Tordeux Claire-Marie Master 1 FLE Anthropologie Compte rendu d ...

Master 1 FLE. Anthropologie. Compte rendu d'article. L'article choisi pour l'étude est extrait de la revue « Hommes et migrations », N°1261 : Accueillir autrement ...
37KB taille 8 téléchargements 313 vues
Tordeux Claire-Marie Anthropologie

Master 1 FLE

Compte rendu d’article

L’article choisi pour l’étude est extrait de la revue « Hommes et migrations », N°1261 : Accueillir autrement, daté de mai-juin 2006. Le titre de l’article est « La perception du migrant et de l’intégration dans l’opinion française : confusions et stéréotypes », il a été écrit par Sylvain Brouard et Vincent Tibéri, Cevipof/Sciences po. Auteurs de Français pas comme les autres ?

Dans cet article les auteurs tentent de donner une vision de ce que pensent les français du migrant et de son intégration, pour cela ils s’appuient sur deux enquêtes réalisées simultanément en avril 2005, auprès de ceux qu’ils appellent « les nouveaux français » et de la population française de 18 ans et plus. Les nouveaux français sont définis comme les immigrés naturalisés et ceux de la première et de la deuxième génération nées en France de familles d’immigrés d’origine maghrébine, africaine et turque (enquête Rapfi) ; la deuxième enquête, appelée enquête « miroir » est basée sur l’ensemble de l’électorat avec un échantillon représentatif de la population française de 18 ans et plus. La question de l’intégration ou non du migrant est soulevée dans un article du monde qui titre : « Les français s’habituent-ils au FN ? » En effet la question de l’immigration est un véritable débat dans la société française et à l’approche de l’élection présidentielle cette question revient sur le devant de la scène. L’intérêt de l’article est de s’interroger sur le sentiment des français vis-à-vis de l’immigration, les français sont, pour les besoins de l’enquête, divisés en deux groupes représentatifs de la question de l’immigration mais ayant une expérience et une vision parfois différentes de la question. L’intérêt de cette comparaison est de relever les différences et les raisons de celles-ci « entre le jugement porté par les individus qui participent ou sont perçus comme concernés par l’intégration et le reste de la population » (ligne 70) La démarche anthropologique des auteurs est de savoir comment les français se situent par rapport aux débats sur l’immigration et de voir s’il y a des caractéristiques communes de pensées des groupes par rapport à ces questions.

Les auteurs dégagent plusieurs points principaux, qui selon eux sont, caractéristiques de « la mise en cause du modèle d’intégration à la française » (lignes 12et 13). On en retiendra six : des valeurs et attitudes trop éloignées du modèle républicain, la religion islamique, le retour de débats dans l’opinion publique autour de l’histoire coloniale et du traitement de celle-ci, la question de la relation entre immigration et chômage réapparue avec les nouveaux flux migratoires de l’Est, la question de l’élargissement de l’Europe qui suscite des craintes sur la pérennité des emplois (le fameux cas du plombier polonais) et enfin l’association entre immigration et délinquance revenue au centre des discussions sur l’immigration après les émeutes de novembre 2005. Les auteurs dressent un bilan des réponses aux enquêtes selon trois thèmes : L’intégration : un état des lieu ; La responsabilité des difficultés d’intégration ; Les conceptions de l’intégration. A l’issu de l’étude des réponses données de ces trois thèmes, les auteurs ont réparti les réponses en trois groupes de personnes : Les assimilationnistes et les républicains ; Les multiculturels et les protestataires-anxieux ; et les intégrationnistes.

L’objectif de cette étude est de positionner les français, connaître leurs différents types de positions et leurs logiques. Deux points de vue semblent prédominer, ceux qui sont sujets à un raidissement accru et d’autre à une tolérance plus grande, vis-à-vis de la perception du migrant et de son intégration. Les auteurs posent donc la question de savoir : « Que veulent les français ? » une société multiculturelle ou une société assimilationniste ?

Intéressons nous dans un premier temps aux conclusions des auteurs sur l’intégration : un état des lieux » (voir le tableau 1 : Les jugements sur la situation de l’intégration). Comme le soulignent les auteurs, les variations constatées dans les résultats sont d’intensités inégales. Les auteurs traduisent les résultats de l’enquête et selon eux « les personnes issues de l’immigration maghrébine, africaine ou turque sont plus confiantes sur les capacités d’intégration des migrants » (41% contre 33% pour l’enquête « miroir ») ; et ont plus confiance (6 points de pourcentage en plus) que les autres sur la réussite possible quelque soit sa couleur de peau. De plus les « nouveaux français » sont moins sensibles au rejet des immigrés, car ils sont 37% contre 47% pour l’enquête « miroir » à considérer qu’il y a trop d’immigrés en France. Selon les auteurs cette attitude des « nouveaux français » serait plus liée à un meilleur niveau d’éducation qu’à l’appartenance à un groupe d’émigrés. Les auteurs relèvent un point significatif au vu des résultats de l’enquête : les français de l’enquête « miroir », qu’ils considèrent ou pas qu’il y ait trop d’immigrés, ne changent cependant pas d’avis sur la capacité d’intégration facile : 33% pensant ainsi. Mais une autre variable apparaît cependant : celle de la religion, ainsi selon la perception négative ou positive de l’Islam les positions vont changer ; l’intégration sera alors perçue comme facile si l’Islam est vue de manière positive 48% et a contrario très faible 28% si l’Islam est vue de manière négative. Le point important à retenir des résultas de la comparaison de ces deux enquêtes est la nouvelle place donnée à la religion dans la question de l’intégration. Intéressons nous maintenant au deuxième thème : La responsabilité des difficultés d’intégration, dégagé par les auteurs dans leur démarche anthropologique sur la perception du migrant et de l’intégration dans l’opinion française. L’explication des difficultés d’intégration est très variable selon le public de l’enquête. Ainsi la faute est des deux côtés rejetée sur l’autre. En effet à la phrase « A propos de l’intégration, ce sont avant tout les personnes d’origines étrangères qui ne se donnent pas les moyens de s’intégrer » 26% des « nouveaux français » sont d’accord, donc un pourcentage assez faible contre les 48% de l’ensemble de l’électorat ; et à l’inverse à l’affirmation « A propos de l’intégration c’est avant tout la société française qui ne donne pas les moyens aux personnes d’origine étrangère de s’intégrer » 59% des nouveaux français sont d’accord avec ce point de vue, contre 39% de l’ensemble de l’électorat. Les auteurs nous informent de résultats similaires en comparaison des réponses par groupes sociopolitiques. Afin de clarifier les résultats fournis par les auteurs nous les présentons sous forme de tableau : Primauté de la responsabilité sur les difficultés d’intégration : société ou individu « Nouveaux français » interrogés Quelque soit les diplômes, la profession, l’âge, la relation à l’immigration et leur position politique : c’est la société qui est responsable - Même parmi les plus anti-immigrés

-

Ensemble de l’électorat interrogé Société Individu - 30 ans et moins - diplômés - politiquement de gauche - société vue comme

- 42 ans et plus - Sans diplôme ou faiblement diplômés - politiquement de droite

43 % de la responsabilité est mise sur raciste les individus contre 48% sur la société d’accueil

- société vue comme non raciste

A l’issu de l’étude des ces enquêtes, les auteurs insistent à nouveau sur l’importance de la religion du point de vue de la responsabilité des difficultés d’intégration. « L’intégration n’est donc plus seulement une question économique ou politique, elle devient aussi religieuse, comme s’il fallait d’abord statuer sur le statut assimilable de cette religion avant de s’intéresser aux migrants qui pourtant sont loin de tous s’en réclamer » (page 125 lignes 145-148). On voit donc que la question de la religion est un nouvel élément pris en compte dans la responsabilité, dans une intégration facile ou non au pays d’accueil. Nous arrivons maintenant au troisième thème de cette étude Les conceptions de l’intégration, en effet que veut dire intégration aujourd’hui en France, les français souhaitent-ils un modèle multiculturel ou tout le monde pourrait mettre en avant ses particularités tout en appartenant à l’ensemble ou un modèle ou chacun doit respecter des règles et coutumes établis et doit faire fi de ses particularismes pour s’intégrer ? Il faut se reporter au tableau « D’après vous le plus important aujourd’hui est ... » Les auteurs constatent qu’il n’y a pas de réel contraste dans les réponses aux questions des différents groupes. Un seul point ressort « la lutte contre les discriminations » le pourcentage en accord avec cette proposition est beaucoup plus important pour les « nouveaux français » 59% que le fait de « traiter tous les français de la même manière » 41%. On pourrait comprendre que la situation d’intégration des nouveaux français pose de réels problèmes, qu’ils se sentent fréquemment sujets de discrimination et qu’ils souhaitent que la société française reconnaisse et comprenne l’intérêt pour elle de s’enrichir de ces cultures ; mais ce n’est pas ce qu’il faut comprendre. Car finalement, ils sont davantage à penser que le plus important est « d’insister sur ce que les français ont en commun » 55% plutôt que « de mettre en valeur les différences culturelles entre les français » 43%. Les auteurs, au vu des réponses formulées dans les deux groupes, ont constaté que plusieurs conceptions de l’intégration se rejoignent dans les deux groupes, par exemple le fait qu’il est plus important pour les deux groupes « de chercher à s’intégrer en évitant tous conflit avec le reste de la société » plutôt que de revendiquer ses droits, même si cela crée des tensions ». Au vu des résultats de l’enquête « D’après vous le plus important aujourd’hui c’est.. » et de la question de la conception de l’intégration selon ces deux publics différents, il paraît significatif, bien que les auteurs n’insistent pas sur ce résultat, de regarder les pourcentages des réponses de l’enquête miroir sur la question trois. En effet plus des deux tiers de ce public ont déclaré, qu’aujourd’hui, selon eux, le plus important est « d’insister sur ce que les français ont en commun », plutôt que « de mettre en valeur les différences culturelles entre les français » ; alors que le public de « nouveaux français » dépasse de peu la moitié des pourcentages.

Puis les auteurs ont dressé une classification ascendante hiérarchique à partir des trois thèmes sur « le modèle d’intégration et sur la responsabilité des difficultés d’intégration » : l’état des lieux de l’intégration, la responsabilité des difficultés d’intégration et les conceptions de l’intégration. Ils ont repéré et identifié des profils de réponses similaires dans un échantillon au sein de l’électorat français et ont fait quatre groupes : - les assimilationnistes 46% ; - les protestataires anxieux 8% ; les républicains 36% et les multiculturels 10%

Les groupes sont regroupés selon différents critères. Nous commencerons à étudier Les assimilationnistes et les républicains. Les assimilationnistes ont une vision très définie de ce qu’est la France et des moyens et devoirs à mettre en œuvre pour pouvoir s’y intégrer, ce qui n’est pas étonnant au vu du pourcentage (le plus) élevé en ce qui concerne leur position anti-immigrés : 67%, leur attitude très autoritaire sur la peine de mort, la non-revendication des droits et la non prise en compte des différences. Il sont donc contre la nouveauté, la diversité, sont très effrayés par l’Islam 45% ayant une attitude négative vis-à-vis de cette religion, n’oublions pas que 76% d’entre eux sont catholiques. Ce qui explique, que selon eux, la bonne intégration au pays d’accueil ne dépend pas de la société mais de l’individu. Les assimilationnistes sont très traditionnels « il existe un modèle français et c’est aux nouveaux arrivants de s’y conformer » (page 126, lignes 193-194) Selon les auteurs 46% des réponses de leur échantillon de l’électorat français correspond à ce groupe, ce fort pourcentage peut notamment expliquer la montée du Front National à la dernière élection présidentielle, car pour eux l’autorité prime avant tout. Les républicains partagent certains points communs avec les assimilationnistes et sont eux aussi nombreux 36% selon l’échantillon d’électorat français. Une des grosses différences d’opinion porte sur le modèle d’intégration, qui selon eux, dépend à 78% de la société, les 22% autres pourcentages relevant à la fois de la société et des individus. Ils ont une image moins négative de la religion islamique 37%. Ils sont moins autoritaires et plus souvent de gauche 48% que les assimilationnistes 28%. Les républicains sont donc pour une politique de l’état pour aider les « nouveaux français », ils sont même 70% à vouloir accorder plus de moyens aux écoles accueillants des immigrés. En ce qui concerne Les multiculturels et les protestataires anxieux, les auteurs nous informent que ce groupe représentant 10% de l’échantillon est constitué de personnes dont l’âge moyen est le plus faible par rapport aux autres groupes et ils sont davantage diplômés que les autres groupes. Ils sont 53% à être de gauche et partagent des points communs avec les républicains tels que le refus de la peine de mort, et la responsabilité de la société du pays d’accueil dans la bonne intégration. Par contre ils ont un avis mitigé, en ce qui concerne la légitimité de la revendication des droits sans conflit, mais sont à 100% pour la lutte contre les discriminations alors que les « nouveaux français » n’étaient qu’à 59% favorables à ce concept, au détriment de l’égalité de traitement pour tous les français. Ils soutiennent, eux aussi, une politique de l’état pour veiller à une meilleure intégration et ils sont très favorables au soutien de l’état dans la construction des mosquées 55%, alors que les républicains y étaient favorables seulement à 19%. Selon ce modèle il faut reconnaître la diversité et l’encourager dans tous les domaines, que cela relève du public ou du privée, ce qui est totalement contraire au modèle assimilationniste. Le groupe des protestataires anxieux a des similarités d’opinion avec les autres groupes. Comme nous le révèlent les auteurs, ils sont, par exemple, comme les assimilationnistes pour le rétablissement de la peine de mort et sont eux aussi très fortement anti-immigrés 44%. Ils ont en moyenne le même niveau d’étude que les assimilationnistes. Ils pensent, cependant, que l’état doit mettre en place des politiques volontaristes à l’égard des émigrés, même si ce sont selon eux les individus sont davantage responsables de la bonne intégration que la société et qu’il faut mettre plus l’accent sur les points communs plutôt que sur les différences des français. Finalement ce groupe serait un groupe de contestataire né qui est effrayé par l’économie donc le chômage mais qui n’a pas « de position spécifique sur l’intégration » (ligne 280). Ces trois groupes constituent donc la société française, les auteurs insistent cependant sur le rôle prédominant des assimilationnistes et des républicains et concluent que les deux questions les plus importantes et objets des débats les plus importants sont « la question des politiques publiques qui doivent être mises en place » (l.289) et le rôle de la société française qui doit ou non veiller à une intégration réussie.

En ce qui concerne les « nouveaux français » trois groupes sont là aussi identifiés par les auteurs au vu des résultat de l’enquête, c’est trois groupes sont Les assimilationnistes 13% de l’échantillon, Les multiculturels 35% et Les intégrationnistes 44%. Les deux premiers groupes les profils sont quasiment les mêmes. Les intégrationnistes sont eux différents des précédents groupes, leur caractéristique principale est « un équilibre entre la revendication de droits spécifiques et celle d’une intégration sans heurt, avec une responsabilité de la société majoritaire dans les problèmes d’intégration (77%), obligeant à mettre en place des politiques de lutte contre la discrimination (66%) plutôt qu’un traitement égal ». La responsabilisation de la société dans l’écoute des revendications et la mise en place de politiques adaptées pour résoudre les problèmes spécifiques aux migrants relève d’une véritable volonté des migrants à s’intégrer et à bien s’intégrer, ces aménagements leur permettant alors de prendre une vraie place dans la société française en partageant des valeurs communes, notamment la laïcité de l’école publique.

A la démarche anthropologique qui posait la question de savoir si des perceptions différentes du migrant et de l’intégration dans l’opinion française existaient, Sylvain Brouard et Vincent Tiberj ont relevé trois modèles différents : une France « melting-pot », une France républicaine et une France qu’ils qualifient d’éternelle, pour caractériser cet autoritarisme par un modèle français figé avec des normes strictes d’intégration. A travers cet article la démarche anthropologique a bien été respectée car on comprend mieux la façon dont est organisée l’opinion des français et des « nouveaux français » sur la question de l’immigration et les raisons de ce type de perception. Ainsi l’intérêt de cet article est également de mettre en avant un critère très discuté, aujourd’hui, dans la perception de l’individu et sa capacité d’intégration : l’Islam. Ainsi selon les groupes, ce critère religieux est plus ou moins important, certains ne peuvent accepter le terme « d’intégration réussie » chez un émigré de confession musulmane. La mise en cause du modèle d’intégration républicain est donc fortement remis en cause par ce genre de jugement extrême. A la réponse que veulent les français, un modèle assimilationniste ou multiculturel, cet article ne peut fournir de réponses plus précises. Mais à l’heure de l’élection présidentielle, avec une campagne où la question de l’immigration et de l’intégration fait débat les français auront à faire leurs choix, et une réponse plus précise nous sera alors fournie sur la position des français dans ce débat.