New Frontier IV - Musée du Louvre

27 avr. 2015 - American Art et la Terra Foundation for American Art, .... Le Crystal Bridges Museum of American Art explore l'histoire de l'Amérique au.
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Dossier de presse Exposition-dossier Du 5 février au 27 avril 2015 Aile Denon, 1er étage, salle 32

New Frontier IV Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine.

Contact presse Marion Benaiteau [email protected] 01 40 20 67 10 / 06 88 42 52 62 1

New Frontier IV Communiqué de presse Exposition-dossier 5 février - 27 avril 2015 Aile Denon, 1er étage, salle 32

Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine Dernier épisode du partenariat New Frontier qui lie le musée du Louvre, le High Museum of Art, le Crystal Bridges Museum of American Art et la Terra Foundation for American Art, l’exposition « Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine » se penche sur l’essor de la nature morte aux Etats-Unis au XIXe siècle. À la suite des expositions consacrées au paysage, à la peinture de genre et au portrait, New Frontier IV permet à nouveau d’enrichir le dialogue autour de la peinture américaine. Rassemblant dix œuvres issues des collections des quatre institutions partenaires, cette dernière édition illustre, comme les précédentes, la façon dont les peintres américains, tels Raphaelle Peale, Martin Johnson Heade ou William Michael Harnett, ont adapté les modèles européens à leur époque et à leur pays, participant ainsi à l’émergence d’une voix nationale.

John Haberle, Small Change [Petite monnaie], 1887 Bentonville, Crystal Bridges Museum of American Art © Crystal Bridges Museum of American Art

Cette exposition-dossier s’inscrit dans le cadre d’une collaboration pluriannuelle entre le Crystal Bridges Museum of American Art, le High Museum of Art, Atlanta, et la Terra Foundation for American Art. Elle est rendue possible grâce à leur généreux soutien. Informations pratiques Horaires Tous les jours, sauf le mardi, de 9h à 17h30, les mercredi et vendredi jusqu’à 21h30. Tarifs Accès avec le billet d’entrée du musée : 12€ Accès libre pour les moins de 18 ans, les moins de 26 ans résidents de l’U.E., les enseignants titulaires du pass éducation, les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires des minima sociaux, les visiteurs handicapés et leur accompagnateur, les titulaires des cartes Amis du Louvre. Renseignements Tél. 01 40 20 53 17 - www.louvre.fr

Direction des Relations extérieures Anne-Laure Béatrix, directrice Adel Ziane, sous-directeur de la communication Sophie Grange, chef du service presse

En dépit d’une tradition vieille de plusieurs siècles en Europe, la nature morte émerge tardivement aux États-Unis. C’est au cours du XIXe siècle, grâce à de profondes mutations politiques, économiques et sociales, que le genre gagne en popularité. Un nouveau type de commanditaires apparaît, désireux de représenter leur fortune à travers certains objets symboliques. Raphaelle Peale, le premier, s’illustre par une production austère et efficace où les produits cultivés en terre d’Amérique se trouvent mis en valeur. La nature morte américaine s’inspire longtemps des codes stylistiques européens. Avec l’évolution du rapport au luxe, les compositions s’enrichissent et les sujets se diversifient. Après la guerre de Sécession cependant, la nature morte américaine revient à des sujets plus nationaux et le symbolisme intervient pour affirmer certaines valeurs morales spécifiques ou critiquer le matérialisme prégnant dans la société américaine à l’époque, comme dans Small Change de John Haberle. Présentée au Louvre à partir du 5 février 2015, l’exposition-dossier « New Frontier IV. Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine » rejoindra ensuite le Crystal Bridges Museum of American Art à Bentonville, Arkansas (16 mai - 14 septembre 2015) puis le High Museum of Art à Atlanta, Géorgie (26 septembre 2015 - 31 janvier 2016). Commissaires de l’exposition : Guillaume Faroult, conservateur en chef au département des Peintures du musée du Louvre et Stephanie Mayer Heydt, conservateur de l’Art américain sous le parrainage de Margaret et Terry Stent, High Museum of Art, Atlanta. Contact presse Marion Benaiteau [email protected] Tél. : 01 40 20 67 10 / 06 88 42 52 62 2

Raphaelle Peale, Corn and Cantaloupe [Maïs et cantaloup], vers 1813, Bentonville, Crystal Bridges Museum of American Art © Crystal Bridges Museum of American Art

L’émergence de la nature morte américaine Genre peu valorisé selon les hiérarchies académiques européennes, la nature morte a connu des débuts assez confidentiels aux EtatsUnis. Les peintres du Nouveau monde lui préfèrent le portrait ou le paysage, qui suscitent davantage l’intérêt des commanditaires, comme l’ont montré les précédentes expositions. Au tout début du XIXe siècle, le développement de l’économie américaine permet l’émergence d’une nouvelle catégorie d’acheteurs, amateurs de représentations d’objets évoquant leur vie quotidienne et leur succès. Vers 1813, Raphaelle Peale peint Corn and Cantaloupe : empruntant à l’Europe les codes traditionnels de la nature morte, il les adapte à son public pour partager sa vision de l’abondance américaine. Melon cantaloup, patate douce et maïs évoquent les grandes plantations, en particulier celle du premier propriétaire du tableau, le Dr Benjamin Lee, dans le Maryland. Le naturalisme du milieu du siècle Si la nature morte est d’abord accueillie avec hésitation, elle s’épanouit pleinement vers le milieu du siècle. Les sujets deviennent plus luxueux : aux fruits et légumes viennent s’ajouter fleurs et gibier, reflétant l’évolution des goûts liée à l’accroissement de la richesse et de la production industrielle. Avec l’émergence de collectionneurs fortunés et curieux des natures mortes hollandaises du siècle d’or, des artistes comme Martin Johnson Heade (1819-1904) se font une spécialité de peintures particulièrement élaborées au symbolisme subtil. Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell, peint en 1870, est un habile pastiche de la peinture nordique ou des vases de fleurs d’Abraham Mignon, dont une œuvre est présentée dans l’exposition. La virtuosité des drapés, la délicatesse des fleurs évoquent un contexte de séduction qui inaugure sans doute un nouveau rapport au luxe et à la sociabilité dans la société américaine.

Martin Johnson Heade, Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell [Nature morte aux fleurs de pommier dans une coquille de nautile], huile sur toile, 1870, Daniel J. Terra, Art Acquisition Endowment Fund, 1999.7 © Terra Foundation for American Art.

William Michael Harnett, Still Life with Bust of Dante [Nature morte au buste de Dante], 1883, High Museum of Art, 64.27 © High Museum of Art

Catalogue de l’exposition New Frontier IV. Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine, sous la direction de Stephanie Mayer Heydt, Editions Marquand. 68 p., environ 10 €. Également disponible en anglais.

Trompe-l’œil et symbole La guerre de Sécession provoque une rupture. Les peintres de natures mortes, tel William Harnett (1848-1892), de nouveau focalisés sur des objets spécifiquement américains, se font une spécialité dans le trompe-l’œil aux résonnances volontiers symboliques parfois subversives. Véritable spécificité de la nature morte américaine de la seconde moitié du XIXe siècle, l’usage du trompe-l'œil fait écho à l’émergence d’un goût populaire pour les peintures dites de « bric-à-brac », les collections éclectiques et les objets exotiques. S’inscrivant dans la longue tradition de l’illusionnisme visuel, le trompe-l'œil est aussi une mise en cause des valeurs matérialistes de la société et de la corruption de la classe politique. Ainsi, Small Change de John Haberle met en exergue le rapport à l’argent dans l’Amérique au plus fort de son essor économique : désacralisée, la monnaie sert à maintenir un petit autoportrait qui semble placé là comme un défi aux autorités. Le spectateur est invité à être le complice de l’illusion, mais aussi, guidé par l’artiste, à en déchiffrer le code.

A l’auditorium du Louvre Présentation de l’exposition mercredi 4 février 2015 à 12h30 par Stephanie Mayer Heydt, conservateur au High Museum of Art, Atlanta. 3

Histoire de la collaboration entre les partenaires En 2003, la Terra Foundation a soutenu une conférence majeure sur l'art américain au Louvre intitulée « Art américain : identités d’une nation ». En 2006, le Louvre et la Terra Foundation ont collaboré sur deux projets importants : ils ont présenté la première exposition d'art américain au Louvre, dans laquelle le monumental Gallery of the Louvre (1831-33) de Samuel F.B. Morse provenant de la collection de la Terra Foundation était présenté dans le Salon Carré. Ils ont également créé avec la Henry Luce Foundation la base de données Lafayette, qui constitue un inventaire complet des œuvres d'art américain dans les collections françaises. (http://musee.louvre.fr/bases/lafayette/?lng=1) De 2006 à 2009, le Louvre et le High ont présenté conjointement une série d’expositions thématiques dans le cadre du projet « Louvre-Atlanta » ainsi que des publications et des travaux scientifiques. La Terra Foundation a également prêté son Gallery of the Louvre dans le cadre de la collaboration Louvre-High ; le tableau a été présenté au High Museum au cours de l'exposition « Kings as Collectors » en 2006. Depuis 2012, les quatre institutions présentent chaque année une exposition dans le cadre du partenariat « New Frontier : l’art américain entre au Louvre », en vue d’initier le public à une meilleure connaissance de l’art des États-Unis à ses origines (de la fin du XVIIIe siècle jusque dans la seconde moitié du siècle suivant).

Les partenaires Crystal Bridges Museum of American Art Le Crystal Bridges Museum of American Art explore l'histoire de l'Amérique au travers d’une collection d'œuvres illustrant le patrimoine américain et sa richesse artistique. Fondé en 2005 par la Walton Family Foundation, le musée a ouvert le 11 novembre 2011. Il tient son nom d'une source voisine et du pont incorporé par l'architecte Moshe Safdie lors de la conception du bâtiment. Une série d’édifices rassemblés autour de deux bassins alimentés par cette source abrite les collections permanentes et les expositions, les espaces de réunions et d'étude ainsi qu’un vaste hall d’accueil serti de verre. La communication harmonieuse entre l'art et la nature s’opère grâce au bâtiment luimême et aux sentiers jalonnés de sculptures qui relient le parc de plus de 48 hectares au centre-ville de Bentonville, Arkansas. La collection permanente réunit cinq siècles de peintures, sculptures et dessins américains de l'époque coloniale à nos jours. www.crystalbridges.org

High Museum of Art Le High Museum of Art (Atlanta, Géorgie) est le principal musée du Sud-Est des Etats-Unis. Avec une collection permanente de plus de 14 000 œuvres, le High abrite une vaste collection d'art américain et d’art décoratif des XIX e et XXe siècles ; un fonds important de peinture européenne ; une collection d'art afro-américain en pleine expansion et un ensemble prometteur d'art moderne et contemporain, de photographies, d’art populaire et d'art africain. Le High a également pour vocation de soutenir la création et de collectionner les œuvres d’artistes du Sud. www.high.org

Terra Foundation for American Art Fondée en 1978, la Terra Foundation for American Art a pour mission d’encourager l’étude, la compréhension et l'appréciation des arts visuels des États-Unis. Avec une collection exceptionnelle d'art américain de l'époque coloniale à 1945, un vaste programme d'aide financière et un personnel spécialisé basé à Chicago et à Paris, c'est l'une des plus importantes fondations d'art américain. Elle consacre environ 12 millions de dollars chaque année pour soutenir les expositions, les projets et la recherche sur l’art dans le monde entier. www.terraamericanart.org 4

Préface du catalogue Comme les trois précédentes expositions de la série de « New Frontier », « Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine » se penche sur l’émergence d’une voix nationale dans l’art américain. Au cours de ce partenariat de plusieurs années, notre collaboration aura permis d’organiser quatre expositions consacrées à l’évolution de genres qui ont occupé une place fondamentale dans le panorama artistique des États-Unis : le paysage, les scènes de genre, le portrait et la nature morte. Cette série est l’aboutissement d’une coopération mûrement pensée entre conservateurs américains et français, qui ont réuni des œuvres de premier plan provenant de nos quatre fonds institutionnels à Atlanta, Bentonville, Chicago et Paris. Il n’est guère surprenant que cette mise en commun de nos richesses ait suscité de nouvelles rencontres avec l’art américain des siècles passés. Cette dernière édition de la série se concentre sur l’un des genres les plus accessibles et pourtant l’un des plus oubliés, la nature morte, capable de rendre hommage aux objets de la vie quotidienne. Dans leur simplicité même, ces objets peuvent en effet être investis de significations propres à une culture ou, au contraire, de portée universelle. Depuis le XVIIe siècle, l’Europe élaborait un langage visuel commun autour de la pratique de la nature morte. Dans l’Amérique du début du XIXe siècle, les artistes adaptent les formats traditionnels du genre à leurs nouvelles conditions de vie. Cette exposition en donne des exemples, depuis les arrangements austères de l’un des premiers praticiens de la nature morte jusqu’aux inventions en trompe-l’œil des peintres de l’Âge d’or, qui s’appuient sur les solides précédents des traditions hollandaise et française. Dans son essai, Stephanie Mayer Heydt décrit les points de rencontre entre la nature morte américaine et la nature morte européenne, mais aussi le moment où elle prend son indépendance. Avec ses collègues, Peter John Brownlee, Guillaume Faroult et Manuela Well-Off-Man, elle replace ces œuvres d’une étonnante diversité dans leur contexte historique et culturel. Certes, cette exposition conclut la série « New Frontier », mais celle-ci a suscité un tel intérêt pour les échanges transculturels qu’il y a lieu de penser que ces rencontres auront des suites.

Rod Bigelow, directeur exécutif Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville Elizabeth Glassmann, présidente et directrice générale Terra Foundation for American Art, Chicago et Paris Jean-Luc Martinez, président-directeur Musée du Louvre, Paris Michael E. Shapiro, directeur sous le parrainage de Nancy et Holcombe T. Green, Jr. High Museum of Art, Atlanta

Ce texte est extrait de la publication New Frontier. Fastes et fragments. A l’origine de la nature morte américaine, sous la direction de Stephanie Mayer Heydt, Editions Marquand.

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Les œuvres exposées Abraham Mignon (Francfort, 1640 – Utrecht, 1679) Fleurs dans une carafe de cristal placée sur un piédestal en pierre, avec une libellule Huile sur toile, H. 88 ; l. 68 cm. Signé en bas à gauche : A. Mignon Fe Musée du Louvre, Paris Jean-Siméon Chardin (Paris, 1699 – Paris, 1779) Pipes et vase à boire, dit aussi La Tabagie Vers 1737 Huile sur toile, H. 32 ; l. 42 cm Musée du Louvre, Paris Raphaelle Peale (Américain, 1774–1825) Corn and Cantaloupe [Maïs et cantaloup] Vers 1813 Huile sur bois, H. 36,8 ; l. 49,5 cm. Avec le cadre : H. 51,8 ; l. 64,5 ; ep. 5,4 cm Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville Joseph Biays Ord (Américain, 1805 – 1865) Still Life with Shells [Nature morte aux coquillages] Vers 1840 Huile sur toile, H. 46 ; l. 61 cm High Museum of Art, Atlanta

William Michael Harnett (Américain, 1848–1892) Still Life with Bust of Dante [Nature morte au buste de Dante] 1883 Huile sur bois, H. 26 ; l. 35,1 cm High Museum of Art, Atlanta De Scott Evans (Américain, 1847 – 1898) Daisies [Pâquerettes] Vers 1885 Huile sur toile, H. 50,2 x 45,4 x 4,4 cm encadré Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville John Haberle (Américain, 1845 – 1933) Small Change [Petite monnaie] 1887 Huile sur toile, H. 23,5 ; l. 18,4 cm Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville George Cope (Américain, 1855 – 1929) A Pair of Spectacles [Paire de lunettes] 1897 Huile sur panneau préparé, H. 50,2; l. 45,1 cm encadré High Museum of Art, Atlanta

William Sidney Mount (Américain, 1807–1868) Fruit Piece : Apples on Tin Cups [Pommes sur des pichets en étain] 1864 Huile sur carton enduit, H. 16,5 ; l. 23 cm. Avec le cadre : H. 32,7 ; l. 38,9 cm Terra Foundation for American Art Martin Johnson Heade (Américain, 1819 – 1904) Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell [Nature morte aux fleurs de pommier dans une coquille de nautile] 1870 Huile sur toile, H. 53,3 ; l. 43,2 cm. Avec le cadre : H. 84,1 ; l. 73,7 ; ep. 10,2 cm Terra Foundation for American Art

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Regards sur quelques œuvres Raphaelle Peale (1774–1825) Corn and Cantaloupe [Maïs et cantaloup] Vers 1813, huile sur bois Fils aîné du peintre américain Charles Willson Peale, Raphaelle Peale commence sa carrière comme portraitiste, mais il s’oriente bientôt vers la nature morte […]. À l’instar de son oncle James Peale, Raphaelle va chercher à revaloriser la place de la nature morte dans la hiérarchie artistique traditionnelle, à développer le genre en Amérique et à faire de Philadelphie le centre de sa pratique. S’appuyant sur ses connaissances en horticulture et sur sa capacité à dépeindre avec précision les spécimens botaniques, Peale rend ici hommage aux récoltes de l’été. Au centre de Corn and Cantaloupe, la diagonale que dessine l’épi de maïs oriente le regard en travers de l’image et crée un lien entre les divers éléments […]. La Raphaelle Peale, Corn and Cantaloupe [Maïs et cantaloup], vers 1813, Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville © Crystal Bridges Museum of composition alimentaire s’enrichit avec la surface American Art. Photography by Dwight Primiano succulente d’un melon fraîchement coupé. Cette variété de melon brodé, qui porte le nom de « Anne Arundel », était cultivée dans la région d’Annapolis, lieu de naissance de l’artiste dans le Maryland. Peale en dépeint avec précision la chair appétissante et invite le spectateur à se laisser tenter. Contrastant avec ce fruit sensuel par la taille, la texture et la couleur, une patate douce et un concombre complètent l’alignement de plantes cultivées […]. […] La présence ici d’une patate douce et de maïs a peut-être un lien avec l’histoire de cette œuvre. Son premier propriétaire, en effet, le Dr Benjamin Lee, était médecin et propriétaire de la plantation de Oak Hill, dans le comté de Prince George, dans le Maryland, et il est possible que Peale lui ait donné ce tableau en paiement d’un traitement médical lors d’un séjour dans le Maryland, car ces deux légumes de base étaient spécifiquement cultivés dans la plantation du médecin. […] Considéré comme le premier « naturemortiste » professionnel du pays, Peale a lancé une tradition américaine de la nature morte qui sera poursuivie par des peintres comme William Michael Harnett et John Peto. Aaron W. Jones, Responsable du Centre d’interprétation, Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville

William Sidney Mount (1807–1868) Fruit Piece : Apples on Tin Cups [Pommes sur des pichets en étain] 1864, huile sur carton enduit Dans cette œuvre de dimensions modestes, William Sidney Mount présente un arrangement faussement simple de deux pommes typiques posées sur un « piédestal » formé par deux pichets en étain retournés et richement patinés. […] Au milieu du XIXe siècle, la pomme était le fruit le plus cultivé aux États-Unis et l’un des aliments de base des Américains. Parmi les nombreuses associations liées à la pomme, la plus forte pour Mount et pour son public a été, durant la guerre civile qui a divisé le pays, sa capacité à incarner le sentiment patriotique. La pomme était donc à la fois un symbole et une source de

William Sidney Mount, Fruit Piece: Apples on Tin Cups [Pommes sur des pichets en étain], 1864, huile sur carton enduit, Terra Foundation for American Art, Daniel J. Terra Collection, 1999.100 © Terra Foundation for American Art. 7

nourriture, comme l’illustre la coutume chez les enfants du Nord d’offrir des pommes aux soldats de l’Union […]. Mount était déjà connu comme peintre de scènes de genre quand il écrit dans son journal, en 1862, que la nature morte est « une façon très ingénieuse de raconter une histoire ». Les natures mortes, en effet, véhiculent une signification par le symbolisme des objets représentés et par les évocations que crée leur juxtaposition. […] Durant la guerre civile, cette capacité de la nature morte à raconter une histoire lui a permis d’exprimer une position personnelle sur le conflit sans s’aliéner un public saturé d’images partisanes et de récits de guerre horribles. Dans Fruit Piece : Apples on Tin Cups, la peau rouge et luisante de la pomme de devant porte l’empreinte d’un ongle, référence subtile à un pays meurtri par la guerre. Les surfaces ternies et usées des pichets qui servent de support aux fruits évoquent la fonction utilitaire de ces ustensiles militaires, mais aussi ce que subissent les soldats qui s’en servent et qui, peut-être, ne rentreront pas chez eux. Riche de tout un éventail de significations symboliques allant de l’idée de nourriture à celle d’absence, Fruit Piece : Apples on Tin Cups exprime sereinement la conviction de Mount, à savoir que la nature morte est capable de transmettre un sens d’une manière poignante et néanmoins acceptable par une nation confrontée à une guerre civile. Eleanore Neumann, Associée de la Collection, Terra Foundation for American Art, Chicago

Martin Johnson Heade (1819 – 1904) Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell [Nature morte aux fleurs de pommier dans une coquille de nautile] 1870, huile sur toile Peintre itinérant de portraits, de paysages et de sujets marins, Martin Johnson Heade commence à s’intéresser aux natures mortes florales au début des années 1860. Ses premiers essais dans le genre, relativement simples, se réduisent à de petits arrangements de fleurs posés sur une table ou disposés dans des vases et autres contenants. Cependant, son intérêt pour la flore va se renforcer à la suite de deux voyages qu’il fait en Amérique du Sud […]. Développant ses talents, il va devenir « un illustrateur précis et élégant de sujets d’histoire naturelle », peignant les délicates images de colibris, d’orchidées et de fleurs de la Passion qui composent sa célèbre série des Gems of Brazil (1864, Crystal Bridges Museum of American Art). Quand Heade peint Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell, en 1870, ses compositions de table ont évolué en complexité et en Martin Johnson Heade, Still Life with Apple raffinement : désormais, elles comportent tout un éventail de variétés Blossoms in a Nautilus Shell [Nature morte aux de pommier dans une coquille de nautile], florales et une constellation de plus en plus riche d’objets naturels ou fleurs huile sur toile, 1870, Daniel J. Terra, Art Acquisition créés par l’homme [...]. Bien que surtout connu peut-être pour ses Endowment Fund, 1999.7 © Terra Foundation for images de la flore tropicale, Heade affectionnait les roses mais aussi American Art. les fleurs de pommier, dont il a peint quelque vingt-cinq interprétations en plus de vingt ans. Rendues avec la précision des illustrations botaniques, ces fleurs de pommier parlent aussi le langage des fleurs, faisant allusion à la « promesse d’une abondance de fruits délicieux » mais aussi à la tentation d’Ève […]. Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell réunit la beauté de la nature et la beauté matérielle des biens de ce monde. Les fleurs, bien qu’ayant des connotations symboliques et qu’étant placées au centre de la composition sur fond d’un mur recouvert d’un treillage, ne sont pas seules à être porteuses de significations. On remarquera aussi la coquille de nautile – référence à Vénus, la fille de Neptune –, le coffret à bijoux partiellement recouvert par un lourd rideau en velours, le chapelet en perles terminé par une croix qui retombe sur le bord de la coupe ornementée, l’éventail légèrement ouvert, orné d’un gland qui pend et occupe une position précaire près du bord arrondi de la table, et, enfin, le gant à festons, négligemment repoussé sur le côté. À une époque où la production est de plus en plus mécanisée et la consommation de plus en plus ostentatoire, ces objets luxueux occupent une grande place dans la signification codée du tableau et donnent à son espace illusionniste une dimension très nettement féminine. Peter John Brownlee, Conservateur adjoint, Terra Foundation for American Art, Chicago

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John Haberle (1845 – 1933) Small Change [Petite monnaie] 1887, huile sur toile John Haberle était un maître du trompe-l'œil, notamment lorsqu’il s’agissait de représenter la monnaie américaine. Ses images étaient si convaincantes que les services secrets l’ont obligé à mettre fin à ces imitations et qu’un journaliste a été jusqu’à l’accuser de contrefaçon intentionnelle. Cette attention qu’on lui accordait lui donna envie, à partir de 1887 environ, de se spécialiser dans la peinture de billets de banque et de pièces de monnaie. […] Dans Small Change, on distingue, sur fond d’une planche en bois foncé, une pièce en cuivre de un cent portant un symbole de la justice, une pièce en argent de trois cents, un billet de dix cents avec le portrait du secrétaire au Trésor William M. Meredith, et un billet déchiré de vingt-cinq cents à l’effigie de George Washington, rapiécé à l’aide d’un timbre-poste […]. Dans le titre de cette toile, Haberle veut opposer la « petite monnaie » (et le peu qu’elle représente) à l’immensité des réserves – qui faisait alors polémique – entreposées dans les chambres fortes du gouvernement des États-Unis. En anglais, « change » permet également un jeu de mots avec les changements intervenus au cours de l’histoire américaine. L’argent représenté par Haberle couvre une période allant de 1785 à 1876, c’est-à-dire englobant la fin de John Haberle, Small Change [Petite monnaie], 1887, Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville la période révolutionnaire, la dépression qui a suivi la panique de © Crystal Bridges Museum of American Art. 1873, et le début de l’Âge doré. […] De plus, l’aspect et l’état des Photography by Amon Carter Museum of American Art billets sont marqués par le temps et l’usage. De ce point de vue, le papier-monnaie râpé et froissé de Haberle se situe dans la tradition des « vanités » des maîtres baroques hollandais et flamands, qui rappellent le caractère éphémère des choses matérielles et la brièveté de la vie. Haberle a soigneusement modelé son sujet, imitant de façon convaincante, par exemple, le relief des bords déchirés et écornés des billets. Ayant une formation de graveur, il a sculpté dans la peinture noire les traits fins de leurs motifs, reproduisant avec précision les surfaces délicatement incisées des plaques de métal qui ont servi à les imprimer. Dans ses compositions, il inclut souvent des allusions personnelles humoristiques, comme ici dans la signature « gravée » au moyen d’une figure en bâtons qui est une caricature de lui-même. Il « signe » également cette œuvre en y ajoutant son portrait en ferrotypie. Ces deux « signatures » personnalisées expriment la fierté de l’artiste et ajoutent à la complexité de cette œuvre. Manuela Well-Off-Man, Conservatrice, Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville

Ces textes sont extraits de la publication New Frontier. Fastes et fragments. A l’origine de la nature morte américaine, sous la direction de Stephanie Mayer Heydt, Editions Marquand.

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Visuels de l’exposition New Frontier IV: Fastes et fragments. Aux origines de la nature morte américaine Du 5 février au 27 avril 2015 - Aile Denon, 1er étage, salle 32 Les visuels sont libres de droit avant et pendant l’exposition. Ils peuvent être utilisés uniquement dans le cadre de la promotion de l’exposition. Merci de mentionner le crédit photographique et de nous envoyer l’article une fois publié : Musée du Louvre, Direction des relations extérieures, Sous-direction Communication, 75058 Paris cedex 01 ou [email protected].

1. John Haberle, Small Change [Petite monnaie], 1887, huile sur toile, Bentonville, Crystal Bridges Museum of American Art © Crystal Bridges Museum of American Art Photography by Amon Carter Museum of American Art

2. Raphaelle Peale, Corn and Cantaloupe [Maïs et cantaloup], vers 1813, Bentonville, Crystal Bridges Museum of American Art © Crystal Bridges Museum of American Art. Photography by Dwight Primiano

3. William Sidney Mount, Fruit Piece: Apples on Tin Cups [Pommes sur des pichets en étain], 1864, huile sur carton enduit, Terra Foundation for American Art, Daniel J. Terra Collection, 1999.100 © Terra Foundation for American Art. 10

4. Joseph Biays Ord, Still Life with Shells [Nature morte aux coquillages], vers 1840, huile sur toile, High Museum of Art, 2013.8 © High Museum of Art

5. Martin Johnson Heade, Still Life with Apple Blossoms in a Nautilus Shell [Nature morte aux fleurs de pommier dans une coquille de nautile], huile sur toile, Terra Foundation for American Art, Daniel J. Terra, Art Acquisition Endowment Fund, 1999.7 © Terra Foundation for American Art.

6. William Michael Harnett, Still Life with Bust of Dante [Nature morte au buste de Dante], 1883, huile sur bois, High Museum of Art, 64.27 © High Museum of Art. 11

7. De Scott Evans, Daisies [Pâquerettes], vers 1885, huile sur toile, Bentonville, Crystal Bridges Museum of American Art © Crystal Bridges Museum of American Art. Photo Dwight Primiano

8. George Cope, A Pair of Spectacles [Paire de lunettes], 1897, huile sur panneau préparé, High Museum of Art, 2005.216 © High Museum of Art. Photo Mike Jensen

10. Jean-Siméon Chardin, Pipes et vase à boire, dit aussi La Tabagie, vers 1737, huile sur toile, Paris, musée du Louvre © Musée du Louvre, dist. RMN / Angèle Dequier 9. Abraham Mignon, Fleurs dans une carafe de cristal placée sur un piédestal en pierre, avec une libellule, huile sur toile, Paris, musée du Louvre © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Franck Raux 12