club d'ornithologie Sorel-Tracy, Comité environnemental de recherche et d'intervention du Grand-Portage, Comité permanent sur l'environnement de Rouyn-Noranda, Conseil régional de l'environnement de l'Est du Québec, Corporation d'aménagement de sites écologiques, Corporation de développement économique de la récupération et du recyclage de la région 03, Ecologie en action en Sagamie, Environnement Jeunesse, Fédération québécoise de la marche, Fondation Echo-logie, Fondation les oiseleurs du Québec, Fondation pour la sauvegarde des espèces menacées, Fonds mondial pour la nature - Canada, Groupe d'animation en sciences naturelles, Groupe Fleurbec, Groupe Inter-Paysages, Groupe nature et patrimoine, Jardins des Laurentides-Carrefour de la nature, Laboratoire d'écologie végétale de l'Institut botanique de Montréal, Laboratoire de géographie de l'Université du Québec à Chicoutimi, Les ami-e-s de la terre de Québec, Montreal Field Naturalists, Mouvement écologique collégial de Sherbrooke, Naturalistes adultes du Québec, Option verte, Parc régional de la Rivière-du-Nord, Parc régional du Long-Sault-Aux bois des Ombelles, Regroupement pour la préservation de l'île et du marais de Katevale, Société culturelle et écologique de la Basse-Côte-Nord, Société d'aménagement des ressources de la rivière Métis, Société d'animation du Jardin et de l'Institut botaniques de Montréal, Société d'animation scientifique de Québec, Société d'entomologie du Québec, Société d'histoire naturelle de la vallée du SaintLaurent, Société d'ornithologie de Lanaudière, Société de biologie de Montréal, Société de géographie de Québec, Société du loisir ornithologique de !'Estrie, Société linnéenne du Québec, Société québécoise pour la conservation des sites naturels, Société Provancher d'histoire naturelle, Société québécoise de la spéléologie, Société québécoise pour la protection des oiseaux, Société zoologique de Granby, Société zoologique de la Mauricie, Société zoologique de Québec.

printemps~

9141, avenue du Zo~oD""----~ Charlesbourg, Qc, GlG 4G4 Tél.: (418) 628-9600 Directeur et rédacteur en chef: Jean-Pierre Drapeau Publicité: Hélène Savard Traitement de texte, adm inistration et abonnement: Lorraine Côté-Ouellet Secrétariat: Chantal Masson Comité de direction: And ré Delisle, Jean-Pierre Drapeau, Harvey Mead, Jacques Proulx Comité de rédaction: Cy rille Barrette, Nicole Beaulieu, Gisèle Lamoureux, Janouk Murdock, Jacques Prescott Révision des textes: René Moisan, Camille Rousseau Conseillers à la production: Yves Bédard, Jean-Luc Grondin, René Lemieux Réalisation graphique: Elizabeth Ann Schofield Composition typographique: Helvetigraf Séparation de couleurs: Graphiscan Impression: Imprimerie Canada Média d'information sur la nature et les questions environnementa les au Québec, FRANCNORD a pour objectif de vu lgar iser les récentes connaissances scientifiques et techniques dans ces deux domaines. FRANC-NORD est Je magazine officiel de l'Union québécoise pour la conservation de la nature. FRANC-NORD est publié quatre fois l'an. En 1988, la cotisation pour les membres individuels de J'UQCN est de 15,00 $ pour un an; celle des organismes affi li és est de 25,00 $. Les membres de J'UQCN sont automatiquement abonnés à FRANC-NORD. Les abonnements à FRANC-NORD, pour les bibliothèques, les écoles et les aut res organismes non affiliés, sont de 15,00 $ pour un an au Canada et de 20,00 $ à l'étranger. Courrier de deuxième classe N° 6284. Port de retour garanti: FRANC-NORD, 9141, avenue du Zoo, Charlesbourg, GlG 4G4. Copyright 1988 - FRANC-NORD. Le contenu de FRANC-NORD ne peut être reproduit ni traduit sans l'a utorisation de la direction.La direction lai sse aux auteurs l'entière respo nsabilité de Jeurs textes. Les titres, sous-titres et les textes de présentation sont !'oeuvre de la Rédaction. Dépôt léga l: Bibliothèque nationale du Québec et Bib liothèque nationale du Canada, premier trimestre 1984, ISSN-0822-7284. FRANCNORD est indexé dans «Point de repère '" La pub li cation de ce périodique est rendue possibl e grâce à J'aide du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec, du ministère de !'Enseignement supérieur et de la Sc ience du Québec et du ministère de !'Environnement du Québec. Nous tenons à remercier Je Collège régional Champlain pour son appréciable collaboration.

union québécoise pour la conservation de la nature

_ _ _ _ _ _édiiorkl._____ _ _ __ LES VRAIS PERDANTS DE LA PRIVATISATION Après plusieurs heures de route, vous arrivez enfin à votre destination, le stationnement du circuit de canot-camping du Grand lac Victoria, dans la réserve faunique de La Vérendrye. Or, c'est avec stupeur que vous apercevez le nouvel écriteau, écrit en grosses lettres: vous pouvez y lire que la région est devenue une pourvoirie à droits exclusifs et que le canot-camping y est dorénavant interdit! Déçu, vous regardez autour de vous, dans le stationnement occupé par de nombreuses voitures qui portent, pour la plupart, des plaques d'immatriculation ... américaine! Scénario fantaisiste? Peut-être pas, si le gouvernement donne suite à sa politique de délestage des réserves fauniques. En effet, le 28 octobre dernier, Yvon Picotte, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche (MLCP), lançait un programme vi sant à réduire considérablement notre réseau de réserves. Ainsi, si on prend seulement les 18 réserves «actives» (celles où le MLCP offre des activités de chasse et de pêche), c'est 43 % de la superficie (près de 30 000 km 2) qui sera «donnée» par le gouvernement à l'entreprise privée, principalement aux pourvoiries. Pour la réserve La Vérendrye par exemple, ce sont 5447 km 2 (soit 40 % de la superficie) qui seront amputés. Le programme touchant les réserves fauniques n'est que la pointe de l'iceberg. Depuis quelque temps, le MLCP est en effet secoué par la vague de privatisation qui balaie le gouvernement actuel. Le ministre Picotte a même fait de ce dossier son principal cheval de bataille. En mars 1987, le Groupe de travail sur le développement des initiatives privées remettait au MLCP son rapport, communément appelé rapport Leblond. Les conclusions étaient radicales: des terrains de camping aux

réserves fauniques , en passant par les piscicultures et les programmes d'interprétation de la nature dans les parcs, c'est une large part des équipements et des services du MLCP qu'on recommandait d'offrir à l'entreprise privée! Ce rapport a évidemment entraîné une levée de boucliers chez les organismes de la faune. Face au mécontentement général, le ministre a chargé un comité de députés, sous la présidence de Daniel Bradet, député libéral de Charlevoix, d'étudier les recommandations du rapport Leblond et de soumettre un plan d'action au gouvernement. Le rapport Bradet, remis en décembre dernier, est une douche d'eau froide pour la politique de privatisation du MLCP (ou, peut-être, une porte de sortie pour le ministre .. .). On y parle de privatisation, certes, mais sur un ton modéré. En effet, les mots «prudence», «besoin d'être informé» et «réévaluation» reviennent souvent. Voilà qui va certes ralentir les élans de privatisation au MLCP, du moins pour un certain temps. Il y a malheureusement un secteur où les projets de privatisation ne sont pas en perte de vitesse et c'est celui des réserves fauniques. En fait, le processus de révision des territoires fauniques était déjà amorcé avant même Je dépôt du rapport Leblond. Depuis janvier, le gouvernement procède à des consultations publiques sur sa politique de délestage des réserves. Ces consultations déboucheront sur un Sommet de la faune, qui se tiendra à Québec du 29 avril au 1er mai. Tous les intervenants de la faune s'assoieront alors autour d'une même table, dans l'espoir d'en venir à un consensus sur les orientations futures en matière de gestion de la faune et des terri t9ires fauniques au Québec. Afin d'exposer son point de vue sur la question (voir «Non au délestage des réserves fauniques», p. 30 de ce nu-

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printemps 1988

méro), l'UQCN entend prendre une part active à cet important Sommet. En attendant, nous assistons à des débats parfois passionnés sur la politique de délestage du MLCP. Les enjeux sont de taille. Pour le gouvernement, les avantages à court terme sont alléchants: il peut se décharge.r d'un fardeau fi nancier, tout en ouvrant à l'exploitation des territoires qui étaient jusqu'à maintenant peu ou pas exploités. Mais on devrait d 'abord se demander si cette «sousexploitation» de la faune dans les réserves est vraiment un mal en soi. Si les réserves renferment une telle richesse faunique , n'est-ce pas justement parce que cette faune est relativement peu exploitée? En fait, c'est une partie importante de notre patrimoine faunique que le MLCP s'apprête à livrer, sur un plateau d'argent, à l'entreprise privée. Voilà qui a de quoi surprendre de la part d'un ministère qui parle beaucoup, par les temps qui courent, de conservation de la faune! Quel sera donc le bilan de toute cette opération de privatisation? On peut déjà entrevoir que les gagnants seront certainement l'entreprise privée et les utilisateurs de la faune les plus fortunés. Les perdants, eux, risquent d'être plus nombreux: les amants de la nature, d'abord, mais aussi le chasseur et le pêcheur moyens, pour qui les promesses d'une plus grande accessibilité à la faune sont plus que douteuses. Ultimement, c'est tout notre patrimoine faunique qui risque de s'appauvrir irrémédiablement à travers cette privatisation. Cela devrait faire réfléch ir. Gilles Gauthier Biologiste et chercheu r en écologie animale à l'Université Laval , Gilles Gauthier est vice-président , à la conservat ion , de J'UQCN. Il s'occupe principalement des dossiers fauniques.

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par Michel Savard

Mal aimées et non protégées, les libellules tiennent une place importante pour le contrôle des populations de moustiques et pour l'alimentation des amphibiens, des poissons et des oiseaux. Symbole de bonheur et de bravoure chez les Orientaux, les libellules sont considérées en Occident comme des créatures maléfiques et repoussantes. Qui n'a pas été mis en garde contre ces «Crève-yeux» qui risquaient même, disait-on, d'entrer dans les oreilles? Cette antipathie se révèle d'ailleurs très bien dans le nom anglais de la libellule (dragonfly), qui fait référence aux serpents et aux dragons qui symbolisaient, au Moyen-Âge, les esprits diaboliques.

au bord d'un étang oublie vite les préjugés. Il découvre plutôt que la libellule s'avère à tous égards une créature prodigieuse.

Cependant, la réalité est tout autre. Les libellules sont des insectes gracieux, fascinants et inoffensifs. Quiconque se donne la peine d'observer les allées et venues d'une libellule

Les entomologistes regroupent les li bellules dans un seul ordre, les Odonates, mot technique créé par Fabricius en 1793 et qui signifie «mâchoires dentées». L'ordre des Odo-

Neuf familles au bord de l'eau Il existe 5 000 espèces connues de libellules dans le monde. Un inventaire réalisé dans le Québec méri dional a permis d'en répertorier 131.

nates se divise en deux grands sousordres, faciles à différencier au premier coup d'œil: les Zygoptères, petites libellules appelées communément «demoiselles», ont les quatre ailes de forme identique, tandis que les Anisoptères, libellules de plus grande taille, ont les ailes postérieures nettement plus larges à leur base. À l'intérieur de chacun de ces deux sous-ordres, on classe également les espèces de libellules en différentes familles; au Québec, on en compte neuf. Les libellules sont des insectes associés exclusivement aux eaux douces, quoique les larves de certaines espèces s'adaptent aux eaux saumâtres

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Au repos, l'Enallagma de Hagen replie ses ailes le long de son corps, un comportement propre aux Zygoptères . .

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printemps 1988

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Le rouge écarlate et remarquable du mâle Sympetrum éclaireur lui a valu le surnom de «rouget».

] En vue de l'accouplement, cette libellule quadrimaculée ~ mâle guette de son perchoir le passage d'une femelle. Au E lieu d'adopter un tel comportement de percheur, les mâles 2 de certaines espèces de libellules, au vol puissant, se font' o.. patrouilleurs: ils parcourent de long en large les rivages des étangs et des cours d'eau, leur vol de poursuite pouvant alors atteindre des pointes de 60 km/h!

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L'ornement des ailes de la libellule gracieuse en fait la plus jolie des espèces du Québec.

printemps

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Voulez-vous Je savoir?

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AUTOMNE 1988 : ADMISSION À rUOAM

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L'alimentation des oiseaux» Peter Lane

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printemps

Québec:::: 1~

(légèrement salées). Les libellules fréquentent trois types de milieux aquatiques: les ruisseaux et les rivières , les lacs profonds, les marais et les étangs. Chacun de ces milieux étant associé à une faune odonatologique propre, certaines espèces de libellules peuvent donc jouer le rôle de véritables indicateurs vivants de la nature d 'un milieu . Par exemple, la présence de la leucorrhine glaciale au-dessus d'un étang indique que les eaux y sont très acides. Toutefois, quelques espèces très communes, comme la cordulie de Shurtleffer, semblent indifférentes à l'acidité de l'eau et se retrouvent en abondance dans des milieux très variés.

On être sensible Les libellules représentent un élément important des écosystèmes aquatiques. Redoutables prédateurs, aussi bien au stade larvaire qu 'au stade adulte , elles tiennent une place

.. ....,.. .,~

L'interprétation et le tourisme Ottawa/88 Un congrès pan-canadien sur l'interprétation du patrimoine

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•Quatre ailes de forme identique

• Yeux sur le côté de la tête •Corps frêle • Longueur: 23 a 40 mm

ZYGOPTÈRES

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• Ailes postérieures nettement plus larges vers la base • Yeux proéminents • Corps robuste • longueur: 20 â 84 mm

AN ISOPTÈRES

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• Aile s'élargissant progressivement de la base vers le centre

• Yeux composés conti gus ou se touchant en un point (vus de dessus)

• Yeux composés, nette· ment séparés sur une bonne distance

feuille d'arbre CALOPTÉRYGIDÉS

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• Nervu re au cent re de

l'aile. commençant près du nodus (•v irgule•)

• Appendices anaux des mâles en forme de pince COENAGRIONIDÉS

• Ne r vure au centre de l'aile, commençan t près

GOMPHIDÉS

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Nervures audessus du triangle, presque parrallèles

Nervures au-dessus du triangle, en forme de .y.

du triang le • Append ices anaux des mâles en forme de fauci lles LESTIDÉS

IDENTIFICATION DES FAMILLES Insectes de grande taille, les libellules peuvent être identifiées à l'oeil nu. Pour déterminer à quelle famille appartient une libellule, un examen rapide des ailes, des yeux o u du thorax suffit. On repère plus facilement les caractères se ra pportant à la structure des ailes en s'habituant au dépa rt à localiser le ptérostigma (« rectangle », à l'extrémité), Je nodus («virgule 11, au centre) et le triangle (bien visible à la ba se), présents chez toutes les libellules, à l'exception des mâles Caloptérygidés.

Nervule oblique prolongeo11nt le ptérostigmll

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LIBELWLIDÉS

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importante dans la régulation des populations de moustiques, de tabanides, d'éphémères, de phryganes, de microlépidoptères, de fourmis, etc. Comme proies, elles constituent un maillon essentiel de la chaîne alimentaire de plusieurs espèces de poissons, d'oiseaux et d'amphibiens; leur présence constitue d'ailleurs souvent un indice de la richesse faunique des eaux douces. La modification et la destruction des habitats favorables au développement des libellules entraînent le déclin, voire l'extinction, de plusieurs espèces. Chez les libellules fréquentant le système fluvial , trois espèces sembleraient totalement disparues du sud du Québec. La seule population de Gomphus amnicola connue au Canada se trouvait dans les environs

printemps~

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Nervures au-dessus du triangle, en forme de •V11 CORDULllDÉS

Côté d u thoro11x o11vec une to11che oblique blo11nche ou jtiune MACROMllDÉS

de Hull; or, elle n'y a plus jamais été répertoriée depuis 1928. En outre, il y a plus de 60 ans que l'Hetaerina americana ne se retrouve plus dans les eaux courantes de la région montréalaise. Enfin, la dernière présence notée de Nasiaeschna pentacantha, autrefois présente dans la vallée de la Gatineau , remonte à 1933. Par ailleurs, une quinzaine d'autres espèces habitant les ruisseaux et les rivières à eau limpide comptent parmi les plus rares au Québec. Cela n'est pas étonnant, puisque les différents milieux fluviaux de l'extrême sud du Québec ont fait l'objet d 'innombrables interventions hu maines au cours des 50 dernières années. Heureusement, dans des rivières plus éloignées des zones habitées, on recommence à découvrir cer-

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taines espèces considérées comme très rares au Québec. Par exemple, on a retrouvé en abondance quatre de ces espèces rarissimes cohabitant le long d'une rivière située au nord de ce qui constituait la réserve faunique des Laurentides. En fait, la rareté de ces espèces est plutôt liée à une baisse du nombre d'habitats favorables non perturbés par l'homme . En effet, la rivière en question n'avait encore subi aucune exploitation forestière dans l'ensemble de son bassin hydrographique. On sait qu'une coupe à blanc modifie profondément le régime hydrique d'un cours d 'eau et de ses tributaires, sans compter tous les effets secondaires qui en résultent: érosion du lit et des rives, plus grande turbidité, changement de la température de l'eau, etc. En outre, le flottage du bois, toujours toléré aujourd'hui, perturbe considérablement les habi tats. De nombreux problèmes en résultent : endiguements, accumulation des écorces au fond des cours d'eau, libération de substances toxiques, variations brusques du débit et du niveau de l'eau, etc. Les cours d'eau subissant le flottage du

bois sont d 'ailleurs très pauvres en espèces de libellules.

début de la colonisation, est aussi responsable du déclin de plusieurs espèces de libellules propres à ce milieu particulier. On draine également les tourbières à des fins agricoles et horticoles. Or, plus d'une vingtaine d 'espèces de libellules se développent dans ces eaux acides.

Dans les territoires agricoles, les lits des petits cours d 'eau sont sans cesse creusés, détournés, redressés, remplis ou asséchés pour favoriser un meilleur drainage des sols, sans autre considération environnementale. Subventionnées à coup de milliers de dollars, ces pratiques relativement récentes sont présentées comme une «amélioration des cours d'eau»! Mais c'est ainsi que chaque année, et ce, depuis plus de d ix ans, on détruit un millier de kilomètres de rives nécessaires à la survie des libellules. En outre, un apport excessif en fertilisants azotés, provenant des terrains cultivés, produit une accumulation souvent impressionnante d'algues vertes filamenteuses couvrant la surface des étangs ou des lacs situés en aval; ces véritables écrans flottants empêchent la reproduction et le développement des libellules.

Parmi ces espèces, les seules populations québécoises de Gomphaeschna furcillata et de Williamsonia fletcheri se retrouvent confinées à une tourbière de Lanoraie, dans le comté de Berthier. Le drainage qu'on projette d'y faire menace donc sérieusement de disparition ces deux espèces également très rares au Canada. La pollution et l'artificialisat ion des rives du plus grand cours d'eau douce du Québec, le fleuve SaintLaurent, sont responsables du déclin de maintes espèces de Zygoptères et d' Anisoptères ne pouvant se développer au Québec que sous le climat favorable de la plaine montréalaise. Les mêmes problèmes se retrouvent également au niveau des lacs où la villégiature s'est développée de fa-

Le drainage systématique des herbiers aquatiques, pratiqué depuis le

ON NE VIT QOE ... TROIS FOIS

] Après trois ans de vie aquatique, la

~ larve du gomphe minuscule sort de

l'eau, au début de l'été, pour compléter sa métamorphose. Elle se nourrit de micro-organismes et de petits inverté~ brés aquatiques, telles les larves de K-....._~_._.....__._-""'-~"'-'-......_._.__......._.__.. 5: moustiques. G:i

Une libellule possède en quelque sorte trois vies: une vie embryonnaire à l'état d'œuf, une vie essentiellement aquatique à l'état de larve et une vie aérienne à l'état d'adulte (imago). Elle passe de la vie embryonnaire à la vie aquatique, lors de l'éclosion, et de la vie aquatique à la vie aérienne, lors de l'émergence.

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~ ~

À l'éclosion, l'œuf donne naissance à une minuscule prélarve incapable de se mouvoir avec ses pattes et de se nourrir. Presque immédiatement après, a lieu la première mue; apparaît alors une petite larve adaptée à la vie aquatique.

La larve de libellule est carnassière et sa vie aquatique se résume à rechercher ses proies et à manger. Chaque larve occupe un territoire de chasse qui lui est propre. Au cours de sa croissance , la larve de libellule subira une douzaine de mues avant d 'atteindre sa pleine maturité. La durée du stade larvaire varie d'un mois à trois ans. Sous le climat

L'émergence des libellules (ici, du gomphe minuscule) se produit tôt le matin ou au cours d'une soirée chaude. Au Québec, certaines espèces émergent aussitôt que les rayons du soleil ont suffisamment réchauffé les eaux, soit entre la mi-mai et le début de juin, alors que d'autres espèces, plus «tardives», émergent seulement à la fin de juillet ou en août.

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çon anarchique. Les libellules sont aussi très sensibles aux variations du pH de l'eau . Par exemple, la Leucorrhinia proxima vit dans des milieux basiques tels les étangs à quenouilles, alors que la Leucorrhinia glacialis, en apparence très semblable à la précédente, se développe uniquement dans les eaux acides des tourbières; ces espèces pourraient presque remplacer les papiers indicateurs de pH! Les pluies acides pourraient donc causer un changement de l'odonatofaune à l'échelle de la province; en effet, environ 40 % des espèces sont menacées par ce phénomène d'origine industrielle. À son insu, l'homme peut aussi favo riser un petit nombre d'espèces de libellules qui s'adaptent rapidement à des habitats nouveaux. Par exemple, les fossés en bordure des chemins et les petits étangs formés dans les anciennes sablières conviennent très bien à des espèces ubiquistes, comme Libellula quadrimaculata, /schnura verticalis ou Aeshna québécois, la température des eaux est favorable durant cinq à six mois à la croissance des larves. Les espèces à croissance lente passent ainsi deux ou trois hivers sous la glace, en état de diapause. Rendue à maturité, la larve de libellule doit sortir de l'eau pour se métamorphoser en imago, capable de voler et de se reproduire. Après sa sortie de l'eau, la larve a peu de temps pour trouver un support en vue de la métamorphose. Une fois bien fixée sur la tige d'une plante émergente, s ur un rocher ou, à défaut, sur le so l, la transformation s'opère. La vie aérienne de la libellule vise une seule fonction: la reproduction". L'imago devra subir auparavant une période de maturation sexuelle (stade ténéral), suivie d'une période d'activité sexuelle (stade adulte), étape ultime de son existence.

eremita, ainsi qu 'à des espèces aux mœurs migratrices, comme Pantala {lavescens .

La richesse de l' odonatofaune du Québec égale celle de tous les pays d'Europe et du nord de l'Afrique réunis. Elle renferme aussi des éléments originaux, comme Somatochlora brevicincta, une espèce endémique découverte en 1953 par un entomologiste québécois, le frère Adrien Robert, un Clerc de SaintViateur.

Les invertébrés crient au secours Pour sauvegarder ce patrimoine naturel particulièrement riche, la protection intégrale de certains bassins hydrographiques renfermant des habitats aquatiques de grande qualité apparaît comme le seul recours dans le contexte socio-économique actuel. Or, les gouvernements et les organismes privés qui se préoccupent des espèces menacées ou en voie de disparition au Canada ometment et à la ponte. Dans le monde des insectes, le mode d'accouplement des libellules est spectaculaire et unique. li faut dire que l'abdomen de la libellule comprend dix segments et que les organes copulateurs du mâle sont situés sous le deuxième segment, alors que ceux de la femelle se retrouvent sous le huitième segment. Ainsi, lors de la copulation, le couple doit adopter une posture acrobatique, nommée roue d'accouplement; les esprits imaginatifs y verront même la forme d'un cœur (voir la page couverture du présent numéro de FRANC-NORD).

tent bien souvent les invertébrés dans leurs plans d'intervention. Notons que les invertébrés constituent à eux seuls plus de 93 % de toutes les espèces animales! Un document de réflexion émanant du ministère de !'Environnement du Québec, «L'extinction des espèces: réalité ou fiction)), affirme que sur le globe, plus de 1 000 espèces de vertébrés (mammifères, oiseaux, poissons, reptiles et amphibiens) sont menacées d'extinction . li s'avère que pour chaque espèce de vertébré qui s'éteindra, 25 espèces végétales et près de 500 espèces d'invertébrés seront déjà disparues. Si la situation présente ne change pas d'ici l'an 2 000, le bilan final des extinctions dépassera l'entendement. Devant ces sombres pronostics, seule l'adoption de politiques globales allant dans l'optique de la Stratégie mondiale de la conservation apporterait des solutions satisfaisantes. Entomologiste, Michel Savard est directeur du comité Entomofaune du Québec.

Boutique de plein-air

Après la copulation, la femelle se di rige, soit en tandem, soit en solitaire, vers les sites de ponte. C'est ainsi que le cycle de vie de la libellule se complète.

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Les imagos meurent au bout de trois à cinq semaines d'existence.

S'accoupler en acrobates Une fois parvenue à maturité, la libel lule adulte retourne près de l'eau, vers les lieux de reproduction. Ses activités se résument alors à la recherche d'un partenaire, à l'accouple-

Au Québec, la taille d'une libellule varie de 20 mm (Néhalennie, Nannothème) à 84 mm (Anax) et son envergure, de 3 à 11 cm . Les premières libellules, apparues il y a 200 millions d'années, pouvaient atteindre 68 cm d'envergure!

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printemps 1988

33, rue St-André, Vieux Port de Québec, Québec, G1K 8 T3 692.1555

W® O@ CHIMIE

Œ@Gû~ 0®~ @[[@®Oô®[?®~ par Serge Beaucher

Déjà omniprésents en agriculture, les produits chimiques investissent de plus en plus le bastion des érablières. Il y a déjà longtemps que le souffle de la technologie a balayé des érablières l'image traditionnelle qu 'on nous montre encore sur les boîtes de sirop. Tandis que des réseaux complexes de tubes de plastique pompant la sève remplaçaient traîneaux et chaudières, la chimie, déjà omniprésente en agriculture, faisait son entrée dans la «Sucrerie». Pour augmenter la récolte, on installe depuis plusieurs années des pastilles de paraformaldéhyde dans les entailles. Pour nettoyer les tubes après la saison, on a recours à l'eau de javel. Comme certains rongeurs montrent un goût particulier pour ces tuyaux sucrés, des producteurs «astucieux» ont découvert que le poison à rat (un rodenticide) est aussi efficace contre les écureuils. Enfin, dans le but de freiner ce mal encore partiellement inexpliqué qu'est le dépérissement des forêts, on se tourne du côté de la «chimiothérapie sylvicole»: les sols des érablières sont souvent traités à la chaux, au phosphore et au potassium.

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Mais qu'y a -t-il de mal dans ces pratiques, si elles permettent d'augmenter les rendements et de compenser certains effets du dépérissement? Pour ce qui est du poison à rat, c'est clair: son usage en milieu naturel est carrément illégal. Quant aux autres aspects, cela dépend du point de vue où l'on se place. L'utilisation des pastilles de paraformaldéhyde, en particulier, suscite la controverse. Des écologistes s'appuient sur des études américaines pour affirmer que ces petites pilules contribuent au dépérissement, alors que les experts du gouvernement et les représentants des producteurs de sirop ne voient en cette thèse que pure aberration.

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Chose certaine, si l'utilisation des selli , une physiologiste du Vermont produits chimiques dans les éraqui a fait plusieurs études sur le sublières diminue au cours des projet, ils dénonçaient surtout le Flomor chaines années, cela viendra du (nom commercial des comprimés de doute qui a été semé chez les pro- paraformaldéhyde) qui, incidemducteurs eux-mêmes. Car dans les ment, est interdit dans l'État du Vermilieux officiels, non seulement on mont. n'entend pas décourager ces pratiques, mais on semble même vou- Ce produit détruit les bactéries resloir fermer les yeux sur les dépasse- ponsables de la cicatrisation des tisments des normes et sur les usages sus de l'arbre. Inséré, au début de illégaux (voir l'encadré). la saison, dans l'entaille d'un érable, il permet à la sève d'y couler plus longtemps, ce qui augmente consiUn cri d'alarme dérablement la récolte. Autre avantage pour les gros producteurs: le Lors d'une conférence de presse Flomor permet d'entailler plus tôt, tenue au printemps de l'an dernier, de sorte qu'une ou deux personnes deux écologistes, les vétérinaires ont le temps de faire elles-mêmes Pierre Olivier et Jacques Laberge, toute l'opération d'entaillage, sans ont lancé uri cri d'alarme, dénonçant embaucher de main-d'œuvre. En des pratiques acéricoles qu 'ils juoutre, certains acériculteurs «échapgeaient dangereuses, autant pour les peraient » à l'occasion quelques pasarbres ou les animaux que pour les tilles dans la sève en ébullition, hishumains. Accompagnés, pour la cir- toire de donner au sirop une teinte constance, du Dr Mariafranca Mor- plus claire (par l'effet bactéricid~ du

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comprimé) et de lui procurer une meilleure classification. Mais c 'est là un usage interdit, puisque les produits de l'érable doivent être purs. Les études de Mme Morselli et d'autres chercheurs américains tendent à démontrer que la paraformaldéhyde affaiblit la vigueur de l'arbre, en augmentant la quantité de tissus morts au-dessus et en dessous de lentaille. La cicatrisation plus lente favoriserait par ailleurs une invasion de l'arbre par des agents pathogènes. Les écologistes Olivier et Laberge considéraient que ces facteurs peuvent contribuer au dépérissement des érablières exploitées, sans compter qu'avec la cueillette sous vide, on soutire maintenant à l'arbre pratiquement le double de sève d'auparavant. lis signalaient d'autre part la possibilité que des résidus de Flomor se retrouvent dans les produits de l'érable et que des personnes puissent même en ingérer en assez grande concentration, là où il est encore possible de boire directement à la chaudière. S'appuyant sur les études de Mme Morselli, les deux écologistes disaient craindre par ailleurs que les résidus de l'eau de javel (hypochlorite de soude) utilisée pour laver l'intérieur des tubes n'augmentent les niveaux de sodium dans la sève et se concentrent dans le sirop. Ils déploraient en outre que ces lavages annuels se fassent dans l'érablière même, sans déplacer la tubulure, le sol s'en trouvant chaque fois généreusement aspergé. Enfin, les deux vétérinaires dénonçaient fortement l'usage, selon eux de plus en plus répandu, de poison à rat (particulièrement celui commercialisé sous le nom de Big gun) pour éliminer les rongeurs qui s 'attaquent aux tubulures. Ce poison ne peut être légalement vendu aux agriculteurs que pour se débarrasser de la vermine dans leurs bâtiments, mais bien des vendeurs en suggéreraient ésalement l'usage dans l'érablière. Evidemment, les écureuils, sur lesquels portent surtout les soupçons des acériculteurs, n'en sont pas les seules victimes. Bien des rongeurs et autres mammifères et nombre d'oiseaux risquent «d'apprécier» aussi la saveur de miel conférée au produit.

Contre-attaque

«L'eau d'érable contient naturellement des aldéhydes, de telle sorte qu 'on peut en retrouver des résidus À peine quelques jours après la conférence de presse de MM. Olivier dans le sirop et même au-delà de 2 et Laberge et du Dr Morselli , l'Union ppm », dit-il, sans pouvoir expliquer pourquoi alors Santé et Bien-Etre sodes producteurs agricoles (UPA) et cial Canada a établi la norme à 2 le ministère de !'Agriculture, des Pêcheries et de !'Alimentation du Qué- ppm. bec (MAPAQ) convoquaient les jourPour sa part, Louis Ménard , le portenalistes à leur tour pour nier avec véhémence que le Flomor soit res- parole de l'UPA sur la question du dépérissement, considère que cette ponsable, même partiellement, du controverse autour de la paraformaldépérissement des érablières et ainsi déhyde constitue un faux débat pourassurer les acériculteurs sur les provant détourner l'attention de la cause fits accrus qu'ils allaient continuer principale du problème, à savoir les de pouvoir réaliser grâce à la «pipluies acides. «Nous ne disons pas lule». que la pilule est sans danger pour Selon Gaston Allard, agronome-in- l'arbre, explique-t-il. C'est sûr que cela peut représenter un stress supgénieur responsable du dossier du plémentaire. Mais il y a de plus en dépérissement au MAPAQ, il est plus d'évidences que les pluies exact, comme le démontrent les acides et la pollution atmosphérique études de Mme Morselli, que la paraformaldéhyde augmente la hauteur en général sont à l'origine du dépéde la colonne de bois mort au-dessus rissement. Faire un débat autour de et en dessous de l'entaille; mais, al- la pilule, c'est donner un prétexte de plus aux Américains pour garder lègue-t-il, cela ne gêne pas plus le transport de la sève que dans le cas les bras croisés en ce qui concerne leur part de responsabilité dans les d'une entaille sans pilule, puisque pluies acides.» la sève circule verticalement dans l'arbre et demeure de toute façon bloquée vis-à-vis de l'entaille. M. Al- En tout cas, lors de sa journée prolard veut bien admettre, à la limite, vinciale d'information sur le dépérissement, cet hiver, l'UPA n'a pas que le Flomor puisse ajouter un stress à l'arbre, mais de façon non voulu alimenter le débat: il n'y a significative, selon lui. Et même si tout simplement pas été question du on réduisait d'une dizaine d'années Flomor. la vie utile d'un érable, estime-t-il, En attendant de savoir à coup sûr cela ne signifierait pas qu'on augmenterait ses chances de dépérisse- ce qui affecte leurs érables, certains ment pendant ses années de vigueur. acériculteurs particulièrement touchés ont décidé de passer aux actes. Au total, évalue Gaston Allard du L'agronome du MAPAQ considère d'autre part que la disponibilité en MAPAQ, environ 20 % d'entre eux sucres nécessaires pour la mise en auraient essayé diverses méthodes marche des fonctions de l'arbre au de chaulage (pour neutraliser l'acidité du sol) ou de fertilisation. Cerprintemps est de beaucoup supérieure aux quantités qu'on peut lui tains ont même effectué des pulvérisations aériennes. retirer par la sève, même avec la pilule et par pompage sous vide. SeSelon Louis Ménard, les épandages lon lui, un mauvais aménagement de chaux n'auraient guère été et des entailles mal faites sont en concluants, alors que les applicadéfinitive beaucoup plus susceptions d'engrais (phosphore et potastibles que la paraformaldéhyde d'ensium) donneraient apparemment des dommager l'érablière. Quant aux possibilités de trouver dans le sirop résultats, mais à doses assez fortes. des concentrations de formaldéhyde Le m!nistère de !'Agriculture et celui supérieures aux normes permises (2 de !'Energie et des Ressources ont aussi fait des expériences et deppm), M. Allard ne s'en inquiète guère, étant donné la grande volati- vraient, à l'automne prochain, recommander une méthode particulité de la substance et jugeant de lière. toute façon l'ingestion du produit peu dangereuse, même à des Pour ce qui est des effets seconconcentrations supérieures à 2 ppm. daires éventuels sur l'ensemble de (suite à la page 17)

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L'ÉTÉ dEs ÎN ••• par Gilles Drouin

Au Québec, l'année 1988 sera marquée par I' «été des insectes», alors que deux importants projets de muséologie scientifique consacrés à l'entomologie verront le jour. Bien des gens en sont encore au stade des «bibites» lorsqu'il est question d'insectes, confondant souvent araignées et moustiques. Pour eux, les insectes sont synonymes de saleté et de maladies et ont surtout le don de gâcher les vacances estivales ou de ravager les potagers. Pourtant, en dépit de ce dédain et de cette méconnaissance, les insectes exercent sur nous une fascination certaine. Des doutes? Chaque été, depuis 1985, près de 100 000 personnes ont visité la Maison des insectes, au Jardin zoologique du Québec, et ce, malgré l'exiguïté des lieux. L'été dernier, 280 000 personnes ont franchi les tourniquets de l'exposition de la collection Georges Brossard, au Zoo de Granby. De novembre 1987 à janvier 1988, la même collection a attiré près de 90 000 personnes au Jardin botanique de Montréal.

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Cet engouement s'explique probablement par l'omniprésence des insectes dans notre vie. Nos maisons, nos parterres, nos cours, nos jardins et même nos corps sont peuplés d'insectes, la plupart du temps utiles et inoffensifs. Les estimations les plus conservatrices parlent de 750 000 espèces d'insectes dans le monde. D'autres vont jusqu'à trois, quatre et même dix millions! Un pays froid comme le Canada en compterait plus de 54 000 espèces. Le biologiste Jean-Marie Perron, membre du conseil d'administration de la Maison des insectes, explique ainsi cette popularité: «Les Québécois ont faim de connaissances scientifiques; ils veulent comprendre leur environnement, mais le Québec ne compte toujours pas de véritable musée scientifique. »

Photographiée ici sur un rosier sauvage, la saperde du pommier (Saperda candida) est un coléoptère remarquable par sa beauté, mais qui cause cependant des dommages aux arbres fruitiers, puisque la larve creuse des galeries dans le bois.

projets muséologiques tenteront de L'insectarium de Montréal rendre plus sympa~hiques ces petits êtres à six pattes. A Québec, la Maison des insectes projette de décupler Avec des investissements d'environ Cet été, la table sera mise en ento- sa superficie, alors que la métropole trois millions de dollars, l'insectamologie, puisque deux importants inaugurera son Insectarium. rium de Montréal sera à l'image de

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celui qui en est un peu beaucoup le père: Georges Brossard. Notaire, devenu rentier à 37 ans, Georges Brossard parcourt le monde depuis dix ans à la recherche d'insectes plus étonnants les uns que les autres. Sa collection personnelle, qu'i l vient de céder à l'insectarium dont il est l'actuel directeur, compte près de 160 000 spécimens. Entomologiste autodidacte, Georges Brossard tient absolument à un insectarium populaire. «L'insectarium aura une vocation avant tout éducative . S'il faut prendre les gens au stade de la «bibite» , nous le ferons», insiste M. Brossard. Pas moins d 'un million de dollars devraient être consacrés au contenu du musée. La moitié de cet argent proviendra de la campagne de financement populaire menée parallèlement à la dernière exposition. Le musée sera construit à l'intérieur du périmètre du Jardin botanique de Montréal. Son extérieur rappellera la forme d'un insecte. Des salles d'exposition, des biotopes, des laboratoires, des aquaterrariums et des bureaux administratifs couvriront une superficie de 1858 m 2 , répartie sur quatre étages. Une unité mobile, transportant environ 5000 spécimens, parcourra le Québec.

Les morts et les vivants La collection Georges Brossard sera sans doute un élément clé de l'insectarium. Mais les insectes vivants propres au Québec auront aussi leur place dans des sortes de volières où le public pourra pénétrer. «Pour les enfants, nous aménagerons une section spéciale, à leurs dimensions, où ils pourront manipuler des spécimens et s'initier aux techniques de l'entomologie», souligne M. Brossard. L 'insectarium élèvera des insectes pour des fins d'échange et d 'exposition. «Nous pensons aussi vendre des insectes qui pourraient être utilisés dans la lutte biologique contre des spécimens nuisibles», poursuit M. Brossard. Il n'est cependant pas question de vendre des spécimens exotiques rares. L 'insectarium de Montréal aura éga-

Insecte forestier propre aux peuplements de chênes, le porte-queue du chêne (Strymon fa/acer) est l'un des très beaux petits papillons diurnes du Québec.

lement une vocation scientifique. Laboratoires, banques de documentation et collections d'insectes seront accessibles aux chercheurs, aux professionnels ou aux amateurs. «Nous avons l'intention d 'encourager la publication d'ouvrages scientifiques et de vulgarisation en entomologie, un secteur trop négl igé au Québec », ajoute M. Brossard. Un service d'identification sera aussi offert au grand public.

À ces volets éducatif et scientifique, s'ajoutera évidemment une dimension touristique. Georges Brossard entend donner une portée internationale à «son» Insectarium. cdl n 'y aura pas de demi-mesure: l'insectarium de Montréal sera le plus beau du monde», soutient-il. Sans doute pour y parvenir plus facilement, l'insectarium de Montréal accueillera également des artistes. «Depuis toujours, les artistes se sont inspirés des formes et des couleurs des insectes pour créer. L'insectarium pourra ainsi s'enrichir d'une intéressante collection d'œuvres d 'art,» termine M. Brossard.

À l'origine, l'idée a germé dans la tête de quelques membres de la Société d 'entomologie du Québec, dont Raymond-Marie Duchesne, l'actuel président de la Maison des insectes. «Nous cherchions un filon pour intéresser le public à l'entomologie, raconte M. Duchesne. Cela a pris la forme d'une modeste exposition d 'environ 55 m 2 , installée dans une petite maison du Jardin zoologique du Québec, à Charlesbourg. A l'époque, il s'agissait d'un projet unique au Canada et nous croyons qu'il l'est toujours.» Selon M. Duchesne, ce projet était unique, parce qu'il ne s'agissait pas de simplement exhiber des spécimens d'insectes morts, épinglés dans leur boîte. «Nous voulions surtout rendre compte de la réalité entomologique du Québec et montrer des insectes vivants», explique-t-il. La petite exposition a remporté un vif succès dès le premier été, la Maison des insectes devenant dès lors la deuxième plus importante attrac-

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Les pionniers de Québec Sans vouloir ouvrir un front entomologique à la «rivalité» Québec-Montréal, il faut toutefois rappeler qu'au Québec, la première réalisation concrète en matière de muséologie entomologique a vu le jour en banlieue de Québec.

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Les vétérinaires Olivier et Laberge avaient également demandé, l'an dernier, un moratoire sur l'utilisation des pastilles de paraformaldéhyde, «jusqu'à ce que leur innocuité ait été prouvée hors de tout doute». Il serait bien illusoire d'attendre un tel moratoire puisqu 'Agriculture Canada n 'envisage ce type d'action que lorsqu'un ., produit fait l'objet d'une révision de ·~ la part de Santé et Bien-Être Canada . J; Ce n 'est présentement pas le cas avec t; le Flomor et si une telle révision avait ~ lieu, ce serait plutôt , selon certaines informations, pour répondre à une de;;; mande d'élargissement de la norme ~de 2 ppm!

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Les GRaNbes MÏGRatiONS aNiMales (2• partie)

LES BEAUX VOYAGES MIGRA~OIRES Par Jean-Pierre Drapeau

Heureux qui, comme la grande oie blanche, le saumon, l'anguille, le monarque ou la sterne arctique, a fait un beau voyage ...

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Est-ce à cause de leurs grands déplacements saisonniers que les oies blanches, à l'image un peu du caribou (voir «Les grandes migrations animales: sur les pistes du caribou», FRANC-NORD, Automne 1987), ont toujours fasciné et intrigué les Québécois, inspirant même nos dramaturges? Car si relativement peu de Québécois ont déjà vu des caribous autrement qu'en photographie ou au revers d'une pièce de 25 cents, nombreux par contre sont-ils à avoir ' aperçu le spectacle impressionnant des envolées d'oies blanches au

cours de leurs spectaculaires migrations printanière et automnale. Mais qu'est-ce qui peut bien pousser ces oies à accomplir de tels périples? Après tout, s'il est aisé de comprendre qu'elles vont se nourrir au sud, où il y a abondance de nourriture , on ne discerne aucune raison immédiate au fait qu'elles reviennent au nord pour se reproduire! «Des causes de nature historique, originant de la période de la dernière glaciation, pourraient contribuer à

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expliquer cet état de fait, avance Cyrille Barrette, professeur d'éthologie (biologie du comportement des espèces animales) à l'Université Laval. La nécessité des migrations serait inscrite dans le bagage génétique des oies blanches: un scénario hypothétique veut que lors du retrait des derniers glaciers, les oies seraient montées graduellement vers le nord, utilisant les milieux mis progressivement à leur disposition, revenant au sud pour s'y reproduire. La distance séparant les aires d'hivernage des aires de reproduction se serait

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Des nuées de papillons monarques parcourent une odyssée de 3000 km, qui les amène à se réunir par millions sur leur aire d'hivernage, au Mexique, où elles forment de somptueuses tapisseries vivantes recouvrant les arbres et le sol, sur dix centimètres d'épaisseur par endroits. ·

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accrue petit à petit au cours des mil- jours d'assurer le succès de la reprolénaires.» duction. La nécessité d'assurer la reproduction constitue en fait la réInterrogé quant aux causes pouvant ponse au «pourquoi» des migrations, expliquer l'ensemble des grandes alors que les causes immédiates n'en migrations, Cyrille Barrette consisont que le «comment».» dère important de distinguer deux grandes catégories d'explications: les causes 'immédiates, reliées au cli- Des hypothèses pour mat ou à la nourriture, et la cause ultime, reliée à la reproduction. «Les explications migrations dont les causes immédiates sont climatologiques sont en- Bien des questions restent sans rétreprises par des espèces désireuses ponse quand on parle de migrations. de trouver des conditions climatiques plus propices pendant une Seules des hypothèses permettent, certaine période de l'année; les ani- par exemple, d'en expliquer le détermaux reviennent à leur point de dé- minisme immédiat. Les plus répandues réfèrent aux conditions écopart lorsque les conditions climalogiques, à l'influence de la photopétiques y redeviennent plus favoriode (durée quotidienne d'éclairerables. Les migrations dont les causes immédiates sont alimentaires ment) ainsi qu'à des facteurs insont effectuées par certaines espèces ternes (certaines espèces auraient un quand la nourriture qu'elles recher- «calendrier migratoire physiolochent devient plus rare à un endroit gique» fixé génétiquement et agissant au niveau de la glande hypodonné; les animaux y reviennent lorsque les réserves alimentaires s'y physe). sont reconstituées. Mais la cause ultime et fondamentale de ces migra- Il en va de même pour les mécations, qui est d'ailleurs aussi celle nismes de l'orientation. Les mécade tous les comportements, est tou- nismes physiologiques entrant en

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jeu à cet égard sont mal connus. Les migrateurs s'orienteraient d'après des repères magnétiques, astronomiques (dont le soleil et la lune) ou olfactifs.

Des horloges biologiques internes En fait, la caractéristique principale des migrations est leur régularité. Chez certaines espèces, le cycle migratoire est saisonnier ou annuel; pour d'autres, surtout celles ayant une longue durée de vie mais une seule période de reproduction, ce cycle peut s'étendre sur toute la vie de l'individu, celui-ci revenant à son lieu de naissance pour se reproduire et mourir. Phénomène intéressant à noter, presque tous les migrateurs font alors preuve d'une sociabilité parfois étonnante, contrastant avec le comportement territorial agressif souvent manifesté pendant la période de reproduction. Si certaines espèces ont adopté des comportements migratoires au cours

de l'évolution, c'est entre autres parce que ces migrations n'impliquaient pas une dépense excessive d'énergie . Dans l'air ou dans l'eau, qui sont tous deux des fluides, même de très longs déplacements peuvent être effectués avec un rendement énergétique très satisfaisant. Les déplacements terrestres entraînent par contre une consommation considérable d'énergie, la marche n'étant pas un mode de locomotion rapide et «économique» pour de longues distances. Cela explique qu'à l'exception des grands ongulés tels le caribou, les grands migrateurs se retrouvent surtout parmi les animaux aquatiques et aériens. Au Québec, plusieurs grands migrateurs ont depuis longtemps suscité l'intérêt des scientifiques: outre le caribou, ce sont, entre autres, la grnnde oie blanche, le saumon de lAtlantique, l'anguille d'Amérique, le monarque et la sterne arctique.

Des nuées d'oies blanches La grande oie blanche accomplit en

fait deux fois par an l'un des plus grands parcours de migration connus: quelque 5000 km séparent ses aires de nidification (les îles Baffin , Bylot, Ellesmere, Bathurst et quelques autres îles parmi les plus septentrionales de l'archipel arctique canadien) et ses aires d'hivernage (les régions côtières du New Jersey, de la Virginie, de la Caroline du Nord et de la Caroline du Sud). Le parcours de migration de la grande oie blanche est en fait tellement connu qu 'elle a bien failli être exterminée par l'homme au cours des siècles ayant suivi la découverte du Canada, n'eût été d'un programme de conservation établi par des chasseurs en 1908 et qui a plus que porté fruit , puisque le troupeau comptant alors moins de 3000 têtes est passé aujourd'hui à plus de 200 000. À l'hiver, les territoires utilisés par

les grandes oies blanches s'étendent, sur la côte est américaine, entre le New Jersey et la Caroline du Sud. Les oies s'y nourrissent surtout de plantes marécageuses, mais aussi de plantes cultivées. À la fin de l'hiver,

elles se regroupent et s'envolent vers le nord, franchissant le chemin qui les sépare de la région du cap Tourmente. Le vol migratoire s'effectue à une vitesse moyenne de 55 km/h et à une altitude de 600 mètres. Arrivées dans la région du cap Tourmente, elles consacreront quelques semaines à se nourrir non seulement dans les marécages, mais aussi dans les champs cultivés, question de se refaire des forces et d'accumuler des réserves de graisse où puiser l'énergie pour le reste du voyage, soit les 3000 km qui les séparent encore de leurs aires de reproduction dans le Grand Nord. Elles demeurent dans l'estuaire du Saint-Laurent jusqu'à la fin de mai, puis s'envolent vers leurs îles de nidification, qu'elles atteignent tôt en juin, après un bref arrêt sur la côte ouest de la baie d'Ungava . Elles y demeurent tout l'été, ne quittant l'Arctique qu'au début de septembre, s'arrêtant à nouveau dans !'Ungava et arrivant, à la miseptembre pour les plus hâtives et à la mi -octobre pour les plus tardives , dans la région du cap Tour-

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•. Dans la situation actuelle , une gestion environnementale sécu ritai re des sites d 'enfouissement est une option réaliste et pragmatique. La faisabilité de formules plus radicales, axées sur la diminution de la production à la source et sur la conservation des ressources, reste toutefois à démontrer. L'introduction de contenants uniformes , l'obligation de la consignation ainsi que l'interdiction de l'usage de matières non recyclables sont des exemples de stratégies de gestion orientées vers la «production zéro » de déchets, stratégies qui offrent aux citoyens et à leurs édiles municipaux des moyens de régler chez eux, et non au détriment de la localité voisine, leurs problèmes de déchets. Communicateur scientifique , And ré Delisle est vice-président, à la Commi ssion éditoriale , de J'UQCN.

L'UQCN publie le premier numéro thématique hors-série de FRANC-NORD

NUMÉRO SPÉCIAL OFFICIEL DU FORUM INTERNATIONAL POUR L:AVENIR DU BELUGA :FORUM

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En vue du Forum international pour l'avenir du béluga, qui se tiendra à Tadoussac du 29 septembre au 2 octobre 1988, l'Union québécoise pour la conservation de la nature (UQCN) consacrera à la protection du béluga le premier numéro thématique hors-série de FRANC-NORD. Tous les membres le recevront, en plus des quatre numéros compris dans leur cotisation régulière. Les organisateurs du Forum ont d'ailleurs fait l'honneur à FRANC-NORD de déclarer ce numéro thématique horssérie Numéro spécial officiel du Forum . Ce numéro comprendra plusieurs articles reliés directement aux thèmes du Forum ainsi qu'à la problématique des espèces menacées: - Un plan d'action pour la conservation du béluga - La sauvegarde des espèces menacées - Une géographie des plantes rares - L'observation des baleines - Un parc marin au Saguenay - Les gens qui protègent les espèces menacées L'UQCN tient à remercier le ministère de !'Enseignement supérieur et de la Science du Québec ainsi que la Fondation pour la sauvegarde des espèces menacées (FOSEM), qui collaborent financièrement à la réalisation de ce premier numéro thématique hors-série de FRANC-NORb.

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LE RIZ SAUVAGE AU QUÉBEC

par Rénald Chabot

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Les aires de répartition naturelle du riz sauvage Les techniques ancestrales de • récolte ont traversé le temps sans perdre le sens sacré que les Autochtones leur donnaient.

Le riz sauvage est une plante aquatique annuelle que l'on retrouve à l'état naturel dans certains lacs et rivières peu profonds de l'Amérique du Nord. Les principales rizières naturelle.s se retrouvent dans la région ouest du lac Supérieur, jusqu'au sud du Manitoba, et également dans les états du Wisconsin et du Minnesota. L'existence de certaines rizières remonte à 2500 ans environ et des vestiges nous révèlent qu'elles furent utilisées il y a un plus de 1000 ans.

Une céréale aborigène en Amérique Les Autochtones, plus particulièrement les Ojibways du centre du Canada, récoltaient cette céréale bien avant l'arrivée d'autres civilisations au pays. Dans certaines régions, la survie des groupes

28 autochtones dépendait directement de la production annuelle des rizières. De brusques variations de température affectaient parfois les récoltes, causant ainsi de graves famines. Riche en matières nutritives, le riz sauvage est devenu, pour les fines bouches, un mets de choix. L'Homme, cependant, n'est pas le seul à bénéficier de cet aliment. Cette céréale est aussi appréciée des canards barbotteurs , de l'oie et de la bernache canadienne, qui en consomment les grains. Le rat mus-

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Affaires indiennes et du Nord Canada

qué, pour sa part, en recherche les racines ainsi que le cœur et l'orignal se régale des tiges principales de la plante émergée.

Un milieu aquatique inerte qui prend vie La plupart des milieux aquatiques où prolifère cette plante sont totalement démunis, ou presque, de vie piscicole. Dans les plans d'eau peu profonds où croît le riz sauvage, l'ensoleillement estival réchauffe l'eau, empêchant ainsi une concentration suffisante d'oxygène nécessaire aux poissons. Les marais et les lacs «eutrophes» constituent donc des lieux de prédilection pour la croissance de cette céréale. À chaque automne, l'activité est intense dans les rizières, car c'est à ce moment que la sauvagine vient y puiser les forces nécessaires pour sa migration; le rat musqué y construit son abri hivernal et les «fermiers des lacs» procèdent à la récolte des grains avant sa mise en marché.

La récolte La méthode traditionnelle de récolte, utilisée encore de nos jours par de nombreux Autochtones, consiste à recueillir les grains dans un canot ouvert. L'avironneur propulse son embarcation au travers des longues tiges de riz s'étendant au-dessus des eaux

et son second frappe les tiges avec deux bâtons pour faire tomber les grains. L'équipe peut amasser environ 45 kilos (100 livres) de riz par jour. Une autre méthode, dite moderne, requiert l'utilisation d'un hydroglisseur muni d'un panier métallique à l'avant. Une seule personne opère l'engin qui récolte en moyenne 450 kilos (1000 livres) par jour. Ce type de récolte, destinée à des fins commerciales, diminue le temps d'exécution du travail et évite les pertes causées par des intempéries soudaines.

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La transformation Par diverses étapes, les Autochtones transformaient le produit brut en une céréale comestible. Après la récolte, les grains étaient séchés au soleil, dans un large contenant de cuir que l'on agitait dans un mouvement de va-et-vient. On achevait le séchage des grains en les déposant dans un autre récipient suspendu au-dessus d'un feu. Les grains secs étaient par la suite étalés sur une peau et piétinés jusqu'à ce que l'enveloppe du grain se détache. Cette étape était appelée «la danse du riz sauvage». À l'aide d'un contenant de cuir, les grains étaient ensuite projetés dans les airs et le vent séparait ainsi le riz de son enveloppe. Le produit fini était entreposé dans des contenants de terre cuite. À présent, il existe des usines de transformation qui refont les étapes d'autrefois. L'utilisation d'un outillage spécialisé permet la mise en marché d'un riz sélectionné et de première qualité.

Le riz sauvage au Québec Ces dernières années, les nations algonquines de l'Abitibi-Témiscamingue ont manifesté un vif intérêt pour le développement de leurs ressources naturelles. En harmonie avec ces attentes, le bureau régional du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAING) a commandé des recherches sur des sites potentiels de culture du riz sauvage au Québec. Dans le cadre d'une entente signée en 1984, les recherches ont été menées par le docteur Peter Lee, de l'Université Lakehead, en Ontario; elles avaient pour but d'évaluer le potentiel de développement des lacs et des rivières de I' Abitibi et du LacSaint-Jean. Suite à cet inventaire, des lacs ont été ensemencés à titre expérimental et les résultats furent jugés intéressants. Un plan d'eau a même montré un potentiel de production peu commun. Il fut retenu comme site expérimental et pourra servir de banque de semences au Québec.

Les outillages modernes ont permis le développement d'entreprises commerciales.

Les droits d'utilisation pour ce lac ont été négociés auprès des différents ministères ayant un pouvoir législatif dans la protection des plans d'eau québécois. La ccmise en réserve» du territoire permettra au MAING et aux Autochtones d'effectuer les travaux de recherche et de développement nécessaires. Depuis 1985, les inventaires de «potentialité» des rizières se sont succédés au Québec. L'Université de Lakehead assurait à l'été 1987 la formation professionnelle d'Autochtones sur le sujet. Par la suite, les étudiants autochtones, assistés d'un agent du programme des ressources naturelles du Ministère, ont participé à différents travaux de recherche. Grâce à cette formation, les Autochtones auront la possibilité de superviser les étapes subséquentes du projet. Leur intérêt ne s'arrête pas là. En effet, plusieurs ont demandé au Ministère d'étudier la possibilité d'un second stage de formation avec des producteurs autochtones d'autres provinces. Les objectifs à court terme du programme de développement économique, qui est géré, dans la région du Québec, par la Section des ressources naturelles du Ministère, visent en premier lieu à développer des sites au potentiel reconnu et inexploité. Cet objectif atteint, l'aménagement de ces sites constituera la seconde étape d'un projet de développement économique qui peut s'avérer rentable pour les communautés autochtones concernées. La contribution de différents programmes des ministères provinciaux et fédéraux sera un atout majeur pour le succès de cette entreprise. La réalisation de projets de commercialisation d'une ressource locale de même que le développement de projets communautaires ne peuvent que favoriser l'autosuffisance économique des Autochtones. Rénald Chabot est agent généraliste à la Section des ressources naturelles du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien , dans la région du Québec.

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par Gilles Gauthier Le Québec possède un réseau de réserves fauniques uniques au monde. Dans la portion méridionale de la province, on compte 18 réserves, couvrant une superficie de plus de 67 000 km2, où des activités récréatives, surtout la chasse et la pêche, sont offertes par le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche (MLCP). À ce réseau , s'ajou· tent plus de 9000 km2 de territoire, comprenant 15 réserves sur rivière à saumon et 26 autres dont les statuts varient.

de l'avant un vaste programme de révision des territoires fauniques du Québec et plus particulièrement des réserves. Dans un premier temps, le gouvernement veut réaffirmer davantage leur vocation, dans le contexte de la conservation et de la mise en valeur de la faune. Toutefois, afin de rendre le réseau de réserves «Conforme,, à cette vocation, il propose un remaniement d'envergure du réseau.

Selon l'énoncé de politique du gouvernement, 14 d'entre elles verraient leur superficie réduite et 35 autres seraient abolies.

Dans le rapport Leblond (rapport du Groupe de travail sur

Finalement, dans la partie septentrionale de la province, on retrouve neuf réserves qui ont été créées temporairement, aux fins de la Convention de la Baie-James et du NordOuest québécois.

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Sur presque tous ces terri· toires, la faune et, dans une certaine mesure, l'habitat sont protégés. Les activités de chasse, de pêche et de piégeage ainsi que, dans plusieurs cas, l'accès même au territoire sont contrôlés et maintenus à des niveaux relativement bas. Cette protection remonte à 1895, date à laquelle la première réserve fut créée au Québec. Ces mesures ont permis à la plupart des réserves de jouir aujourd'hui d'une diversité et d 'une richesse faunique unique au Québec. Ceci est particulièrement vrai dans la partie méridionale de la province, où la grande accessibilité du territoire et la proximité des grands centres urbains ont conduit à une surexploitation de la faune sur l'ensemble du territoire. Récemment, le MLCP mettait

le développement des initiatives privées), il est dit qu'une des raisons premières pour délester les réserves fauniques au Québec est que seulement 31 des 68 réserves «servent , à des degrés plus ou moins importants, aux fins de chasse, de pêche et de contrôle des populations fauniques,,. Si cela représente effectivement l'attitude du MLCP face à la mission de ces territoires, il nous semble qu'il s'agit là d'une vision très étroite de ce qu'est une réserve faunique.

Or, rien de ce que l'on peut lire dans le document «Les ré serves fauniques et les pourvoiries, des territoires en évolution» , que le MLCP a rendu public quelque temps après la parution du rapport Leblond, ne semble contredire cette ap· proche. Une telle philosophie était certes défendable à l'époque où la majorité des réserves fauniques furent créées au Québec, soit du début du siècle jusqu'à la fin des années 1960. Compte tenu des tradi· tions de chasse et de pêche des Québécois, il n'est pas surprenant que les premières réserves fauniques aient été créées dans le but de protéger la faune en fonction de ces deux activités. Mais cette vision n'est plus acceptable en 1988. À une époque où l'exploitation, la (J pollution, la destruction et la ~transformation des milieux na.....~> : B turels atteignent des niveaux -,;~;..~ ~ alarmants, il est impératif qu'une stratégie plus globale Les réserves fauniques du Québec servent comme pouponde conservation de la nature nières de la faune. Le plan de gestion de l'orignal réalisé par soit mise de l'avant. Une telle le MLCP le démontre d'ailleurs clairement. stratégie existe: il s'agit de la

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Stratégie mondiale de la conservation proposée par l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources. Selon les principes de cette Stratégie, les réserves fauniques devraient servir essentiellement à maintenir à son maximum la diversité et la richesse faunique de l'écosystème, de manière à s'assurer que toutes les communautés biologiques y soient représentées. Dans ce contextP. l'exploitation rationnelle de la faune par la chasse, par la pêche et par le piégeage est tout à fait souhaitable. Toutefois, si on veut maintenir la richesse faunique de ces territoires et la diversité génétique des espèces, on se doit de restreindre l'exploitation de la faune ou, en d'autres termes, de ia sous-exploiter. Il ne faut pas oublier que chaque espèce est un maillon de la chaîne alimentaire de l'écosystème et que l'exploitation d'un ou de plusieurs de ces maillons par l'homme a des répercussions sur les autres espèces. Par exemple, l'exploitation soutenue d'une espèce pourrait entraîner la disparition de son prédateur principal, alors qu'à l'inverse, l'exploitation d'un prédateur pourrait entraîner le pullulement de sa proie principale, créant ainsi un déséquilibre dans la communauté. Dans le même contexte, on ne doit pas viser à privilégier systématiquement une espèce faunique ou un habitat, au détriment d'un autre. Si on accepte que les réserves ont une vocation de conservation et de mise en valeur de la faune, on est donc forcé de reconnaître le caractère particulier de ces territoires par rapport au reste du Québec. Ceci implique entre autres que les modifications de l'habitat par les coupes forestières doivent être assujetties à un plan d'aménagement global qui se doit de respecter le rôle premier de la réserve.

Afin de mieux comprendre

comment ces principes d'aménagement pourraient s'appliquer, prenons le cas de la réserve des Laurentides. Une bonne partie du territoire pourrait certes être consacrée à la coupe forestière. Ces coupes devraient toutefois se faire sur de petites surfaces, à chaque année, de façon à favoriser le morcellement des habitats. On obtiendrait ainsi une mosaïque d'habitats à différents stades de régénération, ce qui favoriserait l'abondance et la diversité des espèces fauniques, tels l'orignal, la gélinotte huppée, le lièvre d'Amérique ou le renard roux, qui recherchent ces conditions. La réserve devrait ~ussi comporter plusieurs unités où les coupes forestières sont prohibées pour de très longues périodes. Ceci permettrait de maintenir de vieilles forêts matures, donc de favoriser les espèces caractéristiques des communautés climaciques, tels le lynx, la martre, le caribou et le tétras des savanes. Dans le cas de la réserve des Laurentides, ces petites zones d'habitat mature seraient un atout évident pour le parc de conservation des Grands-Jardins qui constitue ici le «cœur>>, la zone centrale non perturbée de notre système de conservation. Ainsi, au lieu d'être isolés par une ceinture de coupes à blanc autour du parc, le caribou ainsi que les autres espèces utilisant des habitats climaciques pourraient alors se disperser sur une superficie beaucoup plus grande, grâce à ces «îlots» de forêt mature.

À long terme, un tel schéma d'aménagement ne profiterait pas uniquement à la faune, mais aussi à l'exploitation fo. restière. En effet, les catastrophes qui affectent périodiquement nos forêts, tels les feux ou les infestations par des insectes défoliateurs, sont souvent causées, ou à tout le moins fortement amplifiées, par la présence de vastes peuplements forestiers équiennes (c'est-à-dire de composition et d'âge homogènes). Or, en favorisant la régénération sur de grandes superficies, les coupes à blanc perpétuent justement ce problème. Au

contraire, le morcellement des habitats (d'une part. en communautés climaciques; d'autre part, en communautés de succession à différents stades) favorise des peuplements forestiers inéquiennes qui sont moins susceptibles d'être affectés par des catastrophes naturelles.

Les réserves comptent parmi les meilleurs territoires fauniques du Québec et offrent, pour la plupart, une qualité de prélèvement ainsi qu'une valeur récréative très élevées. La richesse faunique de nos réserves constitue un heureux contraste avec celle de plusieurs autres territoires du Québec, en particulier les territoires libres et certaines ZEC où la rareté de la faune, résultat d'une surexploitation soutenue, atteint des niveaux alarmants. Qui plus est, la richesse de nos réserves profite à ces territoires environnants, car elles servent comme centres de dispersion ou comme pouponnières de la faune. L'exemple de l'orignal est édifiant à ce sujet. Le plan de gestion de l'orignal, réalisé par le MLCP, démontre comment les densités élevées de cet animal dans les réserves «alimentent» les ZEC, les pourvoiries et les terrains libres situés à proximité. Le succès de chasse est en effet beaucoup plus élevé dans les zones limitrophes des réserves que dans le reste des territoires de la province où on note d'ailleurs une surexploitation de l'orignal. En plus des activités de prélèvement, les réserves fauniques représentent un potentiel alléchant pour les activités récréatives non consommatrices reliées à la faune. Au Québec, la faible étendue du réseau de parcs fait que ceux-ci ne peuvent, à eux seuls, suffire à la demande d'activités récréatives de plein air des Québécois. Les Québécois se tournent donc de plus en plus vers les réserves fauniques pour pratiquer ces activités. Il s'avère donc important que

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printemps 1988

l'État garde le contrôle entier des réserves, afin que ces territoires ne soient pas «fermés» aux Québécois les moins fortunés.

La politique de délestage du MLCP prévoit la disparition totale de 35 réserves et une diminution de la superficie de 14 des 24 autres; au total, cela représente 48% de la superficie de ces territoires. Après une analyse détaillée, réserve par réserve, des conséquences de cette politique, l'Union québécoise pour la conservation de la nature est arrivée à la conclusion que la plupart d'entre elles devraient être conservées (lire à cet égard le mémoire de l'UQCN sur la politique de délestage des réserves fauniques par Je MLCP). En effet, elle estime que l'abolition du statut de réserve est justifiable pour seulement 21 de ces territoires, qui sont en fait de petits territoires, puisqu'ils ne représentent que 3% de la superficie des réserves actuelles. Il est important de noter que dans les cas où l'UQCN ne s'oppose pas à l'abolition du statut de réserve, il existe déjà un autre statut (un statut de parc, par exemple) pour ces territoires, ce qui en assure une meilleure protection; dans ces cas, l'abolition du statut n'est qu'un exercice administratif qui ne menace nullement la conservation du territoire. Il reste maintenant à espérer que le gouvernement révise sa politique et y pense à deux fois avant d'aller de l'avant avec le délestage des réserves fauniques. Chose certaine, il doit garder

à l'esprit qu'il a tout à gagner à s'inspirer de la Stratégie mondiale de la conservation et à faire en sorte que les réserves fauniques visent à conserver la diversité et la richesse fauniques des écosystèmes. Biologiste et chercheur en écologie animale à l'Université Laval, Gilles Gauthier est l'un des auteurs du mémoire de l'UQCN sur la politique de délestage des réserves fauniques par le MLCP.

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(suite de la page 4)

propre survie des ressources naturelles qui /'entourent. Une telle situation pour /'espèce humaine exige, par contre, que cette dépen,dance respecte la survie des autres espèces vivantes. Chaque individu a la responsabilité de décider si une utilisation quelconque d 'une ressource (que cela soit du bois, de la fourrure ou de J'espace pour un chalet) constitue un abus. Il est évident qu'actuellement, /'espèce humaine est responsable d'une surexploitation de nombreuses ressources de la planète. Déjà, /'article sur le lynx dans le dernier numéro de FRANC-NORD mentionne /'hypothèse «d'interdire complètement Je piégeage pendant les deux ou trois ans où le cycle se maintient à son plus bas, afin de permettre à la population de mieux récupérer et de s'accroître plus rapidement par la suite"· Si les travaux du Comité faunique de /'UQCN permettent d 'en arriver à la conclusion que le lynx est actuellement surexploité au Québec, /'UQCN proposera au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche des mesures qui pourraient permettre à la population du lynx de se rétablir. L'UQCN n 'attendra pas que l'espèce soit formellement reconnue comme «menacée "; elle ne cherchera pas non plus à prôner une interdiction du piégeage sans être convaincue que c'est vrai· ment nécessaire. Harvey-L. Mead Président de l'UQCN

À la manière d'un groupement anti-fourrure

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C'est avec stupéfaction que j'ai pris connais· sance de la campagne de levée de fonds que vous faites contre le trappage au Québec et qui dramatise habilement, à la manière des groupements anti-fourrure, une situation normale dans le cycle de vie du lynx du Canada. En effet, à l'intérieur de votre missive, on retrouve toutes les manoeuvres déguisées de ces groupements qui s'opposent à toutes les formes de prélèvement de la faune, en corn· mençant par l'utilisation habile d'une situa· tion de fait, amplifiée, afin de toucher la sensibilité déjà excitée de personnes mal informées. Je n'a urais jamais imaginé qu'un organisme responsable comme l'UQCN puisse exploiter malicieusement une situation ambi· guë et utiliser, à des fins monétaires, la problématique complexe du lynx du Canada. Aujourd'hui, il nous suffit de jeter un regard en arrière et de constater où ont mené les campagnes contre la chasse aux phoques du Groenland. Nous assistons à un éclatement de ces mêmes populations, avec tous les problèmes qu'un tel phénomène risque de cau ser à la communauté.

Dans le dossier du lynx, /'UQCN se distingue par Je fait qu 'elle n 'a pas à défendre d'intérêts professionnels ou autres. Les membres de /'UQCN sont des individus préoccupés par la problématique environnementale: bon nombre d'entre eux sont particulièrement attirés par la faune. L'UQCN a récemment décidé de faire des levées de fonds auprès de ses membres et de lancer des campagnes pour susciter un enga· gement de ses membres face à divers problèmes de conservation. Le lynx et d 'a utres animaux à fourrure ont été choisis pour la première campagne. Une autre campagne portera sur Je besoin de protéger les milieux humides. Il est vrai que la campagne sur Je lynx visait à

tians des groupes anti·chasse n'étaient plus valables. Par contre, il n'est pas évident que« /'éclatement de ces mêmes populations" de phoques va causer des problèmes. Il n'est pas évident non plus que la chasse au phoque gris actuellement en cours constitue une réponse appropriée à un autre problème, celui du parasitisme de la morue. En tout cas, la compétition entre l'espèce humaine et les phoques, pour les poissons, exige un comporte· ment rationnel pour lequel l'homme n 'a pas démontré jusqu'ici une capacité extraordinaire ... Harvey-L. Mead

La situation du lynx et des autres animaux à fourrure

«toucher la sensibilité"· Dans /'absence d'un intérêt, aucune campagne n'a d 'effet si elle ne

touche pas une corde sensible. S'il fallait ne pas mentionner le trappage ou les animaux à fourrure parce que les groupes anti-fourrure ont suscité des réactions négatives dans la population, cela empêcherait toute intervention publique dans le domaine. L'UQCN (tout comme /'APT/ et Je MLCP) est d 'avis que Je lynx et fort probablement d 'autres espèces connaissent de «sales temps"• pour citer /'article de FRANC-NORD qui soutient la campagne. L'UQCN n 'exploite donc pas une situation ambiguë; elle informe et cherche des appuis pour son intervention. Il n'y a, par ailleurs, aucune malice en cause. Voici les arguments ytilisés: - Le lynx a connu un déclin depuis /'arrivée des Blancs, suite à une déforestation et à un piégeage excessif (ce dernier point n 'est donc pas seul en cause). - Il existe actuellement des pressions qui perpétuent cette situation. D'une part, les coupes forestières continuent de se faire sur une échelle encore plus grande; d'autre part, la valeur actuelle d 'une peau de lynx constitue une incitation à une surexploitation par le piégeage. - Le MLCP et /'APT/ sont intervenus en adoptant des mesures très restrictives. - L'UQCN craint que ces mesures ne soient pas suffisantes. La conclusion est qu'il faut surveiller la situation actuelle. Il n 'est pas aussi évident, contrairement à ce que votre lettre prétend, qu 'il s'agisse d 'une «situation normale dans Je cycle de vie du lynx du Canada" (voir /'article dans le dernier numéro de FRANC. NORD). Plus important encore, il ne faut pas attendre que l'espèce soit menacée pour agir. De là à une interdiction temporaire du piégeage du lynx du Canada, il n'y a qu'un pas. Mais ce serait une interdiction temporaire et spécifique.

Enfin, en ce qui concerne Je cas du phoque du Groenland, /'UQCN a pris position publiDenis Laliberté, président quement par un article dans FRANC-NORD Association provinciale des (Printemps 1984). L'article indiquait clairetrappeurs indépendants (APT!) ment que les raisons soutenant les interven-

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J 'ai parcouru avec avidité l'article «Sales temps pour le lynx», publié dans votre numéro d'Hiver 1988, ainsi que les documents «Le lynx a besoin de vous» que l'Union québécoise pour la conservation de la nature a fait parvenir à ses membres (et éventuels souscripteurs à la levée de fonds lancée alors par l'UQCN). L:article sur le lynx publié dans FRANCNORD reflète à mon avis une réalité très judicieusement exprimée. La forme et le contenu s'inscrivent parfaitement bien dans le rôle d'information et de sensibilisation de vot re organisme auprès de ses lecteurs et revêt une forme appropriée que la qualité de votre magazine transmet à sa juste valeur. Je ne pourrais cependant en dire autant de la forme et du contenu des documents destinés à la levée de fonds de l'UQCN. Je déplore particulièrement le caractère plutôt aguichant du sujet, le titre s'y rattachant ainsi que l'incertitude, sinon le trouble, que certains propos laissent subsister. Le choix du sujet ainsi que le caractère flamboyant de sa présentation et de son contenu ne sont pas sans rappeler le type de publicité véhiculée par des groupes qu'on pourrait qualifier d'opposants à un usage raisonnable des animaux. Je sais pertinemment (pour l'avoir lu) que ce n'est pas votre cas; par contre, il m 'appa raît que dans le contexte actuel, le véhicule d'information que vous avez choisi s'avère exagéré, non-pertinent et plutôt susceptible de culti ver, sinon d'aviver pour le Québec, l'argumentation et les interventions de ces mouvements opposés à une saine utilisation des animaux. De plus, même si elles peuvent apparaître comme des détails face à l'ensemble du document, certaines allégations auraient mérité d'être précisées. Je fais ici allusion à des bouts de phrase comme:« le cas du lynx est typique de la situation inquiétante dans laquelle se retrouven t ces animaux (on

entend ici plusieurs espèces d 'animaux à fourrure) aujourd'hui» et «ces espèces (lesquelles?) risquent de disparaître si nous n'agissons pas rapidement ». A mon avis, ces énoncés débordent de beaucoup la vraie problématique de l'exploitation

de ces espèces d'animaux à fourrure, que vous ne mentionnez pas, mais qui ne sont pas plus dans une situation inquiétante au Québec que d'autres espèces exploitées, tels l'orignal ou le cerf. D'ailleurs, plusieurs animaux à fourrure (le renard, le castcr ou le rat musqué, par exemple) ont profité largement, dans certains cas, des interventions de l'homme sur l'habitat (coupes forestières, développement de l'agriculture, etc.). On convient même généralement que ces espèces sont plus abondantes aujourd 'hui qu'elles ne l'ont jamais été dans le passé. Enfin, permettez-moi de déplorer, dans les documents de levée de fonds, l'association étroite faite entre le statut d'espèce menacée et la situation du lynx et des autres espèces d'animaux à fourrure. A ma connaissance, aucune des espèces d'animau x à fourrure n'est présentement menacée au Québec. Bref, si chacun des éléments pris séparément peut paraître anodin, les documents « Le lyn x a besoin de vous » créent une fausse impression qui peut amener le lecteur à se faire de la situation du lynx et des autres animaux à fourrure un constat beaucoup plus dramati que qu'il ne l'est en réalité.

René Lafond, biologiste Responsable du piégeage et des animaux à fourrure, Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche La campagne de sensibilisation lancée par l '(JQCN avait pour but d'obtenir un appui des membres pour un suivi plus attentif du dos· sier. L'(JQCN cherche en effet à engager ses membres dans un dossier où un contrôle d 'une exploitation peut être envisagé. Vous insistez sur /'imprécision concernant les «autres animaux à fourrure >!. Il s 'agit de la martre et du pékan, qui subissent les mêmes pressions que le lynx, ainsi que du carcajou, espèce déjà extirpée du territoire québécois (voir " Le diable du Nord !!, FRANC.NORD, Hiver 1986). Par contre, votre lettre met un accent sur le statut formel d 'espèce menacée et déclare que ce statut ne s'applique à «aucune des espèces d 'animaux à fourrure au Québec !!. L'(JQCN serait intéressée par tout commentaire que vous auriez sur le statut « officieux >> des quatre animaux mentionnés. Mettre /'accent sur le statutofficiel , comme vous le faites, c 'e st passer à côté du véritable problème. Le statut officiel (COSEWIC, COSEMEQ) d 'e spèce menacée est tellement restrictif que trop souvent, la plante ou J'animai ainsi désigné est dans une situation pour le moins précaire lorsqu'il est classé! L'(JQCN cherche à approfondir les dossiers de populations d 'espèces indigènes avant que le statut officiel ne devienne nécessaire. C'est ce qu 'elle désire faire dans le cas des animaux à fourrure mentionnés. Et en passant, la problématique de ces animaux est décrite dans les documents de l '(JQCN, qui parlaient de pertes d 'habitats et

d 'incitation à une surexploitation due à la valeur élevée de leur peau. Quant à votre affirmation selon laquelle les animaux à fourrure ne sont pas plus dans une situation inquiétante que /'orignal et le cerf, je me permets de manifester mon désaccord. Le cerf est en abondance actuellement, alors que /'orignal, qui connaît quelques problè· mes, n'est pas l'objet d 'une exploitation com· merciale comme le sont les animaux à fourrure. Il est regrettable que vous ayiez associé la levée de fonds de J'(JQCN aux campagnes des groupes antj.fourrure. Il ne faudrait tout de même pas que /'existence de ces campagnes par le passé rende maintenant impossible toute action publique de la part d'autres groupes, d 'autant plus que la campagne de sensibilisation de f'(JQCN se distinguait explicitement des campagnes anti-fourrure. Ceci dit, f'(JQCN est préoccupée par la politique de piégeage actuellement en vigueur, plus particulièrement par /'encouragement au «piégeage récréatif!!. Car non seulement ce piégeage va·t· il à /'encontre du bon sens dans une période où Je monde du trappage se sent sur la défensive, mais encore cette pratique est-elle contraire à une gestion rationnelle des animaux à fourrure. Cela constituera un élément traité dans le mémoire que /'(JQCN entend présenter sur ce sujet.

Harvey-L. Mead

Une politique de trappage à repenser En tant que trappeur professionnel intéressé par la problématique des animaux à fourrure, et ayant pris connaissance des différends entre l'UQCN et l'APTJ, je trouve tout à fait normal que l'APTI soit inquiète de la tournure des événements, car en fait, s'il doit y avoir restriction du prélèvement des animaux à fourrure, l'APTI aurait dû être la première à susciter de telles restrictions. Cependant, il faut comprendre qu'à l'intérieur de l'APTI, les trappeurs s'en remettent au gestionnaire de la richesse, Je MLCP, car ils n'ont ni moyen financier, ni assez de ressources humaines pour faire pression auprès du soi-disant gestionnaire. Nous sommes tous au courant que Je MLCP (et non le trappeur sportif) assume, de par sa juridiction et en tant que gestionnaire du patrimoine faunique, la responsabilitéde la conservation des ressources fauniques. Nous sommes tous au courant aussi que suite à la nouve lle politique de piégeage, le ministère avait des objectifs bien précis: 1) répondre à la demande grandissante pour l'activité de piégeage; 2) favoriser une plus grande accessibilité à l'activité de piégeage; 3) ma x imiser l'impact économique du piégeage, en favorisant la mise en valeur de la ressource; 4) assurer la préservation des animaux à

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fourrure et leur exploitation optimale sur l'ensemble du territoire québécois; 5) mettre sur pied différents cours obligatoires et ce, dans trois ans, lorsque le piégeage du lynx, de la martre et du pékan aura été prohibé. Autrement dit: 1) rendre accessible l'activité de piégeage au plus grand nombre de Québécois, en orientant celle-ci vers une activité sportive ou récréative ; 2) ouvrir les réserves fauniques à l'activité de piégeage et redécouper les terrains enregistrés, en diminuant leur superficie; 3) percevoir Je plus d'argent possible (redevance , permis, taxe perçue sur l'équipe ment de récréation , etc.) en pratiquant une exploitation optimale; 4) en venir à une problématique environnementale, non seulement pour le lynx, mais aussi pour la martre et le pékan; 5) mettre sur pied différents cours obligatoires. Sans doute une belle philosophie de profit à court terme! Selon moi, les politiques de conservation des ressources naturelles appliquées par les ministères ne sont pas crédibles. Rappelonsnous les mesures de conservation et d'exploitation de la forêt québécoise, mises de l'avant depuis plusieurs décennies...

Denis Gagnier Saint-Joseph-de-la-Rive

En 196 7, une prime pour abattre le lynx! Voici l'essentiel du texte de ce document, intitulé «Prime à l'abattage du lynx et du coyote» et présenté comme une «mesure d'assistance» aux colons , offerte par Je ministère de !'Agriculture et de la Colonisation du Québec: «Dans Je but de combattre les dommages que font le loup (wolf), Je lynx ou loup-cervier (bai ou bob-cat) et le coyote (prairie-wolf) aux troupeaux, l'honorable Clément Vincent, ministre de !'Agriculture et de la Colonisation, met à l'avantage de certains particuliers une prime à l'abattage, de 35 dollars pour le loup et le coyote et de 10 dollars pour le lynx, et ce , pour chaque bête abattue. Tous les résidents de la province de Québec sont éligibles à cette mesure. Pour se prévaloir de cette prime, on doit: produire et déposer la peau entière de la bête chez l'agent local (inspecteur de colonisation) du ministère de !'Agriculture et de la Colonisation ou chez le garde chasse du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche le plus rapproché et remplir et signer une déclaration solennelle donnant au complet son nom, son adresse, son occupation et le lieu où la bête a été abattue ou capturée . Aucune prime n'est payée pour un animal abattu en dehors des limites de la province.»

Gérard Massé Longueuil

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_ _ _ _ _Les actl!1alités"'-------cours et d'une éventuelle base d'entraînement tactique de l'OTAN à Goose Bay (Labrador).

Les Amérindiens devront-ils s'adapter? Chaque été, depuis 1983, des avions d'attaque appartenant à plusieurs pays de l'OTAN volent à très basse altitude et brisent le silence sylvestre du nord-est du Québec et du Labrador. Les craintes exprimées quant aux impacts de ces vols, excessivement bruyants, sur le caribou et sur le style de vie traditionnel des Montagnais ont obligé le ministère de la Défense nationale (MDN) à commander une étude environnementale. Menée par la Commission d 'évaluation environnementale, qui est rattachée au ministre fédéral de !'Environnement, cette étude porte sur l'impact écologique C:_s vols à basse altitude déjà en

u Dégel sur l'hiver nucléaire

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Au Québec, pourrait-on survivre à un conflit nucléaire mondial? La théorie de l'hiver nucléaire, bien qu'elle tende aujourd'hui vers «l'automne nucléaire», fait tout de même ressortir de graves dommages pour l'humanité et l'environnement. Pour diffuser de l'information autour de ce phénomène, !'Association des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire consacrera un atelier à l'hiver nucléaire lors de son prochain congrès international, à Montréal, du 2 au 6 juin 1988. Le Dr Paul Cappon, directeur du Centre pour le désarmement nucléaire et la santé communautaire, situé à Montréal, a expliqué que cet atelier, ouvert au grand public, se veut une introduction aux aspects médicaux et écologiques de l'hiver nucléaire. Hiver ou automne nucléaire, il n'en demeure pas moins que les conséquences d'une guerre nucléaire ne se résumeraient pas au danger de la radioactivité ou des destructions locales occasionnées par les explosions nucléaires. Des études récentes démontrent que l'explosion de 1 % de l'arsenal nucléaire mondial produirait 60 millions de tonnes de fumée, de suie et de poussière, dégagées par les incendies allumés par les explosions, et entraînerait un abaisse-

Le processus d'évaluation environnementale est très en retard et a connu plusieurs problèmes, comme l'apparente impuissance de la Commission qui a souvent éprouvé de la difficulté à obtenir des rense ignements du MDN, ce qui a rendu son travail plus ardu. Suite aux audiences publiques préliminaires de l'automne 1986 et de l'hiver 1987, de nombreu x intervenants ont demandé l'arrèt immédiat des vols. La Commission s'est limitée à recommander au MDN de «geler» le nombre des vols. Le MDN a répondu poliment, mais clairement, par la négative. Et à l'été 1987, les Hollandais se sont ajoutés aux pilotes britanniques, allemands et américains, augmentant ainsi jusqu'à 6300 par année le nom bre des vols.

ment de la température à 12° C; en 1983, l'astronome Carl Sagan annonçait la «congélation» de l'hémisphère nord pendant au moins un an. C'est à l'écran de fumée et de suie qu'on attribue la grande responsabilité de l'automne nucléaire, puisque cet écran bloquerait jusqu'à 95 % des rayons solaires. Si une attaque se produisait l'été, le Québec verrait disparaître une grande partie de ses espèces végétales, y compris les forêts, particulièrement sensibles au froid et aux incendies. L.:absence de lumière condamnerait les espèces végétales plus résistan tes au froid. De nombreuses espèces animales s'éteindraient, par manque de nourriture.

Le Conseil Attikamek·Montagnais, ui représente les quelque 3000 Montagnais affectés par les vols au Québec, s'est retiré du processus d'évaluation au mois d'avril 1986, dénonçant son inefficacité. Lors de la conférence de presse annonçant ce retrait, des membres de la bande de La Romaine ont d'ailleurs montré des photos des incendies causés par des bombes de pratique lancées sur les terrains de tir situés dans les territoires de chasse traditionnels des AttikameksMontagnais.

Même l'accord historique du démantèlement des euromissiles, conclu le 7 décembre 1987 entre l'Union soviétique et les EtatsUnis, n'apporte guère d'espoir. L.:accord semble donner des munitions à ceux qui perçoivent encore la défense de l'Occident comme inférieure à celle du Pacte de Varsovie et qui vou draient renforcer davantage les défenses conventionnelles, surtout la défense aérienne.

L.:étude d'impact sera prête au plus tôt en septembre 1988 et sera par la suite soumise à des audiences publiques. Carol Martin, secrétaire administratif de la Commission, estime que si l'OTAN décide entre-temps d'accorder la base d'entraînement tactique à Goose Bay (plutôt qu'à Konya, en Turquie) et si le Canada l'accepte, les gens

La demande pour les sites d'entraînement à basse altitude dans les régions « inhabitées» va donc probablement augmenter et on peut se demander si les Amérindiens et les caribous ne seront pas obligés de s'adapter à ce nouveau phénomène.

nucléaires. De plus, André Tremblay, directeur de Planification Urgence Canada à Québec, signale que la province compte peu de personnes-ressources capables de faire fonctionner les que lque 30 hôpitaux d 'urgence de 200 lits prévus en cas de guerre.

Même atténués, les effets de l'hiver nucléaire n'ont rien de rassurant du point de vue médical ou biologique. Les impacts sur l'écologie globale seraient destructeurs à un degré insoupçonné et les effets biologiques à long terme pourraient entraîner la disparition de la plupart des espèces vivantes, y compris l'homme.

Un printemps ultraviolet précéderait le retour à la normale, en raison de la destruction d'environ 30 % de la couche protectrice d'ozone, causée par les particules radioactives. Cela entraînerait une hausse de rayons ultraviolets qui grilleraient la végétation et causeraient des brûlures superficielles de la peau. La couche d'ozone ne se reconstituerait qu'après un délai de quelques années.

Si l'attaque survenait l'hiver, on assisterait à un retour à la normale en quelques semaines, plutôt qu 'en quelques mois comme dans le cas de l'hypothèse de l'attaque en été. Toutefois, certains effets sur la flore ne seraient que retardés, les particules radioactives « brûlant» les jeunes pousses au printemps. Les survivants devraient affronter l'absence de lumière et le froid dans un grand désordre social: peu d'approvisionnements en énergie et en nourriture, peu de moyens de communications. Ils risqueraient aussi de faire face à une absence presque complète de personnel médical pour traiter les brûlures et les maladies

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printemps 1988

vont mettre encore plus en doute la crédibilité du processus.

Erik Poole

On peut s'inscrire à l'atelier portant sur l'hiver nucléaire en contactant l'agence GEMS (4260 Girouard, suite lOG, Montréal, H4A 3C9, 514-485-0855). Toutefois, comme le coût de l'inscription est de 285 $, on peut se demander si le grand public en profitera vraiment. Annie Bourret

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ESPECES MENAC Des amis pour le faucon pèlerin Pour une seconde année d'affilée, !'Opération SOS faucon pèlerin, qui vise la réintroduction de faucons pèlerins au Québec, a êté un succès. Lancée par la Fondation pour la sauvegarde des espèces menacées (FOSEM) en collaboration avec le Service canadien de la faun e, cette campagne, placée cette année sous la présidence d'honneur du maire de Québec, Jean Pell etier, avait ceci de particulier qu 'elle faisait appel à des «amis en

BRACONNAGE Les perceptions de la Justice Soucieux de connaître la perception du milieu juridique face au braconnage ainsi que son niveau de sensibilisation à ce phénomène, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêçhe du Québec (MLCP) a commandé une étude sur cette question à deux criminologues de l'Université de Montréal, Ruth Murbach et Marie Beaulieu, qui ont interrogé une vingtaine de juges et de procureurs de la Couronne provenant des dix régions administratives de la province. li ressort de cette étude que la notion elle-même de braconnage pose des problèmes de nature

moyens », des entreprises pour la presque totalité, afin d'aider à financer l'élevage et la mise en liberté de trois faucons dans le Vieux-Québec. li en coûtait 1000 $ pour devenir parrain d'un fauconneau et 100 $ pour être ami d'un fauconneau. Les compagnies Alcan, Bell, General Foods et Le Soleil ont versé 1000 $ chacune et une quinzaine d'autres entreprises ont donné 100 $. Notons que les mises en 1iberté effectuées au cours des dernières années portent fruit, puisqu 'un relevé effectué par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec indique qu'au moins cinq couples de faucons pèlerins ont niché dans le sud du Québec.

pêche, mais d'autres le voient plutôt «comme quelqu 'un qu i triche un peu, ce qui pe ut arriver à tout le monde >>.

juridique, puisqu'il n'en existe aucune définition claire et nette. Cela explique probablement que la première recommandation des auteures de l'étude soit que « le MLCP élabore une définition s pécifique de la notion de braconnage et qu 'il la fasse connaître à l'intérieur de l'administration de la justice et auprès du public utilisateur de la ressource, avant d' investir ·dans des campagnes de sensibilisation, condamnées à l'échec lorsqu'elles sont fondées sur un concept flou >>.

L'.étude nous apprend que les juges ont surtout imposé aux braconniers les peines minimales prévues par la loi. Aucun ne se souvient avoir donné une peine ma ximale. Les juges soulignent d 'ailleurs que les peines minimales obligatoires prévues dans la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune relèvent d'une philosophie pénale dépassée, les recherches ayant démontré qu 'elles n'ont aucun effet dissuasif spécial, le public n'étant souvent au courant ni de leur existence, ni de leurs seuils. Certains juges considèrent même l'obligation d'imposer des peines minimales comme un affront ou un manque de confiance envers

Les attitudes morales des juges et des procureurs face au braconnage varient grandement, allant du blâme à la compréhension ... Certains juges considèrent le braconnier comme un individu dangereux pour la soèiété et ne lui pardonnent pas d'enfreindre l'éthique de la chasse ou de la

daise de l'orme.

FORÊT ~orme,

Selon Harvey Mead, président de l'UQCN, «l'orme représente un compromis intéressant dans f5 toute l'histoire du choix de ::;: l'arbre-emblème, surtout si cela .~ amène le ministre Côté à lancer ~ un programme de protection de CfJ cette espèce menacée ».

arbre-emblème?

La saga de l'arbre-emblème semble vouloir connaître sa conclusion (voir «Un arbre -emblème pour le Québec•» FRANC-NORD, Hiver 1988). En effet, au moment de mettre sous presse, le ministre délégué aux Forêts du Québec, Albert Côté, s'apprêtait à recommander l'orme d'Amérique comme emblème forestier du Québec. Le caractère de noblesse de l'orme et sa présence autant en milieu urbain qu'en milieu forestier sont deux des éléments qui ont amené le ministre Côté à choisir cette essence. Selon les informations obtenues par FRANC-NORD, le ministre des Forêts profiterait de

c

-, "'"' Mais d 'après Gisèle Lamoureu x, '

0 0 du Groupe Fleurbec, le choi x de l'orme paraît peu judicieux : =::;i..::=~!S!- 0.. « Avec une devise comme «Je L'orme, me souviens », peut-être vaut-il un arbre au port altier mieux s'abstenir de choisir un arbre aussi malade comme emblème, du moins tant qu 'on la proclamation de l'orme n'aura pas trouvé le remède effi comme arbre-emblème pour lancace à la maladie qui l'affecte. cer une campagne de protection Par ailleurs, si l'orme représente et de conservation de cet arbre bien les vallées du Saint-Laurent menacé par la maladie hollanet de !'Outaouais, ce n'est pas le

.c

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printemps 1988

leur... jugement. lis soulignent d 'ailleurs que la confiscation des outils de chasse ou de pêche uti lisés pour braconner peut souvent s'avérer une méthode plus «frappante >> que l'imposition d'amendes m inimales. Quant aux peines d'incarcération, elles ne sont de toute façon pas .respectées, faute de place dans les pénitenciers. Les juges ont manifesté la volonté d'être mieux informés sur la faune et sur les conséqu ences économiques et écologiques de la chasse et du braconnage. Et ils y vont enfin d'une idée très intéressante lorsqu'ils suggèrent au MLCP d'établir une politique claire quant à la publicité entourant les procès pour braconnage, en la concentrant dans la période avant l'ouverture de la chasse.

cas pour le reste de la province. Par exemple, les gens de la Côte-Nord ou de la Gaspésie risquent de ne s'identifier que difficilement à cette essence. >> Quant à Robert Charpentier, qui avait piloté le dossier de l'arbreemblème pour la Société linnéenne du Québec, il considère que l'orme a une importance environnementale et un charme qui lui sont propres, mais qu'il est regrettable que cette essence soit autant identifiée à une maladie encore incontrôlée. Sans s'opposer formellement au choi x de l'orme, «qu i, en santé, est un bel arbre>> et «qui constitue un meilleur choix que l'épinette noire >>, M. Charpentier lui préfère encorè le thuya de l'est (le cèdre), le chêne rouge ou le bouleau blanc.

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__Les actU1alités__ DÉVELOPPEMENT DO NORD Protection du milieu et respect des populations Pas moins de 25 conférenciers provenant de six pays différents, 350 participants remarquablement studieux et disciplinés, une participation autochtone somme toute assez modeste, voire symbolique dans le cas des Inuit, la pléthore habituelle de fonctionnaires et d'hommes politiques, une organisation impeccable, aucun affrontement majeur en dépit de la rhétorique parfois musclée des représentants autochtones, le tout sous la présidence du plus grand spécialiste québécois des affaires nordiques, Louis-Edmond Hamelin, bref, un événement très réussi que ce Symposium international sur l'avenir du Nord québécois, qui se tenait à Amos, en Abitibi, les 19, 20 et 21 novembre derniers, à l'instigation de l'Université du Québec en Abititi-Témiscaminque, d'Hydro-Québec, de la Société de développement de la BaieJames et de la Municipalité de la Baie-James. De l'ensemble des interventions, la protection du milieu naturel et le respect des populations autochtones se dégagent comme idées maîtresses. Mais les propos des conférenciers ne contenaient pas d'éléments vraiment nouveaux.

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Signalons cependant ceux du consul général de l'URSS, selon qui le désarmement et le respect de l'environnement constituent les conditions indispensables au développement nordique. Ainsi avons-nous pu apprendre, avec intérêt, que les efforts conjugués des scientifiques soviétiques et de l'opinion publique ont persuadé les autorités de ce pays d'abandonner un projet de détournement, vers le sud, de rivières du nord. De quoi inciter à plus de réflexion encore les anciens promoteurs canadiens du projet Grand canal! Pour leur part, les leaders cris, tout en déplorant que certaines dispositions de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois ne soient pas respectées, ont réaffirmé vigoureusement la nécessité pour le gouvernement québécois, s'il entend poursuivre les grands travaux hydroélectriqu~s. de reprendre les négociations avec les représen-

tants autochtones. S'il est difficile de prévoir quelles seront les retombées de ce symposium, une chose est certaine: notre connaissance du Nord québécois s'est quelque peu affinée et cela n'est pas négligeable. De plus, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue ira sans doute de l'avant avec son projet de création d'un centre d'études nordiques. Enfin, un second symposium sur le Nord québécois pourrait avoir lieu en 1988, sur la Côte-Nord. Pierre Beaulieu

ORNITHOLOGIE Austin Reed honoré Chercheur au Service canadien de la faune, le Dr Austin Reed vient de se mériter le Prix de conservation 1988 de la Fondation Québec-Labrador, remis à chaque année à la personne qui s'est le plus signaié par une réalisation exceptionnelle en matière de conservation, pour les provinces maritimes, le Qué bec ou le nord de la NouvelleAngleterre. Quatrième récipiendaire de ce prix, le Dr Reed est le premier qui provienne du Québec.

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_ Événements spéciaux

10 au 16 avril. Semaine de la conservation de la faune. Thème: «Les espèces menacées d'extinction, signaux d'alarme d'une nature en péril ». Renseignements: Direction de l'éducation, ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, (418) 644-8371. 19 avril au 22 mai. Exposition «Les artistes qui ont peint Forillon ». À Québec, au 3 rue Buade. Organisée par Parcs Canada. Renseignements: (418) 648-4177. 1 au 7 mai. Semaine de l'arbre et des forêts. 30 mai au 5 juin. Semaine canadienne de l'environnement. Thème: «Notre avenir à tous».

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_ Congrès et colloques

31 mars au 3 avril. 1cr Symposium nord-est américain des étudiants de 2c et 3c cycles en sciences de l'environnement. À l'Université du Québec à Montréal. Renseignements: Isabel Orellana, (514) 282-8260. 13 au 17 avril. •L'interprétation et le tourisme•. Congrès pancanadien sur_l'interprétation du patrimoine. A Hull et à Ottawa . Parrainé par !'Association québécoise d'interprétation du patrimoine (AQIP) et par lnterpretation Canada. Renseignements: Jacques Major, (418) 648-7772. 29, 30 avril et 1cr mai. Sommet québécois sur la faune. Thème: «L'utilisation de la faune». À Québec. Organisé par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Renseignements: André Boucher, chef de la Division des relations publiques, (418) 643-2464. 9 au 13 mai. 55e Congrès de !'Association canadienne-française pour l'avancement des sciences (ACFAS). À l'Université de Moncton. Renseignements: (514) 342-1411. 13 au 15 mai. Congrès des ornithologues amateurs du Québec. À Sherbrooke. Organisé par la Société de loisir ornithologique de !'Estrie, en collaboration avec !'Association québécoise des groupes d'ornithologues (AQGO). Renseignements: Christian Houle, (819) 564-6178 (jour) et (819) 569-037 4 (soir).

29 mai au 3 juin. VIe Congrès mondial des ressources en eau . Au Centre des congrès d'Ottawa. Organisé par !'Association internationale des ressources en eau. Renseignements: (613) 233-6472.

1 au 3 juillet. 17c conférence annuelle de la Fédération canadienne de la nature. Thème de la conférence: «Conserving our Northern Heritage» . À Yellowknife, dans les Territoires du NordOuest. Renseignements: Arthur Redshaw (403)920-8500 ou Jacques Prescott (418) 622-0313.

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Conférences

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6 avril. Les oiseaux des mangeoires. Conférence de Christian Proulx. À la bibliothèque municipale de Saint-Patrice de Beaurivage, à 19h30. Organisée par le Club des ornithologues du Québec. Renseignements: (418) 6810621

12 avril. «Si les animaux de nos zoos convoquaient une conférence de presse». Conférence de Louise Beaudin, vétérinaire. À l'amphithéâtre du Jardin botanique de Montréal. Organisée par la Société de biologie de Montréal. Renseignements: (514) 2779864. 13 avril. La couche d'ozone. Atelier-discussion. À Québec. Organisé par les Ami-e-s de la terre de Québec. Renseignements: (418) 522-0454. 21 avril. Initiation à l'ornithologie. Conférence d 'Andrée Guimond. À la bibliothèque municipale de Sainte-Sabine (Bellechasse). Organisée par le Club des ornithologues du Québec. Renseignements: (418) 681-0621. 22 avril. Les pigeons voyageurs. Conférence de J.-C. Leblanc. Au Jardin botanique de Montréal. Organisée par le Groupe nature et patrimoine. Renseignements: (514) 681-1303. 27 avril. La pollution de l'air. Atelier-discussion. À Québec. Organisé par les Ami-e-s de la terre de Québec. Renseignements: (418) 522-0454. 30 avril. Présentation en primeur des films sur les peintres animaliers Gigi et Monique Benoit. À l'auditorium du Jardin botanique de Montréal. Organisée par le Groupe nature et patrimoine et le Groupe nature nouvelle. Renseignements: (514) 681-1303 .

6 mai. Les oiseaux des mangeoires. Conférence d'Andrée Guimond . À la bibliothèque muni cipale de Saint-Malachie. Organisée par le Club des ornithologues du Québec. Renseignements: (418) 681-0621.

10 mai. •Des arbres autour de Montréal et sur ses berges, en voulez-vous? Lesquels?» Conférence de Pierre Jutras, botaniste. À l'amphithéâtre du Jardin botanique de Montréal. Organisée par la Société de biologie de Montréal. Renseignements: (514) 2779864. 11 mai. La pollution du fleuve. Atelier-discussion. À Québec. Organisé par les Ami-e-s de la terre de Québec. Renseignements: (418) 522-0454. 25 mai. La fluoration de l'eau. Atelier-discussion. À Québec. Organisé par les Ami-e-s de la terre de Québec. Renseignements: (418) 522-0454.

4 juin. Souper-causerie à l'occasion du lOe anniversaire d'existence des Amis de la terre de Québec. Au Centre international de séjour, à Québec. Organisé par les Ami-e-s de la terre de Québec. Renseignements: (418) 522-0454.

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Voyages, excursions, randonnées

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9 avril. Excursion pour l'observation des oies blanches et autres oiseaux migrateurs. À la baie du Fèvre. Organisée par le Groupe nature et patrimoine. Renseignements: (514) 681-1303. 23 avril. Excursion pour le festival des bernaches. A la réserve faunique de Plaisance. Organisée par le Groupe nature et patri · moine. Renseignements: (514) 681-1303 . 20 au 23 mai. Observation de la migration annuelle des oiseaux. Au Parc national de la PointePelée, en Ontario. Organisée par le Groupe nature et patrimoine. Renseignements: (514) 681-1303 . 21 au 23 mai. Jamboree de la marche. Dans le parc de la Gatineau. Organisé par la Fédération québécoise de la marche. Renseignements: Claude Harvey, (514) 252-3157. 29 mai. Marche internationale de Montréal. À Montréal. Organisée par la Fédération québécoise de la marche. Renseignements: Luc Larose, (514) 252-3157.

printemps~

23 au 26 juin. Excursion pour les fêtes du 150• anniversaire du Lac-Saint-Jean. Au Lac-SaintJean. Organisée par le Groupe nature et patrimoine. Renseignements: (514) 681-1303.

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Stages et camps en sciences naturelles

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2, 3 et 4 avril. Aménagement et entretien des sentiers. Cours de ~ jours (fin de semaine intensive). A Sainte-Lucie, dans les Laurentides, à !'Auberge lnterval. Organisé par la Fédération québécoise de la marche. Renseignements: (514) 252-3157. 7 au 21 avril. Survie en forêt. Cours de 3 semaines, 2h15 par semaine. Au Stade olympique, à Montréal. Organisé par la Fédération québécoise de la marche. Inscription: 31 mars. Renseignements: (514) 252-3157 . 20 au 22 mai. Les arbres et les arbustes, au printemps. À Racine (Richmond). Stages organisés par le Groupe d'animation en sciences naturelles du Québec. Renseignements: Michel Lacroix, (418) 6874691, ou Louis Fortin, (418) 8395376 3 au 5 juin. Observons les phénomènes météorologiques. Découverte du ciel. Etude des oiseaux. A Frelighsburgh, en Estrie. Stages organisés par le Groupe d'animation en sciences naturelles du Québec. Renseignements : Michel Lacroix, (418) 687-4691, ou Louis Fortin, (418) 839-5376.

10 au 12 juin. Stage pour l'étude des plantes printanières et pour l'observation des oiseaux. A la base de plein-air La Vigie. Organisé par le Groupe nature et patrimoine. Renseignements: (514) 681-1303. 17 au 19 juin. Introduction à l'entomologie. À Lac-Trois-Saumons. Stages organisés par le Groupe d'animation en sciences naturelles du Québec. Renseignements: Michel Lacroix, (418) 687 -4691, ou Louis Fortin, (418) 839-5376. 17 au 19 juin. Habitat et _comportement ornithologique. A LacTrois-Saumons. Stages organisés par le Groupe d'animation en sciences naturelles du Québec. Renseignements: Michel Lacroix, (418) 687·4691 , ou Louis Fortin, (418) 839-5376

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Gouvernement du Québec

Ministère de !'Enseignement supérieur et de la Science

Québec

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Par l'anion québécoise pour la conservation de la nature

{Jne synthèse de Jean-Pierre Drapeau

Quand on regarde une carte du Québec, il est facile d'y constater l'importance du milieu aquatique. En fait, la ressource eau est omniprésente dans notre environnement immédiat : la province est bordée · par plus de 9000 km de rives et c'est par milliers que s'y comptent les lacs et les rivières, sans oublier la présence du Saint-Laurent, le huitième cours d'eau en importance au monde, au coeur du territoire québécois. En fait, on évalue à 1,9 million de kilomètres la longueur du réseau de cours d'eau au Québec: 73 % (1 387 000 km) sont des petits cours d'eau à faible débit permanent, 25 % (475 000 km) sont des moyennes ou grandes rivières et 2 % (38 000 km) sont des très grandes rivières ou des fleuves. Quant aux lacs du Québec, on en retrouve 85 couvrant plus de 100 km2 et une estimation qu'on dit prudente situe leur nombre à environ 750 000, même si seulement 35 000 lacs ont été officiellement répertoriés.

Page couverture: la rivière des Mille· Îles, un des tributaires du fleuve Saint· Laurent. Photo Pierre Pouliot, MLCP

Page ci-contre: les rapides de Lachine Photo Pierre Pouliot, MLCP

Veau, un moteur économique à préserver Au Québec, tous ces millions de mètres cubes d'eau représentent un important moteur économique, autant pour la production d'énergie, pour les activités de navigation ou de loisir, que comme composante des procédés de transformation industrielle. Mais cette eau devient malheureusement, en bout de ligne, un immense égout collecteur de déchets de toutes sortes. En fait, cette abondance d'eau dont jouit le Québec devrait en principe lui assurer un approvisionnement sans problème. Tel n'est cependant pas le cas, puisque la qualité de l'eau au Québec laisse grandement à désirer, à cause entre autres de la pollution bactériologique ou organique, de la contamination par les matières en suspension et de la pollution par les métaux lourds ou par les autres produits chimiques.

Le Saint-Laurent, le coeur de notre environnement Lorsqu 'on parle du milieu aquatique au Québec, le dossier du fleuve Saint-Laurent est le premier à venir à l'esprit, car ce fleuve représente non seulement la principale ressource du patrimoine écologique québécois, mais aussi l'un des écosystèmes aquatiques les plus importants dans les processus environnementaux du continent nordaméricain. En effet, le Saint-Laurent

draine la plus grande réserve d'eau douce du globe, celle des Grands Lacs qui renferment à eux seuls un dizième des réserves mondiales. De plus, le fleuve constitue actuellement le principal réservoir d'eau potable au Québec, puisque 45 % de la population totale de la province s'y approvisionne. Le Saint-Laurent constitue aussi la véritable artère vivante du Québec. Plus de 80 % de la population de la province est concentrée dans son bassin hydrographique, particulièrement sur les basses terres qui le bordent et où sont situées quelque 300 municipalités regroupant plus de trois millions de personnes. Depuis près de quatre siècles, le Saint-Laurent est un chemin de découverte, un lien de transport et de commerce, une artère de peuplement, une aire de récréation et de loisir, une voie de développement culturel et un outil majeur pour l'économie de la province. Des Grands Lacs jusqu'au golfe, en passant par l'estuaire, le SaintLaurent est riche d'une diversité inouïe d'écosystèmes, qu'il s'agisse des marais littoraux de l'estuaire, des plaines d'inondation du lac Saint-Pierre, des rapides de Lachine ou des quelque 150 îles qu 'il baigne. Cette multiplicité d'écosystèmes ainsi que la variété des eaux du Saint-Laurent (eau douce, eau saumâtre et eau salée) amènent une productivité biologique importante et procurent des habitats à une faune et à une flore dont la richesse est souvent insoupçonnée. Selon 3

diverses études, 65 % de la faune vertébrée du Québec est associée aux milieux riverains et aquati ques du fleuve, presque toutes les 112 espèces de poissons propres aux eaux douces du Québec se retrouvent dans le Saint-Laurent, plus de 100 espèces d'oiseaux nichent dans son milieu riverain et une cinquantaine d 'espèces s'y arrêtent lors de leur migration. Si toutes ces richesses existent encore aujourd'hui, elles sont cependant gravement menacées par les nombreuses détériorations que subit le Saint-Laurent depuis plusieurs décennies. On a ainsi découvert que le fleuve montre d'importantes baisses de productivité pour plusieurs espèces de poissons. Elles touchent même des espèces comme la perchaude, pourtant réputée comme robuste, dont le niveau de population serait 32 fois moins élevé qu'en 1971 ! Avec un niveau de population 19 fois moins élevé, le poulamon, le célèbre petit poisson des chenaux, serait une autre espèce très affectée. Plusieurs espèces, comme les dorés et les brochets, ont des taux de mercure dépassant les normes acceptées et les rendant impropres à la consommation humaine. Les anguilles sont contaminées. La cueillette des mollusques est interdite à plusieurs endroits. Les bélugas souffrent de lésions, d'ulcères, d'infections et de troubles dus à la pollution chimique (par le DDT, les BPC et le mirex). Entre 1950 et 1980, près de 30 km 2 de milieux humides sont disparus, alors qu'on évalue à seulement 450 km 2 la superficie actuelle des milieux humides au Québec. L'utilisation du Saint-Laurent à des fins économiques et commerciales peut facilement s'accommoder d'une eau de qualité moindre, mais il n'en va pas ainsi des autres utilisations. Par exemple, des habitats perturbés, quand ils ne sont pas tout simplement détruits, empêchent la conservation de la faune, ressource essentielle pour les activités de chasse et de pêche. De même, un fleuve aux eaux polluées ne répond plus adéquatement aux besoins en eau de consommation ni au désir de baignade ou de voile. Bref, alors que la nature et les richesses du Saint-Laurent devraient assurer une utilisation polyvalente reliée aussi 4

Véritable artère vivante du Québec, le Saint-Laurent constitue une excellente aire de récréation et de loisir.

La multiplicité de ses écosystèmes ainsi que la variété de ses eaux font du Saint-Laurent une zone importante d'habitats fauniques essentiels.

Avec les activités portuaires, le transport maritime est l'activité qui prédomine sur le Saint-Laurent.

au loisir et au tourisme, c'est l'utilisation économique (surtout le transport maritime et les activités portuaires) qui prédomine aujourd 'hui de façon presque exclusive.

Les types de pollution De façon générale, la qualité de l'eau peut être affectée par plusieurs types de pollution: par la pollution

bactériologique ou organique (les eaux usées domestiques), par la pollution physique (matières en suspension, contamination thermique ou radioactive, etc.) et par la pollution chimique (métaux lourds, produits toxiques, pesticides et engrais, etc.).

La pollution bactériologique La pollution bactériologique, provoquée par des matières organiques susceptibles de subir une fermentation bactérienne, est principalement due aux rejets non traités provenant des égouts domestiques et agricoles. Les bactéries coliformes en sont la principale composante. La faible solubilité de l'oxygène dans l'eau est la cause fondamentale de cette pollution. L'arrivée de matières organiques dans l'eau entraîne la multiplication de bactéries consommatrices d'oxygène. Comme la pollution par les matières organiques provoque une consommation importante d'oxygène, on mesure habituellement ce type de pollution par la demande biologique en oxygène, la DB05, c'est-à-dire la quantité d'oxygène nécessaire pendant cinq jours pour que les bactéries puissent dégrader les matières organiques. Plus la DB0 5 est élevée, plus l'eau est polluée. C'est en multipliant la DB0 5 des eaux usées d'une municipalité par le volume d'eaux usées correspondant à l'utilisation moyenne par personne, qu'on obtient la moyenne quotidienne de charge polluante par personne. Au Québec, cette moyenne est de 55 g de DB0 5 par jour et on l'utilise pour calculer la notion de population équivalente relative à la pollution organique d'une usine. On dira par exemple que les usines québécoises de pâtes et papiers, qui rejettent 890 tonnes de DB0 5 par jour, génèrent une pollution organique équivalant à celle causée par une population d 'environ 16 millions d'individus (c'est là un ordre de grandeur pouvant varier selon divers facteurs: hausse ou baisse de production, fermetures temporaires d'usines, etc.). Dans les rivières, l'importance de la DB0 5 est fonction du volume et de la concentration de polluants par rapport au débit de la rivière.

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Au Québec, les usines de pâtes et papiers causent une pollution organique équi· valant à celle d'une population d'environ 16 millions d'individus.

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6: Importante source de pollution physique, le flottage du bois génère dans les cours d'eau du Québec quelque 27 5 000 tonnes par année de matières en suspension, soit environ 175 000 tonnes d'écorces et 100 000 tonnes de billes perdues.

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Les barrages hydroélectriques contribuent à la pollution chimique de l'eau. La mise en eau des réservoirs et la submersion conséquente de matière organique causent des perturbations du milieu aquatique et entraînent une augmentation des niveaux de mercure dans les chairs des poissons.

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La pollution physique

La pollution chimique

La contamination par les matières en suspension est l'une des formes de pollution physique les plus destructrices au plan des écosystèmes aquatiques. Les matières en suspension augmentent la turbidité de l'eau, nuisent à la pénétration de la lumière et réduisent donc la photosynthèse. Se déposant finalement sur le lit des cours d'eau, elles ont un effet de colmatage d'habitats essentiels, tels des frayères ou des marais, et entraînent souvent la disparition de la faune et de la flore benthiques. A cause de la pollution agricole diffuse et de l'érosion des sols, l'agriculture est une source importante de matières en suspension. L'industrie forestière en est une autre, à cause du flottage du bois, de l'érosion causée par la dénudation des sols forestiers et surtout des quelque 300 tonnes métriques de matières en suspension que les usines de pâtes et papiers rejettent quotidiennement.

Presque tous les secteurs d'activité économique sont des sources de pollution chimique. Les industries de transformation utilisent des quantités impressionnantes de produits chimiques de toutes sortes; les secteurs agricole et forestier utilisent des fertilisants et des pesticides en grande quantité; les égouts municipaux rejettent aussi nombre de ces produits utilisés pour les activités manufacturières ou ménagères. Et même si les rejets de produits chimiques dans le milieu aquatique sont mieux réglementés aujourd'hui qu'il y a 20 ou 30 ans, il en reste tout de même des quantités impressionnantes accumulées dans les sédiments des cours d'eau, plus particulièrement dans le SaintLaurent, où ils représentent toujours un risque pour l'environnement. La pollution par les métaux lourds (aluminium, cuivre, chrome, nickel, zinc, arsenic, plomb, mercure, cad-

mium, fer, etc.) présente diverses caractéristiques au plan de la toxicité. L'aluminium, le cuivre, le chrome, le nickel, le zinc et certains autres métaux lourds se révèlent très toxiques pour les poissons, les mollusques et les autres organismes aquatiques, mais peu toxiques pour l'humain. Par contre, l'arsenic et le plomb sont surtout toxiques pour l'humain, qui est susceptible de les absorber en consommant des poissons ou des mollusques contaminés. Le mercure, quant à lui, affecte autant les organismes aquatiques que l'humain; il constitue le principal toxique limitant l'exploitation de certaines espèces de poissons et de crustacés. Métal lourd le plus redouté en milieu aquatique, le mercure est encore utilisé dans la fabrication d'appareils électriques, dans la production de chlore et de soude, dans l'industrie des plastiques et des peintures, dans les pâtes et papiers ainsi que dans nombreux pesticides. Même la production d'énergie électrique entraîne une

LES EFFETS NÉGATIFS DES PLOIES ACIDES Pollution insidieuse provenant en 1 bonne partie des centres industriels 1 des Etats-Unis et causée par les fonderies, les centrales thermiques et le transport routier, les pluies acides affectent les écosystèmes et entraînent de nombreux effets négatifs en milieu aquatique: acidification de 1 l'eau et baisse du pH (l'échelle du pH, qui va de 0 à 14, indique l'acidité 1 d'un liquide: à 7, il est neutre; sous ce chiffre, il est acide; au-dessus, il 1 est alcalin); augmentation de la concentration de certains métaux lourds; diminution des populations de poissons, taux élevé de mortalité des alevins et extinction de certaines espèces moins tolérantes; diminution de la diversité des organismes aquatiques (phytoplancton, zooplancton, bactéries, etc.); possibilité de disparition des éléments nutritifs essentiels des sols, qui se voient transformés chimiquement et lessivés vers les cours d'eau.

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Les cheminées très hautes des fonderies rejettent des polluants qui sont transportés sur des distances de plus en plus grandes, jusqu'à 1000 km dans certains cas! Voilà une façon d'exporter ses problèmes de pollution dans la cour du voisin •••

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La résistance des milieux à l'acidifica- ~ 1 tion dépend de leur capacité de neu- ~ traliser l'acidité des précipitations. .g 1Au Québec, ce pouvoir tampon étant ~ I particulièrement faible, les pluies aci- :E'. 1des endommagent les qualités biolo- ~ giques des lacs et des rivières, nuiS: r sant entre autres aux rendements de L'acidification du milieu aquatique affecte gravement plusieurs espèces de poispêche sportive de truites mouchetées sons. Les études démontrent que même les rivières de la Côte-Nord, pourtant et au taux de survie des oeufs et des très éloignées des sources de pollution atmosphérique, subissent l'effet néfaste ~ ~s~luies acides. L alevins des saumons.

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augmentation considérable des concentrations de mercure dans la chair des poissons. La mise en eau des réservoirs et la submersion conséquente de matière organique ont pour effet de relâcher dans le milieu du mercure inorganique, que les bactéries présentes dans l'eau transforment en mercure organique assimilable par les organismes aquatiques. Cependant, ce phénomène ne semble pas irréversible, puisque la situation semble revenir à la normale après une vingtaine d'années. Divers autres produits toxiques tels

les pesticides (DDT, mirex, etc.) ou les BPC (biphényles polychlorés) viennent aussi souiller les cours d'eau, tuer les larves aquatiques de nombreux insectes et réduire ainsi dramatiquement la nourriture disponible pour les poissons. La pollution de l'eau par les pesticides est rendue encore plus dangereuse par le fait que ceux-ci se concentrent le long des chaînes alimentaires. Quant aux fertilisants utilisés en agriculture, ils sont souvent amenés par ruissellement vers le milieu aquatique, provoquant un phénomène d'eutrophisation ou de vieillissement prématuré des cours d'eau.

Des sédiments en eaux troubles Pour qualifier la qualité du milieu aquatique, il faut tenir compte à la fois des eaux et des sédiments. Dans le cas du Saint-Laurent, si les eaux du fleuve peuvent être considérées de qualité moyenne ou mauvaise, ce n'est rien à côté des sédiments qui ont, eux, le pouvoir d'absorber et de «complexifier» diverses substances toxiques dissoutes. On y retrouve même des concentrations de polluants variant de plusieurs centaines à plusieurs milliers de fois supérieures à celles retrouvées dans l'eau! En fait, ces sédiments reflètent l'histoire des dernières décennies, caractérisées par l'industrialisation effrénée des grands centres nord-américains. Et on ne doit pas oublier non plus que le développement phénoménal de la chimie organique a entraîné, au cours de ces mêmes décennies, la commercialisation de plusieurs milliers de substances nouvelles non biodégradables, souvent très nocives pour les organismes vivants.

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Les activités portuaires et industrielles détruisent souvent les écosystèmes aquatiques locaux. Le rouge vif de ces eaux affectées par les oxydes de fer est un signe visible d'un sérieux problème local de pollution.

Le long du Saint-Laurent, la rivière des Prairies et les eaux baignant l'île de Montréal s'avèrent particulièrement polluées: ces hauts lieux de l'activité urbaine et industrielle génèrent des quantités élevées de produits toxiques. Ailleurs, à cause des eaux peu profondes et des faibles courants qui y retiennent les substances toxiques, les élargissements du fleuve que représentent les lacs Saint-François, Saint-Louis et Saint-Pierre accusent également une forte teneur en métaux lourds et en autres substances toxiques. Enfin, à la hauteur de certaines rivières tributaires du Saint-Laurent et fortement touchées par la pollution agricole, par exemple les rivières L' Assomption, Yamaska et Saint-François, le fleuve offre un visage peu reluisant. Parallèlement à cet accroissement des apports de substances toxiques, le Saint-Laurent s'est vu progressivement amputer d'une partie des importants écosystèmes que constituent les marais littoraux, reconnus pour leur capacité de recycler les éléments toxiques, d 'éliminer les constituants organiques et inorganiques des eaux polluées, d'assimiler les composés toxiques et de neutraliser les organismes pathogènes. Entre

Cornwall, en Ontario, et Québec, environ 70 % des rives ont été modi-

fiées, au détriment de la qualité de l'eau et des habitats fauniques. t.:empiètement sur le fleuve et le remblayage des rives représentent deux causes importantes de ces pertes de marais, de loin les habitats les plus productifs et les plus importants pour la faune.

One Stratégie de conservation du Saint-Laurent Au Québec, l'état du fleuve SaintLaurent et de l'ensemble du milieu aquatique est tel qu'il entraîne la perte de plusieurs usages. Les impacts sont énormes au plan des potentiels d'exploitation des ressources fauniques et récréatives, qui sont aussi, rappelons-le, d'importants moteurs économiques. Devant cette situation de fait, il n'est pas surprenant que le gouvernement du Québec ait lancé, il y a déjà près de dix ans, un vaste programme d'assainissement des eaux. Dans un premier temps, ce programme s'est surtout attaqué au volet urbain, avec la construction 7

d'usines de traitement reliées aux réseaux d'égouts municipaux. Au début de 1988, 2,8 milliards de dol· !ars avaient déjà été dépensés à cet égard, soit 45 % des six milliards de dollars d 'investissements prévus par le programme. En ce qui concerne le secteur industriel, on tente plutôt de réduire à la source la charge polluante, grâce à une modernisation des équipements et à un contrôle plus serré de la pol· lution. Quant à la pollution agricole, un nouveau programme d 'assainissement, annoncé au début de 1988, promet de combattre la pollution ponctuelle causée par la concentra· tion des élevages: afin de réduire les charges de matières nutritives et de micro-organismes aboutissant dans les cours d'eau, il favorise un entreposage satisfaisant des fumiers, un épandange adéquat sur les sols ainsi que des procédés de traitement, lorsque nécessaire. Cela ne suffira cependant pas à éliminer la pollution diffuse provenant du drai· nage et de l'érosion des sols; en effet, seule une modification des pratiques agricoles pourra améliorer la situation. Le programme d'assainissement des eaux conçu par le ministère de !'Environnement du Québec porte sur les sources québécoises de pol· lution. Il n'a que peu d'effets sur les contaminants qui proviennent des Grands Lacs et qui sont responsa bles d'une grande partie de la pollution du Saint-Laurent. Le cas du mirex, un produit chimique qui n'a jamais été utilisé dans la province mais qu'on retrouve dans les eaux de la section québécoise du fleuve, est un exemple typique. De même, des analyses effectuées sur des poissons du lac Saint-François révèlent des taux de pollution qui seraient difficiles à comprendre sans cette migration des polluants, puisqu 'on ne retrouve aucune usine polluante sur les rives de ce lac. Cela explique que le gouvernement du Québec ait depuis quelque temps fait aussi porter ses efforts sur des ententes de dépollution impliquant !'Ontario et les Etats américains bordant les Grands Lacs. En 1987, le ministère de !'Environ· nement a d'ailleurs profité de la

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Qui serait prêt à renoncer à boire une eau propre?

Conférence internationale des maires du Saint-Laurent et des Grands Lacs pour lancer un programme d'action visant autant le développe· ment économique que l'assainisse· ment du Saint-Laurent. Il a aussi annoncé la mise sur pied d 'un comité d'action ayant pour mandat de définir les objectifs à atteindre d'ici dix ans pour permettre l'harmonisation de tous les usages possibles du fleuve. Ce programme d'action se veut la réponse du Québec à la Commission mondiale sur l'environnement et le développe· ment (Commission Brundtland), formée par les Nations unies, qui invitait chaque pays à réaliser des projets concrets d 'action qu i puis· sent démontrer que le développement économique passe par la conservation des ressources. C'est dans ce même courant de pen· sée que l'Union québécoise pour la conservation de la nature a proposé récemment un projet d'élaboration d'une «Stratégie de protection, de conservation et de mise en valeur du fleuve Saint-Laurent », qui repré· sente un pas important vers l'adop· tion d'une stratégie québécoise de la conservation. Ce projet, d'une durée de trois ans, vise une mise à jour et une synthèse des travaux de recherche relatifs au fleuve, une amélioration de la sensibilisation du grand public à l'importance autant écologique qu 'économique du Saint-Laurent et surtout une concertation entre les intervenants, afin d 'assurer la conservation et le développement durable des ressour· ces naturelles propres au SaintLaurent.

Gérer en fonction de la dimension écologique Au-delà de tous les ouvrages d'assainissement, dont les résultats tardent encore à se faire sentir dix ans après le lancement du programme d'assainissement des eaux, il faudra inévitablement s'attaquer aux sources mêmes des pollutions de l'eau, modifier au besoin certai· nes pratiques industrielles et sur· tout continuer à sauvegarder les zones sensibles par des législations de protection des rives, des marécages et des fragiles milieux nordiques essentiels au maintien des processus biologiques du Nord. Chose certaine , l'eau a été surtout valorisée pour ses nombreux apports à l'économie : production hydroélec· trique, navigation, refroidissement des procédés industriels, etc. Il est maintenant temps que cela ne se fasse plus au détriment de sa valeur écologique. Car qui serait prêt à renoncer à boire une eau propre? Qui acceptera it de voir sa santé menacée par des substances toxiques dont la pré· sence est trop souvent difficile à discerner? !..'.assainissement des eaux n'est pas un luxe, même si son coût se chiffre par milliards de dollars. C'est plutôt le prix à payer, après des décennies de laisser-aller, pour un milieu de vie amélioré et un développement économique durable. J ea n-Pierre Drapeau est directeur et rédacteur en chef de FRAN C-NORD