Recommandations pour la nouvelle organisation des ... - AdCF

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Mettre en œuvre la loi NOTRe : Recommandations pour la nouvelle organisation des compétences et stratégies économiques

INTRODUCTION

A l’occasion de sa convention nationale de Lille, en octobre 2014, l’Assemblée des Communautés de France (AdCF) a proposé à ses partenaires un « Pacte territorial pour la croissance, l’emploi et l’innovation » 1 constitué de sept axes de travail. Elle a notamment appelé à une clarification des compétences décentralisées et une action publique de soutien des entreprises plus lisible, reposant à titre principal sur les régions et intercommunalités. L’AdCF a souscrit au renforcement des schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation des entreprises (SRDE-II) dès lors que ceux-ci seront élaborés dans une étroite concertation avec les métropoles et communautés. L’AdCF s’est par ailleurs mobilisée pour que soient renforcées les compétences opérationnelles de ces dernières en matière d’immobilier d’entreprises et d’aménagement économique, de promotion du tourisme et de politique du commerce. Il est à ses yeux indiscutable que la loi NOTRe a apporté des avancées attendues sur ces sujets. Un accord de partenariat entre l’AdCF et de l’ARF, signé le 24 mai 2016, vise à accompagner le rapprochement attendu entre régions et communautés/métropoles sur les stratégies de développement économique ainsi que sur leur mise en œuvre opérationnelle. Les délais retenus pour la mise en œuvre des orientations de la loi NOTRe s’avèrent extrêmement serrés. L’échéance du 1er janvier 2017 est ainsi prévue pour … … au niveau régional : -

la réalisation du SRDE-II (après débats en CTAP et concertation avec les communautés), la réorganisation des agences de développement et des outils assimilables (loi NOTRe : « Pendant cette période transitoire, la région organise, en conférence territoriale d'action publique, un débat sur l'évolution de ces organismes avec les conseils départementaux concernés, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale qui y participent, dans la perspective d'achever la réorganisation de ces organismes),

… au niveau départemental : -

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l’abandon par les départements de leurs interventions économiques hors domaines spécifiques limitativement énumérés par la loi (« Les conseils départementaux peuvent maintenir les financements accordés aux organismes qu'ils ont créés antérieurement ou auxquels ils participent pour concourir au développement économique de leur territoire jusqu'au 31 décembre 2016 »), la cession de 2/3 de leurs parts au sein des sociétés économie mixte (SEM) et sociétés publiques locales d’aménagement intervenant en matière de développement économique. (« Le département actionnaire d'une société d'économie mixte locale ou d'une société publique locale d'aménagement dont l'objet social s'inscrit dans le cadre d'une compétence que la loi attribue à un autre niveau de collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales peut continuer à participer au capital de cette société à condition qu'il cède, dans l'année qui suit l'entrée en vigueur de la présente loi, à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de cette compétence, plus des deux tiers des actions qu'il détenait antérieurement. »)

… au niveau du « bloc local » : -

le transfert aux communautés de l’intégralité des zones d’activité, le transfert de la compétence promotion du tourisme dont la gestion des offices,

Ces échéances doivent être préparées au plus tôt et interviennent dans un contexte de réorganisation institutionnelle de grande ampleur, avec les effets induits par les fusions de nombreuses régions et les 450 fusions d’intercommunalités programmées par les SDCI à l’horizon du 1er janvier 2017 (2 intercommunalités sur 3 sont concernées).

                                                                                                                1  Programme d’actions téléchargeable ici >  http://www.adcf.org/files/Pacte-economies-territoriales-25e-convention-AdCF-octobre2014-web.pdf      

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Pour en savoir plus : •

Atlas national et régional des projets de communautés figurant dans les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : www.adcf.org/contenu-article?num_article=3170&num_thematique=7

Dossier Spécial SDCI : Carte intercommunale 2016 : l’évolution du paysage urbain / Focus : Implications fiscales et financières des fusions de communautés. Participation citoyenne : retisser la confiance, Intercommunalités n°208, Mars 2016, Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/files/MAG-INTERCO/ADCF-Interco208-Web.pdf •

L’exercice et le partage des compétences de développement économique des collectivités locales. Positions de l’AdCF sur les volets développement économique et emploi du projet de loi NOTRe, 2015 http://www.adcf.org/files/Position-AdCF-volet-developpement-economique-Plj-NOTRe-fevrier2015.pdf



Accord cadre de partenariat AdCF-ARF, 24 mai 2016 http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=3175&num_thematique=7

SOMMAIRE

I. II.

Les schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDE-II) : les attentes des communautés de France

P. 4

Les nouvelles compétences des intercommunalités : préparer les échéances

P. 12

ANNEXES – Recommandations pour des stratégies économiques locales

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Fiche 1 : Replacer le développement économique et les politiques d’emploi au cœur du projet de territoire

P. 19

Fiche 2 : Organiser la transversalité au sein des exécutifs et des directions générales

P. 20

Fiche 3 : Connaître son tissu d’entreprises et les moteurs du développement économique local

P. 21

Fiche 4 : Renforcer les outils de dialogue et de partenariat avec le monde économique

P. 26

Fiche 5 : Effectuer un suivi attentif du rendement fiscal des activités économiques

P. 28

Fiche 6 : Agir par le levier de la commande publique

P. 31

 

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I – Les schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDE-II) : les attentes des communautés de France Créées à l’origine par la loi du 13 août 2004 sur les libertés et responsabilités locales (LRL), les schémas régionaux de développement économique (SRDE) n’avaient alors qu’une valeur expérimentale et conditionnaient la décentralisation aux régions de certains systèmes d’aide aux entreprises gérés par l’Etat. Dès 2004, la réalisation des SRDE avait pour effet d’encadrer les aides aux entreprises. Ces schémas ont permis de disposer d’un recensement exhaustif des régimes d’aide définis par les collectivités et d’en renforcer la cohérence d’ensemble. Leur expérimentation dans la quasi-totalité des régions a rendu le processus irréversible et le renforcement de leur statut. Cela a été le premier mérite de la loi de 2004. Depuis lors, de nombreuses régions ont renouvelé et approfondi l’exercice de planification, en lui donnant une portée plus stratégique et moins exclusivement réglementaire. Un simple répertoire des aides aux entreprises ne saurait tenir lieu de stratégie. Les nouveaux SRDE-II promus par l’article 2 de la loi NOTRe (article L. 4251-13 du CGCT) précisent que : « Ce schéma définit les orientations en matière d'aides aux entreprises, de soutien à l'internationalisation et d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises, ainsi que les orientations relatives à l'attractivité du territoire régional. Il définit les orientations en matière de développement de l'économie sociale et solidaire, en s'appuyant notamment sur les propositions formulées au cours des conférences régionales de l'économie sociale et solidaire. « Le schéma organise, sur le territoire régional, la complémentarité des actions menées par la région en matière d'aides aux entreprises avec les actions menées par les collectivités territoriales et leurs groupements, en application des articles L. 1511-3, L. 1511-7 et L. 1511-8, du titre V du livre II de la deuxième partie et du titre III du livre II de la troisième partie. « Les orientations du schéma favorisent un développement économique innovant, durable et équilibré du territoire de la région ainsi que le maintien des activités économiques exercées en son sein. « Le schéma fixe les actions menées par la région en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. « Le schéma peut contenir un volet transfrontalier élaboré en concertation avec les collectivités territoriales des Etats limitrophes. « Le schéma peut contenir un volet sur les orientations en matière d'aides au développement des activités agricoles, artisanales, industrielles, pastorales et forestières. » Aussi utile que soit l’exercice de recensement et de définition des aides directes et indirectes allouées aux entreprises éligibles, il est attendu des nouveaux schémas régionaux qu’ils portent une véritable stratégie de développement économique. Les SRDE de deuxième génération, ou les stratégies régionales d’innovation (SRI), développées par certaines régions se sont ainsi révélés beaucoup riches que les premiers documents. Les SRDE-II redéfinis par la loi NOTRe ont pour effet d’élargir les thèmes traités par ces documents mais surtout d’en renforcer le caractère prescriptif. Contrairement aux SRDE de 2004, la loi NOTRe impose la réalisation d’un SRDE-II et en fait un document de plein droit de la collectivité régionale. Le SRDE-II devient en outre directement prescriptif sur les autres acteurs, et notamment les communautés qui exercent leurs compétences « dans le respect des orientations du SRDE-II ». Ce mode d’écriture du code général des collectivités territoriales, relativement inédit, crée une sorte de compétence communautaire « subordonnée » à des orientations régionales. Objet de longs débats au Parlement, cette « prescriptivité » sur les compétences exclusives reconnues aux métropoles et communautés a pu être assimilée à une forme de tutelle. Les parlementaires ont pour cette raison prévu que le SRDE-II sera arrêté par le préfet de région qui pourra contrôler le respect de la légalité du document et de la procédure d’élaboration mais aussi du respect des intérêts nationaux. L’autre contrepartie de cette prescriptivité renforcée du schéma régional repose dans la clause de « concertation » prévue avec les intercommunalités compétentes. Les débats parlementaires ont souligné le

 

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soin qu’il conviendra de respecter en l’occurrence et qui devra être en rapport avec le degré de précision du document sur les sujets affectant les compétences exclusives des communautés. Un SRDE-II qui se voudrait très directif sur les aides à l’immobilier d’entreprises devra faire l’objet d’une concertation nécessairement plus approfondie avec les autorités compétentes en la matière, sauf à porter atteinte à leur libre administration. Il est à noter que les intercommunalités (avec la Métropole de Lyon2) sont le seules institutions locales à bénéficier, au titre de la loi NOTRe et de l’instruction ministérielle qui en découle, d’une obligation de concertation de la part de la région. Celle-ci sera libre d’en élargir le champ mais ne pourra omettre les intercommunalités, au risque de fragiliser juridiquement son document. L’instruction ministérielle du 22 décembre 2015 précise à cet égard ce qui caractérise une concertation : « Il est nécessaire que ces échanges fassent l’objet de rapports écrits ou de procès verbaux suffisamment détaillés permettant d’attester l’effectivité de cette concertation, qui est un élément important de la légalité du SRDEII ». A ce titre, et pour tenir compte des débats parlementaires, les délégations régionales de l’AdCF souhaitent que la concertation préparatoire aux SRDE-II ne se réduise pas, pour les communautés, à l’invitation à des grands événements où sont convoqués plusieurs centaines d’acteurs. Elles plaident pour l’organisation d’une véritable scène de négociation bilatérale entre exécutifs régionaux et communautaires. Elles souhaitent que ce dialogue soit organisé distinctement et spécifiquement, entre pouvoirs publics locaux compétents, avant d’élargir le débat à d’autres acteurs.

Les attendus sur la concertation régions-communautés dans le cadre du SRDE-II et des politiques régionales Pour réussir le nouveau défi des SRDE-II, les présidents d’intercommunalités préconisent ainsi la constitution d’une instance spécifique dédiée à la concertation régions/communautés. Cette instance devrait rassembler régulièrement les exécutifs régionaux et communautaires mais être « doublée » d’une instance de nature plus technique. Un débat est certes imposé par la loi au sein de la conférence territoriale d’action publique (CTAP), mais ce dernier ne saurait épuiser les besoins de coordination entre acteurs publics compétents et répondre aux exigences d’une véritable concertation. Il doit être noté que la CTAP : -

ne comprend pas l’ensemble des intercommunalités de la région, comprend des collectivités dont le législateur a programmé l’extinction des compétences économiques.

L’instance de concertation régions/communautés doit permettre l’expression d’un dialogue bilatéral, entre les deux niveaux institutionnels confortés par la loi NOTRe dans leurs prérogatives économiques. Cette instance pourra être rattachée à la CTAP (sous forme de commission thématique spécialisée), ou indépendante de cette dernière. Son fonctionnement devrait s’inscrire dans la durée pour non seulement participer à la phase d’élaboration du schéma et de ses éventuels volets thématiques, mais surtout pour organiser sa mise en œuvre opérationnelle. Les délégations régionales de l’AdCF souhaitent en effet que les nouveaux SRDE-II soient des documents vivants et très opérationnels, engageant l’ensemble des acteurs autour d’une stratégie partagée. L’appropriation de cette stratégie régionale par les intercommunalités sera un élément de progrès indiscutable. Proposer une mise en œuvre contractualisée A cette fin, les métropoles et communautés souhaitent qu’il soit clairement établi que le SRDE-II a vocation à être mis en œuvre, dans ses orientations territorialisées, par la voie de conventions opérationnelles.

                                                                                                                 Depuis le 1er janvier 2015 et en application de la loi MAPTAM, la Métropole de Lyon n’est plus une intercommunalité mais est devenue une collectivité à statut particulier sous l’effet de sa fusion avec le département du Rhône dans son ressort territorial. Elle reste néanmoins assimilable aux intercommunalités dans de nombreux domaines.

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La loi NOTRe y incite elle-même en précisant que : « La mise en œuvre du schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation peut faire l'objet de conventions entre la région et un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents. » (Art. L. 4251-18. du CGCT). La loi n’impose donc pas une mise en oeuvre par conventions, mais elle y encourage fortement. La loi prévoit également des possibilités de délégation des aides de la région aux communes, intercommunalités et métropoles ou à des établissements publics (chambres consulaires par exemple) ainsi qu’à BPI France. Cette capacité de délégation est très importante dans le cadre de la mise en œuvre opérationnelle des SRDE-II et de l’organisation de « front office » unifiés au sein des territoires pour les entreprises. Cette unification attendue des « points d’entrée » doit être organisée de manière cohérente avec les chambres consulaires qui proposent également d’instruire les dossiers d’aide aux entreprises pour le compte des régions, via les chambres ou leurs antennes (cf. restructurations en cours du réseau consulaire).

Ce que dit la loi NOTRe du 7 août 2015 : « Sous réserve des articles L. 1511-3, L. 1511-7 et L. 1511-8, du titre V du livre II de la deuxième partie et du titre III du livre II de la troisième partie, le conseil régional est seul compétent pour définir les régimes d'aides et pour décider de l'octroi des aides aux entreprises dans la région. Dans le cadre d'une convention passée avec la région, la métropole de Lyon, les communes et leurs groupements peuvent participer au financement des aides et des régimes d'aides mis en place par la région. « Ces aides revêtent la forme de prestations de services, de subventions, de bonifications d'intérêts, de prêts et d'avances remboursables, à taux nul ou à des conditions plus favorables que les conditions du marché. « Le conseil régional peut déléguer l'octroi de tout ou partie des aides à la métropole de Lyon, aux communes et à leurs groupements, dans les conditions prévues à l'article L. 1111-8. Il peut déléguer la gestion de tout ou partie des aides à des établissements publics ou à la société mentionnée à l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement. « Les aides accordées sur le fondement du présent I ont pour objet la création ou l'extension d'activités économiques. (Art. L. 1511-2.-I.-) »

Au-delà de la territorialisation du SRDE-II, les délégations régionales de l’AdCF ont souligné l’importance de donner un caractère profondément évolutif au document. Un SRDE-II n’est pas comparable à un document de planification des sols. Il doit évoluer au gré des mutations économiques de plus en plus rapides. Certains de ses volets ont vocation à s’enrichir et s’approfondir dans la durée. La refonte de la carte intercommunale au 1 er janvier 2017 rendra certainement opportune une « clause de revoyure » du volet territorial du SRDE-II avec les communautés recomposées. Celles-ci seront conduites à repenser leurs stratégies économiques et à faire des propositions aux régions. Le calendrier de réalisation du SRDE-II étant très court, et concomitant de multiples chantiers de réorganisation institutionnelle ou de transferts de compétences, il serait utile que le premier SRDE-II adopté définisse lui-même ses conditions d’évolution.

Les attendus sur les contenus du futur SRDE-II - Une territorialisation plus fine des stratégies et politiques régionales Par rapport aux premières générations de SRDE, les communautés et métropoles espèrent de la nouvelle génération de documents une vision beaucoup plus territorialisée de l’économie régionale et des stratégies. La force des régions, par rapport aux anciennes politiques nationales, est de se situer au plus près des territoires et des bassins d’emploi. Il serait regrettable de reproduire à des échelles régionales les défauts des anciennes politiques nationales standardisées ou les effets de concurrence entre territoires suscités par les appels à projets des ministères et agences. L’AdCF plaide ainsi avec ses adhérents pour une analyse approfondie des économies locales conduite à l’échelle des bassins d’emploi, pour tenir compte de leur diversité. L’élargissement géographique des régions a fortement accru leur hétérogénéité interne et rend encore plus nécessaire cette approche territorialisée.

 

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C’est à cette échelle stratégique du bassin d’emploi que pourrait s’opérer une concertation approfondie entre la région et les intercommunalités (regroupées à plusieurs le cas échéant). Il est ainsi recommandé d’établir et mettre en débat des diagnostics socio-économiques locaux par bassin d’emploi et d’introduire des orientations territoriales spécifiques dans le futur SRDE-II. Le terme de « bassin d’emploi » doit être ici appréhendé de manière pragmatique et adaptable aux contextes régionaux. La définition de ces « bassins » pourra naturellement s’écarter des délimitations des zones d’emploi opérées par l’INSEE à partir de ses propres conventions statistiques. Pour constituer des périmètres à la fois d’analyse et d’action, cohérents avec les compétences des acteurs publics, il sera nécessaire de délimiter des « bassins d’emploi » intégrant d’un seul tenant les intercommunalités. La forte évolution de la carte intercommunale au 1 er janvier 2017 devra être anticipée par l’analyse des projets inclus dans les SDCI (cf. carte ci-dessous) mais également par le suivi des délibérations municipales qui valideront ou non ces projets d’évolution. Dans certains territoires, compte tenu des élargissements en cours, les intercommunalités atteindront elles-mêmes l’échelle d’un bassin d’emploi cohérent. Dans la plupart des cas, les bassins d’emploi en comprendront plusieurs. C’est à cette échelle, si ce pas déjà le cas, qu’il conviendra de les inviter à s’organiser collectivement.

Ci-dessous : la carte des intercommunalités telle que prévue par les SDCI arrêtés au 31 mars 2017 (avant délibérations des communes). 1250 métropoles et intercommunalités environ, issues de 445 procédures de fusion concernant 2 intercommunalités sur 3. Sur le fondement de l’enquête conduite auprès des présidents de communautés en avril 2016, 4 projets sur 5 devraient être validés par les communes.3

                                                                                                                3

Des précisions sur cette enquête ainsi qu’une note de synthèse réalisée par l’AdCF sont disponibles sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=3138&num_thematique=7

 

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Cette « territorialisation » du nouveau schéma régional est vivement attendue des métropoles et communautés. C’est également elle qui favorisera une meilleure organisation des acteurs et des « écosystèmes locaux » et permettra de préparer des conventions opérationnelles.

- Une régulation attendue des concurrences territoriales Les délégations régionales de l’AdCF espèrent également du nouvel exercice de SRDE-II et des compétences renforcées des régions qu’ils puissent participer à la régulation des concurrences inter-territoriales en matière de développement économique. La réalité des concurrences économiques entre territoires est indiscutable, et peut même être un facteur d’émulation. Mais celle-ci doit être modérée et régulée par les autorités supra-locales, plutôt qu’exacerbée. Cette régulation est notamment attendue dans le champ commercial mais également en matière de tourisme ou de politique d’attractivité à l’égard des investisseurs. Les politiques actives de prospection, voire de démarchage agressif, sont des jeux à somme nulle, voire à somme négative compte tenu des coûts qu’elles représentent et des énergies qu’elles consomment. Elles dégradent également la propension des acteurs publics à s’inscrire dans des coopérations et solidarités inter-territoriales à grande échelle et à forte valeur ajoutée. Les concurrences non-régulées sont également ce qui permet à certains acteurs économiques de faire « monter les enchères » entre territoires. Il est ainsi attendu du SRDE-II et des stratégies régionales qu’ils proposent des codes de bonne conduite et des règles du jeu. Les stratégies régionales doivent permettre d’organiser des complémentarités et des jeux « gagnant gagnant ».

- Une attention forte aux questions d’ingénierie du développement L’année 2016 est une année propice pour débattre des « ingénieries » du développement économique local. La loi NOTRe impose un débat au sein de la CTAP sur l’avenir des agences de développement. Les départements sont invités à se retirer (partiellement) de l’actionnariat d’entreprises publiques locales (SEM, SPLA). Le second semestre de l’année sera ainsi une occasion fondamentale pour dresser une cartographie des structures et agents intervenant dans les champs économiques au sens large. De nombreuses communautés s’interrogent sur la réorganisation de ces ingénieries du développement. La disparition de certaines agences de développement est déjà actée, sans que le débat sur la reprise de leur activité (voire de leurs agents) n’ait eu lieu. Il est de fait opportun de veiller à ce qu’un diagnostic approfondi soit proposé sur la situation actuelle, l’efficacité des outils d’appui existants (agences, SEM, missions des organismes consulaires...) et les réorganisations envisageables. Le SRDE-II pourrait lui-même intégrer un volet consacré à cette bonne organisation des ingénieries du développement économique local, en garantissant des soutiens à l’ensemble des territoires. Cette cartographie des compétences et missions devra naturellement s’opérer en lien étroit avec les réseaux consulaires, mais aussi avec les organisations patronales (MEDEF, CGPME, CJD, UPA, FNSEA...) et le monde associatif (réseaux de la création d’entreprises, économie sociale et solidaire...). Il sera utile de reposer la question des qualifications et expériences nécessaires aux différentes formes d’ingénierie du développement économique local. En lien avec la Caisse des Dépôts, l’AdCF et les autres fédérations d’employeurs de développeurs économiques (CCI France, CNER, Initiative France, France Clusters, Alliance Villes Emploi) proposeront un référentiel de compétences partagé qui pourra éclairer les réflexions régionales et locales. Ce référentiel permettra, le cas échéant, de construire des parcours de formations initiales et continues « certifiants ». La reconnaissance des métiers de « développeur économique » n’est pas encore pleinement établie. Le moment est venu d’organiser une véritable communauté professionnelle.

 

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- Une mise en réseau des élus et cadres territoriaux en charge du développement économique A l’instar de ce qui existe déjà dans quelques régions, la mise en réseau des « développeurs économiques » à l’échelle régionale est aujourd’hui indispensable. Cette mise en réseau doit se traduire par : -

des journées régulières de formation, d’échanges et de débats, un dispositif de circulation de l’information et d’intelligence économique, des démarches d’expérimentation...

Ce qui a été construit, par exemple, depuis longtemps en Rhône-Alpes autour du réseau ARADEL gagnerait à se généraliser, sous des formes naturellement adaptées à chaque contexte régional. Il serait en revanche anormal d’en demeurer à la situation actuelle, marquée par une très nette insuffisance de l’inter-connaissance des acteurs tant dans une relation « verticale » (services de la région/développeurs locaux) qu’ « horizontale » (interconnaissance d’un bassin d’emploi à un autre). La simplification proposée par la loi NOTRe et la rationalisation des outils de développement devraient permettre de progresser dans la constitution d’une véritable communauté professionnelle organisée. En lien avec l’association des directeurs régionaux de communautés de France (ADGCF), l’AdCF et ses délégations régionales entendent favoriser la création de réseaux de « développeurs économiques » des communautés.

- La promotion de la culture entrepreneuriale La France dispose d’un taux élevé de créations d’entreprises, ce qui permet de renouveler constamment son tissu économique. Depuis de nombreuses années, d’importants progrès ont été en outre constatés dans l’accompagnement des entrepreneurs. Dans l’ensemble des territoires, des réseaux associatifs adossés aux collectivités et chambres consulaires offrent des appuis précieux aux créateurs ou repreneurs pour élaborer les plans d’affaire, accéder au financement bancaire (avances remboursables, garanties…), trouver des fonds propres, s’insérer dans des circuits économiques… Les outils du premier hébergement (incubateurs, pépinières…), de l’amorçage financier et de l’accompagnement-conseil… permettent d’élever le taux de survie des entreprises. Ce maillage très dense devra être consolidé dans le cadre des stratégies régionales, tout en prenant soin de s’ajuster à la diversité des territoires et des économies locales. La pluralité des réseaux et des modes d’intervention tient à l’hétérogénéité du tissu économique et des créations d’entreprises. Une erreur serait de vouloir standardiser les réponses. Pour autant, une plus grande lisibilité des intervenants et de leurs complémentarités s’impose aujourd’hui. Les régions seront les institutions les mieux placées pour organiser cette « cartographie » des dispositifs d’accompagnement et veiller à leur cohérence. Des « portes d’entrée » mutualisées dans les territoires, à l’échelle des bassins d’emploi, devraient être proposées pour réduire les concurrences institutionnelles et les captations de clientèles. De nombreux territoires ont déjà pris les devants à travers la création de « Maisons de l’entreprise » au sein desquelles se retrouvent tous les acteurs de la création-reprise (boutiques de gestion, plates formes d’initiative locale, ADIE, chambres consulaires..). Les nouveaux SRDE-II devraient encourager ces mutualisations. Au-delà des phases de création ou de reprise, la promotion de la culture entrepreneuriale doit s’étendre à d’autres étapes de la vie des entreprises et notamment aux périodes de franchissement de caps. Parmi les dizaines de milliers d’entreprises créées chaque année, trop peu nombreuses sont celles qui dépassent ensuite le stade de la micro-entreprise. La promotion de la culture entrepreneuriale doit aider à surmonter les « plafonds de verre » qui font obstacle au développement de notre tissu économique (seuils sociaux et fiscaux, aversions au risque …). La faible propension à croître des entreprises françaises explique, pour une part, la faiblesse de notre gamme de grosses PME ou d’entreprises de taille intermédiaire (ETI). Ce sont pourtant ces catégories d’entreprises qui portent l’essentiel des créations nettes d’emploi dans nos territoires et en constituent les activités « motrices ». Des travaux de recherche et d’analyse gagneront ainsi à être engagés sur le repérage des entreprises à potentiel de croissance.

 

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- Une analyse et des stratégies adaptées à la réorganisation rapide des chaînes de valeur De même que les stratégies régionales doivent aider à apaiser les concurrences entre territoires, il est fondamental que les politiques régionales contribuent à améliorer la qualité des relations inter-entreprises au sein des « chaînes de valeur » (expression plus adaptée à l’économie contemporaine que les notions très verticales et cloisonnées de filières ou de branches). A travers les politiques de pôles de compétitivité, de « clusters » ou « réseaux d’entreprises », des formes plus collaboratives d’organisation économique sont apparues depuis les années 2000. Les régions et les intercommunalités ont beaucoup contribué à la structuration de ces approches collectives. Ces politiques sont de toute évidence l’avenir et doivent être absolument confortées dans la nouvelle génération de SRDE-II. Il sera néanmoins nécessaire de veiller à la qualité de ces coopérations-inter-entreprises et à leur pérennité. En lien avec le Pacte PME proposé par les organisations patronales, mais aussi avec la Médiation des entreprises et ses correspondants locaux, il sera opportun d’encourager les bonnes pratiques dans les relations donneurs d’ordre-fournisseurs ou les projets communs d’innovation. De même il sera utile de dissuader, par les moyens appropriés, certaines pratiques agressives et « prédatrices » qui fragilisent les tissus de PME voire confisquent leurs marges.

- Une capacité d’organiser l’accès et la projection des PME à l’export La loi NOTRe conforte le rôle des régions en matière de soutien de nos entreprises exportatrices. C’est assurément une bonne chose. Trop peu d’entreprises osent en effet aujourd’hui l’export et la projection à l’international. Nos capacités exportatrices, insuffisantes au regard de notre balance extérieure, reposent sur un faible nombre d’acteurs : grands groupes et entreprises de taille intermédiaire (ETI), peu nombreuses en France. L’accès à l’export pour nos tissus de PME est de fait une gageure essentielle à relever au cours de la prochaine décennie. Seules des approches collectives, bien organisées, éventuellement adossées à des groupes plus importants, peuvent transformer en profondeur la situation. En lien avec Business France (nouvel opérateur de l’Etat issu de la fusion de l’AFII et d’UBbifrance, 1500 salariés, 6 directions interrégionales), dont il faudra certainement renforcer l’ancrage régional, les régions doivent structurer des « plates formes d’exportation » pour nos PME. Il va de soi que les intercommunalités, à l’exception peut-être des plus grandes métropoles, n’ont pas vocation à conduire individuellement des actions de promotion à l’export de leurs entreprises. Elles seraient en revanche heureuses de pouvoir encourager leurs PME à s’inscrire dans des « opportunités » et ces « plates formes d’export » constituées au niveau régional.

- Une mobilisation exceptionnelle sur les qualifications professionnelles Un récent rapport de France Stratégie évoque les mauvaises performances de notre pays sur le plan des qualifications professionnelles. Faiblesse des qualifications initiales et insuffisance des formations continues se combinent pour soulever un problème réel de compétitivité à nos entreprises et à nos territoires. La formation initiale française est, selon l’OCDE, marquée par une obsolescence plus rapide que dans les autres pays. Il est de fait urgent de réagir en investissant très fortement sur l’enjeu des qualifications professionnelles dans le cadre des SRDE-II et des plans régionaux de formation. La régionalisation renforcée des politiques de formation professionnelle est l’occasion de changer de mode d’approche et de co-construire, au cœur des bassins d’emploi, des solutions répondant à des véritables politiques de gestion prévisionnelle et territoriale de l’emploi et des compétences (GPTEC). En lien avec les outils territoriaux de la politique de l’emploi (maisons de l’emploi, PLIE, missions locales), il est attendu des régions une nouvelle impulsion dans le cadre du SRDE-II sur la question des qualifications professionnelles. Des objectifs ambitieux et chiffrés devraient être fixés.

 

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Il est à noter que la loi prévoit la possibilité d’accorder aux régions un rôle de coordination des outils territorialisés de la politique de l’emploi et de l’insertion. Ce rôle de « chef de file », dont il conviendra de mieux connaître les modalités de mise en œuvre, devrait être accordé à l’ensemble des régions en application du pacte Etat-régions signé en début d’année 2016. « L'Etat peut déléguer à la région, dans les conditions prévues à l'article L. 1111-8-1 du code général des collectivités territoriales et après avis du comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles, la mission de veiller à la complémentarité et de coordonner l'action des différents intervenants, notamment les missions locales, les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi, Cap emploi et les maisons de l'emploi, ainsi que de mettre en œuvre la gestion prévisionnelle territoriale des emplois et des compétences, sans préjudice des prérogatives de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du présent code. La région évalue le taux d'insertion dans l'emploi. « La convention de délégation signée entre les présidents des régions délégataires et le représentant de l'Etat précise les objectifs et les conditions d'exercice et de suivi de la délégation, notamment les conditions de transfert par l'Etat aux régions délégataires des crédits affectés hors dispositifs nationaux des politiques de l'emploi. » La transformation très puissante de l’emploi sous l’effet de la révolution numérique et de la digitalisation de nombre d’activités constitue un véritable défi à relever. Cette mutation peut être très fragilisante mais elle peut aussi constituer pour de nombreuses personnes une véritable « deuxième chance » dans leur parcours professionnel. Sans disposer des moyens juridiques et financiers nécessaires pour agir sur les politiques de qualification professionnelle, les présidents de communautés et métropoles sont au demeurant persuadés de leur caractère éminemment décisif, renforcé par la mobilité géographique décroissante des salariés. Ils appellent les politiques de formation et de qualification à se « territorialiser » davantage, avec des logiques de circuit court dans les bassins d’emploi. Ils sont à la disposition des régions pour expérimenter localement et mobiliser des acteurs au plus près du terrain. Ils entendent également travailler au rapprochement avec les universités et les instituts d’enseignement supérieur pour renforcer l’offre de formation continue et relever les défis de la certification professionnelle des diplômes, condition d’éligibilité au compte personnel de formation (CPF) avec un effort particulier à conduire sur la validation des acquis de l’expérience (VAE).

Pour en savoir plus : •

Les métiers en 2022, rapport du groupe Prospective des métiers et des qualifications, France Stratégie, avril 2015. Disponible sur : http://www.strategie.gouv.fr/publications/metiers-2022-prospective-metiers-qualifications

           

 

Mieux organiser nos bassins d’emploi - Intercommunalités n°198, mars 2015 Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/files/MAG-INTERCO/ADCF-Interco198-150401-web.pdf

 

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II - Les nouvelles compétences des intercommunalités : préparer les échéances Depuis  les lois fondatrices de 1992 puis 1999, les intercommunalités à fiscalité propre (ou « communautés ») se sont vue reconnaître des compétences obligatoires en matière de développement économique. Avec l’aménagement de l’espace, ce dernier faisait partie des deux compétences obligatoires imposées à toutes les catégories de communautés : communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines. Cette compétence était néanmoins partagée avec les communes à travers la définition d’un intérêt communautaire. La montée en compétence des communautés et le renforcement de leur degré d’intégration, la constitution progressive des services et outils dédiés (agences de développement locales, SEM…) se sont affirmées progressivement depuis les années 2000. L’AdCF a conduit plusieurs études, en 2005 puis en 2011, pour évaluer ce renforcement progressif de leurs domaines d’intervention et des moyens d’intervention. D’autres études thématiques ont été conduites sur des points précis (foncier, tourisme, clusters…). Une nouvelle enquête est programmée avant l’été 2016.

Sans révolutionner les compétences des communautés, la loi NOTRe vient systématiser leurs compétences ou les élargir dans les trois champs suivants : -

 

l’aménagement économique et l’immobilier d’entreprises, la politique locale du commerce, la promotion du tourisme.

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L’aménagement économique : les intercommunalités en charge du parcours résidentiel des entreprises Tout en confiant au « bloc local » une compétence exclusive sur l’immobilier économique, la loi NOTRe est venue supprimer la possibilité de définir un intérêt communautaire au sein des compétences économiques obligatoires des différentes catégories d’intercommunalités à fiscalité propre. La conséquence de cette suppression est l’attribution d’une compétence économique pleine et entière aux métropoles, communautés urbaines, d’agglomération et de communes. Cette compétence porte sur l’ensemble des actions économiques mais notamment sur les zones d’activités et l’immobilier d’entreprises qui constituent le « cœur de métier » des intercommunalités. L’échéance prévue pour se mettre en conformité avec la loi est le 1er janvier 2017, date à laquelle toutes les métropoles et communautés de France seront les seules « autorités organisatrices » de l’aménagement économique du territoire. Elles auront ainsi une responsabilité pleine et entière sur l’ensemble du parcours résidentiel des entreprises et leur ancrage « physique » dans les territoires. La Cour des Comptes avait relevé dans un récent rapport le caractère inabouti des transferts aux intercommunalités en matière de développement économique. L’AdCF s’est appuyée sur cette évaluation, dont elle partageait les constats, pour souligner l’utilité de disposer d’une seule autorité en charge du foncier économique. Avec la montée en puissance des PLU intercommunaux (548 communautés et métropoles compétentes au 31 mars 2016), les communautés et métropoles seront demain les autorités les mieux placées pour opérer les arbitrages fonciers nécessaires à la localisation des activités économiques et commerciales, à l’habitat, aux grands services publics et urbains... L’unification de la responsabilité, sans distinction entre types de zones d’activités, va permettre de doter les territoires d’une représentation globale de leur offre immobilière et foncière. Cette évolution était d’autant plus attendue que d’importants enjeux de requalification de notre foncier économique et de notre immobilier d’entreprises vont se manifester dans les dix prochaines années. La France est marquée par un nombre élevé de zones vieillissantes, de conception démodée et peu attractive, souvent éloignées des cœurs urbains et mal desservies en équipements collectifs ou en transports. Les nouvelles attentes des entreprises et des salariés, la transformation accélérée de l’emploi, la recherche de lieux collaboratifs et conviviaux ... vont imposer de nouveaux standards, une plus forte mixité fonctionnelle. Ces transferts de zones d’activités invitent donc les intercommunalités à une réflexion plus globale sur la vocation et les fonctionnalités économiques de l'ensemble des sites d'activité : parcs d'activité, centres commerciaux, aéroports, ports, gares et autres hubs. Au-delà de l’attraction extérieure des entreprises (dont trop d’acteurs sur-estiment la portée au regard du flux des transferts d’établissements), la compétence des communautés en matière d’aménagement économique sera mobilisée sur l’accompagnement de la croissance des entreprises du territoire, leur besoin d’extension ou de relocalisation, de services associés... C’est la notion de « parcours résidentiel » qui doit ainsi prévaloir et qui doit être anticipée pour fluidifier le développement des entreprises en croissance. Au regard des dernières années, il sera fondamental de raccourcir le temps de réaction des collectivités publiques par rapport à des projets d’investissement d’entreprises. Cela nécessitera de : -

disposer d’une offre adaptable ou d’un gisement rapidement mobilisable, de requalifier des parcelles anciennes ou de vieilles « zones » en parcs ou « sites » d’activités de nouvelle génération, plus animés, mieux équipés, mieux desservis, mieux insérés dans les tissus urbains... de maîtriser les coûts de sortie des opérations et baisser les prix.

Selon une récente étude de France Stratégie (ex. commissariat général au Plan), les prix de l’immobilier et du foncier sont pour les entreprises françaises l’un des « intrants » les plus élevés, comparés à leurs concurrentes internationales (en termes de compétitivité-coût). Il est de fait fondamental d’agir sur le gisement foncier et immobilier pour maîtriser ces coûts, soulager les entreprises exposées à la concurrence et préserver l’attractivité de nos territoires pour les investissements mobiles. La responsabilité croissante des communautés en matière d’habitat (Programmes locaux de l’habitat, délégation des aides à la pierre...) permettra de penser ensemble la localisation des activités résidentielles et économiques tout en cherchant, dans les deux cas, à maîtriser les prix (l’immobilier économique coûte cher aux entreprises mais la cherté du logement rétroagit également sur les économies locales en comprimant le pouvoir d’achat disponible des ménages).

 

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La politique locale du commerce : l’urgence d’agir La loi NOTRe a élargi les compétences économiques des intercommunalités à « la politique locale du commerce et à des actions de soutien des activités artisanales et commerciales d’intérêt communautaire ». Cette nouvelle responsabilité, confiée de plein droit par le législateur, est issue d’une proposition de l’AdCF et de ses parlementaires associés. Elle répond à l’urgence de doter les communautés d’une capacité à agir sur un secteur en pleine recomposition. Le législateur a clairement souhaité préserver la capacité directe des communes à agir sur leur tissu commercial, notamment par des politiques de revitalisation et d’animation (commerces de centres villes par exemple). Au demeurant, la politique intercommunale du commerce doit permettre de limiter les concurrences excessives en matière d’implantation commerciale au sein des bassins de vie. Les espaces commerciaux et les infrastructures connexes de stationnement ou de desserte figurent parmi les principales causes de consommation foncière, et entrent en conflit avec d’autres destinations. La multiplication des ouvertures de centres commerciaux s’opère dans un contexte de transformation accélérée de l’offre et des pratiques de consommation (e-commerce, drive…). De nombreuses friches commerciales commencent à apparaître, ainsi que des « dents creuses » dans des artères fréquentées. La politique intercommunale du commerce ne doit pas avoir pour objectif de geler les recompositions en cours, mais de les ordonner et les rendre moins agressives. Elle doit également permettre de lutter contre certaines dérives spéculatives constatées sur les parcelles foncières et les localisations stratégiques. Le commerce suscite par ailleurs une part croissante des flux de déplacement et des fonctions logistiques. Il est logique qu’il soit pensé en lien étroit avec les documents intercommunaux de planification tels que les programmes locaux de l’habitat (PLH), plans de déplacements urbains (PDU), SCOT et PLU-I. En lien avec la loi NOTRe, d’autres textes (loi Pinel, loi Macron) donnent des capacités d’agir aux intercommunalités via les documents d’aménagement artisanal et commercial (DAAC), les CDAC et la CNAC (au sein de laquelle siègent des représentants de l’AdCF) ainsi que l’obligation de soumettre les autorisations d’ouverture des commerces le dimanche (au-delà de 5 dimanches) à l’avis favorable de la communauté. Même si la consommation des ménages demeure l’un des soutiens importants de la croissance au niveau national et dans les bassins de vie, celle-ci n’est pas indéfiniment extensible et ne saurait répondre à la crise de l’emploi. Les collectivités gagneront à être attentives : -

au pouvoir d’achat disponible de leurs habitants (« reste à vivre » une fois retirée les dépenses contraintes de logement, de transport, d’énergie… ), à leur propension à consommer (par rapport au taux d’épargne), à la localisation de leurs achats (risques d’éviction au profit de grands centres commerciaux extérieurs, impacts du commerce à distance ou en ligne…), au type des consommations ou des enseignes qui peuvent, avec plus ou moins d’intensité, capter une part croissante des marges et les exporter hors du territoire, voire dans des paradis fiscaux (cf. les pratiques d’optimisation fiscale agressive et de prédation des marges dénoncées par la Commission européenne par des enseignes telles que MacDonald’s, Starbucks…).

Dans le processus de circulation des richesses entre territoires, les pratiques de consommation des ménages mais aussi la structure de leurs consommations peuvent se traduire par des taux d’évasion de richesses plus ou moins marqués. Une politique locale du commerce se doit d’être attentive à ces phénomènes et mieux en mesurer les impacts. L’AdCF réalise une note sur ce sujet qui sera prochainement disponible à destination de ses adhérents sur son site.

 

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La promotion touristique : s’inscrire dans les stratégies de destination Déjà fortement investie par l’intercommunalité, la politique du tourisme est un sujet complexe qui a fait l’objet de très longs débats au Parlement. La loi NOTRe a renoncé à en faire une compétence exclusive de tel ou tel niveau de collectivité. Elle a maintenu la capacité des départements à intervenir (notamment via les comités départementaux) et s’est refusée à désigner un « chef de file ». Elle a de fait renvoyé aux collectivités le soin de se coordonner, dans le cadre des CTAP et des conventions territoriales d’exercice concerté des compétences (CTEC) prévues par la loi MAPTAM. Représentant plus de 7% du PIB national, le tourisme est devenu un levier à fort enjeu pour les économies locales, régionales et nationale. Même si la France reste l’une des premières destinations mondiales en termes de fréquentation, le défi est d’en optimiser les retombées économiques au regard d’un effort d’investissement donné. Certaines grandes destinations touristiques mondiales ont connu des périodes de restructuration de leur offre quand elles se sont aperçues que les coûts des infrastructures d’accueil excédaient les retombées économiques effectives. A la suite des Assises nationales du Tourisme, organisées en 2013, une volonté s’est exprimée pour rationaliser les interventions et stratégies et établir une politique coordonnée des « destinations », en premier lieu pour capter une clientèle internationale et le potentiel des pays émergents. La loi NOTRe est venue encourager la clarification des compétences au sein du « bloc local » en confiant de plein droit aux intercommunalités la compétence promotion du tourisme, qui emporte le transfert des offices. Ce transfert de plein droit (contesté dans les secteurs les plus hautement touristiques) est de nature à faciliter des stratégies coordonnées et une pleine intégration du tourisme dans les compétences économiques des communautés. Certaines résistances s’expriment pour maintenir le tourisme dans une compétence spécifique et une planification à part, distincte du SRDE-II. Dans la pratique, comme le montrent les résultats d’une enquête conduite en 2015 par l’AdCF, la compétence tourisme est déjà très largement confiée à l’intercommunalité. Nombre d’offices sont déjà intercommunaux. Il demeure que les sites les plus attractifs (littoraux, stations de montagne…) sont en retard sur ce mouvement général et que la « profondeur de champ » de la compétence tourisme nécessite des précisions. Une note de l’AdCF rappelle à cet égard les subtilités de la loi qui ne confie de plein droit que la promotion du tourisme aux intercommunalités. Certains équipements à très forte dimension touristique peuvent demeurer par exemple municipaux. Le transfert de la compétence de promotion et les offices n’emporte pas mécaniquement le transfert de la taxe de séjour qui constitue l’une des principales recettes issues des fréquentations touristiques. Peu contestable sur le fond, le transfert de la compétence « promotion du tourisme » achève un processus historique et un long mouvement d’affirmation des stratégies touristiques intercommunales. Celles-ci reposent néanmoins sur une action de « mise en tourisme » des territoires qui rebondit sur des compétences connexes telles que les transports, l’animation culturelle et sportive, les équipements de loisirs, les centres d’affaires… Plus qu’un tourisme, il est devenu nécessaire d’évoquer « les » tourismes tant sont multiples les motivations et durées de voyages (court/long séjour, affaires, mémoire, sportif, culturel…). La prise de compétence des communautés intervient dans une période de forte mutation de l’économie du tourisme, avec l’émergence des plateformes numériques, les clientèles provenant des pays émergents, la différenciation des attentes. Réputée, l’attractivité du site France demeure exposée à des risques de déqualification de certaines infrastructures héritées des grands plans des années 1960-70. Pressions foncières, dégradations des milieux, changements climatiques… peuvent affecter certains hauts lieux d’autres fois. S’il est important de préserver, voire amplifier, le rayonnement international de la France dans de nombreux segments touristiques (grands congrès et salons, fashions weeks, évènements internationaux, parcs d’attraction…, il est également utile de rappeler que 80% des territoires français ne se positionnent pas dans des stratégies d’attractivité internationale mais cherchent à capter des « clientèles » régionales ou nationales, via des courts séjours, des résidences secondaires, des évènements occasionnels (festivals, rencontres sportives…). La plupart des communautés de France restent réalistes à ce sujet et proposent des stratégies « domestiques », centrées sur l’optimisation des offres à proposer à une clientèle domestique (voyages familiaux, séminaires d’entreprises, groupes, produits locaux…).

 

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L’intercommunalité peut permettre de structurer une offre complète, cohérente, en jouant sur de nombreux leviers connexes : mobilités, habitat, culture… Au demeurant, les stratégies touristiques des communautés doivent s’inscrire dans des véritables stratégies de destination qu’il revient aux régions d’organiser en jouant sur les marques les plus attractives. Marques qui pourront être très locales (ex. : Baie du Mont Saint Michel), départementales (Dordogne, Aveyron, Vendée…) ou régionales (Alsace, Bretagne, Corse…). La très forte pression concurrentielle du tourisme doit conduire à l’affirmation de stratégies coordonnées entre acteurs publics. Outre l’effort de notoriété, ces stratégies de destination doivent mettre en valeur des produits locaux (AOC), des typicités, des activités mais également une qualité d’accueil et un rapport qualité-prix satisfaisant. C’est sur ces derniers points que des progrès importants doivent être accomplis même si la France a la chance de disposer de grands opérateurs de rang mondial (Accor, Pierre et Vacances…) dans son « industrie touristique ». Pour accompagner les communautés dans le transfert de la compétence tourisme et la délimitation du périmètre des équipements et outils concernés, l’AdCF a réalisé une note juridique à cet effet. Pour en savoir plus : Sur l’aménagement économique :

Etude « Regard sur les stratégies et actions économiques locales », montée en puissance et diversification des compétences intercommunales réalisée par l’AdCF et la Caisse des dépôts, mars 2015. Disponible sur le site de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=2479&num_thematique=4

FOCUS : Développement économique local : un rôle d'aménageur en évolution. La cohésion sociale au coeur du projet de territoire Intercommunalités n°195, décembre 2014. Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/files/MAG-INTERCO/ADCF-Interco195-141224Web.pdf



Rapport sur les finances publiques locales, Cour des Comptes, octobre 2015 Disponible au lien suivant : https://www.ccomptes.fr/Accueil/Publications/Publications/Les-financespubliques-locales3



Communautés et zones d'activité : Les contours de la compétence économique, le transfert des zones d'activité économique (méthodes de valorisation), note de l’AdCF réalisée par FCL Gérer la Cité, janvier 2016. Disponible sur le site internet de l’AdCF en accès réservé à ses adhérents, au lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=2969&num_thematique=4



Zones d'activités économiques en périphérie : les leviers pour la requalification, collection « Connaissance », CEREMA, janvier 2015. Disponible sur le site de l’AdcF au lien suivant : http://www.adcf.org/files/co18005314-zae-etudecerema.pdf



 

Quelle France dans dix ans ? Investir dans le redressement économique, rapport thématique, France Stratégie, juin 2014.   Disponible sur : http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/archives/Partie-B-Investirredressement-economique-24-06-final.pdf  

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Sur la compétence tourisme : •

L’intercommunalité et l’exercice de la compétence «tourisme» dans le cadre de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République Enjeux et mise en oeuvre de la compétence communautaire, Note réalisée par le Cabinet DChristiany pour l’AdCF, avril 2016 Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant http://www.adcf.org/contenuarticle?num_article=3132&num_thematique=4 (réservé aux adhérents).



Tourisme : un levier central du développement économique, retour d’enquête sur l’action des communautés en matière de tourisme, AdCF Direct (lettre hebdomadaire disponible publié sur le site de l’AdCF), 13 mars 2016. Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenuarticle?num_article=3036&num_thematique=4    

 

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ANNEXES – Recommandations pour des stratégies économiques locales

 

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Fiche 1 : Faire figurer le développement économique et les politiques d’emploi au cœur du projet de territoire Les intercommunalités de tout statut (métropoles, CU, CA, CC) sont confrontées depuis plusieurs années à la multiplication des documents sectoriels spécifiques aux différentes politiques publiques. Répondant à des obligations procédurales, ces documents peuvent conduire, s’il n’y est pris garde à une segmentation des politiques et des organisations. Dans ces circonstances, le projet de territoire doit demeurer le fil conducteur des stratégies intercommunales et remettre les documents sectoriels, fixés par le législateur, à son service. Le projet de territoire doit ainsi concrétiser la décentralisation, en évitant le risque de pilotage à distance des territoires par les procédures normées. Le projet de territoire doit également être le garant de la transversalité des stratégies. Compétence obligatoire des intercommunalités, le développement économique est l’un des rares domaines qui ne soit pas régi par une procédure normative imposée à leur échelle. Ceci laisse d’importantes marges de manoeuvre aux acteurs locaux pour définir les composantes de leurs stratégies économiques, leur formalisation dans des supports écrits, les acteurs associés à leur élaboration. Il est logique qu’une extrême diversité des pratiques résulte de cette grande liberté. Sans formalisme excessif, il est néanmoins souhaitable de placer le développement économique au cœur du projet de territoire et d’en faire un thème fédérateur. Dans de très nombreux territoires, l’action économique ne fait pas l’objet d’une stratégie explicite, accompagnée d’objectifs et de moyens précis. Il est pourtant toujours utile de se doter d’un document-cadre, le cas échéant très simplifié, qui pourra servir de référence pour mettre en cohérence des initiatives, effectuer des arbitrages, évaluer les effets de l’action publique. Pour rendre l’évaluation possible, il est en effet impératif de se doter d’indicateurs simples et clairs qui permettront de juger de l’efficacité des dispositifs mis en place.

 

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Fiche 2 : Organiser la transversalité au sein des exécutifs et des directions générales Les responsabilités complètes que les intercommunalités vont exercer sur le « parcours résidentiel » des entreprises au sein du territoire doivent être mises en regard de leur affirmation concomitante dans les politiques de l’habitat (PLH, délégations des aides à la pierre…), de l’urbanisme (SCOT, PLU-I), des mobilités (PDU) et des stratégies foncières. Ces évolutions institutionnelles vont permettre de disposer de leviers d’action cohérents sur les arbitrages fonciers et la localisation réfléchie des activités, en remettant en cause le zonage mono-fonctionnel des dernières décennies. Il est à ce titre fondamental de renforcer la transversalité des politiques publiques à travers des organisations adaptées. Tant au sein des exécutifs communautaires que des directions générales, il est important de veiller à organiser des échanges et coordinations constants entre responsables des politiques économiques, des politiques de l’habitat et des politiques de planification (urbanisme, transport). Une politique foncière volontariste permettra de fédérer des acteurs confrontés aux mêmes contraintes de coût des opérations. Les développeurs économiques comme les porteurs des programmes locaux de l’habitat ont besoin de maîtriser les prix et combattre les dérives spéculatives, tout en renforçant leur pouvoir de dialogue avec la promotion privée. La coopération entre services sur les thèmes économie-logement-urbanisme permet également d’offrir un dialogue structuré avec les entreprises sur leurs thèmes de préoccupation majeurs. Des coopérations transversales gagnent, par ailleurs, à être organisées avec les services financiers de la communauté pour se doter d’une lecture partagée des évolutions du tissu économique et de ses contributions à la fiscalité locale (cf. fiche n°5). Ces coopérations permettent de détecter d’éventuelles anomalies, de prévenir les risques contentieux (cf. évolution de la cotisation minimale de CFE) ou les tensions avec le monde économique. Des coopérations étroites sont susceptibles d’être nouées dans les prochaines années avec les acteurs en charge de l’environnement à travers le développement de projets d’économie circulaire (réemploi, valorisation matière…) ou les politiques d’efficacité énergétique (dont il faut optimiser les retombées locales au profit des artisans ou entreprises du bâtiment). Les relations avec les élus et services en charge des transports collectifs et des déplacements (dans les plus grandes communautés) sont nécessaires pour veiller à une meilleure desserte des principaux sites d’activité du territoire, réfléchir aux horaires adaptés, aux contraintes logistiques, aux infrastructures… Il est en tout état de cause nécessaire de se rappeler l’importance du financement apporté par les entreprises aux politiques de mobilité, et tenir compte de leur légitime demande de services en retour. Les élus et cadres en charge du développement économique doivent également réfléchir à des collaborations transversales avec leurs homologues en charge des questions de cohésion sociale (action sociale intercommunale, politique de la ville…), tant pour promouvoir des politiques d’insertion par l’économique, des activités entrant dans le champ de l’économie sociale ou solidaire (ESS) que pour répondre à des besoins sociaux des salariés (cf. le développement des crèches inter-entreprises sur les sites d’activités). Les volets économiques des contrats de ville sont traditionnellement peu développés, en raison d’une géographie trop resserrée sur les quartiers ciblés par les contrats. Le nouveau cadre intercommunal de ces contrats et leur pilotage par les communautés sont des opportunités pour réfléchir avec les services économiques aux questions d’accès à l’emploi (en dehors des quartiers), de revitalisation commerciale, d’entrepreneuriat, de qualification…

 

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Fiche 3 : Connaître son tissu d’entreprises et les moteurs du développement économique local De nombreux diagnostics locaux reposent sur des photographies statiques des forces et faiblesses d’un territoire sans en saisir les recompositions à l’œuvre et les éléments les plus dynamiques. Toute stratégie économique locale se doit de disposer d’une bonne lecture de son tissu d’entreprises, de la répartition de l’emploi entre catégories d’entreprises et des activités les plus « motrices » du territoire. Plusieurs modes d’approche des tissus économiques sont devenus aujourd’hui insuffisants, voire inopérants : -

d’une part la dichotomie traditionnelle entre secteurs primaire, secondaire et tertiaire.

Les activités agricoles, industrielles et de services sont aujourd’hui de plus en plus imbriquées dans des chaînes de valeurs composites qui associent de multiples compétences. L’industrie comme l’agriculture exercent de forts effets d’entraînement sur des activités de services, en amont comme en aval de la production. -

D’autre part, l’opposition binaire entre PME et grandes entreprises :

Depuis la loi de modernisation de l’économie (LME), la France a adopté la nomenclature européenne qui distingue les très petites entreprises, les PME, les entreprises de taille intermédiaire (ETI de 250 à 5000 salariés) et les grandes entreprises. Outre les considérations de seuils, les organismes statistiques s’efforcent d’identifier les « unités légales » et les sociétés correspondant à une véritable réalité économique (activité propre). Le retraitement des données est devenu nécessaire pour corriger des effets statistiques trompeurs, comme la création du statut d’auto-entrepreneur a pu par exemple faire penser à une explosion de la création d’entreprises. La décomposition d’une même entreprise en de multiples sociétés juridiques peut également fausser les analyses. Il est également fondamental de prendre conscience des liens financiers de plus en plus complexes qui relient les entreprises entre elles et qui estompent la dichotomie PME-Grands groupes. L’INSEE a montré que près de 70% de la valeur ajoutée et des salariés du secteur privé marchand relevait désormais de groupes. Les « unités légales » sont ainsi insérées dans des grands groupes ou des groupes de PME. Il est important de bien comprendre le rapport inversement proportionnel entre le nombre des entreprises d’une catégorie donnée, les salariés qui en relèvent ainsi que leur contribution à la valeur ajoutée, à l’export ou aux dépenses intérieures de recherche et développement. Comme le montre le tableau ci-dessous réalisé par l’INSEE à partir de données 2007 (et qu’il faudrait actualiser), les micro-entreprises représentaient 94% des entreprises, mais seulement 22% des salariés, 19% de la valeur ajoutée et une part marginale de l’investissement productif (7%), de l’export (3%) ou de la R&D (1%). Les PME (non micro-entreprises) ne sont plus que 6% des entreprises mais représentent 30% des salariés et 25% de la valeur ajoutée. Elles pèsent peu, en revanche, dans l’investissement productif (8%), l’export (13%) et la R&D (11%). Il est frappant de mesurer dans ce tableau combien l’investissement productif reste concentré dans les grands groupes, et notamment les plus capitalistiques qui rassemblent 65% des immobilisations pour seulement 27% des salariés. De même, les grands groupes assurent l’essentiel de la dépense de R&D (62% en 2007) et plus de la moitié du chiffre d’affaires à l’export, pour 34% de la valeur ajoutée. Les ETI complètent ces chiffres, en occupant une part significative à l’export (31%).

 

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Au regard des tissus d’entreprises et de leur structure, d’importantes différences caractérisent nos bassins d’emploi. Alors que certains sont marqués par une prépondérance de l’emploi dans des établissements liés à des grands groupes, d’autres disposent d’un tissu composé essentiellement de PME et de micro-entreprises. En toute logique, la gouvernance économique du territoire, les relations entreprises-collectivités et les stratégies de développement devront être adaptées à ces fortes différenciations. Il est en tout état de cause utile d’analyser quelles sont les entreprises les plus « motrices » de l’économie locale, aussi bien via leurs créations nettes d’emploi, la croissance de leur valeur ajoutée que leurs consommations intermédiaires au sein du territoire (achats de fournitures ou de composants, investissements, services…). Le pouvoir de commandement des grands groupes sur les chaînes de valeur demeure extrêmement élevé, tant via les effets d’entraînement sur les activités « amont » (conception, recherche, financement…) que sur les fonctions « aval » (logistique, transport, commercialisation…). 1. L’analyse par l’origine des revenus du territoire Les travaux de l’économiste Laurent Davezies ont popularisé l’analyse des économies locales à travers le prisme de l’origine et de la nature des revenus mis en circulation au sein d’un territoire. Laurent Davezies a montré que les revenus issus des activités productives, exposées notamment à une concurrence externe, ne représentaient qu’une part minoritaire, et parfois marginale, des revenus « entrants » au sein d’un bassin d’emploi. Le poids des salaires publics, des prestations sociales, des pensions de retraite, des activités touristiques… excède de très loin les revenus d’origine productive. Les revenus de certains territoires peuvent également fortement dépendre de salaires importés via les migrations pendulaires des actifs. La décomposition de l’origine des revenus permet de mieux cerner le « profil » et les « moteurs du développement » des bassins d’emplois et des intercommunalités. Laurent Davezies avait proposé une analyse de ces profils dans le cadre de son étude réalisée en 2010 pour l’AdCF et l’Institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts (CDC) sur les impacts territoriaux de la crise. La récente étude sur le profil de développement des agglomérations françaises réalisée par le cabinet OPC et publiée par l’AdCF et la CDC s’inspire d’une méthode similaire et la complète par d’autres regards. Ces différents travaux mettent en évidence de très fortes spécificités locales dont les stratégies de développement doivent tenir compte.

 

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Pour en savoir plus :

La Crise et nos territoires : premiers impacts, rapport préparé par Laurent Davezies pour l’AdCF, la Caisse des dépôts et l’Institut CDC pour la Recherche, octobre 2010. Disponible sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenuarticle?num_article=384&num_thematique=4

    Le Profil de développement des agglomérations et métropoles françaises, étude réalisée par le Cabinet OPC pour l’AdCF et la Caisse des dépôts, mai 2016. Une présentation et un lien de téléchargement vers l’étude (réservé aux adhérents) sont à retrouver sur le site de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenuarticle?num_article=3071&num_thematique=4

  2. Mesurer les performances intrinsèques du territoire : « l’effet local » Au-delà de la question de son poids relatif dans l’économie locale, le tissu productif d’un territoire peut également être étudié ou analysé à l’aune de ses éventuelles forces ou vulnérabilités. En utilisant les nomenclatures les plus fines, il est ainsi possible de mesurer le poids des activités du territoire situées dans des secteurs considérés en déclin au niveau national. Sans être prédictive, cette méthode d’analyse met en lumière des fragilités potentielles. Il demeure que les spécialisations d’un territoire, qu’elles soient orientées défavorablement ou au contraire plutôt porteuses, n’expliquent pas de manière mécanique son développement. Des travaux conduits à la demande de l’AdCF et de la CDC par les chercheurs Nadine Levratto et Denis Carré ont permis d’étudier les tissus productifs locaux (à l’échelle des zones d’emploi INSEE) en isolant un « effet local » qui ne pouvait être expliqué par les spécialisations sectorielles (« effet de portefeuille d’activités »). Cette méthode dite d’« analyse structurelle-résiduelle » a pour intérêt de « neutraliser » les effets directs imputables aux spécialisations économiques. Elle fait ressurgir des territoires qui se comportent mieux que ce que l’on pouvait logiquement attendre de leur « portefeuille d’activités ». A l’inverse, d’autres se comportent moins bien qu’attendu (sous-performance). Ces différences entre résultats constatés et résultats attendus s’expliquent essentiellement par la qualité de la gouvernance économique locale et du « climat des affaires ». Des monographies réalisées sur six bassins d’emploi, à partir de séminaires décentralisés, confirment l’importance de cet « effet local », même s’il s’est en partie estompé dans la période de récession récente. Le degré d’autonomie de décision des entreprises et établissements d’un territoire est également un critère important à prendre en considération. De ce degré d’autonomie peut dépendre la capacité des dirigeants d’entreprises ou d’établissements à s’impliquer dans la vie économique locale, à décider de leurs achats externes, de leurs politiques d’investissement et de recrutement. A ce sujet, le puissant mouvement de filialisation des entreprises françaises et de leur intégration dans des groupes interroge l’autonomie des sites, aussi bien dans les domaines des activités de production qu’en matière de commerce ou d’agro-alimentaire. Ce mouvement présente également des incidences très nettes sur la localisation finale de la valeur ajoutée et des bénéfices. L’AdCF souligne depuis plusieurs années la déformation de la valeur ajoutée au profit des sièges et des holdings financières. Cette déformation tient à des méthodes comptables et à des recherches d’optimisation

 

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fiscale qui sont aujourd’hui au coeur des préoccupations de l’OCDE et de la Commission européenne. Au sein des groupes, les liens de subordination financière entre entités permettent, par des mécanismes de facturation et les prix de cession (achats ou ventes entre entités d’un même groupe, redevances pour usage de brevets ou de marques), de minorer comptablement les bénéfices et la valeur ajoutée dégagés sur certains sites. Lorsque ces derniers sont constitués en filiales (ce qui est fréquemment le cas), ces pratiques ont un impact fiscal sur la cotisation à la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). C’est cette raison qui a conduit l’AdCF à plaider pour une consolidation fiscale des groupes au titre de la CVAE pour améliorer la répartition des produits fiscaux entre leurs sites d’implantation. Elle a pu montrer, en utilisant les données d’un rapport remis par des missions d’inspection au gouvernement, que la consolidation fiscale de la CVAE aurait des retombées bénéfiques pour les territoires de production. Les initiatives prises au niveau de l’OCDE et de l’Union européenne pour empêcher la relocalisation des bénéfices et de la valeur ajoutée dans des « paradis fiscaux » sont extrêmement importantes à ce titre pour combattre les formes les plus agressives d’optimisation. Ces dernières tendent à fausser les réalités économiques et à minorer artificiellement la croissance de certains territoires. Elles déforment également la réalité des échanges internationaux. Outre certains grands groupes industriels, ce sont des enseignes commerciales telles que Mac Donald ou Starbucks qui pratiquent ces schémas d’optimisation agressifs. En imposant à leurs franchisés des redevances très élevées, ces célèbres enseignes captent et délocalisent une part croissante des bénéfices et des marges. On notera que ce modèle est également pratiqué à très grande échelle par les grandes plates-formes numériques … qui disposent d’un fort pouvoir de contrôle sur l’accès au marché final. Cette financiarisation excessive et ce mouvement de concentration d’une part importante de l’économie sont actuellement sources de préoccupations pour les institutions internationales et les Etats. Elles contribuent à une accumulation de liquidités et à un déficit d’investissements productifs, formant des bulles spéculatives. A l’échelle des territoires, il est naturellement très difficile d’agir sur de tels mouvements de fond mais il est utile d’en avoir conscience et de bien connaître les modèles économiques des entreprises ou des marques proposant de s’implanter dans son territoire. Le juste retour fiscal attendu par les collectivités de plateformes telles que AirBnB est l’une des premières réactions organisées des collectivités. Les mouvements précédemment décrits expliquent une part de la surconcentration de la valeur ajoutée en Ile-de-France. Représentant 20% de la population française, l’Ile-de-France pèse désormais plus de 30% du PIB national. L’écart de PIB s’accroît même avec les autres régions depuis plusieurs années, sans que cela soit le cas des revenus par habitant. L’Ile-de-France concentre certes des emplois très qualifiés et très productifs mais sans que cela ne puisse expliquer l’importance des écarts. Le modèle francilien est même en difficulté, puisque l’on parle à son sujet de « croissance sans développement ». L’Ile-de-France crée insuffisamment d’emplois, notamment pour faire face à sa croissance démographique et à ses difficultés sociales. La croissance de son PIB est pour une part accélérée par la remontée de la valeur ajoutée au sein des sièges et des filiales financières, en vertu du mécanisme décrit plus haut. En creux de cette « croissance sans développement », d’autres territoires connaissent un « développement sans croissance ». La création d’emploi est soutenue mais la valeur ajoutée stagne. Ces déformations des réalités économiques posent un véritable problème. Les stratégies de développement économique local doivent être ainsi attentives à la relocalisation de la valeur ajoutée et espérer fortement des effets bénéfiques des nouvelles règles que la communauté internationale entend imposer.

 

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Pour en savoir plus :

Les Entreprises du secteur compétitif dans les territoires. Les déterminants de la croissance, étude de Denis Carré et Nadine Levratto pour l’AdCF et l’Institut Caisse des Dépôts pour la Recherche, juin 2013 Une présentation et un lien de téléchargement vers l’étude sont à retrouver sur le site de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=1617&num_thematique=4

Territoires et entreprises : Initiatives pour des bassins d’emploi mieux organisés, étude réalisée par l’AdCF, janvier 2016 Disponible sur le site internet de l’AdCF à partir du lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=2934&num_thematique=4

 

 

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Fiche 4 : Renforcer les outils de dialogue et de partenariat avec le monde économique Les intercommunalités et métropoles ont multiplié depuis de nombreuses années les outils de dialogue avec les partenaires économiques. Un travail d’évaluation de leur fonctionnement serait aujourd’hui à conduire pour en montrer la diversité et en retirer les enseignements. Il pourrait être proposé également une analyse des modalités d’animation de ces outils pour identifier les bonnes pratiques. Plusieurs types d’outils servent aujourd’hui à structurer ce dialogue : -

la médiation institutionnelle des organismes consulaires et de leurs antennes locales, les collèges socio-économiques des conseils de développement (dont la loi NOTRe étend l’obligation de création à partir du seuil de 20 000 habitants dans les intercommunalités) les clubs d’entreprises, les associations de parcs d’activités, les agences de développement, les maisons de l’emploi, les réseaux d’accompagnement de la création d’entreprises…

Ces différents vecteurs d’implication des entreprises dans la vie économique locale doivent être consolidés. Il est néanmoins utile de savoir si la collectivité privilégie une représentation institutionnelle des milieux économiques, dans une logique de concertation, ou souhaite co-construire des stratégies voire engager des actions concrètes. Il est bien clair qu’une intercommunalité, a fortiori une métropole, ne pourra établir un contact direct et constant avec l’ensemble des dirigeants d’entreprises de son territoire. Des cibles particulières doivent être identifiées et des formes d’intermédiation organisées. Il est à cet égard utile de ne pas être enfermé dans un quelconque monopole de la représentation. Il est en outre opportun d’adapter les outils à la diversité des tissus économiques. Le dialogue avec les artisans, les commerçants, les agriculteurs, les PME à fort potentiel ou start up, les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et établissements de grands groupes… ne pourront passer par les mêmes canaux. La médiation des organismes consulaires sera toujours bénéfique pour toucher le très grand nombre de leurs ressortissants. Elle ne saurait pour autant être exclusive d’autres formes de dialogue direct avec les entreprises plus importantes. Pour structurer le dialogue avec les PME à potentiel, les clubs d’entreprises forment souvent une excellente interface. Ils peuvent être territorialisés ou thématiques, confédérés à l’échelle du territoire ou non, liés à la CCI ou non… Les associations de parcs d’activité ont le double mérite d’animer la vie économique d’un site, mais également d’offrir à la collectivité de précieux relais d’information (dans les deux sens). Les intercommunalités gagneraient à encourager leur création pour développer de nouvelles formes d’espaces économiques, plus animés et conviviaux. Les grosses PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) constituent dans bien des cas les fleurons économiques des territoires et leurs meilleurs ambassadeurs. Il est fondamental de tisser des liens forts avec ces entreprises souvent « motrices », qui incarnent un territoire et lui donnent une signature. Ces entreprises doivent être spécifiquement soignées par des échanges bilatéraux avec les exécutifs. La recherche de liens bilatéraux sera également nécessaire avec les grands groupes et leurs établissements. Les études conduites à ce sujet montrent néanmoins la difficulté d’impliquer des directeurs qui, dans beaucoup de cas, ne passeront qu’un temps compté dans le territoire, leur carrière pouvant les amener ailleurs. D’autres liens seront sans doute à nouer avec ces établissements, à travers les fonctions RH par exemple pour échanger sur leurs difficultés de recrutement ou leurs besoins prévisionnels, mais aussi à travers les fonctions achat pour mieux connaître leurs exigences et leurs contraintes de coûts… Des « clubs » de DRH ou de directeurs des achats peuvent ainsi être initiés au sein des territoires.

 

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De nombreuses intercommunalités prennent soin de procéder, à un rythme régulier, à des visites d’entreprises. Elus référents et développeurs s’immergent ainsi dans la vie concrète des firmes. Les agences de développement, les maisons de l’emploi... sont des outils qui associent très souvent des dirigeants des entreprises, voire des représentants des salariés, à leur gouvernance. Ce pilotage public-privé permet d’instaurer une culture commune du développement économique local et un climat coopératif. Les organisations territoriales les plus avancées parviennent à regrouper l’ensemble des acteurs dans des lieux partagés et collaboratifs, sous forme de Maison de l’entreprise ou de GIP regroupant les services économiques de la communauté voire son agence, les organisations patronales, la chambre de commerce...

 

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Fiche 5 : Effectuer un suivi attentif du rendement fiscal des activités économiques

Le poids des cotisations des entreprises dans les ressources des collectivités, et du bloc local en particulier, est absolument décisif. Il instaure un lien très étroit entre le tissu économique et son territoire d’implantation. Ce lien est à la fois garant d’une attention importante des élus au développement de leur tissu économique mais il peut également susciter des épisodes de tension en cas de concertation insuffisante ou de pression fiscale excessive. Ces tensions peuvent dégrader les relations entreprises-territoires s’il n’y est pris garde. Elles peuvent parfois provenir des défauts intrinsèques d’un impôt, des effets d’une réforme fiscale nationale ou du choix d’instituer un nouvel impôt voire d’en accroître le taux. L’épisode des augmentations de la cotisation minimale de la cotisation foncière des entreprises (CFE), en 2012-2013, a suscité de vives réactions. C’est parfois l’institution du versement transport, ou la majoration des taux, qui cristallise des mécontentements. Des critiques s’expriment sur le cumul de la TEOM et de la redevance spéciale, mais aussi au sujet de la taxe sur la publicité extérieure (TLPE). La réforme des valeurs locatives, engagée sur les locaux commerciaux, a par construction pour effet de susciter des « gagnants » et des « perdants », même en cas de produit fiscal global constant. Même si elle vise à rapprocher la fiscalité des réalités économiques, cette réforme suscitera surtout l’expression négative des « perdants ». Il est important d’en lisser les effets et de bien vérifier son équité. Il faudra surtout accompagner d’un effort de pédagogie important. Dans le dialogue avec les entreprises, il est opportun de disposer d’une analyse objective des cotisations provenant des entreprises tout en connaissant bien les dégrèvements dont elles bénéficient sur certains impôts. 1. La CVAE et la CET Les principaux impôts économiques directs locaux, créés en remplacement de la taxe professionnelle, sont la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la cotisation foncière des entreprises (CFE). La CVAE est partagée avec les régions et départements. Elle est à taux fixe défini au niveau national. Toutes les entreprises de plus de 152 000 euros de chiffre d’affaires rapportent une cotisation de CVAE aux collectivités correspondant à 1,5% de la valeur ajoutée déclarée. Au demeurant, leur taux réel d’imposition est progressif en fonction de leur chiffre d’affaire. L’Etat se substitue aux entreprises, via des dégrèvements, pour acquitter la cotisation. Un barème d’imposition progressif dépend du chiffre d’affaires. C’est le « dégrèvement barémique ». L’autre impôt direct fondamental est la cotisation foncière des entreprises, intégralement acquittée au « bloc communal » et aux seules intercommunalités en cas de fiscalité professionnelle unifiée (FPU). Les collectivités ont un pouvoir de fixation des taux, mais soumis à un principe de liaison avec les autres impôts directs. CVAE et CFE sont réunies dans la notion de Contribution économique territoriale (CET). Cette appellation supplémentaire a le défaut de faire croire à l’existence d’un troisième impôt et cela complique les explications. Mais la CET n’est que l’addition des deux premières cotisations. La notion de CET a été créée exclusivement pour garantir aux entreprises un plafonnement global de leurs cotisations cumulées de CVAE et de CFE en fonction de leur valeur ajoutée. Il aurait été utile de faire plus simple. 2. Les autres contributions directes La fiscalité directe issue des entreprises ne s’arrête pas à la CVAE et à la CET. Les entreprises contribuent pour une part importante à un impôt souvent présenté à tort comme un impôt « ménages » : la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Plus de 25% des produits de cette taxe proviennent des entreprises en moyenne. Ce pourcentage peut monter à plus de 60% dans des territoires où se concentrent des grands sites d’activité. La TFPB est massivement prélevée par les communes et les départements. Elle est soumise à des taux votés localement. Les intercommunalités disposent d’un pouvoir de taux additionnel depuis la réforme de la taxe professionnelle. Peu ont à ce jour procédé à une activation de ce taux intercommunal. Les produits de TFPB prélevés par les communautés sont encore marginaux. On constate néanmoins de nouvelles pratiques qui consistent à compenser des transferts de charges aux communautés par l’octroi d’une fraction de taux de la TFPB et des produits fiscaux afférents (Cf.

 

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Communauté du bassin de Pompey). A la majorité des deux tiers des communes représentant la moitié de la population (ou l’inverse), les communes peuvent décider d’unifier le taux de la TFPB à l’échelle intercommunale, sur le modèle emprunté dans les années 2000 pour unifier la taxe professionnelle. Massivement déployée sur le territoire national, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) est également acquittée par les entreprises utilisatrices du service, c’est-à-dire la plupart. La redevance spéciale doit également être instituée même si les territoires sont en retard à ce sujet. TFPB et TEOM sont des impôts directs qui concernent à la fois les particuliers et les entreprises. D’autres recettes fiscales proviennent exclusivement des acteurs économiques et relèvent d’une institution facultative. 3. Le versement transport Dans les intercommunalités compétentes en matière de transports publics (autorités organisatrices de la mobilité durable), leur est donnée la possibilité d’instituer un versement transports auprès des employeurs. Outre les entreprises, les administrations, les hôpitaux et les associations contribuent à ce versement. Son assiette repose sur la masse salariale. Seules les entités de 11 salariés et plus acquittent le versement transport depuis la récente remontée du seuil qui a privé les autorités organisatrices d’une part de leurs recettes. Cette règle suscite un effet de seuil qui est parfois critiqué et qui peut susciter des distorsions de concurrence. Le versement transport (ou VT) est soumis à des taux plafonnés au niveau national. Les taux plafonds dépendent du poids démographique de la collectivité et vont de 0,55% à 2% (hors Île-de-France). Ils peuvent être majorés pour financer des transports collectifs en site propre (TCSP) ou lorsque le territoire comprend une ou plusieurs communes touristiques. Le versement transport est la principale ressource qui finance les réseaux de transports publics locaux (43% du financement hors Île-de-France), à côté des recettes tarifaires (abonnements, billets – 16%) et du budget général des collectivités, de plus en plus sollicité (29%). Il est faux de penser que seules les entreprises financent les réseaux de transport. D’une part les usagers et les budgets généraux (donc les autres contribuables) contribuent au financement. D’autre part, ce sont tous les employeurs de plus de 11 salariés qui contribuent au VT (services publics, associations, fondations, collectivités...). Les grands employeurs publics, comme les hôpitaux, sont souvent les principaux contributeurs à l’échelle de certaines agglomérations. Globalement, les entreprises contribuent à hauteur de 60% du produit du VT et les employeurs publics pour 40%. Le versement transport n’en reste pas moins un sujet sensible. C’est un impôt affecté. Dans de nombreux territoires, les entreprises constatent que peu de salariés utilisent le transport collectif. Ils remettent en cause son assiette ou souhaitent que de véritables contreparties soient offertes en matière de service rendu, notamment pour mieux desservir les sites d’activités. Les plans de déplacements inter-entreprises (PDE-PDIE) sur les parcs et zones d’activité (navettes, covoiturage) sont un bon moyen d’apaiser le débat. De nombreuses autorités organisatrices de la mobilité (AOM) impulsent ces démarches de management des déplacements des salariés dans le cadre de leurs plans de déplacements urbains (PDU). En cohérence avec les politiques d’urbanisme et d’habitat, elles contribuent à une réflexion transversale sur   l’aménagement des rythmes de vie des salariés (services de la petite enfance et autres services supports aux entreprises et salariés.) ; Il est à noter que l’élargissement des périmètres intercommunaux, au premier janvier 2017, aura des effets importants sur les ressorts territoriaux des autorités organisatrices (les anciens périmètres de transport urbain). Le périmètre de prélèvement du versement transport va s’élargir mécaniquement et assujettir des entreprises qui ne l’étaient pas jusque-là. Des réactions de leur part doivent être anticipées. Un lissage des taux reste possible sur une durée de 5 ans. Il est même annoncé par le gouvernement son intention de donner plus de temps aux collectivités qui le souhaiteraient (faculté de lissage sur 12 ans). Les services économiques des intercommunalités concernées, en lien avec les services financiers et fiscaux doivent être attentifs à cette question et en anticiper les impacts.

 

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D’autres taxes, de nature indirecte, peuvent provenir des entreprises, comme des particuliers. Il en est ainsi : -

des droits de mutation à titre onéreux (principalement perçues par les communes et départements) à l’occasion des transactions. de la taxe d’aménagement acquittée à la commune ou l’intercommunalité lorsqu’un terrain est construit (coûts d’extension des réseaux) la taxe spéciale d’équipement (TSE) qui peut être instituée pour financer un établissement public foncier local, la taxe de séjour acquittée par les touristes et recouvrée par les professionnels de l’hébergement (hôtellerie, campings, centres de vacances, sites de réservation...).

Concernant les activités commerciales, peut également être instituée la taxe locale sur les publicités extérieures (TLPE) qui frappe les enseignes et affichages.

 

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Fiche 6 : Agir par le levier de la commande publique L’un des premiers leviers directs à disposition des collectivités pour soutenir le développement économique repose sur la commande publique, leur rôle majeur d’acheteur et d’investisseur. L’investissement public local représente près de 50 milliards d’euros par an en vitesse de croisière, dont 40 milliards de dépenses d’équipement. La commande publique en général, élargie aux achats et à l’ensemble des acteurs publics (et organismes rattachés comme les SEM, bailleurs sociaux), représentait selon une récente étude commandée par l’AdCF et la CDC, environ 80 milliards d’euros en 2012. Sous l’effet des contraintes budgétaires, cette commande publique a chuté à 67 milliards en 2015. Malgré cette compression récente, les volumes concernés représentent une considérable injection d’argent dans les économies locales à travers les entreprises de BTP, les professions de conseil et d’AMO, les cabinets d’architecte, les services associés…

Dans ce panorama, le « bloc local » (communes, communautés, syndicats) constituent de très loin les principaux prescripteurs et maîtres d’ouvrage de cette commande publique. Un travail d’évaluation et de cartographie a été ainsi engagé par l’AdCF et la CDC pour suivre les évolutions, analyser cette commande par destinations thématiques et par nature (travaux neufs, renouvellement, ingénierie, services…).

 

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Pour les communes et communautés, un enjeu important est aujourd’hui de coordonner leurs plans d’investissement pas bassin de vie et définir ensemble les priorités pluriannuelles afin d’affecter les ressources disponibles. Logement, réseaux (numérique, eau/assainissement…), efficacité énergétique, accessibilité, parcs d’activités, transports… font partie des priorités. Ces investissements ont un rôle économique fondamental pour préserver la qualité des infrastructures et équipements du « site France » ; lesquels sont l’un des critères d’attractivité les plus favorables à la France sur le plan international (notamment par rapport à la forte dégradation des infrastructures en Allemagne et en Belgique dénoncée par leurs organisations patronales). Les choix d’investissement et de commande doivent être cependant bien étudiés par les communautés et métropoles en veillant à optimiser les retombées locales. Il est clair que l’investissement ne peut plus être considéré comme de l’emploi « non-délocalisable » compte tenu de l’intervention d’entreprises très capitalistiques mais aussi de l’importance considérable du travail détaché. Le recours aux centrales d’achat dans les marchés de fourniture peut également constituer une fuite de ressources. Il est donc important au sein de la collectivité de se doter d’une stratégie territoriale d’achat et d’investissement. Tout en respectant les règles de la commande publique, certaines clauses légales peuvent favoriser des circuits courts et des réponses locales. Il peut également être mis en place des initiatives pour préparer les entreprises locales à répondre à des offres à venir (formations, certifications, regroupements…), notamment dans des domaines techniques comme l’efficacité énergétique ou autre. La collectivité se doit de donner de la visibilité aux entreprises locales sur ses programmes futurs et faciliter l’accès des TPE-PME à la commande publique. Le critère du seul prix (« moins disant ») peut susciter une économie à court terme, mais une perte économique à moyen terme pour le territoire (perte de retour sur fiscalité, fermetures d’entreprises qui peuvent donner lieu à pénurie de réponses ou inflation des prix en période de reprise économique…). Il est également souhaitable d’allotir la commande publique, notamment en contrepartie de groupements de commande ou de démarches mutualisées. La collectivité doit aider ses acteurs économiques à se grouper pour répondre collectivement à certains appels d’offre. Il est notamment opportun, comme le font certaines intercommunalités en lien avec les chambres consulaires, de créer des coopératives d’artisans ou d’agriculteurs pour répondre à des marchés (travaux d’isolation, cantines scolaires…). L’investissement public peut également constituer le facteur déclencheur de décisions privées d’investissement, sur des parcs d’activité, dans la promotion urbaine, les mobilités… Dans les territoires les plus denses, mais pas exclusivement, les équipements publics de qualité suscitent des co-décisions des entreprises qui cherchent à bénéficier d’un effet d’entraînement.

 

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Il est enfin nécessaire de bien comprendre que les investissements publics valorisent fortement le patrimoine foncier et immobilier, tant des entreprises que des ménages. Cette valorisation n’est pas enregistrée dans les valeurs locatives (non actualisées aux valeurs de marché) mais apparaît dans d’autres recettes indirectes comme les droits de mutation à titre onéreux (affectés aux départements et communes), la taxe d’aménagement ou la taxe d’équipement. Les effets économiques des politiques publiques d’investissement sont donc multiformes mais extrêmement vertueux.

Soutenir les entreprises et l’emploi : L’enjeu du respect des délais de paiement Les dépassements des délais de paiement légaux ne cessent d’augmenter et atteignent une moyenne de 13,6 jours selon les données de l’observatoire des délais de paiement. C’est un record absolu qui inquiète le ministre de l’Economie tant ces retards sont lourds de conséquences sur la trésorerie de TPE-PME souvent fragiles (15 milliards d’euros de ressources non mobilisables pour les seules PME, selon Bercy). Un tiers des entreprises ne paient pas leurs factures à l’heure. Même s’ils disposent de délais plus courts (30 jours), ce sont également les acheteurs publics qui outrepassent certains délais légaux alors qu’ils devraient montrer l’exemple. Certains ministères accuseraient 16 jours de retard en moyenne. Malgré l’alourdissement des sanctions prévues, qui commencent à être activées, de nombreuses TPE-PME n’osent pas porter plainte de peur de perdre leurs clients. C’est afin d’éviter les recours contentieux qu’avaient été mises en place la médiation des marchés publics et la médiation des relations inter-entreprises pour faciliter des règlements de litiges à l’amiable. Les deux méditions ont fusionné en une médiation des entreprises début 2016. Dans ses échanges récents avec la direction de la médiation, l’AdCF a rappelé ses engagements pris en octobre 2014 à Lille dans le cadre de son Pacte territorial pour la croissance, l’emploi et l’innovation. Elle entend sensibiliser ses adhérents à l’importance du sujet des délais de paiement. Lors des consultations de son assemblée générale d’octobre 2014, la quasi-totalité d’entre eux entendaient se montrer très attentifs au respect des délais légaux, conscients du poids décisif de la commande publique sur les tissus d’activité.

 

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Pour en savoir plus : •

2012-2015 : Observatoire de l’évolution de la commande publique, note d’analyse réalisée par l’AdCF, février 2016.

Focus « 2012-2015, La Commande publique à la loupe », Communautés XXL : s’adapter au changement d’échelle, Intercommunalités, janvier 2016.

Disponibles sur le site internet de l’AdCF au lien suivant : http://www.adcf.org/contenu-article?num_article=2993&num_thematique=5

                   

 

Acheteurs publics, développez vos achats socialement responsables, Repères et bons réflexes. Brochure réalisée par la fédération des entreprises d’insertion en partenariat avec l’AdCF et Alliance Villes Emploi, mai 2016. Disponible sur le site internet de l’AdCF http://www.adcf.org/files/DOCS/acheteurspublicsdeveloppezvosachatssocialementresponsables_web.pdf

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