Revue du Conseil économique et social de Wallonie - CESW

17 mai 2016 - de la Chine au Brésil, en passant par les Etats-Unis, la Russie, le. Japon ou l'Afrique .... tion digitale : il ne s'agit pas de science-fiction! On ne peut donc ..... de 22 experts du monde académique et de la recherche, médecins,.
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Wallonie

n° 130 Mai 2016 Trimestriel

Revue du Conseil économique et social de Wallonie Actualités Rapport d’activité 2015

L’invité Pascal Poty «Nous vivons une transformation digitale majeure»

Dossier Quelle assurance autonomie en Wallonie ?

Avec les interviews de Petra Driessens, Alain Colvez, Daniel Gillain et Maxime Prévot

Actualités : Rapport d’activité 2015

Sommaire

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L'invité : Pascal Poty : «Nous vivons une transformation digitale majeure»

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Dossier : Quelle assurance autonomie en Wallonie ?

1 éditorial Actualités 2 > Cela se passe au Conseil 3 > Rapport d’activité 2015 4 > Interview - Frédéric Caruso (IWEPS) : «Un nouvel outil d'analyse de l'économie wallonne» 7 En bref Les avis 8 > Liste des avis adoptés entre le 1/02/2016 et le 30/04/2016 9 > L’occupation des travailleurs étrangers 10 > La mise en œuvre de la 6ème réforme de l’Etat pour la formation en alternance 11 > La deuxième stratégie wallonne de développement durable 12 > La loi relative aux marchés publics 14 > Le prêt «Coup de pouce» 15 > Le Rapport 2014-2015 du Service de lutte contre la pauvreté L’invité 16 > Pascal Poty : «Nous vivons une transformation digitale majeure» Dossier 20 > Quelle assurance autonomie en Wallonie ? 22 > La Zorgverzekering et l’Allocation personnalisée d'autonomie 28 > Tableau comparatif des systèmes flamand, français et luxembourgeois 32 > Dépendance et outils de mesure 35 > L’avis du CESW 44 > Succès pour le séminaire du Conseil > Interviews 37 > Alain Colvez : «En France, le droit à l’APA se veut neutre par rapport au lieu de vie» 41 > Petra Driessens : «La Zorgverzekering est l'un des piliers de la protection sociale en Flandre» 46 > Daniel Gillain : «Le choix d’une échelle de mesure doit être guidé par l’objectif à atteindre» 49 > Maxime Prévot : «L’assurance autonomie : un projet de société qui instaure une nouvelle forme de solidarité entre tous les Wallons !» Zoom 51 > Le tome 27 du Bulletin de la CRMSF est paru ! Livres 53 > Sélection d’ouvrages du Centre de Documentation du CESW 55 > Et dans notre bibliothèque numérique

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L’édito

C

omme nous l’écrivions dans nos éditions précédentes, la concertation sociale entre les interlocuteurs sociaux et les décideurs politiques revêt une importance tout à fait significative dans le contexte actuel, particulièrement ardu à bien des points de vue. La Wallonie l’a bien compris et la concertation a fonctionné de manière intense sur des grands dossiers comme le Plan Marshall, le Pacte pour l’emploi mais aussi la réforme – rationalisation – de la fonction consultative ainsi que l’a prévu la Déclaration de Politique régionale 2014-2019. Les discussions à propos de cette réforme ont été bon train au cours de ces dernières semaines et des projets de décret devraient être déposés imminemment. Les choses se précisent donc. Même si le dossier n’est pas clôturé, on peut constater, sur base des discussions avec le Ministre-Président et le Gouvernement, que les arguments déposés en janvier dernier par les interlocuteurs sociaux tels qu’exprimés par le Conseil, ont inspiré – largement – les modifications en cours. Rappelons que l’idée centrale est de centrer les réflexions et analyses entre interlocuteurs sociaux sur les matières traitées par nos Commissions «Economie–Politique industrielle», «Emploi–Formation–Education», «Finances–Budget–Fiscalité–Institutionnel– Europe–Simplification administrative».

Pour les autres matières, les partenaires sociaux ont estimé qu’il était utile d’ouvrir le débat à d’autres organisations de la société civile wallonne afin de mieux maîtriser la technique de dossiers tels le logement, l’énergie, les transports, l’environnement, l’aménagement du territoire, la nature et la ruralité ou encore la politique scientifique (1). D’autant que, pour ce qui concerne ces matières, des structures consultatives existent déjà ; la plupart sont organisées par le CESW en termes de Secrétariat, les interlocuteurs sociaux y siègent à côté d’autres organisations. Des Pôles thématiques seront créés au sein desquels les partenaires sociaux seront représentés de manière significative ; ils permettront d’éviter les doubles emplois parfois constatés (2). Les Secrétariats de ces Pôles seront organisés par le CESW. Notons que pour ce qui concerne les matières de la Commission de l'Action et de l'Intégration sociale, des Services collectifs et de la Santé, le CESW souhaite son maintien en structure interne, en raison de la création du Conseil de Stratégie et de Prospective organisé au sein de l’AVIQ. D’autres structures devraient aussi être – ou continuer à être – organisées par le CESW et réunies au sein de deux «Coupoles» : l’une concernant la fonction consultative en matière d’agrément dans le domaine de l’économie, l’emploi et la formation, l’autre comportant des Conseils spécialisés ne faisant pas partie de Pôle (par exemple, la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles, le Comité de Contrôle de l’Eau,…). On mesure bien que le paysage de la fonction consultative va être modifié de manière significative sur base de deux principes : celui de l’efficacité permettant à chaque organisation concernée d’apporter sa contribution à un véritable processus démocratique et celui de l’efficience des moyens dans un contexte budgétaire particulièrement contraignant. Jean Pierre Dawance Secrétaire général (1) Notons que la création en 1990 du Conseil de la politique scientifique réunissant les interlocuteurs sociaux et le monde scientifique (Universités, Hautes écoles et Centres de recherche) a inspiré de CESW dans ses propositions actuelles. (2) On a en effet pu relever qu'un même avis était parfois demandé simultanément à plusieurs structures.

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Actualités

Cela se passe au Conseil 17/05/16 : Réunions Inter-Conseils Les Secrétariats des organismes de concertation fédéraux (CNT, CCE), régionaux (SERV, CESW et CESR-Bc) et communautaire (CES-CG) se rencontrent de manière régulière (1). Ces réunions ont principalement à l’ordre du jour un échange sur les priorités propres à chaque organisme. Des travaux en cours dans plusieurs organismes peuvent déboucher sur des collaborations plus concrètes, les compétences étant dans certains domaines partagées entre le pouvoir fédéral et les entités fédérées. Lors de la réunion du 17/05, les organismes régionaux/communautaire ont indiqué que leurs travaux étaient toujours centrés sur la mise en œuvre de la Sixième Réforme de l’Etat, l'emploi (ex : groupes cibles, ALE), la formation (CEP), les allocations familiales. Du côté fédéral, la réforme du droit du travail, la réforme de la loi de 1996 (compétitivité), du rapport technique, constituent des chantiers importants, de même que l’énergie ou la mobilité.

Les pistes de collaborations envisagées par les Secrétariats concernent pour la mobilité, l’idée de «budget mobilité» et la fiscalité automobile. L’économie circulaire et la formation en alternance constituent deux autres champs où la collaboration interrégionale entre interlocuteurs sociaux pourrait déboucher sur des propositions concrètes. (1) CNT : Conseil national du Travail ; CCE : Conseil central de l’Economie ; SERV : Sociaal-Economische Raad van Vlaanderen ; CESR-BC : Conseil

Concernant la mobilité plus précisément, une étude menée par le CCE, en collaboration avec le CNT et les CES régionaux vise à objectiver les coûts de déplacement domicile-travail et leur répartition entre employeurs, travailleurs et pouvoirs publics. Les résultats doivent encore être validés par les instances des Conseils avant une publication. De ces constats pourraient découler des propositions/recommandations.

économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale ; CES-CG : Conseil économique et social de la Communauté germanophone.

26/04/16 Le 26 avril, les membres de la Commission «Mobilité-Aménagement du territoire» ont reçu Mme Hannard, représentante du Ministre C. Di Antonio et M.Balon, représentant du Ministre M. Prévot pour faire le point sur différents dossiers en matière de mobilité.

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Le Rapport d’activité 2015 est disponible ! Le Rapport d’activité 2015 du Conseil économique et social de Wallonie est disponible. Ce rapport, qui en est à sa 19ème édition, constitue la «mémoire» du Conseil et permet de dresser le bilan des travaux menés au sein de notre institution. L’année 2015 fut riche en activités pour le Conseil : 53 avis rendus ou entérinés; poursuite de la concertation par le biais de rencontres avec le Gouvernement wallon qu’avec d’autres Conseils économiques et sociaux; suivi de dossiers économiques, sociaux et environnementaux; Secrétariat de plus de 30 Commissions et Conseils consultatifs; séminaire sur «30 ans de Politique des déchets en Wallonie»; conférences thématiques; Portes ouvertes du Vertbois dans le cadre des Journées du Patrimoine; publications,… sans oublier les travaux relatifs à la rationalisation de la fonction consultative ainsi que la préparation de la réforme des aides à l’emploi.

15/03/16 : Au Parlement wallon Le 15 mars 2015, Véronique Kaiser et Luc Simar ont présenté le «Dossier sur les Politiques de l'Emploi en Wallonie après la Sixième Réforme de l'Etat» aux membres de la Commission Emploi du Parlement wallon. Les députés ont souligné la qualité du Dossier du CESW, résultat d’un travail d’analyse important sur une thématique essentielle pour la Wallonie. Rappelons que le Dossier du Conseil est disponible en version électronique sur notre site Internet (www.cesw.be) mais aussi en version imprimée sur simple demande auprès du service Communication du CESW ([email protected]).

Le Rapport d’activité 2015 est téléchargeable sur le site

www.cesw.be Wallonie 130 I I I I I Mai 2016

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Actualités

Interview Frédéric Caruso (IWEPS)

«Un nouvel outil d’analyse de l’économie wallonne» En janvier dernier, la première édition du Rapport sur l’Economie wallonne (REW) est parue. Fruit d’une collaboration entre le Département de la Compétitivité et de l’Innovation (DGO6SPW), la Cellule d’Analyse Économique et Stratégique (SOGEPA) et l’IWEPS, ce Rapport de plus de 250 pages comprend une analyse économique globale de notre région et des analyses sectorielles d’entreprises wallonnes. Nous avons rencontré Frédéric Caruso, Chargé de Recherche à l’IWEPS (Direction de l'Anticipation des Phénomènes Socio-économiques) qui, le 21 mars, est venu présenter ce Rapport aux membres du CESW. Dans l’interview qu’il a accordée à la revue Wallonie, Frédéric Caruso rappelle les objectifs du REW et ses principaux enseignements.

Wallonie : Quels sont les objectifs poursuivis par la publication de ce Rapport sur l’Economie wallonne ?

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Frédéric Caruso : Le fonctionnement d’une économie est une réalité complexe à appréhender tant dans les mécanismes que dans les interrelations entre les principaux facteurs économiques. Cet exercice est encore plus difficile quand il s’agit d’une petite économie régionale très ouverte au commerce international et très interconnectée avec les autres régions d’un même pays comme c’est le cas de la Wallonie. Il ne se passe pas un jour sans qu’une statistique (ex : taux de chômage, taux d’emploi, taux de croissance du PIB, taux de croissance de la productivité, etc.) soit publiée et commentée. Mais les débats se focalisent trop souvent sur une analyse partielle d’un indicateur. La photo à un moment donné de statistiques économiques ne permet pas une analyse objective de la situation, notamment au regard des politiques économiques qui ont été mises en œuvre. Dès lors, pour objectiver les débats sur l’économie wallonne mais aussi pour orienter les nouvelles décisions économiques tant du secteur public que du secteur privé, il nous a semblé indispensable de disposer d’un état des lieux de l’économie wallonne et de son

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évolution, basé sur une analyse rigoureuse des outils statistiques disponibles. C’est la raison pour laquelle l’IWEPS, la DGO6 (SPW) et la SOGEPA se sont associés afin de réaliser ce Rapport sur l’Economie wallonne qui dresse un bilan historique et récent de l’économie régionale en se concentrant sur ses principaux indicateurs, leur évolution et leurs interactions. L’objectif est donc double : tout d’abord, comme je viens de l’expliquer, ce Rapport veut offrir une analyse de la situation économique ; ensuite, il se veut un appui aux décisions publiques, notamment à l’heure où les transferts de compétence se renforcent. Wallonie : Pourriez-vous nous en dire plus sur la méthodologie utilisée dans l’élaboration de votre Rapport ? Frédéric Caruso : Le Rapport sur l’Economie wallonne repose sur des développements méthodologiques et statistiques entrepris ces dernières années en étroite collaboration avec la Banque Nationale de Belgique, le Bureau fédéral du Plan et les instituts statistiques régionaux. Ces avancées nous permettent aujourd’hui d’avoir une vue complète et objective de l’économie wallonne, de mieux saisir les ordres de grandeur macro-économiques, de comprendre

Le Rapport sur l’Economie wallonne est le résultat de la collaboration entre le Département de la Compétitivité et de l’Innovation (DGO6-SPW), la Cellule d’Analyse Économique et Stratégique (SOGEPA) et l’IWEPS. Près de 10 auteurs ont contribué à la rédaction du Rapport, dont voici la table des matières : Partie 1. Analyse macro-économique 1. Le PIB par habitant en perspective 2. Analyse macro-sectorielle de la croissance wallonne 3. Analyse du tableau entrées-sorties interrégional de 2010 4. Analyse de la compétitivité extérieure 5. Le marché du travail : une analyse de l’évolution du chômage 6. La situation économique des principaux agents Partie 2. Analyses sectorielles des entreprises wallonnes

7. Aperçu général des entreprises 8. Le poids économique de la sidérurgie en Wallonie dans un contexte international 9. Analyse du secteur pharmaceutique dans une perspective de chaîne de valeur 10. L’économie du numérique

les tendances longues et de mesurer les défis auxquels nous sommes confrontés. Les analyses menées dans ce rapport ont cherché à décomposer de nombreux indicateurs économiques : le PIB par habitant, la productivité, le chômage, les performances à l’exportation, le solde commercial, les revenus et les dépenses des agents. Elles ont examiné les relations industrielles et interrégionales de secteurs d’activités importants, faisant apparaître les chaînes de valeur et les effets d’entraînement potentiels. Elles ont aussi décortiqué les comptes des entreprises de certains secteurs phares comme la sidérurgie, l’industrie pharmaceutique ou le secteur numérique.

Le Rapport sur l’Economie wallonne ainsi qu’une synthèse peuvent être téléchargés sur :

> www.iweps.be

Wallonie : Quels sont les principaux constats? Frédéric Caruso : Le premier constat incontournable de l’étude porte sur le fait que la Wallonie est l’archétype d’une petite économie très ouverte sur le monde et en particulier sur les autres régions de Belgique. Cette ouverture économique concerne tant la situation des travailleurs et des consommateurs que celle des producteurs. Pour appréhender valablement la situation économique de la région et de ses acteurs, il faut tenir compte des flux entre la Wallonie et le reste du monde. La forte intégration des économies régionales pose évidemment la question de la coordination des politiques économiques afin d’optimaliser les retombées de ces dernières. En outre, elle implique que la stratégie de développement économique régional peut difficilement être établie sans prendre en considération les réalités, sectorielles notamment, de l’activité des régions voisines.

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Pour la Wallonie, il existe des éléments positifs dans ces constats d’intégration économique, tels que la présence non négligeable de ses entreprises sur les marchés internationaux ou la mobilité des travailleurs, par exemple. Cependant, ces constats démontrent l’insuffisance de l’activité économique interne à la région. Celle-ci peine à rencontrer les besoins en biens et services de ses propres acteurs et à générer suffisamment d’emploi local. Wallonie : Au départ de ces constats, vous avez mis en avant un défi prioritaire. Pourriez-vous nous en dire davantage ? Frédéric Caruso : Le principal défi découle directement du constat que je viens d’évoquer. Il s’agit du développement économique intérieur. L’objectif est de combiner une croissance intérieure porteuse d’emplois et un soutien de la productivité dans une perspective de long terme. Dans le rapport, ces éléments de croissance, de productivité et d’emploi font l’objet d’un examen détaillé duquel nous tirons un bilan plutôt positif pour la Wallonie depuis 2000 en termes d’emploi et de croissance, même s’il s’inscrit bien entendu dans un contexte international de ralentissement. Pour une petite économie ouverte comme la Wallonie, relever ce défi renvoie notamment à la question de la compétitivité. A cet égard, nous avons étudié la dynamique des exportations internationales, qui s’est révélée assez favorable pour les marchandises, au moins avant l’apparition de la crise, et vigoureuse pour les services. Malgré tout, le commerce international reste une faiblesse : la part des exportations wallonnes dans le total belge n’atteint encore que 15 à 16%, alors que la part du PIB régional est de l’ordre de 23%. En ce qui concerne la politique industrielle, nos analyses (notamment sectorielles et avec un focus sur l’industrie pharmaceutique) mettent en avant un potentiel inexploité dans les services marchands et un renforcement nécessaire des effets d’entraînement locaux. Enfin, trois points d’attention particuliers en Wallonie sont soulevés dans le Rapport : il faut diminuer le taux de chômage et surtout relever le taux d’emploi, en veillant à la situation financière des agents économiques et aux risques liés à la concentration des activités. Il est évidemment impossible de résumer ici l’ensemble des données et analyses proposées dans le Rapport ; c’est pourquoi j’invite les personnes intéressées à télécharger soit le Rapport complet, soit la synthèse, disponibles sur le site internet des institutions partenaires.

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Wallonie : Quelle conclusion tirez-vous de cette première édition du Rapport? Frédéric Caruso : En réalité, les discours relatifs à l’économie wallonne sont souvent trop simples et trop tranchés. Résumer la performance économique wallonne à une comparaison de son PIB par habitant avec celui de ses voisins à un moment donné occulte par exemple les mouvements de revenus, qui sont très importants pour la Wallonie, ou encore les dynamiques de croissance. Certes, le PIB par habitant de la Flandre a dépassé celui de la Wallonie en 1963 et les écarts se sont creusés pendant de nombreuses années. Cependant, la Wallonie connaît aujourd’hui un taux de croissance supérieur à celui de la Zone Euro. Pour atteindre le PIB par tête de la Flandre en 2025, il faudrait dix années successives d’une croissance annuelle réelle de 5% sous l’hypothèse que la Flandre ne connaîtrait qu’une croissance de 1,5%. C’est un objectif illusoire, en particulier à la lumière des interrelations régionales que nous avons mises en évidence. Peu importe. Pour la Wallonie, ce qui compte surtout, c’est de développer davantage d’activités économiques et de saisir les opportunités de gains de productivité afin de maintenir un taux de croissance qui lui permette de rencontrer les défis auxquels elle est confrontée. Il est important de souligner que la parution de ce Rapport sur l’Economie wallonne s’inscrit dans la durée : il ne s’agit pas d’un exercice ponctuel mais bien d’une publication qui sera renouvelée chaque année, dans le courant du premier trimestre. Il sera enrichi, dans les prochaines éditions, de nouveaux développements grâce aux synergies et collaborations scientifiques renforcées entre les institutions partenaires.

En bref

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Rencontre avec le Gouvernement de la Communauté germanophone Le lundi 7 mars, les interlocuteurs sociaux wallons ont rencontré le Gouvernement de la Communauté germanophone. A l'ordre du jour de cette réunion : la situation économique en Communauté germanophone et les conséquences de la Sixième Réforme d’Etat. Cette rencontre a eu lieu à Eupen.

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Pascal Poty, l’Invité, p 16

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Avis Les avis sur www.cesw.be

Prêt «Coup de pouce», Loi sur les Marchés publics, Occupation de travailleurs étrangers, Stratégie wallonne de développement durable, Rapport du Service de Lutte contre la Pauvreté, Formation en alternance… Tels sont les thèmes des avis rendus récemment par le CESW et qui sont synthétisés dans la rubrique qui suit. Rappelons que le CESW rend ses avis soit à la demande du Gouvernement wallon, soit d’initiative. Concrètement, patrons et syndicats analysent, au sein du Conseil, les projets mis sur la table. Quels sont les points positifs d’un projet ? Que faudrait-il améliorer ?... Les positions des uns et des autres sont avancées, débattues et synthétisées dans un «avis» du CESW. Les thématiques abordées sont nombreuses : emploi, formation, économie, budget, action sociale, égalité des chances, transports, environnement, aménagement du territoire, énergie, recherche, logement. Tous les avis du CESW et du CPS sont disponibles sur le site www.cesw.be.

entre le 1/02/2016 et le 30/04/2016

Les avis

Action sociale • Avis sur le Rapport 2014-2015 du Service de Lutte contre la pauvreté intitulé «Services publics et pauvreté, contribution au débat et à l’action politiques» Avis A.1275 adopté le 25/04/2016

Energie

• Avis du CPS concernant l’appel à propositions CWALityDE 2015-3 Avis A.1271 adopté le 25/02/2016

• Avis sur l’avant-projet d’arrêté modifiant l’arrêté du 30 novembre 2006 relatif à la promotion de l’électricité produite au moyen de sources d’énergie renouvelables ou de cogénération tel que modifié par les arrêtés du 20 février 2014 et du 3 avril 2014 Avis A.1273 adopté le 05/04/2016

Economie

Environnement

CPS

• Avis sur l’avant-projet d’arrêté portant exécution du décret «Prêt Coup de pouce» Avis A.1274 adopté le 11/04/2016

• Avis concernant la deuxième stratégie wallonne du développement durable Avis A.1270 adopté le 25/02/2016

Emploi-Formation

• Avis sur l’avant-projet de loi relative aux marchés publics Avis A.1272 adopté le 04/03/2016

• Avis sur l’avant-projet de décret relatif à l’occupation des travailleurs étrangers Avis A.1268 adopté le 05/02/2016

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• Avis sur l’avant-projet d’arrêté du Gouvernement wallon portant exécution des articles 40 et 41 du décret du 20 février 2014 relatif au plan langues et modifiant divers décrets en matière de formation professionnelle Avis A.1276 adopté le 25/04/2016

• Avis sur l’avant-projet de décret portant sur la mise en œuvre de la Sixième Réforme de l’Etat en matière d’emploi et de formation en alternance Avis A.1269 adopté le 15/02/2016

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Politique générale

Occupation de travailleurs étrangers Dans le cadre de la Sixième Réforme de l’Etat, la Wallonie, déjà compétente pour l’application des normes en matière de permis de travail, s’est vue transférer le pouvoir réglementaire relatif aux permis de travail A et B, l’Etat fédéral restant compétent pour la définition des normes liées à la situation de séjour des personnes L’avant-projet de décret soumis à l’avis du CESW vise donc à adapter les textes à la Sixième Réforme de l’Etat mais aussi à transposer trois directives européennes, dont la Directive 2011/98/UE du Parlement européen et du Conseil du 13/12/11 établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d’un permis unique autorisant les ressortissant de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d’un Etat membre. La transposition de cette Directive nécessitait l’adoption d’une procédure aboutissant à la délivrance d’un seul titre aux travailleurs d’origine étrangère régissant tant l’aspect séjour (de compétence fédérale) que l’aspect travail. Sur ce point, les différents Gouvernements concernés ont dû s’accorder en adoptant au sein du Comité de concertation, un schéma détaillant la procédure unique aboutissant la délivrance d’un «permis unique», tout en respectant la compétence de chacun. Chaque niveau de compétence s’est dès lors engagé à transposer dans sa réglementation les décisions du Comité de concertation, pour ce qui concerne sa propre compétence. Dans son avis, le CESW rappelle tout d’abord une position essentielle déjà exprimée dans son Avis A.1203 du 5 décembre 2014 sur la migration économique et l’occupation de travailleurs étrangers en Wallonie suite à la Sixième Réforme de l’Etat : «Pour le Conseil, la libre circulation des travailleurs citoyens de l’Union européenne et la mobilité encadrée des travailleurs ressortissant de pays tiers doivent contribuer au développement de l’activité économique wallonne et au soutien de la compétitivité régionale. Le CESW insiste sur le fait que ces

retombées positives ne peuvent se concevoir que dans un cadre de saine concurrence, dans le strict respect de la légalité et dans un souci constant de protection du travailleur et de respect de ses droits sociaux». Ainsi, le CESW demande que la mise en œuvre du transfert de compétences en matière de migration économique et la transposition des Directives européennes soient effectivement guidées par ces principes. Soulignant le travail conséquent et de qualité réalisé par les autorités, ainsi que la coopération établie entre les différents niveaux de pouvoir, le Conseil fait ensuite part de sa satisfaction générale quant à l’adoption de l’avant-projet de décret, les avancées obtenues pour l’application des directives européennes et, en particulier, l’obtention d’un consensus entre entités régionales et fédérale sur la transposition de la directive «Permis unique». Pour un système rapide et efficace Le développement d’un système opérationnel, rapide et efficace pour la délivrance du permis unique est essentiel pour les entreprises et les travailleurs concernés. A l’analyse du schéma proposé, il s’avère cependant que dans de nombreux cas, la procédure envisagée pour la délivrance du permis unique pourrait conduire à des délais nettement plus longs que ceux pratiqués actuellement. Dans la perspective de l’adoption des textes réglementaires, le CESW formule dès lors quelques propositions concrètes visant à faciliter l’introduction d’un dossier de demande de permis unique et à limiter les temps de traitement dans le cadre du champ de compétences wallon. Dans le même esprit, le Conseil demande à être consulté sur le futur projet d’arrêté d’exécution qui définira notamment les catégories et formes d’autorisation de travail, ainsi que les procédures d’introduction des demandes. Par ailleurs, un accord de coopération entre Régions devra être

conclu rapidement et permettre d’assurer effectivement la cohérence et les articulations indispensables entre les réglementations régionales. Dans ses considérations générales, le CESW insiste aussi pour que les employeurs et les travailleurs étrangers puissent aisément bénéficier d’une information claire sur leurs droits et obligations. Parallèlement, il préconise une fois encore un renforcement des actions de contrôle et des collaborations entre les différents services d’inspection. Les interlocuteurs sociaux se prononcent également sur la fonction consultative relative à ces matières et formulent des suggestions quant l’avenir du Conseil consultatif fédéral pour l’occupation des travailleurs étrangers. Enfin, une série de considérations particulières visant notamment à améliorer la rédaction du projet de décret sont formulées concernant divers aspects dont les définitions, les sanctions ou encore l’entrée en vigueur du texte.

Avis A.1268 adopté le 05/02/2016

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Mise en œuvre de la 6ème Réforme de l’Etat en matière d’emploi et de formation en alternance Fin 2015, la Ministre de l’Emploi et de la Formation a sollicité l’avis du CESW sur l’avant-projet de décret portant sur la mise en œuvre de la 6ème Réforme de l’Etat en matière d’emploi et de formation en alternance. Cet avant-projet de décret organise la transposition au niveau régional de la compétence relative aux bonus de démarrage et de stage (dont l’exercice est géré par l’ONEM jusqu’au 1/01/2016) et de la compétence relative au Contrat d’Apprentissage industriel (dont le fonctionnement est pris en charge par le SPF Emploi, Travail et Concertation sociale jusqu’au 31/07/2016 au plus tard). L’accueil de ces compétences au niveau régional wallon a été confié à l’IFAPME. En préalable de son avis, le CESW a souhaité remettre en évidence sur base de données chiffrées l’importance quantitative et qualitative du Contrat d'apprentissage industriel (CAI), particulièrement pour les jeunes fréquentant l’enseignement en alternance et les Centres d’enseignement de formation en alternance (CEFA). Pour les interlocuteurs sociaux, la référence centrale au nouveau contrat commun d’alternance ne peut empêcher le recours au CAI émanant d’initiatives sectorielles.

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Dans son avis proprement dit, le Conseil prend acte de l’avant-projet de décret qui selon la Note au Gouvernement wallon s’inscrit dans la première étape de transposition des compétences «à l’identique» visant à assurer la continuité des dispositifs, avant d’éventuellement dans une seconde étape, adapter les dispositifs aux spécificités et politiques régionales. Le Conseil est conscient de l’urgence, la compétence des organes fédéraux (ONEM et SPF Emploi, Travail et Concertation sociale) prenant effectivement fin le 1er janvier 2016 pour le bonus de stage et démarrage, le 1er août 2016 pour le CAI.

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Le Conseil constate cependant que l’avantprojet de décret, certes indispensable pour assurer l’exercice des compétences transférées, ne concerne qu’une part limitée de la réalité tant de la formation en alternance (l’enseignement en alternance et donc les CAI organisés par les CEFA n’étant pas couverts par cet avant-projet) que du CAI (celui-ci étant principalement mis en œuvre par les CEFA). Le Conseil souligne qu’en matière d’enseignement et de formation en alternance, la concertation entre la Région wallonne et la Fédération Wallonie-Bruxelles est indispensable compte tenu des différents acteurs, tant institutionnels qu’opérationnels, concernés. Dans le cas du présent avant-projet de décret, cette concertation semble avoir été menée de façon différente selon les aspects traités. Ainsi, lors du Gouvernement quadripartite du 26 février 2015, les entités ont convenu de confier la mission exercée par les Commissions paritaires d’apprentissage à des Commissions CAI instituées au niveau sectoriel dans le cadre des conventions-cadres de collaboration en matière d’enseignement, de formation et d’insertion professionnelle conclues entre la Région wallonne, la Communauté française et les secteurs professionnels. Par contre, le CESW relève que les modifications apportées à la loi du 19 février 1983 sur l’apprentissage de professions exercées par les travailleurs salariés ne semblent pas avoir fait l’objet d’une approche concertée. Le Conseil regrette vivement cette situation qui pourrait se traduire par des modalités

de transposition différentes entre la Région wallonne et la Communauté française et donc des modalités de mise en œuvre du CAI différentes pour les opérateurs de formation et d’enseignement. Cela engendrerait une nouvelle complexification du paysage de l’alternance, contraire à la dynamique d’harmonisation mise en œuvre depuis plusieurs années. Le Conseil s’étonne ensuite de certaines modifications proposées qui introduisent des modifications de fond et vont audelà de la transposition «à l’identique» des dispositifs transférés. Il constate que ces nouvelles dispositions qui tendraient à réduire le champ d’application du CAI, ne sont pas en adéquation avec la réalité de terrain. En effet, en 2014, sur 608 CAI agréés par la Région wallonne dans le cadre de l’accord de coopération du 18 juin 1998, 80% ont été conclus dans des entreprises de 20 personnes ou moins, et 87% dans des entreprises de 50 personnes ou moins. De plus, le Conseil constate qu’en matière de dérogation aux dispositions relatives au champ d’application du CAI, si la compétence d’avis du CNT est effectivement remplacée par la compétence d’avis du CESW, les avis et demandes des comités paritaires d’apprentissage ne sont plus prévus. Tenant compte de l’importance de l’initiative sectorielle à la base du développement de CAI, le Conseil demande que la notion de «demande de la Commission CAI compétente» soit introduite dans le texte, complémentairement à l’avis du CESW. Avis A.1269 adopté le 15/02/2016

Deuxième stratégie wallonne de développement durable Mi-janvier 2016, le Ministre wallon de l'Environnement a sollicité l’avis du CESW sur le projet de deuxième stratégie de développement durable. Voici la synthèse de l'avis rendu. Cette stratégie s’inscrit dans le cadre définit par le décret du 27 juin 2013 relatif à la stratégie wallonne de développement durable et comprend conformément à celui-ci : - une vision à long terme, représentation rêvée de la Wallonie à l’horizon 2050 ; - un diagnostic des acquis et des défis régionaux se basant sur l’évaluation de 37 indicateurs entre 2004 et 2014 ; - des objectifs à court et moyen terme tenant compte des engagements existants au niveau belge, européen et international, et particulièrement des 17 objectifs adoptés lors du Somment des Nations Unies en septembre 2015 ; - un plan d’actions pour la législature 2014-2019 s’articulant autour de trois axes thématiques : autonomie alimentaire, autonomie énergétique, autonomie des ressources. Il comprend également un quatrième axe transversal relatif aux politiques de soutien : information/sensibilisation, éducation/recherche, responsabilité sociétale des organisations, marchés publics durables et promotion du développement durable au niveau international.

déjà existants soit effectué, et ce particulièrement dans les domaines visés par le plan d’actions.

Plus largement, il s’interroge sur la cohérence entre constats, indicateurs et plan d’action.

De plus, ce plan a comme objectif principal l’atteinte de l’autonomie dans les trois domaines abordés. Pour le CESW, il est simpliste de réduire le développement durable à cette notion. La Wallonie étant une économie ouverte, le Conseil estime qu’une logique de développement durable devrait également être développée dans ce contexte.

Enfin, le CESW estime que les objectifs de développement durable ne pourront réellement être incarnés dans les politiques menées sous des législatures successives que si un certain consensus s’opère autour de la vision à long terme et si les citoyens et l’ensemble des acteurs de la société peuvent se l’approprier. Il regrette dès lors que la méthodologie, les objectifs et l’ampleur des mesures de participation ne semblent pas définis; il demande que cet aspect soit développé rapidement comme prévu par le décret.

Concernant la vision à long terme, il estime que la situation décrite semble inaccessible au vu des défis que la Wallonie va devoir relever à court et moyen terme. Si le Conseil partage la volonté du Gouvernement de viser une situation à long terme ambitieuse, il estime que celle-ci doit néanmoins rester réaliste et prendre en compte les moyens disponibles. Il rappelle que toute la difficulté de l’exercice de définition d’une SWDD réside dans l’approfondissement des mesures de transition qui devront être prises de manière très concrète, que ce soit au niveau des politiques de redéploiement économique, de R&D, d’approfondissement de l’AEE, de formations aux nouveaux métiers «verts», …

Avis A.1270 adopté le 25/02/2016

Dans son avis, le Conseil prend acte de la volonté de pragmatisme de ce deuxième exercice, mais relève toutefois que le plan d’actions proposé reste d’une portée limitée en ne visant que trois domaines d’action, alors que le diagnostic posé est très large et les objectifs à moyen et long terme restent ambitieux. Cohérence avec d'autres plans Par ailleurs, la stratégie ne fait que peu référence aux nombreux plans déjà définis au niveau régional. Il insiste dès lors pour qu’un exercice de mise en cohérence avec les objectifs, plans/programme et actions

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Avis

Projet de loi relative aux marchés publics Le 4 mars 2016, le CESW a adopté un avis sur la procédure de transposition des directives européennes en matière de marchés publics, et plus particulièrement sur le projet de loi qui initie le processus, suite à une sollicitation en ce sens du Ministre Christophe Lacroix. Dans ce cadre, le Conseil a formulé une série de remarques concernant principalement la lutte contre le dumping social, l’ouverture des marchés publics aux PME et la prise en compte des exigences environnementales, sociales et du droit du travail.

Procédure de transposition Les interlocuteurs sociaux wallons insistent sur l’importance de clore le processus de transposition rapidement vu la date butoir du 18 avril 2016 imposée par l’Union européenne et ils encouragent les représentants de la Région wallonne à participer activement aux réunions de la Commission fédérale des marchés publics. Dans ce cadre, le Conseil souhaite être associé à l’élaboration des arrêtés royaux d’exécution dès les premières phases préparatoires, d’autant plus qu’il l’a été fort tard lors du processus législatif. Dans la continuité de son avis A.1193 de juin 2014 relatif au dumping social, le CESW invite le Gouvernement wallon à poursuivre et à amplifier ses efforts de formation, d’aide et d’incitation des adjudicateurs publics afin de promouvoir des marchés publics durables, socialement responsables et accessibles aux PME. Lignes directrices du projet Le Conseil adhère à l’option d’une refonte intégrale de la législation afin de fournir une réglementation uniforme et cohérente. Néanmoins, il souligne la nécessité de cadrer davantage les délégations au Roi ainsi que l’utilité d’inviter tous les niveaux de pouvoirs à travailler de manière coordonnée pour aider l’ensemble des acteurs vers une mise en œuvre compréhensible et efficiente des règles. Quant aux objectifs annoncés dans l’exposé des motifs, le CESW se réjouit que celui d’une participation plus accrue des PME aux marchés publics soit endossé par le projet de loi,

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mais regrette que le Fédéral n’ait pas pris la mesure du potentiel de ces marchés dans la lutte contre le dumping social. Principe transversal quant aux obligations des droits environnemental, social et du travail Les interlocuteurs sociaux wallons prennent acte avec intérêt de la consécration d’une règle transversale relative au respect des obligations du droit environnemental, social et du travail étendue à toutes les phases des marchés publics et reposant sur une énumération large des normes à prendre en compte. Ils s’interrogent cependant sur la portée des obligations visées et suggèrent au Gouvernement wallon d’obtenir du Fédéral certaines explications additionnelles et de faire renforcer l’impact de ce principe. En tout état de cause, le CESW invite le Gouvernement wallon à encourager tous les pouvoirs adjudicateurs régionaux et locaux à prévoir, dans leurs cahiers des charges, des motifs d’exclusion en cas de nonrespect de ce type d’obligations et à assurer des contrôles effectifs du respect de ces obligations, à tous les stades des procédures de marchés publics.

Remarques particulières L’analyse du Conseil s’est ensuite portée sur une série de points plus spécifiques du projet de loi. L’usage des moyens de communications électroniques est généralisé, ce à quoi souscrit le CESW dans une optique de simplification administrative. Il serait toutefois recommandé que les pouvoirs adjudicateurs utilisent des moyens de communication simples et financièrement abordables pour les PME. L’utilisation des labels consacrée dans un article distinct est constitutive, aux yeux des partenaires sociaux, d’une avancée positive pour donner une visibilité accrue à la prise en compte de critères environnementaux, sociaux et éthiques dans les marchés, qui sont autant d’outils utiles pour lutter contre le dumping social. Ils relèvent néanmoins la nécessité de recourir de manière opportune et proportionnée aux labels afin de ne pas décourager la participation des PME. L’allotissement est rendu obligatoire pour les marchés dont le montant estimé est supérieur à 135.000 €, ce qui est accueilli positivement pas le CESW. Il soutient en effet les démarches visant à ouvrir les marchés publics à tous les acteurs économiques. Il approuve au surplus le fait que cette obligation n’ait pas été étendue à tous les marchés car cela aurait conduit à un excès de démarches administratives. La phase de sélection fait l’objet, dans l’avis, d’une attention particulière étant donné son importance pour lutter contre

le dumping social. A titre liminaire, les organisations syndicales tiennent à faire part de leur déception au regard des choix posés par le Gouvernement fédéral pour la catégorisation des motifs d’exclusion et l’étendue de la marge d’appréciation reconnue aux pouvoirs adjudicateurs. De manière unanime, les partenaires sociaux wallons constatent, par contre, des améliorations en termes de simplification administrative pour l’étape de la sélection, mais soulignent certaines lacunes regrettables dans le projet de loi, notamment quant aux modalités précises des dispositifs envisagés et aux moyens de preuves pouvant être utilisés au stade de la sélection. La sous-traitance dans le cadre de l’exécution des marchés publics est aussi abordée dans le projet de loi, trop brièvement toutefois d’après le CESW qui regrette que l’habilitation donnée au Roi à ce sujet soit si large et non détaillée alors que de nombreux risques de dumping social découlent de cette structuration. Le Conseil demande à ce qu’il soit tenu compte, lors de l’élaboration des dispositions de l’arrêté royal relatives à la sous-traitance, de l’accord fédéral tripartite «Plan pour une concurrence loyale», de l’accord du Groupe des dix du 9 décembre 2014 ainsi que des mesures utiles proposées par le CESW dans son avis A.1193 pour encadrer la sous-traitance. Les critères d’attribution envisageables pour passer des marchés publics sont revus en profondeur dans le texte en projet. Le Conseil considère que l’importance grandissante donnée aux critères de type qualitatif est une avancée majeure. Il pointe cependant une série de précautions utiles destinées à éviter les usages inappropriés

ainsi qu’à clarifier les objectifs de certains critères, notamment l’indispensable information des pouvoirs adjudicateurs quant aux finalités des clauses sociales, à l’importance de restreindre davantage l’utilisation du prix comme critère unique et, enfin, l’utilité d’expliciter suffisamment dans les cahiers des charges les critères «dits qualitatifs». Les prix et coûts anormalement bas doivent être «vérifiés» d’après la réglementation examinée, mais les modalités précises de cette vérification seront définies par le Roi. Les interlocuteurs sociaux critiquent cette méthode de délégation très large et imprécise et recommandent, en tout état de cause, de cadrer cette étape en s’inspirant des directives qui énumèrent une série de justifications potentielles. De plus, le Gouvernement wallon est invité à examiner les mesures régionales éventuelles pouvant aider les pouvoirs adjudicateurs à juger du caractère anormal ou non des offres proposées (ex : observatoires des prix, «métréstypes», fiches pratiques). Les marchés publics de faible montant soumis à des règles simplifiées seraient désormais ceux dont le montant estimé est inférieur à 30.000 €. Bien qu’il s’agisse déjà, pour le CESW, d’une amélioration en termes de simplification administrative, celui-ci s’interroge néanmoins sur l’éventualité d’assouplir encore davantage les procédures pour ces marchés ou certains d’entre eux, voire même de (partiellement) exempter de mise en concurrence les marchés ayant une incidence économique limitée. Avis A.1272 adopté le 04/03/2016

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Avis

Le prêt «Coup de pouce» L'accès des PME, créatrices de valeur ajoutée et d'emplois, au financement de leurs activités et de leurs projets est crucial pour le maintien et le développement du tissu économique wallon.

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Dans ce contexte, le Gouvernement wallon estime qu’il y aurait incontestablement une utilité à mobiliser une partie de l’épargne particulièrement élevée des Belges (taux de 16% en 2014) pour de l'investissement en faveur de l'économie réelle, via le réseau proche des entrepreneurs, à travers une solution de prêt à caractère subordonné. Il propose donc un dispositif s’inspirant fortement du win-winlening flamand (2006) et du «Tante Agathe» des Pays-Bas (2001), qui connaissent un réel succès.

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En septembre 2015, le CESW a déjà rendu un avis divisé sur l’avant-projet de décret relatif à la mobilisation de l’épargne privée en faveur des PME aussi appelée «Prêt coup de pouce» (Avis A.1238). C’est à présent sur l’avant-projet d’arrêté d’exécution que le Conseil se prononce. Si les partenaires sociaux sont certes d’accord sur le principe de la mobilisation de l’épargne privée à destination des PME wallonnes, les organisations syndicales sont en revanche toujours en désaccord avec la méthode à mettre en place pour y arriver. C’est la raison pour laquelle elles ne formulent pas de remarques additionnelles à celles reprises dans l’avis A.1238. De leur côté, les organisations patronales continuent à soutenir le dispositif proposé par le Gouvernement wallon, arguant

notamment que des systèmes fortement similaires ont déjà fait leurs preuves chez nos voisins et ne sont nullement remis en cause. Plus particulièrement sur le projet d’arrêté, elles demandent que : • la phase d’expérimentation dure au minimum 18 mois ; • les démarches administratives demandées aux parties impliquées soient allégées ; • une communication large sur les conditions à remplir pour pouvoir bénéficier du crédit d’impôt soit assurée. Avis A.1274 adopté le 11/04/016

Rapport du Service de lutte contre la pauvreté Le Conseil vient de rendre son avis sur le 8ème rapport du Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale, consacré pour son édition 2014-2015, au rôle des services publics dans la lutte contre la pauvreté. Le CESW juge pertinent le choix thématique adopté, qui pose la question de savoir «dans quelle mesure les services publics contribuent à garantir l’effectivité des droits fondamentaux de tous, y compris des personnes en situation de grande pauvreté» (1). Notons que, dans le rapport, les services publics visent à la fois les missions de service public et les acteurs chargés de les mettre en œuvre, ces derniers étant entendus au sens large càd incluant les acteurs à qui des autorités publiques confient des missions de service public. Le document aborde six chapitres sur les thèmes suivants : Justice, Culture, Accueil de la petite enfance, Santé, Emploi, Energie/Eau, sachant que d’autres thématiques importantes telles que le logement ou l’enseignement n’ont pu être traitées.

Par ailleurs, le Conseil insiste sur l’importance d’une approche transversale et coordonnée entre l’Etat fédéral et les entités fédérées en ce domaine mais également au niveau régional. Il rappelle la nécessité de disposer d’indicateurs complets et actualisés sur les personnes en situation de pauvreté et celles se trouvant dans une situation précaire qui pourraient basculer dans la pauvreté. Il recommande également que les autorités veillent à remédier à la carence de données statistiques régionales en la matière (cf. enquête sur les revenus et les conditions de vie – EU SILC). Il convient en effet de prendre en compte les intérêts wallons dans les différents lieux de concertation existants et de bien mesurer l’impact éventuel, chiffres à l’appui, d’une politique sur l’autre (ex. : reconversion hospitalière, réforme des allocations de chômage ou instauration du projet individualisé d’intégration sociale).

dans ses précédents avis. En effet, un premier plan wallon intégré de lutte contre la pauvreté (2015-2019) a été adopté et un groupe de travail destiné à constituer un réseau collaboratif transversal de référents «cohésion sociale» en Wallonie a été mis en place. L’intention est d’aboutir à la publication d’une version actualisée du Rapport sur la cohésion sociale, sous l’égide de l’IWEPS. Le CESW ne peut que se réjouir de cette initiative et recommande que la DiCS (Direction interdépartementale de la Cohésion sociale) du SPW bénéficie du soutien nécessaire dans son rôle de coordination de la démarche. Le CESW complétera ses recommandations dans un prochain avis sur le projet de décret relatif au Fonds régional de Cohésion sociale. A suivre donc… Avis A.1275 adopté le 25/04/2016 (1) Rapport bisannuel 2014-2015 du Service de

Enfin, le Conseil relève avec satisfaction que des avancées importantes ont été réalisées au niveau wallon, dans le sens des recommandations qu’il avait formulées

lutte contre la pauvreté, p. 2. (2) Rapport bisannuel 2014-2015 du Service de lutte contre la pauvreté, page 185.

Le CESW estime que l’accès effectif aux droits fondamentaux par le recours aux services publics et à la protection sociale reste un élément essentiel dans la lutte contre la pauvreté. Il se montre sensible à la recommandation du rapport qui suggère de considérer les dépenses de service public comme des investissements plutôt que des coûts (2), dans la mesure où une action préventive à l’encontre de la précarisation de personnes cumulant difficultés sociales et/ou sanitaires permet d’éviter des interventions plus lourdes et plus coûteuses par la suite. Il estime toutefois qu’il convient de s’interroger sur l’efficacité des services publics à l’égard de ce public fragilisé, notamment au vu de nombreux exemples du rapport attestant que les personnes en situation de grande pauvreté ou de précarité n’ont plus accès aux droits fondamentaux ou ne se considèrent même plus comme sujets de droits, ce qui lui paraît interpellant.

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L'invité

Pascal Poty

«Nous vivons une transformation digitale majeure» Communément appelé «GSM» en Belgique, «Portable» en France, «Natel» en Suisse ou encore «Cellulaire» sur le continent Nord-américain, le téléphone mobile présent au fond de nos poches est devenu en seulement vingt ans un objet incontournable de notre quotidien. 80% des adultes dans le monde disposeront d’un smartphone en 2020. L’accès à l’Internet devient prioritairement mobile. La recherche de contenus en ligne est devenue mobile. Le commerce est de plus en plus mobile. En Chine, 50% des ventes sont aujourd’hui réalisées depuis un smartphone. Cette révolution globale correspond également à une évolution technologique impressionnante. Pascal Poty, Expert Responsable du Pôle Veille Technologique & Juridique de l'AdN (Agence du Numérique), étudie depuis de nombreuses années cette transformation à la fois technique et sociale. Il a publié récemment un ouvrage à ce sujet : «L’Instant mobile» (voir en page 19). Suite à la conférence qu’il a donnée au CESW, Pascal Poty s’est prêté au jeu de l’interview. Il nous explique ce qu’est l’Instant mobile, quelles sont les conséquences attendues de cette révolution digitale et les pistes pour s’y préparer au mieux.

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Wallonie : Pourriez-vous nous expliquer brièvement ce qu’est «L’Instant mobile» ? Pascal Poty : Le téléphone mobile est devenu, en l’espace de 20 ans, un élément incontournable de notre quotidien. Les Japonais l’appellent d’ailleurs le «Kakasenai Keitai», soit «l’indispensable mobile». Objet de statut social à ses débuts, le smartphone est devenu aujourd’hui un objet fonctionnel, bien sûr, mais aussi «émotionnel» : la perte ou l’oubli de son smartphone est de nature à provoquer un sentiment d’anxiété aigüe chez les personnes concernées… De nos jours, on ne porte plus le téléphone à l’oreille : on le regarde. Et on le regarde souvent : savez-vous qu’en moyenne, nous consultons l’écran de notre smartphone 150 fois par jour, soit une fois toutes les 6 minutes ! Toutefois, les interactions dépassent rarement plus de deux minutes. C’est cela, «l’Instant mobile» : un instant éphémère, récurrent, localisé et éminemment personnel. Il faut également ajouter que ce phénomène touche toutes les générations : penser que le mobile est une «affaire de jeunes» est une erreur. Wallonie : Les évolutions technologiques rapides ont participé à l’émergence de ce phénomène… Pascal Poty : Effectivement. D’un simple téléphone permettant l’établissement d’une communication vocale en situation de mobilité, un smartphone concentre aujourd’hui une puissance de calcul équivalente à celle de certains ordinateurs personnels. Plus encore, il embarque aujourd’hui un nombre sans cesse croissant de capteurs qui ont fait de lui un véritable «tueur en série» d’un bon nombre de segments de l’industrie électronique grand public. Les smartphones et les tablettes sont ainsi sur le point de représenter 50% de l’intégralité du marché de l’électronique grand public dans nos pays développés et un tiers des ventes en ligne. En réalité, le mobile n’est pas un canal supplémentaire, mais un véritable levier de transformation digitale. En effet, par leur diffusion de masse, leur nature personnelle et ubiquitaire, leur richesse logicielle et enfin la puissance de leurs capteurs embarqués, les terminaux mobiles annoncent l’obsolescence relative de l’ordinateur individuel tel que nous le connaissons depuis 30 ans. Selon moi, A l’horizon d’une décennie, les PC et les terminaux mobiles auront véritablement convergés, notamment en ce qui concerne leurs systèmes d’exploitation que leurs applications tant professionnelles que privées. Cette nouvelle réalité n’est cependant pas encore suffisamment prise en considération par les entreprises qui restent «PC Centric». Or, il est essentiel, pour ne pas rater l’Instant mobile et les opportunités offertes, que les contenus soient différents, plus complets et conçus pour une utilisation sur smartphone.

CV express > Pascal Poty est actif dans le domaine des télécommunications mobiles depuis plus de 20 ans, d’abord au sein de directions générales d’opérateurs de télécommunications puis au sein de cabinets d’études. Il dirige le Pôle Veille Technologique et Juridique depuis 1999 au sein de l’Agence du Numérique (ex-AWT) et il est directement associé à la mission de conseil du Gouvernement wallon pour l’élaboration de sa stratégie digitale. Dans ce cadre, il a été l’un des co-rédacteurs de la proposition pour la stratégie «Digital Wallonia» auprès du Conseil du Numérique. Il est aujourd’hui responsable de la mise en place de la stratégie Digital Wallonia pour le territoire. Professeur associé dans plusieurs universités et grandes écoles à Paris, Lille et Bruxelles, il enseigne dans le domaine des stratégies mobiles d’entreprises. Dans ce cadre, il est l’auteur d’un ouvrage intitulé «L’instant mobile : 2 minutes pour convaincre votre client mobile» publié aux éditions EdiPro en décembre 2015 (www.instantmobile.xyz). > Son compte Twitter : @mobisphere permet de suivre quotidiennement l’actualité des écosystèmes mobiles et de la transformation digitale.

Wallonie : L’Instant mobile concerne tout le monde : tous les âges, toutes les sphères sociales, tous les secteurs… Pourriezvous nous expliquer en quoi ce phénomène est global? Pascal Poty : L’Instant mobile est global car il se développe partout dans le monde. Dans tous les pays, de la Belgique à l’Australie, de la Chine au Brésil, en passant par les Etats-Unis, la Russie, le Japon ou l’Afrique … Tout le monde utilise son smartphone de la même manière (recherche d’information, réseaux sociaux, achats en ligne, paiements, …), même si cela se passe dans des écosystèmes différents. Les pays émergents sont tout particulièrement concernés par cette transformation digitale. Parmi ceux-ci, l’Inde est en train de prendre la tête : près de 2 Indiens sur 3 naviguent déjà sur Internet depuis leur téléphone mobile; 100 millions de femmes indiennes utilisent déjà un smartphone et 40% d’entre elles achètent déjà en ligne. En Inde, le mobile sevient un véritable «hub» de la vie quotidienne, permettant de retirer de l’argent à un distributeur automatique grâce à un système de reconnaissance vocale ou encore de prévenir ses proches lors d’une tentative d’agression à l’aide d’une application de géolocalisation.

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L'invité

L’autre région la plus dynamique au monde pour le développement des usages mobiles est sans conteste le continent africain. D’ici à 2017, plus de 9 habitants sur 10 du continent africain détiendront un téléphone mobile et, pour 50% d’entre eux, il s’agira d’un smartphone. La démocratisation de l’accès aux smartphones est en train de produire une révolution des usages mais aussi et surtout une transformation profonde des modes de vie. L’Afrique est ainsi devenue la pionnière des transactions mondiales sur mobile avec 52% des paiements mobiles. Le kit solaire M-KOPA permet à 12 millions de clients d’accéder à la ressource électrique et son financement a été rendu possible par le téléphone mobile avec 3 millions de micro-transactions depuis 2012. D’autres applications en matière de santé, d’agriculture ou encore d’éducation sont utilisées par des millions de personnes…

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25-5-80-90 4 chiffres-clés de l’instant mobile :

Wallonie : Le commerce est un secteur particulièrement impacté par la révolution mobile…

25 = le nombre maximum d’applications sur un

Pascal Poty : Tout à fait ! Le commerce est mobile, notamment avec le développement des transactions bancaires via Internet. Cette année, au moment du «blackFriday » aux USA, les ventes en ligne ont dépassé (et de loin) les ventes dans les enseignes traditionnelles. Le magasin n’est pas mort, mais il va devoir se transformer car il n’est plus le lieu unique – et privilégié – d’achat. La digitalisation de l’expérience client suppose une remise en question des points de frictions des «retailers» : l’assortiment de produits, la disponibilité de l’information produit, l’organisation de la transaction,… . Le commerce devra s’adapter aux nouveaux modes de consommation et proposer à ses clients des produits adaptés à chacun. Le magasin deviendra un lieu où le client ira pour le plaisir et pour vivre une expérience. Parallèlement, l’utilisation des «bots» dans les applications mobiles ouvre également de nombreuses possibilités qui redéfiniront l’expérience-client selon un mode conversationnel. Les premières expériences menées par de grandes marques avec des plateformes telles que Facebook Messenger vont notamment en ce sens.

5 = le nombre d’applications (sur les 25) utilisées

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smartphone

quotidiennement

80% = le temps passé sur les 5 applications 90% = dans les 3 mois après leur installation, 90% des applications sont supprimées du smartphone

L’instant mobile. Deux minutes pour convaincre votre client.

Wallonie : Les potentialités offertes par le développement du mobile semblent énormes, en termes de services et de développement économique. Que faut-il faire pour anticiper les changements annoncés et participer pleinement – et activement – à cette transformation ? Pascal Poty : Une première étape est très certainement de bien comprendre que nous sommes en train de vivre cette transformation digitale : il ne s’agit pas de science-fiction! On ne peut donc considérer qu’une position attentiste serait une réponse adéquate à l’intensité et à la rapidité des mutations annoncées par l’Instant mobile. Actuellement, seule une partie du phénomène est visible : ce sont les applications mobiles, les sites «responsive», ou encore les objets connectés. Mais, au-delà de cette réalité apparente, une transformation plus profonde est actuellement à l’œuvre chez les acteurs les plus avancés dans la maitrise de l’Instant mobile. Cette nouvelle étape moins visible concerne directement les changements de process au sein même des organisations. Cette transformation organisationnelle demandera des capacités nouvelles en termes d’investissement et de ressources humaines afin de créer les résultats attendus en matière de différenciation en termes d’offres de produits et de services. Dans ce contexte, de nouveaux intermédiaires digitaux vont apparaître, entre les entreprises (ou les marques) et les consommateurs. Ces nouveaux intermédiaires permettront, par exemple, l’agrégation de l’offre et de la demande en temps réel, consolideront les données personnelles pour améliorer l’offre de services (la «privacy» est un élément essentiel de la réussite de l’Instant mobile), développeront des services «on demand» (d’où la nécessité de bien connaître les «habitudes» de ses clients) et utiliseront des agents intelligents pour l’anticipation des besoins. Au-delà de ces évolutions majeures, il importe de rappeler le rôle essentiel que jouera l’éducation pour la réussite d’une telle révolution car la qualité des ressources humaines sera la clé de cette transformation.

Nous regardons en moyenne notre écran de smartphone 150 fois par jour. Toutefois, ces interactions dépassent rarement deux minutes. Pour être présente sur l’écran de votre client mobile, votre entreprise doit donc convaincre endéans ces deux minutes. C’est l’instant mobile, un instant éphémère, récurrent, localisé et éminemment personnel. Sa compréhension passe donc par une agilité inédite pour les entreprises. En effet, le mobile ne constitue pas un canal supplémentaire de leur offre de produits et services mais bien un levier stratégique pour réussir leur transformation digitale et organisationnelle. Le smartphone est au carrefour de ces interactions multiples et complexes où la capture de l’attention du consommateur devient un enjeu majeur pour les marques et les enseignes, y compris dans l’environnement physique du point de vente. Maîtriser les codes de l’instant mobile c’est entrer en conversation avec votre client, mobiliser votre communauté et plus globalement renforcer l’attachement et la fidélité à votre marque. A l’image de nos vies quotidiennes, cet ouvrage est donc avant tout un concentré d’instants mobiles. Ceux-ci y sont décryptés au travers d’exemples concrets à destination des entreprises souhaitant disposer des clés nécessaires pour intégrer les exigences d’une réalité nouvelle où le smartphone est devenu ce premier écran par lequel leurs clients vont les découvrir.

Paru aux Editions Edipro, «L’instant mobile» est venu au prix de 29€. > www.edipro.eu

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Dossier

Quelle assurance autonomie en Wallonie ? 15 ans après la Flandre, la Wallonie a décidé de mettre en place une assurance autonomie. Dans sa Déclaration de politique régionale de 2014, le Gouvernement wallon annonçait en effet que «le transfert de l’allocation pour l’aide aux personnes âgées (APA) constitue une occasion de mettre sur pied une véritable ‘couverture autonomie’ au profit de tous les aînés de Wallonie». La date annoncée pour la mise en route de cette assurance autonomie wallonne est le 1er janvier 2017, autant dire demain.

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Le CESW a décidé de contribuer activement au débat, les interlocuteurs sociaux wallons étant particulièrement concernés par cette thématique. Après avoir rendu un avis

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d’initiative en janvier 2016 (voir l’article en page 34), le Conseil a organisé, le 18 mars dernier, un séminaire intitulé «Quelle assurance autonomie en Wallonie ?» (voir page 44). Près de 200 personnes ont participé à ce séminaire, preuve de l’intérêt des Wallons et des Wallonnes pour le sujet. Le Dossier du numéro 130 de la revue Wallonie est consacré à cette thématique. Que recouvre le terme «Assurance autonomie» ? Quels sont les systèmes mis en place dans d’autres pays ou région ? Le premier article de notre dossier (voir page 22) trace les grandes lignes de la Zorgverzekering (l’Assurance soins flamande) ainsi que de l’Allocation personnalisée d’autonomie française.

Un tableau synthétique comparant les dispositifs flamand, français et luxembourgeois vient compléter la description (voir page 28). Un second article présente les différents outils de mesure de la dépendance, dont le BelRAI, outil pressenti pour être l’échelle de référence de la future assurance autonomie wallonne (voir page 32). Deux encarts rappellent brièvement ce que sont l’allocation pour l’aide aux personnes âgées (APA) et le budget d’assistance personnelle (BAP). Enfin, plusieurs interviews viennent compléter le tour d’horizon du thème proposé dans ce dossier. Mme Petra Driessens (Vlaamse Zorgfonds - Afdeling Vlaamse Sociale

Bescherming) et le Docteur Alain Colvez (CNSA) nous apportent des éléments de contexte et des perspectives au regard des dispositifs flamand et français. Leurs interviews sont proposées en pages 37 et 41. Le Professeur Daniel Gillain (ULg) présente les objectifs des instruments de mesure de la dépendance (lire en page 46). Enfin, dans l’interview qu’il a accordée à la revue Wallonie, le Ministre wallon de l’Action sociale et de la Santé, M. Maxime Prévot, nous livre sa vision de la future assurance autonomie.

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Dossier

La Zorgverzekering et l’Allocation personnalisée d'autonomie La question du vieillissement de la population – et les réponses à y apporter – n’est évidemment pas propre à la Wallonie. Dans d’autres pays et régions, des systèmes d’assurance autonomie ont été mis en place. Dans l’article qui suit, deux dispositifs sont présentés : la Zorgverzekering (l’assurance soins flamande) instaurée en 2001, et l’Allocation personnalisée d’autonomie française (APA), mise en place en 2002. Quels sont les bénéficiaires ? Quelles sont les prestations prévues? Quel est le mode de financement ? Comment et par qui le dispositif est-il géré? Autant de questions abordées dans la description de ces deux systèmes. Le tableau proposé en page 28 présente de manière synthétique les dispositifs flamand, français et luxembourgeois. Les interviews du Docteur Alain Colvez (page 37) et de Mme Petra Driessens (page 41) viennent compléter cette analyse.

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En Flandre : la Zorgverzekering L’assurance soins flamande (Zorgverzekering) est un dispositif qui permet d’octroyer aux personnes fortement dépendantes un soutien financier mensuel pour les aider à prendre en charge les frais liés à des prestations d’aide et de soins non médicaux. Les affiliés à l’assurance soins

Depuis le 1er octobre 2001, toute personne de plus de 25 ans et habitant en Flandre est obligée de s’affilier à une caisse d’assurance soins et de payer une cotisation annuelle. L’affiliation se fait sur base volontaire pour les habitants de la Région de Bruxelles-Capitale. Depuis le 1er janvier 2015, la cotisation s’élève à 50€ par an, contre 25€

Les bénéficiaires

Pour pouvoir bénéficier de l’assurance soins, il convient de remplir les conditions suivantes : - démontrer, à l’aide d’une attestation ou par le biais d’une «indication» délivrée par un organe agréé, que l’on est affecté par une autonomie réduite prolongée et grave ; - depuis au moins 5 ans, résider de façon ininterrompue en Flandre ou dans la Région de Bruxelles-Capitale ou être assujetti à la sécurité sociale dans un autre Etat membre de l’Union européenne ou dans les Etats de l’Espace Economique Européen ; - être affilié auprès d’une caisse d’assurance soins, y cotiser et ne pas demander de prise en charge auprès d’une autre caisse durant l’année en cours.

précédemment. Les bénéficiaires de l’intervention majorée à l’assurance-maladie (BIM) paient une cotisation réduite s’élevant à 25€ (10€ jusqu’en 2014). L’affiliation se fait auprès d’une des 7 caisses d’assurance soins agréées, 5 étant issues des mutualités, une de la DKV, la dernière étant la Vlaamse Zorgkas. A noter que toute personne de plus de 25 ans non affiliée volontairement à une caisse est affiliée d’office à la Vlaamse Zorgkas. En cas de non-paiement de la cotisation, il existe des sanctions : amende administrative de 250€ (100€ pour les BIM) lorsque la cotisation n’a pas été payée (même partiellement) à 3 reprises et suspension de la prise en charge (4 mois de suspension par année de cotisation non payée).

L’intervention versée aux bénéficiaires de l’assurance soins s’élève à 130€ par mois. Il s’agit d’un montant forfaitaire s’adressant aussi bien aux personnes qui reçoivent de l’aide à domicile qu’aux personnes résidant en maison de repos, maison de repos et de soins ou maison de soins psychiatriques. Pour démontrer l’état de dépendance, il convient de produire une des attestations reconnues par la législation relative à la «Zorgverzekering». Pour les soins de proximité et les soins à domicile, l’attestation doit certifier que la personne remplit les conditions requises au regard de l’une des échelles d’évaluation suivantes : échelle BEL (1), échelle de KATZ, échelle médico-sociale utilisée pour le droit à l’intégration et l’APA, allocations familiales supplémentaires. A défaut d’attestation, il convient de faire établir le degré de dépendance auprès d’un organe agréé (2) qui établira une «indication» sur base de critères définis au regard de l’échelle BEL. Pour les soins résidentiels, il s’agit d’une attestation de résidence en maison de repos, maison de repos et de soins ou maison de soins psychiatriques. A noter qu’actuellement, la Flandre est dans une phase de test de l’échelle BelRAI screener, version simplifiée de l’échelle BelRAI.

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La demande d’intervention ainsi que l’attestation (ou l’ «indication») sont introduites auprès de la caisse d’assurance soins auprès de laquelle la personne est affiliée. La caisse examine la demande et peut, si nécessaire, faire procéder à des examens supplémentaires. Lorsque la demande est acceptée, l’intervention financière est versée après un stage d’attente de 3 mois. L’intervention peut, le cas échéant, être accordée avec un maximum 6 mois de rétroactivité. La caisse d’assurance soins décide de la durée de la prise en charge. Pour les soins de proximité et les soins à domicile, cette durée est de 6 mois minimum à trois ans maximum sauf dérogations prévues dans la réglementation. Cette prise en charge peut faire l’objet de prolongations. Pour les soins résidentiels, une décision positive est valable à durée indéterminée. Toutefois, la caisse d’assurance soins peut mettre fin à une décision positive lorsque la personne ne remplit plus les conditions. Le Vlaams Zorgfonds

Au niveau de la gestion du dispositif, le pilier central de l’assurance soins est le Fonds flamand d’assurance soins (Vlaams Zorgfonds) dont la gestion est assurée par l’Agence flamande des Soins et de la Santé (Zorg-en-Gezondheid). Parmi ses différentes tâches, le Vlaams Zorgfonds est notamment chargé d’octroyer des subventions aux caisses d’assurance soins, de compenser les différences structurelles existant au niveau des risques entres les différentes caisses ou encore de surveiller et de contrôler la gestion, le fonctionnement et la situation financière des caisses. Le financement de l’assurance soins flamande est principalement assuré par une dotation du Gouvernement flamand, les cotisations des affiliés et, dans une moindre mesure, par des revenus d’investissements. Quelques chiffres pour conclure

(3)

En 2014, le système d’assurance soins flamand reposait sur 4,6 millions d’affiliés. Sur un budget total de 365 millions € dédié au dispositif, 336 millions € ont été versés à 237.974 bénéficiaires (75.462 pour les soins résidentiels et 162.512 pour les soins de proximité et les soins à domicile). Avec une dotation de 216 millions € en 2014, le Gouvernement flamand a alimenté près des 2/3 du fonds, les cotisations des affiliés et les revenues d’investissements contribuant pour, respectivement, 104 millions € et 29 millions €. Il est probable qu’avec l’augmentation, au 1er janvier 2015, de la cotisation obligatoire (celle-ci passant de 25€ à 50€), la part de chaque source de financement dans le budget de l’assurance soins s’établira dans une proportion différente pour l’année 2015.

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En France : l’allocation personnalisée d’autonomie La prise en compte des besoins des personnes en situation de dépendance a suivi une évolution en plusieurs étapes, en France, pour aboutir à l’instauration, en 2002 de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Les bénéficiaires

Toute personne âgée de 60 ans et plus, résidant en France, qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou mental a droit, sous certaines conditions, à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins : aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou surveillance régulière liée à son état.

Dans le cas de l’APA à domicile, l’évaluation de la dépendance est réalisée à domicile par une équipe pluridisciplinaire. Cela ouvre le droit à une intervention, en fonction du Gir et du niveau de revenus, plafonnée à certains montants s’échelonnant de 1713€/mois pour le Gir 1 à 663€/mois pour le Gir 4 (7). Un plan d’aide, élaboré par une équipe médico-sociale, définit les prestations pouvant être financées. Dans les cas de perte d'autonomie les plus importants, lorsque le plan d'aide prévoit l'intervention d'une tierce personne à domicile, l'APA est, sauf refus exprès du bénéficiaire, affectée à la rémunération d'un service prestataire d'aide à domicile agréé. L’allocation peut, après accord du bénéficiaire, être versée directement aux services d’aide à domicile qu’il utilise (décision réversible à tout moment). Les prestations assurées par les services récipiendaires font l’objet d’un contrôle de qualité. Lorsqu'il n'y a pas lieu d'élaborer un plan d'aide, un compte rendu de visite comportant des conseils est établi. Une participation financière peut être laissée à charge du bénéficiaire, selon le niveau de ressources dont il dispose. Celle-ci peut s’échelonner de 90% du plan d’aide si les ressources mensuelles du bénéficiaire dépassent 2.945€ à une participation nulle si les ressources mensuelles sont inférieures à 739€. Pour déterminer le montant de cette participation financière, certains revenus sont pris en compte (revenus déclarés, produits de placement, patrimoine mobilier ou immobilier hors résidence principale), d’autres sont exclus (remboursement de soins, allocations diverses, rentes viagères, etc.).

L’APA qui a le caractère d’une prestation en nature, est accordée, à la demande du bénéficiaire, dans les limites des tarifs fixés, à toute personne attestant d’une résidence stable et régulière et remplissant les conditions d’âge et de perte d’autonomie, évaluée à l’aide d’une grille nationale (AGGIR)(4). Les niveaux de dépendance sont classés en 6 groupes «iso-ressources», du Gir 1 (le plus haut niveau de dépendance) au Gir 6 (personnes disposant encore d’une certaine autonomie pour les actes essentiels de la vie courante). Seuls les groupes Gir 1 à 4 ouvrent le droit à l’APA. L’allocation peut être attribuée aux bénéficiaires résidant soit à domicile, soit en établissement (5). Si elle est accordée à une personne résidant à domicile, elle est affectée à la couverture des dépenses de toute nature relevant d’un plan d’aide élaboré par une équipe médico-sociale. Lorsque le bénéficiaire est hébergé dans un établissement, l’allocation aide le résident à acquitter le coût du tarif dépendance fixé par l’établissement d’accueil, correspondant à son Gir (6). Notons que sont assimilés aux bénéficiaires résidant à domicile, les personnes qui résident soit chez un accueillant familial, soit dans un établissement dont la capacité d’accueil est inférieure à 25 places, soit dans un logement pour personnes valides.

Dans le cas de l’APA en établissement, l’évaluation de la dépendance est effectuée en institution par le médecin coordinateur ou tout médecin conventionné. Les montants de l’allocation diffèrent des plafonds applicables au domicile et couvrent tout ou partie du tarif dépendance fixé par l’établissement d’accueil. Sauf avis contraire de la personne, le montant de l’APA sera versé directement à l’établissement. La participation du bénéficiaire est également calculée en fonction de ses ressources et correspond à un montant équivalent à un certain pourcentage du tarif dépendance de l’établissement, variable selon le niveau de ressources et le Gir du bénéficiaire. Le plan d’aide couvert par l’APA peut concerner des aides techniques (fauteuil roulant, canne, déambulateur,...) ou des interventions à domicile effectuées par une tierce personne (aide ou garde à domicile, repas, transport, blanchisserie, aménagement du logement, petits travaux, etc.). Le bénéficiaire de l’APA peut choisir d’employer et rémunérer directement une ou plusieurs personnes intervenant à son domicile ou recourir à des organismes prestataires autorisés pour ce faire. Le bénéficiaire de l'APA peut employer un ou plusieurs membres de sa famille, à l'exception de son conjoint ou de son concubin ou de la personne avec laquelle il a conclu un pacte civil de solidarité. Si le bénéficiaire choisit de recourir à un salarié ou à un service d'aide à domicile agréé, l'APA destinée à le rémunérer peut être versée sous forme de chèque emploi-service universel.

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L’APA n’est pas cumulable avec certaines dispositions du Code de sécurité sociale (ex. prestation de compensation du handicap ou allocation simple d’aide à domicile). Le montant de l’allocation peut être réduit ou son versement suspendu en cas de séjour en établissement de santé ou si le bénéficiaire ne respecte pas ses obligations (justificatifs, participation financière). Des dispositions spécifiques sont prévues pour les conjoints ou concubins ainsi que pour les personnes relevant de l’aide sociale. L’APA fait l’objet d’une révision périodique, en fonction de l’évolution de la situation personnelle ou financière du bénéficiaire. L'allocation est accordée par décision du président du conseil départemental, sur proposition d'une commission présidée par celui-ci ou son représentant. Cette commission réunit notamment des représentants du département et des organismes de sécurité sociale. A défaut d’une notification dans le délai requis, l’allocation est accordée pour un montant forfaitaire et en cas d’urgence, elle peut être attribuée à titre provisoire. Une procédure de recours est prévue en cas de litiges relatifs à l’APA. La CNSA

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L’organisme gestionnaire de l’APA est la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie), établissement public créé par la loi du 30 juin 2004 (8). La CNSA est à la fois une caisse et une agence d’appui technique. Elle est, en effet, chargée de répartir les moyens

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financiers concernant les aides en faveur des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées, de garantir l’égalité de traitement sur tout le territoire et pour l’ensemble des handicaps mais également d’assurer une mission d’expertise, d’information et d’animation. En ce qui concerne l’APA, la CNSA répartit les moyens entre les différents départements du territoire, selon quatre critères : le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans (variable entrant pour 50% dans le calcul de la dotation du département), la dépense constatée d’APA (20%), le potentiel fiscal (25%) et le nombre de bénéficiaires du RSA(9) (5%). Chaque département est tenu de transmettre au Ministre en charge des personnes âgées les données comptables et statistiques relatives au développement du dispositif (bénéficiaires, activité des équipes médico-sociales, suivi des conventions). Les ressources de la CNSA proviennent des crédits de l’assurance maladie, de la solidarité nationale (Contribution de solidarité pour l’autonomie, Contribution sociale généralisée) et des contributions des caisses d’assurance vieillesse. Le Conseil de la CNSA, en tant que parlement du secteur médico-social, exerce un double rôle. Il agit comme organe de gouvernance classique (orientations, budget, priorités) mais constitue aussi un lieu de débats et de réflexion sur les questions liées à la perte d’autonomie. Il réunit tous les acteurs concernés (48 membres) : associations de personnes âgées ou

handicapées, syndicats, employeurs, services de l’Etat, Conseils généraux, parlementaires, professionnels. La CNSA dispose également d’un Conseil scientifique qui assiste le Conseil et la Direction sur les questions d’ordre technique et scientifique. Il est composé de 22 experts du monde académique et de la recherche, médecins, psychologues, épistémologistes, gériatres, magistrats, etc.

(1) L’échelle BEL est l’échelle d’évaluation à l’aide de laquelle sont mesurées la durée et la gravité de l’autonomie réduite, telles que visées à la réglementation sur l’aide aux familles et telles que visées à l’article 9 du décret du 30 mars 1999 portant organisation de l’assurance soins. (2) Les acteurs suivants ont été désignés comme indicateurs mandatés : les CPAS, les services d’aide familiale et de soins à domicile complémentaires, les services d’assistance sociale de la mutualité et les centres de services locaux.

L’APA en quelques chiffres

(10)

(3) Source : Rapport d’activités 2014 du Vlaams Zorgfonds : http://www.zorg-en-gezondheid.be/jaarverslagen-vlaams-zorgfonds.

La CNSA gère près de 23 milliards € au financement des politiques d’aide à l’autonomie, quasiment à parité entre personnes âgées et personnes handicapées. Entre 2006 et 2015, le budget de la CNSA a augmenté de 61%, passant de 14,2 à 22,8 milliards €. En 2015, le concours APA réparti et versé par la CNSA aux département s’élevait à 1,7 milliard €. Le montant des dépenses totales engagées par les départements pour l’APA au cours de la même année s’élevait à 5,5 milliard €. Le nombre de bénéficiaires bénéficiant de l’APA s’élevait à 1.249.490 en 2014, dont 59% à domicile et 41% en établissement. Les pourcentages de bénéficiaires par Gir, au 31 décembre 2013, s’établissaient de la manière suivante : Gir 1 : 2% à domicile et 19% en établissement, Gir 2 : 17% à domicile et 41% en établissement, Gir 3 : 22% à domicile et 17% en établissement, Gir 4 : 59% à domicile et 23% en établissement. Notons encore que 3/4 des bénéficiaires de l’APA sont des femmes et que la part des bénéficiaires âgées de 80 à 85 ans s’élève à 24% au domicile et à près de 18% en établissement. Alors que la moitié des bénéficiaires de l’APA au domicile sont âgés de plus de 85 ans (65% en établissement) (11).

(4) AGGIR : Autonomie, gérontologie, groupes iso-ressources. (5) EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ou USLD (unités de soins de longue durée). (6) Les dépenses et recettes de l’établissement sont réparties en trois sections tarifaires correspondant aux trois composantes de la prise en charge gériatrique : - Le tarif hébergement qui couvre les dépenses hôtelières ; - Le tarif dépendance qui couvre les dépenses liées à la dépendance ; - Le tarif soins qui couvre les charges relatives aux dépenses de personnel soignant et aux soins médicaux et paramédicaux. (7) Plafonds financiers mensuels établis au 1er mars 2016. (8) L’équipe de la CNSA est composée de 114 ETP, sous la direction d’une directrice générale, d’une directrice adjointe et de plusieurs directeurs/directrices fonctionnels. (9) RSA : revenu de solidarité active. (10) Sources : www.cnsa.fr et www.drees.social-sante.gouv.fr. (11) Source : DREES – open data – calculs CESW.

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Dossier

Tableau comparatif des systèmes

Flandre

Intitulé du dispositif

Zorgverzekering (Assurance soins)

Date d’entrée en vigueur 1er octobre 2001 Champ d’application Région linguistique néerlandaise (obligatoire) Région bilingue de Bruxelles-Capitale (sur base volontaire) Bénéficiaires Age : pas de condition d’âge Résidence : résider en Flandre (le cas échéant à Bruxelles-Capitale) de manière ininterrompue durant les 5 dernières années ou être assujetti à la sécurité sociale dans un pays UE ou EEE depuis 5 ans. Dépendance : à prouver par une des attestations reconnues ou à défaut par une «indication» évaluant la perte d’autonomie. Autre : être affilié à une caisse d’assurance soins et y cotiser. Stage : stage d’attente de trois mois. A Bruxelles-Capitale, pour les habitants qui se sont affiliés tardivement, stage d’attente de 10 ans.

Evaluation de la dépendance

Pouvoir présenter une attestation de dépendance (soins à domicile) ou de séjour dans une institution (soins résidentiels) sur base d’une des échelles d’évaluation reconnues (BEL, KATZ, …). A défaut d’attestation, il est possible de faire établir la dépendance auprès d’un organe agréé, qui établira une «indication» sur base de l’échelle BEL.

Type de prestation/lien avec les revenus

Allocation financière forfaitaire de 130 € par mois, octroyée indépendamment des revenus.

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flamand, français et luxembourgeois France

Grand-Duché de Luxembourg

Allocation personnalisée d’autonomie

Assurance dépendance

1er janvier 2002 1er janvier 1999 Territoire national Territoire national

Age : 60 ans et plus Résidence : résider en France de manière stable et régulière (domicile, accueillant familial, établissement