L'éducation des patients à la gestion de leur ... - CHU Brugmann

6 juil. 2016 - PATIENT CARE. L'éducation des patients à la gestion de leur médication. Si l'empowerment des patients constitue l'une des finalités es-.
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PATIENT CARE

L’éducation des patients à la gestion de leur médication Le service de réadaptation du CHU Brugmann Reine Astrid s’est lancé depuis 2013 dans un ambitieux programme d’éducation des patients à la gestion de leur médication. Quatre unités de soins sont concernées par le projet qui ­entend allier développement de l’autonomie des patients et sécurité. Dans cette optique, un protocole précis a été développé, protocole qui pourrait s’appliquer d’ici peu à d’autres unités et services. Valérie Kokoszka

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i l’empowerment des patients constitue l’une des finalités essentielles du projet, il s’agissait aussi, en l’initiant, d’apporter une réponse concrète aux difficultés suscitées par une mauvaise compréhension ou un mauvais suivi des prescriptions à la sortie. Et plus précisément de répondre aux constats qui remontaient du terrain, tels que les nombreux appels de patients, à peine sortis de l’hôpital, pour se voir repréciser leur médication, les réhospitalisations consécutives à un suivi «fantaisiste» des prescriptions (1 hospitalisation sur 10), un manque de suivi de la prescription médicamenteuse oscillant entre 30 et 60% et un nombre élevé de patients (15%) qui ne vont même pas chercher les médicaments prescrits.

tenariats externes avec le médecin généraliste et les soins à domicile.

Un processus étagé pour garantir l’autonomie… et la sécurité! Concrètement, un processus séquencé a été mis en place, destiné à assurer l’éducation des patients à la gestion de la médication tout en garantissant la sécurité du suivi médicamenteux. La première étape débute par un screening à l’admission dont le but est de sélectionner les patients «éducables». Via l’anamnèse médicamenteuse réalisée avec le patient ou ses proches, les connaissances et le suivi des prescriptions sont évalués. Tous les patients ne sont néanmoins pas concernés par le projet, qui s’assortit de critères d’exclusion tels que la fin de vie, le séjour en MR/MRS ou encore les troubles cognitifs sévères. La deuxième étape est franchie avec la décision de la date de sortie lors du tour médical. Dans ces unités, les durées de séjour sont habituellement longues (± 58 jours), le temps peut donc être mis à profit pour le plan d’éducation qui s’accompagnera si nécessaire d’un second screening (3e étape). Ce deuxième screening est composé de tests praxiques – MMSE (Mini Mental State Examination) et MOCA (Montreal Cognitive As-

Devant ce panorama, l’idée a germé de faire du patient un véritable acteur de son traitement via la connaissance de ses médicaments (indications, posologie), et l’apprentissage d’une gestion autonome ou accompagnée de sa médication, à la sortie. Pour mettre en œuvre ce projet, des partenariats internes ont été noués avec les patients et leurs proches, les équipes hospitalières multidisciplinaires, la coordinatrice et les référents éducation, ainsi que des par-



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Figure 1: L  e processus d’éducation à la médication mis au point au CHU Brugmann, Site Reine Astrid.

Processus mis en place Anamnèse médicamenteuse 1er screening mise en sécurité médicements perso

Plan d’éducation

Tour MD

+ 2e screening Si nécessaire

Décision de date de sortie HT

Conclusions de l’éducation et préparation de la sortie

Description du Qui fait quoi…

sessment). Enfin, lors de la dernière étape, l’équipe tire les conclusions du plan d’éducation et prépare la sortie effective du patient. En pratique, le plan d’éducation conduit par l’infirmière avec le patient et/ou ses proches s’appuie sur une grille des compétences attendues qui structure l’apprentissage. L’infirmière explique les étapes et les outils au patient, supervise ce qu’il fait, fait connaître les médicaments, remplit chaque jour le document d’éducation et fait appel à un ergothérapeute. Sous la supervision de l’infirmière, le patient suit la feuille de traitement, prépare ses médicaments et les range dans le pilulier quotidien, prend ses médicaments aux heures prévues et connaît les indications de ses médicaments. Quant au médecin, il adapte le traitement en vue de la sortie. Le parcours d’éducation, qui dure en général 8 jours, comprend de nombreux points d’attention pour le patient comme la compréhension et l’acceptation de la maladie, le choix libre et conscient du traitement, le pilulier, l’implication de la famille et l’évaluation de l’efficacité. Mais il

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comporte aussi des points d’attention au niveau du traitement, afin d’éviter tout ce qui peut nuire à l’observance. Les prestataires s’efforcent ainsi de simplifier le traitement via les monoprises ou la suppression des doublons et de respecter les préférences des patients en termes de forme galénique, de tolérance mais aussi de prix/remboursement (Figure 1).

Quelques résultats chiffrés Entre juin 2014 et fin 2015, sur les 627 patients admis, 377 ont été jugés «éducables» à l’issue du premier screening, soit 60%. Au terme du plan d’éducation, 271 patients, soit 72%, géraient leur médication de manière autonome. Un découpage plus fin, réalisé sur un échantillon de 38 patients, a montré que 92% prenaient correctement leurs médicaments, 97% les prenaient au moment correct et 87% en connaissaient le dosage. Le seul résultat améliorable du plan d’éducation réside dans la connaissance de l’indication des médicaments, qui plafonnait à 71%. En revanche, l’enquête menée auprès de 31 médecins généralistes a



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révélé des lacunes puisqu’un quart d’entre eux disait ne pas voir reçu de rapport de sortie et près des 3/4 (23/31) affirmaient ne pas être au courant du programme d’éducation. Plusieurs actions ont été prévues pour pallier ces problèmes, telles que la vérification des coordonnées du médecin généraliste durant l’hospitalisation, la révision de la structure du rapport de sortie afin de mettre en évidence le document de conclusion et des séances de sensibilisation via les GLEMS, l’info news et l’intranet. Le succès de ce projet d’autonomisation des patients, tant auprès des patients eux-mêmes que du personnel qui se fédère autour de lui et voit son rôle valorisé, devrait lui valoir son extension prochaine dans d’autres services. n

Note Source: «L’éducation des patients à la gestion de leurs médicaments – Entre autonomie et sécurité», exposé de Véronique Hélin, Lutgard Vandenbosch et Agnieszka Gierasimowicz, lors du symposium «Patient partenaire, une plus-value pour votre hôpital», organisé par le SPF Santé publique le 24/02/16