L'Alternance dans le supérieur - CESI Alternance

Pionnier, pour avoir dès 1989 lancé en France la première formation d'ingé- ..... Niveau I et II : diplômes des écoles d'ingénieurs, de commerce, de gestion et des universités. Niveau III : BTS ...... ronnements capacitants pour faciliter les pratiques des Responsables ..... association, Cesi Alumni, qui bénéficie d'une plate-.
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L’Alternance dans le supérieur Un défi, une ambition

LIVRE BLANC 2014

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ÉDITO

Le Cesi, groupe d’enseignement supérieur et de formation professionnelle, se mobilise depuis plus de 25 ans en faveur de l’alternance dans le supérieur. Pionnier, pour avoir dès 1989 lancé en France la première formation d’ingénieurs par l’apprentissage, en partenariat avec la branche de la métallurgie, le Cesi n’a eu de cesse, depuis, de favoriser le développement de l’alternance dans ses parcours de formation, convaincu, dès l’origine, de l’efficacité de ce dispositif en tant qu’outil d’insertion professionnelle, d’accès à un diplôme, à un métier et, plus largement, à la promotion sociale. Devenu acteur majeur de l’alternance dans le supérieur, avec plus de 3 000 diplômés sortant chaque année après un cursus en apprentissage et en contrat de professionnalisation, le Cesi bénéficie d’une expertise et d’une culture de l’alternance qu’il met au service de sa pédagogie et de ses projets. La dernière-née de ses écoles, l’École supérieure des métiers, 100 % alternance, propose plus de 24 parcours métiers, à destination de jeunes titulaires d’un bac à un bac+4, dans des filières d’avenir qui recrutent (Informatique et numérique, Ressources humaines, BTP, Industrie et services). Au travers de ce livre blanc, le Cesi se veut également militant en faisant partager au plus grand nombre ses convictions et espère contribuer, à sa façon, au débat public. Car, si l’alternance est avancée par beaucoup, à juste titre, comme une réponse à des enjeux aussi majeurs que la lutte contre le chômage des jeunes, la compétitivité des entreprises, le transfert des compétences et des

savoir-faire et la professionnalisation, des tensions demeurent réelles, tensions qui pourraient, sinon remettre en cause ce dispositif d’excellence, du moins freiner son essor, notamment dans le supérieur. Ce livre blanc donne donc la parole à tous ceux qui, par leur métier, leur action, contribuent à la promotion de l’alternance. Interpellés sur des questions aussi essentielles que la pédagogie, l’employabilité, la construction de l’identité professionnelle, la politique publique ou de branche, le financement, le tutorat ou les facteurs clés d’intégration dans l’entreprise, leurs témoignages éclaireront les lecteurs sur les leviers de développement de l’alternance de demain. Enfin, ce livre blanc est également l’occasion de dresser, pour la première fois sans doute de manière aussi exhaustive en France, un panorama de l’alternance, depuis son origine jusqu’à aujourd’hui, avec des données, repères et chiffres clés à même d’alimenter nos réflexions. C’est aussi pour le Cesi l’occasion de faire entendre sa voix au travers d’une série de recommandations, afin de permettre à la formation en alternance de poursuivre son développement, en particulier dans l’enseignement supérieur. Vous en souhaitant bonne lecture, VINCENT COHAS, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPE CESI SOPHIE CRESPY, Directeur Cesi Entreprises et Cesi Alternance

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LIVRE BLANC

SOMMAIRE

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SOMMAIRE

Chapitre 1 - REPères L’alternance, un processus historique À l’origine : le développement de l’apprentissage

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L’ouverture au supérieur

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Une voie de formation, Deux dispositifs

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Quelle alternance aujourd’hui ? 20 Une décennie de réformes

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L’alternance en chiffres : une réalité bien ancrée

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Chapitre 2 - Cesi L’alternance au Cesi

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Une légitimité historique

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La culture de l’alternance au Cesi, une approche pragmatique

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Un processus d’accompagnement vers la réussite

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Avant la formation, une rencontre décisive

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Pendant la formation

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La remise des diplômes

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Une nouvelle voie s’ouvre

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« Cesi Alternance : l’École Supérieure des Métiers »

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Des formations débouchant sur des métiers d’avenir

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CONCLUSION Des expertises pour construire l’avenir 55 ANNEXES INTERVIEWS 64

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LIVRE BLANC La recherche de compétences à des niveaux Bac+4 et plus va se développer d’ici 2016. Nous en sommes à environ

Repères

160 000 recrutements par an à ce niveau de qualification. Jean-Marie Marx, directeur général de l’Apec

L’alternance, un processus historique À l’origine : le développement de l’apprentissage

Longtemps décriée, présentée comme une voie de relégation scolaire pour les élèves rencontrant des difficultés dans leur parcours d’apprentissage « classique », l’alternance s’est progressivement affirmée au cours des trois dernières décennies comme une voie de formation aussi « noble » que celles proposées dans les cursus non alternés. Une enquête réalisée début 2014 par la CCI Paris Île-de-France montre en effet que l’image globale de l’apprentissage est désormais très positive. Les jeunes et les parents partagent cette appréciation dans 86 % des cas, les entreprises

à 95 %. Depuis dix ans, la formation en alternance est ainsi plébiscitée par les dirigeants politiques, quelle que soit leur appartenance. Cette méthode, mêlant apprentissage formel et accumulation de connaissances in vivo en entreprise, permet de faciliter l’insertion professionnelle des jeunes, filles ou garçons. Donc, une solution efficace à soutenir alors que le chômage tutoie des niveaux historiques et que celui des moins de 25 ans approche du double de la moyenne nationale. Mais l’alternance est aussi un chemin aux pentes escarpées qu’il ne faut pas négliger : abandons en cours de formation qui restent nombreux dans certaines filières ; difficultés pour des jeunes en devenir à allier parcours d’enseignement et entrée dans la vie d’adulte au travail ; éloignement parfois de l’établissement de formation, de l’employeur, du domicile parental… Des contraintes connues, mais qui méritent d’être soulevées, encore et toujours. La formation en alternance, dans sa configuration actuelle, est le fruit d’un long processus législatif qui tire son origine dans la mise en place d’une assise réglementaire de l’apprentissage. Le système des corporations, aboli par la loi Le Chapelier de 1791, est d’abord chargé de la formation – strictement professionnelle – des apprentis qui acquièrent un savoir-faire. Il faut attendre la loi du 22 février 1851 sur l’apprentissage pour voir émerger une première tentative de

formalisation du dispositif. Le contrat d’apprentissage est né. « Le contrat d’apprentissage est celui par lequel un fabricant, un chef d’atelier ou un ouvrier s’oblige à enseigner la pratique de sa profession à une autre personne qui s’oblige, en retour, à travailler pour lui ; le tout à des conditions et pendant un temps convenu » (article 1er de la loi du 22 février 1851 relative aux contrats d’apprentissage des enfants dans les usines, manufactures et ateliers). Désormais régi par le code civil, le contrat d’apprentissage reste un acte engageant l’employeur et son apprenti, et qui peut d’ailleurs être oral. La loi Astier du 25 juillet 1919 marque l’intervention de l’État dans cette relation contractuelle. Ce texte sur l’« organisation de l’enseignement technique, industriel et commercial » met en place une obligation pour les apprentis de moins de 18 ans de suivre des cours professionnels gratuits. L’enseignement technique gagne ainsi ses lettres de noblesse avec la reconnaissance par l’État, au même titre que l’enseignement général, d’une « étude théorique et pratique des sciences et des arts ou métiers en vue de l’industrie ou du commerce ». La loi Astier instaure également le certificat de capacité professionnelle (devenu certificat d’aptitude professionnelle ou CAP), qui sanctionne l’enseignement reçu et lui confère ainsi une valeur officielle.

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Repères

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Évolution des effectifs d’apprentis

Effectifs

En 1925, le système de financement de l’apprentissage tel que voulu par la loi Astier est mis en place avec une taxe dédiée. La même année sont créées les chambres de métiers, chargées d’organiser et de contrôler la formation des apprentis. La loi de finances du 13 juillet 1925 institue la taxe d’apprentissage, impôt sur les entreprises pour financer les premières formations technologiques et professionnelles. L’État intervient ainsi sur les conditions économiques de l’apprentissage. Un texte fondateur qui s’applique encore aujourd’hui et continue de donner lieu à débat sur les modalités d’affectation de la taxe aux établissements de formation potentiellement bénéficiaires. De fait, le périmètre des formations éligibles à ce financement n’a pratiquement pas évolué depuis, et concerne aussi bien les établissements d’enseignement public que privé (écoles d’ingénieurs,

écoles de commerce, lycées professionnels et techniques, centres de formation d’apprentis...). La liste des formations, par établissement ou par organisme, pouvant recevoir des fonds en provenance de la taxe d’apprentissage est publiée chaque année par les préfectures. L’apprentissage trouvera sa première base législative solide avec la loi du 20 mars 1928 qui impose une forme écrite au contrat d’apprentissage, mais ne fixe pas de manière rigide les conditions de durée ou de rémunération. Ce texte va plus loin que le cadre fixé par la loi de 1851 en préférant la « formation professionnelle méthodique et complète » à l’enseignement d’un métier. La loi oblige l’apprenti à se présenter aux épreuves du CAP.

La taxe d’apprentissage, en bref En 2014, redevable sur l’exercice comptable, la taxe d’apprentissage représente 0,5 % de la masse salariale brute des entreprises, et 0,26 % dans le Bas et Haut-Rhin ainsi qu’en Moselle. La taxe comprend : • Une part obligatoire correspondant à 57 % du produit total de la taxe, le « quota », qui finance exclusivement les établissements délivrant des formations en apprentissage. Les CFA en perçoivent 35 %, le Trésor public 22 % pour un fonds de péréquation destiné au « financement national du développement et de la

modernisation de l’apprentissage » voté chaque année en loi de finances dans le cadre d’un compte d’affectation spéciale, le CAS-FNDMA. • Une part soumise à exonération, de 43 %, le « hors quota » ou « barème », qui peut être attribuée, selon des critères liés aux niveaux de qualification, aux établissements délivrant des formations professionnelles et technologiques telles que définies par la loi de finances de 1925, y compris des CFA (certains collèges, lycées, universités, écoles supérieures…).

500 000 Niveau I et II : diplômes des écoles d’ingénieurs, de commerce, de gestion et des universités

400 000

Niveau III : BTS Niveau IV : Bac et brevet professionnels Niveau V : BEP

300 000 200 000

Niveau V : CAP, CAP agricole, mention complémentaire

100 000 0

1971

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2001

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Champ : France. Sources : Depp ; ministère de l’Agriculture, bilans des remontées d’enquête sur les apprentis.

Alors que la scolarité obligatoire est prolongée de 14 à 16 ans par la réforme Berthoin de 1959, les centres d’apprentissage, dont le statut avait été reconnu par la loi du 21 février 1949, se voient transformés en « collèges d’enseignement technique ». Finalement, les centres de formation d’apprentis (CFA) font leur apparition avec la circulaire du ministère de l’Éducation nationale du 16 mai 1961 pour « favoriser la formation professionnelle des jeunes gens qui ne peuvent trouver place dans des établissements d’enseignement ». Ces CFA dispensent un enseignement « qui respecte les exigences professionnelles et la nécessité d’une formation théorique étendue », en vue d’une augmentation de la qualification des jeunes ciblés. 1971 : construction du système de formation professionnelle moderne

Il faudra attendre la loi Guichard du 16 juillet 1971 pour que le contrat d’apprentissage soit

formellement encadré juridiquement avec, pour la première fois, la reconnaissance d’une formation professionnelle accompagnée d’un contrat de travail. L’apprentissage est défini comme « une forme d’éducation », les CFA fournissant « une formation générale associée à une formation technologique, théorique et pratique qui doit compléter la formation reçue dans l’entreprise ». Les CFA sont ainsi « soumis au contrôle technique, pédagogique et financier de l’État ». Le 16 juillet 1971 sont également votées une loi « sur la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles », une loi d’orientation « sur l’enseignement technologique », ainsi qu’une loi « portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l’éducation permanente ». Cette dernière structure la « formation professionnelle permanente » selon deux axes : la formation initiale et les « formations ultérieures destinées aux adultes et aux jeunes déjà engagés dans la vie active ou qui s’y engagent », qui

Repères

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dans tous les cas, l’alternance est un premier pied à l’étrier pour ensuite progresser professionnellement ; c’est une première connaissance valorisable de l’entreprise. L’expérience est un plus indéniable ! Yves Hinnekint, directeur général d’Opcalia

« constituent la formation professionnelle continue ». Ces textes s’inscrivent dans la continuité d’un accord interprofessionnel signé le 9 juillet 1970, premier du genre sur « la formation et le perfectionnement professionnels ». Toutefois, malgré la reconnaissance apportée à l’apprentissage par le législateur, le nombre d’apprentis évolue faiblement durant les années 1970, 1974 marquant le niveau le plus bas avec 160 000 contrats signés.

Précurseur des dispositifs récents de formation professionnelle en alternance, le CEF est notamment décrit dans les années 1980 par le ministère du Travail comme une tentative de répondre « aux problèmes d’inadéquation des formations scolaires à la nature des emplois offerts » et comme « un moyen souple et simple pour les entreprises de mettre en œuvre leur propre système de formation et d’adaptation de la main-d’œuvre juvénile » 1.

Dans le contexte de la crise économique découlant du choc pétrolier de 1973 apparaît un premier dispositif alternatif – certains disaient alors « concurrent ». Un contrat de travail dit « emploi-formation » (CEF) est ainsi créé par un décret du 4 juin 1975 pour les demandeurs d’emploi de 16 à 25 ans. Le CEF donne droit à un stage « de formation ou d’adaptation à temps plein ou à temps partiel », après convention conclue entre l’employeur et l’État qui attribue une indemnité sur les frais de formation et de rémunération. Ce stage peut se dérouler dans un centre de formation.

Le CEF, qui sera intégré au pacte national pour l’emploi du 16 juillet 1977, connaîtra un certain succès avec la signature de plus de 265 000 contrats de cette date à l’été 1982. Ils seront supprimés par décret le 20 décembre 1985, suite à la mise en œuvre des contrats de qualification et d’adaptation par la loi du 24 février 1984, nouvelle génération de contrats aidés par l’État visant à favoriser l’insertion professionnelle des jeunes. 1 - Ministère du Travail, « Le contrat emploi-formation en 1980 ».

L’ouverture au supérieur

L’alternance politique de 1981 se traduit par la création d’un nouveau ministère de la Formation professionnelle de plein exercice, confié à Marcel Rigout. Le gouvernement de Pierre Mauroy engage une politique de décentralisation qui se concrétise avec l’adoption de deux lois, le 7 janvier et le 22 juillet 1983. La première donne compétence générale aux Régions en matière d’apprentissage, et crée les fonds régionaux de l’apprentissage et de la formation professionnelle continue. Gérés par les conseils régionaux, ces fonds sont toujours destinataires du produit de la taxe d’apprentissage réservé au financement des CFA.

sortis du système scolaire sans qualification aux besoins du marché du travail, mais aussi de « donner des moyens aux branches d’orienter l’appareil de formation en vue de répondre à leurs besoins de compétences à court et moyen terme » 1. Contrat de travail, il permet l’obtention d’un titre, d’un diplôme, d’une certification professionnelle.

La même année est conclu, le 26 octobre, un accord national interprofessionnel posant le principe de trois modalités d’insertion professionnelle en alternance des 16-25 ans, reprises dans la loi du 24 février 1984 : les contrats de qualification, les contrats d’adaptation, les stages d’initiation à la vie professionnelle (SIVP).

• Les SIVP, remplacés ensuite par le contrat

• Le contrat de qualification a d’abord

1 - Dares, « Retour sur quelques jalons de l’histoire de la formation professionnelle en alternance », Éducation & formations, n° 75, octobre 2007, http://media.education.gouv.fr/file/78/0/20780.pdf

pour objectif d’adapter les compétences des jeunes

• Le contrat d’adaptation est défini comme

« un outil de pur court terme destiné à augmenter la fluidité du marché du travail et [à] corriger rapidement des écarts entre demande et offre de compétences » 1.

d’orientation, permettent aux jeunes de se familiariser avec le monde de l’entreprise sans vocation d’insertion immédiate dans l’emploi, mais pour les aider à s’orienter dans la vie active.

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Repères

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On trouve de l’alternance dans les lycées professionnels, les universités, les contrats de professionnalisation, ou encore dans la quasi-totalité des dispositifs de formation continue que les

Évolution du flux d’entrées en contrat d’apprentissage

régions mettent en place. Philippe Meirieu, spécialiste des sciences

Effectifs

de l’éducation et vice-président de la région RhôneAlpes chargé de la formation tout au long de la vie

Avec la « loi Séguin », un mouvement de fond se dessine

Après le tournant politique du remaniement de 1984, le gouvernement de Laurent Fabius engage une nouvelle réforme ayant pour objectif de répondre au chômage des jeunes qui ne cesse de croître depuis 1975. Il est, à cette époque, de plus de 7 % parmi les 15-24 ans et dépassera les 20 % d’ici la fin des années 1980 pour toucher plus de 850 000 jeunes 1. Avec la loi de 1984, l’État confie aux partenaires sociaux l’organisation pédagogique et la gestion des nouveaux contrats aidés en alternance (d’adaptation et de qualification), ainsi que leur financement par le biais des organismes financeurs de la formation continue. Les organisations syndicales et patronales représentatives des branches professionnelles se voient ainsi confier un rôle prédominant, en particulier dans la définition des contenus de la formation. 1 - Insee, « France, portrait social », 2011.

280 000

Une nouvelle alternance électorale, en 1986, donne lieu à l’élaboration par le gouvernement de Jacques Chirac d’un « Plan d’urgence en faveur de l’emploi », avec pour priorité de développer « l’embauche et la formation en alternance des jeunes de 16 à 25 ans » par des exonérations de charges sociales. La mesure est portée par Philippe Séguin, alors ministre des Affaires sociales et de l’Emploi, elle aboutit à la signature de près de 300 000 contrats d’adaptation entre 1986 et 1987. La volonté gouvernementale de favoriser l’alternance est confirmée avec la prolongation à 25 ans de l’âge d’entrée en apprentissage, par ordonnance du 16 juillet 1986. Un an plus tard, l’apprentissage s’élargit à l’enseignement supérieur technique et professionnel avec la « loi Séguin » du 23 juillet 1987. L’intention du gouvernement est clairement exposée dans les motifs de la loi : ouvrir l’apprentissage « à des niveaux de qualification supérieurs au CAP et favoriser son extension aux entreprises de toutes tailles ». Ainsi redéfini, l’apprentissage permet « l’obtention d’une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme de l’enseignement professionnel ou technologique du second degré ou du supérieur » ou d’un titre homologué figurant sur une liste fixée par arrêté ministériel, stipule la loi Séguin. Et « tout jeune travailleur peut souscrire des contrats d’apprentissage successifs pour préparer des diplômes ou titres sanctionnant des

200 000 120 000 40 000 0 1973 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 Contrat d’apprentissage Contrat de qualification abrogé à la fin 2004, contrat de professionnalisation à partir de 2005 Champ  : France. Source : Dares, exploitation des formulaires Cerfa.

qualifications différentes ». Avec l’obtention possible d’un CAP comme d’un diplôme d’ingénieur, l’apprentissage devient alors davantage qu’une simple voie de formation professionnelle : un système de formation reconnu à part entière. Il faudra cependant attendre la loi du 17 juillet 1992 pour voir le titre d’ingénieur explicitement cité comme une certification pouvant être obtenue par la voie de l’apprentissage.

La loi Séguin confère donc à l’apprentissage tous les attributs nécessaires à sa reconnaissance comme filière complète, professionnelle, de la formation initiale au même titre que peut l’être l’enseignement technologique du secondaire et du supérieur. Premièrement, elle allonge la durée de formation en centre pour la porter jusqu’à trois ans, le cas échéant. Elle incite également les entreprises de plus de 10 salariés à recruter des apprentis, en instituant une prise en charge par l’État de la part patronale des cotisations de sécurité sociale. La loi va encore plus loin en prévoyant que l’entreprise, par convention avec un CFA, « assure une partie des formations techniques et pratiques normalement dispensées par le centre de formation d’apprentis ».

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Évolution des entrées en alternance 320 000 280 000 240 000 200 000 160 000 120 000 80 000 40 000 0 1985 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 Source : Dares.

Une voie de formation, Deux dispositifs 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05

Contrat de professionnalisation

Contrat d’orientation

Contrat de qualification (jeunes et adultes)

Contrat d’adaptation

Pour rendre possible un meilleur essor du marché de la formation professionnelle, la loi du 4 juillet 1990 – portant diverses dispositions relatives à l’Éducation nationale et à la jeunesse – institue un contrôle de la qualité de la formation dispensée dans les organismes de formation. L’Office professionnel de qualification des organismes de formation continue (OPQFC) est créé.

L’apprentissage tardant toutefois à décoller, le gouvernement d’Édouard Balladur prend une série de mesures d’urgence en 1993, dont une baisse des charges sur les bas salaires inscrite dans la loi du 27 juillet avec, en contrepartie, un développement de l’apprentissage. Le dispositif prévoit ainsi une revalorisation des contrats d’apprentissage, de qualification, d’adaptation, d’orientation, de retour à l’emploi et d’emploi-solidarité. L’effort mis sur ces contrats aidés permet une reprise des entrées. Ils concerneront, sur cette année 1993, environ 2,2 millions de personnes. Une nouvelle étape est franchie avec la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle, avec l’extension des compétences attribuées aux Régions. Après les lois de décentralisation de 1983, ainsi que la création par la loi Séguin d’un « schéma prévisionnel de l’apprentissage » confié aux Régions, le texte de 1993 fait d’elles un véritable pivot de la politique de formation professionnelle des moins de 26 ans. Les Régions se trouvent désormais en charge du pilotage des politiques territoriales de formation professionnelle des jeunes et donc chargées d’assurer un travail de concertation et de coordination entre l’ensemble des acteurs, nombreux, en particulier les milieux professionnels.

Professions préparées en contrat de professionnalisation

Professions préparées en contrat d’apprentissage

Le contrat d’apprentissage et le contrat de qualification (qui sera remplacé par le contrat de professionnalisation en 2004) caractérisent deux approches différentes d’une même voie, la formation professionnelle en alternance. Le premier relève de la formation initiale, qui « fait suite à la formation générale et prépare les jeunes à s’insérer dans un emploi qualifié, d’ouvrier à ingénieur », selon la définition donnée par l’Éducation nationale 1. Le second relève de la formation professionnelle continue, qui « s’adresse à toutes les catégories d’adultes actifs », soit dès la sortie de la scolarité obligatoire et l’entrée sur le marché du travail, et permet « de renforcer ou d’acquérir un niveau de qualification reconnue ». Dans les deux cas, l’alternant signe avec son

Source : Céreq 2010 sur la « génération 2004 ».

Repères

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employeur un contrat de travail ouvrant droit à rémunération, l’entreprise bénéficiant d’un certain nombre d’aides. Le principe d’une alternance de périodes d’enseignement et de travail prévaut pour l’un et l’autre des contrats, mais les modalités d’organisation, le public ciblé et les obligations des employeurs diffèrent. Ainsi que le résume le Céreq, les contrats d’apprentissage apparaissent « beaucoup plus encadrés par la tutelle publique : ils sont soumis à une réglementation plus contraignante, mais bénéficient d’incitations fiscales plus favorables » 2. 1 - Les dossiers de l’enseignement scolaire, « L’Éducation nationale et la formation professionnelle en France », 2010. 2 - Céreq, « Contrats de professionnalisation et d’apprentissage : des usages diversifiés », 2010.

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Le contrat de professionnalisation : f Publics : jeunes de 16 à 25 ans révolus et audelà de 26 ans pour les demandeurs d’emploi

D’une manière générale, le contrat d’apprentissage prépare plutôt à des métiers techniques alors que le contrat de qualification intéresse particulièrement le secteur des services. La mise en œuvre des contrats de qualification s’est accompagnée d’une implication plus grande des partenaires sociaux dans la création des formations avec pour aboutissement la mise en place des certificats de qualification professionnelle (CQP) ouverts aux salariés et demandeurs d’emploi dans le cadre de la formation continue. Un décret paru en février 1988 permet ainsi aux

Nomenclature des niveaux de qualification par l’Insee  Niveau VI et V bis : sorties en cours de 1er cycle de l’enseignement secondaire (6e à 3e) ou abandons en cours de CAP ou BEP avant l’année terminale. Niveau V : sorties après l’année terminale de CAP ou BEP ou sorties du 2d cycle général et technologique avant l’année terminale (seconde ou première). Niveau IV : sorties des classes de terminale de l’enseignement secondaire (avec ou sans le baccalauréat). Abandons des études supérieures sans diplôme. Niveau III : sorties avec un diplôme de niveau bac+2 (DUT, BTS, DEUG, écoles des formations sanitaires ou sociales, etc.). Niveaux II et I : sorties avec un diplôme de niveau supérieur à bac+2 (licence, maîtrise, master, DEA, DESS, doctorat, diplôme de grande école). 

branches d’établir des listes de qualifications « jugées comme prioritaires pour des contrats de qualification ». Aux diplômes codifiés par l’État s’ajoute désormais un système pensé par les branches professionnelles pour leurs entreprises. La dimension d’insertion dans l’emploi du contrat de qualification, en fonction des besoins identifiés par les entreprises, selon les secteurs d’activité, sera réaffirmée avec son remplacement par les contrats de professionnalisation. Signé par l’ensemble des organisations syndicales et patronales, l’accord national interprofessionnel du 5 décembre 2003, à l’origine de ces nouveaux contrats, fixera notamment pour objectif de « recentrer l’alternance vers les jeunes sans qualification professionnelle et vers les demandeurs d’emploi ». Dès les premiers mois de mise en route du nouveau dispositif, les résultats seront au rendez-vous : entre octobre 2004 et fin avril 2005, la part des jeunes sans qualification professionnelle passe à 14 % des entrées en contrat contre 9 % auparavant, celle des demandeurs d’emploi sans qualification à 39 % contre 17 %.

f Employeurs concernés : entreprises du secteur privé, de travail temporaire, établissements publics industriels et commerciaux, et entreprises d’armement maritime f Parties prenantes : l’employeur et l’apprenti (assimilé à un salarié) f Nature du contrat : à durée déterminée ou indéterminée, possibilité d’une période d’essai et d’un temps partiel

Le contrat d’apprentissage : f jeunes de 16 à 25 ans révolus, dérogations possibles (après un premier contrat d’apprentissage, donnant lieu à une qualification supérieure, pour un travailleur handicapé, en vue d’un projet de création d’entreprise, à partir de 15 ans après la 3e, notamment) f entreprises du secteur privé, de travail temporaire, fonction publique (État, territoriale, hospitalière), établissements publics industriels et commerciaux… f l’employeur et l’apprenti (apparenté à un salarié) f à durée déterminée, indéterminée (projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale), période d’essai possible de 2 mois, pas de temps partiel possible

f Renouvellement : une seule fois si l’objectif n’est pas atteint ou pour préparer une qualification supérieure ou complémentaire f Durée minimale du contrat : entre 6 et 12 mois, allongement à 24 mois possible notamment pour les bénéficiaires sans qualification f Objectif de formation : une qualification professionnelle (diplôme, titre, CQP, etc.) reconnue par l’État et/ou la branche professionnelle f Durée minimum en centre de formation : 150 heures, sauf dérogation de branche f Organisation de la formation : l’employeur s’engage à assurer une formation

f éventuellement plusieurs fois

f Évaluation de l’enseignement : par un organisme de formation ou par l’entreprise si elle dispose d’un service de formation f Tutorat : l’employeur n’a pas obligation de désigner un tuteur, il peut l’assurer lui-même « s’il remplit les conditions de qualification et d’expérience » f Rémunération : selon l’âge et le niveau de formation (ne peut être inférieure à 55 % du Smic pour les moins de 21 ans et à 70 % du Smic au-delà, pas moins d’un Smic pour les 26 ans et plus) f Aides à l’employeur : ouvre droit à des allégements de cotisations patronales, exonérations de charges, avec des aides particulières aux entreprises notamment pour l’embauche de demandeurs d’emploi de 45 ans et plus ou de travailleurs handicapés f Financement de la formation : par les Opca (organismes paritaires collecteurs agréés)

f par le CFA ou l’UFA (unité de formation par apprentissage) s’il y en a

f 2 ans, dérogations possibles de 6 mois ou 3 ans, 4 ans pour un travailleur handicapé f diplômes allant du CAP au bac + 5 et/ou certification professionnelle reconnue par la CNCP f 400 heures f enseignement théorique en CFA et enseignement du métier chez l’employeur

f l’employeur désigne un maître d’apprentissage (un salarié ou l’employeur lui-même) f selon l’âge et le niveau de formation (de 25 % à 78 % du Smic) f ouvre droit à une exonération des cotisations sociales, depuis le 1er janvier 2014 à une prime versée par la Région (pas moins de 1 000 € par année de formation), crédit d’impôt possible f par la taxe d’apprentissage

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La mobilisation de l’argent, et notamment de la taxe

Repères

d’apprentissage, doit être mise au service de l’intérêt général. La part que pourraient avoir les régions servira à renforcer ce pilotage de la formation professionnelle. Plus personne ne peut travailler

Quelle alternance aujourd’hui ? Une décennie de réformes

Avec l’accord national interprofessionnel (ANI) du 5 décembre 2003 « relatif à l’accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle », repris par la loi du 4 mai 2004, le contrat de qualification entre dans une nouvelle ère. Il change de nom pour celui de « contrat de professionnalisation » et agrège les contrats d’orientation et d’adaptation en un unique dispositif. La philosophie sous-jacente consiste à donner encore davantage la main aux entreprises, d’abord en réduisant le temps minimal consacré à la formation qui passe de 25 % à 15 % de la durée du contrat.

seul, il faut maîtriser les moyens. Laurence Demonet, vice-présidente à la formation et l’accompagnement des parcours du Conseil régional de Lorraine

Côté apprentissage est introduite la possibilité pour un salarié que son CDI soit « suspendu pendant la durée d’un contrat d’apprentissage conclu avec l’employeur ». Avec le passage du « contrat de qualif’ » au « contrat pro », le législateur a préféré mettre en avant le caractère professionnalisant du dispositif, suivant en cela la philosophie de la réforme voulue par les partenaires sociaux signataires de l’ANI. La loi va d’ailleurs plus loin, avec la mise en place de « périodes de professionnalisation » destinées à « favoriser par des actions de formation le maintien dans l’emploi des salariés à durée indéterminée ». Ces périodes visent à acquérir une qualification, fixée par une liste établie via un accord collectif de branche ou un accord conclu entre partenaires sociaux, ou à « participer à une action de formation dont l’objectif est défini par la commission paritaire nationale de l’emploi de la branche professionnelle dont relève l’entreprise ». Ces actions de professionnalisation peuvent être organisées pendant le temps de travail, ou en dehors, notamment dans le cadre du droit individuel à la formation (DIF) également créé par la loi du 4 mai 2004. Les enseignements sont dispensés, comme pour les contrats de professionnalisation, dans des organismes publics ou privés de formation ou dans l’entreprise « lorsqu’elle dispose d’un service de formation ».

L’alternance devient un enjeu national majeur

La même année, le 13 août 2004, une loi relative aux libertés et aux responsabilités locales consolide le mouvement de décentralisation engagé depuis 1983, prévoyant que « la Région définit et met en œuvre la politique régionale d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle ». La coordination nationale des stratégies de formation fait l’objet de « contrats d’objectifs » annuels ou pluriannuels entre « l’État, une ou plusieurs Régions, une ou plusieurs organisations représentatives des milieux socioprofessionnels ». Alors qu’entre 60 000 et 150 000 jeunes selon les sources décrochent du système éducatif sans qualification chaque année, est conclu le 19 avril 2005 un accord-cadre national pour le développement de l’apprentissage fixant pour objectif de parvenir à 500 000 apprentis en 2009. Le ministre du Travail, Jean-Louis Borloo, et son secrétaire d’État à l’Insertion professionnelle des jeunes, Laurent Hénart, signent avec une vingtaine de branches professionnelles notamment un texte précédé peu avant par la loi de programmation pour la cohésion sociale. Adoptée le 18 janvier 2005, cette loi comprend une série de

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La première plus-value de l’alternance est de permettre un meilleur accès à l’emploi. C’est manifestement plus important que pour les filières classiques de formation. Jean-Marie Marx, directeur général de l’Apec

Part des emplois aidés dans l’emploi des jeunes de moins de 26 ans 35 en % 30 25

Emplois aidés du secteur non marchand

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Emplois aidés du secteur marchand (hors alternance)

15

Formation en alternance (hors apprentissage)

10 5

mesures en faveur de l’insertion professionnelle des jeunes. Le texte vise ainsi une « amélioration du statut de l’apprenti » et la « modernisation et développement de l’apprentissage ».

Apprentissage

0 1974 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 04 06 08 10 12

Champ : France métropolitaine ; hors abattement temps partiel, Accre et insertion par l’activité économique. Sources : Dares, mesures pour l’emploi ; Insee, enquêtes emploi.

Le nombre d’apprentis atteint 408 000 fin 2006 contre 293 500 en 1996, une hausse tirée par les préparations à des diplômes de niveau IV et au-delà (du bac au supérieur), les CAP et diplômes de niveau V accusant une baisse régulière. La loi du 31 mars 2006 dite « pour l’égalité des chances » va ouvrir encore davantage la filière de l’apprentissage puisque désormais « les élèves ayant atteint l’âge de quatorze ans peuvent être admis, sur leur demande et celle de leurs représentants légaux, à suivre une formation alternée, dénommée “formation d’apprenti junior” ». Un dispositif contesté, en particulier par les syndicats d’enseignants, qui sera supprimé en 2007 et remplacé par le dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA). Des incitations à embaucher les jeunes, et en particulier en contrat de professionnalisation à durée indéterminée, sont créées le 21 avril 2006 dans le cadre de la loi sur « l’accès des jeunes à la vie active en entreprise » au travers de soutiens de l’État. La politique des emplois aidés se poursuit, et l’ANI du 11 janvier 2008 sur « la modernisation du marché du travail » réaffirme l’importance de l’alternance comme outil de lutte contre la crise économique. L’accord, dont les dispositions seront rendues obligatoires par décret du 25 juillet 2008, proclame ainsi que « les branches

professionnelles rechercheront, en privilégiant la négociation collective, tous les moyens permettant de favoriser l’embauche, prioritairement en CDI, des jeunes ayant accompli un stage, ou exécuté un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation dans une entreprise de leur ressort ». En 2009, sous l’effet de la crise économique et financière mondiale qui a éclaté à l’été 2008, l’alternance connaît un fléchissement avec au premier trimestre « seulement 72 873 contrats d’apprentissage et 48 791 contrats de professionnalisation » signés, soit un recul respectivement de 22 % et 37 % sur un an, déplore le rapport Proglio de novembre 2009 1. Le document, adressé au Président de la République, Nicolas Sarkozy, alarme sur un état des lieux jugé « préoccupant : l’alternance, faute de définition, faute de principes, clairement énoncés et partagés, est devenue un dispositif à la fois flou, complexe et peu susceptible d’appropriation commune par ses acteurs ». Dans ce contexte, après un nouvel accord national interprofessionnel conclu le 7 janvier 2009 encore une fois par toutes les organisations syndicales et patronales, la loi du 24 novembre relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie institue un « droit à l’information, à l’orientation et à la qualification professionnelles ». Les mesures doivent permettre à chacun « d’acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle, ainsi que de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie

professionnelle ». Le texte fixe le principe d’une « stratégie nationale coordonnée » entre État, Régions et partenaires sociaux, et élargit l’accès des contrats de professionnalisation aux bénéficiaires de minima sociaux (revenu de solidarité active, allocation de solidarité spécifique, etc.), réaffirmant au passage la vocation première de ce dispositif : favoriser l’insertion professionnelle de leurs bénéficiaires en répondant au mieux aux besoins des entreprises en termes de compétences professionnelles. Un paysage législatif en évolution constante

L’année 2013 a été marquée par une large concertation entre l’ensemble des acteurs de la formation en apprentissage qui s’est intensifiée à partir du dernier trimestre. Les ministères concernés, les Régions, les organismes de collecte et les représentants des établissements de formation ont ainsi confronté leurs analyses et arguments pour tenter de parvenir à une réforme consensuelle. Au final, pas moins de trois textes de loi ont, à ce jour, été nécessaires pour porter la refonte du système. Le premier, la loi de finances pour 2014 votée fin décembre 2013, revoit en profondeur les modalités de mise en œuvre des mécanismes d’aide aux employeurs d’apprentis. 1 - Henri Proglio, « Promouvoir et développer l’alternance », rapport au Président de la République, novembre 2009.

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L’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) est supprimée à compter du 1er janvier 2014 et remplacée par une « prime à l’apprentissage » réservée aux seules entreprises de moins de 11 salariés. Financée par l’État, elle reste versée par les Régions qui pourront moduler à la hausse son montant minimal de 1 000 € par an et par apprenti. Le crédit d’impôt « apprentissage » est également réformé avec des dispositions transitoires prévues en 2014 et 2015 pour les contrats conclus avant le 1er janvier 2014. Pour les contrats signés à compter de cette date, son bénéfice est recentré sur les formations d’un niveau inférieur ou égal à bac+2. De plus, le crédit d’impôt ne sera désormais accordé que pour la première année de contrat. Deuxième étage de la réforme, le financement de l’apprentissage reste le volet le plus sensible. Problème : le Conseil constitutionnel en a censuré les principales dispositions prévues par la loi de finances rectificative pour 2013. Les sages n’ont rien trouvé à redire à la fusion de la taxe d’apprentissage et de la contribution au développement de l’apprentissage (CDA) pour créer une nouvelle taxe égale à 0,68 % de la masse salariale, sans effet pour les entreprises. Ils ont en revanche invalidé la nouvelle répartition votée par le législateur qui prévoyait d’affecter au minimum 55 % de la taxe rénovée aux Régions et de renvoyer à un décret la fixation d’une nouvelle répartition entre les fractions « quota » et « barème » de la taxe. Finalement, la loi « Formation – Démocratie sociale » du 5 mars 2014 fixe à 21 % la part maximale de la taxe que les entreprises pourront verser aux

CFA (part « quota ») et à 23 % la part maximale destinée à financer les formations hors apprentissage (part « barème » ou hors quota), la fraction « régionalisée » de la taxe devant être arrêtée dans le cadre de la loi de finances 2015. La loi du 5 mars 2014 prévoit, en outre, une profonde refonte du système de collecte de la taxe. Au 1er janvier 2016, le nombre d’organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (Octa) va ainsi passer de plus de 140 à une quarantaine. Ne subsisteront, au niveau régional, qu’un seul collecteur consulaire commun aux chambres de commerce, de métiers et d’agriculture, et, au niveau national, des Octa adossés aux 20 organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) qui gèrent les contributions des entreprises au titre de la formation continue. Enfin, dernière évolution annoncée fin avril par le Président de la République, l’apprentissage devrait s’ouvrir aux demandeurs d’emploi de longue durée, quel que soit leur âge, afin de faciliter leur accès ou leur retour dans l’entreprise. S’inspirant d’une des propositions contenues dans le rapport que lui a remis le président de GDF Suez et de la Fondation Agir contre l’exclusion (FACE), Gérard Mestrallet, François Hollande souhaite que les bénéficiaires du dispositif soient placés sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle. Ils seraient rémunérés par Pôle emploi, leur tutorat restant à la charge de l’employeur.

L’alternance en chiffres : une réalité bien ancrée

La formation professionnelle continue et l’apprentissage représentaient en France en 2011 une dépense d’environ 32 milliards d’euros, dont le quart en direction des jeunes. L’apprentissage (avec plus de 5,6 milliards financés) représente 18 % du total, l’alternance au titre des contrats de professionnalisation 3 % (avec un peu plus de 1 milliard d’euros financés) 1. Selon les derniers travaux du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV), la dépense totale de la Nation en faveur de l’apprentissage dépasse même désormais 8 milliards d’euros par an, tous financements confondus. En matière de formation professionnelle, les principaux financeurs sont les entreprises (43 %), l’État (15 %), les Régions (14 %), puis les autres administrations ou institutions publiques dont Pôle emploi (5 %), les ménages (4 %) et la fonction publique pour leurs agents (19 %). Hors apprentissage, les formations des jeunes en insertion professionnelle (dont l’alternance) sont d’abord

financées par les entreprises (pour 1 milliard d’euros), puis par les Régions (pour 870 millions), l’État (pour 510 millions) et d’autres collectivités (pour 50 millions d’euros). Alors que la crise économique perdure, le nombre de contrats de professionnalisation et d’apprentissage connaît une augmentation contrastée, respectivement de 5 % (après avoir baissé de 9 % en 2010) et de 0,8 %. L’évolution de l’alternance s’inscrit dans un contexte difficile du marché du travail, mais s’explique en particulier par les mesures financières incitatives vers les entreprises voulues par l’État, dans le cadre notamment du Plan de mobilisation pour l’emploi décidé en 2011 pour soutenir les entrées en formation des demandeurs d’emploi ou leur accès aux contrats aidés.

1 - Dares, « La dépense nationale pour la formation professionnelle continue », décembre 2013.

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Ce qui nous intéresse avec l’alternance, c’est d’avoir des ressources et une main-d’œuvre qualifiée à qui il sera possible de proposer un emploi dans un avenir proche, autrement dit, d’anticiper

DÉpense (hors frais de gestion des Opca) et effectifs des jeunes en contrats de professionnalisation Effectif annuel moyen

nos compétences de demain. Marc Jouenne, DRH d’Airbus en France

En millions d’euros

L’alternance au 31 décembre 2011 2 

Plus de 468 000 nouveaux contrats d’apprentissage et de professionnalisation enregistrés 800 dans le secteur marchand, contre 436 000 en 2010 et 434 000 en 2009. La progression est 700 de 7 % sur cette année 2011, pour 0,4 % en 600 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2010 et un recul de 9 % en 2009 : • 173 000 nouveaux contrats de professionnaEffectif annuel moyen des jeunes en alternance lisation (+17 % sur un an) ; Dépenses des entreprises pour les jeunes en alternance • 295 000 nouveaux contrats d’apprentissage (hors frais de gestion des Opca) (+2,6 % sur un an).

Après un premier recul enregistré en 2012 (-8,6 %), les contrats d’apprentissage accusent en 2013 un nouveau repli. L’augmentation des contrats de professionnalisation s’expliquait en 2011 notamment par une « progression des entrées dans les secteurs tertiaire (+19 % par rapport à 2010) et industriel (+16 %) » 2. Conséquence d’une conjoncture économique durablement dégradée, la baisse de 2012, plus prononcée dans la construction (-12 %) et le tertiaire (-10 %) que l’industrie (-2 %), « est essentiellement liée à une diminution des embauches dans les établissements de 250 salariés ou moins » 4.

nance semble marquer le pas dans le secteur de l’emploi marchand aidé 3 : DÉpense et effectifs des jeunes en apprentissage • près de 146 300 nouveaux contrats de professionnalisation en 2013 (contre 154 500 en Effectif annuel moyen En millions d’euros 2012, soit -5,31 %) ; 420 000 1 200 • près de 273 100 nouveaux contrats d’appren1 100 tissage en 2013 (contre 297 300 en 2012, soit 390 000 -8,13 %) ; 1 000 360 000 • près de 419 400 entrées cumulées dans les 900 deux dispositifs en 2013 (contre 451 800 en 330 000 800 2012, soit -7,17 %).

Le tertiaire s’affirme néanmoins comme le premier secteur pourvoyeur de contrats de professionnalisation puisqu’il totalise 79 % des nouvelles embauches (contre 15 % dans l’industrie et 6 % dans la construction). Il l’est aussi, dans une moindre mesure, pour l’apprentissage dont environ 56 % des nouveaux contrats concernent ce secteur et 21 % l’industrie 5. En outre, en 2012, plus de la moitié (56 %) des titulaires d’un contrat de professionnalisation exerçant dans le secteur de l’industrie se formaient à « des métiers des spécialités de services » 4.

200 000 180 000 160 000 140 000 120 000 100 000 80 000 60 000 40 000 20 000 0

1 100 1 000 900

Champ : France entière. Source : Dares pour les effectifs, états statistiques et financiers (ESF) pour les dépenses. Mais les données enregistrées en 2012 et 2013 montrent que la tendance favorable à l’alter-

300 000

700 600

270 000 2005

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Des bénéficiaires plus âgés, et plus qualifiés

Effectif annuel moyen des jeunes en contrat d’apprentissage Dépenses des entreprises pour les jeunes en apprentissage

Champ : France entière. Source : Dares pour les effectifs, compte de l’éducation et états statistiques et financiers (ESF) pour les dépenses.

2 - Jaune budgétaire « formation professionnelle » annexé au projet de loi de finances 2013. 3 - Ministère du Travail, « Tableau de bord des politiques d’emploi », données provisoires pour 2013.

Les petites entreprises, de moins de 10 salariés, sont les premières à recourir à des contrats de professionnalisation – 37,1 % des contrats signés en

2012 les concernent –, mais sont aussi les plus représentatives des secteurs de la construction (plus de 48 %). Les grandes entreprises, de plus de 200 salariés, comptent pour 27,5 % des nouveaux contrats et représentent l’industrie à plus de 48 %. La tendance est aussi à la diminution de la durée des contrats, la part de ceux supérieurs à une année étant en 2012 de 38 % contre 36 % l’année précédente. Elle tombe à 32 % en 2010. De ce fait, la part des formations longues (800 heures au moins) et donc diplômantes est passée de 31 % en 2010 à 28 % en 2012, celle des formations de moins de 500 heures représente 48 % des nouveaux contrats. En moyenne, les formations en contrat de professionnalisation durent environ 28 % de la durée du contrat, soit 620 heures 4. Les CDD sont ultra-majoritaires (91 % des nouveaux contrats), la part des CDI passant d’environ 12 % à 9 %. L’âge moyen des nouveaux entrants en contrat de professionnalisation augmente, la part des 26 ans et plus passant de 16 % en 2010 à 20 % en 2012 4. Cette catégorie résiste d’ailleurs mieux à l’érosion constatée du nombre de contrats signés, reculant de 6 % entre 2011 et 2012, contre 11 % pour les moins de 26 ans, après avoir enregistré une hausse de 33 % entre 2010 et 2011 2. Celle des 45 ans ou plus reste stable, à 3 % de l’ensemble. Près d’un tiers (32 %) des candidats au contrat de professionnalisation sortent de scolarité, alors que 30 % étaient en recherche d’un emploi, 16 % salariés (dont 85 % étaient âgés de plus de 26 ans) et 22 % « dans une autre situation, notamment en contrat aidé ».

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Plus l’apprenant est diplômé, plus il a de chances de décrocher un CDI pendant sa formation : 44 % des diplômés du supérieur en contrat de professionnalisation sont dans cette situation, alors qu’ils représentent 35 % des signataires de ces contrats. Il s’agit désormais d’une réalité, la formation en alternance séduit de plus en plus les diplômés : • les apprentis ont tendance à « s’engager plus fréquemment dans les filières qui préparent à un diplôme ou titre allant du baccalauréat ou brevet professionnel au diplôme d’ingénieur » (51 % en 2010, contre 49 % en 2009 et 42 % en 2008) 2 ; • les contrats de professionnalisation attirent, pour plus de 70 % des entrées, les diplômés du baccalauréat et du supérieur 4.

semble acquise, 30 % des jeunes déclarent avoir cherché un contrat d’alternance sans succès... Si près d’un quart (24 %) des jeunes de l’enseignement supérieur ont signé un contrat d’alternance durant leur cursus, franchir le pas relève parfois du parcours du combattant. Les deux tiers de ceux ayant engagé une démarche ont abandonné faute de proposition de contrat. Pour les autres, diverses raisons à la non-signature du contrat sont évoquées, dont un recrutement déjà effectué par l’entreprise ou encore des propositions d’organismes de formation n’ayant pas d’entreprise d’accueil. Les organismes de formation sont dans 31 % des cas « sources de contrat », les candidatures spontanées représentant 29 % des demandes.

Les certifications enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) – autres qu’un certificat de qualification professionnelle, comme un diplôme ou titre à finalité professionnelle délivré au nom de l’État – attirent les deux tiers des nouveaux entrants en contrat de professionnalisation. Le choix de l’alternance séduit d’autant plus les diplômés du supérieur qu’une récente enquête de l’Association pour faciliter l’insertion professionnelle des jeunes diplômés (Afij) vient de mettre en évidence que « 70 % des jeunes post-bac ont envisagé ou choisi de passer par une formation en alternance » 6. Autre enseignement de l’étude : alors que l’institutionnalisation de l’alternance

4 - Dares, « Le contrat de professionnalisation en 2012 », décembre 2013. 5 - Dares, « L’apprentissage en 2011 », novembre 2012. 6 - Afij, « L’alternance dans le supérieur », mars 2013.

Enfin, une fois entrés en contrat de professionnalisation, près de 7 bénéficiaires sur 10 ont obtenu la qualification préparée, selon les données recueillies par la Dares pour les entrées en 2006 7. Environ 18 % des contrats sont interrompus avant leur fin, dans plus d’un tiers des cas (36 %) du fait d’une démission sans reprise d’emploi immédiate, dans plus d’un quart des cas (26 %) pour prendre un autre emploi, sinon suite à un licenciement, une fermeture de l’entreprise, une défaillance de l’organisme de formation notamment. Situation des bénéficiaires après leur contrat de professionnalisation (commencé en 2006) : • les deux tiers sont en emploi, dont près des trois quarts chez le même employeur ; • près d’un quart (24 %) sont au chômage ; • 7 % sont inactifs ; • 3 % poursuivent une formation.

Lorsqu’ils s’insèrent dans l’emploi, les bénéficiaires occupent un CDI dans 60 % des cas. Il en va de même des apprentis, qui prennent un CDI à 59 %. En sortie de CFA, le taux d’emploi en 2012 est de 69 % en moyenne, il est de 77 % pour les titulaires d’un baccalauréat professionnel et de 82 % pour les titulaires d’un BTS 8.

7 - Dares, « Le contrat de professionnalisation : l’insertion des bénéficiaires varie surtout selon le métier préparé », décembre 2012. 8 - Depp, « L’insertion professionnelle des jeunes sortants d’apprentissage », août 2013.

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L’alternance au Cesi Une légitimité historique

En plaçant au cœur de sa logique fondatrice la performance économique alliée à une ambition de promotion sociale, le Cesi s’est développé pendant plus d’un demi-siècle au rythme de l’innovation. D’abord, poussé par l’intime conviction que la réussite d’un projet de développement d’entreprise s’appuie avant tout sur des ressources humaines qualifiées. Privilégier la réflexion sur l’adaptation des formats pédagogiques a toujours été une constante, en prenant soin d’anticiper les évolutions législatives qui fondent la formation en alternance d’aujourd’hui. L’aventure du Cesi s’inscrit dans cette histoire moderne de la formation professionnelle où l’entreprise sait faire entendre sa voix pour se doter des compétences qui

lui sont nécessaires, de concert avec des publics variés – jeunes en formation, salariés, demandeurs d’emploi – qui revendiquent leur droit à une formation tout au long de la vie. Dans ce contexte, la formation en alternance ouvre le champ des possibles pour des populations aspirant à révéler leurs compétences dans le monde des entreprises, tout en suivant un parcours de formation reconnu. Qu’il soit issu de la formation initiale, en réorientation professionnelle, ou en reprise d’étude, l’alternant est en demande d’une ingénierie pédagogique appropriée. En rassemblant des professionnels de métiers diversifiés, le Cesi a depuis toujours souhaité réserver la part belle au dialogue entre l’expertise du formateur, les réalités de terrain vécues au sein des entreprises et l’ambition de progression des alternants dans leur parcours. Un positionnement précurseur

Le Cesi est créé en 1958. En pleine période des Trente Glorieuses, la France voit son économie se transformer avec un besoin de plus en plus pressant en travailleurs qualifiés. Dans un contexte de croissance soutenue, le développement de l’activité demande un regard neuf pour faciliter l’accès à la formation. Cinq grandes entreprises industrielles françaises (Renault, Télémécanique, Snecma, Chausson et la Compagnie électromécanique) se mobilisent autour d’une cause commune : faire évoluer leurs techniciens à

fort potentiel vers des postes d’ingénieurs. Elles créent pour cela le Cesi afin de les former en recourant à des apprentissages organisés alternativement en centre de formation et en situation de travail. De cette originalité pédagogique, qui préfigure ce qui deviendra le modèle de l’alternance que nous connaissons aujourd’hui, le Cesi en fait une véritable marque de fabrique. En partant des besoins exprimés sur le terrain, le Cesi s’est positionné d’emblée comme le pionnier de la pédagogie de la formation alternée en France, avant même que le dispositif qui perdure actuellement ne soit défini législativement plusieurs décennies après. Ainsi que le souligne Catherine Afonso dans son mémoire de master professionnel 2 1, « à partir des années 1980, le Cesi participe à la structuration du secteur de la formation et à son mouvement de professionnalisation. En effet, l’association joue un rôle de premier plan dans la création des institutions nouvelles » : Fédération de la formation professionnelle (FFP), Convention collective de la branche, Observation des métiers de la formation, Centre Inffo, Forum français pour la formation ouverte et à distance (FFFOD), Instituts des techniques d’ingénieurs de l’industrie (ITII), Office professionnel de qualification des organismes de formation (OPQF), etc. 1 - Catherine Afonso, mémoire de master professionnel 2 « Des environnements capacitants pour faciliter les pratiques des Responsables de promotions de Cesi Entreprises dans leur mission d’accompagnement des stagiaires », 2012/2013.

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LIVRE BLANC Avec les alternants, nous savons précisément quelles compétences ils

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ont développées au cours de leur période d’apprentissage, et c’est tout l’avantage de ce système ! Les qualités comportementales, le partage des valeurs de l’entreprise, la capacité à travailler dans des équipes transnationales, sont mieux identifiés au cours du parcours d’alternance qu’au travers d’un simple entretien. Marc Jouenne, DRH d’Airbus en France

Le Cesi s’est construit en adoptant dès sa création une vision professionnalisante de l’appropriation des compétences et des qualifications. Accompagner les bénéficiaires de formations à des niveaux supérieurs signifie également un pari social que voulait relever ce nouvel organisme de formation : celui de valoriser la mobilité au sein des entreprises en favorisant l’évolution professionnelle des salariés. En 1969, est ainsi ouverte la première formation interentreprises « accompagnement du passage au statut de cadre ». L’ambition de former aux plus hauts niveaux de qualification des bénéficiaires issus d’horizons différents reste une constante de la philosophie du Cesi. Ce défi se concrétise avec l’habilitation, en 1978, par la Commission des titres d’ingénieur (CTI) à délivrer le diplôme d’ingénieur Cesi en formation continue pour ses centres d’Arras, de Lyon, de Paris et de Toulouse. Le pari visionnaire sur les qualifications

En 1987, avec la promulgation de la loi Séguin, l’apprentissage gagne ses lettres de noblesse et s’ouvre aux enseignements de niveau supérieur. Le Cesi, particulièrement mobilisé sur ce sujet, obtient dès 1989 l’habilitation de la CTI pour lancer en Île-de-France sa première formation d’ingénieurs par l’apprentissage dans un CFA, en partenariat avec la branche de la métallurgie. Depuis la première habilitation de 1978 (pour la formation continue), trois nouveaux centres habilités ont ouvert : Bordeaux, Nancy et Rouen. Après 1989, les

possibilités d’obtenir le diplôme d’ingénieur grâce à l’apprentissage s’élargissent avec l’ouverture – et l’habilitation – du centre d’Angoulême en 1992, puis de celui de Rouen un an plus tard. Le mouvement est lancé ; d’autres habilitations à délivrer le titre d’ingénieur par la voie de l’apprentissage seront attribuées tout au long des années 1990 et 2000, le Cesi s’implantant progressivement sur l’ensemble du territoire national. Avec ces cursus complets de formation conduisant à l’obtention d’un titre de niveau I, un pas est franchi permettant la reconnaissance d’un engagement précurseur en faveur de l’alternance. Aujourd’hui, le dispositif de formation d’ingénieurs par l’apprentissage attire tous les ans, au sein de l’EI.Cesi (école d’ingénieurs du Cesi), plus de 2 900 élèves ingénieurs (généralistes et BTP) et diplôme chaque année plus de 810 ingénieurs par la voie de l’apprentissage, positionnant l’EI.Cesi en tête des écoles d’ingénieurs françaises proposant le cursus ingénieur par l’apprentissage. En 1993, le Cesi s’ouvre plus largement encore à l’alternance avec l’arrivée des premiers contrats de qualification en 2 ans « Technicien supérieur en gestion et organisation de la qualité » de niveau III (bac+2) ; une formation délivrée par le centre de Limoges. Au cours des années, est menée une réflexion sur la création de formations « diplômantes » visant des titres homologués CTH (Commission technique d’homologation) en vue de les mettre en œuvre par la voie de l’alternance.

Le premier catalogue national d’offres de formations qualifiantes en alternance du Cesi est publié en 2000 sous le label Cesi Tech’Sup. Destinés à former des techniciens supérieurs, ces parcours donnent principalement accès à des titres homologués de niveaux III en informatique, organisation industrielle, BTP et QSE. Le catalogue est diffusé à près de 10 000 exemplaires. Cette campagne de sensibilisation et d’information permettra d’accueillir en moyenne 500 jeunes par an dans ces formations. Anticiper les évolutions, s’adapter aux réalités

En 2004, la loi relative à la formation tout au long de la vie et au dialogue social, issue de l’ANI du 5 décembre 2003 sur la formation professionnelle, introduit plusieurs changements majeurs et, en premier lieu, la substitution des contrats de professionnalisation aux contrats de qualification. La Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) reprend les missions de la CTH suivant une logique très différente et innovante, celle de la certification – et non plus celle de la formation. Le Cesi s’adapte et crée en son sein une équipe d’experts métiers avec pour mission de construire des référentiels de certification, dans une approche compétences « métiers », pour les décliner ensuite en référentiels de formation, puis en cahiers des charges. Le souci marqué d’un accompagnement

vers l’emploi se traduit également par la mise en place d’un dispositif de suivi des diplômés. De la sorte, il devient possible de mesurer précisément leur taux d’insertion professionnelle : métiers exercés selon les secteurs d’activité, fonctions exercées en première embauche, typologie des entreprises qui recrutent, niveaux de salaires proposés, etc. Une visibilité est apportée sur les perspectives d’évolution de carrière des jeunes alternants, dans les cinq ans suivant l’obtention de leur diplôme. Au tournant des années 2010, le Cesi affirme clairement une volonté d’enrichir l’offre de ses formations en alternance, que ce soit au travers des contrats de professionnalisation ou de l’apprentissage. La stratégie est engagée sur l’ensemble des sites du Cesi, et l’alternance représente désormais deux tiers de l’activité du groupe. Le développement important de cette offre est intervenu en réponse à une demande forte liée au portefeuille de titres, et notamment sur les dispositifs métiers de niveaux II (responsable opérationnel/chef de service de niveau bac+4). Le Cesi s’ouvre ainsi vers les niveaux II, puis I (bac+5) en continuant de faire le pari de l’alternance dans le supérieur. Le groupe anticipe ainsi une tendance de fond, durable, de l’alternance mise au service des entreprises dont les besoins en recrutement des futurs cadres via ce dispositif vont croissant.

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Avec la loi dite « Cherpion » de 2011 qui permet de conclure successivement deux contrats de professionnalisation, sous réserve de viser un diplôme de niveau supérieur, le Cesi se voit renforcé dans ses convictions : l’alternance est bel et bien consacrée comme une voie parallèle à la voie académique. Cette modalité de formation, pour laquelle le groupe a déployé une stratégie ambitieuse, gagne avec cette loi toute sa légitimité dans l’enseignement supérieur. Le Cesi propose alors en alter-

nance une palette complète de filières de formation par métiers et domaines ouvrant des perspectives professionnelles aux jeunes et permettant aux entreprises de recruter des collaborateurs qualifiés. En 2014, avec plus de 20 000 jeunes formés en alternance dans ses 21 centres ces vingt dernières années et près de 2 000 diplômés par an, le Cesi lance « Cesi alternance : l’École supérieure des métiers »...

La réussite d’un parcours de formation dépend pour partie de l’attention accordée par l’organisme de formation à l’accompagnement de l’alternant. Pour qu’il puisse mettre toutes les chances de son côté, le Cesi a pensé un processus d’accompagnement menant vers le chemin de la réussite. Le parcours de formation est ainsi pris dans son ensemble, pour dialoguer en permanence avec le jeune et son entreprise. L’action du Cesi commence donc avant même le démarrage effectif de la formation, au moment de la phase d’orientation et de recrutement des alternants et de conseil des entreprises. Le Cesi assure un suivi tout au long du parcours de l’apprenant, jusqu’à la remise de son diplôme et son insertion professionnelle dans le métier préparé.

Nombre de diplômés par an et par filière 2012

2013

109 BTP / Construction durable

159 368

Ressources humaines

La culture de l’alternance au Cesi, une approche pragmatique

441

Industrie (Qualité - Sécurité Environnement Performance énergétique)

409 503

910

Informatique et systèmes d’information

962

0

200

400

600

800

1 000

1 200

Une ingénierie pédagogique au service de l’employabilité des jeunes

En entretenant, depuis longtemps, des relations étroites avec les entreprises et les branches pro-

fessionnelles, le Cesi a su affiner sa vision du marché du travail pour identifier progressivement et actualiser les métiers porteurs d’emplois. Les dispositifs de formation sont pensés en fonction des demandes manifestées dans les bassins d’emploi, selon un processus bien établi : • Un référentiel métier / compétences

est élaboré par le Cesi pour identifier les activités du futur professionnel à former, mais aussi les compétences clés (savoirs, savoir-faire, savoir-être) indispensables à l’exercice du métier. Son niveau de responsabilité et son contexte d’exercice sont également pris en compte, afin de cerner les caractéristiques de son poste en termes d’autonomie, d’encadrement, de périmètre d’action, etc. objectifs pédagogiques sont construits à partir des objectifs opérationnels et sur la base des compétences à acquérir. Les apprenants devront, à l’issue de leur cursus, disposer de l’ensemble des clés nécessaires à l’exercice du métier préparé.

• Des

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LIVRE BLANC La formation en elle-même ne suffit pas, il faut toujours un

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accompagnement. Le parcours suppose de rebondir tout au long de la formation, dans une logique de continuité. Laurence Demonet, vice-présidente à la formation et l’accompagnement des parcours du Conseil régional de Lorraine

• Un séquencement de la progression attendue permet, en fonction du public visé,

Le pilote de formation

de traduire les objectifs pédagogiques en contenus « compétences » à acquérir au travers du triple champ d’apprentissage : les apprentissages formels, ceux issus des échanges avec les tuteurs et les pairs, et ceux provenant de l’expérimentation réelle vécue par les apprenants. Entre l’expérience de formation en centre et les pratiques en entreprise, l’alternant construit son identité professionnelle, accompagné par le tuteur et l’ingénieur de formation Cesi, jusqu’à l’obtention du diplôme.

Pivot essentiel du dispositif de formation, le pilote a un rôle majeur d’interface entre l’apprenant, l’entreprise et l’ensemble des formateurs. Il est garant de l’équilibre pédagogique et du processus d’apprentissage de l’alternant. Il doit donc être à la fois un professionnel de la pédagogie et un spécialiste des métiers préparés. La fonction de pilote au Cesi correspond par conséquent à une mission complexe qui nécessite professionnalisme, expertise pédagogique, qualités d’organisation, capacités de dialogue et d’ouverture. Pilier de la relation entre l’alternant et son entreprise, il doit :

• la certification des titres du Cesi se conforme aux exigences de la CNCP. L’inscription au RNCP implique une demande de renouvellement à période régulière et la nécessité d’apporter la preuve de l’utilité professionnelle des diplômes par la qualité de l’insertion professionnelle. L’attribution du diplôme constitue la garantie première de l’acquisition des compétences visées.

Une équipe pédagogique mobilisée autour du pilote de formation

Point fort du Cesi, les modules des parcours de formation sont animés par des professionnels du métier préparé par les alternants. Pour chacun des cursus, l’équipe pédagogique est constituée du pilote de la formation, à la fois ingénieur de formation et expert métier, et de spécialistes des modules enseignés exerçant eux-mêmes en entreprise.

dans la construction de son identité professionnelle au travers d’une relation privilégiée, d’un suivi individuel et collectif pouvant aller jusqu’à la personnalisation du parcours.

• Accompagner

l’apprenant

• Garantir un environnement d’étude serein qui passe par le respect du cahier des

charges de la formation, une planification cohérente pensée dans un objectif de progression pédagogique et des outils et moyens d’apprentissage adaptés. • Animer une équipe pédagogique composée principalement de professionnels du métier : le pilote en assure le recrutement, l’accompagnement et l’évaluation. Dans la phase de préparation de leur animation, il travaille avec eux sur le contenu,

leur valeur ajoutée et les objectifs pédagogiques attendus. Il doit également être à leur écoute et susciter entre eux une dynamique collaborative autour de la conduite du groupe d’alternants vers la réussite. C’est le pilote qui donne le ton, une vision d’ensemble du cursus.

le pilote de formation et l’évaluation systématique de la qualité de leur intervention par les apprenants eux-mêmes et le pilote – est donc requis. Ces formateurs doivent justifier de : • Compétences opérationnelles mises en

• Gérer le quotidien et tout événement survenant au cours de la formation en étant l’interlocuteur privilégié de l’apprenant et de son tuteur. Le pilote est le référent clairement identifié par les différents acteurs (alternant, chef d’entreprise, tuteur, formateurs, etc.) pour gérer toutes les questions ou difficultés portant sur les problématiques personnelles ou professionnelles, de comportement ou d’apprentissage, de tutorat, et plus globalement d’organisation du parcours. Les formateurs

Le parti pris du Cesi, depuis son origine, sur les parcours en alternance, est de faire principalement animer les modules de formation de ses cursus métiers par des professionnels issus de l’entreprise afin de favoriser les illustrations concrètes des enseignements abordés et le partage d’expérience. Le recrutement de ces formateurs en mesure de répondre à ses exigences est donc une étape majeure qu’il convient d’entourer d’un ensemble de garanties. Un processus complet d’agrément des intervenants de type « assurance qualité » – avec une étude des candidatures, la conduite d’entretiens poussés par

œuvre dans le cadre d’une expérience significative en entreprise. Ces compétences doivent être en adéquation avec les besoins métiers spécifiques du Cesi (informatique, ressources humaines, qualité, sécurité, environnement, performance industrielle, BTP, etc.). • Compétences d’animation pour impliquer les alternants et leur permettre d’acquérir rapidement les compétences visées. Professionnels de la pédagogie, ils sont encouragés à diversifier leurs modalités d’apprentissage en utilisant les techniques d’animation les plus interactives, sources d’expérimentation individuelle et collective (études de cas, jeux pédagogiques, projets collectifs, mises en situation, etc.).

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LIVRE BLANC Les cours sont tous orientés vers le monde professionnel plus que vers la théorie.

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Tant mieux, car l’important est la réalité terrain ! Aujourd’hui, je suis complètement satisfait, tant pour mon niveau de salaire que pour les rapports avec mes collègues dans l’entreprise. J’ai fait le bon choix.

Un processus d’accompagnement vers la réussite Avant la formation, une rencontre décisive

Dès le premier contact avec le candidat à l’alternance, le Cesi démarre le processus d’accompagnement qui vise à orienter, former et certifier ce futur professionnel. Projet professionnel et découverte des métiers

Les centres sont organisés pour permettre aux plus jeunes de découvrir les métiers et de réfléchir à leur trajectoire professionnelle au travers de journées portes ouvertes, de réunions d’information, de rencontres avec des apprenants en cours de formation et du processus de sélection.

Gregory Castin, diplômé du Cesi Orléans de Niveau III « gestionnaire en maintenance et support informatique » et de niveau II « responsable en ingénierie réseaux »

Ces jeunes doivent également avoir la possibilité d’évoquer avec des professionnels leur avenir, les débouchés et les métiers qui présentent des opportunités, en toute transparence, à l’occasion de moments privilégiés. C’est primordial. Afin d’ouvrir le champ des métiers possibles aux jeunes qui méconnaissent souvent certaines spécialités pourtant porteuses d’emploi et de perspectives professionnelles, le Cesi a à cœur de toucher le plus largement possible ce public. Il souhaite également répondre aux entreprises désireuses de recruter de futurs collaborateurs par la voie de l’alternance et qui comptent sur lui pour leur présenter des candidats motivés et sérieux. Pour cela, le Cesi participe à de nombreux événements (conférences métiers, salon d’orientation) et noue des relations durables avec des partenaires chargés de l’orientation des jeunes (centres d’information et d’orientation CIO/SUIO, missions locales, Pôle emploi, Apec, établissements scolaires/universitaires, etc.). La phase de sélection pour un parcours choisi est l’occasion de mettre en place un partenariat entre

le jeune et le Cesi, responsabilisant l’individu autour de son projet. Cet accompagnement – qui tient compte de sa personnalité, de ses capacités, de ses motivations – est destiné à le guider utilement (à le mettre sur les rails de la réussite) et à lui faire prendre conscience de l’investissement que le Cesi et sa future entreprise attendent de sa part. En contrepartie de cette implication du jeune, le Cesi s’engage à ses côtés au travers d’une promesse claire. Accompagnement vers la recherche d’entreprise

Le Cesi guide les candidats dans leur recherche d’entreprise, condition clé de l’inscription au dispositif de formation. Pour cela, est proposée une démarche en deux temps forts : • des ateliers d’aide à la recherche d’entreprise pour valoriser ses expériences et mettre en avant ses atouts de manière déjà professionnelle ; • un suivi individuel des candidats et leur mise en relation avec les entreprises recrutant par ce biais.

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Accompagnement de l’entreprise dans ses recrutements

Le Cesi se positionne comme conseil auprès de ses entreprises partenaires en recherche de leurs futurs collaborateurs et les aide à définir la mission qu’elles souhaitent confier à un alternant en identifiant les compétences attendues. En fonction de la mission, du contexte d’exercice et de l’autonomie espérée par l’entreprise, le Cesi lui propose le bon niveau de parcours pour répondre à ses attentes. Michel Riggenbach, pilote de formation au Cesi d’Aix-en-Provence « Notre pédagogie ne se bâtit pas par l’empilement de différents modules de formation, mais au travers d’une analyse

Au fil de ses échanges avec les candidats, le Cesi prend le temps de les découvrir et peut ainsi mieux conseiller ses entreprises partenaires sur les candidatures proposées, en mettant l’accent sur les projets individuels des candidats et en mettant en avant les potentiels détectés.

des besoins des métiers préparés, alimentée notamment par les nombreuses visites en entreprise. Notre système d’évaluation des parcours n’est pas un système de sanction, mais s’établit sur un référentiel de capacités métiers à atteindre. »

Le succès du parcours en alternance étant étroitement lié à la réussite et à la pérennité du mariage entre l’entreprise et l’alternant, le Cesi concentre tous ses efforts pour proposer le bon candidat au bon moment. Afin de faciliter la mise en place du dispositif en alternance par toutes les tailles d’entreprises (y compris les plus petites), le Cesi assure un conseil de nature plus administrative et réglementaire auprès de ses interlocuteurs. Il s’agit entre autres d’assister les entreprises dans l’élaboration du dossier de demande de prise en charge auprès de leur Opca et plus globalement de répondre à l’ensemble des questions que ces dernières pourraient se poser sur un dispositif qui peut, pour certaines, paraître complexe au niveau notamment des circuits financiers.

Pendant la formation

La relation entre l’alternant et l’entreprise, amorcée lors de la phase préparatoire à la formation proprement dite, doit se consolider tout au long du cursus. Pour favoriser l’intégration de l’apprenant dans l’entreprise, des points réguliers faits auprès des tuteurs visent à s’accorder sur les rôles de chacun, le calendrier et les objectifs d’acquisition des connaissances et compétences. Ainsi, le rôle du tuteur et les enjeux de la formation sont clairement rappelés à l’occasion de réunions organisées avec l’entreprise en début de parcours, l’objectif étant de valider préalablement les missions confiées à l’alternant dans l’entreprise. Ces rencontres instaurent un dialogue régulier et transparent entre les différents acteurs. Dès l’entrée en formation, l’apprenant et son tuteur disposent de toutes les informations nécessaires à la réussite du parcours : programme détaillé des apprentissages, calendrier de la formation, progression pédagogique, description des compétences à acquérir, système d’évaluation précis et échéances clés. Un livret d’accueil complet comprenant

l’ensemble de ces renseignements et un livret de bord sont remis à l’alternant. Ce dernier permet de mesurer régulièrement sa progression (tous les semestres, à l’occasion d’entretiens réunissant l’apprenant, son tuteur et le Cesi) et de tracer utilement les échanges et observations. Parallèlement, le tuteur est convié à une réunion de travail regroupant l’ensemble des tuteurs de la promotion afin de s’approprier cette mission particulière qu’est le tutorat, facteur majeur de succès, et de comprendre les attentes en termes pédagogiques notamment. Au fil du parcours, l’équipe pédagogique du Cesi porte une attention particulière à l’évolution de l’apprenant, au travers d’échanges, de séances de recadrage si nécessaire, de médiation éventuelle avec l’entreprise, de plans d’action à proposer, d’une écoute constante, etc. Un bilan semestriel, réalisé sur la base du référentiel de compétences, pour dresser régulièrement un état des lieux de la montée en compétences de l’apprenant, est conduit par le pilote à l’issue des visites organisées en entreprise, en présence du tuteur.

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Bruno Palmieri, formateur au Cesi Orléans Comment les alternants vivent-ils le déroulement de la formation ?

« Plus on avance et plus les alternants acquièrent les clés que nous leur transmettons pour appréhender les projets. Nous leur donnons une méthodologie, les formons à travailler en groupe, à s’organiser pour parvenir à une planification complète, puis suivre un fil rouge toute une année en développant un projet opérationnel. »

La remise des diplômes

Sont-ils vraiment « acteurs » de leur formation ?

« Le Cesi a adopté un système de management par la qualité, certifié ISO 9001, ce qui suppose différents types d’évaluation : appréciations des étudiants sur les modules de formation pour des retours à chaud, évaluations de la formation dans son ensemble, etc. Toutes ces remontées s’inscrivent dans une logique d’amélioration continue, avec, à la clé, une coordination nationale des responsables pédagogiques pour faire évoluer les formations lorsque cela s’avère nécessaire. »

Le système d’évaluation

La certification des compétences repose sur trois modalités d’évaluation principales : En centre

• Des contrôles continus tout au long de la formation pour évaluer les savoirs/connaissances. • Des projets pour évaluer les savoir-faire, les pratiques et les comportements. • Des épreuves orales pour évaluer les comportements et la maîtrise de la fonction. En entreprise

• Une évaluation par le tuteur sur les aptitudes professionnelles : l’exercice de la mission, la maîtrise du métier attendu. • Une évaluation par le tuteur sur les comportements professionnels : le relationnel et la posture attendus pour ce métier.

• L’évaluation du chantier d’application conduit dans l’entreprise (atteinte des objectifs, maîtrise des délais, etc.). Épreuve finale

L’épreuve finale du parcours de formation consiste à rédiger un mémoire ou une thèse professionnelle avec une soutenance orale devant jury. Cette épreuve majeure permet d’évaluer si l’apprenant a réellement acquis la maîtrise de sa fonction et s’il est apte à exercer le métier. Pour garantir l’homogénéité du processus d’évaluation, quel que soit le centre du Cesi dans lequel l’alternant a suivi son parcours, un jury national d’attribution des titres RNCP a été mis en place. Il décide de l’attribution du diplôme au regard de l’ensemble des résultats obtenus lors des épreuves précitées. Ce jury est, entre autres, composé de professionnels des métiers préparés.

Le Cesi organise pour chacun de ses centres, annuellement et depuis presque dix ans, une cérémonie de remise des diplômes. Souhaitée comme un temps fort, cette cérémonie est l’occasion de mettre en avant et de fêter les diplômés, de remercier les équipes du Cesi ainsi que les formateurs pour leur investissement, d’associer les tuteurs et les entreprises au succès de leurs apprenants. Elle réunit également les familles et proches des diplômés, témoins privilégiés de leur évolution. Et après le diplôme...

L’insertion professionnelle étant au cœur de ses préoccupations, le Cesi s’est doté depuis plusieurs années d’un pôle Diplômes et Carrières chargé de

suivre de près l’évolution professionnelle de ses diplômés. La qualité de l’insertion professionnelle constitue à la fois la preuve de l’efficacité de ses dispositifs pédagogiques et de ses diplômes et un outil permettant d’ajuster, le cas échéant, les contenus de ses programmes à l’évolution des métiers. Parmi les diplômés enquêtés six mois après l’obtention de leur diplôme, 84 % sont en poste, ce qui révèle un excellent taux d’insertion. Ce sont près de 6 000 diplômés qui sont enquêtés chaque année. Enfin, parce que se constituer un réseau professionnel est capital pour évoluer dans sa fonction, le Cesi a regroupé l’ensemble de ses diplômés au sein d’une association, Cesi Alumni, qui bénéficie d’une plateforme permettant à chacun de prendre des nouvelles de son école et d’échanger avec ses pairs.

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Une nouvelle voie s’ouvre « Cesi Alternance : l’École Supérieure des Métiers »

Déjà précurseur sur les formations d’ingénieurs en apprentissage, le groupe Cesi, convaincu depuis vingt ans que l’alternance a toute sa place dans le supérieur, lance en 2014 « Cesi alternance : l’École supérieure des métiers ». Sous cette nouvelle appellation sont regroupés tous ses parcours professionnalisants accessibles à de jeunes titulaires d’un bac à un bac+4 autour de ses filières d’excellence en Informatique et numérique, Ressources humaines, Industrie et services et BTP.

L’École supérieure des métiers, qui affiche clairement son pari de parcours 100 % alternance, naît d’une conviction, d’un constat et d’une expérience : • La conviction que l’alternance constitue une voie privilégiée vers l’emploi, adaptée aux formations supérieures, comme le prouvent les taux élevés d’insertion professionnelle des jeunes passés par ces cursus. Pour le Cesi, la valeur du diplôme réside aussi dans l’expérience professionnelle qui, associée à la formation, valide concrètement un parcours professionnalisant. • Le constat que l’alternance représente une réelle alternative aux études proposées en formation initiale, car cette voie de formation permet également d’accéder à des postes à responsabilité et à des fonctions d’encadrement. En plus du principe de gratuité de la formation inscrit dans la loi, le jeune perçoit une rémunération versée par son entreprise, ce qui fait de l’alternance un formidable outil de promotion et d’ouverture sociale. • L’expérience du Cesi, précurseur sur le

terrain de l’alternance, montre clairement que ce choix de formation lève les freins et inquiétudes que peut générer l’entrée sur le marché du travail. Grâce à l’accès privilégié au monde de l’entreprise qui leur est proposé, les apprenants appréhendent mieux leur métier et leur environnement professionnel et peuvent, plus que les autres, saisir les perspectives de carrières qui s’offrent à eux.

L’École des Métiers, un concept novateur autour de l’alternance

Fidèle à sa volonté de répondre aux réalités du marché du travail, le Cesi a souhaité poursuivre son action dans une approche « compétences » au plus près des besoins des entreprises. Pour cela, comme indiqué précédemment, ses référentiels de certification sont conçus dans une logique « métier », afin d’articuler formation et application en entreprise dans une perspective de montée en compétences. Les cursus, tous diplômants, sont construits par niveau et par filière pour ouvrir à leurs bénéficiaires de véritables perspectives d’évolution professionnelle. Valoriser l’alternance en tant que voie parallèle, réelle alternative à la voie académique et non pas solution dégradée, est aujourd’hui l’ambition du Cesi. La structuration de ces parcours métiers, proposés en filières de bac à bac+5, autorise en effet le jeune alternant inscrit sur un parcours de technicien supérieur à se projeter plus clairement dans un plan d’évolution de carrière. Si son premier cursus est concluant, il pourra poursuivre vers un niveau supérieur ou, parce qu’il le souhaite, intégrer le monde professionnel en se voyant offrir la possibilité de revenir plus tard au Cesi pour se spécialiser.

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Une réponse appropriée aux enjeux de demain des entreprises

En proposant des parcours exigeants dans des filières qui recrutent, l’École supérieure des métiers vise à former les professionnels de demain que recherchent dès aujourd’hui les entreprises. Ces jeunes se dotent d’un bagage théorique et pratique qu’ils pourront valoriser tout au long de leur vie professionnelle, grâce à une première expérience professionnelle facilitée par l’alternance. Les entreprises sont toujours à l’affût de nouveaux talents pour assurer leur développement. Elles recherchent des compétences métiers à tous niveaux de responsabilité (de l’opérateur à l’expert en passant par le manager opérationnel ou le responsable de service), correspondant à autant de niveaux de qualification et de filières de formation. L’École supérieure des métiers leur propose de recruter via l’alternance des profils disposant déjà d’une sérieuse culture professionnelle et opérationnelle, et d’une première expérience in vivo dans une entreprise. Au final, les alternants du Cesi se révèlent rapidement opérationnels sur les missions qui leur sont confiées. L’École supérieure des métiers s’engage à la fois envers les entreprises recruteuses et envers les bénéficiaires de l’alternance : • Pour les entreprises, le Cesi garantit des collaborateurs opérationnels et compétents, capables de s’intégrer très rapidement au sein des équipes et de conduire des projets d’envergure.

• Pour les apprenants, le Cesi assure un

diplôme reconnu et une insertion durable sur le marché du travail dans le poste et le métier préparés. Forts de leurs expériences acquises lors de l’alternance, ils verront s’ouvrir des perspectives professionnelles attrayantes et des opportunités de mobilité au sein des entreprises.

L’ingénierie pédagogique du Cesi repose sur des référentiels métiers qui tiennent nécessairement compte des différentes conditions d’exercice réelles de ces métiers dans les entreprises. Avec des contextes professionnels en constante évolution, les programmes et référentiels de certification sont

Les 30 premières entreprises qui recrutent les alternants du Cesi 1 SNCF 2 RENAULT 3 LA POSTE 4 ERDF 5 EIFFAGE 6 SANOFI 7 TOTAL 8 SOGETI 9 SCHNEIDER 10 FAURECIA 11 EDF 12 ORANGE 13 LAFARGE 14 AIRBUS 15 ARCELOR MITTAL 16 SAINT-GOBAIN 17 OSIATIS 18 ADECCO 19 THALES 20 SITA 21 MANPOWER 22 ITM LAI 23 REVIMA 24 SNECMA 25 NESTLÉ 26 AERAZUR 27 OI MANUFACTURING 28 EADS 29 VEOLIA 30 VALEO

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LIVRE BLANC Les alternants ont une formation assez pratique et sont rapidement

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autonomes. Pour le jeune, ça peut déboucher sur une embauche, car on sait qui l’on recrute, s’il est immédiatement opérationnel, et cela joue pour l’évolution de carrière. Lionel Mange, responsable de domaine infrastructure chez SGD SA, groupe de 5 000 personnes, et tuteur d’alternants du Cesi

Géraldine Leclercq, alternante du Cesi de Toulouse, titre de niveau III « assistante RH », titre de niveau II « chargée des RH » « Le passage en entreprise pendant ma formation m’a permis d’avoir une expérience enrichissante et valorisante et aussi de créer des contacts. Il y a une forte corrélation entre le monde réel, professionnel, et l’école. C’est une aide pour prendre du recul et pour mieux assimiler les cours. Une fois sur le terrain, la connaissance acquise prend immédiatement sens. »

régulièrement enrichis par les experts métiers du Cesi. Ils le sont également par les réflexions menées au niveau des branches professionnelles, au travers de leurs observatoires métiers notamment, ainsi que par les nombreux échanges entre les ingénieurs de formation du Cesi et les tuteurs en entreprises des apprenants, partout en France. Cette logique partenariale, au cœur de l’offre de l’École supérieure des métiers, permet de proposer des parcours résolument tournés vers les perspectives concrètes d’emploi et de carrière. Les jeunes désireux de se professionnaliser bénéficient de parcours de formation exigeants qui les guident vers une insertion professionnelle durable et valorisée. Les diplômés qui le souhaitent peuvent en effet entrer directement sur le marché du travail en justifiant d’un premier bagage opérationnel. D’autres préféreront poursuivre, après un premier cursus en alternance, qui les conforte dans leur potentiel. Ils porteront alors plus loin leurs ambitions en se préparant à un degré de responsabilité plus élevé.

Une pédagogie au service d’une insertion durable dans l’emploi

Le regard porté sur l’alternance a considérablement évolué ces dernières années, en particulier avec la montée en puissance des formations bac+4 et bac+5. En donnant de manière évidente à l’alternance ses lettres de noblesse, ces hauts niveaux de qualification témoignent de la mise en œuvre d’une pédagogie de l’excellence, à laquelle le Cesi est particulièrement attaché. Pour former les professionnels de demain, l’École supérieure des métiers fait appel à des experts pour la construction des dispositifs et des diplômes, ainsi que dans les cursus de formation eux-mêmes. L’acquisition des compétences et connaissances indispensables pour exercer légitimement un métier et en maîtriser les contours dépend d’une combinaison des phases d’enseignement et de mise en pratique. Parce que théorie et expérience se complètent, le Cesi apporte à ses alternants des savoirs fondamentaux, notamment sur les domaines « cœurs de métiers » des programmes. Les entreprises sont également associées au dispositif d’évaluation : l’obtention de la certification dépend en effet à parts égales, et de façon indissociable, des évaluations en centre et de la réalisation d’une mission et d’un projet en entreprise. La mise en application sur le terrain des pratiques professionnelles développe effectivement les capacités d’apprentissage. L’entreprise transmet sa culture,

son expérience, ses valeurs, qui conduisent à créer une relation privilégiée avec l’alternant devenu salarié à part entière. L’alternance donne corps au concept d’« entreprise apprenante » : outil efficace d’intégration du jeune salarié dans l’entreprise, cette voie de formation est aussi un levier permettant de valoriser les collaborateurs en charge d’encadrer l’alternant. Les tuteurs et maîtres d’apprentissage, notamment lorsqu’il s’agit de salariés « seniors », assurent la transmission de leurs savoirs – y compris comportementaux – et de leurs pratiques professionnelles. L’accompagnement, clé de voûte de la formation

Pour que l’intégration de l’alternant dans l’entreprise se déroule dans les meilleures conditions, le Cesi porte une attention particulière à l’accompagnement. La construction, en amont de l’embauche, d’une relation étroite avec le recruteur est au cœur du dispositif pour que le jeune accomplisse au mieux les missions qui lui seront confiées. Concernant les entreprises, le Cesi conçoit ses dispositifs de manière à les accompagner dans leurs démarches de prérecrutement de collaborateurs sur les niveaux de postes recherchés, y compris et en particulier pour de futurs cadres.

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L’École supérieure des métiers permet de présenter le bon profil grâce à un processus de sélection exigeant : • Accompagnement

L’école supérieure des métiers

de

l’entreprise

dans la définition du poste et du profil attendu, en fonction de la mission qu’elle entend confier à l’alternant et de l’avenir qu’elle projette pour lui.

L’alternance, voie d’excellence

Le Cesi guide les alternants dès leur inscription dans leur choix d’orientation professionnelle. Le processus de sélection met en œuvre des outils qui servent également à accompagner l’apprenant dans son orientation initiale : tests de positionnement, entretiens individuels avec des experts « métiers », ateliers de préparation aux étapes de recrutement…

• Évaluation préalable du candidat

Avec un

Bac+4

(acquis, compétences, motivation à s’engager dans une voie professionnelle, réalisme du projet).

Se perfectionner Approfondir sa spécialité DEVENIR EXPERT Validation d’un titre de niveau I enregistré au RNCP* permettant d’entrer dans la vie active

être OPÉRATIONNEL en entreprise en tant que MANAGER/CONSULTANT

Philippe Meirieu, spécialiste des sciences de l’éducation et vice-président de la région Rhône-Alpes chargé de la formation tout au long de la vie Quels sont les modèles pédagogiques de l’alternance ?

Bac+2

DEVENIR CADRE Validation d’un titre de niveau II enregistré au RNCP* permettant d’entrer directement dans la vie active ou de poursuivre sur le niveau supérieur

Avec un

Bac

être OPÉRATIONNEL en entreprise en tant que RESPONSABLE

Se former Découvrir l’entreprise et les fondamentaux d’une discipline DEVENIR TECHNICIEN SUPÉRIEUR Validation d’un titre de niveau III enregistré au RNCP* permettant d’entrer directement dans la vie active ou de poursuivre sur le niveau supérieur

être OPÉRATIONNEL en entreprise en tant que TECHNICIEN SUPÉRIEUR

Une entrée possible à chaque niveau de formation

* RNCP : Répertoire National des Certifications Professionnelles

Avec un

Se professionnaliser Monter en compétences

« D’abord l’alternance “juxtapositive”, dans laquelle on juxtapose un enseignement théorique, avec sa propre logique, et une immersion dans des situations de travail sans lien explicite entre les deux. Cela produit des effets, mais l’articulation entre théorie et pratique n’est pas prise comme un objet structurant. C’est pourquoi on parle aussi de l’alternance “interactive”, vers quoi tout le monde cherche à tendre, mais qui est complexe à mettre en œuvre : entre les temps de formation, il faut une interaction et pas seulement une juxtaposition ; ce qui se travaille dans le centre est repris dans l’entreprise et vice versa. Pour autant, on trouve des deux côtés de la théorie et de la pratique. Aujourd’hui, ce qui est important, c’est de centrer cette articulation autour du concept de “décision”. Car, ce qui fait l’expertise dans n’importe quel métier, c’est bien la capacité à prendre la bonne décision au bon moment dans le bon contexte. Ce qui fait la véritable expertise aujourd’hui, c’est la capacité de progresser dans sa professionnalité par la compréhension des enjeux de toute décision, l’anticipation des scénarios possibles et le choix des modalités d’intervention pertinentes. » Comment se construisent dans le temps les stratégies pédagogiques ?

« Dans la formation, on va du plus simple au plus complexe, mais dans l’univers de la production, dans le réel de l’entreprise, le moins complexe n’anticipe pas forcément le plus complexe. Les formateurs ont une temporalité de la progressivité, l’entreprise a une temporalité de l’imprévisibilité. Chacun des alternants aura des expériences différentes vécues selon des temporalités distinctes, mais quand ils se retrouveront dans le centre de formation, la même chose leur sera enseignée. La difficulté est donc de trouver des points de recoupement de cette temporalité, et pas seulement de les juxtaposer. Il faut que les maîtres de stage et les formateurs se mettent d’accord autour de grands objectifs sur lesquels mettre le focus, à un moment donné, en les articulant à leur logique propre. »

53

LIVRE BLANC Le passage dans différentes entreprises grâce à l’alternance m’a permis

CESI

52

de conduire de vraies missions professionnelles, de travailler sur des projets complets et très intéressants. Ce sont autant d’atouts sur un CV ! Tout dépend aussi de l’ambition sur le parcours de formation, si L’on vise un niveau I ou un niveau III. Élise Hauzay, diplômée du Cesi de Rouen de niveau III « gestionnaire en maintenance et support informatique », de niveau II « responsable en ingénierie réseaux » et de niveau I « mastère spécialisé en management de projet »

Des formations débouchant sur des métiers d’avenir

• d’Encourager l’apprenant qui, valorisé

Taux de diplômés en poste 6 mois après l’obtention du titre par filière

Informatique et numérique Industrie* et services

85 %

Qu’ils se forment aux fonctions de technicien supérieur, responsable ou manager, les diplômés du Cesi doivent, à l’issue de leur formation, être en mesure de se prévaloir d’un parcours les ayant conduits à un métier assurant leur avenir. L’École supérieure des métiers a donc structuré son offre alternance en quatre filières professionnelles offrant des perspectives de recrutement particulièrement intéressantes : Informatique et numérique, Ressources humaines, Industrie et services, BTP, ses domaines d’expertise. En proposant des cursus préparant à quelque 24 métiers, le Cesi s’efforce de répondre aux attentes des entreprises qui recherchent des compétences rares et des salariés immédiatement opérationnels.

82 %

par l’obtention d’un premier cycle en alternance, se projette plus aisément vers de nouvelles ambitions en ayant pris de l’assurance sur ses capacités à poursuivre des études tout en travaillant. Les jeunes ayant fait le choix de l’alternance se construisent en s’appuyant sur les succès obtenus en centre de formation et en entreprise. Tout au long de leur parcours, ils montent progressivement en compétences et adaptent leur projet professionnel en fonction de leur vécu dans l’entreprise et des opportunités qui leur sont offertes. • de Faire connaître les métiers auprès des jeunes, en leur faisant rencontrer des entreprises qui recrutent, mais ne trouvent pas ces compétences sur le marché de l’emploi. Le métier de technicien supérieur « méthodes et amélioration continue en industrie » est par exemple méconnu des jeunes alors que de très belles entreprises cherchent continuellement à recruter de tels profils, avec difficulté.

Le Cesi présente une offre de formation susceptible  : BTP 

Ressources humaines

87 %

• de Répondre aux besoins et envies de 85 %

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

*Qualité - Sécurité - Environnement - Performance industrielle

chacun, en formant des professionnels sur les métiers proposés dans les filières qui recrutent avec une entrée par niveau en fonction des prérequis du candidat. Ceux qui ont le potentiel peuvent poursuivre après une première expérience professionnelle ou, à l’issue de leur premier cycle en alternance, continuer leur parcours dans un cycle supérieur.

• de déboucher sur des emplois qualifiés et valorisés notamment au niveau de la rému-

nération. Celle-ci est en effet de 23 100 € bruts par an pour le premier emploi des jeunes diplômés de niveau bac+4 et de 27 400 € pour les bac+5 1, contre respectivement plus de 26 600 € et près de 32 500 € pour les diplômés du Cesi. 1 - Source : Apec.

Salaire annuel brut moyen du premier poste jeune diplômé (Ces moyennes n’incluent pas les diplômés salariés expérimentés)

35 000

32 447

30 000 26 611

25 000

22 839

20 000 Bac+5

15 000

Bac+3/4 Bac+2

10 000 5 000 0

2012

55

LIVRE BLANC

CONCLUSION

54

Des expertises pour construire l’avenir Sophie Crespy, Directeur Cesi Alternance

La dernière étude du Céreq concernant l’insertion professionnelle des jeunes actifs, publiée le 8 avril 2014, confirme leur très difficile accès au marché de l’emploi, détérioré par plusieurs années de crise économique. En 2013, près de 22 % cherchent un emploi trois ans après avoir quitté l’école, soit le niveau de chômage « le plus haut jamais observé dans les enquêtes d’insertion » (Céreq). Pour autant, cette génération justifie globalement d’un niveau d’études plus élevé. Une constance cependant, les non-diplômés demeurent les plus durement touchés. Aussi, si le diplôme reste un atout pour trouver un emploi, la «transition de l’école à l’emploi s’avère bien plus difficile », marquée par des périodes de chômage, d’emplois précaires, de stages. Et pourtant, sans surprise, les recruteurs continuent de rechercher des diplômés avec expérience professionnelle. Les jeunes sortis du supérieur l’ont bien compris : d’après cette même étude, ils sont de « plus en plus nombreux à se diriger vers l’alternance après leur première formation initiale. Durant les trois premières années

de vie active, près d’un jeune sur dix a fait ce choix, notamment ceux titulaires d’un bac+2 ». Bénéficier d’une première expérience professionnelle et d’un diplôme sanctionnant une fin de cursus plus « métier » constitue aujourd’hui l’un des principaux leviers d’accès à un premier emploi. D’autres bénéfices sont à souligner que personne ne remet en cause aujourd’hui. On peut citer notamment l’intérêt de l’alternance comme réponse au décrochage scolaire, ou à la pénurie d’emplois constatée dans certains secteurs, ou encore au nécessaire transfert des compétences dans l’entreprise, soucieuse de perpétuer son savoir-faire. Sa capacité à faire « fonctionner » l’ascenseur social, en permettant aux plus modestes d’allier études et emploi rémunéré, est également avancée. Malgré tout, les perspectives peuvent inquiéter : le nombre de contrats en alternance a diminué de 43 000 postes en 2013. Ils étaient 541 000 à bénéficier d’un contrat d’apprentissage et de professionnalisation en 2012, contre 498 000 en 2013.

57

LIVRE BLANC

CONCLUSION

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La formation doit répondre aux besoins des bénéficiaires et des entreprises, la formation n’est pas une fin en soi. Aujourd’hui, les organismes de formation doivent s’emparer de la question de l’accompagnement. Les dispositifs de formation doivent être plus réactifs, davantage en relation avec les besoins, sur la base de diagnostics de territoire et de branche. Le système de la formation en France,

Différentes causes expliquent cette baisse : la conjoncture économique et l’attentisme des entreprises face à une crise qui n’en finit pas de produire ses effets, la diminution ou suppression de certaines aides versées aux employeurs d’apprentis notamment, ainsi que la concurrence d’autres dispositifs nouvellement créés, tels que les emplois d’avenir vers lesquels les jeunes seraient systématiquement orientés. Cette tendance, que tous les acteurs déplorent, montre la fragilité du dispositif, en partie trop tributaire de son financement, des politiques publiques et des priorités de l’État.

qui représente 32 milliards d’euros par an, n’a pas encore fait la preuve de son efficacité. LAURENCE DEMONET, VICE-PRÉSIDENTE À LA FORMATION ET L’ACCOMPAGNEMENT DES PARCOURS DU CONSEIL RÉGIONAL DE LORRAINE

La dernière réforme de la formation professionnelle illustre bien cette difficulté. Tout en rappelant la nécessité de sécuriser les dispositifs en alternance, la loi du 5 mars 2014 entérine une baisse des fonds de la professionnalisation suscitant la crainte légitime d’un recours moindre aux «  contrats pro  » par les entreprises. La modification, en parallèle, des circuits de financement de l’apprentissage nourrit également certaines inquiétudes. Or l’alternance, pour continuer à se développer, doit s’appuyer sur un système organisé, pérenne, offrant à l’ensemble des parties prenantes, bénéficiaires compris, une visibilité suffisante pour parier durablement sur ce dispositif. Cela suppose évidemment une volonté politique clairement affichée d’inverser cette tendance à la baisse, volonté qui doit être relayée par une mobilisation sans faille de l’ensemble des acteurs sur le terrain (organismes de formation, employeurs, financeurs d’alternance, branches professionnelles, etc.).

En premier lieu, le développement de l’alternance en France, puisqu’il s’agit de cela, doit s’affranchir d’un certain nombre de freins, de clivages persistants. L’alternance doit permettre de préparer à tous niveaux de qualification (infra-bac et post-bac)

• Limiter l’accès aux seuls bénéficiaires de formations infra-bac, au motif que l’alternance étendue dans le supérieur viendrait à priver ceux qui en ont le plus besoin, n’a pas de sens aujourd’hui. Encore une fois, le dispositif fait aussi ses preuves lorsqu’il est utilisé comme cursus professionnalisant après un premier parcours en formation initiale pour acquérir une expérience professionnelle sérieuse et décrocher un premier emploi. Son déploiement dans le supérieur, parce qu’il répond à une demande des entreprises et des jeunes diplômés, valorise le dispositif (qui n’est alors plus seulement entendu comme la dernière alternative à l’échec scolaire) et bénéficie évidemment à l’ensemble des formations proposées en alternance. « Vers une alternance non plus subie, mais choisie », pour reprendre les termes du rapport au Président de la République française d’Henri Proglio de novembre 2009 « Promouvoir et développer l’alternance ». • La problématique du financement reste cependant entière, s’agissant notamment de l’apprentissage, l’assiette de la taxe n’étant pas suffisante pour couvrir l’ensemble des besoins de formation

en alternance. De manière différente, mais avec un effet tout aussi négatif, la part de prise en charge des coûts de formation en contrat de professionnalisation par les Opca – bien qu’elle soit généralement progressive en fonction des niveaux de qualification – amène régulièrement les entreprises à abonder en complément de financement, et constitue donc un frein à l’embauche d’alternants sur des métiers qualifiés. Une réflexion autour des modalités de financement de l’alternance dans le supérieur doit donc être menée, financement qui pourrait passer par une participation individuelle de l’alternant dans des limites qui, bien que remettant en cause le principe de gratuité de l’alternance, devraient cependant rester raisonnables et acceptables. L’alternance doit pouvoir s’afficher comme étant une voie parallèle et non pas une voie alternative aux études dites « initiales »

Aujourd’hui, plus de 85 % des jeunes sont bacheliers. Il est donc primordial, non seulement de leur donner accès à des filières professionnalisantes d’excellence, mais encore de rendre attrayantes ces filières qui recrutent. • L’offre de formation en alternance doit donc être plus largement diffusée à l’instar de l’offre « études supérieures » proposée sur une plateforme unique, le portail APB (Admission postbac) limité aux seuls diplômes de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

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LIVRE BLANC

CONCLUSION

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• Une nouvelle grille de niveaux (ou à tout le moins une nouvelle grille de lecture) des diplômes à finalité professionnelle délivrés à la fin du cursus (certifications enregistrées au RNCP) devrait être proposée pour une meilleure lisibilité de cette offre. En effet, ces niveaux (V, IV, III, II et I) – qui expriment les différents positionnements des emplois que pourraient occuper les titulaires de la certification en fonction du métier visé ou des responsabilités susceptibles d’être assumées – sont issus d’une nomenclature qui date de plus de 45 ans. Ils suscitent énormément de questionnements de la part des candidats à l’alternance désireux de valoriser le diplôme obtenu à l’issue de leur cursus, mais qui ne se reconnaissent pas dans ce cadre de référence.

La valorisation de l’alternance, dans le supérieur notamment, exige également la mise en œuvre de formations de qualité, dispensées via ce dispositif. Le taux d’insertion professionnelle, dans le métier et le niveau préparés, à l’issue de l’obtention du diplôme est évidemment le meilleur des indicateurs et mériterait d’être communiqué obligatoirement aux candidats à l’alternance. La création d’un label, garantissant la qualité des dispositifs de formation mis en œuvre par les écoles et organismes de formation par l’alternance, serait une réponse complémentaire appropriée.

au travers d’une grille d’évaluation donnant lieu à des rencontres régulières entre le tuteur, le pilote de la formation et l’alternant.

Les préconisations précitées d’Henri Proglio pourraient constituer un excellent cadre de référence à partir duquel de futurs indicateurs seraient définis :

YVES HINNEKINT, DIRECTEUR GÉNÉRAL D’OPCALIA

• Il faut faire évoluer la terminologie propre à l’alternance, trop marquée par ses modalités de mise en œuvre (par exemple le « contrat aidé ») et qui ne valorise pas assez l’exigence de ces parcours conduisant à des métiers qualifiés. Il n’est plus rare aujourd’hui qu’un jeune bachelier conclue successivement deux contrats de professionnalisation pour aller chercher un diplôme bac+4 et se professionnaliser sur un métier à responsabilité. Mener des études tout en exerçant une activité professionnelle exige rigueur, organisation et persévérance. Le vocabulaire usité ne valorise pas assez ces efforts. « Décloisonner » l’alternance en s’appuyant sur une terminologie plus générique, moins spécifique à ce dispositif, servirait le statut même de l’alternant.

Un unique temps de formation réparti en deux familles de séquences – académique et entreprise – coordonnées, complémentaires et interactives

C’est le principe même de l’alternance. La formation est partagée en deux lieux différents que sont le centre de formation et l’entreprise. Les référentiels de formation doivent a minima contenir cette exigence de complémentarité, de coconstruction, sans laquelle il n’y a pas d’alternance. Certains organismes comme le Cesi ont fait le choix d’aller plus loin dans le principe en exigeant du tuteur qu’il participe également à l’évaluation de l’apprenant pour mesurer, tout au long du parcours en alternance, l’évolution de ses acquis professionnels. Ces étapes sont formalisées

Un apprenant en situation professionnelle, responsabilisé, à l’intérieur d’une communauté de travail, pour une durée significative 

L’intégration de l’alternant dans l’entreprise est dictée par le « principe d’utilité ». Parce qu’il

n’est pas stagiaire, mais salarié à part entière, il s’agit dès le démarrage du cursus en alternance de le responsabiliser dans l’entreprise au travers d’une mission claire, précise, en lien avec le métier préparé et sur laquelle il devra, au fur et à mesure, prendre de plus en plus d’autonomie. Cette mission, définie en amont entre le tuteur et le pilote de formation, vise un double objectif : permettre à l’alternant de monter progressivement en responsabilité et en compétences sur le métier préparé, tout en répondant à un besoin identifié en interne par l’entreprise.

Comment les Opca valorisent-ils la formation en alternance ?

« Le système que nous connaissons depuis des années permet au bénéficiaire du contrat de professionnalisation d’être embauché directement dans l’entreprise quand le dispositif est bien “vendu” par l’organisme de formation. Les Opca devraient être mieux utilisés comme relais d’information auprès des entreprises avant l’ouverture d’une session de formation. L’idéal serait de disposer en ligne de toutes les sessions en alternance pour une branche ou un territoire. » Quel accompagnement est mis en place en direction des tuteurs ?

« C’est fondamental ! Nous proposons de la formation et de l’accompagnement pour les tuteurs, de plus en plus à distance avec des “e-tuteurs”. Le sujet est surtout celui de la valorisation du rôle du tuteur : faut-il aller plus loin dans la reconnaissance avec une certification ? C’est une vraie question, de nombreuses entreprises s’en sont déjà saisies avec des résultats probants sur l’investissement de leurs salariés. » La dernière réforme de la formation induit-elle un risque de pénurie de financements pour l’alternance ?

« Le “0,5 %” dédié à la professionnalisation n’a pas été touché ; il n’y a donc pas de fonds en moins pour l’alternance. Du côté du contrat d’apprentissage, comme les Opca vont collecter cette taxe à partir de 2016, nous jouerons tous un rôle de pédagogue auprès des entreprises qui ne savent pas pourquoi et à qui elles versent. Nous aurons à cœur de permettre aux entreprises d’avoir une visibilité sur l’affectation des fonds. Nous serons un interlocuteur des conseils régionaux pour les alerter lorsqu’il y a des fonds à mobiliser sur une action en particulier, avec tel institut ou telle école. »

61

LIVRE BLANC

CONCLUSION

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Plus cette mission présente une véritable valeur ajoutée pour l’entreprise, plus rapide et meilleure est l’intégration de l’alternant. Ce dernier se trouve légitimé dans son travail et peut s’appuyer sur cette mission pour travailler notamment avec d’autres collaborateurs et s’impliquer dans les projets de l’entreprise. Le tuteur joue également pleinement son rôle d’accompagnement et de socialisation professionnelle. L’exigence de cette mission, sa définition et son périmètre sont donc incontournables. Elle guide l’ensemble des acteurs (alternant, tuteur, organisme de formation) et sert utilement de support pour mesurer la progression pédagogique et professionnelle de l’alternant. Les entreprises comme les organismes de formation ont parfois une vision insuffisante des métiers

S’agissant de diplômes à finalité professionnelle, l’offre de formation doit correspondre aux besoins métiers des entreprises, pour assurer l’employabilité des futurs diplômés et se prémunir contre le risque de pénurie d’emploi. Il n’est pas toujours aisé d’avoir cette vision des métiers pourtant essentielle, parce qu’elle nécessite l’accès à des études spécifiques, une veille importante et experte ainsi qu’une analyse de l’emploi. Les entreprises, et notamment les PME, ne disposent ni du temps nécessaire ni des moyens pour le faire. D’autre part, seuls les écoles et organismes de formation disposant d’un vrai réseau et d’une assise nationale sont en mesure de mener ce travail exigé, ne serait-ce qu’à l’occasion d’une demande d’enregistrement au RNCP.

Maintenant, la loi du 5 mars 2014 vise à généraliser au sein des branches professionnelles les « observatoires des métiers », lesquels réalisent notamment des études prospectives sur l’évolution de leurs métiers. Il conviendrait de créer une véritable passerelle entre les travaux réalisés par ces observatoires des métiers (amenés à se développer avec la réforme) et les écoles, centres de formation, capables de créer des dispositifs de formation adaptés en réponse aux besoins identifiés. Un tutorat reconnu 

Le tutorat est l’une des clés de réussite du parcours en alternance. La transmission des bonnes pratiques professionnelles est évidemment mieux assurée lorsque le tuteur est non seulement expert dans son métier, mais qu’il justifie également d’une expérience importante dans sa fonction même de tuteur. Pour autant, le tutorat exige un investissement personnel important de la part de celui qui accepte ce rôle. Il convient donc de valoriser cette fonction dans l’entreprise. La formation des tuteurs est un dispositif déjà connu et financé. La généralisation d’une certification de tuteur et son financement, par les Opca par exemple, permettraient non seulement de mieux récompenser cet investissement, mais également de valoriser la « marque employeur » de l’entreprise qui met tout en œuvre pour faciliter l’intégration des alternants. Cette certification reconnaît que le tuteur a acquis les compétences professionnelles

JEAN-MARIE MARX, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’APEC Quelle est l’incidence du contexte économique sur l’alternance ?

« La conjoncture économique actuelle invite les entreprises à la prudence. Elles se placent naturellement dans une position d’attente par rapport à l’impact de certaines mesures à l’œuvre ou annoncées, notamment le Pacte de responsabilité. Les employeurs n’anticipent pas encore l’avenir, mais la tendance peut se retourner d’ici fin 2014. Sur les deux dernières années, le recrutement de jeunes sans expérience professionnelle a fortement décru. La baisse pour ce public est de 4 % en 2013 et devrait être de 5 ou 6 % en 2014, alors que les profils “cadres” avec une expérience professionnelle sont en augmentation. » L’alternance est-elle vraiment un atout pour l’insertion durable dans l’emploi ?

« Entre 40 et 50 % des alternants se voient proposer un contrat à l’issue de leur formation, contre 25 % de ceux qui sortent d’un stage. Il s’agit à 60 % d’un CDI, contre moins de 50 % pour les non-alternants. De plus, 70 % de ceux passés par l’alternance, à niveau bac+4 ou plus, accèdent directement à un emploi de cadre, et le salaire à l’embauche est supérieur d’environ 10 à 15 %. On peut parler de prime à l’alternance ! Il est clair que les alternants ont davantage de chances d’accéder à un emploi, plus rapidement en CDI, plus facilement avec un statut cadre et sont mieux payés. » Comment l’alternance est-elle généralement perçue par les bénéficiaires ?

« Premièrement, les alternants se disent à 90 ou 95 % satisfaits de leur formation. Parmi les raisons qu’ils évoquent : la mise en situation, l’approfondissement de leur connaissance du monde de l’entreprise, ou encore la possibilité de tester l’attrait de leur futur métier. D’une manière générale, ils pensent bénéficier d’une meilleure intégration au sein des équipes de l’entreprise qu’avec un stage. Pour certaines entreprises, l’alternance est, dans le cadre de la Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), une manière de constituer un vivier de recrutements. »

63

LIVRE BLANC Les relations au travers des réunions de tuteurs et les entretiens

CONCLUSION

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tripartites sont des moments privilégiés permettant d’échanger sur l’adéquation de nos parcours de formation (tant sur l’aspect contenu que déroulé pédagogique) en lien avec les besoins et les évolutions des entreprises. THIERRY PERRIN, CESI NANCY

MARC JOUENNE, DRH D’AIRBUS FRANCE Que deviennent les alternants que vous recrutez ?

« À fin 2013, les trois quarts de nos alternants, qui ont voulu s’intégrer dans le marché de l’emploi à la sortie de l’alternance, ont trouvé un emploi chez Airbus ou chez nos partenaires dans le cadre du concept d’“entreprise étendue” qui comprend les sous-traitants, fournisseurs, équipementiers, etc. Depuis un an, des “parcours partagés d’apprentissage” ont été mis en place, pour mettre en relation un apprenti avec une autre entreprise en complément d’Airbus durant sa période de formation. Dès 2014, ceux que nous recrutons en apprentissage passeront au moins deux semaines chez un partenaire. Tous les profils nous intéressent, tout dépend de nos besoins en emploi ! » Comment AIRBUS gère-t-il la relation avec les organismes de formation ?

« Le développement de l’alternance se fait en relation étroite avec les établissements, nous discutons en particulier des rythmes de formation, de l’adéquation entre nos besoins et l’offre présentée. Avec nos partenaires – organismes de formation, écoles d’ingénieurs, business schools, universités –, nous avons un fort niveau d’exigence, que nous contractualisons dans le cadre de conventions. Au final, le taux de rupture des contrats d’alternance est très faible, aux alentours de 1 %. Pour mieux développer nos relations avec les écoles, ces conventions abordent des sujets comme les stages, le marketing emploi, en insistant sur l’importance du suivi qualitatif. »

conformes aux exigences contenues dans un référentiel et peut mettre en pratique ses compétences au service de l’alternant. Elle est délivrée par les organismes dits « certificateurs », se référant à la norme de certification des personnes. Au-delà des préconisations d’Henri Proglio et du cadre de référence opposable qu’il propose, d’autres facteurs de valorisation de l’alternance paraissent devoir également être mis en avant, notamment : Un plus large recours à des formateurs professionnels dits « occasionnels »

Experts en activité, les formateurs rapprochent la théorie et la pratique. Leur ancrage professionnel permet aux alternants de mieux situer l’interaction décisions/enjeux dans leur métier. Parce qu’ils jouent le rôle d’interface entre les connaissances académiques et les activités réelles de l’entreprise, ils aident les alternants à former leur jugement et à s’approprier les bonnes pratiques de l’exercice quotidien du métier réel. Leurs apports offrent des avantages incontestables dans l’évolution des compétences des alternants. C’est la raison pour laquelle le recours à des professionnels du métier en activité dans ces cursus en alternance constitue un vrai plus de la formation. La difficulté est que la possibilité de recourir à ces intervenants qualifiés

est de plus en plus limitée par la loi, et dans la durée et dans le nombre d’interventions, ce qui met en risque social les écoles qui fonctionnent sur ce modèle pourtant éprouvé. Il conviendrait donc de fixer un cadre légal sécurisé pour maintenir la qualité des enseignements apportés. Une souplesse d’organisation laissée aux organismes de formation dans la définition des rythmes d’alternance – en début de formation notamment

L’apprentissage de certains métiers exige une préparation en centre de formation importante en amont, avant que l’alternant ne soit opérationnel dans sa mission en entreprise. À titre d’exemple, le métier d’analyste-programmeur ou de développeur informatique exige a minima deux mois en centre à temps plein pour apprendre les bases de la programmation. La POE (Préparation opérationnelle à l’emploi) avant conclusion d’un contrat de professionnalisation, et notamment la POE collective, répond partiellement à cette problématique, mais est compliquée à mettre en place, car elle fait appel à d’autres acteurs tels que Pôle emploi. Autre solution : l’école pourrait donner à l’alternant les bases des savoir-faire utiles à son intégration dans l’entreprise, durant par exemple les six à huit premières semaines du contrat en alternance, lorsque le métier préparé l’exige.

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LIVRE BLANC

ANNEXES

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Interviews

prévisionnels, nous devrions retrouver des niveaux de recrutement plus élevés : entre 200 000 et 210 000 recrutements en 2015 et 2016. L’alternance a perdu 40 000 bénéficiaires par an par rapport à 2007.

Comment expliquez-vous la baisse enregistrée ces deux dernières années ?

Jean-Marie Marx, directeur général de l’Apec

Quelle est aujourd’hui la réalité de l’alternance et ses perspectives à moyen terme ?

La recherche de compétences à des niveaux bac+4 et plus (soit les masters, les titres et diplômes des écoles d’ingénieurs et de commerce) va se développer d’ici 2016, après deux années assez moyennes. Nous en sommes à environ 160 000 recrutements par an à ce niveau de qualification, contre 200 000 avant la crise de 2009. Même avec une conjoncture à croissance modérée et compte tenu des départs à la retraite

La baisse de 2013, de l’ordre de 10 %, s’explique par deux phénomènes importants. La conjoncture économique d’abord, qui invite les entreprises à la prudence. Elles se placent naturellement dans une position d’attente par rapport à l’impact de certaines mesures à l’œuvre ou annoncées, notamment le Pacte de responsabilité dont on ne connaît pas encore tous les éléments. Elles n’anticipent pas encore l’avenir, mais la tendance peut se retourner en cours d’année 2014. Un second élément important est que, contrairement aux prévisions de l’Agirc, les départs en retraite en 2013 ont été moins importants qu’escompté, avec un différentiel d’environ 4 000 à 5 000. Nous aurons en 2015 et 2016 quasiment 10 000 départs à la retraite en plus, ce qui accroît de fait le potentiel de recrutement et notamment en alternance. Nous devrions ainsi retrouver les niveaux intéressants de recrutement de personnels d’encadrement d’ici un à deux ans.

La baisse concerne-t-elle tous les profils d’alternants ?

Dans cette période, le recrutement de jeunes sans expérience professionnelle a fortement décru. La baisse pour ce public est de 4 % en 2013 et

devrait être de 5 ou 6 % en 2014, alors que les profils « cadres » avec une expérience professionnelle sont en augmentation. D’une manière générale, l’insertion dans l’emploi est plus difficile pour les entrants sur le marché du travail. Autre élément notable, le taux d’insertion des diplômés de niveau bac+4 et plus s’est fortement effondré sur la promotion sortie en 2012, passant de 71 % à 64 % un an après l’obtention de leur diplôme. Plus d’un tiers des diplômés ne trouvent donc pas d’emploi après leur passage par l’alternance. Cela s’explique encore une fois par les tensions que nous connaissons sur le marché du travail ; nous sommes dans un creux, mais, normalement, cela devrait se redresser dans les deux prochaines années.

La formation en alternance constitue-t-elle une plus-value réelle en termes d’insertion professionnelle ?

Globalement, la première plus-value de l’alternance est de permettre un meilleur accès à l’emploi. Dans beaucoup de cas, les entreprises font une proposition d’embauche à l’issue du contrat d’alternance. C’est manifestement plus important que pour les filières classiques de formation : 40 à 50 % des alternants se voient proposer un contrat, contre 25 % de ceux qui sortent d’un stage. Il s’agit à 60 % d’un CDI, contre moins de 50 % pour les non-alternants. De plus, 70 % de ceux passés par l’alternance, à niveau bac+4 ou plus, accèdent directement à un emploi de cadre, et le salaire à l’embauche est supérieur d’environ 10 à 15 %. On peut parler de prime à l’alternance ! Il est clair que les alternants ont davantage de chances

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LIVRE BLANC

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Yves Hinnekint, directeur général d’Opcalia

d’accéder à un emploi, plus rapidement en CDI, plus facilement avec un statut cadre et sont mieux payés.

Quels sont les secteurs particulièrement en pointe sur l’alternance et ceux qui devraient l’être ? Quels sont les facteurs de blocage ?

Quelles sont les caractéristiques des jeunes issus de l’alternance : atouts, points faibles, spécificités dans l’évolution professionnelle, etc. ?

Premièrement, les alternants se disent à 90 ou 95 % satisfaits de leur formation. Parmi les raisons qu’ils évoquent : la mise en situation, l’approfondissement de leur connaissance du monde de l’entreprise, ou encore la possibilité de tester l’attrait de leur futur métier. D’une manière générale, ils pensent bénéficier d’une meilleure intégration au sein des équipes de l’entreprise qu’avec un stage. Pour certaines entreprises, l’alternance est, dans le cadre de la GPEC, une manière de constituer un vivier de recrutements.

Il y a clairement une surreprésentation des filières alternées dans certains secteurs. L’industrie attire plus de 30 % des alternants, alors que le secteur représente 15 % des recrutements au global. Mais il faut aussi tenir compte du fait que ce secteur peut également préparer à des métiers de services. A contrario, l’informatique compte pour 5 à 10 % des alternants, mais 20 % des recrutements de cadres. Il y a donc des marges importantes de progrès en termes de mise en place des formations. L’alternance existe, mais n’est pas encore assez développée, alors que la demande est forte.

Quels sont les atouts du contrat de professionnalisation par rapport au contrat de qualification supprimé en 2004 ?

Je n’ai pas l’impression qu’il y ait beaucoup de changements, même si le contrat de qualification était davantage calqué sur l’année scolaire. Avec le contrat de professionnalisation, les formations sont organisées tout au long de l’année. Le dispositif n’est pas cantonné à une date unique, qui entraînait le phénomène d’engorgement que nous avons connu avec le contrat de qualification.

Identifiez-vous des spécificités sur le niveau de qualification des bénéficiaires ?

Majoritairement, les contrats de professionnalisation concernent davantage les jeunes, mais sont également ouverts aux adultes demandeurs d’emploi. À mon goût, les jeunes recherchent encore trop souvent un diplôme, alors que le public adulte vise davantage des certifications ou des qualifications. Il y a vraiment une différence culturelle avec, par exemple, le système allemand qui porte l’alternance dans son ADN, sans forcément rechercher à tout prix le diplôme. En France, nous restons arc-boutés sur ce point. Il y a un travail de fond à effectuer, surtout si nous

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avons la capacité de développer davantage l’offre pédagogique permettant d’assurer une insertion professionnelle par l’obtention d’une qualification qui ne passe pas nécessairement par la case « diplôme ». Les CQP n’ont pas l’air de séduire les jeunes publics : il faut donc convaincre que le tout diplômant n’est pas la seule solution. On peut parfaitement trouver un job avec un CQP en poche.

L’information des jeunes sur le contrat de professionnalisation est-elle correctement assurée ?

Il reste des choses à améliorer. Le système que nous connaissons depuis des années permet au bénéficiaire du contrat de professionnalisation d’être embauché directement dans l’entreprise quand le dispositif est bien « vendu » par l’organisme de formation. Depuis 4 ou 5 ans, nous observons une forte pression du côté des Opca pour augmenter le nombre de contrats de professionnalisation et mieux les proposer à leurs entreprises contributrices, toutes tailles confondues. Les petites entreprises ne sont pas contre, mais n’ont pas toujours du temps à y consacrer ; il nous faut prendre ce sujet en main, avec un travail de communication adapté. D’une manière générale, dans les Opca, nous n’avons pas assez pris en compte la sensibilisation des jeunes et de leurs parents, en particulier au travers d’outils comme les réseaux sociaux. Opcalia vient ainsi de créer le site Moncontratpro.com, véritable communauté entre jeunes, entreprises et centres de formation pour dynamiser l’alternance. Il reste vraiment un travail important à réaliser sur la représentation que se font les uns et les autres de l’alternance.

Quel est le rôle d’Opcalia dans l’accompagnement des entreprises et des jeunes ?

Nous assurons leur mise en relation au travers de l’offre de formation proposée et, concrètement, nous constatons actuellement une augmentation de 5 à 10 % du nombre de contrats de professionnalisation par an. Opcalia joue un rôle d’informateur pour créer le réflexe chez les entreprises qui hésitent à recourir à l’alternance, ou ne savent pas comment trouver les jeunes et les formations qui répondent à leurs attentes. Pour les aider, les Opca s’occupent de tous les aspects administratifs. Opcalia a innové avec le dispositif Prodiat lorsqu’il n’y a pas la bonne offre de formation au bon endroit. Grâce à Prodiat, nous construisons un parcours avec un organisme de formation « architecte », sur 200 à 300 heures qui sont suivies dans un organisme de formation ou dans l’entreprise. C’est un contrat de professionnalisation court, réactif, qui profite aux entreprises, car elles trouvent là un dispositif sur mesure. Prodiat, lancé de manière expérimentale en 2009, est industrialisé dans le réseau Opcalia depuis 3 ans.

le nombre de contrats de professionnalisation, car nous avons la capacité de savoir quels sont les organismes délivrant telle formation, à tel endroit, et s’il est possible d’y inscrire un jeune. Les Opca devraient être mieux utilisés comme relais d’information auprès des entreprises avant l’ouverture d’une session de formation. L’idéal serait de disposer en ligne de toutes les sessions en alternance pour une branche ou un territoire.

Partagez-vous les craintes de certains, liées à la suppression du « 0,9 % », sur les Quel accompagnement est mis en place en

crédits mutualisés qui financent le plan

direction des tuteurs ?

de formation ?

C’est fondamental ! Nous proposons de la formation et de l’accompagnement pour les tuteurs, de plus en plus à distance avec des « e-tuteurs ». Le sujet est surtout celui de la valorisation du rôle du tuteur : faut-il aller plus loin dans la reconnaissance avec une certification ? C’est une vraie question, de nombreuses entreprises s’en sont déjà saisies avec des résultats probants sur l’investissement de leurs salariés.

Il n’y a pas de rapport avec le contrat de professionnalisation. Le « 0,5 % » dédié à la professionnalisation n’a pas été touché ; il n’y a donc pas de fonds en moins pour l’alternance. Du côté du contrat d’apprentissage, comme Opcalia va collecter cette taxe à partir de 2016, nous allons jouer un rôle de pédagogue auprès des entreprises qui ne savent pas pourquoi et à qui elles versent. Nous aurons à cœur de permettre aux entreprises d’avoir une visibilité sur l’affectation des fonds. Nous serons un interlocuteur des conseils régionaux pour les alerter lorsqu’il y a des fonds à mobiliser sur une action en particulier, avec tel institut ou telle école. Tout cela était jusqu’à présent géré sans visibilité globale du système. Nous aurons un rôle de conseil auprès des entreprises sur la partie « collecte », puis sur l’orientation des fonds en pointant les besoins de formation sur tels publics, tels secteurs, etc. Maintenant, nous ne gérons pas le contrat d’apprentissage. Mais, pourquoi pas ? Cela permettrait d’aller plus loin...

Comment analysez-vous la baisse du nombre de contrats d’alternance en 2012 Comment s’organise la relation des OPCA

et 2013 ?

avec les organismes de formation autour

Pour recruter, les entreprises doivent être en bonne santé. Dans la situation économique actuelle, elles ont pour beaucoup un comportement attentiste, mais cela devrait repartir avec la reprise économique que nous espérons. Par ailleurs, l’alternance correspond-elle obligatoirement à de l’emploi pérenne ? Nous n’avons pas suffisamment de recul, mais, dans tous les cas, l’alternance est un premier pied à l’étrier pour ensuite

des contrats de professionnalisation ?

Cela dépend à quel moment de la chaîne nous intervenons. Au-delà de la relation administrative, nous permettons aux employeurs de mieux connaître les offres de formation en nous efforçant d’être informés quasi instantanément des sessions ouvertes et des places restantes dans chaque région. Ce travail de veille nous permet d’augmenter

progresser professionnellement ; c’est une première connaissance valorisable de l’entreprise. L’expérience est un plus indéniable ! De nombreuses filières réussissent à attirer les jeunes via l’alternance, comme la propreté, le recyclage, etc. C’est un moyen de sensibiliser les jeunes à des métiers qui sont encore peu connus.

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Philippe Meirieu, spécialiste des sciences de l’éducation et vice-président de la région Rhône-Alpes chargé de la formation tout au long de la vie Que pensez-vous des mesures prévues par la nouvelle loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, et notamment que tout salarié bénéficie d’un nombre d’heures annuel crédité sur son Compte personnel de formation (CPF), dont les bénéficiaires d’un contrat d’apprentissage ou d’un contrat de professionnalisation ?

Ce nouveau dispositif va concerner tous les actifs, salariés comme demandeurs d’emploi. La création du CPF est un plus, mais il n’est ni un booster ni

un frein au développement de la formation en alternance. Comme les jeunes en apprentissage ou en contrat de professionnalisation pourront accumuler des heures dès la signature de leur contrat, le CPF va démontrer – s’il en était besoin – que, en entrant dans l’alternance, le jeune met le pied à l’étrier et que ce dispositif lui permettra un jour d’évoluer, tous niveaux de qualification confondus. Les salariés en alternance sont des salariés comme les autres. Restent certains points à régler du côté de la protection sociale : les alternants ne bénéficient pas d’une mutuelle, par exemple.

Quelles sont les spécificités pédagogiques de la formation en alternance ?

Il faut distinguer l’alternance – qui est une pédagogie – de l’apprentissage, qui est une modalité institutionnelle spécifique de cette pédagogie, avec un contrat de travail. On trouve aussi de l’alternance dans les lycées professionnels, les universités, les contrats de professionnalisation, ou encore dans la quasi-totalité des dispositifs de formation continue que les Régions mettent en place. Ne mélangeons pas dispositif institutionnel et pédagogie ! La pédagogie de l’alternance peut s’incarner dans différents dispositifs institutionnels qui alternent des temps en centre de formation et des temps d’immersion dans des lieux de production. À quelques petites exceptions près, la totalité de la formation professionnelle en France se fait par alternance : formation initiale et continue, contrats de professionnalisation et apprentissage, etc. Nous parlons là d’une pédagogie dont nul n’a le monopole.

Parle-t-on de plusieurs pédagogies ou d’une pédagogie de l’alternance ?

On fait souvent remonter le principe de l’alternance à la création des Maisons familiales rurales, car, probablement, l’agriculture est un domaine où la rythmicité des saisons permet d’alterner

divers types d’activités et où les initiatives pédagogiques novatrices furent précoces. Mais, dans la réalité, l’alternance est bien plus ancienne. On la trouve déjà chez les compagnons du Moyen Âge et peut-être même peut-on considérer que, depuis toujours, tout apprentissage réussi s’est fait par alternance dans la mesure où il a réussi à articuler l’acquisition de connaissances et la capacité à les utiliser dans l’action. Mais l’alternance peut se concrétiser selon plusieurs modèles.

Quels sont ces modèles ?

D’abord l’alternance « juxtapositive », dans laquelle on juxtapose un enseignement théorique, avec sa propre logique, et une immersion dans des situations de travail sans lien explicite entre les deux. Cela produit des effets, mais l’articulation entre théorie et pratique n’est pas prise comme un objet structurant. C’est pourquoi on parle aussi de l’alternance « interactive », vers quoi tout le monde cherche à tendre, mais qui est complexe à mettre en œuvre : entre les temps de formation, il faut une interaction et pas seulement une juxtaposition ; ce qui se travaille dans le centre est repris dans l’entreprise et vice versa. Pour autant, ce n’est pas, comme on le croit trop souvent, une simple dialectique théorie-pratique, car on trouve des deux côtés de la théorie et de la pratique. La manière dont s’effectue la formation

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dite « théorique » détermine la manière dont elle sera «  mise en pratique  » ; symétriquement, il y a de la « théorie en action » dans toute situation « pratique » de production. Ce qui structure le modèle original de l’alternance est finalement la façon dont les deux types de formation s’articulent. Pour moi, aujourd’hui, ce qui est important, c’est de centrer cette articulation autour du concept de « décision ». Car, ce qui fait l’expertise dans n’importe quel métier, c’est bien la capacité à prendre la bonne décision au bon moment dans le bon contexte. Ce qui fait la véritable expertise aujourd’hui, c’est la capacité de progresser dans sa professionnalité par la compréhension des enjeux de toute décision, l’anticipation des scénarios possibles et le choix des modalités d’intervention pertinentes.

Comment est envisagée la relation entre les parties prenantes dans la conception de l’ingénierie pédagogique ?

Dans une pédagogie de l’alternance élaborée et bien construite, ce qui structure la relation, c’est précisément la formation à la prise de décision et la recherche des moyens pour que les gens aient les outils afin d’agir de manière pertinente dans les situations qu’ils auront à affronter. Il y a aussi, pour moi, une interrogation particulière sur la problématique du transfert, car ce qui fait un expert, c’est aussi la capacité à prendre des décisions dans des contextes en permanente évolution et qui ne sont pas connus à l’avance. On a longtemps considéré que le transfert se faisait de manière automatique et quasi spontanée : on apprend et on applique ! Ce n’est pas si sûr. On voit d’ailleurs que quelqu’un peut parfaitement apprendre à faire quelque chose en centre de formation, mais, placé dans une situation réelle de travail, ne pas

savoir transférer ce qu’il a appris. Si l’alternance ne prend pas en compte cette capacité à transférer dans un contexte différent, elle rate en partie sa cible. Les choses évoluent, les contextes changent, cela impose de former la personne dans sa capacité à analyser et à agir de manière pertinente, et cela doit être explicitement l’objet de formation.

Quelles sont alors les bonnes pratiques pour consolider le lien entre les phases de formation dans l’organisme et dans l’entreprise pour réussir l’alternance ?

Trop souvent, dans l’alternance, les formateurs du centre et les maîtres de stage ont leurs propres logiques et ne communiquent pas suffisamment. Ils le font au travers des livrets, du référentiel métier, mais cela reste extrêmement ténu et souvent très formel. Or, l’acquisition de l’expertise apparaît fortement corrélée à la capacité de travail commun entre formateurs et maîtres de stage. L’efficacité augmente très fortement lorsqu’il y a des zones de recouvrement, quand sont organisées, par exemple, des journées où ils travaillent ensemble avec les stagiaires. Tout ce qui favorise la communication réelle entre apprenants, entreprise et organisme, améliore la qualité de l’alternance. On peut aussi aller au-delà du dialogue avec des activités communes, par exemple au travers d’études de cas pour lesquelles se retrouvent côte à côte les différents acteurs de la formation.

La construction des parcours de formation obéit-elle à une progression dans le temps des stratégies pédagogiques mises en œuvre ?

Dans la formation, on va du plus simple au plus

complexe, mais dans l’univers de la production, dans le réel de l’entreprise, le moins complexe n’anticipe pas forcément le plus complexe. Les formateurs ont une temporalité de la progressivité, l’entreprise a une temporalité de l’imprévisibilité. S’ajoute à cela une seconde difficulté en termes de coordination des temporalités : chacun des alternants aura des expériences différentes vécues selon des temporalités distinctes, mais quand ils se retrouveront dans le centre de formation, la même chose leur sera enseignée. La difficulté est donc de trouver des points de recoupement de cette temporalité, et pas seulement de les juxtaposer. Il faut que les maîtres de stage et les formateurs se mettent d’accord autour de grands objectifs sur lesquels mettre le focus, à un moment donné, en les articulant à leur logique propre. C’est un gros travail, que certains centres de formation font bien et d’autres, mal, ou peu.

Est-ce une condition indispensable au bon déroulement de l’alternance ?

Quand ce travail n’est pas fait, cela ne veut pas dire que l’alternance ne fonctionne pas, mais qu’elle est tributaire du travail de l’alternant lui-même, et donc très largement aléatoire. Tout le problème est de faire en sorte que les rencontres soient précises et structurées pour que l’alternance soit la plus cohérente possible et fonctionne pour tous les alternants... On peut aussi, évidemment, repousser le point de jonction à plus tard, dans le métier, mais on ne garantit plus alors la qualité de la formation… On peut, enfin – et c’est ce qui est fait, souvent, dans l’enseignement supérieur – proposer une tâche « intégratrice », comme un mémoire, qui va permettre à l’apprenant de mettre en relation, de manière cohérente, tout ce qu’il a acquis en centre de formation et en entreprise.

Mais il faut, évidemment, accompagner l’alternant dans cette tâche. Synchroniser les temporalités en un ensemble de compétences professionnelles homogènes et opérationnelles, avec des modèles culturels stabilisés, n’est pas chose aisée : cela demande vraiment une pédagogie adaptée.

Les pratiques pédagogiques ont-elles connu des évolutions notables en fonction des changements législatifs intervenus récemment autour de l’alternance ?

Nous n’avons pas, me semble-t-il, d’étude particulière sur ce sujet, d’autant que les changements législatifs ne portent pas sur la pédagogie, mais sur les dispositifs institutionnels. La pédagogie renvoie au travail d’élaboration, à l’ingénierie pédagogique, et on voit par exemple émerger dans l’enseignement supérieur des outils techniques comme l’e-portfolio qui peuvent nous aider pour élaborer des projets pédagogiques de qualité. Cependant, il faudrait que les universités développent davantage de recherche sur l’efficacité et l’ingénierie de leurs propres formations. Il y a tout un champ de recherche sur la pédagogie de l’alternance qu’elles pourraient investir pour faire progresser la totalité des dispositifs d’alternance, universitaires ou autres. Cela permettrait d’éviter que l’apprentissage dans le supérieur ne soit parfois qu’un « habillage », avec pour seul objectif de « siphonner » les financements des Régions et de collecter de la taxe. C’est un vrai danger, car on risquerait alors de dévaloriser l’alternance qui correspond pourtant à une pédagogie originale et extrêmement exigeante, qui est un bel outil de transmission intergénérationnelle et de promotion sociale.

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Laurence Demonet, vice-présidente à la formation et l’accompagnement des parcours du Conseil régional de Lorraine

Quel est le rôle de la région en matière de pilotage de la formation professionnelle, en lien avec les Opca et organismes de formation ?

La pratique de bon sens s’est instaurée en Lorraine : nous œuvrons avec tous les acteurs de la formation, opérateurs comme financeurs (Opca, Direccte, Pôle emploi, entreprises, branches, Éducation nationale, etc.), pour élaborer une feuille de route commune. C’est un partenariat très large qui consiste à se mettre autour d’une table afin de s’accorder sur un ensemble de stratégies et de priorités autour desquelles tout le monde se retrouve. On peut parler de « coconstruction » dans la mesure où les priorités se rejoignent – métiers en tension, problèmes de recrutement sur une branche, etc. – pour déterminer quelles actions de formation il convient de monter. À partir de là, nous contractualisons en vue de construire des parcours sur mesure, selon le besoin en compétences des entreprises. La formation doit répondre aux besoins des bénéficiaires et des entreprises, la formation n’est pas une fin en soi.

Quelles sont vos priorités en matière de

Concrètement, comment est pensé le

formation ?

pilotage des dispositifs ?

Nous mettons la priorité sur les premiers niveaux de qualification, les salariés précaires, les jeunes sortis de formation initiale. J’insiste sur la dimension de parcours, car la formation en elle-même ne suffit pas ; il faut toujours un accompagnement. Le parcours suppose de rebondir tout au long de la formation, dans une logique de continuité. Aujourd’hui, les organismes de formation doivent s’emparer de cette question de l’accompagnement. Cela permet d’identifier des dispositifs de formation plus réactifs, davantage en relation avec les besoins, sur la base de diagnostics de territoire et de branche. Le système de la formation en France, qui représente 32 milliards d’euros par an, n’a pas encore fait la preuve de son efficacité. Au regard des dépenses investies, nous n’avons en effet pas les résultats escomptés par rapport à l’emploi. État, Région, entreprises, nous poursuivons le même objectif. Arrêtons de séparer public et privé, les financements concernent en définitive le public bénéficiaire des actions. Pour que ces investissements deviennent utiles, il faut nous accorder sur une même feuille de route pour préparer les jeunes dans un souci d’équilibre entre formation initiale et apprentissage, et certainement pas de concurrence. À la faveur de la crise, cela devient une opportunité d’engager ces changements à partir de points de convergence, pour cofinancer.

La Région organise le rapprochement des acteurs, c’est un principe d’unité dans l’action et dans le respect de chacun pour mutualiser les moyens des uns et des autres. Et peu importe qui paie à la fin ! Nous avons organisé des pilotages, qui anticipent d’ailleurs les futures lois, pour s’entendre sur des stratégies communes. La Région a vocation à piloter la formation, mais les partenaires sociaux ont repris depuis décembre la responsabilité de la formation de leurs salariés. Nous consultons les branches pour contractualiser avec elles cette année sur les priorités communes avec des contrats d’objectifs et de moyens à deux ou trois ans. Nous avons déjà une convention tripartite avec l’État et Pôle emploi sur les demandeurs d’emploi, qui définit en amont les priorités en termes de secteur d’activité, de métiers, de moyens. À la faveur des nouveaux enjeux du Pacte Lorraine, nous avons une convention avec l’Éducation nationale et la Draaf, qui nous a permis de croiser nos données pour visualiser les enjeux et besoins économiques. Nous avons ainsi défini un cadre stratégique, envoyé à tous les établissements avec des appels à projets pour qu’ils disent quelles formations ils souhaitent ouvrir.

Les compétences de la Région vont-elles être accrues sur la formation professionnelle des jeunes en apprentissage avec la réforme en cours ?

Lorsqu’on mutualise, cela permet de réaliser des économies d’échelle. Avec les 312 millions de la Région pour l’éducation et la formation, je fais

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le pari que les cofinancements – par des fonds européens, des conseils généraux, des entreprises, des conventions avec les Opca, etc. – seront des leviers. Concernant la réforme en cours, la mobilisation de l’argent, et notamment de la taxe d’apprentissage, doit être mise au service de l’intérêt général. La part que pourraient avoir les Régions servira à renforcer ce pilotage de la formation professionnelle. Plus personne ne peut travailler seul, il faut maîtriser les moyens.

bassins pour faciliter l’émergence de projets au plus près des besoins. Trois cibles ont été identifiées : les ateliers pour les jeunes demandeurs d’emploi avec des constructions de parcours du début à la fin de la formation, afin de voir comment on les « raccroche » dans un parcours avec tous les acteurs ; des ateliers pour les bassins très en difficulté qui accusent un manque de qualification et un taux de chômage persistant, avec quatre expérimentations (une par département) ; enfin, les ateliers pour les filières d’avenir qui se structurent.

Comment se caractérise votre partenariat avec le Cesi ?

Le Cesi rencontre assez ces valeurs et ces méthodes que nous suivons. Nos relations se sont faites naturellement, avant tout au travers de confiances humaines. Nous allons avoir un besoin d’ingénieurs important et j’apprécie que l’École supérieure du Cesi ait une culture ancrée dans les réalités économiques en s’investissant beaucoup pour consolider les liens avec le monde du travail. J’apprécie les parcours en alternance, et ce lien important avec les entreprises. Le Cesi doit s’emparer des réalités locales et des évolutions, ce travail-là peut être assez facilement mis au point.

Qu’en est-il de la formation des demandeurs d’emploi pour laquelle le contrat de professionnalisation peut être utilisé ?

Nous avons resserré notre action en direction des demandeurs d’emploi en ciblant des besoins prioritaires de qualification. En quelque sorte, nous organisons notre propre décentralisation sur les

Est-ce une bonne politique de cibler les aides sur les premiers niveaux de qualification, alors que ce sont les niveaux supérieurs qui tirent vers le haut ?

Nous sommes à 30 % d’offre de niveau supérieur sur l’apprentissage ! Nous avons vu augmenter le niveau III il y a deux ans, et cette année les niveaux I et II. Notre offre se cale avec celle de l’Éducation nationale pour ne pas faire doublon ni surtout concurrence. Nous étudions ensemble les besoins d’une branche, d’une entreprise. Les enjeux du Pacte Lorraine renvoient souvent à des besoins de qualification supérieure. Il faut abandonner des formations, et les établissements qui ont proposé des ouvertures ont également présenté des fermetures. Nous avons besoin, dans la proximité, des premiers niveaux pour les faire entrer dans les dispositifs et ensuite leur faire bénéficier d’un continuum de parcours. Il faut se poser la question de l’accès à l’apprentissage. Nous avons monté des dispositifs avec tout le monde

– Éducation nationale, branches, organismes, services consulaires – en inventant le dispositif d’intégration vers l’apprentissage (Diva) et le dispositif d’accès vers l’apprentissage (Dava). Pour nous, l’apprentissage est une voie d’excellence et nous faisons le pari qu’il faut aller chercher les jeunes là où ils sont, dans les missions locales en particulier, pour les placer dans des parcours de CFA sans contrat d’apprentissage. La Région finance le jeune par une bourse, inférieure au salaire d’un apprenti. Nous en avons 180 par an qui sont intégrés dans des parcours de CFA volontaires avec les missions locales. Les deux s’ignoraient d’ailleurs ! Mais certains de ces jeunes n’avaient pas les compétences clés pour faire un parcours d’accès, il fallait les identifier pour les mettre dans un parcours plus court, le Dava, et nous avons pour cela mobilisé les compétences clés de l’État. Ensuite il y a la problématique de la rupture du contrat d’apprentissage. Nous avons mis en place le dispositif d’accompagnement adapté pour les contrats en alternance

(Daca), complété par un travail avec les chambres consulaires pour créer des parcours d’accompagnement de 600 jeunes par an. C’est une sécurisation pendant le parcours, mais cela ne suffit pas encore. Nous sommes à -2,8 % sur l’apprentissage l’année dernière, une baisse nettement inférieure à la moyenne nationale, alors que l’activité a sensiblement baissé : c’est ce travail d’accès et d’accompagnement qui fait la différence. L’autre axe que nous renforçons est l’apprentissage transfrontalier, avec la signature, dans deux ou trois mois, d’un accord formation-emploi avec la Sarre pour des parcours et des moyens réciproques afin de passer au-delà des différences législatives. Cela conduira à un double diplôme dans un contexte bilingue. Nous avons identifié une douzaine de métiers en commun, en plus de l’ensemble du secteur de la santé. Une initiative similaire est menée avec le Luxembourg, mais cela prend plus de temps, car nous devons passer par une conférence intergouvernementale d’État à État.

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Marc JOUENNE, DRH d’AIRBUS France

Où en est le développement de l’alternance au sein du groupe AIRBUS ?

Notre politique, en matière d’alternance, va de pair avec notre stratégie « emploi », elle s’adapte et évolue en fonction de nos besoins en termes de recrutement et de recherche de compétences. D’une manière générale, l’alternance s’est beaucoup développée chez Airbus en France, car nous avons fortement embauché ces dernières années. C’est une source importante de prérecrutement : nous sommes passés d’un niveau modeste à 1 ou 1,5 % d’alternants parmi nos effectifs pour, en l’espace de trois ans, progresser de plus de 400 % et parvenir à une moyenne de 4 %, soit un peu plus d’un millier d’alternants en rotation permanente. Cela concerne tous les métiers et tous les niveaux d’étude, sachant que la répartition actuelle des diplômes préparés comprend 25 % de bac pro ou CAP, 25 % de BTS-DUT et licence, et 50 % de master 1 & 2.

Quelle est votre stratégie de recrutement des alternants ?

Les alternants sont recrutés à l’issue de leur formation de la même manière que pour des recrutements extérieurs. Si la vacance d’un poste se confirme, le processus de recrutement se déroule

en fonction des compétences techniques et humaines que nous recherchons. Avec les alternants, nous savons précisément quelles compétences ils ont développées au cours de leur période d’apprentissage, et c’est tout l’avantage de ce système ! Les qualités comportementales, le partage des valeurs de l’entreprise, la capacité à travailler dans des équipes transnationales, sont mieux identifiés au cours du parcours d’alternance qu’au travers d’un simple entretien.

stabiliser notre population d’alternants, car moins d’embauches sont prévues. Nous avons aussi lancé une initiative – qui fait d’ailleurs école dans l’aéronautique et dans d’autres secteurs comme l’automobile – avec notre programme « Carnet de Vol » qui permet de réunir une ou deux fois par an les sous-traitants lors d’un forum afin d’organiser un job dating. Des entretiens sont planifiés pendant toute une journée par les partenaires avec nos alternants en fin de parcours et qui cherchent un emploi.

Combien d’alternants recrutez-vous en moyenne ?

Avez-vous aussi fait l’effort de passer à

À fin 2013, les trois quarts de nos alternants, qui ont voulu s’intégrer dans le marché de l’emploi à la sortie de l’alternance, ont trouvé un emploi chez Airbus ou chez nos partenaires dans le cadre du concept d’ « entreprise étendue » qui comprend les sous-traitants, fournisseurs, équipementiers, etc. Depuis un an, des « parcours partagés d’apprentissage » ont été mis en place, pour mettre en relation un apprenti avec une autre entreprise en complément d’Airbus durant sa période de formation. Nous avons, en effet, choisi de développer fortement ces dispositifs qui prévoient que l’apprenti développe des compétences chez nous, mais également chez un sous-traitant. Dès 2014, ceux que nous recrutons en apprentissage passeront au moins deux semaines chez un partenaire. Ensuite, il faut garder à l’esprit qu’un certain nombre de jeunes poursuivent leurs études et que certains souhaitent se réorienter. Nous adaptons l’alternance en fonction de nos besoins en emplois, ce qui explique aussi ce chiffre important de recrutements. Cette année, nous devrions

4 % d’alternants pour éviter les pénalités légales ?

On ne raisonne pas en fonction des pénalités, nous ne sommes pas montés à 4 % pour passer au-dessus de 3 % et ainsi éviter d’être sanctionnés avec la contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA). Ce qui nous intéresse, c’est d’avoir des ressources et une main-d’œuvre qualifiée à qui il sera possible de proposer un emploi dans un avenir proche, autrement dit, d’anticiper nos compétences de demain.

Comment AIRBUS gère-t-il la relation avec les organismes de formation ?

Le développement de l’alternance se fait en relation étroite avec les établissements, nous discutons en particulier des rythmes de formation, de l’adéquation entre nos besoins et l’offre présentée. Nous avons, en interne, un lycée qui affiche 100 % de réussite aux bacs techniques. Cela s’explique par le niveau d’encadrement, les valeurs

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propres à Airbus ; c’est un monde un peu à part où les jeunes sont valorisés, motivés. Avec nos partenaires – organismes de formation, écoles d’ingénieurs, business schools, universités –, nous avons le même niveau d’exigence que nous contractualisons dans le cadre de conventions. Au final, le taux de rupture des contrats d’alternance est très faible, aux alentours de 1 %. Pour mieux développer nos relations avec les écoles, ces conventions abordent des sujets comme les stages, le marketing emploi, en insistant sur l’importance du suivi qualitatif. Nous sommes d’ailleurs en train de préparer une convention avec le Cesi, qui propose un suivi pédagogique de haute qualité. Pour ajuster les dispositifs en fonction de nos contraintes opérationnelles, par exemple sur les rythmes d’alternance, nous entretenons des échanges permanents avec tous les établissements.

De quelle manière désignez-vous et

Quels profils d’alternants ciblez-vous ?

Les contrats en alternance et

En fait, tous les profils nous intéressent. Tout dépend de nos besoins en emploi ! Jusqu’à présent, nous avons pris des alternants en commençant plutôt au niveau du bac technologique, mais Airbus propose aussi des parcours complets avec des jeunes qui parviennent au niveau ingénieur. Nous poussons aussi les diplômés de notre « lycée Airbus » à poursuivre leur parcours en alternance, du BTS vers les niveaux supérieurs. Une fois les potentiels repérés par rapport à nos besoins en termes d’emploi, on les encourage et on les accompagne.

de génération vous semblent-ils

valorisez-vous les tuteurs ?

Les managers se proposent spontanément pour assurer le rôle de tuteur. Nous avons pris en compte cette demande et mis en place des formations pour les accompagner dans leurs missions. La valorisation des compétences développées dans le cadre de la fonction tutorale est pour nous essentielle. C’est une opération gagnant-gagnant pour les salariés ; nous avons même parlé de « tutorat inversé » avec des jeunes qui sont aussi en capacité de transmettre des compétences à leur tuteur. Nous ne donnons pas de rémunération complémentaire aux tuteurs, car nous estimons que cette fonction s’inscrit dans le parcours de développement d’un manager. Leur implication est cependant valorisée et prise en compte dans la gestion de carrière.

complémentaires ?

Au niveau du groupe Airbus, nous avons conclu un accord intergénérationnel qui revisite la formation et le recrutement des jeunes ; la formation en alternance en fait partie intégrante. Il n’y a pas en tant que tel de recrutement sous contrat de génération, mais en embauchant environ 30 % de jeunes, nous sommes de fait forcément déjà dans cette démarche. Notre accord intergénérationnel est venu confirmer notre politique d’embauche des jeunes qui était déjà forte.

Ce livre blanc a été édité par le Groupe Cesi © Juin 2014 Rédaction en chef : Sophie Crespy / Groupe Cesi Rédaction et coordination éditoriale et graphique : Groupe AEF Conception graphique : Commevisuels Photos : Groupe Cesi

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