sucre et diabète

plus de 25 ans la bagasse (résidus de la canne après extraction du sucre) est ... de bagasse équivaut à 260 kg de charbon ou 180 l de fioul, la bagasse se ...
4MB taille 11 téléchargements 176 vues
M a g a z i n e d e s p a r t e n a i r e s d u C e n t r e d ’ Ét u d e s e t d e D o c u m e n t a t i o n d u S u c re / n ° 3 7 - O c t o b re 2 0 1 5

LA CONFITURE,

un univers en ébullition…

AGRICULTURE

INTERVIEW

FILIÈRE

LA BETTERAVE SUCRIÈRE FACE AU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

régis Bigot DIRECTEUR GÉNÉRAL DU CRÉDOC

Les terminaux sucriers en France CAP SUR L’EXPORT

Page 5

Page 8

Page 12

LA MAGIE DES BONBONS. LES PRALINES DE MONTARGIS

Invention de 1636 attribuée au cuisinier du comte de Plessis-Praslin, duc de Choiseul, la « prasline » fit les délices de la cour du roi Louis XIII. Son lieu de fabrication – Montargis, dans le Loiret – et sa recette ont traversé les siècles. Ces amandes soigneusement sélectionnées, torréfiées et enrobées d’un caramel aux contours irréguliers sont fabriquées par la confiserie Mazet dont le fondateur, Léon Mazet, avait acquis l’atelier original en 1903.

SOMMAIRE

ÉDITORIAL

grain De SuCre n°37 - oCtoBre 2015

À en croire deux chiffres qui circulent à propos du sucre, nous serions passés d’une consommation moyenne de quelques kilos par personne et par an en 1850 à 35 kg de nos jours ! Cet indicateur qui sert régulièrement de rampe de lancement aux attaques contre le sucre est non seulement dénué de toute pertinence, mais il est de surcroît erroné. En effet, le chiffre de 35 kg ne correspond pas aux quantités réellement consommées mais aux volumes de sucre commercialisés, ce qui inclut les utilisations non alimentaires ainsi que les pertes et gaspillages. La consommation réelle de sucre fait, quant à elle, l’objet d’enquêtes qui permettent de l’estimer de manière fiable : 25 kg par an et par personne, soit 30 % de moins que le chiffre ressassé. Et, contrairement aux propos alarmistes, ce niveau de consommation est stable depuis près de cinquante ans.

03 aCtualitÉ

excès alimentaires ou restrictions ? La guerre du modèle alimentaire français n’aura pas lieu !

05 agriCulture

La betterave sucrière face au réchauffement climatique

08 interVieW

Une fois cette vérité rétablie, que peut-on déduire d’une comparaison entre deux époques distantes de 150 années ? À vrai dire, pas grand chose car cette comparaison purement quantitative est un raccourci biaisé, qui ne prend pas en compte l’évolution de la société dans ses multiples dimensions : conditions de vie, pouvoir d’achat, modes de production, de distribution et de consommation, nouvelles utilisations, gaspillage… Sous la Seconde République, la production de sucre de betterave commence son développement à grande échelle. Le sucre, qui provenait essentiellement de la canne et d’Outre-mer, est encore une épice réservée aux privilégiés. Un siècle et deux révolutions agro-industrielles plus tard, le sucre s’est démocratisé, est devenu un aliment disponible : les ventes annuelles per capita atteignent 30 à 35 kg à l’aube des Trente glorieuses, niveau auquel elles demeurent encore aujourd’hui.

régis Bigot Directeur général du Crédoc

10 DÉCouVerte

Le diabète origines et réalités d’une maladie mieux connue

12 Filière

les terminaux sucriers en France Cap sur l’export

16 ConSoMMation

La confiture, un univers en ébullition

et auSSi : SuCre expreSS (p.2) - SantÉ expreSS (p.15) tenDanCeS (p.20) - BloC-noteS (p.21)

Le ceDus (centre d’etudes et de Documentation du sucre) est l’un des tout premiers organismes interprofessionnels à avoir été créé pour assurer l’information et la documentation sur un produit essentiel du secteur agroalimentaire français : le sucre.

CEDUS, CENTRE D’ÉTUDES ET DE DOCUMENTATION DU SUCRE ISSN : 1632-1278 Directeur de la publication : Bertrand du Cray Responsable de rubrique : Philippe Reiser (information scientifique et technologique) Conception éditoriale et rédaction : Christophe Tronchet Communication Ecrite (02 54 72 79 80) Conception graphique : Novima (06 71 27 11 13)

OCTOBRE 2015

Cedus 23, avenue d’Iéna 75116 Paris Tél. : 01 44 05 39 99 E-mail : [email protected] Internet : www.lesucre.com

Crédits photos : A. Lejarre : p. 1 – Confituriades de Beaupuy : p. 19 - D.R. p. 2, 14 - F.L. Athénas : p. 6 – Festival des confitures de Salouel : p. 18 - F. Lange : p. 12, 13 - FOTOLIA ( Alombon : couv. p. 5 - B. Pheby : p. 16 - Flairimages : p. 15 - Gkrphoto : couv. – Minerva Studio : p. 5 – M. Nivelet : p. 15 - Warebreak Média Micro : p. 2 – Weseetheworld : p. 19 ) – G. Ancel : p. 2 – J. SaintGeorges : p 10, 11 - P. Boulen : couv. p. 1, 13 - R.E.A. ( Hamilton : p. 16, 17, 19) - Rocco : p. 3 – Téréos : p. 14 - T. Ledoux : couv. p. 8, 9 – V. Colin : p. 18. DOCUMENT DESTINÉ AUX PROFESSIONNELS Gds Imprimeurs - Limoges

10-31-1581 Certifié PEFC pefc-france.org

Les écarts entre les deux époques peuvent être cités pour bien d’autres produits, et dans les deux sens : par exemple pour le pain (220 kg per capita en 1850 contre 50 kg aujourd’hui) ou pour le poisson, qui suit une évolution similaire à celle du sucre, de 2,5 kg à 24 kg. On pourrait poursuivre en comparant l’évolution des moyens de transports ou de communication qui a évidemment un impact important. Comparaison n’est pas raison, et ces tentatives n’apportent pas d’éclairage pertinent sur l’alimentation, sur les modes de vie contemporains, et encore moins sur les questions de santé publique. Chercher à faire coïncider des chiffres avec des préjugés dans le but d’établir des corrélations hâtives entre consommation de sucres et progression de l’obésité est un non-sens auquel notre filière est en mesure d’opposer des arguments solides et documentés. La grande stabilité de la consommation de sucre sur les cinquante dernières années montre bien que ce produit n’est pas un « marqueur de l’obésité », ce phénomène étant, somme toute, assez récent à l’échelle de l’Histoire.

Bruno Hot Président du Cedus

1

Sucrexpress sucré

Bien vivre

Depuis plusieurs années de nombreux signaux mettent en lumière le retour en grâce du fait-maison au sein des foyers. Cette réalité est à nouveau confirmée par une analyse du Crédoc, publiée en mai 2015. En effet, l’enquête nationale Comportements et consommation alimentaires en France (CCAF) de 2013 fait émerger le « cuisiné maison » parmi les représentations du « bien manger ». Cette notion qui n’apparaissait pas dans les précédentes enquêtes traduit une hausse de la dimension « plaisir » portée par une recherche de goût, de qualité et de partage. Des valeurs auxquelles la pâtisserie et les desserts, piliers emblématiques du fait-maison, restent profondément associés.

cLin D’œiL

« Une île, des hommes, du sucre »

Emblème du patrimoine économique et culturel de l’île de La Réunion, le musée Stella Matutina a fait l’objet d’un important programme de rénovation dont l’inauguration a eu lieu en juin 2015. Au cœur de l’ancienne sucrerie de Saint-Leu superbement réhabilitée et mise en valeur, ce nouveau parcours muséographique propose, sur 3 600 m2, une approche moderne, scientifique et très attractive de l’histoire de l’île et de la canne à sucre, des techniques sucrières et de la place du sucre dans la société réunionnaise. Au-delà de son intérêt touristique et culturel, Stella Matutina se veut un véritable hommage aux femmes et aux hommes qui ont contribué à façonner La Réunion et à fonder son identité. www.museesreunion.re

La Petite Phrase

consommation

Défense et illustration du modèle alimentaire français

saLé

Survivre

Réduire le temps consacré aux repas afin de gagner en productivité... Pour répondre à cet objectif aussi économiquement absurde que préjudiciable à la santé, plusieurs fabricants américains ont lancé une nouvelle catégorie de produits alimentaires à consommer d’une traite, sous forme liquide. Ces préparations protéinées sont censées couvrir la totalité des besoins nutritionnels quotidiens avec un apport de 2 000 kcal. Outre les effets secondaires constatés (mauvaise digestion, hypertension…), cette solution de « survie alimentaire » ne risque pas d’arranger les relations complexes que de nombreux consommateurs américains entretiennent avec leur alimentation.

Le chiFFre

« Le sucre, un élément essentiel à la vie, le carburant de l’organisme. » Christian Schmidt, ministre fédéral allemand de l’Alimentation et de l’Agriculture, le 4 juin 2015 à Berlin, lors du congrès de la Confédération internationale des betteraviers européens (Cibe).

C’est le nombre de variétés de bonbons et autres spécialités de confiseries régionales recensées en France… soit le double de l’estimation évoquée par le cliché du pays « aux 350 fromages ». Une offre dont la diversité ne manque pas de satisfaire les Français, qui classent la dégustation d’un bonbon parmi les trois premiers petits plaisirs qui « donnent la pêche »*. * enquête BVa-unPP, avril 2015

2

Les résultats de l’édition 2015 du baromètre OpinionWay-Ania sur l’alimentation et les Français montrent que le modèle alimentaire national est, à la quasi unanimité, autant une référence au quotidien qu’un sujet de fierté. Ainsi, 92 % des Français pensent que ce modèle est une composante essentielle du mode de vie « à la française », 88 % considèrent qu’une alimentation saine, variée et équilibrée est la meilleure manière de préserver sa santé et 75 % sont fiers des composantes de l’alimentation française (modèle alimentaire, savoir-faire, produits régionaux…). La conscience du « bon pour moi » s’affirme comme une tendance de fond que révèlent les critères d’achat où la qualité (composition des produits, valeur nutritionnelle…) prend de l’ampleur au détriment du prix, même si celui-ci reste prioritaire (66 % aujourd’hui contre 73 % en 2013). Enfin, l’indice de satisfaction vis-à-vis des produits progresse de +8 points sur les critères de goût, de qualité, de conservation et composition nutritionnelle.

grain De sucre n°37

ACTUALITÉ

exCèS aliMentaireS ou reStriCtionS ?

LA GUERRE DU MODÈLE ALIMENTAIRE FRANÇAIS N’AURA PAS LIEU ! À l’heure où les attaques contre certains aliments – et en premier lieu contre le sucre – se multiplient, des voix issues de différents milieux, y compris scientifiques, commencent à s’élever pour rappeler aux consommateurs une simple notion de bon sens : non aux comportements alimentaires extrêmes, oui à la prévention des excès, oui à une alimentation diversifiée, individualisée et sans interdits. oui au plaisir de manger.

i

ci un champion de tennis monte au sent l’une de l’autre dans un cercle compulsion d’autant plus bruyante que la filet pour promouvoir l’alimenta- vicieux dont l’individu est la seule frustration aura été longue et péniblement tion sans gluten ; là une actrice victime. Les spécialistes de l’alimenta- vécue. Le rattrapage calorique n’est pas déplore être « accro au sucre » tandis tion ont mis en lumière un phénomène proportionnel au déficit dû à la restriction qu’un de ses confrères déclare préalable. À l’opposé, la culpabilrenoncer au lactose comme on ité conduit le mangeur restreint entre en sacerdoce ; ailleurs une à tenter de surcompenser ses mère de famille transforme « une écarts alimentaires par une année sans sucre » en livre à fort privation exagérée, sans rapport tirage… Si de telles prises de avec la régulation physiologique paroles n’engagent que leurs auexigée par l’organisme, mais teurs, on ne peut nier que les médavantage proportionnelle à dias leur offre une caisse de l’intensité de la culpabilité résonnance que les scientifiques les ressentie. »1 Objet de toutes les attentions, plus qualifiés pourraient parfois l’aliment que l’on supprime de leur envier ! son alimentation est un arbre Gluten, sel, sucre, beurre, lait, qui cache la forêt. Des études banane… la liste des ingrédients et menées aux États-Unis sur les aliments ciblés par les régimes personnes suivant des régimes bannissant une ou plusieurs à faibles apports en sucres ou composantes ne cesse de s’allonger en graisses (low carb/low au gré des modes et au nom de préfat) ont aussi montré qu’à force tendus bénéfices que les consommade se focaliser sur un teurs sont supposés en retirer. ingrédient, le mangeur relâche Évidemment à tort car, en dehors son attention sur les autres des cas particuliers diagnostiqués composantes de son hygiène par la médecine (pathologies, : hausse de la intolérances, allergies…), les nutriEn focalisant son attention sur certains ingrédients, alimentaire consommation d’alcool, recul tionnistes sont unanimes quant à la de la diversité, pratique règle de base de l’alimentation le mangeur « restrictif » tend à oublier les autres humaine : pour être en bonne santé, composantes de son hygiène alimentaire quotidienne, culinaire simplifiée, plaisir de manger dilué, moindre il faut manger de tout et en quan- notamment l’activité physique. exercice physique… Sans tités raisonnables tout en pratiquant psychologique appelé « restriction oublier la frustration qui expose aux une activité physique régulière. cognitive » qu’ils définissent ainsi : « le épisodes de surcompensation. Tension et relâchement couple frustration-culpabilité est un Ignorer – ou feindre d’ignorer – ce dérégulateur puissant des mécanismes de De l’individuel principe engendre deux attitudes régulation. La lutte permanente du sujet extrêmes et opposées : excès alimentaire contre ses envies de manger provoque une au collectif d’une part, privation d’autre part. frustration gonflant comme une vague Au-delà des risques que les restrictions, Comble de l’absurdité, elles se nourris- qui viendra ensuite éclater dans une anathèmes et autres interdits font peser octoBre 2015

3

Sous le régime du rire

Témoignant d’un début de prise de conscience salutaire, les modes du « sans sucre », « sans gluten » et autres régimes « détox » commencent à faire sourire la population des jeunes urbains branchés qui ont eux-mêmes contribué à les lancer. Ainsi, le très « bobo » magazine satirique Gorafi.fr a publié sur Internet, en juin dernier, un article parodique sur le sujet, dont voici un court extrait : « sans gluten, sans sucre, sans huile et sans lactose, le gâteau-minceur était en fait un bout de carton […] Le ministère de la santé a appelé les jeunes urbains touchés par cette mode à faire preuve de plus de discernement dans leurs choix nutritifs, et à se tourner à nouveau vers des aliments normaux. »

sur les comportements individuels, la question mérite également d’être examinée au niveau collectif. Si la prise en compte des pathologies liées aux excès alimentaires (obésité, diabète de type 2, affections cardio-vasculaires…) est, à juste titre, un enjeu prioritaire de santé publique, ces situations spécifiques ne peuvent être utilisées comme jalons au niveau de la population toute entière. Particulièrement en France et dans les pays européens où la grande majorité des habitants adhère à des modèles alimentaires basés sur la diversité des aliments, sur la régularité des repas et sur des rations alimentaires adaptées aux besoins de chacun. Avec l’accumulation de messages stigmatisant tel ou tel aliment, de nouveaux convives – nettement moins fréquentables – s’invitent à table : stress, confusion, peur de ne pas bien faire, culpabilité… Tiraillé entre des injonctions « collectivisées » et ses propres repères, le consommateur développe autour de son alimentation une anxiété qui s’ajoute à d’autre facteurs anxiogènes (difficultés économiques, instabilité géopolitique, dégradation de l’environnement et du climat…). Or le stress « de masse » est l’une des pires menaces qui puisse peser sur l’équilibre alimentaire individuel.

La consommation excessive est un phénomène qui est apparu aux ÉtatsUnis dans les années d’après-guerre. Il procède d’un double mécanisme : pour soutenir l’économie, les Pouvoirs publics encourageaient les « bons Américains » à consommer beaucoup ; de leur côté, pour se rassurer et s’assurer de ne manquer de rien, les consommateurs commençaient par bien remplir leur assiette. Ce paradigme a inévitablement provoqué une inflation des portions alimentaires qui ont elles mêmes engendré les graves problèmes de santé publique auxquels l’Amérique est aujourd’hui confrontée.

À chacun sa « juste portion », à chacun son « juste sucre » Pour renverser la tendance, l’Amérique s’est jetée à corps perdu dans les interdits, les restrictions et la culpabilisation des populations les plus exposées. Une stratégie d’urgence dont l’efficacité à terme restera à démontrer... De plus, la situation d’outre-Atlantique n’est pas transposable au Vieux Continent. En effet, outre le caractère protecteur du modèle alimentaire français (qui reste le cadre de référence dans la grande majorité des foyers), la tendance à consommer des « justes portions »

semble s’être naturellement installée au sein de la population. Certes, la crise économique et la sensibilisation au gaspillage sont passées par là, mais comme l’a montré Pierre Chandon, spécialiste de l’impact du marketing sur les comportements alimentaires (Insead), d’autres facteurs contribuent à enraciner cette tendance : la recherche hédonique, le bon sens et les représentations d’une certaine qualité de vie associant plaisir et santé. Choisir des aliments un peu plus onéreux mais en plus petite quantité, s’offrir des petits plaisirs occasionnels, partager des mets gourmands dans des moments d’exception : telle sera probablement la voie de l’avenir pour éviter les excès. Les industries alimentaires, si souvent stigmatisées, accompagnent cette tendance en proposant des recettes, des conditionnements et des portions adaptées à ces nouvelles demandes placées sous le signe du plaisir et du discernement. Chez les artisans des métiers de bouche et les observateurs de la vie gastronomique, les prises de position contre les attitudes extrémistes et dénigrantes se multiplient. Même les humoristes s’y mettent (voir cicontre). Enfin, les nutritionnistes prennent soin de rappeler qu’une personne ne présentant pas de contre-indication médicale spécifique peut manger de tout, à condition que ce soit en quantité raisonnable, y compris des produits sucrés c a r ce l a co n t r i b u e à l ’é q u i l i b re psychologique ; et même du sucre en poudre si cela permet de consommer des fraises, un pamplemousse ou des endives ! Écouter ses propres besoins, faire confiance à ses goûts, tester ses talents culinaires et, surtout, se méfier des extrêmes. C’est sur ces bases solides, reconnues et partagées que nous éviterons de mettre en péril le modèle alimentaire français. 1 source : groupe de réflexion sur l’obésité et le surpoids, association de thérapeutes – médecins généralistes et spécialistes, psychologues, diététiciens, paramédicaux – ayant à prendre en charge des personnes en difficulté avec leur poids et leur comportement alimentaire (www.gros.org)

Les Français avalent de plus en plus mal les régimes forcés

Qu’ils concernent l’alimentation, les modes de vie, l’utilisation d’Internet ou encore la conduite, les interdits et contraintes qui se multiplient et pèsent sur le quotidien des Français sont de plus en plus mal perçus par celles et ceux que ces injonctions sont censées protéger. Selon un sondage réalisé par l’institut Viavoice* pour La Revue civique, les deux tiers des interrogés déplorent l’accumulation de restrictions et de réglementations qui sont ressenties comme autant « d’atteintes aux libertés individuelles ». Plus préoccupant, 45 % sont convaincus que les interdits donnent envie de

4

« faire le contraire », ce qui, dans le domaine de l’alimentation, confirme pleinement les alertes formulées par les nutritionnistes et les spécialistes des comportements alimentaires. Enfin, 48 % jugent que les mesures restrictives sont inefficaces, et les deux tiers considèrent que la prévention doit passer avant la répression. Si les Français ont la réputation de manifester leurs humeurs, ils prouvent aussi qu’ils savent exprimer leur pleine conscience des responsabilités individuelles. * Source : Le Figaro, 7 juillet 2015

grain De sucre n°37

AGRICULTURE

LA BETTERAVE SUCRIÈRE FACE AU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE L’agriculture s’inscrit au cœur des enjeux mondiaux qui seront débattus à Paris, fin 2015, lors de la conférence des nations unies sur le réchauffement climatique (coP 21). un sujet complexe dans la mesure où l’agriculture est à la fois source de gaz à effet de serre et victime des évolutions climatiques. Pour en limiter les impacts et réduire les émissions, le monde agricole dispose de solutions opérationnelles. La culture betteravière en offre des exemples concrets.

«

Le dérèglement climatique favorise l’alternance d’épisodes de sécheresse et de phénomènes météorologiques violents. OCTOBRE 2015

L’augmentation du CO2 et, à un moindre degré, des autres gaz à effet de serre est incontestablement due à l‘activité humaine », indiquait l’Académie des sciences dès 2010 dans son rapport sur le changement climatique. Si l’effet de serre est avant tout un phénomène physique naturel qui permet à l’atmosphère de réchauffer la Terre et de limiter les variations de température, il existe un effet de serre additionnel dit « anthropique », car lié aux gaz produits par les Hommes : vapeur d’eau, dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote, ozone... Ce sont les fameux gaz à effet de serre (GES) qui sont, pour partie, à l’origine du réchauffement global de la planète et des évolutions climatiques. Ainsi que le rappelle Hervé Escriou, responsable du Département scientifique de l’Institut technique de la

betterave (ITB), « l’élévation de la température moyenne nationale est de l’ordre de +1,5°C sur les quinze dernières années, et les scénarios de croissance climatique prévoient +1 à +2°C d’ici à 2050. De plus, cela s’accompagne d’importants changements au niveau des précipitations. Bien que les volumes d’eau restent globalement identiques, leur répartition évolue, avec une alternance d’épisodes de sécheresse et de phénomènes extrêmes (orages, pluies diluviennes) qui génèrent des dégâts : destruction partielle des cultures, ruissellement, dégradation des sols… »

Prévenir et esquiver les conséquences du réchauffement Comme la plupart des cultures végétales, la betterave sucrière est exposée aux conséquences des évolutions climatiques. 5

AGRICULTURE

Le développement d’une agriculture de précision soutenue par les hautes technologies est un des leviers que la culture betteravière met à profit pour prévenir l’impact des évolutions climatiques et réduire son bilan carbone.

Dans un premier temps, on a constaté que celles-ci pouvaient avoir un aspect bénéfique en termes de rendements en sucre. « En effet, explique Hervé Escriou, l’augmentation des températures et du taux de CO2 dans l’atmosphère stimule la photosynthèse qui, de fait, favorise le développement de la biomasse et accroît les quantités de sucre stockées dans chaque plante. On estime ainsi que le réchauffement climatique serait, pour moitié, à l’origine de la progression des rendements enregistrés depuis les années 1990. L’autre facteur permettant d’expliquer les performances de rendements de la filière betterave-sucre française1 réside dans les progrès accomplis aux niveaux de la génétique (sélection variétale) et des pratiques culturales. » Reste que ce coup de pouce est à double tranchant dans la mesure où le réchauffement climatique peut également pénaliser les cultures : non seulement les épisodes de sécheresse freinent le développement de la plante, mais en plus, elle cesse complètement de pousser à partir de 35°C. À moyen terme, le stress hydrique associé à des températures élevées représente donc une réelle menace pour la betterave sucrière, et cela même dans ses zones de prédilection, la moitié nord de la France, qui lui sont 6

traditionnellement favorables en raison d’un climat tempéré et des bons niveaux de précipitations. Afin de répondre à cette situation, les acteurs du monde betteravier (planteurs, semenciers, chercheurs…) ont mis au point des stratégies visant à doter les plantes de moyens de défense accrus. Cela se traduit tout d’abord sur le terrain, avec un décalage des cycles culturaux afin d’éviter les épisodes de sécheresse en fin de saison. Lorsque les conditions le permettent (absence de gelées, sols non détrempés), les semis sont effectués la première quinzaine de mars, soit avec presque un mois d’avance par apport aux dates habituelles. Ensuite, la recherche travaille en permanence à la mise au point de variétés mieux tolérantes au stress hydrique et de variétés plus résistantes à certains parasites et autres maladies dont les modifications du climat favorisent l’apparition ou la prolifération.

Réduire les émissions de gaz à effets de serre Enfin de nouvelles pratiques culturales sont mises en œuvre afin de répondre, plus spécifiquement, aux défis posés par des sols très secs. « La sécheresse complique

la lutte contre les adventices (mauvaise herbes), confirme Hervé Escriou. Les désherbants sont moins efficaces, et pour ne pas recourir à une augmentation des doses de produits, les agriculteurs privilégient aujourd’hui les techniques de binage et de désherbage mécanique. » Cette initiative s’inscrit dans une dynamique plus large, portée par le rapide développement de nouvelles pratiques culturales et de « l’agriculture de précision », dont l’objectif est de réduire l’impact climatique et environnemental. Au niveau mondial, l’agriculture est en effet le troisième secteur émetteur de GES, loin derrière l’industrie et les transports, avec environ 12 % des émissions globales. Si elle produit peu de CO2, elle délivre en revanche des gaz dont l’impact est supérieur en terme de réchauffement. Principalement du méthane (CH4), généré par l’élevage (fermentation entérique des ruminants, fumiers), qui représente 56 % des émissions agricoles2. Puis, dans une moindre mesure, du protoxyde d’azote (N2O), issu de l’épandage d’engrais de synthèse nécessaires aux cultures (13 %)2. Le dioxyde de carbone est, quant à lui, produit par les équipements motorisés, le chauffage des serres et bâtiments et par la combustion de résidus. grain De sucre n°37

Les cultures végétales disposent, par ellesmêmes, d’un premier atout pour rééquilibrer leur « bilan CO2 » grâce à la photosynthèse chlorophyllienne, qui est un allié redoutablement efficace pour capter et stocker du gaz carbonique. Cet avantage se traduit à deux niveaux. D’une part, les surfaces cultivées contribuent activement à la réduction globale des gaz à effet de serre. D’autre part, les ressources végétales utilisées à des fins non alimentaires (biocarburants, chimie verte…) n’augmentent pas, à la fin de leur cycle d’usage, la quantité de GES émis dans l’atmosphère, à la différence des ressources extraites du sol. En France, au-delà de ces acquis, les agriculteurs se sont mobilisés de longue date pour mettre en place des techniques et des pratiques ayant un impact positif au plan environnemental, et plus spécifiquement au niveau des émissions de N2O. Au cours des quinze dernières années, les apports d’azote minéral ont été réduits de 30 % sur l’ensemble des grandes cultures et, pour la betterave sucrière, la baisse atteint 44 % sur quarante ans3. La quantité annuelle de N2O émise par l'agriculture française est ainsi en baisse de 17 % par rapport à 1990, et celle de CH4 a diminué de 2 %4. D'autre part, la progression des rendements en betteraves (+ 1,1 t par hectare et par an au cours des trente dernières années) se traduit par une augmentation des quantités de CO2 stockées par hectare, et donc par une participation accrue à la réduction des émissions globales de CO2.

Une agriculture de pointe Afin de rendre les apports d’azote plus efficients, autrement dit afin d’apporter moins d’azote à

productivité égale, de nouveaux protocoles sont mis en place, comme les cultures intermédiaires (couverts végétaux provisoires qui fixent l’azote sur le sol entre deux cultures), le pilotage de précision (qui adapte les interventions et les apports au juste besoin), ou encore l’enfouissement localisé (l’engrais n’est pas épandu mais déposé au niveau de la graine). Les bénéfices environnementaux de ces pratiques culturales ont été formellement identifiés : diminution des pertes d’azote par volatilisation dans l’air, baisse des rejets de microparticules, réduction du phénomène de lessivage des nitrates vers les nappes phréatiques... Parallèlement, ces techniques diminuent le nombre de passages sur les parcelles, ce qui engendre une moindre consommation de gazole et donc moins de rejets de CO2… Et les résultats sont là. En France, les émissions de GES d’origine agricole ont chuté de 10 % entre 1990 et 20155. Enfin, plus en aval, les différents acteurs de la filière sucrière investissent et se mobilisent eux aussi, au niveau des activités industrielles et logistiques, pour abaisser le bilan carbone du sucre qui arrive sur la table des consommateurs (voir Grain de sucre n°35). À l’heure où le monde entier s’apprête à converger vers la France pour débattre du réchauffement climatique, la culture betteravière française s’inscrit résolument à la pointe d’une course de vitesse à laquelle le monde agricole entend apporter toute sa contribution. 1 avec des rendements de l’ordre de 13 tonnes de sucre par hectare, la France se situe dans ce domaine au premier rang européen. 2 source : Fao 3 source : colloque syndicat des énergies renouvelables-France Biomasse énergie, 30 juin 2015 4 source : rapport cgaaer, octobre 2014 5 source : inventaire France, périmètre Kyoto, citePa/meDDe, avril 2014

Mesure de la teneur en sucre des betteraves dans une sucrerie. Si l’augmentation des températures favorise, jusqu’à un certain niveau, la concentration en sucre, elle peut également nuire au developpement de la plante.

Canne à sucre et autosuffisance énergétique

Sous d’autres latitudes, la canne à sucre participe elle aussi à la lutte contre le réchauffement climatique. Sur l’île de La Réunion, les acteurs de la filière canne-sucre ont choisi de faire porter leurs efforts sur l’optimisation énergétique. Depuis plus de 25 ans la bagasse (résidus de la canne après extraction du sucre) est utilisée comme combustible pour produire de l’énergie électrique et de la vapeur.

Non seulement ces énergies renouvelables couvrent la totalité des besoins des deux sucreries de l’île mais en plus le dispositif, excédentaire, permet d’alimenter le réseau local d’électricité pendant la campagne sucrière. Sachant qu’une tonne de bagasse équivaut à 260 kg de charbon ou 180 l de fioul, la bagasse se substitue ainsi aux combustibles d’origine fossile pour délivrer, au final, un bilan CO2 neutre. Côté pratiques culturales, tout comme pour la culture betteravière, les techniques mises en œuvre pour la production de canne à sucre évoluent elles aussi. Par exemple, en gérant au mieux le paillis laissé au champ, il est possible de limiter l’enherbement tout en fournissant du fourrage aux filières locales d’élevage. Les co-produits des sucreries (écumes, cendres de bagasse) sont utilisés pour réduire la fertilisation minérale. D’autres projets sont à l’étude comme des méthodes alternatives de lutte contre les mauvaises herbes avec l’utilisation de plantes de « services » ou encore l’application des techniques culturales simplifiées pour réduire le nombre de passages des tracteurs.

Enfin, côté prévention des impacts climatiques, la filière canne-sucre réunionnaise bénéficie avec eRcane d’une structure de recherche dont les travaux d’amélioration variétale permettent de mettre à la disposition des planteurs des variétés de cannes à sucre capables de s’adapter aux évolutions du climat et aux conditions de culture à échelle locale.

OCTOBRE 2015

7

INTERVIEW

UN ENTRETIEN AVEC

Régis Bigot Directeur général du Crédoc Le Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie est un organisme d’études et de recherche dont l’acronyme, « Crédoc », est bien connu du grand public et dont les expertises sont sollicitées par de multiples acteurs, privés ou publics. Dédié à la compréhension et à l’anticipation du comportement des individus dans toutes leurs dimensions, le Crédoc apporte régulièrement des éclairages utiles aux débats sur l’alimentation. Rencontre avec son nouveau directeur général, nommé en février 2015, Régis Bigot. GrAIn De SUCre. Quels sont la vocation et le champ d’action du Crédoc ?

régis Bigot. Le Crédoc est un organisme créé en 1954 et financé, à l’origine, par l’État qui s’est progressivement désengagé. Aujourd’hui, ses ressources proviennent en quasi-totalité des contrats signés avec ses clients, issus de la sphère publique ou privée : ministères, administrations, organismes, fédérations professionnelles, entreprises de tous secteurs... La vocation du Crédoc est d’apporter du sens aux données dans un monde où leur multiplication est exponentielle, à tel point que 90 % des données existant actuellement ont été produites dans les deux dernières années… La spécificité du Crédoc réside dans sa capacité à analyser ces données, les contextualiser et les mettre en perspective pour, au final, apporter des réponses à nos commanditaires sur les sujets qui les intéressent. Ainsi, notre rôle est de les accompagner dans la définition de la problématique, puis de mettre les moyens nécessaires pour produire et analyser les données, puis de les conseiller dans les prises de décision qui en découlent.

GDS. Ses méthodes et ses missions ont-elles évolué au fil des années ?

rB. Avec l’apparition du Big Data, nos méthodes ont été profondément bouleversées. Par le passé, il fallait lancer des enquêtes spécifiques pour collecter des données ; désormais le défi consiste à savoir les trouver dans la masse de données produites par le numérique en immense quantité et en temps réel. Par exemple, dans le champ de la consommation, des centaines de milliers de données sont générées à chaque instant par les multiples capteurs numériques (tickets de caisse, factures, billetteries…), mais aussi par d’autres supports comme les forums d’échanges sur Internet, dont les contenus publics peuvent être analysés. Pour identifier, organiser et traiter toutes ces données, nous disposons

8

grain De sucre n°37

d’outils adaptés (serveurs, logiciels puissants…), d’experts dédiés à chaque domaine d’étude et nous développons des partenariats avec des acteurs spécialisés, à l’image de Datastorm, filiale du GENES1, qui dispose de moyens informatiques considérables.

GDS. Le champ alimentaire nécessite-t-il des dispositifs spécifiques ?

rB. Il y a quarante ans, nous avons créé « l’Observatoire des conditions de vie et des aspirations des Français », un outil de compréhension de la société sur une période longue qui est actualisé tous les six mois, ce qui permet notamment de distinguer les épiphénomènes des mouvements majeurs. Par ailleurs, nous avons mis en place, depuis 1992, un observatoire recentré sur la consommation au sens large, puis un baromètre plus spécifique, dédié à la consommation alimentaire : l’enquête « Comportements et consommations alimentaires en France » (CCAF), dont l’origine remonte à 1988. Ces trois dispositifs nous permettent d’appréhender les phénomènes et tendances liés à l’alimentation à différents niveaux. Ils peuvent alors être complétés par des enquêtes, panels et autres suivis de cohortes qui vont permettre d’affiner les données au plan qualitatif et sur des problématiques ciblées.

GDS. Comment ces études sontelles utilisées ?

rB. Pour être intéressante, l’analyse doit déboucher sur des modélisations, sur de la prospective à moyen et long termes et, de plus en plus fréquemment, sur des aides à la décision. Le Crédoc est, à ce titre, amené à émettre des recommandations dont la légitimité s’appuie sur une expertise, une antériorité et une maîtrise scientifique des données qui nous permettent d’avoir un point de vue sur les problématiques qui nous sont soumises. Cette mission de conseil prend une importance croissante.

GDS. Le fait de travailler sur les mêmes sujets avec les acteurs publics et privés ne pose-t-il pas la question des conflits d’intérêt potentiels ?

rB. Chacune de nos missions est menée dans les règles de l’art et dans le respect de notre charte de déontologie. D’ailleurs, les données scientifiques sont les mêmes pour tout le monde : nous ne produisons que la vérité des chiffres ! S’il est vrai que nous ne sommes pas maîtres des utilisations qui peuvent être faites de n o s ré s u l t a t s , n o u s v e i l l o n s scrupuleusement à ce que ceux-ci ne fassent pas l’objet de publications

OCTOBRE 2015

parcellaires, décontextualisées ou risquant d’en dénaturer les enseignements. En cas de publication biaisée, nous pouvons être amenés à rendre publique la totalité de l’étude concernée. Ce recours est inscrit dans notre charte comme dans les contrats passés avec nos clients. GDS. La règle s’applique donc à l’alimentation, qui est au cœur d’enjeux et de débats multiples…

rB. L’alimentation est effectivement un thème qui intéresse beaucoup de monde, aussi bien les décideurs de la vie publique concernés par les comportements alimentaires que les industries alimentaires, l’agriculture, la distribution, etc. Le Crédoc met à la disposition de chaque instance qui en fait la demande des données spécifiques, issues des enquêtes nationales CCAF et Inca2, comme c’est régulièrement le cas pour la filière sucre.

GDS. Dans quel but et avec quelle méthode ?

rB. L’objectif est d’avoir une vision des quantités consommées à tel ou tel moment de la journée, par telle ou telle personne. La méthode consiste à analyser la consommation quotidienne de différentes catégories de population en nous appuyant notamment sur des tables de passage entre les aliments et leur composition nutritionnelle, ce qui permet de prendre en compte les différents sucres et d’aboutir à une évaluation fiable des niveaux de consommation.

GDS. Votre champ d’étude peut-il excéder l’Hexagone afin de prendre en compte d’autres modes de consommation ?

rB. Absolument. Le Crédoc est membre du réseau européen ENSR3, qui réunit des organismes d’études et de recherche d’une vingtaine de pays. Ce dispositif nous permet de mobiliser des ressources supplémentaires et d’accéder à des cultures diversifiées. Cette possibilité est particulièrement intéressante dans un domaine comme l’alimentation, car la consommation n’a pas le même sens en Grande-Bretagne, en Italie, à Malte ou en Pologne. Des programmes d’études sont actuellement engagés sur ces sujets avec plusieurs pays. Les résultats de ces comparaisons ne manqueront pas d’intéresser, dans chaque pays, les acteurs concernés par les questions alimentaires… 1 groupe des écoles nationales d’économie et de statistiques 2 enquête de consommation alimentaire diligentée par l’anses 3 european network for social and economic research

9

DÉCOUVERTE

LE GLUCOSE DANS LE SANG le glucose est une source d’énergie indispensable au bon fonctionnement des muscles et du cerveau. l’organisme « fabrique » le glucose à partir des glucides présents dans l’alimentation puis, selon les besoins, il est utilisé comme « carburant » ou stocké en réserve dans le foie et les muscles. le glucose est véhiculé par le sang. afin de maintenir un apport d’énergie constant, la glycémie (taux de glucose dans le sang) est régulée par l’insuline, une hormone produite dans le pancréas. Dans les conditions normales, la glycémie se situe autour de 1 g/l à jeun. le diabète se caractérise par un excès de glucose dans le sang ou hyperglycémie. un diabète est avéré lorsque la glycémie à jeun est égale ou supérieure à 1.26 g/l à deux reprises, ou égale ou supérieure à 2 g/l à n’importe quel moment de la journée.

LE DIA

1,2 HY

IE

YCÉMIE RGL PE

OG HYP LYCÉM

0,8

ORIGINES ET RÉ MALADIE MIE

g/l

LE DIABÈTE DE TYPE 2 BEAUCOUP PLUS PRÉSENT

Le diabète de type 1 ne représente que 10 % des cas, le diabète de type 2 représente 90 % des cas

le diabète est un dysfonctionnement des mécanismes de régulation du taux de glucose dans le sang. Cette maladie, dont il existe plusieurs origines et plusieurs formes, n’est pas causée par la consommation de sucre.

3

MILLIONS

DE PERSONNES DIABÉTIQUES

(5% DE LA POPULATION

EN MÉTROPOLE, 8% dans les DOM-TOM)

10

grain De sucre n°37

LES DIFFÉRENTS DIABÈTES DIABÈTE DE « TYPE 1 »

Maladie auto-immune d’origine génétique ou infectieuse apparaissant dès l’enfance. les cellules sécrétrices d’insuline du pancréas sont détruites. injections quotidiennes d’insuline pour maintenir la glycémie dans les zones norrmales.

DIABÈTE DE « TYPE 2 »

Maladie apparaissant au cours de la vie, principalement en cas de surpoids associé à un manque d’activité physique. etat d'insulino-résistance et baisse de l'insulino-sensibilité : l’action de l’insuline est moins efficace et le taux de glucose ne peut plus être régulé correctement. Équilibre nutritionnel, activité physique, traitements pharmaceutiques.

BÈTE ALITÉS D’UNE UX CONNUE Si les médecins et les diabétiques connaissent bien cette réalité, les relations entre sucre et diabète restent cependant une source de confusion pour une grande partie de la population.

SUCRE ET DIABÈTE Contrairement aux idées reçues, les sucres ne sont pas impliqués dans l’apparition du diabète et la consommation de sucre et de produits sucrés n’est pas interdite aux diabétiques. les recherches scientifiques menées sur l’absorption et la digestion des glucides ont permis d’adapter les conseils alimentaires pour les diabétiques. ils redonnent notamment une place aux produits sucrés dans le cadre d’apports contrôlés au sein d’un repas. OCTOBRE 2015

DIABÈTE « GESTATIONNEL »

la grossesse est, par nature, une période d’insulino-résistance qui peut déclencher un état diabétogène. le diabète gestationnel toucherait entre 2 et 6 % des femmes enceintes en France. le diabète disparaît après la grossesse, sauf si cet épisode révèle un diabète déjà présent et non identifié.traitements pharmaceutiques. alimentation et activité physique adaptées, insuline si nécessaire, surveillance péri-natale.

Comme pour toute la population, les glucides doivent représenter 50 à 55 % des apports énergétiques quotidiens du diabétique.

les personnes diabétiques doivent éviter de consommer des aliments et boissons sucrés entre les repas.

le diabétique doit surveiller sa glycémie afin d’éviter des hypoglycémie ou hyperglycémies.

11

FILIÈRE

Page ci-contre : le terminal sucrier du port de rouen. Ci-dessus : l’expédition du sucre par bateau s’effectue dans des conteneurs vrac protégés ou en sacs de 50 kg qui peuvent être conditionnés sur place.

leS terMinaux SuCrierS en FranCe

CAP SUR L’EXPORT afrique du nord, moyen orient, pays de l’union européenne et du bassin méditerranéen… Les débouchés internationaux du sucre fabriqué en France sont multiples. grâce aux terminaux sucriers portuaires et terrestres, la filière est en mesure de répondre à une demande internationale de plus en plus exigeante et avec des volumes sans doute appelés à croître dans les prochaines années.

L

es expéditions de la filière betteravecanne-sucre française représentent actuellement 2,3 millions de tonnes par an, principalement à destination des autres pays de l’Union européenne et à hauteur de 330 000 t vers les pays tiers (hors UE)1. Pour assurer ces livraisons, l’industrie sucrière dispose de dispositifs logistiques adaptés, notamment des terminaux sucriers portuaires qui sont de véritables atouts stratégiques appelés à jouer un rôle croissant. En effet, à l’horizon 2017, le régime des quotas, qui encadre notamment les exportations de sucre communautaire, prendra fin2. Les producteurs français, tout comme leurs homologues européens, pourront alors exporter sans être contraints par un plafond jusqu’alors fixé par l’Organisation mondiale du commerce. Afin de tirer parti de cette opportunité et de se préparer à affronter la concurrence sur les marchés extérieurs, les acteurs et partenaires de la filière sucrière en France ont développé, au cœur de plusieurs sites portuaires, des infrastructures dédiées à leur produit et offrant des capacités de stockage significatives (voir encadré). Implantés à Calais, Dunkerque, Le Havre et Rouen, ces terminaux sucriers sont, de fait, proches des zones de production sucrière et sont conçus comme de véritables « hubs » ou

OCTOBRE 2015

plates-formes d’échanges multimodales qui, outre l’accès qu’elles offrent sur les voies maritimes, peuvent être approvisionnées par voie routière ou ferroviaire3. Ainsi que l’explique le dirigeant d’une importante structure portuaire, « à la différence d’autres matières premières agricoles comme les céréales, le transport, le stockage et la manipulation du sucre nécessite des précautions très particulières, notamment au plan sanitaire, qui sont d’ailleurs encadrées par la réglementation européenne. De plus, les clients des marchés export ont fortement augmenté leurs exigences qualitatives au cours des dernières années. Aussi, pour répondre à toutes ces contraintes, les terminaux sucriers français ont su se conformer à des normes de très haut niveau. »

Des infrastructures performantes et réactives Dans la pratique, dans un même terminal sucrier, le sucre issu de fabricants différents ne peut être mélangé au sein d’un même silo. Il existe par conséquent deux catégories de terminaux : ceux dédiés à un unique opérateur, dont la production peut être stockée dans un ou plusieurs silos, et ceux dont les silos sont fractionnés en cellules individualisées, qui peuvent alors accueillir du sucre de différentes provenances.

Les terminaux sucriers sont des plates-formes logistiques multimodales et de grande envergure dédiées aux performances de la filière à l’export.

13

Sur la route de l’Espagne... En complément des

infrastructures portuaires, la

France dispose également de

terminaux sucriers terrestres,

notamment à Cestas, en Gironde, et sur le Distriport du Boulou,

dans les Pyrénées-Orientales. Le second a la particularité d’être à proximité de la frontière

espagnole, sur un ancien site des

Douanes françaises reconverti en une vaste plate-forme logistique multimodale et multisectorielle.

Le terminal sucrier y a été créé en 1994 afin de répondre aux

besoins du marché espagnol. Il

gère aujourd’hui la quasi-totalité

des flux de sucre à destination de ce pays. Les réseaux ferroviaires de part et d’autre des Pyrénées ne présentant pas les mêmes

écartements de rails, le système du hub s’est imposé comme solution alternative au

changement d’essieux des trains. Avec ses quatre cellules

compartimentées, Le Boulou est en mesure d’accueillir le sucre

des différents fabricants français. Il est acheminé par train, puis

stocké avant d’être réexpédié par

voie routière, en camions citernes ou en « big-bags » conditionnés sur place.

Silos sucriers sur le terminal du Boulou.

Terminal sucrier du port de Calais.

L’expédition du sucre par bateau s’effectue soit en vrac, grâce à des conteneurs de 23 ou 25 tonnes équipés de protections spécifiques et dédiés exclusivement à cette utilisation, soit par sacs de 50 kg. Généralement, le vrac est destiné à un client industriel unique, tandis que les sacs peuvent être dispatchés à l’arrivée. Afin de réaliser des ensachages à la demande, les terminaux portuaires disposent d’équipements de conditionnement adaptés. Reste qu’avant de prendre la mer, le sucre doit être acheminé depuis les sucreries vers les terminaux. « Ce volet logistique est un véritable challenge dans la perspective d’une hausse des exportations, souligne notre interlocuteur. Le rail reste le mode de transport privilégié, car un train est capable de transporter à lui seul 1 200 tonnes de sucre en une nuit. Cependant, il faudra vraisemblablement renouveler et agrandir le parc de wagons, sachant que le transport du sucre requiert des wagons spécifiques, tout comme le transport routier s’effectue avec des citernes réservées exclusivement aux denrées alimentaires. » Au-delà des défis qu’elle s’applique à relever, la filière sucre française est dorénavant prête à servir plus largement ses marchés export en s’appuyant sur ses hubs portuaires et terrestres. Pour preuve, en 2014, le port de Rouen a enregistré un trafic de 100 000 t de sucre au départ, mais le site a la capacité de monter à 450 000 t par an. Un exemple qui donne une idée de la marge de manœuvre dont dispose la filière lorsque le moment de hisser les voiles sera venu.

terminal sucrier portuaire terminal sucrier terrestre

Calais

67 000 t Le Havre

45 000 t

s’adapter aux règles de l’OMC. Les quotas de production ont été abaissés et les exportations plafonnées. Ce régime prendra fin au 30 septembre 2017.

3 Pour des raisons techniques, réglementaires et de compétitivité, la voie fluviale n’est pas adaptée au transport du sucre, qui nécessiterait alors des barges spécifiques et réservées à cette utilisation.

Dunkerque

83 000 t

rouen

60 000 t

Cestas

17 000 t

Le Boulou

8 000 t

1 Source : Cedus, Mémo statistique, mai 2015

2 En 2006, le régime sucrier européen a été réformé pour

14

Capacité de stockage des principaux terminaux sucriers en France, en 2015

NB : Les terminaux sucriers peuvent être exploités soit directement par un groupe sucrier, qui en est alors propriétaire, soit par une société spécialisée qui offre ses services à une ou plusieurs sociétés. sources : données opérateurs

grain De sucre n°37

Santé express

Score nutritionnel et étiquetage Le CnA évoque la complexité du sujet…

Dans le contexte de la préparation de la prochaine Loi de santé publique, l’article relatif à l’information nutritionnelle sur les produits alimentaires a fait l’objet d’une note de questionnement rédigée par le Conseil national de l’alimentation. Le CNA attire l’attention des parties prenantes sur « la complexité des questions à étudier avant de choisir un éventuel système d’information nutritionnelle graphique ou symbolique. » Il considère ainsi nécessaire de prendre le temps d’étudier les différentes options possibles et leurs impacts dans le contexte français afin de construire un système pertinent eu égard aux objectifs politiques fixés, lesquels devant être également précisés. S’appuyant sur des études scientifiques, sociologiques et économiques, avec un éclairage spécifique sur les populations précaires, le CNA dresse un panorama des multiples paramètres du problème et en appelle à la conduite d’une expertise scientifique collective complémentaire.

… l’Anses rend un avis mitigé

C’est dans ce même contexte que l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) a rendu, le 1er juin 2015, un avis scientifique sur la faisabilité technique du système d’information nutritionnelle proposé dans le rapport réalisé en 2013 par le professeur Hercberg. Basé sur le modèle britannique dit de « Rayner », ce système établit un score nutritionnel des aliments et les répartit en cinq classes de qualité nutritionnelle respectivement associées à une couleur. Selon l’Agence, la mise en œuvre d’un tel système « semble techniquement faisable », sachant qu’il manque encore des données permettant de calculer le score. En revanche, souligne l’expert, le système paraît « insuffisamment discriminant pour certaines catégories d’aliments ». Ainsi, pour les fromages, les matières grasses, les boissons sucrées, les compotes ou les produits chocolatés, la plupart des références se retrouveraient dans une à deux classes seulement.

…le HCSP se déclare favorable

Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) s’est prononcé, en août 2015, pour la mise en place d’un système d’information nutritionnelle basé sur un code à cinq couleurs. Tout en soulignant que le système « 5-C » a le mérite d'être simple et d' « attirer l'attention du consommateur », le Haut Conseil reconnaît néanmoins que ce dispositif n’est « pas parfait ». Par ailleurs, comme l’affirme un membre du HCSP, « il n’est pas question de dire qu’un aliment est bon ou mauvais, mais de donner un outil pour se repérer. »* * Source : AFP

Qui « zappe » le petit déjeuner ?

Bien que le modèle des trois repas par jour soit toujours suivi par la grande majorité des Français, une étude basée sur un échantillon de parisiens a constaté des évolutions que les chercheurs ont mises en relation avec des variables sociodémographiques et comportementales. Ces travaux montrent que 66 % des adultes étudiés prennent bien trois repas par jour, mais qu’un quart du panel sort du modèle en sautant le petit déjeuner. Surtout les jeunes célibataires correspondant à deux profils sociologiques très différents : soit des personnes ayant un bas salaire ou au chômage, soit de jeunes actifs, intégrés, ayant des contraintes de temps liées à leur travail. Cette modification des prises alimentaires va-t-elle se généraliser chez les jeunes urbains ? Vont-ils garder cette habitude en prenant de l’âge ou en changeant de statut familial ? Cette tendance va-t-elle s’étendre à d’autres profils, à d’autres classes d’âges et à d’autres populations (villes, campagne…) ? Avec quel impact sur l'état de santé des Français ? L'avenir et de nouvelles études sur la question se chargeront d’apporter les réponses… Source : PloS One, mars 2015

De l’influence de la téléréalité sur le comportement des mangeurs

La perte de poids, la consommation et l’image du corps sont des thèmes dont la téléréalité se nourrit avec délectation. Non sans effets dommageables sur les téléspectateurs, au moins en termes comportements alimentaires. C’est ce que conclut une équipe de chercheurs australiens qui ont eu l’idée de comparer l’influence de deux émissions typiquement anglo-saxonnes, l’une avec des candidats en surpoids engagés dans un challenge d’amaigrissement (The Biggest Loser), l’autre proposant un défi de transformation d’appartement (The Block). L’étude a mis en évidence que les jeunes téléspectatrices du panel les plus enclines à la restriction dans leur vie quotidienne étaient plus nombreuses à grignoter devant The Biggest Loser que devant le programme « déco ». Les auteurs de l’étude soulignent les effets négatifs sur l’humeur et l’image de soi de ce type d’émission centrées sur le poids ; ils émettent en outre l’hypothèse que le fait de voir à l’écran des sujets plus gros qu’elles inciterait certaines personnes à grignoter. Source : Appetite, août 2015 OCTOBRE 2015

15

CONSOMMATION

LA CONFITURE, UN UNIVERS EN ÉBULLITION Faite de sucre et de fruits, la confiture est à la fois un produit simple, authentique et chargé de symboles affectifs. c’est aussi une référence dans l’industrie agroalimentaire française, une source de créativité pour les artisans et un produit aussi traditionnel que résolument tendance pour les consommateurs. autant de facettes multiples qui, au final, en font un produit unique et aimé de tous. Plongée dans une bassine débordant d’arômes et de surprises.

D

e toute évidence, les Français ont une relation privilégiée avec la confiture. 70 % d’entre eux en achètent au rythme de sept fois par an, ce qui représente une consommation annuelle de 3,87 kg par foyer pour la seule confiture industrielle1, et 60 % en préparent à la maison, de temps en temps ou plusieurs fois par an2. La recette de base, bien connue des ménages, est on ne peut plus simple : des fruits, du sucre, un filet de citron et une bassine en cuivre pour la cuisson. La proportion généralement utilisée dans les foyers est de l’ordre de 800 g de sucre par kilo de fruit. Si cette règle peut varier selon les fruits et les goûts de chacun, la proportion de sucre doit rester suffisante pour que la confiture prenne, qu’elle se conserve et que les fruits gardent leur couleur.

Selon la réglementation, la confiture commercialisée sous cette appellation doit contenir au moins 45% fruits et 55% de sucres totaux.

16

Afin de protéger les caractéristiques et l’authenticité d’un produit aussi présent dans la vie quotidienne, la confiture vendue dans le commerce fait l’objet d’une réglementation très précise3, qu’elle soit d’origine industrielle ou artisanale. Ainsi, l'appellation « confiture » désigne une recette contenant au minimum 55 % de sucres totaux dans le

produit fini (sucres ajoutés et naturellement présents dans les fruits) et au moins 45 g de fruits pour 100g de matières premières mises en œuvre. Si le taux de fruits dépasse ce seuil, elle sera qualifiée « d'extra » ; si le taux de sucres est de 30 % inférieur à la moyenne, elle est dite « allégée ». Lorsque la purée de fruits est filtrée après une première cuisson pour ne conserver que le jus, c’est une « gelée », et si des agrumes remplacent les fruits comme ingrédient principal, la confiture devient une « marmelade ».

La qualité et la diversité font recette Côté industrie, les confitures répondant à cette appellation représentent une production annuelle de 135 400 tonnes pour un chiffre d’affaires de 465 millions d'euros (2014). Ce secteur très concentré (les quatre premiers acteurs produisent 83 % des volumes) est aussi un secteur exportateur qui affiche une balance commerciale aussi excédentaire que substantielle : 80 millions d'euros en 2014. En termes de ventes, la confiture « extra » s’arroge désormais 65 % des volumes. Comme le confirme Delphine Jayot, déléguée générale des « Groupes Fruits » de la Fédération des industries d'aliments conservés (Fiac), « la montée en puissance de la demande vers les produits premium, de plus en plus gourmands en fruits, est la tendance lourde de ce marché. » Côté artisanat, l’offre se déploie à travers grain De sucre n°37

La fabrication de confitures « maison » est une pratique répandue dans 60 % des foyers.

différents profils de fabricants (pâtissiers, confituriers spécialisés…) et circuits de distribution : boulangeries, épiceries fines, traiteurs, marchés… Quelle est l’envergure de la production ? S’il n'existe pas de statistiques dédiées, les observateurs considèrent qu'elle est vraisemblablement significative. De même, on ignore, faute de chiffres, combien les Français consomment réellement de confiture, tous modes de fabrication confondus… Il est en revanche acquis que la confiture est plus que jamais un produit tendance, qui s’inscrit à ce titre au cœur de l’engouement pour le « fait maison ». Facile à réaliser soi-même, la confiture se situe à la croisée d’aspirations dans l’air du temps : plaisir gourmand, partage, authenticité, recherche d’une alimentation simple, saine et goûteuse, écoute de la nature et des saisons... Les quelque 20 millions de bocaux vendus chaque année aux particuliers par le leader du secteur suffisent à en témoigner. « Bien qu’une part non négligeable des contenants pour confitures utilisés dans les foyers soient de la récupération, nos ventes ont progressé de plus de 40 % en 2014 par rapport à l'année précédente, et 2015 suit la même tendance, note un représentant de la marque Le Parfait. Pour autant, nous avons aussi connu des années à la baisse lorsque les récoltes de fruits étaient mauvaises… » Fabriquer ses confitures est donc une tendance de fond mais soumise à des variations conjoncturelles liées aux caprices de la nature. Et les consommateurs, comme les industriels et

La production industrielle de confitures s’élève, en France, à environ 135 000 tonnes par an.

OCTOBRE 2015

17

période la plus intensive de fabrication s'achève. Aux quatre coins de la France, les artisans confituriers vont alors à la rencontre du public. Par exemple aux Confituriades de Beaupuy (Lot-etGaronne) où depuis six ans, à la troisième semaine d’août, 8 000 à 10 000 personnes affluent. « C'est un public très intéressé, attentif, qui pose beaucoup de questions aux exposants », explique Christian Pezzutti, responsable de l'événement. Septembre offre deux événements incontournables : la Fête des confitures de La-Chapelle-desFougeretz près de Rennes, organisée depuis vingt ans, et le Festival des Confitures de Saloüel, proche d'Amiens.

À l’image du Festival des confitures de Salouël, dans la Somme, les manifestations dédiées réunissent un public toujours nombreux et passionné.

les artisans, le savent bien : la confiture est un art exigeant où seuls les fruits mûrs et de qualité sont éligibles. Tout comme la bassine de cuivre est utile car, au niveau chimique, les ions du matériau favorisent la prise de la confiture…

Une communauté d’amateurs passionnés Si les consommateurs aiment l’acheter ou la fabriquer et la consommer, ils aiment aussi en parler et la partager. Sur Internet, la confiture occupe une place importante dans les sites et forums culinaires. Non contents d’y échanger des recettes, ils échangent aussi leur

production. Surfant sur la vague de l’économie de partage, la marque Le Parfait a ainsi mis en ligne, depuis 2011 et avec succès, une plate-forme de troc (Bocalentroc). Les amateurs s’y échangent librement et gratuitement leurs productions, autant pour y faire des découvertes gourmandes que pour faire profiter d’autres personnes de leurs excédents. Toujours présente sur les salons et événements gourmands, la confiture bénéficie également de rendez-vous dédiés qui mobilisent un public toujours plus nombreux et averti. Tout particulièrement en fin d'été, quand la

Pour sa 21e édition, ce dernier a présenté en 2015 des parfums originaux, à base d’endive ou de géranium. « Ici, la soixantaine d’artisans confituriers exposants peuvent écouler jusqu’à 3 000 pots en deux jours, s’enthousiasme le président du Festival, Jean-Paul Plèze. Certains amateurs remplissent leurs coffres de voiture pour leur consommation annuelle, d'autres acquièrent toute la production, en série limitée, d'une saveur originale. De plus en plus de jeunes sont présents, attirés par les nouveautés, l'envie de savourer les meilleures confitures primées et de trouver des idées auprès des sommités qui sont présentes. » Car si le monde de la confiture artisanale s’est fortement professionnalisé au cours des dernières années, celui-ci reste toujours proche des consommateurs, simples curieux ou passionnés.

La ConFiturE S'émanCipE

Marie Maryns, Championne du monde des confitures en 2012.

18

Les chefs étoilés s'emparent de la confiture. Ils ne se contentent pas d'être jurés dans des concours de confitures, ils l'intègrent désormais dans leurs recettes, en pâtisserie mais aussi de plus en plus dans leurs plats salés. Marie Maryns, Championne du monde des confitures lors du Mondial d'août 2012, un temps fournisseur en confitures de Bernard Vaussion, ex-chef cuisinier de l'Élysée, est bien placée pour en témoigner. « Je travaille avec Joël Robuchon, Ladurée et de nombreux chefs qui, comme moi, veulent faire sortir la confiture des sentiers battus. Je leur soumets mes idées ou je traduis leurs envies. Ils utilisent ces créations inédites comme un ingrédient à part entière de leurs plats gastronomiques. » C’est ainsi que sa recette aux haricots de Soissons aux noix exalte le goût de légumes, celle aux agrumes et gingembre confit les coquilles Saint-Jacques. Ses confits de Sauternes ou de fleurs font merveille avec du foie gras et dans les tajines, tandis que le confit au whiskey et au cigare rehausse la ganache en chocolat d'un macaron. Autant d’idées originales et raffinées pour élargir la palette sensorielle de grands classiques de la gastronomie.

grain De sucre n°37

La FéE Et LE Champion…

Tout comme la pâtisserie et la confiserie-chocolaterie, la confiture a ses vedettes et figures emblématiques. Loin du star system mais plébiscitée autant par les confituriers amateurs – qui s’arrachent ses livres de recettes – que par les tables et épiceries renommées en France et à l’étranger, Christine Ferber, surnommée « La fée des confitures », est l’une de ces personnalités attachantes. Dans sa petite entreprise familiale de Niedermorschwihr, au cœur du vignoble alsacien, l’auteur du best-seller Mes confitures (Payot) et son équipe concoctent ses délicieuses recettes en petites fournées (4 kg maximum par cuisson !) avec une philosophie simple et authentique : « travailler les fruits en douceur pour les sublimer ».

www.christineferber.com

Le maître confiturier Francis Miot aux Confituriades de Beaupuy (Lot-et-Garonne).

Une reconnaissance méritée Le mouvement est si puissant que la confiture a fait son entrée, depuis 2013, au prestigieux Concours général agricole. « C'est en effet un formidable moyen de reconnaissance et de promotion des savoir-faire. Une médaille au Concours général Agricole, c'est une incitation à l'achat pour plus de 75 % des consommateurs, et presqu'autant se déclarent prêt à payer un peu plus cher pour partager cette excellence », rappelle son commissaire général, Benoît Tarche en s’appuyant sur une récente enquête4. En 2015, 129 échantillons répartis dans 10 sections couvrant toute la diversité de la production, ont été dégustés et 19 entreprises ont obtenu les prestigieuses médailles décernées lors du Salon international de l'agriculture. Par ailleurs, les meilleurs artisans sont reconnus et distingués par les professionnels des métiers de bouche. Ainsi, l’Ordre Culinaire International, association cofondée par le grand confiturier Francis Miot, définit les

Considéré comme le confiturier le plus célèbre de France, Francis Miot est également le plus titré, avec notamment les palmes de « Meilleur confiturier de France » et de triple Champion du monde (classé « hors concours »). À l’heure où la Maison Francis Miot fête ses trente ans, la petite fabrique créée en 1985 dans le Sud-Ouest est devenue une marque artisanale d’excellence et renommée dans le monde entier. Francis Miot a également créé, à Uzos (Pyrénées-Atlantiques), un musée des arts sucrés, Féerie gourmande, qui dévoile aux visiteurs « les plus grands secrets gourmands de la fabrication des confitures ». www.francis-miot.com

règlements et décerne les titres de Champion de France et de Champion du monde des Confitures. Autres signes d’ébullition, le monde de la confiture compte dans ses rangs des stars qui rivalisent en notoriété avec les pâtissiers, et le produit trouve sa place en cuisine, jusque dans les restaurants gastronomiques où de plus en plus de chefs cuisiniers l’intègrent à leurs plats salés (voir p18). Par sa capacité à réinventer un poisson vapeur ou enchanter un fromage de brebis sec tout comme elle exalte la saveur des fruits, la confiture ouvre une immense gamme de sensations. Au panthéon des préférences, les parfums classiques restent dominants, la fraise (27 % des ventes) et l'abricot (18 %) étant plébiscités devant la framboise, la myrtille et les quatre fruits rouges. Mais au-delà de ces indicateurs reflétant les achats en grande distribution, on estime que plus de 1 800 parfums différents ont été créés à ce jour. Une inventivité à laquelle les artisans et les adeptes du fait maison prennent toute leur part. Et c’est bien là que résident à la fois la force et l’alchimie de la confiture. Comment varier les plaisirs et séduire les papilles de toutes les générations avec une recette aussi simple que du sucre et des fruits ? Aucun secret au monde n’est aussi agréable à partager.

unE aCtion En FavEur du pEtit déjEunEr

Redoutant les conséquences sur la santé de la baisse de consommation du petit déjeuner observée chez certaines catégories de populations, les professionnels du secteur des confitures sont engagés au sein d’un « Collectif du petit-déjeuner à la française » dont la vocation est de promouvoir et valoriser le petitdéjeuner en tant que premier pilier journalier du modèle alimentaire français et levier de l'équilibre nutritionnel. Une action de sensibilisation a notamment été mise en place, en septembre dernier, à l’intention des personnes socialement défavorisées. Un million de petitsdéjeuners et des documents d’information ont été distribués à travers des associations caritatives, et des consultations nutritionnelles ont été proposées en partenariat avec des médecins.

1 source : Fédération des industries d'aliments conservés. tous les chiffres relatifs à l'industrie de la confiture mentionnés dans cet article proviennent de la Fiac. 2 enquête opinionWay-collective du sucre, 2013

Chez les industriels comme chez les artisans, la confiture associe l’amour du fruit à l’art de la cuisson du sucre.

OCTOBRE 2015

3 Décrets 2008-183 du 26 février 2008 et 85-872 du 14 août 1985 portant application de la loi du 1er août 1905 sur « les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services en ce qui concerne les confitures, gelées et marmelades de fruits et autres produits similaires ». 4 cga-adquation, septembre 2011

19

Tendances

Planète chocolat

98 % des Français apprécient le chocolat, qu’ils placent en tête de leurs aliments préférés et au quatrième rang des aliments indispensables*. En tablettes, en bouchées, dans les desserts ou en poudre pour le petit déjeuner, ils le consomment sous une multitude de formes et de recettes. Mais au-delà des produits, le chocolat c’est aussi tout un univers, avec ses lieux, ses tendances et ses rituels à partager. * source : toluna-Lsa , mars 2014

Bars chocolatés

Tasses de gâteau

Après les cup cakes, pop cakes, whoopies et autres gâteaux magiques, l’univers en continuelle expansion de la pâtisserie maison vient de découvrir un nouveau satellite aussi tendance que résolument associée au chocolat : le mug cake. Comme son nom l’indique, ce gâteau a été conçu pour être préparé et présenté dans un mug, accessoire présent dans toute les cuisines. La recette se réalise sur le pouce, limite l’utilisation de vaisselle, se cuit en 2 mn au micro-ondes et se présente en portion individuelle. Bien qu’ouverte à toutes les déclinaisons, la formule originelle (et la plus utilisée) reste sur une base de chocolat.

Si la formule « prendre un chocolat au bar » est toujours d’actualité, il existe aussi aujourd’hui la possibilité de se rendre dans un « bar à chocolat ». Le concept a été créé par le grand chocolatier Jean-Paul Hévin, qui a ouvert son premier Chocolate Bar à Tokyo en 2003. Au Japon comme dans ses deux boutiques parisiennes, il propose un espace entièrement dédié à la dégustation de chocolats de toutes origines à partir d’un produit emblématique, le chocolat chaud. Alternative moderne et gourmande au traditionnel salon de thé, le concept a essaimé pour le plus grand plaisir des amateurs. Par exemple à Paris, où l’hôtel Royal Monceau a fait appel à Pierre Hermé pour y créer un bar à chocolat, ou encore à Montpellier, où le bar Mademoiselle & Chocolat est devenu un must de la vie locale.

À la page…

Les librairies regorgent de livres de recettes et de beaux livres dédiés au chocolat, tous plus appétissants les uns que les autres. Sur Internet, l’une des grandes librairies en ligne recense plus de 3 000 titres disponibles sur le sujet ! Encore plus surprenant, seuls un tiers d’entre eux se classent dans la catégorie « cuisine », car le chocolat inspire aussi romanciers, essayistes, historiens, dessinateurs… Au cœur de cette bibliothèque gourmande, L’Encyclopédie du chocolat et ses 400 pages richement illustrées fait référence (Flammarion). Résolument pédagogique et précis, cet ouvrage s’adresse au débutant comme au professionnel. Plus de cent techniques y sont abordées (tempérage, ganaches, mousses, décors, glaçages...) et tous les gestes expliqués en photos pas à pas. De grands chefs pâtissiers comme Christophe Michalak, Gilles Marchal ou Christophe Adam y livrent également quelques uns de leurs petits secrets et grandes recettes.

Manifestations gourmandes

Lors de sa 20e édition, en 2014, le Salon du chocolat de Paris à accueilli 120 000 visiteurs sur cinq jours. Si cette affluence et cette antériorité contribuent à en faire le plus grand événement mondial dédié au chocolat, il n’est plus la seule manifestation dédiée tant la demande du public est forte. De nombreuses villes de France proposent aujourd’hui leur propre salon, à l’image du salon Chocolat et Gourmandises de Vannes, dont le Cedus est partenaire officiel et dont la prochaine édition aura lieu du 6 au 8 novembre 2015. Recette du succès : dégustations, démonstrations, découvertes et échanges gourmands.

20

grain De sucre n°37

AGENDA 12-18 octobre 2015

3-4 décembre 2015

Colloque du GROS (Groupe de réflexion sur l’obésité et le surpoids), Paris. « La tentation des régimes »

26e Semaine du Goût, dans toute la France 18 octobre 2015

5-6 décembre 2015

« À la Saint Luc, la betterave devient sucre »

Marché aux sucreries, Erstein (Bas-Rhin)

28 octobre-1er novembre 2015

8 décembre 2015

Assemblée générale de la Confédération générale des planteurs de betteraves, Paris

Salon du Chocolat, Paris 30 octobre - 2 novembre 2015

9-11 décembre 2015

Foire internationale et gastronomique, Dijon (Côte-d’Or)

Journées francophones de nutrition, Marseille (Bouches-du-Rhône)

3 novembre 2015

5 février 2016

Conférence Benjamin Delessert, Paris « Les adolescents, responsables de leurs choix de santé ? »

Journée annuelle Benjamin Delessert (JABD), Paris Thèmes : « Qui dort, dîne ? Rythmes biologiques et santé », « Se nourrir et bien vieillir »

6-8 novembre 2015

5-9 février 2016

Salon du chocolat et gourmandises, Vannes (Morbihan)

Salon Europain, Paris Nord-Villepinte 14 novembre 2015

22-23 mars 2016

Colloque Association française des diabétiques (AFD)

Finale du 42e Championnat de France du dessert, Lycée des métiers de l’hôtellerie et du tourisme Biarritz Atlantique (Pyrénées-Atlantiques), sous la présidence de Jérôme Chaucesse, MOF Pâtissier 2015

27-29 novembre 2015

Gastronomades d’Angoulême (Charente)

BLOC-NOTES ILS SONT PASSÉS PAR ICI… ILS REPASSERONT PAR LÀ…

➔ Le 16 avril 2015, Bertrand du Cray, directeur général délégué du Cedus, a présenté à Paris les activités de cet organisme interprofessionnel de la filière sucre devant les membres du groupe des agrodécideurs du think tank SAF Agr’Idées.

➔ Sur le parvis de Notre-Dame de Paris, le 8 mai 2015, à l’occasion de l’inauguration de la Fête du Pain, dont le Cedus est partenaire officiel, il a accueilli Anne Hidalgo, Maire de Paris, sur le stand « Le Sucre ».

➔ À la veille de l’inauguration de la Foire de Châlons-en-Champagne (Marne), Bertrand du Cray est intervenu, le 27 août 2015, au cours de la conférence de présentation de cet événement où le Sucre est l’invité d’honneur.

➔ Dans le cadre de la Foire internationale et gastronomique de Dijon (Côte-d’Or), Jacqueline Sieffert, chargée des Manifestations extérieures au Cedus, remettra le 2 novembre 2015, le trophée « Le Sucre » aux lauréats du Grand Prix de la gourmandise.

ABONNEMENT GRATUIT AU MAGAZINE « GRAIN DE SUCRE » OU CHANGEMENT D’ADRESSE Oui, je souhaite recevoir gratuitement, le magazine « Grain de Sucre », 3 numéros par an. Mlle E-MAIL*

Mme

M.

Prénom* ........................................................................................................ Nom*

J’ai changé d’adresse

........................................................................................................................................................................................

...............................................................................................................

Tél.* ................................................................................................................... Portable* ............................................................................................................ ...... Secteur d’activité* Fonction* CP*

................................................................................................................................

................................................................................................................................................................

......................................................................................................................................................................................

Société*

............................................................................................................................................................................................................................

Adresse professionnelle* ................................................................................................................................................................ Ville*

........................................................................................................................................................................................................................................

S’il s’agit de votre adresse personnelle, cocher cette case * champs obligatoires

ABONNEMENT GRATUIT AUX NEWSLETTERS SUR LE SUCRE ET LES PRODUITS SUCRES OUI, je souhaite recevoir gratuitement, par e-mail des informations complémentaires sur le sucre et les produits sucrés. À remplir et à retourner au Centre d’études et de documentation du sucre PAR COURRIER : CEDUS service abonnement - 23, avenue d’Iéna - 75116 Paris - PAR MAIL : [email protected]

m o c . e r c su

le

ACTUALITÉS

UNE INFORMATION ENCORE PLUS CIBLÉE SUR LE SUCRE

MÉDIATHÈQUE SUCRE DE A À Z

SUCRE GOURMAND

SUCRE ET ÉQUILIBRE

…à l’attention du grand public

lesucre.com

…à l’attention des professionnels, accédez directement à votre site dédié.

sucre-info.com