A l’Equipe de Leadership International Trosly, le 17 octobre 2016

Chers amis,

Plus d’une année s’est maintenant écoulée depuis ma lettre de mai 2015 concernant les révélations sur le Père Thomas. Certains parmi vous ont regretté ce qu’ils estiment être mon silence sur ses agissements et abus sexuels. Ils lisent dans cette lettre un manque de condamnation claire. Je tiens à vous redire que je condamne ces gestes dont j’ai mesuré la gravité à l’occasion de l’enquête canonique et depuis lors. J’ai fait le deuil du Père Thomas tel que je l’ai connu. Je demande pardon aux femmes victimes de ne pas avoir mesuré assez vite leur traumatisme et avoir été suffisamment sensible à leur souffrance. Je continue maintenant à relire l’histoire de ma relation avec Père Thomas pour mieux discerner ce qui a été positif et ce qui était négatif. Je vous demande de prier pour moi dans la poursuite de ce travail de relecture. En effet, pour ce qui regarde mon passé, vous savez bien qu’à l’Eau Vive (comme jeune de 22 à 28 ans) et par la suite, j’ai eu une grande confiance dans ce prêtre, qui m’a aidé spirituellement. Je réalise aujourd’hui, avec l’ensemble des révélations qui nous sont parvenues, quelle sorte de dévoiement spirituel était agissante chez lui, à ce moment-là, puis, lorsqu’il était à la Ferme et que je fondais L’Arche. Je l’ignorais absolument à l’époque. Je n’avais aucune conscience qu’il ait pu faire usage d’une certaine spiritualité mariale d’une manière aussi pervertie, telle que les témoignages ultérieurs l’ont révélé. Par ses actes répétés et condamnables, le Père Thomas a brisé la confiance que j’avais en lui. Je voudrais ajouter qu’il n’y a aucun lien entre la spiritualité ou la théologie mises en avant par le Père Thomas et qui a servi à justifier ses relations abusives avec des femmes et la spiritualité de L’Arche, telle qu’elle a été conçue, développée et vécue depuis ses origines. Une messe se prépare à l’intention de toutes les victimes du Père Thomas, directes et indirectes, et du Père Thomas lui-même. Cette démarche, inscrite dans la « démarche de miséricorde » dont parle le Pape François, me parait nécessaire et je sais qu’elle est accompagnée d’autres initiatives témoignant de compassion et de la solidarité de toute L’Arche à l’égard des victimes. Nous prierons aussi pour L’Arche elle-même, où chacun est blessé à la suite de la mise au jour des souffrances causées par le Père Thomas. Je serai bien entendu présent pour prier avec vous le jour de cette cérémonie.

Jean Vanier