Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité 80 - ISS Africa

Au cours du débat, le Représentant permanent de l'Égypte a déclaré que son ..... Après la course à la présidence de la CUA de 2012, qui a été extrêmement .... États d'Afrique de l'Ouest (CÉDÉAO) et ancienne ministre des Affaires .... Une caractéristique intéressante de cette liste est la faible représentation des professions ...
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Numéro 80  | Mai 2016

Dans ce numéro ■ À

l’ordre du jour

  Le mois dernier, le Conseil de paix et de sécurité (CPS) a discuté du rôle des efforts de déradicalisation dans la lutte contre le terrorisme en Afrique.   Le Conseil s’est également penché sur l’enjeu de la reconstruction et du développement post-conflit au cours d’une réunion ouverte à Addis-Abeba. ■ Analyse

de situation

  L’Égypte se tourne de plus en plus vers le sud. La décision du Caire de céder sa souveraineté sur deux îles de la mer Rouge est un élément révélateur de cette nouvelle orientation. ■ Vues

d’Addis

  Le scrutin en vue d’élire le nouveau président de la Commission de l’Union africaine (UA), son adjoint ainsi que huit commissaires se tiendra au mois de juillet, lors du prochain Sommet de l’organisation.

Rapport

sur le Conseil de paix et de sécurité

Qui sont les candidats ? ■ Entretien

avec le CPS

  Le Rapport sur le CPS a demandé à l’Ambassadeur Aguibou Diarrah, chef du Programme Frontières de l’UA, en quoi une démarcation plus claire des frontières pourrait prévenir les conflits.

“ « L’Algérie a

cherché à isoler les groupes radicaux »

“ « L’Égypte Page 3

n’est plus la superpuissance du monde arabe »

Page 9

“ « La moitié

des candidats sont des fonctionnaires »

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Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité

À l’ordre du jour Les précieux enseignements de la lutte contre le terrorisme Le CPS a tenu une séance publique le 16 avril 2016 pour discuter des causes profondes du terrorisme en Afrique et des mesures possibles pour contrer cette menace à la paix et à la sécurité sur le continent. L’Algérie a fourni de précieux enseignements tirés de ses propres efforts de lutte contre le terrorisme. Le Nigeria a quant à lui insisté sur le fait qu’une attention particulière devrait être portée aux facteurs qui mènent les jeunes à rejoindre les rangs de groupes terroristes. Lors du sommet du CPS qui s’est tenu en janvier 2016 à Addis-Abeba, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a mis de l’avant six mesures que les États membres de l’UA pourraient adopter pour lutter contre le terrorisme. Parmi ces mesures, la mise en place de programmes de déradicalisation à destination des membres de groupes terroristes figurait en bonne place. Dans son communiqué publié au terme de ce sommet, le CPS a souligné « la nécessité d’efforts renouvelés pour lutter contre les interprétations religieuses extrémistes et obscurantistes qui favorisent la radicalisation et l’intolérance ».

Une attention particulière devrait être portée aux facteurs qui mènent les jeunes à rejoindre les rangs des groupes terroristes Il était donc logique que l’Algérie organise, au cours de son mandat à la présidence du CPS, une séance publique consacrée au rôle décisif des politiques de

Président actuel du CPS S.E. Mme Mamosadinyana P.J. Molefe Ambassadrice du Botswana en Éthiopie et Représentante permanente auprès de l’UA et de l’UNECA

Les membres actuels du CPS sont : l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Botswana, le Burundi, l’Égypte, le Kenya, le Niger, le Nigeria, l’Ouganda, la République du Congo, le Rwanda, la Sierra Leone, le Tchad, le Togo et la Zambie.

déradicalisation dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent en Afrique. L’UA a souligné la nécessité de lutter contre l’idéologie radicale en présentant des messages différents qui visent à affaiblir l’attrait qu’exercent l’extrémisme et le radicalisme. L’objectif principal de la réunion était « de permettre la tenue de discussions approfondies et l’échange de points de vue et d’idées sur la question des individus qui se radicalisent ou qui développent un état d’esprit propice à ce qu’ils se livrent à des actes d’extrémisme violent ou de terrorisme, et de s’accorder sur les mesures concrètes à même d’être prises aux niveaux national, régional et continental pour prévenir et lutter contre la radicalisation pouvant conduire à l’extrémisme violent ».

Les expériences de l’Algérie dans la lutte contre le radicalisme religieux Le Représentant permanent de l’Algérie auprès de l’UA, l’ambassadeur Rachid Benlounes, a partagé les expériences de son pays dans la déradicalisation, notamment dans les domaines de la politique, de la justice, de la sécurité et de la religion. Parmi les mesures politiques prises par l’Algérie, M. Benlounes a mentionné la réaffirmation de l’importance d’un « État fort fondé sur la primauté du droit et de la démocratie, la levée

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de l’état d’urgence et la politique de réconciliation nationale ». Au

façon égale et sans restreindre la liberté de culte. Le pays hôte

niveau judiciaire, le diplomate algérien a insisté sur le fait qu’« une

de l’UA a également mis de l’avant la nécessité de lutter contre

lutte anti-terroriste respectueuse des droits fondamentaux

la pauvreté et d’assurer une répartition équitable des revenus

[rendait] cette bataille acceptable et efficace ».

entre les différentes franges de la société.

Ainsi, l’Algérie a supprimé les tribunaux d’exception et

Le Représentant du Kenya a appelé à une approche

a prorogé son moratoire sur la peine de mort. En ce qui

institutionnelle impliquant toutes les parties prenantes,

concerne le système carcéral, lequel est souvent vu comme

des institutions publiques aux communautés locales, afin

un puissant vecteur de radicalisation, l’accent a été mis sur

d’identifier les facteurs alimentant l’extrémisme violent.

le fait que tous les prisonniers devraient recevoir le même traitement. Toutefois, les prisonniers impliqués dans des actes terroristes devraient être séparés des autres afin de stopper la propagation de la radicalisation dans les prisons.

Une lutte anti-terroriste respectueuse des droits fondamentaux rend cette bataille acceptable et efficace Dans le cadre de ses mesures visant à maintenir l’ordre public, l’Algérie a cherché à isoler les groupes radicaux et les partisans de l’extrémisme violent. Alger a ainsi cherché à limiter les conditions permettant aux individus de développer des idées extrémistes. Alger a aussi combattu la cybercriminalité en tant que vecteur de terrorisme, et réprimé la radicalisation sur Internet. En termes de mesures religieuses, les objectifs que s’est donnés l’Algérie sont l’amélioration de l’instruction des imams, la formation d’imams femmes, l’introduction du thème de la prévention de l’extrémisme violent dans les sermons des ulémas, et la création d’un observatoire national de lutte contre l’extrémisme religieux. Pour combattre le financement de l’extrémisme radical, l’Algérie a fait valoir que l’État devrait jouer un rôle central dans la collecte de l’aumône et dans la gestion des dons annuels de la zakat et des dons waqf afin d’assurer la transparence de la collecte et de la distribution de ces revenus.

Le Représentant du Mali a quant à lui souligné la nécessité d’adopter une approche basée sur la sensibilisation des communautés. Il a ajouté qu’il était nécessaire de veiller à ce que les jeunes diplômés issus du cursus en arabe trouvent leur place sur le marché du travail. Il a également appelé à des solutions régionales, arguant que le terrorisme était un enjeu transfrontalier. Il a enfin exhorté l’UA à adopter un cadre politique de déradicalisation pouvant être une source d’inspiration au Mali.

Un concept à définir De son côté, le Nigeria a abordé la question sous un autre angle, en estimant : « bien que la déradicalisation soit importante, l’accent devrait être mis sur ce qui radicalise la jeunesse ». Son Représentant a insisté sur la nécessité, en premier lieu, de prévenir la radicalisation en veillant à la bonne gouvernance et en s’assurant que les populations ne sont pas marginalisées. Hannah Tsadik, de l’Institut Vie et Paix, a appelé à la retenue dans les discussions relatives à la déradicalisation ainsi que dans les efforts visant à lutter contre l’extrémisme. Elle a exhorté les membres de l’UA à « prioriser l’analyse du phénomène et à mieux définir le problème avant de passer à l’action. À l’heure actuelle, le terrorisme et les dynamiques qui y mènent génèrent plus de questions que de réponses convaincantes ». Cet argument avait été évoqué plus tôt dans le débat par le Représentant du Soudan, qui avait relevé « une insuffisance dans la définition du concept d’extrémisme

Au cours du débat, le Représentant permanent de l’Égypte

violent », et qui avait appelé à la tenue d’une séance du Conseil

a déclaré que son pays favorisait une approche contre la

pour permettre aux États membres d’échanger leurs points de

radicalisation qui est globale, commune et basée sur ses

vues sur cette question.

expériences avec le terrorisme depuis les années 1920. Il a insisté sur la nécessité de transformer tous les instruments juridiques de l’UA et de l’Organisation des Nations unies (ONU) en actions concrètes sur le terrain. Il a ajouté que la volonté politique et la coordination internationale étaient des facteurs

Le terrorisme et les dynamiques qui y mènent génèrent plus de questions que de réponses convaincantes

essentiels dans la lutte contre le terrorisme.

Des appels en faveur d’un cadre continental de déradicalisation L’Éthiopie a souligné la nécessité de s’attaquer aux causes profondes de la radicalisation en traitant toutes les religions de

Autre sujet récurrent dans les diverses interventions des États membres de l’UA, la conviction selon laquelle, dans les termes du Représentant de l’Éthiopie, l’extrémisme violent « n’avait pas de racines dans les traditions africaines ». Cette idée a été reprise par le Mali et l’Algérie. Cependant, aucun de ces États

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Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité n’a expliqué pourquoi ni comment le radicalisme s’est propagé dans leur pays. Alors que de nombreux observateurs ont reconnu le rôle joué par les pays du Golfe dans la montée du radicalisme religieux sur le continent africain, par le biais du financement et de l’entraînement, les États membres n’ont pas abordé ce problème.

Le CPS appelle à la mise en place d’une stratégie continentale de lutte contre la radicalisation et contre le terrorisme Le Conseil a approuvé deux principales mesures dans son communiqué de presse : • La mise en place d’une plateforme de réflexion pour l’élaboration d’une stratégie continentale de contre-radicalisation et de déradicalisation, y compris sur la possibilité d’organiser une conférence sur ce thème au niveau des chefs d’État et de gouvernement. • La réactivation de ses comités sur les sanctions et sur le contre-terrorisme, en vue de lui permettre de s’attaquer efficacement à la question du terrorisme et de la radicalisation en Afrique. La première mesure reconnaît la nécessité de poursuivre les consultations entre les États membres de l’UA sur la question de la lutte contre la radicalisation. Toutefois, il convient de noter que lors du sommet de janvier du CPS, le terrorisme figurait déjà en tête de l’ordre du jour. On peut donc se demander si la pluralité des situations au sein des États membres justifie un tel appel en faveur d’un cadre continental ou si une analyse plus solide est nécessaire. L’appel à réactiver les comités subsidiaires du CPS a quant à lui déjà fait l’objet d’une réunion du CPS le 14 avril dernier. Considérant qu’aucune déclaration n’avait été publiée à la suite de cette rencontre, la mise en œuvre de cette recommandation paraît difficile. Un premier obstacle réside dans le manque de ressources humaines et financières au sein du département Paix et Sécurité. Le manque d’experts sur ces questions dans de nombreuses délégations des États membres du CPS constitue un second obstacle de taille. Bien que le CPS fasse pression en faveur de l’adoption de nouvelles mesures pour lutter contre le terrorisme, il est également nécessaire de veiller à la mise en œuvre des cadres continentaux existants. Par exemple, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a publié ses Principes et directives relatifs aux droits de l’homme et des peuples dans la lutte contre le terrorisme en Afrique en janvier 2016. Le suivi par le CPS de la mise en œuvre de ce document dans les États membres qui font face au terrorisme pourrait constituer la base d’un cadre continental concernant la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent.

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À l’ordre du jour Que faire lorsque les armes se sont tues ? Le 26 avril 2016, le CPS a discuté de la question cruciale de la reconstruction et du développement post-conflit en Afrique (RDPC). Malgré les nombreux rapports et documents traitant de cette question, force est de constater que le continent peine encore à trouver comment aider les pays se relevant d’un conflit. Les besoins sont pourtant pressants à travers le continent, de la République centrafricaine (RCA) au Mali en passant par le Soudan du Sud. En 2016, le Cadre d’action de l’Union africaine (UA) pour la reconstruction et le développement post-conflit fêtera ses dix ans. Depuis son adoption à Banjul, en Gambie, ce cadre d’action fait face à un intéressant paradoxe. D’un point de vue politique et normatif, l’UA possède l’une des politiques de consolidation de la paix les plus complètes et les plus inclusives au monde. Toutefois, du point de vue de la mise en œuvre, la RDPC accuse toujours un retard, nécessitant un plus grand appui de la part des États membres de l’UA.

L’UA possède l’une des politiques de consolidation de la paix les plus complètes et les plus inclusives au monde Le cadre d’action constitue une tentative pour l’UA de s’assurer qu’elle dispose des mécanismes pertinents pour aider les pays se relevant d’un conflit. Il comporte six piliers, à savoir la sécurité, l’assistance humanitaire d’urgence, la gouvernance politique et la transition, la reconstruction et le développement socio-économique, les droits de l’homme, la justice et la réconciliation, et les femmes et le genre. Lors de sa réunion du 26 avril, le CPS a discuté du deuxième rapport d’activités de la présidente de la Commission de l’UA (CUA) concernant les efforts de l’UA pour la RDPC. La réunion a constitué une occasion importante de discuter de ce que l’UA a réalisé à ce jour, y compris en termes d’appui à l’élaboration d’initiatives de RDPC dans les domaines de la réforme du secteur de la sécurité, du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion des anciens combattants, et des initiatives de réconciliation. Cette rencontre visait également à impulser une dynamique afin que les initiatives de RDPC soient considérées comme des instruments essentiels de soutien à l’architecture africaine de paix et de sécurité de l’UA.

Plus de réunions, mais toujours pas de mise en œuvre réelle Le thème de la RDPC revient de plus en plus souvent dans les discussions entre responsables politiques africains, en particulier lors des sommets de l’UA et au sein du CPS. Cependant, si cet intérêt des États membres a donné lieu à de nombreuses discussions et à l’adoption de cadres politiques, il n’a pas conduit à une mise en œuvre efficace des différentes stratégies de RDPC. Cela est principalement dû à une combinaison de facteurs ayant trait aux capacités financières, à la coordination et à l’adhésion politique au projet. Pour tenter de faire face à ces défis, la CUA et le CPS ont des interactions fréquentes lors desquelles la Commission fournit au Conseil des

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Dixième anniversaire du Cadre d’action de l’UA pour la reconstruction et le développement post-conflit

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Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité mises à jour sur la mise en œuvre de la RDPC, ainsi que sur ses défis et ses opportunités. Tel était le principal objectif de la réunion du 26 avril. Les défis concernant la mise en œuvre effective de la RDPC ne sont pas propres à l’UA et touchent le domaine de la consolidation de la paix en général. En réponse à ces défis, le rapport de la présidente de la CUA suggère différents points d’entrée pour la mise en place de stratégies de renforcement des efforts de l’UA dans le domaine de la RDPC. Le document s’éloigne d’une action axée sur l’adoption de cadres stratégiques pour mettre l’accent sur des mesures pratiques pouvant être entreprises par la CUA, le CPS et les États membres afin d’assurer l’efficacité des politiques de RDPC.

Le thème de la RDPC revient de plus en plus souvent dans les discussions entre responsables politiques africains Les recommandations à l’attention du CPS tournent autour de trois questions fondamentales : la nécessité d’une adhésion politique de la part des États membres, l’importance d’un soutien financier, et les structures et les mécanismes qui améliorent l’efficacité du Cadre d’action pour la RDPC. Le rapport traite des améliorations pouvant être apportées tant à l’intérieur de l’UA qu’à l’extérieur, afin notamment d’agir sur les facteurs faisant obstacle à la mise en œuvre complète du Cadre d’action par la Commission. Ce faisant, le document veille à ce que l’UA soit en mesure de faire face à des processus complexes et sur le long terme, dans lesquels les résultats ne sont souvent visibles que bien après la mise en œuvre d’activités.

Les différents départements de l’UA devraient collaborer plus étroitement Le rapport de la présidente met un accent particulier sur l’importance de la coopération des États membres avec les structures internationales ayant trait à la consolidation de la paix, y compris la Commission de consolidation de la paix des Nations unies (ONU), la Banque africaine de développement et les autres partenaires de l’UA. En parallèle, le rapport aborde la question de l’importance des efforts de cohérence interne au sein de l’UA et des défis qui y sont liés, en insistant sur la nécessité de poursuivre la collaboration entre le département des Affaires politiques et le département Paix et Sécurité (DPS). Dans le rapport, un certain nombre de recommandations structurelles et institutionnelles sont mises de l’avant, y compris l’opérationnalisation du groupe de travail interdépartemental de l’UA sur la RDPC. Cette initiative permettrait à la RDPC, laquelle se limite pour l’heure à une série d’activités mises en

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œuvre par le DPS, de devenir une stratégie d’ensemble de l’UA mise en œuvre par divers acteurs internes et partenaires externes. Ces idées montrent que, pour être efficace, la RDPC a besoin de développer de nouvelles connexions au sein même de l’UA. Bien qu’elle ne soit pas explicitement mentionnée, l’interaction entre les différents départements démontre les liens non seulement avec les questions de paix et de sécurité, mais aussi avec la réalisation des objectifs de l’Architecture africaine de gouvernance.

L’UA devrait jouer un rôle plus important dans la reconstruction de la RCA Le rapport met également en évidence l’importance du dialogue avec les Communautés économiques régionales/Mécanismes régionaux (CER/MR). Il s’agit de l’un des aspects requérant le plus d’attention, du fait qu’il nécessite une collaboration accrue. L’Institut d’études de sécurité est en train de finaliser un document d’orientation visant à évaluer le rôle de l’UA dans les efforts de consolidation de la paix en RCA. L’une des principales conclusions de ce rapport est qu’en dépit de l’existence d’un intérêt pour intensifier le dialogue entre l’UA et la Communauté économique des États d’Afrique Centrale (CEEAC), plusieurs difficultés ont émergé. En ce sens, le développement de politiques au niveau de la CEEAC concernant la RDPC et la poursuite du soutien et de la coordination de l’UA sont cruciaux. Cela permettrait en effet de renforcer la présence de l’UA sur le terrain et d’améliorer la pertinence et le positionnement de ses bureaux de liaison dans les CER.

Les efforts de RDPC sont essentiels pour permettre aux pays d’accéder à une paix durable en s’attaquant aux causes profondes des conflits Il est généralement admis que les efforts de RDPC sont essentiels pour permettre aux pays d’accéder à une paix durable, en s’attaquant aux causes profondes des conflits plutôt qu’en visant simplement un arrêt des violences. Obtenir le soutien nécessaire pour ce faire est néanmoins devenu plus difficile. Le faible financement fourni à l’Initiative de solidarité africaine, une initiative phare visant à accroître la coopération intra-africaine et le soutien aux efforts de RDPC, démontre l’impact d’une interaction limitée et d’un manque d’adhésion politique des États membres. Il met également en évidence le fait que les acteurs politiques doivent maintenir leurs propres engagements sur le long terme par le biais d’un processus mûrement réfléchi, hiérarchisé et intégré. Pour ce faire, les structures de l’UA doivent être plus cohérentes et mieux adaptées.

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Des stratégies à long terme comportant de nombreux défis Alors que la consolidation de la paix et la RDPC sont des stratégies à long terme, elles pâtissent souvent de leur nature fluide, de la multiplicité des acteurs impliqués et des contraintes de court terme. Les membres du CPS doivent renforcer les capacités de la CUA et créer un environnement politique permettant à la CUA de fonctionner efficacement. Les recommandations les plus pertinentes du rapport suggèrent des moyens visant à assurer l’utilisation de la complémentarité interne et externe comme une avenue essentielle en vue de parvenir à des réalisations concrètes. Certains estiment que l’UA doit choisir entre un rôle de facilitateur ou d’exécutant des initiatives de RDPC. Cependant, les discussions en cours devraient faire partie d’un processus mûrement réfléchi et intégré dans une stratégie politique claire et plus large. Bien que l’UA soit en mesure de jouer un rôle important d’intermédiaire pour assurer l’efficacité des stratégies de RDPC, l’organisation est également un acteur important de mise en œuvre de ces stratégies dans des espaces spécifiques. Dans tous les cas, l’UA doit être en mesure d’identifier et de prioriser les domaines d’action sur lesquels elle peut avoir le plus grand impact.

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Analyse de situation L’Égypte se tourne enfin vers le sud La décision de l’Égypte de rendre à l’Arabie Saoudite les îles de Tiran et de Sanafir situées dans la mer Rouge est un indicateur fort de l’orientation de son avenir vers le sud. Au début du mois d’avril, le roi Salman d’Arabie Saoudite s’est rendu au Caire pour une visite très médiatisée. Il a apporté avec lui des milliards de dollars en transactions commerciales, en prêts à faible taux d’intérêt et en subventions. Et il est reparti en emportant avec lui quelque chose que les Saoudiens considèrent comme encore plus précieux : les îles de Sanafir et Tiran, situées dans la mer Rouge. De prime abord, il semblait que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, faisant face à une pression économique très forte, avait posé un geste auquel peu d’autres dirigeants auraient consenti : en contrepartie d’un soutien financier, il venait de céder une partie du territoire national. Le rejet de cette décision par le public, y compris parmi les partisans d’al-Sissi, a été rapide. Une grande manifestation a été organisée au Caire. Ce rassemblement représentait la plus importante démonstration de force de la population depuis l’adoption en 2013 de lois sévères contre les manifestations. « Nous baissons la garde et lorsque nous nous ressaisissons, nous constatons que des erreurs ont été commises, allant d’un simple mot parasite dans un discours présidentiel à une décision ayant trait à la souveraineté territoriale », s’est insurgé Mahmoud al-Kardoussi, le rédacteur en chef du quotidien al-Watan, pourtant généralement favorable au gouvernement. Dans un discours télévisé plutôt décousu, al-Sissi a rejeté toute critique. « On est en train de brouiller la vérité et de dénaturer la réalité, et nous devons tous en être conscients », a-t-il déclaré. « En bref [l’objectif est] de saper la confiance dans tout ce qui est bon et d’amplifier la critique de tout ce qui n’est pas bon... Voilà exactement ce qui est en train d’être fait pour nous pousser à atteindre [un état de] suicide national ».

Des îles d’une grande valeur stratégique Les îles de Sanafir et de Tiran sont d’une grande importance stratégique. Elles sont situées à l’entrée du golfe d’Aqaba, seul accès direct d’Israël à la mer Rouge. Par ce fait même, elles ont depuis toujours constitué un pion crucial sur le plan géopolitique. En effet, quiconque contrôle Sanafir et Tiran est en mesure de restreindre la circulation des navires israéliens.

1950 Transfert de Sanafir et de Tiran à l’Égypte

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Quiconque contrôle Sanafir et Tiran est en mesure de restreindre la circulation des navires israéliens Cette grande valeur stratégique explique d’ailleurs pourquoi les deux îles ont longtemps été sous souveraineté égyptienne. Toutefois, cela n’a pas toujours été le cas. En fait, jusqu’en 1950, ces îles appartenaient à l’Arabie Saoudite, qui était alors un État relativement faible. Redoutant une expansion israélienne, et dans l’esprit du panarabisme qui caractérisait cette décennie, l’Arabie Saoudite a cédé les îles à

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l’Égypte, la superpuissance régionale de l’époque, en pensant que Le Caire serait le mieux placé pour défendre les îles, et ainsi restreindre Israël. Cependant, le plan ne s’est pas tout à fait déroulé comme prévu. Lors de la guerre israélo-arabe de 1967 (également connue sous le nom de la guerre des Six Jours), Israël a humilié l’armée égyptienne et s’est emparé entre autres de Sanafir et de Tiran. Bien que les îles aient été rendues à l’Égypte lors d’un accord de paix ultérieur, ce retour dans le giron égyptien s’est fait à la stricte condition que les navires israéliens puissent jouir d’un libre passage à travers le détroit de Tiran.

L’Arabie Saoudite désormais superpuissance régionale L’Égypte n’est plus la superpuissance du monde arabe. Cette responsabilité est désormais celle de l’Arabie Saoudite qui est

Pull quote : Les îles symbolisent quelque chose que l’Égypte a déjà perdu, à savoir son importance déterminante dans la géopolitique du Moyen-Orient Les prédécesseurs d’al-Sissi ont largement dédaigné ou ignoré le statut géographique de l’Égypte en tant que nation africaine, choisissant plutôt de se concentrer sur la culture et le patrimoine arabes du pays. Hosni Moubarak, en particulier, a été profondément marqué dans son esprit par une tentative d’assassinat qui a eu lieu à Addis-Abeba en 1995. Pour alSissi, l’intensification des relations tant diplomatiques que commerciales avec les pays africains est cependant devenue un défi existentiel. La construction par l’Éthiopie du barrage de la Grande Renaissance menace de limiter l’accès de l’Égypte aux eaux du Nil, ce qui paralyserait littéralement le pays. Cela a forcé les diplomates égyptiens à ouvrir le dialogue avec leurs homologues africains sur un pied d’égalité.

dotée d’immenses ressources pétrolières et qui souhaitait que les îles lui soient rendues avec la valeur stratégique qu’elles représentent. Ayant désespérément besoin des milliards de l’Arabie, le président al-Sissi n’a pas eu besoin d’être persuadé très longtemps. Et Israël ne s’est pas objecté. Bien que l’Arabie

Après avoir si longtemps ignoré son africanité, est-il trop tard pour que l’Égypte renoue vraiment avec le continent ?

Saoudite et Israël n’aient pas de relations diplomatiques officielles, l’Arabie Saoudite a utilisé des canaux informels pour rassurer les Israéliens sur leur intention de respecter les obligations de l’Égypte ayant trait à l’accord de paix. Ainsi, lorsque des dizaines de milliers d’Égyptiens ont manifesté contre la décision d’al-Sissi, ceux-ci ne pleuraient pas vraiment la perte des îles, lesquelles n’appartenaient pas vraiment à l’Égypte à l’origine. Ils étaient plutôt en colère face à la perte d’envergure de l’Égypte au sein du monde arabe et face au refus d’al-Sissi de se battre pour tenter de préserver le statut de superpuissance régionale de leur pays.

Des échanges accrus avec l’Afrique : un enjeu existentiel Néanmoins, Al-Sissi a l’intention de rendre à son pays le statut

Dans ce contexte, les îles de Sanafir et de Tiran symbolisent quelque chose que l’Égypte a déjà perdu, à savoir son importance déterminante dans la géopolitique du MoyenOrient. La perte de ces îles constitue cependant aussi un présage concernant l’avenir de l’Égypte : un avenir tourné vers le sud et dans lequel les relations avec le Soudan et l’Éthiopie prendront le pas sur celles avec Israël et l’Arabie Saoudite. Ce changement n’est pas forcément facile à accepter. Lors de la conférence de Charm el-Cheikh, la rhétorique enthousiaste n’a pas abouti à des offres concrètes. Après avoir si longtemps ignoré son africanité, est-il trop tard pour que l’Égypte renoue vraiment avec le continent ? Cet article est une publication de la rubrique ISS Today.

de superpuissance, mais dans un espace géographique distinct. Il y a deux mois, lors d’une réception somptueuse qui s’est tenue dans la station balnéaire égyptienne de Charm elCheikh, le président a souligné devant un public composé de chefs d’État, d’hommes d’affaires et de diplomates africains, l’importance de l’Afrique pour l’avenir de l’Égypte. Il a mis de l’avant les remarquables opportunités que représentent les marchés africains et a exhorté les entreprises égyptiennes à tirer profit de ces opportunités à titre de priorité nationale. Ce discours constituait la pièce maîtresse d’une stratégie visant à déplacer l’attention de l’Égypte vers le continent africain, en vue d’un engagement plus important tant en termes quantitatifs que qualitatifs.

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Vues d’Addis Rude bataille à venir pour les élections à la Commission de l’UA Lors de la 27e Assemblée de l’UA, qui se tiendra à Kigali les 17 et 18 juillet 2016, les chefs d’État africains seront appelés à élire ceux et celles qui dirigeront la Commission de l’UA (CUA) pour les quatre prochaines années. Le départ de la présidente de la CUA, Nkosazana Dlamini Zuma, laisse présager une lutte intéressante pour ce poste prestigieux. La vice-présidence de la CUA est également à pourvoir, ainsi que quatre des postes de commissaire. Quatre autres commissaires présenteront leur candidature pour se faire réélire à leur poste pour un mandat supplémentaire. Le Rapport sur le CPS a obtenu en exclusivité les noms de tous les candidats à ces postes.

Remaniement de la moitié de la Commission Lors des élections qui se tiendront en juillet, les deux principaux postes de la CUA seront à pourvoir, ce qui représente une première depuis 2008. La présidente actuelle de la Commission, Dlamini Zuma, a décidé de ne pas briguer un nouveau mandat tandis que le vice-président de l’organe, Erastus Mwencha, ne peut se représenter puisqu’il a déjà été élu à deux reprises (en 2008 et 2012). Les portefeuilles des Affaires politiques, de l’Infrastructure et de l’Énergie, de l’Économie rurale et de l’Agriculture, et des Ressources humaines, des Sciences et de la Technologie sont également à pourvoir. Les commissaires à la Paix et à la Sécurité, aux Affaires sociales, au Commerce et à l’Industrie, et aux Affaires économiques ont quant à eux la possibilité de se faire réélire. Les enjeux sont élevés. Après la course à la présidence de la CUA de 2012, qui a été extrêmement serrée, la fluidité de l’élection à venir est importante. Le statut de la CUA et celui de sa présidence se sont renforcés au cours des années, alors que l’organisation continentale prend de plus en plus de responsabilités et jouit d’une visibilité accrue.

La bataille pour la course à la présidence de la CUA a commencé

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Nombre de candidats à la présidence de la CUA

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Mme Pelonomi Venson-Moitoi (65 ans), actuellement ministre des Affaires étrangères du Botswana, a été choisie par une majorité des États membres de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) comme candidate de l’organisation régionale pour le poste de président de la CUA, lors d’une réunion de la SADC qui s’est tenue au mois d’avril. Bien que soutenue par l’Afrique du Sud et par le bloc régional, la candidature du Dr Venson-Moitoi pourrait pâtir du fait que le Botswana n’a pas toujours été favorable aux positions de l’UA sur certaines questions, notamment celle portant sur la Cour pénale internationale (CPI). La SADC soutient que le départ de Dlamini Zuma donne droit au bloc régional à un second mandat. Venson-Moitoi fera cependant face à deux autres candidats issus respectivement de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique Centrale, ce qui laisse penser

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que l’obtention d’un second mandat par un ressortissant d’un État membre de la SADC ne fait pas l’unanimité au sein des autres régions de l’UA.

La SADC soutient que le départ de Dlamini Zuma donne droit au bloc régional à un second mandat

et troisième tours, après avoir soutenu la candidature du président sortant Jean Ping lors du premier tour. Le statut de l’Afrique du Sud sur le continent et les efforts diplomatiques déployés par le pays entre les deux tours de scrutin avaient contribué à faire basculer le vote de petits États. Un tel ralliement est loin d’être garanti avec un candidat du Botswana, en particulier à cause de la position de Gaborone sur certaines questions liées aux droits de l’homme.

Pour l’Afrique de l’Est, l’Ouganda a mis de l’avant la

La candidature de Mokuy pourrait quant à elle faire

candidature de Mme Specioza Naigaga Wandira Kazibwe

réémerger certains enjeux régionaux et linguistiques. Tout

(60 ans). Le Dr Kazibwe, membre actuel du Groupe des

comme l’Afrique du Sud faisait valoir il y a quatre ans qu’un

Sages de l’UA, a occupé les fonctions de vice-présidente de

ressortissant de la SADC n’avait jamais occupé le poste de

l’Ouganda de 1994 à 2003. Elle a aussi été représentante

président de la CUA, la Guinée équatoriale pourrait insister

spéciale de l’ONU. Cependant, la capacité de l’Ouganda à

sur le fait qu’aucun ressortissant hispanophone n’a jamais

attirer le soutien des États de la région et du continent reste

occupé ces fonctions, en dépit des contributions importantes

une inconnue. Les relations tendues qu’entretient le président

et variées du pays à l’organisation. Paradoxalement, la

ougandais Yoweri Museveni avec certains de ses homologues

position de l’Afrique du Sud sur plusieurs points saillants

de l’Afrique de l’Est pourraient porter ombrage à la candidature

de l’actualité de l’UA, notamment sur le Burundi et sur la

de Mme Kazibwe.

position face à la CPI, semble plus proche de celle de la

Agapito Mba Mokuy (51 ans), ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de la Guinée équatoriale, est quant à lui le candidat de l’Afrique Centrale. Il est relativement peu connu comparé à ses concurrents dans la course à la présidence de la CUA, mais son pays pourrait mener d’importants efforts diplomatiques et financiers afin de glaner des votes dans les différents blocs régionaux. Les relations personnelles construites par le président Teodoro Obiang Nguema au fil de sa longue carrière ainsi que lors des sommets et autres rencontres de haut-niveau de l’UA auxquels il participe avec assiduité sont considérées comme les principaux atouts de la candidature de Mokuy, la Guinée équatoriale ayant un piètre bilan en matière de droits de l’homme. La Guinée équatoriale a accueilli deux sommets de l’UA, en 2011 et en 2014, et Obiang Nguema a occupé la présidence tournante de l’UA en 2011.

La diplomatie sud-africaine est-elle capable d’un nouveau tour de force ? Une question clé est de savoir si l’Afrique du Sud déploiera des efforts diplomatiques de la même ampleur que ceux ayant permis l’élection de Dlamini Zuma à la présidence de la CUA en 2012. Lors de cette élection, la candidature d’une ressortissante sud-africaine avait eu un effet paradoxal. D’une

Guinée équatoriale que de celle du Botswana. En outre, l’identité culturelle du président n’aura probablement pas un impact aussi important qu’en 2012, alors que Jean Ping était considéré comme un candidat pro-France. En 2016, la nationalité des trois prétendants au poste de président de la CUA est moins susceptible d’être utilisée contre leur candidature qu’elle ne l’a été en 2012 pour M. Ping. En effet, ni l’Ouganda ni la Guinée équatoriale ne peuvent être jugés comme étant trop proches de leur ancienne puissance coloniale.

La Guinée équatoriale pourrait faire valoir qu’aucun ressortissant hispanophone n’a jamais occupé le poste Le Nigeria et l’Algérie en lice pour le poste de commissaire à la Paix et à la Sécurité L’Algérie et le Nigeria, deux des membres actuels du Conseil de paix et de sécurité (CPS), ont chacun mis de l’avant une candidature pour le poste de commissaire à la Paix et à la Sécurité. Smaïl Chergui, le titulaire du poste, cherche à obtenir un mandat complet de quatre ans. Il avait été élu en 2013 pour terminer le mandat de son prédécesseur, Ramtane Lamamra, nommé ministre des Affaires étrangères de l’Algérie.

part, certaines puissances régionales (le Nigeria, le Kenya,

Le Nigeria présente la candidature de Salamatu Hussaini

l’Éthiopie) n’avaient pas soutenu la ministre de l’Intérieur sud-

Suleiman, l’actuelle commissaire aux Affaires politiques, à

africaine. D’autre part, cette candidature avait certainement

la Paix et à la Sécurité de la Communauté économique des

contribué à changer la position de certains États membres,

États d’Afrique de l’Ouest (CÉDÉAO) et ancienne ministre

qui avaient finalement voté pour Dlamini Zuma aux deuxième

des Affaires féminines de 2008 à 2010. Chergui et Suleiman

Numéro 80  •  Mai 2016

11

Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité devront faire face à deux autres candidats pour le poste convoité : Emmanuel Edou, ancien ministre de la Défense du Cameroun et la Burundaise Épiphanie Ntamwana Kabushemeye, ancienne chef de cabinet du représentant spécial de l’Union africaine en Somalie.

Une défaite des candidats algérien et nigérian porterait un coup au statut dont jouissent les deux pays au sein de l’UA Une défaite des candidats algérien et nigérian porterait un coup au statut dont jouissent les deux pays au sein de l’UA, car cela signifierait qu’Alger et Abuja ne seraient pas représentés sur la prochaine commission. Une défaite de l’Algérie pourrait être vue comme l’illustration des limites d’une

Australe (2). Le Cameroun et l’Égypte appuient respectivement la candidature de huit et quatre de leurs ressortissants pour la prochaine Commission. S’agissant du Cameroun, cet activisme contraste avec les absences fréquentes du président Paul Biya aux réunions de l’UA. Ces candidatures viennent cependant après que le Cameroun a retiré en janvier 2016 sa candidature pour un siège sur le CPS, laissant le champ libre à l’élection de la République du Congo. Comme le commissaire congolais aux Ressources humaines, aux Sciences et à la Technologie, Martial De-Paul Ikounga, ne sollicite pas de second mandat, il est possible d’imaginer que le Cameroun et la République du Congo s’échangent des faveurs diplomatiques en Afrique Centrale.

politique africaine principalement basée sur l’anticolonialisme

Concernant l’Égypte, cette élection illustre son regain d’intérêt

et l’antiimpérialisme. Il faut cependant rappeler que l’Algérie

pour les affaires africaines depuis sa suspension après le coup

a joué un rôle important dans la CUA au cours de la dernière

d’État contre Mohammed Morsi. Le Caire démontre aussi une

décennie en occupant successivement le poste clé de

certaine réticence à être laissé en dehors de la Commission

commissaire à la Paix et à la Sécurité de 2003 à 2008 avec

pour le prochain cycle, bien que le pays ait eu un commissaire

l’ambassadeur Saïd Djinnit, puis de 2008 à 2013 avec Ramtane

au cours des huit dernières années. La logique derrière ces

Lamamra et enfin depuis 2013 avec Smaïl Chergui.

candidatures multiples est d’être en mesure de négocier

Une éventuelle défaite du Nigeria pourrait nuire à l’image de

l’abandon de certains candidats en échange de l’obtention

l’administration de Buhari, qui a fait le choix de renoncer au portefeuille Affaires politiques pour prendre part à la course au portefeuille Paix et Sécurité. La volonté du Nigeria de présenter un candidat à cette fonction représente un changement au vu de sa réticence passée à faire campagne contre d’autres puissances régionales pour briguer des postes clés dans le domaine de la paix et de la sécurité continentales.

Retour au statu quo La plupart des candidats à la présidence et à la viceprésidence de la Commission proviennent de petits et de moyens États. L’élection de Dlamini Zuma ne semble pas avoir instauré une tendance qui inciterait les autres puissances régionales à chercher à diriger la Commission ou à proposer des candidats pour divers postes. En 2012, l’Afrique du Sud a été fortement critiquée pour avoir enfreint la règle implicite selon laquelle les grandes puissances ne devaient pas occuper de postes clés dans les grandes institutions continentales. L’Algérie, le Nigeria et le Kenya ont chacun présenté un seul candidat pour cette Commission. L’Éthiopie et l’Afrique du Sud n’en ont présenté aucun.

12

de l’Afrique de l’Est (8), de l’Afrique du Nord (67) et de l’Afrique

d’au moins un poste. Il convient toutefois de rappeler que le Cameroun avait présenté huit candidats en 2012 et qu’il n’a finalement obtenu aucun poste au sein de la CUA.

Le Cameroun et l’Égypte appuient respectivement la candidature de huit et quatre de leurs ressortissants pour la prochaine Commission Le respect de l’équilibre régional et l’intensité des efforts diplomatiques : deux facteurs décisifs Bien que le parcours professionnel et l’expérience internationale des candidats comptent lors de l’élection à un poste au sein de la Commission, les règlements insistent sur la nécessité d’une répartition géographique équitable. Les efforts diplomatiques menés par les chefs d’État des pays d’origine des candidats jouent également un rôle important dans le succès ou l’échec d’une candidature. L’équilibre entre les sexes est un autre critère à prendre en considération.

Le Cameroun et l’Égypte veulent un poste sur la prochaine Commission

Selon les statuts de la Commission, chaque région est

Comme en 2012, l’Afrique Centrale est en tête en termes

pour chaque portefeuille. Ces statuts indiquent qu’« au

candidatures à la CUA (13), suivie de l’Afrique de l’Ouest (10),

moins un commissaire de chaque région doit être une

censée présenter deux candidats, un homme et une femme,

Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité  •  WWW.ISSAFRICA.ORG/PSCREPORT

femme ». Cependant, la gent féminine constitue moins de la moitié des candidats à la prochaine Commission, avec seulement 14 femmes sur les 40 candidats en lice. En raison de ces considérations, chaque campagne pour un portefeuille aura nécessairement un impact sur les autres. Par exemple, l’éventuelle élection de Mokuy à la présidence de la Commission pourrait mettre l’UA dans une position difficile, car il n’y a pas de candidate à la vice-présidence, bien que cela soit une obligation légale. La logique est la même en ce qui concerne la représentativité régionale au sein de la Commission : si le candidat ghanéen venait à être élu vice-président de la Commission, cela aurait une incidence négative claire sur les chances du candidat nigérian au poste de commissaire à la Paix et à la Sécurité ou sur celles du candidat guinéen au poste de commissaire aux Affaires politiques. Il est en effet peu probable que les autres régions acceptent que les postes de président et de vice-président de la Commission reviennent au même bloc régional. Tout cela illustre comment les résultats seront façonnés par des considérations multiples liées au genre et à la représentativité régionale.

Une majorité d’anciens ministres et de fonctionnaires parmi les candidats Dix-sept des 44 candidats déclarés à l’un des postes à pourvoir au sein de la nouvelle Commission sont, ou ont été, membres d’un gouvernement. Avoir été ministre semble ainsi être un critère essentiel pour devenir commissaire. Les candidats provenant d’organisations internationales représentent un autre bassin important avec 12 représentants : quatre sont issus de l’UA, cinq des communautés économiques régionales (CER) et trois de la Banque africaine de développement. En termes de catégories socioprofessionnelles, les fonctionnaires constituent près de la moitié des candidats, avec 19 représentants. Les autres catégories représentées sont les universitaires (au nombre de 8), les ingénieurs (6) et les médecins (3). Une caractéristique intéressante de cette liste est la faible représentation des professions habituellement associées à la société civile. Ainsi, seuls un avocat et un journaliste comptent parmi les candidats. Fait intéressant, la candidature de ces deux individus issus de la société civile est proposée ou soutenue par des puissances régionales pour les postes essentiels de président de la CUA et de commissaire à la Paix et à la Sécurité. Il semble que les petits États ne sont pas prêts à prendre le risque de présenter des candidats issus de ce milieu, ce qui contraste avec les nombreux appels en faveur de l’ouverture de l’UA aux individus issus d’organisations de la société civile. La prévalence des fonctionnaires des administrations nationales ou des organisations internationales semble être le résultat logique d’un processus de sélection étroitement contrôlé par les États et les organisations régionales. Bien que cela garantisse la mise en place d’une Commission dotée d’une grande expérience et de solides connaissances en administration publique, la présence d’un grand nombre d’anciens fonctionnaires aux postes de commissaires pourrait avoir des conséquences négatives. En effet, cette composition va à l’encontre de la volonté de la Commission d’être plus indépendante, plus efficiente et plus efficace, et non pas plus bureaucratique. En bout de ligne, une sensibilisation accrue à la culture bureaucratique et hiérarchique de la CUA pourrait inhiber les futurs commissaires

13

Nombre de candidats originaires de l’Afrique Centrale

dans leurs initiatives.

Numéro 80  •  Mai 2016

13

Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité CANDIDATURES POUR LA COMMISSION DE L’UA 2016 – 2020* Poste

Président(e)

Viceprésident(e)

Candidat

Pays

Sexe

Antécédents

Dr Pelonomi Venson-Moitoi

Botswana

Afrique Australe

F

Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale ; ancienne ministre de l’Éducation

Dr Wandira Specioza Kazibwe

Ouganda

Afrique de l’Est

F

Conseillère principale sur les questions démographiques et de santé auprès de la Présidence ; Membre du Groupe des Sages de l’UA ; ancienne vice-présidente

Agapito Mba Mokuy

Guinée Équatoriale

Afrique Centrale

H

Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération ; ancien administrateur de l’UNESCO

Yacin Elmi Bouh

Djibouti

Afrique de l’Est

H

Ancien ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation ; Ancien ministre des Finances

Ibrahim Ali Hussein

Somalie

Afrique de l’Est

H

Victor Emmanuel Djomatchoua Toko

Cameroun

Afrique Centrale

H

Ambassadeur de l’OUA auprès de l’ONU à New York (1995–1997) ; à Genève (1997–2000) ; et auprès de l’UE et du Groupe ACP (2000–2004) ; chef de la division Coopération économique et Développement de l’OUA (1980–1987)

Thomas Kwesi Quartey

Ghana

Afrique de l’Ouest

H

Secrétaire exécutif du président ; ancien ministre adjoint aux Affaires étrangères et à la Coopération ; ancien ambassadeur auprès de l’UA, de l’UNECA et de l’Éthiopie (2008–2012)

Smaïl Chergui

Algérie

Afrique du Nord

H

Commissaire sortant ; élu en 2013 pour remplacer Ramtane Lamamra

Emmanuel Edou

Cameroun

Afrique Centrale

H

Ancien délégué général à la Sûreté nationale (2009–2010) ; ancien secrétaire d’État à la Défense en charge de la Gendarmerie (1997–2000) ; ancien ministre adjoint à l’Administration territoriale et à la Décentralisation (2004–2009)

Épiphanie Ntamwana Kabushemeye

Burundi

Afrique de l’Ouest

F

Chef de cabinet du représentant spécial de l’UA en Somalie ; ancienne ambassadrice auprès de l’UA, de l’UNECA et de l’Éthiopie

Salamatu Hussaini Suleiman

Nigeria

Afrique de l’Ouest

F

Commissaire aux Affaires politiques, à la Paix et à la Sécurité de la CÉDÉAO

Mona Omar Attia

Égypte

Afrique du Nord

F

Ambassadrice au Danemark `; ministre adjointe aux Affaires étrangères

Churchill Ewumbue Monono

Cameroun

Afrique Centrale

H

Ministre-conseiller auprès de l’ambassade en Russie

Paix et Sécurité

François Lounceny Fall

Guinée

Afrique de l’Ouest

H

Vice-président de la Commission conjointe de suivi et d’évaluation au Soudan du Sud ; ancien premier ministre (2004) ; ministre des Affaires étrangères (2002–2004; 2012–2015) ; représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Somalie (2005–2010)

Rahamtalla Mohamed Osman Elnor

Soudan

Afrique de l’Est

H

Représentant permanent auprès de l’ONU ; ancien sous-secrétaire aux Affaires étrangères

Amani Abou-Zeid

Égypte

Afrique du Nord

F

Représentant de la BAD au Maroc

Aboubakar Baba Moussa

Bénin

Afrique de l’Ouest

H

Directeur des Infrastructures et de l’Énergie de l’UA (depuis 2004)

Mahboub M. Maalim

Kenya

Afrique de l’Est

H

Secrétaire exécutif de l’IGAD

Amel Makhlouf

Tunisie

Afrique du Nord

F

Coordinateur pour la Tunisie (R20, Régions pour le Climat)

Koussi René N’Guetta

Côte d’Ivoire

Afrique de l’Ouest

H

Directeur des Affaires économiques de l’UA

Ousmane Sylla

Guinée

Afrique de l’Ouest

H

Ambassadeur en Belgique

Affaires Politiques

Infrastructures et Énergie

14

Région

Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité  •  WWW.ISSAFRICA.ORG/PSCREPORT

CANDIDATURES POUR LA COMMISSION DE L’UA 2016 – 2020* Poste

Affaires sociales

Ressources humaines, Sciences et Technologies

Commerce et Industrie

Économie rurale et Agriculture

Candidat

Pays

Région

Sexe

Antécédents

Philémon Zo’o Zame

Cameroun

Afrique Centrale

H

Secrétaire permanent pour le ministère des Travaux publics

Justine Diffo Tchunkam

Cameroun

Afrique Centrale

F

Directeur de la division Recherche à l’Université de Yaoundé

Amira Elfadil Mohammed Elfadil

Soudan

Afrique de l’Est

F

Ministre de la Sécurité sociale

Mustapha Sidiki Kaloko

Sierra Leone

Afrique de l’Ouest

H

Commissaire sortant

Warren Naamara

Ouganda

Afrique de l’Est

H

Directeur-pays d’ONUSIDA en Éthiopie

Sabine Ntakarutimana

Burundi

Afrique Centrale

F

Ancienne ministre de la Santé et de la Lutte contre le SIDA

Saidi Kibeya

Burundi

Afrique Centrale

H

Coordonnateur du bureau à la Présidence chargé des Études stratégiques et de Développement ; ancien ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, des Travaux publics et des Transports

Fatimetou Mohamed Saleck

Mauritanie

Afrique du Nord

F

PDG de Servotics ; ancienne secrétaire d’État aux Nouvelles technologies

Maurice Tchuente

Cameroun

Afrique Centrale

H

Recteur de l’Université de Buea ; ancien ministre de la Recherche scientifique (2002–2004)

Fatima Haram Acyl

Tchad

Afrique Centrale

F

Commissaire sortant

Mona Toema El-Garf

Égypte

Afrique du Nord

F

Présidente de l’Autorité égyptienne de la concurrence ; professeure d’économie à l’Université du Caire

Safiatou Ndiaye

Sénégal

Afrique de l’Ouest

F

Ancienne ministre de la Culture ; ancienne ambassadrice en Suisse

Aly Abdel Hamid Abou Sabaa

Égypte

Afrique du Nord

H

Vice-président de la BAD en charge de l’Agriculture, de l’Eau, du Développement humain et des Ressources naturelles

Josué Dione

Mali

Afrique de l’Ouest

H

Conseiller spécial du commissaire de l’UA à l’Économie rurale et à l’Agriculture ; ancien directeur de la division Sécurité alimentaire et Développement durable de l’UNECA

François Ekanga Ekoko

Cameroun

Afrique Centrale

H

Université des Nations Unies ; Conseiller à la coopération Sud-Sud ; PNUD

Antoine Marie Moustache

Seychelles

Afrique de l’Est

H

Directeur exécutif de l’Agence agricole des Seychelles ; conseiller spécial du ministre des Ressources naturelles et de l’Industrie

Yacouba Sanon

Burkina Faso

Afrique de l’Ouest

H

CÉDÉAO ; expert régional sur les programmes agricoles et l’investissement

Paul Tasong Njukang

Cameroun

Afrique Centrale

H

Commissaire à l’Économie, aux Finances et aux Politiques monétaires de la CEMAC

Anthony Mothae Maruping

Lesotho

Afrique Australe

H

Commissaire sortant

Affaires économiques

Répartition régionale

Sexe

Afrique du Nord

7

Hommes

26

Afrique de l’Ouest

10

Femmes

14

Afrique Centrale

13

Afrique de l’Est

8

Afrique australe

2

* Liste des candidatures en date d’avril 2016. Certains candidats pourraient se retirer de la course d’ici aux élections à la mi-juillet.

Numéro 80  •  Mai 2016

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Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité

Entretien avec le CPS Créer des espaces transnationaux pacifiques Les frontières et le manque de délimitations claires ont été identifiés comme l’une des causes des conflits qui secouent le continent africain. Le Programme Frontières de l’UA (PFUA) œuvre à la réduction des risques de conflits. Le Rapport sur le CPS s’est entretenu avec l’ambassadeur Aguibou Diarrah, chef du PFUA au sein du département Paix et Sécurité.

En quoi consiste le Programme Frontières ? C’est un programme qui a pour objectif la prévention structurelle des conflits. On a toujours géré les crises violentes, il y a lieu de les prévoir et de les anticiper. Le programme est logé au sein du département Paix et Sécurité, dans la division Prévention des conflits. Ce programme repose sur quatre grands axes. Le premier traite de la démarcation des frontières qui ont longtemps été source de tensions et de conflits entre les pays, notamment entre le Mali et le Burkina Faso, entre le Nigeria et le Cameroun, entre le Tchad et la Libye ou entre l’Éthiopie et l’Érythrée. Ce sont là des cas de délimitation mal gérée de frontières. C’est pour cette raison que les chefs d’État ont décidé de créer ce programme.

La démarcation des frontières a longtemps été source de tensions et de conflits entre les pays Le deuxième axe porte sur la coopération transfrontalière. Il faut aller au-delà de la démarcation. Il faut arriver à l’intégration progressive des pays via une coopération transfrontalière accrue. Le troisième volet porte sur le renforcement des capacités. Il faut arriver à former les personnels en charge des frontières pour que celles-ci soient bien gérées. Enfin, le quatrième volet s’articule autour du partenariat avec d’autres institutions et de la mobilisation des ressources.

Quelles sont les retombées de ce programme en termes de paix et de sécurité ? Il s’agit d’un programme de prévention. Les retombées sont dans la création d’un espace de paix entre les États. Au lieu que les États s’engagent dans des conflits, nous promouvons les négociations. Par exemple, nous avons réussi à créer un espace de dialogue et de fraternité entre le Soudan et le Soudan du Sud, État nouvellement créé. Nous sommes également en train de créer un espace de dialogue entre certains pays d’Afrique de l’Ouest. Partout où il y a des velléités de tensions, ce programme peut être un instrument d’apaisement.

En quoi peut-il répondre aux problèmes migratoires qui font l’actualité ? La migration est un processus à gérer et non un problème à résoudre. On ne résout pas la migration, c’est un phénomène qui existe depuis des temps immémoriaux. Le programme travaille à partir de la coopération transfrontalière. La Convention

16

Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité  •  WWW.ISSAFRICA.ORG/PSCREPORT

de Niamey peut être un instrument efficace en termes de développement. La frontière est un aboutissement du mouvement des populations vers d’autres cieux. Si l’on arrive à une coopération transfrontalière efficace, on crée une dynamique entre les États. En mutualisant les services de santé et d’éducation dans les zones frontalières, on peut arriver à freiner la migration sauvage. L’instrument juridique peut constituer un élément fondamental dans la régulation des mouvements migratoires. Les relations entre les États et également entre les communautés transfrontalières peuvent atténuer l’ampleur des mouvements migratoires illégaux. La mutualisation des efforts aux frontières peut aider à maintenir la jeunesse — qui constitue le terreau des mouvements migratoires — sur place. Il faut que les États africains ratifient la Convention et s’engagent de façon collective, aux frontières, pour mettre fin à la migration illégale.

Quel bilan faites-vous du programme après dix ans ? Le programme est opérationnel depuis 2009. À sa création, seulement un tiers des 83 000 km de frontières terrestres que compte l’Afrique était démarqué. Aujourd’hui, plus de la moitié des frontières sont démarquées. En matière de coopération transfrontalière, on a adopté la Convention de Niamey. Il s’agit de la première convention relative à la coopération transfrontalière depuis la résolution du Caire de 1964 sur l’intangibilité des frontières. Cette Convention est en cours de ratification. À ce jour, seul le Niger a ratifié le texte, mais neuf autres pays sont engagés dans le processus de ratification. Il va falloir mener un lobbying dynamique pour une ratification plus large de cet instrument. En matière de renforcement des capacités, nous avons produit cinq livres et des guides pratiques, et nous avons produit deux films documentaires sur les activités du programme de 2010 à nos jours.

À l’heure actuelle, seulement la moitié des frontières de l’Afrique est démarquée Quels sont les défis auxquels ce programme fait face ? Les défis à relever sont énormes. Le premier défi est celui que les chefs d’État avaient fixé, à savoir que toutes les frontières soient délimitées/démarquées d’ici 2017. À l’heure actuelle, seulement la moitié de ces frontières est démarquée. Donc le premier défi est la démarcation, mais pour quand, telle est la question. Il va falloir travailler pour relever ce défi. Le deuxième grand défi est la ratification de la Convention de Niamey, évoquée ci-dessus. Le troisième grand défi est la mobilisation des ressources. Le seul partenaire finançant le programme est l’Allemagne qui envisage de mettre fin à son financement. Il va falloir que les pays africains s’engagent dans le financement de ce programme.

Quelles sont les mesures susceptibles d’améliorer la coopération transfrontalière à l’échelle de l’UA ? La Convention de Niamey vise à l’atténuation des procédures bureaucratiques aux frontières. On se retrouve face à une situation de « soft border ». Au lieu d’avoir des procédures bureaucratiques lourdes, il faut des procédures allégées par la mutualisation des activités aux frontières par les États membres. Chaque État demeure souverain, mais il convient d’arriver à une gestion pragmatique des frontières.

À l’heure actuelle, plus de la moitié des quelque

83 000 KM de frontières terrestres de l’Afrique a été démarquée

Numéro 80  •  Mai 2016

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Rapport sur le Conseil de paix et de sécurité

À propos de l’ISS

ISS Pretoria

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