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25 oct. 2011 - C. La technologie permet une évaluation objective de l'adéquation selle/dos...................... ...... Les chevaux de compétition de saut d'obstacles ...
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VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2011 - Thèse n°

ETUDE DE L’EFFET DE DIFFERENTS PADS SUR L’ADEQUATION DE LA SELLE AU DOS DU CHEVAL

THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 25 octobre 2011 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par Laure BONATI Née le 14 septembre 1986 à Colombes (92)

VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2011 - Thèse n°

ETUDE DE L’EFFET DE DIFFERENTS PADS SUR L’ADEQUATION DE LA SELLE AU DOS DU CHEVAL

THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 25 octobre 2011 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par Laure BONATI Née le 14 septembre 1986 à Colombes (92)

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REMERCIEMENTS A Madame le Professeur Elvire SERVIEN, De la faculté de médecine de Lyon, pour avoir accepté et nous avoir fait l’honneur de présider ce jury, Mes hommages respectueux. A Monsieur le Professeur Olivier LEPAGE, De VetAgroSup, campus vétérinaire de Lyon, pour m’avoir fait l’honneur et le plaisir de diriger cette thèse, Toute ma reconnaissance. A Monsieur le Professeur Serge SAWAYA, De VetAgroSup, campus vétérinaire de Lyon, pour m’avoir fait l’honneur de participer à ce jury et pour l’interêt porté à ce travail, Toute ma gratitude. A Monika GANGL, De VetAgroSup, campus vétérinaire de Lyon, pour m’avoir permis de réaliser ce travail qui me tenait à cœur, et pour m’avoir encadrée tout au long de sa réalisation, Mes sincères remerciements.

A l’AVEF, Qui par l’attribution de la bourse de thèse a permis le financement de toute la partie expérimentale de cette thèse.

A Annette Rancurel, Sans qui rien n’aurait été possible. A sa motivation sans limite, à nos échanges téléphoniques riches en enseignements, et pour son aide précieuse tout au long de cette année. A nos futures collaborations. Aux cavaliers et propriétaires, Qui ont accepté de me confier leurs chevaux lors de la partie expérimentale de ce travail.

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REMERCIEMENTS PERSONNELS A mes parents, A ma mère, pour son aide précieuse, pour sa relecture de ce travail et surtout pour son soutien sans faille. Je suis heureuse qu’on puisse se parler si facilement. Merci pour tout ! A mon père, à sa façon si particulière de voir le monde, et au « génie » qui est un peu héréditaire j’espère ! A mon frère, à ce qui nous rassemble, le cinéma, les voyages et les chats ! Bon courage pour ta thèse universitaire. A ma grand-mère, qui m’a accompagnée dans mes années d’école primaire, qui m’a fait réciter mes tables de multiplication. Si je suis là aujourd’hui, c’est aussi grâce à toi. A mes grands-parents disparus, A toute ma famille, Merci.

A Nora, mon amie depuis presque 15 ans. J’entends bien faire en sorte que ça continue comme ça encore longtemps. Au chemin parcouru depuis nos années collège ! A Sara, j’ai mis plus de temps que toi, mais j’y suis enfin à cette thèse. Aux réveillons du nouvel an passés ensemble, et aux prochaines années commencées en ta compagnie. A ma Laurette, à tes conseils toujours justes et précieux. A ta joie de vivre et à ta lucidité. Je suis sûre que tu seras une excellente vétérinaire. A Julie, au jour où enfin on ira galoper sur la plage avec Kartoon et Jivaro. A ta nouvelle maison, où le petit chaton sera heureux . A nos animaux, qui prennent tant de place dans nos vies.

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A mes années « vétos », A Laëtitia, ma coloc. Au C12, aux goûters nutella, à la vie en communauté avec Kenya, Whooper, Dickens (et Max...). Aux « balades » de boum bras dessus bras dessous. A ce métier, qu’on aime mais qui ne nous le rend pas toujours bien. Je sais que je peux compter sur toi quand ça va pas, merci pour ça. A Schnap’s, tu as été présente dans tous les moments importants de ces années d’école, les très bons comme les moins bons. Alors, je ne suis pas très originale, mais... merci ! J’espère sincérement qu’on ne se perdra pas de vue toutes les trois.

A mon pouillot, continue comme ça, je suis fière de toi ! A Slanie et Maria, à nos dîners à 4. Faudra qu’on recommence en 2012, on trouvera bien un moment pour organiser ça. A Claire, aux soirées ciné à Charbonnières, au composteur d’appartement... à notre côté vétoécolo-nature que j’assume ! A Prachette, ma voisine pendant quelques mois. J’espère que ton année d’internat se passe bien. A notre côté cheval-passion que j’assume ! Au groupe 12.

A Laura, Kissa et Cvrca, à Magic, à Whooper et Zutan, à Jivaro. Ils m’accompagnent, et m’accompagneront toujours.

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TABLE DES MATIERES INTRODUCTION .................................................................................................................................. 15

Première partie : .................................................................................................... 16 Les différentes structures mises en jeu dans l’adéquation selle/dos.................... 16 A. Le dos du cheval : une structure complexe ............................................................................ 17 1. Anatomie du dos du cheval ........................................................................................... 17 1) La colonne vertébrale .......................................................................................... 17 2) Les tissus mous de la colonne thoraco-lombaire ............................................... 18 3) Structures vasculaires.......................................................................................... 24 4) Structures nerveuses............................................................................................ 25 2. La conformation des chevaux : conséquences locomotrices ...................................... 26 1) Malformations congénitales ................................................................................... 26 2) Malformations acquises....................................................................................... 27 3) Conformation et performance ............................................................................ 27 3. Notion de cinématique du dos....................................................................................... 29 1) Biomécanique du dos du cheval.......................................................................... 29 2) Mouvements des vertèbres .................................................................................. 30 3) Modifications pathologiques de la colonne vertébrale ..................................... 33 4) Etude morphométrique ....................................................................................... 38 B.

La selle : outil de communication entre le cavalier et le cheval......................................... 40 1. La structure de la selle .................................................................................................. 40 2) L’arçon.................................................................................................................. 40 2) Les quartiers......................................................................................................... 43 3) Les panneaux........................................................................................................ 44 4) Les taquets ............................................................................................................ 45 5) La sangle ............................................................................................................... 45 2. Place de la selle sur le dos du cheval ............................................................................ 45 1) Etude statique....................................................................................................... 45 2) Etude dynamique ................................................................................................. 46 3. Adaptations possibles de la selle................................................................................... 46 1) Au cheval .............................................................................................................. 46 2) Au cavalier ............................................................................................................ 47

C.

Les pads ou amortisseurs : améliorateurs de l’adéquation ? ............................................ 48 1) Rôles des pads ................................................................................................................ 48 1. Adéquation selle/dos ............................................................................................ 48 2. Eviter les effets indésirables ................................................................................ 49 2) Matériaux utilisés .......................................................................................................... 50 1. Les matériaux utilisés dans le milieu du cheval................................................. 50 2. Les matériaux issus de la médecine humaine .................................................... 51 3) Conception et ergonomie des pads............................................................................... 53 1. Equitation western ............................................................................................... 53 2. Equitation anglaise............................................................................................... 54 4) Résistance à l’utilisation: .............................................................................................. 55

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Deuxième partie : ................................................................................................... 56 Evaluation de l’adéquation de la selle au dos du cheval ...................................... 56 A.

La pression : un danger pour les tissus................................................................................ 57 1) Les ulcères de pression en médecine humaine............................................................ 57 1. Pression et ischémie ............................................................................................. 57 2. Pression et durée .................................................................................................. 58 2) Les ulcères de pression des équidés de bât.................................................................. 58 3) Les lésions provoquées par la pression chez les chevaux de sport et de loisir ......... 60 1. Pression et lésions macroscopiques..................................................................... 60 2. Pression et douleur............................................................................................... 63 3. Pression et performance ...................................................................................... 63 4. Tolérance à la pression ........................................................................................ 63

B.

Détecter les signes d’une éventuelle inadéquation .............................................................. 64 1. Chez le cheval................................................................................................................. 64 1) Signes comportementaux..................................................................................... 64 2) Signes physiques................................................................................................... 67 2. Sur la selle ...................................................................................................................... 69 1) Examen de la selle au sol ..................................................................................... 69 2) Examen de la selle sur le cheval.......................................................................... 70

C.

La technologie permet une évaluation objective de l’adéquation selle/dos ...................... 72 1. Prise de la topographie du dos...................................................................................... 72 2. Tapis « à impression » ................................................................................................... 72 3. Thermographie .............................................................................................................. 73 1) Principe ................................................................................................................. 73 2) Motif thermique du dos du cheval...................................................................... 73 5. Tapis capteur de pression ............................................................................................. 75 1) Principe ................................................................................................................. 75 2) Un outil validé par l’expérience.......................................................................... 75 3) Données actuelles sur les pressions mesurées sous la selle ............................... 78

Troisième partie : étude expérimentale................................................................. 87 Influence des différents pads sur les pressions mesurées sous la selle à l’aide d’un tapis capteur de pression (X-Sensor®) .......................................................... 87 A.

Objectifs.................................................................................................................................. 88

B. Matériel et méthodes ................................................................................................................ 89 1) Dispositif expérimental ................................................................................................. 89 1. Dix chevaux........................................................................................................... 89 2. Deux selles............................................................................................................. 89 3. Un cavalier ............................................................................................................ 89 2) Réalisation des mesures ................................................................................................ 90 1. Protocole ............................................................................................................... 90 2. Logiciel .................................................................................................................. 90 3) Méthode d’analyse statistique des données................................................................. 90 10

1. 2.

Durée d’enregistrement ....................................................................................... 90 Variables analysées .............................................................................................. 90

C. Résultats .................................................................................................................................... 92 1) Selle B. ............................................................................................................................ 92 1. Images virtuelles MAP et MPP ........................................................................... 92 2. MOF ...................................................................................................................... 93 3. LOF ....................................................................................................................... 94 4. Analyse statistique................................................................................................ 94 2) Selle P. ............................................................................................................................ 99 1. Images virtuelles MAP et MPP ........................................................................... 99 2. MOF ....................................................................................................................... 100 3. LOF......................................................................................................................... 101 4. Analyse statistique.............................................................................................. 101 D.

Discussion ............................................................................................................................. 103 1) Protocole....................................................................................................................... 103 1. Choix des chevaux .............................................................................................. 103 2. Choix des selles ................................................................................................... 103 3. Choix des pads.................................................................................................... 104 4. Choix du tapis capteur de pression................................................................... 104 5. Choix du parcours.............................................................................................. 104 6. Conditions météorologiques .............................................................................. 105 2) Résultats ....................................................................................................................... 105

E.

Conclusion ............................................................................................................................ 105

CONCLUSION ..................................................................................................................................... 107

11

TABLE DES FIGURES Figure 1 : Courbures naturelles de la colonne (12)............................................................................17 Figure 2 : Muscles moteurs de la colonne thoraco-lombaire (5) .......................................................18 Figure 3 : Muscles de l'encolure et du tronc, plan profond (12)........................................................19 Figure 4 : Muscles de l'encolure et du tronc, plan superficiel (12)....................................................20 Figure 5: Muscles juxtavertébraux (12).............................................................................................21 Figure 6 : Ligament nucal (49) ..........................................................................................................22 Figure 7 : Scoliose (77)......................................................................................................................26 Figure 8 : Lordose (78) ......................................................................................................................27 Figure 9 : A gauche cheval au dos long, à droite cheval au dos court (24) .......................................28 Figure 10 : Concept de l'arc "bow and string" (21) ...........................................................................29 Figure 11 : Rassembler - accentuation des courbures dorsales (12)..................................................30 Figure 12 : Articulations intervertébrales – vertèbres thoraciques (T13-T19) (12) ..........................31 Figure 13 : Rotation d'une vertèbre autour de trois axes (54)............................................................31 Figure 14 : Conflit de processus épineux (CPE) (VetAgroSup Imagerie médicale). ........................35 Figure 15 : Extension et flexion de la colonne vertébrale (48 modifié d'après Denoix) ...................35 Figure 16 : Desmopathie du ligament supra-épineux (VetAgroSup Imagerie médicale)..................36 Figure 17: Amyotrophie nette du muscle trapèze gauche chez un cheval de selle (Rancurel A.).....37 Figure 18 : Sites préférentiels des lésions dorsales (modifié d’après 23)..........................................38 Figure 19 : Arçon de selle anglaise (76) ............................................................................................40 Figure 20 : Arcade au nez coupé (73)................................................................................................42 Figure 21 : Selle FNE à arçon ajustable (75).....................................................................................43 Figure 22 : Mesure de la largeur du garrot à l’aide d’un règle plastique (flexicurve®) (74) .............47 Figure 23 : Deltapad® (Bonati L.)......................................................................................................54 Figure 24 : Schéma bilan ...................................................................................................................55 Figure 25 : Ulcère sur la ligne du dos chez un âne de travail au Mali (Lassausaie J.) ......................58 Figure 26 : Mal de garrot (Lassausaie J.) ..........................................................................................59 Figure 27: Myosite purulente (Lassausaie J.) ....................................................................................59 Figure 28 : Relation entre pression et sudation .................................................................................60 Figure 29 : Zone sèche sous la selle après l’exercice (64).................................................................61 Figure 30 : Zones d’apparition des signes cutanés consécutifs à une selle inadaptée (74) ...............67 Figure 31 : Equiscan® (Schonering M.).............................................................................................72 Figure 32 : Port Lewis impression pad (Rancurel A.) .......................................................................73 Figure 33 : Exemples d’image thermographique de selles ................................................................74 Figure 34 : Capture d'écran du logiciel d'analyse X-Sensor ..............................................................77 Figure 35 : Effet pont (Bonati L.) ......................................................................................................80 Figure 36 : Points de pressions localisés à l'arrière de la selle ..........................................................82 Figure 37 : Défaut de matelassure avec matelassures hétérogènes ...................................................83 Figure 38 : Image des pressions maximales (MPP) avec compression grave du garrot....................83 Figure 39 : Compression des épaules – corps de l’arçon trop étroit..................................................84 Figure 40 : Image des pressions maximales MPP - même cheval/même selle/même cavalier .........85 Figure 41 : Captures d’écran Quokin, selle B., pad mouton..............................................................92 Figure 42 : MOF en fonction du cheval.............................................................................................93 Figure 43 : LOF en fonction du cheval..............................................................................................94 Figure 44 : Variation de la surface portante ......................................................................................95 Figure 45 : Distribution des pics de pression avec les différents pads, cheval Caresse, selle B. ......96 Figure 46 : Comparaisons des PP, cheval Quartz, selle B.................................................................97 Figure 47 : Vue 3D, cheval Quartz, selle B,., pad coton ...................................................................97 12

Figure 48 : Cheval Jivaro, selle P. .....................................................................................................99 Figure 49 : Najma, selle P., pad mouton : pressions le long de la colonne .....................................100 Figure 50 : MOF en fonction du cheval, selle P. .............................................................................100 Figure 51 : LOF en fonction du cheval, selle P. ..............................................................................101 Figure 52 : Cheval Quizz, selle P., pad haf® ...................................................................................102

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TABLE DES TABLEAUX Tableau 1 : Mouvements dorso-ventraux d'amplitude maximale (14,15 et 34,35,36) ......................32 Tableau 2 : Mouvements de latéroflexion(14,15 et 34,35,36)...........................................................32 Tableau 3 : Mouvements angulaires (14,15) .....................................................................................33 Tableau 4 : Pressions moyennes subies en kPa (d’après 41).............................................................62 Tableau 5 : Pressions maximales mesurées en kPa (d’après 41) .......................................................62 Tableau 6 : Tableau récapitulatif des tapis capteurs de pression utilisés dans les différentes études77 Tableau 7 : Valeurs maximales de pression tolérables selon Von Rechenberg (65) .........................81 Tableau 8 : Effectif des chevaux .......................................................................................................89 Tableau 9 : Comparaison des 5 pads, selle B. ...................................................................................94 Tableau 10 : Analyse de variance des pics de pression, selle B. .......................................................96 Tableau 11 : Analyse de variance des pressions moyennes, selle B..................................................98 Tableau 12 : Résultats......................................................................................................................101 Tableau 13 : Analyse de variance des pics de pression, selle B. .....................................................102 Tableau 14 : Analyse de variance des pressions moyennes, selle B................................................103

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INTRODUCTION

Autrefois animal de bât ou de trait, utilisé en temps de guerre, ou encore comme moyen de transport, le cheval est devenu un animal de sport et de loisir, qui porte un cavalier sur son dos. Quel que soit le niveau du couple cheval/cavalier, l’équitation nécessite d’utiliser une selle afin d’améliorer le confort et la stabilité du cavalier. Cependant, le confort du cheval doit être pris en compte également. Celui-ci peut, en effet, souffrir d’une selle inadaptée, qui provoque des dorsalgies, elles-mêmes à l’origine de comportements désagréables voire dangereux pour le cavalier. La première partie de ce travail s’intéresse aux structures intrinsèques de la colonne vertébrale et de la selle. Les relations entre la selle et le dos du cheval sont complexes : la structure rigide de la selle doit pouvoir s’adapter à la structure souple et mobile du rachis, faite de multiples articulations. Pour mieux comprendre ces relations, la biomécanique du dos « nu » et « sellé » est étudiée. Un troisième élément entre en jeu : il s’agit des tapis de selle et des « amortisseurs », appelés pads dans ce travail. Les cavaliers utilisent quasi systématiquement au moins un tapis de selle en coton, et de plus en plus souvent, des « amortisseurs » dont ils ne connaissent que partiellement les propriétés physiques et leurs conséquences sur l’adéquation déjà difficile d’une selle au dos d’un cheval. L’observation attentive de la selle sur le dos du cheval, à l’arrêt, puis au travail devrait être un pré-requis indispensable à tout achat. Cela est rarement le cas. Les selliers, ou saddle fitters, sont capables d’estimer l’adéquation d’une selle au dos d’un cheval à l’aide de critères visuels simples. Cette première approche reste très subjective. Annette Rancurel, qui a participé à cette thèse, travaille au quotidien avec un tapis capteur de pressions, qui permet de visualiser en temps réel l’adéquation de la selle au dos du cheval. Sa compétence, acquise par de nombreuses évaluations de selle sur le terrain, a beaucoup apporté à l’analyse des résultats. C’est cet outil que nous avons utilisé dans cette thèse : le tapis, placé sous la selle et relié à un ordinateur que le cavalier porte sur son dos, permet la mesure en temps réel des pressions mesurées à la surface de la peau du dos du cheval. En effet, des études préalables à ce travail ont montré que des pressions excessives sont délétères pour l’animal. Le parallèle est possible avec la médecine humaine, où les pressions excessives sont la cause d’escarres et d’ulcères chez les personnes handicapées. On peut donc étudier l’adéquation d’une combinaison selle/pad à l’aide de la mesure des pressions induites par cette combinaison sur le rachis de l’animal. La troisième partie de ce travail est expérimentale et propose d’étudier les effets de différents pads sur l’adéquation d’une selle au dos d’un cheval donné. On considère que l’adéquation du couple selle/pad au dos du cheval est améliorée si les pressions mesurées par le tapis sont significativement plus faibles. On pourra ainsi évaluer les effets de différents pads, certains classiques comme le coton, le mouton ou le gel, et d’autres plus innovants, comme le haf® ou le deltapad®, sur l’adéquation de deux selles d’obstacles.

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Première partie : Les différentes structures mises en jeu dans l’adéquation selle/dos

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A. Le dos du cheval : une structure complexe Le cheval transmet au cavalier assis sur son dos ses émotions et ses tensions, et réciproquement. Pour Denoix, le dos est, chez le cheval comme chez l’être humain, un filtre émotionnel qui capte les résistances psychomotrices et les localise dans la masse musculaire(12). La connaissance anatomo-fonctionnelle du dos du cheval est le passage obligé permettant la compréhension des conséquences que peut avoir la selle sur cette structure.

1. Anatomie du dos du cheval 1) La colonne vertébrale a. Les vertèbres : unité structurelle et fonctionnelle La colonne vertébrale se compose de sept vertèbres cervicales, dix-huit vertèbres thoraciques (ou dorsales), six vertèbres lombaires et cinq vertèbres sacrées soudées entre elles (figure 1). Le poids du cavalier repose sur les vertèbres thoraciques. Ces vertèbres ont des processus épineux très hauts, pouvant atteindre trente centimètres dans la région du garrot. Elles ont un rôle de bras de levier très efficace. L’orientation de ces processus est dorso-caudale puis s’inverse entre T13 et T16, pour devenir dorso-crâniale. La vertèbre au niveau de laquelle l’orientation change est dite vertèbre anticlinale.

b. Inflexions naturelles de la colonne 7 vertèbres cervicales

8 vertèbres thoraciques

6 vertèbres 5 vertèbres 18 à 22 vertèbres coccygiennes lombaires sacrales Courbure lombo-sacrale

Courbure sacrale

Courbure nucale

Courbure cervico-thoracique Courbure thoraco-lombaire

Figure 1 : Courbures naturelles de la colonne (12) 17

La colonne présente différentes courbures (figure 1), plus ou moins accentuées selon les individus(12) : • Courbure nucale (cervicale haute) : convexité dorsale de l’os occipital à C3 ; • Courbure cervico-thoracique (cervicale basse) : complexité ventrale de C4 à T4 ; • Pont vertébral thoraco-lombaire : pratiquement rectiligne, avec une discrète courbure à convexité dorsale de T1-L6 ; • Courbure lombo-sacrale, très marquée : espace intervertébral lombo-sacral L6-S1; • Courbure sacrale.

2) Les tissus mous de la colonne thoracolombaire a. Les masses musculaires : support de la selle De très nombreux muscles sont présents dans la région thoraco-lombaire du cheval. Dans

les paragraphes suivants, seuls les muscles en relation avec la selle seront détaillés(12). On distingue : • Les muscles juxtavertébraux : situés au contact des vertèbres. Ils assurent la proprioception, lors de la station et de la locomotion. Leur tension ou leur étirement module l’activité de masses musculaires beaucoup plus puissantes : • Les muscles superficiels : eux-même séparés en deux groupes selon leur position relative par rapport aux processus transverses des vertèbres : - Les muscles situés dorsalement aux processus transverses qui sont les extenseurs du pont thoraco-lombaire ; - Les muscles situés ventralement aux processus transverses qui sont les fléchisseurs du pont thoraco-lombaire ; Tous sont également des rotateurs ou des fléchisseurs latéraux (lors d’une action unilatérale) de la colonne, à des degrés divers. Muscles extenseurs Muscles fléchisseurs

M. erector spinae M. fessier moyen M. ilio-psoas

M. droit de l’abdomen

M. obliques

Figure 2 : Muscles moteurs de la colonne thoraco-lombaire (5) 18

i. Les muscles extenseurs 1. Les muscles extenseurs de la colonne thoraco-lombaire : Corde du lig. nucal

m. digastrique du cou m. complexus m. longissimus

m. semi épineux de la tête m. épineux m. longissimus m. ilio-costal

m. erector spinae

m. long de la tête m. long du cou m. scalènes m. droit de l’abdomen m. transverse de l’abdomen

Figure 3 : Muscles de l'encolure et du tronc, plan profond (12) On nomme muscle erector spinae (figure 2) la masse volumineuse qui occupe tout l’espace compris entre les processus épineux et les processus transverses des vertèbres lombaires et thoraciques, en recouvrant les muscles segmentaires plus profonds. Cette masse commune se clive en trois plans : • Muscle épineux (figure 3) : c’est la partie médiale du muscle erector spinae. Il s’insère sur la partie terminale des processus épineux thoraciques. Il recouvre le muscle multifide. Il est extenseur de la colonne vertébrale. • Muscle longissimus (figure 3) : Il est très épais et entièrement charnu. Son volume décroît en direction crâniale. Il est situé entre les deux autres extenseurs. Il s’insère sur les processus lombaires et thoraciques, ainsi que sur l’extrémité proximale des côtes. C’est un fort extenseur de la colonne vertébrale. Il participe également au mouvement de latéroflexion lors de contraction unilatérale. Au pas, l’activité éléctromyographique du muscle longissimus est maximale en T12 et minimale en L3(37). Cette activité intense en T12 pourrait contribuer à l’apparition de dorsalgies dans cette zone. Le muscle longissimus est responsable de la stabilisation de la colonne vertébrale, au pas et au trot, puisque son activité est maximale lors de la poussée du postérieur ipsilatéral. Son action est passive et ne participe pas activement à la mise en mouvement du dos. • Muscle ilio-costal (figure 3) : c’est la partie latérale du muscle erector spinae. Il s’insère sur le processus transverse de C6 et sur l’extrémité dorsale des côtes. Il participe à l’extension et à la latéroflexion de la colonne thoraco-lombaire. Le poids de la selle et du cavalier repose sur cette volumineuse masse musculaire.

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2. Les muscles extenseurs de l’encolure : m. rhomboïde m. trapèze m.splénius m. dentelé du cou

Fascia thoracolombaire

m. grand dorsal

m. fessier moyen m. fessier superficiel

m. omohyodien

m. glutéo-fémoral

m. sterno-céphalique

m. brachio-céphalique

m. tenseur du fascia lata m. semi-tendineux m.biceps fémoral

m. brachio-céphalique

m. omo-transversaire m. subclavier

m. pectoral descendant

m. pectoral ascendant

m. oblique externe m. dentelé ventral du thorax

Figure 4 : Muscles de l'encolure et du tronc, plan superficiel (12) Ce sont les muscles cervicaux dorsaux. Ils jouent un rôle capital dans le maintien dorsal de la scapula et sont mobilisateurs de l’épaule. •



Muscle trapèze (figure 4): muscle plat, triangulaire, étalé à la surface du cou. Il s’appuie sur la corde du ligament nucal dans sa partie cervicale, sur le ligament supra-épineux et les premiers processus épineux thoraciques dans sa partie thoracique. Seule sa partie thoracique est en relation avec la selle. Il contribue fortement aux déplacements dorsaux de la scapula. Muscle rhomboïde (figure 4): il s’étend de la corde du ligament nucal au sommet des premiers processus épineux thoraciques, et s’insère au bord dorsal de la scapula. Il est divisible en une partie cervicale et une partie thoracique. Comme pour le muscle trapèze, seule la partie thoracique est en relation avec la selle. Il est recouvert par ce dernier. Il tire dorsalement la scapula et peut redresser l’encolure.

Le muscle grand dorsal (figure 4) n’est pas un extenseur de l’encolure, mais il est anatomiquement en rapport avec les deux muscles précédents, c’est pourquoi il est présenté ici. Il assure la solidarisation du membre antérieur au tronc. C’est également un agent majeur de la propulsion du membre antérieur. Il s’insère par le fascia thoraco-lombaire sur le ligament supraépineux, il couvre la région du dos et des lombes. Il s’insère sur le membre au niveau de l’extremité proximale de l’humérus. Il est couvert par le muscle trapèze et recouvre le muscle rhomboïde thoracique. Les muscles grand dorsal et trapèze, qui couvrent les processus latéraux du garrot, peuvent être lésés par une selle trop étroite(20).

20

ii. Les muscles fléchisseurs Ils ne sont pas en relation directe avec la selle, mais leur action est primordiale dans la locomotion du cheval car ils permettent au cheval de « s’arrondir » et d’engager les postérieurs. 1. Les muscles fléchisseurs de la colonne thoraco-lombaire : Ce sont les muscles de la paroi de l’abdomen (muscles oblique externe, oblique interne, muscle droit de l’abdomen, muscle transverse de l’abdomen), et les muscles de la région lombo-iliaque (muscles grand et petit psoas et muscle carré des lombes). Ce sont des muscles relativement peu épais. Leur efficacité sur le plan locomoteur est due à leurs corps musculaires très étendus et au fait qu’ils s’insèrent très loin de l’axe vertébral, ce qui leur confère un effet de levier important(12). NB : le muscle ilio-psoas = grand psoas + iliaque. 2.

Les muscles fléchisseurs de l’encolure :

Ce sont les muscles cervicaux ventraux. Ils sont peu développés.

iii. Les muscles juxtavertébraux m. droits dorsaux de la tête m. obliques crânial et caudal de la tête

m. multifide cervical m. épineux du cou

m. multifide

m. ilio-psoas

m. iliopsoas

m. iliaque

m. long du cou

m. intertransversaire

Figure 5: Muscles juxtavertébraux (12)

Ce sont les muscles segmentaires profonds. Il s’agit principalement du muscle multifide (figure 5), qui est formé de multiples faisceaux obliques allant des processus transverses aux processus épineux. Il participe à la contention articulaire et à la proprioception, ainsi qu’à la latéroflexion et à la rotation des espaces intervertébraux du pont thoraco-lombaire.

21

Une dissection fine de ce muscle a mis en évidence que l’orientation et la direction des faisceaux de fibres étaient similaires chez le cheval et chez l’homme(50). Il paraît légitime de penser que les muscles ont le même rôle dans les deux espèces : empêcher l’extension caudale de la vertèbre d’origine des fibres tout en prévenant la compression intervertébrale de la colonne thoracolombaire. La taille des faisceaux augmente lorsque le mouvement des vertèbres est plus important, soit à la jonction thoraco-lombaire(50).

b. Les structures ligamentaires associées i. Ligament nucal Le ligament nucal est particulièrement fort et élastique chez le cheval (figure 6). La corde du ligament nucal s’étend des processus épineux du sommet du garrot jusqu’à la protubérance occipitale externe. Il joue un rôle primordial dans la mécanique vertébrale du cheval, il assure la composante passive du balancier cervico-céphalique en association avec les muscles cervicaux dorsaux (composante active), en statique et en dynamique. Il participe à la coordination des mouvements de l’encolure et du pont vertébral. Foramen pour la bourse synoviale de la nuque Protubérance occipitale externe

Ligament supra-épineux

Corde de ligament nucal Foramen ovale

Lames du ligament nucal

Figure 6 : Ligament nucal (49)

ii. Ligament supra-épineux Situé juste sous la peau, il est aisément palpable (figure 6). Son rôle est de stabiliser les vertèbres thora-colombaires et leurs processus épineux. Il n’est protégé par aucune structure anatomique et subit directement toutes les pressions qui s’exercent au sommet de l’axe vertébral. La bourse supra-épineuse est toujours présente chez le cheval, elle est située entre le ligament supra-épineux et le plus haut des processus épineux des vertèbres du garrot (le plus souvent T6). Elle protège le ligament supra-épineux à cet endroit.

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iii.

Ligament inter-épineux

Il est situé entre les processus épineux des vertèbres et ses fibres sont orientées obliquement vers le centre de rotation de l’espace intervertébral considéré. Il ne gêne pas les mouvements de flexion et d’extension(12).

c. Fascia thoraco-lombaire Le fascia thoraco-lombaire enveloppe toute la masse commune depuis la crête iliaque jusqu’à l’encolure (figure 4). Il est riche en somatocepteurs et semble pouvoir être la source de douleurs projetées(3).

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La selle repose sur le pont thoraco-lombaire. Elle doit respecter l’incurvation naturelle du dos à cet endroit. Son poids, et celui du cavalier, provoquent une mise en contrainte des articulations et tendent à imposer une incurvation ventrale à l’axe vertébral(3). Cette mise en tension entraîne le cisaillement des disques intervertébraux, la compression des articulations synoviales et le pincement du ligament inter-épineux. Cette contrainte doit être la plus faible possible, afin de préserver au maximum ces structures. Conséquences en sellerie : On considère que la force correspond au poids de la selle auquel s’ajoute le poids du cavalier. Etant donné que la pression est égale à la force divisée par la surface sur laquelle elle s’exerce (P = F/S), on peut diminuer les contraintes de deux façons : - en diminuant le poids de la selle ; - en augmentant la surface sur laquelle repose la selle.

3) Structures vasculaires a. Etude anatomique

• •

Chaque artère intercostale dorsale donne naissance à un rameau dorsal : Le rameau cutané médial irrigue les muscles multifide et épineux puis la peau en regard de ces deux muscles. Le rameau cutané latéral irrigue les muscles longissimus, ilio-costal, et le grand dorsal avant d’irriguer la peau.

Le tronc costo-cervical s’arborise depuis le tronc brachiocéphalique, puis donne l’artère scapulaire dorsale qui irrigue les muscles trapèze et rhomboïde ; ses rameaux cutanés irriguent la région du garrot. L’artère thoraco-dorsale irrigue le muscle grand dorsal. Le réseau veineux est satellite du réseau artériel.

b. Vascularisation cutanée Les rameaux vasculaires superficiels, de très faible calibre, sont les premiers à subir les pressions exercées par la selle et le cavalier. Ils s’organisent en un fin lacis, qui joue un rôle essentiel dans la nutrition cutanée et la thermorégulation du cheval. On suppose qu’en cas de surpression exercée par la selle, les capillaires sont occlus. L’ischémie ainsi provoquée aurait pour conséquence des lésions pouvant aller jusqu’à la mort cellulaire et l’apparition de lésions des tissus mous. L’apparition de poils blancs sous une selle inadaptée pourrait s’expliquer par l’atrophie des bulbes pilaires suite à l’ischémie prolongée. La destruction pilaire provoquerait la fuite du pigment mélanique. Ces lésions permettent de repérer une inadéquation selle/dos, comme nous le développerons dans la seconde partie.

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c. Vascularisation musculaire Les muscles sont irrigués par un réseau vasculaire profond. Il est logique de penser que lorsque les masses musculaires sont comprimées, les capillaires qui les irriguent sont occlus. On sait par ailleurs que toute altération du flux sanguin est une cause de douleur musculaire et de crampe(66). Selon le même phénomène, l’ischémie musculaire est source de lésions. De plus, il a été montré que pour une valeur de pression mesurée en surface, la pression mesurée en profondeur est plus importante (53).

4) Structures nerveuses Les muscles dorsaux sont innervés selon un schéma comparable à leur irrigation. Les filets du système sympathique circulent le long des capillaires sanguins, et c’est ce système qui contrôle la vasomotricité des vaisseaux superficiels. Une irritation nerveuse de ce système au niveau d’une structure vertébrale profonde ou d’un viscère provoquerait une vasoconstriction réflexe des capillaires cutanés innervés par ce nerf. Il en résulte une hypothermie au niveau de la zone concernée. Le phénomène n’est pas inflammatoire et ne répond donc pas aux thérapies anti-inflammatoires classiques. Les fibres de conduction de la douleur mises en jeu sont les fibres lentes de type C et les fibres A delta. Chez l’homme, la stimulation de ces fibres évoque des sensations d’hyperésthésie, de brûlure, de douleur ou encore de mécanoallodynie (intolérance à la pression). Le même phénomène est observé lors de douleurs dorsales chroniques chez le cheval, qui s’expriment par des changements de comportement ou par une altération des mouvements du dos. La vasoconstriction de la peau est puissante comparée à celle des muscles (réduction de 25 à 50% de l’afflux sanguin). La thermographie permet d’objectiver ce phénomène : on observe des images de zones « froides » (29,66). Selon Perrin, rapporté par Brouard(3), ces mêmes modifications du tonus vasomoteur par le système sympathique entraînent l’apparition de zones de sudation très localisées.

Conséquences en sellerie : La selle doit : - Respecter les courbures naturelles de la colonne ; - Respecter le garrot en étant dégarottée, suffisamment large et ne doit pas être positionnée trop en avant, pour ne pas gêner les mouvements de l’épaule; - Respecter le ligament supra-épineux et les processus épineux grâce à la gouttière vertébrale.

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2. La conformation des chevaux : conséquences locomotrices Les chevaux présentent des multitudes de variations dans leur conformation. Ces différences morphométriques ont des conséquences sur le fonctionnement de leur dos. Il est important de tenir compte de cette conformation au moment de choisir la selle. Dès la fin du XIXème siècle, les « anciens » avaient fait le lien entre les lésions du dos et la conformation des chevaux. Ainsi, selon Youatt, un cheval qui présente la conformation idéale possède une discrète courbure ventrale juste derrière le garrot, et une ligne du dos rectiligne jusqu’aux lombaires. Toute accentuation de cette courbure augmente le risque de blessure. Un cheval qui présente une courbure dorsale est de plus considéré comme contre performant.

1) Malformations congénitales Selon Jeffcott, il est certain que les malformations de la colonne prédisposent aux blessures. Les muscles superficiels sont soumis à une tension plus importante, ce qui peut conduire à des lésions chroniques des tissus mous (23). Cependant, ces malformations sont rares. Un auteur rapporte 40 cas de malformations congénitales du rachis sur 2839 fœtus et poulains, autopsiés entre 1986 et 2006, soit une prévalence de 1,4% (33). Les poulains appartenaient aux races pur-sang, trotteur français et selle français. La grande majorité des malformations congénitales ne causent pas d’avortement et la plupart surviennent pendant les deux derniers mois de gestation. La principale anomalie rachidienne identifiée est la scoliose (figure 7 - déviation latérale de tout ou partie de la colonne vertébrale, associée ou non à une rotation des corps vertébraux), qui affecte 1,2% des individus autopsiés, soit 82,5% des malformations rachidiennes. Les scolioses thoraciques s’accompagnent généralement d’une déformation de la cage thoracique, avec le plus souvent une asymétrie des hémithorax. Les cas de lordose (déviation du rachis dans un plan sagittal entraînant une convexité ventrale) et de cyphose (déviation du rachis dans un plan sagittal entraînant une convexité dorsale) recensés par cette étude sont associés à une scoliose thoracique ou cervico-thoracique.

Figure 7 : Scoliose (77)

26

Les autres anomalies congénitales ne sont pas développées ici car elle ne sont pas compatibles avec la vie.

2) Malformations acquises On peut considérer que tous les chevaux développent une lordose (figure 8 - cheval ensellé) lorsqu’ils vieillissent. Une lordose modérée est compatible avec l’équitation. En cas de lordose, la courbure naturelle thoraco-lombaire s’inverse pour prendre une inflexion ventrale (12). Cependant, certains individus ne peuvent plus être montés lorsqu’aucune selle ne leur va plus ou lorsqu’ils ne sont plus capables de supporter un poids sur la colonne.

Figure 8 : Lordose (78) La cyphose peut être secondaire à un traumatisme de la colonne (un cas à été rapporté suite à une fracture d’une vertèbre thoracique). Elle peut apparaître lors de boiterie antérieure bilatérale, surtout chez de jeunes chevaux. Dans ce cas, elle disparaît lorsque la boiterie est traitée (21).

3) Conformation et performance Les hommes de chevaux connaissent et se transmettent certaines connaissances sur les liens entre la conformation de l’animal et ses performances. Ainsi, Xénophon, au IVème siècle avant JC, décrivait déjà les grands traits morphologiques à rechercher chez les chevaux. Il privilégiait les chevaux à la zone thoraco-lombaire large mais relativement courte. Il considérait les dos longs comme une faiblesse. Les chevaux au dos court auraient moins de problèmes de dos et pourraient porter des charges plus lourdes. Ils auraient plus d’endurance mais seraient moins rapides. A contrario, les chevaux au dos long seraient bâtis pour la vitesse mais seraient plus enclins aux blessures une fois montés(24). Cependant, peu de preuves scientifiques viennent étayer ces suppositions.

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Figure 9 : A gauche cheval au dos long, à droite cheval au dos court (24) Johnston a mené une étude sur la conformation des chevaux(26). La seule différence notée dans cette étude est la longueur de la colonne lombaire (L1-L5), qui est significativement plus longue chez les chevaux de dressage que chez les chevaux d’obstacle (respectivement 271 mm et 227 mm). Les chevaux de dressage ont un mouvement de diduction plus important que les chevaux d’obstacle. Les chevaux au dos long sont considérés comme plus souples, ce qui explique peut-être la préférence des cavaliers de dressage pour les chevaux plus longs. Les chevaux au dos court, qui présentent une flexibilité moindre de la colonne, présentent plus de lésions vertébrales que les chevaux au dos plus long. Ces derniers semblent enclins aux blessures musculaires et ligamentaires(24). Les chevaux au dos court sont certes capables de porter de lourdes charges, mais une grande selle western est trop longue pour leur dos. Le poids du cavalier ne sera pas réparti correctement. Au contraire, un cheval au dos long pourrait supporter une selle plus longue, mais la pression exercée sur les « reins » (c’est-à-dire la jonction thoraco-lombaire) serait intolérable (19) . Malgré les nombreuses avancées technologiques et scientifiques, peu de recherches ont été effectuées et les critères morphologiques d’évaluation des chevaux sont toujours subjectifs et empiriques. Nous sommes loin, à l’heure actuelle, d’avoir démontré les relations entre certains traits de conformation et la performance, ou encore le risque d’apparition de blessures. Une évaluation objective de ces relations requiert une évaluation quantitative et répétable des critères de conformation (une image 3D d’un cheval à l’arrêt serait l’idéal). Il est aussi nécessaire de connaître les données épidémiologiques relatives à un type de blessure donné, tout en pouvant évaluer la performance, toujours de manière quantitative (ces données sont disponibles). L’immense majorité des études s’intéressent aux critères utilisables pour les membres et non pas pour le dos. Dans un avenir proche, il sera possible pour les vétérinaires d’associer les défauts de conformation courants à un risque d’apparition de troubles locomoteurs, selon l’usage du cheval. Cependant, la relation entre les défauts de conformation et la performance est bien plus difficile à évaluer, étant donné que la performance dépend de multiples critères (caractère, condition physique, absence d’affection systémique…).

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Conséquence en sellerie : L’inspection du cheval est essentielle afin de repérer d’éventuelles malformations congénitales ou acquises, susceptibles de gêner le cheval une fois monté. La selle doit s’adapter à la conformation du cheval et à la longueur de son dos, sous peine d’être inadaptée et de devenir très inconfortable pour l’animal.

3. Notion de cinématique du dos Seule la connaissance de l’anatomie et de la biomécanique du dos du cheval permet la réalisation d’une selle adéquate. La selle doit convenir en statique, sur un cheval à l’arrêt, mais également en dynamique, sur un cheval en mouvement. Le dos est l’organe clé de la biomécanique du cheval. C’est de ses propriétés que découlent les qualités de mobilité, d’équilibre et de rassembler du cheval (12). La cinématique est la discipline qui étudie le mouvement d’un objet sans tenir compte des forces qui génèrent ce mouvement.

1) Biomécanique du dos du cheval a. Le pont et l’arc Historiquement, de nombreuses analogies ont été faites entre un pont et la colonne du cheval. Le dos est décrit comme un pont vertébral horizontal tendu entre la ceinture scapulaire et la ceinture pelvienne. Il transmet l’impulsion depuis les postérieurs jusqu’aux antérieurs. Le concept de pont renvoie à une image de structure rigide. Selon la théorie de Slijper, le dos est comparé à un arc (figure 10 - bow-and-string concept), où l’arc représente la colonne vertébrale alors que la corde correspond à la ceinture musculaire ventrale et au sternum.

Figure 10 : Concept de l'arc "bow and string" (21) b. Les sensations décrites par le cavalier Le cavalier cherche à avoir un cheval qui « monte son garrot », c’est-à-dire qui fléchit le dos en engageant les membres postérieurs sous la masse. La flexion de la « ligne du dessus » traduit la décontraction et l’accord du cheval. Dans une attitude naturelle, le cheval va fléchir son encolure et céder dans sa bouche. Une extension de la « ligne du dessus » peut au contraire traduire la résistance ou le refus, le cheval « se creuse ». Il se met en défense et lève l’encolure, ce qui correspond à une extension cervicale. La flexion dorso-lombaire, obtenue lors de l’engagement des postérieurs et du rassembler, est provoquée par la participation de la sangle abdominale (figure 11). Ce sont les muscles abdominaux de la « ligne du dessous » qui déclenchent la phase active du raccourcissement 29

musculaire et donc la flexion. Il est donc nécessaire, lors du travail du cheval, de renforcer la « ligne du dessous » avant de chercher à obtenir la flexion de la « ligne du dessus ».

2 : Tension de la corde du logament nucal

3 : Flexion thoracique et montée du garrot

Mise en tension du m. erector spinae : augmentation du tonus

2’: Flexion lombo-sacrale et thoraco-lombaire

1 : Contraction concentrique des m. longs de la tête et du cou

1’ : Contraction concentrique des m. droits et obliques

Figure 11 : Rassembler - accentuation des courbures dorsales (12) Selon Harman, le traitement des dorsalgies associées à des exercices pour tonifier les muscles abdominaux peut aider à restaurer la « ligne du dessus », et peut rendre le choix de la selle plus facile (19).

2) Mouvements des vertèbres Le dos du cheval est une structure segmentaire, complexe, constituée d’une cinquantaine d’éléments rigides distincts, mais intrinsèquement reliés entre eux : les vertèbres. Le mouvement de la colonne thoracolombaire peut être décrit comme la somme des mouvements des vertèbres pris individuellement (63). Cependant, le mouvement d’une vertèbre est limité par les structures anatomiques avoisinantes : les muscles, les ligaments, les disques intervertébraux et les côtes (figure 12). Cette chaîne articulaire doit combiner deux propriétés a priori contradictoires : une certaine rigidité est nécessaire pour empêcher l’affaissement du corps, mais la flexibilité doit être suffisante pour permettre les mouvements du tronc lors de la locomotion.

30

lig. supra-épineux

lig. inter-épineux capsule articulaire foramens intervertébraux lig. longitudinal dorsal fovea costale disque intervertébral lig. longitudinal ventral

Figure 12 : Articulations intervertébrales – vertèbres thoraciques (T13-T19) (12) La cinématique d’un objet peut être décrite grâce à six mouvements de base : trois rotations et trois translations. Les mouvements de translation entre vertèbres sont négligeables. Le mouvement de base du dos peut donc être décrit comme la rotation d’une vertèbre, considérée individuellement, autour de 3 axes (figure 13). Le degré de rotation d’une vertèbre varie selon sa place au sein de la colonne, et la partie de la colonne considérée. Toutes les vertèbres sont capables de bouger selon ces trois axes, sauf en cas de fusion intervertébrale(54).

Figure 13 : Rotation d'une vertèbre autour de trois axes (54) Les études ex-vivo s’intéressent au mouvement de la colonne vertébrale disséquée et isolée. On met en charge les vertèbres de façon à étudier leurs déplacements. Les études in-vivo sont plus difficiles à réaliser, étant données la complexité et la faible amplitude des mouvements. Deux méthodes sont utilisées : la méthode invasive où des marqueurs fixes sont implantés dans les vertèbres (14,15) et la méthode non invasive où des capteurs sont maintenus sur la peau à l’aide de ruban adhésif, sur la ligne médiane du dos, à l’aplomb des processus épineux (34,35,36). Toutes ces études traitent du mouvement normal des vertèbres, chez des chevaux non dorsalgiques.

31

a. Flexion et extension ou dorso-ventraux i.

Etudes ex-vivo

Townsend a étudié la cinématique de 18 colonnes vertébrales, ex-vivo. Le mouvement dorso-ventral le plus important se situe au niveau de l’articulation lombo-sacrée et des premières vertèbres thoraciques (54).

ii.

Etudes cinématiques

Afin de permettre la comparaison inter-individus, Licka exprime ses résultats en pourcentage de la hauteur au garrot (34,35,36). Faber communique ses résultats en degrés (14,15).

A l’arrêt Au pas Au trot

Zone de mouvement d’amplitude maximale

Flexion moyenne (Licka)

Extension moyenne (Licka)

T10 T16 L3 T10 Sacrum T10 T 16

4,1 % 5,9 % 4,2 % 1,7% 4,3 % 4,46 % 4, 94 %

2,0 % 2,4 % 2,0 %

Mouvement angulaire (Faber)

6,2° 7,8° 4,9° 3,5°

Tableau 1 : Mouvements dorso-ventraux d'amplitude maximale (14,15 et 34,35,36) b. Latéroflexion i. Etudes ex-vivo

Ex-vivo, pour Townsend, le mouvement de latéroflexion d’amplitude maximale est mesuré au niveau du milieu de la colonne thoracique (T11-T12)(54). ii. Etudes cinématiques

A l’arrêt Au pas Au trot

Zone de mouvement d’amplitude maximale

Flexion à gauche (Licka)

Flexion à droite (Licka)

T10 T16 T10 T17 L3 Sacrum T6

4,6 % 4,2 %

5,1 % 5,3 %

3,0% 3,41% 3,49% 2,78% Mouvement faible

Mouvement angulaire (Faber)

11,3° 17,9° 13,5° 10,8° 4,9°

Tableau 2 : Mouvements de latéroflexion(14,15 et 34,35,36)

32

Selon Faber, le mouvement de latéroflexion de chaque vertèbre thoracique est indépendant de celui des autres vertèbres. Les méthodes employées dans ces deux études, ainsi que la vitesse du tapis roulant, étaient différentes et peuvent expliquer ces variations.

c. Rotation axiale i. Etudes ex-vivo

Le mouvement de rotation axiale d’amplitude maximale est mesuré au niveau du milieu de la colonne thoracique (T11-T12)(54). ii. Etudes cinématiques

Au pas Au trot

Zone de mouvement d’amplitude maximale

Mouvement angulaire

T10 T13 L1 L5 T10 T13 S3

5,3° 8,4° 11,3° 13,1° 3,3° 3,1° 5,7°

Tableau 3 : Mouvements angulaires (14,15) Au pas, depuis T13 jusqu’au bassin, les vertèbres se comportent comme un seul segment rigide. Mais l’amplitude du mouvement change(14,15).

3) Modifications pathologiques de la colonne vertébrale a. Evaluation dorsalgiques

cinématique

des

chevaux

Wennerstrand a montré que le mouvement du dos des chevaux qui présentent des signes cliniques de dorsalgie était significativement différent de celui de chevaux sains, dans l’amplitude angulaire comme dans la symétrie du mouvement(68). Ainsi, au pas, les chevaux dorsalgiques montrent une amplitude du mouvement de flexion/extension en T13 et T17 et une amplitude de rotation axiale de la hanche significativement plus faible que les chevaux sains. L’amplitude du mouvement de latéroflexion en T13 est en revanche significativement plus importante. Au trot, l’amplitude de flexion/extension à la jonction thoraco-lombaire (en T17 et en L1) est significativement plus faible. Tous les chevaux de cette étude présentaient des douleurs musculaires lors de la palpation du dos, ainsi que des modifications pathologiques squelettiques pour plus de la moitié d’entre eux. 33

L’auteur pense que ces lésions du dos expliquent la diminution du mouvement de flexion/extension au pas et au trot, ainsi que les modifications du mouvement de latéroflexion au pas. Un cheval dorsalgique tente de soulager son dos, en se raidissant, lorsqu’il se déplace. Pour Von Rechenberg, lorsque la selle est responsable de cette dorsalgie, le cheval refuse de fléchir son dos pour ne pas se « rapprocher » de la selle. On observe alors des allures raccourcies, un désengagement des postérieurs. Le cheval refuse la mise en main(65). Dans un autre article, Wennerstand a cherché à étudier si une dorsalgie, induite par une injection unilatérale d’acide lactique dans le muscle longissimus gauche, modifiait la cinématique du dos. Au pas et au trot, l’extension du dos post-injection était plus importante, une latéroflexion à gauche était également présente aux deux allures étudiées. Cependant, lors des mesures effectuées la semaine suivante, au pas, la latéroflexion était inversée (latéroflexion à droite), c’est-à-dire du côté sain(69). Les chevaux aux lésions dorsales identiques présentent des changements similaires de la cinématique de leur dos. Une dorsalgie unilatérale provoque une extension plus importante du dos, ce qui est cohérent avec l’étude précédemment citée. On note également l’apparition de mouvements latéraux compensateurs.

b. Lésions osseuses D’après Jeffcott, les lésions osseuses sont le plus souvent localisées dans la partie centrale de la colonne, de part et d’autre de la 12ème vertèbre thoracique(23). i. Ostéophytes des corps spondylose vertébrale

vertébraux

ou

Townsend a étudié la relation entre la biomécanique du dos et les changements pathologiques observés chez des chevaux dont le fonctionnement thoraco-lombaire était considéré comme normal antemortem(55). Aucun de ces chevaux n’était rapporté comme dorsalgique. Ils ont observé, chez 36% des chevaux, des ostéophytes ventro-latéraux des corps vertébraux. Ces ostéophytes étaient retrouvés majoritairement dans la zone de mouvement latéral et rotatoire maximal, entre T10 et T17, les plus importants étant retrouvés entre T11 et T13. La spondylose est une affection relativement peu fréquente (14 cas sur 443 chevaux pour Jeffcott) qui correspond à la formation d’un pont osseux entre les corps vertébraux d’une ou plusieurs vertèbres, principalement au centre du dos (T12-T13). Les signes cliniques peuvent disparaître lorsque la fusion est complète. ii. Conflit de processus épineux (CPE)

Les conflits de processus épineux (CPE – figure 14) sont détectés sur 86% des colonnes, la plupart entre T13 et T18 (55). Jeffcott retrouve des lésions vertébrales chez 202 chevaux dorsalgiques (38,6%), les conflits de processus épineux étant l’affection vertébrale la plus fréquente, en région thoracique caudale et lombaire crâniale. Les chevaux de compétition de saut d’obstacles sont les plus touchés par cette affection (173 cas). On note une perte de souplesse et de flexion du dos, ce qui provoque une baisse de performance et des dorsalgies. Il est probable que cette affection provoque une douleur importante.

34

CPE : espace interépineux réduit avec chevauchement entre les processus épineux

T14

T15

T16

Figure 14 : Conflit de processus épineux (CPE) (VetAgroSup Imagerie médicale). Cette radiographie est une vue latérale de la région thoracique caudale d’une jument de loisir pur sang arabe de 13 ans, présentée pour des dorsalgies chroniques, évoluant depuis 3 ans. La radiographie révèle un conflit de processus épineux sévère entre T14 et T15. On note que ces vertèbres se situent sous la selle. Les espaces interépineux entre T15 et T18 sont également diminués. La localisation de ces CPE est dans la zone préférentiellement décrite par Townsend.

Selon Jeffcott, l’incidence de l’apparition des CPE est corrélée au travail effectué par le cheval et plus précisément au degré d’extension du dos exigé par ce travail(55) (figure 15).

tension sur le lig. supra-épineux

Ecartement des processus épineux

tension sur le lig. nucal

flexion thoracique

relâchement du lig. nucal rapprochement des processus épineux relâchement du lig. supra-épineux

extension thoracique

Figure 15 : Extension et flexion de la colonne vertébrale (48 modifié d'après Denoix)

35

A l’obstacle, l’extension du dos est maximale, ce qui explique l’incidence élevée de cette pathologie chez les chevaux de CSO. De plus, selon De Cocq, le poids et la selle provoquent également une extension générale de la colonne vertébrale. Cette extension se manifeste par une diminution de la flexion et de l’extension maximale en L3 et L5, lorsque le cheval porte une selle à laquelle est ajouté un poids « mort » de 75kg. Cette extension serait à l’origine de lésions des tissus mous et pourrait être un facteur étiologique possible dans le développement des conflits de processus épineux(8). La thermographie est un outil diagnostic intéressant lors de suspicion de conflit des processus épineux. Ainsi, chez les chevaux symptomatiques, on décrit une zone de chaleur importante le long de la colonne vertébrale, qui dénote une inflammation. Les chevaux asymptomatiques présentent une très discrète zone de chaleur, celle-ci peut même ne pas être retrouvée(29). iii. Fracture des processus épineux

La fracture de garrot survient après un traumatisme, par exemple lorsque le cheval « tire au renard » et tombe à la renverse. On observe alors des fractures multiples des processus épineux. Le pronostic est bon, une fois la douleur et l’inflammation locale résolues. Jeffcott rapporte que pour trois chevaux, la déformation persistante a nécessité la réalisation d’une selle adaptée(55).

c. Lésions des tissus mous Les lésions des tissus mous sont le plus souvent localisées dans les parties proximales et distales de la colonne thoraco-lombaire. Elles ont été diagnostiquées chez 38,8% des chevaux examinés par Jeffcott (203 cas). Les plus fréquentes étant les lésions du muscle longissimus et la desmopathie du ligament supraépineux (117 cas). Les signes cliniques sont identiques, toutefois le pronostic de la desmopathie est moins favorable(55). i. Desmopathie du ligament supra-épineux (LSE)

Lésions hypoéchogènes du ligament supra-épineux Contours très irréguliers des sommets des processus épineux T14

T15

Figure 16 : Desmopathie du ligament supra-épineux (VetAgroSup Imagerie médicale).

36

La desmopathie du ligament supra-épineux (figure 16) survient le plus souvent chez les jeunes chevaux, au dos long et flexible(55). La partie crâniale de la colonne lombaire est la plus touchée. On peut souvent sentir un gonflement dans la zone médiane du dos, au-dessus d’un ou de plusieurs processus épineux. Lorsque la pathologie évolue depuis longtemps, la palpation du ligament est douloureuse. La latéroflexion est réduite de façon uni- ou bilatérale. Le diagnostic est échographique. Lorsque les chevaux cicatrisent, ils développent secondairement un syndrome du « dos froid », qui généralement n’affecte pas les performances sportives. Les forces exercées par la selle peuvent être une des causes d’apparition des lésions, puisque le ligament est comprimé entre la selle et l’os. ii. Lésions musculaires

Selon Harman, 80% des chevaux, toutes disciplines confondues, présentent une atrophie du muscle trapèze droit(19). Clayton constate également que de nombreux chevaux ont une musculature asymétrique, avec l’épaule gauche plus proéminente et placée plus caudalement par rapport à la droite(6). La selle a donc tendance à glisser vers la plus petite épaule. La pression à droite de la selle est donc plus importante. C’est également ce qui a été constaté lors des premières mesures effectuées à l’aide du tapis capteur de pression(Annette Rancurel, communication personnelle). Cela pourrait s’expliquer par le fait que l’immense majorité des cavaliers monte toujours par la gauche du cheval, ce qui finit par déformer les arçons et les chevaux (6). Il serait intéressant de monter alternativement par la gauche et par la droite du cheval. Harman signale l’existence d’une douleur importante au niveau du muscle trapèze chez les chevaux dont la selle est trop en avant, ou lorsque la selle (et/ou le pad) comprime(nt) le garrot(19).

Figure 17: Amyotrophie nette du muscle trapèze gauche chez un cheval de selle (Rancurel A.) Lorsqu’une selle inadaptée est utilisée, une amyotrophie des muscles trapèzes peut apparaître (figure 17). Cette amyotrophie disparaît rapidement avec l’utilisation d’une selle adéquate(6,19). La selle n’est pas toujours responsable des douleurs musculaires, mais une selle symétrique posée sur une musculature asymétrique ne peut pas se positionner correctement et entretient la douleur(3). Une selle mal conçue ou inadaptée peut non seulement être à l’origine de dorsalgies, mais également entretenir ou exacerber une lésion du dos préexisante(25). 37

Figure 18 : Sites préférentiels des lésions dorsales (modifié d’après 23)

4) Etude morphométrique Johnston a étudié les relations entre l’étude morphométrique et la cinématique du dos. Il a montré que l’utilisation, le sexe et l’âge étaient corrélés à la conformation et au mouvement. Les chevaux étaient des chevaux de selle suédois, montés régulièrement par le même cavalier et entraînés pour leur discipline respective (CSO, dressage et CCE). Les juments présentent un mouvement latéral de la partie crâniale de la colonne thoracique plus important, ainsi qu’une meilleure symétrie, par rapport aux hongres(26). Jeffcott avait noté une incidence plus importante de la spondylose chez les juments (64%)(23), ce qui pourrait faire penser qu’un mouvement latéral excessif est un facteur prédisposant aux processus dégénératifs des vertèbres, et donc à la spondylose dans les régions les plus fréquemment touchées. Les vieux chevaux présentent un mouvement de flexion/extension de la jonction thoracolombaire significativement moins important au trot(26). Dans l’étude de Licka, la différence entre l’angle maximal et l’angle minimal entre les marqueurs a été mesurée dans les plans horizontal et sagittal, au pas. Elle n’a pas trouvé de corrélation entre l’âge des chevaux (qui variait de 4 à 22 ans) et la variation entre ces deux angles(35). Selon Von Peinen, les cavaliers font travailler les jeunes chevaux trop tôt, et les forcent à maintenir leur encolure et leur dos dans des positions que leurs os ou leurs tissus mous ne sont pas prêts à supporter. Ils n’apprennent pas à se déplacer correctement avec un cavalier sur le dos. Cette utilisation trop précoce des chevaux pourrait contribuer à l’augmentation de l’incidence des dorsalgies(64).

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Conséquences en sellerie : - Les lésions les plus fréquentes du dos se situent sous la selle. - Les apophyses épineuses doivent pouvoir bouger dans les trois dimensions, sans entrer en contact avec la matelassure de la selle. On comprend alors l’importance d’une gouttière vertébrale large (au moins 3 doigts dans la partie postérieure de la selle – 6 à 8 cm). - Au sein de la colonne thoracolombaire (T5-S5), la charnière T17-L2 est la zone la plus mobile de la colonne vertébrale du cheval. La selle ne doit pas réduire l’amplitude de ces mouvements, elle ne doit donc pas dépasser T17.

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B. La selle : outil de communication entre le cavalier et le cheval La selle est une structure rigide, qui connecte les structures dynamiques du cheval à son cavalier. La position de la selle affecte la façon dont le cavalier communique avec son cheval à travers ses aides (assiette et jambes). Son adéquation affecte le mouvement et le confort du cheval(18,19).

1. La structure de la selle On distingue trois type de selles : - Les selles anglaises, les plus couramment utilisées en France. La selle anglaise se décline ensuite selon le type d’activité auquel le cheval est destiné. On distingue des selles de dressage, des selles d’obstacle, des selles de complet et enfin des selles dites « mixtes » qui doivent convenir à tous les types d’activité ; - Les selles western ; - Les selles sans arçon. Nous avons choisi deux selles anglaises d’obstacle pour notre étude. Nous développerons donc uniquement la structure de ce type de selle.

2) L’arçon L’arçon correspond au cœur de la selle (figure 19). Il détermine sa taille, sa forme et sa rigidité.

Figure 19 : Arçon de selle anglaise (76) a. Composition i. L’arçon en bois

L’arçon en bois est traditionnellement fait de bois lamellé collé, renforcé par deux lames métalliques parallèles au siège. Son centre est vide. Les arçons en bois sont dits « souples » car le bois est légèrement déformable. Le bois utilisé est traditionnellement le hêtre. Certains arçonniers utilisent du peuplier, plus souple mais plus fragile. Aujourd’hui, on peut trouver toute une gamme de bois selon la qualité de l’arçon : du bois de hêtre au contre-plaqué. 40

La flexibilité des arçons dépend du rapport entre sa longueur et la résistance des matériaux utilisés. Elle s’exerce longitudinalement et en torsion(3). Les selles de CSO, de dressage, de CCE ou de randonnées sont équipées d’arçons qui se ressemblent. Les selles mixtes sont généralement équipées d’un arçon de selle de CSO. ii. Arçon en plastique

Les arçons en plastique (polyuréthane) équipent les selles synthétiques. Ils sont moins chers que les arçons en bois. Ils sont pleins mais évidés en leur centre pour dégager la colonne vertébrale. Ils sont souples et déformables. On leur reproche de perdre leur incurvation à l’exercice sous le poids du cavalier(Murdoch cité par 3). Certains selliers leur reprochent également leur manque de flexibilité d’arcade, qui pourrait gêner le mouvement de la scapula(3). Il existe des arçons rigides ou indéformables, que nous ne détaillerons pas ici. Ils équipent les selles western ou les selles de randonnées. Ils peuvent être en fibre de verre ou encore en polyéthylène. On trouve également des arçons en résine ou métalliques. iii. Arçon « nouvelle génération »

Ces arçons innovants sont dits « flexibles », mais jusqu’à quel point ? Et avec quel impact sur le dos du cheval ? Il existe de multiples innovations, mais une seule étude sur ce sujet est parue à notre connaissance(32) : L’auteur compare les pressions engendrées par trois selles de course, munies respectivement d’un arçon classique (en bois), d’un arçon flexible et une selle sans arçon. Les trois selles sont de forme et de poids très variables. La force moyenne mesurée avec les trois selles est équivalente. La selle à arçon flexible permet une distribution des pressions sur une surface plus importante au galop (environ 20% supplémentaires). Au trot, la même tendance est notée, mais elle n’est pas significative. La selle à arçon flexible semble être la plus à même de s’adapter à un grand nombre de chevaux de conformation différente. La selle sans arçon concentre la pression sur une seule région, selon la position du cavalier, alors que l’on cherche à distribuer les pressions sur la plus grande surface possible. La selle à arçon classique a un effet « pont » important, ce qui est mal toléré par le cheval. La selle à arçon flexible serait donc la plus intéressante pour les chevaux de course. Cependant, les pics de pression mesurés pour les trois selles dépassent les valeurs considérées comme tolérables pour les chevaux. Ces valeurs seront développées dans la partie suivante. Riou a testé deux selles d’obstacles sur un simulateur équestre, à l’aide d’un tapis capteur de pression (NOVEL®). L’une était munie d’un arçon en bois classique, l’autre d’un arçon nouvelle génération (DUALTREE®) avec des panneaux en mousses innovantes. Elle a montré que la selle « nouvelle génération » est supérieure à la selle classique : la surface de contact avec le dos du cheval est importante et homogène, et l’atténuation des pressions est meilleure. Cependant, les pressions maximales mesurées pour les deux selles étaient identiques. La selle nouvelle génération n’engendre pas moins de pression, mais la répartit de façon plus homogène. Malheureusement, on ne peut pas distinguer la part d’amélioration apportée par l’arçon innovant de celle qui s’explique par la matelassure(48). L’avenir de l’arçon pourrait être le sur-mesure(Annette Rancurel, communication personnelle).

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b. L’arcade de garrot Les arcades de garrot peuvent être de forme et de taille variées. L’arcade de garrot des arçons français est de forme ogivale, et peut donc comprimer latéralement le garrot si elle n’est pas assez grande. Les arçons anglais ou allemands ont une forme en demi-lune, donc si l’ouverture est trop grande, le garrot vient toucher l’arcade(3). Elle est systématiquement renforcée par une arcade métallique qui limite la déformation. Le nez de l’arcade peut être droit ou coupé (figure 20). Les arcades au nez coupé conviennent mieux aux chevaux ayant le garrot saillant. Le nez coupé permet également une montée de garrot plus importante.

Figure 20 : Arcade au nez coupé (73) Pour les selles d’extérieur ou d’obstacle, l’arcade doit être suffisamment haute pour dégager le garrot tout en laissant la liberté au cavalier de se lever facilement.

c. L’habillage de l’arçon Après avoir vérifié la qualité de l’arçon (symétrie, intégrité, taille), le sellier procède à son habillage. La première étape est le sanglage, qui permet de donner une incurvation à l’arçon, en le comprimant longitudinalement, manuellement ou mécaniquement. Cette opération permet de donner sa future forme au siège (creux ou semi-creux). L’incurvation est maintenue en forme par deux bandes synthétiques, clouées ou agrafées au niveau de l’arcade et du troussequin. L’arçon porte également les couteaux d’étrivières, il permet donc l’usage des étriers(3). Pour les selles à sanglage court, l’arçon reçoit également les contre-sanglons. Le cuir qui recouvre le siège est préalablement découpé selon un patron spécifique, puis il est cousu, ou cloué, sur la partie ventrale de l’arçon(48).

d. Innovations i. Selle sans arçon

Le principe des selles sans arçon est de suivre de manière optimale tous les mouvements du cheval. Le principal problème de ces selles est l’absence de gouttière vertébrale (pour la plupart des marques). En effet, comme nous l’avons vu, la selle doit absolument préserver les structures de la ligne médiane du dos et laisser libre le mouvement des vertèbres.

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ii. Selle à arçon ajustable

C’est le principe de la selle de marque FNE, qui n’a pas, à proprement parler, d’arçon mais un ensemble de palettes qui s’ajustent aux mouvements du cheval, en rotation et en latéroflexion (figure 21).

Figure 21 : Selle FNE à arçon ajustable (75) Ces selles sont principalement utilisées en endurance.

2) Les quartiers a. Petit quartier Préalablement découpé selon un patron donné, il est ensuite fixé par le clou de selle et cousu sur la jupe du cuir du siège. Il recouvre les couteaux d’étrivière.

b. Grand quartier Egalement découpé au préalable selon un patron, il reçoit ensuite ses matelassures. Il est cousu à l’arçon. La jambe du cavalier repose sur le grand quartier. Les matelassures de quartier, les taquets et les contre-sanglons sont cousus entre deux épaisseurs de cuir, qui sont ensuite cousues entre elles.

c. Faux quartier Il peut ne pas exister. S’il existe, il reçoit des matelassures et des taquets avant son montage sur l’arçon, de la même façon que le grand quartier.

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3) Les panneaux a. Matelassure La matelassure détermine les capacités amortissantes du panneau. Le matériau le plus utilisé par les selliers français est la mousse, qui peut être disposée en une seule épaisseur ou en association de plusieurs mousses, en sandwich. Les mousses sont majoritairement de type caoutchouc synthétique ou polyuréthane. Elles sont élastiques et imputrescibles, avec une mémoire de forme importante(3). Les selles de marque Wintec® et Bates®, pourvues du système CAIR®, possèdent des panneaux en mousse injectés d’air. Les selliers allemands et anglais tendent à utiliser le feutre. Il est solide, amortissant, indéformable, imputrescible et bon marché. On peut le coudre facilement. Il peut constituer toute l’épaisseur des panneaux, ou servir d’assise à d’autres matériaux. Dans son étude de 2010, Byström a étudié l’influence des différentes matelassures sur les pressions engendrées par la selle(4). L’adéquation des selles était correcte, mais imparfaite, pour les chevaux utilisés. Il a montré que la laine semble être un meilleur matériau que le type de mousse utilisée dans son étude (mousse synthétique sans plus de précision). En effet, les pressions maximales mesurées sous la partie arrière de la selle munie de panneaux en mousse étaient de 7 à 12% supérieures par rapport à une matelassure en laine. Comme nous le détaillerons plus tard, les études sur les pads ont montré que les différents types de mousse n’avaient pas les mêmes propriétés. Il n’est donc pas possible de conclure que la laine constitue toujours un meilleur matériau que la mousse. Cependant, Byström a montré que les matelassures jouent un rôle non négligeable dans l’adéquation de la selle au dos du cheval(4). Les panneaux en laine nécessitent d’être « refloqués » tous les 6 mois, ce qui en pratique n’est jamais fait par les cavaliers. Quelle que soit l’utilisation de la selle, la matelassure s’élargit en général en regard de la pointe de l’arçon pour éviter que celle-ci ne vienne au contact direct du cheval(3). La tendance actuelle est au close contact. Le cavalier cherche à se rapprocher du dos du cheval, les selliers ont donc tendance à diminuer l’épaisseur des matelassures, au détriment de la distribution des pressions. Des irrégularités de la matelassure peuvent être détectées à l’examen sur le cheval en station au carré lorsque la selle ne repose pas à plat, ou être objectivées à l’aide de l’examen thermographique.

b. Angle des panneaux Les panneaux doivent reposer à plat sur la musculature dorsale. Un angle trop aigu est douloureux pour le cheval.

c. Symétrie des panneaux Selon Harman, environ 30% des selles présentent un défaut de fabrication avec une asymétrie des panneaux. Dans ce cas, il est évident que le poids n’est pas réparti de façon homogène (avec un poids supérieur du côté où la matelassure est la moins large), ce qui peut gêner le cheval(19).

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4) Les taquets Ils permettent de maintenir la jambe du cavalier en place. Ils sont longs et minces sur une selle de dressage, courts et épais sur les selles d’obstacles. Les selles d’extérieur n’en sont pas pourvues. Certains cavaliers n’apprécient pas les selles munies de taquets proéminents.

5) La sangle Le sanglage permet de maintenir la selle en place. Il peut être long (sangle courte) comme sur la majorité des selles de dressage. Ce type de sanglage permet d’enlever une épaisseur sous la jambe du cavalier. La majorité des selles d’obstacle ont un sanglage court (sangle longue)(3). La sangle peut être élastique ou non. D’après Brouard, 84% des cavaliers optent pour une sangle élastique(3). Mais une sangle trop serrée comprime le sternum, appuie sur les pectoraux et diminue la mobilité des antérieurs. C’est l’inconvénient des sangles élastiques, que l’on a tendance à trop serrer. Harman signale l’importance des muscles pectoraux qui recouvrent le sternum et sont comprimés par la sangle. Elle rapporte le cas de chevaux toujours douloureux malgré un traitement efficace de leur dorsalgie qui, en réalité, souffraient du sternum(19). De Cocq a montré qu’un surfaix utilisé pour longer les chevaux, ou une selle sans cavalier, n’ont aucune influence sur la cinématique du dos du cheval au pas, au trot et au galop(8). Les tests ont été effectués avec une selle de dressage (sangle courte) et un surfaix de longe. Le sanglage étant toujours réalisé par la même personne. Cependant, les effets d’un surfaix ne peuvent pas être assimilés à ceux d’une sangle. Byström s’est intéressé à l’influence du type de sanglage sur les pressions mesurées sous la selle(4). Pour lui, un sanglage en V n’est pas meilleur qu’un sanglage classique. Il provoquerait des pics de pression plus importants à l’avant de la selle. L’auteur mentionne un biais dans son étude, car les sangles utilisées pour le sanglage en V sont plus courtes, et par conséquent, la tension exercée lors du sanglage diffère d’un sanglage classique. Il ajoute que le sanglage en V fait avancer la selle, et modifie donc les pressions mesurées à l’avant. Cependant, la conclusion de son étude est que le sanglage classique semble équivalent, voire meilleur, que le sanglage en V en termes de pressions mesurées sous la selle. On peut noter que dans cette étude, le sanglage en V choisi s’attache à la pointe d’arçon, ce qui n’est pas toujours le cas. Ce choix d’attache peut provoquer un biais. Les résultats de cette étude ne peuvent donc pas être extrapolés à l’ensemble des sanglages en V.

2. Place de la selle sur le dos du cheval 1) Etude statique a. Lock-in point (point de verrouillage) La position de la selle sur le dos du cheval résulte de l’anatomie. Ainsi, les selliers nomment lock-in point, le point le plus bas du dos du cheval. Il est situé en arrière de la huitième vertèbre thoracique (T8). Le garrot verrouille la selle crânialement et les pointes de l’arçon n’empêchent pas le mouvement des scapulas(3).

b. Reposer sur des masses musculaires Nous l’avons vu, la selle ne doit pas toucher les apophyses épineuses pour ne pas gêner le mouvement des vertèbres. De plus, il est nécessaire de répartir le poids sur la plus grande surface possible, c’est pourquoi les panneaux de la selle doivent reposer sur les masses musculaires du dos et épouser leur forme. La longueur, la largeur et l’angle des panneaux, ainsi que la qualité de la matelassure, doivent donc respecter ce principe. 45

c. Place de la sangle La sangle doit tomber exactement au niveau du passage de sangle. Si la sangle tombe en avant, elle aura tendance à tirer la selle vers l’arrière et inversement.

Conséquences en sellerie : Place de la selle sur le dos du cheval en statique : • En arrière du garrot, sans trop avancer sur celui-ci ; • Les panneaux doivent être larges, souples et incurvés comme la musculature du cheval ; • La sangle doit tomber en face du passage de sangle.

2) Etude dynamique Valentin a étudié l’effet de l’ajout d’un poids de 40 kg (selle pesant 10 kg chargée de 30 kg de sac de sable) sur la mobilité du garrot. Au trot, la rotation du garrot est significativement augmentée avec la selle chargée par rapport à la selle « nue ». L’ajout d’un poids modifie les conséquences de la selle sur la locomotion du cheval(62). Il est donc nécessaire d’évaluer la selle sur le cheval en mouvement. Comme nous l’avons vu précédemment, les lésions principales retrouvées sur les colonnes des chevaux sont situées dans les zones où repose la selle. La selle « classique » est une structure rigide qui ne s’incurve pratiquement pas latéralement. Cette structure rigide doit donc s’adapter aux mouvements du cheval puisqu’elle ne se déforme pas. On voit l’intérêt théorique des selles adaptables qui ne devraient pas gêner les mouvements du cheval, puisqu’elles se déforment lorsque le cheval se déplace.

Conséquences en sellerie : Position de la selle en dynamique : • Elle ne doit pas gêner le mouvement de la scapula ; • Elle ne doit pas bouger ni frotter sur le dos ; • La sangle ne doit pas gêner le mouvement du coude, ni comprimer le sternum ; • L’arçon doit être suffisamment ouvert pour ne pas gêner le garrot, mais pas trop pour ne pas toucher la ligne dorsale.

3. Adaptations possibles de la selle 1) Au cheval a. Taille de l’arcade Si l’ouverture de garrot est insuffisante, le risque est de comprimer les côtés du garrot. De plus, la taille de l’arçon - et plus particulièrement la largeur de l’arcade de garrot - joue un rôle significatif dans la façon dont la selle distribue les pressions. Ainsi, la pression mesurée sous les selles trop étroites ou trop larges est significativement plus importante que sous une selle correctement ajustée(40). On comprend l’importance de l’arcade de garrot dans le choix de la selle. 46

A l’heure actuelle, il n’existe pas de grille standardisée permettant de mesurer le garrot du cheval et d’en déduire la taille d’arcade la mieux adaptée. On peut toutefois mesurer le garrot de son cheval à l’aide d’un fil de fer, deux doigts derrière la scapula et se reporter aux grilles proposées par certains selliers qui offrent des arcades de garrot interchangeables. Certains selliers proposent également un outil de mesure, le Flexicurve® (figure 22). L’arcade s’adapte au changement de morphologie du cheval (ou au changement de cheval). Cette technologie provient des selles synthétiques, mais se développe aujourd’hui pour les selles en cuir.

Figure 22 : Mesure de la largeur du garrot à l’aide d’un règle plastique (flexicurve®) (74)

b. Forme de l’arçon ®

Le sellier Thorowgood propose trois arçons différents selon la ligne du dos du cheval. Cependant, la plupart des selliers « classiques » ont une seule ligne d’arcade pour toutes les morphologies. Certains selliers anglais proposent plus de cinquante tailles d’enfourchures différentes (largeur et angle), alors que les selliers français n’ont souvent qu’une seule taille d’enfourchure. Compte tenu de la très grande variabilité des morphologies des chevaux, une seule taille d’enfourchure ne peut pas convenir à tous les animaux. De plus, le choix des selliers aujourd’hui est de rapprocher le cavalier du cheval – c’est le concept du close contact ou contact étroit – qui implique nécessairement une enfourchure étroite, risquant de comprimer les muscles du garrot.

2) Au cavalier Les cavaliers choisissent davantage leur selle en fonction de leur taille que de celle de leur cheval. Il existe des sièges de longueurs standardisées, exprimées en pouces. L’idéal est de laisser la place pour une main en avant et une main en arrière du cavalier dans la selle. Si le siège (et donc l’arçon) est trop grand, le cavalier bouge continuellement dans sa selle, ce qui est inconfortable pour le cheval. En aucun cas la selle ne doit dépasser la dix-septième vertèbre thoracique.

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C.

Les pads ou amortisseurs : améliorateurs de l’adéquation ?

Les selleries proposent une multitude de pads, appelés couramment amortisseurs de dos, dont les cavaliers ne connaissent généralement les effets sur le dos du cheval. Selon l’opinion générale, un amortisseur doit, comme son nom l’indique, « amortir » les pressions subies par le cheval lorsqu’il est monté. Un pad doit certes absorber les chocs, mais son rôle principal d’un pad est de distribuer les pics de pression, tout en rééquilibrant le cavalier.

1) Rôles des pads Un pad doit avant tout améliorer l’interaction entre le cavalier et le cheval, mais c’est la selle qui joue le rôle majeur dans cette interaction (Annette Rancurel, communication personnelle). Un pad devrait consister en une fine couche de matériaux absorbant les chocs, qui protège le dos des points de pressions et s’adapte au dos du cheval (47). Il doit pouvoir disperser les pressions provoquées par le cavalier et la selle, à l’arrêt et en mouvement. Brouard cite l’utilisation de pads compensateurs qui permettraient au cavalier de ne pas changer de selle lorsqu’un cheval perd de l’état, ou en gagne, au cours de la saison. Elle insiste sur la nécessité de vérifier régulièrement si leur emploi est justifié ou non (3).

1. Adéquation selle/dos Le pad doit surtout améliorer la qualité de l’adéquation selle/dos (et en aucun cas l’empirer) en optimisant l’homogénéisation des pressions.

a. Facilité d’entretien Avant tout, le pad doit pouvoir être utilisé quotidiennement par le cavalier, dans les conditions inhérentes à l’équitation. Il doit être résistant à la sueur et pouvoir sécher rapidement après l’utilisation, l’idéal étant qu’il laisse « respirer » le dos du cheval et ne provoque pas par luimême une sudation excessive. Il doit être lavable. Les matériaux ne doivent pas se déformer ou perdre leurs propriétés avec l’usage.

b. Respect des structures anatomiques Tout comme la selle, le pad doit respecter les structures sous-jacentes du dos du cheval. Il est nécessaire que la colonne vertébrale du cheval soit épargnée, et que le pad n’exerce aucune pression sur les apophyses vertébrales. Cela a des conséquences sur son ergonomie et sa mise en forme, que nous détaillerons plus tard.

c. Equilibre du cavalier Les mouvements d’un cavalier expert sont coordonnés avec ceux du cheval, alors qu’un cavalier novice est désynchronisé de son cheval. La relation entre les mouvements du cavalier et 48

son niveau est significative. Le déplacement du centre de gravité est moins important chez un bon cavalier. Le cavalier expert s’assoit « profondément » dans la selle et est capable d’absorber les oscillations verticales du cheval, alors que le novice est tendu et rebondit dans sa selle. De plus, un cavalier expert diminue la variabilité des allures du cheval, en diminuant la vitesse et l’accélération vers l’avant (42). Le pad doit aider le cavalier à s’équilibrer sur son cheval. Il doit également diminuer les rebonds du cavalier dans la selle, et ainsi diminuer la variation des pressions subies par le cheval. Si le cavalier n’est pas à l’aise, son poids n’est pas réparti de façon homogène et le cheval en pâtit. Ainsi, certains pads ne sont pas « confortables » pour le cavalier qui dit, par exemple, avoir une sensation de flottement. De nombreux cavaliers rapportent de telles sensations avec le Haf®. L’utilisation quotidienne d’un tel pad pour un cavalier de dressage ou d’obstacle semble donc compromise à long terme. Cependant, de nombreux cavaliers d’endurance l’utilisent.

d. Confort du cheval Le confort du cheval doit être préservé, ainsi que la mobilité de son dos. Le pad doit permettre d’atténuer les points de pression. La communication entre le cavalier et son cheval passe de manière quasi exclusive par l’emploi des aides du cavalier. Il est naturel de penser que tout point de pression excessif est douloureux, gène le cheval et parasite la communication cheval/cavalier. Il existe donc de grandes variations individuelles. Ainsi dans l’étude de Kotschwar, pour chaque cheval, au moins un pad diminuait significativement la force maximale mais ce n’était pas toujours le même. Aucune différence significative lors de la comparaison inter-individu n’est montrée(31). Un même pad ne semble pas pouvoir être confortable pour tous les chevaux.

e. Absorption des chocs Le pad doit absorber les chocs et diminuer ainsi la pression moyenne exercée par la selle. C’est son rôle premier en médecine humaine où les mêmes matériaux sont utilisés pour les coussins de fauteuil roulant pour la prévention des escarres.

2. Eviter les effets indésirables Harman a publié la première étude s’intéressant aux effets des pads(18) : 65% des pads étudiés ont une mauvaise influence sur l’adéquation selle/dos, en augmentant les pressions mesurées sous la selle. Sous une selle présentant une ouverture de garrot déjà trop étroite, le fait de rajouter une épaisseur diminue encore l’ouverture de garrot, augmente la pression subie et provoque à long terme une amyotrophie des trapèzes. L’auteur fait le parallèle entre rajouter un pad sous une selle trop étroite et porter des chaussettes en laine dans des chaussures de bal. Il faut noter que tout changement dans le harnachement soulage le cheval à court terme, car les points de pression changent de localisation. Il est donc nécessaire d’évaluer un changement (selle et/ou pad) dans la durée si celui-ci n’a pas été entériné par une évaluation qualitative préalable (tapis capteur de pression, thermographie).

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2) Matériaux utilisés De multiples matériaux sont disponibles sur le marché de l’équitation. Nous en avons sélectionné certains parmi les plus utilisés et les plus innovants.

1. Les matériaux utilisés dans le milieu du cheval a. Le coton Le coton est utilisé comme référence, car son effet sur l’adéquation de la selle est négligeable(18). Il protège la selle des salissures et absorbe la sueur. Moins de 10% des chevaux sont montés avec un tapis en coton seul(3).

b. Le mouton Il peut s’agir de mouton synthétique ou naturel. La densité de la laine conditionne les propriétés amortissantes du mouton. La matière doit être dense sinon le pad s’écrase sous la selle. On trouve des pads en mouton de qualité très variable, notamment dans la conception. Il doit absolument être muni d’une gouttière vertébrale large.

c. La peau de renne Ce type de pad n’est pas courant en France. Il a néanmoins fait l’objet de deux études par Kotschwar en 2010(30,31). L’auteur a choisi de s’intéresser à la force maximale mesurée sous l’ensemble de la selle ainsi qu’à la distribution des pressions pour discriminer les meilleures combinaisons selle/pad. Il conclut que la peau de renne diminue significativement la force maximale mesurée, au pas et au trot, avec une selle de dressage dont l’arçon était correctement adapté aux chevaux utilisés. C’est le seul pad avec lequel il obtient des résultats significatifs (les autres étant le gel, le cuir et la mousse). De même, la distribution des pressions, dans les directions longitudinale et transversale, n’est améliorée par rapport à la mesure sans pad, qu’avec le pad en peau de renne, et seulement au trot(30). Le même protocole est répété avec une selle dont l’arçon est trop grand, et donc mal adapté aux chevaux. Quatre selles sont utilisées, qui ne diffèrent que par la largeur de l’arcade (28, 30, 32 et 34 centimètres). Pour chaque cheval, on choisit la selle dont l’arcade est une taille au-dessus de la taille idéale. Les selles dont l’arçon est trop grand exercent des pressions plus importantes le long de la colonne, car la selle se rapproche du dos du cheval(40). La présence d’un pad ne semble généralement pas diminuer les pressions maximales près de la colonne(31). Au trot, la peau de renne diminue significativement la force maximale mesurée chez 61,1% des chevaux. Mais la distribution des pressions dans la direction transversale est plus mauvaise chez 27,8% des chevaux au pas et 22,2% au trot (la variation de pressions entre deux régions adjacentes augmente, ce qui signifie que les pressions sont moins bien distribuées). De même, dans la direction longitudinale, les variations de pression sont augmentées chez 27,8% des chevaux au pas, et 38,9% des chevaux au trot. Le pad en peau de renne diminue la force maximale mesurée mais ne distribue pas correctement les pressions, sous une selle trop large.

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2. Les matériaux humaine

issus

de

la

médecine

Les coussins de fauteuil roulant sont conçus pour réduire et redistribuer les forces mécaniques subies par la peau et donc diminuer le risque de nécrose tissulaire. Un coussin idéal distribue les pressions, diminue les pics de pression aux proéminences osseuses et améliore la posture tout en correspondant aux critères de confort, d’entretien et d’esthétique du patient (46). Les pads utilisés en équitation cherchent à atteindre les mêmes objectifs. Il est donc légitime de s’inspirer de la médecine humaine pour l’étude des pads. D’autres pads sont issus des études réalisées dans le domaine du sport automobile. Cependant, la transposition d’un domaine à l’autre est difficile car les études en humaine sont réalisées en statique. De même, lors d’un crash test, les événements sont tellement brefs et soudains qu’on peut assimiler les tests à du statique. Or, le propre de l’équitation est de se déplacer. Le comportement de ces matériaux en dynamique est peu prévisible.

a. Le gel Le pad en gel est le plus utilisé par les cavaliers (3). i. Médecine humaine

Le gel possède à la fois les propriétés d’un liquide et d’un solide (72). En principe les pads en gel permettent de distribuer la pression de façon équivalente sur toute la surface, car le gel peut se déplacer librement(52). Cependant, il a été émis l’hypothèse que le matériau qui enveloppe le gel peut le contraindre et limiter son efficacité. Les pads en gel sont utilisés en médecine humaine pour réduire la pression subie au niveau du coccyx et du sacrum chez les patients en décubitus dorsal. La différence de pression moyenne, avec et sans pad, varie beaucoup selon les participants (52). On note donc, comme pour la peau de renne une grande variabilité individuelle. Le coussin testé n’avait pas un effet significatif sur la réduction de la pression chez 55 patients sur 61. Il avait un effet améliorateur chez trois patients. Mais, il augmentait la pression de façon significative chez trois autres patients. L’auteur note que le coussin en gel augmentait la pression mesurée en parallèle de l’augmentation de l’Indice de Masse Corporelle (IMC) et donc du poids du patient. Le coussin en gel n’est donc pas recommandé par cet auteur. ii. Médecine vétérinaire

Chez les chevaux, Harman obtient également des résultats très variables, mais toujours médiocres(18). Avec un des pads en gel, les pressions obtenues sont les mêmes que sans pad. Avec les autres pads en gel, la pression sur le garrot est augmentée. Elle note qu’avec les pads d’une marque en particulier, les pressions sont dramatiquement augmentées pendant le test. Les résultats correspondent à ceux de la médecine humaine. De même, Wesley observe qu’avant usage, les pressions moyennes mesurées avec le tapis en gel étaient dans les valeurs moyennes par rapport aux autres tapis. Après usage, le tapis en gel était celui avec lequel les pressions étaient les plus élevées. Les auteurs concluent que ce type de tapis a des performances plus faibles que les autres tapis du même ordre de prix(71).

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D’après Kotschwar, au pas, le pad en gel diminue significativement la force maximale dans 44,4% des cas, alors qu’au trot, la diminution significative a lieu dans 61,1% des cas. Mais la distribution des pressions (dans les directions longitudinale et transversale) est plus mauvaise chez 38,9% des sujets, au trot(31). Conséquences en sellerie : L’usage des pads en gel est donc controversé. L’efficacité de ce type de pad dépend beaucoup de l’individu. La distribution des pressions semblent médiocre dans tous les cas.

b. Les mousses On classe les mousses en open-cell (cellules ouvertes), closed-cell (cellules fermées) ou encore mixtes, selon la structure du matériau qui les compose. Le matériau principal reste l’air(71). i. Open-cell

Les mousses à cellules ouvertes contiennent des espaces remplis d’air, assimilables à des bulles, connectés les uns aux autres et organisés en réseau. L’air est expulsé des cellules lorsque la mousse est soumise à une pression, et regagne les cellules lorsque la pression s’arrête. Le pad en mousse open-cell s’adapte donc à la forme du cheval. Cependant, s’il subit une pression trop importante, il n’est plus capable d’absorber les chocs(71). Harman a testé différents pads en mousse dont deux en mousse à cellules ouvertes(19). Le pad le plus épais améliore l’adéquation de la selle, mais les pressions mesurées augmentent au fur et à mesure du test. Le plus fin améliore légèrement les pressions subies. ii. Closed-cell

Les mousses à cellules fermées sont formées de bulles d’air, contenues dans un matériau solide ou liquide. Cependant, certaines peuvent exploser pendant la conception du tapis. Lorsque l’air est comprimé, il ne peut pas s’échapper. Le pad à cellules fermées distribue les pressions. Il est totalement imperméable. Dans son étude, le pad testé par Harman augmentait les pics de pression(19). iii. Mixtes Le pad testé part Harman permettait une discrète amélioration des pressions subies(19). iv. Mémoire de forme Encore appelées mousse visco-élastique, les mousses à mémoire de forme s’écrasent sous la pression puis retrouvent, lentement, leur forme initiale. Elles sont plus malléables lorsqu’elles sont chauffées.

On ne connaît pas la composition exacte du tapis en mousse utilisé par Kotschwar(30,31). Mais selon lui, le tapis en mousse réduit la force totale sous une selle à l’arçon trop large, au pas, chez 44,4% des chevaux. Le tapis en mousse permet également une réduction significative des différences de pressions entre deux zones, dans la direction transversale au pas. Il n’y a aucune réduction significative des différences de pressions entre deux zones, dans la direction longitudinale. Conséquence en sellerie : La propriété des mousses dépend de leur composition. Il est donc nécessaire d’avoir cette information avant de choisir un pad en mousse. 52

c. L’air Une étude a comparé trois coussins de fauteuil roulant (coussin à air, mousse de polyuréthane et gel) en considérant comme meilleur, celui pour lequel le nombre de capteurs qui mesurent une pression supérieure à 60 mmHg (pression maximale tolérable avant les lésions des tissus mous) est le plus faible(72). L’auteur observe que la valeur médiane du nombre de capteurs indiquant une pression comprise entre 60 et 99 mmHg est significativement plus faible pour le coussin à air que pour les deux autres. De plus, la valeur médiane du nombre de capteurs qui détectent une pression supérieure à 100 mmHg est significativement plus faible pour le coussin à air que pour le coussin en gel. Le coussin à air est donc plus efficace pour réduire la pression mesurée en surface que les coussins en gel et en mousse de polyuréthane. Cependant, l’utilisation d’un pad à air n’est pas envisageable au quotidien. En effet, le cavalier décrit une sensation de flottement, qui est incompatible avec une communication fine et précise du couple cavalier/cheval. Conséquence en sellerie : Les pads à air semblent être les plus performants en médecine humaine. Mais, ils ne procurent pas des sensations suffisamment précises pour pouvoir être utilisés quotidiennement par les cavaliers. Ils pourraient néanmoins servir d’outil thérapeutique, lors de la remise au travail d’un cheval dorsalgique.

3) Conception et ergonomie des pads Les coussins utilisés en médecine humaine sont plus épais que ceux utilisés dans le milieu de l’équitation. Les coussins à air ou en mousse de polyuréthane mesurent de huit à dix centimètres d’épaisseur, le coussin en gel mesure quatre centimètres d’épaisseur(51). Sachant que les propriétés amortissantes varient selon l’épaisseur de matériau considérée, la comparaison entre les deux utilisations est difficile. De plus, il est inenvisageable d’ajouter une épaisseur de dix centimètres sous la selle. Il convient donc d’adapter l’ergonomie des pads aux contraintes de l’équitation.

1. Equitation western Pullin a utilisé un tapis capteur de pression (technologie FSA) afin d’approcher de façon scientifique la conception d’un tapis de selle western(47). Deux chevaux Quarter horse, utilisés pour une équitation de travail, sont étudiés. Leur « ligne de dos » sont décrites : - Le premier a le garrot proéminent et symétrique, et son dos possède une discrète courbure ventrale ; - Le deuxième a le garrot rond et symétrique, et le dos plat. Une selle faite sur mesure est utilisée pour chaque cheval. Les deux selles sont testées sans tapis. On n’observe aucune pression sur le garrot, la gouttière vertébrale est bien dégagée, le contact des panneaux est symétrique et total, et la distribution des pressions est très bonne à excellente. Les pads testés sont des pads « western ». L’adéquation est déterminée par l’observation des pressions mesurées dans six zones : le long de la colonne vertébrale, au niveau du garrot et sur les masses musculaires situées sous la selle (gauche et droite). On contrôle l’uniformité de la

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distribution des pressions (gauche et droite). Chaque zone est notée de 1 (mauvais) à 6 (excellent). Chaque mesure est réalisée en statique et en dynamique. L’auteur conclut que toutes les combinaisons selle/pad sans cavalier montrent un « effet pont ». Le poids du cavalier est donc nécessaire à l’équilibre de la selle, et permet la distribution du poids à toute la zone de contact selle/pad/dos. Un pad trop long provoque une pression excessive sur le garrot. Plus le pad est épais, plus la pression totale subie par le cheval est importante. Ainsi, c’est avec le pad le plus fin que la meilleure adéquation est obtenue. Pullin souligne que le pad doit tout de même avoir une épaisseur suffisante pour protéger le dos du cheval contre les forces dynamiques subies(47).

2. Equitation anglaise Il faut privilégier les pads « 3 en 1 ». L’épaisseur totale du pad est diminuée. De plus, une superposition de couches est forcément plus instable, et bouge sur le cheval, ce qui provoquerait des forces de cisaillement(Annette Rancurel, communication personnelle).

Figure 23 : Deltapad® (Bonati L.) Le Deltapad® (figure 23) est un pad personnalisable "3 en 1" qui cherche à obtenir une efficacité maximum avec une épaisseur minimum, afin d’améliorer la compatibilité de la selle au cheval ainsi que l’équilibre du cavalier, sans gâcher la communication proprioceptive entre le cheval et le cavalier. Il s’agit à la base d’un simple tapis coton, qui possède des poches où l'on peut insérer de la mousse à cellules ouvertes de haute densité (éventuellement combinée à d'autres matériaux dont l'apport est validé par l'utilisation d'un capteur de pression) et d'une épaisseur choisie selon les zones, en fonction de la situation. La découpe et le positionnement des poches garantit l'absence de pression sur la colonne vertébrale, y compris et surtout sur le garrot. Elles sont recouvertes d’un tissu antidérapant, qui permet une meilleure adhérence du pad à la selle et évite ainsi que l’ensemble s’étire sur le garrot pendant le travail.

Conséquences en sellerie : Un pad doit être le plus fin possible, tout en ayant une épaisseur suffisante pour protéger le dos du cheval des pressions excessives. 54

4) Résistance à l’utilisation: Cinq tapis de selle « western » présumés de très bonne qualité (>130$ à l’achat) sont testés(71). La pression a été mesurée à l’aide du tapis FSA, avec les tapis neufs, puis après deux cents heures d’utilisation. La valeur moyenne des pics de pression mesurée après usage était plus faible et ce pour tous les pads testés. Néanmoins, cette différence n’était pas statistiquement significative. Les auteurs suggèrent tout de même qu’un tapis, comme une paire de chaussures, doit avoir été utilisé pour montrer ses performances idéales.

L’adéquation de la selle au dos du cheval dépend donc de nombreux paramètres, que l’on peut résumer par le schéma suivant :

Figure 24 : Schéma bilan Les différents acteurs de l’adéquation selle/dos

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Deuxième partie : Evaluation de l’adéquation de la selle au dos du cheval

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Une selle inadaptée fait subir au cheval des pressions importantes sur une structure complexe et fragile : son dos. Nous allons détailler en quoi la pression représente un danger pour le dos du cheval.

A.

La pression : un danger pour les tissus 1) Les ulcères de pression en médecine humaine

Les ulcères de pression sont un problème grave en médecine humaine. Ils surviennent chez les personnes handicapées et affectent significativement leur qualité de vie. Ils correspondent à la destruction d’une zone de tissu mou, due à des pressions trop fortes sur la peau et les tissus sousjacents(1). Bien que les mécanismes exacts en soient mal connus, on sait que la pression joue un rôle majeur dans le processus d’ulcération. On ne parvient pas à expliquer comment des charges externes affectent les tissus sous-jacents et peuvent aboutir à des dommages tissulaires, mais on pense que la pression affecte la nutrition des tissus en provoquant l’occlusion des vaisseaux sanguins et déforme les cellules. Lorsque la malnutrition persiste, elle provoque une atrophie musculaire ainsi qu’une nécrose qui coïncident avec une inflammation locale(64). La peau est généralement le dernier tissu à présenter des lésions macroscopiques. Donc quand celles-ci apparaissent, le muscle sous-jacent est déjà abîmé (Nola cité par 64).

1. Pression et ischémie Des modèles animaux ont été utilisés pour déterminer le seuil à partir duquel la pression est délétère, soit la valeur de pression minimale qui provoque la fermeture des vaisseaux sanguins. Les études considèrent que la valeur seuil à partir de laquelle l’occlusion se produit est de 30-35 mmHg (soit 4 - 4,66 kPa)(Reswick and Rogers, cités par 1, 61). Cette valeur correspond à la pression moyenne dans les capillaires. Cependant, elle est controversée, car la pression à partir de laquelle les capillaires se ferment varie de façon très importante selon les individus(7). Il a été établi que la pression se transmet depuis la surface jusqu’aux os, par l’intermédiaire des muscles. La pression à l’intérieur des tissus est significativement plus élevée qu’à la surface(16,18,40). On a donc un biais puisque l’on mesure la pression à la surface de la peau, par l’intermédiaire d’un capteur de pression, et non à l’intérieur des tissus. De plus, on sait que pour une même pression subie, le tissu mou en contact avec des proéminences osseuses est plus sensible à la nécrose que celui des zones où le tissu sous-cutané est plus épais et crée donc un support élastique intrinsèque. Il semble alors intuitif de penser qu’un cheval osseux est plus sujet aux blessures dues à la pression qu’un cheval bien musclé, dont les masses musculaires protègent les surfaces osseuses des pressions. Le processus d’ulcération est bien plus complexe et la pression n’est pas le seul facteur qui entre en jeu. C’est pourquoi, il est pratiquement impossible de déterminer une valeur, mesurable à la surface de la peau, pour laquelle on est certain que les tissus sous-jacents sont sains.

En conclusion, une pression excessive provoque une ischémie tissulaire. La valeur maximale de pression tolérable par les tissus reste controversée.

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2. Pression et durée Une relation existe entre la pression et la durée : une pression forte subie pendant une courte durée est aussi délétère qu’une pression plus faible qui s’exerce plus longtemps(Kosiak cité par 61).

2) Les ulcères de pression des équidés de bât D’une façon similaire à ce qui se passe chez l’être humain, les surpressions engendrées par un harnachement mal adapté, ou des charges excessives, perturbent la perfusion des tissus et provoquent ainsi une hypoxie tissulaire et une altération de la sudation(64). Dans des conditions extrêmes d’utilisation des équidés, par exemple des ânes de bât dans les pays africains, on observe des pathologies de ce type (figures 25, 26 et 27). Ces lésions des tissus mous de la région dorsale peuvent être superficielles (plaies, excoriations) voire suppurées et nécrotiques (mal de garrot, myosite purulente). Elles sont provoquées par la pression et/ou le frottement du matériel de bât.

Figure 25 : Ulcère sur la ligne du dos chez un âne de travail au Mali (Lassausaie J.)

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Figure 26 : Mal de garrot (Lassausaie J.)

Figure 27: Myosite purulente (Lassausaie J.)

Le problème est différent pour les chevaux de sport et de loisir qui subissent aussi des pressions importantes sous la selle mais de façon discontinue, puisque la distribution des pressions change continuellement(6). C’est pourquoi les ulcères de pressions apparaissent chez des animaux de bât, qui portent des charges pendant des longues périodes, et qui subissent donc des pressions très importantes de façon continue.

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3) Les lésions provoquées par la pression chez les chevaux de sport et de loisir 1. Pression et lésions macroscopiques a. Décoloration du poil Il est fréquent de voir dans les écuries des chevaux avec des poils blancs au niveau du garrot ou à la jonction thoracolombaire. La décoloration des poils est le signe d’une lésion permanente du follicule pileux dont la cause est la pression excessive exercée par la selle(6,19). De même, une couverture portée par le cheval pendant l’hiver peut provoquer des lésions tissulaires se manifestant par une décoloration des poils(7). Le cheval subit dans ce cas de faibles pressions pendant une durée très longue.

b. Perturbation de la sudation Il est fréquent d’observer des zones « sèches » sous la selle des chevaux (figure 29). Ces zones correspondent à des zones où la surpression subie empêche le fonctionnement des glandes sudoripares.

Figure 28 : Relation entre pression et sudation

En effet, ces glandes sont profondément insérées dans un réseau de capillaires sanguins. Ce réseau est dense et très flexible chez le cheval, par rapport aux autres espèces domestiques(38). Une vasoconstriction inhibe la production de sueur par les glandes sudoripares de la zone affectée. Ces vaisseaux se ferment sous l’effet de la pression selon le mécanisme précédemment évoqué.

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Figure 29 : Zone sèche sous la selle après l’exercice (64)

Dans une étude rétrospective, publiée en 2010, Von Peinen a comparé les pressions mesurées sous les selles de trois groupes de chevaux(64) : - 16 chevaux qui présentaient une perturbation de la sudation : une zone sèche au niveau du garrot après l’exercice (groupe A). - 7 chevaux qui présentaient des signes évidents de blessure du garrot due à une selle inadaptée. Les signes d’inclusion étaient : une zone chaude, gonflée, douloureuse à la palpation associée à des traumatismes plus ou moins importants du tissu cutané (groupe B). Tous ces chevaux présentaient également une douleur vive à la palpation de cette zone. - 16 chevaux sains, avec une selle adéquate (groupe C) L’auteur a montré que la pression moyenne variait significativement, entre chaque groupe, pour chacune des trois allures. Les chevaux sains (groupe C) subissaient des pressions significativement plus faibles que les deux autres groupes.

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Par ailleurs, une étude datant de 2005 a permis d’établir des valeurs de pressions considérées comme tolérables par les chevaux(41). Les auteurs ont divisé la selle en tiers, et ont déterminé des valeurs maximales de pression au-delà desquelles le cheval était dorsalgique. Ces valeurs sont appelées « valeurs seuil » dans les tableaux suivants.

Valeurs seuil (Nyikos) Pas Trot Galop

13,2

Groupe A (Von Peinen) 15,3 18,1 21,4

Groupe B (Von Peinen) 24 29,7 28,6

Groupe C (Von Peinen) 7,8 9,8 10,9

Tableau 4 : Pressions moyennes subies en kPa (d’après 41) Valeur seuil (Nykios) Pas Trot Galop

31,5

Groupe A (Von Peinen) 30,6 43,4 48,9

Groupe B (Von Peinen) 38,9 53,3 56

Groupe C (Von Peinen) 13,4 21 24,6

Tableau 5 : Pressions maximales mesurées en kPa (d’après 41) Lorsque l’on compare les valeurs rapportées par Von Peinen à celles de Nyikos, on observe que le seul groupe pour lequel les pressions subies étaient inférieures aux pressions-seuil tolérables selon Nyikos est le groupe C (chevaux sains). Les zones de non-sudation permettraient de détecter une mauvaise adéquation de la selle au dos du cheval. Les propriétaires n’accordent pas d’importance à ce signe clinique dont ils ne soupçonnent pas les circonstances d’apparition. Si, dans l’anamnèse, une telle anomalie est rapportée, il faut envisager le rôle de la selle dans l’apparition d’une éventuelle dorsalgie. La pression moyenne est ici une valeur intéressante à étudier car la zone considérée est de petite taille et très localisée (garrot ou tiers crânial de la selle), contrairement aux mesures effectuées sous l’ensemble de la selle où les pressions aux extrémités, plus faibles, diminuent de façon importante la pression moyenne.

c. Œdème traumatique Chez certains chevaux, on peut observer rapidement une tuméfaction indolore juste après les avoir dessellés. Il s’agir d’un œdème traumatique au niveau d’une zone de pression localisée(6,13). C’est la pression prolongée de la selle sur les tissus qui provoque un trouble de la circulation lymphatique. Les métabolites s’accumulent, provoquant une acidose, qui a pour conséquence la parésie des muscles vasoconstricteurs. Au final, les capillaires deviennent poreux et laissent passer un transsudat non inflammatoire(13).

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2. Pression et douleur La relation entre lésion tissulaire, douleur et performance n’est pas connue. On sait que la pression provoque une ischémie tissulaire. Marie Brouard rapporte dans sa thèse que l’ischémie musculaire est source de douleur. Elle abaisse le seuil d’exitabilité des nocicepteurs vis-à-vis des subtances algogènes, tel que l’acide lactique, qui s’accumule par ailleurs dans un muscle mal irrigué(3). On peut noter que c’est une injection d’acide lactique qui est utilisée pour provoquer une dorsalgie unilatérale dans le protocole de Wennerstrand(69).

Werner est la première à noter une corrélation entre des pressions maximales > 35 kPa (3,5 N/cm2) et des pressions moyennes > 15kPa (1,5 N/cm2) d’une part, et l’apparition de dorsalgie d’autre part (manifestation de douleur à la palpation des processus épineux et amyotrophie des muscles porteurs de la selle)(70). Ces valeurs s’entendent au trot assis, pour l’ensemble de la surface du tapis. Or les pressions aux bords du tapis sont bien plus faibles, ce qui diminue la valeur moyenne. D’autre part, l’auteur ne précise pas l’importance des points de pressions localisés.

3. Pression et performance Des études consacrées à la relation entre les pressions dans les capillaires sanguins cutanés et la performance des chevaux manquent toujours. Cependant, si l’on admet que la pression provoque une douleur, alors il semble évident qu’une surpression exercée par la selle provoque une baisse de performance du cheval.

4. Tolérance à la pression a. Comparaison intraspécifique Chez nos chevaux de sport et loisir, la pression semble bien mieux tolérée que chez l’être humain. La valeur seuil de tolérance à la pression est en effet bien plus importante. D’après l’étude de Von Peinen, le groupe de contrôle des chevaux sains présente une pression moyenne de 7,8 kPa (52,6 mmHg ou 0,78 N/cm2) soit presque deux fois la valeur considérée comme critique chez l’homme (4 à 4,67 kPa)(64). Les pressions exercées par la selle ne sont pas continues mais intermittentes, elles dépendent à la fois des mouvements de cheval et de ceux du cavalier. Les capillaires cutanés seraient donc comprimés de manière irrégulière et le flux sanguin ne serait altéré que de manière intermittente(47). Cela pourrait expliquer en partie les variations de tolérance entre l’homme et le cheval. Cependant, il existe des différences significatives dans le réseau capillaire qui rendent difficile la transposition des constatations effectuées d’une espèce à l’autre(47).

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b. Comparaison inter-raciale Il ne semble pas y avoir de différence significative de tolérance à la pression entre différentes races, bien que l’épaisseur de la peau varie significativement entre les races(64).

Une même valeur seuil peut donc être utilisée chez toutes les races de chevaux. Cette valeur est sensiblement supérieure pour le cheval par rapport à l’homme.

B. Détecter les signes d’une éventuelle inadéquation 1. Chez le cheval Chez la plupart des chevaux, les signes d’une inadéquation de la selle sont frustes et les lésions physiques ne sont pas évidentes. Pour Harman, la performance est affectée bien avant que les premiers signes cliniques n’apparaissent(19). C’est pourquoi il est essentiel d’observer le cheval en main, puis monté, et de chercher à détecter les signes de dorsalgie. Les dorsalgies sont un problème fréquent en clientèle, mais leur diagnostic et leur traitement restent un défi pour le praticien. Les motifs de consultation sont multiples et peu spécifiques. Les propriétaires décrivent des résistances du cheval, des changements de comportement, voire une discrète boiterie. Il est nécessaire de s’interroger sur le rôle possible de la selle dans ces dorsalgies et de rechercher les signes d’une éventuelle inadéquation selle/dos.

1) Signes comportementaux Les comportements énumérés ci-dessous sont plus ou moins gênants pour le cavalier. Ils constituent le « syndrome rétivité » du cheval, que l’AVEF (Association des Vétérinaires Equins Français) définit par : « l’ensemble des comportements et des conduites rendant un cheval impropre à l’utilisation envisagée parce qu’il présente, dans une situation donnée, une réponse comportementale inadaptée ».

a. A pied i. Au pansage et au seller

Il est légitime de penser que le cheval, qui associe la sensation douloureuse à la selle, redoute le moment où il va être sellé. On parle d’anxiété, qui se définit comme l’anticipation d’une menace potentielle. Cette anxiété se traduit par des manifestations somatiques (non visibles pour le propriétaire) ainsi que par des manifestations comportementales. Le cheval couche les oreilles au moment du pansage du dos, du seller ou encore de la pose d’une couverture. Le cheval peut être réticent à donner les postérieurs, y compris avec le maréchal-ferrant(19). Dans les cas extrêmes, il peut chercher à mordre le cavalier.

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De plus, l’anxiété provoque un état d’hypervigilance et de l’hyperalgie(67), c’est-à-dire une sensation douloureuse d’intensité anormalement élevée à la suite d’une stimulation douloureuse. Il s’agirait d’un mécanisme protecteur, dissuadant l’animal d’effectuer des actions qui pourraient aggraver des lésions préexistantes(67). Ainsi, la douleur due à la mauvaise adéquation de la selle pourrait être exacerbée par l’anticipation de la douleur par le cheval. ii. En liberté

D’autres signes sont évocateurs d’une dorsalgie et peuvent être observés au box ou au pré. Le cheval se couche ou se roule moins fréquemment(19). Il a des difficultés à se mettre en position pour uriner, ou encore il porte la queue toujours du même côté lorsqu’il urine.

b. Sous la selle Un cheval dorsalgique est tout d’abord un cheval contre performant. C’est souvent cette baisse de performance qui amène le cavalier à consulter. Ce dernier peut décrire différentes situations qui doivent amener le vétérinaire à s’interroger sur l’éventualité d’une inadéquation selle/dos. i. Cheval au « dos froid »

Le cavalier peut décrire un cheval au « dos froid », qui a besoin de temps avant de « fonctionner » correctement (19). Un tel cheval peut bouger, voire même être agressif au montoir. Il est tendu dans les premières minutes de la séance, ses allures sont étriquées, il peut même ruer. Il convient de rappeler l’importance de l’échauffement pour tout sportif, et donc aussi pour le cheval qui sort de son box et auquel on demande trop vite de travailler efficacement et ce, trop souvent en utilisant la force. ii. Refus de la mise en main et défaut d’engagement

Les cavaliers parlent de « mettre le cheval sur la main » ou encore de le « placer ». Celui-ci répond aux aides de son cavalier en engageant les postérieurs sous sa masse, ce qui provoque une « montée du garrot ». Il fléchit son dos. Cette flexion a pour conséquence un port de tête avec une nuque fléchie et un chanfrein à la verticale. Chez un cheval dorsalgique, les allures semblent raccourcies et de faible amplitude. Cette observation a également été faite par Harman avec une selle trop étroite, et a été confirmée par Fruehwirth(16,19). Si la selle induit des pressions localisées, la phase antérieure de la foulée du cheval est raccourcie et l’amplitude de la foulée diminue(16). De même, on peut observer une diminution de flexion des jarrets et des grassets. Le cheval semble laisser traîner les pieds postérieurs en pince. On peut également noter une douleur à la palpation des glandes parotides (65) car le cheval refuse la mise en main. Le cavalier peut alors mentionner pendant le recueil de l’anamnèse que le cheval a la « bouche dure ». Devant un cheval présentant un défaut d’engagement et une difficulté de mise en main, il convient de s’interroger sur le rôle du cavalier. En effet, certains cavaliers obtiennent un placé par la force : le cheval place sa tête, mais ne fléchit pas son dos. Pour distinguer un défaut d’équitation d’une réelle dorsalgie, il suffit de demander au cavalier de monter le cheval rênes longues. Si cela résout le problème, le cavalier peut être effectivement mis en cause, sinon, la selle est peut-être inadaptée. De plus, un cavalier impatient, qui cherche à obtenir la mise en main par la force, ne fera qu’aggraver une dorsalgie préexistante(65).

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Chez certains chevaux qui présentent des dorsalgies en lien avec la selle, celles-ci se manifestent par un défaut d’engagement(19,41). iii. Difficultés d’incurvation

Les cavaliers de dressage peuvent mentionner des difficultés d’incurvation sur des figures basiques, comme les voltes. Le cheval « tourne comme un bateau ». Il peut chasser la croupe vers un côté. Le cheval dévie vers la droite si le cavalier est droitier, vers la gauche s’il est gaucher. La queue est toujours portée du même côté(65). iv. Difficultés dans les transitions

Les transitions - particulièrement les transitions « descendantes » d’une allure vers une allure moins rapide - exigent du cheval une flexion du dos plus marquée. C’est pourquoi les chevaux dorsalgiques ont tendance à « s’ouvrir dans les transitions » : le cavalier perd la mise en main, le cheval refuse de fléchir son dos. La force d’inertie qui s’exerce dans les transitions descendantes inflige une augmentation de la pression sur les épaules(Annette Rancurel, communication personnelle) . Sans être véritablement dorsalgiques, c’est-à-dire sans présenter de lésions musculaires ou osseuses objectivables, un cheval avec une selle non adaptée peut appréhender ces transitions et creuser le dos. Un cheval qui travaille dans le « bon sens » cherche à étendre son encolure vers le bas lorsque le cavalier relâche les rênes. Au contraire, un cheval dorsalgique se met en extension et relève la tête lors de la transition d’une allure de travail donnée à une allure plus relâchée. Ainsi, chez certains chevaux qui présentent des dorsalgies en lien avec la selle, celles-ci se manifestent par des difficultés dans les transitions entre les allures(41). Des irrégularités au sein d’une même allure sont également un signe d’appel de dorsalgie. v. Difficultés à l’obstacle

Le cavalier peut parler d’un cheval qui « saute à plat » et ne bascule pas lors du planer. Un cheval qui refuse l’obstacle, ou qui se précipite, peut être un cheval dorsalgique(19). Le passage des combinaisons et des obstacles larges lui est difficile(22). vi. Manifestations d’agressivité

Dans les cas extrêmes, le cheval peut se cabrer ou ruer lorsqu’on lui demande un exercice trop difficile ou trop douloureux.

Des comportements tels que ceux cités ci-dessus doivent être un signe d’appel fort de dorsalgie, surtout s’ils sont d’apparition récente et concomitante avec un changement de selle.

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2) Signes physiques a. Signes cutanés Les signes cutanés qui permettent de repérer une inadéquation de la selle ont été développés dans le premier paragraphe, puisqu’ils sont la conséquence des surpressions exercées par la selle. Pour mémoire, il s’agit de la présence de : • poils cassés, provoquée par des frottements répétés. • poils blancs, le plus souvent au niveau du garrot ou à la jonction thoraco-lombaire. • zones de non-sudation sous la selle, juste après avoir desselé le cheval. • zones de gonflement, ou oedème traumatique. Ces signes, très fréquents, n’alertent malheureusement pas suffisamment les cavaliers.

Figure 30 : Zones d’apparition des signes cutanés consécutifs à une selle inadaptée (74) (Ravenel S., Equimetric®) b. Signes musculaires La palpation du dos est une étape essentielle de la démarche diagnostique face à une suspicion de dorsalgie et donc d’inadéquation selle/dos. Elle nécessite que le cheval soit calme et détendu. Il convient de commencer par une palpation superficielle, suivie d’une palpation profonde des tissus mous (masses musculaires) et des structures ligamentaires et osseuses. La palpation superficielle est réalisée avec la main à plat, sans exercer de pression, de chaque côté de la colonne. On recherche d’éventuelles cicatrices, les zones de chaleur ou encore les zones où le muscle apparaît plus fibreux. Lors de la palpation plus profonde, à l’aide du bout des doigts, on recherche une hypertonicité, des fasciculations musculaires (d’une durée supérieure à deux secondes ou 67

éloignées de la zone stimulée). Les réactions de défense et d’échappement sont anormales, en considérant bien sûr le caractère du cheval. Pour être interprétable, la réaction doit être reproductible. i. Trigger points ou points de déclenchement

Les trigger points semblent correspondre à des points de tension au niveau desquels on détecte une sensibilité douloureuse très localisée. Ils sont mis en évidence par une contraction musculaire réflexe lors de la palpation profonde du dos. A ce jour, chez le cheval, un seul trigger point a été décrit dans un article scientifique(39). Les auteurs ont étudié ses caractéristiques éléctrophysiologiques, en comparant l’activité éléctromyographique (EMG) au niveau du trigger points et au niveau du muscle normal. Cependant, ce point est très fréquemment décrit en acupuncture. Il est situé dans l’encolure, au niveau du muscle brachiocéphalique(65). Pour ces auteurs, il peut être dû à l’emploi de rênes allemandes, à un cavalier à la main dure ou encore à une selle inadaptée. Les quatre chevaux sélectionnés présentaient une dorsalgie chronique avec une baisse de performance. On notait une contraction locale, associée à une activité électrique spontanée, au niveau des trigger points préalablement mis en évidence par la palpation profonde. La fréquence d’apparition de ces signes était significativement plus importante au niveau des trigger points qu’au niveau des sites de contrôle. Il est donc possible d’identifier des trigger points chez le cheval. ii. Importance des trigger points

Les trigger points participeraient à l’amplification et à l’entretien du syndrome de douleur dorsale myofasciale (myofascial pain syndrome) du fascia thoraco-lombaire. La projection d’une douleur au niveau de ce fascia déclencherait la contraction simultanée du muscle sous-jacent(3). La douleur peut être d’origine superficielle (cutanée) ou profonde (articulaire ou viscérale). Cette contraction peut induire un mouvement mal exécuté ou inadapté et provoquer des phénomènes de traction ou de torsion musculaire ou ligamentaire. L’hypertonie musculaire induite est elle-même source de douleur. On a alors un phénomène auto-entretenu : la douleur augmente la contraction du muscle concerné et stimule d’autres trigger points. iii. Mécanismes d’apparition des trigger points

L’histo-pathogénie des trigger points n’est confirmée par aucune étude à ce jour. Chez l’homme, un traumatisme aigu ou l’association de microtraumatismes répétés sont supposés pouvoir provoquer l’apparition d’un trigger point. Le manque d’exercice, le maintien d’une position inadéquate, les troubles du sommeil, les douleurs articulaires sont également mis en cause. En réalité, toute activité qui induit un stress répété sur un muscle ou un groupe de muscles provoque un stress chronique pour les fibres musculaires, ce qui conduit à l’apparition de trigger points. On peut tout à fait imaginer que les mêmes mécanismes s’appliquent chez le cheval. Ainsi, une affection ostéo-articulaire profonde ou des micro-traumatismes répétés provoqués par la selle sont des causes possibles d’apparition de trigger points. Le stress engendré par le froid hivernal a également été évoqué(3).

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Plus que la pression en elle-même, on peut supposer que tous les frottements et les pincements provoqués par une selle inadaptée, utilisée régulièrement, peuvent provoquer l’apparition de « trigger points ». iv. Atrophie musculaire

Toute amyotrophie doit alerter le vétérinaire. C’est souvent le muscle trapèze qui est touché, souvent à cause d’une selle trop étroite ou d’un de tapis de selle trop épais, qui compriment le garrot). Le muscle longissimus dorsi est également souvent concerné(19).

c. Signes locomoteurs Certaines boiteries postérieures peuvent être imputables à une dorsalgie(22). Ainsi, Turner rapporte que sur 5352 chevaux présentés pour boiterie, 102 (2,2 %) présentaient des problèmes de dos. Ces problèmes étaient très variables, mais un des cas était dû à une inadéquation de la selle(59). Les autres cas étaient les suivants : 10 conflits de processus épineux, 10 desmopathies du ligament supraépineux, 8 (59) douleurs musculaires, 6 blessures du garrot, 66 lésions sacro-iliaques, et 1 myopathie . Bien que l’auteur ne le précise pas, certaines de ces pathologies peuvent être aggravées par une selle inadaptée. Selon Harman, la pression peut être responsable d’une lésion du ligament supraépineux. De même, pour les conflits des processus épineux ou encore les lésions du garrot(19) !

Une selle inadaptée peut donc provoquer une boiterie. Il est nécessaire d’examiner la selle lorsque l’examen locomoteur complet ne permet pas de localiser la source de la boiterie.

2. Sur la selle 1) Examen de la selle au sol La discipline pratiquée et le niveau atteint reflètent les exigences et les besoins du couple en matière de sellerie. Il convient également de savoir si la selle a été faite sur mesure, si elle a été achetée après un essai sur le cheval, ou sans essai préalable – ce qui reste très fréquent en France.

a. Examen de l’arçon Nous l’avons vu dans la première partie, l’arçon est la pièce maîtresse de la selle. Bien souvent, le type d’arçon n’est pas connu par le propriétaire mais le nom commercial de la selle permet de retrouver cette information. Il convient de vérifier l’intégrité de l’arçon. En effet, le cavalier n’en détecte pas toujours la cassure. Un arçon cassé est toujours dangereux pour le cavalier et douloureux pour le cheval. L’arcade de garrot peut se briser lors d’une chute sur le dos. Les lames de l’arçon peuvent se briser lors d’un effort en torsion. Différents tests permettent de vérifier l’intégrité de l’arçon : i. Test de compression longitudinale

Il faut saisir le pommeau à deux mains, avec le troussequin posé sur le ventre, et tirer vers soi. L’arçon est comprimé longitudinalement. En cas de cassure, on peut entendre un craquement. Les arçons en plastique sont beaucoup plus faciles à comprimer que les arçons en bois(3). 69

ii. Test de torsion

Il faut positionner la main droite sur le pommeau, la main gauche à l’endroit où se rejoignent le quartier et la matelassure, puis exercer une traction vers la gauche. Répéter le test en inversant les deux mains. Ce test permet de détecter la fêlure d’une seule des deux barres. iii. Test de l’arcade

Le test de l’arcade consiste à retourner la selle, toujours en maintenant le troussequin sur l’abdomen. Tenir à travers le quartier une pointe d’arçon dans chaque main, pousser les pointes d’arçon l’une vers l’autre (test de rapprochement de l’arcade) puis les écarter (test d’écartement de l’arcade). L’un des tests peut être positif sans que l’autre le soit, un seul test positif suffit à conclure que l’arçon est cassé. Sans être brisé, l’arçon peut être tordu ou vrillé. Lorsque l’on pose la selle sur le sol, la ligne perpendiculaire au sol, qui passe par le milieu de la gouttière vertébrale, doit passer par le milieu de l’arcade de garrot. Si ce n’est pas le cas, l’arçon est défectueux.

b. Examen général des autres éléments L’examen de la selle sur un tréteau permet de juger de son état général et de son entretien. On examine ainsi les coutures, les couteaux d’étrivières, les contre-sanglons et les étrivières ainsi que l’intégrité et la qualité du cuir. La palpation du siège et des matelassures ne doit mettre en évidence aucun élément saillant, susceptible d’être vulnérant pour l’animal ou le cavalier.

c. Largeur de la gouttière vertébrale Nous avons vu l’importance de ce critère dans la première partie, il faut passer au minimum quatre doigts (environ 7cm) dans la gouttière vertébrale, du pommeau jusqu’au troussequin.

d. Qualité des panneaux De même, il est utile de rappeler l’importance de l’angle, de la surface portante et de la symétrie des panneaux, comme développé précédemment. Il faut demander au cavalier si les matelassures ont déjà été refloquées, surtout pour les selles âgées, bien que cette pratique soit très peu courante en France, contrairement à ce qui se fait au Royaume-Uni.

2) Examen de la selle sur le cheval a. Position de la selle Le cavalier doit seller le cheval comme il le fait habituellement. De nombreux cavaliers ont tendance à poser la selle trop en avant (19), c’est-à-dire en avant du lock-in point ce qui gêne le cheval. Certains rajoutent même un collier de chasse qui empêche la selle de trouver sa position idéale sur le dos en reculant.

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b. Critères visuels d’examen de la selle On examine d’abord la selle nue, puis la combinaison selle/tapis/pad utilisée habituellement par le cavalier. •

La charnière thoraco-lombaire doit être libre, la selle ne doit pas dépasser T17. Les selles Western sont souvent longues et ne conviennent pas aux chevaux au dos court, comme les pur-sang arabes(19,65).



On doit pouvoir passer trois doigts entre le garrot du cheval et l’arcade de la selle, et deux doigts lorsque le cavalier est à cheval(3).



La scapula doit pouvoir bouger librement, il faut pouvoir poser deux doigts entre la pointe de l’arçon (visible dans une petite poche des panneaux) et la scapula. Cette distance est très insuffisante lorsque la selle est posée en avant du lock-in point (3).



L’angle de l’arçon doit suivre celui du dos du cheval.

Si l’arçon est trop large, la surface de portance des panneaux est réduite et concentrée près de la colonne. L’arcade se rapproche du garrot. Le niveau du siège plonge vers l’avant. Si l’arçon est trop étroit (ou si le tapis utilisé par le cavalier est trop épais), le contact est concentré aux extrémités latérales des pointes de l’arçon. Le niveau du siège plonge alors vers l’arrière. •

La selle doit poser symétriquement sur le dos lorsqu’on observe le cheval en se plaçant derrière la croupe.



La gouttière vertébrale doit être bien large de façon à libérer les apophyses vertébrales. On doit pouvoir voir le jour en regardant à travers l’arçon au niveau du garrot.



La sangle pendue doit tomber en face du passage de sangle, c’est-à-dire à un travers de main derrière le coude.



On peut évaluer manuellement la pression sous les panneaux en passant la main sous la selle sur toute la longueur des matelassures. Ce geste permet également de vérifier que l’arrière de la selle pose bien à plat sur la musculature et que les panneaux ne sont pas trop aigus

c. Examen du tapis après exercice Un examen dynamique doit systématiquement suivre l’examen statique de la selle. Même lorsque l’on ne dispose d’aucun outil d’étude objective de l’adéquation de la selle (comme la thermographie ou le tapis capteur de pression, qui seront développés ultérieurement), il est toujours nécessaire d’observer le cheval monté. On s’intéresse à la position du cavalier, aux déplacements de la selle sur le dos du cheval et aux réactions de ce dernier lors du travail(3). Après l’exercice, on observe le cheval à la recherche des signes d’une inadéquation énumérés précédemment, ainsi que le tapis de selle. Les zones salies du tapis correspondent à la zone où les panneaux appuient sur le dos. Toute zone propre du tapis, qui ne porte pas de trace de transpiration, correspond à un défaut de la selle ou à

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une zone de surpression. L’utilisation d’un tapis blanc permet donc d’avoir une première évaluation de l’adéquation de la selle au dos du cheval. Brouard propose dans sa thèse une feuille d’examen de la selle (3). Nous nous en sommes inspirés pour la feuille présentée en annexe 3. Elle permet au vétérinaire d’être exhaustif dans son examen.

C. La technologie permet une évaluation objective de l’adéquation selle/dos 1. Prise de la topographie du dos L’Equiscan® est un outil en forme de squelette articulé qui permet d’obtenir une mesure exacte de la topographie du dos (figure 30). Il permettrait ainsi d’élaborer une selle parfaitement sur mesure pour le cheval, ou encore de contrôler qu’une selle donnée suit bien la morphologie du dos du cheval.

Figure 31 : Equiscan® (Schonering M.)

2. Tapis « à impression » ®

Le Port Lewis Impression Pad est un outil simple et peu onéreux, qui consiste en une poche en vinyle flexible contenant un gel de couleur rouge (figure 31). Le pad se place sous la selle, sans autre tapis, et le cheval est monté aux trois allures pendant trente minutes. Aux endroits de fortes pressions, le gel est chassé. Le pad garde l’empreinte de la selle en trois dimensions.

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Figure 32 : Port Lewis impression pad (Rancurel A.) Cet outil permet une première évaluation, assez imprécise, de l’adéquation de la selle au dos du cheval. Le tapis est réutilisable, il suffit de réuniformiser le gel à l’intérieur de la poche. Cependant le pad reste assez fragile et peut éclater aux coutures(communication personnelle). Cet outil permet de mesurer les effets d’une selle, mais en aucun cas l’impact d’un pad correcteur.

3. Thermographie 1) Principe Le corps produit de la chaleur et cette chaleur est ensuite dissipée à travers la peau (par radiation, convection, conduction ou évaporation). La température de la peau (5°C) est nettement plus basse que celle du corps (37°C). Cette température varie avec l’activité, ainsi la température de la peau qui recouvre les masses musculaires augmente avec l’activité musculaire. La chaleur du tissu cutané provient de la circulation sanguine et du métabolisme tissulaire. Comme le tissu cutané ne participe pas à l’activité physique, son métabolisme tissulaire peut être considéré comme constant. On admet alors que toute variation de température du tissu cutané est consécutive à des changements de la perfusion sanguine par les vaisseaux cutanés(60). La thermographie repose sur un principe de base : c’est le flux sanguin qui détermine le motif thermique. Les caméras thermiques sont dix fois plus sensibles que la main pour détecter les variations de température.

2) Motif thermique du dos du cheval a. Localisation d’une lésion

On connaît le motif thermique cliniquement normal du dos du cheval : l’image doit être symétrique, sans augmentation excessive de la température le long de la colonne(29). Toute lésion d’un tissu provoque une altération de la circulation sanguine. Ainsi, une variation d’1°C entre deux régions anatomiquement symétriques signe une zone lésionnelle, sachant qu’une diminution de température est aussi significative qu’une augmentation. Certains 73

auteurs abaissent ce seuil à 0,3 °C. On peut ainsi localiser la zone d’interêt afin de poursuivre les investigations cliniques (examen de la selle, examens d’imagerie…)(60). Il a été montré chez l’homme que l’importance de la variation de température mesurée lors d’arthralgie, avant et après traitement, est étroitement corrélée au gonflement de l’articulation et à l’inconfort ressenti. La thermographie permet donc une évaluation objective de la réponse au traitement, ce qui permet de valider son utilisation en orthopédie équine(29). L’image thermique obtenue permet de localisation la lésion, mais elle ne permet en aucun cas de la caractériser. Certaines images sont malgré tout caractéristiques d’une pathologie donnée. b. Situations pathologiques

Une inflammation se caractérise par une libération de chaleur, due à une augmentation du flux sanguin. On voit à la thermographie, un hot spot ou point chaud en regard de l’inflammation. Au contraire, lors d’un gonflement ou d’une thrombose, on observe un point froid, car la circulation sanguine est réduite à cet endroit. Les zones glabres (cicatrices, blessures par la selle) apparaissent plus chaudes à la thermographie, car les poils forment une couche isolante(29). L’examen thermographique du dos permet de détecter six situations pathologiques : conflit de processus épineux, desmopathie du ligament supra-épineux, douleurs musculaires, lésions du garrot, lésions sacro-iliaques et inadéquation de la selle au dos du cheval(60) .

c. Evaluation de la selle Turner propose un protocole d’examen thermographique de la selle(57): Le dos du cheval est examiné à l’aide de la caméra thermique. On repère les zones d’asymétrie et de chaleur. Le cheval est ensuite sellé, avec un simple tapis en coton et la sangle est ajustée normalement. Il est longé aux trois allures, pendant au moins 20 minutes, autant de temps à chaque main. On desselle le cheval et on procède à l’examen thermographique de la selle (figure 31). Le critère le plus important est la symétrie thermique entre les panneaux.

Figure 33 : Exemples d’image thermographique de selles à gauche selle qui fait « effet pont », à droite selle qui comprime le garrot (79)

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On replace la selle sur le dos, et on réexamine le dos à l’aide de la caméra thermique. Le plus souvent, la selle génère de la chaleur et la ligne du milieu apparaît plus froide que les autres structures dorsales. On recherche des zones chaudes ou froides dans les masses musculaires, qui signeraient un défaut d’adéquation. Enfin, l’examen est réitéré avec un cavalier, ce qui permet d’objectiver l’effet du cavalier sur le dos.

5. Tapis capteur de pression 1) Principe Le tapis capteur de pression est un outil de mesure des pressions à l’interface entre la peau du cheval et la selle. Il est constitué d’un ensemble de capteurs, protégés par une enveloppe en plastique. Cet outil a tout d’abord été utilisé en médecine humaine, pour mesurer la pression au niveau des tubérosités osseuses des patients handicapés, sujets aux ulcères de pression. Son utilisation s’est ensuite élargie au milieu de la podologie, de l’automobile et du sport de haut niveau pour enfin trouver une application dans le monde de l’équitation. Le tapis convertit les valeurs mesurées par les différents capteurs de pression en une image virtuelle des pressions, où une couleur donnée correspond à une valeur de pression donnée. Le résultat est donc très visuel et une première interprétation succinte des résultats est possible sur le terrain. Ces outils sont d’une extrême fragilité, et ne sont utilisables que dans certaines conditions de température et d’humidité (46). De plus, les mouvements du cheval et de la selle lui imposent des contraintes qui risquent de léser certains capteurs.

2) Un outil validé par l’expérience La première utilisation d’un tapis capteur de pression en équitation est rapportée par Harman en 1994. Depuis, certains auteurs ont tenté de valider ces tapis par l’expérience. a. Tapis Force-Sensing Array (FSA)

Une première étude avait utilisé un tapis FSA avant sa validation(47). Jeffcott a utilisé un tapis de type FSA dans une étude préliminaire de 1999. Cette étude avait pour but de vérifier la précision et la répétabilité des mesures effectuées avec cette technologie (25). Le tapis FSA est constitué de 256 capteurs, pouvant mesurer des pressions variant de 0 à 300 mmHg, avec une précision de 10 mmHg. Ainsi, l’auteur a mesuré la pression sous une même selle, posée sur un cheval de bois, avec différents cavaliers. Il a conclu à un coefficient de corrélation de 0,98 entre la pression totale et le poids du cavalier. Il existe donc une relation linéaire entre la force totale exercée par le cavalier – c’est-à-dire son poids – et la pression mesurée sous la selle par le tapis capteur de pression FSA. Les mêmes résultats (coefficient de corrélation de 0,98) sont obtenus avec un cheval vivant à l’arrêt. De plus, les images obtenues montrent une symétrie gauche/droite et une zone de moindre pression au centre, correspondant à la gouttière vertébrale de la selle. Les pressions mesurées sous la gouttière vertébrale varient entre 0 et 50 mmHg, ce qui indique que le tapis capteur de pression est sous tension et peut indiquer des valeurs de pression même dans les zones où les capteurs n’en subissent normalement pas. Les valeurs de pression maximale, atteintes pour les cavaliers les plus 75

lourds, sont de 300 mmHg (39,9 kPa). Il s’agit de la valeur de saturation des capteurs. On peut donc supposer que les valeurs réelles sont supérieures. Lors d’une étude utilisant un tapis capteur de pression, il convient donc d’utiliser toujours le même cavalier et la même selle puisque les pressions mesurées sous la selle sont proportionnelles au poids de la selle et du cavalier. L’auteur a ensuite étudié la distribution des pressions sous la selle de dix chevaux, au pas, au trot assis, au trot enlevé et au galop. Les chevaux sont montés avec leur propre selle, considérée comme adaptée. Il conclut qu’aucune valeur objective ne permet de discriminer entre une selle inadaptée et une selle bien adaptée. De plus, le cavalier a une interaction importante sur le cheval, et influence le mouvement du dos et de la selle. Le tapis FSA est donc adapté aux mesures de pression sous la selle, les mesures sont fiables, précises et répétables. Une seconde étude s’est attachée à valider cet outil et son pouvoir discriminant entre plusieurs selles dont l’adéquation variait (9). L’auteur conclut à des résultats similaires à ceux de Jeffcott mais précise que l’outil est difficilement utilisable sur le terrain et nécessite des conditions d’utilisation très standardisées. Des variations de pression significatives, avant et après l’adaptation de l’arçon de la selle, n’ont pu être trouvées qu’à l’arrière de la selle. b. Tapis NOVEL

De Cocq a démontré que le tapis NOVEL permet de mesurer les différentes pressions sous la selle, quand un poids est ajouté ou lorsque le cavalier prend diverses positions (10). Dans cette étude, elle montre la validité et la répétabilité des mesures de pression lors de l’évaluation de la position d’un cavalier sur un cheval à l’arrêt, grâce au calcul de différents coefficients de corrélation. Le tapis NOVEL de marque Pliance, est le plus fréquemment utilisé dans les études publiées en médecine vétérinaire (4,9,10,16,17,30,31,40,65,70). c. Tapis X-SENSOR

Le X-SENSOR n’a jamais été utilisé, à notre connaissance, en médecine vétérinaire mais il est utilisé en médecine humaine (72). Ce tapis permet des mesures précises car il possède un nombre de capteurs par cm2 plus important que ses concurrents. De plus, il est le seul à posséder des capteurs le long de la colonne vertébrale, dans une zone où les pressions sont très mal tolérées par les chevaux. Le logiciel d’analyse de données permet d’obtenir une image des pressions relevées par le tapis, en utilisant une échelle de couleur allant du bleu au rouge, c’est-à-dire des pressions minimales aux pressions maximales relevées par le tapis.

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Figure 34 : Capture d'écran du logiciel d'analyse X-Sensor

Il semble important de noter que certaines études de médecine humaine tendent à montrer que la répétabilité est moins bonne sur les surfaces courbes, ce qui pourrait poser un problème lors de l’utilisation sur le dos des chevaux (46). De plus, Pipkin a testé quatre tapis capteur de pressions (deux de marque Tekscan, X-SENSOR® et FSA) dans des conditions similaires (46). Il conclut notamment que, de façon générale, les tapis capteurs de pression sous-estiment la pression réellement mesurée et que, pour cette raison, les tapis devraient être utilisés pour exclure un coussin amortisseur inadapté plutôt que pour sélectionner un coussin correct. De plus, une étude citée dans la thèse d’Anne-Sophie Riou a comparé les tapis les plus utilisés en médecine vétérinaire. Elle conclut que le tapis NOVEL (Pliance System) est plus fiable que le FSA, le Clinseat (Tekscan) et le X-SENSOR (X-Sensor technology corporation) (10, Hochmann cité par 48) . Les technologies de chacun de ces équipements ont depuis considérablement évolué. Cette étude est donc à nuancer.

FSA TECKSCAN

Type de tapis utilisé capacitif capacitif

NOVEL

capacitif

X-SENSOR

résistif

Médecine humaine Pipkin Pipkin

Médecine vétérinaire De Cocq, Jeffcott Byström, De Cocq, Fruehwirth, Geutjens, Kotschwar, Latif, Nyikos, Riou, Von Rechenberg, Werner

Pipkin, Yuen

Tableau 6 : Tableau récapitulatif des tapis capteurs de pression utilisés dans les différentes études

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3) Données actuelles sur les pressions mesurées sous

la selle Ces différentes études n’ont pas été réalisées avec les mêmes tapis capteur de pression. Leurs résultats sont sujets à caution, car la précision des mesures varie avec l’outil et notamment la taille et l’espacement des capteurs.

a. Chez le cheval non dorsalgique i. A l’arrêt

La première étude de Jeffcott a mesuré des pressions allant jusqu’à 300 mmHg (40 kPa ou 4 N/cm2), sous une selle a priori adéquate et avec un cavalier lourd (environ 100kg) (25). Cette valeur est très supérieure aux valeurs tolérables par l’être humain. ii. Aux trois allures

Fruehwirth a cherché à établir les normes des valeurs de pression sous une selle anglaise correctement adaptée à un cheval non dorsalgique (16). La distribution des pressions varie au pas, au trot assis, au trot enlevé et au galop. Afin d’analyser ces résultats, cet auteur utilise la force maximale mesurée sur la surface du tapis capteur de pression. Il en déduit une relation linéaire entre la force mesurée et le poids du cavalier, selon l’allure.

Ainsi, la force totale (F) et le poids du cavalier (Pcavalier) sont reliés : Fpas = 1 x Pcavalier Ftrot = 2 x Pcavalier Fgalop = 2,5 x Pcavalier La force totale dépend donc du cavalier, et non pas de la selle ou du cheval. Elle semble peu utile dans l’analyse des données. On note également que la force totale découle de la pression totale si l’aire des capteurs de pression est toujours identique. Le cavalier a un rôle stabilisateur de la selle. En effet, le déplacement du centre des pressions est plus faible chez le cheval monté que chez le cheval sellé, sans cavalier. Plus le déplacement du centre des pressions est faible, meilleur est le cavalier.

b. Au montoir Geutjens a étudié les forces et les pressions subies par le cheval au montoir. Il conclut que la force totale et les pics de pressions sont significativement plus importants lorsque le montoir s’effectue depuis le sol, par rapport à un montoir avec l’aide d’un marchepied. Les pressions maximales sont subies au niveau du côté droit du garrot, le montoir s’effectuant traditionnellement à gauche. Il y a donc un net déséquilibre entre la gauche et la droite du cheval. D’autres pressions importantes sont mesurées au niveau des panneaux à gauche. Le garrot joue donc un rôle de stabilisateur de la selle lors du montoir(17). La moyenne du pic de pression au montoir est de 2,68 N/cm2 = 26,8 kPa depuis un marchepied, et de 3,35 N/cm2 = 33,5 kPa depuis le sol. Il conclut que les pressions sont maximales au montoir, et doivent être inférieures pendant le travail monté, sauf si la selle est inadaptée au cheval (17).

c. Influence du type de selle La plupart des études ont utilisé des selles de dressage(16,30,31). 78

Les selles de type western induisent des pressions élevées au niveau des épaules, et réduisent par conséquent le mouvement des antérieurs(65). De plus, il est important de rappeler que ces selles sont souvent trop longues pour les chevaux au dos court, tels que les poney ou les pursang arabes. Les pics de pression sous les selles de course sont souvent retrouvés au-dessus des processus épineux, juste derrière le garrot, ainsi qu’au niveau de la zone lombaire(65). Dans l’étude de Latif, les pressions maximales sont mesurées dans le tiers crânial de la selle au galop, ainsi que dans le tiers caudal au trot(32). La thèse d’Anne-Sophie Riou porte sur la comparaison entre deux selles d’obstacles, munies de deux arçons différents. L’étude a été réalisée sur un simulateur équestre, mimant un parcours de quatre obstacles. Les capteurs du tapis capteur de pression utilisé dans cette thèse, tel qu’ils sont calibrés actuellement, peuvent être saturés lors du saut, ce qui empêche une analyse correcte des résultats(Annette Rancurel, communication personnelle).

d. Influence de l’arçon i. Type d’arçon

Anne-Sophie Riou conclut à une atténuation des pressions mesurées sous la selle munie d’un arçon de nouvelle génération(48). Latif, au contraire, ne conclut pas à des différences significatives dans l’atténuation des pressions dans le tiers caudal d’une selle de course, quel que soit le type d’arçon utilisé, alors que c’est précisément dans cette zone qu’elles sont le moins bien tolérées par les chevaux (32). ii. Taille de l’arçon

Il existe de nombreux arçons, qui varient en longueur, largeur et en angle entre les deux branches latérales. Meschan a démontré que la pression sous une selle dont l’arçon est trop large, ou trop étroit, est significativement plus importante que sous une selle ajustée. En effet, sous une selle inadaptée, la pression est distribuée sur une surface plus petite, ce qui entraîne des pics de pression(40). Lorsque l’arçon est trop étroit, la pression sous le tiers caudal de la selle est significativement plus importante que sous la selle considérée comme adéquate. Lorsque l’arçon est trop large, la pression sous le tiers moyen est significativement plus importante que sous la selle considérée comme adéquate. En conclusion, une selle trop étroite pèse plus à l’arrière, et le centre des pressions est reculé. Une selle trop large induit des pressions plus importantes autour de la colonne vertébrale, dans le milieu du dos. Une telle selle est très instable.

e. Discriminer entre une « bonne » et une « mauvaise » selle

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Harman en 1994 utilise un autre type de tapis, le Saddletech, spécifiquement conçu pour mesurer les pressions sous la selle au pas, puis au trot sur un cercle de 20 mètres de diamètre(18). Ses caractéristiques ne sont pas précisées. A notre connaissance, ce tapis n’a plus été utilisé dans une étude scientifique depuis. Cette étude permet d’avoir une première idée de valeurs considérées comme tolérables pour les chevaux (on considère P la pression maximale atteinte lors de l’enregistrement). • • • •

Selle excellente : P < 1,93 psi = 51,7 mmHg = 6,88 kPa Bonne selle : 2,0 < P < 3,8 psi = 103 < P < 155 mmHg ou 13,8 < P < 20,6 kPa et pas de points de pression persistants Assez bonne selle : 2,0 < P < 3,8 psi = 103 < P < 155 mmHg ou 13,8 < P < 20,6 kPa avec des points de pression modérés Mauvaise selle : P > 3,4 psi = 155 mmHg = 20,6 kPa ou points de pression persistants

Conversion : 1 mmHg = 0.133 kPa = 0.0193 psi et 1N/cm2 = 10 kPa

On entend par « point de pression persistant », un point de pression retrouvé dans la majorité des images pour une même combinaison cheval/pad/selle. Ces valeurs présentées par Harman découlent d’une étude préliminaire non publiée qui a montré qu’il est difficile de trouver une selle avec des pressions inférieures à 0,75 psi = 38,8 mmHg = 5,16 kPa. Cette valeur correspondant à la pression maximale mesurée dans les capillaires sanguins. Werner liste également des critères objectifs permettant l’évaluation d’une selle à l’aide du tapis capteur de pression(70). • • • • •

La surface de contact avec le dos doit être large ; Le contact doit être homogène et continu; Les pressions doivent être inférieures à 3 N/cm2 soit P < 30 kPa ; Il ne doit pas y avoir de pics de pression ; L’effet pont (figure 35), qui se produit lorsque l’avant et l’arrière de la selle sont en contact avec le dos - mais lorsque le centre de la selle ne pose pas - doit absolument être évité.

Figure 35 : Effet pont (Bonati L.)

Les valeurs considérées comme références par Annette Rancurel sont celles publiées par Von Rechenberg(41,65). Le tapis utilisé est de type NOVEL. 80

Elle utilise différentes images des selles pour discriminer entre selles tolérables ou non : le MPP (Maximal Pressure Picture ou image des pressions maximales qui correspond à l’image virtuelle de la pression maximale mesurée par chaque capteur), le MVP (Mean Value Picture ou image des pressions moyennes qui est l’image de la valeur moyenne des pressions mesurées par chaque capteur pendant toute la durée de l’enregistrement).

Les selles sont divisées en six parties, tiers crânial, milieu et tiers caudal, de chaque côté.

MPP (en kPa) MVP

Tiers crânial 34,5

Milieu 30,3

Tiers caudal 31

13,2

11,4

10

Tableau 7 : Valeurs maximales de pression tolérables selon Von rechenberg (65)

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Plus que la valeur moyenne des pressions, la distribution et la localisation des points de pressions sont des facteurs essentiels dans l’analyse(18,65). Ainsi, si les points de pression apparaissent sur une zone très localisée, notamment près de la colonne vertébrale ou dans la zone lombaire, les problèmes de dos sont plus graves(41,65).

Tête

Queue

Figure 36 : Points de pressions localisés à l'arrière de la selle Dans cet exemple, on trouve deux points de pression situés symétriquement de part et d’autre de la gouttière vertébrale, à la limite entre le tiers moyen et le tiers caudal de la selle. La pression mesurée est de 4,18 N/cm2 (41,8 kPa) en moyenne, avec une pression maximale de 5,38 N/cm2 (53,8 kPa). Ces pressions dépassent les valeurs seuils de Von Rechenberg (31 kPa pour les pressions maximales). Le reste des pressions sous la selle est tout à fait correct, mais ces deux points de pression très localisés sont certainement sources de douleur aiguë chez ce cheval. Des pressions plus importantes sont tolérées à l’avant de la selle.

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Le tapis capteur de pression permet de détecter les inadéquations les plus fréquentes des selles : •

L’effet pont (figure 35), est un des défaut d’adéquation les plus graves(18,65,70). Dans ce cas, une pression P > 60 kPa est inévitablement corrélée avec une douleur musculaire sévère ainsi qu’une sensibilité du sommet des processus épineux.



Des défauts de matelassure (figure 36), trop dures, ou hétérogènes. Plus les matelassures sont dures, plus les pressions mesurées sont importantes(65). P > 35 kPa indique des matelassures trop dures(70).

Tête

Queue

Figure 37 : Défaut de matelassure avec matelassures hétérogènes •

Une pression excessive à l’avant (figure 38), avec un point de pression sur le garrot, qui correspond souvent à une selle munie d’un arçon trop large, la selle posant alors seulement à l’avant.

Tête

Queue

Figure 38 : Image des pressions maximales (MPP) avec compression grave du garrot •

une grande variation des pressions pendant l’enregistrement, qui correspond à une selle très instable, ce qui est souvent rencontré lorsque l’arçon est trop étroit (figure 39) ou trop large.

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Figure 39 : Compression des épaules – corps de l’arçon trop étroit

D’une façon plus générale, toute selle inadaptée est instable. Toute instabilité engendre une augmentation de la tension musculaire des muscles du dos, ce qui diminue son élasticité et par conséquent, augmente encore les pressions subies par les muscles(40). La force totale a également été utilisée pour discriminer entre une selle adéquate et une selle inadéquate. Elle est obtenue en sommant les forces mesurées par chacun des capteurs. Dans une étude comparative entre quatre selles, qui ne différaient que par la taille de leur arçon, la selle considérée comme adéquate était celle pour laquelle la force totale mesurée était la plus faible(40). D’après l’auteur, la détermination de la force totale minimale peut constituer un moyen fiable pour déterminer la selle la plus adaptée à un cheval donné. Cependant, il convient de vérifier préalablement que la selle ne présente aucun défaut majeur et qu’aucun pic de pression n’apparaît lors des mesures.

f. Influence des pads Plusieurs études ont déjà porté sur l’influence des pads sur les pressions mesurées sous la selle à l’aide d’un tapis capteur de pression. Leur rôle est bien évidemment de diminuer ces pressions, puisqu’ils servent normalement « d’amortisseurs ». Cependant, en pratique, les choses ne sont pas si simples. La première étude publiée en 1999 concluait déjà que 65% des pads aggravaient la situation, en augmentant les pressions mesurées sous la selle(18). Comme nous l’avons développé dans le point C de la première partie, les qualités et les propriétés d’un pad dépendent essentiellement du matériau dont il est fabriqué et de son ergonomie. Voici l’exemple d’un pad en mouton que nous avons testé. Le matériau est de bonne qualité et les chevaux semblent apprécier son contact. Cependant, ce pad a le défaut majeur de ne pas posséder de gouttière vertébrale, ce qui empêche de dégarotter. Le pad est capable de diminuer les pressions sous la selle, mais il en exerce sur le garrot. Son effet est donc négatif sur l’adéquation de la selle.

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Figure 40 : Image des pressions maximales MPP - même cheval/même selle/même cavalier A gauche tapis coton – à droite pad mouton Cet exemple illustre parfaitement la nocivité de certains pads. Le pad en mouton atténue les pressions maximales subies par le cheval sous la selle par rapport au tapis coton qui nous sert de référence. Les valeurs sous les panneaux de la selle ne sont pas excellentes, mais tout à fait tolérables, et la situation est nettement améliorée par rapport au témoin. Cependant, cette solution n’est pas du tout acceptable puisque ce pad engendre des pressions très importantes sur le garrot. Kotschwar, en 2010, a étudié les effets des pads sur les pressions et les forces mesurées sous une selle adéquate puis sous une selle trop large(30,31). Il interprète une diminution de la force totale maximale comme une amélioration de l’adéquation. Le seul pad ayant une influence significative sur la diminution des pressions est le pad en peau de renne. L’auteur conclut donc qu’il est possible de diminuer les pressions subies en utilisant un pad, correctement choisi. Cependant, il convient de rappeler que sous une selle correctement adaptée, un pad est inutile. L’usage d’un pad permettrait de diminuer la force maximale totale mesurée sous la selle. Le même auteur recommence son étude, cette fois sous une selle trop large. Ce type de défaut conduit à une instabilité importante de la selle, avec des pressions le long de la colonne vertébrale, au milieu du dos. La selle choisie, mesurée sans pad, engendrait des pressions maximales de 1,91 N/cm2 au trot. Ces valeurs sont inférieures à celles considérées comme nocives par les différents auteurs précédemment cités. L’adéquation de la selle semblait donc tolérable, ce qui peut limiter l’interprétation des effets des pads. L’auteur obtient des résultats très variables, certains pads tendent à améliorer la situation, d’autres l’aggravent. Le pad en gel diminue la force maximale totale au pas et au trot, ce qui pourrait s’expliquer par le fait qu’il « prend de la place » entre la selle et le garrot, et ce faisant, stabilise la selle et augmente l’adéquation. Cependant, aucun des pads testés ne permettait de diminuer de façon significative les pressions mesurées près de la colonne vertébrale, qui sont les plus nocives et les plus fréquemment rencontrées dans ce type d’inadéquation.

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Un pad doit être utilisé lorsque la selle posée sur un simple tapis de coton n’est pas adaptée. Une démarche rigoureuse doit être entreprise pour choisir le pad qui améliore le plus une situation donnée, avec un cheval donné. Le tapis capteur de pression permet de faire un choix objectif grâce aux mesures des pressions, et à leur distribution sous la selle.

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Troisième partie : étude expérimentale Influence des différents pads sur les pressions mesurées sous la selle à l’aide d’un tapis capteur de pression ® (X-Sensor )

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La première partie de ce travail nous a permis de décrire les différentes structures qui rentrent en jeu dans l’adéquation de la selle au dos du cheval : - la colonne vertébrale du cheval, structure complexe qu’il est nécessaire de préserver afin de prévenir d’éventuelles dorsalgies très délétères pour le bon fonctionnement du couple cheval/cavalier ; - la selle, qui doit assurer confort et stabilité au cavalier et à sa monture ; - les pads, qui permettent de moduler l’adéquation de la selle au dos du cheval. Traditionnellement, l’adaptation de la selle au dos du cheval s’évaluait selon des critères visuels. Aujourd’hui, grâce à des innovations technologiques, une évaluation objective de cette adéquation est possible : on étudie les pressions mesurées sous la selle (ainsi que d’autres valeurs qui en découlent, comme la force totale ou l’intégrale des pressions) à l’aide d’un tapis capteur de pression. Les mesures réalisées préalablement par Annette Rancurel, ainsi que les études scientifiques préliminaires à ce travail, nous permettent d’accepter le postulat de départ suivant : les pads influent sur les pressions mesurées sous la selle(18,30,31,70). On considère par ailleurs que tous les cavaliers utilisent a minima un pad particulier : le tapis coton, qui nous sert donc de référence. La comparaison de différentes valeurs obtenues sous une même selle nous permettra d’évaluer les capacités des différents pads présents sur le marché.

A.

Objectifs

L’objectif de ce travail est donc de montrer que les pads influent sur les pressions mesurées sous la selle d’obstacle, et permettent donc de corriger certains défauts d’adéquation fréquents, visualisés par des pics de pressions à l’aide de notre logiciel d’analyse. Les résultats obtenus au terme de cette étude pourraient permettre de développer des stratégies correctives de certains défauts de conception courants des selles d’obstacle et ainsi d’affiner le conseil aux cavaliers lorsqu’ils recherchent un pad. Les hypothèses que nous souhaitons vérifier sont les suivantes : • Les propriétés et les qualités d’un pad dépendent du matériau dont il est fabriqué et de son ergonomie. • Un même pad ne peut pas convenir à tous les chevaux, et son choix doit donc être raisonné en fonction de la morphologie et du travail demandé au cheval. • Un pad peut permettre de corriger certains défauts d’adéquation entre la selle et le dos du cheval.

Nous nous attendons à trouver des pressions excessives sur les pointes des épaules, sur le garrot et sur les processus épineux, étant donnée la conception des deux selles choisies. Nous espérons observer une diminution significative des pressions excessives avec l’emploi de pads novateurs (Haf® et Deltapad®). Les pads classiques de type gel, ou mouton, devraient apporter une amélioration moins franche des pressions.

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B. Matériel et méthodes 1) Dispositif expérimental 1. Dix chevaux Dix chevaux sont retenus, réputés en bonne santé, sans dorsalgie ou boiterie rapportées au moment de l’examen. Leurs âge, taille et race sont variables. Leur mode de vie est divers, certains vivent au pré toute l’année (trois sur dix), les autres vivent au box. L’effectif se compose de sept hongres et trois juments. On compte huit chevaux de loisir, et deux chevaux sortent en compétition amateur en CSO (Concours de Saut d’Obstacle). Age (années) Toise (cm)

Arizona

Caresse

FF

Jivaro

Najma

Nat

Quartz

Quizz

Quokin

Stern

17

20

18

14

10

10

7

7

7

22

163

146

148

151

156

154

175

166

175

174

Tableau 8 : Effectif des chevaux Un examen visuel du dos ainsi qu’une palpation sont réalisés avant l’expérience, à la recherche d’anomalies. On notera la présence de poils blancs, une musculature dissymétrique ou une amyotrophie éventuelles. On reporte, pour chacun d’eux, un calque de la ligne de garrot et de la ligne de dos, afin de montrer la variabilité des morphologies au sein d’une population de chevaux montés par des cavaliers amateurs (annexe 1 et 2).

2. Deux selles Les deux selles choisies sont des selles d’obstacle d’occasion. Elles présentent des défauts d’adéquation fréquemment rencontrés : • Une selle (notée B.) avec une ouverture d’arçon étroite derrière le garrot qui peut infliger des pressions importantes de part et d’autre des muscles épineux, grand dorsal et trapèze. Ce choix de conception d’arçon correspond au close contact, qualité recherchée par les cavaliers d’obstacle qui leur permet de se rapprocher du cheval et de mieux « encaisser » les sauts. • Une selle (notée P.) avec une gouttière vertébrale trop étroite qui entraîne des pressions importantes de part et d’autre des vertèbres dorsales. Ces deux selles sont utilisées pour tous les chevaux de l’étude. Elles ne pourront donc pas être considérées comme adéquates pour chaque cheval, compte tenu de la diversité des morphologies présentées ci-dessous. Cependant, l’emploi d’une selle identique pour un panel de chevaux variés correspond bien souvent à une réalité du terrain, pour les centres équestres ou les cavaliers professionnels notamment. L’adéquation de la selle est évaluée pour chaque cheval avant le début des mesures, à l’aide des critères visuels précédemment cités.

3. Un cavalier L’ensemble des mesures est réalisé avec le même cavalier, un cavalier professionnel mesurant 1m70 et pesant 66 kg. Il sangle avant de monter à cheval, avec sa force habituelle. Le comportement du cheval lors du sanglage ou au montoir peut être l’indication d’une inadéquation de la selle ou de la combinaison selle/pad. 89

2) Réalisation des mesures 1. Protocole La première séance de mesures a eu lieu le 21 décembre 2010. Les conditions météorologiques nous ont contraints à reporter la suite des mesures aux 22 et 23 mars 2011. L’intégralité des enregistrements a été réalisée en manège. Chaque séance se déroule de la même manière. Les mesures sont effectuées après un échauffement de dix minutes au pas et au trot. Le tapis capteur de pression est placé sous une combinaison selle/pad. Le cavalier porte à la ceinture l’ordinateur de poche, qui est relié au tapis électronique. L’ordre selon lequel les différents pads et les selles sont étudiés est choisi de façon aléatoire par tirage au sort pour chaque cheval. Le cavalier effectue une longueur de manège au trot enlevé, puis au trot assis et enfin une volte au trot assis à main gauche, puis à main droite. La longueur du manège correspondant à une durée d’enregistrement de 10 secondes environ. Nous avons analysé dans cette étude les données récoltées au trot assis.

2. Logiciel Le tapis utilisé est le X-Sensor®, présenté dans la deuxième partie de ce travail. Le tapis mesure en temps réel les pressions exercées par le dispositif sur le dos du cheval. Les données sont transmises à un ordinateur par wifi, ce qui permet aux manipulateurs d’observer en temps réel la représentation graphique des pressions en fonction du temps. Ce dispositif nous permet de faire une première analyse succinte des observations sur le terrain, et d’adapter le pad personnalisé (deltapad®) sur place, au cours de l’expérience. Les données dont ensuite exportées sous Excel® (Microsoft Office), et l’analyse statistique est réalisée à l’aide du logiciel R®.

3) Méthode d’analyse statistique des données 1. Durée d’enregistrement On choisit les dix secondes les plus représentatives de l’enregistrement. On exclut les mesures pour lesquelles un biais est notoire (cheval qui trébuche, cavalier qui perd un étrier etc.), la répétabilité des mesures ayant été vérifiée au préalable de l’étude.

2. Variables analysées Le logiciel d’analyse X-Sensor® nous a permis d’étudier plusieurs variables distinctes pour chaque enregistrement : • Les images virtuelles des pressions moyennes (MAP) et des pressions maximales (MPP) enregistrées sur la période d’enregistrement, qui permettent une analyse visuelle des données, et l’exclusion de certaines combinaisons d’emblée(65). • La force totale maximale (Maximum Overall Force - MOF). • La force totale minimale (Low Overall Force - LOF). On considère que la meilleure adéquation est celle pour laquelle la LOF est la plus faible(40).

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• •

Les pressions maximales (pics de pression - PP) et de pressions moyennes. Une augmentation des pressions maximales ou moyennes par rapport au témoin signe une aggravation de l’adéquation, et inversement. L’intégrale des pics de pressions, outil utilisé en podologie. Plus l’intégrale est faible, meilleure est la combinaison.

Pour l’analyse intracheval, on considère l’ensemble de l’effectif des chevaux retenus. On considère une variable qualitative : les pads (n=5 ; coton, mouton, gel, haf® et deltapad®). On considère des variables quantitatives (PP, Pmoy, MOF, LOF, intégrale des PP). Pour chaque variable qualitative, on cherche à calculer les différences entre une paire d’observation, le tapis coton étant la référence. On compare des séries appariées (coton/mouton, coton/gel etc.) pour chaque variable quantitative. On utilise un test de Student si la distribution des différences est normale et un test des rangs signés sinon.

Pour la suite de l’analyse, on s’intéresse à un cheval donné avec une selle donnée et on cherche à déterminer la meilleure combinaison selle/pad. C’est l’analyse intercheval. Les variables pics de pression et pression moyennes sont étudiées. On réalise une analyse de variance (ANOVA) pour chacune de ces variables.

Il est délicat de savoir lequel de ces paramètres permet la meilleure évaluation de l’adéquation selle/dos du cheval. Les podologues semblent considérer que pour augmenter le confort, et préserver les tissus, il convient de diminuer les pics de pression, alors que pour augmenter la performance, il est nécessaire de diminuer la force totale.

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C. Résultats 1) Selle B. Les données de huit chevaux sont analysées, compte tenu de difficultés d’enregistrement lors des tests sur le terrain.

1. Images virtuelles MAP et MPP Seuls quelques exemples représentatifs de l’apport de l’étude des images virtuelles MAP et MPP seront développés ici. On rappelle que ces images ont l’avantage de pouvoir évaluer visuellement une combinaison selle/pad pour un cheval donné. Cependant, elles sont caricaturales. En effet, la MPP tend à donner une image aggravée de la réalité, alors que la MAP tend à donner une image améliorée de la réalité. Voici un exemple pour illustrer ce fait, on observe les captures d’écran suivantes :

Figure 41 : Captures d’écran Quokin, selle B., pad mouton A gauche MAP, à droite MPP La MAP montre l’image d’une selle tout à fait acceptable, avec des pressions moyennes tolérables. Cependant, la MPP montre des pressions intolérables au niveau du garrot, très supérieures au seuil recommandé. L’analyse des pressions moyennes semble donc tout à fait insuffisante, d’autant plus que les pics de pressions entraînent ischémie et douleur, et sont donc à proscrire absolument. Le tapis X-Sensor® est très sensible, et donne des valeurs numériques de pressions toujours supérieures à celles recommandées par Von Rechenberg. Cette évaluation de l’adéquation selle/dos par analyse des MPP et des MAP conduit à l’exclusion de l’ensemble des combinaisons selle/pad dans notre étude. Cependant, cela reste un outil précieux et rapide d’analyse des combinaisons. On rappelle que l’on recherche des pressions homogènes, et que tout pic de pression localisé entraîne l’exclusion de la combinaison (surtout s’il est situé le long de la colonne, ou dans le tiers caudal de la selle). 92

2. MOF

Figure 42 : MOF en fonction du cheval Les chevaux sont classés par valeur croissante de la MOF du tapis coton. Dans la plupart des cas, le pad coton est celui pour lequel la MOF est la plus faible pour cette selle. On note que pour deux chevaux cependant le tapis coton est celui pour lequel la MOF est la plus importante (Stern et Quokin). On rappelle que la force totale dépend de la surface totale des capteurs activés, qui dépend elle-même de la surface du pad. Or, tous les pads ont une surface différente. La comparaison semble donc difficile entre les cinq pads.

93

3. LOF

Figure 43 : LOF en fonction du cheval Les chevaux sont classés par valeur croissante de la LOF du tapis coton. Il semble que dans la plupart des cas le pad coton soit celui pour lequel la LOF est la plus faible pour cette selle.

4. Analyse statistique a. Comparaison inter-chevaux Les résultats obtenus sont réunis dans le tableau suivant :

/coton PP MOF LOF Intégrale

mouton 0,644 0,039* 0,009** 0,378

gel 0,247 0,084 0,039* 0,25

haf® 0,009** 1 0,078 0,0033**

deltapad® 0,016* 0,23 0,25 0,016*

Tableau 9 : Comparaison des 5 pads, selle B. Seuil : p