une famille syrienne - cinéma Mercury

Dans l'immeuble, quelque part dans une ville syrienne indéterminée —Alep ? Damas ? — tout le monde a fui, sauf eux : une famille (trois générations) cohabite ...
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UNE FAMILLE SYRIENNE de Philippe Van Leeuw









Un film saisissant La guerre, d’un matin blême à un autre. La guerre, derrière les murs et les fenêtres, derrière la porte d’entrée, lourdement barricadée. A l’intérieur, les occupants tentent de poursuivre une demi-vie, otages de tout ce qui rôde, explose et mitraille au-dehors. Mais ils ont beau se terrer, le mal les rattrape, s’infiltre comme une poussière toxique, entre la pénurie et les tensions, le danger et les cas de conscience qu’il suscite, intenables, déchirants. Dans l’immeuble, quelque part dans une ville syrienne indéterminée —Alep ? Damas ? — tout le monde a fui, sauf eux : une famille (trois générations) cohabite avec la bonne et un couple de voisins recueillis avec leur bébé. Unité de temps —vingt-quatre heures — et de lieu : on ne sortira presque jamais du huis clos de cet appartement, dont l’imposante bibliothèque, les buffets couverts de cadres et les canapés profonds sont les vestiges d’un monde mort. Un décor d’avant les bombes, les pillards et les snipers. Dans ce cadre presque théâtral, le réalisateur nous offre du grand cinéma : entre les gens, entre les murs, l’attente perpétuelle, heurtée d’alertes affolantes, de brusques saccades, suggère formidablement l’angoisse, l’impuissance et la claustration. Il n’est pas nécessaire de montrer les ravages militaires d’un conflit pour bien l’évoquer. Le film nous en fait partager un aspect bien plus insupportable : un état de siège permanent, une distorsion intime du quotidien. Pour que cette violence s’incarne, il fallait de beaux personnages, déchirés entre la nécessité de fuir — tous ceux qui protestent contre l’afflux de réfugiés politiques en Europe devraient voir ce film — et le besoin de rester. De la mélancolie tendre et funèbre du grand-père, fantôme d’une autre époque, à l’énergie dure de sa belle-fille, tous sont inoubliables de présence et de vérité. Cécile Mury