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Développer une stratégie de communication pour satisfaire l'obligation de ... vérification à objectif étendu et d'optimisation des processus de vérification. .... Le concept contemporain englobe de multiples aspects tenant à la chaîne de résultats ...
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Inspections générales d’Etat d’Afrique. Réalités, perspectives et enjeux. Abdou Karim GUEYE. Inspecteur général d’Etat. Expert international en stratégie, gouvernance, management public et audit dans le secteur public.

« Tous les audits supposent au début la détermination d’objectifs qui à leur tour déterminent le type d’audit qui sera mené et les normes qui lui seront applicables. ». Source - « Normes d’Audit Gouvernemental » Government Accountability Office des Etats-Unis (GAO)

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Présentation de l’ouvrage Si cet ouvrage a été écrit, c’est que dans le métier d’Inspecteur général d’Etat et celui de Consultant international que j’exerce depuis quelques années, je rencontre souvent des experts, des citoyens et bien d’autres personnes qui constamment posent la même série de questions : Qu’est ce qui différencie l’Inspection générale d’Etat d’autres corps ou d’autres organes de contrôle ? Pourquoi plusieurs corps ou entités de contrôle dans le secteur public ? Un corps ou un organe de contrôle ne suffirait-il pas pour les pays africains aux moyens limités ? L’Inspection générale d’Etat est-elle vraiment indépendante puisqu’elle est rattachée au Chef de l’Exécutif ? Le rattachement au Parlement ne garantirait-il pas plus d’indépendance ? Les recommandations issues de vos rapports sont-elles appliquées ? A quoi serviraient vos rapports s’ils ne sont pas appliqués ? On retrouve les mêmes thèses dans une série de documents publiés par divers partis politiques, en tout cas au Sénégal et par certains bailleurs de fonds et donateurs. Au terme d’une série de missions en Afrique, ces derniers mettent en évidence ce qui serait des dysfonctionnements, voire des inefficiences ou des inefficacités :

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« - il y aurait en Afrique des conflits de compétences réels ou prévisibles entre les principaux corps de contrôle 1; - pour cette raison, il conviendrait d’assurer une coordination ou une spécialisation. » En Afrique francophone, les Inspections générales d’Etat, « à compétence universelle et horizontale » sont souvent et plus fréquemment rattachées à un Président de la République, parfois à un Premier Ministre, rarement à un Parlement (Cas de l’Inspector General of Government en Ouganda2). Néanmoins et récemment, on assiste à de nouvelles formes de structuration, les Inspections générales d’Etat relevant d’un Ministère du Contrôle, de la Bonne Gouvernance, de l’Inspection générale d’Etat, voire du Contrôle d’Etat (Burundi, Gabon) ou d’un Ministère du Contrôle Supérieur de l’Etat comme au Cameroun. Leurs compétences sont très étendues et s’appliquent aux entités que sont les services de l’Etat, les collectivités locales, les projets et les agences de développement, les 1

Etrangement, cette problématique n’est pas posée avec la même intensité en Europe, aux Etats-Unis, au sein des organisations internationales de développement ellesmêmes où existe la même pluralité ; au sein de la Banque mondiale, il existe le Panel des Inspecteurs généraux, des auditeurs, divers comités sur l’intégrité, etc. Aux EtatsUnis, le Government Accountability Office coexiste avec une pluralité d’Inspections générales au niveau des Etats fédérés, de l’USAID, du secteur de la Sécurité Sociale… Au canada, le document officiel sur la modernisation de la fonction de contrôleur va en ce sens. En France, il existe depuis un siècle au moins l’Inspection générale des Finances, la Cour des Comptes, les Inspections générales des Ministères… 2 Il faut remarquer que cette Inspection générale, qui porte le nom d’Inspection générale du Gouvernement, s’est spécialisée dans la lutte contre la corruption et en ce sens est différente du point de vue du champ de ses attributions, des Inspections générales d’Etat des pays francophones d’Afrique.

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entreprises et les établissements publics. Elles s’appliquent aussi aux relations entre l’Etat et les entités soumises à contrôle. Leurs missions, qui dépassent les frontières du contrôle, stricto sensu, couvrent aussi les études et les conseils, des activités d’enquête de prévention et de détection, de gestion de programmes, et habituellement, quels que soient les pays concernés (Burkina Faso, Niger, Madagascar, Sénégal, Congo, Burundi, Djibouti, Côte-d’Ivoire, etc.), le contrôle des aspects ou domaines suivants :3  l’observation des textes de lois et des règlements qui régissent le fonctionnement administratif et financier4 ;  l’utilisation des crédits publics et la régularité des opérations des administrateurs, des ordonnateurs, des comptables et des régisseurs de deniers publics ;  la proposition de mesures tendant à simplifier le fonctionnement des services publics et à améliorer la qualité de l’administration publique ;  le contrôle de la gestion administrative et financière des services judiciaires, sous réserve du respect de l’indépendance de la Magistrature ;  des enquêtes ponctuelles de détection de fraudes sur dénonciation ou à la demande de l’autorité présidentielle ou primatorale. 3

Une bonne partie de cette description a été empruntée au document de planification stratégique. 2007 – 2009 du Forum des Inspections générales d’Etat d’Afrique et Institutions assimilées. 4 Les textes consacrent aussi des vérifications de conformité (compliance audit), mais dans un univers organisationnel où la conformité est comprise comme le respect des lois, des règlements et des instructions et non comme signifiant forcément la conformité aux bonnes ou meilleures pratiques internationales ; on note cependant de nouvelles orientations en ce sens.

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Traditionnellement, en Afrique, de l’indépendance à nos jours, elles fournissent une opinion indépendante à un Président de la République ou en tout cas à un Chef de gouvernement, au sens constitutionnel du terme, à un Premier Ministre, en cas de délégation, en:  examinant les systèmes, les outils et les pratiques de gestion, par référence à des critères des plus variables : d’efficacité, d’efficience, d’optimisation des ressources, d’opportunité, de conformité aux lois et règlements ;  suggérant, au terme d’études qui leur sont confiées, des réformes et des ajustements de divers dispositifs organisationnels, comptables ou financiers ;  menant des investigations de détection des fraudes, à la suite de dénonciations anonymes ou officielles ou sur prescription de l’autorité présidentielle ou primatorale ;  collectant des preuves et des éléments probants, pour se forger une opinion étayée d’observations ou de commentaires pertinents et à en faisant rapport ;  assurant le suivi des directives présidentielles ou primatorales par des relances ad-hoc ou des missions spécifiques de suivi, sur le terrain et à l’intérieur des entités déjà contrôlées, en somme une sorte d’audit de l’effectivité des audits, des études ou des enquêtes déjà menés. Une opinion parfois bien établie ne voit dans l’institution qu’un organe d’audit et de vérification, au sens de -5-

contrôles a posteriori de la régularité et de détection des fraudes, avec une vision fortement corrélée à la discipline administrative et aux sanctions. C’est là pourtant une compréhension fort limitée de la réalité d’une Inspection générale d’Etat, au sens où elle a été créée par les pays africains5. En fait, il s’agit d’une institution dotée d’un vaste champ d’intervention horizontale et verticale, à la fois, instituée sur la base d’un certain nombre d’idées :  un Chef de l’Etat, Chef du Gouvernement, en régime présidentiel, exerce un pouvoir constitutionnel de contrôle général de l’Exécutif6, notamment par le biais d’un organe indépendant dénommé Inspection générale de l’Etat7 ;  à l’instar des normes de management, toute haute direction doit pouvoir contrôler, pour la maîtrise de la gestion et des risques, l’atteinte des objectifs et évaluer les performances, etc. ;  le contrôle de l’effectivité des conditions et des modalités de mise en œuvre des politiques, des stratégies 5

En fait, un benchmarking international démontre que la similitude des appellations ou la quasi-similitude de celles-ci, par exemple dans le monde anglo-saxon (Inspector général, Inspector-Comptroller general, Auditor general, Auditor –Comptroller general) ne signifie pas pour autant qu’il s’agit d’institutions absolument analogues… 6 Au Sénégal, après la réforme constitutionnelle initiée par le Président Senghor et instituant un Poste de Premier Ministre, il trancha la question en ce sens en faisant jouer un rôle important à l’Inspection générale d’Etat et au Bureau Organisation et Méthodes, tous les deux rattachés à la Présidence de la République. Il optait ainsi pour le rôle essentiel de contrôle et de coordination à son niveau, avec l’appui du Premier Ministre, de la politique qu’il définit, dont la mise en œuvre et le compte-rendu de la mise en œuvre incombaient aux ministres et services publics rattachés. 7 En fait, contester cela de la part de fonctionnaires est un acte grave d’insubordination, en espérant que cela soit dû à de faibles connaissances de la science administrative.

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et des choix définis, approuvés ou pris par un Chef de l’Etat, commande de la méthode, car un Chef de Gouvernement ou/et son délégué, ne peuvent naturellement pas eux-mêmes procéder sur le terrain à des investigations sur des faits, des évènements, des systèmes, des registres, des livres ou des pratiques de gestion. Ils ont besoin d’une institution disposant d’un mandat général de vérification, d’études et de conseil, mais aussi d’enquête pour que le pouvoir constitutionnel de contrôle général du Chef de l’Exécutif devienne opérationnel. Le système ainsi créé et mis en œuvre par certains pays africains, permet à l’Inspection générale d’Etat d’exercer un certain nombre de métiers en profonde synergie : - de contrôle au sens d’études, de conseils, d’enquêtes et d’audits administratifs, pour permettre la maîtrise de la gestion et des risques, des résultats et des performances ; - d’enquêtes ad hoc, pour permettre au Chef de l’Etat ou de Gouvernement de procéder à des arbitrages à la demande des usagers et des citoyens, bien souvent parties faibles, qui n’ont que le dernier recours du Président de la République; ce qui est du reste conforme à la notion de justice sociale ; - d’études qui constituent une base de réflexion évaluative et prospective pour procéder aux ajustements requis et préparer l’avenir ;

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- de suivi des directives présidentielles et/ou primatorales, lorsque ses propositions sont approuvées par le Président de la République. Pour exercer de telles activités, lesdites Institutions d’Etat assument également les activités suivantes :  planifient leurs missions pour atteindre des objectifs de performance et d’assurance qualité ;  intègrent dans leurs missions le principe du scepticisme professionnel tout au long de leurs travaux ;  assurent le suivi de directives présidentielles ou primatorales, dès lors que leurs conclusions sont approuvées par un Président de la République ou par un Premier Ministre. Dans cette position d’Inspecteur où l’on a constamment le besoin de s’interroger, d’écrire, pour peu qu’on soit curieux et motivé, on plonge dans la recherche-action, autre fonction corrélée aux métiers mis en œuvre au sein d’une Inspection générale d’Etat, du moins si je me réfère à l’expérience sénégalaise. Par ailleurs, répondre aux interrogations précitées, sans faire référence aux évolutions de l’audit, au développement du management public et des modèles d’excellence, au besoin de résultats et d’impacts, aux nouveaux paradigmes émergents de la science administrative, revient à s’appuyer sur des analyses simplificatrices. Et lorsque l’on plonge dans cette recherche-action si nécessaire à cette fonction d’inspection générale, l’on se voit obligé de pratiquer le -8-

benchmark, l’étude et la comparaison des bonnes ou des meilleures pratiques internationales ; l’on découvre la relativité de paradigmes ; qu’en Afrique, peuvent exister de meilleures pratiques8. L’histoire de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal dont les fondements remontent en 1906 pourrait en être une, maintenue par des leaderships présidentiels constants et un consensus qui ne s’est pas érodé, en dépit des alternances, de l’indépendance à nos jours9. Le leadership du Chef de l’exécutif, la culture républicaine et démocratique, c’est ce qui fait ou fera le succès d’une Inspection générale d’Etat, au fond des autres institutions de contrôle ; certes audelà, les critères classiques de la communauté internationale sont importants, mais insuffisants pour appréhender le succès précité. L’histoire de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal reste fortement tributaire de ce critère qu’est le leadership présidentiel.

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Par exemple, certaines questions que se pose la communauté internationale des auditeurs en ce qui concerne la coordination des corps et des organes de contrôle et le suivi ont été posées et organisées par le système sénégalais quelques années seulement après l’indépendance ; ces mesures ayant influencé d’autres pays africains au Sud du Sahara ayant opté pour le même système. 9 Le leadership est une question négligée lorsqu’on étudie ce genre de système qu’est le contrôle d’Etat ; c’est pourtant la clé majeure de succès, en tout cas en Afrique.

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SOMMAIRE PRESENTATION DE L’OUVRAGE

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SOMMAIRE

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INTRODUCTION

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 Genèse d’une origine séculaire - 17  La période post-indépendance. Des jalons successifs d’atténuation des acquis de la période coloniale, de maintien de la tradition historique et de renforcement de l’excellence - 24 I. L’INSPECTION GENERALE D’ETAT, UNE STRATEGIE AFRICAINE AXEE SUR LA CONSECRATION D’UN POLE DE METIERS EN PROFONDE SYNERGIE - 26 I.I. GENESE ET PROBLEMATIQUE DES NORMES - 27  Un référentiel doctrinal de base, la théorie de Mautz et Sharaf- 29 Postulat 1- Les états financiers et les données financières sont vérifiables - 30 Postulat 2 – La présomption de convergence d’intérêt entre le vérificateur et la direction de l’entité vérifiée - 30 Postulat 3 – La présomption de non collusion ou d’altérations volontaires - 31 Postulat n° 4 - Un système de contrôle interne adéquat élimine les probabilités d’inexactitudes - 31 Postulat n° 5 - L’application continue des principes comptables généralement reconnus assure la présentation fidèle de la situation financière et des résultats d’exploitation - 31 Postulat 6 – À moins d’indications contraires, ce qui était vrai dans le passé continuera de l’être dans le futur - 32 - 10 -

Postulat 7 - Lorsqu’il effectue la vérification, l’auditeur doit agir dans l’intérêt exclusif de l’entité, uniquement à titre de vérificateur indépendant - 32 Postulat 8 - Le statut professionnel impose une déontologie envers le public, les clients et la profession. - 32 -

La doctrine de l’agence

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 Un cadre conceptuel influencé par « les normes généralement admises ou reconnues » - 35  Structure General Accepted Government Auditing Standards – USA - 39  Structure des normes d’audit INTOSAI - 39  L’Institut Interne des Auditeurs a défini une série de normes IIA dites de qualification, de fonctionnement et de mise en œuvre, résumées ci-dessous. - 42  Normes d’exercice des missions de juriscomptabilité – Novembre 2006. Comptables agrées du Canada - 43  Aux Etats-Unis, les normes du General Accountability Office consacrent quelques remarquables particularités : - 44  S’agissant de la déclaration de LIMA, il paraît possible de relever notamment deux particularités, la référence à des sources constitutionnelles ou dérivées et le concept d’institution supérieure de contrôle des finances publiques. - 46  Quant aux normes du forensic audit, elles introduisent un lien entre la détection des fraudes, des abus et des gaspillages avec le processus judiciaire de poursuite, de défense d’un client, le droit pénal et les procédures pénales, d’où l’intérêt pour l’un des métiers de base des Inspections générales d’Etat: les enquêtes de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages. - 47 I.2. PRINCIPES DIRECTEURS - 47 I.3. RELECTURE DE L’OPTION INSPECTION GENERALE D’ETAT A LA LUMIERE DES NORMES INTERNATIONALES GENERALEMENT ADMISES - 49 I.3.1. LA FONCTION « AUDIT » - 49 -

 L’audit à la lumière des concepts développés par l’Institut de l’audit interne - 50  L’audit selon les normes du Governement Accountability Office 53 - 11 -

Exemple d’objectifs d’audit proposés par le manuel du Government Accountability Office - 55  L’audit à la lumière des manuels développés par les bureaux des Inspecteurs généraux aux Etats-Unis - 60  L’audit à la lumière des concepts développés par l’INTOSAI- 61 I.3.2. LA FONCTION « ETUDES ET CONSEILS - 64 I.3.3. LA FONCTION « PREVENTION ET DETECTION DES FRAUDES, DES ABUS ET DES GASPILLAGES - 67  Définitions et panorama de normes - 67 - Exemple de circonstances ou d’évènements augmentant le risque de fraudes ou d’erreurs, selon ISA 240 - 72 - Questions liées à l’intégrité ou à la compétence de la direction- 72 - Pressions inhabituelles au sein de l’entité ou subies par l’entité 73 - Prévalence d’opérations inhabituelles - 73 - Autres cas de risques - 73  Le rôle des Inspections générales d’Etat - 75 I.3.4. INDEPENDANCE DES INSPECTIONS GENERALES D’ETAT FACE AUX NORMES INTERNATIONALES - 78  Indépendance et niveau de rattachement - 78  Gestion de la confidentialité et du secret - 79  Une légitimité renforcée par le mode de recrutement et le régime statutaire - 84  Le renforcement de l’autonomie, par la création d’un Fonds d’intervention de l’Inspection générale d’Etat - 90  L’ajustement des symboles de la fonction - 93 I.3.5. UN MODELE POUR LA COORDINATION ET L’HARMONISATION 93  La coordination vue par les normes applicables aux Inspecteurs généraux des Etats-Unis - 94  La vision de l’INTOSAI - 94  Le modèle tunisien du Haut Comité du Contrôle Administratif et Financier - 96  L’expérience du Mali - L’association des Contrôleurs, des Inspecteurs et des Auditeurs du Mali. - 97 - 12 -

 Le Comité Interministériel d’Audit de Programme (CIAP) en France - 98  La mise en réseau de la Communauté des Inspecteurs généraux aux Etats-Unis - 99  L’expérience maltaise - 101  Expériences africaines de coordination et d’harmonisation - 102  Il demeure aussi possible de discuter de la problématique des IGE liée au concept d’institution supérieure de contrôle, apparemment très influencé par le modèle judiciaire ou juridictionnel : - 111 I.3.6. LA PLANIFICATION DES MISSIONS - 113  Sources de données utiles pour l’auditeur, selon le GAO - 116  Indicateurs PEFA d’efficacité du système de vérification - 121 I.3.7. L’EXECUTION DES MISSIONS - 124 Formalisation par l’IGE de Djibouti des normes d’exécution des missions d’audit ou d’enquête - 128 I.3.8. LE SUIVI-EVALUATION - 129 I.4. CONCLUSIONS PRELIMINAIRES - 134 Modélisation simplifiée de l’approche IIA - 136 II. LES INSPECTIONS GENERALES D’ETAT D’AFRIQUE : ENJEUX, DEFIS ET PERSPECTIVES - 139 LES INSPECTIONS GENERALES D’ETAT D’AFRIQUE, UNE INSTITUTION SUPERIEURE DE CONTROLE DE L’ORDRE ADMINISTRATIF ? - 139 II.1.1. GENESE ET INTERPRETATION DOCTRINALES : AUX SOURCES D’UNE HISTOIRE JURIDICO- CONSTITUTIONNELLE - 141 II.1.2. L’IMPLICATION DES CHOIX STRATEGIQUES ET ORGANISATIONNELS DES PAYS AFRICAINS FRANCOPHONES - 143 II.1.3. L’IMPLICATION SUR LA NORMALISATION - 147 II.2. DE NOUVEAUX DEFIS EN MATURATION - 149 II.2.1. UN CONTEXTE NOUVEAU EN MATURATION - 149 II.1.

- Un enjeu, assumer les défis liés à l’évolution de la gestion publique - 149 - Un autre enjeu, assumer les défis de l’audit face aux nouvelles technologies de l’information et de la communication - 153 - 13 -

- Approfondir la synergie, pour des résultats et des impacts de la gestion publique, renforcée par une demande citoyenne - 154 - Quelques exemples de circulaires ou d’instructions, à la suite de rapports de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal - 157 - La tendance actuelle à l’ajustement des missions - 158 Les options sénégalaises d’ajustement - 160  Renforcer la crédibilité de l’Inspection générale d’Etat et le prestige du corps. - 162  Mobiliser les membres de l’Inspection générale d’Etat autour d’objectifs et de valeurs organisationnelles partagées. - 162  Créer les conditions de prévention de la fraude et de la corruption. - 162  Créer les conditions d’une bonne exécution des missions à haute valeur ajoutée axées sur l’évaluation des politiques publiques et de l’audit des pratiques et des systèmes de gestion en cours dans les organisations publiques. - 162  Créer les conditions d’instauration d’une culture de reddition des comptes. - 163  Moderniser le système informatique de l’IGE et mettre en place un site Web. - 163  Développer une stratégie de communication pour satisfaire l’obligation de rendre compte, mais aussi respecter le droit du citoyen à l’information, dans le secret des informations issues des travaux de vérification, d’audit et d’inspection. - 163 Une autre illustration – Le modèle d’ajustement à Djibouti - 163 Objectif stratégique n° 1 – Prendre et mettre en œuvre des mesures organisationnelles à la hauteur des défis de normalisation, de la vérification à objectif étendu et d’optimisation des processus de vérification. - 164 Objectif stratégique n° 2 - Intégrer les nouvelles technologies de l’information et de la communication à la gestion de l’Inspection générale d’Etat et à ses missions de vérification. - 164 Objectif stratégique n° 3 - Mener des vérifications et des études qui ont un impact sur l’évolution du secteur public, en adéquation avec les principaux défis de l’environnement institutionnel, économique, social et technique. Produire dans ce cadre un rapport annuel

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cohérent et utile sur la gouvernance, la gestion et les réformes administratives du pays. - 164 3.1. Renforcer la qualité de la gestion publique et promouvoir la bonne gouvernance, la discipline administrative, le respect et l’application des textes. - 164 3.2. Assurer le suivi et l’évaluation des programmes et des secteurs prioritaires, en s’assurant de l’efficacité, des performances, de l’efficience et de la productivité organisationnelles, de l’optimisation des ressources, ainsi que de la contrepartie obtenue en fonction d’un franc dépensé. - 164 - La charte des valeurs de l’IGE de Djibouti - 165 Notre devise : - 165 Notre mission : - 165 Nos valeurs : - 166 Objectivité et impartialité : Nos travaux sont basés sur des normes et les standards de vérification qui garantissent l’objectivité des rapports produits. Nous respectons le caractère confidentiel des informations détenues en les utilisant à bon escient. - 166  Le code de déontologie - 167 - Les normes de vérification - 167 - Normes de travail - 168 - Le professionnalisme des jugements effectués - 170 - Normes de rapport - 171 - Le secret professionnel - 171 - Intégrité et réserve - 172 - Utilisation économique, efficiente et optimisation des ressources de l’Inspection générale d’Etat - 172 II.2.2. UNE VISION SYSTEMIQUE DE L’AUDIT COUVRANT TOUTE LA CHAINE DE PERFORMANCE - 172  L’impact de la vision managériale - 173  Vision managériale intégrée - 174  Evolution vers une planification stratégique et une gestion stratégique axée sur les tableaux de bord prospectifs et rétrospectifs 175  Auditer pour l’impact - 179 -

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I.2.3. LA FONCTION CONTRADICTOIRE D’AGENT DE CHANGEMENT OU DE MAINTIEN DES NORMES - 180 III. PARADIGMES, QUAND TU NOUS TIENS !

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III.1. CONTROLE INTERNE ET/OU CONTROLE EXTERNE ? III.2. INDEPENDANCE ET APPROCHE SYSTEMIQUE

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IV. INSPECTIONS GENERALES D’ETAT D’AFRIQUE A LA LUMIERE DE L’EXPERIENCE SENEGALAISE. QUE FAUTIL RETENIR ? - 186 IV.1. QU’EST-CE FINALEMENT UNE INSPECTION GENERALE D’ETAT EN AFRIQUE? - 186 IV.2. LES DEFIS DU FUTUR - 189 L’AUTEUR

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INTRODUCTION 

Genèse d’une origine séculaire

L’Inspection générale d’Etat, telle qu’elle existe aujourd’hui en Afrique, en général et au Sénégal, en particulier, est une création purement africaine, très différente de ce que l’on peut voir ailleurs, par exemple en France où une telle institution n’existe pas, et dans d’autres continents. Ainsi, en France, le contrôle a vocation horizontale et interministérielle relève de l’Inspection générale des Finances, rattachée à un Ministre ; en Afrique francophone au détenteur originel du pouvoir exécutif, un Président de la République, un Chef d’Etat ou de Gouvernement. L’origine est bien lointaine. C’est une vieille tradition institutionnelle qui remonte au temps de la colonisation, et au terme de laquelle émerge au Sénégal une fonction de haut prestige, des fonctionnaires dont les qualifications recouvrent communément des termes variés : « Les Hommes du Président », « Les Soldats de la République », « Les soldats de l’ombre », les « Incorruptibles », etc. Mais en fait, cette situation est le fruit de tout un processus historique, mais aussi de l’effort de construction d’une république rationnelle et normalisée. 1906 ! Une année bien lointaine. Un arrêté du Gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française paraît et crée dans chacune des colonies relevant de sa juridiction, à l’exception du territoire de la Mauritanie, « un ou plusieurs emplois d’Inspecteurs des Affaires - 17 -

administratives dans les cercles de la colonie ». Le texte est relativement bref, mais précise que ces Inspecteurs correspondent exclusivement avec le Gouverneur auquel ils présentent leurs constats et leurs propositions10. A cette date apparaissent déjà deux règles fondamentales : le privilège de correspondre directement avec le Chef du Territoire11 et le concept de proposition, bien différente de celui de recommandations, évoqué plus loin. 1932 confirme le renforcement de la fonction, dès l’apparition d’un arrêté du 28 février de la même année, réorganisant l’Inspection des Affaires Administratives dans les colonies relevant du groupe de l’Afrique Occidentale française. En 1937, le système tend à se généraliser au niveau des colonies, car un arrêté du Gouverneur général promulgue un décret portant organisation de l’Inspection des Affaires Administratives dans les territoires d’outre-mer, en procédant également à la répartition des emplois.

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Ce terme « propositions » a été maintenu par tous les textes juridiques qui sont apparus ultérieurement et demeure essentiel pour comprendre les mécanismes de fonctionnement dans une sorte de relation triangulaire entre une Inspection générale d’Etat, le Chef de l’Exécutif et les entités, les projets et les programmes vérifiés, en tenant compte du concept de directives présidentielle. 11 En fait, après l’indépendance, ce Chef du territoire est devenu successivement le Président du Conseil et par la suite le Président de la République.

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Colonies Indochine Afrique Occidentale Française

Afrique Equatoriale française Madagascar Cameroun Togo et Côte française des Somalis

Emplois 2 2

Observations A l’exception Laos Pour chacune des colonies de la fédération, à l’exception des colonies de la Mauritanie, du Dahomey et du Niger qui n’en ont chacune qu’une seule.

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2 2 1

13 emplois sont ainsi crées.

Le décret de 1937 ci-dessus cité, relativement détaillé par rapport aux textes antérieurs, contient un certain nombre de dispositions :  « le recrutement d’administrateurs civils de 1ère et de 2ème classe, selon les colonies et leur nomination par le Gouverneur général en qualité d’Inspecteurs ;  une Inspection des Affaires administratives indépendante et essentiellement mobile, recevant dans les Etats fédérés, des directives des seuls LieutenantsGouverneurs et ailleurs, du Chef de la Colonie, avec lesquels ils correspondent directement pour tout ce qui concerne le services ;  l’interdiction d’exercer d’autres responsabilités de direction ou de prise de décision ;

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 la responsabilité du contrôle de tous les services administratifs à l’exception du Trésor et des services techniques des chefs-lieux de colonie, avec l’obligation, chaque année, d’inspecter chaque circonscription territoriale ;  l’exercice, dans le ressort territorial normal de leurs attributions d’enquêtes et de missions spéciales.» Le décret de 1937 précise également leurs pouvoirs de vérification qui concernent les services de la colonie, leur gestion générale, les résultats de leur action sur la population ou les intérêts du territoire12. A cet égard, le texte prévoit que l’Inspecteur des Affaires administratives recueille les informations utiles auprès des colons européens et des populations ; ils sont chargés du contrôle de l’application des règlements et des instructions ministérielles et locales et au besoin, proposent des aménagements qui leur paraissent nécessaires. Enfin, ils sont tenus d’envoyer chaque année un compte-rendu de leurs activités, des constations et des suites qui leur ont été réservées. Le texte de 1937 contenait donc quelques dispositions dont l’esprit et même parfois la lettre subsistent dans les textes actuels.

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Déjà, en 1937, la notion de contrôle des résultats est affirmée, sans pour autant qu’on assiste à une doctrine conceptuelle comme celle que l’on peut aujourd’hui aisément rassembler, au niveau international. Le concept contemporain englobe de multiples aspects tenant à la chaîne de résultats « intrants, séquence ou traitement, résultats et impacts », à la restitution des performances et des résultats, à qualité de la gestion publique. Il englobe aussi dans la doctrine et au niveau des pratiques professionnelles divers autres concepts ou critères sur la performance, les indicateurs et la mesure des performances, par exemple, etc. Ce qui est intéressant est que le texte de 1937 prévoyait que les résultats de l’action administrative soient envisagés par rapport aux intérêts des populations et du territoire.

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A partir de 1943, le processus d’ajustement et d’amélioration continue, du fait d’un arrêté n° 4045 du 26 novembre 1943 promulguant en Afrique Occidentale Française un décret du 29 octobre 1943 portant création d’un emploi d’Inspecteur général des Affaires administratives :  l’appellation d’Inspecteur général apparaît en lieu et place d’Inspecteur des Affaires administratives ;  le niveau et les modes de recrutement évoluent, l’Inspecteur général étant nommé par décret et choisi parmi les Gouverneurs des colonies ou les Administrateurs en chef des clonies ;  il a sa résidence à Dakar et exerce ses attributions sur toute l’étendue de l’Afrique occidentale française. Le 8 avril 1944, un arrêté n° 1045 promulgue en Afrique occidentale française un décret du 15 mars 1944 fixant le régime des avantages en nature ; l’Inspecteur général a le grade de Gouverneur des colonies ou d’Administrateur en chef des colonies. Ces avantages, au terme du décret ci-dessus, renforcent le symbolisme de la fonction et comprennent par exemple : « l’hôtel sous forme de logement gratuit, avec l’ameublement se composant de meubles meublants, d’objets mobiliers affectés, appartement de représentation, cabinet de travail et appartements familiaux ;

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les moyens de transport sous forme d’un véhicule et d’un chauffeur ; le personnel domestique (cuisinier, maître d’hôtel, domestique), le personnel affecté à la garde de l’hôtel, à l’entretien des cours et des jardins, le matériel nécessaire à l’éclairage, au chauffage, etc. » En 1949 apparaît encore une nouvelle réorganisation, du fait de la publication en Afrique occidentale française par l’arrêté n° 1624 du décret n° 49-350 du 12 mars 1949, relatif à l’organisation de l’Inspection générale de Affaires administratives en Indochine, en Afrique occidentale française et à Madagascar. Ce texte met en relief les dispositions suivantes régissant l’Inspecteur général des Affaires administratives:  « contrôler, sous l’autorité du Gouverneur général, les services relevant de sa compétence ou de celle du Haut Commissaire, y compris les agences, les offices, les régies et les sociétés d’économie mixte, en excluant les services judiciaires13 et militaires ;  veiller au bon fonctionnement administratif et financier des services du Gouvernement général ou du Haut Commissariat ;  renseigner le Gouverneur général ou le Haut Commissaire sur la marche des services et lui proposer

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Le contrôle des services judiciaires aura été à la source de conflits et sera résolu progressivement…

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toutes mesures propres à simplifier le fonctionnement et à réaliser des économies14 ;  effectuer toutes enquêtes prescrites par Gouverneur général ou par le Haut-commissaire ;

le

 contrôler l’activité des Inspecteurs locaux des Affaires administratives 15;  effectuer des études par décision spéciale du Gouverneur général ou du Haut Commissaire. » En outre, le décret susvisé précise de nouveau le régime des avantages aligné sur celui d’un Secrétaire général de Gouvernement local et détermine l’ordre de préséance dans les cérémonies officielles.16 En 1957, apparaît un nouvel arrêté n° 1285 promulguant en Afrique occidentale française le décret n° 57-09 du 22 janvier 1957, modifiant le décret du 6 janvier 1937, portant organisation de l’Inspection des Affaires administratives dans les territoires de la France d’OutreMer. L’ère des indépendances s’approcha. Le Sénégal allait hériter de cette histoire institutionnelle et, sur cette base,

Dès l’origine, le texte consacre une fonction « conseils et enquête », à côté des travaux de contrôle. Il faut constater aussi la consécration du concept « d’économie ». 15 La coordination des Inspections internes est ainsi une problématique résolue depuis la période coloniale et a été reconduite par toutes les législations qui sont apparues en Afrique, comme cela est décrit dans diverses parties de cet ouvrage. 16 Le régime inventorié ci-dessus explique en grande partie le statut des Inspecteurs généraux d’Etat du Sénégal, fonctionnaires hors catégorie et hors hiérarchie bénéficiant d’un régime dérogatoire de rémunérations, d’avantages en nature quasi-identique à ceux d’un Ministre et protocolaires, comme évoqué plus loin. 14

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forger progressivement un système d’Inspection générale d’Etat, non sans quelques hésitations et difficultés.  La période post-indépendance. Des jalons successifs d’atténuation des acquis de la période coloniale, de maintien de la tradition historique et de renforcement de l’excellence Au moment de l’indépendance, certains acquis ont survécu, en ce qui concerne le niveau de rattachement17, le symbolisme de la fonction, l’élévation progressive du niveau de recrutement:  le dispositif de contrôle est placé au plus haut sommet de l’Exécutif, comme il l’était au temps de la colonisation, auprès du Gouverneur général ou du Haut Commissaire ;  le niveau de recrutement, déjà très élevé, se renforce d’avantage, car l’histoire coloniale laisse aussi le legs de l’Inspecteur général ayant au moins le grade de Gouverneur ou d’Inspecteur général des Colonies ;  un certain symbolisme de la fonction, maintenu, se renforce, car l’Inspecteur général était auparavant entouré des apparats d’une fonction solennelle, avec son hôtel, ses appartements et la crainte qu’il a exercé tout au long de cette période ; l’on raconte que sa venue au sein d’une circonscription territoriale pour son contrôle annuel était considérée comme un évènement Certains pays passent d’une période où le détenteur réel du pouvoir exécutif est le Président du Conseil à une autre où émerge et s’affirme l’institution présidentielle que nous connaissons aujourd’hui, avec le transfert successif des Inspections générales auxdites autorités. 17

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exceptionnel, par les administrateurs coloniaux et par les chefs de services. Pourtant, la nouvelle législation post-indépendance semble hésiter à réinstaurer les mêmes exigences de la période coloniale. Dans un premier temps, avec la succession d’Etat, les nouvelles autorités mettent en place une législation pouvant être caractérisée de forte régression par rapport au dispositif juridique coloniale et, dans une deuxième période, retournent à l’orthodoxie historique : le renforcement de cette fonction, de son autorité et de ses moyens, l’Inspection générale des Affaires administratives étant transformée en Inspection générale d’Etat.

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I. L’Inspection générale d’Etat, une stratégie africaine axée sur la consécration d’un pôle de métiers en profonde synergie L’on pourrait introduire par le thème de la stratégie et de ses liens avec la structure, un vieux débat: « la stratégie précède-t-elle la structure ou la structure précède-t-elle la stratégie ? » On trouve dans les doctrines du management des organisations et de la science administrative des éléments qui plaident pour la primauté de la stratégie ; par exemple Alfred Chandler qui argue que la stratégie précède et détermine la structure, même si Ansoff rétorque l’inverse est possible. Avec l’évolution du management public, l’on ne doute plus de la nécessité d’une vision stratégique, donc d’objectifs stratégiques, à partir desquelles se conçoivent les dispositifs organisationnel, opérationnel et de gestion des ressources. A un haut niveau de définition de politiques et de stratégies (Président de la République, Premier Ministre), mises en œuvre par des entités constituées de ministères, d’agences ; c’est un choix possible et pertinent de permettre à la haute direction de gérer par le contrôle, au sens contemporain, de maîtrise des risques ou des déficiences liées à l’absence d’efficacité, d’efficience, d’économie, d’équité, d’éthique. A chaque palier de la structure organisationnelle, l’on peut retrouver cette même logique, par cascades, d’une haute direction qui supervise, coordonne et contrôle des paliers inférieurs, jusqu’au niveau du bas de la pyramide. Du reste, en mangement, les frontières entre planification et contrôle sont ténues, car toujours prévaut cette - 26 -

fameuse rétroaction pour l’ajustement, pour re-planifier, réorganiser, donner des instructions, ajuster, corriger, au besoin.18 Si la question est d’ores et déjà ainsi posée, c’est que derrière une Inspection générale d’Etat se pose également toutes ces questions évoquées ci-dessus, selon une logique systémique et intégrée, par ailleurs, un modèle de gestion publique, grâce au système de directives présidentielles et eu égard aux nécessités de la coordination de l’action gouvernementale et 19 administrative . Pour comprendre véritablement ce système, faudrait-il encore revenir aux principes exposés ci-dessous. I.I. Genèse et problématique des normes Un défi, pour les Inspections générales d’Etat d’Afrique, c’est d’inventorier, pour déclencher le processus d’une réflexion endogène, mais ouverte aux particularités des défis des Etats et du continent africain et à leurs propres spécificités. C’est là un devoir des cadres africains, de penser l’universel, reformulé, et d’en tirer profit. Les vrais systèmes, qui seront intériorisés, acceptés, sources déclencheurs de motivation à faire, soi-même, avec les autres, dans un partenariat accepté, ne seront que ceux 18

Il suffit par exemple de se référer aux cinq infinitifs de Henri Fayol : planifier, organiser, coordonner, commander, contrôler. 19 Il faut souligner qu’en management des organisations, la marge entre coordination et contrôle est ténue ; Mintzberg rappelle le concept de coordination comme mécanisme d’ajustement mutuel ; il faut y ajouter que dans une perspective systémique il est possible de distinguer un sommet stratégique qui a une fonction de pilotage et de contrôle, ce qui suppose aussi un sous-système d’information de contrôle…

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qui obéiront à cette logique. Le benchmark de plusieurs systèmes, aussi divers les uns que les autres, influencés par les contextes constitutionnels de régimes présidentiels ou parlementaire, semi-présidentiels ou semi - parlementaires, doit servir à libérer la pensée, non à se ranger dans une école. C’est le prix de la créativité, de la liberté. « Laissez-nous penser », devraient dire les africains. Mais alors, par rapport d’interrogations émerge :

aux

normes,

une

série

- Quel est leur fondement conceptuel et doctrinal, à l’instar des autres « sciences » sociales ? - Quelle est leur pertinence par rapport aux exigences de croissance et de développement de l’Afrique en général et par rapport aux spécificités d’une institution africaine supérieure de contrôle de l’ordre administratif dénommée « Inspection générale d’Etat en particulier ? Quels sont les enjeux sous-jacents ? Quelle synergie avec les objectifs stratégiques et organisationnels des Inspections générales d’Etat d’Afrique ? Une telle approche amène à s’interroger sur les « fondamentaux » et les bases conceptuelles et doctrinales d’une part, de l’audit et des enquêtes de prévention et de détection et d’autre part, des normes dites internationales qui en constituent l’ossature.

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 Un référentiel doctrinal de base, la théorie de Mautz et Sharaf Un ouvrage de référence, « Philosophy of Auditing », paru en 1991, de Mautz et Sharaf, a profondément marqué la doctrine en audit ; les deux auteurs tentent de dégager les principes « philosophiques », qualifiés de postulats, qui constitueraient le fondement théorique de l’audit, en se référant à l’univers comptable : - les états financiers et les données financières sont vérifiables ; - a priori, il n’y a pas de conflits d’intérêts entre le vérificateur et la direction de l’entité ; - les états financiers et les informations qu’ils contiennent ne comportent pas d’inexactitudes causées par la collusion ou d’autres causes inhabituelles ; - un système de contrôle interne adéquat élimine les probabilités d’inexactitudes ; - l’application continue des principes comptables généralement reconnus assure la présentation fidèle de la situation financière et des résultats d’exploitation ; - à moins d’indications contraires, ce qui est vrai dans le passé, continuera de l’être dans le futur ; - lorsqu’il effectue une vérification des états financiers, le vérificateur agit exclusivement à titre de vérificateur ; - 29 -

- le statut du professionnel impose des obligations équivalentes. La nature, le contenu et la portée de ces postulats sont étudiés ci-après, en détail. Postulat 1- Les états financiers et les données financières sont vérifiables Par ce postulat, des contrôles appropriés permettent au vérificateur d’obtenir un certain degré de certitude sur les déclarations comptables et financières qui figurent dans les états financiers. Le vérificateur doit cependant intégrer dans sa démarche la collecte et le traitement d’éléments probants, par une bonne utilisation des lois de la probabilité, des échantillonnages représentatifs et exhaustifs, et l'usage de procédés de vérification généralement reconnus.

Postulat 2 – La présomption de convergence d’intérêt entre le vérificateur et la direction de l’entité vérifiée C’est l’idée selon laquelle, il n’y a pas de conflits d’intérêts entre le vérificateur et la direction de l’entité ; l’auditeur doit admettre a priori une présomption de complétude, d’authenticité et de la véracité des registres comptables et de la documentation mis à sa disposition. A défaut, la vérification serait impossible ou alors aurait un coût excessif, sinon prohibitif, à cause de l’étendue des travaux requis20.

Aujourd’hui, prévaut une présomption, voire une attitude de scepticisme professionnel. (CF ICCA, par. 5135.06), le vérificateur évaluant la validité des éléments probants obtenus, tout en demeurant attentif à tout ce qui va à l’encontre de la présomption de bonne foi en faveur des responsables de l’entité à l’origine de l’information financière. 20

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Postulat 3 – La présomption de non collusion ou

d’altérations volontaires Un principe de base, au départ, c’est que les états financiers, et les autres informations connexes ne comprennent pas d’inexactitudes causées par la collusion ou d’autres causes inhabituelles. En soi, la collusion peut engendrer la falsification des documents, la suppression de traces, rendant la vérification presque impossible21.

Postulat n° 4 - Un système de contrôle interne adéquat élimine les probabilités d’inexactitudes Ce postulat est à la base des normes de vérification comptable et financière et permet d’établir le risque de non contrôle. En effet, un système de contrôle interne déficient va appeler des contrôles exhaustifs. Mais le vérificateur ne devra pas oublier qu’un système de contrôle interne adéquat, certes réduit les risques d’inexactitudes, mais ne les élimine pas, d’où l’importance pour le vérificateur d’appliquer des procédés de corroboration.

Postulat n° 5 - L’application continue des principes comptables généralement reconnus assure la présentation fidèle de la situation financière et des résultats d’exploitation L’auditeur, pour émettre une opinion sur les états financiers, devra prendre en compte les principes comptables généralement reconnus. Plus l’entité aura tendance à s’y

21

On admet en vertu du principe du scepticisme professionnel que les auditeurs doivent être attentifs aux facteurs et risques d’inexactitudes (erreurs, fraudes, irrégularités) importantes et aux indices qui peuvent les amener à soupçonner que les états financiers contiennent des inexactitudes importantes.

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conformer, plus une présomption de crédibilité de ses états financiers aura tendance à s’affirmer.

Postulat 6 – À moins d’indications contraires, ce qui était vrai dans le passé continuera de l’être dans le futur Si une entité a déjà fait la preuve de la fiabilité de ses informations financières, l’auditeur pourrait, jusqu’à preuve du contraire, admettre une présomption de fiabilité des informations à sa disposition.

Postulat 7 - Lorsqu’il effectue la vérification, l’auditeur doit agir dans l’intérêt exclusif de l’entité, uniquement à titre de vérificateur indépendant Ce qui est ainsi posé, c’est le principe de l’indépendance, d’où dans certaines législations ou déontologie, l’interdiction du cumul des fonctions d’auditeurs et de conseils. En somme, si le vérificateur devait rendre des services complémentaires, ceux-ci devraient être marginaux, sinon d’importance secondaire.

Postulat 8 - Le statut professionnel impose une déontologie envers le public, les clients et la profession. Au total, les concepts, les postulats, les principes et les normes ci-dessus ont influencé l‘audit comptable et financier. Il convient de retenir que la doctrine de Mautz et Sharaf reste corrélée à l’univers comptable et financier ; elle demeure préoccupée par la question de l’efficience du processus d’audit, compte-tenu des contraintes liées au volume des transactions. Par rapport à l’univers de la gestion publique et aux pratiques de l’Inspection générale d’Etat, des remarques méritent d’être soulevées : - 32 -

- si la doctrine de Mautz et Sharaf plaide pour un auditeur agissant uniquement à titre de vérificateur indépendant, argumentaire plaidant pour l’interdiction du cumul des fonctions d’auditeur et de conseil, le métier d’Inspecteur général d’Etat repose sur une triptyque « audit, études et conseils, enquêtes de prévention et de détection des fraudes » ; en outre, la crainte sous-jacente qu’un auditeur payé par son agent principal ne soit indépendant ne s’applique guère au système de contrôle publique ;

les postulats de Mautz et Sharaf font confiance aux principes généralement admis, au système de contrôle interne, à la reproductibilité du passé sur le présent, à l’indépendance de l’auditeur, etc. -

Au total, il semble bien possible de se poser les questions suivantes : les postulats ci-dessus sont-ils applicables de façon systématique au modèle des Inspections générales d’Etat ? A toute catégorie d’audit (de performance, stratégique, organisationnel ou autres) et d’enquête de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages ? Une autre doctrine, celle de « l’agence » devait aussi jouer un rôle important dans le cadre conceptuel de l’audit.

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La doctrine de l’agence

La doctrine de l’agence a tenté aussi de formaliser un cadre conceptuel explicatif de l’audit. Cette doctrine, une transposition de la théorie du mandat, consacre une typologie des relations contractuelle selon le schéma cidessous. Une entité ou une autorité donne mandat en

1. Entité ou Autorité qui requiert l’informati on

commanditant Décisi on

une

mission

d’audit,

notamment le Parlement, l’entité auditée ellemême par ses représentants habilités, un partenaire

extérieur

qui

a

besoin

de

l’information, par exemple avant de s’engager dans

une

opération,

d’Administration,

la

le

Conseil

Direction

Générale,

l’assemblée des actionnaires, le Président de la République, un Ministre habilité, etc.

Audit 2. Auditeur

Un professionnel, personne physique ou morale, de droit public ou privé, ou autorité administrative, indépendant de l’audité, dit

Rapport d’audit

auditeur interne s’il est localisé au sein de l’entité auditée ou dit auditeur externe s’il est situé en dehors de la ligne hiérarchique. L’audité, notamment une entreprise publique,

3. Entité qui rend compte

une collectivité locale, une agence, un projet Informations

ou programme, un contractant, une structure ministérielle,

interministérielle,

gestionnaire de ressources administratives et d’Etat

- 34 -

un

de valeurs

Au total, la théorie de l’agence repose elle aussi sur des postulats : - qu’un agent mandaté par un principal (actionnaire par exemple) comme auditeur, sur la base d’honoraires, était à même de garantir les intérêts du principal; - que les deux, principal et agent, s’accordent forcément sur des règles dont chacun tirera profit. La théorie a pour socle l’obligation de rendre compte comme un élément du contrat de mandat qui lie trois parties. La théorie de l’agence traduit-elle pleinement et intégralement le modèle des Inspections générales d’Etat ? La nature de ses trois métiers de base que sont la vérification, les études et conseils, les enquêtes de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages communément appelées lutte contre la corruption ?  Un cadre conceptuel influencé par « les normes généralement admises ou reconnues » Il existe une pluralité de normes dites « généralement admises ou reconnues » qu’il serait lourd d’inventorier toutes dans le présent document. Celles-ci sont constituées d’une part, d’un cadre général applicable à l’audit et aux enquêtes, à ses activités et tâches, de plus en plus de normes spécifiques aux investigations de détection et d’enquête, avec la percée et le développement du forensic audit et/ou du forensic accounting (normes de juriscomptabilité selon un certain - 35 -

lexique, notamment canadien), d’autre part, d’une série de paradigmes ou d’hypothèses, fondements ou facteurs explicatifs supposés conditionner les performances et l’efficience des auditeurs et des enquêteurs et du processus d’audit ou d’investigations. Du fait de leur variété ou de leur pluralité, peut-être est-il préférable d’en citer quelques unes en forte corrélation avec notre métier d’auditeur dans le secteur public : - les normes internationales pour la pratique professionnelle de l’audit interne de l’Institut des Auditeurs internes ; - la Déclaration de LIMA sur les lignes directrices de contrôle des finances publiques22 et les normes d’audit de l’Organisation internationale des Institutions supérieures de contrôle (INTOSAI) ; - les normes IFRS (International Financial Reporting Standard) ou normes internationales de rapport financier ; normes internationales de l’audit de la Fédération internationale des Comptables publics (IFAC/PSAC) ; - des normes de la Commission Européenne édictées sous forme de directives pour ses membres23;

A compléter avec le document « Code d’éthique et normes d’audit » élaboré par le Comité des normes de l’INTOSAI. 23 avec au demeurant 10 priorités retenues, parmi lesquelles la création d’un Comité de Réglementation de l’audit, la définition de mécanismes de coordination des différents systèmes de contrôle et d’audit ; diverses directives sur le droit des sociétés (1968), sur les comptes annuels (4ème directive), sans compter une stratégie formalisée d’information financière 22

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- aux Etats-Unis, le single audit Act, les normes particulières définies au niveau des Inspecteurs généraux, le Yellow Book ou Government Auditing Standards, valant normes à l’échelon du gouvernement fédéral, publiées par le Government Accountability Office (GAGAS), un remarquable document ; - la loi Sarbanes Oxley, bien qu’américaine, mais considérée comme un standard international de référence ; - récemment des normes de forensic audit ou de juriscomptabilité spécifiques à la prévention, à la détection et la poursuite des fraudes, des abus et des gaspillages.  les normes pour la pratique professionnelle de l’audit interne (Institut de l’Audit Interne) ;  lignes directrices de l’Association de l’Afrique du Sud et de l’Est des Comptables, etc. Il paraît difficile des les étudier toutes dans le présent ouvrage qui n’est pas à proprement parler un ouvrage d’audit, mais un écrit sur l’Inspection générale d’Etat, la référence aux normes étant faite à des fins d’illustration du réel, des enjeux et perspectives. Les fonctions d’Inspection générale d’Etat sont abordées dans la partie qui suit et parfois expliquées par référence aux normes d’audit. La question qui peut se poser est celle de la nature et de la portée de telles normes ; ce qu’elles ont de commun, de différent, la synergie possible ou réelle entre elles. C’est aussi celle de la valeur ajoutée similaire ou - 37 -

différente que chaque catégorie de norme ou chaque catégorie d’organisation professionnelle apporte au progrès de l’audit et de la gouvernance étatique, voire des organisations. La synthèse24 ci-dessous établit des similarités que l’on retrouve d’une norme à une autre. Paradigmes et hypothèses conceptuels

Cadre de l’audit, mandat et finalités Facteurs de performance

Processus d’audit, diligences et procédures obligatoires

Valeur ajoutée

A l’instar de la théorie de l’agence et des postulats de Mautz et Sharaf, des questions telles que la répartition des responsabilités entre l’auditeur, l’audité et le commanditaire. Obtenir l’assurance que les états financiers sont exempts d’erreurs matérielles causées par la fraude ou pouvant limiter les risques d’audit ; cependant une assurance absolue ne peut être obtenue, d’où l’intérêt de se référer aux normes d’audit généralement admises. Relations commanditaire, auditeur, entité vérifiée ; typologie des audit (comptable et financier, de performance, d’attestation des déclarations, etc.) Indépendance, statut légal, valeurs et capacités humaines, matérielles et financières. L’audit doit être exécutée par une personne indépendante, régie par une certaine éthique et un comportement déontologique, compétente, bien formée, possédant les habiletés requises. Les normes traitent du processus, de la planification en passant à l’exécution de la mission jusqu’à la finalisation du rapport et le suivi de ses conclusions : planification adéquate et efficiente fondée sur les risques, mission correctement et adéquatement supervisée, collecte de preuves ou d’éléments probants, évaluation du contrôle interne. L’auditeur doit maîtriser l’entité et son environnement, évaluer les risques d’erreurs et le système de contrôle interne (environnement, risques de contrôle, activités de contrôle, système d’information et de communication, suivi) de l’entité auditée. Matérialité et risques d’audit - Il doit exister des procédures d’audit sous forme de tests, d’évaluation de la pertinence des éléments probants collectés, d’échantillonnages, d’utilisation de méthodes statistiques et non statistiques. Améliorer le système de management des risques, de la gouvernance de l’entité, les fonctions de l’organisation ; contribuer à la réalisation des objectifs, etc.

24

An academic perspective on the new risk analysis audit standards. DR. Kenneth M. Macus. Professor of accounting and information systems. School of business – Edgewood College

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Pour répondre plus profondément à cette question des normes, une vue quelque peu analytique est présentée, en l’occurrence celles du Government Accountability Office, de l’Institut International d’Audit, d’INTOSAI, de juriscomptabilité, etc.  Structure General Accepted Government Auditing Standards – USA Champ d’application des normes – Finalités - Relations du GAGAS25 avec les autres catégories de normes - Typologie des audits - Terminologie Chapitre II Ethiques et principes en matière d’audit à l’échelon gouvernemental - Questions d’intégrité, de probité, d’objectivité- Ressources et autonomie Chapitre III Indépendance - Jugement professionnel et facteurs d’altération de l’indépendance et du jugement professionnel - Compétences Normes de travail - Pour les audits financiers, d’attestations de déclaration, de performance Détection des erreurs, élaboration des conclusions Normes de rapport aux tiers sur la conformité, le contrôle interne, les fraudes, abus et gaspillages Appuis au Comité d’audit Index NB - Certains aspects des normes ci-dessus sont détaillés plus loin en fonction de thématiques particulières retenues tout au long de l’ouvrage. Chapitre I



Structure des normes d’audit INTOSAI

Champ d’application

Buts, finalités

Indépendance Pouvoirs de contrôle et mandat

25

Code d’éthique Introduction - Intégrité – Indépendance - Secret professionnel – Compétence Normes d’audit- Comité des normes - 1991 Principes - Normes générales - Normes d’éthique Champ d’application Supervision - Etude et revue du contrôle interne - Conformité aux lois et règlements - Analyse des états financiers - Normes de rapport Glossaire Saine gestion des fonds publics et contrôle de la réglementation -Typologie des contrôles, contrôles a priori, a posteriori, interne, externe, de conformité, de régularité, de rendement. - Garanties par la constitution et/ou les lois et protection par un tribunal suprême, disponibilité de ressources appropriées, autonomie à cet égard. Accès aux registres, documents et livres, aux informations et à leurs supports, liberté de décider du lieu des travaux de contrôle, au siège de l’organisme à contrôler ou au siège de l’ISC.

Generally Accepted Government Auditing Standard

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Liens avec le Parlement Liens avec l’administration

Réalisation des constatations

Activité d’expertise, consultation

de

Méthodes, personnel contrôle

de

Personnel contrôle

de

Echange international Rédaction des rapports, à l’intention du Parlement et du public

Spécifiés par la constitution et présentation chaque année d’un rapport au Parlement - Mandataire du Parlement Contrôle des activités du gouvernement, des autorités administratives et des autres organismes qui en relèvent … Indépendance et responsabilité entière du gouvernement de ses actes et de ses omissions, sauf en cas d’expertise sous forme de jugements exécutoires et valides en droit. Délais régissant la communication à l’ISC des renseignements, des documents, registres, y compris les états financiers, les commentaires sur les constatations de contrôle de l’ISC prévus par la loi ou précisés par l’ISC, sur la suite réservée… Possibilité d’expertises au profit du Parlement et de l’administration, y compris de prises de position sur les projets de lois ou les autres règlements à caractère financier. Responsabilité des autorités administratives de l’acceptation ou du rejet de l’expertise… Programmes de contrôle établis par les ISC elles-mêmes, sans préjudice de … contrôle spécifiques initiés par d’autres organes… tenant compte de l’évolution des sciences et des techniques de gestion financière. Guides de contrôle des finances publiques… Compétence requises … Exigences de recrutement, d’expérience, de perfectionnement théorique et pratique, par le biais de programmes internes, universitaires et internationaux, etc. Traitements proportionnels aux exigences spéciales que comporte ce genre d’emploi. L’échange international d’idées et d’expériences dans le cadre de l’INTOSAI et publications… Terminologie uniforme du contrôle des finances publiques sur la base du droit comparé. Autorisation des ISC et prescriptions de la Constitution à présenter, chaque année et de manière autonome, un rapport public, largement diffusé, sur les résultats de son activité au Parlement ou à tout organe étatique responsable…entre deux rapports annuels, de présenter d’autres comptesrendus sur des questions particulièrement importantes et graves.…

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Contrôles

Contrôle des administrations nationales et les autres institutions établies à l’étranger en tenant compte des limites imposées par le droit international … Possibilité de contrôler de façon exhaustive la conformité aux lois et règlement, l’efficacité, la régularité, l’organisation et les réalisations de la perception les contributions publiques et des prévisions de recettes, d’avoir accès aux dossiers fiscaux individuels… suggestions des améliorations à l’organe législatif. Contrôle des sommes consacrés aux marchés et travaux publics, notamment des adjudications publiques…, en tenant compte des critères de la régularité des paiements, de l’efficacité de la gestion et de la qualité des travaux de construction. Contrôle des sommes consacrées aux installations de traitement électronique, axé sur les systèmes, la planification des besoins, l’utilisation économique du matériel informatique, la qualification du personnel, la prévention des abus et l’utilité de l’information produite. Contrôle a posteriori, notamment de l’efficience, de l’économie et de l’efficacité, des entreprises établies sous le régime de droit privé compétentes dans des activités économiques de l’Etat si la participation de l’Etat est majoritaire – ou si l’Etat y exerce une influence prépondérante. Rapports sur ces entreprises destinés au Parlement et au public tenant compte des restrictions visant à assurer la protection des secrets d’affaires et de fabrication. Habilitation à contrôler l’utilisation des subventions provenant de fonds publics, ainsi que l’ensemble de la gestion financière de l’Institution subventionnée, à l’utilisation des subventions à des fins non appropriées entraînant le remboursement des sommes octroyées. Promotion d’un contrôle externe Indépendant des organisations internationales et supranationales dont les dépenses sont couvertes par les cotisations des Etats membres…, établi conformément aux principes qui régissent le contrôle supérieur des finances publiques des Etats membres. Promotion de la sélection, pour a3surer l’Indépendance de ce contrôle, parmi les membres des ISC.

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 L’Institut Interne des Auditeurs a défini une série de normes IIA26 dites de qualification, de fonctionnement et de mise en œuvre, résumées ci-dessous. Normes qualification

de

Normes de fonctionnement

Gouvernance Planification

Accomplissement de la mission Communication des résultats

Surveillance Glossaire

Missions, pouvoirs et responsabilités des auditeurs internes… devant être prévus par une Charte d’audit...Indépendance organisationnelle et fonctionnelle, objectivité, notamment individuelle ; atteintes à l’indépendance et à l’objectivité, supervision et conflits d’intérêt. Compétences et conscience professionnelle, assistance par des conseils et experts ; connaissances suffisantes et connaissance des risques… Formation professionnelle continue ; programmes d’assurance qualité de l’audit interne, soins à accorder aux travaux d’audit, évaluation interne et externe de la qualité, rapport sur la qualité. Utilisation de l’informatique et de ses outils pour l’audit. Gestion de l’audit interne pour apporter de la valeur ajoutée. Planification fondée sur les risques et les priorités. Communication et approbation, gestion, allocation et affection de ressources suffisantes à la mission. Règles et cadre de procédures de l’audit interne, coordination et partage des informations. Rapport au Conseil et à la direction sur les risques, la gouvernance, etc. Nature du travail : évaluation du processus de management des risques, des contrôles, de l’efficacité du système de management des responsabilités, de la fiabilité des informations, de l’efficacité des opérations, la protection du patrimoine, le respect des lois et règlements. Missions de conseils ; contrôle et évaluation de la pertinence et de l’efficacité du système d’information, des buts et objectifs des opérations, des projets, es résultats. Critères de contrôle adéquats Conception et mise en œuvre des objectifs, efficacité des activités. Prise en compte des objectifs et activités, accord sur les objectifs de la mission, les responsabilités et les attentes liées. Evaluation préliminaire des risques, du champ de la mission, des systèmes, documents, du personnel, des biens… Programme de travail et procédures formalisés, définis, évaluation de la documentation et des informations, approbation avant la mise en œuvre. Identification des informations nécessaires, analyses et évaluations avant de tirer des conclusions. Documentation des informations, système de gestion et de conservation des archives. Supervision appropriée de la mission. Communication claire, précise, concise, objective, constructive sur les objectifs, le champ et les résultats de la mission, sur les points forts, en précisant les restrictions et indication des cas de non-conformité aux normes - Diffusion des résultats Suivi de la suite réservée aux résultats de la mission - Surveillance des actions de progrès -Existence d’un dossier approprié, à cet égard… Terminologie : signification et portée des principaux concepts

Normes internationales pour la pratique professionnelle de l’audit interne. Documentation Institut des Auditeurs Internes. 26

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 Normes d’exercice des missions de juriscomptabilité – Novembre 2006. Comptables agrées du Canada Introduction, champ d’application Définitions et concepts

Normes de travail et de fonctionnement

Normes minimales, esprit d’investigation, jugement professionnel que les praticiens de la juriscomptabilité doivent respecter, utiliser. Buts et finalités : protéger l’intérêt public. Missions portant sur des différends réels ou prévus, sur des situations de risques, de soupçons de fraudes ou sur des comportements illégaux ou contraires à l’éthique. Compétences requises en comptabilité (mode de documentation comptable, de gestion et de communication), d’enquête et d’esprit d’investigation (capacité à quantifier les estimations et les répercussions financières d’une opération ou d’un événement réel ou prévu, à évaluer et comprendre le contexte de la mission, les processus judiciaires, les lois et les règlements, les modalités de collecte ou de dissimulation des informations) - Scepticisme professionnel dans l’analyse, la recherche, la collecte, l’évaluation des informations. Applicabilité, conditions et modalités d’acceptation d’une mission. Planification adéquate et évolutive ; évaluation des travaux permettant d’identifier les objectifs de la mission, les circonstances et évènements, des limites, les informations, le calendrier, les ressources requises, notamment en conseils et experts, les hypothèses de travail, les approches et les techniques à envisager. Supervision des travaux, des assistants, mandataires et autres ressources humaines associées. Collecte, procédés de contrôle et analyse des informations… notamment pour protéger l’information confidentielle, conserver les dossiers ; prise en compte et évaluation de la cohérence des hypothèses raisonnables. Modalités et principes d’utilisation des travaux des tiers : évaluation de l’utilité, des compétences, de la réputation, des objectifs, de l’indépendance, des rôles et responsabilités respectifs. Documentation des dossiers : mentions, conservation, contenu (documents comptables, actes de procédures, lettres et correspondances, notes et rapports, tableaux de calcul, procès-verbal. Témoignages d’experts, etc.

Au total, l’on constate plusieurs catégories communes aux normes internationales d’audit et d’enquête: le jugement professionnel, la gestion des dossiers de vérification, la compétence et le renforcement des capacités, les critères d’audit, la typologie des contrôles et des méthodologies, les exigences d’efficience pour la planification, l’exécution des missions et la confection des rapports, l’exigence de valeurs d’éthique et de comportement, le besoin de valeur ajoutée, l’obligation de rendre compte. Cependant, en dépit des paradigmes, des - 43 -

concepts ou des catégories communes, il semble bien possible d’inventorier des particularités des normes de l’audit ou d’enquête.  Aux Etats-Unis, les normes du General Accountability Office consacrent quelques remarquables particularités27 : - un cadrage systémique et fermement affirmé de la finalité de l’audit, une démocratie saine, la nécessité pour les gouvernants, le législatif et le public de connaître que les résultats prévus sont atteints, que les services fournis le sont de manière efficace, efficiente, économe, éthique et équitable, l’obligation des dirigeants de rendre compte devant le Parlement et le public28: - une vision élargie du concept d’audit29 et de l’auditeur »

défini comme30 une série de spécialistes aux compétences 27

CF Yellow book avec les passages ci-dessous… “The concept of accountability for public resources is key in our nation’s governing process and a critical element for a healthy democracy. Legislators, government officials, and the public want to know whether government services are being provided efficiently, effectively, economically, and in compliance with laws and regulations. They also want to know whether government programs are achieving their objectives and desired outcomes, and at what cost. Government managers are accountable to legislative bodies and the public for their activities and related results. Government auditing is a key element in fulfilling the government’s duty to be accountable to the people. Auditing allows those parties and other stakeholders to have confidence in the reported information on the results of programs or operations, as well as in the related systems of internal control. Government auditing standards provide a framework to auditors so that their work can lead to improved government management, decision making, oversight and accountability. 29 redefining the types of audits and services covered by the standards, including an expansion of the definition of performance auditing to incorporate prospective analyses and other studies and adding attestation as a separate type of audit, • providing consistency in the field work and reporting 30 1This document addresses the standards that should be used by the individuals in audit organizations conducting the broad array of work that is described more fully in chapter 2. Accordingly, the focus of this document is not on the wide variety of titles that are used by individuals conducting and reporting on this work, but instead the nature of the work that is being performed. The term “auditor” throughout this document includes individuals who may be titled auditor, analyst, evaluator, inspector, or who may have a similar position. 28

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les plus diverses et au-delà de la revue du passé et du présent, englobant l’avenir – CF point 1.32 du GAGAS “Prospective analysis audit objectives provide analysis or conclusions, about information that is based on assumptions about events that may occur in the future along with possible actions that the audited entity may take in response to the future events. Examples of objectives pertaining to this work include providing conclusions based on a. current and projected trends and future potential impact on government programs and services; b. program or policy alternatives, including forecasting program outcomes under various assumptions; c. policy or legislative proposals, including advantages, disadvantages, and analysis of stakeholder views; d. prospective information prepared by management; e. budgets and forecasts that are based on (1) assumptions about expected future events and (2) management’s expected reaction to those future events; and f. management’s assumptions on which prospective information is based;

- un élargissement des critères d’audit (version 2007 du GAGAS) 31 et une explicitation des « audités » que sont les entités, les fonctions, les activités, les « programmes »32 comme items de base auxquels s’appliquent les audits33 ; - une référence au concept de ressources au sens large et non de ressources au sens restrictif de ressources financières, celles-ci pouvant être humaines, matérielles, financières ou informationnelles et envisagés comme un intrant aux résultats, approche très utile en audit des performances…

31

Government officials entrusted with public resources are responsible for carrying out public functions legally, effectively, efficiently, economically, ethically, and equitably.1 Government managers are responsible for providing 32 3Henceforth, the term “program” will be used in this document to include government establishments, organizations, programs, activities, and functions. 33 The standards and guidance in this document apply to audits and attestation engagements of government entities, programs, activities, and functions, and of government assistance administered by contractors, nonprofit entities, and other non governmental entities.

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 S’agissant de la déclaration de LIMA, il paraît possible de relever notamment deux particularités, la référence à des sources constitutionnelles ou dérivées et le concept d’institution supérieure de contrôle des finances publiques. Pour ce qui est du concept «institution supérieure de contrôle des finances publiques », en recherchant une définition formalisée et systémique, par exégèse et par la méthode du faisceau d’indices, il ressort que ce concept peut être appréhendé à travers des prescriptions ou les caractéristiques mises en évidence par la déclaration de LIMA. Une institution supérieure de contrôle des finances publiques serait avant une institution de contrôle de source constitutionnelle, dont l’existence et l’indépendance sont consacrées par la constitution ou au minimum par la loi, bénéficiant d’une indépendance fonctionnelle et organique, protégée par un tribunal spécial, à l’abri de toute pression, dotée de procédés de nomination et de révocation, faisant rapport au Parlement, et, en vertu de la section 9 de la déclaration, contrôlant les activités du gouvernement, des autorités administratives et des autres organes rattachés. Stricto sensu, le terme s’intéresse « aux vérificateurs législatifs ».

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 Quant aux normes du forensic audit, elles introduisent un lien entre la détection des fraudes, des abus et des gaspillages avec le processus judiciaire de poursuite, de défense d’un client, le droit pénal et les procédures pénales, d’où l’intérêt pour l’un des métiers de base des Inspections générales d’Etat: les enquêtes de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages. Au total, au vu des similarités, des différences et des synergies possibles entre les normes, quelles seraient les forces et les faiblesses actuelles du système IGE ? Quelles sont les menaces, les opportunités possibles et les marges d’amélioration et de progrès souhaitables ? Comment opérationnaliser de nouvelles perspectives, s’il y a lieu ? Faudrait-il encore avant tout répondre aux interrogations et problématiques déjà mises en évidence, s’interroger sur ce qu’est fondamentalement le système « IGE »34, du point de vue du droit public constitutionnel et administratif et du système global de management étatique au sein de nos pays ? I.2. Principes directeurs Dans le système créé par certains pays africains, l’Inspection générale d’Etat exerce un certain nombre de métiers en profonde synergie, d’audit, d’enquêtes ad hoc, d’études, d’évaluations rétrospectives et prospectives, de suivi des directives présidentielles lorsque ses propositions sont approuvées par le Président de la République ou le Chef de Gouvernement. Globalement, 34

Inspection générale d’Etat

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ce dispositif crée un système qui allie vérification, études, évaluations et conseils et enfin enquêtes de détection et de prévention des fraudes, des abus et des gaspillages.

Enquêtes de prévention et de détection des fraudes

Audits et vérifications

Propositions IGE

Décision du Chef du Gouvernement

Suivi et contrôle de la mise en oeuvre

Directives présidentielles

Etudes, évaluations et conseils

Un premier questionnement apparaît : en quoi l’ancrage institutionnel à un si haut niveau est-il nécessaire ou pertinent ? Peut-on alors procéder à une relecture de l’option à la lumière des normes internationales ou inversement les normes internationales à la lumière de l’option ?

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I.3. Relecture de l’option Inspection générale d’Etat à la lumière des normes internationales généralement admises I.3.1. La fonction « Audit » Du point de vue des Inspections générales d’Etat, le terme « Audit » a pu, plus ou moins et pendant un certain temps, être méconnu, selon les pays africains. Au cours de cette période transitoire, l’audit est purement comptable et financier ; il est un métier des cabinets d’expertise comptable. En Afrique francophone, le vocable « vérification » reste ainsi pendant longtemps d’usage35. Mais pourtant, l’audit est une veille technique utilisée déjà par des rois et des empereurs pour faire contrôler les intendants et les percepteurs. Diverses études doctrinales tendent à établir que le terme viendrait du latin « Audire, auditur » qui évoque l’idée d’écouter, entendre, ce qui n’est pas sans rappeler les techniques d’entretien encore en vigueur et basées sur l’écoute, les questions orales ou écrites, etc. Historiquement, l’audit est une discipline qui s’est diversifiée au fil du temps. « Tout est auditable », a-t-on pu dire, ce qui pose le problème de la typologie des audits, en somme leur caractère diversifié, mais aussi l’enjeu de l’intégration avec les options de la vérification à objectif intégré et/ou étendu.

35

Il faut remarquer qu’au Canada, au niveau du Bureau du Vérificateur général du Canada, selon qu’il s’agit d’une publication en anglais ou en français, les termes audit ou vérification sont respectivement utilisés.

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Le concept d’audit et sa portée sont résumés ci-dessous par référence à des doctrines et normes internationales du GAO36, de l’INTOSAI37 et de l’IIA38.  L’audit à la lumière des concepts développés par l’Institut de l’audit interne Pour l’Institut de l’Audit interne, « l’audit interne est une activité indépendante et objective qui donne à une organisation une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui apporte ses conseils pour les améliorer, et contribue à créer de la valeur ajoutée. Il aide cette organisation à atteindre ses objectifs en évaluant, par une approche systématique et méthodique, ses processus de management des risques, de contrôle, et de gouvernement d’entreprise, et en faisant des propositions pour renforcer leur efficacité. » Par rapport à la nature du travail d’audit qui constitue nos propos dans la présente partie de l’ouvrage39, « l'audit interne doit évaluer les processus de management des risques, de contrôle et de gouvernement d’entreprise et contribuer à leur amélioration sur la base d’une approche systématique et méthodique. ». Le document propose les finalités poursuivies dans chacun des domaines :

36

Government Accountability Office dont l’ancienne appellation est le General Accounting Office. 37 Organisation Internationale des Institutions Supérieures de Contrôle. 38 Institut des Auditeurs Internes. 39 CF Point 2100 du document « Normes internationales pour la pratique professionnelle de l’audit interne »

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Thèmes

Code IIA 2110

2110.A1 Management des risques

2110.A2

2110.C1

2110.C2

2120

2120.A1

Contrôle

2120.A2

2120.A3

2120.A4

2120.C1

2120.C2

Finalités de l’audit interne selon IIA Identifier et évaluer les risques significatifs, pour aider l’organisation et contribuer à l'amélioration des systèmes de management des risques et de contrôle. Surveiller et évaluer l'efficacité du système de management des risques de l'organisation. Evaluer les risques liés au gouvernement d’entreprise, aux opérations et aux systèmes d'information de l'organisation au regard : de la fiabilité et de l’intégrité des informations financières et opérationnelles ; de l’efficacité et l’efficience des opérations ; de la protection du patrimoine ; du respect des lois, des règlements et des contrats. Pour les auditeurs internes, considérer, au cours des missions de conseil, l’ensemble des risques rencontrés, y compris ceux qui n’entrent pas dans le périmètre de la mission, dans la mesure où ils sont significatifs. Intégrer dans le processus d’identification et d’évaluation des risques significatifs de l’organisation les risques révélés lors de missions de conseil. Aider l'organisation à maintenir un dispositif de contrôle approprié en évaluant son efficacité et son efficience et en encourageant son amélioration continue. Evaluer sur la base des résultats de l’évaluation les risques, la pertinence et l'efficacité du dispositif de contrôle portant sur le gouvernement d’entreprise, les opérations et les systèmes d'information de l'organisation, en ce qui concerne les aspects suivants : la fiabilité et l’intégrité des informations financières et opérationnelles ; l’efficacité et l’efficience des opérations ; la protection du patrimoine ; le respect des lois, des règlements et des contrats. Déterminer dans quelle mesure des buts et les objectifs concernant les opérations et les projets ont été définis et si ces buts et ces objectifs sont conformes à ceux de l'organisation. Passer en revue les opérations et les projets afin de déterminer dans quelle mesure les résultats suivent les buts et les objectifs établis et si ces opérations et projets sont mis en oeuvre ou réalisés comme prévu. Déterminer dans quelle mesure le management a défini des critères adéquats pour apprécier si les objectifs et les buts ont été atteints. Si ces critères sont adéquats, les utiliser pour l’évaluation. S'ils sont inadéquats, travailler avec le management pour élaborer des critères d'évaluation appropriés. Examiner, au cours des missions de conseil, les processus de contrôle interne en accord avec les objectifs de la mission et accorder une attention à l’existence de toute faiblesse de contrôle significative. Prendre en compte dans le processus d’identification et d’évaluation des risques significatifs de l’organisation le dispositif de contrôle interne.

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Thèmes Gouvernement d’entreprise

Code IIA 2130

2130.A1

2130.C1

Finalités de l’audit interne selon IIA Evaluer le processus de gouvernement d’entreprise et formuler les recommandations appropriées en vue de son amélioration. À cet effet, déterminer si le processus répond aux objectifs suivants : promouvoir des règles d’éthique et des valeurs appropriées au sein de l’organisation ; garantir une gestion efficace des performances de l’organisation, assortie d’une obligation de rendre compte ; bien communiquer aux services concernés au sein de l’organisation les informations relatives aux risques et aux contrôles ; fournir une information adéquate au Conseil, aux auditeurs internes et externes et au management, et assurer une coordination efficace de leurs activités. Evaluer la conception, la mise en oeuvre et l’efficacité des objectifs, des programmes et des activités de l'organisation liés à l’éthique. Définir des objectifs de la mission de conseil qui doivent être en cohérence avec les valeurs et les objectifs généraux de l’organisation.

Cette définition de l’IIA, bien qu’intéressante, reste profondément influencée par les systèmes de l’entreprise privée ; elle a cependant le mérite d’expliciter l’audit en terme de valeur ajoutée. Elle induit aussi la question pertinente de ce qu’est la gouvernance des entités, en somme celle d’une définition opérationnelle du concept de gouvernance de gestion au sein du secteur public. Elle semble aussi se réduire aux opérations, aux systèmes d’information, au dispositif de contrôle, au patrimoine et aux ressources, aux valeurs et à l’éthique et corrélativement à la gestion des contraintes légales. Elle induit des jugements professionnels qui tournent autour de critères d’adéquation, de conformité, d’efficacité, d’efficience, de fiabilité, d’intégrité.

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 L’audit selon Accountability Office

les

normes

du

Governement

Un document, d’une haute valeur ajoutée pour l’audit dans le secteur public, publié par le Government Accountability Office des Etats-Unis (GAO), intitulé « Normes d’Audit Gouvernemental » propose une typologie des audits, sur la base du principe suivant : « Tous les audits supposent au début la détermination d’objectifs qui à leur tour déterminent le type d’audit qui sera mené et les normes qui lui seront applicables. ». Sur cette base, le manuel du GAO propose la typologie suivante40 : - « les audits financiers destinés à fournir une opinion indépendante et une assurance raisonnable sur la fiabilité des états financiers et des informations financières publiés par une entité ; démarche incluant des rapports sur les contrôles internes, la conformité aux lois, aux règlements et aux dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles en vigueur, les transactions, les processus et les systèmes financiers ; - les audits de performance destinés à fournir une analyse sur l’utilisation, par ceux chargés de la gouvernance d’une entité, de l’information pour améliorer la performance des programmes41 et des opérations, réduire les coûts, faciliter la prise de décision 40

La typologie présentée ci-dessus constitue un résumé. Les lecteurs peuvent accéder aux détails y afférents dans le Yellow book, à l’adresse http://www.gao.org ; A notre avis, ce document est d’une qualité incomparable dans l’ordre international et mérite une grande attention. 41 Dans l’approche américaine du GAO, la notion de programme est définie comme incluant les entités du gouvernement, les organisations, les activités et les fonctions.

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de ceux qui ont la responsabilité de superviser ou de prendre des mesures correctives… » Le manuel attire l’attention sur la variété des objectifs de l’audit des performances qui peuvent inclure l’évaluation de l’efficacité des programmes, l’économie et l’efficience, le système de contrôle interne, la conformité, des analyses prospectives. A cet égard, il est précisé qu’un audit des performances peut englober plusieurs objectifs, par exemple, si un tel audit au début n’envisageait que l’efficacité des programmes, il peut se révéler utile par la suite d’examiner les contrôles internes pour se prononcer sur les causes qui expliquent le manque d’efficacité et sur les moyens d’améliorer celle-ci. L’un des aspects que met évidence le document ci-dessus cité est le caractère fréquemment inter relié entre les concepts suivants : efficacité des programmes, objectifs de l’audit, économie, efficience. Aussi, est-il expliqué, que des objectifs d’audit qui mettent l’accent sur l’efficacité et les résultats d’un programme évaluent généralement dans quelle mesure celui-ci atteint ses buts et objectifs. Des objectifs d’audit qui mettent l’accent sur l’économie et l’efficience s’intéressent aux coûts et aux ressources utilisées pour réaliser les résultats du programme.

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Exemple d’objectifs d’audit proposés par le manuel du Government Accountability Office Audit de l’efficacité des programmes

Audit de l’efficience des programmes

Thèmes Dans quelle mesure les buts et les objectifs de nature législative, réglementaire, organisationnelle sont-ils atteints ou sont-ils entrain de l’être ? Y a-t-il une relative marge de manœuvre pour des approches alternatives permettant d’améliorer les performances du programme ou d’éliminer les facteurs qui altèrent l’efficacité du programme ? Coût/ Efficacité des programmes et des activités ? Dans quelle mesure le programme produit-il des résultats qui ne sont pas concordants par rapport aux objectifs de programme retenus ? Dans quelle mesure le programme fournit-il un accès (distribution) équitable aux ressources publiques, compte-tenu de paramètres statutaires ou autres ? Dans quelle mesure des programmes dupliquent-ils, se chevauchent-ils ou entrent-ils en conflit avec d’autres programmes ? Dans quelle mesure l’entité auditée met-elle en œuvre de saines pratiques d’acquisition / d’achat ? Dans quelle mesure le système de mesure des performances est-il fiable, pertinent et valide pour évaluer l’efficacité et les résultats des programmes, leur caractère économique et leur efficience ? Dans quelle mesure l’information financière est-elle fiable, valide et pertinente pour les aspects liés à la performance des programmes ? Le programme obtient-il en retour une valeur ajoutée appropriée compte-tenu des coûts supportés ou des montants mis en paiement ou pour ce qui concerne les revenus encaissés ? Dans quelle mesure les services gouvernementaux et leurs prestations sont-ils accessibles à ceux qui en ont droit ? Dans quelle mesure les honoraires/tarifs recouvrent-ils les coûts ? Dans quelle mesure et comment est-il possible de diminuer les coûts unitaires d’un programme ou/et d’augmenter sa productivité ? Dans quelle mesure les intrants en ressources sont-ils obtenus à un coût raisonnable tout en permettant la réalisation des objectifs en qualité appropriée et à temps ?

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Le remarquable travail accompli par le Gao, à travers le Government Auditing Standard, distingue aussi des objectifs d’audit qui concerne d’une part, le contrôle interne, d’autre part, la conformité aux lois et règlements, aux dispositions contractuelles ou aux d’accords de subventions et enfin, aux analyses prospective.42 Pour le Gao, les objectifs d’audit du contrôle interne ont trait à l’évaluation des différentes composantes du système de contrôle interne destinées à donner l’assurance raisonnable du fonctionnement efficace, fiable et efficient des opérations, du système d’information financière et des performances, de la conformité aux lois et aux règlements. Ainsi, « les objectifs de contrôle interne peuvent s’avérer importants lorsqu’ils s’agit de déterminer les causes liées à une performance non satisfaisante ; le contrôle interne inclut ainsi les plans, les politiques et les méthodes utilisés pour atteindre les objectifs et les buts de l’entité, ainsi que ses objectifs, les processus et les procédures utilisés pour planifier, organiser, diriger et contrôler les opérations liées aux programmes, le système de management pour mesurer, faire rapport et assurer le suivi les performances. » Le manuel donne quelques exemples d’objectifs d’audit en rapport avec le système de contrôle interne.

42

En fait, le GAO est beaucoup plus qu’un bureau d’audit, c’est une véritable machine d’études, de conseils, avec un volet audit. Elle s’oriente de plus en plus vers la prospective… Il semble que les audits financiers ne dépassent pas 15 % du temps de travail du GAO.

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Objectifs d’audit du contrôle interne

Thèmes Dans quelle mesure les missions, les buts et les objectifs de l’entité sont-ils réalisés de façon efficace et efficiente ? Les ressources sont-elles utilisées en conformité avec les lois, les règlements et les autres exigences ? Les ressources (y compris l’information sensible stockée dans ou en dehors de l’entité) sont-elles protégées des acquisitions, des manipulations ou des utilisations non autorisées ? Dans quelle mesure l’intégrité des données informatisées est-elle préservée ? Des plans d’urgence (de rechange) en ce qui concerne les systèmes d’information sont-ils prévus pour faire face aux perturbations indues ou non désirées des activités ou des fonctions pris en charge par le système ?

Le document du Gao définit les objectifs d’audit de conformité comme ceux qui ont trait à des critères établis par les lois, les règlements, les dispositions contractuelles, aux autres exigences de cette nature qui pourraient affecter l’acquisition, la protection, l’utilisation et la disponibilité des ressources, en quantité et qualité appropriées, à temps, voire les coûts du service que l’entité produit ou met à disposition… Objectifs d’audit de conformité

Thèmes Les buts, les modalités de réalisation, les services fournis, les résultats ou la population bénéficiaire sont-ils conformes à ceux prévus par les lois, les règlements, les dispositions contractuelles, les accords de subventions ou autres exigences similaires ? Les services et les prestations sont-ils fournis en tenant compte des critères d’éligibilité applicables pour accéder ou obtenir des services ou prestations ? Les revenus perçus le sont-ils conformément aux lois, aux règlements, aux contrats ou clauses de conventions de subventions ?

Par ailleurs, le Government Auditing Standard définit aussi des objectifs d’audit liés aux analyses prospectives destinés à fournir des conclusions basées sur des hypothèses événementielles susceptibles de se réaliser - 57 -

dans le futur ainsi que des actions que l’entité auditée doit assumer en réponse à ces futurs et probables évènements. Le document donne à cet égard quelques exemples d’objectif d’audit d’analyses prospectives. Objectifs d’audit d’analyses prospectives

Thèmes Les tendances actuelles et celles projetées, l’impact futur et potentiel sur les programmes gouvernementaux. Alternatives de programmes ou de politiques y compris les prévisions des résultats de programmes estimés à partir d’hypothèses variées. L’information prospective préparée par le management de l’entité auditée. Budgets et prévisions élaborés sur la base des hypothèses du futur probable et les comportements probables des gestionnaires comptetenu des évènements futurs. Les hypothèses de gestion sur lesquelles s’appuie l’information prospective.

Enfin, le GAGAS43 met en relief des services professionnels autres que ceux fournis par les organisations d’audit si cela est prévu par des dispositions statutaires ou autres: collecte et transmission d’information à la demande, sans pour autant qu’il ait une évaluation par un auditeur ou une vérification de l’information ou des données qu’elle comporte ; le développement de normes, de méthodologies, de guides ; la collaboration avec des organisations professionnelles pour l’avancement des audits à l’échelon gouvernemental, l’assistance à des travaux législatifs, le fait de dispenser des séances de formation, l’identification de bonnes ou meilleures pratiques . Au total, le concept développé par le Gao est extensif, voire intégré et systémique. Il va au-delà de l’audit stricto 43

Government Auditing Standard

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sensu pour englober diverses études, évaluations et prospectives, ce qui, sur ce champ, le rend très voisin du concept d’Inspection générale d’Etat et son triptyque « Audit, Etudes et Conseils, Enquêtes de prévention et de détection des fraudes. » Le changement de dénomination de GAO, en corrélation avec ce qui précède, est en soi-même intéressante. Pour comprendre, mieux vaut retourner aux sources écrites44 attestant des témoignages de son personnel dirigeants au cours des décennies : - David M. Walker, Comptroller General of the United State: “After 83 years, the General Accounting Office has changed its name to the Government Accountability Office. Some might wonder why GAO felt a need to tinker with an in institutional identity so strongly associated with government economy, efficiency, and effectiveness. But our old name, as familiar and reassuring as it was, had no kept pace with GAO’s evolving role in government. The truth is that “accounting” has never been our chief mission” - Plus loin, le patron de GAO précise ce qui suit : « GAO has become a modern, multidisciplinary professional services organization whose 3200 employees include economists, social scientists, engineers, actuaries, and computer experts as well as specialists in areas from health care to homeland security.”

Le GAO est ainsi, au-delà de l’attestation des comptes (15 % de son travail), beaucoup plus qu’un auditeur des comptes. C’est un véritable bureau d’études. 44

CF article: GAO answers the question: what’s in a name. By David M. Walker. Comptroller General of the United States. See also « The Comptrollers General of the United States and a conversation with the surviving VGH’S. Donald E. Tidrick, Ph D, CPA, CMA, CIA. Deloitte Professor of accountancy. Nothern Illinois University. - 59 -

 L’audit à la lumière des manuels développés par les bureaux des Inspecteurs généraux aux Etats-Unis Aux Etats-Unis, les Bureaux d’Inspecteurs généraux, dans le cadre de la loi de 1978 sur l’Inspection générale, de l’association des Inspecteurs généraux, du Conseil Présidentiel pour l’Intégrité et l’Efficience et du Conseil Exécutif pour l’Intégrité et l’Efficience ont finalisé d’importants outils pour leurs travaux d’audit, d’évaluation, d’enquête, notamment ceux indiqués cidessous : - Normes de qualité pour les investigations, en décembre 2003 - Principes et normes pour les Bureaux d’Inspecteur général, autour de six éléments de base : les principes, les normes de qualité pour la gestion des bureaux, les normes de qualité pour les inspections, les évaluations et revues, les normes de qualité pour les audits ; point de départ des autres manuels publiés ultérieurement et indiqués ci-après (version mai 2004) ; - Normes de qualité pour les Inspections publié en janvier 2005 dans le cadre du Conseil Présidentiel de l’Intégrité et de l’Efficience et du Conseil Exécutif sur l’Intégrité et l’Efficience… Il ressort de la loi précitée, un certain nombre d’objectifs poursuivis avec la création des bureaux d’Inspecteurs généraux:

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- « procéder ou superviser des audits et investigations, pour tout ce qui concerne les programmes et les opérations du gouvernement ; - assumer et promouvoir un leadership et la coordination de telles activités, et recommander à cet égard des politiques appropriées ; - promouvoir l’efficacité, l’efficience et l’économie au sein de l’administration; - prévenir et détecter les fraudes et les abus au niveau des programmes et opérations susvisés ; - donner au Congrès et aux Responsables d’agences les moyens d’être informés de tous les problèmes et déficiences relatifs à la gestion des programmes et des opérations précités… »  L’audit à la lumière des concepts développés par l’INTOSAI La déclaration de Lima, dans sa version française45, se réfère au concept de contrôle rapporté aux finances publiques, en définissant les buts du contrôle comme étant de « signaler en temps utile les écarts par rapport à la norme ou aux atteintes aux principes de la conformité aux lois, de l'efficience, de l'efficacité et de l'économie de la gestion financière… que l'on puisse, dans chaque cas, prendre des mesures correctives, préciser la responsabilité des parties en cause, obtenir réparation ou

45

La version anglaise

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prendre des mesures pour empêcher, ou du moins rendre plus difficile, la perpétration d'actes de cette nature. » La déclaration propose la typologie des contrôles suivants : contrôle a priori et contrôle a posteriori (Section 2 de la déclaration) ; contrôle interne et externe (Section 3 de la déclaration). Elle met en évidence certaines présomptions en ce qui concerne les deux types de contrôles : - « le contrôle a priori, vérification avant le fait des activités administratives ou financières, pouvant être exercé par une Institution supérieure de contrôle des finances publiques ou par d'autres organismes de contrôle ; il offrirait l'avantage de pouvoir prévenir les actes préjudiciables avant qu'ils ne surviennent, mais, par contre, a le désavantage de créer un volume de travail excessif et une certaine confusion quant aux responsabilités prévues par le droit public ; - le contrôle a posteriori, vérification après le fait, exercé par une Institution supérieure de contrôle des finances publiques, permettant de souligner la responsabilité des parties en cause et éventuellement d'obtenir réparation pour les préjudices subis et d’empêcher la répétition des infractions commises. » Face au diptyque contrôle a priori et contrôle a posteriori, la déclaration rappelle aussi la typologie contrôle interne et contrôle externe : - les services de contrôles internes sont ceux qui appartiennent ou relèvent d’un organisme ou d’une - 62 -

institution du secteur public, certes relevant nécessairement de la direction de l'organisme, mais devant jouir d'une indépendance fonctionnelle et organisationnelle la plus grande possible au sein de la structure organisationnelle à laquelle il s'intègre ; - les services de contrôle externe sont ceux qui ne font pas partie de la structure organisationnelle des institutions à vérifier, lesquels ont la qualité d’Institutions supérieures de contrôle des finances publiques et ont notamment pour tâche d'examiner l'efficacité du contrôle interne. Pour la déclaration de Lima, la fonction traditionnelle des Institutions supérieures de contrôle des finances publiques englobe le contrôle de conformité aux lois, le contrôle de la régularité de la gestion financière et de la comptabilité, ainsi que le contrôle du rendement. Elle souligne qu’à côté de ceux-ci subsiste aussi « un autre genre de contrôle d'égale importance visant à mesurer la performance, l'efficacité, le souci d'économie, l'efficience et l'efficacité de l'administration publique. Le contrôle du rendement porte non seulement sur des opérations financières spécifiques mais également sur l'ensemble des activités du secteur public, y compris les systèmes d'organisation et d'administration.46 » Pour la Déclaration de Lima, les objectifs de contrôle des Institutions supérieures de contrôle des finances publiques - conformité aux lois, régularité, souci d'économie, efficience, et efficacité dans la gestion 46

Cette partie de la déclaration ouvre une fenêtre sur toutes les autres formes de vérification possible, au sens de l’audit et de ses différentes spécificités.

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financière – « ont tous, fondamentalement, la même importance. Cependant, il appartient à l'Institution supérieure de contrôle des finances publiques d'établir l'importance relative à chacun. » I.3.2. La fonction « Etudes et conseils En pratique, le choix d’une Inspection générale d’Etat, telle que créée en Afrique, est de faire coexister les activités d’audit, de conseils, voire d’études47 et d’enquête. L’Institut de l’Audit interne (IIA) dans sa publication « Normes internationales pour la pratique professionnelle de l'audit interne» définit au niveau d’un glossaire ce à quoi correspond des activités de conseil, celles-ci étant faites en direction du client donneur d’ordre, dont la nature et le champ sont convenus au préalable avec lui. Ces activités ont pour objectifs de créer de la valeur ajoutée et d’améliorer les processus de gouvernement d’entreprise, voire de gouvernance, de management des risques et de contrôle d’une organisation sans que l’auditeur interne n’assume aucune responsabilité de management. Le document donne quelques exemples tels que les avis, les conseils, l’assistance et la formation. En outre, la norme IIA48 précise que le responsable de l’audit interne à qui est proposé une mission de conseil, avant de l’accepter, doit considérer dans quelle mesure 47

Le fonctionnement au quotidien d’une Inspection générale d’Etat aboutit à de multiples notes ou études en direction de l’autorité présidentielle 48 IIA : signe en anglais de l’Institut des Auditeurs Internes (Institute of Internal Auditors)

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elle est susceptible de créer de la valeur ajoutée, d’améliorer le management des risques et le fonctionnement de l’organisation, les missions de conseils qui ont été acceptées devant être intégrées dans le plan d’audit. Les Normes d’Audit gouvernemental publiées par le General Accountability Office, tout en présentant les « prestations de services professionnels autres que les audits fournis par un Bureau d’audit »49 comme ne relevant pas de ce document, recommandent aux organisations d’audit de s’interroger si en fournissant de tels services, ne se poseraient pas des conflits avec l’indépendance requise lors des audits au sein d’entités déterminés. Par contre, si l’on se réfère aux normes de l’Institut des Auditeurs Internes, dans sa publication « Normes internationales pour la pratique professionnelle de l'audit interne» au niveau du glossaire, la question est posée en terme d’une activité d’audit interne étant considérée comme quasi-concomitante à celle de l’audit interne. Ainsi, l’IIA définit l’activité d'audit interne comme celle assurée par un service, une division, une équipe de consultants ou tout autre praticien ; c’est une activité indépendante et objective qui donne à une organisation une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui apporte ses conseils pour les améliorer, et contribue à créer de la valeur ajoutée.

49

Paragraphe 133 du document Normes d’audit gouvernemental du General Accountability Office

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Enfin, la Section 12 de la déclaration de Lima intitulée « Activité en tant qu'experts et droits de consultation » recommande la prise en compte de deux normes : 1. « la mise, le cas échéant, par les Institutions supérieures de contrôle des finances publiques, de leurs connaissances spécialisées, à la disposition du Parlement et de l'Administration, sous forme d'expertises y compris de prises de position sur les projets de lois ou les autres règlements à caractère financier, les autorités administratives étant seules responsables de l'acceptation ou du rejet de l'expertise; sans que, en outre, ce complément d'information ne puisse présumer des constations futures de l'Institution supérieure de contrôle des finances publiques et porter atteinte à l'efficacité de son activité de contrôle ; 2. l’émission des règlements visant à établir des procédés appropriés de comptabilité et aussi uniformes que possible en accord avec l'Institution supérieure de contrôle des finances publiques. » Au total, si par exemple, dans l’audit interne, notamment dans le secteur privé, il s’agit d’activités menées sur une base contractuelle50, dans le cas des Inspections générales d’Etat, il s’agit d’une activité permanente qui peut se déclencher à tout moment, à la demande de l’autorité présidentielle ou sur initiative et auto-saisine des Inspecteurs généraux eux-mêmes. Les activités de conseil ainsi menées concernent souvent des questions 50

Ce qui explique sans doute la conception de donneur d’ordre susvisée par la définition de l’Institut des Auditeurs Internes susvisé.

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ponctuelle ou dont l’envergure ne nécessite pas forcément l’application de procédure d’audit approfondi et un processus dont le traitement est d’une durée beaucoup moins longue que s’il s’agissait d’une vérification… L’activité s’insère ainsi dans le mandat général déjà défini par la loi ou les règlements sur l’Inspection générale d’Etat, elle est intrinsèque aux fonctions d’un chef d’exécutif et au mandat de l’Inspection générale d’Etat elle-même. C’est notamment pour faciliter l’exercice d’un tel mandat que dans plusieurs pays, le dispositif juridique en vigueur prévoit que l’IGE est tenue informée des orientations générales de la politique du gouvernement dans tous les secteurs de la vie publique, qu’elle est destinataire des attestations des conseils des ministres, de tous les textes administratifs relatifs à l’organisation et au fonctionnement administratif, financier et comptable ; qu’elle reçoit tous les rapports établis par les Inspections générales ou techniques internes des départements ministériels… I.3.3. La fonction « Prévention et détection des fraudes, des abus et des gaspillages

 Définitions et panorama de normes Au niveau international prévalent à cet égard plusieurs normes, par le biais d’un certain nombre d’instruments internationaux, notamment la Convention des Nations Unies contre la corruption, véritable charte de 71 articles. Par exemple, celle-ci, en son article premier, stipule qu’elle a pour objet de promouvoir et de renforcer les mesures visant - 67 -

à prévenir et à combattre la corruption de manière efficace, de promouvoir, de faciliter et d’appuyer la coopération internationale et l’assistance technique aux fins de la prévention de la corruption et de la lutte contre celle-ci, y compris les recouvrements d’avoirs, de promouvoir l’intégrité, la responsabilité et la bonne gestion des affaires publiques et des biens publics. Il faut remarquer que ladite convention traite des institutions de lutte anti-corruption, mais il semble bien qu’on n’ait pas encore suffisamment tiré les conséquences sur les corps de corps d’Etat dont l’une des fonctions est la prévention et la détection des fraudes, des abus et des gaspillages.

Si la fraude est ainsi devenue une préoccupation majeure des Etats, des bailleurs et des donateurs, le débat s’est posé sur la capacité de l’audit à détecter les fraudes ; d’abord le coût des détections peut s’avérer élevé en temps et en honoraires ; en outre, dans une certaine mesure, les experts ne s’accordent pas sur l’habilitation ou la capacité des auditeurs à s’orienter vers la détection des fraudes, certains estimant que leur rôle est plutôt d’identifier les facteurs liés aux risques de fraudes et l’impact sur les états financiers. Il faut souligner qu’à la vision comptable et financière pure et dure, s’ajoutent d’autres analyses de type quasi-psychosociologique, présentés ci-dessous, notamment le « Triangle de la fraude ». A cet égard, la doctrine a tenté de formaliser le phénomène de la fraude, en mettant en relation trois éléments explicatifs de la fraude : 1) les attitudes ou comportements, 2) la motivation, 3) l’opportunité. Aussi, une partie de la doctrine a-t-elle repris et accepté le

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schéma du triangle de la fraude qui comprendrait trois pôles :  la motivation ou les facteurs pouvant influencer un employé à commettre la fraude les incitations et les pressions qui petit à petit obligent à passer à l’acte, par exemple des difficultés financières personnelles ;  l’opportunité,qui serait l’aspect le plus important, l’agent à un poste de travail se rendant compte qu’il est possible de s’approprier des actifs, des espèces, en raison de lacunes, des possibilités de cacher les soustractions frauduleuses (un petit objet qu’on peut glisser dans sa poche, absence de contrôle interne);  les attitudes et les comportements, souvent appuyés d’une certaine rationalité (rationalisation au sens de justification ou d’auto-justification), par exemple l’orientation vers un choix ou style de vie coûteux, sans rapport avec les gains normaux de la personne. Motivation

Opportunités Rationalisation

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Motivations et incitations Conditions de travail défavorables - Problèmes familiaux, de santé et de coût des soins Endettement personnel Pressions du groupe ou de l’environnement - Attentes irréalistes de gains engendrant une insatisfaction, style de vie extravagant… Problèmes personnels financiers, personnels et familiaux. Détresse familiale, jeux d’argent, drogue, alcool, maîtresse… Incitation et pressions du staff pour (à) frauder Obligeant à diminuer ou augmenter les revenus

Opportunités

Contrôles internes inexistants ou limités

Faiblesses organisationnelles de l’entité, par exemple du système de contrôle interne.

Rationalité Processus mental qui convainc que l’entreprise frauduleuse va réussir, sans dommage ou risques Perception du caractère raisonnable du succès de l’entreprise

C’est toléré, tout le monde le fait. Pourquoi pas moi (nous) ? Je ne peux pas être pris L’argent ne manque pas, il coule à flot. L’entité ne perdra pas beaucoup Il y a assez d’argent, autant en profiter ; Ils servent, pourquoi pas moi. Je rembourserai.

Les normes d’audit interne de l’IIA définissent la fraude comme « tout acte illégal caractérisé par la tromperie, la dissimulation ou la violation de la confiance. Les fraudes sont perpétrées par des personnes et des organisations afin d'obtenir de l'argent, des biens ou des services, ou de s'assurer un avantage personnel ou commercial. ».

Quant au GAGAS51 du Government Accountability Office, il dispose que les abus englobent un comportement déficient ou incorrect comparé au comportement normal qu’une personne devrait 51

Generally accepted government auditing standard ou normes d’audit gouvernemental généralement reconnues

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considérer comme étant raisonnable… Ils incluent aussi des abus d’autorité ou de position pour des intérêts financiers personnels. Ceux-ci n’incluent pas forcément des fraudes et des violations de la loi. En outre, la norme GAGAS prescrit aussi des normes sur les fraudes lors des audits financiers, les auditeurs qui ont des responsabilités en la matière, devant étudier les déficiences du contrôle interne, les actes de fraudes et les abus qui pourraient altérer les états financiers et déterminer si ceux qui sont chargés de la gouvernance de l’entité en sont suffisamment informés. Ils doivent également envisager si la divulgation de tels actes ne porterait pas atteinte au déroulement des processus légaux d’investigation en cours… En matière comptable, des recommandations prévalent aussi, notamment un principe de base, au départ, c’est pour un auditeur de s’assurer que les états financiers, et les autres informations connexes, ne comprennent pas d’inexactitudes causées par la collusion ou d’autres causes inhabituelles. En soi, la collusion peut engendrer la falsification des documents et/ou la suppression de traces, rendant la vérification presque impossible. A cet égard, l’Institut Canadien des Comptables Agréés a demandé aux vérificateurs d’adopter une attitude de scepticisme professionnel et d’être attentifs aux facteurs et aux risques d’inexactitudes importantes (erreurs, fraudes, irrégularités) et aux indices qui peuvent les amener à soupçonner que les états financiers contiennent des inexactitudes importantes.

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On trouve aussi dans la norme ISA 240, des éléments intéressants. La fraude y est définie comme « un acte volontaire commis par une ou plusieurs personnes faisant partie de la direction ou des employés, ou par des tiers, qui aboutit à des états financiers erronés. Sont considérés comme fraudes, au sens de cette norme :  « la manipulation, la falsification, l’altération de la comptabilité ou de documents, le détournement d’actifs ;  la suppression ou l’omission de l’incidence de certaines opérations dans la comptabilité ou les documents ;  l’enregistrement d’opérations sans fondement, l’application incorrecte de politique d’arrêté des comptes » Par contre l’erreur est définie comme « une inexactitude involontaire contenue dans les états financiers, telles qu’une erreur mathématique dans les documents et les données comptables, l’omission et l’interprétation incorrecte des faits, l’application incorrecte des politiques d’arrêté des comptes » - Exemple de circonstances ou d’évènements augmentant le risque de fraudes ou d’erreurs, selon ISA 240 - Questions liées à l’intégrité ou à la compétence de la direction  Direction entre les mains d’une seule personne, sans comité ou conseil de surveillance ;  société dont la structure complexe ne semble pas justifiée ; - 72 -

 déficiences majeures de contrôle interne systématiquement négligées, alors qu’elles pourraient être corrigées ;  taux de rotation élevée des responsables comptables et financiers ;  sous-effectifs chroniques et importants au niveau du service comptable ;  changements fréquents de conseils juridiques ou d’auditeurs.

- Pressions inhabituelles au sein de l’entité ou subies par l’entité - Le secteur est en récession et le nombre de faillites augmente ; - le fonds de roulement est insuffisant du fait de la baisse des résultats ou d’une expansion trop rapide ; - la qualité des revenus se détériore, l’entité a investi massivement dans un secteur ou une ligne de produits connus pour être volatiles ; - l’entité est fortement dépendante d’un ou plusieurs produits ou clients ; - les directeurs subissent des pressons financières ; - le service comptable subit des pressions pour établir les états financiers dans des délais anormalement courts.

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Prévalence d’opérations inhabituelles

- Opérations inhabituelles, surtout en fin d’année, ayant un impact significatif sur les résultats ; - opérations ou traitements comptables complexes ; - transactions avec les parties liées ; - paiement de services (avocats, consultants ou agents) qui semblent excessifs par rapport aux services fournis ; - difficultés pour réunir suffisamment d’éléments probants ; - risques liés à l’environnement informatique (documentation inadaptée, fonctionnement du programme informatique).

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Autres cas de risques

- Paiement de services non spécifiés ou de prêts à des consultants, des parties liées, des employés ou fonctionnaires de l’Etat ; - commissions disproportionnées par rapport à celles habituellement payées par l’entité ou pratiquées dans la profession, ou par rapport aux services effectivement rendus ; - 73 -

- achats à des prix sensiblement supérieurs ou inférieurs à ceux du marché ; - paiements inhabituels en liquide ; - opérations inhabituelles avec des entités dont le siège se trouve dans les paradis fiscaux ; - paiements sans remise de la documentation correspondante ; - commentaires dans les médias.

Il est aussi utile d’approfondir la connaissance de la typologie des fraudes et leur nature à travers le manuel du GAO52, lequel donne quelques exemples de fraudes, d’abus ou de gaspillages et d’indicateurs de fraudes pour ses auditeurs, parfois proches de ceux décrits ci-dessus. Exemples d’abus

Indicateurs de fraudes

Création d’heures supplémentaires fictives. - Faire exécuter au personnel des courses ou commissions. Utiliser à mauvais escient sa position pour obtenir un gain ou profit personnel ou au profit de partenaires, de sa famille ou un proche, d’une entité dans laquelle on possède des intérêts ou au niveau de laquelle on négocie un contrat. Décisions ou choix affectant la politique de transport à l’occasion de voyages et missions, avec des coûts non nécessaires, extravagants ou onéreux. Absence de communication sur l’éthique ou d’actions tendant au développement de normes d’éthique, de politiques, de normes et procédés d’obligation de rendre compte ou de protection des biens et valeurs… Procédures non ou pas du tout formalisées. Absence de stabilité financière, de budgets assujettis à des contraintes économiques et opérationnelles rendant difficile la réalisation des objectifs53. Organisation ou opérations facilitant la réalisation des opportunités de fraudes ; structure organisationnelle instable ou d’une complexité non nécessaire. Absence de conformité et de suivi adéquat des politiques, lois et règlements. Paiement indu ; historique de fraudes, d’antécédents condamnables dans les rapports d’audit…Fausses déclarations ou informations dans le but d’induire en erreur. Absence, inexistence, disparition de documents…

CF. Appendix I – Supplemental Guidance Une telle situation est considérée dans plusieurs études ou normes comme une pression qui pousse à frauder, par exemple pour justifier des résultats et performances… 52 53

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Le rôle des Inspections générales d’Etat

Le système d’Inspection générale d’Etat, tel qu’il a été conçu en Afrique, englobe aussi des activités d’enquête de prévention et de détection des abus, des fraudes, pour l’arbitrage ou la prise de décision du Président de la République sur certains dossiers, pour l’amélioration de l’organisation du travail administratif. Il faut noter que certes, il peut exister des particularités, dans certains pays, comme au Burkina Faso où l’article 3 alinéa 6 de la loi n° 13-93-ADP du 18 mai 1993 prévoit la possibilité de recevoir et d’étudier les réclamations des administrés dans les relations que ces derniers ont avec les administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, les établissements publics ou tout autre organisme investi d’une mission de service public. Cette disposition à notre connaissance n’est pas habituelle dans plusieurs pays d’Afrique, et rappelle les dispositions du paragraphe 7 Inspector General Act de 1978 aux Etats-Unis (§ 7 – Complaints by employees ; disclosure of identity ; repraisals) : «

L’Inspecteur général peut recevoir et effectuer des investigations sur des récriminations ou des informations en provenance d’un employé relatives à des activités constitutives de violations de la loi et des règlements, à une mauvaise gestion, des déperditions de fonds, des abus d‘autorité ou constituant des dangers pour la santé publique et la sécurité. ».

Les normes en vigueur, s’agissant des Inspecteurs généraux des Etats-Unis (CF. Quality Standards for Federal Officies of Inspector general) précisent des pré- 75 -

requis nécessaires à la gestion qualitative des processus de réclamations et/ou de plaintes, en exigeant l’établissement de politiques et de procédures de réception et de traitement d’allégations résultant de tels faits. Il doit ainsi exister un canal approprié pour la soumission des allégations, préservant l’anonymat, appuyé de documentation des faits allégués, de leur évaluation, en termes de priorité, d’urgence, de crédibilité, de moyens d’action, de suivi notamment par un feed-back, par des voies appropriées, par exemple de « newsletters », à l’occasion des rapports, etc. En fait, si cette disposition sur les réclamations et/ou les dénonciations, semble quelque peu singulière au Burkina Faso par rapport aux autres Inspections générales d’Etat d’Afrique et se retrouve aux Etats-Unis, sous une réglementation plus détaillée ; dans les autres pays d’Afrique francophone, elle revêt la forme de dénonciations anonymes, parfois appuyées de pièces justificatives ou de faits précis, à partir desquels des missions spécifiques sont déclenchées, permettant aux Institutions supérieures de contrôle de l’ordre administratif d’exercer leur véritable mission d’enquête prévue par les textes de lois et de règlements. Il faut aussi souligner qu’aux Etats-Unis, dans le monde anglo-saxon et même dans les pays anglophone d’Afrique, le système repose également sur un système de hotlines en activité auprès des Inspections générales et bureaux d’auditeurs généraux, lignes téléphoniques publiques ouverts aux tiers et citoyens pour lesdites dénonciations. - 76 -

Un autre aspect corrélé, par rapport à la détection des fraudes, des abus et des gaspillages, demeure la prévention. Les normes définies au profit des Inspecteurs généraux des Etats-Unis54 paraissent à cet égard intéressantes, voire utiles, car elles prescrivent : - de développer une stratégie et des procédures permettant d’identifier les causes des fraudes, des abus, des gaspillages et de mauvaise gestion à risques élevés afin d’appuyer les agences à résoudre de tels problèmes et de faire rapport sur les opportunités de prévention qui émergent progressivement ; - de prendre des initiatives destinées à renforcer le niveau de connaissances, par exemple par des actions de formation destinées à alerter le personnel sur les faiblesses systémiques, à consolider les habiletés et savoirs requis dans les domaines de la prévention et de la détection des fraudes, des abus et gaspillages ; - d’effectuer des revues et de commenter les programmes, à cet égard ; - de procéder à l’analyse des audits et évaluations écoulés pour identifier les tendances Au total, la lutte contre la corruption et les activités de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages, supposent toute une panoplie de stratégies, de démarches et d’instruments en interrelation.

54

Quality Standards for Federal Offices of Inspector general.

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Prévention

Contrôles internes

Répartition des Rôles et des responsabilités

Détection

Partenariat, Réseautage, Coopération

Revue

Nationale

Internationale

Programmes d’éducation pour la prévention Whistleblowers

Société civile

NTIC de détection et de surveillance

Hotline

Institutions de lutte contre la corruption

Auditeurs et Spécialistes des examens et de la détection des fraudes

I.3.4. Indépendance des Inspections générales d’Etat face aux normes internationales 

Indépendance et niveau de rattachement

Certains bailleurs et donateurs semblent être très suspicieux à l’égard d’un corps de contrôle rattaché à l’Exécutif. Dans le cas du Sénégal, l’indépendance demeure régie par des normes législatives, mais elle est aussi à mettre en rapport avec un certain nombre de mesures de légitimation inventoriées ci-dessous. L’option « Bureau d’Inspection, de Vérificateur général ou de - 78 -

Contrôleur général d’Etat » a permis jusqu’ici, en Afrique, du fait de leur localisation à l’extérieur des entités vérifiées et de leur rattachement au plus haut niveau de l’Exécutif, de préserver leur indépendance à l’égard des entités vérifiées, de fournir une opinion neutre et indépendante, permettant :  d’analyser les stratégies, les systèmes et les outils organisationnels, les performances opérationnelles et la gestion des ressources ;  de rassembler des éléments permettant de documenter leurs analyses et leurs rapports et de se forger une opinion attestée par les éléments probants ;  de faire rapport sur des constats et des recommandations, avec la particularité, dans certains pays, de directives présidentielles ou primatorales notifiées aux entités vérifiées.  Gestion de la confidentialité et du secret L’argument est posé par certains rapports, de plus en plus publiés sur l’Afrique, sur la fonction d’audit55, lorsque dans le secteur public des dispositions législatives l’arriment, du point de son rattachement, à un organe de l’exécutif et que par tradition, ses rapports ne sont pas ou sont rarement publics56. L’on présume alors que l’organe d’audit précité ne serait pas indépendant, qu’il existe un risque, donc une probabilité (au sens Cette problématique est posée par rapport à l’indépendance, alors que les enjeux sous-jacents sont plus vastes, comme développé dans plusieurs autres parties du présent rapport. 56 On constate d’ailleurs que dans certains cas, la presse parvient à obtenir copies et à les publier. 55

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même où l’on entend ce terme en audit) qu’elle soit à la merci de manipulations. Mais en fait, aucune norme internationale n’érige en prescription absolue la publication de toutes les parties d’un rapport d’audit. A titre d’illustration, sous ce chapitre, l’inventaire des normes effectuées ci-dessous. Le manuel du G.AO précité, en son chapitre 5, consacré au rapports d’audit financier, sous la rubrique « Rapport de l’information confidentielle ou sensible » traite de la question en ces termes : « … si une information pertinente est interdite à la diffusion publique ou est exclue du rapport, du fait de sa nature confidentielle ou sensible, les auditeurs devraient préciser dans le rapport que celle-ci l’a été en raison de circonstances qui rendent nécessaire cette omission ». En outre, la norme GAO reconnaît que certaines informations peuvent être classifiées et être ainsi interdites à la diffusion générale par les lois et les règlements fédéraux, d’Etat, ou locales. Dans de telles circonstances, les auditeurs peuvent publier un rapport particulier, voire spécifique et classifié ou à usage restreint et ne transmettre le rapport particulier qu’aux personnes autorisées par les lois et les règlements. Au niveau du paragraphe qui traite de la question « reporting confidential or sensitive information57 », il est précisé, et c’est logique, que des circonstances additionnelles telles que la sécurité58 peuvent également 57

Rapport sur des données confidentielles ou sensibles. Le manuel utilise les termes « security and safety », les deux termes signifiant « sécurité », le terme « safety » pouvant signifier aussi « sûreté » ; ce qui sous-entend qu’on comprendre ce dernier terme au sens de sécurité publique, par exemple. 58

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justifier la non diffusion ; la norme donne à cet égard quelques exemples, par exemple la sécurité informatique de certains programmes, du fait de dommages possibles… L’attitude recommandée est la même que celle précédemment citée, des rapports accessibles à des personnes autorisées. Certaines dispositions du manuel recommandent vivement à l’auditeur de s’entourer au besoin des conseils d’un juriste qualifié en la matière. Les normes applicables aux Inspecteurs généraux des Etats-Unis, à l’instar d’autres, prescrivent l’obligation de maintenir cette indépendance, de sorte à sauvegarder l’objectivité, l’impartialité et d’éviter des attitudes ou les positions qui feraient douter de l’indépendance de l’Inspecteur général et de ses collaborateurs associés aux missions d’audit et d’enquête. On retrouve également dans les normes ainsi retenues des critères reconnues en totalité ou partiellement, par la communauté des auditeurs et des enquêteurs spécialisés dans la prévention et la détection des fraudes, des abus et des gaspillages : la possibilité d’exécuter la mission en conformité avec ses convictions, l’accès aux enregistrements, à l’information, aux dirigeants, la collecte de témoignages, avec la possibilité aux Etats-Unis, pour les Inspecteurs généraux, d’administrer le serment, de requérir l’assistance de toute agence fédérale d’Etat, locale ou gouvernementale. Cette capacité de réquisition existe aussi dans le dispositif sénégalais, suite à la circulaire n° 024 PR/SG/IGE du 12 mars 1968 définissant le concours à apporter à l’Inspecteur général d’Etat.

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Si l’on se réfère à la norme IIA, dont les dispositions paraissent moins détaillées à cet égard, l’on constate tout de même qu’elle précise (point 2440.01) que « Sauf indication contraire de la loi, de la réglementation ou des statuts, le responsable de l’audit, avant de diffuser les résultats à des destinataires ne figurant pas dans l’organisation, doit accomplir les tâches suivantes : i) évaluer les risques potentiels pour l’organisation ; ii) maîtriser la diffusion en imposant des restrictions quant à l’utilisation des résultats. » Par ailleurs, d’une manière générale, s’agissant des Inspections générales d’Etat, la question de l’indépendance peut être posée, celle-ci étant alors liée aux risques que comportent les activités de conseils. Dans une certaine mesure, la question n’a pas d’intérêt si l’on sait que les conseils et les études ne sont pas directement fournis aux entités, mais sont faits, en première instance, sous forme de propositions soumises au Chef de l’Exécutif. En outre, si dans le secteur privé, cette crainte est d’autant plus fondée que les cabinets d’audit trouvent dans la consultance et les conseils, un vaste marché commercial, le problème se pose différemment pour les Inspections générales d’Etat situées en dehors des entités contrôlées et non rémunérées par elles. Cette distance constitue à cet égard un gage d’indépendance. Néanmoins, il serait possible de dire puisque l’entité bénéficiaire n’est pas finalement demanderesse, elle ne serait pas motivée à s’approprier les conseils fournis. En fait là, intervient toute l’armature du droit administratif et du droit de la fonction publique en appui : le pouvoir hiérarchique, la discipline administrative, l’obligation de - 82 -

déférer aux ordres des autorités supérieures, la coordination et le contrôle de l’action gouvernementale, etc. Au total, s’agissant du caractère public des rapports, les normes internationales reconnaissent la possibilité de limiter la publicité et la diffusion, sous certaines conditions : si la loi, les règlements, le statut de l’organisme d’audit prévoient des dispositions particulières, lorsque l’information sensible induit des dommages ou des risques pour l’entité d’audit et/ou nuit à la sécurité et aux sûretés. La technique préconisée est alors en cas de besoin l’élaboration de rapports particuliers en dehors du rapport de base ou du rapport général public et dans ce cadre, la diffusion des informations sensibles ou secrètes à des personnes autorisées par le biais de ce rapport particulier. Néanmoins, pour certaines normes, l’auditeur doit mentionner l’omission dans son rapport général. C’est sans doute là une solution future… Au total, l’indépendance est une certaine forme de liberté, encadrée. Toutes les normes s’accordent sur le fait que les vérificateurs et les enquêteurs doivent être libres et indépendants à l’égard des tiers. En réalité et en plus, il faudrait aussi prendre en compte, à cet égard, des leviers tels que la culture républicaine, la tradition de restitution de l’information sur les résultats et les performances, la discipline administrative, le leadership du Chef de l’Exécutif, la qualité et l’effectivité du pouvoir hiérarchique, l’existence d’une technocratie de haut niveau, autant de facteurs qui peuvent faciliter ou - 83 -

empêcher la mise en œuvre des conseils fournis59 ou altérer la publicité ou la confidentialité des données.  Une légitimité renforcée par le mode de recrutement et le régime statutaire Plusieurs normes internationales insistent sur les exigences de qualité en matière de recrutement du personnel d’audit. Dans le document révisé (version 2007), des Normes d’audit gouvernemental, au Chapitre III, le Government Accountability Office érige la compétence en norme, avec les exigences suivantes : - la possession par les auditeurs de compétences professionnelles adéquates pour mener les tâches requises ; - la nécessité pour les gestionnaires des bureaux d’audit d’évaluer les habiletés afin de s’assurer que les compétences disponibles sont adaptées aux mandats des auditeurs ; - l’existence de processus de recrutement, d’affectation, de développement et de renforcement continus des capacités. Le document précité insiste sur le savoir professionnel et technique requis, notamment non seulement des normes d’audit qu’il prescrit, mais aussi sur la connaissance de l’environnement de travail spécifique aux entités contrôlées, sur diverses habiletés, notamment la capacité à communiquer oralement et par écrit. La norme rappelle 59

Voir a à cet égard, le système de gestion des directives présidentielles...

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aussi que le travail peut requérir de faire appel à des ressources humaines spécialisées pour mener à bien la mission, notamment des spécialistes en environnement, en statistiques et en sondages, en procédés d’enquêtes, en matière de nouvelles technologies de l’information et de la communication, en techniques actuarielles, en sciences et médecine, etc. Enfin, selon la norme susvisée, des qualifications additionnelles peuvent s’avérer nécessaires pour les audits financiers et en ce qui concerne la connaissance des principes généralement admis. Une exigence est également formulée, celle de la formation professionnelle continue, les auditeurs devant aussi assumer la responsabilité de leur propre formation pour améliorer leurs compétences. Plusieurs autres normes de ce document traitent également de la compétence… L’Institut de l’Audit Interne a retenu une norme dite de qualification qui énonce les caractéristiques que doivent posséder les organismes et les personnes affectées à des activités d’audit interne, notamment la compétence, des connaissances et un savoir-faire suffisant pour identifier les indices de fraudes, les principaux risques, les contrôles liés aux technologies de l’information et aux techniques d’audit informatisé, etc. Quant à la section 14 de la déclaration de Lima sur les lignes directrices du contrôle des finances publiques, elle recommande un personnel de qualité, possédant des compétences avérées, des connaissances et des capacités au-dessus de la moyenne et une expérience professionnelle suffisante. - 85 -

Au Sénégal, des exigences de qualité ont toujours été la règle, de telle sorte qu’il paraît possible de conclure que le mode de recrutement et le régime statutaire retenus ont sans doute contribué à consolider la légitimité de ce corps, doté d’un statut « hors hiérarchie » et soumis à des normes de concours et de sélection sur titre très élevées. Modes sélection

de

Concours professionnel

Concours directs

Tour extérieur pour renforcer l’effectif et améliorer les capacités techniques

Eligibles

Fonctionnaires, Magistrats, Officiers supérieurs des forces armées appartenant aux hiérarchies A et A spécial60 Ingénieurs docteurs, Experts comptables, Docteurs d’Etat en droit, en sciences économiques ou en gestion. Fonctionnaires, Magistrats, Officiers supérieurs des forces armées appartenant aux hiérarchies A spécial et A1 ou hiérarchies assimilées61

Conditions additionnelles Ancienneté Age requise maximal requis Dix ans. Cinquante ans.

Quarante ans.

Par ailleurs, il a existé une tradition consistant à nommer les Secrétaires généraux de la Présidence de la République ou du Gouvernement, Inspecteurs généraux d’Etat ou inversement.

Le Sénégal a opté pour le choix délibéré d’une élite hors hiérarchie qui déroge au régime statutaire de droit commun de la fonction publique, ce qui peut être perçu comme le besoin de recruter des compétences élevées, 60

Au Sénégal, un fonctionnaire de la hiérarchie A1 est titulaire de la maîtrise et de deux années d’études supplémentaires, soit 6 années d’études supérieures. 61 La loi limite les prérogatives de nomination du Chef de l’Etat dans la limite du 1/5 de l’effectif théorique.

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mais aussi d’équilibrer les savoirs requis. La tradition a conservé deux concours qui ont la réputation d’être particulièrement difficiles et sélectifs, sous le contrôle d’un Jury composé d’éminents universitaires agrégés, de hauts fonctionnaires, dont les compétences couvrent l’économie, le droit public et privé, la comptabilité et les finances publiques, les sciences administratives, voire même la culture générale. Un décret consacre le programme de ce concours, étant entendu qu’il faut au moins une année de travail pour l’épuiser. Plusieurs fois, il est arrivé qu’au terme du concours, aucun candidat ne soit déclaré par le Jury. Ce choix d’une élite spéciale repose non seulement sur les modes de recrutement, mais aussi sur un flambeau et la mise en place d’un régime statutaire dérogatoire que tous les présidents de la République qui se sont succédés au pouvoir se sont évertués à maintenir, haut placés, sinon à renforcer. Les concours ci-dessus voient défiler des plus hauts fonctionnaires de l’Etat (Directeurs nationaux de services et de cabinet, conseillers techniques, hauts fonctionnaires de la douane, du Trésor, des Impôts, Magistrats, enseignants et maîtres assistants, etc.), sans être sûrs, du fait d’une culture très sélective du Jury national, d’être finalement retenus62. Il faut d’ailleurs dire que les nominations par tour extérieur sont très ciblées, elles ont tendance par exemple à concerner d’anciens directeurs généraux des Douanes, du Trésor, des Impôts et Domaines, des Fondés de

62

Cette vision très sélective n’en comporte pas, à notre avis, des inconvénients comme d’empêcher la dotation en ressources humaines requises, deux ou trois années de suite.

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Pouvoirs du Trésor, etc. Cela a été un processus constant, de 1906, voire de l’indépendance à nos jours. En fait, il a existé une histoire de leadership présidentiel. Senghor, latiniste et homme de lettres, adepte du Grecque, donc de rationalité, qui aimait la Grèce et à citer Heidegger, a fermement mis l’Inspection générale d’Etat à l’abri de pressions indues. Il n’hésita pas par exemple à réaménager devant le comportement d’un Ministre, paralysant une mission qu’il avait commanditée. Il en fit aussi le marketing, notamment par ses déclarations : « s’il y a deux choses que je fais le week-end, c’est écrire mes poésies et lire les rapports de l’Inspection générale d’Etat et du Bureau Organisation et Méthodes ». Certaines circulaires dudit Président n° 24/PR/SG/IGE du 12 mars 1966 et n° 2/PR/SG/IGE du 02 octobre 1973, adressées aux Ministres et gouverneurs de région, sont restées célèbres ; par elles, le Président prenait des mesures fermes de protection de « son Inspection générale » sur laquelle, racontent les anciens, il n’a jamais toléré de pressions extérieures: « - invitation des ministres et gouverneurs de région de mettre immédiatement à la disposition des Inspecteurs généraux d’Etat en mission, tous agents dont ils ont besoin pour l’accomplissement de leurs tâches; - obligation du Chef de circonscription administrative de mettre à la disposition des Inspecteurs généraux d’Etat en mission tous les moyens matériels (logement, secrétariat et transport) nécessaires à l’accomplissement de leurs travaux ; - 88 -

- obligation pour les personnels des services, des collectivités, établissements, entreprises ou organismes vérifiés de ne s’absenter qu’avec l’autorisation de l’Inspecteur général d’Etat en mission ; - obligation pour les ministres de prêter une attention soutenue à la transmission et à l’exploitation des directives issues des rapports d’Inspection générale de l’Etat, en rappelant les défaillances liées au pouvoir hiérarchique et la primauté que lui et le Premier Ministre accorderont au contrôle, en ne tolérant aucune entrave à l’exécution des mesures prises à l’issue de missions de vérifications ordonnées dans le cadre du contrôle général que lui et le Premier Ministre exerceront sur l’organisation et la marche des services de l’Etat. » Sous le Président Diouf, administrateur formé à la chose publique, ce choix a été maintenu, avec une ferme résolution de faire face aux tentatives de blocages, parfois de ministres ; Diouf aimait aussi annoter de sa propre main, avec ses grosses écritures la feuille d’approbation des rapports : « Oui, j’approuve les conclusions et propositions de l’Inspecteur général d’Etat Vérificateur. Mettre en œuvre. Ce rapport est vraiment excellent, … ». Parfois il y ajoutait des appréciations élogieuses lorsque le rapport lui paraissait d’une excellente qualité. Sous son magistère, s’amorce une autonomie d’action appréciable, avec la création d’un Fonds d’Intervention de l’Inspection générale d’Etat, la rendant autonome vis-à-vis des contraintes budgétaires, lui permettant d’acquérir toute la logistique nécessaire au déroulement des missions ; le rang protocolaire des Inspecteurs généraux d’Etat au - 89 -

cours des cérémonies fut revue ; le corps fut doté d’apparats, sous forme de tenues de services et de cérémonies, et bénéficia des avantages particuliers, en nature et à l’occasion des voyages internationaux63. Sous Wade, entrepreneur et dirigeant pragmatique, des mesures de revalorisation de la fonction sont prises, en termes de rémunérations compétitives par rapport à celles du secteur privé, par exemple, d’avantages et apparaît la nouvelle loi de 2005 qui jette l’Inspection générale dans les exigences contemporaines de l’audit ajusté64. Les métiers de l’Inspection générale d’Etat sont davantage formalisés, incluant de nouveaux domaines thématiques, détaillés plus loin dans le présent ouvrage.  Le renforcement de l’autonomie, par la création d’un Fonds d’intervention de l’Inspection générale d’Etat Plusieurs normes internationales plaident, non seulement pour l’indépendance fonctionnelle, mais aussi pour l’autonomie d’action des vérificateurs d’Etat, notamment du point de vue de la disponibilité de ressources financières, en quantité et qualité suffisantes. Par exemple, la déclaration de Lima plaide pour une indépendance financière, décrite en ces termes : - « la dotation en moyens suffisants permettant d’accomplir la mission et la possibilité de demander 63

En fait, les Inspecteurs généraux d’Etat du Sénégal ont quasiment les mêmes avantages en nature qu’un ministre de la République (voyage en classe affaires quelle soit la durée de la mission, salon d’honneur, passeport diplomatique, salon d’honneur, logements et véhicule de fonction, taux de perdiem identiques, etc.) 64 Le budget du fonds d’intervention et les rémunérations nettes des IGE ont triplé…

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directement à l’organisme public responsable du budget national, des ressources financières conformes aux besoins; - l’habilitation à utiliser les fonds qui doivent être attribués dans un poste distinct, comme elles l’entendent. » Par ailleurs, la norme GAO explicite des facteurs qui affectent ou altèrent l’indépendance et qui sont liés aux pressions des gestionnaires ou des employés de l’entité auditée ; elle donne de multiples exemples à cet égard d’interférences ou d’influences extérieures pouvant limiter, modifier ou porter atteinte à l’étendue de l’audit : - « des pressions susceptibles de réduire de façon inappropriée l’étendue, les coûts et les honoraires requis, de porter atteinte aux choix et à la mise en œuvre des procédures d’audit, aux examens que les auditeurs doivent effectuer sur certaines transactions ; - des restrictions déraisonnables ou inappropriées sur le temps alloué et nécessaire à la réalisation de l’audit, en matière d’allocation de fonds ou des autres catégories de ressources nécessaires qui pourraient affecter négativement les capacités des auditeurs à exercer leurs responsabilités ; - des interférences extérieures en matière de recrutement, d’affectation et de promotion du personnel d’audit. » Au Sénégal, cette problématique a été résolue, en 1987, avec l’entrée en vigueur d’une instruction présidentielle - 91 -

n° 11 créant un Fonds d’intervention de l’Inspection générale d’Etat, système repris par la suite par divers pays africains. L’instruction met en relief la nécessité d’allouer à l’IGE les moyens nécessaires à son fonctionnement, par diverses dotations en provenance de l’Etat et des collectivités publiques, notamment des participations des fonds d’équipement ou de la lutte contre la fraude, de participations, aides et subvenions d’organismes ne relevant pas de l’administration. Ce fonds supporte aussi bien « les dépenses de matériel que de fonctionnement, la rémunération d’experts et d’autres personnes apportant leur concours à l’Inspection générale d’Etat, voire toutes autres dépenses de personnel, de matériel ou de fonctionnement. » La gestion flexible fait du chef de l’IGE l’ordonnateur des dépenses, et s’appuie sur un manuel de procédures annexe. La séquence des dépenses relève quasiment de l’I.G.E., de l’engagement, à la certification, à la liquidation et au règlement. Cette sorte de méga caisse d’avances n’exclut des contrôles du Receveur général du Trésor qui suit, en fin d’année, contradictoirement avec l’Inspection générale, le compte de dépôt, sur la base d’un compte de situation. Ce dispositif a progressivement, au fil des années, conforté l’autonomie d’action par rapport aux entités vérifiées, permis la dotation des moyens nécessaires à la mobilité, la mise en place des outils informatiques et les technologies nécessaires au travaux, le confort de travail et la motivation accrue des ressources humaines du service. - 92 -

 L’ajustement des symboles de la fonction En 1988, s’opère un ajustement des symboles, par le port d’uniformes, dans l’exercice des fonctions ou à l’occasion des cérémonies officielles65 , composés :  deux tenues kaki clair de couleur sable dont l’une comporte une veste à manche courte, genre saharienne ; 

deux tenues blanches et des tenues de cérémonies.

L’annexe du décret d’un 1er août 1998 décrit en détail la composition des tenues et des attributs des Inspecteurs généraux d’Etat. Enfin, le régime des avantages en nature est celui accordé aux plus hautes fonctions de l’Etat, notamment aux ministres.66 I.3.5. Un modèle l’harmonisation

pour

la

coordination

et

Plusieurs doctrines, au niveau international, traitent de la coordination, de l’harmonisation, des redondances ou de duplications à éviter, en matière d’audit, au niveau national. Le problème de la coordination et de l’harmonisation est en fait un débat doctrinal et professionnel au niveau international. Certaines tendances sont résumées ci-dessous.

65 66

Ce dispositif symbolique résulte du décret n° 88-1130 PR du 1er août 1988. Logement et véhicule de fonction, voyage en business, etc.

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 La coordination vue par les normes applicables aux Inspecteurs généraux des Etats-Unis On trouve dans le document « Normes de qualité pour les bureaux fédéraux d’Inspections générales » certaines considérations relatives à la coordination, tant en ce qui concerne la planification, les échanges et la rationalisation des interventions. D’abord, la norme prescrit, lors du processus de planification, une coordination avec les gestionnaires de l’entité, à cet égard, la prise en considération des demandes du Congrès, de l’Office du Management et du Budget, des parties prenantes, du Conseil Présidentiel pour l’Intégrité et l’Efficience (PCIE) et du Conseil Exécutif pour l’Intégrité et l’Efficience (ECIE). Le document met en évidence que cette coordination permet une utilisation pertinente des connaissances disponibles au sein des agences et une planification avantageuse en termes de coûts – efficacité. Un autre objectif mis en exergue est la volonté d’éviter les duplications, en échangeant sur les plans annuels ; le document recommande aussi là où c’est possible, de mener des audits conjoints. 

La vision de l’INTOSAI

Lors de son 18ème congrès, INTOSAI a plaidé pour Forum de coopération entre les ISC67. A cet égard, le préambule du document des accords de Budapest traite du renforcement des capacités, du partage des Le terme ISC désigne selon les concepts de l’INTOSAI le vocable « Institution Supérieure de Contrôle » 67

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connaissances, de la bonne gouvernance ; des questions techniques comme l’élaboration de normes techniques, des réponses à apporter à des questions telles que la société de blanchissement de l’argent, la fraude et la corruption. Lors des débats, les raisons de cette coopération mises en avant ont été les suivantes : « - promouvoir la responsabilité et la gouvernance par rapport aux traités et aux projets d’envergure internationale ; - promouvoir les bonnes pratiques, le développement et l’harmonisation des normes en matière de comptabilité et de contrôle ; -

soutenir le développement institutionnelles. »

des

capacités

Le document recense des cadres et des actions de coopération possibles : le conseil, la délégation, les audits parallèles ou conjoints, l’adoption de normes communes et de méthodologies, le détachements d’experts d’une ISC à une autre. Un autre domaine discuté est la coordination des efforts d’audit au sein d’un même pays, avec au terme des débats, des recommandations relatives « à la possibilité d’audits coordonnés au sein d’un pays et au respect des principes suivants pour la coordination des audits dans un même pays : - « l’intérêt que les ISC ont à coopérer, tout en reconnaissant le respect des spécificité des mandats ; - 95 -

- la nécessité de spécifier les objectifs des audits et la nature de la coordination, des accords sur les critères, les normes, les pratiques et les procédures d’assurance qualité, lesquels devraient être conformes aux directives de l’INTOSAI ; - la communication, la définition claire des rôles, l’accord sur le calendrier d’audit, les procédures de présentation de l’information, le processus de résolution des différents, etc. »  Le modèle tunisien du Haut Comité du Contrôle Administratif et Financier La Tunisie a crée un Haut Comité du Contrôle Administratif et Financier par une loi n° 93-50 du mai 1993, complétée par le décret d’application n° 93-906 relatif à l’organisation dudit Comité. Ces deux textes posent les règles et les principes suivants : - la création d’un établissement public autonome dont le siège est à Tunis, dénommé « Haut comité du Contrôle Administratif et Financier » ; - la coordination par cet organe des programmes d’intervention des organes de contrôle général des services de l’Etat et des établissements publics ; - l’étude et l’exploitation des rapports des services d’Inspections des Ministères qui parviennent aux organes du Contrôle général ; - des avis donnés par ce Comité sur les projets de textes législatifs et réglementaires qui lui sont soumis et - 96 -

visant à faire évoluer les méthodes et les procédés de gestion ou à améliorer l’action des organes de contrôle administratif et financier ; - la participation dudit Comité à des études, des séminaires ou des rencontres en rapport avec ses attributions. Ce Comité qui se réunit une fois par mois et en tant que besoin, reçoit avant la fin janvier et juillet de chaque année, les programmes semestriels d’activités des organes de contrôle.  L’expérience du Mali L’association des Contrôleurs, des Inspecteurs et des Auditeurs du Mali. Au Mali, une association à but non lucratif a été créée pour regrouper les Contrôleurs, les Inspecteurs et les Auditeurs du Mali, ses membres étant notamment le Bureau du Vérificateur général du Mali, le Contrôleur général du Mali, certaines Inspections internes… Selon les statuts et le règlement intérieur de l’association, cette dernière poursuit notamment les objectifs ci-après :  « la mise en commun, le développement et la recherche de principes, de systèmes et de méthodes d’audit et de contrôle;  la promotion du développement de la profession d’audit interne au sein des entreprises et des organisations maliennes ;

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 la sensibilisation de l’Etat et des organismes d’employés sur la valeur ajoutée de la fonction d’audit interne, etc. » A l’actif de l’association, des acquis intéressants : un code de déontologie, des séminaires nationaux et internationaux.  Le Comité Interministériel d’Audit de Programme (CIAP) en France Le Comité Interministériel d’Audit de Programme (CIAP) a été crée à l’occasion de la publication de rapports de performances, au terme d’une circulaire n°CIAP – 03-06 du 04 juillet 2003 ayant pour objet la mise en œuvre de la loi organique du 1er Août 2004… Par ce dispositif, les équipes d’audit mandatées reposent sur une composition interministérielle, incluant obligatoirement un Inspecteur général et un membre de l’institution de contrôle du Ministère concerné. Au total, avec la création du Comité Interministériel d’audit de Programmes, on assiste en France à une tentative coordonnée des efforts et des processus d’audit. Il faut souligner, qu’au terme de la circulaire précitée, le processus semble être une opération temporaire, dans le cadre de l’implantation de choix budgétaires appropriés, à proposer au Parlement.

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 La mise en réseau de la Communauté des Inspecteurs généraux aux Etats-Unis Au Etats-Unis, le concept d’Inspection générale, régi par l’Inspector général Act68, est très large et peut couvrir différentes situations ; elles sont tantôt créées au niveau d’un Etat fédéral, d’un secteur (Inspection générale de la Sécurité Sociale), d’une activité internationale transversale, par exemple le financement du développement (Bureau de l’Inspecteur général de l’USAID), d’un programme à durée déterminée (Inspecteur général du Programme de Construction de l’Irak), etc. Sur ce plan, le concept de Bureau de l’Inspecteur général d’Etat retenu aux Etats-Unis est différent de celui d’Inspection général d’Etat en Afrique où l’IGE est « déconnectée » de la hiérarchie administrative des ministères, des opérations, des entreprises ou établissements publics et des projets de développent soumis à contrôle. Le problème de la coordination s’est posé et différents Présidents de la République, de Ronald Reagan à ses successeurs, ont apporté des solutions résumées ci-après : - en 1981, la création du Conseil Présidentiel de l’Intégrité (PCIE ou Président’s Council on Intergrity and Efficiency) pour promouvoir l’efficience et l’intégrité dans la gestion des programmes gouvernementaux et pour mieux détecter les fraudes, les abus et les gaspillages ; 68

Loi sur l’Inspection générale

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- en 1992, la création du Conseil Exécutif sur l’Intégrité et l’Efficience, le Conseil Présidentiel de l’Intégrité et de l’Efficience, le Conseil Exécutif de l’Efficience et de l’Intégrité étant désormais régi par un décret 12805 (Executive order69 12505), du Président George Bush. Parallèlement, existe une Association des Inspecteurs généraux des Etats-Unis et un Forum d’Audit qui regroupent notamment le General Accountability Office, des Auditeurs et Inspecteur généraux de secteurs d’Etat, etc. Le plan stratégique 2005-2010 de ce forum précise qu’il est une association destinée d’une part, à améliorer la coordination, la communication et la coopération entre les membres pour lever ensemble les défis communs, d’autre part, à contribuer au renforcement de la performance gouvernementale, de l’obligation de rendre compte et enfin, à accroître la confiance au public. Les objectifs stratégiques retenus incluent les aspects suivants: fortifier la mise en réseau, le dialogue, la collaboration sur les questions d’intérêt commun au sein de la communauté des auditeurs ; renforcer la capacité et le professionnalisme des organismes d’audit par l’amélioration des normes, le partage des meilleures pratiques, l’obligation de rendre compte au sein du gouvernement de la profession d’auditeurs ; 69

Le terme « executive order » désigne ce nous appelons décret dans le droit français en vigueur dans beaucoup de pays francophones d’Afrique.

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assister les contribution à gouvernementales.

membres du Forum l’amélioration des

dans leur opérations

Le document prévoit de nombreuses actions de renforcement de la coordination, par le biais d’un Réseau de dialogue et de collaboration, notamment : des groupes de travail sur les tendances et les défis de la profession, des groupes de discussion électronique permettant le partage et les contacts ; -

le développement de documentation, un centre de ressources Internet, etc.



L’expérience maltaise

A Malte, en 1988, le Bureau National d’Audit a publié une étude intéressante intitulée « Internal Audit Function Within Government Ministries70 », au terme d’une revue de la fonction d’audit au sein des ministères. L’étude a recommandé :  une coordination centrale forte pour unifier le mécanisme d’audit au sein de Ministères ;  la relocation de l’Unité de coordination des politiques d’audit en dehors du Ministère des Finances pour assurer son indépendance, en y impliquant des professionnels extérieurs;

70

L’audit interne au sein des Ministères du Gouvernement.

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 l’octroi de fonds à cette unité pour accomplir le développement de capacités ;  des réunions conjointes, des séminaires et des échanges pour éviter la duplication de travail et assurer la complémentarité.  Expériences d’harmonisation

africaines

de

coordination

et

Sur le plan des principes juridiques, on constate aussi dans plusieurs pays d’Afrique francophone, des dispositions relatives à la coordination. La question de la coordination et de la préséance entre les corps et les organes de contrôle de l’Exécutif est clairement réglementée par les lois et les règlements ou au demeurant par des instructions et circulaires administratives. A Madagascar, une loi n° 2004-032, notamment son chapitre préliminaire du Titre II intitulé « Des pouvoirs de Contrôle général du Président de la République » fixe les principes fondamentaux régissant les organes administratifs de contrôle et explicite clairement la répartition de leurs rôles respectifs. En effet, l’article 18 de dite loi dispose ce qui suit : « Pour exercer les pouvoirs de contrôle général qu’il détient de la constitution, le Président de la République dispose de deux organismes : l’Inspection générale d’Etat et le Contrôle Financier … » En outre, l’article 23 de cette loi dispose que « Dans le cadre de sa mission permanente d’audit interne, l’Inspection générale d’Etat est chargée pour le compte du Président de la République de ……… - 102 -

». Enfin, le dispositif précise clairement en matière de contrôle le champ des missions de l’Inspection générale des Finances, à savoir la vérification « des servies centraux, déconcentrés ou rattachés au Ministère des Finances et / ou au Budget, de la gestion financière des représentations diplomatiques et consulaires à l’étranger, des projets financés par les organismes internationaux ou régionaux. » Au total, l’originalité du dispositif en vigueur est la synthèse des principes fondamentaux régissant les organes administratifs d’inspection et de contrôle, tout en rappelant, en ce qui concerne l’Inspection générale d’Etat, l’essence de ce contrôle, le pouvoir constitutionnel de contrôle général détenu par le Président de la République ou le chef de gouvernement. En Mauritanie, les décrets n° 122-2005/PC DMDE du 19 septembre 2005 et n° 129-2005 du 01 novembre 2005 réglementent la question, comme suit : - Article 9 du décret n° 122-2005 précité : « L’Inspection générale d’Etat reçoit copie de tous les rapports établis par les institutions et les corps de contrôle de contrôle administratif. » ; - Article 7 du décret n° 129-2005 susvisé : « L’Inspection générale d’Etat a préséance sur tous les corps d’Inspection et de contrôle ministériel. » Au Tchad, le décret n° 696 PR/PM/MCCGEM du 20 septembre 2005 portant modalités des procédures d’exécution des missions et déterminant les conditions de contrôle et de moralisation effectuées par le Ministre

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chargé du Contrôle général de l’Etat et de la Moralisation dispose ce qui suit : Article 17 : « La mission d’Inspection, de contrôle et de moralisation ne dispense pas les Ministres, dans le cadre de leur pouvoir hiérarchique, de faire opérer des inspections et des contrôles dans les différents services de leurs départements et toutes les entités soumises à leur tutelle. Cependant, ils doivent transmettre au Ministère chargé du Contrôle général de l’Etat et de la Moralisation copie des rapports de toutes les missions. Le Ministère chargé du Contrôle général d’Etat et de la Moralisation peut être associé à titre d’observateur à des missions d’audit sectoriel pour le compte d’une institution publique ou bénéficiant des fonds publics. » « Article 19 : Le contrôle effectué par le Ministère chargé du Contrôle général de l’Etat et de la Moralisation emporte et prévaut sur celui exercé par tous les autres corps de contrôle et d’inspection ministériel, interministériels et les commissions ad hoc. » A Djibouti, le Chapitre I du décret n° 2005-0151/PR/PM du 31 août 200571 régit les missions et les attributions du Comité. L’article 1er du décret institue « auprès de la Primature (Inspection générale d’Etat) un Comité de Coordination des Corps et Organes de Contrôle chargé :  d’examiner les grandes tendances liées aux résultats des contrôles ; 71

Décret n° 2005-0151/PR/PM du 31 août 2005 portant sur le Comité de Coordination des Corps et Organes de Contrôle et d’Inspection

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 de mettre en œuvre un processus d’harmonisation de leurs interventions permettant d’éviter les redondances et d’exploiter au mieux les synergies possibles entre leurs objectifs et activités ;  de coordonner la planification et l’exécution des missions d’audit ;  d’examiner les problèmes auxquels sont confrontés les organes et les corps de contrôle et d’en faire rapport. » Le décret formalise aussi les modalités de travail et la composition du Comité susvisé, en disposant ce qui suit : « Le Comité de Coordination des Organes et des Corps de Contrôle (CCOCC) tient au moins deux réunions par an, notamment en novembre précédant la nouvelle année, pour la planification et la coordination des plans de travail et des missions et en décembre, pour l’évaluation des missions et des activités. Le Secrétariat Permanent du Comité de Coordination est logé à l’Inspection générale d’état. Un inspecteur d’état est désigné pour tenir le procès verbal de séance. » En outre, l’article 3 dudit décret réglemente la composition du Comité présidé par l’inspecteur général d’Etat, en étant complété par les articles 4 et 5 qui fixent la composition suivante :  Inspection générale des Finances ;  Inspection générale de l’Education Nationale ;  Inspection générale de la Santé ;  Inspection générale de l’Equipement et des Transports ; - 105 -

 Inspection de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs ;  Inspection générale de la Police ;  Inspection générale des Forces Armées de Djibouti ;  tout autre organe et corps de contrôle d’un département technique non visé par l’article précédent… Il est aussi retenu par le biais de ce décret, en son Chapitre III intitulé « Suivi des directives », les dispositions suivantes : - Article 6 : Les corps de contrôle envoient un exemplaire de leurs rapports finalisés à l’Inspection générale d’Etat pour la saisie et la mise à jour des directives issues de corps de contrôle dans la Banque de Données des Directives et des Rapports. - Les conclusions et les recommandations des travaux de ce comité sont intégrées dans le rapport annuel de l’Inspection générale d’Etat prévu par l’article 11 du décret n° 2001- 0222/PR du 21 novembre 2001 portant création d’une Inspection générale d’Etat. Au Sénégal, entre autres attributions, l’IGE assure la coordination des corps et des organes internes qualifiés, selon la terminologie en vigueur, d’Inspections internes des départements ministériels. Cette fonction, outre la loi portant statut des Inspecteurs généraux d’Etat, est aussi régie par diverses instructions présidentielles. Il faut retenir qu’en principe, à l’échelon des interactions entre corps et organes de contrôle, un effort de coordination est effectué, comme indiqué dans la représentation cidessous, avec un premier niveau de coordination qui se - 106 -

déploie lors du processus de planification, selon la séquence ci-dessus modélisée.

IGE – Préparation de son Plan annuel de Vérification et d’Etudes

Rapprochement des données

Réunion du Comité de Coordination

Accord sur les missions

Préparation des Plans annuels de Vérification et d’Etudes des différents organes de contrôle

Mise en oeuvre

Réunion annuelle d’évaluation et planification

Réception IGE copies rapports et centralisation

Au total, au vu de l’expérience sénégalaise, un problème mal perçu est la nature et la hiérarchie qui doivent prévaloir en matière de coordination de l’action gouvernementale et administrative. Celle-ci ne peut s’exécuter, quand il s’agit de contrôle administratif, qu’en termes de niveaux hiérarchiques, par exemple au niveau d’un service par la direction, au niveau d’un Ministère par le Cabinet ou le secrétariat général, sur les questions globales et interministérielles, plus fréquemment au niveau de la Primature ou de la Présidence. C‘est une longue pratique dans le travail quotidien de

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l’administration publique. 72. La coordination des corps et des organes de contrôle par une Inspection générale d’Etat, rattachée à un niveau présidentiel ou primatoral, n’a rien de différent par rapport à ce qui vient d’être évoqué. Par ailleurs, par rapport aux développements précités, il peut alors se poser la problématique de l’auditeur dans le secteur public. Il existe des définitions fort classiques, par exemple par rapport à la célèbre théorie de l’agence… Dans le secteur public, si l’on s’oriente vers une approche intégrée (Comprehensive audit, full audit), la définition du GAGAS, au sens de son manuel, nous semble intéressante à plus d’un titre : - « Auditeurs : individus qui accomplissent des travaux en conformité avec le GAGAS et en conséquence, individus qui peuvent porter le titre d’auditeur, d’analyste, d’évaluateur, d’inspecteur ou d’autres titres similaires » ; - « Entité d’audit : … aussi bien des entités gouvernementales que les firmes comptables qui mettent en œuvre des audits par référence aux normes GAGAS ». Sous bien des aspects, il existe des similarités entre les normes qui se complètent, malgré les nuances. L’on peut partager la vision définie dans le GAGAS lorsque cet organisme dispose de l’utilité des autres normes lorsque 72

C’est bien, par exemple, en pratique, dans plusieurs pays, une tradition que les Conseillers Techniques de la Présidence et de la Primature coordonnent des dossiers interministériels, les Directeurs nationaux étant à leur disposition, naturellement dans le cadre de normes et de règles de déontologie.

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cela s’avère nécessaire, notamment les travaux de l’IIA, mais aussi de celles contenues dans le guide des évaluateurs de l’Association Américaine des Evaluateurs, au niveau des normes d’évaluation des programmes du Comité sur les normes pour l’évaluation de l’Education, etc. Les frontières ne sont pas étanches, entre les normes d’audit interne et externe, entre les différentes méthodologies et pratiques des auditeurs internes ou externes. Au demeurant par rapport aux doctrines conceptuelles, il paraît à ce stade possible de tirer les conclusions suivantes, pour mieux répondre aux enjeux: - si l’on met de côté quelques recherches doctrinales de renom telles que les publications de Mautz et Sharaf « The philosophy of auditing », 1961, et le texte intitulé « A statement of Basic concepts, 1973, une caractéristique fondamentale demeure l’insuffisance, si ce n’est la rareté de doctrines conceptuelles en matière d’audit, discipline enfermée dans la formalisation des processus, parfois dans certains paradigmes corporatistes73 et une vision unilatérale qui ne tiennent pas compte de la pluralité des régimes constitutionnelles74, des acquis de la science politique75, voire de la théorie de la relativité; 73

L’on comprend alors James E. Rebel lorsqu’il écrit « Unlike financial accounting standard setting and practice which are guided by conceptual statement, audit standard setting and practice have been influenced very little by basic theory concept. ». La nature du régime constitutionnelle n’a-t-elle pas une influence ? Du point de vue de la science politique, ce qui est évident en droit n’est pas forcément effectif dans la réalité ; en somme le jeu partisan, des facteurs extérieurs peuvent altérer la portée des normes et l’effectivité des règles juridiques. 74 75

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- si la normalisation, dans une perspective d’autorégulation, voire d’auto réglementation, est souvent le fait d’organisations professionnelles non gouvernementales nationales ou internationales (IIA, INTOSAI, GAO et Bureau de Gestion et du Budget), la tradition de l’interventionnisme étatique ou d’organisation interétatique survit, voire même connaît un regain, avec la loi Sarbanes-Oxley, la généralisation de directives de la Commission Européenne qui entend jouer un rôle normatif en matière d’audit, de contrôle interne, de contrôle des comptes et de l’information financière, etc. ; - en Afrique, apparemment, très de processus pertinents ont été mis en œuvre à cet effet, sous réserve des réalisations en Afrique du Sud; - au vu de l’expérience de la Communauté Européenne, il semble bien qu’une communauté africaine peut s’octroyer la marge de manœuvre requise pour impulser des politiques et des stratégies dont les finalités et les objectifs restent à déterminer, voire à formaliser ; - une vision trop opérationnelle et des approches intrinsèques qui font de l’audit une sorte d’en soi centrée sur les processus et les pratiques professionnelles, très déconnectée des disciplines qui font que l’audit a un sens ou est possible, par exemple les sciences juridiques, de management, de comptabilité et de gestion financière, posant la problématique suivante : faudrait-il définir l’audit de faon intrinsèque ou extrinsèque ?

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- l’apparition de nouvelles formes « d’assurance » orientées vers la pertinence, l’équité, la vison, la prise de décision, la stratégie, la gestion des performances, posant la problématique d’une avancée décisive vers l’approche élargie et intégrée…  Il demeure aussi possible de discuter de la problématique des IGE liée au concept d’institution supérieure de contrôle, apparemment très influencé par le modèle judiciaire ou juridictionnel : - des Cours de Compte de type latin, même si la source constitutionnelle de tels organes dans certains pays n’est pas effective, d’un pays à l’autre ; - de la hiérarchie judiciaire entre juridictions inférieures et supérieures, vocabulaire retenu par rapport à certains principes ou procédures comme le double degré de juridiction, l’appel, la cassation, la réformation, etc., le substrat conceptuel ne pouvant déborder, dans le droit latin par exemple, les sphères du monde juridictionnel, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, voire de l’équilibre desdits pouvoirs ; - dès lors, le terme supérieur ne peut s’appliquer aux relations entre des autorités administratives et des autorités judiciaires, en vertu des principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs, applicables tout aussi bien à l’exécutif, au judiciaire qu’au législatif ; - dans une certaine mesure, la théorie de la séparation des pouvoirs est aussi une théorie de l’équilibre des pouvoirs, par exemple le juge ne peut, sauf - 111 -

dans de rares cas, faire des injonctions à l’exécutif et s’immiscer dans la gestion des affaires publiques ; en somme, le terme supérieur ne saurait ainsi établir une hiérarchie entre organes indépendants les uns des autres, notamment dans les relations de fonctionnement, en tout cas que dans l’un des ordres pris séparément, d’une part, administratif et d’autre part, judiciaire; - l’évolution de l’audit et de la science administrative, sous la poussée de ce qui a été appelé le « Nouveau Management public – New public management » impose d’élargir la vision classique, processus entamé depuis longtemps (vers les années 45 par le GAO), élargissant la stricte vision axée sur le soussystème de finances publiques, comme en atteste la percée et le développement de la vérification élargie ou dite intégrée.

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I.3.6. La planification des missions D’une manière générale, la planification pose la question de ce qui doit être audité et comment. A cet égard, les normes internationales établissent des principes directeurs qui président à la planification des missions. La planification est une norme dite de fonctionnement. Selon l’IIA, « Le responsable de l’audit interne doit gérer l’audit de telle sorte que cette activité apporte une valeur ajoutée à l’organisation et notamment établir une planification fondée sur les risques afin de définir des priorités cohérentes avec les objectifs de l’organisation. » IIA Les programmes des missions d’audit interne doivent s’appuyer sur une évaluation des risques réalisée au moins une fois par an et tenir compte du point de vue de la Direction générale et du Conseil. Ainsi deux critères émergent déjà : la valeur ajoutée et le risque. La norme IIA prescrit aussi les diligences exposées ci-dessous : - prendre en compte les objectifs de l’activité auditée et la manière dont ils sont maîtrisés ; identifier à cet égard la pertinence et l’efficacité des système significatifs de management et de contrôle des risques et de l’activité, les ressources mises en oeuvre, les tâches opérationnelles et les moyens par lesquels les risques sont maintenus à un niveau acceptable ; identifier les opportunités permettant d’améliorer de manière significative le système de management des risques et de contrôle des activités ; sur la base des risques, établir une priorité cohérente avec les objectifs de l’audit et de l’entité ; au moins deux fois par an, évaluer les risques, pour disposer d’un programme de mission fondé sur une telle évaluation et sur le point de vue de la direction générale ; intégrer les missions de conseils qui sont acceptées dans le plan d’audit ; déterminer les ressources appropriées affectées à la mission, la composition des équipes de vérification, les contraintes, etc. - formaliser pour chaque mission un plan qui précise les objectifs, le champ d’intervention, les dates et les durées, ainsi que les ressources allouées ; finaliser un programme de travail qui définit les procédures d’analyse, d’évaluation et de documentation des informations ; ajuster au besoin en fonction de l’évolution. Faire approuver ledit plan avant sa mise en œuvre.

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La planification est un processus continu tout au long des travaux d’audit destiné à définir les objectifs, l’étendue, la méthodologie et les procédures d’audit. La norme GAO définit des exigences présentées ci-dessous. Planifier et documenter adéquatement les travaux et les objectifs d’audit pour : i) réduire les risques d’audit à un niveau acceptable permettant d’obtenir un niveau d’assurance raisonnable que les éléments probants collectés seront suffisants et appropriés ; ii) étayer les conclusions et redéfinir continuellement les objectifs, l’étendue et la méthodologie d’audit. Objectifs Ce qu’il faut accomplir durant le processus d’audit, ceci incluant GAO d’audit les thèmes, les performances recherchées, les constats potentiels de l’audit et les éléments éventuels de rapport. Champ et Frontière qui encadrent les objectifs de l’audit, par exemple des étendue de programmes spécifiques ou quelques uns de leurs aspects, la l’audit documentation concernée, les délais et échéances, la localisation, etc. Méthodologie Processus formalisé qui décrit la manière d’obtenir des éléments d’audit significatifs et pertinents permettant de réaliser les objectifs de l’audit, de réduire les risques à un niveau acceptable et d’obtenir l’assurance raisonnable que des éléments probants seront disponibles pour étayer les constats et propositions. Compréhension Les objectifs d’audit, la méthodologie et les procédures d’audit préliminaire précités permettent d’obtenir une compréhension préliminaire de l’entité notamment des éléments suivants : la nature des programmes, leurs caractéristiques, les besoins des utilisateurs potentiels de l’audit, plus précisément du rapport d’audit ; les contrôles sur les systèmes d’information, les exigences légales et réglementaires, contractuelles, notamment d’accords de subventions, les fraudes et les abus potentiels significatifs dans le contexte de l’étude ; résultats des audits antérieurs qui ont un lien direct avec les objectifs de l’audit. - identification des sources d’éléments probants et des critères Exigences de d’évaluation requis par rapport aux objectifs d’audit ; planification évaluer s’il convient d’utiliser les travaux d’experts pour la prise en charge des objectifs d’audit ; évaluer les besoins en compétences, en spécialistes et en ressources nécessaires ; communiquer avec les tiers et les intéressés au sujet de la planification ; finaliser le plan écrit de l’audit.

Deux éléments demeurent ainsi importants en matière de planification, la connaissance de l’environnement et de ses implications sur la mission et la détermination des sources nécessaires à la compréhension de l’environnement. La nature des données peut varier en - 114 -

fonction du type d’audit mené ; par exemple, en matière d’audit des performance, le manuel du GAO donne des indications sur la connaissance requise, notamment celle de la nature des programmes et projets, pour évaluer les programmes et les opérations audités : - la visibilité, la sensibilité, l’impact et les risques associés aux programmes et opérations ; - l’âge du programme, les changements intervenus, sa taille en valeur monétaire, le nombre de citoyens concernés qui seront affectés par le programme ; - les données et informations du plan stratégique et des objectifs ; - les conditions extérieures susceptibles d’avoir des effets sur les programmes, les opérations ou les activités.

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 Sources de données utiles pour l’auditeur, selon le 76 GAO Lois, règlements, contrats, accords de subvention Buts et objectifs des programmes, des opérations et activités Contrôle interne

« Efforts »77

Opérations et activités des programmes Outputs Outcomes Efficacité et efficience du programme Pertinence et fiabilité de l’information

76

77

Fixant les objectifs, les résultats escomptés, les bénéficiaires, les critères d’éligibilité... Effets escomptés fixés par le législateur, les règlements ou d’autres documents officiels… Possibilité pour l’auditeur de les transformer en critères de vérification… Au sens large, c’est contrôle de gestion institué au travers d’un ensemble de plans, de méthodes pour réaliser la mission de l’entité. Il comprend le processus de planification, d’organisation, de direction, de contrôle, tout en incluant les systèmes et rapports de mesure des performances, de suivi-évaluation. C’est aussi la première ligne de défense pour la protection des biens et valeurs de l’entité, de prévention et de détection des fraudes, des abus, des erreurs et des violations des lois et règlements… Sa compréhension peut être obtenue par l’étude de dossiers et procédures, des investigations, des documents de rapports antérieurs, etc. Montant des ressources investies pour réaliser la mission, les programmes, mesurables en termes de coûts, de temps, de qualité, de valeur monétaire. Stratégies, processus et activités de management destinés à transformer des inputs (entrées ou intrants) en outputs (résultats immédiats, sorties, extrants). Quantité de biens, de services et valeurs produits par le programme. Réalisations et résultats produisant des impacts… Le programme est efficace lorsqu’il atteint des objectifs, mais Compte-tenu du rapport coûts – efficacité et d’un certain niveau d’efficience. Nécessité d’évaluer si les informations collectées sont fiables, en l’occurrence les informations sur les politiques, les procédures, les pratiques mises en œuvre par les gestionnaires de l’entité auditée.

CF. Point 7.13 - General Government Auditing Standards C’est le terme utilisé par le manuel qui pourrait être traduit par investissements effectués.

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Conformité

Protection des actifs, biens, valeurs et ressources Déficiences du système de contrôle interne

C’est la conformité aux lois et règlements, à des clauses contractuelles valides. Le programme doit ainsi s’exécuter en conformité avec de telles contraintes légales, réglementaires ou conventionnelles ; l’auditeur peut s’y appuyer pour évaluer les risques d’actes illégaux, de violations des lois et règlements, les abus, et les fraudes potentiels . Il doit exister un ensemble de contrôles déclinés sous forme de procédures et politiques de l’entité auditée lui permettant de détecter les acquisitions, les utilisations, la mise à disposition d’actifs et de ressources non autorisées, indues, frauduleuses, etc. Le système de contrôle interne tel que conçu ne permet pas de prévenir, détecter ou corriger les faiblesses, d’atténuer les facteurs qui altèrent l’efficacité ou l’efficience, les fausses déclarations, les violations des lois, règlements et clauses conventionnelles

Les éléments mis en exergue par les normes retenues par les bureaux des Inspecteurs généraux aux Etats-Unis78 tournent également autour d’un certain nombre d’orientations, plus ou moins voisins, résumé ci-après : - le maintien d’un système de planification qui s’appuie sur l’évaluation de la nature, de l’étendue des risques inhérents aux programmes et aux opérations, les intrants de base au système constitué par le plan stratégique et le plan de performance et permettant de prendre en compte les buts, les objectifs, la mesure des performances à réaliser dans une période de temps déterminée ; - la coordination, par les Inspecteurs généraux et par l’encadrement du Bureau de l’Inspecteur général, des activités en interne et en considérant les autres composantes au niveau gouvernemental, pour optimiser les ressources disponibles au niveau du bureau de vérification. 78

Quality standards for federal offices of Inspector general – PCIE – ECIE…

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Le document de normes applicables aux Inspecteurs généraux décrit également des éléments que le processus de planification doit prendre en compte : - une planification stratégique qui prend en considération la nature des programmes et des opérations en cours et/ou en développement, les risques inhérents et les défis du management, la mesure des performances et des impacts, l’importance des sommes en jeu et les tendances budgétaires ; - des méthodologies et processus annuels de planification des performances des activités des bureaux d’Inspecteurs généraux, permettant de prioriser les audits, les évaluations et les investigations, de traduire lesdites priorités en objectifs, résultats et impacts recherchés ; - les actions à mener pour la prise en charge des recommandations issues des audits, des enquêtes, des investigations et des évaluations antérieures ; - lors de ce processus de planification, d’arbitrer entre les besoins et les ressources disponibles. Au Sénégal, la planification est effectuée par l’Assemblée générale des Inspecteurs généraux d’Etat, suite à une circulaire de l’Inspecteur en Chef, selon le processus résumé ci-dessous79. 79

Une crainte exprimée par le public ou certaines études d’ONG ou de bailleurs est que le planning soit dicté ; c’est ne pas prendre en compte les contraintes d’un Etat républicain, d’une culture d’indépendance jalousement sauvegardée par les IGE d’Etat sénégalais eux-mêmes, contre toute tentative d’appropriation.

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Circulaire du Chef de l’Inspection générale d’Etat

Transmission au Président de la République

Proposition des IGE

Réunion de l’Assemblée générale des IGE

Validation par le président, qui propose parfois d’y ajouter d’autres secteurs

Réception

Amendement et approbation par l’Assemblée générale

Emission progressive des ordres de mission

Une des questions souvent posée est celle de l’indépendance si ce plan est soumis à approbation. Il faut d’abord constater que la question fondamentale est l’existence d’une tradition républicaine ou non, car au Sénégal, les différents présidents qui se sont succédés n’ont pas eu l’habitude d’intervenir pour censurer le plan annuel des vérifications ; tout au plus invitent-ils à des ajouts. L’accountability dépendra toujours, non pas seulement de considérants juridiques, mais aussi du degré de l’état de droit et du type de leadership démocratique en vigueur dans un pays. Au-delà de la planification, il faut signaler l’existence du dispositif de suivi qui contribue à une coordination du travail d’audit et de ses résultats, consubstantiel au fonctionnement quotidien des Ministères et des autres entités soumises à vérification. D’une manière générale, la planification peut prendre en compte les attentes des citoyens, les suggestions et l’expérience des auditeurs, les objectifs stratégiques et initiatives gouvernementales. - 119 -

A Djibouti, au-delà de la gestion des risques, des critères ont été également pris en compte : les entités et les secteurs d’importance stratégique pour la nation, la qualité des services, l’impact et la perception des programmes et des activités sur les usagers et citoyens, etc. En résumé, en combinant les pratiques des IGE, notamment celles du Sénégal et de Djibouti, on aboutit, au terme d’une modélisation, au format ci-après. Planification

Questions et entités d’importance stratégique

Enjeux stratégiques, besoins et attentes

Evaluation des risques Présomptions de dysfonctionne ments ou dysfonctionne ments potentiels appréhendés

Zones de risques importants Profil des risques Cartographie des risques

Contrôle interne COSO Efficacité et efficience Fiabilité, conformité

Pour l’avenir, en tirant les leçons de bonnes pratiques internationales80, il semble bien que le système peut être amélioré en y ajoutant des outils contemporains largement pratiqués ailleurs telles la matrices de risques destinées à préciser des critères d’évaluation de l’impact des risques, les feuilles d’évaluation des risques (Risk scorecards) destinées à décrire et à illustrer les options de gestion des risques ou les secteurs à risques importants, etc. Par ailleurs, pour le suivi, il paraît aussi possible de s’inspirer des normes PEFA… C’est là une piste de recherche et d’action à approfondir. 80

CF. Risk-based audit framework – Secrétariat du Conseil du Trésor

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 Indicateurs PEFA d’efficacité du système de vérification Couverture et étendue de la vérification. Qualité de la vérification. Fréquence des rapports. Diffusion des rapports. Suites données conclusions de vérification.

aux la

Couverture et étendue

Qualité de la vérification

Diffusion des rapports

Vérifications internes Vérifications opérationnelles au niveau de toutes les entités de l’administration centrale. Conformité aux normes internationales ; vérifications axées sur les aspects systémiques. Vérifications qui s’insèrent dans un calendrier fixe. Copies au Ministère des Finances, à l’entité vérifiée, à l’Institution Supérieure de Contrôle. Des suites immédiates sont données aux conclusions – Suites données aux conclusions sont exhaustives pour l’ensemble des entités de l’administration centrale. Vérifications externes Toutes les entités de l’administration font l’objet d’une vérification annuelle portant sur les recettes et les dépenses, les éléments d’actifs et de passifs. Une série de vérifications internes et quelques vérifications de la performance sont effectuées… et mettent l’accent sur les aspects systémiques. La série des vérifications internes et des quelques vérifications de la performance effectuées sont conformes aux normes internationales… Les rapports de vérification sont présentés au Parlement dans les 4 mois suivant la fin de la période sous revue. Les rapports de vérification concernant les états financiers sont présentés au Parlement dans les 4 mois suivant leur réception par l’institution de vérification externe.

Il semble bien que la taille des bureaux de vérification en Afrique, en effectifs et en ressources de façon générale, ainsi que l’étendue du portefeuille des entités, des programmes et des ressources vérifiables, à de rares exceptions, ne leur permettent pas d’atteindre les indicateurs d’efficacité ci-dessus cités. Mais alors se pose aussi la question de la politique et de la stratégie nationale d’audit… Au vu des éléments de normes et modèles précités, l’Inspection générale d’Etat de Djibouti a formulé un

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modèle en général pour la planification dont la logique est résumée ci-dessous. I. Planification

Lettre / mission

Ordre

de

Enquête et revue préliminaires

Réunions préliminaires avec l’entité

Identifier et couvrir toutes les activités et risques. S’applique au Plan annuel ou au plan pluriannuel et au plan de la mission Spécifiquement à une mission, suivre les étapes suivantes : Notification de la mission en interne et discussion préliminaire interne sur son étendue et ses objectifs probables. Collecte de l’information sur les processus les plus importants. Site Web du gouvernement, réseau, CDI, etc., évaluation des contrôles existants et planification des étapes ultérieures. Notifier par écrit l’objet de la mission ou notifier par écrit l’étendue et l’objectif de la mission. Spécifiquement à une mission, suivre les étapes suivantes : notification de la mission. - Comité interne d’audit : discussion préliminaire interne sur l’étendue et les objectifs probables de la mission. Première réunion : explication de l’entité sur les structures, les systèmes, l’organisation, les ressources, etc. Collecte d’informations pertinentes, entretiens, revue des rapports disponibles, de dossiers. Contacts de sources d’informations identifiées, à identifier…

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Phase d’études et de recherches documentaires

Revue du contrôle interne

Description des processus Sur cette base, identification de zones de risques destinés à mettre en évidence les tests (contrôles) ultérieures qui seront effectués.

Ajustement et élaboration de programmes d’audit

Risques + Dysfonctionnements et déficiences potentiels appréhendés

Comité interne d’audit

Préparation de la phase d’exécution de la mission

I. Etudes et recherches documentaires préliminaires Identification de sources d’information Collecte de l’information documentaire sur les processus les plus importants, benchmark, évaluation préliminaires des contrôles existants. CF Lois et règlements disponibles, rapports des commissaires aux comptes, études documentaires de consultants, auditeurs ou autres disponibles. Planification des étapes ultérieures. Rapport préliminaire provisoire… Discussion en Comité d’audit II. Etudes et recherches documentaires avec enquêtes sur le terrain : Première réunion : entretiens et explications avec l’entité sur les structures, les systèmes, l’organisation, les ressources matérielles, humaines, financières, etc. Collecte de documents additionnels (états financiers, rapports annuels de gestion, études stratégiques et organisationnelles, etc.) Description des processus, du système de contrôle interne, des systèmes et outils de gestion – Longs à décrire parfois ; sur cette base, identification de zones de risques,mise en évidence de tests (contrôles) ultérieurs qui seront effectués. Déterminer si les contrôles identifiés sont pertinents, si la manière dont l’entité l’a présenté est pertinente. Elaboration d’un rapport préliminaire d’audit avec des constats qui vont requérir des approfondissements. Déterminer si les contrôles identifiés sont pertinents, si la manière dont l’entité l’a présenté est pertinente. Elaboration d’un rapport préliminaire d’audit avec des constats qui vont requérir des approfondissements décrivant l’entité sous différents aspects sus évoqués, les risques, les dysfonctionnements et déficiences potentiels appréhendés.. Discussion du rapport préliminaire en Comité d’audit et ajustement du plan préliminaires et élaboration de programmes d’audit – Approbation, ajustement. .Préparation d’un projet de vérification approfondie par type de risque, déficience ou dysfonctionnement potentiel appréhendé.

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I.3.7. L’exécution des missions Les normes internationales mettent en évidence des principes applicables à l’exécution des missions d’audit et/ou d’enquête. En matière d’enquête, les normes des enquêteurs juriscomptables certifiés81 prescrivent une série de normes minimales applicables : - le jugement professionnel, l’exigence d’un savoir, d’habiletés et de l’expertise nécessaire à la collecte d’éléments probants, par des voies légales ; - des analyses et évaluations qui devraient être basées sur des faits et informations fiables, sur les concepts généralement admis, des hypothèses raisonnables, des conclusions qui s’appuient sur des éléments probants ; - se mettre à l’abri de tout conflit d’intérêt qui pourrait empêcher le jugement professionnel et l’objectivité… La norme IIA (Point 2300), « Accomplissement de la mission » met en exergue la nécessité d’identifier, d’analyser et de documenter les informations pour exécuter la mission avec toute l’objectivité requise. A cet égard, la norme prévoit une série d’exigences : -

superviser la mission d’audit ;

- identifier des informations nécessaires, utiles et pertinentes ; Il s’agit d’une traduction du terme certified forensic investigators –CF en l’occurrence le document « Standards for certified forensic auditors » 81

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- fonder les conclusions et les résultats de la mission sur des analyses et des évaluations appropriées ; - créer et maintenir une documentation contenant les informations pertinentes ; - définir des contrôles d’accès et en cas de nécessité, faire appel à un juriste pour obtenir un avis approprié ; - définir et mettre en œuvre des contrôles d’accès à la documentation par le biais d’autorisations d’accès par les tiers et en cas de besoin, en s’entourant des avis juridiques requis, ce processus devant aussi être accompagné de règles cohérentes, d’orientations définies ou conformes aux exigences réglementaires ; - définir et mettre en œuvre des règles de conservation, de protection et de diffusion de la documentation. Au niveau du General Accountability Office, relativement à l’exécution de la mission, on note une approche exhaustive de la structure du manuel, qu’il s’agisse des audits financiers, des audits d’attestation des déclarations d’une entité, des audits de performance, comme résumé ci-dessous.

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Audit financier

Détection des erreurs matérielles susceptibles d’affecter les états financiers

Prise en compte des déficiences…

Quelques aspects communs aux audits lors de l’exécution de la mission

Développer les éléments nécessaires à la formation et à la formulation des constats et des objectifs d’audit Procédures d’audit Critères d’audit

Causes

Effet Documentation

Matérialité

Prise en compte de procédures légales ou des investigations en cours

Déterminer les effets et les implications de la violation de dispositions législatives, réglementaires, contractuelles ou clauses d’accords de subvention ayant un impact sur les états financiers ; dans ce cas, appliquer des procédures d’audit permettant de valider les effets sur les états financiers. Contrôle interne, des fraudes, actes illégaux, violations des dispositions contractuelles ou clauses d’accords de subvention. Corrélation des constats avec les objectifs d’audit.

Exécution de procédures permettant le déploiement des constats. Lois, règlements, contrats, accords de subvention, normes, mesures, performances recherchées, pratiques de gestion définis, benchmarks à des fins de comparaison. Expliciter les raisons ou justifier les différences entre une situation réelle et une situation désirée ou prévue ; source potentielle de recommandations ou/et d’actions de correction. Effet potentiel ou réel en termes d’écarts. Données, information et supports permettant une claire compréhension du travail. Mesures de conservation et de protection. Exécuter l’audit de sorte à obtenir l’assurance raisonnable que les erreurs matérielles ou les déficiences seront détectés. Eviter les interférences avec les procédures légales en cours, par exemple judiciaire ; évaluer l’impact d’une telle situation qui surviendrait, analyser la possibilité ou la pertinence de travailler avec les enquêteurs…

Il convient de souligner l’importance de la notion de critères de vérification, notamment lorsque l’entité - 126 -

d’audit désire exécuter des projets approfondis de vérification. Le Gao définit les critères comme étant destinés à identifier et comparer l’état désiré ou requis avec le réel, c’est-à-dire par rapport aux opérations ou aux programmes. Le document donne, dans la partie intitulée « Identifying audit criteria », des exemples de critères, certes comme mentionnés précédemment, mais en outre, les exigences en provenance de lois, de règlements, de clauses contractuelles, de normes, de mesures, de performances escomptés, des pratiques généralement admises, de benchmarks, mais aussi : - les politiques et procédures officielles ou des normes techniques formulées et admises ; - des opinions en provenance d’experts ou des performances écoulées de périodes antérieures ; - les pratiques courantes des affaires, les performances d’autres entités ou secteurs permettant des analyses comparées.

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Formalisation par l’IGE de Djibouti des normes d’exécution des missions d’audit ou d’enquête

Projet de vérification approfondie (PVA) Comité d’audit interne

Administration du PVA et feuilles de travail sur le terrain. Application de tests de contrôle Discussions et entretiens Feuilles de travail

Rapport préliminaire d’audit approfondi

Comité d’audit interne Rapport provisoire Transmission aux audités, enquêtés

Rappel de principaux constats, dysfonctionnements et déficiences potentiels appréhendés. Déclinaison pour chaque constat des aspects suivants : les domaines de vérification (important), les objectifs de l’audit et les critères d’audit (Efficacité, Efficience, Economie, Equité, Ethique, Conformité, Risques de fraudes), les procédés d’audit (feuilles de travail, questionnaires, calcul, etc.), les ressources … Validation, ajustement. Discussions (orales, par écrit avec des questionnaires, etc.), au fur et à mesure, des constats importants avec l’entité contrôlée sur la manière appropriée de résoudre les constats (risques, dysfonctionnements, déficiences, etc.) Application de procédures d’audit, de tests de contrôle, sondages, d’analyses des transactions, ratios, corrélations, etc. Au fur et à mesure des constats importants avec l’entité contrôlée sur la manière appropriée de résoudre les constats (risques) pour harmoniser la compréhension. Synthèse des résultats des analyses effectuées lors de la phase d’audit approfondi, à l’aide du projet de vérification et de ses feuilles de travail annexes.Validation par Comité interne d’audit, correction et ajustements, etc. Premier rapport : résumé des conclusions et des constats, recommandations. - C’est une version quasi-définitive, mais qui sera soumis à l’avis de tout tiers intéressé… En tenant compte des révisions, s’il y a lieu, suite à la réunion précitée. Font leurs observations. Joint en annexe au rapport en vertu du droit de réponse.

Rapport définitif

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I.3.8. Le suivi-évaluation Le suivi-évaluation est aussi une donnée du processus de gestion des missions. L’Institut des Auditeurs Internes a formulé une exigence de communication en ce qui concerne les objectifs et champs de la mission, les conclusions et les recommandations, au besoin, la nécessité d’élaborer un plan d’action pour le suivi. Le document des normes de pratiques professionnelles utilise ainsi le concept de surveillance des actions de progrès sous forme de systèmes et de processus de suivi et de surveillance de la suite réservée aux conclusions. En ce qui concerne, les Inspections générales d’Etat, la procédure de base de notification des rapports repose sur l’obligation de communiquer le rapport aux entités vérifiées et aux tiers intéressés ou au niveau desquelles s’opèrent des enquêtes ou études et l’obligation de réponse, en vertu d’un droit de la défense… Rapport définitif

Transmission pour approbation

Si approbation, notification de directives

Suivi des directives et rapport sur le degré d’exécution des directives.

Le nombre d’exemplaires est codifié – Fiche de transmission – Fiche analytique. Corps du rapport. Annexes. Réponses des entités concernées. Selon les pays, l’auditeur public transmettent leurs rapports pour approbation au Président de la République, au Premier Ministre, à des Ministres, ou à deux d’entre eux (Yémen au Parlement et au Président). Nécessité d’un système qui légitime ou donne une force juridique aux directives. C’est conforme au principe de la hiérarchie et de la coordination au sein de l’Exécutif… L’entité concernée rend compte de la mise en œuvre. Le bureau d’audit vérifie sur le terrain la réalité de l’exécution, à l’occasion d’une mission nouvelle, au fur et à mesure des réponses aux directives, annuellement, par exemple pour documenter le rapport annuel…

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Un système de gestion, de transmission, voire de circulation des directives, est mis en place et permet aussi, au-delà de la coordination, la gestion de la mise en œuvre des directives présidentielles. Une telle option correspond bien aux prescriptions des normes internationales d’audit qui traitent du suivi des résultats de l’audit. Par exemple, la norme IIA 2500 « Surveillance des actions de progrès » dispose de la nécessité pour « le responsable de l’audit interne de mettre en place et de tenir à jour un système permettant de surveiller la suite donnée aux résultats communiqués au management, pour l’atteinte des objectifs suivants : - la mise en place d’un processus de suivi permettant de surveiller et de garantir que les mesures ont été effectivement mises en œuvre par le management ou que la direction générale a accepté de prendre le risque de rien faire ; - la surveillance de la suite donnée aux résultats des missions de conseils conformément à l’accord passé avec le client donneur d’ordre. »

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En modélisant, le système existant correspond à un flux de supports et à un dispositif de circulation des rapports et des directives, présentés dans le schéma qui suit. Rapport définitif - I

Approbation Président de la République - II

Premier Ministre

Bureau de Suivi Primature

. Inspectio n générale d’Etat

Suivi mise en oeuvre

Prochaines missions

Ministères et entités concernés V.2

III IGE Bureau Suivi

Inspecteurs interne des Ministères

Elaboration de directives présidentiell e-V

Compte – rendu de la mise en oeuvre

Mise à jour « Base de données des directives présidentielles VI

Contrôles de l’effectivité Rapports d’exécution

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Ministère concerné (Bureau Suivi)

Ce système, bien géré et en tenant compte du système d’organisation en vigueur, dans certains pays, devrait en principe conduire au réseau décrit ci-dessous. Pilotage du système de contrôle - Approbation du plan annuel d’audit…

Président de la République

Examen des enjeux et coordination du contrôle en rapport avec le Président de la République (Plan de vérification, etc.) - Ordre de mission (Dépend des pays).

Premier Ministre

IGE

Suivi IGE

Comité des Coordination des Corps et Organes de Contrôle

Notification des directives issues des rapports d’audit, d’études et de conseils, d’enquêtes, etc. Archivage et mise en réseau. Missions de contrôle de la qualité et du degré d’exécution des directives présidentielles ou autres. Coordination au sein du Comité de Coordination des Corps et Organes de contrôle.

Base de données centrale des directives, instructions, indicateurs de performance de l’Etat

Ministères

Directeur de Cabinet ou

Secrétaire générale Inspecteur interne du Département ministériel Bureau du suivi

Base de données déconcentrée

Pilotage, approbation (plans et ordres de mission) et coordination du système et des plans annuels de contrôle interne au département. Suivi et contrôle d’effectivité des directives présidentielles, ministérielles. Rapports périodiques et rapports annuels sur les directives. Transmission à l’IGE pour des rapports périodiques et annuels de synthèse. Participation aux réunions de Comité de Coordination des Corps et Organes de contrôle, etc.

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Au total, le modèle repose sur une séquence qui est déjà en soi un modèle de travail administratif, de mise en œuvre, de coordination et de gestion des 82 dysfonctionnements inventoriés , basée sur les étapes suivantes: - réunions du Comité de coordination examinant les plans annuels de vérification et les rapports annuels d’activités desdits organes ; - suivi des directives présidentielles avec l’Inspecteur interne du département ministériel auprès duquel est rattaché un Bureau de Suivi ; - tenue d’une base de données des directives présidentielles issues des rapports de l’Inspection générale d’Etat, contenant aussi les conclusions et les recommandations des autres organes de contrôle ; - centralisation des copies des rapports de vérification dans le Centre de Documentation de l’Inspection générale d’Etat83.

82

Ce système ne peut fonctionner que dans un cadre où les fonctionnaires ont le culte des priorités, de la discipline et de la hiérarchie existante entre une présidence de la République, une Primature, les Ministères et les autres entités du secteur public. Si l’IGE du Sénégal n’avait pas le statut et la reconnaissance qu’elle a, au sein du secteur public, ce système ne servirait pas à grand-chose ou alors serait difficile à mettre en œuvre. 83

Ces documents centralisés constituent aussi des intrants aux futures missions, facilitant le déroulement de la planification et de la phase de connaissance préliminaire d’une entité à vérifier, mais aussi permet le contrôle a posteriori du degré d’exécution des directives issues de ses propres rapports et de ceux des autres corps et organes de contrôle.

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I.4. Conclusions préliminaires Le modèle africain repose aussi sur une répartition des rôles, avec deux niveaux de contrôle, système repris par bien des pays africains francophones: - une Inspection générale d’Etat ou un Contrôle général de l’Etat84, situé en dehors des ministères et des entités soumises à contrôle, rendant compte à un Président de la République ou par délégation, à un Premier Ministre ; - des Inspections internes rattachées à des départements ministériels, situées au sein des ministères, chose normale, pour permettre aux Ministres, dans le cadre de leur pouvoir hiérarchique, de faire procéder aux vérifications des services et des unités administratives rattachés à leurs départements et d’exercer leurs propres pouvoirs de contrôle et de suivi-évaluation85, concomitant à l’exercice de toute fonction de direction, de gestion et de leadership. Ce système est très différent de celui en vigueur en France où existe dans l’ordre administratif une Inspection générale des Finances, la seule à vocation horizontale et interministérielle, et des Inspections générales des Ministères, sous l’impulsion d’une vieille tradition qui 84

Il faut aussi prendre en compte les nouveaux systèmes de Ministères de la Bonne Gouvernance, de l’Inspection générale et du Contrôle d’Etat, comme au Bénin, au Burundi, laquelle comporte une Inspection générale d’Etat… 85 Au Sénégal, par le Bureau du Suivi, placé au niveau du Cabinet du Ministère, sous la coordination de l’Inspecteur interne du département ministériel…

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remonte à Napoléon, en l’absence de corps de contrôle au sens d’audit rattaché au Président de la République ou au Premier Ministre. Au total, aussi paradoxal que cela soit, dans la mesure où l’IGE est une structure de l’administration publique, son processus de travail et les exigences induites à cet égard, sont profondément différents de ceux mis en œuvre par plusieurs services publiques :  l’exigence de mobilité fait que le travail de bureau et de terrain occupe des temps à peu près équivalents, le bureau n’étant qu’un lieu de synthèse ;  le processus de travail est un cycle continu, dont l’efficience dépend du degré de normalisation du travail, tandis qu’en général, les autres catégories de fonctionnaires travaillent sur des thématiques à durée plus limitée, parfois de façon ad hoc ou ponctuelle ;  globalement, il prévaut une certaine forme de taylorisation, comme dans une usine… Si les normes, d’un organisme à un autre, présente des similarités, il est quelque peu possible de les caractériser, mais aussi de mettre en évidence quelques particularités.

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Modélisation simplifiée de l’approche IIA Normes de qualification

Normes de mise en oeuvre

Normes de fonctionnement

Caractéristiques essentielles d’une entité d’audit

Nature et qualité des activités d’audit interne et critères

Missions, pouvoirs et responsabilités de l’auditeur

Typologie des misions

Valeur ajoutée

Indépendance, objectivité, compétence et conscience professionnelle Formation professionnelle continue Programme d’amélioration continue et d’assurance qualité Evaluation et rapports sur les qualité, etc.

Il semble que le modèle IIA est centré sur l’apport de valeur ajoutée pour la gouvernance au terme d’un jugement professionnel qui doit s’exercer dans la rigueur. Il est centré sur une logique de processus, et des critères d’efficience, d’efficacité et d’optimisation, voire de productivité, de telle sorte que le jugement soit professionnel. Il consacre aussi des caractéristiques d’indépendance, de conscience professionnelle, de renforcement des capacités et de la qualité et à cet égard, formalise des règles et des procédés, des ressources, des

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activités, de gestion des risques, de planification et de communication, etc. Il est aussi intéressant de tenter une formalisation du modèle construit par le General Accountability Office ; l’architecture logique de son manuel repose notamment sur un certain nombre d’éléments ou de principes directeurs (CF. Partie introductive du manuel – Use and Application of GAGAS) : -

« l’audit est un élément, voire un sous-système, essentiel de la responsabilité (au sens d’obligation de rendre compte ou d’accountability pour employer un terme désormais courant) ;

-

le concept d’obligation de rendre compte, voire de responsabilité, de l’utilisation des ressources86 et de l’autorité au sein du gouvernement, est quelque chose de vitale au niveau des processus de gouvernance de la Nation. »

L’examen analytique de ce manuel permet de reconstituer, à titre indicatif, le éléments suivants inter reliés :

86

On constate que le manuel ne qualifie pas les ressources de financières, matérielles ou humaines, présumant qu’on a voulu donner au terme « ressources » son sens générique et englobant…

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Fondements préalables de l’audit

Jugement professionnel

Compétences

Indépendance

Contrôle de la qualité

Typologie des audits

Financiers

Analyses prospectives

Audit des performances

Attestation de conformité

Normes de travail : - Planification – Collecte. Constations - - Documentation - Eléments probants Rapports… Diligences additionnelles …

Responsabilité et obligation de rendre compte

Gouvernement

Exercice légal d’une fonction publique

Besoin commun - Bonne connaissance d’informations sur :

Obligati ons : 5E

Obligation de faire rapport public des informations sur les programmes

Obligations d’une information publique pertinente Fiabilité

Efficacité

Utilité

Efficience

Programmes gouvernementaux

Gestion des ressources

Correcte et convenable

Exercice de l’autorité

Conforme aux lois, règlements

A temps, dans les délais

Légalité - Conformité

Les objectifs sont atteints et des impacts réalisés

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Législatif

Economie

Obligati on de rendre compte des responsa bilités

Equité

Des services adéquats sont fournis

II. Les Inspections générales enjeux, défis et perspectives

d’Etat

d’Afrique :

II.1. Les Inspections générales d’Etat d’Afrique, une institution supérieure de contrôle de l’ordre administratif ? Ce qui existe en fait et en droit pur, au sein au sein de l’Etat compris comme juxtaposition ou coexistence de pouvoirs, c’est l’architecture suivante : - un contrôle administratif, avec une architecture et des modèles variables d’un pays à un autre, d’un continent à un autre ; - un contrôle législatif qui est assumé par le Parlement, au besoin en s’appuyant sur un vérificateur législatif également avec une architecture et des modèles variables d’un pays à un autre, d’un continent à un autre ; - dans quelques pays, sans doute encore rares87, la combinaison des deux modèles précités, au sein d’un organe unique possédant les deux caractéristiques, tantôt rattaché à l’Exécutif (Yémen) tantôt au Parlement (Suède), ou en relation avec les deux à la fois, comme au Yémen précité et aux Etats-Unis où les Inspecteurs généraux envoient leurs rapports aux Congrès, sans pour autant

87

Full audit coverage is frequently provided by complementary external and internal auditing entities. However, in some smaller governments or sub-governmental units, one audit entity alone, or an entity combining a hybrid of internal and external audit characteristics, may be appropriate.

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d’ailleurs que cela n’exclut l’existence de systèmes d’audit interne au sein d’entités publiques spécifiques.88 En réalité, il n’y a pas de modèle unique, voire figé, les choix peuvent être effectués en fonction d’une stratégie nationale d’audit, de gestion publique, d’intégrité, de transparence, d’éthique, de modernisation de l’Etat89, d’implantation de méthodes intégrées de suivi pour l’impact des audits et des évaluations, etc. Par ailleurs, quelles que soient les normes, les types d’audits et d’auditeurs, il existe un besoin commun d’indépendance, de statut légal, d’accès aux informations sans restriction, de financement appropriés, de ressources humaines compétentes, d’appui extérieur des parties prenantes, de professionnalisme et là les gouvernants, en somme le politique, a la plus grande part de responsabilité. CF. « “Recommendations90 --- “To protect the public interest, every government requires some form of independent audit function, whether through the use of internal and external audit services or through use of a form that combines the two….. The government audit function’s mandate should be as broad as possible to enable it to respond to the full scope of the government’s activities… all government audit functions require: • Organizational independence. • A legal mandate. …. • Unrestricted access. … • Sufficient funding. … • Competent leadership. .. • Competent staff… • Stakeholder support. … • Professional audit standards… Governments must establish protections to ensure that audit functions are empowered to report….”

Peut-être qu’il n’est pas inutile de revenir aussi à la distinction classique contrôle organique… 89 CF. les audits de modernisation actuellement impulsés en France. 90 The Role of Auditing In Public Sector Governance. A DRAFT IIA Position Paper Coauthored and Co-sponsored by: National Association of Local Government Auditors (U.S. and Canada) National Association of State Auditors, Comptrollers, and Treasurers (U.S.) CCAF-FCVI Inc. (Canadian Comprehensive Auditing Foundation--La Fondation canadienne pour la vérification integrée) Government Internal Audit Council of Canada In Collaboration With U.S. Comptroller General’s Domestic Working Group 88

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II.1.1. Genèse et interprétation doctrinales : aux sources d’une histoire juridico- constitutionnelle Il est intéressant de s’interroger sur la possibilité d’une formalisation doctrinale du concept d’Inspection générale d’Etat, à travers son histoire, l’intention des pères fondateurs, les divers ajustements institutionnels qui se sont déroulés de 1906 à nos jours au niveau des Etats francophones en Afrique du Sud du Sahara où elles sont apparues, et dans d’autres pays, comme Madagascar, Djibouti, en Afrique de l’Est, en Afrique centrale, sans doute ailleurs91. Comme indiqué précédemment, l’histoire institutionnelle établit un organe placé auprès de Chefs de territoire, ces fameux gouverneurs généraux des colonies. Par la suite, les pays qui ont connu cette tradition institutionnelle ont maintenu et/ou ajusté le dispositif légué par l’ancienne colonie. Au vu cet héritage, des pratiques et du dispositif juridico-institutionnel mis en place après les indépendances, je propose la lecture doctrinale suivante : - un Chef d’Etat, Chef de Gouvernement élu au suffrage universel par les citoyens, électeurs, acquiert le privilège et la légitimité constitutionnelle de définir la politique de la nation, d’arbitrer les grands enjeux, divers intérêts particuliers et généraux, de contrôler l’exécution de la politique, des projets et programmes définis, non seulement pour les raisons juridiques précitées, mais

91

Il faut remarquer que le texte fondateur du temps des colonies incluait l’Indochine (Laos). En l’état actuel, nous ne disposons pas d’informations précises sur l’évolution du système dans ce pays.

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aussi pour des nécessités managériales, car qui dirige, contrôle ; - en somme, détenteur de la même légitimité d’un élu au suffrage universel, le Chef de l’Etat ou de gouvernement détient, en vertu de la constitution, un pouvoir général de contrôle et d’arbitrage, mais il ne peut, par nécessité, contrainte ou en pratique, procéder lui-même aux investigations sur le terrain, sur des systèmes et des outils, au sein des entités et programmes ; aussi, selon les pays, est-il procédé à une habilitation législative (Sénégal, Burkina Faso, Djibouti) ou réglementaire à une institution de l’ordre administrative dénommée Inspection générale d’Etat, Contrôle général d’Etat ou autre appellation, selon les pays ; - dans les pays où cela est bien compris et pratiqué comme tel, ce pouvoir de contrôle devient un élément de pilotage, de leadership présidentiel, de contrôle, d’arbitrage, de réflexion ; - il induit dispositif juridico-institutionnel et une typologie des métiers assumés par l’Inspection générale d’Etat autour du triptyque « vérification, études et conseils, enquêtes de prévention et de détection des fraudes » ; - il induit aussi une image institutionnelle d’institution d’audit, d’étude et de conseils, d’organe de prévention et de lutte contre la corruption habilitée à détecter les fraudes, les abus et les gaspillages et dans certains pays, à déclencher le processus judiciaire de

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poursuite par elle-même ou par le saisine du ministère public; - il reformule un cadrage systémique de la finalité de l’audit, partout ailleurs et aujourd’hui, une démocratie saine, en formalisant la nécessité pour le Chef suprême de l’Exécutif et le public de connaître si les résultats prévus sont atteints, que les services fournis le sont de manière efficace, efficiente, économe, éthique et équitable, mais dans le cadre de l’obligation des dirigeants de rendre compte audit Président ou Chef de gouvernement, principal et déléguant d’une partie de ses pouvoirs ; - il induit aussi non pas seulement une vision du contrôle, au sens de maîtrise par le Chef du gouvernement, sur des entités, mais aussi sur des thématiques, des programmes, des projets, en somme des « objets et sujets de contrôle ». II.1.2. L’implication des choix stratégiques et organisationnels des pays africains francophones Une première implication porte sur la doctrine de l’agence, celle-ci, comme décrit précédemment, ayant constitué un fondement conceptuel de l’audit, avec le triptyque « Principal, agent et entité contrôlé » revêt un contour particulier appliqué au système «IGE ».

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Vision classique de la théorie de l’Agence Princi pal Actionnaires Conseil d’administratio n Direction générale

Agent Cabinet d’audit

Entité contrôlée

Théorie de l’agence appliquée à l’option Inspection générale d’Etat

Selon les constitutions, Président de la République, Chef de l’Etat et de gouvernement. N’est pas responsable devant le Parlement, « sauf en cas de haute trahison. » Selon les pays: Inspection générale d’Etat Contrôle général de l’Etat Ministre d’Etat ou Ministre chargé du Contrôle d’Etat, de l’Inspection générale d’Etat (récent) Contrôle Supérieur de l’Etat (Cameroun) Entité, programme et projet, thématique objet d’audit, d’études et de conseils, d’enquête de prévention et de détection

Définit la politique de la Nation, stratège des visions et grandes ambitions

Ministres Directeurs d’agences, d’établissements ou d’entreprises de l’Etat

Mettent en œuvre la politique définie par le Chef de l’exécutif En rendent compte au Chef de l’exécutif, au Parlement

Politiques et programmes publiques d’envergure gouvernementale ou ministérielle ou interministérielle , entités et gestionnaires (Ministère,

Inspection générale du Ministère, auditeurs des agences, des entreprises et établissements publics.

Politiques et programmes publiques d’envergure ministérielle, entités et gestionnaire s au sein du Ministère,

Mettre en œuvre les politiques, stratégies définies par la haute autorité présidentielle ou le chef du gouvernement

Au total, si la théorie de l’agence insiste sur le mandat et la relation « Principal, agent, entité contrôlée », apparaissent quelques particularités constitutionnelles : - dans les régimes politiques des pays en Afrique francophone au Sud du Sahara, une séparation étanche - 144 -

entre les responsabilités respectives, le Président de la République n’étant pas responsable devant le Parlement, mais plutôt le gouvernement au sens du groupe Premier Ministre et ses ministres92, d’où une différence majeure avec certains régimes parlementaires ou mixtes, ce qui invite à configurer la théorie de l’agence autrement ; - tout autant que le gouvernement est responsable devant l’assemblée, le Premier Ministre, les Ministres et leurs collaborateurs le sont à l’égard du Président de la République ; - les pratiques des IGE privilégient ce qui est appelé « propositions, directives, mise en œuvre et suivi des directives », lesquelles peuvent être considérés comme les vrais extrants du travail. Il faut aussi souligner la particularité du concept de suivi qui ne s’analyse pas seulement en une opération de compte-rendu, mais audelà, d’un contrôle du degré et de l’effectivité des directives issues des rapports à l’occasion d’une nouvelle vérification ou par des missions ad hoc ou spécialisées de vérification de l’effectivité des directives issues des rapports. Le système ci-dessus a eu des implications sur le dispositif de gestion et de coordination de la pyramide de contrôle, comme décrit ci-dessous, avec des particularités induites au niveau du système de fonctionnement

92

En général les constitutions africaines distinguent clairement dans des titres distincts le Président de la République, le Gouvernement et le Parlement…

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Implication Objectifs d’être

Extrants et

Etendue des respectifs

raison-

rôles

Coordination et suivi en synergie

Pilotage, contrôle de la mise en œuvre et impact au niveau gouvernemental Au-delà du rapport, des propositions transformées en directives présidentielles ou du Chef du gouvernement aux Ministres et Ministères, aux gestionnaires, sur des thématiques interministérielles, programmatiques Un contrôle transversal, horizontal dont les frontières dépassent une seule entité, en cas de besoin, peut concerner un programme, une thématique… Coordination et suivi au niveau du déléguant et mandant, donc du principal, par son organe de contrôle

Au niveau du reste de la pyramide Pilotage, mise en œuvre et impact au niveau ministériel Au-delà du rapport des propositions transformées en directives et instructions ministérielles aux agents du Ministère et des services rattachés ou sous tutelle

Un contrôle interne peu susceptible de dépasser les frontières de l’entité concernée Coordination localisée et suivi au niveau du Ministère, par son organe de contrôle

Au total, en Afrique au Sud du Sahara, une Inspection générale d’Etat est l’institution présidentielle, en tout cas celle placée auprès d’un Chef de gouvernement habilité par la constitution à arbitrer des enjeux et des intérêts généraux et particuliers, à contrôler la mise en œuvre de la politique qu’il a définie, par tout procédé, notamment de vérification, d’études et de conseils, d’enquête. Un tel système ne fonctionne convenablement que si le Chef du gouvernement l’intériorise comme instrument de leadership, de pilotage, de maîtrise des risques et des résultats, d’impact… C’est une institution matricielle, interne à l’Etat au sens constitutionnel et du droit public administratif, mais externe aux entités, projets, programmes et thématiques contrôlés, étudiés ou investiguées.

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II.1.3. L’implication sur la normalisation La normalisation suppose le nécessaire maintien de principes, des bonnes et/ou meilleures pratiques et des paradigmes rationnels, conformes au contexte constitutionnel et organisationnel, car il est évident que certains principes s’appliquent ou sont censés l’être déjà à toute institution de contrôle : l’indépendance, le renforcement des capacités, l’éthique et la responsabilité, d’autant plus qu’ils s’appliquent ou censés s’appliquer à la fonction publique, conformément à certaines dispositions des statuts généraux ou particuliers des fonctionnaires. Elle suppose aussi de prendre en compte les spécificités constitutionnelles et d’organisation des relations entre les pouvoirs publics au sein de l’Exécutif : le pouvoir de contrôle général que détient le Président de la République ou le Chef de gouvernement en vertu de la constitution, la nécessité d’utiliser le contrôle comme outil de pilotage permanent, la spécificité des rôles et métiers basés sur la triptyque « vérifications, études et conseils,enquêtes de prévention et de détection93 », permettant l’exercice d’attributions de contrôle, d’arbitrage d’intérêts généraux et particuliers. C’est une option stratégique possible, même s’il peut exister des The broadest audit focus also considers the organization’s governance activities, which can help the organization, achieve its objectives and priority goals and improve its governance framework, including its ethical code. The narrowest audit focus involves testing individual transactions for errors or for compliance with contract terms, policies, regulations, or laws. The auditors’ scope of work can vary between these extremes, and include activities such as reviewing internal controls, processes, and systems to identify systemic weaknesses and propose operational improvements. Usually, both types of focus are necessary to varying extents in order to achieve the most effective impact from a government audit function. 93

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visions plus sectorielles. Elle présente des avantages, notamment ceux décrits par l’étude précitée94 broader focus allows the audit function flexibility to use a risk based approach to auditing, focusing on the areas of most concern or risk, while contributing value across the entire organization.”.

Elle comporte des inconvénients, voire des contraintes, la nécessité de ressources adaptées, en quantité appropriées, la pluridisciplinarité, face aux faibles moyens et ressources des services publics d’audit, en Afrique.95 Ces conditions et modalités sont-elles réunies ? Quelle doctrine constitutionnelle retenir ? Les audits, les enquêtes de prévention et de détection, les études et conseils menés, pour nourrir la réflexion du chef de l’Etat, assurer une information neutre et son pouvoir d’arbitrage, constituent un sous-système du système global de management ou de gouvernance, si on lui donne son sens juridique et managérial de maîtrise avec ses différents processus de planification, de décision, d’action, de contrôle, de rétroaction, pour des corrections, des ajustements. En somme, qu’il soit interne ou externe, ce qui au demeurant n’impacte pas sur l’audit en tant que tel, ils doivent être considérés comme des outils de gestion qui permettent à une entité ou à un mandant légitime, détenteur d’un pouvoir, de procéder à des ajustements stratégiques, organisationnels, opérationnels, de gestion des ressources, au terme d’une rétroaction par un professionnel légitime et indépendant, sur les risques, 94

The Role of Auditing in Public Sector Governance- - DRAFT Because government auditing is so key to good public governance, it is crucial to achieve an appropriate configuration with an appropriately broad mandate to achieve the organization’s governance objectives. The government audit function’s mandate should be as broad as possible to enable it to respond to the full scope of the government’s or governmental unit’s activities. 95

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les dysfonctionnements, les faiblesses ou les menaces ».La seule contrainte est dans quelle mesure le détenteur d’un tel mandat est prêt à en assumer l’entière faisabilité ou opérationnalité. Alors, que peut ou doit faire l’Afrique ? Quel plaidoyer africain impulser en conséquence ? II.2. De nouveaux défis en maturation II.2.1. Un contexte nouveau en maturation En fait, aucun système, pas plus qu’un environnement, n’est figé. Un système, a-t-on pu dire, est un ensemble de sous-systèmes inter reliés, chaque sous-système contribuant à l’équilibre global du système. A cet égard, plusieurs enjeux sont apparus, surtout à partir des années 80, notamment ce qu’il est convenu d’appeler la nouveau management public, l’émergence et le développement des technologies de l’information dans la gestion publique, mais aussi au niveau de l’audit, le management axé sur les résultats, la performance et la qualité. Les métiers des auditeurs, en l’occurrence, vérificateurs, consultants, limiers et enquêteurs de l’Etat, sont eux aussi appelés à s’ajuster. - Un enjeu, assumer les défis liés à l’évolution de la gestion publique A partir des années 80-90, émergent les premiers débats et expérimentations sur les mutations du secteur public, avec le poids des déficits budgétaires dans certains pays, des doctrines de la crise de légitimité du secteur public. Des slogans apparaissent : « moins d’Etat, mieux d’Etat. » Le changement qui se consolide au cours des années 90, - 149 -

aboutit à ce que nous pouvons aujourd’hui qualifier de la nouvelle forme de gestion publique. On passe d’une ère axée sur la régularité, les processus et les procédures, à une dimension complémentaire axée sur les performances, les résultats et sur la qualité. En fait, il s’agit d’une immixtion du management des organisations dans un environnement construit au cours de l’histoire de la science administrative sur le modèle taylorien et wébérien de la bureaucratie réglementée et professionnelle. On ne gère plus comme avant : on gère par la vision, la stratégie, l’action, les résultats, tout en ayant en perspective le respect des normes traditionnelle de la légalité. L’on gère aussi par référence aux meilleures ou bonnes pratiques internationales. On assiste aussi quelque peu à une orientation vers une approche intégrée de la gestion des ressources, qu’elles soient humaines, matérielles ou financières, axée sur les résultats. A cet égard, au niveau international, une grande interrogation se consolide sur l’impact des financements, notamment de l’aide, sur l’appui budgétaire à la place des multiples projets et agences de développement. Parallèlement, la gestion est axée sur la dévolution assortie du renforcement de l’obligation de rendre compte, mais aussi est orientée vers les clients, en l’occurrence les usagers des services publics, les citoyens, les contribuables.

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Cette évolution pose de nouveaux défis pour les pays africains, lesquels, plus jamais que par le passé, doivent chercher à devenir des Etats de classe internationale, à l’écoute d’impacts et de résultats, capables de lever des contraintes et déclencher les facteurs clés du développement et du bien-être économique et sociale. Des défis importants se posent alors pour eux, comment revoir la manière de travailler, redéfinir les processus, formaliser l’atteinte de résultats et de la qualité. Atteindre cet objectif suppose des mutations dans le management de l’Etat, des organisations publiques et privées en Afrique, avec les enjeux suivants :  établir une direction stratégique capable de formuler un système intégré et partagé formulant le triptyque Vision, Missions, Objectifs, Tactique (VMOST) ;  à cet égard, l’effectivité de capacités en planification stratégique, par un processus continu, structuré, participatif et consensuel, axé tout aussi bien sur le futur que sur le présent ; 

un leadership stratégique attestant de l’effectivité du management par l’exemple et de la capacité à transformer une vision en actions fructueuses ;  une gestion des ressources financières, matérielles et humaines axée sur les résultats et les impacts, ayant pour finalité de mettre à la disposition des gestionnaires de résultats et d’impacts les ressources dont elles besoin, - 151 -

en quantité et qualité appropriées, au bon moment et au bon endroit; ce qui commande une autre forme et une autre mentalité de gestion des ressources financières ;  un système et des outils de mesure continue des performances, assortis d’indicateurs de résultats, de la méritocratie par des sanctions positives ou négatives pour constamment évaluer et récompenser l’atteinte de résultats désirés ;  la maximisation et l’optimisation de la valeur et des opportunités, au profit des citoyens et des usagers, par la revue des processus, des systèmes, des structures, de tout ce qui coûte cher, en réduisant les abus, les gaspillages et les fraudes. Il s’agit aussi à cet égard de s’orienter vers un secteur public et un Etat à la taille raisonnable (downsizing96), pour réduire les coûts, rester compétitif dans un monde de compétition globale, mieux diriger au sens de maîtrise de la gestion, des objectifs et résultats, en utilisant les nouvelles technologies de l’information et de la communication.97 L’enjeu est ainsi un secteur public au service et à l’écoute des citoyens, des usagers et des contribuables, ce qui suppose l’identification de leurs besoins et de leurs perceptions, des normes de performance de service à leur égard, par exemple en terme de délais ou de temps de satisfaction, d’efficience de l’offre de services. Au niveau 96

Serving the American public. Best practices in downsizing. National performance review. Al Gore. National Performnance review. Le benchmarking établit les vertus de la flexibilité 97 Dans certains écrits de la littérature anglo-saxonne, on parle de « Small government » ; l’on rappelle que « Small is beautiful ».

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international, cette nouvelle forme de gestion publique exploite toutes les opportunités ouvertes par le benchmark, le management des organisations en utilisant des tableaux de bord prospectif (balanced scorecards), des normes de services aux clients, des modèles d’excellence et de la gestion de la qualité (Baldridge, EFQM98, etc.). L’on rentre aussi dans l’ère de la planification stratégique au sein des bureaux d’inspection générale et d’audit gouvernemental. Il faut également constater un mouvement de réforme, voire d’ajustement, inégalement et partiellement réparti ou engagé et de plus en plus, quelques rapports de bailleurs et donateurs plaidant pour une harmonisation de la pluralité des interventions d’organes de contrôle… La fonction « Audit » dans le secteur public est sans doute amenée à s’ajuster et démonter sa contribution aux évolutions précitées. Un autre enjeu, assumer les défis de l’audit face aux nouvelles technologies de l’information et de la communication L’informatisation et les nouvelles technologies de l’information envahissent le travail des auditeurs, notamment en matière de détection des fraudes et des abus, de sondages, avec des logiciels et système d’information comme ACL, COBIT, IDEAI, etc. L’on assiste aussi à l’émergence d’un monde plus ouvert, accessible par Internet. Les grands bureaux de 98

Excellency Framework Quality Model

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vérification, à travers le monde, s’affichent, dévoilant leurs méthodes et leurs pratiques ; leurs manuels de vérification sont téléchargeables, leurs études et recherches doctrinales disponibles. Mais plus intéressant, certains auditeurs africains accèdent à une série de documents remarquables par leur contenu, notamment le manuel du Government Accountability Office99 , intitulée « Standards for Audit of Government Organisations, Programs, Activities and Functions100, publié en 1972, véritable bréviaire de l’audit intégré dans le secteur public. Plus que jamais que par le passé, il s’agit de s’adapter, d’être à l’écoute de l’environnement, de s’ouvrir aux apports fécondants de l’extérieur tout en restant soi-même.101 - Approfondir la synergie, pour des résultats et des impacts de la gestion publique, renforcée par une demande citoyenne Au-delà de la vérification, les travaux de l’IGE englobent diverses fonctions et activités importantes pour la marche de l’Etat au quotidien, d’enquête de prévention et de détection des fraudes, de préparation de l’arbitrage du Président de la République sur certains dossiers, de contribution à l’amélioration de l’organisation du travail administratif. Adapter, en réinventant quelque peu les 99

Le General Accounting Office (Bureau du Vérificateur général des Comptes) change de nom et devient le Covernment Accountablity Office qu’on traduire par le Bureau de la Responsabilité Gouvernementale. Cela témoigne de la vision du bureau américain qui d’ailleurs a été à l’origine de la vérification intégrée (comprehensive audit) 100 Normes d’audit pour les organisations gouvernementales, programmes, activités et fonctions. 101 Nous empruntons la formule à Léopold Sédar Senghor, notamment son plaidoyer pour la civilisation de l’universel.

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normes et les bonnes pratiques internationales, c’est là un défi. Sous ce dernier volet, plusieurs exemples peuvent être mis en évidence notamment la refonte de la comptabilité des matières de l’Etat, la rationalisation des dépenses publiques, en matière de logements administratifs, de gestion du parc automobile de l’Etat et de gestion des véhicules administratifs, etc. Très souvent, les rapports de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal ont aussi servi de base, sinon de source d’inspiration, à l’élaboration de circulaires et d’instructions présidentielles, primatorales ou ministérielles sur le respect ou la mise en place de normes et d’exigences de gestion que les différentes structures et les agents de l’Etat doivent respecter. D’ailleurs, ces actes commencent par des formules bien classiques : « Les récents contrôles de l’Inspection générale d’Etat (mention de la période au besoin) me conduisent à rappeler … J’ai constaté à la suite de plusieurs contrôles de l’Inspection générale d’Etat …, etc. ; « (signé le Président de la République, le Premier Ministre, le Ministre des Finances, etc.) En outre, une longue tradition d’une demande citoyenne s’est instaurée, de citoyens ou des agents publics qui saisissent directement le Président de la République ou le Vérificateur général, Chef de l’Inspection générale d’Etat, pour solliciter une enquête de l’Inspection générale d’Etat, voire même des fonctionnaires en conflit avec leurs supérieurs ou ministres. Bien souvent, ces plaintes ont lieu au niveau local, en matière domanial, de la part de populations ou d’individus qui s’estiment lésés par - 155 -

des décisions ou les comportements d’une autorité administrative locale et territoriale, d’employés qui dénoncent une mauvaise gestion102 présumée de projets de développement, du budget communal, de la communauté rurale, etc. Ces demandes sont devenues si importantes qu’elles pèsent sur la charge de travail des Inspecteurs généraux d’Etat. A partir de ces dénonciations, après recoupement, des ordres de missions sont émis et des enquêtes diligentées. Parfois, en cours d’enquête, l’Inspecteur général d’Etat commis propose de transformer la mission en cours en une vérification approfondie. Au total, le modèle est consubstantiel à une certaine culture organisationnelle, à une certaine forme de tradition républicaine que le Sénégal doit aussi à l’existence d’une technocratie, voire d’une élite formée aux sciences administratives., parfois jusqu’au niveau de la sphère administrative et politique.

102

De plus en plus, au niveau international, avec les acquis certains en matière de prévention et de détection des fraudes, le développement du forensic audit, des logiciels de prévention et de détection, de toute une recherche sur les thèmes des fraude, des abus et des gaspillages, les bureaux d’inspection et d’audit comportent un département spécialisé dans ce genre de travaux…

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Quelques exemples de circulaires ou d’instructions, à la suite de rapports de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal103 Circulaires ou notes N° 106/PM du 30 octobre 1972. Destinataires : Ministres, Secrétaires d’Etat, Secrétaires général de la Présidence de la République, Secrétaire général du Gouvernement, Délégué général au Tourisme

Objet Administration des crédits et gestion du matériel au niveau des différents départements ministériels

Note du mai 1974 sur les comptables gestionnaires, les dépositaires comptables, les détenteurs de matériel en service et les agents chargés de la tenue des comptabilités administratives. Destinataires : Comptablesgestionnaires, détenteurs de matières, agents chargés de la tenue des comptabilités administratives Elaboré par Inspecteur général d’Etat Georges Vermont Gauchy

Responsabilités des agents de la comptabilité générale des matières (comptables gestionnaires, détenteurs de matières, agents chargés de la tenue des comptabilités administratives

103

Thèmes - En matière d’administration des crédits : absence d’actes de nomination pour certains administrateurs de crédits. Abus d’engagements des dépenses ; fractionnement des commandes, systèmes des avoirs de crédits, fausses imputations, gestion du matériel. Comptabilité des matières, patrimoine immobilier de l’Etat, gestion des véhicules et du carburant. Mesures de redressements, fautes de gestion, etc. Responsabilités des agents de la comptabilité générale des matières.

Naturellement, la liste est loin d’être exhaustive par rapport aux apports de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal. Elle est simplement dressée aux fins d’illustration.

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Note circulaire n° 30 du 23 février 1774. Elaboré par Inspecteur général d’Etat Georges Vermont Gauchy N° 00299/PR/SG/IGE du 16 mai 1972. Destinataires : Administrateurs de crédits, Economes, Gestionnaires de deniers publics, dépositaires comptables, Maires, Secrétaires généraux de Mairie et agents municipaux chargés de la gestion des deniers et biens communaux….

Paiements collectifs par les billeteurs

Sanctions encourues par les responsables de deniers et matières

Main-d’œuvre payée sur crédits de matériel. Intendants, billeteurs de bourses. Mesures de redressements. Catégories de sanctions dans les cas suivants : refus de faire examiner par des autorités habilitées, à cet effet, les actes ayant pour effet d’engager des dépenses. Imputations irrégulières de dépenses. Engagement de dépenses sans délégation. Certifications fausses ou non sincères. Inobservations de la réglementation sur les marchés. Non respect des règles en matière de dépenses et de recettes. Utilisation non économe des crédits.

Au total, les missions de l’Inspection générale d’Etat, plus précisément leurs constats et propositions, ont été l’occasion d’élaborer ou de rappeler des normes. Un usage s’est instauré depuis longtemps : le Premier Ministre, le Ministre des Finances, sur la base des propositions approuvées sous forme de directives présidentielles, prenant des mesures, sous forme d’instructions. Bien souvent, certains de ces textes ont été rédigés ou revus au sein de l’Inspection générale d’Etat, avant leur publication. Au total, le métier est horizontal et comporte de multiples facettes, comme en témoignent les développements ci-dessus. -

La tendance actuelle à l’ajustement des missions - 158 -

Dans un monde ouvert, certaines Inspections générales d’Etat commencent à tirer les leçons apprises de l’évolution contemporaine; le système peut être amélioré et s’affirme alors le mouvement actuel d’ajustement. Au Sénégal, tout au début, diverses études sont menées, avec la coopération canadienne ; par la suite l’Inspection générale d’Etat intégrait ainsi la vaste famille de la Fondation Canadienne de Vérification Intégrée104.

104

Le terme Fondation Canadienne de Vérification Intégrée est traduit en anglais par le terme de Canadian Comprehensive Audit Foundation. Ceci est intéressant, dans la mesure où en Afrique le terme Audit lui-même a posé des problèmes tout au début. Pour le langage canadien Audit signifie tout simplement vérification.

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Les options sénégalaises d’ajustement Au Sénégal, en 2005, est entrée en vigueur une loi n° 2005-23 du 11 août 2005 portant statut des Inspecteurs généraux d’Etat, laquelle outre qu’elle qualifie l’Inspection générale d’Etat d’Institution Supérieure de Contrôle Administratif105, précise les missions suivantes qui incombent à cet organe. Missions générale permanentes Missions spécialisées particulières Etudes Etudes vérifications thématiques

et

et

et

Vérifications, audits, contrôles et inspections – Audits de conformité, organisationnels ; vérifications financières, vérifications de l’optimisation des ressources… Evaluation des politiques publiques. Investigations et enquêtes. Etudes de cas et recherches. Avis sur toute affaire soumise par le Président de la République. Sujets thématiques communs à plusieurs entités et à différents secteurs - Vérifications intégrée Vérifications sectorielles d’activités dont la gestion relève d’une seule entité ou de plusieurs entités d’un même secteur.

Par ailleurs, la réforme de 2005 légifère sur certaines vérifications effectuées jusqu’ici, mais pour les définir avec plus de précision :

105

CF. le travail du Dr. Jean François Collin, Inspecteur général d’Etat, dans sa publication intitulée « La mise en œuvre d’une vérification de l’optimisation des ressources dans les Inspections internes des ministères du gouvernement sénégalais » - Fondation Canadienne de Vérification Intégrée. Mai 2004. Dr. Collin a été ainsi à l’origine d’un concept fort innovant qui reste à être exploité dans toute sa portée.

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- la prise en compte, de façon explicite, des fondations faisant appel à la générosité publique ; - le cas des personnes ou des organisations exerçant une charge publique au nom de l’Etat, notamment les officiers publics ou ministériels ; - les rapports entre les institutions contrôlées et les tiers, notamment les organismes bancaires, publics ou privés, sans que le secret professionnel ne puisse être opposé aux Inspecteurs généraux d’Etat en mission. En outre, le dernier alinéa de l’article 6 de la loi précitée confie à ce service « la coordination des corps et organes de contrôle administratif » tandis qu’au terme de cette nouvelle loi, le Chef de l’Inspection générale d’Etat, nommé pour 7 ans et inamovible pendant cette durée, porte le titre de « Vérificateur général.» Enfin, les Inspecteurs généraux d’Etat sénégalais en mission disposent d’un droit d’investigation sans restriction, avec un accès aux documents et aux informations même secrètes et confidentielles, y compris ceux classés « secret défense nationale » ; les autorités civiles et militaires étant tenues par la loi de leur prêter assistance. Au total, la nature même des pouvoirs exercés constitue d’ores et déjà une différence à retenir, car il serait difficile aux autres institutions d’avoir les mêmes pouvoirs, soit en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, soit en vertu de leur localisation, par exemple à un niveau ministériel. - 161 -

La nouvelle stratégie prend en compte les dimensions spécifiques à l’Inspection générale d’Etat du Sénégal, en déclinant les objectifs liés au contexte suivant :  « un intérêt accru à l’égard de l’IGE du fait de la crédibilité dont elle jouit, dans un contexte d’adversités politiques et une effervescence médiatique pour tout ce qui concerne les rapports d’audit ;  le caractère dual d’une IGE respectée et crainte, qui a su conserver une rigueur et une expertise fondées sur le droit. » Du point de vue de la stratégie, l’institution de contrôle s’appuie sur ses traditions qu’elle entend conserver : « demeurer une vitrine de l’administration, préserver le caractère sélectif du recrutement de ses membres, préserver son indépendance garantie par la loi et son ancrage institutionnel sous l’autorité du Président de la République, en appuyant l’exercice de sa vision, par les audits, les études et conseils, les enquêtes. Sur ces fondements, les sept (7) orientations stratégiques cidessous ont été définies :  Renforcer la crédibilité de l’Inspection générale d’Etat et le prestige du corps.  Mobiliser les membres de l’Inspection générale d’Etat autour d’objectifs et de valeurs organisationnelles partagées.  Créer les conditions de prévention de la fraude et de la corruption.  Créer les conditions d’une bonne exécution des missions à haute valeur ajoutée axées sur l’évaluation des politiques - 162 -

publiques et de l’audit des pratiques et des systèmes de gestion en cours dans les organisations publiques.  Créer les conditions d’instauration d’une culture de reddition des comptes.  Moderniser le système informatique de l’IGE et mettre en place un site Web.  Développer une stratégie de communication pour satisfaire l’obligation de rendre compte, mais aussi respecter le droit du citoyen à l’information, dans le secret des informations issues des travaux de vérification, d’audit et d’inspection.

Pour chacune de ses orientations stratégiques, des plans d’action pertinents ont été déclinés... Une autre illustration – Le modèle d’ajustement à Djibouti A Djibouti, il faut remarquer une tendance récente de réécriture du dispositif juridique, notamment par une loi n° 52/AN/04/5ème L du 03 mai 2004 portant sur l’Inspection générale d’Etat. Celle-ci définit ses missions, ses objectifs, les pouvoirs et les prérogatives de vérificateurs, sa déontologie et les valeurs qui doivent présider au comportement éthique et professionnel des vérificateurs. Cette loi vise précisément les différentes modalités de l’audit à objectif étendu et intégré, notamment l’accomplissement d’audits stratégique, organisationnel, d’optimisation des ressources, de missions d’envergure gouvernementale, l’utilisation de critères de vérification comme l’Efficacité, l’Efficience, l’Economie, la Conformité, etc. La stratégie de

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l’Inspection générale d’Etat de Djibouti s’appuie sur une série d’objectifs stratégiques récapitulés ci-dessous : Objectif stratégique n° 1 – Prendre et mettre en œuvre des mesures organisationnelles à la hauteur des défis de normalisation, de la vérification à objectif étendu et d’optimisation des processus de vérification. 1.1. Normaliser les processus de vérification, pour qu’ils soient compétitifs, sur le plan international et codifier, à cet effet, la déontologie de l’Inspection générale d’Etat. 1.2. Asseoir un processus de planification efficace, efficient et productif (économe) des missions ; construire à cet effet un système d’information et des indicateurs appropriés. 1.3. Encourager et systématiser un processus de développement organisationnel au sein de l’Inspection générale d’Etat. 1.4. Gérer et systématiser la formation et le perfectionnement des Inspecteurs d’Etat pour l’appropriation des méthodes contemporaines de vérification et des nouvelles technologies.

Objectif stratégique n° 2 - Intégrer les nouvelles technologies de l’information et de la communication à la gestion de l’Inspection générale d’Etat et à ses missions de vérification. Objectif stratégique n° 3 - Mener des vérifications et des études qui ont un impact sur l’évolution du secteur public, en adéquation avec les principaux défis de l’environnement institutionnel, économique, social et technique. Produire dans ce cadre un rapport annuel cohérent et utile sur la gouvernance, la gestion et les réformes administratives du pays. 3.1. Renforcer la qualité de la gestion publique et promouvoir la bonne gouvernance, la discipline administrative, le respect et l’application des textes. 3.2. Assurer le suivi et l’évaluation des programmes et des secteurs prioritaires, en s’assurant de l’efficacité, des performances, de l’efficience et de la productivité - 164 -

organisationnelles, de l’optimisation des ressources, ainsi que de la contrepartie obtenue en fonction d’un franc dépensé.

Parallèlement ces objectifs stratégiques ont été complétés par une charte de valeurs et un code de déontologie.

- La charte des valeurs de l’IGE de Djibouti

Notre devise : professionnalisme, discernement et compétence, intégrité et réserve.

Notre mission : promouvoir la bonne gouvernance et la transparence ; servir l’intérêt public ; appliquer avec rigueur nos principes d’économie, d’efficacité et d’efficience ; favoriser l’apprentissage d’une culture de conformité et de reddition des comptes au sein des entités contrôlées.

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Nos valeurs :

Objectivité et impartialité : Nos travaux sont basés sur des normes et les standards de vérification qui garantissent l’objectivité des rapports produits. Nous respectons le caractère confidentiel des informations détenues en les utilisant à bon escient. Compétence et objectivité : Nous nous engageons à accomplir les travaux en mettant nos habiletés et notre savoir-faire à disposition et nous nous efforçons d’améliorer continuellement nos connaissances par une formation continue. Professionnalisme : Nous nous engageons à émettre des jugements professionnels basés sur des éléments probants, pertinents et fiables en nous assurant de la qualité et de l’adéquation de nos rapports et conclusions aux normes existantes. Intégrité et réserve : Nous nous efforçons de faire preuve d’intégrité et d’adopter une conduite exemplaire dans l’exercice de nos fonctions. Nous sommes également astreints au devoir de réserve en faisant preuve de discrétion et en respectant le caractère confidentiel des dossiers. Vers la qualité et l’excellence : Nos travaux sont basés sur les normes les plus élevées en terme de qualité et de recherche de l’excellence.

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 Le code de déontologie DEONTOLOGIE DES MEMBRES DE L’INSPECTION GENERALE D’ETAT DE DJIBOUTI Considérant les normes internationales de vérification et les pratiques communément admises par la profession ; Au vu des règlements régissant la création, l’organisation et le fonctionnement de l’Inspection Générale d’Etat de Djibouti ; Les membres de l’Inspection Générale d’Etat adhèrent aux principes, aux valeurs et au code de déontologie et de conduite ci-après.

- Les normes de vérification Les vérificateurs acceptent les normes professionnelles internationales généralement reconnues, lorsqu’ils planifient ou exécutent une mission, soit de certification des comptes ou d’examen, sous réserve de particularités définies dans les manuels de type général et spécifique de vérification en vigueur. Ils se réfèrent, chaque fois que possible, aux normes générales, aux normes de travail et aux normes de rapport, reconnues par la communauté internationale.

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En ce qui concerne les normes générales, les vérificateurs de l’Inspection générale d’Etat de Djibouti promeuvent les qualités et adoptent les attitudes requises des praticiens de la vérification, au niveau international, notamment : - en n’exprimant pas une opinion s’ils n’ont pas l’assurance que les conclusions qui en résulteraient sont fiables et significatives ou s’ils n’ont pas l’expertise et les habiletés requises, à cet égard. Dans ce cas, ils s’engagent à en informer l’inspecteur général d’Etat, chef du service d’Inspection et de contrôle, pour le recrutement des experts extérieurs nécessaires à la planification et l’exécution de la mission ; - en exécutant leurs travaux avec diligence et objectivité, en toute impartialité et à informer de l’existence de liens qui pourraient les amener à être partiaux ou à prendre parti, à l’occasion des jugements professionnels qu’ils sont amenés à faire ; -

en prenant, à temps et à chaque fois que nécessaire, les initiatives nécessaires à la disponibilité des compétences professionnelles adéquates pour la mise en oeuvre de leur travaux et en s’assurant que les experts qu’ils utilisent, disposent eux-mêmes d’une réputation avérée et des compétences requises.

- Normes de travail Les vérificateurs de l’Inspection Générale d’Etat, désireux de disposer d’un niveau de compétences compétitif au plan international, adoptent les normes de travail ci-après : - planifier adéquatement, par une stratégie efficace et un plan détaillé de mission, leurs travaux et, à cet égard, assurer la supervision des personnes et des équipes chargées des travaux de vérification ; - alimenter et mettre à jour les dossiers de vérification et de corroboration qui permettent de conserver les feuilles de travail et les outils de collecte, les procédés de contrôle, les informations - 168 -

recueillies et les conclusions obtenues, ainsi que les éléments probants qui leur ont permis de tirer des conclusions; - s’assurer de l’existence d’un niveau élevé d’assurance, par des procédés de sondages ou autres (Inspection, observations, demandes de confirmation, calculs, analyses, etc.), permettant de réduire les risques d’erreur ou de biais à un niveau de seuil de tolérance adéquat ; - réunir, chaque fois que de besoin, des éléments probants, suffisants, fiables et pertinents, permettant d’apporter des preuves tangibles, en provenance de sources indépendantes ou possibles à constater physiquement, en rapport avec le sujet analysé ; - déterminer des critères pertinents d’évaluation et d’examen pouvant assurer l’exhaustivité et le professionnalisme des travaux de vérification.

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Le professionnalisme des jugements effectués

Les vérificateurs de l’Inspection Générale d’Etat s’engagent à : - émettre, avec discernement et compétence, des jugements professionnels, tout au long du processus de vérification, ceci, pour élever la qualité de leurs travaux ; - prendre en compte les risques de mission qui consistent à exprimer une opinion non appropriée ou non fondée, pour n’avoir pas contrôlé des éléments importants (risque de non contrôle) ou ne pas les avoir décelé (risque de non détection) ; - obtenir un niveau d’assurance plus ou moins élevé, permettant de ramener le risque de conclusions erronées ou non fiables, à un niveau faible. - s’assurer que leurs travaux et leurs conclusions sont significatifs du fait qu’ils comportent une assurance élevée, et constamment réévaluer les objectifs, les critères et les procédés de vérification, ainsi que les conclusions, s’il y a lieu. Pour constamment réaliser ces objectifs, ils s’engagent à améliorer les trois dimensions de leurs compétences professionnelles, en l’occurrence leurs connaissances, leurs habiletés et expérience, par la formation, l’autoformation, les échanges d’expérience, l’apprentissage et par l’expérience.

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Normes de rapport

Les vérifications de l’Inspecteur Général d’Etat adhèrent aux normes de rapport communément admises, par l’exécution des diligences suivantes et de celles y afférentes, qui figurent dans les manuels de vérification : - présenter de façon adéquate le rapport de telle sorte à identifier les dates de mission, les destinataires, l’objet de la mission, la période couverte ; - mentionner des assertions de la direction, dans le cas d’un rapport d’attestation financière ou des comptes ; - décrire les responsabilités de la direction et l’étendue de leur propre responsabilité, dans le contexte de la mission ; - indiquer les critères qui ont permis les analyses et évaluations, lors de la mission, ainsi que les conclusions qui ont été tirées ; - élaborer des rapports professionnels, basés sur des standards de qualité, en ce qui concerne tant la forme que le fond, notamment au niveau des messages qui doivent être pertinents et préciser, pour les constatations, les causes, les conséquences et leur impact sur la gestion et les activités de l’entité vérifiée.

-

Le secret professionnel

Les vérificateurs et le personnel de l’Inspection Générale d’Etat : - respectent le caractère confidentiel des dossiers, ne les utiliseront pas à des fins personnelles et ne les communiqueront pas sans autorisation, sauf dans les cas de notification prévus par la

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réglementation et en matière de procédure contradictoire des rapports ; - s’engagent en conséquence à assurer la protection des informations ou documents professionnels auxquels ils ont accès.

- Intégrité et réserve Les agents de l’Inspection Générale d’Etat, à tout moment, dans l’exercice de leur profession, font preuve d’intégrité et s’engagent à ne mener aucune action ou à n’avoir de comportement pouvant jeter un discrédit sur le service d’Inspection et de contrôle. En outre, ils font preuve de discrétion, dans leurs vies privées et sont astreints au devoir de réserve.

- Utilisation économique, efficiente et optimisation des ressources de l’Inspection générale d’Etat Les membres de l’Inspection Générale utilisent avec efficience, économie, et dans un souci d’optimisation, les ressources dont l’institution dispose, à l’occasion des travaux qu’ils sont appelés à réaliser.106

II.2.2. Une vision systémique de l’audit couvrant toute la chaîne de performance L’évolution tend à assurer la jonction de plusieurs disciplines de sciences administratives, avec un mouvement affirmé d’une synergie entre l’audit, le management et la gouvernance. En réalité, au-delà de la conformité, auditer pour des résultats, c’est poser des questions relatives aux capacités de leadership Il paraît utile d’ajuster ce thème en formalisant davantage la norme pour y inclure les derniers développements du contrôle interne, notamment la norme COSO. 106

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stratégique et organisationnel, c’est s’interroger sur la disponibilité d’un management stratégique, organisationnel et opérationnel des activités et des programmes. C’est s’intéresser à l’optimisation des ressources, non seulement financières, mais aussi humaines et matérielles. De la même manière que les entités du secteur public ont assumé de tels défis, les entités d’audit sont astreintes à s’interroger sur les démarches, les outils et les systèmes qui sous-tendent leurs programmes et activités. 

L’impact de la vision managériale

L’évolution de la gestion publique, voire de la gouvernance, entrepreneuriale puisque axée sur les performances, profondément influencée par les acquis du management de organisations, tend à se stabiliser autour de paradigmes, de doctrines et de principes connus depuis bien longtemps en management. En somme, à côté des règles juridiques, des normes de la bureaucratie professionnelle, s’est affirmée toute la séquence vision, stratégie, organisation, performance, gestion des ressources. Cette vision consacre ce qui a été formulé par cette même discipline, avec le système intrants, séquences ou traitements et résultats, en somme la chaîne de résultats.

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Vision managériale intégrée107

Intrants

Ressources humaines

Processus - Séquences et traitement

Audit stratégique VMOST - DIS

Plan stratégique

Gestion organisationnelle Audit organisationnel

STR

PT

Extrants Sorties Résultats Outputs.

SIG

PROC

Résultats stratégiques pour l’environne ment externe et la société

Gestion des activités et programmes Plan d’actions Contrôle interne

Prestations de service

Usagers, contribuables, citoyens

Gestion des ressources Financière s

Matérielle Humaines s OPTIMISATION ?

Programmation

Utilisation

Résultats internes pour l’entité

Résultats aux clients

Résultats transversaux Clients Entité

Acquisition Conservation

107

Légende : VMOST= Vision, Mission, Objectifs, Stratégie, Tactique. DIS = Domaine d’intervention stratégique. STR = structures. PT = Postes de travail. SIG = système d’information de gestion. PROG = Programme.

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Appliqué à la nouvelle gestion publique, c’est tout le système des entités publiques qui évolue, cependant de façon inégale, selon les continents et les pays. A cet égard, l’Afrique a encore de grands défis à lever. Plus que jamais, il s’agit d’asseoir une vision systémique de la gestion publique, ce qui commande aussi un audit élargi et systémique.  Evolution vers une planification stratégique et une gestion stratégique axée sur les tableaux de bord prospectifs et rétrospectifs Clients - Stakeholders Produits

Mission, Vision, Objectifs, Tactique

Normes et meilleures pratiques

Processus

Ressources Plan stratégique

Humaines

Structures, Postes de travail

Matérielles Financières

Balanced scorecards Tableaux de bord prospectifs

Système d’information de gestion des performances

Résultats Impacts

Tableaux de bord rétrospectifs

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D’un point de vue des innovations en cours, certaines Inspections générales d’Etat, notamment celle de Djibouti, ont opté pour cet audit élargi, intégré et systémique108. Les enjeux d’une structure de vérification d’Etat, horizontale et transversale, commande que la vérification, les études et conseils, ainsi que les enquêtes contribuent à la prise en charge d’enjeux d’importance stratégique pour l’Etat et la nation. Il s’agit d’épouser les contours de la gestion d’un programme et d’une entité, de ses systèmes et outils, de ses processus, de ses résultats et impacts. Par le processus ci-dessus, il est escompté que les audits, les études, conseils et enquêtes qui constituent le fondement et la raison-d’être des Inspections générales d’Etat, pour un client unique, le Chef de gouvernement ou d’Etat, affecteront au mieux les intérêts de divers clients et stakeholders (citoyens, contribuables, usagers des services publics). C’est en fait une stratégie, mais toute stratégie à un coût avec la difficulté que les pouvoirs publics africains ne sont pas forcément de telles contraintes. La nouvelle démarche entamée plaide pour une vision de l’optimisation de toutes les catégories de ressources, pas strictement financières, mais aussi humaines, matérielles et informationnelles, en somme passer d’une Value For Money Auditing (VFM) à une Value For Ressources Auditing (VFR).

108

On trouve parfois dans la littérature les termes correspondant plus ou moins de « comprehensive audit, full audit, full coverage audit, expanded scope audit »

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Optimisation Conformité au juridique, aux instructions et directives, aux meilleures ou bonnes pratiques de gestion des ressources

Normes législatives, règlements,

Fiabilité de l’information sur les ressources : rapports, états, comptes, indicateurs

Risques liés à la gestion des ressources

Normes de contrôle interne

manuels de procédures. Benchmarking

Analyse de l’information financière,

comptes, etc.

Analyse financière, informations et indicateurs

Les ressources ont-elles été planifiées, programmées, utilisées et conservées de la meilleure manière possible pour réaliser la raison-d’être, les objectifs et les résultats escomptés ? Dans quelles conditions et modalités ?

Impact

Produits et services

Stratégie nationale d’audit

Processus

Nourrir la réflexion du Chef de l’exécutif Rapports d’audit, d’études et d’enquêtes, d’évaluation Constations et propositions

Processus internes Directives Capital humain et logistique

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Satisfaction des besoins, aux enjeux, aux analyses de performances des programmes, aux bonnes pratiques

Mise en oeuvre

Arbitrage, décision et contrôle

Compétences, motivation, valeurs partagées

Constats par les citoyens de l’impact et de l’utilité des changements. Crédibilité, confiance

esprit

d’équipe,

Culture de changement, d’apprentissage organisationnel, expertise et capacités.

Au total, il s’agit de sortir de la vision étriquée et simplificatrice de la dichotomie qui veut qu’on traite de particularités, sans synthèse et approche systémique. Certes, bien des doctrines, en traitant de l’audit par exemple, distinguent des catégories avec une spécialisation fondée sur les bases de connaissances juridiques, économiques, etc. Mais en réalité, c’est de la combinaison que naîtront l’efficacité, l’efficience et l’optimisation des compétences et du processus d’audit, d’études et de conseils, de détection et de prévention des fraudes, des abus et des gaspillages. Bases de connaissances Juristes magistrats Comptables publics

Chercheurs

Consultants management

en

Rôles Décisions fondées sur le droit Professionnels de la comptabilité publique, du forensic « accounting ». Font des rapports destinés à renforcer l’obligation de rendre compte et la transparence. Spécialistes des sciences sociales créant de nouvelles connaissances et des informations fondées sur les sciences économiques, sociales ou autres Conseils aux entités publiques. Ce sont des professionnels du management.

En fait, il s’agit de faire travailler ensemble les profils de compétence ci-dessus… Cela correspond aux pratiques de certaines IGE d’Afrique, avec une nouvelle impulsion à donner, l’ouverture à la diversification de compétences. La tradition ayant toujours été de miser sur une force de travail pluridisciplinaire, mais il faudra miser davantage sur la diversification des compétences, ce qui par ailleurs pose le problème de l’attractivité. - 178 -



Auditer pour l’impact

Si dans les modèles d’analyse stratégique applicables à une entreprise privée, les variables de rentabilité et de rendement du capital investi constituent un fondement de base, il n’en est pas de même en ce qui concerne les services publics classiques, à l’exception des entreprises publiques à vocation commerciale. En fait, il s’agit de mener des audits qui produisent des résultats et des impacts, ce qui commande d’introduire les notions de clients et de parties prenantes:  le client interne étant le destinataire du rapport final, en l’occurrence le Président de la République, ce qui pose la satisfaction et l’utilité qu’en tant que destinataire il peut en tirer, la contribution au processus à la prise de décision présidentielle, à sa vision, l’utilisation des résultats comme outil de gestion, d’arbitrage, de contrôle stratégique et de leadership ;  les clients-usagers, contribuables ou citoyens, stakeholders, qui en tirent des bénéfices lorsque les directives issues des rapports sont effectivement mises en œuvre et induisent des changements stratégiques permettant l’effectivité et l’efficience des stratégies publiques, et des économies de ressources ou en tout cas leur optimalisation, etc. Si ces principes sont acceptés, l’audit dans le secteur public est appelé à évoluer, profondément, il faudra par

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exemple formuler des indicateurs de performance appropriés. I.2.3. La fonction contradictoire d’agent changement ou de maintien des normes

de

Agent de changement, oui ! L’inspection générale d’Etat l’a été à plusieurs occasions, par exemple, au Sénégal, comme indiqué précédemment. Il existe tant d’autres exemples… Combien de jeunes fonctionnaires exercent aujourd’hui leurs activités sans se douter un moment qu’ils appliquent un système de comptabilité des matières qui n’a pu devenir une réalité administrative qu’avec la fermeté de l’Inspection générale d’Etat ? Ou de citoyens qui votent sans savoir que la Direction générale aux Elections et certains ajustements du processus électoral proviennent d’un audit des élections municipales ? Se soignent dans des hôpitaux dont la réforme a été amorcée au sein de l’Inspection générale d’Etat ? Poursuivent une réforme à l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature en ne sachant pas qu’elle a été ajustée à l’aune du management public et des nouvelles technologies de l’information par l’IGE ? Que la gestion des véhicules administratifs, des logements de fonctions et de services, voire du patrimoine bâti a été rationalisée et réglementée à la suite de vérifications et études de l’Inspection générale d’Etat ? Qu’une bonne partie des circulaires de comptabilité administratives et des deniers a été inspirée par les rapports de l’Inspection générale d’Etat.

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Agent de changement, oui, mais aussi gardien des normes, car les Inspecteurs généraux d’Etat au Sénégal sont aussi investis d’une mission de sécurisation et de rappel des normes établies …

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III. Paradigmes, quand tu nous tiens ! III.1. Contrôle interne et/ou contrôle externe ? Appréhendée sous l’angle des Inspections générales d’Etat, la qualification de contrôle interne pourrait n’être vraie que partiellement, peut-être n’a-t-elle d’intérêt ou de sens que par rapport à certaines situations, sans en englober d’autres ; tel que mis en œuvre Afrique, renvoie à une variété de situations et de rôles : d’enquêteur, de vérificateur au sens d’auditeur, de conseiller-consultant d’un Président de la République ou/et d’un Premier Ministre, d’instance de normalisation, parfois d’agent d’exécution et de supervision de projets et programmes ; par exemple dans des situations de crises ou de redressements il est estimé que seule l’Inspection générale d’Etat a la crédibilité et les pouvoirs nécessaires pour les prendre en charge. L’histoire du Sénégal regorge de cas patents à cet égard. Par ailleurs, dans l’ensemble, ce système bouleverse bien des paradigmes à la lumière desquels une partie de la littérature internationale fonde ses analyses : l’Inspection générale d’Etat, de par son rattachement et son statut, est complètement déconnectée de la hiérarchie classique, du fait d’une sorte de domaine réservé exclu de toute intervention extérieure et du fait aussi qu’il existe une culture organisationnelle des Inspecteurs généraux d’Etat eux-mêmes considérant que leur unique client dans l’administration est le Président d la République ou le Chef du Gouvernement, dans d’autres pays au cas où constitutionnellement cette qualité n’est pas attachée à la fonction présidentielle. - 182 -

III.2. Indépendance et approche systémique A l’occasion des missions, les vérificateurs abordent de multiples questions horizontales, d’envergure gouvernementale ou interministérielle, qui dépassent les frontières de l’entité auditée, lorsqu’ils estiment qu’il s’agit là d’enjeux à assumer pour la résolution des problèmes. Ainsi, la spécialisation prônée par certains experts s’accommode mal du système, à moins de revoir fondamentalement ses principes originels et sa philosophie. Telle que cette fonction a été conçue, une telle option priverait le Chef de l’Etat ou un gouvernement d’un processus cohérent lui permettant de se forger une opinion, voire une vision indépendante sur des thèmes d’études ou de vérification les plus variables ; l’option amènerait à plaider pour qu’il n’initie plus les contrôles qu’il juge opportun, à un moment donné. Par ailleurs, sur le plan technique, avec l’évolution de l’audit dans le secteur public, il faut s’interroger sur la pertinence d’un tel argument. La quasi-totalité des bureaux d’Inspecteurs généraux ou d’Auditeurs généraux anglo-saxon109 font plutôt aujourd’hui une vérification élargie (comprehensive audit, expanded scope audit, full audit, full coverage audit) qui s’accommode mal de cette dichotomie. Les critères et les normes d’audit de la Conformité, de l’Efficacité, de l’Economie, de l’optimisation des ressources, voire de l’efficience sont si imbriqués, qu’à l’occasion d’un des aspects, on est obligé 109

Plusieurs cas peuvent être étudiés à partir d’Internet, ceux par exemple du Government Accountability Office et des Inspecteurs généraux des Etats-Unis, de la National Audit Office de Grande-Bretagne, d’Australie et de Nouvelle Zélande, du Bureau du Vérificateur général du Canada, etc.

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d’étudier un des autres critères. Si l’on a l’expérience de ces formes de vérification contemporaine, l’on découvre forcément qu’en jugeant l’efficacité, on se prononcera forcément sur l’efficience, sur l’optimisation des ressources, sur la conformité, etc., tant ces questions sont liées, tout aussi bien en management des organisations qu’en audit. Il faut aussi relativiser le paradigme de l’indépendance que l’on tente d’opposer au système d’inspection générale, indépendance qui serait mieux assurée au niveau des auditeurs externes. Ce n’est point une vérité absolue. En fait, la contrainte majeure de l’autonomie, voire de l’indépendance, reste tributaire, dans un pays donné, de l’effectivité du leadership, de la démocratie sociale et institutionnelle, des valeurs et de la culture républicaine, de l’existence de fonctionnaires bien formés maîtrisant quelques principes statutaires du droit administratif ou constitutionnel de répartition et de coordination des pouvoirs et rôles, d’éthique et de déontologie administrative. De telles considérations sont la condition sine qua non de l’indépendance, quel que soit le système, contrôle interne ou externe, quel que soit le mode de rattachement, à l’exécutif ou au Parlement, même si de bons textes constitutionnels, législatifs ou réglementaires sont élaborés. Il faut d’ailleurs remarquer que dans la République (res publica), c’est la fonction publique dans son ensemble, en tout cas du point de vue de son expertise, qui doit être indépendante, en exerçant leur expertise… - 184 -

Il existe de nombreux autres paradigmes dont on découvre la relativité ; par exemple en naviguant sur Internet, sur différents sites de vérificateurs d’Etat, l’on découvre par exemple que la dichotomie, rapports transmis au Président de la République et /ou au Parlement est relatif et dépend de la législation des pays ; on peut ainsi bien concevoir que cela se fasse dans un ou dans les deux sens110 ou dans un seul des sens. On découvre aussi le modèle du seul et unique bureau de vérification, par exemple au Yémen, transmettant ses rapports, selon leur nature tant au Président de la République qu’au Parlement dans le cas du rapport sur les comptes annuels. En fait, ce qui émerge et semble primordial aujourd’hui, et qui est sera une question majeure au cours des prochaines décennies, est l’audit pour des impacts. C’est à la stratégie nationale d’audit de formaliser les orientations stratégiques pertinentes et d’opérer les choix souhaitables. Et celle-ci n’existe pas souvent.

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Les Inspecteurs généraux des Etats-Unis déposent copies de leurs rapports au Congrès. Il n’a pas de vérité absolue, c’est ainsi une question de choix.

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IV. Inspections générales d’Etat d’Afrique A la lumière de l’expérience sénégalaise. Que faut-il retenir ? Au début de cet ouvrage, l’objectif était de répondre à une série de questions qui est constamment posée aux Inspections générales d’Etat : Qu’est ce qui différencie l’Inspection générale d’Etat d’autres corps ou d’autres organes de contrôle ? Pourquoi plusieurs corps ou entités de contrôle dans le secteur public ? Un ne suffirait-il pas pour les pays africains aux moyens limités ? L’Inspection générale d’Etat est-elle vraiment indépendante puisqu’elle est rattachée au Chef de l’Exécutif ? Le rattachement au Parlement ne garantirait-il plus l’indépendance ? Les recommandations issues de vos rapports sont-elles appliquées ? A quoi serviraient vos rapports s’ils ne sont pas appliqués ? Plusieurs réponses ont été déjà fournies. IV.1. Qu’est-ce finalement une Inspection générale d’Etat en Afrique? En fait, un système, quel qu’il soit, n’est pas figé et est appelé à évoluer, car dit-on, il est composé d’un ensemble de sous-systèmes inter reliés dont chacun contribue à l’équilibre global du système. L’avenir d’un système c’est de s’ajuster et d’anticiper. Le système sénégalais111 a pu inspirer bien des pays africains de l’espace francophone qui ne manquent pas d’effectuer des voyages d’études et 111

Il ne faut pas oublier comme indiqué au début de cet ouvrage que Dakar était le siège de l’Inspecteur générale de Affaires administratives, en chef.

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de s’informer, pour au besoin s’en inspirer. Il possède des caractéristiques et des particularités qui bouleversent les paradigmes de la littérature internationale sur la vérification. Vérifications, études, conseils et enquêtes forment un tout cohérent. Au-delà de la détection, l’objectif parallèle est aussi d’améliorer la gouvernance du secteur public. Si je devais dégager des leçons apprises, au cours de pérégrinations de Dakar Djibouti, de Djibouti au Cameroun, comme Inspecteur général d’Etat et Consultant international dans ces domaines, mais aussi comme Secrétaire Exécutif du Forum des Inspections générale d’Etat centralisant une base documentaire sur les IGE et d’autres corps ou organes de contrôles, les enseignements suivants me paraissent pertinents. L’Inspection générale d’Etat, c’est au fond, une sorte de grand bureau d’audit, de conseils, d’études et d’enquête sur la gouvernance que celle-ci concerne la stratégie, l’organisation, les opérations et systèmes, les processus, les ressources. A la lumière de l’expérience, ces domaines sont si corrélés, surtout, lorsque au-delà des travaux des Inspecteurs, l’objectif recherché est aussi l’impact112. Pour lever les équivoques contenues dans une certaine littérature internationale, en ce qui concerne les Inspections générales d’Etat en Afrique, il faut retenir la particularité de la philosophie sous-jacente : celle-ci ne fait pas directement des recommandations à des Ministres, des entités ou autres, au sens où le font Auditer, comme finalité, en soi, est un gaspillage d’énergie. Certains pays sont entrain d’innover en ce sens, comme Dubaï… 112

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habituellement des cabinets privés d’audit, d’études ou de conseils intervenant dans ce domaine. Le système repose sur une idée simple et cohérente : si le Chef de l’Etat, en sa qualité de Chef du gouvernement, définit la politique de la nation, il faut bien qu’il s’assure de l’adéquation, de l’optimisation et de l’effectivité de la mise en œuvre ou de la gestion optimisée des ressources de la nation. Aussi, le système sénégalais, se fondant sur un long héritage institutionnel du début du vingtième siècle, consacre-t-il un processus qui aboutit à des propositions lesquelles adoptées deviennent des directives présidentielles113 notifiées par l’Inspection générale d’Etat aux Ministres, aux Inspections internes des départements ministériels, aux fonctionnaires, pour mise en oeuvre. Par ce biais, le Président de la République ou le Chef de gouvernement exerce ses pouvoirs constitutionnels de contrôle général de l’exécutif et d’arbitrage. L’audit n’est pas une finalité pour elle-même, une sorte d’en-soi, pour parler un peu comme Jean Paul Sartre. Il est un sous-système de gouvernance et du management public. En ce sens, sa mise en œuvre devrait aussi s’insérer dans le cadre d’une stratégie nationale de performance, d’efficacité et d’efficience globales, de construction d’un Etat de clase internationale, d’obligation de rendre compte.114 113

Il arrive que le Président de la République opère une délégation au Premier Ministre, surtout dans les pays où ce dernier est chef du Gouvernement (Cas du Cameroun). Mais ils examinent ensemble les documents de l’IGE. 114 Avec l’évolution du management public, l’obligation de rendre compte couvre plusieurs aspects, non seulement elle englobe les questions d’intégrité, de transparence, d’éthique, mais aussi la restitution et l’évaluation des performances, pour mener à bien tout ajustement requis, d’ordre stratégique, organisationnel, opérationnel, d’optimisation des ressources. C’est aussi une composante de la gestion de l’excellence, de la performance, de la qualité, etc.

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IV.2. Les défis du futur Au total, selon les pays, au vu des dernières réformes, on assiste, de façon encore inégale, à une tendance à prendre en compte les évolutions de la gouvernance, du management public, voire de l’audit dans le secteur public. Ainsi s’opèrent dans certains pays (Sénégal, Djibouti, par exemple) des ajustements du dispositif institutionnel, organisationnel et d’action. Les champs opérationnels d’action couvrent ainsi :  des vérifications financières et comptables, par référence aux pratiques comptables généralement admises ;  de façon récente, une approche audit de l’optimisation destinée à rendre compte de l’utilisation des ressources financières, matérielles et humaines ;  la combinaison des deux types d’audit susvisés permettant non seulement de fournir une opinion sur la qualité et la pertinence de l’information financière, mais aussi de mener des audits de performances pour analyser l’efficacité, les performances et la qualité de la gestion publique ;  des investigations sur les fraudes, les abus, les gaspillages et le respect des règles de prudence financière.

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Au total un mouvement de réforme est amorcé. Ce qui émerge, à l’analyse, c’est parfois des similarités, mais aussi quelque fois, des différences d’approche inventoriées ci-après :  des orientations plus ou moins inégales en direction de l’approche intégrée, certains pays (Sénégal, Djibouti) ayant entamé cette expérience, tandis que d’autres s’appuient encore sur une approche sectorielle, souvent administrative et financière ;  dans certains pays, toute une stratégie très affirmée de prévention et de détection des fraudes, des abus et des gaspillages, comme en Ouganda ;  une approche d’audit des performances et d’évaluation de l’impact des projets et programmes apparemment embryonnaire, en tout cas pas ou peu formalisée ;  des tendances émergentes à codifier les valeurs, la déontologie, par voie législative, sans pour autant que des chartes ou manuels d’éthique soient généralisés ;  un pouvoir d’arbitrage ou en tout cas de la préparation de l’arbitrage en cas de conflits ou dénonciations de citoyens dans certains pays, apparemment pas assumé dans d’autres. Peut-être s’agira-t-il aussi de réécrire les normes internationales en les adaptant, sans forcément en altérer la substance, aux spécificités reposant sur la synergie « Audits, Conseils et Etudes enquêtes », en étant conscient qu’il s’agit d’assurer à un haut dirigeant, un Chef d’Etat ou de Gouvernement, d’user de leviers - 190 -

pertinents pour exercer un leadership stratégique, source de valeur ajoutée… Cela requiert d’opter pour la synthèse fructueuse pour réaliser les objectifs d’un Etat de classe internationale ouvert à un management axé sur les performances et les résultats, la qualité et l’Excellence. Il s’agit, pour nous Africains, de poursuivre le plaidoyer que la bonne gouvernance, c’est aussi une gouvernance entrepreneuriale axée non seulement sur les résultats (outputs) mais aussi sur les impacts (outcomes), d’opter à cet égard pour des audits, des études et des conseils, voire des enquêtes qui épousent toute la chaîne de résultats. Ce défi est possible, mais il faut alors se battre pour refuser la pensée unique, produire une pensée endogène, décomplexée et africaine, mais ouverte aux apports fécondants de l’Universel. Pour terminer, rappelons que les travaux de l’Inspection générale d’Etat dépassent la vérification et englobent de multiples activités de conseils, d’enquête, d’études, de normalisation. Leur variété et leur caractère intégré, parfois à l’occasion d’une même mission, font d’elle une sorte de support, de grand bureau d’études, pour « nourrir la réflexion du Chef de l’Exécutif, voire du Gouvernement». Au fond, ceci est conforme à la logique de pilotage et de leadership nécessaire à tout dirigeant, en l’occurrence le Président de la République. Taylor, Weber, Mintzberg et tant d’autres doctrinaires du management ont largement étudié cette question. En fait, la structure ne devrait pas précéder la stratégie, mais c’est l’inverse qui est souhaitable ; c’est la stratégie qui détermine la structure, les caractéristiques des produits et - 191 -

des services, les objectifs, les résultats et les impacts recherchés. C’est une vieille leçon apprise par tous les étudiants en management, c’est aussi la voie obligée de ce qui a été appelé « le nouveau management public ». Et puisque la stratégie a forcément quelque part ou quelque peu un caractère contingent, il faut relativiser les modèles. Le problème, c’est la créativité, l’audace de la créativité, la capacité à comprendre les contingences et les contraintes, pour les intégrer. Au total, sous ce chapitre, le système sénégalais constitue un levier d’information indépendant des structures exécutives de l’Etat chargées de la mise en œuvre. Il permet la transmission de directives nécessaires à l’efficacité de l’action gouvernementale, car qui dirige, contrôle, évalue et redresse. Au fond, dans une certaine mesure, les enquêtes, les vérifications et les études deviennent ainsi des outils de gestion, de normalisation, de formation et d’autoformation pour toute la pyramide du secteur public. Le système est aussi un levier de coordination, tant des directives mettent en interaction différents services, non seulement de l’entité concernée par une vérification, mais une autre entité non vérifiée, et dont l’action est nécessaire pour la résolution complète des dysfonctionnement identifiés. Très souvent, les conclusions et analyses dépassent les frontières des entités, pour épouser des secteurs d’envergure gouvernementale, interministérielle, etc.

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Avec l’intérêt accru du public, des médias et des partis politiques pour les audits et les enquêtes de détection des fraudes, au Sénégal, bien des limites sont relevées par des tiers et une méfiance affirmée à l’égard du système :  le rattachement à un Chef de l’exécutif pourrait en faire un instrument de règlement des comptes et obérer son indépendance115 ;  le caractère restreint de la publicité des travaux ferait douter de la transparence du système, etc. Peut-être est-il temps d’ajuster par de futurs chantiers d’innovations administratives. En fait, il ne s’agit pas d’un système figé, bien des options et innovations sont encore possibles. Le système, appréhendé à travers ses fondamentaux, est rationnel, mais comme tous les autres systèmes de contrôle, de l’ordre administratif, parlementaire ou de l’ordre juridictionnel116 il ne peut produire ses effets que dans certaines conditions :  la tradition républicaine et le leadership présidentiel, voire du Chef du gouvernement, sont déterminants117 ;  il suppose une culture républicaine, une discipline administrative de fonctionnaires formés à la gestion publique, aux sciences administratives qui comprennent 115

Aux Etats-Unis, ce qui appelé Inspecteur général, transmet ses rapports semestriels au Congrès ; les rapports des Inspectors general Offices sont téléchargeables sur Internet. 116 Il faut se féliciter de l’innovation introduite dans la science administrative par l’Inspecteur général d’Etat François Collin à qui nous devons le concept d’institution supérieure de contrôle de l’ordre administratif et d’institution supérieure de contrôle de l’ordre juridictionnel. 117 La même exigence prévaut dans le cadre du Vérificateur législatif, il faut un leadership parlementaire authentique.

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parfaitement les différentes formes de hiérarchie, les principes de coordination du bas au sommet de la pyramide administrative ;  il exige un statut spécial, voire la dotation en moyens spéciaux, comme le Sénégal a su le faire, pour des raisons psychologiques, culturelles, surtout en Afrique118 ;  il nécessite aussi une chaîne de sanction positive ou négative qui, en cas de besoin, prenne le relais des auditeurs ;  il suppose aussi une éthique d’égalité, car peu importe les privilèges de tiers lorsqu’il s’agit de faire le point sur l’accountability. C’est aussi une innovation africaine, par essence présidentielle, qui bouscule quelque peu les paradigmes généralement admis, notamment des experts issus de pays à de régime parlementaire ou en tout cas non présidentiel119, largement différente de ce qui peut exister ailleurs. Par ailleurs, de notre point de vue, malgré une certaine doctrine internationale, le paradigme du contrôle ou de l’audit interne en principe assuré au sein de la direction d’une entité ne s’applique que partiellement, tant les Ige sont totalement déconnectées des entités 118

Pour toute une génération d’africains, la fonction imposent un rang, un statut qui témoignent de son importance, bien qu’une évolution soit amorcée pour exiger ce qui apparaît de plus en plus importants : les résultats, la performance, la qualité, etc. 119 A noter que le régime présidentiel africain n’est pas forcément identique à celui des EtatsUnis, avec les prérogatives non négligeables que détient le Congrès américain…

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contrôlés et indépendantes d’elles, se situant hors de la hiérarchie classique de l’administration publique, avec des activités et des processus de travail au quotidien totalement différentes. Paradoxalement, la nature de ses interventions au sein d’une même mission, dépassent les frontières d’une entité contrôlée, pour évoquer des questions d’envergure gouvernementales, proposer des mesures concernant une autre entité pendant qu’elle en contrôle une déterminée, pour proposer la modification de dispositif juridique qui concerne l’ensemble des ministères, pour effectuer des injonctions à une autre entité non vérifiée, mais dont des processus ou activité ont des incidences sur des questions étudiées, etc. C’est un métier difficile qui demande des ressorts psychologiques et une structure mentale solide, un métier à ne pas faire uniquement pour rechercher un statut, car la dure réalité de ces longs et contraignants processus de finalisation d’un rapport n’est pas évidente à assumer, si l’on pas été préparé à un tel défi. C’est parfois un calvaire et il faut savoir soumettre le facteur temps à ses propres objectifs de performance. C’est un métier à faire lorsqu’on est juste, serein, pas adepte des règlements de comptes, des faux problèmes et longues discussions inutiles, lorsque qu’on sait écrire120, indifférent à être aimé et mal aimé parce-qu’on est en mesure après son travail de dire : qu’importe, je suis quitte avec ma conscience121 ! 121

Dans certains pays africains, s’y ajoute des pressions liées à des considérations surnaturelles, parfois pour faire peur au Vérificateur. Un jour, la fin d’une mission, à l’intérieur du territoire sénégalais, en rentrant, l’ensemble du personnel m’appelle pour me dire : « M.

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C’est un métier plaisant et passionnant, lorsqu’on a une curiosité intellectuelle sans bornes, qu’on a toujours cette soif d’apprendre, qu’on a quelque part l’âme d’un chercheur pour l’action, de découvrir quelque chose de nouveau ou caché, de classer, de formaliser, de décortiquer pour faire du désordre apparent une architecture cohérente et prometteuse. Cela s’apprend, à mon avis, au moins pendant 5 ans. Et encore ! C’est un métier avec un pari sur l’excellence, sur soimême, avec les autres ; un rapport final, c’est comme une œuvre d’art, il doit être parfait ou en tout cas attrayant et convaincant122. Du fait qu’ils soient assujettis à l’obligation de faire des propositions à un Chef d’Etat, les Inspecteurs se sentent assujettis à l’obligation d’une grande rigueur, même s’ils peuvent se tromper, à l’instar de toute œuvre humaine. 123. Au-delà, ce qui est en jeu, c’est de comprendre le nouveau sens de l’accountability, qui est non seulement l’obligation de rendre compte de la gestion des ressources, mais aussi des résultats, de l’information sur les performance, première étape de la transparence, bientôt si ce n’est déjà fait, des impacts. Ce sujet est également vaste tant il englobe des questions liées à l’éthique, aux valeurs, à la déontologie, aux processus, l’inspecteur général, nous savons que vous faîtes votre travail ; mais attention, un grand taureau noir a été sacrifié contre vous par la personne vérifiée. Tendez les mains et nous allons prier pour vous. Je dus me plier à leur volonté par courtoisie et la prière fut faite. » 122 A Djibouti, j’ai classé les rapports définitifs comme dans un hôtel de luxe, entre 3 et 7 étoiles ; un rapport de moins de 5 étoiles ne sort pas du service. 123 Au Sénégal, il existe une série d’expression qui traduit bien la fierté de servir le pouvoir de contrôle général du Chef d’Etat : « Les soldats de la République », « les hommes du Président »

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aux outils et méthodes qui en permettent l’effectivité. Il y a donc tant d’autres questions qui auraient pu être abordées… Les performances du système dépendent aussi du système intégré de transparence, d’éthique, de responsabilité et d’obligation de rendre compte existant dans un pays. Pour prospérer, il requiert par rapport à la fonction de contrôle et d’enquête une mise à l’écart de la chose politique, au sens partisan, et des considérations similaires. Cela peut et doit être une fonction vitale de démocratie, de proximité des dirigeants avec leurs électeurs, de la bonne gouvernance qui requiert une vision, un leadership étatique, le credo de la performance et de la restitution de l’information sur les résultats, les impacts et la gestion des ressources. A elles seules, les normes, le système constitutionnel ou institutionnel, l’existence d’une structure de contrôle, la compétence des auditeurs et enquêteurs, ne donnent pas une garantie absolue d’efficacité, en tout cas d’impact ; l’environnement démocratique, la culture républicaine, l’égalité des citoyens, le leadership national participatif et consultatif, la volonté du principal, les exigences des stakeholders et de la société vis-à-vis d’une gouvernance de contrôle, constituent plus que les lois et règlement, voire les normes nationales ou internationales, la condition sine qua non d’un contrôle effectif, efficace et efficient, voire utile et porteuse d’impact de résultats

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Leadership. C’est bien cela dont il s’agit. C’est cela qui fera la durabilité de ce métier ; c’est une force et une faiblesse en même, car si le leadership du ou des détenteurs du pouvoir constitutionnel de contrôle124 flanche, ou si la même détention au niveau exécutif ou législatif n’est équilibrée, la typologie des métiers peut s’effondrer. Le futur du contrôle en Afrique doit tenir compte de ces liens ombilicaux et par le plaidoyer en Afrique, faire comprendre l’intérêt des évolutions esquissées. Pour bâtir une saga de l’excellence, il faut une culture républicaine et démocratique, une technocratie mobilisée autour des idéaux d’un Etat moderne, un consensus qui transcende les alternances et les changements d’hommes. Il faut une implication des leaders. Cela comme la stratégie, a un coût ; la question est alors de décider si l’investissement mérite d’être fait. C’est une décision stratégique, de nature politique, au sens noble du terme. Mais il faudra bâtir une vision stratégique, toujours lever la contrainte d’un leadership efficace qui catalyse, sans lequel rien n’est possible ou en tout cas, tout sera difficile. La gouvernance de contrôle, c’est peut-être la stratégie la plus opérationnelle pour réaliser la gouvernance ellemême, pour faire du nouveau management public une réalité. C’est une question de projet stratégique et organisationnel. C’est sans doute une des leçons apprises à travers l’action et en rédigeant cet ouvrage. Djibouti, mars 2008

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Il peut s’agir tout aussi bien du Chef de l’Exécutif que du parlement ou les deux à la fois…

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Inspections générales perspectives et enjeux

d’Etat

d’Afrique.

Réalités,

Abdou Karim GUEYE.

L’auteur

Abdou Karim GUEYE, Inspecteur général d’Etat et ancien directeur général de l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature du Sénégal, publie un deuxième essai sur le management public et la gouvernance, à travers la problématique des Inspections générales d’Etat d’Afrique. L’auteur, Juriste, est aussi diplômé en administration publique et en management des organisations, avec une spécialisation post-universitaire en audit et contrôle de gestion. Il cherche, à travers ses ouvrages qui paraissent progressivement, une jonction qu’il appelle vision systémique entre le droit, le management et la science administrative. Théoricien de la gouvernance entrepreneuriale, il a entamé une expérience doctrinale et pratique d’audit élargi, composante de la gouvernance de contrôle. Ce livre sur les Inspections générales d’Etat se situe dans cette perspective intellectuelle. C’est aussi un ouvrage écrit par un praticien du métier, qui se détache momentanément du quotidien, pour conceptualiser et pour rapprocher le réel - 199 -

vécu et connu, les doctrines, les mouvements de réformes et les enjeux actuels ou à venir. Il faut souligner que M. Guèye est également auteur d’un premier essai intitulé « Gouvernance entrepreneuriale et modernisation des Etats », chez manuscrit.com et de deux recueils de poésie dont l’un intitulé « le Temps des épines » publié aux Nouvelles Editions Africaines du Sénégal et l’autre, « Les piroguiers aux millions de rames », aux éditions manuscrit.com en France.

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