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Réduire la place de l'aléatoire dans le pilotage du système . ...... d'ailleurs qu'en France l'institution a donné le signal du peu d'intérêt qu'elle plaçait dans une ...
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Dossier documentaire Promouvoir une culture de l’évaluation et de pilotage pédagogique dans notre système éducatif Problématique et documents d’accompagnement

Juillet 2010

Promouvoir une culture de l'évaluation et de pilotage pédagogique

Avant-propos "Promouvoir une culture de l’évaluation et de pilotage pédagogique dans notre système éducatif" : voilà assurément une des missions essentielles assignées, depuis de nombreuses années déjà, à l’inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN) et à l’inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la Recherche (IGAENR). Et, derrière ces mots de "culture de l’évaluation" et de "pilotage pédagogique", chacun saisit bien que ce sont les conditions effectives de réussite des élèves qui sont en jeu. Cette mission, tout autant, est assumée par l’École supérieure de l’Éducation nationale (ESEN) à travers la contribution majeure qu’elle apporte à la formation initiale et continue des différentes catégories de personnels d’encadrement de l’institution. Les inspections générales sont au demeurant sollicitées fréquemment à Poitiers pour des interventions à ce titre. Le concours qu’elles peuvent apporter ainsi se traduit également par la production de ressources, à commencer, bien évidemment, par les rapports de synthèse – souvent conjoints IGEN-IGAENR – que les inspecteurs généraux élaborent chaque année sur différents thèmes, de même que par la valorisation de documents émanant de professionnels exerçant soit au niveau de l’administration centrale, soit dans les services académiques, soit encore au sein d’établissements scolaires, et dont la diffusion peut s’avérer profitable pour l’information et la réflexion des divers acteurs du système sur le terrain, y compris naturellement les enseignants. C’est précisément l’objectif envisagé pour ce "dossier documentaire" sur le double thème de la culture de l’évaluation et du pilotage pédagogique du système qui rassemble, outre une note de problématique et des éléments de nature juridique, différents documents émanant :  de contributions ou rapports que des inspecteurs généraux ou des cadres des services académiques, inspecteurs pédagogiques, chefs d’établissement ont rédigés sur divers sujets et qui concernent les conditions d’organisation et de fonctionnement pédagogique de notre système éducatif. Qu’ils soient ici remerciés d’avoir bien voulu accepter que ces textes soient ainsi présentés ;  d’interventions en académie au cours des dernières années dans le cadre d’actions de formation des personnels d’encadrement ou d’interventions à l’ESEN, à Poitiers, ou lors de séminaires ou colloques, entre autres celui qu’organise chaque année l’Association française des administrateurs de l’éducation (AFAE), ou encore d’interventions dans le cadre de la préparation de concours, notamment au sein de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE). Le présent dossier documentaire se veut avant tout un outil pratique d’information et de formation. Il a été conçu à l’intention plus particulièrement des personnels d’encadrement : personnels de direction des établissements, inspecteurs pédagogiques du premier et du second degré, cadres des services académiques, CASU-APAENES, attachés et gestionnaires ; mais sa lecture peut sans doute intéresser aussi d’autres acteurs du système éducatif : des enseignants, assurément, des administrateurs de l’éducation, des responsables de collectivités territoriales, etc. Le parti que les inspections générales et l’ESEN ont pris conjointement pour cette publication est celui d’un ouvrage aisément accessible : s’il comprend une version "papier", avec un sommaire détaillé pour se référer rapidement à tel ou tel document, il est aussi – et d’abord – accessible en ligne et téléchargeable sans le moindre problème aux quatre points cardinaux. Que, de la sorte, les pièces de ce dossier puissent être pleinement utiles aux acteurs de terrain dans l’exercice des fonctions que leur confie l’institution, c’est le vœu ici formé. En ayant conscience que, à travers l’impact de cet ouvrage, c’est aussi une façon d’aider les personnels à assumer au mieux leur tâche quotidienne consistant à faire réussir les élèves. Tous les élèves.

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Sommaire A. PROBLÉMATIQUE ...................................................................................................................................................................................... 4 1. Plusieurs raisons militent pour un développement de la culture de l’évaluation et du pilotage pédagogique ....................................... 4 1.1. La démarche d’évaluation dans le système éducatif : une nécessité assez largement admise désormais ....................................................................5 Un écho familier parmi les acteurs du système mais aussi une exigence démocratique ................................................................................................5 La mise en œuvre de la LOLF vient conforter la place que doit occuper l’évaluation dans notre système éducatif .......................................................5 Des acquis significatifs et reconnus en matière d’évaluation au cours des dernières décennies....................................................................................6 1.2. Le "pilotage pédagogique" : concilier la liberté pédagogique et l’autonomie des acteurs et les attentes fortes de l’institution .......................................7 "Liberté pédagogique" des enseignants et autonomie des établissements .....................................................................................................................7 Améliorer le pilotage pédagogique et la "performance" : l’objectif premier de la réforme de l’enseignement primaire engagée depuis septembre 2008 ....10 Le "pilotage pédagogique" : un des axes essentiels du référentiel des corps d’inspection pédagogique de mai 2009 ...............................................10

2. Promouvoir une "culture commune" qui soit, autant que possible, partagée entre les personnels de direction et les inspecteurs pédagogiques....11 2.1. Construire une problématique appropriée de l’évaluation des établissements pour prévenir les craintes qu’elle peut susciter ..................................11 Ne pas mésestimer que la culture de l’évaluation est une notion souvent controversée ..............................................................................................11 La nécessité d’une attitude constructive pour prévenir des malentendus, voire des inquiétudes éventuelles .............................................................12 Crédibiliser l’évaluation en tirant parti au mieux des outils d’analyse et de mesure de la performance .......................................................................13 2.2. Renforcer le pilotage pédagogique des établissements ................................................................................................................................................14 Réduire la place de l’aléatoire dans le pilotage du système ..........................................................................................................................................14 Réussir à créer du lien entre des acteurs dont les approches ne sont pas forcément convergentes ...........................................................................15 Conforter la responsabilité pédagogique des chefs d’établissement .............................................................................................................................16 Des "audits à visée participative" ou des formules analogues pour assurer une complémentarité entre l’évaluation interne et la contribution d’évaluateurs externes ...................................................................................................................................................................................................17 Inscrire des dispositifs tels que des "contrats d’objectifs" dans le cadre d’un pilotage pédagogique partagé ...............................................................18 Viser à la création d’une véritable "chaîne de l’évaluation" à travers des modalités d’accompagnement au plus proche du "terrain" ........................19

B. DOCUMENTS D'ACCOMPAGNEMENT ................................................................................................................................................... 21 1. Éléments de nature juridique .................................................................................................................................................... 21 Doc 1 - Dispositions principales de la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 .............................................................21 Doc 2 - Les sept piliers du socle commun de connaissances et de compétences – Décret du 11 juillet 2006 ....................................................................22 Doc 3 - "Le décret de 1985, vingt-cinq ans après" ................................................................................................................................................................24 Doc 4 - Référentiel des corps d’inspection pédagogique - Direction de l’encadrement - Mai 2009 ....................................................................................31 Doc 5 - L’évaluation des établissements scolaires : éléments de nature juridique ...............................................................................................................34 Doc 6 - Circulaire ministérielle pour la préparation de la rentrée scolaire 2004 (extraits) ....................................................................................................38 Doc 7 - Circulaire no 90-108 du 17 mai 1990 sur le "projet d’établissement"........................................................................................................................40 Doc 8 - L’essentiel n° 3 – décembre 2007 La note d’information sur les rapports des inspections générales ....................................................................47

2. Documents relatifs à l'évaluation .............................................................................................................................................. 50 Doc 9 - "Programmes de la LOLF et programmes scolaires, performance de l’établissement et réussite des élèves" .......................................................50 Doc 10 - Note de la DEPP (décembre 2008) relative aux performances des élèves de CM2 à vingt ans d’intervalle – 1987-2007 ...................................55 Doc 11 - L’évaluation PIRLS .................................................................................................................................................................................................61 Doc 12 - L'évaluation des écoles primaires ...........................................................................................................................................................................66 Doc 13 - Résumé et propositions du rapport IGEN-IGAENR sur "l’évaluation des collèges et des lycées en France : bilan critique et perspectives en 2004" .....71 Doc 14 - Comment amener le changement dans les méthodes et procédures d’évaluation des établissements scolaires ? .............................................77 Doc 15 - Les indicateurs de pilotage des EPLE ....................................................................................................................................................................79 Doc 16 - L'évaluation des performances des élèves .............................................................................................................................................................89

3. Documents relatifs au pilotage pédagogique.............................................................................................................................. 92 Doc 17 - Le pilotage pédagogique partagé ...........................................................................................................................................................................92 Doc 18 - Évaluations d’écoles et inspections individuelles ................................................................................................................................................ 102 Doc 19 - Protocole élaboré par l’inspectrice d’académie-DSDEN de la Manche, en lien avec les IEN de ce département, afin de mieux organiser le déroulement des visites effectuées dans les écoles par les IEN ....................................................................................................................................... 105 Doc 20 - "Le pilotage pédagogique de l’EPLE" .................................................................................................................................................................. 110 Doc 21 - Audits d’établissements à visée participative ...................................................................................................................................................... 114 Doc 22 - "Une évaluation des compétences au service de la politique pédagogique de l’établissement" ........................................................................ 116 Doc 23 - Formation continue et pilotage pédagogique : quelle perception les différents acteurs du système ont-ils de la formation continue ? ............. 124 Doc 24 - "Veut-on vraiment abattre le Mur de Berlin ?" ..................................................................................................................................................... 127

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A. Problématique François LOUIS IGAENR1 "Culture de l’évaluation", "performance", "pilotage pédagogique", ou encore "gouvernance2 des établissements" : voilà tout un ensemble d’expressions de plus en plus souvent employées lorsque l’on évoque les évolutions – en cours et/ou souhaitables – de notre système éducatif. Employées, mais aussi critiquées parce que ressenties parfois comme "technocratiques" ; en réalité, l’enjeu prioritaire que mettent au premier plan ces différents concepts, un enjeu qui fait au demeurant le lien entre toutes les parties prenantes de l’École, c’est bien la mission assignée à l’École : la réussite de chaque élève, et de tous les élèves. Le présent ouvrage se propose justement de faciliter le lien entre ces concepts et l’enjeu prioritaire que sont les conditions de réussite des élèves :  dans une première partie, il aborde d’abord la problématique générale de l’évaluation et du pilotage pédagogique dans notre système éducatif, avant de formuler un certain nombre de suggestions visant à développer une "culture commune", avec le souhait que, autant que possible, elle soit partagée entre les chefs d’établissement et les inspecteurs pédagogiques ;  dans une seconde partie, il présente différents documents directement en rapport avec les thématiques abordées et qui peuvent se révéler utiles pour approfondir tel et tel points.

1. Plusieurs raisons militent pour un développement de la culture de l’évaluation et du pilotage pédagogique Appliquée au système éducatif, la démarche d'évaluation est, à l’échelle du long terme, relativement nouvelle en France, comme au demeurant dans beaucoup d'autres pays. Elle suscite, a priori, un très large consensus sur son principe ; pour autant, la culture de la performance occupe dans les modes de gestion du système éducatif français une place que l'on peut considérer comme encore relativement modeste, quoique irremplaçable. La démarche d’évaluation requiert donc toute l’attention de l’institution, a fortiori eu égard aux attentes exprimées depuis quelques années par la LOLF3 en matière d’évaluation de la performance des acteurs publics. La notion de "pilotage pédagogique", quant à elle, est de plus en plus fréquemment utilisée dans notre administration pour exprimer une approche de son management qui, sans négliger nullement les contraintes et aspects administratifs, entend aller au-delà des questions d’organisation en prenant pleinement en considération les enjeux essentiels pour le système éducatif que sont tout simplement les conditions de réussite des élèves. Sous cet angle, la question de l’articulation des rôles joués par les différents et multiples acteurs du système (enseignants, personnels de direction, d’inspection pédagogique, services académiques) est considérée, assurément, comme primordiale4.

Précédemment chef de la Mission de l’évaluation à la DEP, après avoir exercé comme sous-directeur des moyens à la direction des lycées et collèges et, auparavant, comme secrétaire général de l’académie de Paris ; docteur en sciences de gestion. 2 Le terme de "gouvernance" est celui qui a été retenu pour un colloque organisé à la Sorbonne le 15 octobre 2009 par la direction de l’encadrement sur le thème "Gouvernance et performances des EPLE". 3 Loi organique relative aux lois de Finances du 1 er août 2001. 4 Cf. document n° 17. 1

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1.1. La démarche d’évaluation dans le système éducatif : une nécessité assez largement admise désormais Un écho familier parmi les acteurs du système mais aussi une exigence démocratique Le terme "évaluer" trouve naturellement un écho dans un - dans le - service public qui pratique continuellement, à l'égard de ses usagers, les élèves et les étudiants, un travail d’évaluation. La notion d'évaluation est reconnue par les acteurs de l'École comme une notion familière. De plus, la nécessité de mieux connaître le fonctionnement du système éducatif et d'apprécier ses résultats est largement admise, plusieurs éléments convergents expliquant l’émergence de ce consensus :  le poids considérable de la dépense publique consacrée à l’éducation : au regard de tels montants budgétaires, l’"investissement éducatif" est-il rentable ? faut-il dépenser plus ? dépenser mieux ? Davantage que par le passé, le service public de l’éducation est confronté à cette exigence d’un droit de regard sur la qualité de ses résultats. Faut-il rappeler pourtant que l’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 précisait déjà que "la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration"5 ?  certaines attentes légitimes et pressantes de l’opinion publique : le système éducatif français doit aujourd’hui répondre à une forte demande sociale et sociétale quant à son efficacité dans la formation des élèves et leur préparation à affronter des études supérieures ou le marché de l’emploi. Les principales interrogations quant à "l'efficacité de l'École" - partagées au demeurant par beaucoup d'autres pays – sont les suivantes : qu'en est-il de la qualité des apprentissages ? le niveau des élèves s'améliore-t-il ? baisse-t-il ? l’insertion dans la vie active et professionnelle est-elle assurée au mieux ? et qu'en est-il, dans la réalité quotidienne, de l'égalité des chances ?  l'École, d’autre part, en tant qu'institution, est perçue encore amplement comme une "boîte noire" par les parents et nombre de responsables pour ce qui concerne ses conditions réelles de fonctionnement ; cette perception vaut d'abord pour l'unité de base, la classe, mais aussi pour les différents établissements scolaires : le service assuré ici est-il d'une qualité équivalente à celui offert dans un établissement voisin ? L'École, désormais, échappe d’autant plus difficilement à une approche comparative que les comparaisons sont fréquentes et se sont banalisées tant au niveau national (classements réguliers des établissements dans la presse) qu’au niveau international (programme PISA de l’OCDE, par exemple). La mise en œuvre de la LOLF vient conforter la place que doit occuper l’évaluation dans notre système éducatif La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de Finances (LOLF) depuis le 1er janvier 2006 a indiscutablement une incidence sur la place que doit occuper la démarche d’évaluation dans le système éducatif ; elle en fait une obligation légale. Votée en août 2001 à une très large majorité6 par le Parlement (tant par l’Assemblée nationale que par le Sénat), la LOLF dépasse en effet les clivages politiques habituels. Elle vise à présenter les politiques publiques en termes stratégiques, en mettant en avant une obligation de résultat et pas simplement une obligation de moyens ; elle exprime une réelle attente sociale en termes de résultat de l’action publique, ou, pour prendre le terme qu’elle emploie, d’évaluation de la "performance" des services de l’État. La LOLF "légitime" la démarche d’évaluation, avec trois angles d’approche : l’efficacité, l’efficience et l’équité.

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Cf. document n° 5. Ce très large consensus, au-delà des clivages politiques classiques, vaut d’être souligné - a fortiori s’agissant d’une loi "organique", située par conséquent à un niveau très élevé dans la "hiérarchie" des textes normatifs - parce que l’idée même d’évaluation tout autant que la notion de "performance" sont parfois contestées, voire caricaturées de façon simpliste. École supérieure de l'éducation nationale

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S’agissant des établissements scolaires, il est certain que l’État, depuis l’entrée en vigueur des lois de décentralisation en 1986, n’est pas le seul financeur ; les collectivités territoriales apportent une contribution non négligeable au fonctionnement des établissements, de longue date au demeurant pour "l’école communale". Il est vrai également que, si l’on exclut les crédits de rémunération des personnels enseignants et administratifs qui n’entrent pas en ligne de compte dans le budget des EPLE, la part des crédits d’État allouée aux établissements scolaires est minime. On pourrait en déduire qu’ils n’entrent pas dans le champ couvert par la LOLF, cette observation valant d’autant plus pour les écoles primaires puisqu’elles sont dépourvues du statut d’établissement public. Soutenir ce point de vue aboutirait toutefois à méconnaître deux éléments essentiels et évidents, ainsi que l’a souligné le chef du service de l’IGAENR, Thierry Bossard, lors du colloque organisé le 15 octobre 2009 à la Sorbonne sur le thème "Gouvernance et performances des EPLE"7 :  la contribution du budget de l’État dans la rémunération des personnels enseignants et administratifs : l’engagement financier de l’État demeure prépondérant dans le fonctionnement quotidien des établissements scolaires ;  le fait, d’autre part, que les EPLE comme les écoles appartiennent pleinement à un service public de l’État, l’Éducation nationale ; comment pourraient-ils à bon droit s’affranchir des attentes fortes exprimées par le Parlement à travers la LOLF ? Comme on l’évoquait plus haut, la loi organique ne promeut pas seulement la notion de "performance" ; elle met également l’accent, fort opportunément, sur une vision plus stratégique du management public, et donc, pour ce qui concerne l’Éducation nationale, sur les conditions du pilotage – et du pilotage pédagogique – du système : elle invite les acteurs publics à mieux définir leurs objectifs, à les finaliser, et ce aux différents niveaux : national, intermédiaire (régional et départemental), et au niveau des établissements publics. Dans cette perspective, l’interrogation sur la performance occupe bien évidemment une place cruciale parce que c’est l’appréciation des résultats des politiques engagées qui permettra de mieux finaliser ou d’infléchir, précisément, les objectifs. La circulaire ministérielle pour la préparation de la rentrée scolaire 20048 a mis justement en exergue cette nécessité d’améliorer les conditions du pilotage stratégique du système éducatif, tant au niveau national qu’au niveau des académies et des établissements scolaires. Ceci étant, sans doute faut-il convenir effectivement, après quelques années, avec Alain Bouvier9 notamment, que "le premier bilan de la mise en œuvre de la LOLF dans l’Éducation nationale" a été, jusqu’à présent, "en demi-teinte" ; "il faudra encore quelques années", souligne-t-il à raison, "pour voir vers quoi l’ensemble se dirige" ; néanmoins, "il n’est pas interdit", ajoute-t-il, "d’espérer et de voir dans la LOLF l’un des outils attendus pour aider à la gouvernance nationale et locale". Des acquis significatifs et reconnus en matière d’évaluation au cours des dernières décennies Les attentes promues par la LOLF pour les services de l’État viennent conforter les travaux entrepris depuis le début de la décennie 1980 par l’administration de l’Éducation nationale, notamment par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) : construction d’un "système d’information" qui soit fiable, avec des bases de données organisées et mobilisant judicieusement l’outil informatique ; publication régulière de documents tels que "Repères et références statistiques sur l’éducation", "L’état de l’École", "Géographie de l’École", notes thématiques de la DEPP, travaux sur des indicateurs, etc. C’est en 1987 qu’avait été créée une direction de l’évaluation et de la prospective (DEP), qui, aujourd’hui, met des outils d’évaluation à la disposition des acteurs, outre la responsabilité d’un appareil statistique performant de l’ensemble de l’Éducation nationale ; suite à la mise en œuvre de la LOLF, le terme de "performance" a été ajouté à sa dénomination (DEPP). Par ailleurs, un Haut Conseil de l’évaluation de l’école avait été mis en place en 2000, organisme indépendant du ministère Cf. document n° 3. Cf. document n° 6. 9 Cf. à ce sujet : "Réflexions sur les débuts de la mise en œuvre de la LOLF à l’Education nationale", par Alain Bouvier (membre du Haut Conseil de l’Education, précédemment recteur d’académie), Collection Les numéros spéciaux de la Revue Éducation et Management, octobre 2008. 7 8

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chargé de trois missions : expertise, synthèse, proposition ; il n’avait pas pour mission de procéder luimême à des évaluations, mais d’examiner l’évaluation du système éducatif ; ses missions, depuis quelques années, sont assurées par le Haut Conseil de l’Éducation10. Assurément, la démarche de meilleure connaissance (quantitative et qualitative) du fonctionnement de notre système éducatif n’est pas regardée comme gratuite, ou comme une approche simplement intellectuelle, mais comme un instrument utile pour l’action : évaluer pour agir et pour ré-agir. L’objectif généralement admis est bien celui d'apprécier les résultats afin de mieux piloter le système et de mettre les différents acteurs – à commencer par l’enseignant dans sa classe11 - en mesure d'adapter leur action par rapport :  aux objectifs initiaux d'une politique, d’un projet académique, et tout autant d'un projet d’établissement ou d’école, ou encore de tel projet ou de telle innovation pédagogique ;  aux besoins des élèves, mieux identifiés, a fortiori s’il s’agit d’élèves en difficulté ;  à des problèmes qui appellent une solution. En fait, l’évaluation du "système éducatif" constitue, aujourd’hui, une responsabilité partagée par de multiples acteurs :  les enseignants pour ce qui concerne les élèves et les étudiants ; outre le dispositif d’examens, des évaluations diagnostiques et des évaluations bilans des acquis des élèves sont entreprises à grande échelle depuis la décennie 1980 ;  les corps d’inspection pour ce qui concerne les personnels enseignants et les unités d’enseignement, qui interviennent au niveau académique ;  les services académiques, bien évidemment ;  au niveau national, l’inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN) et l’inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la Recherche (IGAENR) procèdent, en liaison avec les services administratifs compétents, à des évaluations départementales, académiques12 et nationales.

1.2. Le "pilotage pédagogique" : concilier la liberté pédagogique et l’autonomie des acteurs et les attentes fortes de l’institution "Liberté pédagogique" des enseignants et autonomie des établissements Le milieu enseignant, on le sait, est généralement très attaché au principe affiché et revendiqué de "liberté pédagogique". On a pu le constater à nouveau en 2006 quand le ministre, à l’époque, avait voulu orienter les méthodes d’apprentissage de la lecture à l’école élémentaire ; l’institution, finalement, avait dû faire "machine arrière". Le code de l’éducation, au demeurant, affirme que les enseignants bénéficient effectivement, pour organiser au quotidien leur enseignement, de la liberté pédagogique.

Article 14 de la loi d’orientation d’avril 2005. Rappelons qu’une circulaire du 23 mai 1997 (Bulletin officiel n° 22 du 29 mai 1997) précise clairement, pour ce qui concerne les professeurs "exerçant en collège, en lycée d’enseignement général et technologique ou en lycée professionnel" quelle est leur "mission" ; ce texte est ordonné autour de trois parties : "I – Exercer sa responsabilité au sein du système éducatif ; II – Exercer sa responsabilité dans la classe ; III – Exercer sa responsabilité dans l’établissement". 12 Un dispositif d’évaluation des conditions d’enseignement dans les académies a été engagé de 1999 à 2006 sur l’ensemble des académies métropolitaines ; effectuées conjointement par les deux inspections générales, ces évaluations se sont appuyées sur l’analyse d’un dossier constitué par les services académiques et sur des données fournies par l’administration centrale puis, à partir des hypothèses que cette analyse conduisait à élaborer, sur des entretiens conduits en académie ainsi que sur des visites d’établissements ou de circonscriptions ; les entretiens ont concerné les responsables de l’Éducation nationale dans l’académie, mais aussi un certain nombre d’acteurs directement intéressés par le fonctionnement du système scolaire : personnels, parents d’élèves, autres services de l’État, Conseil régional, Conseils généraux, représentants des maires, acteurs économiques… ; les rapports de synthèse se sont conclus par des recommandations à l’adresse de l’académie et du niveau national. 10 11

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L’autonomie des "établissements publics locaux d’enseignement" (EPLE), en second lieu, est un principe de fonctionnement pédagogique affirmé lui aussi par l’institution depuis à présent un quart de siècle. Elle tient d’abord au statut d’établissement public qui a été conféré aux collèges, aux lycées et aux lycées professionnels par les lois de décentralisation des années 1980 et par le décret (plusieurs fois révisé depuis) du 30 août 198513 ; à lui seul en effet, ce statut d’établissement public donne aux EPLE la personnalité morale, et donc la capacité juridique et l’autonomie budgétaire et financière dont ils ne bénéficiaient pas auparavant14. L’autonomie des EPLE s’exprime également à travers la notion de "projet d’établissement" promue par l’institution depuis la loi d’orientation de juillet 1989 et réaffirmée par la loi d’orientation d’avril 200515. Elle s’exprime encore – même s’il convient de reconnaître que les marges effectives d’autonomie pédagogique des établissements secondaires sont limitées – à travers des dispositifs tels que l’attribution d’une dotation horaire globale (DHG) et la globalisation de crédits pédagogiques, ou par des marges telles que celles dont bénéficient les LEGT dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme du lycée à compter de la rentrée scolaire 2010. Ces principes étant clairement posés, le pilotage pédagogique ne va-t-il pas à l’encontre de la liberté pédagogique des enseignants ? Voilà une question très souvent soulevée ! Car la plupart des enseignants craignent une remise en cause de leur liberté pédagogique à travers les notions de gouvernance ou de pilotage. Et quelle(s) leçon(s) prétendrait-on leur donner aujourd’hui à travers un tel concept de pilotage pédagogique ?! Quelle(s) justification(s) à d’éventuelles remises en cause de leur pratique ?! Comment répondre à ce type d’interrogations, pour ne pas dire d’interpellations ? On observera d’abord, pour ce qui concerne les établissements secondaires, que les personnels de direction, de même que les enseignants, travaillent quotidiennement au sein de l’établissement, ce qui n’est pas le cas, en revanche, des inspecteurs pédagogiques, dont la présence est inévitablement irrégulière. Sur cette donnée de fait, les sentiments des uns et des autres sont au demeurant ambivalents : les enseignants développent généralement une certaine appréhension à l’égard des visites d’inspection ; mais, d’un autre côté, ils apprécient le concours que l’expertise de l’inspecteur et un regard positif peuvent apporter à l’amélioration de leur pratique professionnelle, tout spécialement pour ce qui concerne le défi quotidien auxquels ils ont à faire face, la gestion de la classe. Quant aux personnels de direction, ils (et elles) vivent la même ambivalence : attachés au principe affiché par l’institution d’autonomie de leur établissement et aux marges de liberté dont ils disposent, ils entendent bien être "maîtres chez eux" ; mais ils sont néanmoins preneurs, bien évidemment, des avis et conseils que les inspecteurs peuvent apporter à la faveur de leurs visites, tant pour ce qui concerne des enjeux pédagogiques transversaux (mise en œuvre de réformes et de dispositifs pédagogiques, projet d’établissement, aide aux élèves en difficulté, entre autres) que pour le suivi de carrière et la gestion des personnels enseignants, notamment pour ce qui concerne l’appui à des néo-titulaires, à des personnels en difficulté passagère ou plus sérieuse, ou pour des actions de formation continue16, notamment sur site, etc. Si la place que l’inspecteur pédagogique occupe au sein de l’établissement est ainsi plus limitée du fait de l’irrégularité de sa venue, il dispose cependant d’un atout – et quel atout… "maître" ! –, la possibilité d’entrer dans l’"espace clos" où s’exerce de façon déterminante la liberté pédagogique de l’enseignant, la classe. Les proviseurs et principaux savent pertinemment que la seule autorité pédagogique effectivement reconnue, en tout cas a priori, par les enseignants est celle de l’inspecteur, même si les chefs d’établissement partagent avec les inspecteurs le "pouvoir" de notation. Ceci étant, si la "légitimité pédagogique" d’un personnel de direction, à la différence de l’inspecteur, n’est nullement gagnée d’avance, de multiples exemples montrent cependant que cette légitimité peut parfaitement s’affirmer, les personnels de direction n’étant pas dépourvus de divers "leviers", outre la compétence, bien évidemment, pour l’établir de façon sereine.

Cf. document n° 3. Statut dont ne bénéficient pas, en revanche, les écoles primaires. 15 Cf. document n° 7. 16 Cf. document n° 23. 13 14

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Ces précisions une fois données, on conviendra que l’autonomie des acteurs constitue, par définition, un pari positif ; l’accent mis sur la liberté pédagogique des enseignants et l’autonomie des acteurs ne peut aller sans responsabilisation de leur part et sans une attention portée aux effets des projets mis en œuvre au regard des moyens mobilisés ; l’évaluation des résultats effectivement atteints est, en fin de compte, la contrepartie logique de la liberté d’action consentie aux acteurs. L’objectif de l’autonomie, c’est bien l’adaptation à un contexte particulier afin d’améliorer la "performance" des établissements, et donc les conditions effectives de réussite des élèves, y compris ceux qui se trouvent confrontés à des difficultés de nature diverse. Au demeurant, c’est bien l’orientation que prennent également d’autres pays au-delà de nos frontières. La loi d’orientation d’avril 2005 conforte cette recherche d’un point d’équilibre entre l’autonomie des acteurs et les attentes de l’institution à travers plusieurs de ses dispositions17 :  l’article 9, d’abord, qui affirme la garantie "à chaque élève", à travers "la scolarité obligatoire", des "moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun (…) de connaissances et de compétences"18 ;  l’article 16, ensuite, prévoit la mise en place dans les écoles et les EPLE au profit d’élèves en difficulté d’un "programme personnalisé de réussite éducative" (PPRE) ;  la loi de 2005 reprend d’autre part à son compte la notion de "projet d’établissement" puisque son article 34 envisage, "dans chaque école et établissement d’enseignement scolaire public", l’élaboration d’ "un projet d’école ou d’établissement", qui "peut prévoir la réalisation d’expérimentations" de nature pédagogique pour autant que celles-ci ciblent bien l’amélioration des conditions de réussite des élèves. Au-delà des clivages politiques, il y a donc bien un consensus à présent établi sur la notion de "projet" ;  l’article 36 envisage, lui, l’élaboration et la signature par les EPLE d’un "contrat d’objectifs conclu entre l’établissement et l’autorité académique", avec un point d’équilibre entre l’autonomie des EPLE et la prise en compte par les établissements des attentes de l’institution. On ajoutera que, dans le domaine de l’enseignement supérieur, l’approche retenue par le législateur est tout à fait similaire : en effet, si la "loi LRU" – "Libertés et responsabilités des universités" – adoptée par le législateur en août 2007 a prévu de confier "des compétences élargies" aux universités, tout spécialement le transfert de la gestion de la masse salariale, les marges d’autonomie consenties par cette loi constituent cependant un instrument, avant tout. Elles laissent entière l’interrogation sur le sens, sur le pilotage stratégique de l’université, et donc sur l’élaboration de son projet d’établissement et la définition des objectifs prioritaires qu’elle entend poursuivre. Et le cadre dans lequel ce pilotage stratégique doit s’inscrire est celui défini par la LOLF : la préoccupation d’améliorer la performance doit être située au premier plan19 avec, très concrètement, une double traduction souhaitable :  améliorer de façon significative les conditions de réussite des étudiants accueillis par les différentes composantes, notamment les étudiants de licence, surtout en L1 ;  faire en sorte que, à travers le développement de projets de recherche, les universités optimisent leur contribution au développement des savoirs.

Cf. document n° 1. Cf. document n° 2. 19 Encore faut-il que, comme ailleurs, le management soit effectivement participatif pour garantir un réel dialogue de gestion, l’enjeu n’étant pas seulement que l’équipe de direction d’une université donnée dispose d’instruments de pilotage plus performants grâce à une meilleure organisation en son sein du système d’information, mais que le pilotage soit effectivement partagé entre l’instance de direction et les composantes ; dans la négative, on pourrait craindre que chacune des composantes se replie sur son "pré carré", voire que chacun "tire à hue et à dia" plutôt que d’apporter son concours propre à la réalisation d’objectifs définis et adoptés au niveau de l’université dans son ensemble. De ce point de vue, le partage de données transparentes peut contribuer à faire émerger un changement de culture et une vision solidaire de l’université dans son ensemble, où chaque composante parvient à se convaincre que sa propre réussite passe aussi par la réussite des autres composantes. 17 18

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Améliorer le pilotage pédagogique et la "performance" : l’objectif premier de la réforme de l’enseignement primaire engagée depuis septembre 2008 Dans le cas de l’enseignement primaire, l’amélioration du pilotage pédagogique et de la performance constitue l’axe principal de la réforme engagée depuis le début de l’année scolaire 20082009. De fait, plusieurs opérations d’évaluation tant nationales20 qu’internationales21 ont appelé l’attention sur une diminution préoccupante de la "performance" globale de l’école primaire. Il devenait donc nécessaire d’améliorer les conditions du pilotage du premier degré et de passer, selon la formule à présent classique, d’un système "administré" à un système "piloté", qui fasse confiance à la liberté pédagogique des acteurs, mais en les incitant à trouver des solutions inventives, locales, et à étendre des "bonnes pratiques" ; il est important que ce pilotage puisse aussi s’appuyer, au niveau territorial, sur des indicateurs et sur l’appropriation par les équipes de la culture du résultat. Cette réforme de l’école primaire engagée depuis la rentrée scolaire 2008 représente, selon l’expression du ministre de l’Éducation nationale22 "un chantier prioritaire" ; il est souhaitable, a-t-il souligné, "de rentrer dans une nouvelle vision de l’école, avec exigence de qualité et culture de la performance", parce que la dégradation des performances est incontestable et qu’elle touche particulièrement les élèves des catégories défavorisées. La politique engagée en conséquence comporte trois volets : outre de nouveaux programmes d’enseignement et une nouvelle organisation de la semaine scolaire, de nouveaux instruments d’évaluation ont été mis à la disposition des écoles et des maîtres : évaluations en CE1 et en CM2. La préoccupation est donc bien réelle de favoriser, autant que possible, une démarche d’évaluation par les écoles de leur "performance". Sans doute cette nouvelle approche représente-t-elle un tournant difficile pour le corps enseignant du premier degré, qui est homogène et qui, bien qu’exerçant son métier de façon "libérale", porte de longue date le symbole de l’École. Mais la démarche de projet devient habituelle aux différents niveaux de fonctionnement de notre système éducatif, qu’il s’agisse de l’académie, du département, de la circonscription ou des établissements. C’est bien un "pilotage opérationnel" que promeut la réforme engagée depuis septembre 2008, à distinguer de "l’administration" ou du simple pilotage de la gestion. L’organisation d’un tel pilotage doit donc être pensée de même que son organisation fonctionnelle. À cet égard, il est clair que le pilotage pédagogique par l’inspection et l’animation constituent le cœur de métier des IEN, responsables des circonscriptions du premier degré23. Le "pilotage pédagogique" : un des axes essentiels du référentiel des corps d’inspection pédagogique de mai 2009 Dans le référentiel24 des corps d’inspection pédagogique publié en mai 2009 par la direction de l’encadrement du MEN, la notion de "pilotage pédagogique" est longuement évoquée ; elle constitue le premier des trois axes essentiels de ce référentiel, avant "le management" et "le conseil". Si l’inspection individuelle des enseignants dans leur classe est qualifiée d’ "essentielle pour vérifier la qualité de l’enseignement dispensé" et "pour assurer le pilotage de l’action éducative dans l’académie", ce texte incite cependant les inspecteurs pédagogiques à procéder "à l’évaluation des enseignements, des écoles établissements ou à celle de champs disciplinaires ou éducatifs" ; il invite nettement les corps d’inspection à "désormais placer l’inspection individuelle dans une perspective de véritable pilotage pédagogique". On note encore que la promotion de la culture de la performance est mentionnée sous cette rubrique puisque le référentiel demande aux inspecteurs territoriaux d’apporter "un soin particulier (…) au suivi des évaluations nationales et à l’analyse des résultats aux examens" et de rédiger, "dans l’académie, (…) un rapport sur l’état des disciplines ou spécialités, transmis au recteur et tenu à la disposition de l’inspection générale". Cf. document n° 10. Cf. document n° 11. 22 Séminaire national sur le pilotage de l’enseignement primaire, Paris, 7 janvier 2009. 23 Cf. documents n° 18 et n° 19. 24 Cf. document n° 4. 20 21

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En résumé, la notion de "pilotage pédagogique" a pour cible les conditions de réussite des élèves, avec une interrogation centrale qui figure au premier plan dans le suivi du "fonctionnement pédagogique" des établissements, la qualité des apprentissages et des acquis des élèves25.

2. Promouvoir une "culture commune" qui soit, autant que possible, partagée entre les personnels de direction et les inspecteurs pédagogiques 2.1. Construire une problématique appropriée de l’évaluation des établissements pour prévenir les craintes qu’elle peut susciter Si le principe d'évaluer fait l’objet aujourd’hui d’un large consensus, force est cependant de constater que sa mise en œuvre provoque des réticences et des débats ; et les acteurs se situent souvent "sur la défensive". Ne pas mésestimer que la culture de l’évaluation est une notion souvent controversée De façon générale, le développement d’une culture de la performance dans le cadre du système éducatif alimente de réelles controverses, sur plusieurs registres ; certains arguments relèvent probablement davantage de l’alibi invoqué pour, en fin de compte, ne pas s’engager dans l’évaluation. Ceci étant, il faut admettre que l’évaluation n’est pas forcément simple ; si c’était le cas, peut-être seraitelle mise en œuvre de longue date par les acteurs publics :  une interrogation classique, en premier lieu : quelle doit être la part respective ou/et complémentaire du quantitatif et du qualitatif ?  ensuite, quels niveaux de fonctionnement du système éducatif convient-il de privilégier ? Le niveau national ? académique ? ou bien l’établissement et la classe ? ou encore l'ensemble de ces niveaux ?  évaluation interne ou évaluation externe ? D'aucuns jugent que la seconde est seule valable méthodologiquement, d'autres que la première est sensiblement plus réaliste. Mais des combinaisons de ces deux approches ne sont-elles pas envisageables et complémentaires ?  la production d'indicateurs : leur interprétation n'est-elle pas génératrice de malentendus ? Ne s'agit-il pas là d'instruments "technocratiques" qui appréhendent mal la réalité concrète et vécue sur le terrain ? À cet égard, des indicateurs IPES26 sont fournis aux EPLE depuis 1994 ; mais ils insistent sans doute trop sur l’impact des catégories socioprofessionnelles au détriment du niveau réel des acquisitions des élèves, outre une certaine faiblesse des indicateurs de vie scolaire. L’attention de l’opinion, surtout, se focalise généralement sur une donnée plus particulièrement alors pourtant que, du point de vue méthodologique, une "lecture croisée" de plusieurs de ces indicateurs IPES est tout à fait indispensable27. Quant aux indicateurs globaux relatifs au fonctionnement de notre système éducatif, ils portent davantage sur des données de gestion et résultats internes, comme l’a souligné clairement une conférence28 de mars 2007 du doyen de l’IGEN, François Perret, de même que l’audit mené par l’IGF, l’IGEN et l’IGAENR sur "le pilotage du système éducatif dans les académies à l’épreuve de la LOLF"29, que sur la réalité des "performances" atteintes, tout spécialement pour ce qui concerne les acquis et compétences réels des élèves30 ;

Cf. sur ce sujet le rapport conjoint IGEN-IGAENR des inspections générales : "Les acquis des élèves, pierre de touche de la valeur de l’école", juillet 2005 (accessible en ligne). 26 Indicateurs pour le pilotage des établissements secondaires. 27 Cf. document n° 15. 28 Cf. document n° 9. 29 Rapport conjoint de l’Inspection générale des Finances, de l’IGEN et de l’IGAENR, mars 2007. 30 Cf. document n° 16. 25

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 notons aussi à propos plus particulièrement de l’évaluation des établissements secondaires qu’un rapport conjoint des inspections générales de l’Éducation nationale31 de juillet 2004 a insisté sur la nécessité de "revisiter" le dispositif existant et de développer l’auto-évaluation de leur performance, à l’instar de l’orientation prise en ce sens et depuis plusieurs années par d’autres pays, nettement plus avancés que le nôtre en cette matière ; ce rapport plaide notamment pour un approfondissement de la notion de "valeur ajoutée" d’un établissement, "en revoyant son mode de calcul conformément aux standards internationaux" ;  autre sujet de controverse, la validité des comparaisons internationales, notamment l’opération d’envergure PISA menée par l’OCDE : quelles composantes de différents systèmes éducatifs nationaux peuvent se prêter à des comparaisons valables et fructueuses ? les protocoles établis dans le cadre d'opérations internationales d'évaluation des acquis des élèves permettent-ils véritablement de produire des données comparées et convaincantes à cet égard ? à quelles conditions ? plus généralement, quelles sont les méthodologies les plus appropriées ? La nécessité d’une attitude constructive pour prévenir des malentendus, voire des inquiétudes éventuelles Si l’évaluation des politiques éducatives apparaît nécessaire, la "culture de la performance", cependant, est souvent mal comprise ; des clarifications sont indispensables. De façon générale, il n’est pas rare que les conclusions d'évaluations, qu'il s'agisse de données d'enquêtes à dominante statistique ou d'études conduites – par l’inspection générale notamment, ou par des équipes universitaires de recherche – à partir d'observations sur le terrain soient sources de malentendus, voire "dérangent" : car elles peuvent aller à l'encontre de préjugés établis, d'idées reçues, et inciter à la remise en question d'orientations suivies jusqu'alors durablement, ou encore de pratiques solidement ancrées, etc. Les débats que suscite fréquemment l’École évoqués précédemment viennent souligner la nécessité de "crédibiliser" l’évaluation quand elle s’applique au système éducatif : affiner ses méthodes, privilégier des approches complémentaires, garantir la qualité des observations, faire en sorte par conséquent que, au moins, les conclusions produites soient vraiment difficilement contestables, même si les conséquences qui en seront tirées ensuite peuvent apparaître sinon décevantes, du moins limitées. En fait, la culture de la performance nourrit chez beaucoup d’enseignants et de chefs d'établissement une prévention et de réelles réticences32 :  les enseignants, dans leur grande majorité, s’interrogent voire restent méfiants quant à la légitimité d’une culture de la "performance" ; leurs interrogations – mêlées de craintes – sont multiples, avec la crainte d’une logique de "marchandisation" et de "privatisation" et des réticences vis-à-vis des modalités de l’évaluation : l’observation de ma pratique professionnelle va-t-elle aboutir à des conclusions négatives ? l’inspection va-t-elle m’être défavorable ? où vont conduire les interrogations quant à la réalité de "l’effet-maître" ? et ma "liberté pédagogique", pourtant réaffirmée par la loi d’avril 2005, va-t-elle être remise en cause ?  les chefs d’établissement, de leur côté, expriment dans bien des cas des réserves, se demandant si l’évaluation sera menée dans des conditions équitables et satisfaisantes du point de vue méthodologique : l’interprétation éventuellement mal fondée d'indicateurs comparés ne portera-telle pas finalement tort à l’établissement et à celui (ou celle) qui en assume la responsabilité, a fortiori à une époque où sont nettement assouplies les contraintes de la carte scolaire ? Mentionnons également que certains chefs d’établissement manquent encore d’une culture informatique suffisante pour utiliser rationnellement les indicateurs à leur disposition : lecture critique, mise en relation, émission d’hypothèses, etc. En résumé, on a fréquemment l'impression que "l'évaluation est souhaitable, mais pour autant qu'elle concerne... les autres". Il est important de dissiper tout malentendu à ce sujet : l’évaluation des 31 32

Cf. document n° 13. Dans plus d’un cas, le terme d’ "évaluation" est perçu rapidement de façon personnelle, quand bien même chacun sait pourtant que les conclusions des évaluations "personnelles" n’ont que peu d’incidences sur la gestion des ressources humaines (GRH), notamment pour ce qui concerne la gestion des promotions… École supérieure de l'éducation nationale

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établissements constitue un outil de régulation d’un service public de qualité et elle ne peut se réduire à l’évaluation des acteurs, notamment les enseignants. Crédibiliser l’évaluation en tirant parti au mieux des outils d’analyse et de mesure de la performance La promotion d’une culture de la performance nécessite par conséquent une attitude constructive33. L’adoption de règles déontologiques strictes, notamment, apparaît indispensable : il importe de s’appuyer à la fois sur des protocoles uniformes mais aussi sur des approches adaptées à la spécificité de chaque établissement. Et il est essentiel que les enseignants se convainquent que la démarche d’évaluation vise à améliorer la "performance" de l’établissement, donc les conditions d’enseignement, et cela sous trois angles :  sous l’angle de l’efficacité : le champ des observations doit privilégier la qualité des apprentissages des élèves et donc une analyse des résultats des élèves non pas de manière absolue, mais de façon relative, par comparaison dans l’espace et dans le temps, en référence à des standards pertinents ; la préoccupation doit être clairement affichée de faire progresser les élèves dans l’acquisition des connaissances et des compétences34 même s’il est primordial, tout autant, de pouvoir apprécier des éléments aussi importants que le climat de l’établissement et le bien-être des élèves ;  de l’équité : quelle est la capacité de l’établissement à réduire les inégalités de réussite entre élèves ?  et de l’efficience : eu égard aux résultats atteints, l’établissement utilise-t-il de façon optimale ses ressources ? S’agissant des outils disponibles, la promotion d’une culture de la performance passe par un effort de pédagogie consistant à expliquer le sens approprié à donner à des notions telles que celle de "valeur ajoutée" prise en compte par le dispositif IPES, mentionné plus haut. Disponibles depuis 1994, ces indicateurs portent sur les caractéristiques de la population accueillie, sur le fonctionnement et sur les résultats des EPLE. Les indicateurs de résultat n’évaluent pas seulement la réussite à un examen mais l’ensemble du déroulement de la scolarité d’un élève. Les IPES sont destinés aux chefs d’établissement afin de leur fournir des éléments d’aide au pilotage, mais ils ont vocation tout autant à donner aux équipes pédagogiques d’un établissement donné un aperçu de la valeur ajoutée de l’action collective, et d’approcher ainsi la réalité d’un "effet établissement". Pour ce qui concerne plus particulièrement les lycées et les lycées professionnels (publics et privés), le dispositif IPES retient trois indicateurs de performance, accompagnés de références nationales et académiques ainsi que de "taux attendus" pour apprécier cette "valeur ajoutée" de l’établissement, c’està-dire son apport dans la réussite de ses élèves, cette valeur étant comparée à la réussite des élèves de même type et accueillant une population comparable de l’académie et de la France :  le taux de réussite au baccalauréat ;  le taux d’accès au baccalauréat pour les 2ndes et les 1res ;  la proportion de bacheliers parmi les sortants. L’attention ne doit pas se focaliser seulement sur le premier de ces ratios : en effet, comme indiqué rapidement précédemment, seule une lecture croisée35 de ces trois indicateurs de résultat permet de "mesurer" – prudemment – la réussite de l’établissement eu égard à l’objectif d’obtention du diplôme, en faisant apparaître si l’établissement a mené une politique sélective en amont visant à écarter des élèves Cf. document n° 14. Cf. document n° 16. Pour ce qui concerne les écoles et les collèges, l’introduction par la loi d’avril 2005 du "socle commun de connaissances et de compétences" confère à cette question un caractère nouveau, en faisant ressortir son bien-fondé : que les élèves maîtrisent effectivement ce socle à l’issue de la scolarité obligatoire est bien le "contrat" que se donne l’institution dans sa relation avec les familles. Les équipes pédagogiques des collèges doivent donc progresser dans le sens de l’évaluation des acquis des élèves par rapport aux 7 "piliers" définis par le socle. 35 Cf. document n° 15. 33 34

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en difficulté ou non. En outre, depuis l’édition 2009 de ces indicateurs des lycées, la DEPP a introduit une innovation importante dans le dispositif à travers de nouvelles variables : le niveau scolaire effectif des élèves à leur entrée au lycée, le sexe des élèves ainsi que la mixité sociodémographique du lycée de scolarisation. Il est important, par ailleurs, de souligner que notre administration a construit également, depuis des années, d’autres outils d’évaluation : sont ainsi disponibles une base centrale de pilotage, des indicateurs communs pour un tableau de bord de l’éducation prioritaire, des indicateurs pour le pilotage de l’école au collège afin de favoriser l’articulation entre le premier et le second degré, outre une "banque" d’exercices d’évaluation conçus sous la responsabilité de la DEPP par des enseignants et pour les enseignants du premier comme du second degré. En-dehors des outils d’information statistique, on peut aussi envisager une certaine diversification des modes d’investigation dans l’évaluation des établissements, entre autres par des enquêtes par questionnaire (sans alourdir pour autant de façon excessive la tâche des personnels de direction), ou en recentrant les grilles d’observation sur les activités des élèves et les processus d’apprentissage, ou encore en procédant à des observations dans certaines classes qui seraient suivies d’entretiens avec les élèves, etc.

2.2. Renforcer le pilotage pédagogique des établissements Réduire la place de l’aléatoire dans le pilotage du système Si, au cours des dernières années, un mot est revenu fréquemment dans les rapports que des inspecteurs généraux ont rédigés à la suite de visites d’établissements, c’est le terme d’"aléatoire" employé à plusieurs reprises pour caractériser la situation observée par les inspecteurs au cours de leurs visites36 : dans plus d’un cas, par comparaison avec les prescriptions et recommandations de l’institution, la réalité sur le terrain apparaît aléatoire, précisément. Le sens de ce qualificatif doit au demeurant être explicité : naturellement, il ne s’agit pas de désigner par cet adjectif le moindre écart par rapport à une stricte conformité à une norme qui serait considérée comme devant être respectée à la lettre par tous les établissements. Chacun sait que le contexte dans lequel ils se trouvent situés tout autant que leur réalité concrète sont multiples, indiscutablement, et que le même mot d’école primaire, de collège, de lycée ou de lycée professionnel peut désigner des profils extrêmement différents d’établissements : taille, caractéristiques de l’établissement, de la population scolarisée et des personnels, contexte, ressources disponibles, etc. De plus, dans le cadre de la déconcentration, l’institution, justement, invite résolument les chefs d’établissement et les équipes pédagogiques à tenir compte au mieux du contexte spécifique dans lequel les uns et les autres exercent leurs fonctions et à tirer pleinement parti de leurs marges d’autonomie. Ce que l’on désigne donc ici sous le terme d’aléatoire, ce n’est évidemment pas le fait que la réalité observée, telle qu’elle ressort des notes rédigées par les inspecteurs, puisse varier d’un établissement à un autre dans des proportions à la fois raisonnables, compréhensibles – et même souhaitables ! – eu égard au contexte dans lequel se trouvent placés les établissements et à la mise en œuvre de leur projet d’école ou d’établissement. L’aléatoire est d’une toute autre nature parce qu’il "relève du hasard" ; il apparaît diamétralement à l’opposé de quelque chose de maîtrisé, d’une réalité cadrée et réellement pilotée37.

Cf. à ce sujet la conclusion générale du "Rapport de synthèse IGAENR des visites d’EPLE effectuées durant l’année scolaire 2001-2002", rapport n° 02-062, septembre 2002 (accessible en ligne). 37 Sans multiplier à l’envi les exemples concrets, le rapport IGAENR de synthèse des visites d’établissements publié en 2002 qui vient d’être mentionné évoquait cependant la situation, à l’époque et parmi beaucoup d’autres exemples, de deux établissements de l’académie de Créteil, avec un contraste assez frappant : - un collège du Val-de-Marne, établissement certainement difficile puisque classé à la fois sensible, en ZEP et en zone de prévention de la violence ; dans leur rapport de visite, les inspecteurs qualifiaient le projet de cet établissement de "très vague" et d’"inconsistant", exposant qu’il "repose sur une réflexion très générale et présente de grands objectifs bien éloignés d’une prise en compte des spécificités de l’établissement. Le catalogue d’actions qui y sont recensées ne peut en aucun cas s’apparenter à une politique d’établissement tant sa lecture témoigne d’un éclatement des initiatives prises à des titres divers. L’absence d’un 36

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Ainsi, dans plus d’un cas (et non pas dans tous les cas, bien sûr), les conditions effectives de mise en œuvre de telle ou telle orientation de la politique éducative – nationale – relèvent davantage, de l’aléatoire plutôt que de variations qui demeurent maîtrisées par l’institution même si l’administration centrale a édicté des circulaires et commentaires clairs à l’intention des acteurs. On peut certes s’attendre à observer sur le terrain, selon le contexte, des variations dans la mise en œuvre, selon des proportions compréhensibles selon les établissements, par rapport à ce que l’on pourrait désigner comme une "norme moyenne". Cet état de fait dans la mise en œuvre des orientations de la politique nationale vient rappeler la nécessité, pour l’institution, de dispositifs de pilotage, de suivi et d’accompagnement sur le terrain des politiques éducatives impulsées par le niveau central. Les établissements ne doivent pas être "livrés à eux-mêmes", si l’on peut dire, comme si l’institution s’estimait quitte dans la mise en œuvre des orientations arrêtées au niveau national dès lors qu’elle a édicté des textes. Une action plus concertée et des synergies entre les diverses instances académiques est bien une nécessité, celle, justement, du pilotage pédagogique. On rappellera au demeurant qu’un rapport conjoint IGAENR-IGEN sur "la fonction "conseil aux établissements publics locaux d’enseignement" publié en avril 200138 insistait déjà sur la nécessité d’un tel accompagnement. Et dans son rapport publié la même année sur "L’autonomie de l’EPLE en question dans la relation entre l’autorité académique et l’établissement scolaire"39, l’IGEN plaidait, dans le même sens, pour "une organisation plus claire et plus efficace du pilotage académique pour mieux accompagner les établissements" ; car si "on ne compte pas le nombre d’EPLE qui, çà et là, utilisent intelligemment leurs marges de liberté et exercent leur autonomie à la satisfaction de leur communauté éducative, ni le nombre de responsables qui, çà et là également, favorisent ces prises de responsabilités, dans l’intérêt du service public", il n’en demeure pas moins, observait l’IGEN à l’époque, que, "du côté de l’administration, (…) la croyance" est encore largement répandue, "selon laquelle la décision administrative générale, imposée du haut, va s’appliquer sans coup férir – ce qui est de plus en plus sujet à caution –". Réussir à créer du lien entre des acteurs dont les approches ne sont pas forcément convergentes Le pilotage pédagogique, avant tout, ne consiste-t-il pas à réussir à tisser des liens entre des acteurs dont les approches, sinon les intérêts premiers ne sont pas forcément convergents, ou sont perçus à tort

véritable document de référence est un handicap considérable pour sortir de la situation tendue observée aujourd’hui" (février 2002) ; ils insistent également sur le constat d’"une responsabilité et une charge démesurées pour la principale : un CFA très prenant à hauteur de 50 % du temps du responsable et un collège très difficile à diriger et à organiser en raison des pesanteurs internes et des turbulences régulières qui ont abouti à un fonctionnement défectueux", en pointant le fait que, "lors de la nomination de l’actuelle responsable, la véritable spécificité de la direction d’un tel établissement n’a pas été prise en considération dans un contexte interne problématique alors inconnu", soulignent- ils, "des responsables académiques" ; - second exemple, celui d’un lycée situé dans le même département, "établissement particulièrement défavorisé (…) où une équipe administrative reprend les choses en mains" ; "le redressement de la situation" de ce lycée, insistaient les deux inspecteurs de l’IGAENR et de l’IGEN, "exige des responsables académiques un appui soutenu" ; or, "s’il est cité par eux comme très difficile, il ne fait pas l’objet d’un pilotage académique différent des autres lycées. On peut s’interroger d’ailleurs sur l’absence de réaction et d’analyse lorsque les résultats sont aussi catastrophiques", ajoutaient-ils, en plaidant, précisément, pour "un accompagnement particulier" de la part des services académiques. 38 Rapport conjoint IGAENR n° 01-021 – IGEN n° 2001-007, avril 2001 (accessible en ligne). "Pour ce qui concerne les réformes", souligne ce rapport, "le respect du principe de réalité de la vie des établissements et l’examen de la possibilité même de les mettre en œuvre devraient guider davantage l’action des directions. L’anticipation et la prévention des difficultés d’application, le respect d’un délai réaliste entre la décision et la mise en œuvre des textes devraient plus systématiquement constituer la condition de la création de nouvelles réglementations. Dans une démarche dialectique entre le ministère et les acteurs de "terrain", le niveau central gagnerait à s’engager plus régulièrement dans la mesure des effets des réformes qu’il a impulsées, gage d’un conseil lui-même "réassuré" en direction des académies" ; et, "au niveau des académies, le conseil aux établissements est une des tâches qu’elles doivent accomplir, à la fois dans le respect de l’autonomie de l’établissement et dans le cadre de la politique définie dans leur projet", avec une organisation appropriée qui "doit tendre à ce que les différents acteurs pédagogiques ou administratifs mettent en œuvre des procédures et tiennent un discours communs". 39 Rapport n° 2001-047, novembre 2001. École supérieure de l'éducation nationale

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ou à raison comme antagonistes40 ? Si l’on privilégie cette approche, il faut considérer plusieurs questions :  quels liens faut-il s’efforcer d’établir qui se révèlent comme les plus utiles dans l’intérêt des élèves ? comment l’"équipe de direction" d’un établissement peut-elle contribuer à promouvoir un véritable travail d’"équipe enseignante"41 ? quelles sont les synergies les plus souhaitables ? les plus efficaces au bénéfice des élèves ?  comment avancer dans cette direction ? que dire concrètement des qualités de compétence professionnelle, d’écoute des uns et des autres, de subtilité dans la recherche de compromis, de persuasion dans l’argumentation, d’obstination dans la conduite de l’action, etc., qu’il importe de déployer à cet effet ? comment prévenir au mieux les réticences, voire des résistances ou des oppositions de la part d’enseignants fondées sur une revendication affirmée, militante, de leur "liberté pédagogique" ? quelles sont les qualités personnelles les plus déterminantes pour progresser ?  quelles sont ensuite les instances les plus appropriées pour nouer ces liens ? le conseil d’administration ? le conseil pédagogique introduit dans les EPLE par la loi d’orientation d’avril 2005 ? les conseils d’enseignement ? ou encore d’autres cadres de concertation plus informels mais qui, dans une approche pragmatique, peuvent permettre en fait d’avancer par la voie du détour dans la même direction ?  quels sont les autres points d’appui mobilisables pour enclencher une dynamique d’établissement ? la démarche de projet d’établissement ou d’école ? l’élaboration d’un contrat d’objectifs ? une utilisation judicieuse des TICE ? des expérimentations pédagogiques soigneusement réfléchies avec le concours des corps d’inspection ? etc.  quelles initiatives bienvenues les personnels de direction doivent-ils prendre en direction des inspecteurs pédagogiques42, des enseignants ou/et de leurs représentants, des personnels d’information et d’orientation, de personnes-ressources, d’autres catégories de personnels (infirmière scolaire, assistante sociale, etc.) ?  quel parti peut-on tirer du dialogue avec des collègues d’autres établissements au sein d’un même bassin éducation-formation, ou d’expériences réussies de pilotage qu’ils ont engagées antérieurement ? ou que l’on a soi-même réussies dans une affectation précédente ?  comment promouvoir la démarche d’évaluation de la performance pédagogique de l’établissement (au sens exact que donne la LOLF à ce mot de "performance") ? comment parvenir à dissiper les malentendus sur ce terme parmi l’équipe enseignante ? quel concours constructif les corps d’inspection peuvent-ils apporter pour le développement de la démarche, en se référant au texte de mai 200943 qui précise leurs missions44 ? quel parti tirer par ailleurs du concours technique des services académiques spécialisés dans le traitement de données statistiques ? des services d’information et d’orientation ? etc. Conforter la responsabilité pédagogique des chefs d’établissement Le rôle du chef d’établissement et la mise en place de conseils pédagogiques au sein des EPLE

Le statut des EPLE, dont la mission première est "l’enseignement"45, de même que celui des personnels de direction, soulignent la mission de pilotage du projet pédagogique qui est confiée au chef Cf. document n° 20. Cf. document n° 24. Le thème "Équipe de direction, équipe enseignante" a été précisément le thème retenu par l’Association française des administrateurs de l’éducation – AFAE – pour son colloque annuel, à Bordeaux, en mars 2010. Le document n° 23 est le texte de la conférence de clôture du colloque par Roger-François Gauthier, IGAENR, consultant à l’UNESCO. 42 Cf. document n° 17. 43 Cf. document n° 4. 44 Interrogé en mars 2010 sur sa conception des rapports entre personnels de direction et corps d'inspection, le directeur de l’encadrement, Roger Chudeau, a indiqué que ces derniers "doivent aller là où il y a des problèmes pour aider les chefs d'établissement à lever les obstacles et non les contrôler". 45 Cf. document n° 8. 40 41

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d’établissement. Comme on l’a déjà mentionné, l’article 38 de la loi d’avril 2005 conforte cette responsabilité en instaurant pour les EPLE un "conseil pédagogique", animé et présidé par le chef d’établissement. En mars 2010, le directeur de l’encadrement, Roger Chudeau, a souligné devant des chefs d’établissement que "le conseil pédagogique est un levier extraordinaire pour asseoir votre compétence pédagogique. (…) Et cet outil permettra aux enseignants de s'impliquer davantage dans l'administration de la pédagogie". De plus, l’autonomie pédagogique des écoles, des collèges et des lycées se trouve renforcée par la possibilité légale d’"expérimentations de nature pédagogique" (article 34 de la loi de 2005)46. Sur l’ensemble de ces points, l’implication personnelle des chefs d’établissement demeure déterminante. La dimension "évaluation" dans la mise en œuvre et le suivi des projets d’établissement et des projets d’école

La capacité de l’établissement à évaluer lui-même sa performance, en principe, n’est pas absente dans le suivi du fonctionnement des établissements et la mise en œuvre de leur projet. Pour les EPLE, le décret du 30 août 1985 précise en effet que le chef d’établissement "établit chaque année un rapport sur le fonctionnement pédagogique de l’établissement et ses conditions matérielles de fonctionnement". Ceci étant, le contenu de ces rapports intègre peu la dimension pédagogique ; ils s’en tiennent souvent aux données de gestion ou/et au stade du constat quant aux résultats et aux données relatives à l’orientation. Quant à la circulaire de mai 1990 relative au projet d’établissement47 – dont le principal rédacteur, Joël Adrian48, souligne à juste titre que "les principes énoncés gardent toute leur actualité" –, sa cinquième partie indique que "deux dispositifs spécifiques concourent à l’évaluation de la réalisation du projet d’établissement" ; déjà en 1990, elle envisageait explicitement la combinaison d’ "un dispositif interne à l’établissement" et d’ "un dispositif externe, dispositif académique relayant les dispositifs nationaux". C’est dire clairement que non seulement l’évaluation interne des établissements pourrait être plus systématique et renforcée mais aussi que cette démarche d’auto-évaluation peut s’appuyer sur l’élaboration de tableaux de bord académiques comparés49 ; et les corps d’inspection peuvent partir de cette auto-évaluation lors de leurs visites des établissements. C’est dire aussi que l’évaluation interne doit constituer, pour l’équipe de direction, une préoccupation pleinement intégrée à ses modes de pilotage et que l’établissement doit réfléchir aux outils qu’il entend utiliser à cet effet. Des "audits à visée participative" ou des formules analogues pour assurer une complémentarité entre l’évaluation interne et la contribution d’évaluateurs externes La recherche de la complémentarité entre l’évaluation interne, avec une responsabilisation des acteurs et un retour sur les effets de leur action, et l’évaluation externe, dans le souci de rendre compte à une hiérarchie ou/et à des usagers, peut emprunter diverses formules ; l’essentiel, au-delà des modalités, est que cette complémentarité soit effective. Il vaut la peine, de ce point de vue, de mentionner la procédure expérimentale d’ "audit à visée participative" (AVP) qui a été menée dans certaines académies, tout particulièrement à Bordeaux50 : cette formule est proposée aux équipes de direction des établissements du second degré de cette académie pour les familiariser aux techniques d’évaluation et renforcer leur autonomie ; l’AVP est conçu comme un outil d’aide au pilotage des établissements. L’intervention possible d’évaluateurs externes est donc envisageable, et même souhaitable, et, comme on l’a évoqué précédemment, le référentiel des corps d’inspection invite précisément les inspecteurs pédagogiques à apporter leur concours à cette démarche51. Le "cercle" des évaluateurs peut sans doute être élargi de façon pragmatique, l’essentiel étant que la compétence professionnelle de ces intervenants "externes" dans les établissements soit indiscutable et pleinement reconnue ; seul, en effet, Cf. document n° 1. Cf. document n° 7. 48 Proviseur, en 2009-2010, d’un lycée dans l’académie de Versailles. 49 Cf., pour les écoles primaires, document n° 12. 50 Cf. document n° 21. 51 Cf. document n° 4. 46 47

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le professionnalisme peut rendre crédible la démarche, en mettant au premier plan l’évaluation effective de la qualité du service d’enseignement assuré par un établissement donné. Il est primordial également qu’une visite d’évaluation soit une démarche participative52 et transparente du point de vue de la méthode comme des constats ; l’enjeu premier est d’associer, dans l’établissement, toutes les parties prenantes à son fonctionnement pédagogique : l’équipe de direction, les personnels enseignants, les autres catégories de personnels, les élèves, les parents d’élèves, etc., en considérant qu’une visite d’évaluation représente pour l’établissement comme pour l’institution une occasion privilégiée de dialogue approfondi à ne pas laisser passer. Étant donné qu’un regard externe peut difficilement concerner tous les établissements parce que, en France comme ailleurs, le "potentiel" d’évaluateurs mobilisables est inévitablement limité, il importe d’optimiser l’emploi des ressources disponibles et de définir des cibles prioritaires plutôt que de se disperser : quels sont les établissements à visiter en priorité ? Dans certains pays53, la réponse apportée à cette interrogation consiste à privilégier les établissements dont les résultats apparaissent comme les moins bons sur des échelles comparées, et donc comme les plus préoccupants pour l’institution, sans tomber pour autant dans le travers de les stigmatiser. Ceci étant, il est utile à l’évidence de visiter aussi des établissements plus performants afin de voir quelles sont les "bonnes pratiques" qui expliquent la qualité, voire l’excellence de leurs résultats. Au titre de la transparence, étant donné que les évaluations d’établissements sont généralement peu visibles et souvent méconnues des usagers, on insistera sur la nécessité de rapports qui rendent compte effectivement des principales caractéristiques du fonctionnement pédagogique d’un établissement, qui soient dépourvus de "jargon", et donc aisément accessibles aux divers lecteurs potentiels. Inscrire des dispositifs tels que des "contrats d’objectifs" dans le cadre d’un pilotage pédagogique partagé La mise en œuvre de "contrats d’objectifs" entre les EPLE et l’autorité académique telle qu’elle a été souhaitée par la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école d’avril 2005 (article 36) peut concourir également au développement du pilotage pédagogique, même s’il est clair que ces contrats ne peuvent trouver leur pertinence que s’ils s’appuient sur un "diagnostic partagé" entre les acteurs de terrain et les responsables académiques, et donc sur une évaluation de la situation effective de chaque établissement scolaire au regard des attentes essentielles de l’institution. Cette démarche "contractuelle" représente une occasion de dialogue approfondi et transparent ; outre une amélioration dans le pilotage pédagogique, elle n’est pas sans intérêt afin de mieux faire passer les axes forts du "projet académique". Sans qu’il s’agisse là, bien évidemment, d’un instrument-miracle, les contrats d’objectifs peuvent constituer un levier d’amélioration du pilotage des établissements. On ajoutera qu’il est primordial de faire le lien entre la démarche de "contractualisation" et la mise en œuvre des "projets d’établissement" ; encore faut-il que ces projets ne portent pas sur le "périphérique" mais qu’ils visent l’essentiel, les conditions de réussite des élèves, avec : un diagnostic en premier lieu, la définition ensuite des axes du projet d’établissement, puis l’élaboration d’un programme d’actions et l’évaluation de la stratégie pédagogique ainsi conduite. Par ailleurs, il importe également d’assurer une cohérence dans les outils de pilotage mobilisés par l’institution, respectivement, pour un collège donné54 et pour les écoles qui constituent son "vivier de

On peut utilement se référer, sur ce sujet, à l’ouvrage intitulé "Conduire un audit à visée participative" co-édité en 2006 par l’ESEN et Chronique Sociale dans la collection Pédagogie/formation – L’essentiel – Chronique Sociale, les auteurs étant : Angeline Aubert-Lotarski, Michel Lecointe, Blandine Maës, Michel Rebinguet et Michèle Saint-Jean. 53 Cf. document n° 14. 54 Dans le cas des RAR, cette cohérence indispensable se trouve en principe assurée par le contrat du réseau "ambition réussite" puisque celui-ci engage à la fois le collège et les écoles environnantes. 52

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recrutement"55. Et, "à l’heure" du socle commun de connaissances et de compétences tel qu’il a été institué par la loi d’orientation d’avril 200556, il semble d’autant plus nécessaire de "penser" d’une manière cohérente les outils de pilotage des établissements scolaires du premier degré comme du premier cycle de l’enseignement secondaire. C’est sans doute dans cette perspective que certains inspecteurs d’académie-DSDEN et certains recteurs ont envisagé – ou envisagent – de transposer la démarche de "contrats d’objectifs" dans le premier degré, au-delà de l’obligation fixée pour les EPLE par la loi de 2005. Là où elle est mise en œuvre, cette extension s’appuie sur un "dialogue de gestion" avec les IEN et les directeurs d’écoles et elle tire parti de l’expérience des contrats des réseaux "ambition réussite" (RAR) depuis 2006, puisqu’ils impliquent des circonscriptions du premier degré et des écoles primaires ; ils représentent sinon des "prototypes" pour la "contractualisation", du moins un cadre auquel il est possible de se référer. Dans les départements concernés, c’est généralement le niveau de la circonscription qui a été privilégié pour ces "contrats". Tout en se gardant de conclusions hâtives, la transposition de la démarche de contractualisation avec des circonscriptions – non pas certes à l’identique mais sur quelques objectifs pédagogiques majeurs – peut sans doute contribuer à donner plus de sens au pilotage pédagogique dans le premier degré. Viser à la création d’une véritable "chaîne de l’évaluation" à travers des modalités d’accompagnement au plus proche du "terrain" Enfin, le souci de mieux articuler "évaluation interne" et "évaluation externe" pourrait se donner comme objectif la création d’une véritable "chaîne de l’évaluation"57, qui se traduise par des modalités d’accompagnement des équipes au plus proche du "terrain". De ce point de vue, le niveau académique doit être privilégié, avec cependant le risque d’alourdir les tâches des inspecteurs territoriaux ; mais le concours des corps d’inspection est précieux, indispensable, notamment pour ce qui concerne la formation des personnels de direction et la sensibilisation des enseignants. Avant de procéder à des visites d’établissements, il importe de "préparer le terrain", autant que possible, selon deux directions58 :  l’appui sur des tableaux de bord, en premier lieu : un ensemble de données comparées entre les établissements (notamment à l’échelle des bassins éducation-formation) à partir des indicateurs IPES permet de situer les établissements – et leur permet de se situer – sur des échelles synthétiques ; outre l’exploitation judicieuse de ces données pour préparer attentivement une visite d’établissement, des tableaux de bord de cette nature présentent un avantage évident, leur utilisation ultérieure, par l’établissement lui-même, dans le cadre d’une auto-évaluation de sa performance ;  l’appui, en second lieu, que des évaluateurs "externes" peuvent tirer utilement de personnes ressources au sein de l’établissement, qu’il s’agisse d’interlocuteurs désignés à cet effet ou de "pairs" ; l’objectif, à nouveau, est bien de conjuguer un regard extérieur (l’évaluation externe) et un développement au sein des établissements d’une démarche d’évaluation interne. Enfin, outre ce qui précède, les modalités suivantes d’accompagnement auprès des établissements apparaissent souhaitables :  faire bien comprendre, d’abord, qu’une évaluation combinant auto-évaluation et regard externe va dans le sens d’une affirmation constructive du dialogue de gestion entre les établissements et l’autorité académique ; les évaluateurs, dans cette perspective, doivent se situer dans une attitude de conseil et non pas de "jugement" ; Pour les contrats d’objectifs impliquant des collèges, il apparaît de première importance qu’il n’y ait pas de discordance entre le collège, d’un côté, et la circonscription du premier degré du secteur, de l’autre, a fortiori si un contrat d’objectifs signé entre l’autorité académique et le collège insiste nettement sur la continuité pédagogique à renforcer entre la scolarité dans le premier degré et la scolarité au collège. 56 Cf. document n° 2. 57 Cf. document n° 13. 58 Cf. document n° 14. 55

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 faire aussi en sorte que les équipes réalisent bien que l’évaluation par les établissements des résultats atteints est en fin de compte aussi importante – sinon plus – que les conclusions produites : essayer de comprendre pourquoi on observe tel écart par rapport à ce qui était escompté, analyser les causes, envisager d’autres dispositifs pédagogiques en tant que de besoin59 pour assurer de meilleures conditions de réussite à des élèves en difficulté, etc. ;  autre enjeu à prendre en compte au titre de l’accompagnement, la mise en œuvre de procédures de suivi : éviter qu’une évaluation d’établissement qui combine regards interne et externe ne constitue, en fin de compte, qu’une démarche sans lendemain et qu’elle soit perçue alors comme gratuite par les acteurs de l’établissement, sans grandes incidences concrètes. Ce travail de suivi représente donc un élément majeur pour conforter la crédibilité de l’évaluation ; les services académiques doivent marquer qu’ils entendent tirer des conséquences pratiques de visites d’établissement – leur "contrepartie", en quelque sorte, dans une démarche "contractuelle" – et assumer pleinement leur fonction "conseil et appui" auprès des équipes à travers plusieurs modalités : l’organisation d’actions de formation continue pour les personnels de direction ou/et pour les enseignants60, des échanges d’expériences et de pratiques, etc. -:-:-:-:-:-:-:Pour conclure sur cette présentation rapide de la problématique, on indiquera que, outre les documents qui suivent, on peut se reporter utilement, pour approfondir tel et tel points, aux publications suivantes :  "L’état de l’École, 30 indicateurs sur le système éducatif français, n° 19", octobre 2009, Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance ; cette publication de la DEPP présente depuis deux décennies une analyse synthétique des principales caractéristiques de notre système éducatif à travers 30 indicateurs relatifs aux coûts, aux activités et aux résultats de l’École ;  "La performance, sa mesure. Enjeux éthiques", Revue trimestrielle de l’Association française des administrateurs de l’éducation – AFAE, n° 2 – 2009 ;  "L’école et son contrôle", Revue internationale d’éducation du Centre international d’études pédagogiques – CIEP, n° 48, septembre 2008.

59 60

Cf. document n° 22. Cf. document n° 23. École supérieure de l'éducation nationale

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B. Documents d'accompagnement 1. Éléments de nature juridique Document 1 - Dispositions principales de la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005

Article 3 : mention explicite de "la communauté éducative" ; Article 9 : garantie "à chaque élève", à travers "la scolarité obligatoire", des "moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun (…) de connaissances et de compétences" ; Article 14 : institution du "Haut Conseil de l’éducation" ; Article 16 : mise en place dans les écoles et les EPLE au profit d’élèves en difficulté d’un "programme personnalisé de réussite éducative" (PPRE) ; Article 32 : dispositions relatives au "diplôme national du brevet" ; Article 33 : conditions de délivrance d’un label de "lycée des métiers" ; Article 34 : élaboration "dans chaque école et établissement d’enseignement scolaire public" d’ "un projet d’école ou d’établissement", qui "peut prévoir la réalisation d’expérimentations" de nature pédagogique ; Article 36 : élaboration par les EPLE d’un "contrat d’objectifs conclu entre l’établissement et l’autorité académique" ; Article 37 : possibilité pour les EPLE de "s’associer au sein de réseaux, au niveau d’un bassin de formation" ; Article 38 : institution au sein des EPLE d’un "conseil pédagogique" ; Article 39 : possibilité, pour les EPLE, d’ "une expérimentation permettant au conseil d’administration de désigner son président parmi les personnalités extérieures à l’établissement siégeant en son sein" ; Article 43 : "la formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres répond à un cahier des charges fixé par arrêté des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale après avis du Haut Conseil de l’éducation".

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Document 2 - Les sept piliers du socle commun de connaissances et de compétences – Décret du 11 juillet 2006 Présentation par Gilles de Robien, ministre de l’Éducation nationale Juillet 2006 Le texte du socle commun s’articule en sept grandes compétences, qui sont en quelque sorte les sept grands piliers de ce socle. Chaque fois, on y retrouve la division en connaissances, capacités et attitudes. Je voudrais souligner pour chacun d’eux quelques points qui m’apparaissent essentiels. 1. La maîtrise de la langue française La maîtrise de la langue française est la base de toute l’éducation. Le dire semble relever de l’évidence. Mais beaucoup trop de jeunes quittent le système scolaire sans posséder la maîtrise élémentaire du français. Ceux-là sont amputés d’une part importante de leur existence intellectuelle et sociale : car il est impossible de développer une pensée rigoureuse, ni de communiquer avec autrui sans vocabulaire précis. Le socle réaffirme donc le caractère impératif de la maîtrise du vocabulaire, de la grammaire, et de la syntaxe. Pour cela, un entraînement spécifique doit y être consacré : exercices de conjugaison, dictées, récitations doivent faire partie intégrante de l’apprentissage des règles de la langue. 2. La pratique d’une langue vivante étrangère Chacun le sait : nous vivons à l’heure de la mondialisation. Il est donc essentiel que l’école donne à chacun les moyens de s’ouvrir sur le monde par la maîtrise d’une langue étrangère. Car désormais, l’absence de maîtrise d’au moins une langue étrangère est un sérieux handicap pour la vie professionnelle, et l’école ne peut permettre que les élèves la quittent sans qu’ils aient acquis cette maîtrise élémentaire. Elle doit veiller en particulier à ce que les élèves soient capables de parler correctement cette langue étrangère. 3. La connaissance des principaux éléments des mathématiques et la maîtrise d’une culture scientifique Comme la maîtrise de la langue, celle du calcul fait partie des exigences les plus anciennes de l’école obligatoire. "Savoir lire, écrire, compter" : c’était le mot d’ordre naguère, qui reste d’actualité ! Car l’absence de maîtrise des opérations élémentaires de calcul est un handicap aussi grave qu’une orthographe déficiente. Il importe aussi que les élèves se constituent une culture scientifique de base, pour comprendre les grandes lois qui régissent l’univers, notre planète et aussi notre corps. En outre, dans les pays développés, comme la France, les sciences jouent un rôle fondamental : elles inventent les nouvelles théories, et donc les bases des progrès qui créent notre environnement technique. Sans une culture scientifique et technique suffisante, nos enfants seraient laissés sans repères dans un monde que la science et la technique ont façonné. Ils seraient par suite incapables d’agir sur lui, de le transformer. 4. La possession d’une culture humaniste Nous ne vivons pas seulement dans un monde structuré par la technique, mais aussi par l’histoire, les grandes œuvres d’art, les valeurs, les idées. Donner accès à cet univers culturel, c’est enrichir la perception des enfants. C’est aussi leur donner des repères. On dit volontiers aujourd’hui que nos enfants manquent de repères. La culture humaniste permet précisément de leur en donner, notamment par la connaissance des

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repères chronologiques et géographiques : grâce à eux, les élèves peuvent savoir d’où ils viennent, où ils se situent. Ne sous-estimons pas la valeur structurante de tels repères. J’ajoute que cette culture ne saurait être étroitement nationale, surtout à l’heure de l’Europe. C’est pourquoi le socle inclut les grandes réalisations de la culture européenne : les textes majeurs (la Bible, l’Iliade, l’Odyssée, etc.) mais aussi les grandes œuvres du patrimoine mondial, afin de permettre aux élèves de comprendre ce qu’il y a d’universel et donc d’essentiel dans toutes les cultures humaines. 5. La maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication À l’heure d’Internet, il aurait été peu compréhensible de négliger la formation aux nouvelles technologies de l’information. Tous les parents savent bien que les jeunes ont une grande appétence pour ces technologies, notamment l’ordinateur. Le socle prévoit donc de donner aux élèves une maîtrise plus approfondie de ces outils. Ils doivent surtout acquérir la capacité de trier les informations et une attitude critique vis-à-vis d’elles, faute de quoi ils n’en sont plus que des récepteurs passifs. Cette attitude critique est la condition d’un usage intelligent des ressources offertes par Internet. Il faut impérativement leur apprendre à se repérer dans cette immense bibliothèque mondiale où rien n’est hiérarchisé ! 6. L’acquisition des compétences sociales et civiques L’école doit préparer les enfants à vivre en société. Mais ils ne pourront vraiment prendre part à la vie de notre pays que s’ils connaissent et respectent les règles de la vie collective. Les règles civiques doivent en particulier faire l’objet d’un apprentissage attentif. C’est pourquoi le socle commun insiste en particulier sur la connaissance des symboles de la République et de leur signification. Il est tout aussi nécessaire que les élèves connaissent les mécanismes fondamentaux de notre démocratie (représentation nationale, justice, fiscalité, etc.). Ainsi le socle met en place un véritable parcours civique pour les élèves, qui comprend tout à la fois la connaissance des principes de la vie en société, des éléments du droit, et l’acquisition de la notion de responsabilité individuelle. 7. L’accession à l’autonomie et l’acquisition de l’esprit d’initiative Ce septième pilier est essentiel, car l’éducation aurait manqué son but si elle ne parvenait pas à former des êtres autonomes, c’est-à-dire capables de juger par eux-mêmes, de se prendre en main. Ils pourront ainsi transposer les savoirs du domaine scolaire à des situations différentes et profiter de la culture scolaire pour toute leur vie. L’autonomie et l’esprit d’initiative leur permettront enfin de concevoir des projets, de les mettre en œuvre, et d’innover. Dans un monde où l’innovation incessante est le moteur du progrès, ils auront de bons atouts pour leur vie professionnelle future.

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Document 3 - "Le décret de 1985, vingt-cinq ans après" Conférence introductive61 de Thierry Bossard, chef du service de l’IGAENR, lors du colloque "Gouvernance et performances des EPLE" organisé à la Sorbonne le 15 octobre 2009 par la direction de l’encadrement

Mesdames et Messieurs, Devant la fresque de Puvis de Chavannes qui présente l’enseignement des sciences, j’ai compris pourquoi la direction de l’encadrement avait décidé de commencer par l’histoire et la géographie. Merci de nous avoir épargné l’éloquence, le devoir d’éloquence. L’histoire, ce sont les vingt-cinq ans de notre système éducatif depuis le 30 août 1985, la géographie, c’est ce que traitera Nathalie Mons et ce regard sur la comparaison internationale. Alors, commençons par l’histoire. Permettez à l’inspection générale de l’administration de faire d’abord un peu un panorama, justement, de cette histoire du droit, de la réglementation au cours de ces vingtcinq dernières années. Le décret du 30 août 1985, chacun le sait et Patrick Gérard l’a rappelé dans son propos d’ouverture, fait suite aux lois de décentralisation, aux lois de 1982 qui fixaient de nouvelles compétences aux collectivités et qui leur permettaient de participer à la gestion du système éducatif, et à la loi de juillet 1983 qui portait répartition des compétences entre l’État, les communes, les départements et les régions et créait les EPLE. Par conséquent, ce décret de 1985 s’inscrit délibérément dans cette perspective de la décentralisation. Et la décentralisation, comme le recteur Patrick Gérard le disait tout à l’heure, c’est le choix, assumé par l’État, de limiter ses interventions, de faire en sorte qu’il y ait des lieux où des décisions soient prises et où il ne soit pas le seul à décider, c’est le thème évidemment bien connu des compétences partagées. Donc la création de l’EPLE est le corréla de la décentralisation : réduire la place de l’État pour donner toute leur place aux collectivités locales suite aux lois de décentralisation. C’est la naissance de l’EPLE. Et, depuis cette naissance, si l’on regarde l’histoire de la réglementation, le "décret de 1985 modifié", comme on dit quand on le cite, a été modifié successivement par 17 décrets ; 17 décrets ont modifié le décret initial ! Alors, je ne vous infligerai pas la lecture détaillée des modifications, plus nombreuses d’ailleurs que les 17, parce qu’un même décret peut comporter lui-même plusieurs modifications. Mais il est intéressant d’essayer de faire, au fond, le panorama, de trouver la typologie des grandes modifications qui sont intervenues au cours de ces vingt-cinq années, plus exactement de 1990 à 2009. Les modifications du décret de 1985, au fond, se répartissent en quatre grands thèmes :  premièrement, tout ce qui a trait à l’autonomie de l’EPLE parce que, et Patrick Gérard le disait tout à l’heure, ce qui constitue un établissement public, c’est d’abord le fait qu’il dispose d’une part d’autonomie ; c’est évidemment tout ce qui sera consécutif aux deux lois d’orientation, la loi de 1989, avec justement l’insertion dans le décret de la part d’autonomie qui revient aux établissements, d’autonomie pédagogique et administrative, et, par exemple, le fait qu’il revient aux établissements de répartir les élèves, de faire le choix de l’utilisation des dotations horaires, et bien d’autres choses que je ne me lancerai pas à expliquer devant vous qui êtes si experts en ces questions. Mais, première conséquence de la loi de 1989, c’est bien l’insertion dans le décret de cette part d’autonomie pédagogique et administrative. Deuxièmement, ce qui concerne le projet d’établissement : il est introduit en 1990 dans le décret de 1985 ; c’est la reconnaissance de la diversité et de la part d’initiative des établissements, d’un caractère collectif au projet. Le projet d’établissement n’est plus une option, il est devenu une obligation pour tout établissement public local d’enseignement. Mais, autant la loi de 1989 avait une conséquence sur le décret, autant la loi d’orientation de 2005 aura aussi une conséquence sur ce texte puisque, réaffirmant l’autonomie de l’établissement, elle l’inscrit dans une perspective sensiblement nouvelle qui met l’accent, non plus sur la décentralisation, mais sur l’objectif de performance des établissements, en renforçant le projet d’établissement et en introduisant des outils nouveaux : le conseil 61

Accessible en visioconférence sur le site de l’ESEN : suivre ce lien. École supérieure de l'éducation nationale

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pédagogique, l’expérimentation que peuvent conduire les établissements, et le contrat d’objectifs. Première famille, donc, de modifications au cours de ces vingt-cinq années, le renforcement et l’affirmation de l’autonomie de l’établissement, sur laquelle je reviendrai tout à l’heure ;  deuxième grande famille de modifications, toutes les modifications qui ont trait, justement, à la gouvernance de l’EPLE, qui portent sur les instances et les organes de décision, que ce soient les compétences du conseil d’administration, l’élection au conseil d’administration, le rôle de la commission permanente, du conseil des délégués des élèves, les modalités d’élection des parents, des représentants des élèves, la possibilité ouverte plus récemment d’une présidence du conseil d’administration par une personnalité extérieure à l’établissement, tout ce qui va viser aussi à recentrer le conseil d’administration sur ses missions principales et stratégiques pour l’établissement et réaffirmant le rôle essentiel de la commission permanente ;  troisième famille de modifications, tout ce qui a trait aux élèves et aux droits des élèves. C’est évidemment d’abord suite au mouvement lycéen de l’automne 1990 que le décret va se trouver modifié en introduisant ce qui est relatif aux droits et obligations des élèves ; c’est effectivement l’introduction non seulement d’un droit des élèves, mais des principes généraux du droit dans les procédures concernant les sanctions, par exemple appliquées aux élèves. C’est l’ensemble des dispositions qui sont prises à l’automne 1990, mais également en 2000 avec la fixation de l’échelle de sanctions applicables aux élèves, les précisions sur les pouvoirs du chef d’établissement pour prononcer seul certaines sanctions ; c’est la création de la conférence des délégués des élèves, du conseil des délégués de la vie lycéenne, toutes décisions qui portent sur la place des élèves dans l’établissement ;  quatrième famille de modifications, tout ce qui a trait à l’aspect comptable et financier puisque le décret, finalement, fixe l’organisation administrative et financière des EPLE : ce sont les différentes modifications intervenues sur la création des groupements comptables en 2004, le délai d’envoi du compte financier, la modification concernant le dépôt des fonds de l’établissement avec la suppression de l’obligation de dépôt aux chèques postaux, bref, tout ce qui a trait aux aspects financiers. Quatre grandes familles, donc, de modifications en vingt-cinq ans. Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que ce décret de 1985 est historique parce qu’il n’est pas resté en quelque sorte comme une "butte témoin" inchangée au fur et à mesure que le système éducatif évoluait ; mais, à chaque fois qu’il y avait une modification forte de notre système éducatif, à chaque fois par exemple qu’une loi d’orientation fixait des objectifs à notre système d’enseignement, immanquablement, le décret de 1985 était immédiatement touché par ces modifications et appelé à évoluer. Il n’est pas resté comme une butte témoin isolée, dépassée par l’histoire, les nombreuses modifications dont il a été l’objet sont le signe qu’il a, dès sa création, établi un point essentiel dans notre système éducatif, la place désormais décisive de l’établissement public local d’enseignement. Ces modifications confirment que ce décret est historique et qu’il est resté vivant puisqu’il est en permanence corrigé par les différentes modifications législatives ou règlementaires, ou politiques, qui affectent notre système éducatif. Je me permets donc de citer un rapport des deux inspections générales, qui écrivent souvent communément, comme vous le savez, un rapport au cœur de la problématique d’aujourd’hui, "L’EPLE et ses missions", qui disait en décembre 2006 : "La création du statut d’EPLE correspondait à un pari à la fois juridique et pédagogique, permettre à l’établissement de prendre toute sa place dans le pilotage pédagogique du système éducatif". C’est bien l’idée que l’établissement aujourd’hui est une réalité absolument essentielle dans l’organisation du système éducatif français. En vingt-cinq ans, donc, l’ensemble des lois qui ont concerné le système éducatif, les deux lois d’orientation, mais aussi la loi de 2005 sur la cohésion sociale, la loi sur les assistants d’éducation qui a introduit une nouvelle compétence aux établissements, la capacité d’être recruteurs d’un certain nombre de personnels, la loi de décentralisation de 2004 qui a transféré les personnels TOS aux collectivités ainsi que la mission d’accueil, de restauration et d’hébergement, ont eu des conséquences sur le décret. Il en est de même pour la loi organique relative aux lois de Finances de 2001, même si l’EPLE ne figure pas, au sens strict, dans la LOLF puisqu’il n’est ni un "opérateur", comme les universités, ni une "unité opérationnelle" (UO), comme les inspections académiques ; néanmoins la LOLF, par l’esprit qu’elle introduit, ne peut pas ne pas avoir de conséquences sur l’EPLE. École supérieure de l'éducation nationale

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Voilà récapitulés très rapidement, trop rapidement au fond, les grandes évolutions et les grands thèmes qui ont affecté ce décret depuis vingt-cinq ans. Alors, au cours de cette période, quelles sont les lignes de force et les problématiques aujourd’hui ? Premier thème que je voudrais esquisser – car ce sont les tables rondes au cours de la journée qui les développeront, cet exposé, vous l’avez compris, est plus introductif, voire problématique, que conclusif – , premier thème, c’est ce que soulignait le recteur de l’académie de Paris : un établissement public, c’est d’abord la reconnaissance d’une autonomie ; l’établissement public, c’est un lieu, une institution qui est au principe de certaines des décisions que le concernent. Il n’est plus, avec le décret de 1985, simplement le lieu où s’appliquent des directives ou des instructions nationales, il est lui-même à l’origine d’une part des décisions qui le concernent. C’est toute la question effectivement de l’autonomie, de la part et du champ de l’autonomie de l’EPLE. Puisque vous m’avez invité, que Roger Chudeau m’a invité à faire un propos à dimension historique, je voudrais simplement rappeler que la question de l’autonomie, et notamment de l’autonomie pédagogique, ne date pas du décret de 1985 : le décret vient de loin et la question de l’autonomie pédagogique vient de loin. Dès les années 1970, à une époque où personne, évidemment, ne songeait même à remettre en cause le rôle déterminant de l’État dans l’organisation du système éducatif, dès les années 1970, un Ministre comme Olivier Guichard disait : "Je serais bien étonné qu’avant dix ans l’autonomie pédagogique ne devienne pas de plus en plus la règle". Vous voyez que, dès cette époque, la perspective était l’autonomie pédagogique et que le souci de l’autonomie pédagogique a, d’une certaine façon, précédé la préoccupation de l’autonomie administrative. Le discours sur l’autonomie pédagogique parcoure toutes les années 1970 dans les discours ministériels, d’Olivier Guichard à Christian Beullac ; je vous renvoie, sur ce sujet, à un excellent article de François Perret dans une revue qui est la revue des administrateurs de l’éducation (AFAE), intitulé : "L’autonomie, une histoire à suivre". Donc, remonter aux origines et à cette autonomie. Que fait, justement, le décret de 1985 ? Il va non seulement fixer l’idée d’une autonomie pédagogique, mais il va donner une reconnaissance juridique et statutaire à l’autonomie administrative de l’établissement ; l’établissement est désormais une "personne morale" – Patrick Gérard nous a montré qu’elles étaient nombreuses – mais qui est au principe, à l’origine de décisions qui le concernent. Mais, en vingt-cinq ans, le discours sur l’autonomie et les justifications de l’autonomie ont sensiblement évolué. Je le rappelais au début de mon propos, le point de départ, c’est la décentralisation, l’autonomie est pensée comme corréla de la décentralisation. Et antérieurement même, la loi Beullac et le décret de 1976, dont le décret de 1985 reprend certains éléments, voyaient dans l’autonomie une adaptation aux réalités locales. Les années 1970, l’autonomie, c’est l’adaptation aux réalités locales, les années 1980, l’autonomie, c’est le corréla de la décentralisation, aujourd’hui, avec la loi d’orientation sur l’avenir de l’école, l’autonomie est présentée et pensée comme la meilleure condition de la réussite, de la performance et des résultats de l’établissement jugés à l’aune des résultats des élèves. Vous voyez donc que, en vingt-cinq ans, si l’autonomie est un discours permanent, néanmoins l’angle d’attaque sous lequel elle est privilégiée a légèrement changé. Je dis que le discours sur l’autonomie est permanent, mais enfin, c’est quand même une réalité hésitante : l’autonomie a toujours été, au cours de ces vingt-cinq ans, présentée comme étant l’une des manières à la fois de s’adapter à la décentralisation et d’améliorer les résultats des établissements ; c’est le thème de l’autonomie permettant de trouver les réponses au plus près des usagers, c’est l’idée que l’égalité des chances s’obtient non pas au prix d’un traitement uniforme mais d’un traitement local, adapté, c’est l’idée que l’autonomie permet l’expression des initiatives, c’est même l’idée, qui était dans un rapport de l’IGAENR qui s’appelait "Centrale 2000" – rappelez-vous pour certains qui avaient suivi toutes ces questions –, d’inverser la lecture du système éducatif et de ne plus penser l’organisation de l’administration de l’Éducation nationale à partir de l’administration centrale qui, par cercles concentriques successifs, allait vers les services dits à l’époque "extérieurs" puis vers les établissements, mais de penser l’organisation du système éducatif à partir précisément de l’établissement, non plus dans une conception descendante, mais ascendante, en fonction d’un principe que l’on a appelé après dans d’autres domaines, de "subsidiarité" ; c’est-à-dire, pensons un système d’éducation qui soit national, mais à partir des responsabilités que l’on donne aux établissements et que peuvent assumer les établissements, et ne confions à l’échelon supérieur que ce qui ne peut pas être École supérieure de l'éducation nationale

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assuré avec la meilleure efficacité à l’échelon le plus déconcentré. Bref, un discours récurrent, permanent sur l’autonomie. Vous savez, je parle devant des experts qui l’ont vécu aux différentes responsabilités qui sont les leurs ou qui ont été les leurs, ce discours ne s’est pas toujours traduit à la hauteur des espoirs dans la réalité même si, au-delà des dispositions administratives, nous avons vu aussi – c’est une des lignes de force du pilotage pédagogique de l’enseignement secondaire au cours de ces dernières vingt-cinq années – combien, dans l’ordre de l’organisation administrative mais également dans l’ordre de l’organisation pédagogique, la marge de manœuvre donnée aux établissements a été tentée à plusieurs reprises. Je ne remonterai pas, concernant le collège, jusqu’aux heures libres de 1985, mais enfin c’était déjà une première marge de manœuvre qui était laissée aux établissements, mais je citerai, par exemple :  ce qu’était l’organisation dans les années 1990 des modules en lycée, avec le fait que, par exemple, nous avions laissé la liberté à l’établissement de déterminer quelle était la discipline qui allait bénéficier de la deuxième heure en classe de module en classe de première ;  les marges de manœuvre qui avaient été introduites dans les années 1990 au collège, avec les fourchettes horaires en classe de 5ème et de 4ème, les parcours diversifiés, les itinéraires de découverte ;  puis, ensuite, les PPCP, les TPE. Bref, la marge d’autonomie donnée aux établissements n’a pas porté seulement sur des questions périphériques, elle a voulu porter sur le cœur même de l’activité de l’EPLE, c’est-à-dire l’enseignement. Mais nous savons que la réalité a été elle-même hésitante, les inspections générales dans le rapport de 2006 parlaient d’"une autonomie corsetée" ; "corsetée" parce que, je vous renvoie à ce rapport, nous savons bien ce qu’ont été, souvent, les dérives un peu bureaucratiques du projet d’établissement : formalisme des projets, moyen de récupérer parfois un contrôle a priori d’opportunité, projet parfois périphérique n’allant pas à l’essentiel. Nous savons bien aussi que, dans la délégation des moyens, la dotation horaire globale a parfois été réinterprétée et que le calcul a plus été fait "à la structure", laissant moins de marges de manœuvre aux établissements ; que, sur la répartition des élèves dans les classes, qui est une des responsabilités de l’EPLE que lui fixent le décret de 1985 et ses modifications, un certain nombre de discours ou d’incitations fortes nationales donnaient des prescriptions quant à la manière, justement, dont les élèves devaient être répartis dans les classes. Nous savons aussi – et les chefs d’établissement l’ont souvent souligné – que la multiplicité des prescripteurs, avec, en contrepartie, l’unicité du lieu d’exécution, faisait que l’établissement voyait ses marges de manœuvre se réduire ; c’est le thème du "harcèlement textuel", qui a été souvent avancé à la fois par les chefs d’établissement mais également par les inspections générales. Je ne parle pas ici du rôle des systèmes d’information, absolument essentiel, mais qui, évidemment, ont pu avoir, temporairement je l’espère, parfois quelques effets qui ne facilitaient pas l’autonomie des établissements. Ainsi, on voit bien que l’autonomie de l’établissement au cours de ces vingt-cinq années, si elle a été un thème récurrent et permanent, n’a pas toujours eu des réalités à la hauteur des espoirs. Alors, pourquoi pourrions-nous aujourd’hui finalement peut-être mieux surmonter les difficultés qu’au cours de ces vingt-cinq dernières années ? Je ne fais qu’esquisser un certain nombre de pistes que vous pourrez peut-être développer en ateliers. D’abord parce que, effectivement, nous avons des outils nouveaux dont nous ne disposions pas il y a vingt-cinq ans. Je pense en premier lieu au conseil pédagogique, outil qui permet de conjuguer à la fois l’autonomie de l’établissement et la liberté des enseignants ; la liberté des enseignants, – je parle là sous le contrôle de Patrick Gérard qui fut un rédacteur minutieux de ces lignes – , elle s’exerce bien sûr dans le cadre des lois et règlements de l’Éducation nationale, elle s’exerce aussi, naturellement, sous le contrôle des corps d’inspection ; mais cette liberté des enseignants ne doit pas pour autant se substituer à cette liberté également qu’est la liberté collective de l’établissement de se donner à lui-même un certain nombre d’objectifs et de principes d’action. Donc, nous avons, à travers le conseil pédagogique, un outil nouveau dont je pense qu’il sera débattu lors de la table ronde.

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Deuxième exemple que je voudrais citer, c’est l’organisation horaire, par exemple, des enseignements en lycée professionnel. Nous avons bien là la consécration d’une marge de manœuvre donnée aux établissements, où tout n’est plus fixé aujourd’hui sur le cœur même de l’activité de l’EPLE, c’est-à-dire le "e" d’enseignement ; tout n’est plus fixé par l’administration centrale, il y a des décisions à prendre dans l’établissement, dans chacun des établissements. Et la diversité des réponses fournies par les établissements ne peut pas être alléguée et présentée comme une objection au caractère national de l’éducation ; au contraire, c’est la meilleure façon de permettre que les réponses, pour diversifiées qu’elles soient, soient les mieux adaptées à la situation que connaissent les établissements eux-mêmes. Nous avons là, à travers la rénovation de la voie professionnelle et ce qui a été fait en matière de marges et d’initiatives données aux établissements, une piste essentielle pour que l’EPLE assume et exerce son autonomie, et je vous laisse en débattre en atelier. Deuxième point, avoir des marges de manœuvre, mais pourquoi faire ? C’est la question des missions de l’EPLE, sujet qui était d’ailleurs essentiellement traité par le rapport des inspections générales de 2006. Mais c’est un sujet ancien, car, il y a dix ans déjà, je me rappelle le "rapport Blanchet" abordait déjà cette question des missions de l’EPLE et de la variété de ses missions. Disonsle clairement, la mission d’enseignement demeure bien la mission constitutive, essentielle et spécifique de l’établissement public local d’enseignement, mais à condition de concevoir cette mission d’enseignement dans la totalité de ses dimensions : à la fois l’acquisition des connaissances par les élèves, l’éducation et la formation des futurs citoyens, la transmission des valeurs ainsi que l’orientation, l’insertion, la préparation de la vie professionnelle. Tout ceci constitue en réalité une mission unique, la mission d’enseignement, qui correspond, à l’échelon de l’EPLE, aux grandes missions que la Nation fixe à l’École dans le code de l’éducation, aux deux premiers articles du code qui fixent les grandes missions de l’École, qui ont été définies par la loi de 1989 et par la loi de 2005, c'est-à-dire : premièrement, transmettre des connaissances et acquérir une culture ; deuxièmement, préparer à la vie professionnelle ; troisièmement, préparer à l’exercice des responsabilités de citoyen et faire partager les valeurs de la République. Donc, la mission d’enseignement est une mission qui comporte diverses facettes. Le problème, sur ce sujet, vient évidemment d’un certain nombre de tâches nouvelles qui sont apparues au fil des ans. J’en prends quelques-unes, que le rapport des inspections générales de 2006 développait : l’organisation des examens, l’accueil des commissions qui sont liées, le remplacement des personnels absents, l’organisation de concours, la délivrance d’attestations diverses, le recrutement de certains personnels – je l’évoquais tout à l’heure –pour l’EPLE, voire pour d’autres, notamment pour les écoles. C’est ce sujet qui a donné lieu à discussions parfois quant à l’unité ou à la dispersion, ou à la multiplication des tâches auxquelles les EPLE devaient faire face. Distinguons bien, puisque, je crois, ce sera un des sujets abordés lors des tables rondes, les missions, qui restent inchangées, et les tâches, qui peuvent évoluer. La question est de savoir s’il y a eu adjonction, multiplication de charges qui se cumulent à la périphérie de l’essentiel, qui est l’enseignement, ou, au fond, s’il y a eu le développement, l’expression de formes nouvelles qui correspondent à l’évolution des missions du système éducatif et à l’évolution du contexte dans lequel il intervient. Il y a des tâches qui, évidemment, sont en rapport direct avec la mission d’enseignement : je pense par exemple à l’organisation des examens, en lien direct avec l’enseignement ; je pense aussi à un sujet majeur, la continuité de l’acte d’enseignement, avec l’organisation des remplacements de courte durée. Sur tous ces points, il me semble que la "Charte des pratiques de pilotage" de février 2007 a abouti à une clarification et à un équilibre qu’il convient de faire vivre, mais qui sera sans doute débattu au cours de vos travaux. Ce qui me parait important de noter, au fond, de ces vingt-cinq années, et pourquoi cette question peut donner lieu à discussion, c’est que, effectivement, nous avons eu un mouvement général et profond d’évolution de notre institution qui met, désormais, davantage qu’il y a vingt-cinq ans, l’accent sur les résultats et sur la qualité du service que l’École doit rendre. Et cette qualité du service se traduit effectivement par le développement de nouveaux services, c’est le thème qui sera débattu dans la première table ronde, je crois, concernant la plate-forme de services que serait l’EPLE. Ceci emporte aussi une conséquence, la question de la taille de l’EPLE et de la mise en réseau des établissements ; c’est un sujet qui a été souvent abordé au cours de ces vingt-cinq dernières années. École supérieure de l'éducation nationale

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Tous les collèges et tous les lycées ont le statut d’EPLE ; en même temps, ils sont de taille parfois fort variable ; peut-on par conséquent demander la même chose à tous les EPLE et n’y-a-il pas là une nécessaire mise en réseau des établissements, voire mutualisation d’un certain nombre de fonctions support ? À cet égard, ce sujet de la mutualisation des fonctions support ne concerne pas les seuls EPLE, il concerne aujourd’hui l’ensemble des administrations françaises, l’ensemble des organismes publics et pas seulement des organismes publics, je pense ; c’est un sujet que l’IGAENR suit et auquel elle participe attentivement ; le problème se pose dans les établissements d’enseignement supérieur, dans les universités. La mutualisation, la mise en réseau, c’est évidemment ce qui permet trois choses :  d’abord des gains qualitatifs en professionnalisant les agents qui sont chargés de certaines missions,  des gains qui permettent d’améliorer l’efficacité de l’organisation,  et de procéder à des économies d’échelle. Nous le voyons dans le cadre des universités, nous l’avons vu dans le cadre des EPLE à travers, justement, la réorganisation de la carte comptable et la question qui est posée de la constitution, en parallèle du regroupement des agences comptables, de "pôles administratifs". Cette question, aujourd’hui, évidemment, est importante, elle concerne l’évolution des EPLE. Un établissement autonome, un établissement dont la mission est restée identique même si ses formes peuvent varier, un établissement qui doit peut-être, avec d’autres, mutualiser un certain nombre de ses fonctions. Mais s’il y a autonomie, marges de manœuvres, alors ne doit-il pas y avoir évaluation ? La question de l’évaluation de l’EPLE est une question que les inspections générales s’attachent à poser régulièrement depuis plusieurs années. C’est une question que nous avons posée dans un rapport en 2004 où nous regardions quel était l’état de l’évaluation des collèges et des lycées en France comparé à ce qui se faisait à l’étranger, un rapport signé par Jean Etienne et Roger-François Gauthier ; une question que nous avons également posée en 2006 dans le rapport sur les missions de l’EPLE, où nous disions que "l’évaluation des établissements, c’était plutôt un bilan en demi-teinte et plutôt décevant". Pourquoi poser régulièrement cette question de l’évaluation de l’EPLE ? D’abord parce que – après l’histoire, nous allons passer à la géographie dans un instant – nous sommes dans une situation singulière en France : nous sommes, avec la Grèce et la Bulgarie, je crois, le dernier pays en Europe où il n’y a pas d’évaluation organisée, systématique, cadrée, de nos établissements d’enseignement, alors que, dans tous les autres pays, c’est au contraire un point fort sur lequel on mise pour améliorer le résultat des établissements. Cette absence d’évaluation en France a ses raisons, elle n’est pas simplement conjoncturelle, c’est la foi peut-être plus affirmée en "l’effet maître", c’est la confiance en un système centralisé qui est, par son unité en France parfois confondue avec l’uniformité, censé assurer l’égalité, l’équivalence de tous les établissements sur l’ensemble du territoire ; c’est aussi le fait que l’autonomie elle-même est encore relativement limitée. Tous ces éléments doivent-ils être pour autant des arguments pour ne pas penser une évaluation de nos établissements, pour ne pas faire en sorte que nous nous engagions dans cette évaluation des établissements ? Lors d’un colloque international que nous avons tenu, avec d’autres inspections générales, dans l’académie de Créteil, accueillis par le recteur de l’académie et l’université Paris XII en novembre dernier dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, nous avons, avec l’équivalent de l’inspection générale pour les autres pays européens, repéré six conditions pour qu’il y ait une évaluation des établissements en France comme dans les autres pays :  premièrement, nous réaffirmons qu’il ne peut pas y avoir d’autonomie s’il n’y a pas d’évaluation et, corrélativement, d’évaluation si les établissements ne disposent pas de marges de manœuvre ;  deuxièmement, qu’il n’y a d’autonomie et d’évaluation que si cette autonomie et cette évaluation portent sur l’essentiel, c'est-à-dire sur l’enseignement, sur la pédagogie, sur la formation et sur la qualité de la formation, ce que nous avons appelé, dans des rapports récents, "les acquis des élèves", à l’aune de quoi doit être jugée la performance des établissements ; École supérieure de l'éducation nationale

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 troisièmement, il n’y aura enclenchement effectif d’un processus d’évaluation que si cette évaluation est publique et faite pour être rendue publique. Je suis désolé, M. Davidenkoff, mais peut-être que, là aussi, nous allons faire en sorte que ce ne soit pas la presse, et la presse seule, qui puisse se faire l’écho des résultats des élèves ! Mais je ne doute pas que vous ayez toujours à exercer vos talents et que vous ne soyez pas obligé de revenir vers le Ministère !  quatrièmement, il n’y a de juste et de pertinente évaluation que celle qui va articuler une autoévaluation conduite d’abord par les établissements et une évaluation extérieure ; il ne peut pas être question de conduire simplement une évaluation externe de tous les établissements, premièrement pour des raisons de dimension mais également pour des raisons de fond, pour des raisons aussi d’efficacité de l’évaluation. L’évaluation, cela doit être avant tout un processus conduit à l’intérieur de l’établissement et par l’établissement, mais avec, bien sûr, la possibilité d’un complément par une évaluation externe ;  cinquièmement, il n’y a d’évaluation que si celle-ci tire à conséquence et si cela permet de déboucher sur des actions correctrices et des plans d’action ;  et, enfin, nous pensons, naturellement, qu’il n’y a pas d’évaluation sans procédure contradictoire, sans enclenchement d’un dialogue entre les différents interlocuteurs ; ceci débouche sur la question du dialogue entre les autorités nationales et académiques et les établissements, sujet qui sera au cœur de vos débats dans les tables rondes. En conclusion, car je sens que M. Davidenkoff va me rappeler à l’ordre, depuis vingt-cinq ans, depuis la création de l’EPLE, les lois de décentralisation, le mouvement de déconcentration, le mouvement d’accroissement des marges de manœuvre des établissements, l’émergence du rôle essentiel des académies, tout ceci a marqué le système éducatif français. Et pourtant, Nathalie Mons, dans un article sur la décentralisation en Europe, a souligné que la France restait dans les 28% des pays, selon la typologie établie, à décentralisation minimale. Cela ne signifie pas un jugement de valeur, c’est un constat ; nous sommes, vingt-cinq ans après et malgré toutes les évolutions que j’ai essayé de retracer à grandes enjambées, dans un pays qui reste encore un pays à décentralisation minimale. Et la comparaison internationale pourrait ici – c’est le sens de l’exposé suivant – nous inciter à donner plus de marges de manœuvre, plus oserais-je le dire, de libertés et responsabilités aux établissements publics d’enseignement, comme c’est le cas dans un autre domaine vis-à-vis des universités. Deuxième problème, en conclusion, tout ceci ne doit pas cacher que l’ancrage professionnel dans l’établissement demeure encore relativement faible : l’identification des professeurs ne se fait pas d’abord à travers l’établissement, on est d’abord professeur d’une discipline ; on est peut-être éventuellement ensuite professeur de l’Éducation nationale, on est peut-être fonctionnaire français, mais on ne dira pas d’abord que l’on est professeur de tel ou tel établissement. C’était d’ailleurs un des débats qui a animé les travaux de la commission Pochard, comment faire en sorte que, en cet ancrage multiple qu’a un professeur, le rattachement à l’établissement devienne peut-être plus important. Voilà donc retracée rapidement cette histoire. Je reprendrai évidemment la formule de François Perret, "L’EPLE, une histoire à suivre". Et puisque j’ai dit que nous étions devant la fresque de Puvis de Chavannes, je citerai Péguy en conclusion : "Il faudra bien un jour que l’histoire se range à la géographie, comme la géographie s’est rangée à la géologie". Et c’est pourquoi l’histoire passe maintenant la parole à la géographie.

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Document 4 - Référentiel des corps d’inspection pédagogique Direction de l’encadrement - Mai 2009 Bulletin officiel n° 22 du 28 mai 2009 Missions des corps d'inspection : inspecteurs d'académie-inspecteurs pédagogiques régionaux et inspecteurs de l'Éducation nationale affectés dans les académies NOR : MEND0910498C RLR : 631-1 Circulaire n° 2009-064 du 19-5-2009 MEN - DE B2-2 Texte adressé aux rectrices et recteurs d'académie ; aux vice-recteurs Conformément à l'article R. 241-19 du code de l'éducation, les corps d'inspections sont chargés de veiller à la mise en œuvre dans les classes, les écoles et établissements, de la politique éducative définie par le ministre de l'Éducation nationale et des lois et règlements relatifs à l'action éducatrice de l'État. Les inspecteurs affectés dans les académies sont placés sous l'autorité du recteur d'académie ou sous celle de l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'Éducation nationale, pour les inspecteurs à qui a été confiée par le recteur la charge d'une circonscription d'enseignement du 1er degré en vertu des dispositions de l'article R. 222-12 du code de l'éducation. Les corps d'inspection se voient confier prioritairement, par l'autorité académique, des missions contribuant à l'amélioration constante de l'acquisition par les élèves des savoirs et compétences définis par les programmes pour les différents niveaux d'enseignement. Cadres supérieurs de l'institution scolaire, ils contribuent au pilotage du système éducatif et à l'atteinte par celui-ci des objectifs quantitatifs et qualitatifs fixés par le ministre et par la représentation nationale (LOLF). Experts de leur champ disciplinaire ou de spécialité les inspecteurs travaillent en relation fonctionnelle avec l'inspection générale de l'Éducation nationale, ainsi qu'avec l'inspection générale de l'administration de l'Éducation nationale et de la Recherche. Le cadre de l'action des corps d'inspection : I.A.-I.P.R., I.E.N-E.T., I.E.N.-E.G., I.E.N.-I.O., I.E.N.C.C.P.D., est le projet académique arrêté par le recteur. En fonction de ce projet le programme de travail académique (P.T.A.), défini par le recteur et le correspondant académique de l'inspection générale de l'Éducation nationale établit les priorités pédagogiques et éducatives de l'académie et fixe des objectifs quantitatifs et qualitatifs aux corps d'inspection en matière d'amélioration de la qualité des enseignements et des résultats scolaires. Le P.T.A. précise ces objectifs par discipline ou spécialité, dans des territoires identifiés. Chaque inspecteur se voit fixer, dans sa lettre de mission et pour une durée précisée, des missions prioritaires, reposant sur une analyse préalable de la situation des enseignements dans l'académie et dans les différents territoires, écoles et établissements qui la constituent. L'appréciation, par le recteur, de la manière de servir des inspecteurs est référée à la lettre de mission.

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Le pilotage pédagogique La compétence et la légitimité des corps d'inspection sont fondées sur la maîtrise de leur discipline ou de leur spécialité respective. Les inspecteurs procèdent à l'évaluation des enseignements, des écoles et établissements ou à celle de champs disciplinaires ou éducatifs : L'inspection individuelle des enseignants dans leur classe est essentielle pour vérifier la qualité de l'enseignement dispensé. Elle l'est aussi pour assurer le pilotage de l'action éducative dans l'académie. Elle permet une observation fine et une connaissance approfondie de l'état des disciplines et des activités de l'école ou de l'établissement. Elle vérifie le respect des programmes, l'application des réformes et mesure l'efficacité de l'enseignement dispensé en fonction des résultats et des acquis des élèves. Toutefois, l'évaluation d'équipes disciplinaires ou pédagogiques, l'évaluation de niveaux ou de cycles, l'évaluation systémique d'unités éducatives, sont des formes d'interventions qui viennent désormais placer l'inspection individuelle dans une perspective de véritable pilotage pédagogique. Ces formes d'interventions sont d'ailleurs aisément combinées avec des inspections individuelles. Elles peuvent aussi revêtir la forme d'audits interdisciplinaires, où l'inspection est un des éléments d'une évaluation plus globale. Ce type d'intervention est déclenché par l'autorité académique et a vocation à être systématisé. Un soin particulier est apporté au suivi des évaluations nationales et à l'analyse des résultats aux examens. En la matière, l'expertise des inspecteurs ne se limite pas à dresser des constats. Les corps d'inspection ont le devoir de conseiller les professeurs, d'impulser et d'encourager les «bonnes pratiques». La liberté pédagogique dont bénéficient, pour organiser leur enseignement, les personnels enseignants de l'enseignement scolaire, dans le cadre notamment des dispositions des articles L. 921-11 et L. 311-3 du code de l'éducation, ne sera pas le prétexte de pratiques qui font obstacle à l'acquisition des savoirs. L'expertise déployée dans ce cadre s'exerce à l'échelle de la classe, de l'école ou de l'établissement, mais aussi sur des territoires plus vastes : circonscription du 1er degré, bassin, département, académie. Dans l'académie, elle conduit, selon une fréquence prévue par le P.T.A., à la rédaction d'un rapport sur l'état des disciplines ou spécialités, transmis au recteur et tenu à la disposition de l'inspection générale. Le management L'inspecteur conçoit ses interventions directes auprès du personnel enseignant comme un acte de gestion de la ressource humaine et éducative de l'académie. L'avis de l'inspecteur est sollicité par l'autorité académique dans tous les grands actes de gestion des personnels : titularisation, évaluation, avancement, promotion et affectation. Pour autant cet avis ne se fonde pas nécessairement sur une inspection, car celle-ci n'est pas l'unique moyen d'évaluation des professeurs. Il faut ici insister sur le rôle des conseillers pédagogiques et des professeurs chargés de mission auprès des inspecteurs. Ces personnels sont en mesure de fournir des éléments d'appréciation documentés sur l'activité des personnels enseignants. Les chefs d'établissements apportent eux-aussi au recteur et aux corps d'inspections des éléments d'appréciation sur la manière de servir des personnels enseignants au travers de la notation administrative. L'inspection individuelle «de gestion», intervient, notamment, au début de la carrière d'un enseignant, mais également à l'occasion d'un «bilan à mi-parcours», ou si surviennent des difficultés, ou le cas échéant lorsque l'enseignant entend poursuivre sa carrière dans l'enseignement supérieur, dans la formation d'adultes ou dans l'encadrement. Il entre d'ailleurs dans les missions des inspecteurs de détecter les talents et de les promouvoir en lien avec les services de G.R.H. de l'académie, dans l'intérêt de l'institution.

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Les corps d'inspection sont appelés à assurer la mise en place des formations d'adaptation à l'emploi des professeurs entrant dans le métier d'enseignant. Ils procèdent en tout état de cause à l'évaluation de la qualité de la formation des stagiaires et sont consultés sur leur première affectation si besoin est. Dans le domaine de la formation continue des enseignants, l'inspecteur veille à ce que celle-ci soit conçue en sorte de produire une amélioration de la qualité professionnelle des personnels concernés. Le recteur peut confier aux inspecteurs des missions de conception, d'impulsion, d'animation ou d'évaluation du dispositif de formation continue des enseignants et C.P.E., en lien étroit avec les universités en tant que de besoin. Le conseil En application des articles R. 241-20 et R. 222-12 du code de l'éducation, l'inspecteur peut être sollicité par le recteur pour des missions de conseil : conseil aux chefs d'établissement, conseil aux inspecteurs d'académie D.S.D.E.N., conseil au recteur ou à ses services, participation aux instances académiques. Enfin les inspecteurs peuvent également, à la demande des inspections générales ou des autorités de l'éducation nationale, participer à des jurys de concours ou participer à des groupes d'experts. Il sera veillé à ce que ces aspects de la fonction des inspecteurs n'obèrent pas inutilement leurs missions essentielles de pilotage pédagogique. Cette note de service abroge et remplace la note de service du 17 juin 2005. Pour le ministre de l'Éducation nationale et par délégation, Le directeur de l'encadrement Roger Chudeau

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Document 5 - L’évaluation des établissements scolaires : éléments de nature juridique François LOUIS IGAENR Juillet 2009 Quels éléments de nature juridique apporte au sujet de l’évaluation des établissements scolaires une analyse des textes ? Et quels sont les principaux textes auxquels on peut se référer à cet égard ? I) Différents textes relatifs à l’évaluation Le premier texte – "premier" entendu à la fois au sens chronologique et en tant que fondement initial – est, tout simplement, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789. Son article 15 stipule en effet que "la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration". Si cet article retient l’attention, assurément, c’est parce que l’évaluation de l’ "administration" assurée par un "agent public" ressortit, dans le contexte de cette époque, comme une conquête et non pas d’abord comme une "contrainte" par rapport à l’Ancien Régime : dans un système marqué précédemment par la vénalité des charges, celui qui assumait une charge publique avait-il vraiment des comptes à rendre "de son administration" ? Dans le nouvel ordre, tout au contraire, le principe d’égalité des "citoyens" ouvre l’accès de tout un chacun aux charges publiques ; dès lors et logiquement, l’attente qu’exprime "la société" d’une évaluation des résultats "de son administration" est reconnue comme une avancée significative et pleinement légitime. Autre texte majeur, nettement plus proche de nous mais qui fait écho, manifestement, à cette disposition de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789, la loi organique relative aux lois de Finances (LOLF) votée en août 2001 à l’unanimité, tant par l’Assemblée nationale que par le Sénat (seulement quelques abstentions), et qui dépasse par conséquent les clivages politiques classiques ; elle exprime une attente sociale réelle en termes de résultat de l’action publique, ou, pour prendre le terme qu’elle emploie, d’évaluation de la "performance" des services de l’État. L’unanimité du Parlement vaut d’être soulignée62 parce que l’idée même d’évaluation tout autant que la notion de performance sont parfois contestées, pour ne pas dire caricaturées. S’agissant du système éducatif, la mise en œuvre de la LOLF depuis 2006 contribue à "légitimer" la démarche d’évaluation ; les attentes qu’elle promeut pour les services de l’État viennent conforter opportunément tous les travaux entrepris - entre autres - depuis le début de la décennie 1980 par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) et, plus largement, par l’administration de l’Éducation nationale63. Pour ce qui concerne les établissements scolaires, plus spécialement les EPLE, il est vrai que la part des crédits d’État qui entre dans leur budget est relativement minime : crédits pédagogiques et crédits d’aide aux familles, pour l’essentiel ; on pourrait considérer pour cette raison qu’ils n’entrent pas dans le champ couvert par la LOLF, cette observation valant encore plus pour les écoles primaires puisqu’elles sont dépourvues du statut d’établissement public. Soutenir ce point de vue aboutirait cependant à méconnaître deux éléments essentiels :  la part, pour le moins conséquente, des crédits d’État correspondant à la rémunération des personnels, quand bien même elle n’apparaît pas au budget des EPLE64 ; si, dans le partage de compétences issu des lois de décentralisation de 1983 et 1985, l’État n’assure certes plus le financement des aspects matériels du fonctionnement des EPLE, on ne saurait oublier néanmoins qu’il demeure le principal financeur de la dépense d’éducation (environ les deux tiers) ; A fortiori s’agissant d’une loi "organique" située par conséquent à un niveau très élevé dans la "hiérarchie" des textes normatifs. Construction dans cette administration d’un "système d’information" qui soit fiable, avec des bases de données organisées mobilisant judicieusement l’outil informatique ; publication régulière de documents tels que "Repères et références statistiques sur l’éducation", "L’état de l’École", "Géographie de l’École", notes de la DEPP, travaux sur des indicateurs, etc. 64 Il est prévu que, ultérieurement, le montant total de ces rémunérations soit effectivement porté, pour information, à la connaissance des membres du conseil d’administration des EPLE. 62 63

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 le fait, d’autre part, que les EPLE et les écoles appartiennent pleinement à un service de l’État, l’Éducation nationale ; comment pourraient-ils à bon droit s’affranchir des attentes fortes exprimées par la LOLF ? Troisième texte à mentionner, le décret du 30 août 1985 relatif au statut des "établissements publics locaux d’enseignement", pris en application des lois de décentralisation de 1983 et 1985 qui viennent d’être mentionnées. Il a conféré aux collèges, aux lycées d’enseignement général et technologique et aux lycées professionnels le statut d’établissement public, avec la personnalité morale, une pleine capacité juridique, et donc des marges de manœuvre et d’autonomie dans l’exercice de leur mission. D’après l’article 16, 3°, de ce décret, le conseil d’administration des EPLE, en sa qualité "d’organe délibératif de l’établissement" et "sur le rapport du chef d’établissement", "établit chaque année un rapport sur le fonctionnement pédagogique de l’établissement et ses conditions matérielles de fonctionnement. Ce rapport rend compte notamment de la mise en œuvre du projet d’établissement, des expérimentations menées par l’établissement et du contrat d’objectifs". Cet article 16, 3°, a été modifié à diverses reprises, notamment pour tenir compte des dispositions des lois d’orientation pour l’éducation de juillet 1989, d’une part, et d’avril 2005, d’autre part. Dans la pratique, force est de reconnaître que cette disposition est rarement appliquée, pour ne pas dire qu’elle est généralement perdue de vue ; à tort sans doute parce qu’il y a là, à l’évidence, un point d’appui juridique réel pour promouvoir l’autoévaluation par les établissements secondaires de leur fonctionnement pédagogique, et donc de leur "performance". Quatrième texte, la loi d’orientation pour l’éducation de juillet 1989 qui dispose dans son article 18 que "les écoles, les collèges, les lycées d’enseignement général et technologique et les lycées professionnels élaborent un projet d’établissement. Celui-ci définit les modalités particulières de mise en œuvre des objectifs et des programmes nationaux". Pour ce qui concerne les EPLE, une circulaire très complète et claire est venue, l’année suivante (circulaire du 17 mai 1990), expliquer, à propos du projet d’établissement, "la démarche à suivre pour son élaboration et sa mise en œuvre". Cette circulaire comprend cinq parties, la cinquième étant consacrée, précisément, à l’évaluation du projet. Ce texte est généralement connu et, à sa lecture ou relecture, on peut être frappé de constater qu’il demeure pleinement pertinent dans le contexte d’aujourd’hui, quand bien cette circulaire date à présent d’une vingtaine d’années. On observe notamment au sujet de l’évaluation que sa partie V prône "deux dispositifs spécifiques" qui "concourent à l’évaluation de la réalisation du projet d’établissement" : "un dispositif interne à l’établissement", qui conforte par conséquent la demande d’élaboration chaque année d’un rapport sur le fonctionnement de l’EPLE et, plus largement, la démarche d’auto-évaluation des établissements ; "un dispositif externe", d’autre part, "dispositif académique", ajoute la circulaire, "relayant les dispositifs nationaux". La perspective envisagée par la circulaire de mai 1990 est donc bien celle d’une combinaison entre évaluation interne et évaluation externe. II) La mention de l’établissement dans les textes relatifs aux diverses catégories de personnels Si l’on questionne les textes relatifs à l’évaluation des établissements, il convient, par définition, de considérer les principaux textes mentionnant l’établissement, outre les deux qui ont déjà été mentionnés, le décret d’août 1985 relatif au statut d’EPLE et la circulaire de mai 1990 sur le projet d’établissement. En fait, il s’agit d’inventorier les textes qui "parlent" de la notion d’établissement à ces acteurs de premier plan du système éducatif que sont, respectivement, les personnels enseignants, les personnels de direction et les inspecteurs pédagogiques. S’agissant des enseignants, le texte de référence, à présent, est le cahier des charges de la formation des maîtres publié en décembre 200665. Ce texte met d’abord au premier plan le rôle de l’enseignant dans la classe ; mais il mentionne l’établissement ainsi que le système éducatif dans certaines de ses dispositions. Si on le compare, pour ce qui concerne les enseignants du second degré, avec un autre document important, la circulaire du 23 mai 1997 précisant la "mission du professeur exerçant en collège, en lycée d’enseignement général et technologique ou en lycée 65

L’article 43 de la d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 stipule que "la formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres répond à un cahier des charges fixé par arrêté des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale après avis du Haut Conseil de l’éducation". École supérieure de l'éducation nationale

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professionnel", on estimera que le cahier des charges de la formation des maîtres est plutôt en retrait par rapport à ce référentiel de la fonction de professeur du second degré qu’a été la circulaire de mai 199766 (publiée pourtant, à l’époque, sans le timbre de la DPE67) : ce texte était en effet ordonné très explicitement autour de trois parties :  l’enseignant, d’abord, en tant qu’acteur du système éducatif : "Exercer sa responsabilité au sein du système éducatif" ;  l’enseignant dans sa classe, ensuite : "Exercer sa responsabilité dans la classe" ;  et l’enseignant comme "partie prenante du projet d’établissement" et de "la communauté éducative" : "Exercer sa responsabilité dans l’établissement", expose la troisième partie de la circulaire. Pour ce qui concerne les personnels de direction, le texte de référence évoquant l’établissement est généralement connu : il s’agit en effet du référentiel de la fonction de personnel de direction qui, dans un premier temps (novembre 2000), constituait l’annexe 1 d’un Protocole d’accord entre le Ministère et les représentants syndicaux des personnels de direction, avant que ne soit pris, l’année suivante, un texte réglementaire, le décret du 11 décembre 2001 portant statut particulier du corps des personnels de direction d’établissement d’enseignement ou de formation relevant du Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. L’établissement est mentionné dans ce référentiel à de nombreuses reprises, ce qui est parfaitement compréhensible, évidemment, puisqu’il s’agit du décret statutaire concernant les chefs d’établissement ! Ce texte souligne que les proviseurs et principaux dirigent l’EPLE avec leur double qualité de représentant de l’État et de président du conseil d’administration, sous l’autorité du recteur et de l’inspecteur d’académie. Pour ce qui concerne les inspecteurs pédagogiques, le texte qui fait référence aux écoles et aux établissements est, comme pour les personnels de direction du second degré, le référentiel de la fonction d’inspecteur. Le texte initial à considérer à cet égard est le décret du 18 juillet 1990 modifié portant dispositions statutaires pour les métiers d’inspecteur d’académie-inspecteur pédagogique régional (IA-IPR) et d’inspecteur de l’Éducation nationale (IEN) ; mais il importe de se référer aussi à la circulaire du 19 mai 2009 émanant de la direction de l’encadrement68 qui constitue le "référentiel des corps d’inspection pédagogique" et qui abroge et remplace une note de service sur le même sujet datée du 17 juin 2005. Ce référentiel de la fonction est ordonné autour de trois missions fondamentales assignées à l’ensemble des inspecteurs pédagogiques : "le pilotage pédagogique", en premier lieu, "le management", ensuite, et, en troisième lieu, "le conseil". Le texte de mai 2009 mentionne à plusieurs reprises les écoles et les établissements. Il souligne, surtout, que "l’évaluation systémique d’unités éducatives" est une "des formes d’interventions" des corps d’inspection "qui viennent désormais placer l’inspection individuelle dans une perspective de véritable pilotage pédagogique". La contribution des IA-IPR et des IEN à l’évaluation du fonctionnement des établissements scolaires et au "pilotage pédagogique", qu’il s’agisse des écoles primaires ou des établissements d’enseignement secondaire, est donc très explicitement mentionnée dans cette circulaire. Enfin, on ne peut oublier de mentionner que l’établissement est mentionné comme tel par la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 à travers plusieurs de ses dispositions importantes :  l’article 3, en premier lieu, parle de la "la communauté éducative" ;  l’article 34 reprend à son compte la notion de "projet d’établissement" posée par la loi d’orientation de juillet 1989 puisque cet article prévoit l’élaboration "dans chaque école et établissement d’enseignement scolaire public" d’ "un projet d’école ou d’établissement", qui "peut prévoir la réalisation d’expérimentations" de nature pédagogique ; B.O. n° 22 du 29 mai 1997. Circulaire publiée sous le double timbre de la direction des lycées et collèges et de la direction générale des enseignements supérieurs. 68 Bulletin officiel n° 22 du 28 mai 2009 ; cf. document n° 4. 66 67

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 l’article 36, par ailleurs, prévoit l’élaboration par les EPLE d’un "contrat d’objectifs conclu entre l’établissement et l’autorité académique" ; c’est bien l’établissement, manifestement, entendu comme un tout, qui est visé par cette disposition ;  l’article 37, lui, envisage la possibilité pour les établissements secondaires de "s’associer au sein de réseaux, au niveau d’un bassin de formation" ;  l’article 38, pour sa part, prévoit l’institution au sein des collèges et des lycées d’un "conseil pédagogique" ; ici aussi, c’est bien l’établissement qui apparaît au premier plan. Pour ce qui concerne les écoles primaires, c’est également l’idée d’établissement que promeut la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales à travers la mise en place possible d’ "établissements publics d’enseignement primaire" (EPEP) selon les dispositions de son article 8669. Les arguments généralement mis en avant dans le dialogue avec divers interlocuteurs pour promouvoir l’idée d’EPEP consistent à souligner que la formule d’un établissement pour l’enseignement primaire ouvrirait, dans plus d’un cas, une perspective d’amélioration de la qualité de l’éducation parce que l’EPEP en effet élaborerait un projet pour assurer une offre éducative de réussite accompagnée d’un programme d’actions et d’indicateurs d’évaluation ; il pourrait également prendre en compte les TICE, les langues vivantes, outre des activités périscolaires. Ceci étant, le décret d’application de cet article de la loi "de décentralisation" d’août 2004 n’est pas paru70 ; mais l’idée de créer des EPEP avait été évoquée à nouveau l’année passée par le Ministre dans le cadre, plus large, de la réforme de l’école primaire. En conclusion, il n’est pas inutile de mettre en exergue, notamment à partir de ce dernier paragraphe concernant les aspects statutaires de l’école primaire, ce qui, naturellement, sonne pourtant comme une évidence, pour ne pas dire un truisme : a) parler d’évaluation des établissements scolaires présuppose à la fois une démarche d’évaluation et l’existence d’un établissement ; b) pour le moment, l’établissement "existe" dans le second degré, selon trois "modalités" :  "en amont" d’abord, à travers un concept de nature juridique, le statut d’EPLE (1985) ;  il existe aussi de façon plus dynamique – en principe – à travers la notion de "projet d’établissement" (1989 et 2005) ;  et, troisième élément, la démarche d’évaluation le fait apparaître aussi "en aval", au-delà des murs des différentes salles de classe, à travers l’observation constatée d’un "effet établissement" (qui provient fréquemment, au demeurant, d’un "effet chef d’établissement"). S’agissant du premier degré, ces observations renvoient à deux questions :  celle relative à l’existence d’un établissement : à défaut d’un fondement juridique tel que le statut d’établissement public71, l’élaboration et la mise en œuvre du projet d’école parviennent-elles, ici et là, à donner suffisamment de consistance à la réalité (pédagogique, bien entendu) d’un établissement ? En d’autres termes, l’école existe-t-elle vraiment en tant qu’établissement ?  à l’interrogation, d’autre part, quant à la réalité de l’"effet établissement" dans les écoles primaires, plus spécialement les écoles élémentaires : cet effet est-il aussi observable dans les écoles que dans les collèges et les lycées ? Et, dans l’affirmative, quels sont alors les principaux facteurs d’explication là où l’on peut l’observer ? Article 86 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales : "Les établissements publics de coopération intercommunale (…) peuvent, après avis des conseils d’écoles concernées et accord de l’autorité académique, mener, pour une durée maximum de cinq ans, une expérimentation tendant à créer des établissements publics d’enseignement primaire". 70 Dans quelques départements où ce dossier apparaissait "mûr" en 2006, l’administration de l’Éducation nationale de même que les préfets ont été confrontés à une situation embarrassante et institutionnellement confuse où une organisation syndicale prenait prétexte de l’inexistence du décret d’application de ce texte législatif pour s’opposer à une expérimentation qui, dans le contexte de ces départements, était réellement envisageable, tout en faisant part, parallèlement, de son hostilité en tout état de cause et a priori à l’égard d’une publication éventuelle de ce texte réglementaire… 71 Il vaut la peine de noter que, dans l’enseignement privé sous contrat, les écoles primaires ne se trouvent pas, elles, placées dans la même situation d’incapacité juridique dont pâtit l’école communale ; disposant de la personnalité morale à travers généralement le statut d’association loi de 1901, elles sont en mesure, justement, de passer contrat… 69

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Document 6 - Circulaire ministérielle pour la préparation de la rentrée scolaire 200472 (extraits) (…) 1.3.) Au niveau des écoles et des établissements Les perspectives d’autonomie pédagogique, déjà ouvertes par la circulaire préparatoire à la rentrée 2003, doivent être approfondies. Cette autonomie, qui ne se confond pas avec la nécessaire liberté pédagogique des maîtres, ne peut être exercée individuellement par chaque enseignant. Elle est mise en œuvre d’une part au niveau des écoles et des établissements (offre de formation, constitution des classes, des emplois du temps) et, d’autre part, au niveau des équipes pédagogiques (équipes des enseignants d’un même cycle, d’une même classe, d’une même discipline, d’une même filière). Le travail en équipe est le corollaire obligé de la mise en œuvre de l’autonomie. Ses modalités peuvent être débattues dans les écoles au sein des conseils de maîtres ou, pour les EPLE et sous l’autorité du chef d’établissement au sein des équipes pédagogiques, des conseils de classe ou d’une instance spécifique, préfiguration d’un conseil scientifique ou pédagogique. Cette autonomie respecte les programmes ; elle doit permettre aux élèves une meilleure appropriation de leur contenu et l’acquisition raisonnée de bonnes méthodes de travail. Elle se concrétise déjà dans plusieurs champs :  à l’école primaire, de nombreuses possibilités de souplesse sont permises notamment à l’intérieur des cycles ; les choix opérés prennent sens dans le projet d’école qui regroupe les principaux axes de travail retenus pour répondre aux besoins des élèves ;  dans le second degré, les textes réglementaires précisent déjà de nombreuses possibilités de souplesse horaire (enseignements dispensés en classe entière ou en groupes allégés par exemple). Les établissements peuvent utiliser de manière différenciée les moyens horaires qui leur sont alloués. Ainsi est-il déjà possible, à partir de l’analyse des besoins des élèves, d’organiser, par exemple, des rapprochements entre les TPE et l ’ ECJS en terminale, de substituer aux IDD d’autres modalités d’aide aux élèves en considérant que les moyens dévolus aux IDD sont mis à la disposition des équipes pédagogiques pour l’usage qui leur semblera le plus utile aux élèves. C’est dans ce même esprit que peut être expérimentée une diversification des enseignements artistiques en classe de 3e ;  de plus, les dispositifs qui associent plusieurs disciplines, les TPE, les PPCP, l’ECJS, l’aide individualisée au lycée, les IDD au cycle central des collèges permettent de réelles rencontres entre disciplines. Il est souhaitable d’aller au-delà et d’expérimenter de nouveaux modes d’organisation des enseignements et de mise en œuvre des programmes. Les professeurs d’une même discipline et d’un même niveau peuvent organiser en commun une partie de leurs heures d’enseignement. Plusieurs combinaisons sont possibles : dédoublements sur une partie de l’horaire, regroupements de classes avec un même professeur sur une autre partie, interventions communes... Il est également possible d’associer ces modes d’organisation avec des regroupements d’horaires en séquences mensuelles ou bimensuelles. Au lycée, en langues vivantes étrangères, il est possible de regrouper des élèves selon les compétences de communication à travailler, qu’ils soient en LV1 ou LV2. Au lycée professionnel on exploitera au mieux les libertés d’organisation liées à l’annualisation des horaires figurant dans les référentiels. Cette souplesse peut aussi être utilisée en fonction d’un objectif commun à plusieurs disciplines : la maîtrise de la langue ou, sur un autre plan, l’éducation à l’environnement vers le développement durable par exemple. Cet élargissement des champs de l’autonomie n’est pas une déréglementation. Les finalités des enseignements, telles qu’elles sont précisées dans les programmes et les documents 72

Circulaire n° 2004-015 du 27 janvier 2004, B.O. n° 6 du 5 février 2004. École supérieure de l'éducation nationale

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d’accompagnement, s’imposent naturellement à toutes les écoles, à tous les établissements, à tous les professeurs. La souplesse s’exerce dans les approches et les méthodes. Le suivi de ces marges d’autonomie est dorénavant une des fonctions majeures des corps d’encadrement, équipes de direction et corps territoriaux d’inspection. En fonction de l’ampleur que pourra revêtir cette autonomie, l’inspecteur de la circonscription pour les écoles primaires, un ou plusieurs IEN- ET ou IA-IPR pour les collèges et les lycées, pourraient être proposés, par le recteur ou l’IA-DSDEN, comme référents afin de préparer et valider les choix soumis par les équipes. La direction de l’enseignement scolaire (DESCO), après consultation de l’inspection générale, pourra mettre en place, pour certaines situations, un protocole de suivi des expérimentations. Une évaluation des nouvelles pratiques doit être obligatoirement prévue et organisée, au niveau de l’école et de l’établissement ou au niveau du bassin, du département, voire de l’académie. Cette évaluation porte sur les acquis des élèves et mesure l’écart entre les résultats attendus (à partir du diagnostic et des finalités précisées au départ) et les résultats constatés. Au plan national, la DESCO dans le cadre de la politique nationale de soutien à l’innovation est chargée du suivi de ces nouvelles pratiques, en collaboration avec l’IGEN notamment pour leur évaluation.

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Document 7 - Circulaire no 90-108 du 17 mai 1990 sur le "projet d’établissement"73 (Éducation nationale, Jeunesse et Sports : bureau DLC 17) Texte adressé aux recteurs, aux inspecteurs d'académie, directeurs des services départementaux de l'Éducation nationale. Projet d'établissement La loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 dispose dans son article 18, que "Les écoles, les collèges, les lycées d'enseignement général et technologique et les lycées professionnels élaborent un projet d'établissement. Celui-ci définit les modalités particulières de mise en œuvre des objectifs et des programmes nationaux". Ce projet d'établissement conjugue trois exigences complémentaires.  Il exprime d'abord la volonté collective d'une communauté particulière mais doit aussi favoriser l'initiative individuelle et la responsabilité personnelle de chacun des membres de cette communauté. À ce titre, il assure la convergence des pratiques éducatives d'une équipe enseignante dont l'existence est indispensable à la cohérence de l'ensemble tout en respectant la diversité des méthodes mises en œuvre par chacun des enseignants qui la composent.  Il exprime ensuite les attentes, les espoirs, la volonté d'adaptation de l'établissement. Cela suppose une communauté d'objectifs partagés par l'ensemble de ses membres. Parce que ces objectifs reposent sur des valeurs qui dépassent le cadre de l'établissement, les établissements proches entretiennent entre eux des rapports fondés sur la solidarité.  Il exprime enfin une volonté locale qui doit aussi garantir la mise en œuvre et le respect d'orientations définies par les autorités de l'Éducation nationale. Le projet d'établissement donne une cohérence aux activités de l'établissement et organise ses relations avec son environnement. Il fait suite à un certain nombre d'actions conçues dans le même esprit mais de manière plus ponctuelle ou sectorielle. Depuis une dizaine d'années, diverses initiatives ont vu le jour et se sont conjuguées afin de promouvoir une véritable stratégie de changement en profondeur. Les Projets d'action éducative prenant en compte le développement du travail en équipe, l'implication active des élèves et l'ouverture de l'école sur son environnement se sont fondés sur des modes plus souples d'organisation du temps et des activités ; ils ont constitué une première démarche qui se situe dans la perspective de la définition d'un projet d'établissement. Par ailleurs, les actions menées dans le cadre de la rénovation des collèges ont favorisé l'élaboration de projets permettant à chaque établissement de définir sa stratégie pour mieux prendre en compte les spécificités du public scolaire qu'il reçoit. La circulaire du 8 septembre 1988, qui concerne les établissements techniques et professionnels, a encouragé la généralisation du projet d'établissement dans les lycées technologiques et professionnels.

73

"Au-delà des "éclipses" qu’a connues la notion de projet d’établissement depuis la parution de la circulaire il y a vingt ans", souligne Joël Adrian, proviseur dans l’académie de Versailles et principal rédacteur de cette circulaire en tant que chargé de mission, à l’époque, auprès du directeur des lycées et collèges, André Legrand, "et si la procédure de présentation et de validation du projet d’établissement décrite dans la circulaire est caduque, les principes énoncés gardent toute leur actualité : la nécessaire convergence des pratiques éducatives d’une équipe enseignante d’établissement et la communauté d’objectifs partagés liées à la garantie de la mise en œuvre d’orientations nationales… Il faut encore et toujours un cadre qui donne une cohérence aux activités d’un établissement scolaire, quel que soit son nom : collecte de données et de caractéristiques propres, définition d’objectifs pédagogiques communs. De cette circulaire restent en outre, me semble-t-il, au sein des lycées et des collèges, la pratique d’une réflexion sur la méthodologie de projet et l’association de l’ensemble des parties concernées à la définition d’objectifs communs". École supérieure de l'éducation nationale

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C'est cette diversité qui fonde le projet d'établissement et explique la démarche à suivre pour son élaboration et sa mise en œuvre.

I. Le fondement et la démarche du projet d'établissement a) Le fondement C'est en raison de la diversité des établissements scolaires que s'est imposée progressivement la notion de projet d'établissement : type d'établissement concerné (collège, lycée classique, polyvalent, technologique ou professionnel), différence d'origine sociale et culturelle des élèves accueillis, variété du corps enseignant, spécificité de l'environnement local. L'établissement est à la fois une communauté particulière et un élément du système éducatif national. Quelle que soit la difficulté de l'entreprise, le projet d'établissement doit concilier ces deux aspects : il permet à chaque établissement d'apporter sa contribution à la réalisation des objectifs nationaux de réussite de tous les élèves tout en prenant en compte la diversité des publics scolaires et des situations d'enseignement. C'est cette conciliation qui amène l'établissement à construire un projet par lequel :  On imagine une pratique éducative en fonction de ses possibilités, de ses contraintes et de la nature du public scolaire accueilli ;  on traduit, pour mieux les assurer, les objectifs nationaux dans leur contexte particulier. À cet égard, l'établissement scolaire s'insère dans un dispositif national d'éducation : les objectifs ministériels s'imposent à lui et il ne peut pas, dans l'élaboration et la conduite de la politique pédagogique et éducative qui lui est propre, contredire les principes généraux et les dispositions législatives et réglementaires qui définissent le fonctionnement du service public d'éducation. b) La démarche Les quatre étapes du projet sont les suivantes :    

le diagnostic ; la définition des axes du projet ; l'élaboration et la présentation d'un programme d'actions ; l'évaluation.

Cette définition implique en premier lieu une approche globale du fonctionnement de l'établissement, un recueil et une interprétation de ses données et besoins propres : caractéristiques de la population scolaire, constat des opérations nationales d'évaluation, réflexion sur les pratiques pédagogiques et les processus d'enseignement mis en œuvre, vie scolaire, nature et ressource de l'environnement local, rapports institutionnels, culturels, sociaux et économiques avec cet environnement, insertion aux différents niveaux du système éducatif, degré d'application des objectifs ministériels, réponse à l'exigence d'insertion sociale et professionnelle des élèves... C'est la phase d'analyse de ce qui fait l'identité de l'établissement. On s'appuiera en particulier, dans cette analyse, sur ce qui existe déjà au sein de l'établissement. Dans de nombreux cas, des actions novatrices ont déjà été entreprises par les personnels ; le recensement de ces actions facilitera leur liaison et leur mise en cohérence dans le cadre d'un projet plus global. Cette analyse préalable, fruit d'un travail participatif associant les membres de la communauté scolaire et leurs compétences variées, permet la définition d'objectifs spécifiques prenant en compte les réalités locales appréciées au regard des objectifs nationaux. La discussion de ces objectifs associe bien entendu tous les membres de la communauté scolaire dans un souci de cohérence de l'ensemble, centré sur l'élève.

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II. Le projet d'établissement, démarche globale Le projet d'établissement est une démarche globale et cohérente qui peut toucher à l'ensemble des activités internes et externes de l'établissement : c'est un cadre large qui englobe la dimension pédagogique. Le projet d'établissement est en premier lieu une démarche pédagogique Il permet de faire converger les pratiques diverses de tous les enseignants vers un objectif commun, il met en évidence l'intérêt de la réflexion et du travail collectifs des enseignants, gage de cohérence et d'efficacité de l'action éducative. Il veille dans le même temps à respecter le caractère individuel de l'acte pédagogique et la responsabilité de l'enseignant dans sa classe. Il n'y a pas de projet d'établissement qui ne repose sur un projet pédagogique, ce qui souligne la responsabilité propre des enseignants dans son élaboration. Le projet ne se réalisera cependant que s'il est placé dans un ensemble plus vaste comprenant les relations avec l'environnement socioculturel et économique, les rythmes scolaires, les conditions de vie dans l'établissement et enfin les activités périscolaires. Chaque projet doit obliger à une réflexion approfondie sur les relations parents-enseignants-élèves : accueil et information des parents, prise en compte des propositions des conseils de délégués-élèves des lycées. Les relations externes recouvrent les différents rapports de l'établissement avec les partenaires institutionnels ou associatifs, le monde économique et les collectivités territoriales étroitement associées à la mise en œuvre concrète du projet. Le projet d'établissement, qui définit les orientations et les objectifs prioritaires, ne peut prétendre envisager toutes les formes de la vie d'une communauté, ni en résoudre tous les problèmes ; il comporte plusieurs aspects qui ne peuvent être conçus indépendamment les uns des autres et se traduit par un programme d'actions. Au nombre des lignes de force qui caractérisent ce programme figurent nécessairement un projet pédagogique, une politique de l'orientation et de l'insertion sociale et professionnelle des élèves et un dispositif de l'ouverture de l'établissement sur son environnement. 1. Les pratiques pédagogiques à mettre en œuvre s'inscrivent au centre du projet d'établissement. Dans cet esprit, le législateur a prévu que cette partie du projet serait adoptée sur proposition des équipes pédagogiques. Les professeurs, au sein de l'équipe pédagogique, mènent des efforts convergents pour permettre à l'ensemble de leurs élèves d'acquérir un niveau de qualification reconnu ; ils veillent en particulier avec attention au suivi des élèves en difficulté. La conjugaison de ces efforts constitue en effet la définition même de l'équipe pédagogique. Les décisions en la matière, compte tenu de leur spécificité et de leur technicité, sont de la compétence des enseignants, à qui il revient d'informer les autres membres de la communauté sur la manière dont les pratiques pédagogiques servent les objectifs définis. 2. L'orientation et l'insertion sociale et professionnelle des élèves sont l'affaire de l'ensemble des membres de la communauté scolaire. Ils aident et conseillent les élèves dans la construction de leur projet personnel. C'est en effet à travers le devenir scolaire, professionnel et social des élèves que se mesure la réussite de l'action éducative entreprise. 3. L'élaboration d'une stratégie d'ouverture de l'établissement s'appuie sur l'analyse des ressources culturelles, économiques et sociales de l'environnement, prend en compte les relations avec les collectivités et les divers départements ministériels, les jumelages ou les modes plus informels d'échanges avec l'extérieur : stages, visites d'élèves, actions de formation continue... Elle utilise l'ensemble des techniques de communication.

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Compte tenu des spécialités des établissements concernés, cette liste des axes du projet peut n'être pas limitative, notamment pour ce qui a trait aux lycées professionnels et technologiques. Parce qu'il coordonne différents objectifs, le projet d'établissement doit prévoir des étapes dans sa mise en œuvre ; tous les objectifs ne sauraient être atteints en même temps. C'est le bilan fait lors de chaque étape qui doit mettre en confiance la communauté éducative et convaincre tous ses membres de l'utilité de la démarche. Il ne peut y avoir de projet efficace sans la conviction de tous les acteurs, au premier rang desquels se situent les enseignants, le chef d'établissement, le gestionnaire, leurs collaborateurs et les personnels d'éducation. Le chef d'établissement aide à l'explicitation des attentes et des capacités de la communauté éducative et garantit la cohérence des actions avec la politique nationale d'éducation. Il est aidé dans cette tâche par une analyse des réussites et des difficultés de la vie quotidienne dans l'établissement. De cette constatation et de sa discussion par la communauté scolaire peuvent naître des idées d'actions que le chef d'établissement reliera aux objectifs nationaux et académiques. Au sein de cette communauté éducative, les personnels administratifs, techniques, ouvriers, sociaux, de santé et de service apportent leur appui et leur expérience à de nombreuses actions ; ils participent directement à certaines d'entre elles : clubs de santé, aménagement de l'espace scolaire, amélioration de l'environnement, campagnes de propreté... Cette démarche d'ouverture à l'intérieur même de l'établissement est le gage d'une cohésion renforcée.

III. Les instruments du projet d'établissement Le projet d'établissement est un programme d'action visant à l'amélioration de la situation, établi sur une durée assez longue pour que ses résultats soient appréciables. Cette durée ne doit pas être plus courte que la durée moyenne de présence des élèves dans l'établissement. Il serait même souhaitable qu'elle soit un peu plus longue pour recueillir des éléments sur leur devenir. Aux actions programmées seront affectés des moyens dont l'établissement dispose ou qu'il sollicitera des autorités hiérarchiques ou d'autres partenaires. Ces moyens concernent au moins les domaines suivants : 1. La formation. Elle intéresse tous les partenaires :  Les enseignants pour l'exercice de leur profession ;  Les parents d'élèves ou les délégués-élèves pour l'exercice de leur mission ;  La communauté éducative dans son ensemble, qu'elle aidera à concevoir et réaliser un projet d'établissement, et à en assurer le suivi et l'évaluation régulière. Ces fonctions demandent en effet à l'établissement de développer de nouvelles capacités. La définition des besoins de cette formation sera élaborée au premier chef par les catégories concernées. Les différents échelons de responsabilité de l'Éducation nationale doivent, à la fois, manifester leur confiance envers les établissements en les laissant développer leurs initiatives, et rassembler toutes les compétences pour apporter, à chaque collège ou lycée, les aides nécessaires. Le projet s'appuie sur les plans académiques de formation et propose des actions de formation plus spécifiques, synthétisées dans le plan de formation de l'établissement qui s'efforce de rendre cohérentes ces actions isolées. 2. Le programme d'équipement de l'établissement. Sa prise en compte concourt à la détermination et à la mise en œuvre du projet d'établissement. 3. La gestion de la politique du projet d'établissement. Elle est facilitée à tous les échelons par la globalisation des crédits d'un certain nombre d'actions traitées jusqu'alors isolément (projets d'action École supérieure de l'éducation nationale

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éducative, fonds d'aide à l'innovation, actions de soutien, projets culturels, politiques des zones d'éducation prioritaire) et l'attribution par les autorités déconcentrées d'une enveloppe globale aux établissements. Pour l'élaboration et la mise en œuvre du projet d'établissement, le chef d'établissement et l'équipe éducative disposent de l'aide et du conseil de groupes, constitués au niveau départemental ou académique, dont le rôle est de :    

faciliter la mise en œuvre des projets ; apporter une aide méthodologique ; animer les équipes ; aider à l'autoévaluation.

Ces groupes associeront des personnes qualifiées : corps d'inspection, services académiques, chefs d'établissement, enseignants.

IV. La procédure de présentation et de validation du projet Le conseil d'administration délibère du projet d'établissement et élabore une première proposition qui comporte les grandes lignes du projet ; il garde présent à l'esprit le fait que l'établissement scolaire s'insère dans un dispositif national d'éducation. Tout projet doit prévoir une mise en œuvre sur les moyens du fonctionnement normal de l'établissement pour l'année scolaire considérée. Il sert de référence pour la gestion des moyens de l'établissement et pour l'attribution de moyens spécifiques éventuels, notamment, selon le principe d'engagements contractuels. Sous la forme de cette première proposition, les projets sont adressés aux autorités académiques. Elles s'assurent, d'une part, de leur cohérence interne et veillent, d'autre part, au respect par l'ensemble des projets, des objectifs académiques et nationaux. À ce titre, le projet d'établissement constitue un outil privilégié du dialogue avec les autorités académiques. À l'issue de cette première phase du dialogue, le conseil d'administration de l'établissement, informé des observations éventuelles des autorités académiques, adopte le projet sous sa forme définitive. L'établissement étant le lieu privilégié, mais pas unique, de la mobilisation et de la prise en compte des spécificités locales, des lycées et des collèges peuvent, dans le cadre du bassin de formation, s'associer pour l'élaboration puis la mise en œuvre de projets communs tant dans le domaine de la formation initiale que dans celui de la formation continue, ainsi que le recommande la loi d'orientation. On devra veiller à ne pas empêcher, par le mode d'examen administratif des projets, la collaboration d'établissements de types divers. Pour la rentrée 1990, on prendra en compte, dans la mesure du possible, les recommandations de la présente circulaire dans les projets en cours d'élaboration. À partir de l'année scolaire 1990-1991, la transmission et l'examen des projets se feront selon le calendrier suivant :  présentation au conseil d'administration et transmission aux autorités académiques avant la fin de février de la première proposition ;  phase de dialogue, à l'issue de laquelle est transmis aux autorités académiques l'acte relatif au projet d'établissement. Notification aux établissements dans un délai de quinze jours de l'acceptation de leur projet ;  information des établissements sur la nature et l'importance des moyens complémentaires éventuellement dégagés qui leur sont attribués courant juin.

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Cette procédure doit être l'occasion de créer une dynamique se nourrissant d'échanges mutuels. La prérentrée constitue un moment favorable pour une réflexion en commun des personnels sur le projet pédagogique. L'établissement doit inscrire ses efforts dans la durée ; le projet revêt donc un caractère pluriannuel ; l'analyse périodique de l'état de son avancement et de ses résultats menée aux différents niveaux et le dialogue qui s'instaure annuellement avec les autorités académiques dans le cadre des demandes de moyens susceptibles d'y être dévolus constituent les temps forts d'une réévaluation régulière des objectifs fixés et des méthodes utilisées pour aboutir à leur réalisation.

V. L'évaluation Deux dispositifs spécifiques concourent à l'évaluation de la réalisation du projet d'établissement. Un dispositif interne à l'établissement Le projet implique un dispositif d'évaluation interne, outil de pilotage, facteur de cohérence et de régulation de l'action, associant les acteurs et les partenaires du projet. Ce dispositif permet de recueillir des données quantitatives et qualitatives sur le fonctionnement de l'établissement, il comprend notamment le tableau de bord qui permet de mesurer le degré de réalisation des objectifs et privilégie, parmi les indicateurs retenus, l'analyse des flux d'élèves, des poursuites d'études et de l'insertion. Des indicateurs, plus qualitatifs, portent notamment sur la vie scolaire comme par exemple :      

état des locaux ; relations de l'établissement avec le milieu environnant ; activités socioculturelles proposées aux élèves ; fréquentation et implication des élèves dans le CDI et le foyer ; participation des élèves et des parents aux élections ; appréciations portées par les élèves sur le réfectoire, les repas, l'internat.

Un dispositif externe, dispositif académique relayant les dispositifs nationaux Il s'agit là de vérifier au moins le respect des orientations nationales et des principes généraux intangibles ; on ne saurait utiliser pour la réalisation des objectifs fixés des moyens contraires aux principes et règles du système éducatif : dispense de certains enseignements obligatoires, ségrégation d'une partie des élèves... Par ailleurs l'observation académique de la relation entre les taux d'échec scolaire et l'environnement socioéconomique met en évidence les disparités de situation face à l'École et permet aux recteurs de renforcer par des moyens sélectifs l'action éducative là où se concentrent les difficultés. Dans le cadre de leurs missions, les inspecteurs pédagogiques apportent leurs compétences en matière d'évaluation des politiques éducatives. Ce dispositif externe permet en outre au ministère :  d'organiser et d'exploiter les informations collectées localement et d'élaborer une synthèse qualitative et quantitative au travers d'un dialogue avec les académies ;  d'impulser un travail de réflexion sur la méthodologie de projet, l'innovation, le partenariat et les zones d'éducation prioritaire. En 1989-1990, ce travail prend appui sur une action de réflexionformation inscrite au Plan national de formation. De plus, les inspecteurs d'académie et les recteurs assurent la diffusion de projets ayant permis l'amélioration sensible de la situation d'un établissement. Les recteurs prennent l'initiative de faire porter, École supérieure de l'éducation nationale

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avec le concours des centres régionaux de documentation pédagogique, à la connaissance des autres établissements de même nature les innovations intéressantes. Le projet d'établissement vise à accroître l'efficacité globale du système éducatif en associant l'ensemble des parties concernées à la définition d'objectifs, en assouplissant et en élargissant les procédures de décision : il est ainsi un élément important de la modernisation et de la rénovation du service public d'éducation. Facteur de progrès social, il est une démarche indispensable pour que notre système d'éducation favorise véritablement l'esprit d'initiative chez les élèves et le goût de la liberté associé au sens de la responsabilité. (BO no 21 du 24 mai 1990.)

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Document 8 - L’essentiel n° 3 – décembre 2007 La note d’information sur les rapports des inspections générales Cette publication présente en résumé certains des rapports récents des inspections générales. Ceux-ci sont consultables dans leur intégralité sur le site du ministère, dans la rubrique "rapports". Clarifier les missions des EPLE L’étude sur "l’EPLE et ses missions" est l’occasion de faire le point sur un sujet central pour le système éducatif : l’établissement public local d’enseignement s’est en effet affirmé comme le niveau essentiel de mise en œuvre des politiques éducatives et d’évaluation de leur efficacité, mais aussi comme le carrefour d’exercice des compétences entre l’État et les collectivités territoriales. Elle intervient aussi au moment où les chefs d’établissement souhaitent une clarification des missions qui sont confiées à l’EPLE et, partant, à eux-mêmes, en raison du "malaise" que suscite la sollicitation périodique des EPLE pour des tâches nouvelles auxquelles ils ne sont pas toujours préparés. Certes, le décret de décembre 2001 a précisé ce que sont les missions des chefs d’établissement et de leurs adjoints. Mais, les missions de l’EPLE, pour leur part, n’ont jamais fait l’objet d’une mission expresse et exhaustive, qui soit contenue dans un texte unique ; même si, ne serait-ce qu’à travers le terme d’ "enseignement", explicitement spécifié dans leur intitulé, leur spécialité n’en existe pas moins. Les établissements se sont éloignés de leur mission d’enseignement Il apparaît donc temps de clarifier ce que sont les missions de l’EPLE, tant pour l’institution que pour ses partenaires. En effet, le sentiment général est que ces derniers ont perdu la lisibilité de ce qui leur est demandé. L’empilement des réformes et des consignes a parfois ébranlé les convictions. Les chefs d’établissement considèrent en outre que la multiplicité des tâches qui s’accumulent sur les EPLE et sur leurs directions (notamment le remplacement des enseignants absents, l’organisation des examens et des concours et la délivrance d’attestations diverses ou le recrutement de certains personnels, les éloigne de leurs missions de base : la transmission des connaissances, l’éducation et la formation des futurs citoyens, l’orientation, l’insertion et la préparation à la vie professionnelle, qui constituent, en réalité, une mission unique, la mission d’enseignement au sens large du terme. IGEN – IGAENR – Rapport n° 2006-100 – l’EPLE et ses missions À ceci s’ajoute le fait que la mission d’éducation et de socialisation confiée aux EPLE pèse désormais souvent autant, en poids relatif, que leur mission d’enseignement et de transmission des connaissances. De plus, depuis vingt ans, cette mission est devenue plus difficile, en raison notamment de la situation plus précaire d’un grand nombre d’actifs et de la fragilisation des liens familiaux, de la remise en cause de l’autorité morale et intellectuelle des personnels ou encore de la recherche d’un nouvel emploi entre les droits et les devoirs des élèves et ceux des adultes. Enfin, l’EPLE, est aussi un acteur local, placé au cœur même des enjeux de la cité et son environnement. À ce titre, il est devenu un des lieux de création ou/et de maintien du lien social. En zone rurale comme dans les quartiers en difficulté, il apparaît parfois comme l’un des derniers services publics présents et sans doute le plus visible et le mieux reconnu et accepté, ce qui lui confère une responsabilité particulière. Mais il représente également, pour son environnement, une ressource culturelle et de socialisation à travers des actions conduites en partenariat avec les collectivités territoriales. Il y a donc, incontestablement, depuis plusieurs années, une tendance à faire de l’EPLE une sorte de "guichet unique ", assurant en direction de la jeunesse une mission éducative élargie, à la demande de l’État comme des collectivités territoriales, ou accomplissant des tâches qui relèveraient davantage d’un École supérieure de l'éducation nationale

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service déconcentré que d’un EPLE. Certes, il y a là le signe que l’EPLE est un organisme vivant qui sait répondre aux besoins des élèves et de la société. Grâce à l’ensemble de ses personnels, il s’est adapté, et il s’adapte encore. Mais, il l’on n’y prenait garde, la mission première de l’EPLE pourrait être perdue de vue et la dispersion des énergies risquerait, enfin de compte, de nuire de nuire aux élèves euxmêmes. Un nécessaire recadrage Un recadrage de son action paraît donc s’imposer. Mais, parce-que l’EPLE est un corps social vivant, sans doute n’est-il pas nécessaire de figer le contenu de ses missions dans un texte unique et exhaustif. Il doit garder le dynamisme qui lui a permis de répondre positivement aux sollicitations diverses et mouvantes dont il est l’objet. Aussi a-t-il surtout besoin :  de cohérence et de lisibilité pour ne pas se disperser et rester concentré sur sa mission d’enseignement ;  de visibilité pour conduire son action dans la durée, dans le cadre d’objectifs clairs et contractualisés et au moyen de dotations pérennes ;  de soutien de la part des autorités ministérielles et académiques : l’EPLE doit devenir un vrai sujet d’attention, mais aussi le lieu et l’instrument principal de la mise en synergie de tous les cadres de l’académie. Aujourd’hui, l’autonomie de l’EPLE est encore en construction. D’une part, les textes de l’administration centrale sont souvent pointilleux sur les modalités d’action. D’autre part, les outils de gestion utilisés ne sont pas toujours conçus pour des EPLE autonomes, dont les marges de manœuvre sont souvent réduites. Il est vrai que, au sein des EPLE eux-mêmes, on observe une réticence des personnels devant l’exercice de l’autonomie, et tout spécialement de l’autonomie pédagogique, qui exige l’acceptation d’un minimum de travail collectif et implique une prise accrue d’initiative et de responsabilité. Seule une pédagogie de l’autonomie permettra de résoudre ces contradictions et d’éviter de voir réduits à néant les espoirs justement placés dans la contractualisation et les contrats d’objectifs. L’autonomie n’est pas l’indépendance ; mais, si l’administration centrale et les responsables académiques doivent être respectueux de l’autonomie des EPLE, ils doivent, tout autant, se montrer soucieux d’éviter que la diversité des approches ne dérive en disparités non compatibles avec le principe d’unité du service public. Étant donné que l’enseignement est bien la mission première de l’EPLE, l’établissement n’est pas - et ne peut pas être – qu’un concept juridique, utilisé par commodité pour héberger certaines tâches de proximité. Il semble donc très important de faire preuve de discernement chaque fois que l’on confie des tâches nouvelles aux établissements. Pour récapituler, les quatre axes principaux suivants permettraient de clarifier et donc de rendre plus effectives, les missions des EPLE.  Reconnaître vraiment l’EPLE comme un espace autonome de l’action pédagogique, d’une part, en réaffirmant que son pilotage pédagogique relève de la responsabilité principale du chef d’établissement et que les notions d’établissement et de projet doivent se situer au premier plan pour les différents acteurs de notre système éducatif ; d’autre part, en redonnant aux établissements des marges dans l’utilisation des moyens d’enseignement, en garantissant budgétairement les crédits pédagogiques ou encore en centrant les contrats d’objectifs sur des objectifs réellement pédagogiques.  Respecter le principe de spécialité de l’EPLE, en veillant notamment à ce que l’on ne confie pas à celui-ci de tâches nouvelles sans alléger ou mutualiser certaines des tâches qu’il assume déjà.  Organiser les services académiques dans une perspective de service effectif aux établissements, notamment en passant d’une administration de commandement et injonctive, comme cela est encore parfois le cas, à des relations plus respectueuses du statut d’établissement public des EPLE.

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 Aider les EPLE à mieux organiser pour assurer de manière plus efficace leurs tâches pédagogiques et administratives, ce qui nécessite, au plan pédagogique, un soutien fort du niveau académique pour légitimer la position d’animateur pédagogique du chef d’établissement et, au plan administratif, la professionnalisation des collaborateurs des chefs d’établissement, l’allègement et la bonne répartition des tâches confiées aux EPLE et la mise en place d’outils facilitateurs mutualisés par le niveau académique.

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2. Documents relatifs à l'évaluation Document 9 - "Programmes de la LOLF et programmes scolaires, performance de l’établissement et réussite des élèves" Intervention de François Perret, doyen de l’IGEN Colloque au Sénat, mars 2007 Je voudrais me féliciter d’intervenir en premier, non pas pour un plaisir de vanité mais, parce qu’au fond, j’y veux voir le signe qu’il y a une forme de consensus sur le fait que les enjeux de la LOLF sont d’abord d’ordre pédagogique et concernent prioritairement la réussite des élèves. Reprenant le terme du président Jean Arthuis, qui parlait il y a un instant d’ambition de lucidité, j’essaierai de rester lucide par rapport aux objectifs qui nous sont fixés, par rapport à l’histoire récente et plus ancienne de l’institution scolaire. Le passé doit toujours éclairer le présent. La LOLF consacre la notion d’obligation de résultat dans les politiques publiques. J’emploie ici le verbe "consacrer" parce que l’architecture de la LOLF représente, à l’évidence, un point d’aboutissement jamais atteint auparavant d’un pilotage par objectifs de l’action publique et, en l’occurrence, de la politique éducative. Mais tout cela est apparemment assez ancien dans notre maison. C’est une assez vieille histoire. L’univers scolaire est familier des évaluations, des résultats, des examens. Cela fait longtemps que la loi a fixé des objectifs, y compris des objectifs chiffrés et mesurables, au système éducatif. Pensons aux objectifs fixés par la loi d’orientation de 1989 qui sont toujours présents à l’esprit et toujours valables : 100 % de qualification des élèves au niveau V ou 80% des élèves au niveau du baccalauréat. La démarche de projet telle qu’elle s’exprime avec force dans les programmes de la LOLF est également très ancienne dans l’école française. Dans notre histoire, cette démarche de projet s’est développée de façon ascendante, depuis la classe jusqu’au système éducatif tout entier. Pensons d’abord à la classe et à la pédagogie dite "de projet" au sein de la classe qui s’est développée dès les années 20 et les années 30, avec le recours à des pédagogies actives centrées sur l’élève. Pensons, beaucoup plus tard, aux fameux 10% du ministre Fontanet en 1973 (10% de l’horaire global pouvant être utilisé pour des activités pédagogiques décloisonnées ouvertes sur l’environnement de l’école). Pensons ensuite à tout ce qui arriva dans les années 1970 et dans les années 1980, les projets d’action éducative, les PACTE d’abord, les PAE ensuite. Pensons à la création des zones prioritaires qui virent se développer dans les années 1980 une logique de projet parce que les situations d’urgence impliquaient ce type d’approche. Pensons au projet d’école et d’établissement consacré par la loi de 1989 et, plus tard, au projet d’académie, et aujourd’hui au projet annuel de performance de la LOLF. C’est bien ce mouvement ascendant partant de la classe vers le système éducatif qui a vu se développer la démarche de projet. Or, avec le recul, quel regard pouvons-nous porter sur une démarche si anciennement ancrée dans nos pratiques ? Il est hors de doute et j’en ai été le témoin et l’un des acteurs, que cette responsabilisation des acteurs locaux, notamment au sein des écoles et des établissements, a été souvent un facteur de dynamisation des équipes et des politiques. Certes, la gestion des projets d’établissement a pu donner naissance ici ou là à quelques dérives bureaucratiques, je pense en particulier au développement du contrôle a priori des projets d’établissement, ou à la connexion entre les dossiers des projets d’établissement et l’attribution de quelques moyens supplémentaires. Le principal fut que, trop souvent, les projets d’école et d’établissement ne concernaient que les marges de l’action éducative, des activités pédagogiques, culturelles, sportives, non sans intérêt, mais relativement périphériques. Le cœur même de l’activité enseignante est resté le plus souvent à l’écart de cette démarche de projet d’établissement. École supérieure de l'éducation nationale

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Nombreuses sont les circulaires de rentrée qui ont fait ce constat. Pourquoi ? Au fond, on a soumis les acteurs à une double injonction paradoxale :  d’une part, un appel insistant à la responsabilité, à la mobilisation autour d’objectifs que chaque unité d’enseignement devait se fixer ;  d’autre part, une gestion immuable des moyens attribués en fonction de grilles horaires arrêtées nationalement, fixant les horaires de chaque enseignement parfois au quart d’heure près ; des instructions qui n’hésitent pas à descendre dans le menu détail, et surtout des programmes nationaux d’enseignement qui restent tout naturellement la première référence des professeurs. Ainsi s’est développée une sorte de "schizophrénie", avec un discours managérial, celui de la réforme de l’État, moderne, extrêmement vigoureux, soutenu par les autorités de l’éducation nationale, mais tournant parfois à la rhétorique un peu creuse et incantatoire, parce que greffé sur un système de gestion et de références immuable. Au risque de paraître simpliste, je dirais que la priorité pour un professeur demeure d’atteindre dans son enseignement les objectifs fixés par les programmes, plus que de contribuer à réaliser les objectifs du projet d’établissement ou du projet académique. Et ce d’autant plus que les professeurs sont d’abord évalués, traditionnellement, en référence aux instructions et objectifs des programmes de leurs disciplines. On retrouve la ligne de partage entre l’administratif et le pédagogique, entre les chefs d’établissement et les corps d’inspection, entre l’univers des projets et celui des programmes. Je force le trait. Ce que je veux montrer, c’est qu’il faut travailler davantage sur l’articulation entre les deux univers, sur le rapprochement des logiques, celle des gestionnaires et celle des enseignants, sur le recours à un langage commun qui permette de concilier la performance de l’établissement, du système scolaire tout entier, et la réussite des élèves. À l’heure de la LOLF, qu’est-ce qui permet d’espérer que les difficultés que je viens d’évoquer seront mieux surmontées ? Qu’on saura concilier les exigences des programmes scolaires et les objectifs des projets annuels de performance ? L’une des clés réside sans doute dans le rapprochement entre les deux systèmes d’évaluation qui prévalent dans l’école et qui sont aujourd’hui peu connectés. D’une part, l’évaluation du système éducatif pour les pilotes, pour les responsables, pour les personnels d’encadrement, et, d’autre part, l’évaluation des acquis des élèves. Je reprends avec "acquis" un terme que nous avons utilisé dans un rapport de l’inspection générale de 2005 intitulé "Les acquis des élèves, pierre de touche de la valeur de l’école". La notion d’ "acquis", en effet, mieux que celle de "résultats", renvoie à une conception très large des compétences atteintes par les élèves, de façon progressive et sur le long terme, ainsi qu’à la valeur de ces apprentissages au-delà de l’école. La notion d’acquis permet de porter davantage l’attention sur les effets réels de l’éducation au-delà du temps de l’éducation. L’évaluation du système éducatif s’appuie essentiellement sur des indicateurs de fonctionnement. Elle intègre très peu d’indicateurs portant sur les acquis des élèves. Or, il paraît difficile, à tout le moins, d’apprécier la performance d’un système éducatif sans tenir compte d’abord des acquis des élèves. Si vous regardez par exemple le programme "Enseignement public du second degré" de la LOLF, vous êtes frappés par le fait que, sur le premier objectif "Conduire le maximum d’élèves au niveau de compétences attendues en fin de scolarité et à l’obtention des diplômes correspondants", qui comptabilise pas moins de 37 indicateurs, très peu portent sur les acquis des élèves, la plupart portent sur le fonctionnement du système. Lorsqu’on vous propose comme indicateurs des taux d’accès au baccalauréat, des taux d’accès au brevet, des taux de redoublement ; lorsqu’on vous propose des proportions de jeunes filles dans les enseignements scientifiques ou technologiques, par exemple, ce sont des indicateurs qui ont École supérieure de l'éducation nationale

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évidemment leur intérêt, mais qui ne permettent pas de mesurer précisément les acquis des élèves. Parmi cette série d’indicateurs, seuls trois dans ce programme-là concernent les acquis des élèves. Je vous les cite :  proportion d’élèves ayant acquis les compétences de base en français et en mathématiques en fin de collège. Cela dit, qu’est-ce que les compétences de base sinon ce que, à un moment donné, l’institution et le Parlement bien sûr, auront décidé ?  proportion d’élèves ayant atteint le niveau "B1" en fin de collège, en référence au cadre européen pour l’enseignement des langues vivantes ;  proportion d’élèves ayant atteint le niveau 2 du brevet informatique et Internet. Seuls trois indicateurs portent véritablement sur les acquis des élèves. Je passe maintenant à la seconde évaluation, celle des élèves telle qu’elle se pratique jusqu’à présent. Vous savez que l’évaluation des élèves repose la plupart du temps sur une notation chiffrée fondée sur l’attribution de notes, dont chacun connaît la fragilité, et sur la pratique de la moyenne, tout pouvant compenser tout. Le principe de la compensation produit des données peu significatives sur les connaissances et les compétences acquises par les élèves. Alors, comment relier ces deux grands systèmes d’évaluation a priori hétérogènes ? En se donnant véritablement les moyens d’évaluer les acquis des élèves, et je crois qu’il faut ici évidemment parler du socle commun de connaissances et de compétences, qui ouvre véritablement dans ce domaine des perspectives nouvelles. Je ne peux pas dire qu’il les ouvre exactement, car l’évaluation par les compétences n’est pas étrangère à certaines disciplines telles que l’éducation physique et sportive ou à l’enseignement professionnel. Mais il est clair que la définition d’un socle commun pour tous ceux qui sortent de l’école obligatoire ouvre un panorama général d’approche par les compétences. Les compétences au sens du socle n’ont plus exactement le sens qu’on leur accordait dans la littérature pédagogique habituelle. Les compétences du socle ont le sens européen qu’on leur accorde aujourd’hui. Elles désignent à la fois des connaissances, mais aussi des capacités et des attitudes ou des comportements. L’entrée est transversale, transdisciplinaire, plusieurs disciplines pouvant participer naturellement à l’acquisition de telle ou telle compétence. Le socle privilégie la continuité des apprentissages et leur progressivité par rapport à la segmentation entre les disciplines et entre les différents niveaux d’enseignement, et puis, naturellement, la logique du socle suppose qu’il n’y ait pas de moyenne, de compensation. C’est une logique binaire : on a le socle ou on ne l’a pas. Je ne peux pas compenser, théoriquement, des faiblesses dans la maîtrise de la langue par une excellence remarquable, en culture mathématique et scientifique par exemple. Le principe, c’est que chacun des piliers puisse être maîtrisé. Vous voyez à quel point cette logique d’évaluation fait une différence extrêmement profonde par rapport à la tradition d’évaluation des élèves, Il s’agit maintenant de transformer ce document de référence en un énoncé précis de niveau de compétences à atteindre et de mettre en place les modes d’évaluation correspondants, c’est à dire un véritable outil de mesure des compétences réellement atteintes par les élèves à la fin de l’école primaire ou du collège. C’est exactement le moment où nous en sommes dans nos travaux conduits sous l’égide de la direction générale de l’enseignement scolaire, après avoir commencé par identifier, au sein des programmes d’enseignement, les compétences à atteindre, en référence au "socle". La phase qui suit, absolument stratégique, concerne la production d’un outil de référence pour évaluer précisément le degré d’atteinte de ces compétences par chacun des élèves. Le chemin est long. Il faudra en premier lieu une mobilisation des corps d’inspection, dont les pratiques devront certainement évoluer. Vous savez à quel point les corps d’inspection sont aujourd’hui plus attentifs aux pratiques professionnelles des professeurs lorsqu’ils inspectent, qu’aux résultats des élèves dans les classes qu’ils visitent. Sans doute faudra-t-il faire évoluer un peu ce paradigme, tout en

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considérant que de telles évolutions mettent en jeu profondément les pratiques, et qu’il sera nécessaire d’avoir du temps et de l’argent à y consacrer, notamment à la formation continue. Il y a évidemment des dangers, ce que j’ai appelé dans d’autres lieux, des dérives "technicistes". On peut craindre que l’on passe son temps à évaluer au lieu d’enseigner, on peut craindre que les programmes ne se réduisent à ce qui est facilement évaluable, et à moindre frais, et que ce qui est le plus difficile à évaluer soit écarté des programmes. Ce serait alors essentiellement les contenus culturels des formations qui seraient écartés parce que très difficiles à évaluer. On peut évoquer le danger de réduire l’enseignement à la préparation de tests standardisés, QCM par exemple. Un danger plus grave encore que je vais signaler car nous le voyons déjà à l’œuvre, c’est celui d’un enfermement des élèves dans des activités, dans des tâches, fermées sur elles-mêmes, juxtaposées sans lien de sens, sans perspectives globales et, au fond, sans signification d’ensemble. Ce rapport au savoir, pour citer l’expression d’un chercheur, Bernard Charlot, a été observé de façon extrêmement précise, notamment dans les zones d’éducation prioritaires. On peut évoquer aussi le danger d’une multiplication excessive des certifications particulières spécialisées dans des domaines à côté des examens, des concours traditionnels, dans une logique de constitution d’un portefeuille de compétences, utile dans la vie ultérieure, utile pour les CV. Pourrait alors se profiler à l’horizon la disparition de la dimension globale et humaniste de la formation. Or, former l’homme global c’est tout de même ce qui nous importe d’abord. Je signale ces dangers pour que nous ayons à les connaître. Il n’empêche que nous ne pourrons véritablement progresser, à mes yeux, que si nous entrons véritablement dans cette logique d’approche par les compétences. On voit combien les perspectives ouvertes par le socle sont susceptibles de réconcilier la logique des projets et celle des programmes. En identifiant de façon très précise les compétences que tout jeune doit acquérir au terme de sa scolarité obligatoire, en facilitant ainsi la création de véritables outils communs de mesure des acquis des élèves, ce socle permet de rapprocher la démarche des pilotes, la démarche des personnels d’encadrement et celle des enseignants. Finalité commune, entre eux, à coup sûr, et on peut l’espérer, objectifs et indicateurs de plus en plus partagés sans doute, d’autant plus que la loi d’orientation de 2005 a tracé un cadre qui permet de porter une attention plus grande aux résultats que l’on doit atteindre, tout en ménageant aux établissements une liberté plus grande. Trois dispositions majeures y figurent en effet : premièrement, la réaffirmation de la liberté pédagogique des enseignants, deuxièmement, la création au sein des établissements du conseil pédagogique, troisièmement la capacité laissée aux établissements d’expérimenter. Ce qui comptera de plus en plus, ce sont les résultats que, dans l’établissement et dans la classe, on cherchera à atteindre, plus que le chemin pour y parvenir. Je voudrais finir en quelques mots en revenant sur l’obligation de résultats et sur ses limites. En matière de normes, je voudrais rappeler qu’il convient de distinguer deux grands types : d’une part, la loi, la réglementation juridique, les lois institutionnelles, et d’autre part les mœurs, les usages, les cadres moraux. Le non-respect de la norme dans sa forme impérative déclenche des sanctions institutionnalisées. Inversement, le non-respect de la norme incitative ou morale n’est pas sanctionné au sens juridique du terme, même s’il y a évidemment des sanctions symboliques d’une autre nature. On comprend bien que les marchés financiers, l’univers de la compétition sportive, ou bien le monde du renseignement, sont soumis à une obligation impérative de résultats. Mais qu’en est-il de l’obligation de résultats dans l’espace éducatif ? Il faut reconnaître qu’il y a une certaine ambiguïté dans les discours officiels qui promeuvent cette obligation de résultats. S’agit-il simplement d’une ardente obligation ? Quelle forme prendraient les sanctions à l’égard des établissements, à l’égard de leurs chefs, voire à l’égard des professeurs en cas de non atteinte des objectifs ? Les établissements non performants verraient-ils leur budget réduit ? Fermeraient-ils, comme en Angleterre par exemple ? Dans quelle mesure la carrière des enseignants serait-elle indexée sur la valeur ajoutée qu’ils produisent ? Je force le trait mais c’est pour mieux faire sentir le flottement qui entoure cette notion, et je pense qu’il y a intérêt à clarifier ces notions-là, et à distinguer le cas du politique et de la haute administration, de celui École supérieure de l'éducation nationale

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des professionnels de terrain. Pour le ministre, pour le directeur d’administration centrale, pour le recteur, la norme impérative a un sens. D’abord parce que l’éventualité de la sanction fait partie du contrat de départ, et que l’exercice de hautes responsabilités doit aller de pair avec l’évaluation des responsables. Ensuite, parce qu’au niveau macro-éducatif, le national ou l’académique, on peut identifier assez aisément des objectifs mesurables, chiffrés, lisibles. Mais, pour les enseignants, pour les équipes éducatives des établissements, la limite essentielle à l’obligation de résultats, c’est la liberté absolue du sujet qui apprend, ou qui n’apprend pas, et qu’il n’est pas question d’enseigner à toute force. La responsabilité des enseignants, à un moment donné, se confronte à la liberté du sujet que l’on souhaite enseigner. J’ajoute un détail pragmatique : il n’est de toute façon pas possible de changer de corps enseignant quand bien même il n’atteindrait pas les résultats escomptés. Tout cela est évident et c’est pourquoi il me semble que, pour les établissements, pour les personnels, cette norme que j’évoquais, elle est de l’ordre de l’horizon éthique, tout en étant portée et soutenue par l’institution. Tout faire pour la réussite de tous les élèves. Il s’agit d’une obligation de moyens, et d’ailleurs, c’est ce que dit le code de l’éducation, dans son article L.122-1-1, "La scolarité obligatoire doit au moins garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun". Veillons à ce que cette logique de performance portée par la LOLF contribue à renforcer l’attention de tous les acteurs de l’institution scolaire sur les acquis des élèves, tout en respectant la responsabilité singulière des enseignants, dans leur relation directe avec leurs élèves et leurs étudiants. Au final, ce qui fonde cette responsabilité, c’est d’abord un ensemble de valeurs, celles de la République, le code de l’éducation le dit, que notre école a pour mission de transmettre et de faire partager. .-.-.-.-.-.-.-.-. Dominique ANTOINE74 Je remercie François Perret pour cet exposé brillant, sans langue de bois, qui a le mérite d’introduire de façon rigoureuse le débat et de nous montrer, je crois, combien cette nécessité constitutionnelle du compte rendu qui s’impose, comme le rappelait le président Arthuis, à chaque fonctionnaire, doit être adaptée au cas particulier de l’enseignant.

74

Alors secrétaire général du MEN ; par la suite conseiller auprès du président de la République. École supérieure de l'éducation nationale

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Document 10 - Note de la DEPP (décembre 2008) relative aux performances des élèves de CM2 à vingt ans d’intervalle – 1987-2007

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Document 11 - L’évaluation PIRLS Alain HOUCHOT – IGEN (groupe de l’enseignement primaire) Janvier 2008 L’évaluation PIRLS (Progress in international Reading Literacy Study) est une étude pilotée par l’IEA (Association internationale pour l’évaluation du rendement scolaire). Elle a été initiée en 2001 puis reconduite en 2006 et vise à mesurer les performances en lecture des élèves à un niveau scolaire donné, niveau qui correspond au CM1 en France (et non pas pour une génération d’élèves comme c’est le cas de PISA). La moyenne d’âge internationale est de 10,3 ans ; pour la France elle est de 10 ans. L’épreuve comprend 10 textes (5 textes littéraires et 5 textes informatifs) à partir desquels est évaluée la maîtrise de 4 grandes compétences :    

prélever des informations explicites (24% des items) ; faire des inférences directes (34% des items) ; interpréter et assimiler idées et informations (28% des items) ; examiner et évaluer le contenu, la langue et les éléments textuels (apprécier) (14% des items).

45 pays ou provinces dont 21 pays européens ont participé en 2005. Il est toujours difficile de faire une interprétation de résultats lorsque l’on n’a pas l’ensemble des données disponibles. Toutefois, sur la base de l’analyse transmise par la DEPP, je pense que nous pouvons tenter une première analyse des résultats des élèves français, résultats mis en perspective avec ceux de 2001, mais aussi avec ceux d’autres évaluations nationales. 1) Le constat  Un score moyen qui cache des faiblesses Les élèves Français, au CM1, se situent, avec un score moyen de 522, au-dessus de la moyenne internationale fixée à 500, relativisant ainsi les propos parfois très négatifs concernant leurs acquis. Comme dans tous les pays les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons (+ 11 points). Mais les élèves français se situent en deçà de la moyenne de l’Union européenne ou de l’OCDE, nous sommes au 16e rang parmi les 20 pays de l’union européenne qui ont participé à PIRLS en 2006. Les élèves français témoignent donc de performances (en Français c'est-à-dire dans la langue maternelle) satisfaisantes au niveau international mais ils réussissent plutôt moins bien que les autres élèves de l’Union européenne. Cette faiblesse moyenne cache par ailleurs une répartition très hétérogène des performances des élèves. La répartition dans les différents groupes de performance est atypique chez les élèves français : ils sont surreprésentés dans le groupe le plus faible (36% contre 25% au niveau européen) et à l’inverse ils sont sous représentés dans le groupe de plus haut niveau (17% contre 25%). Notre école fabrique plus d’élèves faibles et moins d’élèves forts que les autres systèmes éducatifs européens, c’est sans aucun doute une piste de travail déterminante si l’on veut parvenir à une plus grande efficience globale de notre système éducatif.  Des résultats en baisse entre 2001 et 2006 L’évaluation de 2006 reprend 4 textes et leurs questions du protocole de 2001 (40% des items de 2006 sont communs aux deux évaluations) 28 pays ont participé aux deux évaluations : 13 d’entre eux voient leurs résultats significativement baisser. École supérieure de l'éducation nationale

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Pour la France on constate : une stabilité des performances dans les secteurs ZEP ; une baisse significative de 12 points dans les secteurs hors ZEP ; une hausse significative de 11 points dans le secteur privé. On peut rappeler que les résultats de 2001 témoignaient déjà d’une première baisse par rapport à une enquête initiée également par l’IEA (l’enquête "Reading literacy") de 1990-1991.  Des performances en lecture peu homogènes Là encore la moyenne masque une particularité française : le comportement de nos élèves de CM1 s’écarte du comportement des autres élèves testés dans 82% des items. Sur l’ensemble des 126 items testés les élèves français répondent moins bien à 60% d’entre eux et mieux à 25%. Nos élèves réussissent mieux sur les textes informatifs : lorsqu’il s’agit seulement de prélever de l’information (y compris dans un texte narratif) ; de répondre sous la forme d’un QCM. Ils échouent lorsqu’ils sont face à des textes narratifs : qu’ils doivent inférer la réponse ou encore interpréter ou apprécier ; qu’ils doivent rédiger la réponse, produire un texte de quelques lignes. Ces résultats confirment des données anciennes, émanant d’une étude comparative conduite par la DEP et ciblant le domaine de la compréhension de la langue à dix années d’intervalle (1987 1997). Elle concernait les élèves de CM2. Cette étude mettait en évidence une grande stabilité des résultats globaux (65, 6% et 66,1% de réussite). Mais surtout, si aux deux périodes considérées, environ 70% des questions relevant de la compréhension immédiate (prélever de l’information) sont réussies, à l’inverse, les questions mettant en jeu l’inférence, la construction d’informations et l’interprétation y étaient déjà échouées dans 50% des cas. 2) Des pistes d’analyse  Une certaine incapacité à transformer les ressources en résultats Si l’on relie l’évolution du niveau d’acquisition des élèves avec les ressources allouées à l’école, la situation de la France est peu favorable dans le contexte international. On peut en effet parler d’une faible efficience qualitative (relation entre les coûts et le niveau d’acquisition des élèves) et quantitative (relation entre les coûts et la durée moyenne de scolarisation). Pourtant les conditions d’enseignement se sont progressivement améliorées au cours des trente dernières années (meilleurs taux d’encadrement, augmentation des moyens, revalorisation des salaires,…).  Des effets de contexte Même s’ils sont quantitativement modérés, les effets de contexte, ce qui concerne l’ensemble des conditions de travail des élèves, sont importants.  Une organisation globale qui différencie trop ? Des recherches ont été faites sur l’influence de l’organisation globale du système éducatif et sur le rôle des facteurs sociaux et culturels. L’origine sociale des élèves, selon ces études, influence d’autant plus les résultats des élèves que l’hétérogénéité sociale diminue dans les écoles.

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Le lien entre l’organisation du système et les résultats des élèves est du même ordre : plus les systèmes scolaires maintiennent un niveau élevé d’hétérogénéité (peu de redoublements, tronc commun long, établissements peu différenciés) moins les inégalités sociales de réussite entre élèves sont importantes. Les pays dont les systèmes cultivent la différenciation ont donc des résultats plus faibles : moins d’élèves performants, plus d’élèves faibles. La France, malgré une apparence de globalité et d’intégration, recourt en fait assez massivement à la différenciation dès l’école élémentaire : différenciation sociale dont elle ne peut porter la responsabilité, mais aussi différenciation dans l’organisation du cursus scolaire avec un recours très important au redoublement, et cette différenciation est de sa responsabilité.  Les enseignants Regroupés dans une classe les élèves sont confrontés à un destin commun fortement déterminé par le traitement auquel ils seront exposés, c’est pourquoi l’attitude et les choix des enseignants sont déterminants. Les enseignants disent clairement qu’ils adaptent leurs pratiques aux élèves qu’ils accueillent. Cette adaptation apparaît clairement au niveau des attentes des maîtres concernant la réussite de leurs élèves : les maîtres des écoles favorisées estiment que 75% de leurs élèves obtiendront le bac contre 43% dans les écoles défavorisées. Les enseignants sont donc convaincus qu’ils font face à des élèves ayant un potentiel inégal selon les contextes d’enseignement. Ce positionnement a un effet immédiat sur leur attitude : l’échec de certains élèves apparaît comme indépendant de l’école. Ceci se traduit par un abandon de certaines ambitions et surtout une délégation du traitement de la difficulté scolaire, entraînant la moindre progression des élèves dans les établissements regroupant un grand nombre d’élèves issus de milieu perçu comme défavorisé.  Une pratique pédagogique ordinaire à interroger La surreprésentation des élèves faibles n’est pas nouvelle mais sa confirmation la transforme peu à peu en constante. Tout se passe comme si notre école ne parvenait pas à prendre en compte la variété des élèves qui la fréquente. Elle semble fonctionner sur un modèle déterminé, adapté aux élèves moyens, ne répondant pas aux possibilités des élèves brillants d’aller plus loin, et surtout installant toujours plus d’élèves dans la difficulté. À ce titre la baisse de onze points entre 2001 et 2006 des performances du public hors ZEP est significative. Cette quasi-impossibilité de l’école à prendre en compte la variété des élèves est évidente lors de l’observation des classes. Massivement les maîtres positionnent leurs exigences, organisent leurs séquences sans anticiper vraiment sur les possibilités des élèves de leur classe. Ils enseignent sur un schéma théorique, qui convient à une majorité d’enfants. L’échec de certains ne vient que très rarement remettre en cause leur pratique et leurs choix. Cet échec est constaté par les enseignants mais il est le plus souvent renvoyé à des causes externes sans s’interroger sur la responsabilité éventuelle de l’enseignement proposé. L’histoire personnelle de l’enfant, son origine sociale, l’environnement familial sont alors invoqués pour justifier l’échec scolaire. Les difficultés étant renvoyées en dehors du champ pédagogique, l’enseignant ne s’estime pas en capacité de les résoudre. Il renvoie leur traitement à une ou plusieurs prises en charge extérieures alors que le cœur du problème se situe dans la pratique ordinaire de la classe : on ne peut soutenir une pratique trop déficiente, qui ne permet pas aux élèves de construire et d’apprendre ce qui est attendu, qui les installe aussi dans une attitude négative par rapport aux apprentissages sans parler d’une image négative d’eux même peu propice à une remobilisation.

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Deux pistes de travail semblent à ce stade nécessaires : repositionner les enseignants face à cette question, renverser leur logique actuelle : les difficultés des élèves révèlent tout autant les faiblesses ou l’inadéquation de l’enseignement qui leur est proposé que les limites de leurs capacités dans le contexte social et familial qui est le leur. Les enseignants doivent dépasser la logique dans laquelle ils se sont trop souvent enfermés depuis près de trente ans : la difficulté scolaire n’est pas prioritairement un problème socioculturel, ils ont donc le pouvoir de remédier à cette situation ; donner aux enseignants des repères didactiques solides pour leur permettre une pratique plus efficiente et sortir de choix personnels plus liés à des habitudes de fonctionnement qu’à une véritable réflexion personnelle. De ce point de vue la proclamation permanente de la liberté pédagogique des enseignants ne peut se concevoir si l’on est dans un système qui met à l’écart un très grand nombre d’élèves. Le rappel que certaines démarches sont plus performantes que d’autres est tout aussi important.  Des dispositifs de soutien peu opérants Depuis 2001, les dispositifs de soutien aux élèves en difficultés ont été fortement relancés. Certains ont été nouvellement créés : CP aménagés, accompagnés, PPRE,… Force est de constater que les résultats restent à venir. La forte proportion des élèves faibles révélées à nouveau par les évaluations internationales dans notre pays, montre les limites de ces pratiques. Il n’a pas suffi d’avoir des maîtres en plus, d’être à deux dans les classes pour améliorer les performances des élèves. Le manque d’anticipation et de suivi de l’administration, le renouvellement permanent des préconisations n’ont sans doute pas permis une optimisation de ces dispositifs. Toutefois, ainsi qu’il l’a été dit dans plusieurs rapports successifs, c’est avant tout le manque de renouvellement des pratiques des enseignants, l’absence de cohérence de leurs actions et le manque de coordination qui font le plus défaut. Le plus souvent, les élèves se retrouvent dans les dispositifs de soutien face aux mêmes pratiques pédagogiques et donc aux mêmes difficultés que dans le groupe classe. Pistes de travail : limiter le soutien "délégué" à d’autres personnes que le maître de la classe ; repenser le mode de fonctionnement des équipes pédagogiques qui doivent se centrer sur une pratique plus collective, partageant plus efficacement objectifs, démarches et supports de travail, une prise en charge des élèves plus directe, plus maîtrisée dans le temps.  Une pédagogie de l’écrit qui interroge Les résultats de nos élèves témoignent bien évidemment des pratiques pédagogiques dans les classes : la place de la compréhension domine largement celle de la production qui reste le parent pauvre ; la simple recherche d’informations domine les autres activités autour de la compréhension ; la restitution est privilégiée au réinvestissement. Le recours depuis le CP à de nombreux supports imprimés (fichiers, photocopies…) limite très fortement le recours à la production directe de l’écrit par l’élève qui ne développe pas assez ses capacités ne serait-ce qu’au simple niveau de la réalisation graphique. Un renouvellement des pratiques dans l’apprentissage et l’entraînement à l’écriture est nécessaire si l’on veut que les élèves se sentent suffisamment à l’aise et puissent atteindre la maîtrise possible à la fin de l’école élémentaire. École supérieure de l'éducation nationale

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Reste posée la question plus importante de la production de l’écrit. Sans oublier tout ce qui habituellement dit sur la complexité du passage de l’oral à l’écrit dans notre langue et qui explique sans doute une partie des contre-performances, la question des formes de travail dans l’école française reste posée. L’équilibre entre la transmission des connaissances et la construction des compétences n’est toujours pas sortie d’un débat idéologique qui les oppose. La question de la place et de la forme de l’entraînement apparaît tout autant. Les items de PIRLS, mais aussi ceux de PISA, mettent les enfants en position de démontrer leurs compétences à mobiliser leur maîtrise de la langue pour comprendre, apprécier une situation complexe et donner leur réponse par écrit. Très clairement les résultats des élèves français témoignent que notre système d’enseignement ne leur permet pas de développer suffisamment cette compétence. Ils savent restituer des connaissances, trouver des informations directement accessibles, produire des écrits courts, ils ne savent pas assez mobiliser ces ressources pour maîtriser une situation plus complexe. C’est sans doute lié aux choix opérés dans les classes mais aussi dans les programmes : envisage-t-on la même compétence dans notre école et dans PIRLS lorsque l’on parle d’interpréter, d’apprécier ? Par ailleurs nos élèves sont régulièrement confrontés à des textes ambitieux et difficiles pour lesquels la simple recherche du sens mobilise toute leur énergie. Souvent, la complexité du support ne permet que la mobilisation de compétences parcellaires : déchiffrer, rechercher l’information, accéder au sens. Elle ne permet pas suffisamment le travail d’interprétation, de réflexion. Nous sommes là face à la question de la cohérence entre l’entrée dans l’apprentissage et son évaluation. Les élèves français sont confrontés à une évaluation de compétences globales alors qu’ils sont entraînés avant tout, et parfois insuffisamment, à la maîtrise de capacités parcellaires. Sommes-nous prêts poser cette question au moment où nous envisageons la réécriture des programmes ?

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Document 12 - L'évaluation des écoles primaires Martine Safra, IGEN, Groupe de l’enseignement primaire Mai 2010 La direction de l'encadrement évoque, dans la circulaire du 19 mai 2009 concernant les missions des inspecteurs, "l'évaluation d'équipes disciplinaires ou pédagogiques, l'évaluation de niveaux ou de cycles, l'évaluation systémique d'unités éducatives, […] formes d'interventions qui viennent désormais placer l'inspection individuelle dans une perspective de véritable pilotage pédagogique". Elle avait antérieurement évoqué, dans un protocole avec un syndicat d'inspecteurs, "l'évaluation des équipes d'école". Dans le texte précédent (note de juin 2005), la direction signalait ce type d'évaluation comme un complément de l'inspection individuelle : "Au-delà de l’acte d’inspection individuelle, les inspecteurs doivent, sous l’impulsion du recteur, procéder à l’évaluation des enseignements et des établissements". Le changement de 2009 est net : on vise à fonder le pilotage pédagogique sur l'évaluation des équipes et des unités éducatives, l'inspection individuelle est inscrite dans cette perspective. Pour autant la situation de l'école primaire est différente de celle des EPLE, différente aussi de celle de la plupart des pays européens, et elle appelle une réflexion spécifique. 1. La situation singulière des écoles primaires françaises Si, en France comme ailleurs, une attention croissante est portée à la recherche d'efficacité de l'école, la situation française dans le premier degré est singulière. Les voies qui sont privilégiées en Europe (développement de l'autonomie, responsabilisation des acteurs et évaluation connue des usagers) sont très étrangères au fonctionnement habituel des écoles primaires :  l’école primaire n'a pas statut d'établissement, l'autonomie qui lui est reconnue est marginale ; pour autant, un "effet école" est souvent perceptible ; il y a de fait des politiques d'écoles, même si sur l'essentiel elles demeurent souvent implicites ;  le réseau des écoles est extrêmement dispersé : 39 % des 49 498 écoles publiques ont trois classes et moins, 65 % cinq classes et moins75 ;  la culture du 1er degré est rétive à l’idée de direction d’établissement ; néanmoins, une évolution se fait jour sur le terrain, certains directeurs d'école inscrivent leurs fonctions dans une perspective plus large et souhaitent assumer de pleines responsabilités de direction ;  les données de résultats sont peu nombreuses : les seules données disponibles au travers des évaluations nationales concernent le français et les mathématiques, et ce, à certains niveaux de la scolarité seulement. Les changements fréquents de protocole d'évaluation, voire de niveaux concernés par l'évaluation, entraînent une absence des séries nécessaires à une analyse des résultats dans la durée ;  la tradition de l’inspection individuelle est forte, bien que peu efficiente, la note pédagogique étant bridée par les barèmes départementaux fondés sur l'ancienneté ;  jusqu’à présent une absence d’engagement de l'État comme des autorités académiques sur cette question ; la note de service de juin 2009 permet d'escompter une évolution ;  la double responsabilité de l’inspecteur de circonscription, responsable administratif et évaluateur. Peut-on évaluer une école lorsqu’on a une large responsabilité dans son fonctionnement ? Le terrain n'est pas vierge pour autant. Des expériences se font jour, sans que l'on en ait un recensement précis, mais la plupart des académies paraissent désormais s'engager dans cette voie. Des inspecteurs ont réalisé tantôt des inspections de cycle ou d'écoles (proches des inspections croisées des EPLE), tantôt se sont engagés dans des évaluations de cycle ou d'école. Dans un cas 75

Données RERS 2009 portant sur l'année scolaire 2008-2009. École supérieure de l'éducation nationale

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connu, il s'agit d'une politique académique conduite dans les écoles et EPLE. Dans la plupart des cas, l'évaluation est conduite par un ou des évaluateurs externes à l'école, mais le conseil des maîtres y est associé. Dans des cas récents, l'évaluation s'appuie sur l'analyse orale de l'équipe, exprimée en conseil des maîtres en amont de l'évaluation externe, parfois sur une synthèse écrite des enseignants. 2. Comment concevoir une évaluation d'école primaire ? L’objectif est de concevoir une évaluation d’école qui puisse avoir un impact sur les équipes. Ainsi envisagée, l'évaluation d'école prend en compte les pratiques individuelles, mais elle doit aller au-delà. En prenant appui sur des expériences conduites dans d'autres pays, on peut proposer des démarches et des procédures, en cherchant à faire de l'évaluation un levier pour l'amélioration des compétences des élèves et un élément d'appui au pilotage de circonscription. Il s'agirait, pour déterminer sinon un protocole national, sans doute inutile et inadapté, de définir des principes qui doivent guider toute évaluation d'école. Pour cela, il apparaît nécessaire de concevoir un travail expérimental, avec des IEN volontaires, dans des écoles volontaires, prenant appui sur un protocole type à expérimenter. Quelques pistes possibles :  2.1.) Associer les équipes d’écoles Leur faire connaître les finalités de l’opération, les inciter à un bilan interne préalable. Cela aussi implique de définir les questions que les équipes peuvent se poser, les indicateurs à retenir et d’expliquer que les affirmations doivent être étayées. Points d'observation qui peuvent être suggérés aux écoles : a)

une réflexion sur les résultats :

nos élèves apprennent-ils bien et réussissent-ils ? est-ce équivalent dans tous les domaines ? quels résultats avons-nous atteints à la fin de chaque cycle ? dans quelle mesure préparons-nous nos élèves à atteindre les objectifs des piliers 6 et 7 du socle commun ? On peut relever ici l'exemple des finalités éducatives du système écossais : former des élèves qui réussissent ("successful learners"), des individus qui ont confiance en eux ("confident individuals"), des citoyens responsables ("responsible citizens"), des personnes engagées ("effective contributors") ; b)

une réflexion sur les moyens, visant à amener l'école à se centrer sur ses responsabilités propres :

nous sommes-nous fixé des objectifs adéquats ? avons-nous organisé, articulé les moyens dont nous disposons (locaux, matériels, personnels, horaires, formation…) avec pertinence ? comment avons-nous choisi les outils des élèves ? sur quels principes se fondent les choix de répartition des élèves dans les classes, des classes entre les enseignants ? globalement, avons-nous mis en place ce qui était attendu et tiré au mieux parti de ce qui était possible ? à cet égard, les concertations à l’intérieur de l’école sont-elles fécondes ? c)

une réflexion sur les besoins des élèves et le travail avec les partenaires de l'école

comment répondons-nous aux besoins de notre communauté scolaire (analyse spécifique des besoins des élèves, qu’ils aient des problèmes d’apprentissage ou au contraire qu'ils soient très à l'aise) ? comment notre action s'articule-t-elle avec celle des autres acteurs intervenant auprès des élèves, singulièrement le RASED ? École supérieure de l'éducation nationale

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d)

une approche du fonctionnement d'équipe et du pilotage de l'école

Par exemple, en demandant aux équipes si elles estiment qu'elles construisent une offre éducative cohérente, dans le cadre du projet d'école. C'est-à-dire que l'on chercherait ainsi à voir quel fonctionnement d'équipe est installé.  2.2.) Hypothèses d'intervention des évaluateurs externes a)

préparer l’évaluation de l’école

étudier des documents relatifs à l’école et à son évolution : projet d’école, résultats de l’école, dispersion de ces résultats, suivi du devenir des élèves (en élémentaire pour les écoles maternelles, au collège pour les écoles élémentaires), fluidité des parcours scolaire, recours aux ressources spécialisées ; contextualiser l’analyse par comparaison avec des écoles similaires par leur implantation, le contexte socio culturel etc.76 ; étudier l’analyse que l’école fait de ces documents ; en réunion, travailler avec les équipes d’écoles à préciser les questions que pose le diagnostic de l’équipe, l’analyse des résultats, etc., pour tenter de formuler quelques hypothèses pour expliquer ces résultats ; en déduire un questionnement, des points d’observation qui orienteront (mais pas exclusivement) les visites dans les classes. b)

à l'école

observations de la vie de l'école (accueil, mouvements d'élèves ; cohérence du règlement de l'école et des classes, de la mise en œuvre dans les classes) ; observations des pratiques pédagogiques : observation de classes, avec des entretiens visant à mettre en évidence les effets de la pratique du maître sur le travail des élèves et à proposer le cas échéant des hypothèses d’amélioration ou à recueillir de "bonnes pratiques" ; le regard peut être centré sur un domaine, choisi par exemple en fonction des résultats ou du projet d'école. L'inspecteur peut ainsi observer un moment de lecture dans chacune des classes, ou de sciences, etc. ; observation des outils des élèves, ceux qui les suivent de classe en classe, les manuels choisis, etc. ; ruptures et continuités ; observation de l'implication des élèves, de leur mise en confiance ; quel regard est-il porté sur l'erreur ? de quelle façon l'initiative, l'autonomie sont-elles favorisées ? c)

à l'école et autour de l'école

conduite d'entretiens avec des élèves, des parents d’élèves ; les questions, là aussi, doivent être définies (il s'agit, par exemple, de savoir si les élèves se sentent bien à l'école, en sécurité, s'ils sont écoutés, s'ils ont l'impression que leurs besoins particuliers sont pris en compte, qu'ils font des progrès, etc.) ; entretiens avec les personnels intervenant régulièrement dans l'école (ATSEM par exemple) ; entretiens avec le ou les responsables concernés (élu, directeur des affaires scolaires, etc.) dans la ou les communes concernées. d)

le rapport

Élaboration rapide d’un pré-rapport, retour aux équipes avec discussion sur les conclusions ; Rapport final et retour à la communauté éducative. Il doit s'agir d'un rapport bref, qualitatif, ne se prêtant pas à la hiérarchisation des écoles, mais faisant 76

Cela suppose une aide des services statistiques académiques en amont. École supérieure de l'éducation nationale

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apparaître les caractéristiques de l'école, ses points forts comme ses points faibles. Pour être efficaces, les voies d'amélioration (peu nombreuses) doivent être arrêtées avec les enseignants. Le conseil des maîtres est destinataire du rapport. Les conclusions en sont présentées par oral au conseil d'école ; cette restitution, qui peut constituer un moment sensible de la procédure d’ensemble, devra faire l’objet d’une attention particulière dans le cadre du travail expérimental préconisé ici. L'inspecteur d'académie doit également être destinataire du rapport. L'exemple écossais est là aussi intéressant : le rapport qui résulte d’une évaluation d’école est court (quelques pages), rédigé. On se focalise sur les sujets suivants : l'école (dans son environnement) ; les points forts de l'école ; des exemples de bonnes pratiques ; quel degré de réussite des élèves dans leur apprentissage et leurs résultats (how well do children learn and achieve ?) quel degré de réussite de l'équipe avec ses partenaires pour favoriser l'apprentissage des enfants ? (how well do staff work with others to support children's learning ?) est-ce que l'équipe et les élèves s'impliquent dans l'amélioration de la communauté scolaire ? est-ce que l'école a des attentes élevées à l'égard de tous les enfants ? une question sur l'équipe, son implication dans l'autoévaluation ; et maintenant ? En fait, très brève conclusion où les inspecteurs précisent s'ils estiment que l'école doit être accompagnée ou peut progresser toute seule ; enfin, quelques voies d'évolution fixées en accord avec l'équipe. L’ensemble de l’opération doit être limitée dans le temps (un mois ?). Il est nécessaire que les rapports ne soient pas trop longs mais qu'ils soient rapidement rendus. Les évaluateurs externes pourraient être une équipe de deux inspecteurs (par exemple l'IEN de la circonscription et un autre) et des conseillers pédagogiques. NB. De telles hypothèses sont plutôt conçues pour des écoles comptant au moins cinq à six maîtres. Les petites structures, qui constituent plus de la moitié des écoles, ou les RPI demandent une adaptation et une mise en œuvre spécifique. En conclusion, la traduction de la circulaire du 19 mai 2009 dans les pratiques des inspecteurs suppose l'articulation de l'évaluation individuelle et de l'évaluation des écoles, avec une part croissante donnée à cette dernière. L'implication des personnels dans la démarche d'évaluation constitue un point essentiel. Engager une démarche d'évaluation d'école passe par la définition, au niveau national, de principes devant guider les académies, par un appui sur les évaluations déjà conduites sur le terrain, par la définition, associant des inspecteurs, de protocoles précis dans les académies et départements. Il est École supérieure de l'éducation nationale

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nécessaire d'engager ce type d'évaluation sur la base du volontariat ; elles ne peuvent être efficaces que si les équipes y participent pleinement. On pourrait par exemple engager tous les départements dans des expériences d'évaluation d'écoles centrée en priorité sur l'analyse des facteurs de réussite des écoles les plus performantes. C'est en montrant aux équipes d'enseignants le parti qu'elles peuvent tirer d'une évaluation d'école que l'on peut introduire cette démarche sans s'engager dans une "guerre de religion" qui aurait pour effet de faire reculer de dix ans, au moins, la mise en œuvre de ce mode de pilotage du système.

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Document 13 - Résumé et propositions du rapport IGEN-IGAENR sur "l’évaluation des collèges et des lycées en France : bilan critique et perspectives en 2004" 77 Première partie : l’évaluation de l’EPLE, avec quels enjeux ? Alors que dans la plupart des pays européens le développement de l’autonomie des établissements scolaires s’est accompagné de la mise en place de procédures d’évaluation ou d’auto-évaluation, tant pour répondre aux attentes de l’institution qu’à celle des usagers, il est symptomatique qu’en France le sujet n’ait pas été considéré comme une priorité politique. Après avoir noté cette réticence apparemment plus forte en France de l’École par rapport à l’évaluation, le rapport rappelle qu’il s’agit pourtant d’une obligation légale que la mise en place de la LOLF va rendre encore plus nécessaire et qu’en tout état de cause le développement de l’autonomie des établissements ne saurait être réel, sans la contrepartie de formes nouvelles de régulation se substituant à la simple conformation à une norme unique. Plusieurs rapports, dont un émanant du Haut Conseil de l’évaluation de l’école, ont d’ailleurs regretté la faiblesse de l’évaluation des collèges et des lycées français et, de fait, plusieurs académies ont tenté de pallier cette carence par la mise en place de procédures d’évaluation des établissements. Laisser les choses en l’état et se désintéresser d’un sujet en apparence difficile ne manquerait pas d’avoir deux conséquences : 1. priver les établissements de la maîtrise de leur destinée et de la capacité à exercer pleinement leur autonomie, au moment même où la difficulté des problèmes qu’ils ont à résoudre est accrue ; 2. laisser les écarts se creuser encore entre les différents établissements, dans l’indifférence apparente de l’institution. Tout en jugeant le développement de l’évaluation des établissements indispensable à l’amélioration du terrain éducatif et des résultats de l’école, les auteurs du rapport ne méconnaissent pas les difficultés de l’exercice et tentent de répondre aux arguments qui tendraient à dissuader de s’engager dans une telle démarche : si les caractéristiques initiales des élèves et la qualité des enseignants expliquent, pour une grande part, le degré de la réussite scolaire, plusieurs recherches ont montré que dans certaines situations – très bons ou très mauvais établissements, difficultés des élèves – l’établissement peut faire la différence ; si l’interventionnisme croissant en matière pédagogique des administrations centrale et académique a pu faire douter de l’autonomie, des établissements, l’évaluation des collèges et lycées, loin d’être rendue inutile, est devenue d’autant plus nécessaire qu’il faut mesurer l’effet en contexte des orientations nationales ou académiques ; enfin, l’évaluation doit permettre de déterminer dans quelle mesure l’établissement s’est saisi des marges d’autonomie dont il dispose, notamment dans le domaine pédagogique, où l’autonomie des maîtres, distincte de celle qui a été récemment consentie, est ancienne et forte. Les auteurs du rapport prennent aussi au sérieux les arguments par lesquels l’école tente d’échapper à l’évaluation : l’impression que l’école fait de l’évaluation sans le savoir, puisqu’elle évalue sans cesse ses élèves : l’argument ne provient que d’un effet de miroitement autour du mot "évaluation", puisque l’activité d’évaluation des élèves fait précisément partie de ce qui doit être évalué dans un ensemble pédagogique ; 77

Rapport IGEN-IGAENR n° 2004-118, juillet 2004 (accessible en ligne sur le site du Ministère), coordination : Jean Etienne, IGEN, et Roger-François Gauthier, IGAENR. École supérieure de l'éducation nationale

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les résultats d’un établissement, les notes de ses élèves, seraient des données "indigènes" auxquelles il ne conviendrait pas de donner une signification à l’extérieur de l’établissement : ne convient-il pas pourtant de lire les résultats scolaires à une aune différente de celle de l’école qui les produit ? des exemples étrangers, notamment américains, ont pu à juste titre conduire à se méfier des aspects "appauvrissants" sur l’enseignement de certaines modalités d’évaluation par tests dont il faudrait dire clairement que ce n’est pas ce qui est visé ; il en va de même pour la crainte de la marchandisation et de la privatisation souvent invoquée : tout montre, au contraire, que le service public sera au contraire renforcé s’il se dote de modes de régulation de qualité. Il convient aussi de ne pas méconnaître certains obstacles que, volens nolens, l’institution met ellemême au développement de l’évaluation des établissements : en ne veillant pas au respect des obligations d’auto-évaluation qui figurent dans les textes et à la qualité de leurs productions ; en mettant centralement l’accent sur la question du projet d’établissement, conçu trop souvent en faisant l’économie d’une évaluation véritable ; en maintenant un régime d’inspections individuelles qui, confiées souvent aux mêmes agents que l’évaluation d’établissements, mélange tout et dément l’importance par ailleurs proclamée de l’établissement ; en ne donnant pas le même régime aux écoles du primaire, ce qui ne favorise pas la promotion d’une conception unifiée de l’évaluation dans le système ; en fournissant aux établissements des indicateurs nombreux mais qui ne sont pas toujours les plus pertinents, avec en particulier une insistance exagérée sur l’impact des catégories socioprofessionnelles au détriment de l’étude du niveau des acquisitions des élèves. Les auteurs du rapport considèrent en conséquence qu’une relance de l’évaluation des établissements constitue un enjeu important, mais qu’il convient de prendre un certain nombre de précautions "clés" : appréhender l’établissement dans sa globalité, et non comme une simple juxtaposition de fonctions à évaluer séparément ; clarifier la démarche d’évaluation et la rendre crédible et utile, notamment aux usagers, en répondant à des questions simples : l’évaluation pour quoi faire ? avec quels destinataires ? quelle périodicité ? quels protocoles ? quels acteurs ? privilégier les résultats des élèves, avec une conception élargie de ces résultats, qui visent non seulement les "acquisitions scolaires" ponctuelles, mais aussi le devenir des élèves à l’issue de leur départ de l’établissement, ainsi que des aspects plus difficiles à saisir, bien qu’importants, comme les apprentissages sociaux et la constitution progressive d’une culture. Deuxième partie : le paysage de l’évaluation des établissements aujourd’hui est marqué par son caractère disparate Le rapport procède à un état des lieux des évaluations d’établissements selon trois focales : 1. Une focale européenne Il est observé que dans plusieurs pays l’évaluation des établissements a été jugée matière si importante qu’on en a chargé une instance indépendante du ministère de l’éducation nationale. À la différence de la situation française, il est fréquent que les évaluations soient obligatoires, avec une périodicité imposée, que les protocoles d’évaluation soient définis publiquement et s’imposent à ceux qui les mettent en œuvre et que les évaluations débouchent sur un suivi obligatoire. La publicité des rapports est également une différence significative, ainsi que l’insistance des autorités sur l’auto-évaluation, en limitant en ce cas l’évaluation externe à un contrôle qualité des auto-évaluations.

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2. Une focale nationale Si, à l’origine, l’inspection générale était bien chargée d’un regard global sur les établissements du second degré, on a assisté par la suite à une différenciation entre des activités d’inspection "administrative" des établissements, qui se sont poursuivies, et d’inspection "pédagogique", qui ont délaissé l’approche d’établissement pour se centrer sur le contrôle individuel des maîtres. L’IGAENR effectue, ainsi que l’IGEN "établissements et vie scolaire", des visites systématiques d’établissements : elle a élargi son regard au fonctionnement systémique de l’établissement et élaboré des protocoles de qualité, mais : les protocoles ne sont ni publics ni toujours respectés ; les critères de choix des établissements évalués ne sont pas définis ; la distinction entre le commanditaire (le ministre) et le destinataire (le chef d’établissement et les autorités déconcentrées) est source de difficultés ; il n’existe pas de procédure de suivi ; les évaluations d’établissements sont peu visibles dans le système et généralement méconnues des usagers ; le nombre même des établissements ne permet pas à ces visites d’établissements d’avoir une périodicité crédible ; de par ses compétences, l’IGAENR ne s’intéresse pas centralement aux acquisitions des élèves, ainsi qu’à l’utilisation fine des moyens pédagogiques, parmi lesquels figurent les talents des maîtres. 3. Une focale académique Le rapport aborde aussi la question des évaluations d’établissements scolaires mises en place dès la décennie 1990 dans plusieurs académies, sous des dénominations diverses. Si le cas de l’académie de Lille se signale par le caractère systématique des évaluations qui y ont eu lieu dès 1991, d’autres démarches académiques souvent inspirées par l’expérience lilloise, mais portant sur un nombre d’établissements plus restreint, émergent depuis quelques années et tentent d’apporter un essai de réponse au besoin de disposer d’un dispositif éprouvé d’évaluation d’établissements. Ces tentatives rencontrent cependant des limites évidentes : les objectifs sont souvent ambigus : les évaluations n’osent pas s’afficher pour ce qu’elles sont et les critères du choix des établissements sont flous ; le déroulement des visites a souvent connu des flottements avec une prédominance d’une logique de contrôle et des inspections individuelles souvent déconnectées de l’ensemble ; la restitution et le suivi obéissent à des procédures et à des logiques fort disparates. Au total, l’impact de ces évaluations reste limité en dehors des personnels d’encadrement : les contenus des rapports intègrent peu la dimension pédagogique : l’analyse des résultats, des processus d’orientation, des modes d’évaluation, des effets de la formation, ne dépassent qu’exceptionnellement le stade du constat pour rechercher des explications. L’objectivation des pratiques enseignantes est faible et les préconisations souvent conventionnelles ; les perceptions des évaluations sont contrastées entre évaluateurs et évalués : pour les premiers ces évaluations ont permis la mise en place d’indicateurs appréciés et le développement d’une culture commune aux chefs d’établissements et inspecteurs territoriaux. Pour les évalués, l’impact est très limité : seule une clarification des objectifs de l’évaluation ainsi qu’un effort significatif de formation des personnels d’inspection et de direction sembleraient susceptibles d’améliorer cet impact. École supérieure de l'éducation nationale

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Troisième partie : l’évaluation des EPLE demain : perspectives méthodologiques et stratégiques Le rapport fait des propositions dans trois directions : 1. "Revisiter l’évaluation de l’EPLE" L’évaluation de l’action publique dans l’éducation nationale demande, plus encore qu’en d’autres domaines, que sa crédibilité soit assise sur des règles déontologiques strictes et adaptées à la mission d’éducation. C’est ainsi que le rapport insiste sur la nécessité : de recourir pour l’établissement scolaire à une démarche spécifique d’évaluation : comme toute évaluation d’action publique l’évaluation d’établissement scolaire emprunte à la fois aux activités de contrôle ou d’audit, tout en étant multiforme, et aux activités de recherche scientifique, tout en se préoccupant davantage de son utilité sociale ; mais elle tient compte aussi du fait que l’activité éducative est une co-production entre prestataires de service (personnels de direction, d’éducation et enseignants) et usagers (les élèves) : elle se distingue d’autant plus clairement du contrôle des personnes qu’elle développe une attitude d’écoute compréhensive et associe les évalués à la méthode et aux constats de l’évaluation. de rechercher la complémentarité entre évaluations interne (dont la finalité est que les acteurs "se rendent compte" des effets de leur action) et externe (dont la finalité est de rendre compte à une hiérarchie ou à des usagers) : si l’auto-évaluation a l’avantage de mieux impliquer les acteurs de l’établissement, ses limites (difficulté des acteurs à se distancier de leur action et de l’établissement à se situer dans un ensemble plus large) conduisent plutôt à rechercher une complémentarité entre les deux formes d’évaluation : l’auto-évaluation peut servir de point de départ à l’évaluation externe, ou être son aboutissement ; l’évaluation externe peut favoriser l’amélioration de la qualité de l’auto-évaluation par les effets d’apprentissage qu’elle produit ; les indicateurs externes peuvent se combiner avec des indicateurs conçus en interne plus adaptés à des problématiques spécifiques. de construire une problématique adéquate de l’évaluation : en préférant la recherche de quelques grandes problématiques à celle de l’exhaustivité ; en privilégiant, dans tous les cas, l’approche par les résultats articulée à une évaluation par des processus et des pratiques professionnelles – pédagogiques et organisationnelles – qui ont contribué à les faire advenir dans un contexte donné ; o en ayant recours à des protocoles uniformes mais aussi à des approches adaptées à la spécificité de chaque établissement ; o en faisant la part du recours aux référentiels national et académique externes et au référentiel interne que constitue le projet d’établissement ; o en approchant les résultats des élèves non de manière absolue (absence de référentiels de compétences d’élèves par niveau en France), mais de façon relative, par comparaison dans l’espace et dans le temps ; o en s’entendant, pour chaque objectif dont on veut mesurer l’atteinte, sur des critères et des indicateurs (chiffrés quand ils existent), tout en les considérant avec précautions et en les croisant. o o

2. "Améliorer l’évaluation dans le cadre de l’existant" Le rapport conclut que dans le court terme il faudrait : assurer une meilleure transparence à l’évaluation externe et associer davantage l’établissement à chacune de ses phases L’analyse du dossier initial devrait servir à l’élaboration d’un pré-diagnostic, communiqué pour avis au chef d’établissement. L’association des inspecteurs des différentes disciplines, travaillant sur des grilles École supérieure de l'éducation nationale

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d’évaluation harmonisées, devrait être plus forte, de manière à permettre d’articuler les observations de classes à la problématique d’évaluation ; recentrer l’objet de l’évaluation sur la construction des performances au sein de l’EPLE Il s’agit d’abord de l’évaluation des performances de l’EPLE lui-même envisagées sous l’angle de l’efficacité (capacité de l’école à faire progresser les élèves dans les acquisitions scolaires et la maîtrise de compétences sociales), de l’équité (capacité à réduire les inégalités de réussite entre les élèves) et de l’efficience (capacité de l’établissement à utiliser de manière optimale ses ressources). Il s’agit ensuite de déterminer la contribution propre de l’établissement à la production des résultats : recherche de sa valeur ajoutée, au-delà des seules catégories socioprofessionnelles ; recherche de l’effet des différentes composantes emboîtées – de la classe à la direction – qui constituent l’établissement. Il s’agit enfin de mesurer la capacité de l’établissement à maîtriser son environnement : l’établissement a-t-il un comportement d’inertie, ou un comportement réactif ou proactif par rapport à son environnement ? quel est son rôle au sein du bassin, dans ses relations verticale et latérale avec les autres EPLE, et avec l’ensemble de ses partenaires (collectivités, institutions et services, entreprises, associations) ? mieux utiliser les indicateurs d’évaluation disponibles Les indicateurs statistiques disponibles sont nombreux mais mal utilisés, à commencer par les IPES produits par la DEP. Ils doivent être enrichis, au moins pour les lycées, par la recension, depuis peu disponible, des notes obtenues au baccalauréat. Il convient, par ailleurs, d’utiliser ces indicateurs avec méthode, en distinguant le diachronique du synchronique, en comparant les indicateurs avec ceux des établissements voisins, en se gardant de prendre une relation de corrélation pour une relation causale unilatérale. 3. "Repenser à terme l’évaluation des EPLE" Le rapport propose à terme de : revoir l’articulation entre les différents niveaux d’évaluation pour constituer une "chaîne" : o

le cadre académique doit être privilégié dans la logique de la déconcentration et pour répondre au problème soulevé par le nombre des établissements (11000, avec l’enseignement privé sous contrat). La généralisation des démarches d’évaluation initiées dans certaines académies, fait encourir un risque de surcharge des tâches des inspections territoriales ; on lui préférera, dans la logique des expérimentations initiées par la commission européenne, la mise en œuvre d’"auto-évaluations accompagnées", les corps territoriaux d’inspection étant alors chargés de la formation des chefs d’établissements et de la sensibilisation des enseignants aux démarches d’évaluation, ainsi que du contrôle de la qualité des auto-évaluations ;

o

l’organisation des rectorats et la fonction des inspections générales dans l’évaluation des établissements devraient être redéfinies en conséquence. Une direction de l’évaluation devrait être créée dans chaque rectorat et confiée à un responsable de haut niveau dans des conditions où elle serait indépendante des directions opérationnelles. Quant aux inspections générales, même si elles continuent à visiter les établissements dans un cadre ciblé à la demande du ministre, elles auraient à la fois à veiller à la cohérence du système d’informations statistiques, à aider à la construction d’outils d’auto-évaluation de qualité, et à contrôler la qualité de la mise en œuvre académique de l’évaluation des établissements.

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réformer notre système d’informations statistiques : Il s’agirait de rendre plus homogènes les données disponibles, en : comblant certaines lacunes du système d’information : ce qui est en cause est l’hétérogénéité entre les données disponibles pour les collèges (très peu de renseignements sur les résultats de l’examen terminal, mais d’assez bonnes données sur les poursuites d’études après le collège) et les lycées (où c’est un peu l’inverse), ainsi que la faiblesse des indicateurs de vie scolaire ; o améliorant la fiabilité des données : certaines enquêtes ont des taux de réponses insuffisants et les procédures d’identification des catégories socioprofessionnelles dans les établissements sont entachées de trop d’incertitudes ; o assurant un meilleur chaînage des indicateurs produits aux différents niveaux du système, notamment académique et national ; o redéfinissant la notion de valeur ajoutée et en revoyant son mode de calcul conformément aux standards internationaux, par comparaison des niveaux de compétence en début et en fin de cycle par des épreuves standardisées ; o réservant la production et l’exploitation de données individuelles aux niveaux académique et infra-académique : pour profiter notamment des fonctions d’études des notes mises à la disposition des établissements avec les logiciels de saisie de notes dans les bulletins. o

élargir et confronter divers modes d’investigation par : o

l’introduction d’enquêtes par questionnaires, afin de mieux saisir les perceptions des acteurs ;

la réévaluation du rôle et du statut des documents écrits dans l’évaluation en ne leur accordant une valeur probante que dans la mesure où ils sont corroborés par les autres formes d’investigations ; o un recentrage des grilles d’observation sur les activités des élèves et les processus d’apprentissage : une homogénéisation raisonnée des grilles d’évaluation des pratiques enseignantes entre disciplines est à rechercher, en particulier dans le cadre d’une autoévaluation entre pairs, de même que leur ouverture aux aspects interdisciplinaires ; les observations de classes pourraient être suivies d’entretiens avec des élèves pour mieux approcher ce qui s’est passé ; o une meilleure articulation entre les types d’entretien et la nature des informations qu’ils peuvent apporter, en distinguant clairement les apports factuels des simples représentations d’acteurs. o

Bien conduite, l’évaluation de l’EPLE constitue l’un des vecteurs susceptibles d’améliorer grandement la qualité du service public d’éducation en France en favorisant chez les acteurs une connaissance réflexive de leurs pratiques.

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Document 14 - Comment amener le changement dans les méthodes et procédures d’évaluation des établissements scolaires ? Atelier 4 du séminaire conjoint SICI78 –Inspections générales françaises 20-21 novembre 2008 Comment amener le changement dans les méthodes et procédures d’évaluation des établissements scolaires ? Tel était le thème proposé aux participants de l’atelier 4 du séminaire. En d’autres termes, quelles sont les conditions à prendre en compte si l’on veut avancer, progresser dans le sens de l’évaluation des établissements scolaires ? La discussion, au sein de l’atelier, a été introduite par les exposés très riches de trois collègues : Meilyr Rowlands, pour le Pays-de-Galles, Ceri Morgan, pour l’Angleterre, et Kay Bruegmann pour la Rhénanie du Nord-Westphalie. À partir de leurs présentations et des éléments de la discussion, on peut faire ressortir, en synthèse, six conditions principales : 1) la nécessité d’une attitude constructive Première attitude professionnelle requise des acteurs de l’évaluation, une attitude qui soit constructive ; l’exposé relatif à l’Angleterre a particulièrement insisté sur ce point parce qu’il s’agit là d’une condition nécessaire si l’on veut surmonter les craintes et/ou réticences que peuvent éprouver, inévitablement, les personnels exerçant dans tel ou tel établissement faisant l’objet d’une évaluation. Il est essentiel que ces personnels, tout spécialement les enseignants, se convainquent que la démarche d’évaluation vise à améliorer la "performance" de l’établissement, et donc les conditions de réussite des élèves, et que, dans cette perspective, les évaluateurs se situent bien dans une attitude de conseil et non pas de "jugement". 2) une compétence professionnelle des évaluateurs vraiment reconnue Deuxième condition requise, que la compétence des évaluateurs soit indiscutable et pleinement reconnue. Seul le professionnalisme peut en effet rendre crédible la démarche. À cet égard, Kay Bruegmann a présenté les initiatives prises par le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie visant à renforcer les compétences des évaluateurs intervenant dans les établissements scolaires de cette région afin que ceux-ci puissent mettre au premier plan de leur travail l’évaluation effective de la qualité du service d’enseignement assuré par l’établissement. 3) définir des cibles prioritaires Troisième condition, la définition de cibles prioritaires si l’on veut éviter de se disperser ; rapporté au nombre élevé d’établissements scolaires, dans tous les pays, le "potentiel" d’évaluateurs mobilisables apparaît en effet inévitablement limité et il importe par conséquent d’optimiser l’emploi des ressources disponibles. Trois axes principaux émergent à cet égard :  le champ des observations : il est primordial, bien évidemment, de pouvoir apprécier la qualité des apprentissages des élèves en référence à des standards pertinents, mais aussi des éléments importants tels que le climat de l’établissement et le bien-être des élèves ;  deuxième cible, la capacité de l’établissement à évaluer lui-même sa performance : l’autoévaluation constitue-t-elle pour lui, et notamment pour l’équipe de direction, une préoccupation pleinement intégrée dans ses modes de pilotage ? Dans l’affirmative, quels sont les outils que l’établissement utilise à cet effet ? Que peut-on en penser ?

78

SICI : The Standing International Conference of Inspectorates, ou la Conférence internationale permanente des inspections générales et centrales, association dont les inspections générales françaises sont membre co-fondateur. La France est représentée, dans le cadre de cette conférence permanente, par Roger-François Gauthier, IGAENR, consultant à l’UNESCO. École supérieure de l'éducation nationale

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 troisième cible à définir, les établissements à visiter en priorité. Dans le cas du Pays-de-Galles, la réponse apportée sur ce point consiste, comme en Ecosse ou dans d’autres pays, à privilégier les établissements dont les résultats apparaissent comme les moins bons sur des échelles comparées, et donc comme les plus préoccupants pour l’institution, sans tomber néanmoins dans le travers de les stigmatiser. Ceci étant, plusieurs intervenants ont insisté sur la nécessité de visiter aussi des établissements plus performants afin de voir quelles sont les "bonnes pratiques" qui peuvent expliquer la qualité, voire l’excellence de leurs résultats. 4) "préparer le terrain" autant que possible Autre condition, le fait de "préparer le terrain", autant que possible, avant de procéder à la visite de l’établissement. De ce point de vue, deux pistes ont été évoquées :  l’élaboration de tableaux de bord, en premier lieu, mentionnée notamment à propos de l’Angleterre et du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie. Dans ces deux cas en effet, un ensemble de données comparées entre les établissements, établi par les autorités compétentes dans le champ éducatif, permet de situer les établissements sur des échelles synthétiques. Les données prises en compte ne sont pas seulement des résultats statiques à l’instant "t" parce qu’il est important de pouvoir apprécier également des éléments tels que la progression des élèves. Outre leur exploitation judicieuse pour préparer attentivement la visite d’établissement, un des avantages que l’on peut tirer de tableaux de bord de cette nature, c’est leur utilisation ultérieure, par l’établissement lui-même, dans le cadre d’une auto-évaluation de sa performance ;  l’appui que les évaluateurs "externes" peuvent tirer utilement de personnes ressources au sein de l’établissement, qu’il s’agisse d’interlocuteurs désignés ("nominees") ou, autre terme employé, de "pairs" ("peers") ; l’objectif est bien de conjuguer opportunément un regard extérieur (l’évaluation externe) et un développement au sein des établissements de l’évaluation interne, autrement dit de l’auto-évaluation. 5) une démarche qui soit participative et transparente Cinquième condition - allant dans le sens des précédentes - à prendre en compte pour inscrire la démarche d’évaluation dans un contexte positif, faire en sorte que cette démarche soit à la fois participative et transparente :  l’enjeu premier est d’associer, dans l’établissement, toutes les parties prenantes à son fonctionnement pédagogique (l’équipe de direction, les personnels enseignants, les autres catégories de personnels, les élèves, les parents d’élèves, etc.), en considérant que la visite d’évaluation représente pour l’établissement comme pour l’institution une occasion privilégiée de dialogue approfondi à ne pas laisser passer ;  au titre de la transparence, les exposants ainsi que les participants à l’atelier qui sont intervenus durant les phases de discussion suivant les exposés ont insisté sur la nécessité de rapports brefs, qui rendent compte effectivement des principales caractéristiques du fonctionnement pédagogique d’une école primaire ou d’un établissement secondaire, qui soient dépourvus de "jargon", et donc aisément accessibles aux divers lecteurs potentiels. 6) une démarche qui ne doit pas être sans lendemain Sixième condition - "last but not least" - à prendre en compte, éviter que la visite d’évaluation de l’établissement constitue une démarche sans lendemain et qu’elle soit perçue en fin de compte par les acteurs de l’établissement comme gratuite et sans incidences concrètes. Les exposants ont insisté ainsi sur l’enjeu primordial que représente le travail de suivi ("follow up") si les autorités compétentes veulent conforter la crédibilité de l’évaluation. Des conséquences pratiques doivent donc être tirées des visites d’établissement, entre autres l’organisation d’actions de formation continue pour les personnels de direction ou pour les enseignants, par exemple.

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Document 15 - Les indicateurs de pilotage des EPLE79 Patrick ALT80 Juin 2010 Depuis 1994, le Ministère de l’Éducation Nationale met chaque année à la disposition des chefs d’établissement public du second degré des indicateurs d’aide au pilotage dans le cadre d’un dispositif intitulé initialement IPES (Indicateurs pour le Pilotage des Établissements Secondaires) et identifié, à partir de septembre 2010, sous le sigle APAE - Aide au pilotage et à l’auto-évaluation des établissements. Ce dispositif est constitué d’un ensemble d’indicateurs calculés et fournis par le ministère de l’Éducation nationale. Au sein de l’administration centrale, c’est la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) qui est chargée de ce dossier. Ces indicateurs sont assortis de références académiques et nationales. L’ensemble est accessible en ligne pour les établissements scolaires du second degré. Il s’agit ainsi de répondre à un certain nombre de besoins des acteurs du système éducatif. Pour l’édition 2009, le Ministère de l’Éducation Nationale avait introduit une innovation majeure à travers de nouvelles variables dans le calcul des indicateurs de résultats des lycées, encore appelés "indicateurs de valeur ajoutée", et qui constituent les éléments essentiels de ce dispositif, en fait plus large. Après un rappel de l’historique du dispositif et de son organisation, le présent article évoque ensuite l’évaluation des "performances" des lycées au travers, notamment, de la notion de "valeur ajoutée". Un développement spécifique est consacré à la manière nouvelle, introduite en 2009, d’aborder ces indicateurs de résultats des lycées. Enfin sont évoquées les conditions nécessaires à une utilisation sinon "optimale", au moins pertinente, des indicateurs. La genèse et l’organisation du dispositif "IPES"

Historique du dispositif Le souci de fournir des indicateurs aux établissements date – déjà – des années 1970. Cependant une évolution dans les objectifs et la conception de ces indicateurs s’est produite au début des années 1990, liée aux évolutions de la politique de gestion des établissements, à la forte demande d’indicateurs d’évaluation permettant de mesurer leur "efficacité", ainsi qu’à l’évolution des systèmes d’information. Au cours de la décennie 1970 et jusqu’à la fin des années 1980, des "tableaux de bord des établissements" étaient certes conçus au Ministère, comprenant des indicateurs de gestion facilitant l’auto-analyse et l’aide à la décision. Il s’agissait cependant d’un outil complexe et lourd à gérer étant donné la difficulté à disposer de l’information. La logique des projets d’établissement, née au début des années 1980 et confortée par la loi d’orientation sur l’éducation de juillet 1989, a favorisé la conception de nouveaux indicateurs. L’élaboration des projets d’établissement et leur suivi ont nécessité en effet la mise en place d’indicateurs afin d’établir le diagnostic, d’effectuer des choix, de fixer des objectifs et d’évaluer la mise en œuvre du projet. Des indicateurs furent construits localement par les différents acteurs du système, ce qui rendait l’évaluation des projets non homogène. Par ailleurs, des publications par la presse des taux bruts de réussite au baccalauréat et de classements des lycées basés sur ces seuls taux, en occultant les divers autres aspects du fonctionnement des NB : le présent article actualise une version précédente écrite par l’auteur en lien avec Philomène ABI-SAAB, ingénieure de recherche au Ministère de l’Education Nationale, parue en décembre 2001 dans le numéro 120 de la revue Perspectives publiée par l’UNESCOBureau International de l’Education (BIE), numéro consacré au thème : "Autonomie de l’École et Évaluation". 80 IA-IPR "Etablissements et Vie scolaire" dans l’académie de Nice ; précédemment personnel de direction et chef du bureau de l’évaluation des établissements à la DEP (1998-2000). 79

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lycées et de leur contexte, ainsi que le succès dont ont bénéficié ces publications auprès du public, avaient souligné l’urgence, pour l’institution, de rendre compte à son tour de l’efficacité des établissements en fournissant des indicateurs de réussite tenant compte de leurs contraintes effectives. C’est ainsi que trois indicateurs de "performance" des lycées, établis à partir des résultats de leurs élèves au baccalauréat et compris dans la "batterie" des indicateurs IPES, ont été publiés et rendus accessibles à tous les acteurs du système éducatif, qu’il s’agisse des responsables aussi bien que des parents d’élèves81. Enfin, le contexte social de cette période se caractérisait par la montée du chômage, notamment pour les moins diplômés, par l’apparition d’une précarité professionnelle plus importante et par une inquiétude globale devant ces évolutions. La réussite scolaire des enfants et l’obtention de diplômes les plus élevés possibles apparaissaient alors comme une garantie contre cette angoisse du futur. Ces différents éléments, à savoir la multiplicité des évaluations, le classement des lycées par certains organes de presse, la mise en place des projets d’établissement, l’investissement éducatif national et régional, et l’inquiétude sociale face à l’avenir ont donc favorisé l’émergence d’une demande d’indicateurs d’évaluation des établissements. Par ailleurs, l’évolution des procédures de collecte des données portant sur les élèves, les enseignants et les structures des établissements, grâce aux nouveaux systèmes d’information et à leur informatisation, a rendu possible l’homogénéisation des données recueillies et la mise à la disposition des établissements, en retour, d’une batterie standardisée d’indicateurs. Le paysage éducatif actuel a encore accru la nécessité, désormais impérieuse, d’utiliser des indicateurs de pilotage des établissements. La suppression de la carte scolaire en matière d’affectation des élèves impose de renseigner au mieux les parents sur les résultats des établissements dans lesquels ils envisagent de demander l’affectation de leurs enfants. D’autre part, la démarche de contractualisation introduite par la loi du 23 avril 2005 a prévu que chaque établissement du second degré signe avec l’autorité académique un contrat d’objectifs pluriannuel. Ce contrat est fondé sur un diagnostic partagé de la situation de l’établissement s’appuyant notamment, mais pas seulement, sur une analyse des indicateurs de celui-ci ; les objectifs contractualisés sont nécessairement assortis d’indicateurs de performance et de valeurs cibles que l’établissement doit s’efforcer d’atteindre. Enfin, la lettre de mission, obligatoire pour chaque chef d’établissement, vient compléter cette nécessité de s’appuyer sur un ensemble d’indicateurs rendant compte à la fois du contexte mais aussi, et de façon essentielle, des performances de l’unité qu’il dirige.

L’organisation du dispositif : plusieurs types d’indicateurs Description et contenu des IPES IPES ne prétend pas couvrir tous les domaines permettant une connaissance parfaite de l’établissement et une évaluation de tous ses aspects. Ce dispositif propose une approche des éléments fondamentaux permettant une première lecture de la situation de l’établissement, mais il ne permet pas, toutefois, une évaluation exhaustive de ce dernier. Les domaines couverts portent sur les caractéristiques de la population accueillie, le fonctionnement et les résultats :  Caractéristiques de la population accueillie : Les indicateurs permettent de décrire la population accueillie en fournissant : les caractéristiques sociodémographiques des élèves : pourcentage d’élèves défavorisés de l’ensemble de l’établissement, pourcentage d’élèves défavorisés par niveau, pourcentage d’élèves majeurs, pourcentage d’élèves étrangers ;

81

Les indicateurs de performance des lycées sont disponibles sur le site - mis à jour annuellement au mois d’avril http://indicateurs.education.gouv.fr/. École supérieure de l'éducation nationale

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les caractéristiques scolaires et l’origine des élèves : pourcentage de redoublants, pourcentage d’élèves ayant 2 ans de retard ou plus, acquis scolaires des entrants en 6ème, en 2nde générale et technologique et en 2nde professionnelle, pourcentage d’élèves originaires d’un même établissement, pourcentage d’élèves originaires du privé.  Les indicateurs de fonctionnement : Les indicateurs proposés s’efforcent de donner une image objective du fonctionnement de l’établissement au travers de certaines ressources dont il dispose. Afin d’apprécier et de décrire ces ressources, IPES comporte des indicateurs sur les options et les langues enseignées ainsi que sur les enseignants : ceux portant sur les options et sur les langues enseignées fournissent un aperçu de la palette des options et des langues offertes dans l’établissement ; par ailleurs, ils permettent de mesurer le taux de suivi de ces dernières ; ceux relatifs aux enseignants donnent certaines caractéristiques de ces derniers : leur âge, leur sexe ainsi que leur niveau de qualification universitaire à travers leur répartition dans les différents corps d’enseignement.  Les indicateurs de résultats : Les résultats d’un établissement sont envisagés sous différents aspects : il ne s‘agit pas de s’intéresser à la seule réussite à un examen mais aussi à l'ensemble du déroulement de la scolarité d'un élève. Ainsi des taux bruts de réussite sont fournis par filière et par âge ainsi que des taux d’accès au niveau supérieur et au diplôme en tenant compte des réorientations en cours de cycle vers d'autres établissements ou vers la vie active. Par ailleurs, ces indicateurs de résultats cherchent à donner une approche de la "valeur ajoutée" de l'établissement en comparant les taux bruts de réussite et les taux que l'on peut "attendre" de l'établissement, c'est-à-dire les taux de réussite qui seraient constatés si les élèves présentés aux examens avaient réussi dans les mêmes proportions que tous les élèves comparables de l'académie ou de l'ensemble du pays. Ces indicateurs de résultats comprennent aussi des indicateurs permettant d’apprécier les orientations par le biais du devenir des élèves ayant quitté un niveau ou ayant quitté l’établissement. Un développement spécifique sera consacré, plus loin, au mode d’élaboration de ces indicateurs de résultats pour ce qui concerne plus précisément les lycées d’enseignement général et technologique. Les modes d’élaboration et de diffusion des indicateurs IPES L’ensemble de ces indicateurs est destiné en premier lieu au chef d’établissement afin de lui fournir des éléments d’aide au pilotage ; les IPES sont fournis chaque année aux établissements. Ils sont disponibles sur Intranet et consultables moyennant un code d’accès fourni par les gestionnaires du produit aux différents responsables du système éducatif : les chefs d’établissement, les responsables académiques, les inspecteurs ainsi que les agents concernés du Ministère. Par ailleurs, trois indicateurs uniquement sont rendus publics ; il s’agit des indicateurs de performance des lycées d’enseignement général et technologique et des lycées d’enseignement professionnel : le taux de réussite au baccalauréat, le taux d’accès au baccalauréat, et le pourcentage de bacheliers parmi les sortants. Ces taux sont accompagnés de références nationales et académiques ainsi que de taux "attendus" permettant de mesurer la "valeur ajoutée" de l’établissement ; ils sont consultables sur le site Internet du ministère de l’Éducation nationale. Les IPES sont calculés par le ministère à partir des fichiers informatiques utilisés pour la gestion des élèves d’une part, des enseignants d’autre part, et, enfin, des structures des établissements. En effet, dans chaque collège et chaque lycée publics, un même logiciel de gestion des élèves et des personnels École supérieure de l'éducation nationale

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(Sconet) est implanté. Il permet des remontées régulières de fichiers vers l’autorité nationale via l’autorité académique régionale. C’est l’agrégation des données issues de ces sources informatiques qui permet d’une part l’élaboration de statistiques régionales et nationales et, d’autre part, leur restitution aux établissements, leur offrant ainsi la possibilité de se situer dans un ensemble géographique plus vaste. Ces indicateurs communs à tous les établissements de même type, collèges, lycées ou lycées professionnels sont principalement destinés à l’aide au pilotage ; accompagnés de références nationales et académiques, ils permettent à l’établissement de se situer dans l’espace. Ils portent sur les données de l’année en cours et sont aussi déclinés dans le temps, permettant ainsi une approche historique de l’établissement. L’évaluation des "performances" des lycées : un domaine privilégié pour ces indicateurs Parmi cet ensemble d’indicateurs, ceux portant sur les résultats bénéficient de la notoriété la plus importante compte tenu de leur accessibilité au grand public. En effet, les parents d’élèves peuvent les consulter, dans leur quête de l’établissement estimé comme le mieux adapté à la situation particulière de leur enfant, bien que leur choix soit limité du fait des contraintes d’affectation liées au secteur de résidence géographique. Par ailleurs, ils permettent d’alimenter le débat à l’intérieur de l’établissement de même qu’avec les partenaires de ce dernier. Ils reposent sur les résultats aux examens, sur les parcours scolaires dans l’établissement, sur la proportion de diplômés parmi les sortants et, enfin, sur le devenir des élèves après qu’ils aient quitté l’établissement. S’ils permettent de mesurer la "valeur ajoutée" de l’établissement, c’est en se fondant sur une comparaison des résultats obtenus par rapport aux résultats "attendus". Un cas particulier d’un lycée, établissement dont la mission essentielle est de préparer les élèves au baccalauréat, est présenté dans les tableaux qui suivent, permettant d’illustrer ces indicateurs. Afin d’apprécier la performance d’un lycée à travers ses résultats, plusieurs indicateurs ont été retenus, comme indiqué précédemment : le taux de réussite au baccalauréat, le taux d’accès de seconde au baccalauréat, le taux d’accès de première au baccalauréat et la proportion de bacheliers parmi les sortants du lycée. Les trois premières approches permettent d’apprécier la valeur ajoutée de l’établissement par comparaison avec l’académie et avec la France ; ceci étant, si ces indicateurs ne prétendent pas mesurer "l’effet établissement", ils permettent toutefois d’appréhender d’une manière plus juste les résultats de ce dernier.

Faire ressortir la "valeur ajoutée" d’un lycée Afin d’apprécier l’apport réel d’un lycée donné dans la réussite de ses élèves, il faut s'efforcer d’éliminer l'incidence des facteurs de réussite scolaire extérieurs au lycée pour ne conserver que ce qui est dû à son action propre et estimer ainsi la "valeur ajoutée". Plusieurs facteurs propres à l’élève ont une influence sur la réussite scolaire. Des études préliminaires menées au sein du Ministère ont établi de fortes corrélations entre certaines variables et la réussite scolaire. Il s’agissait donc de mesurer la réussite dans l’établissement en neutralisant l’effet de ces critères. En 1994, le choix de deux variables seulement avait été retenu : l’âge des élèves, d’une part, et l’origine sociale des élèves, d’autre part. Ce choix résultait des études précitées mais aussi de la disponibilité de ces données dans les systèmes d’information. Le critère de l’âge se substituait à un critère scolaire difficilement mesurable, à savoir les connaissances des élèves à l’entrée en seconde ; on savait, par ailleurs, que le retard scolaire était une caractéristique qui reflétait la difficulté scolaire. Quant à la catégorie socioprofessionnelle, les résultats de plusieurs recherches avaient montré l’importance de ce critère et son effet sur la réussite tout au long du cursus.

D’autres paramètres désormais disponibles et pris en compte À la date de 2009, les deux critères qui viennent d’être décrits présentent toujours autant de pertinence. Ainsi, à la session de 2007 des baccalauréats général et technologique, le taux de réussite varie de vingt points entre les élèves de terminale en retard de deux ans ou plus (73% d’entre eux ont obtenu le diplôme) et ceux qui sont d’âge "normal" ou plus jeunes (93% d’entre eux ont réussi à l’examen). En ce École supérieure de l'éducation nationale

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qui concerne l’origine sociale, l’écart est de douze points entre les enfants d’ouvriers ou d’inactifs (79% de réussite) et ceux de cadres supérieurs ou d’enseignants (91% de réussite). Cependant, la DEPP a pu ajouter désormais à ces deux variables initiales d’autres paramètres maintenant disponibles dans les systèmes d’information et qui, d’après les études menées à ce sujet, ont effectivement une influence sur la réussite au baccalauréat : il s’agit tout d’abord du niveau scolaire effectif à l’entrée au lycée : il est apprécié par la moyenne des notes obtenues aux épreuves écrites du diplôme national du brevet passées en fin de troisième. En 2007, les élèves qui avaient obtenu une moyenne supérieure à 14 aux épreuves écrites du diplôme national du brevet (D.N.B.) ont réussi le baccalauréat à 93 %, alors que ceux qui avaient obtenu une moyenne inférieure à 10 à ces mêmes épreuves écrites n’ont été lauréats du baccalauréat qu’à 73 %, soit 20 points d’écart ; le sexe des élèves est également pris en considération bien que son influence soit moindre : la variation n’est que de deux points entre les filles (86% de réussite) et les garçons (84% de réussite) ; dernière variable prise en compte, mais non des moindres, celle qui concerne la structure, en termes de population accueillie, de l’établissement fréquenté par l’élève. Des analyses de l’influence de la mixité sociodémographique du lycée de scolarisation (appréciée à travers trois variables : l’âge, l’origine sociale et le sexe des élèves) indiquent en effet que le regroupement, au sein d’un même établissement, d’élèves présentant des caractéristiques "favorisées" pour ces trois variables a un impact positif, par comparaison avec une structure plus "défavorisée", sur l’accès et la réussite au baccalauréat de l’ensemble des élèves de l’établissement, et notamment de ceux, au sein de cet ensemble, qui ne possèdent pas, justement, ces caractéristiques. À titre d’exemple, si l’on compare les 10% des lycées qui ont la plus forte part d’enfants de cadres supérieurs ou d’enseignants aux 10% des lycées accueillant le moins d’enfants de cette même catégorie, on constate que, dans le premier cas, 91% des enfants d’ouvriers et d’inactifs obtiennent le baccalauréat, alors que, dans le second cas, ils ne sont que 72% à l’obtenir. On observe donc un écart de réussite de près de vingt points pour les enfants d’ouvriers ou d’inactifs suivant qu’ils sont scolarisés dans les 10% des lycées les plus favorisés tels que définis précédemment ou dans les 10% des lycées qui le sont le moins. Compte tenu de ces constats, pour chaque élève, en fonction de ses caractéristiques propres (âge, origine sociale, vie, résultats au diplôme national du brevet), d’une part, et des caractéristiques, d’autre part, de l’établissement fréquenté (retards scolaires, sexe, catégories socioprofessionnelles des parents des élèves accueillis), on peut calculer une probabilité de réussite au baccalauréat. Ce type de calcul effectué, le taux attendu de réussite au baccalauréat de l’ensemble du lycée peut alors en être déduit. Et, de la même manière, un calcul du taux d’accès de seconde et de première au baccalauréat peut être effectué également. Pour chacun de ces indicateurs, taux attendu de réussite au baccalauréat et taux d’accès au baccalauréat, deux calculs référencés à un ensemble géographique plus vaste peuvent être effectués : le premier de ces calculs référencés prend comme base l'ensemble des élèves de l'académie où est situé l'établissement : c'est le "taux attendu-base académique" ; le second, lui, prend comme référence l'ensemble des élèves de France : c'est le "taux attendubase France". La comparaison de taux attendus, ainsi calculés, aux taux réels permet d’apprécier la "valeur ajoutée" et d’estimer – prudemment, bien évidemment – quel est "l’apport réel" de l’établissement dans la réussite de ses élèves, valeur comparée à la réussite des élèves des établissements de même type et accueillant une population comparable à celle de l’académie et de la France. En tout état de cause, il s’agit là d’une mesure relative puisqu’elle compare la réussite réelle, qu’il s’agisse de la réussite au baccalauréat ou de l’accès de la seconde au baccalauréat, à une réussite attendue, fictive, par rapport aux résultats que l’établissement aurait obtenu si les élèves qu’il accueille

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avaient connu les mêmes résultats que ceux observés dans un établissement "moyen" de l’académie et de la France offrant les mêmes formations et accueillant le même type de population. Prenons, afin de concrétiser, l’exemple du taux de réussite au baccalauréat : la moyenne nationale de réussite à cet examen a été de 87,30 % en 2007. Mais si l’on considère la moyenne nationale de réussite des candidats d’âge inférieur ou égal à l’âge normal et de catégorie sociale très favorisée, celle-ci atteint 95,70 %. Par ailleurs, si, en sens opposé, on s’intéresse aux candidats ayant deux ans de retard ou plus et qui appartiennent à une catégorie sociale défavorisée, la moyenne de réussite est de 68,30 %. Dans ces conditions : un lycée dont la moyenne de réussite serait de 75 % et qui accueillerait une population scolaire constituée en quasi-totalité d’élèves ayant deux ans de retard ou plus et de catégorie sociale défavorisée pourrait être "légitimement" très satisfait de ce résultat puisque, par comparaison avec le niveau national, les élèves possédant les mêmes caractéristiques en termes d’âge et de catégorie sociale ne réussissent, eux, qu’à 68,30 % ; inversement, un établissement qui n’accueillerait que des élèves d’âge normal et de catégorie sociale très favorisée ne pourrait "se féliciter" d’un taux de réussite de 89 %, parce que celui-ci, bien que supérieur à la moyenne nationale (87,30 %), se trouverait en fait sensiblement inférieur au taux national de réussite des élèves possédant les mêmes caractéristiques que ceux de ce lycée (95,70 %). En résumé, il est plus pertinent, pour un lycée, de comparer son taux de réussite, non au taux moyen national, mais à un taux attendu tel que défini précédemment. L’écart observé permet de mieux apprécier la "valeur ajoutée" de celui-ci : si l'écart est positif, on a tout lieu de penser que le lycée a apporté aux élèves qu'il a accueillis plus que ce que ceux-ci auraient reçu s'ils avaient fréquenté un établissement fictif à l’image de la moyenne nationale ou académique, ce qui est l'indice d'une bonne efficacité ; en revanche, si l'écart est négatif, on peut induire une présomption inverse. Une illustration à travers un exemple Afin d’illustrer ces indicateurs de performance, un lycée a été choisi au hasard et ses résultats sont présentés dans les tableaux 1, 2 et 3. Tableau 1 : Taux de réussite au Baccalauréat par série d’un établissement témoin Séries

Littéraire Économique et social

Scientifique

Sciences et techniques de gestion

Sciences et techniques industrielles

Taux Sciences et technologies global de laboratoire

Taux Brut

87



85



82

82

84

Taux Attendu

88



83



83

78

82

83



79



78

80

79

39



102



96

71

308

(niveau académique) Taux Attendu (niveau France) Nombre total de candidats

Ce premier tableau montre que ce lycée obtient un taux global de réussite au baccalauréat (84 %) légèrement supérieur aux taux attendus au niveau académique (82 %) ou au niveau national (79 %) ; sa "valeur ajoutée" est donc positive. Cependant, l’analyse des performances de cet établissement doit être École supérieure de l'éducation nationale

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complétée par la mesure des taux d’accès afin de déterminer quelle est la réussite réelle pour un parcours scolaire complet dans ce lycée (cf. tableau 3). Asseoir en fait l’évaluation sur plusieurs paramètres Si l’on se propose effectivement, comme on l’évoquait précédemment, de mesurer la "valeur ajoutée" de l’établissement, il apparaît alors que la réussite à l’examen final, même si elle est comparée à une valeur attendue plutôt qu’à une valeur moyenne indifférenciée, ne peut constituer le seul indicateur de performance d’un lycée. En effet, il convient de considérer également le parcours scolaire des élèves dans l’établissement tout autant que la proportion de ceux qui quittent le lycée en ayant effectivement obtenu le diplôme terminal, fut-ce au prix de redoublements. La proportion de bacheliers parmi les sortants Ce taux, la proportion de bacheliers parmi les sortants, idéalement égal à 100 %, permet notamment d’apprécier la capacité d’un établissement à offrir une "seconde chance", grâce au redoublement, qui aboutisse à une réussite à l’examen. On sait que ce n’est pas toujours le cas et que, chaque année, un certain nombre d’élèves quittent définitivement un établissement en étant dépourvus du diplôme convoité (tableau 2). Tableau 2 : Proportion de bacheliers parmi les sortants d’un établissement témoin % de l’établissement

% de l’académie

% de la France

2nde, 1re, Terminale

58

75

69

Terminale

95

94

93

Ce deuxième tableau montre que, dans l’exemple retenu, la proportion de bacheliers parmi les sortants de terminale est satisfaisante mais qu’il n’en est pas de même, en revanche, pour l’ensemble des sortants de 2nde, de 1ère et de terminale qui ont été scolarisés dans ce lycée. Les taux d’accès Évoquons maintenant plus précisément le parcours scolaire d’un élève au sein d’un lycée donné, depuis son entrée dans l’établissement ou dans une filière de formation déterminée jusqu’à sa sortie, muni du diplôme initialement visé quel que soit le nombre d’années nécessaire à l’obtention de ce diplôme. La probabilité de réussite, au travers de ce parcours effectué dans le même établissement, s’exprime par le "taux d’accès" de la classe de seconde (première année du lycée) au baccalauréat ou de la classe de première (deuxième année du lycée, mais année d’entrée dans la filière de formation choisie) au baccalauréat (tableau 3). Mathématiquement, le taux d’accès de la seconde au baccalauréat est le produit du taux d’accès de seconde en première par le taux d’accès de première en terminale (dernière classe du lycée) et par le taux d’accès de terminale au baccalauréat. Il se fonde sur un suivi de "cohorte fictive", le calcul étant effectué sur les élèves du lycée pour l’ensemble des niveaux lors d’une même année. L’hypothèse permettant ce calcul repose sur le fait que ce qui est constaté une année donnée, en termes d’accès d’un niveau à l’autre et de réussite finale au baccalauréat, est extrapolable au parcours complet de l’élève dans l’établissement. Pour ces taux d'accès, on considère aussi, comme pour la réussite au baccalauréat, les taux attendus calculés en tenant compte des caractéristiques des élèves accueillis. La comparaison de ces derniers avec les taux d’accès réels permet d’apprécier la valeur ajoutée.

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Tableau 3 : Taux d’accès de la Seconde et de la Première au baccalauréat d’un établissement témoin Taux Brut

Taux Attendu

Taux Attendu

Nombre total d’élèves

(base (base académique) France) Seconde

50

69

62

Seconde

374

Première

81

83

81

Première

338

Dans l’exemple retenu, ce troisième tableau laisse apparaître un taux d’accès de 2nde au baccalauréat nettement en retrait par rapport aux taux attendus. Mais ce n’est pas le cas, en revanche, pour le taux d’accès de première au baccalauréat.

Une lecture nécessairement croisée En tout état de cause, c’est la lecture croisée de ces trois indicateurs de résultats - réussite au baccalauréat, taux d’accès et proportion de bacheliers parmi les sortants - qui permet de mieux approcher la notion de réussite de l’établissement eu égard à l’objectif d’obtention du diplôme terminal. Car si l’on se restreignait à la seule observation du taux de réussite au baccalauréat, même comparée à un taux attendu, on ne prendrait pas en compte certaines politiques d’établissement visant à écarter des élèves dont le lycée doute des capacités à obtenir le diplôme visé ; on pourrait alors obtenir des taux de réussite au baccalauréat très satisfaisants, mais au prix d’une politique délibérément sélective menée en amont et qui, en réalité, laisse peu de chances à des élèves en difficulté passagère ou ayant besoin de plus de temps pour atteindre le niveau escompté. Ainsi, dans le cas de l’établissement dont les résultats sont présentés dans les trois tableaux, la lecture croisée de l’ensemble des indicateurs peut suggérer une politique sélective en fin de classe de seconde et une élimination des élèves les plus faibles conduisant, à ce prix, à des résultats satisfaisants à l’examen final. Ceci étant, une autre hypothèse peut être émise : comme le montre le premier tableau, l’établissement n’offre pas de série "économique et social" (ES), ni de série "sciences et techniques de gestion» (STG). Cela peut conduire un certain nombre d’élèves intéressés par ce type de filière à quitter légitimement le lycée en fin de seconde au moment où le choix doit être effectué. Le faible taux d’accès de seconde au baccalauréat sera alors davantage un effet de "structure" plutôt que le reflet d’une politique sélective. En tout état de cause, des compléments d’information locaux peuvent seuls conduire à valider l’une ou l’autre des hypothèses, ou encore à en formuler et vérifier une troisième.

Un dispositif certainement utile mais pas suffisant pour autant Plusieurs conditions requises pour tirer effectivement parti de ces indicateurs La batterie d’indicateurs présentée ici représente un élément primordial pour la mise en place de procédures de pilotage au sein des établissements scolaires secondaires français. En effet, la fourniture de données toutes calculées avec des références nationales et régionales est très appréciée par les chefs d’établissement. Cependant, pour indispensable que soit ce dispositif, il ne saurait suffire au pilotage parce que d’autres éléments sont nécessaires :

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le développement, d’abord, d’une culture informatique minimale des chefs d’établissement est une condition essentielle de la diffusion et de l’utilisation raisonnée de cet ensemble d’indicateurs ; le développement d’une culture de l’évaluation, ensuite : l’utilisation, l’interprétation, la simple lecture d’indicateurs nécessitent l’acquisition d’un certain nombre de concepts de base ainsi que de méthodes propres à éviter des erreurs d’interprétation. La lecture critique, la mise en relation, le regard croisé, l’émission d’hypothèses peuvent se développer par le biais d’actions de formation initiale ou continue destinées aux personnels de direction des établissements scolaires. Certes, c’est ce qui a été réalisé systématiquement dès la mise en œuvre d’IPES en 1994 ; mais le dispositif doit faire également l’objet de formation de "rappels" pour les chefs d’établissement qui en ont besoin ; l’aide et une vision extérieure, en troisième lieu : il s’agit là d’une évaluation externe qui constitue un complément très utile à la seule approche interne de l’évaluation d’un établissement. Les corps d’inspection ont vocation à réaliser cet apport. Ils peuvent d’ailleurs s’appuyer précisément sur une analyse des indicateurs IPES leur permettant de formuler un certain nombre d’hypothèses qui, en tout état de cause, nécessitent d’être vérifiées par la visite de l’établissement et le dialogue avec le chef d’établissement et l’équipe éducative afin de mieux éclairer le fonctionnement du lycée ou du collège ainsi que les choix adoptés.

L’implication personnelle du chef d’établissement : un élément déterminant L’expérience acquise sur une période allant de 1994 à 2008 a mis en lumière toute l’importance de l’implication personnelle du chef d’établissement dans la mobilisation de ces données et, plus largement, pour le pilotage des établissements : elle doit assurément être très forte, son action personnelle devant être menée avec conviction si l’on entend réussir en s’appuyant, pour le pilotage, sur des indicateurs. Ainsi, les deux conditions suivantes semblent vraiment déterminantes : la volonté de pilotage par projet : une option qui doit être prise en premier lieu par le chef d’établissement, lui qui a la charge de convaincre la communauté éducative, et notamment les enseignants, de l’efficacité d’un tel choix ; l’animation interne : le rôle du chef d’établissement, là aussi, est essentiel dans l’utilisation par l’établissement d’indicateurs d’évaluation et de pilotage. De par sa position, il détient l’information, les moyens de la diffuser ainsi que l’initiative dans l’utilisation qu’il souhaite en faire. C’est à lui qu’il revient de présenter cette information aux membres de la communauté éducative, et notamment aux enseignants, de contribuer à l’analyse collective, d’orienter vers la définition d’objectifs évaluables, d’aider à l’élaboration puis à la mise en place de projets éducatifs et pédagogiques propres à favoriser l’atteinte des objectifs fixés. La phase d’évaluation, enfin, lui est dévolue qui permet à l’établissement d’infléchir, voire de modifier plus radicalement sa politique. Pour conclure, il convient tout d’abord de préciser que l’évolution de la dénomination du dispositif des "Indicateurs pour le pilotage des établissements secondaire" vers celle d’ "Aide au pilotage et à l’autoévaluation" est loin de se résumer à un simple changement d’intitulé. Car l’interface graphique proposée se veut plus attractive, plus lisible, plus interactive, constituant de la sorte un outil finalisé de communication. Ainsi, aux tableaux de valeurs numériques vont s’ajouter des représentations graphiques sous la forme d’histogrammes ou de courbes. De plus, des enrichissements locaux, dans chaque académie, vont être possibles, tant sur le plan graphique ("radars", par exemple) que sur le plan des indicateurs eux-mêmes ; pour répondre à des besoins proprement académiques, la nouvelle application va permettre d’intégrer des indicateurs calculés localement par le service statistique dont est dotée chaque académie. D’autre part, il paraît utile de mentionner que, dans la logique qui a présidé à la mise en place du dispositif des indicateurs pour le pilotage des établissements secondaires ici présenté, un "infocentre" a été réalisé par le Ministère de l’Éducation Nationale : accessible sur le réseau Intranet du ministère, il se compose de diverses sources de données : base de documents, base décisionnelle, indicateurs, École supérieure de l'éducation nationale

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répertoire, qui sont issus des travaux menés à l’administration centrale ; ces données constituent des références partagées par l’ensemble des responsables du système éducatif. Parmi les outils d’évaluation et de pilotage disponibles, on trouve, outre IPES, une "base centrale de pilotage" (BCP), les "indicateurs communs pour un tableau de bord de l’éducation prioritaire" (ICOTEP), les "indicateurs sur les établissements d’enseignement supérieur" (InfoSUP), ainsi que les "indicateurs pour le pilotage de l’école au collège" (InPEC) qui offrent, sur les écoles et les collèges, des indicateurs poursuivant l’objectif de favoriser l’articulation entre le premier et le second cycles d’enseignement. Il convient enfin de citer, au niveau des académies cette fois, un outil de suivi partagé des projets annuels de performance (PAP) académique, en référence à la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Il s’agit d’une application Internet protégée, intitulée "Mélusine", qui permet un accès simplifié à une synthèse des objectifs et indicateurs pour chacun des programmes budgétaires du Ministère de l’Éducation nationale. Les valeurs académiques qui sont intégrées dans l’application sont systématiquement présentées au regard des valeurs nationales correspondantes. C’est ainsi que l’ensemble du système éducatif français se trouve doté d’indicateurs qui offrent aux cadres des différentes unités éducatives la possibilité de s’appuyer sur des éléments objectifs afin d’assumer, au mieux, leurs responsabilités en matière d’évaluation et de pilotage.

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Document 16 - L'évaluation des performances des élèves Xavier Sorbe, IGEN de mathématiques Janvier 2009 L’évaluation des performances renvoie à la question de la définition du concept de performance en milieu scolaire et pose le problème du choix des indicateurs. Les outils de pilotage dont l’institution s’est dotée, à l’échelon national ou académique, sont-ils eux-mêmes pertinents pour favoriser le développement d’une politique d’établissement ? 1- Quelle place pour les performances des élèves dans les indicateurs institutionnels ? Indicateurs IPES http://www.infocentre.education.fr/ipes/index.php Ils portent sur trois thèmes : la population prise en charge, les ressources et moyens, les résultats. Ce dernier thème comprend, pour un lycée : le devenir des élèves de 2nde, la proportion de bacheliers parmi les sorties, les taux d’accès au niveau supérieur et au baccalauréat, les taux de réussite au baccalauréat par filière. Indicateurs LOLF ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/bo/2007/3/annexes_MENE0700047C.pdf Dans le cadre du programme 141 "Enseignement scolaire public du second degré", l’objectif 1 "Conduire le maximum d’élèves aux niveaux de compétences attendues en fin de scolarité et à l’obtention des diplômes correspondants" regroupe l’essentiel des indicateurs liés aux compétences des élèves. La plupart d’entre eux sont articulés autour du taux d’accès à des diplômes et des flux d’orientation vers certaines filières : 1.1. 1.2. 1.3. 1.4. 1.5. 1.6. 1.7. 1.8. 1.9. 1.10. 1.11. 1.12. 1.13. 1.14. 1.15.

Taux d’accès au baccalauréat Proportion de bacheliers généraux parmi les enfants de familles appartenant aux CSP défavorisées Taux de sorties aux niveaux VI et V bis Taux d’accès au brevet Proportion d’élèves maîtrisant, en fin de collège, les compétences de base en français et en mathématiques Proportion d’élèves ayant atteint dans une langue étrangère le niveau B1 du cadre européen commun de référence, en fin de collège Proportion d’élèves ayant obtenu, au terme de leur scolarité au collège, le niveau 2 du brevet informatique et internet (B2i) Pourcentage de jeunes en difficulté de lecture aux tests passés lors de la JAPD Taux d’accès des élèves de 2nde GT au baccalauréat général ou technologique Proportion d’élèves de BEP obtenant le baccalauréat professionnel Taux de poursuite des élèves de BEP vers le baccalauréat professionnel Proportion d’élèves en classes terminales des filières scientifiques et techniques Proportion de filles en classes terminales des filières scientifiques et techniques Proportion d’élèves apprenant l’allemand Taux de redoublement

D’autres indicateurs, concernant davantage des aspects éducatifs (responsabilité, violence, santé, etc.) apparaissent dans le programme 230 Vie de l’élève.

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Indicateurs de résultats des lycées http://www.education.gouv.fr/cid3014/indicateurs-de-resultats-des-lycees.html Ils se limitent au taux de réussite de chaque lycée au baccalauréat, par série, en précisant un taux attendu. Par ailleurs, les services académiques de statistiques procurent aux établissements des tableaux de bord, à caractère sociologique ou apportant des précisions sur la réussite aux examens. En résumé, les données mises à disposition des établissements par l’institution n’ignorent pas complètement les résultats des élèves. Elles les approchent cependant le plus souvent de façon indirecte. Éloignées des pratiques de classe, elles ont du mal à s’inscrire dans les préoccupations des enseignants. La corrélation naturelle entre les indicateurs dont l’institution se dote pour piloter et ceux dont les établissements se saisissent est relativement forte, alors qu’ils n’ont pas la même pertinence selon le cadre où on fait appel à eux. 2- D’autres indicateurs exploitables par les établissements Pour orienter la réflexion et l’action des établissements au plus près des besoins des élèves, plusieurs dispositifs peuvent procurer des éléments exploitables. Les examens En l’état actuel, le dispositif des examens ne joue pratiquement aucun rôle dans le pilotage du système, alors que, bénéficiant de certaines conditions d’objectivité, il pourrait constituer une provision d’indicateurs utiles. Au-delà des taux de réussite par série, les établissements n’ont aucun retour sur les notes obtenues par leurs élèves. Une évaluation sous forme de crédits plutôt que de moyennes, comme cela se pratique dans d’autres pays, serait de nature à favoriser un intérêt pour des réussites ciblées à l’intérieur de chaque champ disciplinaire. Les évaluations diagnostiques institutionnelles http://educ-eval.education.fr/evaldiag.htm Bien que limitée à Français et Mathématiques, l’évaluation 6e (qui existait en principe pour la dernière fois à la rentrée 2008) offrait la possibilité d’une évaluation fine autour de grandes catégories de compétences permettant d’établir un bilan de certains acquis (Français : connaissance et reconnaissance de mots, compréhension et réception, production de textes, utilisation des usuels ; Mathématiques : espace et géométrie, exploitation de données numériques, grandeurs et mesures, connaissance des nombres entiers naturels, calcul). Les banques d’outils d’aide à l’évaluation http://www.banqoutils.education.gouv.fr/ Elles concernent tous les cycles du primaire et toutes les classes de collège et la 2nde, dans toutes les disciplines. Les évaluations internationales Malgré la spécificité des compétences évaluées et bien que poursuivant des objectifs de comparaison entre pays, les évaluations PISA fournissent des épreuves susceptibles d’alimenter et de renouveler les pratiques d’évaluation.

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Le socle Le socle commun donne des repères pour une évaluation structurée des connaissances et des compétences. Les grilles de référence peuvent aider à concevoir des situations appropriées. Conclusion Concernant les performances des élèves, les indicateurs mis en œuvre renseignent le plus souvent de façon indirecte à travers des données sur des flux d’orientation, des taux de redoublement ou de réussite aux examens. Mais ils s’avèrent nettement déficients en vue d’une évaluation des acquis des élèves. Ceux qui seraient plus adaptés sont très peu utilisés. Dans la perspective d'une auto-évaluation accompagnée, il importe de promouvoir la construction par les académies et les établissements d’outils permettant une véritable évaluation de ces acquis, en privilégiant le suivi de cohortes. Il convient que les indicateurs soient : peu nombreux, centrés sur quelques acquis bien choisis, sans prétendre à l’exhaustivité ; exploitables sur la durée pour réellement permettre d’apprécier la portée d’une politique et compenser les effets induits par de petits effectifs.

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3. Documents relatifs au pilotage pédagogique Document 17 - Le pilotage pédagogique partagé Domitile DUPONCHEL – IA-IPR de mathématiques Académie de Lille Formation des personnels d’encadrement 22 septembre 2009 - ESAAT Roubaix La finalité du système éducatif est de fournir à chaque élève les moyens de sa réussite, de préparer au mieux son avenir professionnel et son intégration dans la société. Chefs d’établissement et inspecteurs ont cet objectif en commun. La complémentarité de l’action des personnels de direction et des inspecteurs s’exerce dans : l’accompagnement des parcours professionnels, la dynamisation des équipes pédagogiques, la mise en œuvre de la politique éducative de l’établissement, la mise en œuvre de la politique académique, et l’accompagnement des réformes nationales. La note de service du 19 mai 2009 définit82 les missions des corps d’inspection : "Conformément à l’article R.241-19 du code de l’éducation, les corps d’inspection sont chargés de veiller à la mise en œuvre dans les classes, les écoles et établissements, de la politique éducative définie par le ministre de l'Éducation nationale et des lois et règlements relatifs à l’action éducatrice de l’État. (…) Le cadre de l’action des corps d’inspection (…) est le projet académique arrêté par le recteur". À cet effet, dans le cadre du programme de travail académique arrêté conjointement par l'inspecteur général de l’Éducation nationale correspondant académique et le recteur de l'académie, leurs missions sont regroupées sous trois grands thèmes : dans l’ordre, le pilotage pédagogique partagé, le management et le conseil, qui sont au cœur de l’action professionnelle des inspecteurs et des chefs d’établissement. 1. Le pilotage pedagogique partagé "Les inspecteurs procèdent à l’évaluation des enseignements, des écoles et établissements ou à celle de champs disciplinaires ou éducatifs". L’inspection individuelle reste indispensable et "essentielle", mais doit toutefois se combiner avec des formes d’intervention plus larges, telles que "l’évaluation d’équipes disciplinaires ou pédagogiques". L’inspection individuelle De sa préparation à son suivi, l’inspection individuelle se réalise en concertation étroite avec le chef d’établissement et débute très souvent par un entretien avec celui-ci. Parce que les missions multiples qui incombent à l'inspecteur ne lui permettent pas d'avoir la fréquence et la régularité souhaitée, beaucoup d'enseignants l’attendent encore avec une grande anxiété. Le chef d'établissement peut dédramatiser cette venue événementielle en la présentant comme une véritable rencontre autour de considérations professionnelles partagées.

82

Circulaire n°2009-064 du 19 mai 2009, Bulletin officiel n° 22 du 28 mai 2009. École supérieure de l'éducation nationale

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On peut en distinguer trois types : d'abord celles qui relèvent de l'initiative de l'IPR où, lors de l'observation des pratiques du professeur en classe, la présence du chef d'établissement s'inscrit dans le cadre de son rôle pédagogique et est vivement souhaitée ; ensuite celles effectuées à la demande du chef d'établissement, adressées par voie hiérarchique, où sa présence ou celle de son adjoint est à envisager conjointement en fonction des diverses situations susceptibles de se présenter ; et, enfin, les inspections ayant valeur d'examen, où, en l'absence de textes réglementaires explicites, la présence de personnes n'est pas souhaitable pour éviter d'éventuels recours en tribunal administratif puisque les examens ne sont pas publics. Dans tous les cas, l'entretien de progrès qui suit se déroule exclusivement entre le professeur et l'inspecteur, mais il est toujours souhaitable qu'une synthèse avec le chef d'établissement ait lieu à la fin. Le résultat se matérialise par un rapport écrit, base d’une note. Lors de l'arrivée du rapport, le chef d'établissement invite le professeur à venir le lire dans son bureau afin de le signer et, éventuellement, d'en commenter le contenu. On ne peut que voir des avantages à ce que le chef d'établissement assure le suivi des recommandations formulées par l'inspecteur et s'en inspire par exemple pour une éventuelle ventilation des services. Au-delà de l'inspection individuelle, chaque fois que cela est possible, il convient que la visite s’accompagne d’une réunion d’équipe avec l'ensemble des professeurs de la discipline et les personnels de direction. Cette réunion est préparée et animée avec l'aide du chef d'établissement car les thèmes abordés sont le plus souvent d'intérêt général pour l'établissement et ils peuvent avoir une incidence sur sa politique éducative et pédagogique. Contenu Thèmes abordés

Réflexion commune sur

Prise en charge des élèves difficiles ou/et en difficultés

Suivis particuliers : tutorat, groupes de besoin, PPRE, modules Veille particulière en 6e et 2nde

Pratique d’évaluation

Évaluations formatives, sommatives, évaluations communes, par compétences Fréquence et contenu des devoirs Notation positive et valorisation des progrès de l’élève Place de l’oral

Résultats (soin particulier au Résultats des élèves aux évaluations et aux examens suivi des évaluations nationales Devenir des élèves en 2nde (Taux de doublement) ou après le et à l’analyse des résultats aux bac examens) Contenus et harmonisation des Programmes, progressions enseignements Introduction du socle dans les pratiques Cohérence inter-niveaux et dispositifs de liaisons inter-cycles Travail et dynamisme de l’équipe Participation à la vie de l’établissement

Gestion de l’équipe disciplinaire (coordonnateur, concertation…) Discipline et projet d’établissement : axes prioritaires Discipline et nouveaux dispositifs : B2i PPRE, conseil pédagogique, socle, histoire des arts, EDD,… Participation à des projets innovants

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Travail en interdisciplinarité

Thèmes de convergence, TPE, validation du socle commun, accompagnement éducatif

Formations

Continue D’initiative locale

Équipements, moyens pédagogiques

Choix et achat technologies

d’équipements,

Place des nouvelles technologies

Horaires, plage de DS

usage

des

nouvelles

Contribution de la discipline à Efforts déployés pour assurer le rayonnement de la discipline et l’ouverture culturelle et la valorisation des filières scientifiques internationale Organisation de concours, de sorties Prise en charge de clubs État de la discipline Pour rédiger avec l’aide du chef d'établissement, conjointement aux rapports individuels, une synthèse sur l'état de la discipline, l'inspecteur s'appuie à la fois sur : les notes prises au fur et à mesure des débats ; les statistiques (principaux indicateurs de l'établissement et de la matière concernée) ; les documents fournis par le chef d'établissement (procès-verbaux des CA ayant trait à la structure pédagogique de l'établissement, éléments du projet d'établissement intéressant la discipline, procès-verbaux des conseils d'enseignement et résultats des évaluations nationales de la discipline) ; les enquêtes envoyées avant la visite. Ce document comportera notamment des recommandations précises et concrètes, dont le chef d'établissement pourra assurer le suivi en concertation avec l'inspecteur : points de progrès à accomplir ; proposition de formations, initiative locale ou continue ; conseils pour la détermination des services. Les priorités en termes de contenus et d’échéanciers seront éventuellement précisées. Ce document est à destination : des chefs d’établissement pour : o les associer et les responsabiliser dans le suivi de l’évaluation et l’application des recommandations et préconisations, o les aider dans l’élaboration de leur projet d’établissement, o établir une mémoire de la discipline au sein de l’établissement ; des professeurs de la discipline, afin de motiver un réel travail d’équipe et de promouvoir un enseignement de qualité ; mais aussi des inspecteurs, pour le suivi d’une mission, et du recteur s’il le demande. Un état de la discipline complet est joint à ce document (cf. ci-après)

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Quelques extraits des dernières parties pour différents établissements : 8- Les résultats de la discipline et de l'établissement Les moyennes au contrôle continu pour le DNB sont inférieures aux moyennes départementales, et pourraient sans doute être plus élevées. Les taux d’élèves issus du collège se dirigeant vers la 1ère S en fin de seconde en 2006 et 2007 (voisins de 40%) sont très supérieurs au taux académique et national (voisins de 30%), ce qui valide l’idée d’une bonne formation scientifique pour ces jeunes. Les faibles performances des élèves lors de l'évaluation 6e mettent en évidence leurs difficultés. L'alignement des classes de 6ème permet une remédiation plus ciblée, par groupe de niveau et par thème. Les efforts semblent profitables : la progression des résultats à l'épreuve de mathématiques du DNB est sensible, mais peut encore être améliorée. Les résultats au brevet sont bons, mais le taux de doublement en 2nde générale est en revanche élevé, donc il faut être attentif à préparer correctement certains élèves à cette orientation (gestion de l'hétérogénéité dans la classe et les contenus de devoirs). 9- Bilan qualitatif de l'enseignement de la discipline et fonctionnement de l'équipe disciplinaire À tous les niveaux, le travail d’équipe doit être intensifié et des progressions communes par palier et des devoirs communs sont recommandés. La préparation collective des énoncés de certains devoirs et la mutualisation des préparations informatiques sont deux possibilités de travailler ensemble, d'échanger des idées et d'alléger la charge de travail qu'il ne faut pas négliger. 10- Recommandations pédagogiques Les programmes, comme les précédents d’ailleurs, insistent sur l'introduction de l'informatique dans les pratiques pédagogiques. Ainsi, il est explicitement fait référence à l’usage d’un tableur en classe de cinquième. Il faut apprendre à utiliser cet outil de manière raisonnée et pertinente. On l'utilisera à la fois en classe entière, à l’aide du vidéoprojecteur, et, en salle informatique, pour des séances de TP. L'importance et l'utilité des logiciels de géométrie dynamique sont à souligner. Chaque enseignant de mathématiques doit par ailleurs contribuer à la validation des acquis du B2i. Prévoir, à chaque niveau, une progression permettant de terminer les programmes pour le début du mois de juin est un objectif. Éviter de placer deux heures d'une même matière, et tout particulièrement des mathématiques, le samedi matin où l'absentéisme est particulièrement important. L’aide individualisée en seconde est le seul dispositif d’aide et de soutien aux élèves en difficultés et chaque professeur l’adapte selon son idée. En 2nde, sur 330 élèves, 2 élèves ont moins de 6 de moyenne générale au premier trimestre contre 17 au second trimestre, 38 deviennent 68 moins de 8 ! De plus, le taux de doublement et de réorientation en fin de 2nde est élevé, 24% en 2008 au lycée contre 16,2% pour l’académie. Une réflexion doit être menée dans l’établissement sur la prise en charge des élèves fragiles. Les professeurs peuvent : o Mettre en place :  une pédagogie différenciée dans la classe, par des sollicitations fréquentes, un suivi particulier du travail effectué ;  des plages horaires :  pour des aides méthodologiques et didactiques basées sur un travail en amont de notions non encore abordées par la classe et ayant pour but d’accompagner un processus de construction de compétences et non de (ré)inculquer des savoirs et de développer l'autonomie de chaque élève ;  pour des "colles", où seront proposés des restitutions de cours et des exercices à résoudre ;  des actions d’aide à l’orientation afin d’obtenir une meilleure motivation des élèves en référence à un projet mobilisateur ;  un réel partenariat avec la famille ;  éventuellement, un tutorat par des élèves de 1ère ou des professeurs ; o Favoriser :  le travail personnel en leur faisant rappeler en début de séance les acquis des précédentes et, en fin d’heure, l’essentiel à savoir pour la suivante ;  le passage en salle informatique pour y travailler seul ;  la motivation et l’estime de soi (évaluation par compétences, fiches de suivi individuel, projets personnels) ; o Évaluer les progrès par des appréciations constructives précisant bien à l’élève les difficultés perçues et la manière d’y remédier.

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Liaisons inter-cycles Il est important de valoriser en collège, tout particulièrement auprès des filles, les sections industrielles et les débouchés qu'elles offrent. Afin de mieux gérer l'hétérogénéité des élèves et leurs difficultés, il serait opportun d'instaurer des liaisons 3ème-2nde. Le suivi des élèves après la terminale est également à étudier. Nouvelles technologies Afin d'enrichir l'enseignement des mathématiques, il faudrait intégrer dans toutes les pratiques pédagogiques les technologies de l'information et de la communication. Une partie des professeurs a affirmé sa volonté de faire avancer la discipline dans ce domaine. Une formation s'avère nécessaire pour les autres : une formation d’initiative locale (FIL) peut être envisagée, car des professeurs très compétents travaillent au lycée.

L’orientation est un thème que l’on retrouve souvent. Elle doit être prise en charge par les acteurs de tous les niveaux en s'appuyant notamment sur l'organisation pédagogique en bassin ou district pour conjointement : développer les réunions de travail entre professeurs des écoles et collèges ; mettre en place des projets de liaison collège/lycée afin de lutter contre l'échec en seconde. À ces fins, la présence systématique des corps d'inspection aux côtés des chefs d'établissement aide à la meilleure connaissance des difficultés pédagogiques et didactiques, et à la promotion de la concertation préalable à une gestion plus efficace des passages d'un établissement à un autre. Autres formes d’interventions Hors inspection, le chef d’établissement peut solliciter la présence de l’inspecteur. Quelques exemples : lors de la journée de prérentrée, ce qui permet de parler d’une même voix et, éventuellement, de participer au conseil d’enseignement ; lors d’un conseil d’enseignement (par exemple en fin d’année, elle peut éventuellement aider à atténuer des tensions entre des professeurs sur la répartition des classes ou aider à la mise en lors d’une réunion de district (par exemple pour présenter ou aider à la mise en place d’une réforme ou d’un dispositif nouveau),… L’évaluation des enseignements et des établissements Inspections croisées ou globales permettent d’avoir une connaissance approfondie de l’état des disciplines et activités de l’établissement, du respect des programmes, de l’application et de l’adéquation des réformes et de proposer les interventions et aménagements nécessaires. Par exemple, en 2008-2009, sur l’académie de Lille : les ateliers de la réussite : intervention d’inspecteurs sur trois établissements n’apportant pas de plus-value ; l’organisation de dix audits à visée participative : groupe de quatre personnes (inspecteurs et chefs d’établissement), période de cinq jours, sur un thème défini par le chef d’établissement à partir d’axes de travail donnés par le recteur, avec restitution au chef d’établissement et à l’équipe éducative. En collège, les thèmes étaient : l’orientation de la 5e à la 3e, la prise en charge de la difficulté scolaire et la liaison école-collège.

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En lycée général et technologique : la liaison collège-lycée, la filière technologique industrielle, le projet de l’élève en 2nde. En lycée professionnel : la prise en charge des difficultés scolaires à l’entrée en CAP et BEP, le suivi du parcours de l’élève et la mise en œuvre du bac pro 3 ans. L’évaluation des expériences pédagogiques Les expériences nouvelles se concrétisent et s'évaluent au sein des établissements avec l’aide des chefs d’établissement. Les corps d'inspection ont un rôle prépondérant à jouer dans l'organisation des remontées d'expériences et les réflexions sur les difficultés. Ils sont également concernés par la diffusion des pratiques innovantes et le transfert des réussites, là aussi avec l’aide des chefs d’établissement. 2. Le management "L’inspecteur conçoit ses interventions directes auprès du personnel enseignant comme un acte de gestion de la ressource humaine et éducative de l’académie". "L’avis de l’inspecteur est sollicité par l’autorité académique dans tous les grands actes de gestion des personnels : titularisation, évaluation, avancement, promotion, et affectation" (…) en lien avec "les chefs d’établissement (qui) apportent (…) aux corps d’inspection des éléments d’appréciation sur la manière de servir des personnels enseignants". "Il entre dans les missions des inspecteurs de détecter les talents et de les promouvoir". Une attention soutenue sera portée : au suivi et à l’évolution des carrières : inciter, par exemple, à passer l’agrégation ou un concours d’encadrement ; au repérage des compétences et des excellences, à solliciter ou dont le travail doit être divulgué. "Assurer la mise en place des formations". La connaissance des établissements, des personnels et les entretiens avec les dirigeants permettent également l’analyse des besoins sur le terrain dans le but de prévoir des formations : formation continue, par la préparation et la mise en œuvre du PAF sur les nouveaux programmes, les nouvelles politiques (PPRE, mise en place et évaluation du socle et des PPRE, validation du B2i et des niveaux de langue, ...) ; formation au niveau local : le montage d'une FIL est du ressort conjoint du chef d'établissement et de l'inspecteur, ainsi que les besoins en formation qui peuvent intégrer des pratiques diverses telles qu'échanges, réunions de travail, relations avec l'entreprise. Dans tous les cas, la communication des informations recueillies lors des stages sera prévue et elle est du ressort du chef d’établissement.

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Les inspecteurs doivent exercer pleinement leur rôle de conseiller des personnels dont ils ont la responsabilité, notamment pour : ceux qui débutent, ceux qui sont confrontés à la mise en œuvre de nouveaux programmes ou de nouvelles méthodes, et ceux qui connaissent des difficultés particulières. Très souvent, les interventions des corps d’inspection se font à la demande du chef d’établissement et la résolution des problèmes est le fruit d’un travail conjoint. 3. Le conseil "En application des articles R.241-20 et R.222-12 du code de l’éducation, l’inspecteur peut être sollicité par le recteur pour des missions de conseil : conseil aux chefs d’établissement ; conseil aux inspecteurs d’académie-DSDEN ; conseil au recteur ou à ses services". Un chef d’établissement peut faire appel à un ou des inspecteurs pour aider à l’élaboration du projet d’établissement, pour améliorer les résultats dans une matière, pour influer sur l’évaluation,… La visite d’un inspecteur dans un établissement dépasse de plus en plus le cadre de la simple inspection. Les inspecteurs y sont présents : ponctuellement : lors d’inspections, de formations ou de réunions, à la demande des chefs d’établissement ou du recteur ; plus longuement, lors d’audits ou dans le cadre du suivi des établissements (réseaux ambitionréussite ou sites d’excellence). 4. En conclusion D’un côté, les inspecteurs, submergés par des tâches multiples, n'ont qu'une vision parcellaire des établissements et de l'état de l'enseignement qui y est dispensé. De l’autre, les chefs d'établissement, assaillis par la gestion du quotidien, ne sont pas en mesure de se consacrer totalement à l'exercice de leur responsabilité pédagogique. Le regard extérieur de l'inspection ne doit plus être considéré comme une vérification du rapport à la norme, mais comme impulsion, aide, conseil et soutien. La multiplication des formations et des actions en commun développe chez les personnels d'encadrement une culture commune favorable à leur collaboration, et les inspecteurs et chefs d’établissement travaillent de plus en plus ensemble. Toutefois, il y a encore des améliorations possibles, par exemple : sur l’évaluation de la performance pédagogique, qui est parfois difficile ; au niveau de l’harmonisation des avis sur le travail des professeurs et de leur notation.

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État de la discipline "mathématiques" Collège X – Académie de Lille - Année 2007-2008 Visite du lundi 4 février 2008 Domitile DUPONCHEL, IA-IPR de mathématiques 1- Données statistiques chiffrées Corps professoral : 2 professeurs certifiés, un PEGC (4h) et un stagiaire PLC2 travaillent actuellement au collège. Les trois professeurs en poste ont été inspectés le 4 février 2008. Classes et horaires : 213 élèves sont répartis dans 10 divisions hétérogènes : trois sixièmes à 4 heures, trois cinquièmes à 3,5 heures, trois quatrièmes à 4 heures, deux troisièmes à 4 heures. Heure de soutien : 1 heure niveau 4e pour les élèves du PLC2 en cas de besoin, 1 heure niveau 3e pour des élèves ciblés ponctuellement, 2 heures niveau 6e sous forme de PPRE. 2- Équipements et moyens pédagogiques Chaque professeur a sa classe. Le collège dispose d'une salle pupitre de 25 postes et d’une salle informatique de 13 postes. Deux vidéoprojecteurs sont à disposition et peuvent être empruntés ainsi qu’un portable. 3- La discipline et le projet d'établissement Le projet d'établissement doit être revu cette année. Axes prioritaires : faire acquérir aux élèves les connaissances et les compétences liées aux programmes et au socle commun, apprendre à l’élève à être autonome, ouvrir le collège sur l’environnement professionnel, ouvrir le collège sur l’environnement culturel et linguistique, former le citoyen de demain. 4- Discipline et nouveaux dispositifs Les professeurs de mathématiques travaillent sur les compétences du B2i. L’un des professeurs coordonne la mise en place du B2i au collège. Les PPRE ont pour l’instant la forme de soutien disciplinaire autant en mathématiques qu’en lettres. Il n’y a pas d’organisation en ce qui concerne les thèmes de convergence, excepté ce qui concerne la sécurité routière (cette organisation existe toutefois avec d’autres disciplines dans le cadre du développement durable… Les mathématiques pourraient y être associées).

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5- Discipline et projet d'orientation des élèves Des liaisons CM2-6e existent. Tous les élèves des écoles du secteur viennent trois heures au collège et participent au calcul@tice, concours organisé par un des professeurs du collège en liaison avec l’IEN. À cette occasion, les élèves font connaissance avec les lieux et les personnes par une visite guidée de l’établissement. Outre ce rallye qui existe depuis 2006-2007, deux rencontres ont lieu également avec les enseignants de CM2 : la première en début d’année pour l’analyse des résultats des tests de 6e, avec des ateliers de travail autour des items à revoir et une autre, courant mai, pour une analyse des résultats annuels des élèves de 6e ainsi que pour des échanges autour des problématiques particulières d’élèves de CM2 en présence du COP et de l’assistante sociale du collège. Une liaison 3e-2nde existe depuis un an. Quatre réunions se déroulent chaque année et réunissent les professeurs de tous les collèges et lycées du district. Une confrontation des acquis, des attentes et de la notation devrait permettre un ajustement des pratiques pédagogiques. 6- Contribution de la discipline à l'ouverture culturelle et internationale Le concours Kangourou aura lieu chaque année. Il est mis en place cette année 2007-2008 à l’initiative du stagiaire. 7- Pratiques d'évaluation Deux brevets blancs sont prévus en 3e (évaluation plus formative que sommative). Un devoir commun est organisé en 4e, courant mai, fondé sur les connaissances et les compétences à acquérir dans le cadre du socle commun. À cette occasion, les élèves sont positionnés sur des grilles de compétences élaborées par des enseignants. L’élève et la famille peuvent ainsi se repérer sur les acquis de l’année et les fondamentaux à revoir pour la classe de 3e. Le professeur peut également se servir de cette évaluation dans sa pratique pédagogique de l’année en cours ou de l’année en préparation. Une évaluation commune aux niveaux 6e et 5e est à l'étude. Des devoirs fréquents et variés tant sur le fond (révisions d'années antérieures, géométrie dans l'espace, statistiques, ...) que sur la forme (problème ouvert pour donner le goût de la recherche, QCM, restitution organisée de connaissances, modélisation ou utilisation de graphiques, ...) sont indispensables et essentiels à la formation des élèves, en particulier les plus faibles. En fait, il faut adapter la longueur et la difficulté des devoirs afin d'obtenir un équilibre raisonnable. L'attention est attirée sur les notes qui, trop basses, sont source de démotivation et, trop hautes, source d'illusion. Dans l'un ou l'autre des cas, elles peuvent nuire à l'orientation. Les professeurs signalent par ailleurs le manque de travail des jeunes. Une interrogation orale rapide à chaque début et fin de cours peut être un moyen de vérifier l'acquisition des notions antérieures et permet de réinvestir et répéter les propriétés à connaître. 8- Les résultats de la discipline et de l'établissement Année

2001 2002

2003 2004 2005

2006

2007

51.2

56.3

Taux de réussite, évaluations 6e clg 59,2

50,7

50,9

48,3

54,7

Évaluations de 6e bassin

52,6

53,1

56,1

56,9

59,4

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Année

2001

2002 2003 2004 2005 2006 2007

Note moyenne maths brevet clg

7,74

5,24

4,82

7,61

9,46

Note moyenne maths brevet bassin

8,34

7,13

8,75

Note moyenne maths contrôle continu clg 9,39 Note moyenne maths contrôle continu 9,84 bassin

7,48

8,90

7,65

8,49

9,9

8,04

10,09 10,44 8.32

9,76

9,89

9,86

10,09 9,87

Pourcentage de reçus au brevet clg

52,24 58,94 44,62 60.00 69,23 68.52 65.91

Pourcentage de reçus au brevet bassin

69,2

71,5

68,62 70,56 74,26

9- Bilan qualitatif de l'enseignement de la discipline et fonctionnement de l'équipe disciplinaire Il y a un coordonnateur de la discipline. L'équipe s'entend très bien. Un travail commun est donc réalisé à tous les niveaux, avec une progression commune par palier. La préparation collective des énoncés de certains devoirs et la mutualisation des préparations informatiques sont deux possibilités supplémentaires de travailler ensemble, d'échanger des idées et, surtout, d'alléger la charge de travail qu'il ne faut pas négliger. 10- Recommandations Enseignement : Une place plus importante aux démonstrations des propriétés et théorèmes est vivement recommandée, l'une d'elles, jugée particulièrement intéressante ou susceptible d'être réinvestie, pouvant être introduite dans les cahiers de cours. À propos des nouveaux programmes, quatre remarques : toute notion nouvelle doit se baser sur les acquis des années précédentes ; le goût de la recherche, l’usage d’un cahier de brouillon, l’accent sur l’importance de la mise en place dès la sixième d’une sensibilisation à la démonstration sont des points forts des commentaires ; il faut donner un sens aux notions enseignées ; l'oral, dont le rôle est primordial, et la participation active des élèves à la mise en place des nouvelles notions contribuent à leur mémorisation. La mise en activité des élèves sur des situations riches est un des axes essentiel. Devoirs et évaluations : Le nombre de devoirs proposés est conforme à nos recommandations. Les sujets gagneraient encore à se diversifier davantage tant sur le fond (TICE) que sur la forme (résumé de cours, thème de convergence, questions ouvertes, QCM,…). Tout travail doit être valorisé (notation "positive"). Aide à la mémorisation : Des progressions spiralées, l’élaboration d’une "boîte à outils", son utilisation ainsi que celle du cahier de cours en séance d’exercices, et parfois ou pour certains en contrôles, peuvent aider à la mémorisation des savoirs.

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Document 18 - Évaluations d’écoles et inspections individuelles Jean-Pierre VILLAIN IGEN – Groupe de l’Enseignement primaire Juin 2010

Premier constat : avec le développement récent d’une culture de la performance dans le système éducatif, les pratiques, très rares jusqu’à il y a peu de temps, d’évaluations d’écoles se sont considérablement multipliées. Elles ont pris place à côté des traditionnelles inspections individuelles. Nombreux sont maintenant les inspecteurs qui ont engagé de telles procédures d’évaluation. Second constat : les évaluations d’écoles ne se sont pas seulement juxtaposées ou surajoutées aux inspections traditionnelles : elles en ont sinon révolutionné les procédures, du moins modifié profondément les formes. L’objet de la présente note est de tenter de rendre compte du mouvement par lequel on en est arrivé à ce double constat. Au risque d’être exagérément simplificateur, il nous semble que l’histoire de l’inspection individuelle s’est structurée selon trois temps majeurs. À chacun de ces trois temps, le mot et les pratiques d’inspection ont été implicitement (et parfois explicitement) référés à un concept clé différent qui en justifiait l’exercice et en exprimait la finalité majeure, telle qu’elle était attendue par le système éducatif. A) Le temps de l’inspection comme contrôle de conformité (1880-1960) Inspecter, c’est contrôler. Tout part du principe républicain d’égalité et de la compréhension qu’on s’en fait. On l’interprète comme devant entraîner chez les enseignants, partout sur le territoire national, un même respect des Instructions et des Programmes nationaux. Au regard de cette conception jacobine, l’inspection est l’acte par lequel on doit pouvoir vérifier, partout et à tout moment, la bonne application de prescriptions imposées identiquement à tous les enseignants. Il en résulte un certain nombre de caractéristiques. Elles ont fait l’image d’Épinal de l’inspection traditionnelle : si tout enseignant doit être à tout instant en phase avec les instructions, l’inspection doit pouvoir se produire "n’importe quand". La "surprise" en est donc la règle et le principe. Le bon maître est celui qui ne craint pas d’être surpris... Le bon inspecteur arrive toujours à l’improviste, presque en cachette. Il surprend le bon maître comme le mauvais… ; la norme est le credo de l’inspection. L’inspecteur se félicite du fait qu’à chaque instant, il pense pouvoir dire que tous "ses" CP ou tous ses CM2 font, qui la séance de lecture, qui, celle de conjugaison, etc. qu’il a lui-même érigées en bréviaire. Dès lors, l’emploi du temps, dans cette économie de l’homogène, est une obligation sacrée. Elle n’est pas la seule. Le souci de normalité est en effet au moins triple : il porte sur les élèves, il porte sur le temps scolaire, il porte sur les contenus d’enseignement. Triple objet d’investigation : le registre d’appel vérifie le contrôle des effectifs, l’emploi du temps vérifie les équilibres disciplinaires, le cahier journal vérifie les progressions ; quant à l’acte d’inspection lui-même, il est régi et bordé par deux impératifs dont le respect scrupuleux fait la compétence et la considération de l’inspecteur : voir juste, d’une part, transcrire juste, d’autre part : ce sont là les deux principales compétences qu’une inspection doit mettre en œuvre. Ainsi va-t-on ce faisant, sans aucune solution de continuité, de l’individualité cellulaire de chaque enseignant dans sa classe au sommet de la pyramide, l’Inspecteur d’académie, représentant de la politique ministérielle dans son département. Pas de place pour quelque échelon intermédiaire que ce soit, l’école, la commune… où s’élaboreraient des stratégies adaptées à leur environnement. L’institution fonctionne comme un bloc, sur le registre du même. École supérieure de l'éducation nationale

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La notation des enseignants en découle. Elle formule le degré de conformité de chacun à l’identique adhésion attendue de tous. B) L’inspection individuelle, temps de formation privilégié Le modèle change à partir des années 60. On en connaît les raisons sociologiques, culturelles, institutionnelles. Quel que soit le registre, on se plaît à découvrir qu’il ne suffit pas d’appliquer une norme pour être efficace. Le normatif ne saurait saturer le qualitatif. D’où l’importance considérable accordée aux méthodes pédagogiques et plus seulement aux prescriptions. Dès lors, l’inspection change de finalité. Le mot clé auquel on la réfère cesse d’être le mot contrôle. Il devient celui de formation. C’est la grande période des réformes. Mathématiques modernes, rénovation de la pédagogie du français, pédagogie d’éveil, etc. Comment enseigner efficacement ? Comment motiver, faire découvrir, fixer au mieux les notions ? Voilà les problématiques majeures. Pour quel défi ? Plus de 50% des élèves arrivent à l’époque avec du retard à la fin de l’école élémentaire. On prend conscience que ce n’est pas en se contentant de contrôler qu’on changera cela. La formation devient donc le maître mot. La formation initiale des enseignants est rallongée, la formation continue fait son apparition. L’inspection ne pouvait évidemment être soustraite à cette vaste évolution. Aussi, l’épouse-t-elle, et l’épousant, change de finalité, et donc de forme. On cesse de lui trouver une légitimité suffisante dans le contrôle de conformité. Elle devient un acte de formation personnalisée, et donc majeur, destiné à améliorer les pratiques des enseignants. Il en résulte que les caractéristiques de l’inspection traditionnelle, telles qu’on les a analysées dans la première période, s’évanouissent peu à peu : en premier lieu, puisque l’inspection est un acte de formation, il devient inopportun de pratiquer la visite surprise. L’attention à la personne prend le pas sur l’obéissance à la norme. Aussi non seulement on prévient de sa visite mais on commence à juger utile de faire préparer l’inspection par l’inspecté, par le moyen, par exemple, de questionnaires préparatoires ; en second lieu, la compétence majeure attendue de l’inspecteur change. Voir juste, c’était bien, mais restituer juste, c’est beaucoup mieux. L’entretien devient donc la part centrale de l’inspection et la part qu’on va lui accorder ne va pas cesser de croître ; enfin, troisième évolution, de façon plus globale, les inspections cessent d’être sous-tendues par le souci de vérifier la prise en compte d’exigences plurielles. Tout au contraire, l’inspection devient un temps privilégié au cours duquel on interroge la cohérence dans la mise en œuvre des différentes prescriptions disciplinaires, méthodologiques ou éducatives imposées au maître. Le souci synthétique de la cohérence globale vient équilibrer celui du contrôle des exigences plurielles. C) L’inspection individuelle, temps d’échange et d’interpellation partagée (1990-2010) Sous la double influence de la notion de projet, - projet d’école, de cycles, de réseaux, etc.- d’une part, et de l’émergence d’une culture de l’évaluation d’autre part, les dispositifs d’évaluation des enseignants vont connaître à partir des années 1990 une nouvelle évolution, avec une accélération sensible depuis 2005. Le concept de référence majeur devient celui de complexité. Dans le droit fil des théories systémiques qui se développent au même moment (voir en particulier l’influence d’Edgar Morin), on reconnaît que tout résultat (résultat constaté comme résultat espéré) ne saurait jamais être attribué à une cause unique. Toute situation singulière ne saurait recevoir de réponse prédéterminée. Partant de là, la possibilité de tout progrès dans l’amélioration des performances du système éducatif suppose avant tout un croisement des analyses et des hypothèses. Il en résulte que deux changements simultanés se produisent. L’un oriente vers les évaluations d’écoles, l’autre vers un nouveau type d’interrogation des maîtres lors des inspections individuelles. Le premier École supérieure de l'éducation nationale

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changement tient à la conviction progressive que, dans un système, une performance n’est jamais seulement le résultat d’interventions individuelles, ne serait-ce que parce qu’elle est toujours le résultat d’une cohérence réalisée entre ces interventions individuelles. Le croisement des regards devient donc une capacité fondamentale à développer (et donc à évaluer) chez les maîtres. L’intérêt des évaluations d’écoles en découle. Mais encore faut-il que cette évolution s’accompagne chez chaque maître individuellement d’un nouveau type d’interrogation de sa pratique, ainsi que de nouvelles modalités d’analyse de sa classe et des difficultés spécifiques de ses élèves. C’est ce qui explique que, dans l’inspection individuelle, on va passer de l’inspection formation à l’inspection experte. Certes, le souci qualitatif y reste une préoccupation comme il l’était dans la période précédente mais il se débarrasse désormais de sa prétention modélisatrice qui le rattachait encore, malgré tout, à une problématique traditionnelle de type normatif. L’inspection individuelle change de ce fait de centration et, avec ce changement de centration, elle change sa méthodologie. Il s’agit certes toujours de vérifier des conformités. Il s’agit certes encore de susciter ou d’encourager des changements pédagogiques. Mais il devient surtout primordial d’évaluer comment et pourquoi les enseignants pensent et organisent la pluralité de leurs responsabilités, dans leur diversité mais aussi dans leur nécessaire cohérence, au regard des enfants qui leur sont confiés. Dès lors, les outils de pensée et d’analyse de la classe deviennent l’objet d’attention majeure de l’ "inspecteur". Nous mettons ici des guillemets à inspecteur, car l’inspection n’est plus seulement une observation de classe mais devient avant tout une expertise, une expertise d’un autre niveau d’expertise. Les outils, les indicateurs, les dispositifs, deviennent les objets majeurs d’interrogation. La question majeure devient celle de la pertinence. Est-ce pertinent ? Comment le maître évalue-t-il ses élèves ? En quoi les performances des élèves l’ont amené à infléchir sa pratique ? L’inspection devient un partage : celui d’une expertise à améliorer sans cesse dans l’échange des interrogations et des hypothèses. Ainsi s’éclaire la cohérence des deux constats formulés au début de cet article. On comprend que l’inspecteur ne puisse plus maintenant se limiter à des inspections individuelles pour évaluer le bon fonctionnement du système éducatif et qu’il ait donc aussi à évaluer le fonctionnement des équipes comme telles. En même temps, on comprend qu’il ait tout autant à s’attacher lors des inspections individuelles à évaluer l’aptitude des enseignants à une authentique pratique d’expertise. Dans un cas comme dans l’autre, aussi bien dans les temps de responsabilité individuelle que dans les moments de responsabilité collective, c’est au même but qu’on s’attache : vérifier, pour l’améliorer, l’expertise si délicate de la complexité des difficultés singulières des élèves, car c’est là que se joue en définitive, pour les individus comme pour les équipes, la capacité du système éducatif dans son ensemble à améliorer significativement ses performances globales.

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Document 19 - Protocole élaboré par l’inspectrice d’académie-DSDEN de la Manche, en lien avec les IEN de ce département, afin de mieux organiser le déroulement des visites effectuées dans les écoles par les IEN Académie de Caen Inspection académique de la Manche Circonscription de… Janvier 2009

RAPPORT D’INSPECTION DU NOM – Prénom :

Grade :

Date de naissance : Échelon : Date de nomination dans l’école : Précédente inspection le :

Années de service au 1.9.2008 : Promu(e) le : Note :

Contexte d’enseignement : ÉCOLE :

COMMUNE :

CYCLE :

NOMBRE DE CLASSES :

CLASSE :

Les élèves : Nombre d’élèves inscrits : Pourcentage de présence :

AVS-EVS :

Nombre d’élèves présents :

Répartition Situation Niveaux Retard Âge Avance RASED Autre 1 an normal 1 an

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Appréciation générale de l’Inspecteur de l’Éducation Nationale :

Observations de Madame l’inspectrice d’académie

Note : À le L’inspectrice d’académie,

Vu et pris connaissance Date

Résultats des élèves dans l’école Évaluation GS-CP :

Évaluation CE1 :

Évaluation CM2 :

Élèves entrés en 6e Nombre d’élèves entrés en 6e

Nombre d’élèves maîtrisant les compétences de base en français et mathématiques

2005 2006 2007 Nombre d’élèves entrés en 6e avec au moins un an de retard Nombre d’élèves entrés en 6e ayant obtenu en langue vivante le niveau A1 du cadre de référence européen Nombre d’élèves de l’école apprenant telle langue vivante Nombre d’élèves entrés en 6e ayant obtenu le niveau 1 du B2i

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Taux de redoublement (nombre de maintiens prononcés en juin 2008/ nombre d’élèves) Nombre d’élèves handicapés dans l’école Orientations du projet d’école

Résultats des élèves dans la classe Bilan de compétences des élèves (au jour de l’inspection) Progrès réalisés (depuis le début de l’année)

Modalités d’accompagnement des élèves qui rencontrent des difficultés

Actions spécifiques, articulées au projet d’école

Actions pédagogiques Organisation de l’espace

Affichages

Préparation

Travaux des élèves

Mise en œuvre des programmes

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Séquences observées Séquence 1 Ne correspond pas aux attentes

À améliorer

Satisfaisant

Excellent

Ne correspond pas aux attentes

À améliorer

Satisfaisant

Excellent

Préparation de la séance Mise en œuvre du contenu Pertinence des choix pédagogiques et didactiques Gestion du temps, de l’espace et de la situation de classe Qualité des dispositifs permettant aux élèves une entrée efficace dans l’activité Diversification des situations, des modalités, des contenus, des stratégies Qualité des échanges, des interactions Régularité des relances auprès des élèves susceptibles de décrocher Efficacité des modalités d’aide Efficacité de la séquence

Commentaire :

Séquence 2

Préparation de la séance Mise en œuvre du contenu Pertinence des choix pédagogiques et didactiques Gestion du temps, de l’espace et de la situation de classe Qualité des dispositifs permettant aux élèves une entrée efficace dans l’activité Diversification des situations, des modalités, des contenus, des stratégies Qualité des échanges, des interactions Régularité des relances auprès des élèves susceptibles de décrocher Efficacité des modalités d’aide Efficacité de la séquence

Commentaire :

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Administration de la classe Ne correspond pas aux attentes

À améliorer

Satisfaisant

Excellent

Taux de fréquentation Tenue des registres Hygiène et sécurité Qualité des documents/documentation Affichage mural Trace écrite des élèves Utilisation des TIC par les élèves Trace écrite du maître (préparation, progression, outils repères) Usage des TICE par le maître dans son travail pédagogique

Commentaire :

Entretien-Conseils :

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Document 20 - "Le pilotage pédagogique de l’EPLE" Résumé d’un rapport établi par les correspondants de l’IGEN et de l’IGAENR pour l’académie de Nice Juillet 2007 Neuf EPLE de l’académie de Nice, choisis par accord entre les IA-DSDEN et les représentants des corps d’inspection, ont été visités par les correspondants académiques des inspections générales (IGEN et IGAENR) et les corps d’inspection en 2006-2007. Un questionnaire élaboré par les correspondants, à partir du protocole de suivi permanent des EPLE de l’IGAENR complété par des aspects pédagogiques, avait été soumis aux chefs d’établissement. Analyser la stratégie de l’EPLE et cerner au plus près le rôle de pilote du chef d’établissement en mettant l’accent sur le pilotage pédagogique résument les objectifs de ce questionnement. Pour les corps d’inspection, il s’agissait de faire un état des disciplines et d’essayer de mesurer l’impact, au sein des équipes enseignantes, des décisions prises par le chef d’établissement dans le champ de la pédagogie et de la vie scolaire. I. Le pilotage de l’EPLE : une notion diversement interprétée par les chefs d’établissement qui doit impérativement être précisée, voire codifiée I.1. "Piloter", un verbe qui, sans être nouveau pour les personnels de direction, ne fait pas toujours sens dans leur quotidien dense et divers Les questions relatives au pilotage auxquelles ont répondu les chefs d’établissement et leurs adjoints (en lycée) peuvent être résumées en quatre points : 1. 2. 3. 4.

cette expression fait-elle sens chez le chef d’établissement ? si elle fait sens, y a-t-il ou non une volonté de piloter ? si pilotage il y a, cette notion a-t-elle ou non de l’importance au quotidien ? si le pilotage existe, a-t-il ou non un impact sur la vie de l’EPLE, et notamment auprès de l’équipe enseignant ?

Il ressort des réponses aux questions posées, que les chefs d’établissements sont avant tout des hommes et des femmes qui ont la volonté, à des degrés divers bien sûr, de diriger, de montrer qu’ils sont investis d’une autorité auprès de l’ensemble des membres et partenaires de l’EPLE. Cette fonction de direction est dorénavant acquise et souvent mise en avant comme étant fondamentale. I.2. Une tradition de direction de l’EPLE, au sens d’affirmation de l’autorité, intériorisée par les chefs d’établissement à la différence du pilotage, moins immédiatement visible "Diriger" et "piloter" sont deux verbes qui, au regard des missions du chef d’établissement, n’ont pas la même signification : Diriger, c’est affirmer une autorité, prendre des décisions, "faire aller selon une manière, un ordre pour obtenir un résultat" selon le Robert ; nous ajouterons "montrer" ! Piloter, c’est se fixer un but et se donner les moyens d’y arriver en mobilisant la communauté concernée par l’objectif, c’est plus "démontrer" que "montrer" ! Il s’agit de deux attitudes complémentaires qui, au terme des témoignages recueillis dans les EPLE, ne sont pas encore vécues comme telles par les chefs d’établissements. "Le processus de pilotage pédagogique est essentiellement un pilotage solitaire qui oscille entre l’injonction et la recherche de l’adhésion"83.

83

Propos d’un IEN-ET exerçant dans l’académie de Nice. École supérieure de l'éducation nationale

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La notion de pilotage est une notion encore floue chez les chefs d’établissement. Son importance n’est pas perçue, ou mal perçue. II. Bases et outils du pilotage II.1. Les bases du pilotage pédagogique présentent de fortes disparités Piloter un EPLE implique en premier lieu que soit établi un projet d’établissement et son calendrier de réalisation, document que tout chef d’établissement est invité à bâtir en liaison avec les équipes enseignante et de vie scolaire et/ou mettre en œuvre lorsqu’il arrive dans un établissement. Or, force est de constater que la grande diversité des situations sur ce point ne permet pas de dire que le projet d’établissement constitue une charte pour l’action, un "projet vivant"84. Les priorités du projet d’établissement dans le domaine pédagogique sont affirmées mais plus rarement hiérarchisées et mises en forme pour les rendre opérationnelles Dans la courte histoire des EPLE, le pilotage pédagogique est la notion la plus récente ; s’appliquant à un ensemble de décisions dont il est difficile de mesurer les effets à court terme, et ne résultant pas de la définition d’une attitude de direction au sens strict du terme, c’est celle qui offre le moins de "prise directe". Notion qui, en outre, ne fait pas l’objet d’instructions au chef d’établissement et doit se lire entre les lignes d’une circulaire de rentrée. Le pilotage pédagogique, c’est d’abord une volonté exprimée puis partagée avec ceux qui ont pour mission d’enseigner ou d’éduquer (les acteurs de la vie scolaire)85. Il serait utile de comprendre les réticences des chefs d’établissement à investir plus avant le champ de la pédagogie86 et il est utile de noter les initiatives qui, au sein du projet pédagogique, relèvent du chef d’établissement. Le CPE et le professeur de documentation doivent être associés aux choix pédagogiques lorsqu’ils existent et l’orientation n’est pas optimisée dans les EPLE. II.2. Les outils du pilotage pédagogique II.2.1. Les outils traditionnels L’offre d’enseignement et la répartition des services L’offre d’enseignement, telle qu’elle est présentée, témoigne en premier lieu de la volonté de répondre à des demandes et d’affirmer des choix qui ont une incidence sur la pédagogie. Ces choix, qui relèvent de compétences traditionnelles du chef d’établissement au sens où elles constituent le cœur du métier, ne sont pas anodins. Ils donnent une couleur à l’offre d’enseignement et, par voie de conséquence, interagissent sur la pédagogie. Les dispositifs de soutien Ils traduisent l’idée qu’un chef d’établissement se fait de l’égalité des chances. De ce point de vue, le travail mis en œuvre au sein des réseaux ambition réussite (RAR) de l’académie, et les projets personnels de réussite éducative (PPRE), ont un caractère d’exemplarité. Le suivi des enseignants par le chef d’établissement et les corps d’inspection ne permet pas de dégager des typologies marquées Le suivi de l’offre d’enseignement et des pratiques quotidiennes qu’elle génère, est un indicateur de l’état de la pédagogie au sein de l’EPLE. "Le projet "document" constitue un référent sur lequel peut s’appuyer le pilotage, le suivi, et donc la régulation du projet "vivant" (c’est à dire l’action)", selon l’expression de l’IEN-ET cité ci-dessus. 85 Il y a nécessité de sensibiliser les personnels de vie scolaire, lors de leur formation, à l’intérêt du projet pédagogique et à la place qu’ils auront à occuper en son sein. 86 Ce champ est-il suffisamment défini et a-t-on demandé clairement aux chefs d’établissement de s’y investir ? 84

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II.2.2. Les nouveaux outils Le conseil pédagogique trouve petit à petit sa place au sein des EPLE de l’académie La mise en place du conseil pédagogique est une belle occasion pour le chef d’établissement, d’une part, d’affirmer une volonté sans qu’elle soit remise en cause à quelque titre que ce soit par l’équipe enseignante, et, d’autre part, d’engager/affermir un rôle de pilote de la pédagogie. Avec le conseil pédagogique, le chef d’établissement dispose d’un levier, probablement le premier, né d’un texte réglementaire. Il peut en jouer mais doit, pour cela, se montrer bon pilote. Les TICE méritent une attention plus soutenue car elles peuvent constituent des outils pertinents du domaine pédagogique. Elles constituent des outils précieux qui peuvent faciliter l’entrée dans le champ pédagogique pour le chef d’établissement. Les indicateurs du programme annuel de performance de l’établissement doivent être des référents fiables et opérants. Ils constituent le cœur du tableau de bord, outil fort du pilotage de l’EPLE Il reste à inscrire les indicateurs dans la vie de l’établissement, c'est-à-dire au sein d’un tableau de bord qui constitue un référent quotidien pour le chef d’établissement et, idéalement, l’outil premier du pilotage de l’EPLE. Mais tout se tient ; les indicateurs n’auront de pertinence pour le chef d ‘établissement que s’ils traduisent une réalité identifiée, une "matière" pilotée, laquelle devra, au préalable, avoir été adoptée et intériorisée par les équipes de l’EPLE. III. Les profils de pilotes III.1. Le pilotage assumé/équilibré Ce type de pilotage fait la part des choses entre le temps du dialogue, de la concertation, et le temps de l’action qui n’exclut pas pour autant la réflexion. Il repose sur un projet d’établissement connu, vivant, auquel il est fait référence, et parsemé d’indicateurs qui permettent d’évaluer, chemin faisant, les actions entreprises. III.2. Le pilotage délégué Le chef d’établissement délègue à son adjoint la responsabilité de piloter la pédagogie considérant qu’il est confronté à d’autres tâches jugées plus fondamentales. Deux formes de délégation : la première qui consiste à déléguer le pilotage mais à se donner les moyens de le contrôler et de le réguler. La seconde qui consiste à déléguer pour s’en dessaisir voire s’en désintéresser. III.3. L’absence de pilotage Pas de projet d’établissement, pas de projet pédagogique et pourtant l’établissement fonctionne, obtient des résultats. L’absence de pilotage pédagogique peut être masquée par des résultats aux examens se situant dans la moyenne académique et par le fait que, sur d’autres aspects de la vie de l’EPLE, il n’est pas noté de problèmes particuliers. Un établissement non dirigé peut très vite dériver dangereusement et voir des situations conflictuelles se développer, alors qu’un EPLE non piloté pédagogiquement peut ne pas attirer l’attention des services académiques et rester un certain temps dans cette situation. Seul, un bilan par les inspecteurs des projets disciplinaires et pluridisciplinaires mis en regard du projet d’établissement, permettra de constater ou non l’absence de pilotage. IV. Les préconisations La mise en œuvre d’un dialogue de gestion entre le rectorat et les EPLE nécessite l’existence d’une synthèse de la situation pédagogique de l’EPLE que seuls peuvent lui apporter les corps d’inspection. Il y a donc nécessité de redéfinir/repréciser le rôle et la place des corps d’inspection dans l’établissement École supérieure de l'éducation nationale

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avec comme objectif, le pilotage pédagogique partagé, c'est-à-dire une mutualisation des forces, dans le champ pédagogique, entre le chef d’établissement et l’inspecteur. Il ne s’agit pas, bien évidemment, de restreindre les missions traditionnelles de l’inspecteur au sein de sa discipline mais, au contraire, de donner à sa présence au sein de l’établissement un sens plus fort. Il est temps de considérer que la visite d’un inspecteur en EPLE pour l’inspection d’un enseignant, doit être suivie d’un temps de concertation et de réflexion avec le chef d’établissement relatif au projet pédagogique et à sa mise en œuvre, au-delà de la place occupée par la discipline de l’inspecteur. Ainsi, lors des visites traditionnelles d’inspection, serait-il judicieux que les inspecteurs : procèdent à un état de la discipline avec l’ensemble de l’équipe disciplinaire, réunissent l’équipe pédagogique en présence du chef d’établissement, aient un entretien avec le chef d’établissement sur l’état de la discipline et sa contribution au projet pédagogique87, apprécient l’implication des enseignants dans la dynamique du projet d’établissement. Ceci permettait d’établir un dossier d’établissement qui évoluerait au fur et à mesure des contributions des inspecteurs et qui constituerait un document de référence utile au chef d’établissement, au recteur et aux inspecteurs d’académie, notamment pour l’établissement des programmes annuels de performance d’établissements, mais aussi pour une meilleure connaissance des EPLE particulièrement précieuse pour la mise en œuvre du dialogue de gestion.

87

Jacques BADET

Alain BRUNET

IGEN

IGAENR

Un protocole d’inspection devra être adopté et utilisé par tous les inspecteurs. École supérieure de l'éducation nationale

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Document 21 - Audits d’établissements à visée participative

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Document 22 - "Une évaluation des compétences au service de la politique pédagogique de l’établissement" Isabelle ROBIN88, proviseure adjointe du lycée polyvalent Gaston Bachelard à Chelles (77), académie de Créteil Janvier 2010 Évaluation des élèves en fin de 3e : analyse des résultats Cette opération s’inscrit dans la réflexion globale que mène le lycée Gaston Bachelard depuis quelques années sur la difficulté scolaire et le moyen de lui apporter réponse. Antérieurement, un repérage avait ainsi été mis en œuvre des compétences des élèves en mathématiques, opéré en fin de troisième. Le dispositif exposé ici reprend et complète cette proposition par un protocole ciblant les compétences acquises dans le domaine de la lecture. La question globale est celle de la mesure des acquis des élèves. Elle repose sur le constat de la difficulté éprouvée par les équipes éducatives lorsqu’il s’agit, dès la rentrée, de prendre en compte les compétences de chacun des élèves (que savent-ils faire, quels sont leurs points forts et faibles ?) et de mesurer, en fin d’année, le chemin accompli. Au niveau des établissements, il s’agit de connaître plus finement les populations d’élèves entrant et sortant : d’évaluer, pour les collèges, le degré de maîtrise atteint dans les compétences attendues et, pour les lycées, les compétences observées à l’entrée en seconde. Dans chacun des deux cas, cette connaissance doit permettre de corriger les dispositifs en place ou d’en mettre en œuvre de nouveaux dans un souci d’efficacité de l’action éducative. Le périmètre de l’évaluation est constitué par l’ensemble des collèges et lycées de secteur, soit trois lycées publics dont un professionnel, et huit collèges, pour un total de 700 observations environ. I - Matériel de l’évaluation 1. Les protocoles L’évaluation est constituée d’une épreuve en mathématiques de 37 items, d’une épreuve en lecture de 25 items et d’un logiciel permettant le traitement des données. Le logiciel en question est une adaptation de JADE, à l’origine conçu pour l’analyse des évaluations du primaire et d’entrée en sixième 89, mais qui a ici été travaillé pour accepter les données (saisie des compétences, des items et des codages) de cette évaluation et en rendre le traitement possible. Chaque protocole est constitué d’items de difficulté variable. En lecture, certains permettent d’identifier la très grande difficulté (items de prélèvement d’information, par exemple) et connaissent des seuils de réussite élevés (88,5%), tandis que d’autres, mesurant la compréhension fine des textes ou relevant de l’argumentation (classer les arguments d’un texte), se révèlent extrêmement discriminants (16,5%). En mathématiques, l’item le moins réussi propose de calculer des puissances (15,5% de réussite) et le plus réussi vérifie la lecture d’un graphique (91,5%). Précédemment chef du bureau de la formation des enseignants à la direction générale de l’enseignement supérieur (DGES) et, auparavant, professeur agrégé, chargée de mission au bureau de l’évaluation des élèves de la DEP. 89 Précision : le logiciel JADE ("J’aide aux évaluations") a été conçu en 1999-2000 par Jacqueline Deschamps, professeur puis ingénieur de recherche, à l’époque chargée de mission au sein de la Mission de l’évaluation de la DEP, par la suite chef du bureau de la qualité, des méthodes et des outils dans la sous-direction des systèmes d’information au STSI (Service des technologies et des systèmes d’information). 88

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En toute logique, ces différents degrés de difficulté devraient être pris en compte dans le calcul de la réussite des élèves, par un système de pondération, par exemple. En l’absence d’un tel système, une attention particulière a été portée aux résultats des élèves lorsqu’il s’est agi de distinguer la difficulté réelle d’une possible désinvolture à l’égard de l’évaluation. 2. Protocoles et socle commun de connaissances et de compétences Chaque protocole est calé sur le socle commun ; toutes les compétences du socle, cependant, ne sont pas représentées. En ce qui concerne la maîtrise de la langue, par exemple, la lecture orale ou la lecture longue ne sont pas envisagées dans le cadre d’une évaluation telle que celle qui est décrite. Par ailleurs, il ne s’agit pas à proprement parler d’évaluer dans le champ d’une discipline "lettres" ou "français" telle qu’enseignée au collège et au lycée, mais davantage de décrire la capacité des élèves à accéder aux textes narratifs ou argumentatifs. En cela, il se met au service de l’ensemble des disciplines. En mathématiques, les items testent les savoirs jugés indispensables pour profiter pleinement des enseignements dispensés au lycée et se révèlent plus purement disciplinaires. 3. Conditions de passation En 2008-2009, les collèges du secteur ont organisé l’évaluation et acheminé les protocoles et résultats aux lycées concernés. Le lycée Bachelard a ainsi recueilli 322 observations donnant lieu à une première analyse. Au cours de l’année, il a été décidé que les épreuves se dérouleraient entre avril et mai, que la durée de passation pourrait être assouplie et que les deux heures consacrées aux épreuves pourraient éventuellement faire l’objet de sessions distinctes. Les conditions de passation n’ont donc pas été rigoureusement les mêmes d’un établissement à l’autre, ce qui est susceptible de biaiser les résultats. Il a par ailleurs été décidé de collecter l’ensemble des résultats sur un fichier unique qui serait transmis au lycée Bachelard pour le traitement des résultats. 4. Recueil des données En 2009-2010, l’ensemble des collèges a organisé l’évaluation. Le lycée Bachelard a été destinataire de l’intégralité des résultats, une partie parvenant en septembre sous format numérique et une autre partie sous format papier. L’opération a permis de collecter 685 résultats numériques sur les 777 élèves qui composent la totalité de la population scolaire du secteur. Le recueil des observations n’est donc pas exhaustif : d’une part, chaque lycée propose des options qui attirent des élèves hors secteur ; pour des raisons techniques, d’autre part, les groupes d’élèves une fois constitués ne peuvent être modifiés. Ainsi, il a fallu, à la mi-septembre, arrêter leur constitution et admettre par conséquent l’absence de données concernant certains élèves. Tableau 1 Classe Seconde 1 Seconde 2 Seconde 3 Seconde 4 Seconde 5 Seconde 6 Seconde 7 Seconde 8 Seconde 9 Seconde 10 Seconde 11 Seconde 12 Total

Élèves manquants 9 9 5 6 6 5 6 6 10 7 4 8 81

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Au total, 77,3% des élèves effectivement inscrits à Bachelard ont suivi l’évaluation. Cette proportion est moindre dans les deux autres établissements publics. En effet, elle est de 46% en ce qui concerne le lycée X (86 élèves sur les 187 inscrits ont suivi l’évaluation) et de 23% pour le lycée Y (59 élèves sur les 252 inscrits). II - Résultats des collèges Tableau 2 Lecture Collèges A B C D E F Moyennes

Moyenne 55,4 50,9 52,1 59,9 58,8 56,9 55,6

Médiane 56 52 52 64 58 60

< 40% 16,8 17,4 23,2 12 18,8 18,9 17,85

Mathématiques > 70% 17,9 9,7 20,8 29,3 31,3 32,6 23,6

Moyenne Médiane 51,4 54,1 45,4 43,2 44,1 43,2 47,6 48,6 48,9 50 46,8 45,9 47,3

< 40% 31,4 40,2 45,6 38,5 29,1 32,6 36,2

> 70% 21,3 10,9 12,8 15,7 14,6 9,9 14,2

Le résultat individuel des collèges apporte des informations qu’il appartient aux équipes éducatives d’exploiter. On constate une forte hétérogénéité, puisque 9 points séparent le meilleur score du plus faible en lecture. Cet écart n’est plus que de 6 points en mathématiques, mais il reste significatif. Cependant, on constate que le collège qui détient la moyenne et la médiane les plus basses n’a pas, pour autant, en lecture tout au moins, le plus fort pourcentage d’élèves en difficulté ( 70%

9,1

35,6

56 40

5,8 45,8

13,9 8,5

56

17,7

23,6

18,7 32,6 62,5

25,7 10,6 0

39,4

15,9

Mathématiques 56,8 45,9 29,7 45,9

En première analyse, on peut ainsi observer les deux LEGT (Bachelard et X) se distinguent par une moyenne supérieure à l’ensemble des élèves de l’évaluation, quels que soient les items, dans les deux disciplines. En ce qui concerne le lycée X, on remarque un nombre relativement faible d’élèves en difficulté en lecture, mais beaucoup plus important en mathématiques. Le lycée professionnel Y, quant à lui, recueille une population d’élèves en difficulté sur les deux disciplines. On note tout de même une proportion d’élèves se révélant relativement à l’aise dans le domaine de la lecture et pour lesquels on peut émettre l’hypothèse d’une orientation davantage choisie que subie. Ultime remarque : dans les deux disciplines, la moyenne des trois établissements est inférieure à la moyenne générale obtenue par l’ensemble des évalués de troisième. Les élèves présents en troisième et qui ne sont pas actuellement scolarisés dans les trois lycées seraient donc plutôt de bons élèves. IV - Résultats du lycée Bachelard 1. Résultats des classes Les classes se révèlent de niveau relativement hétérogène, avec près d’une vingtaine de points d’écart entre la meilleure et la plus faible moyenne en lecture et 17 points d’écart en mathématiques. Ce constat est d’autant plus intéressant que les classes ont été mixées pour la première fois dans le but de mélanger les publics.

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Tableau 4 Lecture 58,7 59,5 70,4 57,3 74,2 70,2 56,8 55,8 62,1 67,5 63,1 59,4

Mathématiques 55,9 56,4 67,9 62 67,6 63,6 53,7 53,5 50,9 62 50,8 50,4

Moyenne

63,3

58,2

Score le plus élevé Score le plus bas

74,2 55,8

67,9 50,4

Seconde 1 Seconde 2 Seconde 3 Seconde 4 Seconde 5 Seconde 6 Seconde 7 Seconde 8 Seconde 9 Seconde 10 Seconde 11 Seconde 12

Option de détermination ISI ISP / MPI ISI ISP / MPI ISI ISP / MPI ISI ISP / MPI ISI / PCL PCL/ SES ISI / SES ISI / SES ISI / SES ISI /SES ISI / SES MUSIQUE / SES

2. Que savent faire nos élèves ? En lecture, l’item le plus réussi l’est à 98,2%. Le plus échoué connaît un score de 22,8% de réussite. Les élèves du lycée Bachelard sont relativement à l’aise en vocabulaire, dans les opérations de synthèse (recherche d’un titre) et de recherche d’informations, qu’elles soient explicites dans le texte support ou plus difficiles à trouver. Leur score varie naturellement en fonction du degré de difficulté de l’exercice. Les items de production d’un avis argumenté sont, en moyenne, réussis par un peu moins de la moitié des élèves. Dans le groupe des 14 items les plus échoués, on retrouve 4 items de lecture : celui qui propose d’associer les substituts à leurs référents et l’item de reconstitution d’une chronologie, mais également le classement des arguments et la formulation d’une thèse à partir de deux propositions opposées. Pour une partie non négligeable d’élèves, le domaine de l’argumentation est donc loin d’être maîtrisé, ce qui n’est pas une surprise puisque cet apprentissage ne commence réellement qu’en lycée. V - Projet du lycée Bachelard 1. Identification des élèves en difficulté À l’issue des évaluations, 62 élèves ont été repérés en difficulté : 37 élèves en lecture, 28 en mathématiques et 5 dans les deux matières. En mathématiques, le score le plus bas parmi ces élèves est de 2,7 % ; le plus haut s’élève à 29,7%. Pour la lecture, ces valeurs vont de 12% à 48% de réussite pour le score le plus élevé. La réussite moyenne en lecture de l’ensemble des élèves repérés en difficulté sur l’une des deux disciplines est de 45%, elle est de 40% en mathématiques. Tableau 5 Moyenne en lecture de l’ensemble des élèves identifiés Moyenne en lecture des élèves faibles en maths Moyenne en lecture des élèves faibles en lecture

45% 54% 38%

Moyenne en mathématiques de l’ensemble des élèves identifiés Moyenne en maths des élèves faibles en lecture Moyenne en mathématiques des élèves faibles en mathématiques

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40% 51% 23% www.esen.education.fr

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Il peut être intéressant de comparer les performances des élèves sur les deux champs interrogés. Ainsi, on se rend compte que peu d’élèves révèlent une difficulté sévère sur l’ensemble des deux protocoles. La plupart des élèves identifiés par leurs résultats dans l’une des deux matières semblent "s’en sortir" dans l’autre. Ce constat doit cependant être tempéré : en effet, si la moyenne en lecture des élèves faibles en mathématiques (54%) est relativement proche de la moyenne globale obtenue par tous les élèves à l’évaluation (55,1), elle est tout de même inférieure de près de 10 points à la réussite moyenne des élèves effectivement inscrits à Bachelard. Inversement, la moyenne en mathématiques des faibles en lecture est inférieure de 6 points à la moyenne des élèves de Bachelard. Ces élèves sont donc susceptibles de rencontrer des difficultés dans leurs apprentissages, dans les champs disciplinaires des sciences et sciences humaines. Dans le tableau suivant, les élèves identifiés en lecture sont marqués en ocre ; on a utilisé le bleu pour l’identification en mathématiques. Les élèves repérés dans les deux protocoles sont signalés en jaune vif. Tableau 6 CLASSE

Seconde 1

Seconde 2

Seconde 3

Seconde 4

Seconde 5

Seconde 6

Élèves

Lecture Moyenne classe

1. 2. 3.

44% 28% 48%

4. 5. 6. 7. 8. 9.

68% 56% 32% 44% 36% 32%

10. 11. 12.

52% 36% 44%

13. 14. 15. 16. 17. 18.

28% 52% 52% 52% 40% 28%

19. 20. 21. 22.

72% 48% 44% 48%

23. 24. 25. 26.

28% 64% 36% 32%

58,7

59,5

70,4

57,3

74,2

70,2

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Maths Moyenne classe 35% 56% 27% 27% 27% 59% 35% 45,9% 45,9 70% 27% 13,5% 70,3% 10% 27% 29,7% 64,9% 32,4% 21,6% 43% 29,7% 51% 64% 51% 59% 70%

55,9

56,4

67,9

62

67,6

63,6

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Seconde 7

Seconde 8

Seconde 9

Seconde 10

Seconde 11

Seconde 12

27. 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34.

48% 48% 44% 68% 52% 76% 32% 36%

35. 36. 37. 38. 39.

24% 52% 60% 40% 36%

40. 41. 42.

48% 36% 32%

43. 44. 45. 46. 47. 48.

60% 32% 44% 48% 48% 12%

49. 50. 51. 52. 53. 54. 55. 56.

40% 32% 56% 52% 44% 52% 76% 36%

57. 58. 59. 60. 61. 62.

76% 44% 44%

56,8

53,7

55,8

32% 29% 24% 21% 54%

53,5

62,1

56% 64,9% 70%

50,9

67,5

63,1

59,4

48% 32% Moyenne

64,9% 29% 24% 29% 27% 18,9% 35% 18%

29,7% 73% 2,7% 67% 64,9% 51% 54% 59% 27% 8% 73% 48% 13,5% 18% 24% 40% 24%

62

50,8

50,4

27% 40% 63,3

58,2

Les élèves identifiés sont capables de comprendre globalement un texte et de réussir des synthèses. La plupart réussissent également des questions portant sur le vocabulaire. S’ils sont également capables de prélever des informations simples, les informations délivrées implicitement par les textes leur posent néanmoins des problèmes. Ils éprouvent des difficultés dans les opérations de traitement de l’information prélevée (rétablissement d’une chronologie, identification des référents aux substituts d’un texte). Enfin, leurs plus grandes difficultés relèvent de la production de texte et de l’argumentation (donner un avis argumenté, classer les arguments d’un texte, formuler une thèse).

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2. Prise en charge des élèves en difficulté Les élèves identifiés sont pris en charge dans le cadre d’un dispositif spécifique piloté par les enseignants et animé par les assistantes pédagogiques. Ils sont tenus de participer au soutien hebdomadaire à raison de 1 heure par semaine et par discipline. Par ailleurs, ces élèves sont invités à participer aux sessions de travail pendant les vacances organisées par l’établissement. À la fin de l’année scolaire, une nouvelle passation permettra d’évaluer les progrès de ces élèves dans les compétences mesurées en fin de troisième. Cette nouvelle saisie sera en outre l’occasion d’améliorer l’ensemble du dispositif de soutien. Le protocole sera donc repris et augmenté d’une épreuve nouvelle relevant d’un champ disciplinaire différent de celui du français. À de très rares exceptions près, les résultats du premier trimestre ont confirmé les difficultés identifiées par les protocoles. On ne saurait naturellement s’en tenir à ce simple constat : la lecture des résultats obtenus aux différents items a en effet provoqué la surprise des équipes d’enseignants et a modifié quelques représentations. À titre d’exemple, la factorisation, qui était considérée comme maîtrisée, au moins par les bons élèves, est désormais perçue comme source de difficultés pour la plupart d’entre eux. Il en va de même des compétences attendues d’un lecteur habile, à présent mieux perçues par beaucoup de professeurs. C’est naturellement au sein des disciplines et dans le cadre des apprentissages que les questions suscitées par ce dispositif doivent trouver réponse.

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Document 23 - Formation continue et pilotage pédagogique : quelle perception les différents acteurs du système ont-ils de la formation continue ? Catherine RÉGNIER, IA-IPR d’histoire-géographie90 Mai 2010 Quelle perception ont de la formation continue des enseignants les différents acteurs du système éducatif que sont les inspecteurs du premier et du second degré, les chefs d’établissement et les enseignants eux-mêmes ? Et en quoi peut-elle représenter un levier pour le pilotage pédagogique ? C’est à essayer de répondre à cette double interrogation que s’attache la présente note. Les données utilisées à cet effet ont été recueillies par le bureau de l’évaluation des politiques éducatives et des expérimentations de la DEPP91 ; elles s’échelonnent sur dix années - 1999-2009 - et font appel à deux types de sources : une note écrite à partir des résultats d’une étude réalisée en 2005 à la demande du cabinet du Ministre. Dans ce cadre, 734 IEN chargés du premier degré, 1513 IA-IPR et IEN chargés de l’enseignement professionnel, ainsi que 1622 chefs d’établissement (de collège, LEGT et LP) avaient été interrogés au début de l’année 2005 sur leur perception de la formation initiale et continue des enseignants ; une note synthétique élaborée à partir d’une douzaine d’études produites sur la période 19992009, dont ont été extraites des données relatives à la perception des enseignants (17 680 au total) de la formation continue. Ces différentes études ont porté sur des pratiques d’enseignement (histoire-géographie, éducation civique et éducation juridique et sociale, éducation physique et sportive et sport scolaire, mathématiques), sur des pratiques de pédagogie générale (place et rôle de l’écrit et de l’oral en classe, pratiques d’évaluation), et sur des pratiques mises en œuvre dans le cadre d’enseignements spécifiques collectivement pris en charge par les équipes pédagogiques (pratiques d’orientation, éducation à la santé et à la sexualité, éducation aux médias) ou faisant appel à des intervenants venus d’autres horizons (dispositifs de l’action artistique et culturelle). Conformément aux missions du bureau de l’évaluation des politiques éducatives et des expérimentations de la DEPP, les études prises ici en considération peuvent aussi concerner les modalités d’appropriation et d’utilisation de ressources diverses par les enseignants (attitudes des enseignants vis-à-vis des TIC) ainsi que leur représentation des obstacles qui peuvent affecter la réussite des élèves (représentation de la grande difficulté scolaire). De l’extraction des réponses qu’ont pu fournir les acteurs concernés à des questions portant sur leur perception de la formation continue, on peut tirer des informations : sur les modalités de formation proposées, sur les contenus déployés, sur le degré de satisfaction des bénéficiaires, et sur leurs attentes. Ces éléments ont été fournis par les répondants dans le cadre de questions fermées ou, moins souvent, de questions ouvertes. On notera que le discours recueilli dans le cadre de questionnaires déclaratifs est doublement subjectif : dans ce qu’il exprime, d’une part, et dans la façon dont il est exprimé, d’autre part ; néanmoins, les informations qu’apportent ces travaux sont vraiment de nature à nourrir la réflexion sur ce sujet. IA-IPR d’histoire-géographie, précédemment chef du bureau de l’évaluation des politiques éducatives et des expérimentations à la DEPP de 1998 à 2010 ; Catherine Régnier a enseigné pendant plusieurs années au LEGT d’Aulnay-sous-Bois (93) avant de travailler à la direction des lycées et collèges (DLC), au sein du bureau des innovations pédagogiques et des technologies nouvelles, puis au bureau des programmes et de l’animation pédagogique. 91 Bureau B4. 90

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Le développement de la formation collective sur site Si la moitié environ des IEN du premier degré interrogés jugent efficace la formation individuelle des maîtres, ils sont tout aussi nombreux à préférer encourager les candidatures collectives, ou sur site, qu’ils estiment être plus pertinentes encore, surtout si elles portent sur les disciplines enseignées et sur les méthodes pédagogiques qui leur sont associées. Les IA-IPR, pour leur part, soulignent que la formation des enseignants concerne plus le collège que le lycée (LEGT et LP), et davantage l’enseignement public que l’enseignement privé. Les résultats des travaux utilisés dans cette note attestent de ce qu’en moyenne, dans une discipline donnée, la moitié des enseignants ont suivi une formation au cours de la période de cinq années 2004-2009. 80 % des inspecteurs du second degré précisent que les enseignants qui refusent d’aller en formation estiment n’en avoir pas besoin, ne souhaitent pas modifier leur façon de faire (ce que pensent sept inspecteurs sur dix), ou encore qu’ils expriment des doutes quant à l’efficacité des formations proposées (six inspecteurs sur dix). Aux dires des inspecteurs du premier comme du second degré, les enseignants prêts à se former sont parmi les plus motivés et les plus dynamiques. La formation individuelle porterait plutôt (selon huit IA-IPR sur dix) sur l’évolution des contenus disciplinaires et didactiques, tandis la formation continue collective sur site, vivement encouragée par les inspecteurs, concernerait les démarches d’enseignement et la concertation entre pairs. On retiendra que près de neuf chefs d’établissements sur dix semblent avoir intégré la formation continue comme un moyen de mieux piloter leur établissement, ce qui passe par l’examen des possibilités offertes par le Plan académique de formation (PAF) pour répondre à des besoins identifiés de certains enseignants de l’établissement, pour accroître les échanges en interne, renforcer la cohésion de l’équipe ou améliorer les résultats des élèves. Pour la moitié d’entre eux, la formation continue ressort d’une démarche individuelle ; mais 90 % des principaux et proviseurs interrogés mentionnent l’existence de formations sur sites ayant eu lieu dans leur établissement. Les enseignants, quant à eux, confirment que les formations individuelles concernent plutôt les thématiques disciplinaires, les approches relevant de la pédagogie donnant plus souvent lieu à des stages collectifs où des enseignants de disciplines différentes sont amenés à travailler ensemble. La prégnance du Plan académique de formation (PAF), de moins en moins voué aux contenus disciplinaires La formation continue des enseignants s’organise essentiellement autour du Plan académique de formation. Les IA-IPR participent à l’élaboration du cahier des charges du PAF et cherchent, dans le contexte actuel, davantage à mettre en œuvre des travaux sur l’adaptation des méthodes et des pratiques aux spécificités des publics d’élèves que des stages d’actualisation des connaissances disciplinaires. Leurs collègues du premier degré, s’ils insistent sur les contenus des matières enseignées, présentent aussi le processus d’enseignement-apprentissage dans son articulation avec les compétences et le niveau scolaire des élèves. Les uns et les autres se disent globalement satisfaits des thématiques abordées dans le cadre du PAF et ils considèrent majoritairement que les publics potentiels visés par les dispositifs de formation sont correctement pensés. Les inspecteurs du premier degré et plus encore ceux du second degré ont le souci de repérer, lors des animations pédagogiques qu’ils sont amenés à conduire, des professeurs susceptibles d’alimenter le vivier des formateurs et intervenants dans le cadre de la formation continue. Ils considèrent aussi comme faisant partie intégrante de leurs missions la nécessité de faire émerger les besoins des enseignants, que répercutera le cahier des charges du PAF, dont les axes les plus importants ont traitle plus communément - à l’adaptation aux spécificités des élèves et à la connaissance des contenus disciplinaires. Bien qu’ils ne contribuent pas au choix des opérateurs, les chefs d’établissement se sentent concernés par les contenus du PAF, puisque quatre sur cinq d’entre eux affirment y contribuer, le plus souvent de École supérieure de l'éducation nationale

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façon indirecte, en suggérant des pistes de contenus, et que quatre sur dix se disent satisfaits en la matière. En dehors des périodes spécifiques d’implantation de nouveaux contenus de programmes, la domination, longtemps constatée, des stages voués aux contenus et à la didactique des disciplines s’amenuise au profit de réflexions centrées sur l’évaluation des élèves, la prise en charge de l’hétérogénéité de leur niveau, l’éducation à l’orientation, à la citoyenneté, à la santé et à la sexualité, au développement durable et à l’histoire des arts. Des études sur les pratiques d’enseignement-apprentissage ont révélé des carences de la formation continue sur la façon d’engager les élèves dans l’écrit, de susciter et de gérer la prise de parole en classe, d’évaluer. Quant à la formation continue à l’usage des technologies de l’information et de la communication (TIC), elle tend à jouer un rôle de plus en plus important, même si huit enseignants sur dix (toutes disciplines confondues) disent qu’ils se sont auto-formés dans ce domaine ou ont bénéficié des conseils d’un collègue. Les stages actuellement proposés ont plus trait au perfectionnement qu’à l’initiation et ceux qui sont demandés portent sur les modalités d’intégration des TIC dans le processus d’enseignement-apprentissage. Des effets difficiles à apprécier, des attentes convergentes Inspecteurs et chefs d’établissement disent leur difficulté à apprécier les effets des stages de formation continue suivis par les enseignants sur les pratiques déployées au quotidien, sauf peut-être sur le développement du travail en commun et sur l’analyse des performances des élèves. Les enseignants, quant à eux, évoquent plus de concertation, davantage d’échanges, une capacité plus grande à se distancier et à réfléchir à leurs propres pratiques ; ce dernier point, notamment, est évoqué par sept enseignants de mathématiques sur dix. Les inspecteurs et les chefs d’établissement s’accordent à souhaiter le développement de la mutualisation et de l’échange de pratiques d’enseignement et l’accroissement des possibilités de formation continue à distance. Les thématiques concernant le repérage et le traitement de la difficulté scolaire sont souvent citées, notamment par les IEN du premier degré. D’enquêtes ciblées sur les enseignants ressort la prégnance de leurs attentes en matière de contenus disciplinaires ; c’est ainsi que les professeurs d’histoire-géographie, majoritairement diplômés en histoire, attendent des sessions plutôt dédiées à la géographie. Les enseignants souhaitent, en second lieu, des formations à mieux évaluer les élèves (notamment en langue, dans le cadre européen de compétences), à les motiver à écrire… La période 2000-2005 a été marquée par une forte attente en matière d’usage des TIC. Mais les attentes les plus souvent exprimées, quels que soient le niveau d’enseignement et la discipline, sont liées au traitement de la difficulté et de la grande difficulté scolaire ; dans ce domaine, les enseignants expriment le souhait de rencontrer des spécialistes (psychologues, pédopsychiatres, professionnels de l’AIS…), et de travailler à partir de situations concrètes de repérage de la difficulté scolaire et de son traitement. En résumé, ces quelques éléments fournissent des grandes tendances qui doivent certes être développées et affinées. Des travaux complémentaires sur la formation continue des enseignants pourraient permettre d’aller plus avant dans les effets qu’elle peut avoir sur quelques-uns des éléments constitutifs du métier d’enseignant, tels les choix didactiques opérés, les démarches déployées, les organisations pédagogiques retenues et les outils et ressources utilisés. On retiendra aussi que, à travers les glissements observés sur la période de dix années considérée, notamment dans les contenus proposés, c’est, en filigrane, l’évolution de l’ensemble du système éducatif que l’on voit apparaître.

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Document 24 - "Veut-on vraiment abattre le Mur de Berlin ?" Conférence de clôture du colloque annuel – Bordeaux, mars 2010 – de l’Association française des administrateurs de l’éducation (AFAE)92, par Roger-François GAUTHIER, IGAENR, vice-président de l’AFAE, consultant à l’UNESCO

Sommaire Introduction : s’il me faut choisir un point de vue… 1. Équipes de rêve ou équipes rêvées : un fonctionnement collégial plus fantasmé qu’effectif 1.1. L’unanimisme dans les discours : le "salut" par les équipes 1.1.1. L’Équipe, "groupe plus ou moins structuré ayant une finalité qui dépasse le groupe en question", semble assez bien correspondre aux réalités des établissements 1.1.2. Des textes officiels tout "ruisselants" d’équipes…

1.2. Une réalité nettement plus en retrait 1.2.1. Des équipes souvent bien discrètes dans les faits, et une collaboration réduite à ce qui engage peu 1.2.2. Mais n’est-ce pas l’établissement scolaire tel qu’il est actuellement défini qui suscite peu de collaborations ?

2. Un État éducateur pris à ses contradictions : notre modèle général d’organisation défavorable au travail coopératif 2.1. Un monde éducatif dont les fractures et les cloisonnements limitent la réalité et les effets de la coopération entre acteurs 2.1.1. L’absence d’équipe curriculaire 2.1.2. Le lobbying disciplinaire 2.1.3. L’ombre portée des fantômes externes

2.2. Des évolutions en cours qui ne facilitent pas les avancées dans le sens souhaité 2.2.1. L’irruption convergente du rôle pédagogique du chef d’établissement et… du Législateur : promesses en souffrance… 2.2.2. De graves malentendus sur les notions de résultat et de performance entre les sphères du management et de la pédagogie 2.2.3. L’autonomie pédagogique, un slogan prometteur auquel l’institution ne paraît pas croire de façon assez forte

L’Association française des administrateurs de l’éducation rassemble des personnels de direction, d’encadrement et d’inspection, qu’ils exercent dans les établissements, les académies ou à l’administration centrale, ainsi que des chercheurs, des enseignants, des responsables parmi les partenaires de la communauté éducative (collectivités, territoriales, associations, …), des acteurs de systèmes éducatifs étrangers, etc. L’AFAE publie une revue trimestrielle, Administration et Education, et elle organise chaque année un colloque annuel. Elle édite également un ouvrage intitulé Le système éducatif français et son administration, supplément à la revue trimestrielle. Cet ouvrage, régulièrement actualisé, est paru pour la première fois en 1982, la dernière édition ayant été publiée en avril 2008. L’édition 2008, fortement augmentée et actualisée, a pour objectif non seulement de proposer une description détaillée et raisonnée du système éducatif français et de son administration, mais aussi de poser un regard à la fois analytique et prospectif sur ses évolutions récentes et sur les problématiques nouvelles. Outre une édition "papier", une version numérique est disponible, coéditée avec le CRDP de Poitiers. Adresse : AFAE, 28 rue du Général Foy, 75008, PARIS. Tél. 01 42 93 12 01 – Fax 01 42 94 11 98. Email : [email protected] – Web : www.afae.fr 92

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3. L’éducation redevenue proposition mondiale : vers une nouvelle conscience pédagogique et de nouveaux modes de travail… ? 3.1.

Lecture française du surgissement mondiale : vers l’école inclusive

d’une

nouvelle

conscience

pédagogique

3.1.1. De quelques idées débattues ici ou là… 3.1.2. … qui donnent l’idée de tant de murs à remettre en cause !

3.2. Que devient le couple "équipe de direction/équipe enseignante" à l’heure de cette ambition nouvelle pour les apprentissages ? 3.2.1. Des interpellations pour chacun de nous 3.2.2. Ce qui pourrait être à faire…

Chers collègues et amis, Introduction : s’il me faut choisir un point de vue… L’angoisse qui s’était emparée de moi juste après que j’eus accepté, en écoutant de façon tout à fait déraisonnable la seule voix de l’amitié, la proposition que votre comité scientifique m’avait adressée de me charger de cette conférence de clôture, cette angoisse n’a fait que croître depuis le début de notre colloque, tant j’ai été comme vous tous saisi par la qualité des travaux, qu’il s’agisse des ateliers ou des interventions en séance plénière. "Mais que vais-je bien pouvoir leur apporter d’autre ?" est la question qui m’a taraudé, "d’autre" qui n’ait déjà été dit par vous, et débattu auparavant. D’autant qu’il s’agit de l’AFAE, que j’en suis membre et que je n’ai guère de secret pour elle ! D’autant aussi que le sujet de notre colloque ne constitue pas un thème sur lequel j’aurais une expertise particulière, fondée sur des travaux spécifiques ! Pour répondre à cette angoisse, je me suis alors demandé au fond d’où il pouvait être le plus intéressant que je vous parle, comme on dit, et j’ai trouvé les deux réponses les plus simples, qui font peut-être écho aux motifs pour lesquels vous vous êtes adressés à moi : je parlerai à partir de mon travail d’inspecteur général, le plus récent, le plus sincère, tel qu’il résulte par exemple de travaux effectués dans de nombreux collèges au cours des derniers mois ; je parlerai aussi à partir de l’éclairage que peut nous apporter mon investissement dans différentes sphères internationales, et sous des cieux dont on peut se demander si la contemplation peut nous apporter ici quelque chose, face à nos problèmes bien français, en tous cas perçus comme tels. Mais rassurez-vous, je ne vais pas entreprendre de vous dire "ce qui se passe ailleurs" sur le sujet de notre colloque, parce que cela, vous le savez ! Bien sûr notre question "équipe de direction, équipe enseignante" est une question typiquement française ! Presque partout, vous le savez et ce n’est justement pas ce que je veux répéter en introduisant le point de vue international, les équipes enseignantes sont très tangibles et très visibles dans les établissements, beaucoup plus que chez nous, et les équipes de direction sont elles-mêmes très…"professorales" ! Le fossé ne donne pas de vertige… parce qu’il existe moins, même si le chef d’établissement a souvent, et paradoxalement, une autorité hiérarchique plus forte sur ses "collaborateurs" enseignants. Non, le motif pour lequel j’introduirai à un moment de mon exposé une dimension internationale est autre : je tenterai de prendre de la distance par rapport à la question posée et je me demanderai s’il existe quelque évolution internationale et le cas échéant planétaire des systèmes d’éducation qui puisse nous permettre d’anticiper sur ce que va devenir cette question française en France ! Si, aujourd’hui, nous avons en France des équipes plutôt séparées (votre ton a été noir, depuis le début du colloque, École supérieure de l'éducation nationale

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souvent noir, le point le plus sombre ayant sans doute été atteint par Daniel Auverlot quand il évoquait la situation d’établissements en situation de crise, où les deux équipes rompaient toutes relations, même … diplomatiques), peut-on se dire qu’existe, ou non, quelque sens à un éventuel rapprochement qui serait à puiser dans le souffle du monde ? Mais perçoit-on un souffle, précisément ? Et de quelle nature ? Restait la question du titre ! Je n’insisterai pas outre mesure sur l’allégorie que je vous proposai, sans doute plus pour aiguiser vos curiosités qu’autre chose, sauf de deux façons, l’une sur le ton de la légèreté, l’autre plus sérieuse : sur le ton de la légèreté, j’aimerais rappeler que si le Mur de Berlin avait été bâti par les autorités de l’Est pour mettre fin à une fuite inconsidérée des Berlinois de la zone d’occupation soviétique vers les zones occupées par les puissances occidentales, un tel Mur n’est jamais apparu nécessaire entre équipes enseignantes et équipes de direction ! Nul risque en ce sens, on l’a dit : il y a peu d’attirance de la part de la majorité des enseignants pour les fonctions qu’ils appellent administratives, et pas vraiment d’engouement de leur part pour accéder aux charges de chef d’établissement ! L’évolution des candidatures au concours le montre, en particulier pour les agrégés ! sur un mode plus sérieux, je rappellerai que le Mur de Berlin n’était que le visage microcosmique, à l’échelle d’une ville, d’une fracture, le "rideau de fer", qui divisait l’Europe entière : c'est-à-dire que je nous inviterai à nous demander dans quelle mesure notre thème de colloque, ce relationnel "administrateurs-enseignants" à l’échelle de l’établissement scolaire n’est pas luimême l’écho en petit de bien autre chose. Cela serait intéressant : cette cristallisation sur "équipe de direction, équipe enseignante" en dirait alors beaucoup plus long sur l’école elle-même prise dans son ensemble… Je vais suivre le plan suivant : 1. revenir en un premier temps sur cette distinction "équipe de direction, équipe enseignante" pour me demander non pas pourquoi nous avons choisi ce titre, mais ce que signifie le fait que nous ayons décidé, au fond, de rêver sur ce rapprochement d’expressions, car nous avons tous bien conscience de ce que ce thème a de "rêvé" dans les conditions actuelles de température et de pression des écoles de France ; 2. creuser un peu, en un second temps, un peu comme l’a fait Agnès van Zanten, la signification actuelle de l’inaccessible rêve, et essayer de me demander : d’accord, c’est un rêve, il y a du rêve, mais s’en rapproche-t-on ? quelle est la tendance tracée par l’évolution même du contexte général de politique éducative en France ? Et, à ce stade, il est vrai que mon propos sera relativement sombre… 3. la dernière partie se proposera d’apporter plus de lumière. J’essaierai en effet de prendre du champ, pour finir, de partir avec vous de quelques évolutions majeures de la façon dont sont posées les questions d’éducation dans le monde, telles que je les perçois, (évolutions qui ne s’effectuent pas toujours nécessairement dans le sens auquel vous vous attendez), pour me demander comment ces évolutions sont susceptibles d’impacter, en France, notre sujet. Je veux parler d’une construction de l’éducation reprenant force et parole sur les apprentissages des élèves et j’évoquerai alors, après un court terme sans doute plutôt préoccupant, un moyen ou long terme peut-être plus ambitieux. 1. Équipes de rêve ou équipes rêvées : un fonctionnement collégial plus fantasmé qu’effectif 1.1. L’unanimisme dans les discours : le "salut" par les équipes Il y a cette idée, confusément partagée, que "si les enseignants travaillaient en équipe", ou encore si le chef d’établissement était le "pilote pédagogique" de son établissement, les lendemains éducatifs français chanteraient. N’y a-t-il pas là toutefois quelque croyance un peu simpliste, à la fois que ce soit une sorte de panacée et surtout que cette panacée soit à portée de main ?

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1.1.1. L’Équipe, "groupe plus ou moins structuré ayant une finalité qui dépasse le groupe en question", semble assez bien correspondre aux réalités des établissements Le mot d’ "équipe", défini comme je viens de le faire, commençons par-là, paraît tout d’abord une réalité commune dans les établissements scolaires auxquels nous nous intéressons : en effet, on rencontre dans les collèges et lycées, comme d’ailleurs dans les écoles primaires, quantité de regroupements de professionnels, avec la participation ou au moins la bénédiction du chef d’établissement, qui ont comme caractéristiques à la fois d’être sur le mode du volontariat et de l’initiative des membres de l’équipe, et d’afficher aussi bien une finalité ponctuelle ("l’organisation du voyage en Espagne de la classe de 4ème 5" ou le "projet lecture pour les élèves de sixième») qu’un intérêt général qui transcende cette finalité (le voyage des 4ème 5 comme le projet lecture en sixième a été voté par le Conseil d’administration et s’intègre donc dans les objectifs politiques de l’établissement). On a souvent l’impression en fait d’une profusion de groupes volontaires, il est vrai relativement éphémères et assez peu structurés, mais d’ "équipes", donc, à nous en tenir à notre définition, avec un intitulé qui est toujours présenté comme un élément qui va contribuer "à la réussite de tous les élèves". On n’évoque en général pas de tension dans les établissements entre ces "équipes", ce foisonnement même, et l’ "équipe de direction" : donc, tout va bien, alors, et l’AFAE n’a pas vraiment motif de s’inquiéter : on peut certes toujours faire mieux, mais on y est déjà largement. 1.1.2. Des textes officiels tout "ruisselants" d’équipes… D’un autre côté, il est aussi frappant de voir que les "équipes" sont souvent nommées dans les textes officiels et, de façon très positive. Elles ont une réalité "textuelle" quasi constante depuis de longues années. Incantatoire ? Je ne sais pas, mais permettez-moi peut-être déjà là d’être sinon critique, au moins dubitatif, en me remémorant brièvement à voix haute mon expérience, ancienne, quand, à ce qui était l’ancêtre de la DGESCO, il m’était donné de m’associer fortement à cet exercice si spécifique de l’éducation nationale en France qu’est la rédaction annuelle de la fameuse circulaire de rentrée : quand une question à traiter dans une telle circulaire était devenue trop complexe, en raison même de la quantité de compromis que les responsables politiques n’avaient pas voulu trancher, quand la conscience était forte parmi les rédacteurs qu’on s’approchait une nouvelle fois de la construction d’une usine à gaz, il se trouvait toujours quelqu’un pour proposer la recette miracle : ce qu’on n’arrivait pas à construire au plan national, bien sûr, dans les établissements, les "équipes pédagogiques" allaient s’en charger ! Elles et elles seules ! Mais je vous parle naturellement d’une époque totalement révolue, pour le seul usage des historiens de l’éducation ! J’aimerais tout de même dans une incise m’arrêter un instant à une question de mots, parce qu’ils sont tous chargés d’histoire, de munitions et d’armistices, comme souvent ! "Équipe pédagogique" dans un texte officiel, l’expression n’est en effet pas dépourvue de sel ! Réfléchissons : le mot de "pédagogique" est un mot bien délicat à utiliser en français de France en cette décennie, puisqu’il est même devenu pour certains une insulte, vous le savez. Et serait même l’antonyme étrange de "républicain"…sauf quand il est l’épithète du substantif "liberté", auquel cas il est soudain paré de toutes les vertus pour ceux mêmes qui le rejettent dans d’autres contextes. Essayons alors de savourer quelle belle ruse, œcuménique, constitue dès lors l’expression d’"équipe pédagogique", sorte de juste milieu que les textes officiels peuvent utiliser jusqu’à plus soif de façon consensuelle : en disant "équipe", on montre qu’il n’y a pas que la "liberté pédagogique" dans la vie, puisqu’on consacre l’importance du travail collectif, d’une part, mais en gardant "pédagogique" on réalise un coup particulièrement astucieux, si vous y prenez garde : d’abord on rassure ceux qui sont attachés au mot, puisqu’on l’emploie, aussi bien que ceux pour qui il représente une menace antirépublicaine, puisqu’on le désarme en l’utilisant dans un texte officiel. Mais en même temps, et surtout, on ménage ceux qu’inquiéterait trop l’ouverture de l’"équipe" en l’accompagnant d’un mot, "pédagogique", qui devient aussitôt un instrument École supérieure de l'éducation nationale

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potentiel d’exclusion, si l’on n’y prend pas garde ! Le chef d’établissement peut-il faire partie d’une "équipe pédagogique" ? Est-il légitime à ses yeux ? Et quid d’un CPE ? Sans parler du COP, de l’assistante sociale, et à plus forte raison des parents et des élèves ! "C’est pédagogique !" est en effet, souvent, en France, vous le savez, le refrain assuré qui accompagne trop le discret grincement de portes qu’on referme ! Sans qu’on sache toujours a priori sur qui ! Et le fait qu’existent des équipes dites "éducatives" ne sert bien sûr qu’à mieux légitimer la clôture excluante de celles qui se revendiquent comme "pédagogiques". Laissons cette petite explication de texte pour revenir à notre fil : les équipes existent dans les textes, comme elles existent sur le terrain, et d’une façon qui ne semble pas faire difficulté : alors je le redis, l’AFAE ne se trompe-t-elle pas en se préoccupant d’un tel sujet ? 1.2. Une réalité nettement plus en retrait 1.2.1. Des équipes souvent bien discrètes dans les faits, et une collaboration réduite à ce qui engage peu Bien sûr non ! Bien sûr, et les débats et ateliers l’ont illustré, notre intention de travailler sur le sujet est parfaitement fondée, parce que la réalité à la fois du travail en équipe et du travail commun entre "équipe de direction" et "équipes enseignantes" est dans les établissements loin d’être aussi évidente que notre première approche pouvait nous permettre de l’espérer. L’apparence toutefois est forte : on rencontre en effet la plupart du temps dans les établissements un certain point d’équilibre entre "équipe de direction" et "équipes enseignantes" qui est tout sauf conflictuel. Rappelons d’abord que le lieu institutionnel obligatoire de collaboration entre les deux, à savoir les conseils de classe, fonctionne la plupart du temps sans anicroche, selon une partition bien réglée et sans trop de fausses notes : ce lieu géométrique de l’exercice considérable du pouvoir scolaire, qui peut au plan des relations école/société paraître bien étonnant, est un lieu indiscuté de retrouvailles entre "équipe dirigeante" et professeurs. Mais s’il s’agit des équipes diversifiées que nous évoquions et qui existent souvent, leur positionnement vis-à-vis de l’équipe dirigeante n’est en général pas conflictuel non plus, comme si on avait souvent trouvé quelque modeste point d’équilibre : ces équipes existent sur le mode du volontariat, bénéficient du soutien et des facilitations de la part de l’équipe de direction chaque fois que c’est possible ; mais, d’un autre côté, force est de reconnaître qu’on leur demande peu de comptes : ni programme de travail contraignant, ni évaluation, ni même souvent comptes rendus. Le cas est fréquent où le chef d’établissement lui-même annonce comme quelque chose d’important un travail collectif entre professeurs d’une même discipline… dont le fruit dérisoire est souvent la seule entente sur un devoir commun à donner aux élèves. Car la réalité est en effet d’une discrétion symptomatique : on peut d’abord observer que ces équipes sont particulièrement discrètes dans les établissements : il est par exemple très rare qu’on vous présente un organigramme du collège ou du lycée qui fasse apparaître les instances diverses qui peuvent exister, et dont on ne vous dévoilera l’existence que d’une façon plus discrète, voire accessoire ; les équipes, quand on les trouve, marquent parfois plus nettement une intention de s’inscrire dans des démarches que d’entrer dans une logique d’ensemble de l’établissement : faut-il parler des équipes de SEGPA, qui ont un directeur et souvent des locaux à part, ou bien ose-t-on parler d’équipe, avec le même sens, si l’on se réfère au pouvoir souvent exercé par les professeurs de tel BTS ou classe préparatoire ? les équipes qu’on trouve le plus souvent, qui sont en fait des équipes "disciplinaires" ou entre des disciplines réputées proches, sont elles aussi particulièrement discrètes : les coordonnateurs disciplinaires sont souvent peu apparents dans l’établissement, en particulier vis-à-vis des parents ou des autorités académiques ; et d’ailleurs ces équipes mêmes qui ont souvent la réalité la plus régulière dans les collèges et les lycées n’ont pas de cahier de charges précis qui répondraient en quelque sorte à quelque routine, déontologie ou exigence : quand on les École supérieure de l'éducation nationale

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interroge par exemple sur l’état même de la discipline qui les rassemble, on perçoit souvent beaucoup d’étonnement quant à la question même ; mais la réalisation même, de façon très concrète, du travail d’équipe entre enseignants, ou entre enseignants et dirigeants de l’établissement paraît particulièrement fragile, si on s’arrête à des gestes ou attitudes qui pourraient en porter témoignage : non seulement l’ "équipe", ce qui est souvent le cas ailleurs, rechigne à prendre en charge les élèves d’un autre membre de l’équipe absent, mais aussi il est rare que les uns (administrateurs, mais aussi autres enseignants) aillent dans la classe des autres, fassent échapper au face à face chaque fois singulier le rapport entre la classe et chacun des maîtres pris isolément : l’équipe est peu tangible aux élèves ! au total, la situation qui me semble souvent prévaloir est celle où on s’accorde sur un discours favorable au travail collectif, à la fois entre enseignants et avec l’équipe de direction, et où on en assure les conditions minimales, mais où personne ne se sent engagé, au fond. Quand on échange avec les intéressés, on voit qu’en fait l’idée domine qu’on sert des intérêts qui sont distincts, qui peuvent tout à fait coïncider mais qui peuvent tout aussi facilement devenir contraires. Notons d’ailleurs que les conditions ne semblent pas exister pour que le jeu soit clarifié et rendu plus confiant : si le chef d’établissement, en effet, a en principe bénéficié lors de sa formation d’une réflexion, d’une mise en perspective sur son positionnement, par exemple comme représentant de l’État ou comme représentant de son établissement, le jeu n’est pas aussi clair pour les professeurs, car à aucun moment ils n’ont vraiment été informés, autrement que par des canaux syndicaux ou des discours de salle des professeurs de … ce qu’est un chef d’établissement ! Le nombre de fois où, ayant utilisé l’acronyme "EPLE" devant des professeurs, on m’a demandé de quel animal je parlais montre s’il en était besoin que ce sont peut-être aussi les conditions minimales d’une formation commune aux rôles de chacun qui font assez souvent défaut. 1.2.2. Mais n’est-ce pas l’établissement scolaire tel qu’il est actuellement défini qui suscite peu de collaborations ? Ce qu’on vient de dire des limites de la formation et de la connaissance du rôle des autres vaut sans doute de façon plus large : si le travail collectif dans l’établissement est une réalité modeste, c’est en fait sans doute l’écho au fait qu’un établissement scolaire français, en particulier sur ce qui peut faire la matière d’un travail avec les enseignants, à savoir les questions liées à l’enseignement, aux apprentissages des élèves et à leur évaluation, est lui-même une réalité bien modeste. Rappelons que, dans bien des réalités étrangères, on considère que les trois questions essentielles qu’un établissement se pose et sur lesquelles il fonde son existence-même sont relatives au teaching ("Qu’est-ce qu’on enseigne dans cette école ? Quelle est la mise en œuvre des curricula nationaux ?"), au learning ("Que peut-on savoir de ce que les élèves apprennent ? Dans les différents champs ? Ces apprentissages sont-ils équitables ? etc.") et à l’assessing ("Comment décide-t-on d’évaluer les apprentissages ? En faisant quelle part à l’évaluation en situation de classe ? Aux évaluations externes ? Aux comportements ? Aux acquis extérieurs ? Etc."). Sur ces questions, on le sait, l’ "établissement français" décide peu de choses, l’équipe pédagogique aussi, les deux niveaux de décision sur ces questions étant le ministère central à un bout, la solitude à la fois artisanale et subjective du professeur à l’autre bout. Il décide peu, mais, corrélation sans surprise, il "connaît" peu aussi : certains d’entre vous connaissent des travaux de ma part où, avec quelques collègues, nous avons tenté de mettre en évidence l’inconscience de l’établissement français quant à ce qu’il fait : quelles connaissances et compétences produit-il ? quel est l’avenir des jeunes à l’issue de leurs études dans l’établissement ? Je crois personnellement que l’établissement n’a aujourd’hui ni les outils cognitifs ni la culture pédagogique qui pourraient lui fournir la matière à un véritable travail collectif sur ces questions, et que c’est en effet préoccupant. Voilà donc que sur notre interrogation relative au travail collectif dans l’établissement scolaire, notamment entre "administratifs" et "enseignants", nous trouvons qu’existent de très sérieux freins : ni la École supérieure de l'éducation nationale

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formation des personnes, ni le contenu même de ce dont l’établissement est maître, ni la propre connaissance qu’il a de son action ne semblent en effet créer les conditions d’autre chose que cette collaboration réduite à la surface et à ce qui n’engage pas qu’on observe dans une majorité de cas. 2. Un État éducateur pris à ses contradictions : notre modèle général d’organisation défavorable au travail coopératif Mais alors voilà, me direz-vous à juste titre : tout cela on le sait et on le constate chaque fois, l’établissement français pas assez fort, pas assez autonome… Tout le monde est d’accord sur l’analyse ! Je dirais d’abord qu’il n’en est rien, bien sûr, quant au consensus sur l’analyse, mais que, de toute façon, si les choses avancent peu, c’est sans doute qu’on soulève là des questions beaucoup plus profondes qui ne concernent pas que l’EPLE, mais qui interrogent plus profondément le système éducatif français, dans ses routines et sa signification. Les limites de l’efficacité de l’établissement scolaire ne sont-elles en effet pas ailleurs que dans l’établissement ? Ses impasses ne sont-elles pas au fond celles du macrocosme, qui se reflètent en son sein ? Je sais que vous n’êtes pas tous étonnés d’entendre des références à une pensée d’inspiration médiévale dans la bouche d’un inspecteur général, mais je n’y suis pour rien, au fond : notre système éducatif est largement construit sur un schéma de type macrocosme/microcosme, avec, par exemple, au niveau académique (je citerais par exemple le collège des IA-IPR) comme au niveau ministériel (faut-il alors citer le collège des doyens de l’IGEN ?), des cercles macrocosmiques qui du plus près d’une lumière de type pantocratique définissent un ordre qui se reflète dans la réalité du plus modeste des conseils de classe. 2.1. Un monde éducatif dont les fractures et les cloisonnements limitent la réalité et les effets de la coopération entre acteurs 2.1.1. L’absence d’équipe curriculaire Il faut en effet commencer par là : fonctionnaires les uns et les autres de l’éducation nationale, recrutés maintenant au même niveau universitaire, on ne peut que remarquer qu’entre les "équipes" enseignantes des différents segments qui sont censés composer le "système éducatif" français, il n’existe pas d’enthousiasme collaboratif : on m’objectera bien sûr les fameuses réunions, voire visites de professeurs entre le CM2 et la sixième, mais franchement quand on y regarde de près, on s’émerveille souvent en ce domaine d’échanges la plupart du temps extrêmement superficiels, réduits à ce qui ne va empêcher personne de rentrer aussitôt dans ses habitudes sans que la rencontre avec l’établissement de l’amont ou de l’aval ne vienne ne rien contester des certitudes établies. Pire encore du lycée vers le collège : l’information qui transite est rare et en général peu utilisée ! Il n’existe pas de ces continuités curriculaires qui ont été créées par exemple dans les pays scandinaves autour de l’école de base, qui donne à la notion d’équipe enseignante une voilure bien supérieure. Même en Italie, le sens de la continuité du travail professoral entre école primaire et "scuola media" est bien plus développé. On sait d’ailleurs qu’en France l’institution a donné le signal du peu d’intérêt qu’elle plaçait dans une telle perspective en décidant dès l’origine que les programmes, au sens de la LOLF, qui définissent et cadrent l’action de l’État continueraient à rejeter l’idée de privilégier l’ "école du socle" sur la fracture historique entre premier degré et "secondaire". Tout cela a un sens, qu’on le veuille ou non : le sens est de proclamer qu’au fond, les "équipes", la collaboration entre les maîtres successifs, ce n’est peut-être pas très important, et cela donne d’un certain côté le "la" sur le travail collaboratif en général au sein de l’éducation, trop souvent : le sport préféré de certains enseignants de collèges peut demeurer la mise en accusation des enseignants du primaire, par qui un certain nombre d’élèves n’ "ont rien appris", et les professeurs de lycée renoncent rarement de leur côté à pratiquer la même activité à l’égard des élèves qui leur arrivent en seconde ! 2.1.2. Le lobbying disciplinaire On sait bien aussi que, dans un établissement scolaire, il existe en général entre les différentes disciplines des gentlemen’s agreements qui permettent une cohabitation consensuelle. On sait aussi École supérieure de l'éducation nationale

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que cette paix apparente est très fragile dès qu’apparaît une innovation qui fait sortir du cadre classique "une discipline-un horaire-une classe-une note-un professeur" : ECJS, TPE, piliers du socle commun, enseignements d’orientation, chaque fois est déterrée la hache de guerre, qui demande ensuite au chef d’établissement un sens aigu de la diplomatie pour que des solutions se fassent jour. Le problème est que, pour construire les collaborations indispensables entre les différentes disciplines, le moins qu’on puisse dire est que les équipes des établissements ne sont pas aidées par l’environnement général de politique éducative : en effet, dès que le mot de réforme est prononcé rue de Grenelle (c'est-à-dire tout le temps), on assiste traditionnellement à l’incroyable sabbat des différentes disciplines qui se partagent les horaires des élèves, et du coup le nombre de professeurs qui seront nécessaires pour enseigner selon ces horaires, les coefficients au baccalauréat et au bout du compte le statut symbolique de la matière. On se souvient lors d’une table-ronde de la journée consacrée au lycée par l’AEF il y a quelques semaines que la journaliste qui animait une table-ronde sur le sujet, MarieCaroline Missir, n’avait pas hésité à interpeller ce qu’elle appelait des "lobbies" disciplinaires, c'est-à-dire des groupes chargés de la défense d’intérêts particuliers le cas échéant contre l’intérêt général. Puisqu’il faut bien constater que l’organisation des pouvoirs au sein de l’éducation nationale n’a jamais réussi à résoudre ces problèmes, c'est-à-dire à mettre en place une méthode explicite et publique d’élaboration des curricula qui soit organisée autour de la définition d’un "intérêt général" plutôt qu’elle soit chaque fois ou presque la résultante de marchandages entre intérêts particuliers et corporatistes, il faut donc aussi voir que l’arrière-plan de cette coopération souhaitée entre équipes disciplinaires dans les établissements est un arrière-plan de non-coopération, ou, ce qui est plus grave, d’une coopération qui n’est en tous cas pas fondée sur la mise en œuvre d’un intérêt général93 clairement défini en termes de formation des élèves. 2.1.3. L’ombre portée des fantômes externes "Fais ce que je dis, mais ne fais pas ce que je fais", telle pourrait aussi être la formule par laquelle on décrirait l’écart entre le discours magique sur les "équipes" dans l’établissement et la réalité de l’organisation des pouvoirs dans l’éducation nationale dans son ensemble. Comment ne pas rappeler en effet, mais vous savez tous cela, et je n’ambitionne pas du tout de vous apporter là quoi que ce soit de neuf, l’existence de toutes ces constructions hiérarchiques ou symboliques qui parmi nous sont porteuses d’un sens qui ne favorise pas les collaborations au niveau des établissements ? Faut-il, mais oui, il faut sans doute parce que c’est aussi notre sujet, rappeler la piètre signification, dans l’établissement français, de la "double hiérarchie", illustrée par la "double notation", qui projette son ombre sur les représentations et les pratiques : que signifient-ils, ces "doublonnements", sinon qu’il y a là, au cœur d’un établissement scolaire, des éléments qui ne se mélangent pas, des personnels qui ne relèvent pas de la même chapelle, au moins en partie, et en particulier un dessin de la collaboration administration/enseignants réduite a priori à certains aspects, et donc toujours quelque peu douteuse ou contestable si elle s’aventure au-delà ? Et on le sait bien, le doublonnement va loin, puisque si les professeurs considèrent, comme l’institution les invite à le faire, que leur supérieur hiérarchique est, pour l’essentiel, l’IA-IPR, ou l’IEN-EG, c'est-àdire quelqu’un qui est extérieur à l’établissement et qui précisément est perçu comme n’appartenant pas aux hiérarchies administratives, il en va de même, au-delà de l’académie, des hiérarchies disciplinaires qui remontent jusqu’à l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN)… qui elle-même ne saurait se mélanger avec l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) ! Quelle belle leçon institutionnelle de travail collectif quand l’institution donne tant d’idées de fractures et de barrières symboliques ! 2.2. Des évolutions en cours qui ne facilitent pas les avancées dans le sens souhaité Je décrivais là des facteurs qui encombrent je dirais le paysage "historique", un héritage avec son actif et son passif. Mais quid de la période actuelle ? Surmonte-t-on ce passé discutable ? Sur quelles voies 93

Sauf sans doute dans le cas du socle commun, qui marque à cet égard une rupture. École supérieure de l'éducation nationale

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la politique éducative actuelle nous engage-t-elle sur ce thème de la coopération interne à l’établissement et à l’école ? Progresse-t-on, en somme ? La réponse doit être nuancée, et ne peut qu’opposer les promesses nées de l’apparition de thèmes nouveaux et les difficultés résultant d’autres logiques, qui séparent et fracturent au lieu de rapprocher. 2.2.1. L’irruption convergente du rôle pédagogique du chef d’établissement et … du Législateur : promesses en souffrance… Face aux difficultés rencontrées par le système éducatif français depuis surtout le milieu des années quatre-vingt-dix94, difficultés perçues par tous les acteurs, et objectivées par différents travaux de recherche, d’expertise, de comparaisons internationales, on assiste à quelques années d’intervalle à deux phénomènes que j’aimerais associer, parce qu’ils me semblent étonnamment ressemblants, et liés de près à notre sujet. À peu près dans les mêmes années, en effet, progressivement, on a vu apparaître le thème du rôle pédagogique du chef d’établissement d’une part, et le socle commun de connaissances et de compétences en fin de scolarité obligatoire d’autre part. Quel rapport, allez-vous vous demander ? Je pense en fait que la ressemblance est intéressante : quand on voit le thème du rôle pédagogique du chef d’établissement apparaître et connaître un assez grand succès, qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que ce personnage, le chef d’établissement, qu’on avait précédemment fortement cantonné dans des fonctions administratives, puis managériales, voici qu’on proclame qu’il est d’abord le chef d’un service public dont l’objectif est spécifique : les apprentissages des élèves qui lui sont confiés. On n’en est pas encore et pas nécessairement à la notion de "résultat" dans ces mêmes années, mais déjà à l’idée qu’une instance "généraliste", l’établissement, au-dessus de tous ses clivages internes, entre filières, niveaux, disciplines, etc., et donc une instance "politique", chargée d’un intérêt public, a une fonction nécessaire d’organisation et de supervision des enseignements puis, au bout du compte, des apprentissages des élèves. Enseignement et apprentissages ont un sens politique, c’est le sens du rôle pédagogique du chef d’établissement. Mais quel autre sens a ce fait que dès la fin des années quatre-vingt-dix, des voix commencent à regretter par exemple que le collège ne soit pas au clair sur ses objectifs d’apprentissages, objectifs généraux d’apprentissages ? On commence alors à penser qu’il faut provoquer une évolution et que cette question doit être posée au niveau politique le plus élevé, celui du Législateur : c’est ce que la commission du débat sur l’école, dite commission Thélot, va amener, avant que le Parlement, via la mission Périssol, s’en empare pour produire la référence à un socle commun de compétences. Rôle pédagogique de la représentation nationale ! Quand on se souvient que, depuis Jules Ferry, cette représentation nationale s’était abstenue de ce type d’intervention, on ne peut que se dire qu’il ne s’agit pas d’un fait superficiel, et d’ailleurs de fait c’est le Parlement qui introduit ce changement de paradigme potentiellement profond que nous connaissons aujourd’hui avec le socle commun. Alors tout cela, rôle pédagogique du Parlement, rôle pédagogique du chef d’établissement, va dans le bon sens, et converge ! Les blocages qui pèsent sur notre sujet vont dès lors être levés ! Précisément, si je n’inscris pas cette partie de mon exposé dans quelque bleu céruléen c’est qu’on constate qu’entre les discours, voire les textes, législatifs ou réglementaires, et la réalité des évolutions existe un certain décalage et qu’à ce stade on ne peut que se dire qu’il doit en effet, sur les deux fronts, s’agir de changements importants, pour qu’ils avancent au pas prudent que nous connaissons ! 2.2.2. De graves malentendus sur les notions de résultat et de performance entre les sphères du management et de la pédagogie En effet, en même temps que s’opéraient ces évolutions vers l’exercice plus global de la mission pédagogique de l’école, et si l’on veut plus "politique" au meilleur sens possible (quel sens et quel effet 94

Rappelons que, vers 1994, même l’expansion quantitative vers l’objectif des 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat s’interrompt brutalement : il apparaît que l’objectif ne sera pas atteint, et de très loin. Commence l’ère des doutes. École supérieure de l'éducation nationale

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pour l’école et les apprentissages scolaires dans la Cité ?), l’éducation nationale était aussi visitée, comme d’autres domaines de l’action de l’État, par tout un vocabulaire et par un ensemble d’idées extrêmement hétérogènes, qui avaient leur origine soit dans un souci de meilleur fonctionnement démocratique de l’État (et c’est le cas de la LOLF, au moins dans son principe), soit dans des théories néolibérales sur son rôle, théories qui rejoignaient de leur côté au plan international des thèses sur l’intégration de l’éducation à la sphère des services marchands. Ces idées étaient hétérogènes, mais de façon assez superficielles elles se trouvaient de converger sur un certain nombre de thèmes, comme celui du pilotage par les résultats et la performance. Il n’est pas lieu ici d’analyser tout cela, ni de le critiquer ; notre position personnelle est d’ailleurs (qu’on ne me fasse pas dire ce que je ne dis pas !) qu’il est absolument indispensable que l’école se préoccupe mieux qu’elle ne le fait traditionnellement des résultats et des effets de son action en termes d’apprentissages des élèves, sur le court et le long terme, en matière de connaissances, compétences, comportements et culture. Absolument indispensable, à partir du double point de vue de l’efficacité et de l’équité. Oui mais ! Oui mais, et mon "mais" est sonore ! Une question importante se pose, dès lors qu’on veut s’intéresser aux résultats de l’école, et c’est comme une marche qui a manqué, et qui fait que tout le monde trébuche : or à l’heure présente tout le monde trébuche, et c’est très lié à notre thème ! Il se trouve, que voulez-vous, que "performance" et "résultat" sont des mots qui ont déjà un sens scolaire avant que le discours du management ne les diffuse : à ne pas voir cela, on laisse s’installer de façon grave qui pro quo et faux semblants. Comment ne pas s’inquiéter, en effet, en voyant que se répand en ce moment sous le couvert d’une évaluation par les résultats, et faute d’une vraie réflexion sur ce qu’on souhaite appeler résultat et sur la façon dont un système éducatif peut produire des "résultats" dans de bonnes conditions de fiabilité et de pertinence, une invraisemblable effervescence tout à fait technocratique qui fait qu’on risque bien en effet de produire du résultat, mais de façon totalement déconnectée de ce qui peut intéresser les enseignants et les aider à améliorer leur efficacité pédagogique ? Pensons tout de même qu’autour du socle commun l’administration en est arrivée à produire au Parlement pendant deux ans des chiffres qui mesuraient les résultats d’une politique qu’on ne mettait pas en œuvre. De la même façon il m’est arrivé d’être saisi d’effroi en voyant la façon dont toute la machinerie "lolfique" de la performance se trouvait répercutée, sans analyse pédagogique suffisante, dans beaucoup d’académies pour venir en bout de chaîne échouer à la porte de la salle des professeurs des établissements où, visiblement, ce langage était inaudible. Et ne peut qu’être inaudible. Voit-on que l’institution, en entrant dans ce jeu de cette façon, ne fait que conforter les conservatismes en faisant comme si le travail sur l’efficacité de l’école ne devait pas être d’abord l’affaire des maîtres, construit avec eux dans leur langage ? 2.2.3. L’autonomie pédagogique, un slogan prometteur auquel l’institution ne paraît pas croire de façon assez forte Là aussi nous avons cru pouvoir dire tout à l’heure que la qualité et l’efficacité de la relation entre équipes de direction et équipes enseignantes ne pourrait que coïncider avec l’attribution de plus d’autonomie pédagogique à l’établissement. Or là encore, alors que partout il est démontré que l’autonomie ne pouvait avoir quelque légitimité que si elle était accompagnée de démarches régulières d’évaluation, en l’occurrence des établissements, et que sans qu’on sache quel devait être l’œuf et quel devait être la poule les deux concepts devaient marcher d’un même pas, il faut bien constater que, malgré un point très explicite qui figurait dans la lettre de mission du Président de la République au précédent ministre, cette question délicate mais nécessaire avance peu. Dans l’immédiat, ce que je vois la plupart du temps c’est un grand désarroi des équipes pédagogiques des établissements, qu’on a très peu informées sur ces problématiques, des chefs d’établissements et des IPR sur le sujet : si chacun doit avoir sa version de l’évaluation des établissements, conforme à ses routines et intérêts corporatistes, on peut craindre que notre thème du travail en commun ne va pas s’en trouver facilité.

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Or c’est délicat : j’ai vu des établissements mis sens dessus dessous parce que des conceptions divergentes et non discutées de l’évaluation étaient à l’œuvre ! Où en sommes-nous à ce stade de mon exposé ? Nous avons commencé par nous interroger sur un sujet qui semblait relativement limité dans son enjeu et par son impact, à savoir les réalités du travail collectif dans les établissements scolaires français entre les responsables de la direction de l’établissement et les professeurs. Puis en découvrant à cet égard un écart entre un discours relativement euphorisant et les faits, nous nous sommes demandés à quoi tenait cet écart : à l’établissement lui-même, ou à des positionnements plus fondamentaux touchant au système éducatif dans son organisation et peut-être son idéologie profondes. Puis nous nous sommes demandés dans quel sens évoluaient les choses, c'est-à-dire si au fond cet écart était en train d’être réduit, et notre réponse a été plutôt sombre, car non seulement l’institution paraît avoir des difficultés à amener dans les faits certaines des évolutions qu’elle prône, mais aussi parce que notre pays connaît certains avatars de développements qu’on observe à l’échelle du monde, et qui paraissent engager l’éducation vers des logiques qui risquent bien de ne pas mettre à l’ordre du jour prioritaire le travail pédagogique collectif. Je vous avais bien annoncé un passage au noir, à un moment de mon exposé, et là je crois que nous y sommes. Alors touchons le fond, sentons le sous les pieds, parce que je crois que c’est en effet préoccupant, et qu’il y va peut-être de la qualité à venir de notre système éducatif, touchons le fond, mais rebondissons, et c’est là que j’aimerais maintenant vous faire entrevoir des perspectives légèrement différentes, mais qui peuvent contribuer à nous permettre, depuis l’apnée où je vous ai plongés, à retrouver un peu de souffle. 3. L’éducation redevenue proposition mondiale : vers une nouvelle conscience pédagogique et de nouveaux modes de travail… ? En effet, face à nos difficultés, il n’est pas infondé que nous nous demandions non seulement ce qui se passe ailleurs, mais si les vents du large sont nécessairement défavorables, si ne soufflent pas aussi dans le monde des inspirations, plus ou moins nouvelles, en matière d’éducation, qu’il vaudrait la peine de tenter de capter, pour les connaître, mais aussi peut-être pour laisser s’enfler certaines de nos voiles. Ma thèse ici serait que le déplacement mondial actuel d’un certain nombre de lignes politiques vers une nouvelle conscience pédagogique pourrait nous conduire en France aussi à inventer de nouveaux chemins, parmi lesquels il faudrait compter de nouveaux modes de travail, et des modes de collaboration renouvelés entre les acteurs. 3.1. Lecture française du surgissement d’une nouvelle conscience pédagogique mondiale : vers l’école inclusive Il est en effet fréquent qu’on ne considère en France les perspectives internationales en éducation que sur le mode de la menace : la France, ayant une conception ambitieuse du service public d’éducation, serait entourée de pays prêts à vendre sans discernement l’âme de leurs écoles au diable de la mondialisation marchande, à l’ombre des classements les plus obsessionnels et dans le culte unique des compétitions les plus effrénées ! Je crois qu’il faut bien voir à quel point le panorama mondial est différent de cette approximation, plus complexe, parce que Dieu merci un peu partout des consciences pédagogiques émergent qui précisément mettent le holà, quand il le faut, à différentes dérives, souvent inspirées par un économisme à courte vue. 3.1.1. De quelques idées débattues ici ou là… Par exemple on pourrait évoquer le type de questions qui est posé depuis quelques années au sein de l’UNESCO sous l’intitulé "from access to success", parce qu’il représente bien le type d’impasse que beaucoup de gouvernements du monde signalent depuis longtemps à l’organisation onusienne : "nous dépensons, disent ces gouvernements, ce que nous pouvons pour l’école, nous croyons à sa promesse, mais nous ne voyons pas les retours attendus sur investissements. Pire, l’école, chez nous, ne semble pas pouvoir éviter de produire un échec massif, d’abord scolaire, puis social, qui a à son tour des répercussions économiques. De solution que nous pensions qu’elle était, l’école n’est-elle pas en train École supérieure de l'éducation nationale

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de devenir problème ? 95". Et les idées qui ont été examinées dans le cadre de ces réflexions, sont par exemple : l’idée que l’accès n’est pas tout : c’est l’idée que, sous divers cieux, l’école de la seconde moitié du XXème siècle s’est donné les moyens de s’ouvrir à des publics plus importants, voir universels (la totalité de la classe d’âge), mais sans créer, sans même s’interroger sur les conditions du succès dans l’école ainsi ouverte ; l’idée que l’éducation est une activité fine et multidimensionnelle : l’idée que les attentes placées par les sociétés dans l’éducation sont de divers ordres, puisqu’il s’agit de répondre aux besoins de l’enfant, de la personne, de la société civile et politique aussi bien que du développement économique, et que la construction comme l’évaluation de tout cela est nécessairement complexe. Les travaux du chercheur belge De Ketele nous rappellent régulièrement l’aspect multidimensionnel de l’éducation et c’est bien ce que certaines tendances classificatrices étaient en train d’oublier ! l’idée que les classements entre écoles et systèmes, tellement à la mode, ne sont que des outils possibles dont il convient d’éviter les effets facilement pervers : c’est l’idée que les grandes enquêtes internationales de type PISA ou PASEC sont intéressantes, mais à condition de ne pas se focaliser sur l’aspect de classement, qui est souvent trompeur et induit une logique discutable. De même, il est intéressant de voir quelles distances certains pays, comme l’Ecosse, prennent avec l’idée des classements d’établissements : un doute salutaire sur les classements est de plus en plus partagé dans le monde ; l’idée que la compétition entre les élèves peut selon le cas être utile ou sévèrement néfaste. On refuse de plus en plus souvent qu’un système éducatif soit une fabrique institutionnalisée d’échec individuel, et on se demande confusément (c’est une partie du dossier sur la compétence) comment l’école pourrait au fond ne produire que du positif. 3.1.2. … qui donnent l’idée de tant de murs à remettre en cause ! Et alors quelques idées comme celles-ci, avec d’autres, quand on les agite sous différentes latitudes, on voit que si on y adhère elles rencontrent un certain nombre d’obstacles, et que ces obstacles tracent peut-être la carte de ces murs que nos consciences et nos routines imposent à l’entreprise d’éducation d’une façon qui devrait être interrogée : frontières entre les "bons" et les "mauvais" élèves, que valezvous, si vous contribuez à fabriquer l’échec ? Frontières entre les différentes parties d’un système d’éducation (primaire, secondaire inférieur, lycée, etc., filières de formation), que valez-vous si tant d’élèves y trébuchent ? Frontières entre instruction sacro-sainte et éducation tenue pour secondaire, que valez-vous, quand il s’agit de former la personne ? Frontières entre les savoirs et la vie ? Frontières entre les disciplines ? Etc. Alors en effet, on assiste à des remises en cause de ce type, qui s’organisent, au bout du compte, selon le concept de l’école "inclusive", sujet sur lequel travaille par exemple le Bureau international d’Éducation de Genève. 3.2. Que devient le couple "équipe de direction/équipe enseignante" à l’heure de cette ambition nouvelle pour les apprentissages ? Vous me direz que nous sommes loin de notre sujet ! Justement je ne crois pas : de ces grandes interrogations, de ce souffle du monde qui pourrait se remettre à nous visiter, nous avons à tirer des questions au quotidien dans nos écoles réelles, et ces questions changent notre façon de penser au futur nos modes de travail et les relations à construire entre les différents professionnels de l’éducation.

95

Je reprends là une formule prononcée par le chercheur portugais Ruis Canario dans le cadre du colloque "Un seul monde ? Une seule école ?", qu’avait organisé Alain Bouvier en 2009 au CIEP, dont les actes ont été édités par la Revue internationale d’éducation de Sèvres. École supérieure de l'éducation nationale

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3.2.1. Des interpellations pour chacun de nous En effet, ces interpellations que je relatais en direction d’une école qui exclut, d’une école qui fabrique industriellement de l’échec scolaire et humain, on sait bien qu’hélas elles peuvent s’adresser aussi au système éducatif français : en France aussi, on a ouvert les portes du collège, par exemple, en 1975, mais sans redéfinir les conditions du succès ; en France aussi, on a conservé une école qui reste malgré tout focalisée sur sa fonction élitiste. On a l’idée qu’il faudrait que cela change, et on a quelques outils institutionnels pour cela, comme le socle commun. Les questions que les acteurs pourraient immédiatement se poser, par exemple, mais ensemble, dans la totalité des établissements scolaires, pourraient être : que voudrait dire que notre école (…collège, lycée) soit désormais "inclusive" ? Qu’elle ne fabrique plus de l’échec ? Qu’elle ne soit plus pour une fraction non négligeable des élèves un lieu d’apprentissage du désamour de soi et de la honte ? Il s’agirait là notamment de mettre au programme de nos établissements une remise à plat à peu près complète des modalités d’évaluation des élèves. C’est un nouveau continent qui est à découvrir : une évaluation qui n’ait plus dans son fonctionnement même l’automatisme de la production de l’échec. que voudrait dire une école où le vivre ensemble serait dans les apprentissages fondamentaux ? Où l’éducation ne soit pas une affaire de "vie scolaire", ou de CPE, mais de tous. Voilà bien une barrière qu’il serait urgent de faire tomber ! que voudrait vraiment dire que notre école (…collège, lycée) mette désormais en œuvre des compétences ? qui pose à son niveau toutes les questions essentielles consistant à rechercher le bon point d’équilibre entre connaissances et compétences, parce que ce n’est pas une question réglée une fois pour toutes ! C’est selon Philippe Perrenoud une tension fondamentale, autour de laquelle tout doit en permanence se construire, entre des savoirs, mais qui doivent être "responsables", et des compétences, qui doivent rester communes. que serait une école qui commencerait à se demander comment elle pourrait mettre ses actes en accord avec ses discours ? Qui serait effectivement un lieu d’excellence démocratique ? de respect porté à autrui dans sa diversité ? Mais rien de tout cela n’est interdit, au fond, bien au contraire : c’est même assez proche de ce qui nous est demandé. Ne s’agit-il pas alors seulement de remettre entre tout ce qui nous est demandé une perspective, de tracer une ligne de priorités ? 3.2.2. Ce qui pourrait être à faire… On voit facilement ce qu’impliqueraient de telles évolutions, si l’institution les inscrivait nettement à son ordre du jour. Il s’agirait notamment : d’arrimer dans une légitimité plus constante les évolutions éducatives, en clarifiant leur signification au regard de la connaissance disponible, de la philosophie de l’éducation, de l’histoire et de la sociologie ; de programmer des mutations professionnelles en profondeur et d’abord de se demander où les personnels de l’éducation nationale vont pouvoir se former à ces changements profonds des paradigmes scolaires (du type du socle commun) ; de définir et de mettre en œuvre une vraie autonomie des établissements scolaires, fondée sur le développement de l’idée d’école apprenante et consciente d’elle-même ; d’inciter les professionnels de l’éducation à passer plus souvent à une formulation explicite de leur activité, notamment vis-à-vis des élèves et des parents, en matière de curricula ou d’évaluation des élèves, par exemple. De grands mots tout cela, ne pouvant prendre de sens que dans le cadre d’une politique nationale ? Mais justement pas, ou pas nécessairement : il n’est aucune de ces questions qui ne puisse prendre de École supérieure de l'éducation nationale

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sens dès aujourd’hui dans quelque établissement scolaire que ce soit, pour peu que ceux qui l’animent aient en tête que les difficultés actuelles de l’école ne peuvent avoir de solution en dehors du passage d’une école facilement excluante, héritière d’une fonction de sélection uniformisante à une école véritablement inclusive, persuadée de la commune éducabilité de tous aussi bien que de la spécificité de chaque itinéraire. Je crois que le mur, là, on le cadre bien, en face de nous, comme il se montre aussi dans quantité de systèmes éducatifs dans le Monde. Il projette une ombre particulièrement dure sur nos établissements et nos élèves. L’abattre va sans doute être la tâche des acteurs de l’éducation en France pendant les 20 prochaines années. Alors précisément : administrateurs, enseignants, vont-ils davantage collaborer ? Tout dépend, et tout est là, au fond : ou bien les angoisses sociales et les réponses politiques qui leur seront apportées entraînent l’école vers une dérive compétitive, méchante, décourageante, souvent cruelle, violente et créatrice de violences, et alors il n’y a plus guère de choses à faire en commun entre des administrateurs comptables des résultats de cette compétition et des enseignants devenus des exécutants, pour avoir cessé d’être des maîtres et des intellectuels. Ce qu’ils se doivent d’abord d’être. Ou bien un autre chemin est emprunté, qui nous place les uns et les autres, administrateurs et enseignants, dans une position non pas de confusion des rôles, mais d’attelage commun, avançant dans une direction commune, celle des apprentissages responsables des élèves. Entre nous tous, administrateurs et enseignants, est sans doute alors nécessaire un socle commun de connaissances et de compétences beaucoup plus étoffé, mais indispensable à une école que je vois commencer, sous bien des latitudes, à partir de ces valeurs ambitieuses et communes, à se réenchanter. C’est cette exigence-là qui est en train de germer : c’est, je crois, ce à quoi nous pouvons nous attendre et ce vers quoi, arcboutés sur nos consciences d’éducateurs, nous devons œuvrer. Il me reste, pour avoir accepté de me suivre sur ces chemins, à vous remercier vivement de votre attention !

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