Funérailles Henri Dieschburg Discours de Monsieur PIQUEFEU, Chef ...

Luxembourgeois d'origine, Dieschburg vint de bonne heure en France; ingénieur, il y travailla et le charme opéra, il fut conquis par la douceur de vivre en notre ...
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Funérailles Henri Dieschburg

Discours de Monsieur PIQUEFEU, Chef du Personnel, à la date du 27.10.1918. Mesdames , Messieurs , Qui donc a dit cette parole: « Tout homme a deux patries: son pays et la France » ? La vérité de cet aphorisme éclate une fois de plus par l'exemple de celui vers qui nous inclinons aujourd'hui notre sympathie dernière. Luxembourgeois d'origine, Dieschburg vint de bonne heure en France; ingénieur, il y travailla et le charme opéra, il fut conquis par la douceur de vivre en notre cher Pays. Aussi lorsqu'éclata le terrible fléau mondial, il n'hésita pas un instant; plein d'amour pour sa patrie d'adoption, plein de foi dans la justesse de sa cause et dans l'avenir de ses destinées, il s'engagea dans la Légion étrangère. Là, héros parmi des héros, il trouva moyen de se distinguer. Cependant, DIESCHBURG désirait s'unir à la France par des liens plus intimes encore, il demanda sa naturalisation. Si vous saviez avec quelle ardeur il nous priait de hâter les démarches en vue de la faire aboutir, on eut dit qu'un pressentiment obscur le guidait et qu'il savait combien peu de temps il aurait à jouir de la joie d'être Français. Sa belle conduite au feu, une blessure grave lui donnaient des titres sérieux à cette naturalisation; il l'obtint et on peut dire qu'elle fut scellée de son sang généreusement versé pour la Patrie qui l'accueillait. Et voici que ce brave, qu'au cours de longs mois de lutte la mort n'a pu abattre, surnoisement, lâchement, « à la Boche » est assailli et terrassé en quelques heures, à l'instant précis où la paix allait offrir à ce courageux, à ce laborieux, la récompense de son dévouement. Messieurs, les circonstances séparent ce pauvre DIESCHBURG de tout son passé; il n'a, aujourd'hui près de sa tombe nul parent pour le pleurer, mais en demandant à être des nôtres, il a entendu faire de nous tous sa grande famille.Je suis sûr que vous tous, ses chefs, ses collègues, ses amis, vous répondrez à ses voeux et que votre sympathie, que dis-je, votre affection, accompagnera dans sa dernière demeure celui qui a voulu se dévouer pour nous, à qui, au nom de la COMPAGNIE GENERALE D'ELECTRICITE tout entière, j'adresse l'adieu le plus ému . ***************

Funérailles Henri DIESCHBURG Discours de M. Paul FLESCH, Président du Comité Franco-Luxembourgeois , Paris

Mes chers Amis, Parmi tant de deuils de toutes les familles et de toutes les nations, alors que la mort couvre de son ombre des pays entiers, il semblerait que nulle perte de parent ou d'ami ne put être la cruauté suprême. Chaque fois une horreur, en ces jours de guerre, dépasse les autres horreurs. Et pourtant qui de nous ne se sera écrié, en apprenant la douloureuse nouvelle de la mort de Henri DIESCHBURG : « C'est vraiment trop » ...... Notre pauvre cher Dieschburg, nous a été enlevé en quelques heures de la traîtresse et foudroyante maladie qui complète les ravages et la désolation de la guerre . Lui qui avait bravé les terribles hasards du champ de bataille, lui qui avait été des attaques d'un régiment de marche, des attaques de la Légion, lui qui avait donné de toute sa vaillance dans l'une de ces formidables attaques: à Neuville-Saint-Vaast et aux Ouvrages Blancs: lui qui blessé, très grièvement blessé, s'était traîné par un sursaut d'énergie, de trou d'obus en trou d'obus, sous la mitraille allemande, pour rejoindre, après une journée d'efforts, un poste d'ambulance; lui qui avait senti là passer sur son front le voile funèbre et sa conscience s'évanouir; lui, l'Héroïque Légionnaire, il a fallu qu'il fut injustement, stupidement terrassé par une grippe infectieuse. Quelle tristesse dans cette fin. Quelle consolation pouvons-nous trouver, nous ses amis, et quelle consolation pourrons-nous donner à son pauvre père, à sa malheureuse famille ? La consolation sublime qui escorte tout cercueil enveloppé du drapeau tricolore et veille sur toutes les tombes dans les cimetières de guerre : « DIESCHBURG est mort en soldat. » En 1914, dès que les sinistres hordes vinrent déchirer à notre frontière Luxembourgeoise le chiffon de papier de la neutralité et envahir le Luxembourg, cet intellectuel, cet ingénieur, se dressa dans sa colère. Il ferait son devoir contre l'envahisseur. Devant avertir son père de sa volonté de s'engager au service de la France, il eut à coeur de donner à cet avertissement l'apparence d'une demande de conseils. C'est lui-même qui, dans une causerie faite à l'une de nos réunions du Comité Franco-Luxembourgeois ,nous a raconté comment une lettre paternelle, qui déjà dut braver le contrôle et la police allemande, lui apporta cette réponse: « Un bon Luxembourgeois sait ce qu'il a à faire. » Il l'avait ainsi pensé. Il offrit sa vie pour le Luxembourg et pour la France. Il l'offrit à la Légion Etrangère. Nul n'ignore que l'offre faite là, c'était à peu près le sacrifice certain. Il combattit, conquit ses galons de caporal, fut cité à l'ordre de l'Armée, décoré de la croix de guerre et obtint la grande naturalisation française. Blessé, il fut mobilisé comme ingénieur à la COMPAGNIE GENERALE D'ELECTRICITE. A ce poste il travailla pour la défense nationale, pour la France. Et c'est à ce poste de

soldat et de travailleur qu'il est mort. L'estime de ses chefs de la COMLPAGNIE qui ont tenu à remplacer pour leur ingénieur, avec le Comité Franco-Luxembourgeois, la famille absente, fut la même que celle de ses chefs militaires. *************** Nous, Luxembourgeois de Paris ou réfugiés du Luxembourg, nous étions fiers de notre ami: fiers de son intelligence, de sa conscience droite et loyale, de son courage, de son dévouement à notre oeuvre patriotique de rapprochement entre le Luxembourg et la France. Il était fidèle à nos réunions au Comité Franco-Luxembourgeois. Souvent il en présidait et dirigeait les travaux avec une clairvoyance et une corialité auxquelles tout le monde rendait hommage. Si une hardiesse était proposée, si une décision tranchante était demandée, nous étions toujours assurés de le trouver parmi les plus prompts aux solutions nettes et franches. Quel vide fera sa perte dans notre Comité Franco-Luxembourgeois. Quelle lugubre et redoutable fatalité nous prive des meilleurs de nos Luxembourgeois! Au champ de bataille chaque nouvelle offensive fauche dans la dernière poignée de nos Légionnaires. S'ils échappent à la tuerie là-bas, si des blessures et des mutilations mettent nos héros à l'abri des coups suprêmes, c'est encore la maladie qui guette leurs corps affaiblis par des annés de batailles et de souffrances. Quels témoins nous restera-t-il, hélas, pour aller dire à nos Luxembourgeois, à nos pères, à nos mères, à nos enfants, la sublime vaillance des uns et la ferme ténacité des autres, ce que tous nous avons fait et souffert sur la noble terre de France ! ... Mon pauvre et cher DIESCHBURG, combien tu aurais été heureux de raconter à ton père , à tous les tiens, tes exploits de la Légion, à fourragère rouge! Quel triomphe de leur montrer ta croix de guerre que pieusement nous leur remettrons! Quelle joie de leur faire le récit de tes efforts et des nôtres, au Comité Franco-Luxembourgeois, pour la délivrance de notre Luxembourg . . . Et cela ne sera pas, cela ne peut pas être. Ta chère famille apprendra en même temps ta gloire et ta mort. Si toute mort à 30 ans est atroce, combien plus atroce celle survenue à l'heure où s'ouvre un nouvel horizon de vie. Ami DIESCHBURG, soldat du Luxembourg, soldat de France, si tu pouvais encore voir, si tu pouvais entendre . . . . Les Boches reculent, ils sont en fuite . . . . ils sont vaincus, par tes frères d'armes comme par toi . . . . Demain ils traverseront, funèbrement, notre pays pour regagner leurs repaires . . . . Les drapeaux français, les drapeaux alliés pourchasseront les débris humiliés de cette armée formidable que nous vîmes, il y a 4 ans, se ruer férocement sur la France. Demain, à la suite des armées victorieuses, nous rentrerons chez nous. Nous nous étions dit que tu serais des premiers à retrouver la petite patrie, et que tu conduirais là-bas le retour des exilés. Hélas! tu ne seras pas là, en ce jour de gloire et d'infinie allégresse. Tes yeux se seront fermés, sans que tu aies vu la victoire aux ailes sublimes qui porteront toutes les couleurs de la liberté telles qu'elles flottaient devant toi, françaises, anglaises, au champ de bataille

de Neuville Saint-Vaast.

Non, tu n'aurais pas dû mourir avant l'aube radieuse! C'est vraiment le sacrifice des sacrifices que t'impose le plus farouche des destins. Du moins, ta vie aura été aussi belle que ta pauvre mort est triste et douloureuse. Rt cela, nous le proclamerons, nous, tes amis. Nous le dirons à ton pauvre père, à ta famille, à ton pays. Et cela vivra dans notre souvenir, dans notre reconnaissance, dans le souvenir et la reconnaissance du Comité Franco-Luxembourgeois, de tous les Luxembourgeois. Ta tombe, en terre de France, sera pieusement gardée et veillée comme toutes les tombes des héros. Nous y reviendrons porter les fleurs de l'amitié et le merci, l'immortel merci du Luxembourg et de la France. *************** Discours du Comité Franco-Luxembourgeois , Paris