Eiger Climate Excursion: Journée du climat, 15 juin 2011

sensiblement modifié la composition chimique de l'atmosphère: la concentration de ... quelques décennies nous apparaît comme un phénomène négligeable.
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Eiger Climate Excursion: Journée du climat, 15 juin 2011 Exposé du professeur Thomas Stocker de l’Université de Berne Monsieur le Conseiller fédéral, Monsieur le Président de commune, Chers invités, La température est le premier critère de mesure utilisé dans les débats sur le changement climatique. Mais l’homme entretient un rapport singulier à cette notion, pourtant clairement définie par la physique. Nous avons l’habitude de voir le thermomètre augmenter de 15°C du jour au lendemain et baisser de 10°C la semaine suivante. Ce sont les «caprices» de la météo et nous nous en accommodons très bien, du moment que nous pouvons prévoir nos activités en conséquence. Nous avons donc du mal à imaginer qu’une hausse de la température globale, qui ne sera peut-être que d’un seul degré d’ici à 2050, puisse avoir des conséquences catastrophiques. Selon notre perception, une différence d’1°C n’a vraiment rien d’alarmant; cela nous laisse même plutôt froids! La parution régulière dans la presse d’articles présentant le réchauffement climatique comme une vaste supercherie et les climatologues comme des charlatans fait écho à notre indifférence vis-à-vis de ce problème. En politique, depuis plusieurs années, toutes les interventions, les stratégies et même une prise de position du premier parti de Suisse visent au statu quo. Les auteurs de cette prise de position, publiée en février 2009 sous le titre de «Pour une politique climatique réaliste», en viennent à la conclusion stupéfiante qu’«au cours de ce siècle, aucun réchauffement climatique [...] n’a été observé». Tenons-nous-en plutôt aux faits établis par la science sur la base de recherches, de mesures et d’observations: 1. Par la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel, l’homme a sensiblement modifié la composition chimique de l’atmosphère: la concentration de CO2, principal gaz à effet de serre après la vapeur d’eau, est aujourd’hui de 30% supérieure aux valeurs maximales des 800 000 dernières années. 2. La température moyenne globale est aujourd’hui supérieure d’environ 0,74°C à ce qu’elle était vers 1900, le niveau de la mer a monté de 17 cm au cours des 100 dernières années, les cinq étés les plus chauds de ces 500 dernières années en Europe ont été les étés 2002, 2003, 2006, 2007 et 2010. 3. En mesurant par satellite la masse du Groenland, on constate une diminution régulière correspondant à une perte d’environ 220 milliards de tonnes de glace par an. Ramenée à la superficie de la Suisse, cette quantité de glace fondue représente plus de 5 m d’eau, et cela chaque année!

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Le rapport de cause à effet entre l’augmentation du CO2 et le réchauffement climatique global de ces 50 dernières années est prouvé. Cela signifie que le réchauffement et les changements qui en découlent au niveau des précipitations, du niveau de la mer ainsi que des phénomènes naturels extrêmes, comme les vagues de chaleurs, sont liés à l’activité humaine et plus précisément à la combustion des combustibles fossiles et à la destruction des forêts tropicales humides.

Malgré toutes ces conséquences tangibles, une hausse de la température globale de 1°C en quelques décennies nous apparaît comme un phénomène négligeable. Notre perception de la température peut être très différente en fonction des situations. Lorsqu’il s’agit de la météo ou du climat, une différence d’1°C nous paraît peu de chose et ne provoque pas chez nous d’inquiétude particulière. En revanche, si la fièvre de notre enfant passe de 39°C à 40°C, ce changement d’1°C va nous pousser à agir immédiatement. Il faut que nous apprenions à réagir de la même façon en ce qui concerne le climat, car c’est de lui que dépend l’environnement dans lequel nous vivons. En cas de changements au niveau local, nous sommes contraints de nous adapter et d’en supporter les coûts à court, moyen et long terme. Le changement climatique influe sur la disponibilité d’innombrables ressources essentielles à la vie. La stabilité des températures, l’existence de précipitations suffisantes au moment opportun, la disponibilité des zones côtières ainsi que la viabilité des écosystèmes constituent autant de ressources indispensables. La question du climat est donc une question de ressources. Lorsque les ressources se raréfient ou se modifient, cela crée des risques de conflits locaux, régionaux et internationaux. Peu de sites en Suisse illustrent aussi bien ces changements que la région de Grindelwald, connue dans le monde entier pour son glacier et caractérisée par un paysage de montagnes encore préservé. La commune de Grindelwald constitue donc un ambassadeur idéal dans le cadre du programme «Eiger-Climat-Ecoles». Aussi ai-je contacté en novembre dernier les responsables de FMB afin de les convaincre de poursuivre l’aventure. Le site de Grindelwald est particulièrement touché par le changement climatique. Si la température hivernale en Suisse augmente comme prévu d’environ 1,8°C au cours des quarante prochaines années, nous aurons à cet horizon un décalage de 300 m dans l’étagement des températures par rapport à aujourd’hui: la limite pluie-neige se situera donc 300 m plus haut, tout comme l’isotherme 0° et ainsi de suite. Pour Grindelwald, cela aura des conséquences sur l’enneigement. La limite pluie-neige, qui se situe actuellement à environ 860 m au-dessus du niveau de la mer, se trouvera dans 40 ans à plus de 1

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150 mètres d’altitude. De station de sports d’hiver avec enneigement garanti, Grindelwald deviendra l’un de ces villages où la neige se fait rare. Il est donc grand temps de se consacrer pleinement à la protection du climat. Cette cause nécessite un engagement solide sur plusieurs décennies. Il faut qu’à partir d’aujourd’hui, elle serve de critère dans toutes les décisions politiques. Ces décisions sont prises pour et seront bientôt prises par la jeune génération à qui s’adressent le programme « Climat-EigerEcoles» et le tout nouveau programme «Eiger Climate Excursion». Donner à ces jeunes une information à jour et de qualité est le meilleur investissement que nous puissions faire pour l’avenir. Je souhaite longue vie et plein succès aux programmes «Climat-Eiger-Ecoles 2011» et « Eiger Climate Excursion» !

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