Signatures radar des forêts de mangroves - amapmed

du globe, elle se développe sur près de 10 millions d'hectares représentant ... totale observée sur ce site varie de 5 tMS/ha pour les stades pionniers de front de ..... 300. 400. Biomasse estimée (tMS/ha). Biomasse mesurée (tMS/ha) r² = 0.85.
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Télédétection radar des mangroves de Guyane Française C. Proisy, E. Mougin Centre d'Etudes Spatiales de la Biosphère CNES/ CNRS / UPS B.P.I. 2801, 18 avenue E. Belin 31401 Toulouse Cedex 4 – France E-mail: [email protected]

F. Fromard Laboratoire d'Ecologie Terrestre CNRS / UPS B.P. 4403, 13 avenue du Colonel Roche 31055 Toulouse Cedex - France

J. P. Rudant Laboratoire de Géologie Structurale et Télédétection Université Pierre et Marie Curie 75005 Paris - France

MOTS CLES : végétation tropicale, mangroves, télédétection radar, Guyane Française

Photo-Intreprétation, Images aériennes et spatiales, Numéro spécial Télédétection et Végétation, CEMAGREFENGREF, 36-1998/1.

RESUME Dans cet article, les réponses radar en multi-fréquences et en multi-polarisations des mangroves de Guyane Française sont analysées. Dans un premier temps, il s'agit de déterminer les meilleures configurations radar pour discriminer les mangroves vis à vis de quelques formations végétales tropicales. Les relations entre les paramètres forestiers de la mangrove (hauteurs, diamètres, densités, biomasses aériennes) et les données radar sont ensuite examinées. Des modèles simples pour l’estimation de ces paramètres sont ensuite proposés.

RESUME ETENDU INTRODUCTION La mangrove est l'écosystème le plus caractéristique des littoraux tropicaux. Sur l'ensemble du globe, elle se développe sur près de 10 millions d'hectares représentant environ 1% de la surface couverte par les forêts tropicales. C'est un écosystème instable et fragile, souvent en régression sous l'effet de perturbations anthropiques. Longtemps jugée hostile et sans intérêt économique, la mangrove reste un milieu mal connu sur le plan de son fonctionnement. Son étude s'est cependant développée depuis une vingtaine d'années avec des travaux mettant en évidence sa forte productivité primaire et l'importance de son rôle nourricier pour les populations côtières de poissons et crustacés. Plus récemment, c'est la position d'écotone entre milieux marin et terrestre qui lui a value un regain d'intérêt. Le suivi de sa dynamique apporte en effet des éléments essentiels à la compréhension de l'évolution des traits de côte, ellemême indicatrice des changements régionaux ou globaux liés à la modification du niveau des océans. Les données structurales (paramètres forestiers) et surtout fonctionnelles (productivité, biomasse) restent cependant encore insuffisantes pour développer des schémas cohérents d'évolution et de fonctionnement de la mangrove. L'utilisation de la télédétection radar peut contribuer à faciliter ces acquisitions d'autant plus que la mesure radar, contrairement aux données optiques, n'est pas perturbée par la couverture nuageuse particulièrement importante dans les régions tropicales.

1

SITE D'ETUDE ET DONNEES

La mangrove occupe le long des 250 km de littoral guyanais une superficie d'environ 60.000 hectares [1]. Les stades successifs de développement de cette mangrove sont schématisés dans la Figure 1. Le long d'un transect partant de la mer à l'intérieur des terres, la hauteur et la biomasse sur pied augmentent alors que la densité d'arbres diminue. Les caractéristiques

globales de la végétation ont été prises en compte sur chacun des 2 sites sélectionnés : définition des grandes formations (différents faciès de mangrove, savanes, forêts), des espèces et des paramètres structuraux et écologiques. A proximité de l'agglomération de Sinnamary (site 1) se rencontre la plupart des formations végétales caractéristiques du littoral guyanais (Planche 1). Sur le site 2 à proximité de Cayenne, la mangrove de la Crique Fouillée a donné lieu à des campagnes de mesures intensives (études structurales, biomasse, dynamique). Des parcelles de surface variable selon la densité des peuplements ont été mises en place. Chacun des 12 points retenus regroupe 1 à 3 parcelles de mêmes caractéristiques. Dans chaque parcelle sont notés : l'identification des espèces, le nombre d'individus, leur diamètre et leur hauteur. On a ensuite établi, pour chaque espèce, des relations allométriques entre biomasses (totale, ligneuse, foliaire). La biomasse totale observée sur ce site varie de 5 tMS/ha pour les stades pionniers de front de mer à 440 tMS/ha pour certains stades matures. Le jeu de données radar acquis sur la Guyane est important. En effet, dans un premier temps, des données ERS-1 (5,3 GHz, polarisation VV) et JERS-1 (1,25 GHz, polarisation HH) ont permis d'observer le site de Sinnamary respectivement en avril, mai, décembre 1992 puis février 1993. De plus, le survol le long du littoral guyanais par l'instrument de la NASA et du JPL "AIRSAR" a permis d'acquérir des données multi-fréquences en bande C (5,3 GHz), L (1,25 GHz) et P (0,66 GHz) et multi-polarisations au mois de juin 1993 sur les 2 sites. Les données les plus récentes sont les données SIR-C en bandes C et L, polarisation HH et HV et X-SAR en bande X (9,68 GHz), polarisation VV, disponibles sur le site de Sinnamary pour avril et octobre 1994. 2

REPONSES RADAR DE LA MANGROVE ET DE QUELQUES FORMATIONS

VEGETALES

Les réponses obtenues pour quatre types de végétation : mangrove mature, mangrove dépérissante, forêt dense et savanes sont présentées dans la Figure 2. La discrimination entre mangrove mature et forêt dense apparaît d'autant plus aisée que la fréquence utilisée est basse. La polarisation HH apparaît être la plus intéressante pour différencier un stade dépérissant et un stade mature de mangrove. L'écart radiométrique est supérieur à 3 dB en bande L.

3

ESTIMATION DES PARAMETRES FORESTIERS

Les réponses radar obtenues pour les bandes C, L, P et les polarisations HH, VV, HV en fonction des principaux paramètres structuraux et de la biomasse totale sur pied sont données dans les figures 3 et 4. Pour toutes les fréquences, le coefficient de rétrodiffusion σ° croît avec la biomasse jusqu'à un niveau de saturation correspondant respectivement à 50 tMS/ha, 130 tMS/ha et 160 tMS/ha pour les bandes C, L et P. Les relations statistiques entre les données radar et les mesures de terrain de hauteur, diamètres et densités des arbres sont examinées. L'objectif est d'obtenir des relations simples entre le logarithme du paramètre considéré et le coefficient radar σ°, exprimé en dB, et mesuré dans un seul canal.

Une analyse statistique pas à pas est donc utilisée pour

sélectionner les meilleures configurations. Pour tous les paramètres structuraux, le meilleur canal retenu est soit P-HV, soit L-HV. De fortes corrélations sont observées entre les valeurs estimées et les valeurs mesurées des paramètres pour la hauteur des arbres (r2=0,95), le diamètre (r2=0,90) et la densité de troncs (r2=0,85). La même méthodologie est appliquée pour l'estimation des différentes biomasses. Les modèles et les coefficients obtenus pour la biomasse totale sont présentés dans le tableau 1. La configuration P-HV permet une bonne estimation des biomasses inférieures à 160 tMS/ha. Le coefficient de corrélation associé est de 0,85 avec une erreur quadratique moyenne de ±73 tMS/ha (Fig. 5). L'utilisation de toutes les fréquences et polarisations donne de meilleurs résultats (r2=0,96) avec une erreur moyenne

d'estimation de ± 40 tMS/ha. L'estimation apparaît très bonne en dessous de 160 tMS/ha et reste même raisonnable jusqu’à 240 tMS/ha. Toutefois, les résultats sont à considérer avec précaution en raison du faible échantillon considéré (n=12).

4

CONCLUSION

Dans cette étude, des données radar multi-fréquences, multi-polarisations ont été utilisées pour étudier les caractéristiques des mangroves de Guyane Française. Les résultats indiqués montrent que la discrimination des forêts de mangroves par rapport aux autres types de végétation est d'autant plus aisée que la fréquence utilisée est basse. Par ailleurs, l'utilisation d'une basse fréquence associée à une polarisation croisée conduit à une bonne estimation des paramètres structuraux (hauteur, surface terrière et densité) et des biomasses sur pied. Avec le seul canal P-HV, une estimation des biomasses sur pied est envisageable jusqu'à 160 tMS/ha. L'utilisation de plusieurs canaux pourrait permettre une estimation des biomasses jusqu'à un seuil plus élevé d'environ 240 tMS/ha. Ces premiers résultats demandent confirmation. Aussi, les futurs travaux combineront de nouvelles mesures terrain et une analyse théorique de la rétrodiffusion radar des mangroves.

ABSTRACT INTRODUCTION Mangrove forests are considered ecologically and economically of prime importance. However, most of the existing studies remain essentially descriptive and more specifically, the spatial and temporal dynamics of mangrove forests in terms of structural parameters or above-ground biomass have rarely been studied, certainly because of the difficulties for penetrating such media. Information delivered by imaging radars might contribute to the study of mangroves. The objective of this paper is to investigate the usefulness of imaging radars for monitoring mangrove forests. This paper presents experimental observations of mangrove forests using multifrequency and multipolarised radar data in order to estimate mangrove structural parameters.

1

STUDY AREA AND DATA ACQUISITION

With a surface area of about 60,000 ha, mangrove forests of French Guiana can be seen as a uniform evergreen forest stretching over the 350 km of the coastline [1]. The successive development stages (pioneer, mature and declining stage) of the Guianese mangrove forest are synthesised in Fig. 1. Along a transect from the sea edge to the inland, the canopy height and the standing biomass increase progressively whereas density of trees decreases. Two study sites were selected to be both representative of various mangrove forest stages and also accessible for intensive measurements. In the first site named "Sinnamary" (Planche 1), ground data have been collected on an extensive basis for the general characteristics of the Guianese coast, including delineation of vegetation types and inventory of mangrove species. In the second site named "Crique Fouillée", twelve stands were chosen as a function of their growth stages. For every stand, measurements of diameters, tree heights and densities were performed. Above-ground total biomass was then derived from DBH measurements through

allometric equations. Above-ground biomass ranges from 5 tDM/ha for the first pioneer stage to a maximum of 440 tDM/ha for the oldest mature stand. On the other hand, a large radar data set has been collected over French Guiana. Spaceborne data (ERS-1, JERS-1, SIR-C / XSAR ) were acquired from 1992 to 1994 over site #1 (Planche 1), with X-, C- and L-bands. The site #2 was imaged with the NASA/JPL AIRSAR instrument on June 11, 1993. Polarimetric AIRSAR data was acquired simultaneously at P- (0.44 GHz), L- (1.25 GHz) and C-(5.3GHz) band.

2

RADAR SIGNATURES OF TROPICAL VEGETATION TYPES

The responses of 4 vegetation types (mature mangrove, declining mangrove, savannahs and tropical rainforest) are showed in Fig. 2. Discrimination of mangrove forests from tropical forest can be achieved with the lowest frequencies. Particularly, L-band with HH polarisation leads to significant radiometric differences between the mature stage and the declining stage of mangrove. 3

ESTIMATION OF MANGROVE PARAMETERS

Backscattering coefficients σº at P-, L- and C-band for VV, HH and HV polarisations are shown in Fig.3 as a function of the main structural parameters. The relationship with aboveground biomass is given in Fig. 4. For all frequencies, a logarithmic-law is observed. At Cband, σº increases as a function of total biomass until it reaches saturation at about 50 tDM/ha. At L-and P-band, the saturation levels are respectively of the order of 130 tDM/ha and 160 tDM/ha. The data set is used to derive regression curves between the logarithm of forest parameters and backscatter values. To this end, a stepwise multiple regression technique is applied to the data set to select the best radar intensity channels. Here, our objective is to find simple functions. For all parameters, the best channel is given by P-HV or L-HV. High correlations are observed between SAR derived parameters and field estimated

parameters with tree height (r2=0.95), tree DBH (r2=0.90) and stem density (r2=0.85). In the same way, relationship between the logarithm of the stand biomass and radar values are obtained under the form: log(Parameter) = a0 + a1σ°. Using the coefficients given in Table 1, predicted parameters using P-HV, are then compared with parameters estimated by ground survey. P-band HV provides a good estimation of the standing biomass below 160 tDM/ha with an associated correlation coefficient r2=0.85 and a root mean square error rmse of about ±73 tDM/ha (Fig. 5). When all the channels are considered, the correlation coefficient increases significantly up to 0.96 and the rmse value indicates that biomass retrieval may be performed within ± 40 tDM/ha. Also, biomass estimation seems acceptable below 240 tDM/ha. However due to small number of ground data (n=12), care must be taken when considering such encouraging results. 4

CONCLUSION

In this study, we use multipolarisation and multifrequency data to investigate the usefulness of imaging radars for studying mangrove forests of French Guiana. Best discrimination with other tropical vegetation is achieved with low frequencies (particularly L-HH). Lower the used frequency is, higher the discrimination is. Capability of low frequency systems for biomass estimation is confirmed, regarding the results obtained with L- and P-bands with HV polarisation. While P-HV saturates at about 160 tDM/ha, the use of several frequencies and polarisations allows total biomass to be estimated up to about 240 tDM/ha. Planned future works will be devoted both to intensive field studies and also to a theoretical analysis of the observations.

ARTICLE INTRODUCTION La mangrove est l'écosystème le plus caractéristique des littoraux tropicaux. Sur l'ensemble du globe, elle se développe sur près de 10 millions d'hectare représentant environ 1% de la surface couverte par les forêts tropicales. Soumise à des contraintes environnementales fortes dues essentiellement à l'ennoiement cyclique par les marées, la mangrove est un écosystème instable et fragile, souvent en régression sous l'effet de perturbations anthropiques. Longtemps jugée hostile et sans intérêt économique, la mangrove reste un milieu mal connu sur le plan de son fonctionnement. Son étude s'est cependant développée depuis une vingtaine d'années avec des travaux mettant en évidence sa forte productivité primaire et l'importance de son rôle nourricier pour les populations côtières de poissons et crustacés. Plus récemment, c'est la position d'écotone de la mangrove entre milieux marin et terrestre qui lui a valu un regain intérêt. Le suivi de sa dynamique apporte en effet des éléments essentiels à la compréhension de l'évolution des traits de côte, elle-même indicatrice des changements régionaux ou globaux liés à la modification du niveau des océans. Les données structurales (paramètres forestiers) et surtout fonctionnelles (productivité, biomasse) restent cependant encore insuffisantes pour développer des schémas cohérents d'évolution et de fonctionnement de la mangrove. L'utilisation de la télédétection radar peut contribuer à faciliter ces acquisitions d'autant plus que la mesure radar, contrairement aux données optiques, n'est pas perturbée par la couverture nuageuse particulièrement importante dans les régions tropicales. Dans cet article, les réponses radar multi-fréquences, multi-polarisations des mangroves de Guyane Française et de quelques formations végétales tropicales sont analysées. Dans un premier temps, il s'agit de déterminer les meilleures configurations radar pour discriminer les mangroves, vis à vis des formations végétales tropicales. Les relations entre les paramètres structuraux de la mangrove et les données radar sont ensuite examinées. Le comportement

radiométrique des mangroves en fonction des paramètres forestiers (hauteurs, diamètres, densités, biomasses aériennes) est présenté. Des modèles simples pour l’estimation de ces paramètres sont ensuite proposés.

1

SITES D'ETUDE - DONNEES

1.1

La mangrove de Guyane Française

La mangrove occupe le long des 250 km de littoral guyanais une superficie d'environ 70.000 hectares [1]. Elle colonise les bancs de vase côtiers et les rives des cours d'eau et des estuaires jusqu'à plusieurs kilomètres à l'intérieur des terres dans la zone d'influence des marées. Comme dans toutes les mangroves du domaine Atlantique, la diversité spécifique en Guyane est faible puisque 3 palétuviers les constituent : le palétuvier gris (Laguncularia racemosa), le palétuvier blanc (Avicennia germinans) et le palétuvier rouge (Rhizophora mangle et Rhizophora racemosa). Les stades successifs de développement de cette mangrove sont schématisés dans la Figure 1. Sur les bancs de vase néoformés le long du littoral, Laguncularia racemosa constitue des formations pionnières arbustives, monospécifiques ou associées à Avicennia germinans. Cette dernière espèce, à croissance plus rapide, élimine progressivement Laguncularia racemosa, et se développe en formations homogènes pouvant atteindre 25 à 30 m de hauteur dans les faciès adultes. Plus a l'intérieur des terres, la mangrove dépérit peu à peu et laisse place à la forêt marécageuse à Pterocarpus officinalis ou à la forêt inondée à Symphonia globulifera. Dans certains faciès, en particulier le long des cours d'eau, se développe Rhizophora spp. Sur les portions de côtes où l'érosion est active, les stades pionniers à Laguncularia racemosa sont absents et les populations adultes à Avicennia germinans occupent directement le front de mer. Lorsque ces mêmes formations sont soumises à des sédimentations trop importantes, la mangrove dépérit et les arbres meurent sur pied, constituant le long du littoral des faciès de "cimetières de mangrove".

1.2

Description des sites d'étude

Les faciès les plus caractéristiques de la mangrove guyanaise - faciès pionniers, adultes, dépérissants - et les cimetières sont pris en compte dans les sites d'étude. A proximité de l'agglomération de Sinnamary (site 1, 5º28N, 52º50W) se rencontre sur une surface de 15 km x 15 km la plupart des formations végétales caractéristiques du littoral guyanais. La mangrove adulte (faciès matures, dépérissants, cimetières) se développe en front de mer. Des savanes herbacées, arbustives et des marécages lui succèdent, puis apparaît la forêt dense humide. Des faciès de forêt sur sable et de forêt marécageuse sont également présents. Sur le site 2 à proximité de Cayenne (4º52N, 52º50W), la mangrove de la Crique Fouillée (2,5 km x 2,5 km) a donné lieu à des campagnes de mesures intensives (études structurales, biomasse, dynamique). Sur ce site se succèdent les faciès pionniers, matures et dépérissants de la mangrove [2]. 1.3

Données de terrain

Les caractéristiques globales de la végétation ont été prises en compte sur chacun de ces sites : définition des grandes formations (différents faciès de mangrove, savanes, forêts), des espèces et des paramètres structuraux et écologiques. Sur le site de la Crique Fouillée, des parcelles de surface variable selon la densité des peuplements (3m x3m dans les faciès pionniers à 20m x 20m pour les adultes) ont été mises en place. Chacun des 12 points retenus regroupe 1 à 3 parcelles de mêmes caractéristiques. Dans chaque parcelle sont notés : l'identification des espèces, le nombre d'individus, leur diamètre ou dbh (à 1,30 m pour les adultes, à mi-hauteur pour ceux inférieurs à 2 m, au-dessus des racines-echasses pour Rhizophora) et leur hauteur (mesures télémétriques). Les densités totales et spécifiques, les surfaces terrières totales et spécifiques (sommes des sections de troncs par hectare) ainsi que des indices structuraux ont été calculés. La biomasse aérienne a été déterminée à l'aide de

coupes réalisées sur un nombre représentatif d'individus répartis par classe de diamètre. Troncs, branches et feuilles ont été triés et pesés sur le site ; la teneur en eau de chacun de ces éléments a été déterminée afin d'obtenir les poids secs correspondants. On a ensuite établi, pour chaque espèce, des relations allométriques entre biomasses (totale, ligneuse, foliaire) et diamètres. Sur une parcelle, la biomasse aérienne totale, exprimée en tonne de matière sèche à l'hectare (tMS/ha) est égale à la somme des biomasses individuelles. L'incertitude moyenne sur les valeurs de biomasses est de l'ordre de 15%. La biomasse totale observée sur ce site varie de 5 tMS/ha pour les stades pionniers de front de mer à 440 tMS/ha pour certains stades matures. 1.4

Données radar

Le jeu de données radar acquis sur la Guyane est important. En effet, dans un premier temps, des données ERS-1 (5,3 GHz, polarisation VV) et JERS-1 (1,25 GHz, polarisation HH) ont permis d'observer le site de Sinnamary respectivement en avril, mai, décembre 1992 puis février 1993. De plus, le survol le long du littoral guyanais par l'instrument de la NASA et du JPL "AIRSAR" a permis d'acquérir des données multi-fréquences en bande C (5,3 GHz), L (1,25 GHz) et P (0,66 GHz) et multi-polarisations au mois de juin 1993 sur les 2 sites. Les données les plus récentes sont les données SIR-C en bandes C et L, polarisation HH et HV et X-SAR en bande X (9,68 GHz), polarisation VV, disponibles sur le site de Sinnamary pour avril et octobre 1994.

2

REPONSES RADAR DE LA MANGROVE ET DE QUELQUES FORMATIONS

VEGETALES Le site de Sinnamary est utilisé pour analyser les réponses en fréquence et en polarisation des mangroves en comparaison avec quelques autres formations végétales. La région de Sinnamary est présentée sous la forme d'une composition colorée multi-fréquences et multi-

polarisations obtenue à partir des données SIR-C / X-SAR à une incidence élevée de 59° (Planche 1). Les réponses obtenues pour quatre types de végétation : mangrove mature, mangrove dépérissante, forêt dense et savanes sont présentées dans la Figure 2. La discrimination entre mangrove mature et forêt dense apparaît d'autant plus aisée que la fréquence utilisée est basse. Pour les fréquences les plus élevées, les écarts radiométriques entre forêt dense et mangrove mature sont faibles (< 2dB). Les savanes se discriminent néanmoins toujours bien quelle que soit la fréquence du signal. La polarisation HH apparaît être la plus intéressante pour différencier un stade dépérissant et un stade mature de mangrove. L'écart radiométrique est supérieur à 3 dB en bande L.

3

ESTIMATION DES PARAMETRES FORESTIERS

Les données du système aéroporté AIRSAR sur le site de la Crique Fouillée ont été acquises à une incidence moyenne de 35° [3-4]. 3.1

Relations entre le coefficient de rétrodiffusion radar, les paramètres structuraux et les biomasses sur pied

Les réponses radar obtenues pour les bandes C, L, P et les polarisations HH, VV, HV en fonction des principaux paramètres structuraux et de la biomasse totale sur pied sont données dans les Figures 3 et 4. Pour toutes les fréquences, le coefficient de rétrodiffusion σ° croît avec la biomasse jusqu'à un niveau de saturation correspondant respectivement à 50 tMS/ha, 130 tMS/ha et 160 tMS/ha pour les bandes C, L et P. La dynamique observée est plus importante en polarisation croisée HV ( > 10 dB ) qu'en co-polarisation (4 à 10 dB). Ce résultat confirme et étend les précédentes observations réalisées sur différents types de forêts indiquant que les mesures à basse fréquence avec une polarisation croisée HV sont les plus appropriées pour l'estimation des paramètres structuraux [5].

3.2

Estimation des paramètres structuraux

Les relations statistiques entre les données radar et les mesures de terrain de hauteur, diamètres et densités des arbres sont examinées ici. L'objectif est d'obtenir des relations simples entre le logarithme du paramètre considéré et le coefficient radar σ°, exprimé en dB, et mesuré dans un seul canal. Une analyse statistique pas à pas est donc utilisée pour sélectionner les meilleures configurations. Pour tous les paramètres structuraux, le meilleur canal retenu est soit P-HV, soit L-HV. Les équations de régression sont indiquées dans le tableau 1. De fortes corrélations sont observées entre les valeurs estimées et les valeurs mesurées des paramètres pour la hauteur des arbres (r2=0,95), le diamètre (r2=0,90) et la densité de troncs (r2=0,85). Les corrélations sont moins bonnes pour l'estimation de la surface terrière (r2=0,74). 3.3

Estimation des biomasses sur pied

La même méthodologie est appliquée pour l'estimation des différentes biomasses. Les modèles et les coefficients obtenus pour la biomasse totale sont présentés dans le Tableau 1. La configuration P-HV permet une bonne estimation des biomasses inférieures à 160 tMS/ha. Le coefficient de corrélation associé est de 0,85 avec une erreur quadratique moyenne de ±73 tMS/ha. (Fig. 5). L'utilisation de toutes les fréquences et polarisations donne de meilleurs résultats (r2=0,96) avec une erreur moyenne d'estimation de ± 40 tMS/ha. L'estimation apparaît très bonne en dessous de 160 tMS/ha et reste même raisonnable jusqu’à 240 tMS/ha. Toutefois, les résultats sont à considérer avec précaution en raison du faible échantillon considéré (n=12).

4

CONCLUSION

Dans cette étude, des données radar multi-fréquences, multi-polarisations ont été utilisées pour étudier les caractéristiques des mangroves de Guyane Française. Les résultats indiqués montrent que la discrimination des forêts de mangroves par rapport aux autres types de végétation est d'autant plus aisée que la fréquence utilisée est basse. Par ailleurs, l'utilisation d'une basse fréquence associée à une polarisation croisée conduit à une bonne estimation des paramètres structuraux (hauteur, surface terrière et densité) et des biomasses sur pied. Avec le seul canal P-HV, une estimation des biomasses sur pied est envisageable jusqu'à 160 tMS/ha. L'utilisation de plusieurs canaux pourrait permettre une estimation des biomasses jusqu'à un seuil plus élevé d'environ 240 tMS/ha. Ces premiers résultats demandent confirmation. Aussi, les futurs travaux combineront de nouvelles mesures terrain et une analyse théorique de la rétrodiffusion radar des mangroves.

BIBLIOGRAPHIE [1]

Lescure J. P. et Tostain O. 1989. Les mangroves guyanaises. Bois et Forêt des

Tropiques. 220. 35-42. [2]

Fromard F., Puig H., Mougin E., Marty G., Cadamuro L. et Peltier A. 1998. Structure

and above-ground biomass of mangrove ecosystems: New data from French Guiana. To appear in Oecologia. [3]

Proisy C., Mougin E. et Fromard F. 1996. Investigating correlations between radar

data and mangrove forests characteristics. Proceeding of IGARSS'96, Lincoln, Nebraska, USA, Vol. 1, 733-735. [4]

Mougin E., Proisy C., Fromard F., Puig H., Betoulle J. L. et Rudant J. P. 1998.

Multifrequency and multipolarisation radar backscattering from mangrove forests. To appear IEEE Trans. Geosc. Remote Sensing. [5]

Dobson M. C., Ulaby F. T., Pierce L. E., Sharik T. L., Bergen K. M., Kellndorfer J.,

Kendra J. R., Li E., Lin Y. C., Nashashibi A., Sarabandi K. et Siqueira P. 1995. Estimation of Forest Biophysical Characteristics in Northern Michigan with SIR-C/X-SAR. IEEE Trans. Geosc. Remote Sensing, 33, 877-894.

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Stades de développement d'une mangrove de Guyane Française (d'après [1])

Planche 1 : Composition colorée de la région de Sinnamary avec les données SIR-C : Rouge = C-HH, C-HV, L-HH (avril 94) Vert = L-HV (04/94), C-HH, C-HV (octobre 94 Bleu = L-HH, L-HV (octobre 94)

Figure 2 : Réponses radar de 4 formations végétales tropicales dans les bandes L, C et X en polarisations HH, VV et HV (satellites ERS-1, JERS-1 et SIR-C/X-SAR).

Figure 3 : Evolution du coefficient de rétrodiffusion radar en fonction des paramètres structuraux des mangroves

Figure 4 : Evolution du coefficient de rétrodiffusion radar en fonction de la biomasse sur pied

Figure 5 : Comparaison de la biomasse sur pied estimée avec le seul canal P-HV et celle mesurée sur le terrain

Tableau 1 : Coefficients de régression pour log(Paramètre) = a0 + a1σ°P-HV

Bancs de Vase

Stade Pionnier

Stade Mature

Stade Dépérissant

Forêt Inondée

Océan Rhizophora spp. Avicennia germinans Laguncularia racemosa

Virola surinamensis Symphonia globulifera Euterpe oleracea

Spartina brasiliensis

Figure 1 : Stades de développement d'une mangrove de Guyane Française (d'après [1])

Océan Atlantique Mangroves

1 km

Savanes et Marais

N

Forêt Dense Humide Sinnamary

Planche 1 : Composition colorée de la région de Sinnamary avec les données SIR-C : Rouge = C-HH, C-HV, L-HH (avril 94) Vert = L-HV (04/94), C-HH, C-HV (octobre 94) Bleu = L-HH, L-HV (octobre 94)

0

L−HV

L−HH

C−HV

C−HH

C−VV

X−VV

SIR−C

JERS−1

SIR−C

SIR−C

ERS−1

X−SAR

× ∆ •

Coefficient de rétrodiffusion (dB)

−5

× ∆

×

−10

∆ −15

× ∆



∆ × •

× ∆ •



−20

• −25

−30

× ∆  •

Mangrove Dépérissante Mangrove Mature Forêt Dense Humide Savanes

Figure 2 : Réponses radar de 4 formations végétales tropicales dans les bandes L, C et X en polarisations HH, VV et HV (satellites ERS-1, JERS-1 et SIR-C/X-SAR).

Coefficient Radar (dB) Coefficient Radar (dB)

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0

VV HH HV

5

10

15

Hauteur (m)

20

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0

5

10

15

Hauteur (m)

20

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0

5

10

15

Hauteur (m)

20

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 10 20 30 40 50

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 10 20 30 40 50

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 10 20 30 40 50

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 100 200 300 400

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 100 200 300 400

0 −5 −10 −15 −20 −25 −30 0 100 200 300 400

Surface Terrière (m²/ha)

Coefficient Radar (dB)

Bande P

Bande L

Bande C

Densité de tiges (10²N/ha)

Surface Terrière (m²/ha)

Densité de tiges (10²N/ha)

Surface Terrière (m²/ha)

Densité de tiges (10²N/ha)

Figure 3 : Evolution du coefficient de rétrodiffusion radar en fonction des paramètres structuraux des mangroves

Coefficient de Rétrodiffusion (dB)

Bande C

Bande L

Bande P

0

0

0

−5

−5

−5

−10

−10

−10

−15

−15

−15

−20

−20

−25

−25

−20

o HH * VV

−25 + HV

−30 0

200

400

Biomasse Totale (tMS/ha)

−30 0

200

400

Biomasse Totale (tMS/ha)

−30 0

200

400

(tMS/ha) Biomasse Totale (tMS/ha)

Figure 4 : Evolution du coefficient de rétrodiffusion radar en fonction de la biomasse sur pied

Biomasse estimée (tMS/ha)

400

300

200

100

r² = 0.85 rmse = 73 t/ha 0

0

100

200

300

Biomasse mesurée (tMS/ha)

400

Figure 5 : Comparaison de la biomasse sur pied estimée avec le seul canal P-HV et celle mesurée sur le terrain

Paramètre Densité (N/ha) 2 Surface Terrière (m /ha) Hauteur (m) DBH (cm) Biomasse (tMS/ha)

Canal P-HV L-HV L-HV P-HV P-HV

a0 0,02 2,88 2,54 3,22 4,77

a1 -2,11 0,10 0,11 0,14 0,17

r2 0,85 0,74 0,95 0.90 0.85

Tableau 1 : Coefficients de régression pour log(Paramètre) = a0 + a1σ°P-HV