3 millions de chômeurs, 32 milliards pour la formation… - La Tribune

8 nov. 2013 - Skolkovo, une Silicon Valley à la mode russe. Par Francis Pisani. > LE CARNET ...... listes que l'on n'avait plus vues, à ce niveau d'intensité, depuis très longtemps. ...... X-Mines, créateur et dirigeant d'entreprises, le Tunisien ...
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La feuille de route imposée par Michel Sapin, le ministre du Travail, est claire : les partenaires sociaux ont jusqu’à la fin de l’année pour réformer la formation professionnelle, accusée de manquer d’efficacité et de ne profiter qu’à ceux qui en ont le moins besoin. PAGES 4 à 7

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L’ÉCONOMIE FLEUR PELLERIN : LE BORDELAIS BRETONNE EST-ELLE SON PLAN POUR MET DE LA TECHNO EN DANGER!? LES START-UP DANS SON VIN PAGE 9 PAGE 10 PAGE 18

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3 MILLIONS DE CHÔMEURS, 32 MILLIARDS POUR LA FORMATION…

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3

VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

Le nouveau parti politique Nous Citoyens recrute. Déjà plusieurs

LA SNCF ASSAILLIE

Transdev embraye le pas d’Arriva, la filiale britannique de Deutsche Bahn, qui a demandé la semaine dernière que les régions puissent tester, dès 2016 pendant deux ans, l’impact de la mise en concurrence des réseaux régionaux, aujourd’hui exploités par la SNCF. Soit bien avant l’ouverture à la concurrence des trains de voyageurs, en 2019. La filiale de la CDC et de Veolia demande aussi une « ouverture à la concurrence de manière expérimentale avant 2019 ».

3

Travail du dimanche : le rapport Bailly mettra les pieds dans le plat

E

n attendant la représentativité syndicale, à l’image de Clic-P, publication du rapl’intersyndicale du comport de Jean-Paul merce parisien qui a fait Bailly, chargé par Francondamner Sephora, çois Hollande de Monoprix et Franprix. débroussailler le terrain pour une évolution de la Pour la Chambre de comloi Mallié sur le travail du merce de Paris Île-deFrance, qui a rendu un soir et du dimanche, de rapport transmis à la premières fuites laissent entendre que l’ancien commission Bailly, le sysUn système jugé « complexe, patron de La Poste n’entème actuel est à la fois incohérent et absurde ». « complexe, incohérent tend pas faire dans l’eau tiède. Il devrait prendre le juridiquement et absurde sujet de façon globale, de économiquement ». Elle la concurrence entre plaide pour une « libéralicommerçants jusqu’aux sation maîtrisée  » s’appouvoirs d’autorisation puyant sur une loi simplidérogatoires de l’adminisfiée et rappelle quelques tration. Les failles se mulchiffres : l’e-commerce tiplient en effet avec l’epèse 45 milliards d’euros, commerce, qui se met à livrer même le soit 7"% du commerce de détail hors alimentaire. dimanche. Le rapport insistera sur la nécessité Paris accueille chaque année 29 millions de toude fixer un nouveau cadre avec des critères plus ristes. L’impact économique d’une ouverture objectifs, afin de réduire le risque de judiciari- dominicale est évalué à 15"000 emplois en plus sation dans lequel se sont engouffrés certains pour la région Île-de-France (lire aussi page 26). syndicats. Attendu mardi 12 novembre, le rap- Reste à voir si François Hollande prendra le port Bailly insistera aussi sur la nécessité de risque d’un conflit sur ce dossier social alors que donner plus de place au dialogue social dans ses marges de manœuvre politiques se sont carl’entreprise et mettra les pieds dans le plat de la bonisées avec la suspension de l’écotaxe.T

L’ouverture dominicale permettrait de créer 15!000 emplois.

Écotaxe : cher coût de gestion…

En mai 2012, le gouvernement Fillon signe avec Ecomouv’ – coentreprise entre Autostrade per l’Italia (70!%), Thales, la SNCF, SFR et Steria – un contrat la chargeant de gérer le système électronique de collecte de l’écotaxe (censée s’appliquer le 1er janvier 2014 aux poids lourds de 3,5 tonnes et plus). En cumulant les coûts d’installation et ceux d’exploitation pour une

COULISSES > Travail du dimanche : le rapport Bailly mettra les pieds dans le plat.

L’ÉVÉNEMENT 4-6 Formation : oseront-ils la réformer"? >Un business en mutation. 7 Financement du paritarisme, une question qui dérange. 8 9 10 11 12

LE BUZZ L’ŒIL DE PHILIPPE MABILLE

Ils ont des bonnets rouges… Web TV de latribune.fr L’économie bretonne est-elle plus en danger que celle d’autres régions"? Entretien avec Fleur Pellerin : « L’innovation, c’est un projet de société. » Une « bourse Pellerin » pour les startuppers. Le « shadow banking » au secours des PME. > Le 1er distributeur automatique de bitcoins.

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16 18 19

durée de onze ans, il apparaît que 27!% des recettes annuelles totales reviendront à Ecomouv’. Si l’on ne compte que les versements annuels hors coûts d’installation, un peu plus de 20!% devraient être reversés au prestataire. Soit le coût de collecte de l’impôt le plus cher de France, bien plus que son équivalent allemand. En savoir plus sur latribune.fr

L’ENQUÊTE Méditerranée : le défi d’un nouveau contrat social. ENTREPRISES & INNOVATION Robots et caméras pour mieux protéger les locaux. Le Bordelais met de plus en plus de techno dans son vin… Les e-commerçants ont-ils raison de se lancer dans l’alimentaire"?

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24 25

IRA, IRA PAS À DAVOS!? A priori, en

2014 comme en 2013, François Hollande n’ira pas à Davos. Il sera ainsi le seul dirigeant européen à ne jamais s’y être rendu, même quand il n’était pas président. À moins que son secrétaire général adjoint, Emmanuel Macron, et Pierre Moscovici, qui sera lui du voyage comme quelques autres ministres, notamment Fleur Pellerin, ne convainquent le chef de l’État que profiter, comme Merkel et Cameron, de la vitrine internationale qu’est le World Economic Forum pourrait être une bonne opération de marketing pour la France, dont l’image à l’étranger est très dégradée. Le thème retenu cette année (22 au 25 janvier 2014) pourrait inspirer le président : « Reshaping the world. »

500!000 4x4 Duster par an! Renault veut rejoindre le

club très fermé des constructeurs qui fabriquent plus de 500"000 voitures par an d’un même modèle. Le constructeur compte pour cela sur son 4x4 à bas coûts, le Dacia Duster, qui sera produit à 370"000 unités dès cette année (contre 300"000 Clio IV). Le Duster est un succès planétaire. Il est produit dans cinq usines, en Roumanie, en Russie, en Colombie, en Inde et au Brésil. L’assemblage est prévu en Indonésie.

© RENAULT

Karine Berger fait la chasse à l’optimisation fiscale.

SOMMAIRE

© JACQUES DEMARTHON/AFP

Les députés PS, emmenés par la secrétaire nationale à l’Économie, Karine Berger, veulent empêcher que le Crédit impôt recherche (CIR) donne lieu à de l’optimisation fiscale chez les grands groupes qui dépassent le plafond de 100 millions d’euros. Karine Berger a accepté de retirer son amendement dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances, sous réserve d’aborder ce problème lors du débat sur le collectif budgétaire de fin d’année. Mais les experts de Bercy mettent en avant la difficulté de trouver une solution technique. Le Crédit impôt recherche restera donc en l’état.

© PATRICK VALASSERIS/AFP

Le CIR restera tel quel

© MIGUEL MEDINA/FP

milliers d’adhérents selon son fondateur, Denis Payre (lire page 8), et pour le moment un seul nom (un peu) connu : le navigateur Marc Thiercelin (photo).

LES IDÉES Le centenaire de 1914 et la crise financière. Pourquoi l’État peut mieux aider les PME innovantes. LES CHRONIQUES Crise : des vérités si dérangeantes. Par François Leclerc. Skolkovo, une Silicon Valley à la mode russe. Par Francis Pisani. > LE CARNET DE FLORENCE AUTRET À BRUXELLES

La main (pas si) invisible de la City prise dans le sac.

TERRITOIRES / FRANCE 20 Lyon, laboratoire des réseaux électriques intelligents.

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TERRITOIRES / INTERNATIONAL Anvers attend depuis 1839 sa ligne directe pour la Ruhr.

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L’INTERVIEW William Koeberlé, président de Marionnaud : « Comment essayer un parfum sur Internet"? »

2,2

L’ÉVÉNEMENT

Ce sera, d’ici à 2020, le nombre de postes exigeant au moins un niveau Bac et impossibles à pourvoir faute de candidats qualifiés, selon l’étude McKinsey sur l’emploi en France (mars 2012). Parallèlement, 2,3 millions d’actifs n’ayant pas atteint le niveau Bac pourraient se retrouver sans emploi.

«

LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

La formation professionnelle a un rôle à jouer dans l’ascenseur social. »

millions

GILBERT CETTE, ÉCONOMISTE ET COSIGNATAIRE DU RAPPORT « RÉFORMER VRAIMENT LA FORMATION PROFESSIONNELLE », POUR L’INSTITUT DE L’ENTREPRISE.

© DR

4

6!%

C’est le taux d’actifs ayant accédé à la formation professionnelle en 2009, ce qui place la France en 14e position dans l’Europe des 15, devant la Grèce, mais loin derrière le Danemark (32"%), la Suède et la Finlande (22%).

FORMATION : OSERONTLE CONTEXTE Alors qu’elle coûte chaque année 13,7 milliards d’euros aux entreprises, la formation professionnelle est accusée de manquer d’efficacité et de ne profiter qu’à ceux qui en ont le moins besoin. Le ministre du Travail, Michel Sapin, demande aux partenaires sociaux de se mettre d’accord sur une remise à plat du dispositif. L’ENJEU Dans notre société de la connaissance, la formation professionnelle est au cœur des enjeux de compétitivité, la réformer est indispensable pour adapter les actifs à la mondialisation. Quelle serait la réforme idéale"? Six pistes pour y arriver. Accusée de coûter 31,5 milliards d’euros sans résultats probants, blâmée pour servir de pompe à e p u i s q u e l q u e s finances aux syndicats comme au semaines, ça sent le patronat (lire page 7), épinglée par soufre chez les parte- la Cour des comptes en 2008 pour naires sociaux. Pous- des stages inadaptés aux besoins sés par Michel Sapin, des salariés, la formation profesils se sont lancés le 24 septembre sionnelle pâtit de sa complexité et dans des négociations difficiles sur de son manque de transparence. un sujet pour le moins ardu qui « Quand il a été créé en 1970 par les touche à beaucoup d’intérêts : la partenaires sociaux, le dispositif formation professionnelle. Or, la visait à qualifier en masse des salafeuille de route que leur a donnée riés peu formés dans un contexte de le ministre du Travail, de l’Emploi, plein-emploi », explique Stéphane de la Formation professionnelle et Lardy, secrétaire confédéral de FO du Dialogue social est claire : ils et négociateur de l’accord. Depuis, doivent trouver un accord pour le moins que l’on puisse dire, c’est réformer le dispositif avant la fin que le contexte économique et de l’année. Et pas quessocial a bien changé… Et tion cette fois de se qu’une vraie remise à plat contenter de petites s’impose. e réformes comme en Pour les entreprises, la 2004 et 2009. Michel sur 24. C’est formation professionnelle est une obligation Sapin veut voir l’intégra- la position de d’investissement. La loi lité du dispositif remis à la France dans plat. Pourquoi"? La le classement leur impose de consacrer 2013 de l’OCDE réponse tient en trois sur les 0,9"% de leur masse salamots : inefficacité, ini- compétences riale à la formation de quité et opacité. La des adultes leurs effectifs (0,55"% pour les sociétés de réforme devra donc à la dans la moins de 10  salariés). fois donner des armes maîtrise linguistique. pour mieux former les Mais aussi de participer demandeurs d’emploi et au financement de la proles salariés, du privé comme du fessionnalisation et du congé indipublic, afin qu’ils s’adaptent en viduel de formation (CIF), ce qui permanence à une économie en porte l’effort financier à 1,6"%. changement perpétuel où les com- Pourtant, les 31,5 milliards qui, au pétences et les qualifications sont total, financent la formation proessentielles à la compétitivité. fessionnelle ne sont pas centralisés FLORENCE PINAUD

D

22 !

dans un ministère. Ils ont une multitude de sources, comme le rappelle Jean-Marie Luttringer, consultant et expert de la matière : « Sur cette somme, la participation des entreprises représente 13,7 milliards d’euros. Mais elle comprend aussi les budgets de l’État pour la formation des agents de la fonction publique et l’insertion des jeunes, des régions pour l’apprentissage et les demandeurs d’emploi, de Pôle emploi et ce que dépensent les Français eux-mêmes pour se former. » La remise à plat demandée par Michel Sapin concerne essentiellement les 13,7 milliards d’euros des entreprises, avec une exigence : la formation doit aller à ceux qui en ont le plus besoin. DES POSTES VACANTS FAUTE DE CANDIDATS QUALIFIÉS

Sans doute plus facile à dire qu’à faire. Depuis trois ans, le système actuel a été épinglé par de nombreux rapports. Les uns lui reprochent de profiter essentiellement aux plus qualifiés : les ouvriers y accèdent 2,5 fois moins souvent que les cadres (Insee octobre 2012). Les autres de ne pas assez s’occuper des demandeurs d’emploi : ils sont 20,3"% à être entrés en formation en 2011, contre 42,7"% des salariés. De fait, un grand nombre de postes vacants ne trouvent pas de candidats qualifiés. Quant aux formations pour les chômeurs, beaucoup d’experts se demandent si elles sont

bien adaptées au marché du travail. Au total, observe Emmanuelle Pérès, déléguée générale de la Fédération de la formation professionnelle (FFP), « la France se place parmi les derniers dans le classement 2013 de l’OCDE sur les compétences des adultes. Sur 24 pays, elle occupe le 22e rang pour la maîtrise linguistique et le 21e pour les mathématiques"! » Pas vraiment de quoi être fier.

Face à tous ces reproches, les milliards du budget de la formation professionnelle font désordre. Quels pourraient être les objectifs d’une refondation du dispositif à laquelle se sont attelés les partenaires sociaux"? À n’en pas douter qu’elle participe à la lutte contre le chômage et qu’elle devienne un véritable levier de compétitivité des entreprises pour participer au redressement économique. Le tout

VENDREDI 8 NOVEMBRES 2013 LA TRIBUNE

13,5!%

«

En France, il n’est pas dans notre tradition d’évaluer les formateurs et de leur donner des objectifs. Mais devant les enjeux financiers du secteur, les mentalités commencent à changer. »

© DR

Tel est le taux de chômage des actifs n’ayant pas dépassé le niveau BEPC, contre 5,6!% pour ceux qui sont titulaires d’un diplôme supérieur à Bac +2. Chiffres 2012.

L’ÉVÉNEMENT

JEAN WEMAËRE, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE (FFP).

4

5

millions

Voilà le nombre d’actifs qui devront gravir une marche sur la pyramide des niveaux de formation, à l’horizon 2020, pour résorber le déséquilibre prévisible entre l’offre et la demande de compétences sur le marché du travail. (Étude McKinsey sur l’emploi en France, mars 2012).

-ILS LA RÉFORMER!? 1. ASSORTIR LE

CAPITAL FORMATION D’UN DROIT À L’INFORMATION

avec l’exigence de transparence et d’efficacité que requiert l’état des finances publiques. En prend-on aujourd’hui le chemin"? Parmi les pistes explorées, le compte personnel de formation (CPF), successeur du droit individuel à la formation (DIF), instaurerait un droit à la formation pour tous et transférable au-delà du contrat de travail. Le patronat plaide aussi pour la suppression de

l’obligation légale de 0,9"% du plan de formation, alors que les entreprises dépensent déjà en moyenne presque deux fois plus que ce que leur impose la loi. En attendant de savoir si de la fumée blanche sortira des négociations en cours, voici, de l’avis des principaux experts, les six clés de ce que serait – ou devrait être – une véritable réforme de la formation professionnelle en France.

Si le compte personnel de formation semble sur les rails, il ne sera réellement bénéfique qu’assorti de moyens d’orientation et d’accompagnement efficaces. Car disposer d’un droit sans savoir quoi en faire ne permettra pas aux moins qualifiés de monter dans l’ascenseur social. « Créé par l’accord du 11 janvier 2013 et introduit dans le Code du travail, le CPF n’est pour l’instant qu’un compteur d’heures issu du droit individuel à la formation"; il s’agit maintenant de lui donner un véritable contenu, souligne Stéphane Lardy. J’estime que ce compte doit prioritairement être utilisé pour améliorer la qualification des salariés et des demandeurs d’emploi. C’est l’enjeu majeur de cette négociation : passer d’une logique quantitative à une logique qualitative permettant à la fois d’assurer la promotion sociale et la compétitivité. » Pour ne pas s’arrêter à la porte de l’entreprise, ce compte serait universel, individuel et transférable tout au long de la vie professionnelle, que l’on soit chômeur ou en activité. S’il sera sûrement bien adapté aux cadres, le CPF devra être assorti d’un droit à l’information et à l’orientation pour les moins diplômés. Pour les accompagner, des postes de conseiller en parcours professionnel pourraient se développer dans les entreprises et dans les branches, mais aussi dans les syndicats, les mairies et les missions locales pour les personnes souhaitant gérer leur capital formation en dehors des intérêts de leur employeur. Les syndicats soulignent l’importance de garantir l’efficacité de ce compte, peut-être en le réservant à des formations labellisées CPF ou qualifiantes. Mais pour être efficace, ce nouveau droit devra aussi être simple à utiliser, ce qui invite l’idée du guichet unique dans les négociations. « Dans la mesure où il viendra s’ajouter au CIF qui qualifie de nombreux actifs et que nul partenaire ne souhaite voir disparaître, il aura besoin d’une bonne lisibilité, reconnaît Jean-Marie Luttringer. Et pour assurer son

Pour être éligible au financement par la taxe à 0,9!%, une formation doit se dérouler en groupe et face à un formateur. [AUREMAR/SHUTTERSTOCK]

caractère universel, pour les chômeurs comme pour les salariés de grands groupes ou de TPE, la réforme aura intérêt à préserver le principe de mutualisation de fonds. C’est la seule manière de rééquilibrer les chances. »

2.

VALORISER LA FORMATION COMME CAPITAL SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL

Au printemps, la Fédération de la formation professionnelle a mis au point une dizaine d’indicateurs de mesure de l’investissement formation des entreprises, dont trois indicateurs de base. « Le premier évalue le nombre d’heures de formation par an et par salarié, explique le président de la FFP, Jean Wemaëre. Il place la France en mauvaise position, avec 25 heures en moyenne contre 45 pour les pays européens. Le deuxième définit le taux d’accès à la formation par catégorie et peut laisser apparaître que les bas niveaux de qualification n’y accèdent qu’à 30"%. Le troisième répertorie les programmes de développement de compétences mis en place par l’entreprise pour aider ses salariés à évoluer vers de véritables qualifications. » En 2014, la formation professionnelle devrait faire partie des critères du Global Reporting Initiative (GRI) mesurant la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Les entreprises devront ou pourront donc afficher ce qu’elles font pour valoriser les compétences de leurs salariés et cultiver au mieux le

capital humain de notre société. Cette reconnaissance de la formation professionnelle comme capital social et environnemental lui donnera des allures d’investissement d’avenir au service de la compétitivité.

3.

FACILITER LE CALCUL DU RETOUR SUR INVESTISSEMENT DE LA FORMATION

Selon Sandra Enlart, directrice générale d’Entreprise&Personnel, « très peu d’entreprises se donnent les moyens de mesurer l’efficacité des dispositifs de formation et de savoir si les salariés formés appliquent leurs nouvelles connaissances dans leurs pratiques professionnelles ». Pourtant, apprendre à évaluer l’efficience de la formation va devenir un enjeu primordial dans les prochaines années. Pour les professions commerciales, une augmentation du chiffre est un indicateur, comme la baisse des accidents après une formation sécurité. Mais les retours sur investissement sont plus difficiles à évaluer pour des formations qualité, management ou communication. Pour que les entreprises et les branches professionnelles acceptent d’élaborer de véritables outils d’évaluation, la reforme devra les y inciter. « Ces évaluations deviendront des garanties propres à améliorer la qualité des prestations et assainir encore le marché », estime Jean Wemaëre.

6

L’ÉVÉNEMENT LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

4.

DOPER LA FORMATION DES MOINS QUALIFIÉS

Lors de la campagne présidentielle, François Hollande s’y était engagé : « Le financement de la formation sera concentré sur les publics les plus fragiles, les moins formés et les chômeurs. » Et il promet, d’ici l’an prochain, 100!000  formations aux chômeurs pour les emplois non pourvus, dont 30!000 dès 2013. Dans notre société de la connaissance, les moins qualifiés sont ceux qui ont le plus besoin d’être formés pour servir leur parcours professionnel et les intérêts de l’entreprise. En se concentrant sur les compétences de leurs cadres, les entreprises ont tendance à alimenter une baisse de l’employabilité d’une partie des salariés et donc, un chômage chronique. « Aujourd’hui, l’employeur doit maintenir les compétences de ses salariés et, demain, il devra leur permettre d’obtenir des qualifications », estime Jacques Barthélémy, avocat en droit social et cosignataire du rapport « Réformer vraiment la formation professionnelle », pour l’Institut de l’entreprise. «  Un droit des actifs à la formation financé par un prélèvement pourrait être plus pertinent. Cette forme d’assurance employabilité commence à être reconnue lorsque certaines jurisprudences sanctionnent des entreprises souhaitant licencier des salariés pour seul défaut de compétence au motif que l’employeur n’a pas tout mis en œuvre, notamment par l’information, pour y remédier. » ENTREPRISES ASSOCIÉES AU SOUTIEN DES PLUS FRAGILES

Pour inciter à une meilleure formation des moins qualifiés, le rapport de l’Institut de l’entreprise mentionne des critères de priorités sur des publics sélectionnés suivant leur niveau de qualification initiale ou leur distance à l’emploi. Un principe que les entreprises semblent avoir accepté. « Elles doivent aussi contribuer à l’effort pour des personnes mal intégrées au monde du travail en participant au financement de politiques nationales pour les bas niveaux de qualification et les publics fragiles, estime Sandra Enlart. Les grandes entreprises sont prêtes à augmenter leur soutien à ces politiques dans une logique de mutualisation. » Mais la qualification de ces salariés peu formés implique aussi de réfléchir à la motivation de personnes fâchées avec le système scolaire et aux moyens de reconnaître leurs nouvelles compétences.

© THOMAS SAMSON/AFP

FORMATION : OSERONT-ILS LA RÉFORMER!?

Le secrétaire confédéral de FO, Stéphane Lardy, souhaite « passer d’une logique quantitative à une logique qualitative ».

5. PROMOUVOIR

DE NOUVEAUX MODÈLES D’APPRENTISSAGE

Pour être éligible au financement par la taxe de 0,9!%, une formation doit généralement se dérouler en groupe et face à un formateur. Mais cette conception ne correspond plus ni à la disponibilité des salariés, ni aux formes actuelles de pédagogie. « Nous avons une vision pauvre

de la formation, regrette Sandra Enlart. Il existe une multitude de manières d’apprendre, Mooc, e-learning ou en situation de travail avec le blended-learning. Ce qui intéresse les entreprises, ce sont les formations dans leurs locaux avec une vision plus large que ce que l’on peut apprendre aux stagiaires. » Pour Stéphane Lardy, la réforme doit aussi penser aux possibilités de capitalisation des compétences. « Il faudra voir comment mieux organiser les formations afin que les stagiaires puissent capitaliser différents modules sur une année. Même si la formation ne peut être envisagée à la carte pour toutes les actions, il est important de sortir de la logique du face-à-face scolaire pas toujours adapté. » Avec des pédagogies modernes, plus interactives et des modules souples, les salariés seront sans doute plus motivés et pourront se mettre à étudier quand ils seront prêts à y accorder leur attention.

6. ACCOMPAGNER LE RETOUR DES STAGIAIRES

Directeur Formation & Compétences de CCI France, Patrice Guezou est formel : « La formation n’est pas une baguette magique qui règle tous les problèmes de compétence en entreprise une fois le stage passé. » Il arrive encore trop souvent que l’action de formation se révèle mal adaptée aux niveaux des salariés ou aux attentes de leur manager. Pourquoi!? Parfois parce que l’organisme n’est pas très bon, mais le plus souvent parce que l’entreprise a mal évalué les besoins du poste de travail. « Il est indispensable de bien prendre en compte la situation de travail et les compétences déjà acquises, précise Patrice Guezou. Il est tout aussi essentiel d’anticiper le retour des stagiaires dans leurs équipes de travail et l’accompagnement de la mise en œuvre de leurs

nouvelles compétences. Pour être vraiment efficace, le processus de développement des compétences doit être envisagé dans sa globalité. » Suivant leur expérience et leur taille, les services du personnel n’ont pas toujours le temps de travailler à cette adéquation et vont parfois choisir des programmes sans avoir bien défini les besoins et le retour sur investissement attendu. « Pour continuer à contribuer à la montée en gamme des compétences des actifs, la formation doit être envisagée comme une démarche articulant la situation de travail, le management de proximité et la motivation des salariés. Ces démarches existent et sont référencées. Elles doivent être mieux appropriées aux acteurs#! » propose l’expert de CCI France. Peut-être une bonne manière d’anticiper les besoins en compétence à travers les dispositifs de gestion prévisionnelle des emplois. T

UN BUSINESS EN MUTATION

Réorganisation, rapprochements, concentrations… les organismes de formation apprennent à mieux travailler ensemble pour mener des actions au sein de l’entreprise.

L

a formation professionnelle ne connaît pas la crise. En 2011, tous ses formateurs ont réalisé un chiffre d’affaires de 13,1 milliards d’euros (+5!% par rapport à 2010). Ils ont formé 23,8 millions de stagiaires (+5,1!%) pour un total de 1!152 millions d’heures (+4,1!%). Des organismes qui se regroupent, des offres plus qualifiantes et des actions menées près du terrain : le secteur de la formation professionnelle a aussi commencé une vaste mutation. « Les commanditaires s’adressent plus souvent aux écoles, aux universités et à l’Afpa pour des formations diplômantes, note Bernard Masingue, directeur de projet d’Entre prise&Personnel et expert de la formation professionnelle. La notion de qualification devient importante pour les entreprises qui savent qu’elle améliore l’employabilité de leurs salariés. » Dans les années 1990, les universités et surtout les grandes écoles ont commencé à investir le secteur en créant des services de formation continue. En 2010, cette filière a représenté plus de 10!% des diplômes universitaires, selon une note du ministère de l’Enseignement supérieur. Si les grandes écoles répondent bien aux attentes des commanditaires, les universités peinent encore un peu à s’adapter aux exigences du secteur privé. Leur chiffre d’affaires en formation continue a représenté 387 millions d’euros en 2010,

fessionnelle, selon la Dares. Mais ce chiffre recense de nombreux consultants et formateurs occasionnels. Seulement 18!% d’entre eux réalisent 89!% du chiffre d’affaires de la profession, soit 10!568  organismes affichant plus de 150!000 euros par an. Et parmi ces derniers, les 500 plus importants déclarent 3  millions d’euros de chiffre d’affaires par an et se partagent 44!% du marché. L’école de formation professionnelle pour adultes ESEA, au Thor, près d’Avignon (Vaucluse), forme chaque année une cinquantaine d’ébénistes et de sulpteurs-doreurs sur bois. [GERARD JULIEN/AFP]

seulement le double de celui d’un gros organisme de formation comme la Cegos. LE THÈME LE PLUS DEMANDÉ : LA SÉCURITÉ

Dans les carnets de commandes, les thèmes les plus demandés concernent la sécurité des biens et des personnes, les formations « au développement des capacités d’orientation, d’insertion sociale et professionnelle », les disciplines de santé, la gestion et l’informatique. Mais l’avenir du secteur de la formation se joue aussi dans les modèles pédagogiques proches des entreprises et les stages directement opérationnels. « Le niveau territorial va prendre beaucoup d’importance avec des formations proches ou sur le lieu de travail, estime Bernard Masingue. Dans les branches, on devrait voir se développer des for-

mations technologiques adaptées aux métiers. Enfin, le développement des compétences managériales devrait progresser au niveau national et européen avec des grandes écoles qui travaillent sur l’encadrement et la conduite stratégique. » Côté concentration du secteur, elle est réelle selon les experts, même si elle ne se décèle pas au premier coup d’œil. « Sous la pression des commanditaires, il connaît ce qu’ont vécu les SSII et les cabinets comptables, observe Jean Wemaëre, président de la Fédération de la formation professionnelle (FFP). L’offre se réorganise et les prestataires se rapprochent. Les investissements nécessaires sur les nouvelles technologies imposent désormais une certaine surface financière. » Ainsi, en 2011, le secteur comptait 58!668  organismes dispensateurs de formation pro-

18!000 « VRAIS » ORGANISMES

Cette dispersion du secteur s’explique notamment par la facilité pour obtenir un numéro de déclaration. « On y trouve une pléiade de formateurs indépendants et de petits organismes spécialisés qui travaillent en direct, mais interviennent aussi dans les formations de plus gros organismes, observe Bernard Masingue. De nombreux cabinets comptables ou juridiques demandent aussi un numéro de dispensateur de formation pour pouvoir proposer des stages en plus de leur activité principale. » Sur les 58!668 organismes enregistrés, seuls 18!000 disposent d’un code APE qui relève de la formation professionnelle. Pour être reconnu comme dispensateur de formation professionnelle, la seule contrainte est de disposer d’un casier judiciaire vierge et de se déclarer. Une fois par an, les organismes devront établir un bilan pédagogique.T 

F.P.

L’ÉVÉNEMENT

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

LE FINANCEMENT DU PARITARISME, L’AUTRE QUESTION QUI DÉRANGE Une véritable réforme de la formation professionnelle passe par une vraie réforme du financement des organisations patronales et syndicales, tant les deux sont imbriquées. JEAN-CHRISTOPHE CHANUT

LES PARTENAIRES SOCIAUX PERÇOIVENT 1,5!% DES SOMMES COLLECTÉES POUR LA FORMATION

Chaque année, environ 31,5 milliards d’euros sont dépensés au titre de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Au sein de cette enveloppe globale, la part consacrée par les entreprises atteint 13,7 milliards d’euros, soit 42!% du total. Le reste étant assuré par l’État, les régions et les ménages. Sur les 13,7 milliards dépensés par les entreprises, un peu plus de 6 milliards sont collectés par 48 organismes paritaires collecteurs agréés

Denis Gautier-Sauvagnac, ancien président de l’UIMM qui aurait détourné plus de 15 millions d’euros pour « fluidifier les relations sociales ».

(les fameux Opca, gérés paritairement par les organisations patronales et syndicales). Or, il est légalement admis que 1,5!% des montants collectés, soit 97 millions d’euros, soient destinés au financement des partenaires sociaux qui gèrent ces organismes. C’est ce que l’on appelle le préciput. S’ajoutent à cela les frais de gestion des Opca, qui peuvent représenter jusqu’à 9,9!% de la collecte (arrêté du 4 janvier 1996), soit 630 millions d’euros!! Des sommes faramineuses… Et parfois tentantes. Ainsi, on sait – via des dépositions effectuées devant le juge Le Loire en charge de l’affaire UIMM – que des montants non négligeables ont été détournés de la formation pour financer la fédération patronale de la métallurgie. De même, en 2002, au terme d’une enquête judiciaire qui a duré

cinq ans, on a découvert que 11 millions d’euros avaient été détournés par l’Opcareg (rebaptisé depuis Opcalia), l’Opca chargé de collecter l’argent de la formation professionnelle en Île-de-France. UNE OPACITÉ DANS L’AFFECTATION DES FONDS

Des scandales de ce genre, il y en a beaucoup. Il faut dire que les règles sont extrêmement floues, même si, depuis la loi du 20 août 2008, il est prévu que les ressources et dépenses des organisations patronales et syndicales doivent avoir un lien avec leur objet et doivent être retracées dans les comptes. Certes, mais comment assurer une réelle traçabilité avec l’argent de la formation!? Comme le soulignait en 2011 le rapport du parlementaire Nicolas Perruchot sur le financement

© MARTIN BUREAU/AFP

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u ministre du Travail, Michel Sapin, aux experts de la formation professionnelle, tel Pierre Ferracci, président du groupe Alpha ou Raymond Soubie, président du groupe Alixio, en passant par les divers think tanks comme l’Institut Montaigne ou l’Institut de l’entreprise, voire les syndicats eux-mêmes, tous s’accordent sur le fait qu’une réforme de la formation professionnelle passe nécessairement par un vrai changement dans le financement du paritarisme. Et pour cause, pour le meilleur (la gestion paritaire) comme pour le pire (les détournements de fonds), patronat et syndicats de salariés sont tellement impliqués dans le fonctionnement de la formation professionnelle qu’ils rechignent à engager une vraie réforme qui risquerait de leur faire perdre une importante source de revenus. Explications.

des syndicats (non publié officiellement) : « Les partenaires sociaux participent à la gestion des Opca, dont la mission est de financer des stages de formation. D’autre part, les mêmes organisations sont souvent amenées à créer dans leurs mouvances des centres de formation.  » Elles sont donc à la fois juges et parties. Et rien de plus simple que de créer des stages bidons, de gonfler le nombre de participants ou de surfacturer… À mi-mots, certains responsables syndicaux reconnaissent qu’il y a (eu) ce genre de débordements : « Plutôt que de dire que le préciput de 1,5"% prélevé sert à la gestion de la formation, il aurait été beaucoup plus honnête de dire que ce prélèvement permettait de financer l’activité des partenaires sociaux », reconnaît Philippe Louis, l’actuel président de la CFTC qui, auparavant, en était le trésorier. Une opacité dénoncée depuis des lustres par la Cour des comptes ou par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), sans que rien ne change vraiment… Même l’affaire de l’UIMM et les quelque 15 millions d’euros détournés « pour fluidifier les relations sociales », selon l’expression de son ancien président, Denis Gautier-Sauvagnac, ne semblent pas vraiment faire bouger les choses. Pourquoi!? LES SYNDICATS MANQUENT DE RESSOURCES PROPRES SUFFISANTES

Tout simplement parce que les syndicats n’ont pas les moyens de leur existence, faute d’un nombre d’adhérents suffisant. Ainsi, selon

FOCUS

Après avoir frôlé la cessation de paiement, l’association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) plaide pour un renforcement du lien entre formation et recrutement. Le premier organisme français propose des stages dans 13  secteurs où sont identifiés des métiers en tension, dans le cadre du plan 30"000 (formation de 30"000  chômeurs aux métiers qui peinent à recruter). Très positionnée sur la formation des demandeurs d’emploi (100"000 stagiaires sur 170"000 en 2011), l’Afpa mise sur les formations qualifiantes et les filières d’avenir,

comme les techniques de maintenance industrielle ou d’intervention du froid industriel. Mais parce que ces formations nécessitent des investissements lourds, peu de centres les proposent. Et les chômeurs peinent à y accéder en dehors de leur région car ces dernières ne peuvent assurer seules les frais de déplacement. « Ce sont des métiers en croissance, mais qui représentent un volume d’emploi faible à l’échelle d’une région, explique Yves Barou, président de l’Afpa. Faute d’une commande nationale, ces formations ne trouvent plus de

© CHAMUSSY/SIPA

L’Afpa se positionne sur les filières d’avenir

financement et leur activité baisse malgré les besoins de recrutement. Pour les pérenniser, les acteurs doivent comprendre l’urgence à les financer, dans le cadre de la réforme. » T F.P.

des éléments rassemblés par le conseiller d’État Raphaël HadasLebel, on parviendrait grosso modo à la situation suivante : 220,6 millions de budget dont 145 millions hors cotisations!pour la CGT!; 138 millions de budget dont 69 millions hors cotisations pour la CFDT!; 61 millions de budget dont 26 millions hors cotisations!pour FO!; 60 millions de budget dont 48 millions hors cotisations pour la CFTC. Et, côté patronal, la CGPME percevrait 2,3 millions de cotisations… pour 16 millions de subventions. Étant entendu, donc, que l’argent de la formation représente une bonne partie de ces subventions. Comment faire pour assurer le financement du paritarisme, sans passer par la formation professionnelle!? L’AVENIR EST À UN FINANCEMENT CLAIR

Deux pistes sont possibles  : alternative ou cumulative. D’abord, à l’instar des partis politiques, un financement public clair pourrait être organisé. Chacune des organisations syndicales pourrait recevoir une subvention proportionnelle à son poids sur l’échiquier, maintenant qu’il existe tous les quatre  ans une élection de représentativité. Ces sommes serviraient à « dédommager » les organisations pour les missions de service public qu’elles assurent (participation à la gestion des organismes paritaires, notamment). Autre piste, multiplier les accords de financement du dialogue social. Le secteur de l’artisanat a ouvert la voie il y a plus de dix ans. l’Union professionnelle artisanale (UPA) a signé en 2001 avec les cinq organisations syndicales un accord prévoyant que chaque entreprise versera annuellement 0,15!% de sa masse salariale afin de financer le dialogue social. Pendant près de dix ans, la CGPME et le Medef ont contesté la validité de cet accord, en pure perte. Il serait donc savoureux que ces deux organisations suivent maintenant l’exemple de l’UPA. D’autant plus que, dans leurs champs respectifs, l’Unapl (professions libérales) et la FNSEA (agriculture) ont également finalisé ce type d’accord de financement. Si rien n’est fait dans ce sens, la déjà longue chronique des faits divers sur le «  financement occulte des syndicats », qui fait la joie de certaines gazettes ou de certains auteurs, ne demandera qu’à s’enrichir.T

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IL A OSÉ LE DIRE

« S’il était nécessaire de faire plus [d’économies] nous le ferions », A ASSURÉ

MARDI 5 NOVEMBRE LE MINISTRE FRANÇAIS DU BUDGET BERNARD CAZENEUVE, AU MOMENT OÙ BRUXELLES DOUTE DU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE DE LA FRANCE ET DU RETOUR DU DÉFICIT SOUS LES 3!% DU PIB EN 2015.

L’ŒIL DE PHILIPPE MABILLE

I

l y a quelques années, la colère de la France laborieuse se tournait souvent vers les entreprises et les patrons. Il y a bien eu le saccage de la préfecture de Compiègne en 2009 par des salariés de Continental, mais, avec l’affaire de l’écotaxe et la grande colère des « bonnets rouges » bretons, la violence se tourne désormais de façon spectaculaire vers l’État et ses symboles, ici, des portiques. Une quinzaine d’installations d’Ecomouv’ ont déjà été détruites et le mouvement parti de la pointe occidentale du pays menace de s’étendre vers le sud, alimentant des revendications régionalistes que l’on n’avait plus vues, à ce niveau d’intensité, depuis très longtemps. Paris contre province, sentiment d’abandon et d’isolement de la périphérie face au pouvoir central et à la gouvernance aveugle de Bruxelles, Jacobins contre Girondins. La crise bretonne nous interpelle tous et atteint non seulement l’autorité de l’État, mais plus profondément encore, la cohésion sociale d’une république française fragmentée, et même fracturée si l’on en croit l’économiste et urbaniste Laurent Davezies dans La Crise qui vient (Seuil, 2012). L’universitaire, très écouté par le pouvoir, y décrit une France où les territoires sont entrés en grande souffrance et se livre à une critique sans concession de la décentralisation telle qu’elle a été réalisée. Le cas de la Bretagne est donc bien plus qu’une révolte fiscale. C’est aussi et surtout la conséquence d’un manque d’anticipation dans une région qui a fait des choix stratégiques risqués et surtout qui n’a pas réussi à s’adapter à la nouvelle donne économique européenne et mondiale. On le voit avec la réforme en cours de la politique agricole commune, l’agriculture intensive a vécu et, en tout cas dans des pays à coût

du travail élevé, elle est un choix suicidaire tant pour l’emploi que pour l’environnement. Dans le travail engagé pour offrir un nouveau pacte de croissance à la Bretagne, il serait donc illusoire de compter sur le rétablissement des aides européennes. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas aider la Bretagne, bien au contraire, mais l’enjeu est ailleurs. AU-DELÀ DE LA CRISE ACTUELLE, UNE RÉGION QUI NE MANQUE NI D’ATOUTS NI DE RESSORTS

«

Le gouvernement, s’appuyant sur le rapport Innovation 2030 remis par Anne Lauvergeon dont c’est l’un des sept défis prioritaires, a commencé à proposer à ses interlocuteurs bretons de travailler sur la grande question du XXIe siècle, celle de l’alimentation. L’innovation, qui est mise à toutes les sauces en cet automne, au secours de la Bretagne, voilà le projet d’avenir qui pourrait bien offrir une porte de sortie à la crise actuelle. Certes, la Bretagne, comme toute la filière agroalimentaire française, a bien raison de dénoncer la concurrence déloyale qui a prospéré à l’intérieur même du cadre européen. Le débat sur le salaire minimum qui agite la construction de la prochaine grande coalition au pouvoir outre-Rhin y répondra peut-être. Mais, le mal est fait, et l’enjeu se déplace maintenant plutôt sur la façon dont la Bretagne, comme d’ailleurs toutes les régions françaises, va refonder une économie diversifiée pour créer les emplois de demain.

© DR

Ils ont des bonnets rouges… Ce que montre notre supplément sur les « entreprises qui innovent » à Rennes, c’est qu’il y a sous la crise actuelle beaucoup de bonnes raisons d’espérer dans le dynamisme d’une région qui ne manque pas d’atouts et de ressorts. D’ailleurs, son taux de chômage est encore bien inférieur à la moyenne nationale (lire page ci-contre). Il lui reste maintenant à refonder un plan stratégique : celui-ci passera évidemment par l’agriculture, mais dans un cadre nouveau et plus innovant!; par le tourisme, même si la spéculation immobilière joue plutôt comme un frein!; par la silver économie, l’un des grands enjeux du vieillissement de la population!; et par le désenclavement d’un territoire qui, en essayant de tuer l’écotaxe, joue contre son propre camp, car l’argent qui aurait dû être prélevé sur les camions doit servir à moderniser le réseau de transports. C’est pour cela que le gouvernement ne parle que de « suspension » et a raison de refuser de céder aux ultimatums. Dans d’autres pays européens, la mise en place de ce nouveau mode de financement des infrastructures ne s’est pas non plus passée sans heurts. En France, à force de tarder, on a fini par atteindre en pleine crise un corps fiscal écorché vif. Mais sur le long terme, et à condition de rassurer la Bretagne, il est à peu près certain que cette écotaxe finira par s’imposer, sous une forme sans doute plus acceptable que le curieux et coûteux dispositif actuel.T Twitter : @phmabille

Sur le long terme, et à condition de rassurer la Bretagne, il est à peu près certain que l’écotaxe finira par s’imposer. »

WEB TV / LA TRIBUNE DES DÉCIDEURS en partenariat avec Interrogé dans le cadre de l’émission de latribune.fr, Denis Payre, fondateur de Business Objects et de Kiala, créateur d’un nouveau parti, Nous Citoyens, a répondu aux questions des internautes. Qu’est-ce qui vous a poussé à fonder votre propre parti politique, Nous Citoyens!? J’ai la conviction que le pays est bloqué, avec des conséquences sensibles pour tous les Français : chômage de masse, précarité, impôts qui explosent, endettement… À cela s’ajoute le manque de confiance des citoyens dans une classe politique composée de professionnels complètement déconnectés de la réalité, qui n’osent pas prendre les risques nécessaires pour le pays de peur de rater leur réélection. La réponse à la crise ne viendra ni des partis de gouvernement, qui nous ont mis dans cette situation, ni des partis populistes, mais de la société civile.

C’est pour cela que nous envisageons sérieusement de présenter un candidat en 2017.

L’entrepreneuriat, c’est le passeport idéal pour faire de la politique!? Nous Citoyens est aussi divers que la France. Les membres fondateurs rassemblent toutes les sensibilités, toutes les catégories socioprofessionnelles : commerçants artisans, cadres, entrepreneurs, sportifs, demandeurs d’emploi, ouvriers, qui possèdent, rassemblés, toutes les compétences nécessaires pour diriger un pays!! Je suis, par exemple, légitime sur la création d’emplois, la compétitivité, la gestion…

Que vous inspire le french bashing ambiant!? L’envergure que prend ce phénomène est grave. Cette maladie doit être traitée par tous et en particulier par les chefs d’entreprise. C’est le rôle de l’élite d’absorber le stress du pays et de diffuser un minimum de sérénité. On oublie trop souvent la quantité d’atouts dont nous disposons. Prenez l’activ ité « fonds de fonds » de la Bpifrance : c’est aujourd’hui la deuxième au monde. Nous sommes aussi le seul pays à proposer un crédit d’impôt recherche, le CIR, doté de 6 milliards d’euros qui, de facto, finance les charges sociales des ingénieurs français.

N’est-ce pas une vision un peu idéaliste de la gouvernance politique!? Notre discours est optimiste, mais il est fondé. Les Français sont des surdoués qui s’ignorent, avec un cocktail de talents incroyable : ce sont des bosseurs, des personnes capables de s’engager si un environnement motivant est mis à leur disposition. Ils ont une capacité exceptionnelle à résoudre la complexité – c’est prouvé chaque jour dans la Silicon Valley, où les développeurs français sont très plébiscités – et ils sont créatifs. Le problème, ce n’est pas la France, ni les Français. Le problème, c’est l’État!!T Interview réalisée

par Thomas Blard et Éric Walther

© JEAN-PIERRE MULLER/AFP

« Le problème de la France, c’est l’État »

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La multiplication des fermetures de sites et la révolte des « bonnets rouges » contre l’écotaxe symbolisent-elles l’irrémédiable déclin économique de la région!? Alors que le gouvernement a mis sur la table un plan pour le secteur agroalimentaire et propose de négocier un « pacte d’avenir », le point sur la difficile transition économique d’un territoire en crise.

L’économie bretonne est-elle plus en danger que celle d’autres régions!? DOUX, GAD, AMICE-SOQUET, SOPRAT, TILLY-SABCO… la liste

des entreprises bretonnes ayant connu récemment des difficultés est longue. Mais l’économie bretonne se résume-t-elle à ces sociétés en crise"? La révolte des « bonnets rouges » contre l’écotaxe symbolise-t-elle la fureur d’un territoire aux abois"? Bien évidemment, les départements bretons souffrent, comme la France entière. Selon une enquête réalisée en juin par la CCI Bretagne, la conjoncture économique n’est pas bonne. Seuls 15"% des chefs d’entreprise anticipaient une progression de leur chiffre d’affaires au cours du second semestre. UN TAUX DE CHÔMAGE INFÉRIEUR À LA MOYENNE

« Après avoir bien résisté à la première vague de la crise de la fin de 2008 et en 2009, l’économie bretonne se situe depuis deux ans sur une tendance encore plus défavorable qu’au niveau national. La Bretagne est la région ayant connu la plus forte hausse du nombre de demandeurs d’emploi en 2012. Si elle était depuis 2008 la région au taux de chômage le plus faible, avec les Pays de la Loire, elle occupait la cinquième place au deuxième trimestre 2013 », explique l’Insee. Cette dégradation de l’emploi concerne les quatre départements (Côtes-d’Armor, Île-et-Vilaine, Morbihan et Finistère) et tous les secteurs d’activité, les plus affectés étant ceux de la construction et du commerce. L’agroalimentaire et l’agriculture, qui représentent à eux deux environ 7"% à 8"% du PIB régional, ne sont donc pas les seuls secteurs à souffrir. Cependant, à la fin du deuxième trimestre, le taux de chômage, à 9,4"%, restait inférieur à la moyenne de la France métropolitaine, à 10,5"%.

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À Quimper, le 2 novembre, une manifestation des « bonnets rouges » contre l’écotaxe et pour la défense de l’emploi en Bretagne. [SALOM-GOMIS SEBASTIEN/SIPA]

L’actualité symbolise-t-elle les difficultés d’une poignée de secteurs sur le déclin, vieillissants, voire condamnés"? On ne peut nier les problèmes de l’agroalimentaire. Contrairement à leurs concurrentes allemandes ou néerlandaises notamment, qui se sont spécialisées sur quelques produits, les entreprises bretonnes appartenant

ROUGE OU NOIR!? à ce secteur se sont lancées dans les années 1980 dans une course à la diversification qui a fortement pesé sur leur taux de marge. Si on ajoute à cette erreur stratégique la baisse de la consommation de la viande, la pression de la grande distribution sur les producteurs – relevée par une étude publiée en 2009 par UFC Que Choisir – et enfin les fluctuations des prix des matières premières et du prix de la viande, on aboutit à la situation actuelle. « Mais au sein de l’agroalimentaire, les réalités sont diverses. Les secteurs de la boulangerie-biscuiterie, ou de la préparation des plats cuisi-

nés, ne connaissent pas les mêmes réalités que la filière porcine », relativise-t-on à l’Insee. LA SEPTIÈME RÉGION LA PLUS RICHE DE FRANCE

Un retournement est-il envisageable"? Après les restructurations en cours, cette hypothèse est envisageable. Dans son malheur, le secteur ne bénéficie-t-il pas d’un savoir-faire de matières premières difficilement délocalisables"? On imagine mal les vaches et les porcs d’Armorique quitter la France pour la Chine pour y revenir sous forme de plats préparés… Mais la septième région la plus riche de France, avec 82 milliards d’euros de PIB en 2012, et qui reste celle ou le taux de pauvreté et les inégalités de revenus sont les plus faibles de France, possède encore de sérieux atouts. L’entrepreneuriat y est dynamique. Au premier semestre, les créations d’entreprises ont continué d’augmenter et les défaillances n’accélèrent pas. Quant au taux de survie à cinq ans des entreprises, il atteint 56,8"% contre 51,9"% dans l’ensemble du pays avance l’Insee.

Qui seront les

lauréates de la 4e édition

?

« L’essentiel de l’économie bretonne est comme partout ailleurs tourné vers les services aux entreprises et aux particuliers qui ont longtemps tiré la croissance de l’emploi, même si actuellement l’emploi y est en léger recul. Des pôles de haute technologie, des projets dans les énergies renouvelables comme le parc éolien offshore au large de Saint-Brieuc, hydrolien au large de Brest ainsi que des investissements d’avenir tels que le prolongement TGV jusqu’à Rennes en 2017 peuvent soutenir l’activité », indique l’Insee. La région est l’une des rares à compter quatre pôles de compétitivité sur son territoire : Valorial, Images et réseaux, Mer Bretagne et ID4CAR, spécialisé dans le véhicule du futur (lire notre supplément Rennes). DES ATOUTS ET QUELQUES BELLES PÉPITES

Si l’on évoque les difficultés de Gad, Doux ou encore Tilly-Sabco, pourquoi ne pas avancer les succès de La Belle-Iloise, de Breizh Cola, d’Armor Luxe, d’Envivio spécialisée dans le développement de solutions technologiques innovantes pour diffuser des vidéos haute définition sur tous les terminaux, ou encore de Blue Solutions, la filiale du groupe Bolloré spécialisée dans le stockage d’énergie. « Par ailleurs, région gagnant 25"000  habitants par an, la Bretagne reste attractive et l’afflux de population génère de l’activité ne serait-ce que pour satisfaire ses besoins. Le secteur du tourisme est également un des moteurs de l’économie régionale », indique l’Insee. « Sur la période 1999-2007, les migrations représentaient les trois quarts de la croissance démographique, plaçant la Bretagne au 8e rang des régions les plus attractives. Ce phénomène pourrait perdurer. Entre 2007 et 2020, la contribution du solde migratoire à la croissance de population serait de 0,62"% en moyenne par an ».

Dans ce contexte, l’avenir économique de la Bretagne est-il plus noir que celui du Nord-Pas-deCalais, de la Picardie, de la Franche-Comté, de la Lorraine pour ne citer que ces régions"? Pas forcément, mais l’État est à son chevet. Mercredi 6 novembre, en conseil des ministres, Jean-Marc Ayrault a présenté un pacte d’avenir pour la Bretagne, sous la pression d’un ultimatum des « bonnets rouges » qui réclament la confirmation de la fin de l’écotaxe. « La Bretagne traverse une crise économique d’autant plus préoccupante qu’elle frappe les filières mêmes sur lesquelles la région a construit sa prospérité : l’agriculture et l’agroalimentaire, l’automobile ou les télécommunications [...]. Elle résulte, pour une grande part, d’erreurs stratégiques majeures et d’un manque d’anticipation vis-à-vis d’éléments prévisibles : fin des restitutions pour le poulet export, absence d’investissements et perte de compétitivité de la filière porcine », a déclaré le Premier ministre. Pour sortir la Bretagne de la crise, il a annoncé le lancement prochain d’un plan pour l’agriculture et l’agroalimentaire. L’objectif est de restaurer la compétitivité structurelle du secteur, notamment en matière de performance économique et environnementale. Le gouvernement a notamment décidé d’anticiper le contrat de plan Étatrégion et une aide de 15 millions d’euros pour l’agroalimentaire. Sept priorités seront déclinées dans le pacte d’avenir de la Bretagne : l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation"; l’évolution des filières structurantes (agriculture, agroalimentaire, pêche, conchyliculture et aquaculture)"; les filières d’avenir"; les infrastructures et les usages du numérique"; l’accessibilité et les mobilités durables"; la transition énergétique et écologique"; la culture et les langues régionales. T 

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FABIEN PILIU

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FLEUR PELLERIN

MINISTRE DÉLÉGUÉE CHARGÉE DES PME, DE L’INNOVATION ET DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

« L’innovation, c’est un projet de société » Jean-Marc Ayrault a présenté, lundi 4 novembre, dans le musée du design de Saint-Étienne, le plan « Une nouvelle donne pour l’innovation ». Ces mesures, concoctées par les ministres Fleur Pellerin (Innovation, PME et Économie numérique) et Geneviève Fioraso (Enseignement supérieur et Recherche), prolongent les efforts du gouvernement pour soutenir l’entrepreneuriat et la R&D, avec le pacte de compétitivité, le programme investissement d’avenir renforcé, les 34 filières industrielles et les sept secteurs clés définis par la commission Lauvergeon (Innovation 2030). La stratégie est claire : « Changer l’état d’esprit de la société » et « promouvoir l’innovation par tous », a affirmé le Premier ministre. Fleur Pellerin développe pour La Tribune le contenu et les enjeux de cette « nouvelle donne ».

PROPOS RECUEILLIS PAR DELPHINE CUNY

LA TRIBUNE – Pourquoi une « nouvelle donne pour l’innovation »!? FLEUR PELLERIN – L’innovation est un facteur essentiel de la montée en gamme de notre économie et un antidote au « low cost ». La compétition uniquement par les coûts entraînerait la France dans une spirale infernale qui n’est pas compatible avec notre modèle social. C’est pourquoi il faut nous différencier, et donc, innover. Or, nous ne maximisons pas ce potentiel de l’innovation. Par exemple, le numérique a contribué à 25"% de la croissance française contre 37"% aux États-Unis durant ces vingtcinq dernières années, ce qui représente un manque à gagner de 0,5 à 0,6 point de PIB par an pendant vingt  ans. Le numérique, et l’innovation en général, ne joue pas tout son rôle dans la création de valeur et d’emploi en France. Nous avons un problème de logiciel dans notre manière d’appréhender l’innovation, qui est souvent perçue comme un accessoire de la recherche et développement. La France est toujours bien classée en R&D, au 6e rang mondial, mais elle fait plutôt partie des pays dits « suiveurs » en matière d’innovation, autour de la 15e place selon les classements. Cela doit nous faire réagir. L’innovation n’est pas toujours issue d’une recherche scientifique. Elle vient aussi et peut-être surtout de petites structures agiles, de start-up qui osent, qui ont ce côté disruptif et sont dans une forme de dissidence, car il faut « tester » et bousculer pour que l’innovation se réalise. (

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Quelle est votre définition de l’innovation!? L’innovation, c’est un nouveau produit, un nouveau service, qui satisfait une demande ou rencontre un marché, et qui est porté par une entreprise, c’est un aspect capital. L’invention du chercheur ou de l’ingénieur est souvent fondatrice, mais une invention n’est pas encore une innovation. La création (

de valeur vient de la rencontre entre l’invention, le marketing, le design, un modèle économique… et bien sûr une demande. L’innovation doit être évaluée en fonction de son impact économique, ou du bien-être social, bref de son « output » : elle ne se mesure pas au nombre de publications scientifiques, au nombre de brevets, même s’ils sont essentiels, mais au nombre d’emplois, de produits et d’entreprises créés. Or à ce jour, il n’y avait pas d’instrument de suivi, alors que les dispositifs publics autour de l’innovation sont très nombreux. Nous allons ainsi créer une commission d’évaluation des politiques d’innovation au sein du commissariat général à la stratégie et à la prospective.

L’OFFENSIVE Et pour la première fois, il existe un ministère chargé de l’Innovation, qui a toute sa cohérence avec les PME, l’entrepreneuriat et le numérique, dont j’ai également la charge. L’innovation est un beau concept, que l’on associe à tort à l’idéologie libérale, mais qui participe en réalité d’une vision progressiste de la société et de l’économie, celle d’une gauche moderne : c’est la lutte contre les rentes, l’idée qu’il faut rebattre les cartes à chaque génération et donner sa chance à tout le monde, indépendamment des origines socioéconomiques. L’innovation n’est pas un sujet technique, c’est un projet de société. ( Comment stimule-t-on justement

« l’innovation par tous »!? Évidemment, on ne peut pas décréter l’innovation. Les nouveaux secteurs de croissance comme le numérique, les biotechnologies ou les technologies vertes ne fonctionnent pas comme cela, mais on peut créer l’environnement, les conditions favorables. On peut accompagner, accentuer des dynamiques de foisonnement et de fertilisations croisées. Il faut surtout faire sauter un verrou essen-

tiellement mental : il faut ancrer la culture de l’innovation dans notre pays, auprès des entreprises, des laboratoires, de l’État et dans toute la société, même si cela n’a pas d’effet immédiat sur l’emploi. Une enveloppe de 20 millions d’euros sera consacrée à la diffusion de la culture de l’entrepreneuriat et de l’innovation dès le plus jeune âge, via un appel à projets en lien avec le ministère de l’Éducation nationale. Il faut décrisper les Français sur le thème de l’échec utile, l’idée d’une seconde chance : la suppression de l’indicateur 040 (du fichier de la Banque de France recensant les entrepreneurs ayant fait l’objet d’une liquidation judiciaire) participe de cette vision. Plus concrètement, nous allons créer une « bourse pour les nouveaux entrepreneurs » [lire ci-contre ]. La France a-t-elle les moyens d’attirer et de garder les talents!? Il le faut, c’est un élément clé de la compétition mondiale"! Nous allons lancer un programme baptisé les « nouveaux Argonautes », qui est un peu le pendant du programme de relocalisation industrielle d’Arnaud Montebourg. Il s’adresse aux Français expatriés (il y en a 50"000 dans la Silicon Valley) pour qu’ils reviennent créer de la valeur, de l’emploi en France. Le nom est un clin d’œil à un ouvrage américain sur l’importance de la circulation des talents dans l’économie mondiale de l’innovation. Nous aurons une action ciblée, très proactive, sur ces publics afin de leur présenter les avantages qu’ils auraient à s’installer dans les écosystèmes innovants de nos territoires. Nous assistons à un mouvement mondial autour du soutien à l’innovation, centré sur les start-up, comme Startup America aux États-Unis, mais aussi en Amérique latine, à Berlin, y compris des initiatives très « agressives », comme la création de zones franches à New York. Nous ne pouvons pas rester en spectateurs et nous préparons un programme de « Quartiers numériques » qui ambitionne de mettre la France (

Fleur Pellerin veut « ancrer la culture de l’innovation dans notre pays, auprès des entreprises, des laboratoires, de l’État et dans toute la société ». [JUNG YEON-JE/AFP]

en bonne place sur la carte mondiale de l’innovation. Nous aurons par ailleurs une stratégie offensive dans les brevets, en créant un fonds souverain de propriété intellectuelle de 100 millions d’euros, qui a vocation à acheter des portefeuilles de brevets essentiels pour le développement en France des filières émergentes d’hypercroissance. Nous devons aussi renforcer notre capacité d’influence en matière de standardisation, sur le modèle du NIST américain : l’Europe avait su imposer le GSM dans le mobile, mais celui qui maîtrisera les standards de demain dans le paiement sans contact, l’identité numérique, les objets connectés, bénéficiera d’un avantage compétitif majeur. Quid du financement, le point faible de l’écosystème de l’innovation en France!? Depuis 1990, la seule success story dans l’innovation qui a émergé en France et est arrivée dans le CAC 40 est Gemalto, quand plus d’une vingtaine de champions mondiaux naissaient aux États-Unis, alors que l’économie américaine ne représente que 6,5 fois la nôtre. Le challenge qui se pose à la France, c’est donc aussi d’accompagner des entreprises innovantes de croissance qui puissent devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI) et des champions mondiaux. (

Pour cela, la France a besoin d’une industrie du financement de l’innovation performante et nous y travaillons avec Pierre Moscovici. Le gouvernement va prendre des mesures en faveur du capitalinvestissement, notamment un allégement des contraintes pesant sur les sociétés d’investissement de business angels (SIBA) en 2014, afin d’augmenter les montants unitaires investis, une simplification des FIP et FCPI, permettant d’augmenter la taille et leur champ d’intervention, ainsi qu’une action ciblée pour attirer de grands fonds d’investissement étrangers en France. Bpifrance va aussi renforcer son rôle de banque publique de l’innovation, avec son ambitieux plan de transformation interne, Nova. Elle a lancé un nouveau fonds de 500 millions d’euros, Large Venture, qui a réalisé cet été son premier investissement, de 11 millions, dans la start-up française Withings – qui a inventé la balance connectée –, en participant à un tour de table de 23,5 millions d’euros. Ce fonds va lui permettre de répondre, en coinvestissement avec le privé, aux difficultés de financements des entreprises françaises qui cherchent à lever plusieurs dizaines de millions d’euros, alors qu’aujourd’hui nos pépites s’expatrient trop systématiquement pour lever des fonds.T

LE BUZZ

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

Parmi les quelque 40 mesures du plan pour l’innovation, le lancement via Bpifrance d’une « bourse des nouveaux entrepreneurs » veut apporter une solution à l’amorçage des projets. Les régions pourront abonder ce dispositif.

Une « bourse Pellerin » pour les startuppers « RENDRE LA CRÉATION D’ENTREPRISE INNOVANTE ACCESSIBLE À TOUS, et surtout

aux jeunes qui n’ont pas de relations ou d’héritage » : c’est l’objectif de l’une des mesures emblématiques de ce plan pour l’innovation, la mise en place d’une « bourse pour les nouveaux entrepreneurs », que l’on a déjà baptisée à Bercy « bourse Pellerin », du nom de la ministre déléguée aux PME et à l’Innovation (lire son interview page ci-contre). Jean-Marc Ayrault a souligné, lundi 4 novembre, en dévoilant le plan lors d’un déplacement à Saint-Étienne, que l’objectif était de « stimuler l’intérêt et l’appétit de tous », de « promouvoir l’innovation par tous, sous toutes ses formes, en encourageant le goût pour l’innovation et la prise de risques ». Ce nouveau dispositif d’aides, sous forme de prêts ou d’avances remboursables, sera piloté par Bpifrance et doté d’une dizaine de millions d’euros par an, afin de soutenir la création de plusieurs centaines de projets innovants chaque année, quel que soit le domaine. « Cette bourse offrira un soutien autour de 30"000 euros, l’argent initial, le “love money” comme disent les Américains, pour ceux que la famille ne peut pas aider financièrement », explique Fleur Pellerin. Ce qui leur donnera « de quoi vivre le temps que l’entreprise soit mise sur les rails, en se concentrant sur leur projet d’innovation ». En effet, « l’entrepreneuriat doit jouer son rôle d’ascenseur social ».

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DES PRÊTS SANS CONDITION DE GARANTIE

L’idée serait de privilégier le volume, avec de nombreux tickets d’un montant faible : Bpifrance accordera environ 300  bourses par an, avec le soutien financier de l’Institut national de la propriété industrielle (3 millions d’euros) et probablement aussi de l’Association française pour le nommage Internet en coopération, à hauteur de 1,5 million d’euros. Ces aides seraient attribuées au choix sous forme de subventions ou de prêts participatifs bonifiés ( jusqu’à 75#000 euros) et très rapidement, dans les deux semaines après l’entretien avec Bpifrance, sans condition de garantie sur le patrimoine personnel de l’entrepreneur. Ce nouveau dispositif se veut complémentaire du concours national d’aide à la création d’entreprises de technologies inno-

vantes, porté par le ministère de la Recherche et de l’Enseignement supérieur depuis quinze ans, qui est plutôt destiné aux cher-

LOVE MONEY cheurs, dont Bertin Nahum – classé quatrième entrepreneur le plus révolutionnaire au monde,

derrière Steve Jobs, Mark Zuckerberg et James Cameron – fut l’un des lauréats en 2002 à la création de la société Medtech (robots d’assistance chirurgicale). Cette nouvelle bourse aux créateurs de start-up vise à aider directement les entrepreneurs pour accompagner la prise de risque personnelle, chez les étudiants ou les salariés, et à soutenir les innovations d’usage. Bpifrance, qui va

inaugurer un espace dédié à l’accueil des start-up au sein de son site parisien, proposera à ces entrepreneurs un accompagnement adapté : mise en contact avec un incubateur ou un accélérateur, avec un réseau de mentorat ou des investisseurs, voire des partenaires industriels potentiels. Les régions qui le souhaiteront pourront abonder le dispositif et une mise en valeur des meilleurs

projets sera organisée au niveau régional. Un jury composé de représentants de la direction régionale des entreprises (Direccte), de Bpifrance et du Conseil régional, sélectionnera les meilleurs projets. Un événement pourrait ensuite être organisé au centre de conférence du ministère de l’Économie et des Finances à Bercy, pour valoriser les 25 meilleurs projets nationaux. D.C.

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Profitant du mouvement de désintermédiation du financement de l’économie, les sociétés de gestion multiplient les créations de fonds de dette d’entreprise. Dernier exemple en date : Avenir PME Obligations, lancé par Twenty First Capital.

Le « shadow banking » au secours des PME françaises LE PROBLÈME DU FINANCEMENT DES PME FRANÇAISES

est bien réel. Alors que 70!% des dirigeants de PME éprouvent des besoins de financement, les trois quarts d’entre eux constatent un durcissement de leurs relations avec leurs banques, selon le dernier baromètre KPMG/CGPME, publié le 10 octobre. Des banques qui représentaient jusqu’à présent 92!% des ressources financières des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Mais du fait notamment de la réglementation qui vise à renforcer leurs fonds propres (Bâle III), elles vont avoir plus de mal à assumer leur rôle de financeur de l’économie réelle dans les prochaines années. « Les banques ne sortent pas massivement du crédit bancaire, elles sont toujours là pour les problèmes de trésorerie des PME, mais elles financent beaucoup moins qu’avant leur développement, notamment leurs opérations de croissance externe », observe Camille Barbier, directeur des gestions au sein du fonds d’investissement Twenty First Capital. Qui, alors, pour prendre la relève des banques, dans le cadre de ce mouvement de désintermédiation du financement de l’économie!? Le capital-investissement, qui pèse 7!% dans le financement des

Faire converger les intérêts des assureurs, qui brassent des milliards d’euros, et ceux des PME… une idée qui n’a pas échappé aux sociétés de gestion. [PRESSMASTER/SHUTTERSTOCK]

PME!? Pas vraiment, il est assez à sec : au premier semestre, les fonds français de private equity ont levé 3,6 milliards d’euros seulement, alors que les besoins des PME et des ETI flirtent avec les 11 milliards, bon an, mal an. La Bourse, qui représente 1!% dans le financement des PME françaises!? Certes, le gouvernement ne ménage pas ses efforts à ce sujet, avec la création de la Bourse des PME et du PEA PME. Mais encore faut-il que les épargnants se laissent convaincre. Ce qui n’est pas gagné, à en juger par le sondage publié le 22 octobre par Opinionway : 78!% des personnes interrogées estiment qu’un place-

ment en actions est d’abord risqué, avant d’être lucratif (44!%) ou citoyen (18!%). LES MILLIARDS PRÊTS À SE PLACER DE L’ASSURANCE-VIE

En fait, il existe une autre catégorie d’acteurs susceptibles de prendre le relais des banques pour financer le développement des PME. Des acteurs que l’on regroupe dans l’appellation « shadow banking » ou « finance de l’ombre  ». Pas nécessairement parce qu’ils évoluent en dehors de toute réglementation, mais parce qu’ils s’aventurent sur le terrain du prêt aux PME sans être soumis aux règles des banques, pour la simple

raison qu’ils ne sont pas des établissements de crédit. C’est le cas, en particulier, des assureurs, que la modification du Code des assurances (le 7 août 2013) autorise désormais à investir en direct dans de la dette d’entreprise. Une évolution réglementaire d’autant plus appréciable que, dans le contexte actuel de taux d’intérêt très bas, les assureurs cherchent désespérément du rendement pour les milliards d’euros qu’ils brassent, à commencer par ceux de l’assurance-vie, dont l’encours dépasse les 1!400 milliards d’euros. Une somme pour l’heure investie à hauteur de 1,5!% seulement dans le non-coté, regrette Camille Barbier. Faire converger les intérêts des PME et ceux des assureurs et autres mutuelles, l’opportunité n’a pas échappé aux sociétés de gestion. Dans le sillage de ses concur-

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cotées, afin de les aider à financer leurs projets de croissance. « Nous sommes à la frontière du capitalinvestissement et du crédit bancaire », estime Stanislas Bernard, président de Twenty First Capital. Ce modèle n’est pas sans rappeler celui de Novo, le premier fonds de prêts à l’économie lancé par le gouvernement, l’été dernier. Ce fonds obligataire, auquel participent quelque 17 assureurs, investira 1 milliard d’euros au total dans 30 à 40  PME de croissance et entreprises familiales non cotées. « Le projet Novo est une initiative intéressante, mais il s’adresse surtout aux ETI », nuance Sébastien Grasset, directeur général de Twenty First Capital. Et d’insister : « Avenir PME Obligations cible les véritables PME, celles qui font moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. » Et qui sont rentables, à l’image d’Acebi, dont l’émission obligataire de 864!000 euros, destinée à financer la transmission à l’un de ses cadres de cette PME nantaise spécialisée dans la construction navale, a constitué la toute première opération d’Avenir PME Obligations, en avril dernier. Le fonds s’est fixé pour objectif une quarantaine d’émissions obligataires. Avis aux amateurs. T

FINANCEURS

rents Tikehau et Acofi, Twenty First Capital vient de lancer Avenir PME Obligations, un fonds de dette de 67 millions d’euros, qui permet aux assureurs et autres investisseurs institutionnels ayant souscrit à ce véhicule d’investir dans des obligations de PME non

CHRISTINE LEJOUX

À Vancouver, on n’aura plus besoin d’aller sur un site Internet ou de se rencontrer physiquement pour s’échanger de la monnaie virtuelle. On pourra en acheter et en vendre via un distributeur automatique!!

LES DAB, DISTRIBUTEURS AUTOMATIQUES DE BILLETS,

tout le monde connaît. Mais connaissez-vous les « RoboCoins »!? Un indice : il y a un rapport avec une monnaie virtuelle créée en 2009… Oui, ce sont des distributeurs automatiques de bitcoins, cette fameuse monnaie électronique expérimentale qui n’est gérée par aucun État ni aucune banque centrale, dont la valeur est entièrement flottante et très volatile. Un bitcoin vaut aujourd’hui 151,56 euros, selon le

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site Likeforex.com. Jusqu’à présent, pour se procurer des bitcoins, il fallait se rendre sur Internet, sur des sites comme Mt.gox ( japonais) ou BitcoinCentral (français) par exemple.

#!ROBOCOINS À Vancouver, Canada, on peut donc en acheter et en vendre depuis quelques jours grâce à des distributeurs automatiques. Comment ça marche!? Pour effectuer une transaction, une

personne qui détient un compte bitcoins devra s’identifier via un contrôle biométrique, en posant sa main sur la machine, par exemple. Une fois authentifiée, elle pourra commander la somme de bitcoins de son choix, à condition de ne pas dépasser 3!000 dollars canadiens (2!100 euros) par jour, afin d’éviter le blanchiment d’argent. Puis le distributeur lui envoie un code QR dans le portemonnaie électronique de son smartphone et imprime un ticket. La machine permet aussi d’échanger des bitcoins contre des dollars et inversement.

Les distributeurs de bitcoins arriveront-ils jusqu’en France!? La société qui les commercialise, RoboCoin, vise en tout cas le marché mondial et dit avoir déjà reçu « des demandes venant d’une vingtaine de pays, tels que l’Australie, la République tchèque, le Kenya, les Philippines et la Thaïlande », sur son blog. Pour les États-Unis, il faudra probablement encore attendre : « La législation actuellement en vigueur représente un obstacle à l’entrée sur le marché pour tout nouvel opérateur », estime le PDG de RoboCoin, Jordan Kelley.

© PIOTR PAWINSKI / FOTOLIA.COM

Le premier distributeur automatique de bitcoins débarque au Canada

Les guichets RoboCoin se vendent autour de 20!000 dollars l’unité. Ceux qui décident d’en acheter percevront un pourcentage sur les transactions et pourront espérer attirer dans leur boutique les fans de cette monnaie virtuelle d’origine japonaise.T ADELINE RAYNAL

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MÉDITERRANÉE Et si développer les industries créatives et culturelles dans

LE DÉFI D’UN NOUVEAU LES FAITS Les pays du Sud méditerranéen sont si mal placés dans le classement mondial de l’innovation qu’ils courent le risque bien réel d’un décrochage de l’économie de la connaissance. LES ENJEUX « Mobiliser le capital humain sur l’innovation en Méditerranée » pour sortir par le haut de la crise économique et sociale, c’est ce que propose un ambitieux rapport d’économistes des deux rives du Mare Nostrum.

«

«

PR JEAN-LOUIS REIFFERS, PRÉSIDENT DU FEMISE

EMMANUEL NOUTARY, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL D’ANIMA INVESTMENT NETWORK

Il s’agit de développer la créativité de la société dans toutes ses composantes. »

produit pas, ou trop peu, d’effet d’entraînement entrepreneurial. Plus largement, revendiquant une approche organique et l’ambition de « proposer une vision d’ensemble visant à orienter la société vers l’innovation », les rédacteurs préconisent des réformes et des mesures dont le caractère apparemment technique ne cache pas l’essence fondamentalement politique : une gouvernance décentralisée et des universités plus auton o m e s aya n t l a c a p a c i t é

d’emprunter, y compris à des bailleurs internationaux"; la généralisation des bourses au mérite, afin de réduire la tendance forte à la dualisation du système d’insertion sociale"; adapter les systèmes de formation afin qu’ils intègrent les nouveaux paradigmes d’employabilité et de créativité… L’ESPOIR, LA CONFIANCE… LA LIBERTÉ

Et puis, page  157, le propos tourne clairement au programme politique, puisqu’il est question d’« éliminer toutes les formes d’obstacles qui privent les hommes et les femmes d’accéder à l’ensemble des opportunités. Ces différentes formes d’obstacles sont la pauvreté, l’exclusion sociale, l’isolement géographique, les inégalités de genres, la privation des droits civiques, l’absence du droit, la règle de l’arbitraire et, par conséquent, certaines formes de corruption… » Un propos que le professeur JeanLouis Reiffers assume pleinement : oui, « il s’agit d’un discours politique qu’il faut faire partager aux populations des pays méditer-

Le plus souvent, la co-innovation passe par les partenariats de sous-traitance. »

© A. M.

ans le contexte actuel d’incertitudes économiques et politiques, il n’est pas évident, tant s’en faut, d’esquisser une vision de moyen et long termes pour l’innovation dans les pays sud-méditerranéens. C’est pourtant le défi qu’essaie de relever le Forum euroméditerranéen des Instituts de sciences économiques (Femise, à Marseille), dans son rapport intitulé « Mobiliser le capital humain sur l’innovation en Méditerranée ». Ce document de près de 300 pages, dont La Tribune a pu prendre connaissance, devait être rendu public samedi 9 novembre lors de la 9e édition des Rendez-vous économiques de la Méditerranée, à Marseille*. Le rapport dresse d’abord un constat sans concession des piètres performances des pays du Sud et de l’Est méditerranéen (les PSEM). Ainsi, sur les 141  pays retenus en 2013 par l’indice mondial de l’innovation (Global Innovation Index, GII), élaboré à partir de 90 critères, un groupe classé dans la première moitié rassemble la Jordanie (46e), la Tunisie (58e), la Turquie (61e) et le Liban (63e), tandis qu’un second groupe apparaît nettement distancé : le Maroc (90 e), l’Égypte (99 e), la Syrie (130 e), l’Algérie (134 e). Seule exception, Israël qui, au 13e rang,

se situe parmi les pays les plus performants au monde. Mais, au-delà de l’analyse de la situation, l’intérêt de l’ouvrage –  dirigé par le professeur JeanLouis Reiffers, président du Comité scientifique du Femise et de l’Institut de la Méditerranée – tient à la remise en cause de quelques postulats qui naguère encore passaient pour indiscutables. C’est le cas par exemple de la rapide ouverture économique des PSEM à l’international, qui, il faut bien se résoudre à l’observer pour la plupart d’entre eux, n’a pas « conduit automatiquement à l’accumulation de connaissances et au développement ». La pertinence de la création de clusters est elle aussi réévaluée. On a ainsi relevé qu’ils sont à la fois relativement peu créateurs d’emplois et que leur localisation, souvent excentrée, ne

© A. M.

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ALFRED MIGNOT

Un embryon d’industrie aéronautique a émergé au Maroc à la suite d’une première création de coentreprise entre Safran et Royal Air Maroc, en l’an 2000. [FADEL SENNA/AFP]

ranéens et, en particulier, à leur jeunesse… Ce discours politique est fondé sur l’espoir, la confiance en soi, la participation aux décisions, la liberté. Tout cela aide à la prise de risque indispensable pour l’innovation, une des voies les mieux à même d’offrir une sortie par le haut aux sociétés méditerranéennes », écrit-il à propos du rapport dans le cahier n° 2 de l’Office de coopération économique pour la Méditerranée et l’Orient (Ocemo). Sous la plume d’un universitaire reconnu pour son expertise des questions méditerranéennes, auxquelles il se consacre depuis des décennies, ces mots résonnent d’une manière singulière. Comme si les « sachants » de la rive nord, un temps désemparés par l’irruption des printemps arabes que personne n’avait vu venir, osaient à nouveau exprimer leur vision de l’avenir euroméditerranéen. « Mais non, se défend Frédéric Blanc, lui aussi économiste et directeur général du Femise. Nos partenaires du Sud participent à nos travaux, il ne s’agit pas d’une vision nordiste, mais méditerra-

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s les pays du Sud et de l’Est méditerranéen était la solution de sortie de crise!?

CONTRAT SOCIAL

1,1 % ( du total mondial, c’est l’estimation des retombées économiques actuelles de l’innovation dans les pays du Sud méditerranéen. Elles sont, en outre, largement concentrées : 80 % rien que pour la Turquie et Israël, 10 % pour l’Égypte.

néenne. En nous fondant sur l’expertise académique, nous cherchons à dégager un consensus et à proposer une vision pour l’action. » LA PROFITABLE COOPÉRATION NORD-SUD

Au-delà des préconisations, cette vision pour l’action inclut aussi la promotion d’une « coopération institutionnelle Nord-Sud s’inscrivant dans la pérennité », notamment pour créer un espace euroméditerranéen de l’innovation, et pour cela « encourager les partenariats et les accords de transferts technologiques avec les multinationales qui s’implantent dans les pays méditerranéens ». Délégué général d’Anima Investment Network – réseau basé à Marseille et rassemblant quelque 80 plates-formes pour le développement économique de la Méditerranée – Emmanuel Noutary observe que ce partenariat est déjà à l’œuvre : « De ce que nous avons pu observer au cours des dernières années, la co-innovation entre les entreprises de la rive nord et celles de la rive sud prend le plus

Le printemps arabe est né en Tunisie de la révolte de la jeunesse contre le chômage et le manque de liberté. Développer, grâce à l’innovation, un système économique créateur d’emplois paraît un moyen de répondre à leurs attentes. [EMIN ENDULISI / ANADOLU AGENCY /AFP]

souvent, soit la forme d’accord de partenariats de sous-traitance de production, dans le cas de prototypes ou de produits déjà aboutis développés au Nord, soit la soustraitance d’études pour finaliser un prototype – études d’ergonomie, tests techniques –, soit la forme d’un accord de développement dans lequel l’entreprise du Sud adapte le produit à son marché et en assure la commercialisation. Certes, hormis au Liban, ce qu’on appelle en Europe les industries créatives et culturelles est relativement peu développé dans les PSEM. Mais on constate un fort intérêt des Européens à travailler avec ces pays pour y développer des compétences dans ces domaines. » Mais ce partenariat peut-il aller jusqu’à dépasser la simple soustraitance et déboucher sur le par-

tage de la chaîne de valeur entre le Nord et le Sud, selon le concept de « colocalisation » que les Allemands ont su déployer avec les pays de l’Est européen, et comme l’a préconisé François Hollande lors de ses déplacements au Maghreb"? X-Mines, créateur et dirigeant d’entreprises, le Tunisien Radhi Meddeb, président de l’Institut de prospective économique du monde méditerranéen (Ipemed, Paris) y croit fermement : « La colocalisation est l’une des options stratégiques du partenariat euroméditerranéen que l’Ipemed promeut © A. M.

1,8 % ( des dépenses mondiales. C’est, en valeur absolue, les dépenses de R&D effectuées par les PSEM.

alliance opérationnelle, concrète, dont nous attendons à terme la création de milliers d’emplois dans nos deux pays. Aujourd’hui, la France détient une expertise en matière de TIC, mais elle manque d’ingénieurs et de techniciens. La Tunisie en forme 12"000 par an… »

«

Il n’y a pas de créativité sans liberté. » FRÉDÉRIC BLANC, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DU FEMISE

© D.R.

Repères DE 0,2 % À 0,8 % ( de leur PIB en 2010. C’est le taux d’investissement que les PSEM consentent pour la R&D, à l’exception d’Israël, n°1 mondial en % de PIB, avec 4,3 % en 2012. Par comparaison, les pays de l’OCDE y consacrent en moyenne 2,3 %.

depuis des années. N’oublions pas que les printemps arabes, aujourd’hui momentanément dévoyés par des dérives identitaires et religieuses, ont été le fait d’une jeunesse qui s’est insurgée contre le chômage et la marginalisation sociale… Le seul moyen pour nous de répondre à ses attentes légitimes et de développer un système économique suffisamment créateur d’emplois, c’est de monter en gamme, c’est d’aller vers une économie de la modernité. Nous n’y arriverons pas seuls. C’est pourquoi la colocalisation nous apparaît comme l’un des éléments de la solution, et au bénéfice des deux parties, du Nord comme du Sud… » Nicole Bricq, la ministre française du Commerce extérieur, qui, avec Mongi Marzouk, ministre tunisien des TIC, coprésidait le 23 octobre dernier à Paris les premières rencontres de l’alliance franco-tunisienne pour le numérique (20 partenariats interentreprises signés), ne dit pas autre chose : « Pour nos entreprises, il s’agit de coproduire et d’aller ensemble à la conquête des marchés internationaux des TIC, en forte croissance. C’est une

«

Il nous faut aller vers une économie de la modernité. » RADHI MEDDEB, PRÉSIDENT DE L’IPEMED

FOCUS

Sept millions d’habitants, sept prix Nobel : l’exception israélienne Avec sept prix Nobel, dont six obtenus depuis 2002 (quatre en chimie, deux en économie), auxquels s’ajoute en 2010 une médaille Fields qui récompense les meilleurs chercheurs en mathématiques, Israël, 7 millions d’habitants, fait figure d’exception en Méditerranée. Avec des dépenses civiles de R&D qui représentent 4,3"% de son PIB en 2010, Israël est le pays au monde qui réalise le plus gros effort relatif en activités de recherche, loin

devant les États-Unis (2,8"%) ou les pays scandinaves (3,5"%). Les dépenses de R&D sont principalement portées par le secteur privé qui en effectue près de 80"%. Cela représente 3,5"% du PIB 2010, contre 2"% aux États-Unis et 1"% pour la moyenne de l’OCDE (2012). Selon les statistiques de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), Israël comptait 26"500 brevets toujours en vigueur en 2010, ce qui situe le pays au 22e rang mondial. T

C’est un exemple, parmi d’autres – comme celui de l’émergence récente d’une d’industrie aéronautique au Maroc, à la suite d’une première création de coentreprise entre Safran et Royal Air Maroc, au début des années 2000 – de la pertinence d’une vision participative de l’espace économique euroméditerranéen, de cette « Méditerranée des projets » dont l’ambition est de faire converger les deux rives vers un scénario de l’excellence. Mais, il y a urgence. Car si « la plupart des évolutions recommandées ici [dans le rapport du Femise, ndlr] nécessitent cinq à dix ans » pour être mises en œuvre – autant dire le temps d’un battement d’ailes de papillon, au regard du temps long cher à Fernand Braudel, le célèbre historien de l’économie de la Mare nostrum – il ne faut pas oublier l’impatience légitime d’une jeunesse massivement au chômage et socialement marginalisée. Car pour cette jeunesse, l’avenir, c’est maintenant. Et si l’on veut aller vers une société de l’innovation, cela suppose un nouveau contrat social, garant des libertés fondamentales, tel est le message explicite du rapport du Femise. Car « il n’y a pas de créativité sans liberté », comme le souligne Frédéric Blanc. T

EN SAVOIR PLUS LA 7e SEMAINE ÉCONOMIQUE DE LA MÉDITERRANÉE, À MARSEILLE *Les Rendez-vous économiques de la Méditerranée, coorganisés par le Femise et le Cercle des économistes, clôturent depuis sa création la Semaine économique de la Méditerranée, chaque année à l’automne, à Marseille – du 6 au 9 novembre pour cette 7e édition, coordonnée par l’Ocemo et dédiée à « la culture comme facteur de développement économique en Méditerranée ». www.semaine-eco-med.com

16 ENTREPRISES & INNOVATION LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

Robots et caméras pour mieux protéger les locaux ANTI-INTRUSION Centrales de surveillance connectées à Internet, détecteurs de mouvements embarqués dans les caméras, robots autonomes… les PME françaises rivalisent d’imagination pour protéger les locaux, qu’ils soient d’habitation ou professionnels.

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ERICK HAEHNSEN

éritable hantise pour beaucoup de propriétaires et de locataires, le nombre de cambriolages a encore augmenté, si l’on en croit le bulletin mensuel de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales de septembre dernier. Au cours des douze derniers mois, la gendarmerie nationale a enregistré 158!365 « faits » (+12!%), tandis que la police nationale en a collecté 213!318 (+8,8!%). Faute d’occupants en permanence, les maisons, appartements, exploitations agricoles et locaux tertiaires constituent trop souvent des cibles de choix pour les malfaiteurs. Pour s’en protéger, les fabricants de systèmes électroniques de surveillance des biens et des personnes ne manquent pas d’imagination pour en améliorer les performances et les fonctionnalités. À

l’instar de ces centrales d’alarmes et d’anti-intrusion pilotables et consultables à distance, de ces caméras intégrant l’analyse d’images ou encore de ces robots patrouilleurs. Des produits de plus en plus faciles à installer et à utiliser et qui participent à la croissance d’un marché estimé à 22 milliards d’euros, selon le salon APS (Alarmes protection sécurité). « Ce marché de la sécurité est en pleine croissance grâce à la simplification des technologies, la réceptivité des utilisateurs et la baisse des coûts », observe Michel Marceau, directeur interrégional Paris NordEst du programme Cap’tronic. Lequel aide les PME à intégrer de nouvelles solutions électroniques et logicielles dans leurs produits. C’est notamment le cas de Myfox, basé à Labège (Haute-Garonne), premier acteur en France à proposer, dès 2009, une centrale d’alarme et de vidéosurveillance connectée à Internet. « Nous avons déployé près

«

Nous avons déployé près de 20!000 systèmes chez les particuliers et les pros. » JEAN-MARC PRUNET, PRÉSIDENT DE MYFOX

de 20!000 systèmes chez les particuliers et les professionnels », recense Jean-Marc Prunet, le président de l’entreprise (36 salariés dont 47!% d’ingénieurs et de chercheurs). Lancée cet été, sa nouvelle génération de box embarque une fonction domotique pour piloter volets roulants, luminaires et autres équipements qu’elle fait interagir entre eux. Point fort, sa centrale est compatible avec de nombreux protocoles de communication électronique du marché. Dont EnOcean qui transforme lumière, mouve-

Le visage de Hung Do-Duy, PDG de Spikenet Technology, traité par son logiciel de reconnaissance faciale. [ SPIKENET TECHNOLOGY]

22 milliards d’euros

Selon les organisateurs du salon APS (Alarmes protection sécurité), le marché de la sécurité (sécurité-sûreté, sécurité incendie et protection de l’homme) a progressé de 2,8!% en 2012. À lui seul, le marché de la sécurité-sûreté qui intègre les équipements électroniques (alarme, contrôle d’accès, vidéosurveillance) représente 17 milliards d’euros.

ment ou température en énergie suffisante pour émettre une information. « Une multitude de produits existent déjà comme ces interrupteurs, capteurs, émetteurs, récepteurs et autres accessoires fonctionnant sans fil et sans pile et faciles à installer pour les utilisateurs. » De son côté, le nantais Kiwatch propose une solution sans centrale intermédiaire puisque les caméras sont directement connectées en Wi-Fi à la box ADSL. Point fort, celles-ci embarquent la détection de mouvements et la vision nocturne. « Autre avantage, l’utilisateur reçoit instantanément sur sa tablette, smartphone ou PC les messages d’alerte. Il peut aussi consulter les images vidéo stockées sur nos serveurs dans le cloud », fait valoir Cédric Williamson, le fondateur de l’entreprise. Ce dernier a levé cette année 300!000 euros auprès de Fair West, une société de capitalrisque. De quoi l’aider à tripler son chiffre d’affaires l’an prochain

(930!000 euros de CA en 2013 et 10 salariés). « Notre offre est déjà relayée par Bouygues Telecom », précise le dirigeant qui lancera en décembre une caméra pour l’extérieur. Pas évident, puisqu’il est impératif de déterminer s’il s’agit du passage nocturne d’un animal, du mouvement d’une branche ou d’une réelle intrusion… NUIT ET JOUR, LA CAMÉRA THERMIQUE CONNECTÉE

Des difficultés que balaie la nouvelle caméra thermique proposée par l’entreprise lyonnaise Sorhea. Créée il y a vingt-cinq ans, cette spécialiste de la protection extérieure des sites sensibles complète son offre de barrières infrarouges, lasers télémétriques et câbles inertiels destinés à la sécurisation des grillages. « Notre caméra thermique fonctionne de jour comme de nuit et détecte les événements sur une portée de 100 à 200 mètres », indique Yves Monneret, président du conseil de surveillance de Sorhea (50 salariés et 10 millions d’euros de CA pour 2012 dont 5!% investis en R&D). En cas d’alarme avérée, les images seront transmises à un opérateur de télésurveillance via le réseau Internet : « Avec ce produit, nous démocratisons l’utilisation des caméras thermiques pour la vision nocturne. »

Le robot d’Eos Innovation patrouille dans les entrepôts et les sites industriels. [EOS INNOVATION]

BOX MULTIPROTOCOLE

Le français Zodianet concilie sécurité et domotique avec sa box qui intègre trois puces (EnOcean, Z-wave et une puce multiprotocole). Intérêt : l’utilisateur va pouvoir mixer plusieurs produits du marché qui ne sont pas forcément compatibles entre eux.

TÉLÉPHONE NFC Til Technologies a développé une solution d’encodage pour que les smartphones NFC (dont les derniers Galaxy) soient utilisables pour filtrer les accès. Ce qui devrait permettre de limiter le nombre de badges perdus chaque année. Un test vient d’être effectué au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille.

ENTREPRISES & INNOVATION

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

FOCUS

Des serrures électroniques pilotables à distance pour logements et bureaux vacants « Avec la crise, le nombre de logements et de bureaux vacants a fortement progressé », constate Jean-Christophe Chwat, président de VPSitex France (35 millions d’euros de CA 2012 et 250 salariés), filiale du groupe britannique VPS Group spécialisée dans la sécurisation et la gestion du patrimoine inoccupé. Pour préserver sa position de leader sur le marché hexagonal, VPSitex parie sur l’innovation. Comme en témoigne Sity Lock, une nouvelle génération de serrures électroniques, pilotables à distance. Elles fonctionnent aussi sans pile et sans fil : l’énergie est délivrée par le mouvement de la simple introduction de la clé à l’inté-

La centrale d’alarme Myfox s’ouvre à la domotique. [MYFOX]

À l’instar des centrales d’alarmes, les caméras de vidéosurveillance enregistrent bon nombre d’évolutions. Par exemple, il est désormais possible d’identifier formellement une personne en contre-jour, ou de voir avec netteté, sur la même image, l’extérieur et l’intérieur d’une pièce. « La résolution des caméras a augmenté grâce à de nouveaux capteurs beaucoup plus sensibles à la luminosité, passant de 0,75 lux il y a trois ans à 0,005 lux. Et ce, à prix constant », indique Philippe Bénard, ingénieur avant-vente chez Axis Communications, fabricant suédois de caméras et d’encodeurs pour le marché de la sécurité. Pour répondre au besoin de ses utilisateurs, le fabricant a ouvert sa plate-forme aux éditeurs tiers de logiciels qui y proposent une quarantaine d’applications téléchargeables sur les caméras. Comme s’il s’agissait d’un smartphone. En matière d’analyse d’image vidéo, le lyonnais Foxstream fait

figure de grand spécialiste grâce à des algorithmes développés en collaboration avec le Liris (Laboratoire d’informatique en image et systèmes d’information), associé au CNRS. Forte de cette notoriété, l’entreprise créée en 2004 (1 million d’euros de CA et 10 salariés) vient de sortir sa propre centrale connectée intégrant la détection d’intrusions en extérieur. UN E-ROBOT ÉQUIPÉ D’UN LASER DE DÉTECTON

Destinée à la protection des sites sensibles, la FoxBox peut recevoir quatre caméras du marché, qu’elles soient numériques ou analogiques. « Nous voulons rendre accessible l’analyse d’images vidéo », revendique son dirigeant, Jean-Baptiste Ducatez. Il mise sur la simplicité d’installation de sa box pour élargir son parc qui compte déjà près d’un millier de sites. De son côté, Eos Innovation cherche à améliorer le travail des

agents de surveillance avec son robot e-vigilant dédié à la surveillance des entrepôts et des sites industriels. Proposé en mode locatif, cet engin est équipé d’une caméra et d’un laser de détection (portée de 20  mètres, sur 270  degrés) et se déplace de manière autonome à la vitesse de 5 km/h durant ses rondes et jusqu’à 8 km/h en intervention. Dans ce cas, le télésurveilleur peut visualiser l’intrus, communiquer avec lui et déclencher une sirène de dissuasion. « Nous sommes en phase de déploiement chez un logisticien et une société de sécurité », indique David Lemaître, dirigeant et fondateur d’Eos Innovation, PME basée à Évry (6 salariés dont deux docteurs en robotique). Après une première levée de fonds de 200"000 euros auprès de Scientipôle Capital, l’entreprise procède actuellement à un second tour de table pour un décollage attendu en 2014.

rieur du cylindre. Une innovation signée par une entreprise finlandaise et adaptée aux besoins du marché français. Installables sur n’importe quelle porte en France, ces serrures ont été déployées sur 500 logements et bureaux. Dans la foulée, VPSitex vient de lancer une nouvelle gamme de systèmes d’alarme télésurveillés, Sity Premium, qui transmettent par les réseaux 4G, 3G, voire GPRS si nécessaire, des images en couleur et en haute résolution grâce à des détecteurs de mouvements couplés à de mini-caméras. Un développement signé par Quatro, la filiale R&D du groupe.T

Selon les experts cependant, pour éviter les intrusions, il vaut mieux prévenir que guérir. Dans ce contexte, les ventes de solutions d’identification par biométrie poursuivent leur progression, de l’ordre de 5"% à 10"% par an. Dans l’habitat notamment avec les serrures biométriques à empreintes digitales qui suppriment les risques liés à la perte de clé. En général, ces solutions sont faciles à utiliser et peu onéreuses. « En revanche, l’usage en entreprise est limité par la Cnil pour laquelle les empreintes sont duplicables », rappelle Alain Choukroun, dirigeant de Zalix Biométrie, société d’une quinzaine de salariés, qui distribue notamment des appareils reposant sur la lecture du réseau veineux de la main. À la différence de ces systèmes basés sur l’identification de points caractéristiques, le français Spikenet Technology adopte une approche fondée sur la reconnaissance de formes, plus proche de la

INNOVONS ENSEMBLE, AVEC

manière de procéder du cerveau. Ce qui lui permet de reconnaître 2"000 formes à la seconde. Une rupture technologique qui revient à Simon Thorpe, cofondateur de l’entreprise et directeur de recherche au CerCo (Centre de recherche cerveau et cognition), une unité mixte CNRS-Université PaulSabatier à Toulouse. Celle-ci œuvre notamment dans la sécurité des sites aéroportuaires. « Nous aidons les agents de l’aéroport de Bordeaux à faire de la levée de doute sur les images des caméras de vidéosurveillance dans les parkings d’avions, indique Hung Do-Duy, PDG de Spikenet Technology (600"000 euros de CA en 2012 et 12  salariés). Lorsqu’il y a une détection de mouvement, nous vérifions qu’il s’agit bien d’une intrusion. Cela évite de submerger les agents de surveillance par des fausses alarmes. » Le dirigeant espère doubler cette année son chiffre d’affaires et dépasser le cap des 2 millions d’euros en 2014.T

ET

Un patch à coller sur la peau pour traiter les allergies à l’arachide et au lait : la formulation de ce médicament de DBV Technologies, moins invasive que les comprimés et injections classiques, convient même aux plus jeunes enfants. Or, des soins administrés dès le plus jeune âge permettent de mieux guérir ces allergies alimentaires de plus en plus fréquentes dans les pays développés. Des essais cliniques aux Etats-Unis, au Canada, en France, en Pologne et aux Pays-Bas sont en cours pour mesurer l’efficacité du Viaskin Peanut, son produit principal. Depuis mai dernier, DBV étend ses activités aux allergies respiratoires en partenariat avec Stallergenes. « Faire vivre une entreprise est une longue lutte. Savoir s’associer est important », explique Pierre-Henri Benhamou, le PDG de DBV. Dès sa création en 2002, outre Sofinnova, son

actionnaire de référence, DBV a pu compter sur le soutien de Bpifrance. « Bpifrance est d’abord intervenue via le fonds d’amorçage Cap Décisif, puis par son extraordinaire fonds qu’est Innobio, fondé avec de grands laboratoires pharmaceutiques. » Innobio a continué à soutenir DBV en souscrivant en mars 2012 à son introduction en Bourse, qui a permis à cette société de lever 40,5 millions d’euros dont 15 millions apportés par le Fonds Stratégique d’Investissement. DBV a par ailleurs reçu des financements de Bpifrance pour plusieurs projets de recherche collaboratifs. « Bpifrance est un interlocuteur très compétent, qui a compris nos enjeux à chaque étape de notre développement. Peu de pays ont une structure aussi performante. C’est une chance pour les entrepreneurs français. »

Entrepreneurs, Bpifrance vous soutient en prêt et capital, contactez Bpifrance de votre région : bpifrance.fr

Pierre-Henri Benhamou, PDG de DBV Technologies

©DBV Technologies

DBV TECHNOLOGIES LUTTE EN DOUCEUR CONTRE LES ALLERGIES

18 ENTREPRISES & INNOVATION LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

L’application mobile « Smart Bordeaux » permet de tout savoir sur un vin, y compris son authenticité. [DR]

Le numérique est en passe de révolutionner le monde prestigieux des grands vins de Bordeaux. En trois ans, pas moins de 13 start-up proposant des applications dédiées au secteur sont nées sur les bords de la Garonne. Cette DE LA SEMAINE filière numérique émergente devrait créer des centaines d’emplois et faciliter la conquête des marchés à l’export.

LE ZOOM

Le Bordelais met de plus en plus de techno dans son vin… NICOLAS CÉSAR, À BORDEAUX, OBJECTIF AQUITAINE

V

ingt-trois bouteilles de vin de Bordeaux se vendent chaque seconde dans le monde. Dont 42!% à l’étranger et 58!% en France. La filière vinicole bordelaise pèse 4,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Pour préserver son leadership mondial, alors que la concurrence internationale est féroce, le Bordelais, épaulé par les collectivités locales, investit donc allègrement dans les nouvelles, technologies, à commencer par le numérique. En juin dernier, afin de structurer la filière, a ainsi été lancé « Wine Startups », un réseau composé de 13  jeunes pousses bordelaises proposant des services numériques liés au vin et représentant déjà 80 emplois. Parmi elles, Qual’ID a développé un système de traçabilité unique de lutte contre la contrefaçon pour les grands vins, qui fonctionne avec la technologie NFC (Near Field Communication). Ses nouveaux outils sont vite devenus indispensables. À l’image de « Wine Services », qui offre aux propriétaires de grand cru classé (Yquem, Cheval Blanc, Angelus…) un suivi précieux de leurs produits dans le monde entier (sont-ils à la carte des meilleurs restaurants internationaux!? prix moyens dans les pays, etc.). « Nous sommes les seuls à produire nos propres données, en allant les collecter

dans les restaurants et caves du monde entier », souligne Guillaume Forcade, directeur des opérations. UNE CROISSANCE DE 250!% EN UN AN!!

Autre innovation, « Max », le sommelier virtuel, capable de choisir le meilleur vin en fonction de vos envies, de vos mets, dans un rayon de supermarché de 600 vins, et en 30 secondes. La société Vinoreco a fait fureur avec cette idée. L’application a séduit Carrefour et Leclerc. Dans le même registre, « Smartcave », gère votre cave et vous donne les vins à boire chaque soir parmi 50!000 références.

Beaucoup de ces start-up sont de véritables « pépites ». À l’instar de Mabouteille.fr, jeune pousse d’à peine deux ans, qui propose un service en ligne de personnalisation de bouteilles de vins et emballages. « Nous vendons plus de 100  bouteilles par jour, dont 80"% à des particuliers », explique, Édouard Bournac, 27  ans, qui dirige la société avec son père, Hubert. De grandes entreprises, Dior, Winamax et les laboratoires Pierre Fabre se sont laissées convaincre par le concept. La société, leader en France du secteur et déjà rentable, a connu une croissance de 250!% en un an. Elle vise un chiffre d’affaires d’un million d’euros en 2014.

Repères 23 ( Le nombre de bouteilles de vin de Bordeaux vendues à chaque seconde dans le monde. 65 000 ( Les emplois directs et indirects de la filière vins en Aquitaine. 4,3 MILLIARDS D’EUROS ( Le chiffre d’affaires global de la filière vins en Aquitaine. 13 ( Les start-up numériques dédiées au vin nées à Bordeaux en trois ans. Elles emploient au total 80 personnes. 15 000 ( Les emplois directs actuels de la filière numérique dans l’agglomération bordelaise. Le site Mabouteille.fr, édité par Bordeaux Prestige, propose de personnaliser vos étiquettes. [MABOUTEILLE.FR]

25 000 ( Le nombre d’emplois que les pouvoirs publics espèrent voir se créer d’ici à 2030 dans la communauté urbaine de Bordeaux.

Sur le plan technique aussi, les choses bougent. Aujourd’hui, la société Vitivista est capable d’analyser la vigueur de la végétation de la vigne avec un drone. Demain, on pourra détecter le stade de maturation de la vigne, les maladies… D’autres exemples de technologies

phones, « Château academy », immergeant les jeunes dans la gestion d’une propriété viticole, depuis la taille de la vigne jusqu’à la commercialisation. Objectif : susciter des vocations, car la viticulture risque de manquer de bras dans les années à venir. « Une dynamique numérique est née ici. Bordeaux entend devenir la Silicon Valley du vin », avance Gilles Brianceau, directeur du cluster Inno’vin, créé en 2010 et financé à parts égales par des fonds publics (région Aquitaine) et privés, dont l’une des missions est de développer le réseau « Wine Startups ».

Les viticulteurs sont en train de démontrer que leur art séculaire s’accommode très bien avec les TIC. promues depuis 2010 par le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) avec son « Smart Bordeaux »!? En photographiant avec son iPhone l’étiquette ou le codebarres d’une bouteille, on obtient des informations sur son histoire, cépage, accords mets/vin et… on s’assure de son authenticité. Développée par Kasual Business, société de huit salariés, cette application a, depuis, séduit sept interprofessions viticoles : le Beaujolais, la Bourgogne… La base de données compte l’équivalent de 150!000 étiquettes. « Nous voulons répertorier toutes les étiquettes françaises pour la mi-2014. L’application sera développée en 13 langues et dans 82 pays », annonce David Ducourneau, qui entend multiplier son chiffre d’affaires – 700!000 euros actuellement – par deux en 2014 et en 2015. Moteurs de cette filière numérique encore émergente, le CIVB et la région Aquitaine ont lancé en septembre dernier un serious game pour les réseaux sociaux et smart-

SEULE LA CALIFORNIE A UN POTENTIEL COMPARABLE

Inno’vin, c’est désormais 70 adhérents fédérés autour des enjeux liés à la recherche et au développement, 1!300  emplois et 250 millions d’euros de chiffre d’affaires. « Nous avons tous les atouts : un super-écosystème, des entreprises numériques innovantes, poussées par les pouvoirs publics et une filière du vin puissante », estime Édouard Bournac. De fait, dans le monde, seule la Californie a un potentiel comparable. Toutefois, pour créer des centaines d’emplois demain dans le numérique dédié au vin, « il faudra aller chercher des marchés partout où il y a des producteurs », prévient Gilles Brianceau. Une étape capitale pour que les vins de Bordeaux parviennent à préserver leurs 65!000  emplois directs et indirects dans la région.T

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Miam Miam : c’est le nom, sans doute un peu primitif mais très explicite, de la plate-forme lancée par Vente-privée.com dédiée aux produits alimentaires du terroir. Bien que la commercialisation en ligne de ce DE LA SEMAINE type de produits demeure difficile, certains acteurs tentent le coup. Mais le jackpot semble encore bien loin.

LE ZOOM

Les e-commerçants ont-ils raison de se lancer dans l’alimentaire!? de ventes, de la période de disponibilité du produit sur le site, etc. », rappelle Jalal Boularbah. Quoi qu’il en soit, si le secteur est complexe et difficile à aborder pour les e-commerçants, il représente un potentiel intéressant de croissance. Les ventes de la catégorie « alimentation-drives-épicerie fine » ont généré 2,8 milliards d’euros l’an dernier, sur un chiffre d’affaires global de 45 milliards d’euros pour le secteur du e-commerce en France en 2012, selon la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Mais surtout, de plus en plus d’internautes achètent des produits alimentaires via Internet. 21"% d’entre eux l’ont fait en 2012, soit 5"% de plus que l’année précédente, d’après le baromètre FevadMédiamétrie sur les comportements d’achats des internautes, publié en juin dernier. Le plus avantageux pour l’e-commerçant serait donc d’opérer une sélection précise des produits remplissant au moins trois critères : facilité de conservation, prix au

L

«

ADELINE RAYNAL

es secteurs du e-commerce et du numérique ont un besoin d ’ i n n ova t i o n incessant pour être boostés. » C’est un spécialiste du secteur, Jalal Boularbah, responsable pédagogique du master commerce électronique de l’université Paris-Est (Créteil-Val-de-Marne) et directeur de l’Usage du numérique à la mairie de Saint-Maur-des-Fossés, qui l’affirme. Justement, le célèbre Vendre à prix cassés des produits frais, issus du terroir français, c’est le site Vente-privée.com vient de lan- credo du nouveau service de Vente-privée, Miam Miam. [VENTE-PRIVÉE.COM] cer en grande pompe un nouveau service : Miam Miam. Un tout nouvel univers dans l’offre du site nent. À l’inverse, Vente-privée.com une alternative à la grande distribufondé par Jacques-Antoine Gran- peut compter sur au moins quatre tion. « De nombreux producteurs ont jon, décidément très gourmand en atouts : une force de frappe indé- déjà répondu favorablement », a nouveautés ces derniers mois. niable"; des prix de vente inférieurs assuré le patron de Vente-privée à Les 2,5 millions d’internautes de 40 à 50"% à ceux habituellement Challenges. Ce qui peut lui perqui se rendent chaque jour sur le constatés par les consommateurs"; mettre de se développer sans pour site de vente en ligne à prix cassés le made in France – le ministre du autant devoir supporter les risques trouveront désormais une catégo- Redressement productif, Arnaud de stocks. Quant aux marges… C’est rie spécifique à l’alimentation Montebourg, était présent lors du évidemment « confidentiel, les monavec des produits du terroir : du récent lancement de Miam Miam"; tants varient en fonction du volume sirop de cassis de Bourgogne, pour et la métamarque « produits du le premier jour, par exemple. Le terroir ». modèle qui a fait le succès du site reste de mise : la vente événemenUNE ALTERNATIVE tielle. Autrement dit, seuls À LA GRANDE DISTRIBUTION quelques produits seront propo« Vente-privée cherche à optimiser sés à un cercle restreint de clients l’utilisation de son fichier clients, privilégiés, à un prix raboté de 40 c’est pour cela qu’il se diversifie », à 50"%, mais sur un laps de temps analyse Jean-Paul Crenn, fondateur de WebColibri et auteur du et dans des quantités limités. Jusqu’à présent, les offres sur V.A.D.OR (éd. Tertium), un guide Vente-privée concernaient plutôt consacré à la vente en ligne. « Ils connaissent déjà leurs des produits de grandes acheteurs de vin [Ventemarques. En se lançant privée se revendique dans l’alimentaire, le site comme le plus gros venprend des risques non négligeables. Car, d’une milliards deur de vin via Internet de part, il existe peu de d’euros. C’est France, ndlr], ils vont marques « top of mind » le chiffre exploiter ce potentiel de dans ce domaine, autre- d’affaires 2012 clients. » « Vente-privée ment dit qui parlent ins- des ventes n’a rien révolutionné avec « alimentationt a n t a n é m e n t a u x drives-épicerie Miam Miam, observe de consommateurs lorsqu’ils fine » sur son côté Jalal Boularbah. recherchent un produit. Internet, Le b.a.-ba du e-commerce, D’autre part, parce que en France. c’est de pratiquer des prix ces produits sont réputés agressifs grâce à l’absence les plus difficiles à vendre de stocks et à la réduction à distance : les charcuteries, choco- du nombre d’intermédiaires. » lats et autres sirops sont périsEn fait, Jacques-Antoine Granjon sables, fragiles, parfois encom- ne dit pas autre chose lorsqu’il brants et pâtissent d’un rapport décrit Miam Miam comme une prix/volume souvent peu avanta- rampe de lancement potentielle, geux… Bref, tout ce qui pose pro- « une plate-forme de lancement, de blème lorsqu’on doit gérer des communication, de promotion », Demandez stocks et des acheminements à pour de nombreux producteurs de l’échelle d’un pays, voire d’un conti- produits du terroir qui auront ainsi

volume suffisamment élevé pour appliquer des marges correctes, et produits qui représentent un intérêt pour les internautes en raison de leur difficulté d’accès en temps normal (le propre des produits du terroir souvent vendus uniquement sur une zone géographique). Partant de ces principes, les produits frais seraient donc à éviter. Pourtant, Amazon s’y est lancé aux États-Unis, dans les régions de Los Angeles et de Seattle, avec son service « Amazon fresh », qui propose notamment du pain, des légumes, des fruits, de la viande… Une voie que pourrait emprunter JacquesAntoine Granjon"? Pour l’instant, il dit vouloir se concentrer sur quelques produits, avec un système de livraison « à flux tendus ». « Attendons d’abord de voir si le modèle marche avant de le déployer, explique-t-il. La vente alimentaire à grande échelle sur Internet reste un modèle compliqué à mettre en place, et qui peut se révéler extrêmement coûteux. » Courageux, mais pas téméraire. T

Clôture des dossiers le 22 novembre Agences médias, participez !

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20 TERRITOIRES / FRANCE LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

EDF démarre dans la capitale des Gaules un chantier inédit en matière de réseaux intelligents : le groupe s’apprête à analyser à la loupe les habitudes de consommation électrique de 25!000 foyers OPÉRATION durant dix-huit mois. Objectif : comprendre comment agir sur les comportements de demain.

LA BONNE

Lyon, laboratoire des réseaux électriques intelligents modes d’utilisation de l’électricité et sur l’incitation des consommateurs à consommer moins et mieux que se concentre notre expérimentation », insiste Christian Missirian. Une dimension absente de tous les autres démonstrateurs européens actuellement en place.

FRANÇOISE SIGOT, À LYON, ACTEURS DE L’ÉCONOMIE

A

près avoir été l’une des terres d’élection des tests des nouveaux compteurs électriques « Linky », le Grand Lyon confirme sa volonté de prendre un temps d’avance sur les smart grids. Et rempile donc pour une nouvelle étude. Cette fois, il s’agit de la plus grande expérimentation européenne sur les systèmes électriques de demain. Baptisée « Smart Electric Lyon », cette initiative portée par EDF vise à mieux analyser les consommations électriques pour pouvoir les maîtriser. « Nous testons pour la première fois en grandeur réelle plusieurs solutions permettant a priori de réduire les consommations électriques et d’améliorer le confort de vie des utilisateurs », dévoile Henri Lafontaine, directeur exécutif Groupe EDF. Quelque 25!000 foyers lyonnais ont donc été choisis pour mieux comprendre qui consomme quoi, en quelle quantité et quand. L’implication de ces foyers tests se limite à… vivre leur vie comme ils la font en temps normal. « L’expérience est totalement gratuite pour ceux qui y prennent part, puisque chaque partenaire met à leur disposition le matériel nécessaire permettant de tracer leurs consommations électriques. Nous leur restituerons par ailleurs les données collectées afin qu’ils acquièrent une meilleure connaissance de leurs consommations électriques », explique Christian Missirian, président du consortium Smart Electric Lyon et directeur EDF commerce Rhône-Alpes. Outre les ménages, une centaine de bâtiments commerciaux et publics sont également associés à la démarche. Tandis que quelque

UN PROJET VOLONTARISTE DE « VILLE INTELLIGENTE »

Inaugurée par Gérard Collomb (au centre), sénateur-maire de Lyon, le lundi 28 octobre, l’expérimentation Smart Electric Lyon a été lancée dans les locaux de la tour EDF de la Part-Dieu. [PASCAL MURADIAN]

100 foyers hébergeront chez eux des équipements innovants (électroménager, systèmes de chauffage, etc.), conçus par les partenaires d’EDF dans le cadre de ce projet et a priori moins énergivores que les actuels. 21 PARTENAIRES, UN BUDGET DE 69 MILLIONS D’EUROS

À l’initiative du projet, EDF a réuni un pool de 21 partenaires pour mener à bien cette étude dont le budget s’élève à 69 millions d’euros, pris en charge à 80!% par l’opérateur électrique historique (20!% par ses partenaires) et soutenu par l’ADEME à hauteur de 10 millions d’euros. Seront ainsi rassemblés des fabricants de systèmes de chauffageclimatisation et d’électroménager, des opérateurs de télécom, des centres de recherche, mais aussi des universitaires, notamment des sociologues et des ergonomes. Leur mission!? Étudier les pratiques des consommateurs d’électricité pour jauger leur capacité d’adaptation et leur degré d’acceptation d’éventuelles contraintes permettant de consommer moins.

Durant dix-huit mois, chaque partenaire va donc s’attacher à analyser les données recueillies dans le cadre de Smart Electric Lyon. Si certains vont en tirer des enseignements pour inventer de nouveaux appareils intelligents capables, par exemple, de se mettre en veille durant les pics de consommation électrique et de s’activer en période creuse, l’objectif majeur de l’expérimentation est d’agir sur les comportements. « C’est sur la transformation des

Innovante, cette opération ne pouvait trouver meilleur terrain de jeu que l’agglomération lyonnaise. « Cette action s’inscrit dans le modèle que nous souhaitons développer ici : permettre au plus grand nombre de bénéficier d’avancées technologiques permises par des expérimentations conduites par des partenaires privés. Elle s’inscrit en outre parfaitement dans notre volonté de faire de Lyon une ville intelligente », commente Gérard Collomb, sénateur-maire et président du Grand Lyon. Ainsi, en marge de Smart Electric Lyon, la ville est également engagée dans plusieurs autres projets dans le giron des smart grids. Le Lyon Smart Community est le plus avancé. Il vise, sur le territoire du quartier de La Confluence, à puiser dans les nouvelles technologies pour économi-

FOCUS

Une expérimentation incarnée en centre-ville Le « Smart Electric Lyon » sera une expérimentation « incarnée ». Un showroom de 700 m2 vient en effet d’ouvrir ses portes au cœur de Lyon. Lieu d’échanges et de collaboration, cet espace est d’abord dédié aux partenaires qui peuvent y recevoir leurs collaborateurs, leurs clients, fournisseurs et prescripteurs. C’est aussi un laboratoire vivant en temps réel, permettant de présenter les solutions innovantes proposées par les parte-

naires et testées par les expérimentateurs. C’est enfin un lieu de rencontres, de travail et d’événements pour chaque partenaire du projet. Très vite, le showroom Smart Electric Lyon s’ouvrira au public pour des visites et rendra compte de l’expérimentation en cours. L’idée est d’en faire un espace de présentation, d’information et de pédagogie sur le projet « Smart Electric Lyon » et au-delà sur les smart grids et leurs applications concrètes.T

CLUB

L’innovation des PME : l’arme anti crise

TOULOUSE - MIDI–PYRÉNÉES

ser les ressources énergétiques. La première traduction en sera l’immeuble à énergie positive Hikari (12!000 m 3 à usages mixtes) en cours de construction, mais aussi l’installation de compteurs intelligents permettant aux résidents de la Cité Perrache de suivre en temps réel leur consommation d’énergie. Le Grand Lyon est aussi un des territoires qui teste les compteurs communicants Linky, et un lieu de déploiement de plusieurs expériences en termes de mobilité, spécialement avec l’implantation de flottes de véhicules électriques en libre-service. Un ensemble d’initiatives que recouvre la démarche « Lyon ville intelligente » lancée en février dernier. Reste désormais à faire le lien entre ces différents projets pour en tirer le meilleur parti. Pour l’heure, rien de concret à l’horizon, mais Karine Dognin-Sauze, vice-présidente du Grand Lyon en charge de l’innovation et des nouvelles technologies, promet que l’exécutif local réfléchit activement à créer des passerelles entre ces initiatives, afin de mieux les partager et de pouvoir les dupliquer sur l’ensemble du territoire urbain et surtout au-delà. T

RSVP jusqu’au 19 novembre

Mardi 26 novembre de 8h30 à 10h00 Salon d’honneur - Diagora Centre de Congrès et d’Exposition 150, rue Pierre Gilles de Gennes - Toulouse - Labège

avec le soutien de

http://goo.gl/YsGCxh En partenariat avec

Renseignements: [email protected]

TERRITOIRES / INTERNATIONAL

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

LE GRAND CHANTIER

Projet historique imaginé voici près de deux siècles, la ligne ferroviaire du « Rhin d’acier », qui doit joindre Anvers à la Ruhr – première région exportatrice d’Europe –, en passant par la Hollande, reste encore lettre morte aujourd’hui. Malgré un besoin logistique croissant, le projet s’enlise entre rivalités nationales et résistances locales.

Anvers attend depuis 1839 sa ligne directe pour la Ruhr Bas n’avaient rien à gagner avec le Rhin d’acier, aucun trafic intérieur n’étant autorisé. La balle est dans le camp belge, il n’y aura pas d’initiative hollandaise sur ce dossier  », tranche-t-on au ministère des Transports batave.

L

MARC MEILLASSOUX, À BERLIN

e projet du « Rhin d’acier » est une vieille, très vieille histoire. Il remonte au traité de Londres en 1839, actant l’indépendance de la Belgique visà-vis du royaume des Pays-Bas. Un traité qui promet notamment aux Belges une ligne ferroviaire entre le port d’Anvers et la frontière prussienne, l’actuelle Ruhr allemande, en passant par la Hollande. Pour la Belgique, le maintien d’une frontière stratégique avec cette région industrielle en plein essor constituait déjà une condition nécessaire à toute partition du territoire. Deux siècles plus tard, le projet est toujours en friche, alternant des périodes d’ouvertures et de suspensions de la ligne, au gré de crises diplomatiques répétées entre Bruxelles et Amsterdam. Alors que la liaison de fret est définitivement coupée depuis 1991, la Belgique a tenté de relancer les négociations en 2004, notamment en raison des insuffisances logistiques de son réseau face à l’explosion du trafic du port d’Anvers (+44!% en volume entre 2000 et 2011). La « route de Montzen », ligne ferroviaire aujourd’hui pratiquée – qui descend par le sud jusqu’à Aix-la-Chapelle pour remonter ensuite vers Duisbourg – est complètement saturée. « Elle ne peut supporter que des trains courts, avec un tonnage restreint, en raison des reliefs du parcours », note Ocke Hamann, porteparole de la Chambre de commerce de Duisbourg.

PAS DE CONSENSUS SUR LE TRACÉ EN ALLEMAGNE

Entre Anvers et la Ruhr, la ligne Rhin d’acier (2) permettrait un raccourci de près de 60 km par rapport à la route Montzen (3)… et de concurrencer la ligne Betuwe (3) jusqu’à Rotterdam. [ASKMEDIA]

à deux lignes, contre une seule actuellement, les économies d’échelles sont substantielles. LA COUR DE LA HAYE A RECONNU LES DROITS BELGES

« Le projet de Rhin d’acier est primordial pour le port d’Anvers et l’économie du pays. L’Allemagne est l’arrière-pays naturel de la Belgique. Mais aujourd’hui, le projet est au point mort, faute de consensus entre les pays », déplore Annik Dirkx, porte-parole du port d’Anvers. Cette dernière refuse d’accuser les Pays-Bas, souvent pointés du doigt. En Hollande, on a longtemps contesté la faisabilité d’un tel parcours et on invoque le parc naturel protégé de Heimweg, – ironiquement « chemin du retour », en allemand – situé sur le tracé historique du Rhin d’acier. En 2005, l’arbitrage de la Cour internationale de justice de La Haye a reconnu le droit historique de la Belgique au « Rhin d’acier », et opté pour le creusement d’un tunnel, financé par les trois parties. Pourtant, depuis, les négociations piétinent. « Les Pays-Bas retardent le projet, cela saute aux yeux. C’est en partie compréhensible, ils défendent leurs intérêts économiques face aux Belges, notamment dans le but de faire transiter le trafic par la “Route de Betuwe” [par le nord, via Rotterdam, ndlr]  », constate Ocke Hamann. Accabler les Hollandais de toutes les responsabilités serait toutefois injuste. En Belgique, les

L’histoire ubuesque d’un projet incontesté sur le fond, mais qui bute sur les détails, depuis deux siècles… Côté belge, l’irritation se mêle à la résignation. Pour le second port d’Europe, l’Allemagne est un partenaire incontournable : le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (RNW), que dessert le Rhin d’acier, représente à lui seul 29 des 178 millions de tonnes échangées en 2011. Le Rhin d’acier permettrait un raccourci de près de 60 km par rapport à la route de Montzen. Si on y ajoute, un réseau moderne électrifié

discussions sont constamment retardées par des lenteurs entre ministères et commissions parlementaires, et le sujet n’a pas été débattu en conseil des ministres depuis près de deux ans. « Une étude de 2009, réalisée conjointement avec la Belgique, a démontré que les Pays-

En Allemagne également, le mille-feuille administratif communes-Land-État complique la progression du dossier. Le Land de RNW se montre notamment intransigeant. « L’issue heureuse du projet dépend d’une double condition. Outre un accord trilatéral entre la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne, la solution doit absolument respecter les intérêts de la Rhénanie-du-NordWestphalie », insiste auprès de La Tribune le ministre socialiste des Transports du Land, Michael Groschek. Véritable plaque tournante des échanges du nord de l’Allemagne et première région exportatrice d’Europe (160 Mds € en 2012), la RNW n’aura toutefois pas le der-

nier mot, la politique ferroviaire étant une compétence fédérale. Deux possibilités sont envisagées côté allemand. Le tracé actuel (suspendu) est soutenu par le gouvernement fédéral. Il serait moins coûteux, entre 150 et 450 millions d’euros, mais fait l’objet de frictions avec les municipalités concernées et avec les écologistes en raison de zones protégées. Le second Rhin d’acier, soutenu par la RNW et estimé à 550 millions d’euros, prévoit de longer une autoroute qui épargne à peu près les zones pavillonnaires. Contrairement au tracé historique, il assure un circuit électrifié à deux voies. « Aujourd’hui, il n’y a pas de consensus entre notre Land et le gouvernement fédéral. Nous sommes pourtant persuadés que seul le trajet que nous proposons est réalisable », martèle Michael Groschek. Ainsi, alors que la Ruhr accuse un retard de vingt ans pour ses infrastructures, l’aboutissement du Rhin d’acier « risque encore de prendre des années », soupire Annick Dirkx. T

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LE CENTENAIRE DE 1914 ET LA CRISE FINANCIÈRE Bientôt le 11 novembre 2013. L’occasion de penser, déjà, au centenaire de la guerre de 1914-1918, qui fera l’objet de nombreuses célébrations et manifestations en 2014. Notre contributeur, l’historien Harold James, y ajoute un regard particulier, celui du lien entre la crise financière de 1907 et la Première Guerre mondiale. Alors que cinq ans après la crise des subprimes aux États-Unis, le monde est à nouveau tenté par le nationalisme face au pouvoir sans limite de la finance, le parallèle est évidemment tentant.

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HAROLD JAMES

PROFESSEUR D’HISTOIRE ET D’AFFAIRES INTERNATIONALES

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à l’université de Princeton et professeur d’histoire à l’Institut universitaire européen de Florence. Son dernier livre : Making the European Monetary Union (éd. Belknap Press).

approche du 100e anniversaire du début de la Première Guerre mondiale en 1914 fait réagir les dirigeants politiques et les commentateurs inquiets de la situation politique et économique de la planète. Le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, a même déclaré récemment que la polarisation croissante entre le nord et le sud de l’Europe a fait reculer le continent d’un siècle. Les leçons de 1914 ne portent pas seulement sur le danger des animosités nationales. La Grande Guerre est un précédent fascinant quant à la manière dont la mondialisation financière peut devenir l’équivalent d’une course aux armements qui menace l’ordre international. En 1907, une crise financière majeure née aux ÉtatsUnis a affecté le reste du monde et démontré la fragilité du système financier international. La réponse à la crise actuelle reproduit une dynamique similaire. Dans Lombard Street, un livre de 1873 devenu un classique, Walter Bagehot, rédacteur en chef de l’hebdomadaire The Economist, décrivait la City de Londres comme « la plus grande combinaison de puissance et de doigté économique que le monde ait jamais vue ». Selon une idée popularisée en 1910 par l’écrivain et parlementaire travailliste Norman Angell, futur Prix Nobel de la paix, l’interdépendance et la complexité des grandes économies mondiales rendaient la guerre impossible. Mais on pourrait défendre l’idée inverse : étant donné la fragilité de l’économie mondiale, sa manipulation habile peut faciliter la victoire militaire d’une grande puissance économique. Les suites du crash de 1907 ont poussé la puissance hégémonique de l’époque, la Grande-Bretagne, à réfléchir à la façon de mettre sa puissance financière

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au service de sa capacité stratégique sur la scène internationale. Telle est la conclusion d’un livre important sorti récemment, Planning Armageddon, de Nicholas Lambert, qui étudie la relation entre l’économie britannique et la Première Guerre mondiale. Il y montre comment, dans le cadre d’un jeu stratégique de grande ampleur, la Grande-Bretagne a combiné sur la scène internationale sa prédominance militaire, notamment sur les mers, avec son leadership financier. Entre 1905 et 1908, l’amirauté britannique avait esquissé le plan d’une guérilla financière et économique contre la puissance montante en Europe, l’Allemagne. La guérilla économique, si elle avait été menée à fond, aurait coulé le système financier de l’Allemagne et l’aurait empêché de s’engager dans un conflit militaire, quel qu’il soit. Quand les visionnaires de l’amirauté britannique ont été confrontés à un rival sous la forme de l’Allemagne du Kaiser, ils ont compris comment le pouvoir pouvait prospérer sur la fragilité financière. La Grande-Bretagne d’avant 1914 avait anticipé le partenariat public- privé qui lie aujourd’hui les géants de la technologie comme Google, Apple ou Verizon aux services de renseignement américains. Les banques londoniennes garantissaient alors la plus grande partie du commerce mondial. Ces réseaux financiers fournissaient les informations qui ont permis au gouvernement britannique de découvrir les vulnérabilités stratégiques cachées de l’alliance à laquelle il faisait face. Pour les rivaux de la Grande-Bretagne, la panique financière de 1907 montrait la nécessité de mobiliser les puissances financières elles-mêmes. Les ÉtatsUnis, de leur côté, reconnaissaient qu’il leur fallait une banque centrale analogue à la Banque d’Angleterre.

On voit réapparaître aujourd’hui certaines caractéristiques de la situation financière d’avant 1914. »

Traders du New York Stock Exchange, le 15 septembre 2008, jour où le Dow Jones a chuté de 500 points à la suite de l’annonce par Lehman Brothers que la banque se plaçait sous la protection de l’article 11 afin d’échapper à la faillite. [SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP]

Les financiers américains étaient persuadés que New York devait développer son propre système d’échanges commerciaux pour traiter les lettres de change de la même manière que le marché de Londres, et assurer leur monétisation (ou acceptation). Un personnage central a joué un rôle essentiel pour parvenir au développement d’un marché américain des acceptations bancaires. Il s’agit d’un immigré, Paul Warburg, frère cadet de Max Warburg, un banquier renommé de Hambourg qui était le conseiller personnel du Kaiser Guillaume II d’Allemagne. Les frères Warburg, Max et Paul, constituaient un tandem transatlantique qui poussait énergiquement à la création d’institutions germano-américaines comme alternative au monopole industriel et financier de la Grande-Bretagne. Ils étaient convaincus que l’Allemagne et les États-Unis étaient des puissances montantes, tandis que la Grande-Bretagne était sur le déclin. ET MAINTENANT, LA CRISE OU LA GUERRE!?

On voit réapparaître aujourd’hui certaines caractéristiques de la situation financière d’avant 1914. Après la crise financière de 2008, les institutions financières semblaient être à la fois des armes de destruction massive sur le plan économique et les instruments potentiels de la mise en œuvre de la puissance nationale. Dans la gestion de la crise de 2008, la dépendance des banques étrangères à l’égard du dollar était une faiblesse majeure qui a nécessité d’importantes « swap lines » de la Réserve fédérale. Y remédier nécessite la renationalisation des banques et la séparation des activités des grandes institutions financières. Pour les banquiers européens et pour quelques gouvernements, le réexamen par les États-Unis du fonctionnement des filiales des banques étrangères chez eux souligne cet impératif. Ils considèrent qu’il s’agit d’un nouveau type de protectionnisme et menacent d’exercer des représailles. La géopolitique intervient également ailleurs dans les pratiques bancaires. Les banques russes essayent d’acquérir des actifs en Europe centrale et en Europe de l’Est. Les banques européennes jouent un rôle bien moins important dans le financement du commerce international asiatique. Les banques chinoises sont poussées à étendre leur activité au commerce international. De nombreux pays envisagent de recourir au protectionnisme financier pour accroître leur influence politique. Dans cette logique, l’étape suivante consiste à envisager la manière de mettre la puissance financière au service de l’intérêt national en cas de conflit diplomatique. On recourt entre autres à des sanctions (pas très efficaces) pour faire pression sur des États voyous, comme l’Iran ou la Corée du Nord. Mais la pression financière peut être beaucoup plus forte si elle s’applique à des pays très impliqués dans l’économie mondiale. En 1907, après une crise financière marquante qui a failli entraîner un effondrement complet du système, plusieurs pays ont commencé à penser la finance avant tout comme un instrument du pouvoir brut qui peut et doit être mis au service de l’intérêt national. Ce genre d’idée a conduit à la guerre de 1914. Un siècle plus tard, en 2007-2008, le monde a subi un choc financier encore plus important qui a enflammé les passions nationalistes. Les stratégies destructrices ne sont peut-être pas loin derrière. T Copyright : Project Syndicate, 2013.

LES IDÉES VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

POURQUOI L’ÉTAT PEUT MIEUX AIDER LES PME INNOVANTES Pour mettre à profit les mesures qui favorisent leur accès à la commande publique, les PME ont tout intérêt à se faire accompagner.

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Q HENRI D’AGRAIN

PRÉSIDENT DE SMALL BUSINESS FRANCE

société spécialisée dans l’accompagnement global des entreprises, notamment des PME technologiques et innovantes, vers la commande publique. En savoir plus : smallbusinessfrance. com

uel que soit le nom qu’on lui donne – réforme générale des politiques publiques ou modernisation de l’action publique – l’objectif demeure le même. Il s’agit de piloter la transformation des services publics, afin qu’ils contribuent tout à la fois au maintien du modèle social français, au redressement des finances publiques et à la compétitivité de l’économie. Dans une telle perspective, la numérisation de l’action publique et son corollaire, l’innovation organisationnelle, sont les vecteurs de sa modernisation. Un espace est donc en train de s’ouvrir pour accueillir l’innovation numérique au sein de la commande publique. Les PME innovantes souhaitant saisir les opportunités qui ne vont pas manquer de se présenter ont tout intérêt à s’organiser dès à présent pour être en situation de répondre efficacement aux sollicitations de l’administration. Elles doivent donc se former aux exigences du formalisme de la commande publique, elles doivent mettre en place un système efficace de détection des opportunités, elles doivent faire connaître leur savoir-faire et valoriser auprès de l’administration le caractère innovant de leurs produits ou de leurs services. Enfin, elles doivent se regrouper pour gagner les appels d’offres les plus importants face aux grands groupes. Cette rencontre de l’innovation portée par les PME est également dans l’intérêt des administrations publiques et de l’économie française. Les PME sont en effet bien souvent porteuses de solutions plus innovantes, plus agiles, plus souples que celles des grands groupes, ces derniers ayant une certaine tendance à reproduire des schémas éprouvés. Par ailleurs, les prestations des PME, à performances égales, sont moins onéreuses que celles des grandes entreprises, ne serait-ce qu’en raison de leurs coûts de structure plus faibles. C’est également l’intérêt de l’économie française si l’on raisonne en termes d’efficacité de la dépense publique. Quelques chiffres illustrent ce constat : les PME en France représentent 52#% de l’emploi salarié, réalisent 49#% de la valeur ajoutée et 43#% de l’investissement. L’Observatoire économique de l’achat public relève qu’en 2011, en valeur, 28#% seulement de la commande publique allait aux PME, et pas plus de 12#% pour la seule commande publique de l’État. C’est très insuffisant, notamment au regard des enjeux de création d’emplois dont les PME sont les principales pourvoyeuses. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’opposer grandes entreprises et PME. La commande publique est suffisamment vaste pour que

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chacun trouve sa place. Il s’agit d’appeler les services achats de l’État et des collectivités à s’ouvrir plus largement aux PME et à l’innovation. « Il faut desserrer un peu le col des acheteurs publics », affirme d’ailleurs JeanLou Blachier, médiateur des marchés publics. Il s’agit en effet de détendre la contrainte juridique qui pèse sur eux afin de favoriser la prise de risque lorsqu’elle permet de valoriser l’innovation et l’efficacité économique de la dépense publique. UN ACCÈS FACILITÉ DES PME À LA COMMANDE PUBLIQUE

Dans le contexte de crise que notre pays connaît depuis plusieurs années, les entreprises doivent trouver des relais de croissance. Si pour la plupart des PME, les marchés publics restent un domaine compliqué, la commande publique leur offre de réelles opportunités de développement, si tant est qu’elles s’organisent avec rigueur pour l’aborder. Plusieurs facteurs favorables méritent d’être soulignés. Les gouvernements successifs ont adopté des dispositions permettant de faciliter l’accès des PME à la commande publique, et les ont inscrites dans le Code des marchés publics. Par ailleurs, les services achats de l’État sont fortement incités à réserver une part significative de la commande publique à des PME. Ainsi Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique, a-t-elle fait adopter au mois d’avril 2013 des dispositions pour favoriser l’accès des PME innovantes à la commande publique. Et les grandes entreprises ellesmêmes sont incitées à réserver une part significative du montant des marchés publics auxquels elles accèdent à des PME sous-traitantes. Enfin, dans son rapport sur la compétitivité de l’industrie française, rendu au Premier ministre en novembre 2012, Louis Gallois suggère d’élaborer un équivalent du Small Business Act comme cadre de cohérence des dispositifs en faveur de la croissance des PME. Le chemin est encore long pour que la place des PME dans la commande publique corresponde à leur poids réel dans l’économie française. L’intention politique est bien présente et régulièrement réaffirmée, les outils se mettent progressivement en place, mais il n’en demeure pas moins que l’effort principal reste bien entendu à fournir par les PME ellesmêmes pour gagner les appels d’offres. C’est pourquoi elles doivent envisager de se faire accompagner afin d’accroître significativement leurs chances d’accéder à la commande publique. T

Les PME doivent se regrouper pour gagner les appels d’offres les plus importants face aux grands groupes. »

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24 LES IDÉES LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

CRISE : DES VÉRITÉS SI DÉRANGEANTES Au fil des épisodes qui se succèdent, et en attendant le prochain, la crise a adopté son rythme de croisière. À défaut d’avoir élucidé les raisons de son démarrage, devenu lointain, il n’est pas interdit d’enregistrer quelques constatations quand bien même elles seraient dérangeantes : la dette ne diminue pas, la croissance ne repart pas et le dollar comme monnaie de réserve ne convainc pas.

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P FRANÇOIS LECLERC

ANCIEN CONSEILLER AU DÉVELOPPEMENT DE L’AGENCE FRANCE-PRESSE

Il tient la chronique de « L’actualité de demain » sur le blog de Paul Jorion. Il est l’auteur de La crise n’est pas une fatalité (éditions Osez la République sociale !, 2013, 280 p., 13 euros).

résenté comme solution miracle, le désendettement n’intervient pas comme espéré. La barque de la dette publique a été trop chargée et la soulager n’est à portée ni des États-Unis ni du Japon, qui continuent d’emprunter le chemin inverse, ni même de l’Europe, où la simple réduction du déficit se traduit par une crise sociale et politique multiforme. Du côté de la dette privée, les accommodements restent de mise, mais l’objectif n’est pas davantage accompli comme la BCE va devoir le révéler, si tout du moins elle réalise sa revue de détail des actifs bancaires sans complaisance (mais est-ce bien parti!?). Une vérité devrait s’imposer : stopper l’accroissement de l’endettement est hors de portée avec les faibles taux de croissance des PIB enregistrés, si l’inflation ne succède pas aux tendances déflationnistes actuelles en érodant la dette, ou si celle-ci n’est pas purement et simplement restructurée à grande échelle. Quant à la croissance, parlons-en de cette Arlésienne!! Des exemples en sont donnés, comme celui de l’Espagne, où elle a atteint 0,1!% au troisième trimestre, ainsi que celui de la Grande-Bretagne, où elle repose en premier lieu sur l’essor de l’immobilier à crédit financé par les largesses de la Banque d’Angleterre… un modèle à ne surtout pas suivre!! Car son principal moteur reconnu, la consommation, n’est pas au rendez-vous pour cause d’austérité généralisée, élégamment qualifiée de déflation interne. Un nouveau concept a émergé, dont la paternité revient à Enrico Letta, le président du Conseil italien, celui de « croissance sérieuse », celle qui se conjugue, on ne sait comment, avec les objectifs européens de réduction du déficit budgétaire qu’il souhaite réviser. Au final, le compte n’y est pas, ni pour la croissance, ni pour le désendettement.

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Stopper la montée de l’endettement est hors de portée avec les faibles taux de croissance des PIB enregistrés. »

LE HAUT NIVEAU DE CHÔMAGE ACTUEL SERAIT-IL DEVENU « STRUCTUREL »!?

Le concept de « croissance sérieuse » fait suite à celui de « croissance sans emploi », désormais adopté. Il traduit la faiblesse de la consommation qui crée une boucle rétroactive liant niveau de chômage élevé et faible croissance. Ce qui suscite alors une interrogation légitime : le chômage actuel serait-il devenu « structurel »!? Si c’est le cas, la conséquence est que sa courbe ne s’inverse pas. Et

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là, les implications débordent sur le terrain politique. En réalité, c’est bien la conception même de la finalité de la croissance qui est en question, un débat oublié après avoir commencé à être abordé. Reste le cas du dollar qui connaît une fin de vie mouvementée comme monnaie de réserve : que celle-ci soit appelée à durer seraient en l’occurrence une circonstance aggravante. Le gouvernement et le Congrès américains font obstacle à toute réforme du système monétaire international qui signerait un déclin des États-Unis dont les manifestations s’accumulent pourtant, en faisant payer à leur place les pays émergents, à défaut de pouvoir continuer de leur vendre sa dette. Prise entre deux feux – la détente des taux de la dette souveraine et le gonflement d’une nouvelle bulle financière – la Réserve fédérale retarde le moment de la décision qui la conduirait à diminuer ses achats de titres. Mais la guerre des monnaies ne durera pas cent ans. QUAND UN ANTHROPOLOGUE PROPOSE D’ANNULER LA DETTE, UNE FOIS DE PLUS…

Le spectacle du monde a bel et bien changé et pourtant les leçons n’en sont pas tirées, tout au contraire. La Grande-Bretagne offre une illustration de la réponse aveugle qui y est apportée. La City relève la tête, profitant que son concurrent Wall Street soit sous le coup d’enq u êt e s, d e p o u r s u i t e s et d’amendes dont le champ est promis à s’élargir. Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, délivre à ses ouailles « un message d’espoir » accompagné de petits cadeaux sur le terrain sensible de la pénurie de collatéral (actifs apportés en garantie). George Osborne, le chancelier de l’Échiquier, est parti négocier à Pékin une coopération avec la Chine afin de recomposer le monde financier. David Cameron, le Premier ministre, profite du récent sommet de Bruxelles et réunit sept de ses homologues européens en vue d’obtenir que soient retaillées les normes environnementales et sociales en vigueur, au nom de l’amélioration de la compétitivité des entreprises. Que trouve-t-on à l’opposé!? Un rejet populaire

RÉDACTION Directeur de la rédaction Éric Walther. Directeur adjoint de la rédaction Philippe Mabille. ( Économie Rédacteur en chef : Robert Jules. Rédacteur en chef adjoint : Romaric Godin. Jean-Christophe Chanut, Fabien Piliu. ( Entreprise Rédacteur en chef : Michel Cabirol. Rédacteurs en chef adjoints : Delphine Cuny, Fabrice Gliszczynski. Alain-Gabriel Verdevoye.

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À Londres, la City relève la tête, profitant qu’à Wall Street la justice enquête. [R.NAGY/SHUTTERSTOCK]

dont les manifestations s’expriment par une contestation dangereusement ignorée et, dans le domaine politique, par la montée des « populismes » (ce terme dont les professionnels de la politique imposent l’emploi péjoratif ) qui vient perturber la formation des coalitions gouvernementales, les compromis bipartisans et l’alternance entre partis de gouvernement. Le malaise vaut manifeste, mais aucune réponse ne lui est apportée. Des idées-forces surgissent néanmoins, dont deux viennent de susciter en France un écho. L’économiste Thomas Piketty et l’anthropologue David Graeber ont en commun de préconiser des solutions radicales. Le premier propose de lever un impôt mondial sur le patrimoine – occasion selon lui d’en faire l’inventaire détaillé – le second d’annuler une fois de plus la dette (lire La Tribune Hebdomadaire n° 64), en se référant à 5!000 ans d’histoire pendant lesquels cela n’a pas manqué. Les deux propositions sont complémentaires et pourraient même s’enchaîner. Car une fois une réduction de la dette réalisée, pour apurer le passé, quoi faire d’autre pour ne pas aboutir au redémarrage de la machine à produire à grande échelle de la dette, si ce n’est redistribuer le patrimoine via l’impôt, et partager égalitairement la nouvelle richesse produite!? Un troisième volet que n’abordent pas les deux universitaires s’imposerait en complément : interdire les paris sur les fluctuations des prix, afin que l’activité financière soit au service de l’économie. Autant de gestes tabous. Mais tôt ou tard, ne faudra-t-il pas convenir que la dette est insoutenable, tout comme le développement des inégalités dans la distribution de la richesse qui lui est étroitement liée!? Il y a au moins une certitude : cela se poursuivra tant que les rendements procurés par les transactions financières spéculatives seront supérieurs à ceux auxquels l’économie peut prétendre. À moins qu’il n’y soit mis le holà.T

La dette est insoutenable, tout comme le développement des inégalités dans la distribution de la richesse qui lui est étroitement liée. »

( Finance Rédacteur en chef adjoint : Ivan Best. Christine Lejoux, Mathias Thépot. ( Correspondants Florence Autret (Bruxelles). ( Rédacteur en chef Hebdo Jean-Louis Alcaïde. Jean-Pierre Gonguet.

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LES CHRONIQUES

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 LA TRIBUNE

SKOLKOVO, UNE SILICON VALLEY À LA MODE RUSSE Le projet fut lancé en 2010 par le président Medvedev. Objectif : réunir sur un même site start-up, chercheurs, entrepreneurs et L’INNOVATION financiers. Aujourd’hui, Skolkovo, près de Moscou, compte quelques grandes entreprises et un millier de start-up… au milieu d’une bagarre politique.

AU CŒUR DE

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K FRANCIS PISANI

CHRONIQUEUR, AUTEUR, EXPERT INTERNATIONAL EN INNOVATION, CONFÉRENCIER. SON BLOG : FRANCISPISANI.NET

atia Gaika sait jouer sur les nuances mais, face au journaliste, elle s’applique d’abord à faire passer des messages simples. « Le but est de former un écosystème avec des start-up, des entrepreneurs, des chercheurs, des capitalrisqueurs et de leur faire sentir qu’ils sont une communauté », m’explique-t-elle à propos du projet Skolkovo. Elle y est responsable R&D du cluster technologies de l’information. Présenté par le Moscow Times comme la « version du Kremlin de la Silicon Valley », Skolkovo est peut-être la plus pure tentative récente de la reproduire. Comptant sur les ressources de la Russie, de son gouvernement, de ses chercheurs de très haut niveau et de ses entrepreneurs décidés, l’initiative semble avoir tout pour réussir. Katia en est convaincue. « On peut y vivre et y travailler comme dans la Silicon Valley », m’at-elle expliqué avec conviction. D’ailleurs, un train permettra de se rendre dans le centre de Moscou en une demi-heure, et l’aéroport sera d’accès facile… Ça n’est pas la première fois que les Russes créent des villes à partir de rien. Plus qu’aux « cités de la science » soviétiques, elle pense à Saint-Pétersbourg créée par la volonté de Pierre le Grand sur un marécage et deve-

nue « l’une des plus belles villes de Russie ». « Changer de paradigme est souvent la seule façon de changer quelque chose en Russie. Il faut prendre le risque et c’est ce que nous faisons. Skolkovo n’est pas une question de géographie. C’est une philosophie, une idéologie. » L’ENJEU D’UN BRAS DE FER ENTRE POUTINE ET MEDVEDEV

Situé à la périphérie de Moscou, le projet a été lancé en 2010 par Dmitri Medvedev quand il était président pour marquer sa volonté de modernisation. Entreprise à but non lucratif, la fondation Skolkovo anime les différentes pièces de l’ensemble. L’une des plus importantes est l’Institut pour la Science et la Technologie (SkolTech). Créé en 2011 en collaboration avec le MIT, il se targue d’être « le premier à entièrement intégrer recherche, éducation, innovation et entrepreneuriat » au niveau de la maîtrise et audessus. Le pendant « affaires » est la Skolkovo Moscow School of Management, une école privée créée en 2006 dans le même esprit. Différence notable avec ses prédécesseurs soviétiques, Skolkovo est ouverte sur l’extérieur. Loin de se cacher, les dirigeants veulent qu’on connaisse son existence, son effort et bientôt, peut-être, ses réalisations.

Elle accueillera plusieurs grosses boîtes, de Microsoft à Siemens en passant par Cisco, IBM, Boeing, Philips, Pfizer, Tata, Gazprom. Cinquante-deux fonds de capital-risque, un millier de start-up ont déjà suivi le mouvement (juin 2013). La moitié pleine de la bouteille contient plutôt de la bonne vodka. Selon le Financial Times (FT), 1,6 milliard de dollars a été investi avant juillet 2013, 13#000 emplois ont été créés et un cinquième des start-up est déjà rentable ce qui, partout, ferait figure de succès fabuleux. L’autre moitié est faite d’accusations de corruption et de bagarres politiques. Elles se traduisent par une curieuse danse entre les deux principaux dirigeants du pays. À la mi-juin, Poutine annulait une disposition de son prédécesseur obligeant les entreprises publiques à contribuer à la dotation dont vit SkolTech, explique le Moscow Times. En août, Medvedev décidait d’y consacrer 15 milliards de dollars d’ici à 2020. Restons gigantesques. Ce bras de fer entre les libéraux de Medvedev et le groupe plus conservateur proche de Poutine risque d’entraîner, selon le FT, « la mort de la modernisation comme stratégie économique du gouvernement russe ». Medvedev peut encore disposer de sommes importantes, mais ses déclarations au moment de l’annonce méritent réflexion. « C’est beaucoup d’argent, a-t-il précisé. Et donc le contrôle devrait être permanent. » De fait, quand un État investit des sommes aussi vertigineuses et consacre autant d’efforts à un projet, il entend le contrôler. Ce qui semble contradictoire avec la dynamique d’un écosystème innovant. Un vrai problème.T

ON EN PARLE À BRUXELLES

La main (pas si) invisible de la City prise dans le sac

A

u début des années 1990, la place de Paris était à la pointe de l’innovation financière. Sur le Matif, le marché à terme des instruments financiers, les premiers contrats à terme sur les taux d’intérêt s’échangeaient autour de la corbeille dans une ambiance frénétique. Sur les écrans s’affichaient en temps réel le meilleur prix offert à la vente comme à l’achat, ainsi que la valeur de la dernière transaction. Regarder cette ruche était comme ouvrir un manuel d’économie à la page : « main invisible ». Sur le « parquet », la belle métaphore d’Adam Smith devenait une réalité tangible, incarnée par un essaim grouillant de vestes de couleur dont les manches s’agitaient frénétiquement. Chacun disposait de la même information au même moment. Le rêve du marché pur et parfait devenait réalité. Vingt ans plus tard, les criées ont quasiment disparu et le palais Brongniart n’est plus qu’un « lieu » loué à la journée. Les Bourses, en tant qu’infrastructures multilatérales chargées de faire fonctionner cette « main invisible », ont perdu leur monopole. Elles ne gèrent plus qu’une partie réduite des transactions sur actions et de lucratives niches sur certains contrats dérivés. Le reste du « marché » est éclaté entre différents lieux de transactions multiples et immatériels,

quand il n’est pas directement géré par les brokers qui négocient entre eux, en bilatéral, ou se contentent de « matcher » en interne les ordres de leurs clients. Une poignée de banques et de fonds ont acquis la maîtrise de l’information centrale, le prix, et sont en situation d’en tirer de confortables profits en jouant sur des « spreads » minuscules entre les cours auxquelles elles passent les ordres et ceux du marché. AU MOMENT DE LA PREMIÈRE GRANDE RÉFORME des marchés de titre qui a aboli les mono-

poles boursiers, ces banques avaient mené une épique bataille pour soustraire certaines transactions sur actions à la « transparence pré-trade », autrement dit à l’obligation de révéler au client le prix du marché avant de passer un ordre. Elles l’avaient gagné. « MiFID » avait ouvert la voie à de larges exemptions dans lesquelles elles s’étaient engouffrées, soustrayant non seulement les grands ordres mais aussi une bonne partie de la liquidité à cette règle de transparence élémentaire. Quand le commissaire européen Michel Barnier a entrepris une réforme du texte en 2011, un de ses principaux objectifs était de ramener à la lumière une partie de ces ordres passés « dans le noir ». Il avait le soutien des régulateurs et de nombreux ministres des Finances européens, inquiets des

effets de MiFID sur la formation des prix et le fonctionnement des marchés. Mais alors que la négociation de « MiFID 2 » progresse laborieusement vers un vote au Parlement après deux ans de négociations, rien ne dit que le commissaire français arrivera à ses fins. Ces dernières semaines, Markus Ferber, chef de file du Parlement sur ce dossier, s’est érigé en défenseur de ces exemptions pourtant unanimement critiquées. Dans un récent « non-papier » sur la transparence « pré-trade » envoyé à la présidence lituanienne, chargée de gérer la négociation, il reprend presque à la lettre l’argumentation des banques d’investissement. Son texte présente de troublantes similitudes avec le mail adressé en septembre par une coalition constituée par les BlackRock, LSE et autres Allianz aux principaux négociateurs du texte. Ces documents, qui ne sont publics ni l’un ni l’autre mais que nous avons pu consulter, suggèrent que « les ordres passés dans le noir sont autorisés même quand ils ne sont pas grands, dès lors qu’il y a une notable amélioration du prix ». Faut-il y voir l’œuvre de la main (presque) invisible de la City#? La Commission européenne et les autorités de surveillance des marchés tenteront-elles une contreattaque#? La transparence des prix est la mère de toutes les batailles. Sans elle, le rêve d’Adam Smith s’évanouit.T

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LE CARNET DE NOTRE CORRESPONDANTE, FLORENCE AUTRET

26 L’INTERVIEW LA TRIBUNE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

WILLIAM KOEBERLÉ PRÉSIDENT DE MARIONNAUD

« Comment essayer un parfum sur Internet!? » Pour vendre du parfum aussi, il faut innover. Le groupe Marionnaud, l’un des leaders européens de la parfumerie sélective racheté en 2005 par le groupe A.S. Watson (fondé par le milliardaire de Hong Kong Li Ka-shing), inaugure cette semaine son magasin emblématique des Champs-Élysées. Ouvert 7 jours sur 7 et surtout de 10!h à minuit, là où son principal concurrent, Sephora, vient de se faire interdire par la justice d’ouvrir la nuit!! L’occasion de revenir avec le patron de Marionnaud sur les règles d’ouverture des commerces… en attendant le rapport Bailly.

À l’heure où des magasins comme Virgin ont fermé, les Champs-Élysées restent un emblème!? Paris est une marque et les Champs-Élysées sont, comme toute grande avenue commerçante des métropoles, un tremplin vers le monde. Ce magasin a été conçu sur un parti pris très identitaire : proposer une illustration de l’univers typique de l’hôtel particulier haussmannien, dont le client retrouvera quelques codes au long de sa visite. Mais nous sommes au XXIe siècle, avec un magasin connecté. Par exemple, les tables de maquillage, où l’on peut se photographier et partager son nouveau look ou ses émotions avec sa communauté. (

PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE MABILLE

( LA TRIBUNE – Marionnaud Paris, votre nouveau magasin

des Champs-Élysées, sera ouvert 7 jours sur 7 de 10!h à minuit, alors que quelques immeubles plus bas, Sephora a été obligé de fermer le soir. Coup de pub ou provocation!? WILLIAM KOEBERLÉ – Nous avons fermé notre magasin des Champs-Élysées le 27 mai dernier, bien avant la polémique que vous évoquez. Nous rouvrons, après quatre mois et demi de travaux, une boutique totalement différente, sur un concept innovant qui met l’accent sur le service et le digital. Cet investissement représente 25!% du chiffre d’affaires de ce magasin. Pour Marionnaud France, c’est une dépense de plusieurs millions d’euros qui doit permettre d’offrir à Paris, sur la plus belle avenue du monde, une vitrine internationale pour l’enseigne comme pour les parfums français les plus iconiques et les marques emblématiques du « made in France » comme Chanel, Dior, Hermès, Lancôme, Yves Saint-Laurent. C’était déjà le plus grand magasin du groupe, mais notre objectif est de doubler au moins le chiffre d’affaires en développant le service et le taux de conversion. Deux tiers des clients de ce magasin sont des touristes de passage à Paris, et 54!% sont étrangers. Ils sont surtout présents le soir et les week-ends. En zone touristique, l’ouverture le dimanche ne pose pas de problème. S’agissant du soir, Marionnaud s’appuie sur l’accord social négocié dès 2001 avec les partenaires sociaux, amendé après la loi Mallié. Cet accord de dérogation est spécifique à ce magasin et nous permet d’ouvrir après 21 h et jusqu’à minuit, tranche horaire où nous réalisons une part très importante de nos ventes.

«

( Ne craignez-vous pas malgré tout que l’intersyndicale du

commerce de Paris, Clic-P, qui a obtenu la fermeture de Sephora le soir, assigne à son tour Marionnaud!? Nous avons pris la peine de négocier un accord et j’espère qu’il sera respecté, car de notre côté, nous avons agi dans le cadre légal. Nous ne sommes pas dans la doctrine ou l’idéologie, mon activité est le commerce. Il y a des endroits où le mode de vie peut justifier de travailler au-delà de 21!h et d’autres non. C’est au cas par cas qu’il faut regarder les choses. Par ailleurs, aujourd’hui quoi qu’on en pense, le shopping fait partie du tourisme et dans ce cas, il n’y a pas de report de consommation, mais un déplacement vers un lieu plus accueillant. Que veut-on!? Que les touristes de passage à Paris prennent, comme c’est déjà trop souvent le cas, l’Eurostar pour faire leur shopping à Londres!?

Ce que j’attends du rapport Bailly, c’est de donner un cadre plus clair : où sont les zones touristiques!? »

( Mais il est quelque peu surprenant de voir deux boutiques

aussi proches l’une de l’autre avoir des règles d’ouverture si différentes… Notre mode d’organisation du travail en magasin est différente. Nos employés qui travaillent au-delà de 21 h s’occupent uniquement de vente et c’est une autre équipe qui, tôt le matin, range. Les salariés qui restent jusqu’à minuit rentrent en taxi et bénéficient d’une double majoration, de 25!% sur le salaire et de 10!% sur les récupérations. Ce qui représente un gain de 150 à 200 euros par mois. Cela se fait sur la base du volontariat. Avec 86 magasins dans Paris et une forte présence en Île-de-France, nos salariés savent que la mobilité est possible dans le réseau, si leur situation familiale change. Seul le magasin des Champs-Élysées est concerné par une ouverture au-delà de 22 h. Enfin, nous avons recruté : alors que la surface de vente n’a progressé que de 10!%, nous avons doublé les effectifs et créé 40 emplois pour ce magasin en formant nos 80 collaborateurs aux attentes différentes d’une clientèle internationale et locale. À l’image des clients, Marionnaud Paris est un lieu multiculturel où plus de 15 langues sont parlées.

point de bascule où tout se voit et le « flagship store » des Champs-Élysées est un signal. Nous sommes prêts pour entrer dans une deuxième phase, celle de l’ouverture de magasins dans des villes où nous ne sommes pas, ou pas assez. ( Pourtant, la crise du pouvoir d’achat est là.

C’est vrai, après une stagnation en 2012, le marché est orienté à la baisse depuis le début de l’année avec un recul global de 1,5!% des ventes et de 4,5!% des volumes. La sensibilité au prix s’accroît. S’agissant du parfum qui accuse la plus forte baisse, nos concurrents ne sont pas seulement Sephora et Nocibé, mais le marché du cadeau sur lequel, notamment à Noël et à la Fête des mères, nous devons demeurer attractifs. À nous de convaincre les clients en innovant par des produits, des univers nouveaux, en réinvestissant une partie de notre marge pour fidéliser les clients. ( Et la concurrence d’Internet!?

Le commerce numérique fait désormais partie de notre métier et de notre stratégie. Il y a cinq ans, moins de 10!% des clients allaient sur le Net, aujourd’hui 2/3 commencent leurs emplettes sur Internet et les finalisent dans nos boutiques. D’où le soin que nous mettons à rénover et à mettre en scène ces deux canaux. Avec le digital on s’informe, on compare, on choisit et on partage les informations, les bons plans, les coups de cœur. Pour autant, la plupart du temps, l’acte d’achat se termine en magasin parce que la dimension conseil et le contact avec le produit parfum ou produit de beauté demeure capital. Comment essayer un parfum sur le Net!? ( Mais les pure players d’Internet ne vont-ils pas casser les

prix comme on l’a vu dans d’autres secteurs!? Dans la distribution sélective, si une marque ne veut pas être dans un magasin, elle en a le droit. C’est ce que l’on appelle le bloc d’exemption de la parfumerie. Avec l’arrivée d’Internet, il a été révisé et impose, depuis 2012, l’exploitation d’un magasin en dur pour ouvrir un magasin sur la Toile. Nous sommes les premiers à utiliser notre magasin sur Internet qui est ouvert 24  h/24, tous les jours de l’année. La concurrence est déloyale avec ceux qui ne respectent pas ces règles et exploitent depuis des paradis fiscaux un business de revente de parfums dont on a du mal à identifier la provenance. T

( Finalement, votre cas est assez emblématique du débat sur

la place du contrat et de la loi!? Ce que j’attends du rapport Bailly, c’est de donner un cadre plus clair : où sont les zones touristiques!? Que sont les PUCE [périmètres d’usage de consommation exceptionnel, ndlr]!? Quelle place et quelle légitimité face à la loi pour la négociation sociale au sein des entreprises sur l’organisation du travail!? Dans tous les pays où le dialogue social est fort, ce problème ne se pose pas et il n’y a pas d’exagération s’agissant du travail du dimanche ou du soir. ( Comment Marionnaud, qui est l’un des tout premiers

investissements chinois en France, traverse-t-il la crise!? À l’offensive. Depuis le rachat de cette entreprise, au bord de la banqueroute, par le groupe A.S. Watson en 2005, nous l’avons restructurée dans un environnement très concurrentiel. Notre actionnaire n’a pas eu un comportement de financier, mais bien une attitude d’industriel, en soutenant tous nos choix d’investissements (rénovation du réseau, CRM et digital, développement de marques propres…). Tout cela s’est fait à bas bruit, et à partir du terrain, ville par ville, en lien avec le tissu local, en nous attachant au dialogue social pour rénover en deux ans dans toute la France plus de 210 magasins. Aujourd’hui, nous sommes arrivés à un

Selon William Koeberlé, « quoi qu’on en pense, aujourd’hui le shopping fait partie du tourisme ».

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VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013

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VENDREDI LA TRIBUNE 5 AVRIL VENDREDI 2013 8 LA NOVEMBRE TRIBUNE 2013

PASCALE PAOLI-LEBAILLY, À RENNES

CHAMPIONS D’AVENIR. Lunettes connectées, outils électroencéphalographiques, diffusion numérique… rien de ce qui fera la croissance de demain n’est étranger aux start-up bretonnes. MENSIA TECHNOLOGIES ANALYSE LES ONDES CÉRÉBRALES © Mensia Technologies

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n en parle grâce aux Google Glass certes, mais l’émergent marché des lunettes connectées ne sera pas monopolisé par un seul acteur. La start-up rennaise Optinvent compte bien prendre sa part du gâteau avec son modèle ORA-S. Ayant finalisé la plateforme hardware, la société ouvre, via son site, la campagne de précommande, au prix d’appel de 700 euros pour les développeurs et les entreprises des secteurs identifiés (médecine, distribution, logistique, avionique, etc.). Une fois l’écosystème et une masse critique d’applications dédiées construits, le produit arrivera sur le marché grand public courant 2014 à un prix situé entre 200 et 300 euros. Après quatre ans d’investissement en R&D pour un total de 3,2 millions d’euros, Optinvent (5 salariés) entend fortement accroître, dans les années à venir, son chiffre d’affaires (moins de 100 000 euros en 2012). « Le marché des early-adopters français risque d’être assez faible. 20 millions de D ’e m b l é e , lunettes nous visons l’internatioconnectées et les seraient vendues nal, États-Unis, fait remarfin 2018. quer Kayvan Mirza, président du directoire d’Optinvent et ancien de Thomson Multimedia. Avec un argument : ORA-S propose une image plus grande que celle des Google Glass, comme un grand écran de cinéma, d’une meilleure qualité optique et qui se superpose au monde réel, selon le principe de la réalité augmentée. » La société vient d’ailleurs de s’associer à l’Autrichien Wikitude afin de créer la première vraie plateforme pour des lunettes de réalité augmentée, combinant l’écran transparent d’ORA-S et le kit de développe-

Les lunettes connectées ORA-S proposent une image plus grande que celle des Google Glass.

ment logiciel de Wikitude. Relevé et directement dans la ligne de visée, l’écran ouvre un champ d’expériences immersives. Abaissé en mode « tableau de bord », il affiche simplement des informations pratiques (itinéraire, plan, etc.). Les innovations d’Optinvent sont protégées par huit brevets. Et la concurrence avec Google, dont les lunettes, actuellement en phase de présentation en Europe, offrent un petit écran fixe installé audessus de l’œil droit (plus GPS, micro et caméra), ne lui fait pas peur. Pour Kayvan Mirza, c’est même un atout. « En évangélisant le marché, ils font le travail pour nous ! » Selon Business Insider, 20 millions de lunettes connectées seront vendues fin 2018, pour 10,5 milliards de dollars.

GOLAEM MULTIPLIE LES FIGURANTS COMME LES PETITS PAINS Fondée en 2009 par des ingénieurs de l’Inria à Rennes, Golaem s’est spécialisée dans le développement d’outils conçus pour aider les artistes et réalisateurs de films ou de séries à animer des personnages numériques. La start-up a sorti, en mai 2011, Golaem Crowd (photo), un simulateur de foule en 3D qui permet de peupler des mondes numériques avec des personnages, de quelques individus à plusieurs milliers. Une nouvelle version du produit est en préparation pour 2014, plus particulièrement conçue pour positionner la société de 13 personnes (CA de 137 000 euros en 2012) durablement sur le marché du jeu vidéo. Sa technologie a été utilisée pour le dernier Astérix et Obélix au service de Sa Majesté.

Contrôle de soi, relaxation, gestion de la performance : Mensia Technologies peaufine son offre commerciale de solutions, visant les grands sportifs et le monde de l’entreprise. Développés par cette start-up rennaise créée fin 2012, ces outils d’électro-encéphalographie quantitative en temps réel seront commercialisés dès 2014. Fondés sur les connaissances de la compréhension du cerveau humain, ils mesurent l’activité cérébrale de personnes équipées d’un casque à électrodes. Ces dispositifs peuvent aussi soigner l’insomnie ou traiter les troubles de l’attention chez l’enfant. Mensia Tech, qui emploie 9 personnes dont 7 ingénieurs et docteurs, prévoit de générer 80 % de son chiffre d’affaires en 2015 sur le marché du bien-être, aux États-Unis notamment. ENVIVIO, ENTRE BRETAGNE ET SILICON VALLEY

Spécialiste de la compression numérique, du Mpeg-4 et de la diffusion multi-écrans, la société francoaméricaine Envivio mise sur la R&D pour remplir ses objectifs de croissance. Cotée au Nasdaq, elle a agrandi son unique centre de recherche implanté à Rennes pour accueillir jusqu’à 200 ingénieurs. Fruit de l’essaimage de France Télécom, la société (190 salariés), créée en 2000 et issue d’Orange Labs, est déjà sous contrat avec Time Warner Cable et Verizon. Basée à San Francisco, Envivio propose des solutions logicielles permettant une diffusion haute résolution vers tous les écrans (TV, tablettes, smartphones). La start-up a investi 5,3  millions d’euros dans la recherche en 2012.

© Envivio

OPTINVENT DÉFIE GOOGLE

© Golaem

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e tocsin contre le déclin. Le 16  octobre, jour où l’État s’est penché au chevet de la Bretagne et a débloqué 15  M€ pour traiter l’urgence, des entreprises de l’agro-alimentaire ont tiré le signal d’alarme. Tocsin pour les abattoirs Gad (1 000 emplois supprimés), le volailler Doux (1 400 postes en moins)… Tocsin aussi contre l’écotaxe, la mesure de trop qui a mis en ébullition les patrons bretons. L’agro-alimentaire régional, ce sont 4  600  entreprises, 70 000 salariés, 20 % de la production nationale et 16,5 Mds€ de chiffre d’affaires. Et à y regarder de plus près, la crise du secteur de la production (21 % du lait français, 34 % des poulets de chair, 58  % des porcs élevés) signe également l’échec d’entreprises qui n’ont pas innové pour s’adapter à la concurrence. Pour autant, tout le modèle breton n’est pas à revoir, loin de là. L’agro-alimentaire possède de véritables capacités de rebond : la valeur ajoutée passe par la transformation (plats cuisinés, nouveaux produits, etc.). Au printemps 2014, la pépinière Biopôle abritera à Rennes les porteurs de projets innovants dans ce secteur. Aux vicissitudes de l’agro, s’ajoutent aujourd’hui celles de l’automobile, avec le plan social lancinant chez PSA, et des télécoms avec celui d’Alcatel. Pourtant, la région résiste mieux à la crise, selon l’étude des défaillances d’entreprises du cabinet Altarès. Car la Bretagne est la cinquième région innovante, et développe une excellente dynamique R&D, tant publique que privée. Deuxième pôle après la région parisienne, le secteur des TIC fédère grands comptes et PME innovantes. Elles disposent à Rennes, à Lannion et à Brest d’un nouvel outil de recherche, l’IRT Bcom, dédié aux technologies du numérique (images, réseaux et e-santé). La mer, 15  % du PIB breton, nourrit également les espoirs. L’économie maritime (pêche, mareyage, construction navale, énergies renouvelables, traitement des eaux, tourisme littoral, etc.) travaille sur des niches de haute valeur ajoutée. Hydroliennes, éoliennes flottantes, biotechnologies marines (santé, nourriture), filière algues, sont autant de pistes de croissance et de création d’emplois. De quoi laisser entrevoir un avenir très prometteur. T

LES TRENTE PME LES PLUS INNOVANTES © Optinvent

ÉDITO ÉDITO

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LA TRIBUNE DES MÉTROPOLES

SYRLINKS FAIT SES BALISES POUR ALLER PLUS LOIN

DR

LA TRIBUNE LA TRIBUNE VENDREDI VENDREDI 8 NOVEMBRE 5 AVRIL 2013

INTERVIEW LOÏG CHESNAIS-GIRARD, VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL, CHARGÉ DE L’ÉCONOMIE ET DE L’INNOVATION

© Breitling

« La Glaz économie est à inventer »

Certains pointent l’incapacité des Comment créer de nouvelles fi- Comment la région accompagnecollectivités à réagir face à la tour- lières et emplois ? t-elle la mutation de certains secmente. Qu’en pensez-vous ? Par la Glaz économie, mélange d’éco- teurs ?

des « villages » dédiés à un projet R&D. Les équipes marketing et ventes, concentrées sur la relation client, sont aussi structurées en « account teams ». CIMAPREM FAIT AIMER LES ALGUES BRUNES

© Coogee Data

Spécialiste de la géolocalisation «  indoor  », la société, cofondée en 2011 à Lorient par Jean-Philippe Gros et Hervé Jolif, a levé cet été 220 000 euros pour accélérer la commercialisation en Europe, aux États-Unis et au Moyen-Orient de son application à 360° web et mobile, itiView. Cet outil d’aide aux déplacements guide, par l’image, les touristes en escale et les usagers des gares, des aéroports et autres lieux publics. Adoptée par la SNCF via son site gare360. com et par l’aéroport de Copenhague (www.360.cph.dk), l’application va être reprise par un aéroport italien. Coogee Data (14 salariés) vise un CA de plus de 1 million d’euros en 2013, soit le double de 2012, dont plus de 50 % à l’export.

DR

Spécialiste du marketing relationnel digital, la société rennaise, fondée par Jocelyn Denis en 2004, édite des solutions Cloud permettant aux entreprises de piloter leurs actions de marketing en temps réel, sur tous les canaux digitaux : SMS, site mobile, QR code, e-mail, vocal, réseaux sociaux. Fort d’une croissance de 81 % en 2012 (CA de 5,8 M€) et de 35 % prévus en 2013, Digitaleo fonde aussi son succès sur un management participatif. Ses 55 collaborateurs (100 attendus en 2016), travaillent au sein d’équipes évoluant dans

© Digitaleo

l’international. Avec un objectif de CA de 3 millions d’euros en 2014 (2,2 millions d’euros en 2012), Artefacto (40 personnes) vient d’ouvrir un bureau à New York.

De fournisseur d’ingrédients naturels et d’alginates (épaississants tirés de l’algue brune utilisés dans l’agro-alimentaire, la pharmacie et les soins dentaires), Cimaprem est devenu façonnier et fabricant de produits finis. Cette PME de Redon (Ille-et-Vilaine) a amorcé sa mue en 2008. Eaux gélifiées, flans à froid à la poudre d’algue pour la restauration collective, valorisation des chutes de volaille : les solutions innovantes de Cimaprem concernent à 80 % l’agroalimentaire. Mais son relais de croissance, c’est la cosmétique où la société a investi 3 M€ dans une nouvelle unité de production. La PME (14 salariés, dont 7 en R&D) compte sur ses masques et enveloppements peel-off pour multiplier par deux son CA (1 à 2 M€ par an) sous deux ans. HAPPINOX REND L’INOX JOYEUX

DIGITALEO CULTIVE LE MARKETING RELATIONNEL

ARTEFACTO AUGMENTE LA RÉALITÉ DE L’IMMOBILIER Présenter un futur immeuble ou un élément de mobilier en réalité augmentée, en superposant sa maquette 3D en temps réel au flux vidéo d’un smartphone et d’une tablette : voilà la promesse d’Urbasee. Cette solution logicielle innovante d’aide à la conception et à la vente de projets immobiliers et d’urbanisme a été développée par Artefacto. Spécialiste de la simulation 3D et de l’animation virtuelle, la société rennaise, cofondée en 1998 par les architectes Valérie Cottereau (PDG) et Erwan Mahé (directeur R&D), compte sur cet outil pour se développer à

sion 2012 de la plateforme logicielle en ligne mise au point par cette start-up basée près de Saint-Brieuc. Cet outil permet aux entreprises, aux industriels, aux collectivités locales, d’accroître leur audience et leur zone d’attraction via un événement virtuel personnalisé et clé en main. Interactif et en 3D, il offre des fonctionnalités comme l’interpellation du visiteur, la prise de rendez-vous, la discussion sur stand.... Visiofair (six personnes en France) vend sa solution 25 000 euros par an et vise un CA de 400 000 euros en 2013. COOGEE DATA GUIDE LES VOYAGEURS

VISIOFAIR REND LES SALONS VIRTUELS

Fondée en 2011 par 3dms, société d’imagerie 3D, Visiofair a été choisie cette année par la Maison régionale de l’industrie du Canada pour organiser quatre salons virtuels sur l’emploi. Ceux-ci s’appuieront sur la ver-

Par l’aide à l’innovation, à la création ou au développement de l’entreprise. Le prêt pour l’amorçage régional PHAR (1,6 M€ accordés à 37 projets), le Prêt participatif d’amorçage et le fonds Go capital amorçage accompagnent ainsi les jeunes entreprises innovantes. La Bretagne consacre 100 M€ par an au développement et à l’innovation économique. T

© Cimaprem

Entre mobile et télévision, Leankr s’est spécialisée dans la conception d’applis pour le second écran. Interlocutrice des opérateurs et des chaînes, la start-up, fondée en avril 2012, a lancé, en septembre dernier avec TDF sur iPhone et iPad, sa première application gratuite grand public. NewsMatch fournit ainsi en temps réel des articles (flux RSS) en lien avec une émission d’information (JT, magazine) diffusée en TV. La plateforme technique de Leankr a été mise au point à Rennes où est installée l’équipe de R&D, trois personnes sur un effectif de quatre actuellement. Leankr vise l’équilibre pour 2015 et procédera à une levée de fonds en 2014 en vue d’étoffer son équipe R&D et de se développer aux États-Unis et en Corée.

nomies verte, bleue et grise : transition énergétique, filière marine, biotech, santé. La Bretagne doit innover en s’appuyant sur ses formations, sa force de production, l’attractivité du territoire et sa capacité d’exportation. Il faut aussi renforcer les pôles d’innovation de Brest, Lannion, Rennes autour du numérique et de la cybersécurité.

Depuis quarante ans, BTCI transforme l’inox pour des applications industrielles. Ses clients proviennent à 75 % de l’agroalimentaire. Mais la PME, basée près de Rennes, innove aussi dans les secteurs de la santé, de la cosmétique ou de l’électronique, avec la fabrication du mobilier inox des salles blanches de production. Connue pour ses réalisations uniques et la technicité de ses prestations, l’entreprise a lancé en avril dernier la marque Happinox. Elle a développé trois familles de mobilier haut de gamme très design pour l’extérieur et les loisirs nautiques. Braseros et séchoirs inox doivent faire croître le CA de BTCI (CA de 1,3 M€, 15 salariés) de 30  % d’ici à trois ans.

© Happinox

LEANKR ENRICHIT LES ÉMISSIONS TV © Leankr

C

’est un produit unique et, en termes de miniaturisation de la carte électronique, une innovation notable. En intégrant sa technologie dans la nouvelle montre Breitling Emergency II, Syrlinks tire les fruits de ses investissements en R&D. Spécialiste des systèmes de communication sans fil dans les domaines spatial, de la défense et de la sécurité, la PME, fondée en 2011 à Rennes, a conçu pour ce produit très haut de gamme des solutions électroniques d’avant-garde : balise de détresse bi-fréquence (vers le satellite et vers un avion ou un hélico sur zone), réduction de la consommation, performances électriques et fiabilité. La société (30 salariés dont 23 en R&D) prévoit une forte hausse de son CA en 2014 (4 M€ en 2013). « Nous développons des produits selon les normes internationales. La miniaturisation est un axe fort d’innovation, et Breitling cherchait un partenaire, précise Guy Richard, président et directeur technique, cofondateur de Syrlinks avec trois autres anciens cadres de TES Electronic Solutions. Les solutions mises au point nous ouvrent maintenant d’autres perspectives. » Ces solutions pourront être appliquées à la sécurité maritime et intégrées, par exemple, à des gilets de sauvetage ou à des vêtements conçus pour des conditions extrêmes. D’abord dédiée au monde de l’avionique, la montre en titane Breitling Emergency II sera commercialisée en fin d’année autour de 14 000 euros. Son émetteur bifréquence est conforme aux spécifications du système international d’alerte par satellite Cospas-Sarsat : du milieu du désert ou de l’océan, il permet de lancer l’alerte via le réseau de satellites Leosar et Geosar. Le domaine de la communication spatiale est d’ailleurs le premier secteur d’activité de Syrlinks, qui en tire 50 % de son CA. Un de ces émetteurs équipe ainsi Proba-V, et transfère vers la Terre les prises de vue effectuées par ce satellite lancé en mai dernier par l’Agence spatiale européenne (ESA) et chargé de cartographier l’occupation des sols et la végétation de la planète.

© Visiofair

La nouvelle montre Breitling Emergency II, équipée du système de communication de Syrlinks.

Les collectivités ne gèrent pas les entreprises. Dans la production agricole, l’automobile ou les télécoms, des choix stratégiques n’ont pas été opérés. Retrouver une Bretagne productive, c’est moderniser l’élevage, les outils d’abattage, harmoniser les règles européennes. La crise de l’automobile nous invite aussi à penser, ensemble, à d’autres formes de mobilité.

BRETAGNE

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ASKOM OFFRE DES AGENTS VIRTUELS AUX PME

Accessoires, panneaux, matériel de communication, etc. : d’ici 2017, Self Signal fournira à Veolia, sur 50 % du territoire hexagonal soit tout le Grand Ouest, l’ensemble de ses équipements de chantier. Avec cet accordcadre, la PME rennaise va pouvoir tirer profit de ses innovations permanentes sur les matériaux. Spécialisée dans les panneaux de signalisation (route, chantier, police), les totems, les enseignes, elle a mis au point le panneau le plus résistant du marché français. En matière plastique recyclable, il est issu de déchets organiques revalorisés. Cette année, Self Signal (CA de 8 M€ en 2012, 65  salariés) embauche et investit 300 000 euros, notamment dans la mise en place de la certification CE et le développement de produits.

Se faire guider de manière ludique et efficace ou conseiller 24 h/24 et 7 j/7 n’est plus réservé aux visiteurs des sites Internet des grands comptes et grands groupes (Fnac, EDF, etc.). La start-up rennaise Askom propose aux TPE-PME de créer aussi leur propre agent virtuel intelligent (AVI). Pour un forfait mensuel abordable, cet avatar accompagnera leur relation client sur leurs sites vitrine ou ceux de e-commerce. Lancée en 2009 au sein d’Edcom, un compa-

rateur de forfaits mobiles, la marque commerciale Askom est devenue une société à part entière en juillet dernier. Elle vise un CA de 100  000  euros en 2013, avec 50 clients. Askom enrichira sa solution en 2014 avec le multilingue (anglais, espagnol, allemand).

LE FABSHOP DÉMOCRATISE L’IMPRIMANTE 3D Bertier Luyt a obtenu le contrat de distribution, pour les pays francophones, des imprimantes 3D de bureau du leader américain MakerBot, qui détient 25 % du marché. Il a ainsi pu concrétiser son FabShop. Ce projet d’atelier de fabrication digitale utilisant la modélisation 3D, a d’abord été adossé courant 2012 à Batitrad.pro, la première société de Bertier Luyit, spécialisée dans la fabrication de décors de spectacles. En avril 2013, le FabShop est devenu la marque commerciale d’Avro Tech, fondée en avril dernier, dont il est le directeur général associé. Après avoir levé 350 000 euros en août, le FabShop emploie une dizaine de personnes

et vise un CA de 730 000 euros en 2013. Le double en 2014 grâce aux marchés français, suisse, belge et nord-africain.

© FabShop

Avant de s’ouvrir au marché non agricole en 2015 ( jardin, golfs), les laboratoires Goëmar, dirigés par Jean-Pierre Princen (photo), veulent devenir un référent mondial en physio-activation, en nutrition innovante et en bio-contrôle. Pour cela, la société de Saint-Malo, spécialisée dans les technologies marines à base d’algues dédiées à l’agriculture, amplifie sa présence à l’international. Elle va conforter sa filiale aux ÉtatsUnis, en fonder une au Brésil et s’étendre en Europe, en Asie et en Afrique du Sud. Pour maintenir un niveau d’innovation constant, elle a ouvert cet été Goëmar Phytopolis, un centre de R&D multipliant par trois ses capacités de recherche sur l’ensemble des plantes du globe. Goëmar y consacre 10 % de son CA (24 M€ prévus en 2013) et 15 % de ses effectifs (80 personnes au total).

SELF SIGNAL EST TOMBÉ DANS LE PANNEAU

© Self Signal

© Yvan Zedda

GOËMAR SOIGNE LES PLANTES AVEC DES ALGUES

© Askom

VENDREDI LA TRIBUNE 5 AVRIL VENDREDI 2013 8 LA NOVEMBRE TRIBUNE 2013

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LA TRIBUNE DES MÉTROPOLES LA TRIBUNE LA TRIBUNE VENDREDI VENDREDI 8 NOVEMBRE 5 AVRIL 2013

En lançant, en avril, son introduction en bourse sur le marché réglementé de NYSE Euronext, Ekinops cherchait à augmenter son capital et à accélérer son développement. Spécialisée dans les solutions de transmission longues distances et métropolitaines par fibre optique à haut débit, la société vise les marchés por-

TANGUY ROUDAULT, DÉLÉGUÉ INNOVATION DE BPIFRANCE BRETAGNE

« Les entreprises innovantes ont besoin d’accompagnement » Quels sont les secteurs les plus aidés ? ments, à travers les projets collaboratifs Nous épaulons les programmes d’innovation de 120 à 150 entreprises par an, dans trois principaux secteurs : le maritime, les TIC et l’agro-alimentaire. Dans cette activité, les entreprises s’autofinancent souvent plutôt que d’évoquer leurs nouveaux produits. Mais nous aidons les entreprises de process alimentaire (chaînes de fabrication), soucieuses de gains de productivité. L’industrie (sous-traitants automobiles) et le BTP font aussi appel à nous.

Comment Bpifrance accompagne-t-elle les entreprises ?

Outre les avances remboursables et les prêts à taux zéro (10 M€ par an), l’innovation mobilise près de 60 M€ de finance-

d’innovation stratégique industrielle et le Fonds unique interministériel. Géré par Bpifrance, le Fonds régional d’innovation représente une dotation de 2 à 2,5 M€, et verse des subventions allant jusqu’à 50 000  euros pour les phases amont.

Les entreprises innovantes ont-elles de gros besoins ?

Le taux de réussite de ces entreprises est plus fort mais l’accompagnement aussi, notamment les cinq premières années. Après la R&D, pour le lancement de leur nouveau produit, Bpifrance peut ainsi les orienter vers les prêts pour l’innovation ou à l’industrialisation des projets issus des pôles de compétitivité. T

La start-up rennaise Eldéris commercialise, depuis début 2013, des services de confort et de sécurité pour les personnes de plus de 75 ans, accessibles par la télévision connectée. Recevoir des messages, discuter en visiophonie en utilisant son téléphone, contacter du personnel soignant : cette plateforme de services se pilote à partir de la télécommande d’un poste de télévision, branché à un boîtier TNT HD, connecté à Internet. Et demain, sur tablette tactile. Valorisant le lien social et l’autonomie, l’offre est accessible via un abonnement mensuel de 25 euros, boîtier compris. Eldéris vise les 50 000 abonnés à cinq ans pour un CA de 8  M€. Pour appuyer son lancement, elle cherche des partenaires financiers en vue d’une levée de fonds de 300 000 à 500 000 euros.

© Cordon Electronics

GOOD SPOT, LE TOURISME COLLABORATIF

CRISTALENS VOIT LOIN À L’EXPORT

Myopie, astigmatisme, presbytie  : Cristalens Industrie, fondée en 2006 sur la technopole optique de Lannion, conçoit et fabrique des implants pour la chirurgie réfractive et celle de la cataracte. Ces produits à forte technicité se sont enrichis d’une matière première innovante. Celle-ci cumule les propriétés des implants acryliques hydrophiles (petite incision mais risque d’opacification) et hydrophobes (plus rigides) tout en limitant les incisions. L’équipe de R&D a mis quatre ans à élaborer ce produit chargé de doper la croissance à l’export. Cette année, le groupe (60 personnes, avec les sites de

Basée à Lannion, cette startup, spécialiste de la synthèse vocale expressive, commence à donner de la voix en réalisant la première… voix de synthèse multi-expressive à valeur industrielle. Thierry Moudenc, un des huit cofondateurs et président de cette PME, faisait partie du voyage de François Hollande au Japon, en juin dernier. Voxygen y a réalisé, avec Nec, une démonstration de son système de synthèse vocale Voxygen Expressive Speech sur le robot PaPeRo. Sa technologie s’appuie sur des échantillons de parole naturelle et adapte l’expressivité du ton au message délivré. Lancée en décembre 2011 par une ancienne équipe de R&D d’Orange, cette future pointure du numérique emploie 18 ingénieurs, docteurs en linguistique et commerciaux. Elle prévoit 2 à 2,5 millions d’euros de CA en 2014.

© Voxygen

VOXYGEN COMMENCE À SE FAIRE ENTENDRE

© Eldéris

EKINOPS FLUIDIFIE LES OPÉRATEURS

INTERVIEW

Strasbourg et d’Éragny) injectera 20 % de son CA (9 M€ en 2012 dont 4 M€ à Lannion) dans la R&D et prévoit d’ouvrir des filiales en Espagne, en Italie et au Vietnam.

ELDÉRIS BRANCHE LES PERSONNES ÂGÉES

© BPI France

Félor veut accroître son CA de 50 % en 2016-2017.

France et cinq filiales, aux Caraïbes, en Hongrie et en Roumanie. L’entreprise a renforcé ses effectifs (1 500 personnes, dont 600 à Dinan) avec l’ouverture, en 2013, d’une filiale au Brésil qui assure la maintenance des décodeurs et box Sagemcom.

teurs de Russie, du Brésil et du Japon. Présidé depuis 2005 par Didier Bredy, Ekinops emploie 60 personnes, dont 40 au siège social de Lannion. Depuis 2006, elle a multiplié par 10 son CA et réalisé 10,2 M€ en 2012, dont 93 % de l’international, et 40 % via les États-Unis. Forte de 75 clients, Ekinops a accéléré sa croissance au 3e trimestre de cette année : son CA consolidé sur neuf mois s’élève à 12,02 M€ (+ 95 % par rapport à 2012).

© Ekinops

© Félor

Lutter contre l’absentéisme et les accidents du travail par le shiatsu, la diététique et le mieux-être physiologique : c’est la démarche, atypique dans l’agro-alimentaire, engagée il y a cinq ans par la société MerAlliance de Quimper. Ce dispositif mis en place par le n° 1 français sur le marché du saumon et des poissons fumés et marinés à marque distributeur (CA de 150 M€), concerne les sites de Quimper et Landivisiau, soit 450 salariés sur les 800 que compte le groupe en Europe. Coaching alimentaire, auto-massage et échauffement avant la prise de poste, mieux-être physiologique et demain, peut-être, activité sportive : MerAlliance investit 50 000 à 60 000 euros par an dans ce programme. L’absentéisme (moins de 4 % au global sur le site de production) frise le 0 % pour les maladies et accidents professionnels.

Le groupe, basé à Dinan (Côtes-d’Armor) depuis 1989, a pris, en septembre, 49 % de l’usine Sony spécialisée dans le SAV pour la marque-mère, la R&D et la production de cartes électroniques. Cordon Electronics a vocation à devenir actionnaire majoritaire de Sony Alsace Tec France en 2014. Acteur clé de la réparation de produits électroniques (mobiles, écrans plats, PC portables, etc.), le groupe (CA de 129 millions d’euros en 2012) compte huit sites industriels en

© Franck Betermin

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émarrée il y a six mois, la commercialisation d’Algo, la peinture aux algues conçue par Félor, s’intensifie. Mr Bricolage (450 magasins) vendra les premiers pots début 2014. Spécialisée depuis 1970 dans les peintures, vernis industriels et produits techniques pour les professionnels du bâtiment et les enseignes, Félor (27 salariés) se diversifie, avec Algo, en visant deux marchés : les particuliers et l’international. Alors que plus de 60 % du secteur de la peinture est capté par des groupes, la PME rennaise veut accroître son chiffre d’affaires 2012 (4 M€) de 50 % en 2016-2017. « Notre projet de diversification s’appuie sur une matière locale bretonne, renouvelable et déjà utilisée dans la cosmétique et l’alimentaire », indique Lionel Bouillon, PDG de l’entreprise. Aidé par Agrimer et l’École de chimie de Rennes, Félor a conçu Algo à l’aide de trois algues de la baie d’Iroise. Constituée de 98 % (100 % à terme) d’algues, de résines d’origine végétale et de caséine, cette peinture possède, selon l’entreprise qui en a déposé le brevet, un excellent rendement au mètre carré. Classée en catégorie A+ en matière d’émission de composés organiques volatils (elle émet 91 microgrammes par mètre cube), Algo est plus chère de 10 à 15 % qu’une peinture tirée de produits pétroliers. Félor, qui a investi 300 000 euros dans cette innovation, mise aussi sur l’attrait du régionalisme pour creuser ce sillon. Elle sortira, en 2014, Ostria, une gamme de peintures extérieures enrichies en coquilles d’huîtres concassées de Bretagne.

CORDON ELECTRONICS INVESTIT EN ALSACE

Découvrir Saint-Malo de nuit, vivre cinq jours de trek au Machu Picchu, pratiquer la marche nordique sur l’Équateur : voici trois des 400  activités proposées par good-spot.com dans une trentaine de pays. Cette plateforme touristique, créée début 2013 par la start-up basée à Dinan (Côtes-d’Armor), propose aux touristes de sortir des sentiers battus. Et de découvrir la France et le monde grâce à des guides locaux, professionnels ou particuliers. Good Spot en référence déjà 1 500, en Europe mais aussi en Amérique latine et en Asie. Le prix moyen d’une offre s’établit à 30  euros, avec des pointes à 1 500 euros pour certaines expériences de plusieurs jours à l’étranger.

© Good Spot

MERALLIANCE FAIT DE L’ENTREPRISE UNE MER DE LA TRANQUILLITÉ © MerAlliance

FÉLOR PEINT LES MURS AVEC DES ALGUES ET DES HUÎTRES

BRETAGNE

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INTERVIEW

http://www.latribune.fr

La Tribune 2, rue de Châteaudun - 75009 Paris Téléphone : 01 76 21 73 00. Pour joindre directement votre correspondant, composer le 01 76 21 suivi des 4 chiffres mentionnés entre parenthèses.

Nos activités de réseau sont structurées autour des stratégies de filières, du développement de l’innovation et de l’attractivité du territoire. La dynamique sur la marque Bretagne (400 partenaires), par exemple, est en marche. Bretagne développement innovation (BDI) est aussi chargée de mettre en œuvre la stratégie régionale qui sera votée mi-décembre pour la période 2013-2020.

Quelles filières seront valorisées ?

Le soutien à l’économie productive et la transition énergétique et écologique sont deux grandes ambitions. L’approche stratégique concerne 11 filières : les traditionnelles en mutation comme l’agro-

Après avoir vendu ses vaches laitières pour passer en agriculture biologique, Evelyne Loison, exagricultrice de G ove n , p rè s d e Rennes, défriche un nouveau champ d’innovation  : celui de l’avoine bio. Pionnière en France, elle a créé la marque Breizh Avoan en septembre 2011 et commercialise plusieurs produits en ultra-frais. Composée d’une boisson, d’une crème de cuisine et de desserts fermentés nature et aux fruits, cette gamme artisanale innovante est fabriquée à partir de flocons issus de Bretagne et de Normandie. Distribuée depuis cet automne dans une centaine de coopératives bio en Bretagne, la marque cherche aujourd’hui un référencement dans d’autres régions, à Paris notamment.

© Cap Ingelec

CAP INGELEC SE DÉVELOPPE EN BRETAGNE

Spécialisée dans le génie électrique et thermique ainsi que dans la performance énergétique, Cap Ingelec s’est implantée en Bretagne, à Brest. La société, qui jusqu’alors n’intervenait dans la région que via ses agences du Grand Ouest de

SOCIÉTÉ ÉDITRICE LA TRIBUNE NOUVELLE. S.A.S. au capital de 3 200 000 euros. Établissement principal : 2, rue de Châteaudun - 75009 Paris Siège social : 10, rue des Arts, 31000 Toulouse. SIREN : 749 814 604 Président, directeur de la publication Jean-Christophe Tortora. RÉDACTION Directeur de la rédaction Éric Walther.

Directeur adjoint de la rédaction Philippe Mabille. ( Économie Rédacteur en chef : Robert Jules. Rédacteur en chef adjoint : Romaric Godin. Jean-Christophe Chanut, Fabien Piliu. ( Entreprise Rédacteur en chef : Michel Cabirol. Rédacteurs en chef adjoints : Delphine Cuny, Fabrice Gliszczynski. Alain-Gabriel Verdevoye. ( Finance Rédacteur en chef adjoint : Ivan Best. Christine Lejoux, Mathias Thepot.

© Breizh Avoan

BREIZH AVOAN PRÉPARE DES AVOINÉES

BDI n’accompagne pas les entreprises, à deux exceptions près. Lesquelles ?

La prestation régionale de diffusion de l’innovation (PRDI) permet aux entreprises de recourir à des prestataires pour la réalisation de projets d’innovation. Cette aide est plafonnée à 10  000  euros. BDI coordonne aussi le programme SIDE (fonds Feder et région). Doté de 2 M€, il a pour objectif d’impulser une dynamique d’innovation dans les PME. T

Nantes et Tours, travaille depuis 2005 sur la ville, notamment dans le domaine de la défense. Cap Ingelec finalise la rénovation des installations électriques du port militaire de Brest, et démarre celle des installations de production et distribution de vapeur de la base de sous-marins nucléaires de l’île Longue. VIVEMENT LUNDI ! SE FAIT SON CINÉMA

Fondée en 1998, productrice reconnue de films et de séries d’animation, mais aussi de documentaires et, depuis peu, de webdocumentaires, Vivement lundi  ! (de Jean-François Le Corre, Mathieu Courtois, Valérie Malavieille) diversifie ses activités vers la prestation. Cette structure rennaise qui emploie l’équivalent de

20 temps pleins pour un CA de 1,2 million d’euros en 2012, vient d’ouvrir son studio de fabrication de programmes d’animation (stop-motion, 2D, 3D relief), baptisé Personne n’est parfait ! Il assurera aussi des prestations pour d’autres producteurs français et étrangers, en animation et documentaire d’animation ainsi qu’en création graphique.

WEELIN ROULE VERS LE GRAND PUBLIC Présenté au salon Maison et Objet, puis à la Design Week à Paris, le prototype 2 de ce vélo pliable, compact et léger (12,5 kg en monovitesse), sera exposé à la Cité des sciences et de l’industrie, à Paris, fin novembre. Imaginé par la start-up rennaise Isocycle, Weelin a été conçu pour s’intégrer aisément dans le cadre de vie des citadins : facile à transporter (poignée intégrée, pédales pliantes), et à ranger. Pour passer à la

Correspondants Florence Autret (Bruxelles). Rédacteur en chef hebdo Jean-Louis Alcaïde. Jean-Pierre Gonguet. ( Dossier réalisé par Pascale Paoli-Lebailly, à Rennes. ( (

RÉALISATION RELAXNEWS Maquette Mathieu Momiron. ( Édition Alfred Mignot. ( Secrétaire de rédaction Séverine Lefebvre. (

Nous retenons aussi sept  grands domaines d’innovation dont la chaîne alimentaire durable, le maritime, les technologies pour l’industrie, l’innovation sociale…

© Vivement lundi !

A

vec un chiffre d’affaires de près de 60 millions d’euros, dont 80 % à l’export, 250 salariés et 13 filiales dans le monde, le groupe morbihannais Olmix est en bonne santé (+6 % de croissance au 30 juin 2013). Pour autant, il ne s’endort pas sur les ressources naturelles qu’il exploite : oligo-éléments, algues bretonnes, argile montmorillonite. Les innovations agricoles qui en résultent servent à la nutrition et à la santé des animaux et des végétaux. Rouges, vertes ou brunes, les algues, associées à l’argile, ont ainsi donné lieu à la création d’un matériau hybride, l’amadéite, utilisé en remplacement des antibiotiques. Avec trois de ses filiales, deux partenaires industriels (PRP Technologies, Agrival) et deux centres de recherche (UBS, CNRS), Olmix est à l’initiative du projet Ulvans. Objectif : bâtir une filière de valorisation des algues en Bretagne, créer 300 à 500  emplois et générer un CA de 150  millions d’euros en 2020. « Il s’agit de créer une filière complète, depuis la récolte des algues jusqu’à leur transformation en produits innovants, et d’ouvrir de nouveaux marchés à l’export, notamment en Asie du Sud-Est, en Chine, en Afrique, projette Hervé Balusson, PDG d’Olmix. Ces nouveaux produits biosourcés pourront bénéficier au développement des défenses animales, remplacer les protéines animales utilisées dans l’élevage aquacole ou encore se substituer à certains produits phytosanitaires et engrais. » Le coup d’envoi de cette nouvelle filière est marqué par l’inauguration à Plouénan (Finistère) d’une première bioraffinerie d’algues fraîches. Celle-ci veut s’appuyer sur un vivier de 750 espèces d’algues bretonnes représentant 500 000 à un million de tonnes. Olmix, qui consacre 5  % de son budget à la R&D, investit quelque 10 millions d’euros dans Ulvans. D’un montant total de 25 millions d’euros sur quatre ans, le projet bénéficie de 10,7 millions d’euros de Bpifrance, dont 4 millions de subventions. Au-delà des animaux, poulets ou porcelets nourris aux algues, et des sols traités avec du jus et du marc, l’alimentation humaine n’est pas oubliée. Une première gamme de condiments mixtes algues et légumes, avec des dérivés d’artichauts, de brocolis ou de tomates, renforcera nos défenses immunitaires d’ici à dix-huit mois.

« BDI fixe le cap de la Bretagne économique de demain » Quel est le rôle de l’agence de alimentaire et l’automobile, et les développement et d’innova- nouveaux relais de croissance comme les biotech, l’éco-activité. tion ?

Développer des applications technologiques concrètes dans le domaine de l’image et des effets spéciaux pour alimenter le portefeuille de brevets du groupe et accroître l’activité de ses branches médias et divertissement : tel est le rôle du campus que Technicolor a inauguré fin 2012 à Cesson-Sévigné, près de Rennes. Ce site, le plus grand des cinq centres de recherche du groupe dans le monde, regroupe 550 personnes dont 200 chercheurs sur 18 000 m2. Plusieurs divisions de R&D, abritant des studios de développement et deux centres de traitement de données, y sont réunies. Le campus travaille sur une vingtaine d’innovations.

La PME exploite 750 espèces d’algues bretonnes.

FRÉDÉRIC RODE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE BRETAGNE DÉVELOPPEMENT INNOVATION

phase industrielle, Isocycle est en phase de levée de fonds, pour partie via la plateforme wiseed.com. La société cherche à réunir un montant total de 1,25 million d’euros. Objectif : 2 000 vélos vendus en 2014.

ACTIONNAIRES Groupe Hima, Laurent Alexandre, JCG Medias, SARL Communication Alain Ribet/SARL, RH Éditions/Denis Lafay. MANAGEMENT Vice-président en charge des métropoles et des régions Jean-Claude Gallo. Conseiller éditorial François Roche. Directrice Stratégie et Développement Aziliz de Veyrinas (73 26). Directrice de publicité Clarisse Nicot (73 28).

Directeur nouveaux médias Thomas Loignon (73 07). Abonnements Aurélie Cresson (73 17). Marketing des ventes au numéro : Agence Bo conseil A.M.E / Otto Borscha [email protected] (01 40 27 00 18). Imprimeries IPS, ZA du Chant des Oiseaux, 80800 Fouilloy. No de commission paritaire : 0514 C 85607. ISSN : 1277-2380.

© Isocycle

© Olmix

© Campus Technicolor

CAMPUS TECHNICOLOR, EN PLEIN ESSOR

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OLMIX VOIT DES ALGUES DE TOUTES LES COULEURS

© Ba 06

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