L'essentiel de la RSE

mise en place d'un prix carbone n Lancement de la Coordination Maroc- ... verts ou la participation à des chantiers solidaires. Ou même par des plateformes.
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L’essentiel de la RSE

numéro

114 juillet 2016

SOMMAIRE nnn

Outils ............................................. p2

Les ODD, nouveaux caps de durabilité Les Objectifs de Développement Durable ont été définis par l’ONU en septembre 2015. Témoignages d’entreprises qui travaillent à les intégrer dans leur stratégie. nnn

Si la RSE est de plus en plus intégrée dans les entreprises, il reste ardu de faire en sorte que tout le personnel s’en approprie les enjeux. Comment sensibiliser, mobiliser et impliquer ? Tour d’horizon de quelques outils qui ont fait leur preuve. ateliers ludiques

n Faire n La

entrer la nature dans l’entreprise

gamification

n Les

plateformes collaboratives

n Le

théâtre

n Le

mécénat de compétences

nnn

Analyse ....................................... p7

Retour sur le Business & Climate Summit Le sommet des entreprises et des acteurs de la finance engagés dans la lutte contre le changement climatique organisait sa deuxième édition, à Londres. Le point sur la mobilisation du secteur privé.

Lutter contre le greenwashing pour protéger la démarche RSE Avec le greenwashing, le retour de bâton est de plus en plus rapide et direct. Entretien avec Alexandre Pasche, président de l’agence Eco&co et auteur d’une note sur le sujet. nnn

Par Béatrice Héraud

Dossier ................................ p3 à 6

Comment mobiliser ses collaborateurs autour de la RSE ?

n Les

L’engagement des collaborateurs, moteur de la RSE

En bref........................................... p8

n Un

standard mondial pour mesurer le gaspillage alimentaire

n Le

Business Dialogue appelle à accélérer la mise en place d’un prix carbone

n Lancement

de la Coordination Maroc-France « Entreprises COP22 »

n Pour

responsabiliser l’entreprise, la Fabrique de l’Industrie veut « libéraliser le travail »

L’essentiel de la RSE - N°114 Juillet / Août / Septembre 2016

P

as de démarche RSE constructive et efficace sans l’implication des salariés. L’antienne est connue. Pourtant, avouons-le, l’affaire n’est pas simple.

Mais à y regarder de plus près, des motifs de satisfaction existent. Plus on parle de RSE et plus on donne envie de s’engager, nous enseigne la dernière étude sur la perception de la RSE par les salariés (Ekodev, Mindded, Des Enjeux & des Hommes avec l’institut ViaVoice, 2015). Ainsi, s’ils étaient mieux informés, 85% des salariés interrogés déclarent qu’ils voudraient s’investir davantage. La question posée est donc celle-ci : comment MIEUX transmettre les BONNES informations donnant envie aux salariés de s’intéresser à ces sujets ? Outre les indispensables prises de parole de la direction et du management de proximité sur la stratégie RSE de l’entreprise, il importe de multiplier les canaux de transmission pour les adapter aux différents publics, débutants et réfractaires en tête. La clé du succès réside, sans surprise, dans l’interaction. Les outils classiques, type newsletters ou réunions internes, ont touché leurs limites. Trop descendants, ils n’impliquent pas suffisamment les salariés qui veulent se rencontrer, échanger, se challenger, se dépasser. Pour montrer sa réelle implication en termes de responsabilité sociétale, l’entreprise doit faire participer, si possible dès sa conception, ses collaborateurs à des projets plus restreints mais qui font sens dans leur quotidien. Et pas uniquement sur leur lieu de travail. Les différents reportages que nous avons menés dans les entreprises pour ce dossier de L’essentiel de la RSE nous ont en effet montré une forte appétence des salariés pour des outils qui ne concernent pas seulement leur vie professionnelle. L’entreprise est non seulement perçue comme légitime, mais aussi en devoir, de leur apporter une information globale en tant que salariés/citoyens/ consommateurs. Cela peut passer par de simples ateliers, ponctuels et ludiques, mais aussi par des engagements de longue durée comme l’intégration d’espaces verts ou la participation à des chantiers solidaires. Ou même par des plateformes digitales pour les plus connectés. Loin d’être anecdotiques, ces outils peuvent donner lieu à de réels et essentiels moments de cohésion mais aussi d’innovation au sein de l’entreprise. Pour autant, pour que celle-ci y gagne un réel engagement des salariés, dans la durée, il importe de dépasser les éco-gestes et les « one shots », sous peine de rater l’objectif. Ces outils restent des compléments de l’implication des salariés sur des projets en lien avec les réels enjeux ESG de l’entreprise, qui restent évidemment le socle de la RSE. n

OUTILS

Les ODD, nouveaux caps de durabilité Mettre fin à l’extrême pauvreté, assurer l’accès à l’eau et à l’assainissement pour tous ou promouvoir une croissance économique durable, inclusive et soutenue… Voici quelques-uns des Objectifs de Développement Durable définis par l’ONU en septembre 2015. Des objectifs qui sont destinés aux États mais aussi au secteur privé. Témoignages d’entreprises qui travaillent à les intégrer dans leur stratégie.

A

près les objectifs Du millénaire (OMD), place aux Objectifs de Développement Durable (ODD). Au nombre de 17, ils forment le cadre de la politique onusienne en matière de développement à horizon 2030. Mais pas question de laisser les seuls États s’en saisir. Lors de leur lancement en septembre 2015, le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, a appelé les entreprises à aider les gouvernements à les mettre en œuvre. Et les entreprises feraient bien de le prendre au mot, selon Patrick d’Humières, senior advisor chez EY. « Les ODD renouvellent le concept de développement durable en le replaçant dans une démarche de trajectoire. C’est très important pour les entreprises. Elles pourront se voir interroger sur la façon dont elles les ont intégrés à leur stratégie et comment elles contribuent à leur réalisation. Malheureusement, les entreprises françaises ont pris du retard », regrette-t-il. Si beaucoup d’entre elles étaient, il est vrai, plutôt focalisées sur les questions climatiques (présentes dans les ODD) l’an dernier en raison de la COP21, plusieurs ont tout de même bien compris l’intérêt qu’elles pourraient avoir à s’en saisir au plus tôt.

Un cadre pour agir C’est le cas de Veolia. Déjà impliquée dans les OMD sur l’eau et l’assainissement pour lesquels elle estime sa contribution à respectivement 6,5 millions et 3 millions de personnes raccordées, l’entreprise a aussi participé à l’élaboration des ODD à l’ONU. « Avec les OMD, nous nous sommes retrouvés dans une situation extrêmement floue avec des définitions changeantes des objectifs. Pour les ODD, nous avons bataillé pour des méthodologies claires et précises », souligne Pierre Victoria, le directeur développement durable du groupe. En interne, Veolia qui pouvait déjà s’appuyer sur les méthodologies et indicateurs mis en place sur les questions d’accès à l’eau et à l’assainissement, a aussi fait appel à ses « critical friends ». Ce groupe d’experts internationaux s’est penché, avec des salariés de Veolia, sur l’intégration des ODD dans la stratégie de l’entreprise et a présenté ses conclusions au Comex, fin juin. « Les ODD lient lutte contre la pauvreté et respect de l’environnement et concernent tous les pays, quel que soit leur niveau de développement. Aussi, ils peuvent être vus comme un cadre de référence de l’action des entreprises qui intègrent, dans leurs métiers et leur stratégie, une vision de développement durable. Ils permettent aussi de bien définir la place des entreprises dans la gestion des biens communs », analyse Pierre Victoria.

Le Global Compact en ordre de bataille

Selon une étude Accenture publiée lors du Global Leaders Summit, 87% des patrons d’entreprises membres du Pacte mondial voient les ODD comme une opportunité unique de repenser leur stratégie de durabilité. Le réseau va les accompagner grâce à des plans d’actions locaux, des partenariats ONU/ entreprise ou encore un programme destiné aux pionniers (10 sélectionnés parmi 600 candidats, aucun français). Un guide publié avec la GRI (Global Reporting Initiative) et le WBCSD (World Business Council for Sustainable Development) est aussi destiné à aider les entreprises à intégrer les ODD dans leur stratégie. Pour en savoir plus : www.unglobalcompact.org et www.sdgcompass.org n

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Le 17 000, outils de sensibilisation

Crédit : DR

C’est aussi l’avis d’Annabelle Guillet, la directrice assurance QSE (Qualité, sécurité, environnement) et RSE d’Armor group, une entreprise nantaise spécialisée dans les technologies d’impression et d’enduction, fortement impliquée dans une démarche RSE : « Je vois les ODD comme un moyen de définir et de structurer un plan d’actions, en abordant des domaines auxquels je n’aurais pas forcément pensé spontanément car l’entreprise n’a pas un impact direct sur eux, comme les océans par exemple. Ils ont aussi du sens pour une entreprise comme la nôtre, c’est-à-dire  implantée sur tous les continents, et notamment dans des pays émergents comme le Brésil, l’Inde ou le Mexique. Et j’ai déjà pu tester leur pouvoir de sensibilisation auprès des collaborateurs, notamment des managers : ils permettent de faire comprendre le rôle et la responsabilité de l’entreprise dans le développement durable au niveau global.»

Un levier de coopération multi-acteurs La reconnaissance, par l’ONU, de ce rôle, est particulièrement importante selon Noémie Bauer, Global CSR manager de Pernod Ricard, qui a présenté sa démarche lors du UN Global Compact Leaders Summit à New York les 22 et 23 juin derniers. « Cela donne une crédibilité à nos actions en termes de développement durable, souligne-t-elle. Nous pensons que les ODD sont une vraie opportunité pour les entreprises. Dès que nous en avons entendu parler, nous avons entamé une réflexion sur la façon de mettre en ligne notre stratégie avec ces objectifs. Cela s’est fait entre services mais aussi avec tout le réseau des CSR leaders répartis dans les 80 pays où nous sommes présents, en lien avec nos parties prenantes ». L’entreprise pense ainsi contribuer à 12 des 17 ODD et va définir des indicateurs pour en assurer le suivi. « De nombreuses actions que nous menons, sur la prévention routière, la consommation responsable d’alcool, les économies d’eau ou la préservation des océans (avec la fondation) s’inscrivent dans les caps fixés par les ODD. Maintenant, il faut réfléchir à de nouvelles actions que ces objectifs peuvent nous amener à prendre », précise Sandrine Ricard, la directrice RSE adjointe. Et voir aussi comment l’entreprise peut coopérer avec d’autres partenaires, entreprises comme collectivités ou ONG, car « les ODD ont apporté un langage commun », apprécie Noémie Bauer. Béatrice Héraud n Pour en savoir plus : http://www.undp.org/content/undp/fr/home/sdgoverview.html

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DOSSIER - Mobiliser ses collaborateurs

Mobiliser ses collaborateurs sur la RSE  Si la RSE est de plus en plus intégrée dans les entreprises, faire en sorte que tout le personnel s’en approprie les enjeux reste difficile. Alors comment sensibiliser, mobiliser et impliquer ses collaborateurs sur un sujet aussi vaste et complexe? L’essentiel de la RSE s’est penché sur différents outils existants qui ont fait leur preuve. Nous en montrons les avantages mais aussi les limites. Pour chacun d’entre eux, la première nécessité est bien entendu de définir en amont les objectifs, le public visé et les moyens à mettre en face. Et surtout, de bien garder en tête que ces outils restent des moyens de mobilisation et ne remplacent en aucun cas les actions RSE de l’entreprise.

Les ateliers ludiques, un premier pas pour mieux comprendre les enjeux Les ateliers ludiques et pédagogiques sont souvent la première étape de sensibilisation des salariés au développement durable. Ils permettent de rappeler les bases et d’adopter les bons réflexes, en douceur.

C

e jeudi midi, l’association Pik Pik Environnement a investi la cour de l’entreprise, à Neuilly-sur-Seine, pour sensibiliser les salariés de JCDecaux aux éco-gestes. C’est la semaine européenne du développement durable et, comme beaucoup d’autres entreprises, JC Decaux y a vu une bonne occasion de mobiliser ses salariés sur la RSE.  Valérie vient de tester ses connaissances en matière de recyclage. « Cela permet de remettre les points sur les « i ». C’est important que l’entreprise se mobilise sur ces questions car nous n’avons pas forcément le temps de le faire autrement », explique la salariée. Ici, l’objectif est de donner des trucs et astuces aux employés pour faire un geste pour la planète tout en économisant de l’argent. Il s’agit surtout de ne pas de les culpabiliser. « Jusqu’à présent, nous n’osions pas dépasser la frontière salarié/ citoyen, précise Virginie Gatin, directrice développement durable chez JCDecaux. Mais nous nous sommes aperçus que nos collaborateurs étaient en fait très demandeurs de ce type d’ateliers, ludiques

pourquoi et comment en tant que promoteur immobilier BNP Paribas Real Estate prend en compte le label HQE ou BBC). Pour CatheLier le ludique rine Papillon, la directrice à l’entreprise RSE, l’objectif est double : « ces actions concrètes Sensibiliser les salariés nous permettent de tenir dans toutes leurs activités un discours de  preuve, du quotidien, c’est aussi ce d’expliquer ce qui peut se qu’a voulu faire BNP Paribas faire au niveau de la RSE Un atelier organisé lors de la semaine du Real Estate. Là encore, la développement durable. en tant que salarié-citoyen Crédit : Pik Pik environnement mais aussi depuis son poste semaine du développement durable a été mise à profit de travail, et de montrer pour organiser des ateliers lors de journées comment l’entreprise prend réellement en thématiques consacrées à la biodiversité/ compte  le sujet dans ses activités ». n climat, au bien-être au travail, à la mobilité durable, au recyclage/économie circulaire et Le + : permet de lier les thématiques aux labels. Mais à chaque fois, l’entreprise RSE au quotidien des salariés a pris soin de dédoubler le thème avec, Le - : impact limité sur la pratique d’une part des ateliers orientés sur les écoprofessionnelle si on se limite aux gestes et d’autre part, des conférences éco-gestes permettant de relier le sujet à l’activité de Pour en savoir plus : www.pikpik.org l’entreprise et à ses différents métiers (ex :

et pédagogiques ». Des ateliers qui permettent aussi de montrer l’engagement de l’entreprise.

F  aire entrer la nature dans l’entreprise pour sensibiliser à l’environnement Espaces verts, ruches ou potagers… La nature s’invite dans les espaces de travail. Loin d’être gadgets, ces installations permettent aux collaborateurs de se détendre et de réfléchir au rôle de l’entreprise sur la biodiversité.

C

hez ADP (Aéroports de Paris), le programme de ce midi de juin, c’est atelier jardinage au soleil. Sur le site d’Orly Parc, tous les salariés sont invités à se rendre dans « l’aire de détente et potagère » pour une initiation aux mauvaises herbes comestibles. Dans les carrés potagers, des haricots, des fraisiers, des radis et des fleurs. Près du récupérateur d’eau de pluie, deux hôtels à insectes ont été installés. Des arbres frui-

tiers ont été plantés autour de la mare. Un peu plus loin, une « butte de la biodiversité », laissée à l’état naturel, vient compléter le paysage. Et des panneaux pédagogiques parsèment le parcours. La création de cet espace a en partie été possible grâce à la mobilisation de Virginie Provoost, assistante du Pôle Environnement et performance RSE au sein du groupe ADP. Il y a deux ans, elle participe avec deux collègues à un challenge lancé

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par l’entreprise pour améliorer l’espace de travail. Leur projet est retenu parmi des dizaines d’autres et présenté au Comex qui décide de le soutenir financièrement. Avec l’aide des Nouveaux Potagers, l’espace voit le jour en avril 2015. A chaque atelier, une quinzaine de salariés se retrouvent. Et des binômes se sont formés pour entretenir le potager au quotidien. Pour Sandrine Prieur, adjointe au directeur de l’environnement et du développement

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DOSSIER - Mobiliser ses collaborateurs

durable, « outre le bien-être sur son lieu de travail, cette démarche participative permet aux collaborateurs d’acquérir de nouvelles compétences en sortant de leurs missions habituelles et de découvrir l’environnement dans le cadre d’un projet concret. Autant de prétextes qui permettent de se former, de créer des liens  et d’avancer autour des thématiques RSE ». De fait, pour Virginie Provoost, le projet a déjà fait sentir ses effets : « Nous nous sommes occupé de négocier avec le service achats, de faire une étude de marché et une enquête auprès des salariés. Pour moi, qui n’avait jamais conduit un projet de A à Z, cela m’a permis de dépasser mes limites et de gagner en assurance. Maintenant, le projet nécessite encore de beaucoup communiquer pour le faire connaître à tous les salariés.»

Un outil multifonctions Quelques centaines de kilomètres plus loin, en banlieue de Toulouse, un cabinet de ressources humaines, 3X Consultants, s’est lui aussi aménagé un petit « écrin de verdure ». Dans sa parcelle boisée,

Chez ADP, des ateliers jardinage sont organisés régulièrement Crédit : Conception Alvarez

elle accueille trois ruches en partenariat avec l’entreprise Biocenys. Deux salariés, responsables des ruches, ont un rôle d’observation et de surveillance. Tous les ans, vêtus de combinaisons de protection, les collaborateurs volontaires se retrouvent pour la récolte du miel autour d’un apiculteur. Igor Gracovetsky fait partie des salariés qui apprécient de pouvoir profiter de ce « bol d’air » pour déjeuner ou simplement réfléchir. « Cela nous permet de nous reconnecter avec la nature et de nous interroger sur sa place dans la société. C’est le rôle de l’entreprise de s’engager sur ce sujet. Individuellement, nous n’y  arriverons pas. » C’est aussi l’avis de Monique Frambourg, la directrice associée. « Il est

du devoir de l’entreprise de se mobiliser sur ces sujets pour le bien-être des salariés et la planète. Mais le but est aussi que nos salariés soient plus acteurs. Nous réfléchissons par exemple à nettoyer le parc, à rafraîchir l’hôtel à insectes, tous ensemble. Nous les incitons aussi à porter des projets humanitaires », explique-t-elle. Plus de 130 ruches ont été installées en France par Biocenys depuis quatre ans. « Il y a un mouvement de fond qui émerge : l’entreprise de demain intégrera sans aucun doute les notions de biodiversité et de nature », analyse Emmanuelle Parache, la dirigeante. Et pour commencer dès maintenant à préparer le terrain chez les salariés, « la ruche a un fort capital sympathie. C’est une bonne porte d’entrée pour aborder la question environnementale.»

Le + : participatif, peut favoriser le bien-être des salariés

Le - : exige une certaine organisa-

tion et une implication régulière des salariés

Pour en savoir plus : http://lesnouveauxpotagers.fr/ www.biocenys.fr

La « gamification », un bon terrain de jeu pour stimuler

l’innovation

Passer par le jeu pour sensibiliser ses salariés ? C’est on ne peut plus sérieux. En faisant appel à l’imagination des collaborateurs, ils permettent de prendre du recul et favorisent l’innovation.

I

l y a deux ans, quand le cabinet d’expertise comptable Axis Experts Conseils a voulu sensibiliser l’ensemble de ses collaborateurs à la RSE, son fondateur Laurent Bazin a porté son dévolu sur un drôle de jeu : « I Nove you ». Créé en 2008 par le Centre des jeunes dirigeants (CJD), ce jeu collaboratif lui a permis de dresser un état des lieux et d’inscrire son entreprise dans une démarche de progrès. « Dans l’esprit de beaucoup de collaborateurs, la notion de RSE n’était pas très concrète. Avec ce jeu, on a pu s’interroger sur les relations clients et fournisseurs, sur le bien-être au travail, sur nos modes de gouvernance », se réjouit-il. « C’est comme un jeu de l’oie, poursuit-il. On lance un dé, on avance son pion et on tire une carte avec une question, ouverte ou fermée. Pour marquer des points et avancer vers le centre du plateau, il faut que nos réponses se rapprochent le plus possible de l’entreprise idéale en termes de RSE ». Le plateau est divisé en quatre couleurs qui reprennent les piliers de la performance globale (économique, sociétale, sociale et environnementale). Sur chacun de ces axes, les joueurs, divisés en équipes, doivent partager leurs bonnes pratiques

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ou en inventer de nouvelles. « Plus la RSE faisait partie de la décision stratégique de l’entreprise et plus on marquait de points, témoigne Anne Heintz, la responsable de la démarche RSE au sein du cabinet. Cela a permis une prise de conscience mais aussi de lancer une dynamique impliquant tous les salariés ».

Réfléchir en s’amusant Le jeu a ainsi servi de déclencheur pour entamer une série de réflexions et d’actions au sein de l’entreprise. « Nous avons mis en place différents comités de pilotage, regroupant des salariés volontaires, pour avancer sur nos différents axes de progrès (travailler en mode projet, valoriser les passions, améliorer le dialogue social, repenser la place du client…). Nous avons par exemple instauré un conseil d’entreprise qui rassemble dirigeants et collaborateurs sur le principe d’1 homme = 1 voix. Et nous sommes l’un des premiers cabinets comptables à être certifiés ISO 26000 », se réjouit le dirigeant. Pour François Marois, le secrétaire général d’Eqiom, une entreprise de 1 500 salariés spécialisée dans les matériaux de construc-

tion, passer par le jeu a également permis de doper la réflexion sur les évolutions possibles de son business model. Avec ses principaux managers, il a testé Circulab le temps d’une journée, un jeu imaginé par  l’agence de design Withaa pour initier à l’économie circulaire. « Il s’agit d’un jeu de rôles dans lequel chacun se met à la place du chef d’entreprise et propose des solutions. Cela permet de réfléchir collectivement en s’amusant et d’imaginer un prototype d’entreprise sous le prisme de l’économie circulaire »,  estime-t-il. Aujourd’hui, Eqiom étudie différentes pistes pour réduire sa consommation d’énergie et de matières premières et ainsi diminuer ses coûts et son empreinte environnementale. Avec une conviction, « l’économie circulaire est l’avenir de nos industries ».

Le + : pédagogique et ludique, permet de stimuler l’innovation

Le - : nécessite la mise en place d’un suivi au sein de l’entreprise pour avoir une réelle portée

Pour en savoir plus : http://circulab.eu/ http://www.acteursduchangement.cjd.net/integrer-lesparties-prenantes/i-nove-you/

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DOSSIER - Mobiliser ses collaborateurs

D  es plateformes collaboratives pour challenger ses salariés Les plateformes digitales, qui surfent sur la vague de l’Internet collaboratif, sont à la mode. Mais attention à bien définir les règles du jeu.

A

u service juridique de Plastico, Patrice peaufine le projet qu’il a mis en ligne sur la toute nouvelle plateforme collaborative de l’entreprise. Son projet : recycler des chutes de plastique mou issu de l’usine de Plastico pour les transformer en garniture d’édredons de l’entreprise voisine. Il doit obtenir le maximum de votes de ses collègues pour avoir la chance d’être sélectionné et que son projet soit mis en place dans les prochains mois. Célia, qui travaille dans le département RSE, lui a déjà promis de lui consacrer quelques heures pour l’aider. Si le projet l’emporte, elle aura droit à un édredon en cadeau. Voici un exemple fictif de ce que propose la plateforme MyCrowdCompany. Celle-ci est basée sur les principes du crowdfunding et est déjà en action depuis 2015. Avec succès. « Le taux moyen d’engagement des salariés est de 60% environ », affirme Céline Degreef, la fondatrice. La clé ? Bien définir les règles du jeu en amont. N’autoriser par exemple que les projets en lien avec la RSE, et les moyens à disposition. Rien de plus démobilisateur qu’un projet porté par de nombreux salariés et qui ne verrait pas le jour par manque de projection financière de la direction ou des porteurs de projets qui ne trouveraient pas de soutien chez leurs collègues par manque de communication. Mais quand la dynamique est lancée, difficile de l’arrêter. Bien maîtrisé et animé, l’outil permet d’impliquer un grand nombre

Un projet RSE présenté sur la plateforme MyCrowdCompany Crédit : MyCrowdCompany

de salariés, de les faire se côtoyer entre services sur des projets concrets, de faire le lien avec la stratégie de l’entreprise. Et parfois même de tracer la voie de l’intrapreunariat.

Challenger les comportements vertueux de ses salariés Donner son sang, faire un voyage solidaire, privilégier les transports en commun ou réduire sa consommation d’électricité… Depuis le 1 er juin, les collaborateurs de BPIfrance sont invités à s’engager et à le faire savoir sur la plateforme collaborative B2020, adoptée par l’entreprise. A chaque nouvelle promesse d’éco-geste ou de socio-geste, le compteur du salarié additionne les kilos de CO2 ou le nombre d’actions sociales pour son propre compte mais aussi celui de son service et de son entreprise. « Nous avons déjà mis de nombreuses actions en place et établi une

charte de responsabilité sociale, mais nous souhaitions mieux sensibiliser l’ensemble de nos collaborateurs à ces enjeux sur le long terme et les amener à s’engager, au quotidien, au bureau mais aussi chez eux. Cette plateforme est intéressante pour les collaborateurs car elle permet de voir ce que rapporte son engagement (en CO2 pour les éco gestes), de se comparer et d’échanger avec ses collègues. Pour l’entreprise, elle donne une vision globale des actions et crée une émulation grâce à des challenges organisés entre services par exemple », apprécie Catherine Maille, responsable développement durable RSE chez BPIfrance. Pour l’heure cependant, il faut surtout amorcer la pompe. La plateforme a été lancée pendant la semaine du développement durable mais pas question de relâcher l’attention une fois l’évènement terminé : des quizz et une mobilisation des personnes les plus sensibles au sujet sont prévus pour que l’émulation soit permanente.

Le + : ludique et addictif, peut être un tremplin vers des projets collaboratifs

Le - : nécessite de l’animer « in

real life », dans l’entreprise. Problématiques d’accès aux données personnelles.

Pour en savoir plus : www.mycrowdcompany.com www.b2020generation.com

L  e théâtre : pour rendre les collaborateurs acteurs de la RSE Outil de sensibilisation mais aussi de formation, le théâtre est un outil modulable, qui permet notamment d’aborder des sujets délicats voire tabou.

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n spectacle vaut parfois mieux qu’un long discours. Quand Catherine Papillon, la directrice de la RSE de BNP Paribas Real Estate, a dû présenter sa toute nouvelle direction aux fonctions centrales du groupe, elle a fait intervenir des comédiens d’Acteurs et Cie en introduction de son intervention. « J’avais besoin de présenter la nouvelle direction RSE et nos missions à des collaborateurs qui n’étaient pas forcément sensibilisés aux questions de développement durable, explique-telle. Lors d’une réunion au C3D, j’avais vu la pièce Mission Colibri, qui présente les préjugés que peuvent avoir les colla-

borateurs sur la RSE. Elle donnait à voir des situations ayant traits aux sujets RSE que l’on peut vivre en entreprise mais qui sont parfois mal compris. Les comédiens ont une aisance et une liberté bien plus grandes pour tenir ce genre de discours avec légèreté et second degré. Solliciter un comédien m’a permis  d’avoir  une bonne entrée en matière, avec un effet de surprise et sur le ton de l’humour pour que je puisse ensuite délivrer mon message ». Car attention, prévient-elle : « le théâtre est un facilitateur, un briseur de glace, mais en aucun cas il ne peut se substituer à la parole de l’entreprise. »

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Un format modulable Le théâtre a aussi séduit Muriel Voisin, la directrice RSE de Dalkia. Après une expérience réussie de sensibilisation au siège, elle souhaite décliner l’outil auprès de différents publics : « l’objectif est de déployer la pièce dans tout le groupe : en la jouant dans des séminaires, des évènements particuliers pour un large public mais aussi en plus petit comité, lors de formation avec des ateliers pour les commerciaux ou les hauts potentiels. Et pourquoi pas dans des petits modules vidéos, pour nos clients par exemple ? » De fait, le théâtre est « un format très modu-

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DOSSIER - Mobiliser ses collaborateurs

lable, qui permet une entrée en matière moins frontale sur des sujets parfois délicats (par exemple la diversité, le handicap ou le fait religieux) et qui permet tout à la fois de dédramatiser et de s’identifier. C’est un outil de sensibilisation mais qui peut aussi être très efficace pour changer nos comportements », souligne de son côté Bérangère Pessaque, coordinatrice des prestations et du conseil RSE au sein de FACE, la Fondation Agir Contre l’Exclusion. Une fondation qui a travaillé avec Co.Théâtre l’écriture du spectacle « RSE : does it pay to be good ? », présenté en mars dernier au salon Produrable. La co-écriture, c’est l’une des clefs du succès de ces pièces. Acteurs et Cie a écrit « Mission Colibri » avec des directeurs développement durable quand Co.théâtre

de départ et un point d’appui. L’échange qui suit avec les spectateurs est souvent crucial. Un temps qui peut être plus ou moins long, plus ou moins creusé et qui peut aussi intégrer des ateliers de mise en situation des collaborateurs. Il permet de digérer et décoder le spectacle mais aussi de le relier à ses propres questionnements ou situations vécues. «Does it pay to be good ?», le spectacle de Co.théâtre pour démonter les prejugés sur la RSE. Crédit : co.théâtre

s’adjoint souvent les conseils d’association ou d’experts. Dans d’autres cas, la pièce est écrite sur mesure pour l’entreprise, lorsque celle-ci veut vraiment adapter la problématique à son environnement. La pièce n’est d’ailleurs souvent qu’un point

Le + : modulable, surprenant, permet une mise en situation

Le - : bien réfléchir à l’objectif visé :

sensibilisation ou formation. Doit toujours être complété par la parole de l’entreprise.

Pour en savoir plus : www.co-theatre.com www.acteursetcie.fr

Le mécénat de compétences pour ouvrir

des perspectives

Pour quelques heures, quelques jours voire quelques semaines, le mécénat de compétences permet aux collaborateurs de s’engager sur le terrain, hors de l’entreprise. Quand celle-ci soutient le projet, l’impact peut être décuplé.

P

roposer bénévolement les services de ses collaborateurs à une association ? C’est le choix qu’a fait Devoteam Management Consulting, une entreprise de 200 salariés spécialisée en management et en transformation digitale. Par le biais d’une mission de mécénat de compétences, plusieurs consultants ont accompagné La Croix Rouge et le réseau des épiceries solidaires Andes, dans leur stratégie de repositionnement de leur business model. « Nous n’avons pas leur connaissance sectorielle mais nous leur avons apporté une méthodologie », témoigne Clément Mardini, l’un des deux salariés qui ont porté le projet auprès du comité de direction. Le binôme l’a convaincu de tester le mécénat de compétences pendant quelques mois, à travers un projet pilote. « L’entreprise peut être un vecteur d’engagement. On nous attend aussi sur nos capacités à tester des approches nouvelles et à réfléchir à notre impact, poursuit-il. Par ailleurs, le mécénat de compétences permet de répondre à la quête de sens des salariés et contribue à la marque employeur. Pour moi, l’entreprise moderne est une entreprise responsable et sociale ». A court terme, l’enjeu est de convertir ce dispositif en une véritable politique d’entreprise, dès 2016. A plus long terme, Devoteam pourrait se positionner sur des thématiques comme le handicap et de la promotion des femmes – deux catégories peu présentes dans les métiers du digital.

Un outil de cohésion d’équipe « Grâce au mécénat de compétence, le collaborateur qui se porte volontaire devient acteur de la RSE et n’est plus seulement spectateur », assure Jean-Michel Pasquier, fondateur de Koeo, une plateforme de mécénat de compétences qui fait du conseil, de l’animation et de la mise en relation. Depuis 2010, son entreprise a accompagné la mise en œuvre de 11 000 heures de mécénat de compétences dans 50 entreprises et quelques 80 associations. Et depuis deux ans, l’engouement est croissant, souligne-t-il. « Le mécénat de compétences est de moins en moins un sujet tabou pour les salariés. Il y a quelques années, ils n’osaient pas trop en parler par peur de la réaction de leur hiérarchie. Mais les directeurs RSE ou RH ont très bien compris les bénéfices qu’ils pouvaient en

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Un séminaire de la Croix Rouge auquel a participé Devoteam Management Consulting (projet Handeway) Crédit : La Croix Rouge

retirer. D’autant qu’il ne faut pas forcément un engagement important. Quelques heures dans l’année peuvent suffire.» C’est le cas chez Amplegest, une société de gestion patrimoniale qui compte 27 salariés. Chaque année, les salariés consacrent deux jours à des chantiers solidaires. Peinture, bricolage, jardinage, rangement… Les collaborateurs en redemandent. « La finance a une très mauvaise image, c’est un métier stressant. Il est donc important de compenser cela par un engagement fort de l’entreprise sur les questions RSE. C’est aussi un formidable outil pour la cohésion de l’équipe », témoigne Arnaud de Langautier, le président de la structure. L’entreprise réfléchit d’ailleurs à généraliser le mécénat de compétences. « Nous nous sommes beaucoup interrogés sur la valeur ajoutée de nos compétences dans le domaine du social et sommes tombés d’accord pour proposer du coaching pour les personnes en insertion. Un salarié est en train de mener l’expérience et, si c’est concluant, nous formerons d’autres collaborateurs », assure-t-il.

Le + : cohésion d’équipe sur des actions solidaires, en lien avec les métiers du salarié et/ou de l’entreprise

Le - : nécessite de se mobiliser sur un temps plus ou moins long et de trouver le bon partenaire associatif

Dossier réalisé par Concepcion Alvarez et Béatrice Héraud n

L’essentiel de la RSE - N°114 Juillet / Août / Septembre 2016

ANALYSE

Le Business and Climate summit pour quoi faire ? La deuxième édition du Business and Climate summit s’est déroulée en plein cœur de la City de Londres. L’occasion de réaffirmer la mobilisation des entreprises et des investisseurs sur le climat.

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uand entreprises et investisseurs se réunissent sur la question du climat, les têtes sont généralement connues. Au point que certains participants se demandent parfois à quoi sert de se réunir entre « usual suspects »... « On ne peut pas dire d’un côté que l’on veut dialoguer et de l’autre disparaître de la circulation», souligne pourtant Claire Tutenuit, d’EpE (Entreprises pour l’Environnement). « Nous avons besoin de faire des points réguliers sur l’avancement des réflexions et des engagements pour pouvoir porter nos messages à l’extérieur. Le faire dans des endroits différents, cela permet de mobiliser des communautés différentes. Ici à Londres, nous avons pu recevoir la finance mainstream, c’est important. Si cela se passe en Inde l’an prochain, ce sera l’occasion pour les entreprises asiatiques, très peu présentes dans ces premières éditions, de délivrer leurs messages et de prendre leurs responsabilités vis à vis du climat », affirme-t-elle.

Une plénière dans la Guildhall de la City, lors du Business et Climate Summit. Crédit : Béatrice Héraud

Le temps des coopérations Dans cette édition, pas de grandes déclarations. La COP21 a permis une réelle prise de conscience. Maintenant, il s’agit de mettre en œuvre les engagements et de décliner les objectifs de l’Accord de Paris, en cours de ratification, au cœur du business. « D’ici 2 ou 3 ans, les grands patrons devront rendre des comptes et montrer en quoi la stratégie de leur entreprise est compatible avec l’Accord », affirme ainsi

Peter Bakker, président du WBCSD (World Business Council for Sustainable Development). Concrètement cela veut dire se fixer des objectifs compatibles avec le scenario 2°C (science based targets) et prouver sa capacité d’adaptation, traduit Aron Cramer, le président du réseau BSR. Ce changement de braquet demandera aux entreprises de multiplier les coopérations. Avec leurs pairs, pour établir des feuilles de route sectorielles. Mais aussi avec les gouvernements, notamment autour de la mise en place d’un prix carbone mais aussi de politiques d’incitation et d’encadrement claires, qui permettent aux entreprises et investisseurs d’avoir une vision claire de long terme. Enfin, avec leurs parties prenantes, au premier titre desquels les clients/consommateurs/citoyens dont l’adhésion à la mise en place d’une économie bas carbone est cruciale, a souligné Jean Dominique Sénard, le patron de Michelin. Béatrice Héraud n

Lutter contre le greenwashing pour protéger la démarche RSE Quand les entreprises font du greenwashing, le retour de bâton est de plus en plus rapide et direct. « Comment dépasser le greenwashing » (1) s’interroge donc Alexandre Pasche, le président de l’agence de communication Eco&co qui vient d’écrire une note sur le sujet. Vous avez écrit une note pour la Fabrique écologique sur « Comment dépasser le greenwashing ? ». Le sujet n’est pas nouveau. Pourquoi maintenant ? Le greenwashing recule sur ses formes les plus visibles. Aujourd’hui, il est rare de voir les entreprises communiquer avec des mensonges caractérisés. L’internet 2.0, avec les réseaux sociaux, a libéré la parole et implique une communication responsable de la part des marques. L’arrivée d’émissions de télévision comme Cash Investigation a aussi changé la donne. Le retour de bâton est dévastateur pour l’entreprise. Le greenwashing, cela peut mettre à mal tous les efforts, parfois réels, d’une entreprise en matière de RSE. Pour les marques responsables, c’est aussi une sorte de concurrence déloyale. C’est particulièrement vrai pour des PME qui n’ont pas les moyens des grands groupes… Or tout est basé sur l’autorégulation de la profession. Il n’y a pas de règlementation contraignante, pas de police d’inspection et quand la justice passe, c’est souvent trop tard. Seul l’avis défavorable de l’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité), qui entraîne une perte conséquente en termes d’achats d’espaces, a un effet dissuasif. Mais insuffisant. Alors comment lutter efficacement contre ? Il faut faire valider par un tiers de confiance les arguments écologiques avancés par les entreprises. Cela peut passer par des certifications, des labels (autre qu’auto-décernés) ou des associations indépendantes comme des ONG reconnues. Cela se fait pour les allégations sanitaires, pour la communication financière, ou pour le reporting RSE…Pourquoi en serait-il autrement pour les argu-

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ments écologiques dans la publicité ? Il faut aussi réformer l’ARPP. Son financement d’abord : il provient des adhérents, donc des marques, ce qui l’expose à un conflit d’intérêts. Sa gouvernance ensuite : celle-ci doit intégrer davantage la société civile dans son conseil d’administration. Enfin, ses sujets d’études : non seulement la publicité mais aussi les emballages, promotions… Il faut également faire confiance aux agences de communication qui se placent dans une optique responsable et qui connaissent bien ces sujets. Nous sommes de plus en plus nombreux. Comment les acteurs du secteur reçoivent votre recommandation de renforcer la règlementation ? Il y a 5 ans, quand nous proposions ce genre de choses, on nous traitait de Khmers verts. Maintenant je vois les acteurs évoluer. Lors de la présentation de l’étude, cela semblait assez partagé. Maintenant nous n’avons pas proposé de faire intervenir le politique pour une établir une loi contraignante, nous n’en attendons rien. Les directeurs RSE n’ont-ils pas aussi un rôle à jouer, en amont, au moment de la conception des campagnes ? En théorie, oui mais quand on travaille en entreprise on connaît la difficulté à faire travailler ensemble différents services… Et s’ils s’immiscent dans la conception, les directeurs DD ou RSE risquent aussi d’apparaître comme des censeurs. Il faut donc faire preuve de pédagogie tout au long de la chaîne. Propos recueillis par Béatrice Héraud n (1) La note est ouverte à consultation jusqu’en août sur la www.lafabriqueecologique.fr/. Sa version définitive sera publiée en septembre.

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EN BREF OUTILS

Un standard mondial pour mesurer le gaspillage alimentaire La lutte contre le gaspillage alimentaire s’organise en France mais aussi au niveau mondial. En témoigne le lancement d’un standard international qui devrait permettre aux entreprises (et autres organisations) de mieux le mesurer et d’en rendre compte. C’est le Food Loss and Waste Protocol, une coalition d’organisations internationales menée par le World Resources Institute (WRI), qui en est à l’origine. « Réaliser des inventaires permettra de développer des stratégies pour réduire ces pertes et gaspillages, et surveiller les progrès dans le temps. Cela pourra également aider les gouvernements et entreprises à remplir leurs engagements internationaux, dont l’Accord de Paris sur le climat et les ODD (objectifs de développement durable) », précise la coalition. Qui distingue comme entreprises leaders de la lutte contre le gaspillage : Nestlé et Tesco. Le standard sera notamment utilisé par le Consumer Goods Forum, qui représente plus de 400 grands distributeurs à travers le monde, pour mesurer les efforts de ses membres à qui elle a demandé en 2015 de réduire de moitié leur gaspillage. Aujourd’hui, on estime qu’un tiers de la nourriture est perdu ou gaspillé au niveau mondial sur l’ensemble de la chaine, pour un coût de 940 milliards de dollars. Cela représente également 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre et 25% de l’eau utilisée par l’agriculture. n EA R É S UX

Le Business Dialogue appelle à accélérer la mise en place d’un prix carbone et à renforcer la transparence de la mesure des émissions Dans la perspective de la COP22, négociateurs internationaux et chefs d’entreprises se sont réunis à Paris le 10 juin pour une quatrième session du Business Dialogue. Au menu des discussions : le prix du carbone et le reporting des émissions. Dans une déclaration conjointe, le Business Dialogue a appelé :

• Les gouvernements à mettre en œuvre les résolutions sur la transparence contenues dans l’Accord de Paris, en particulier via l’harmonisation des méthodologies des bilans d’émissions. • Les acteurs du secteur privé à augmenter leur transparence sur la manière dont ils prennent en compte les risques et opportunités liés au changement climatique dans leurs stratégies et dans leurs actions. • Les gouvernements et les entreprises à accélérer le déploiement de signaux prix carbone dans leurs économies. n

Lancement de la Coordination Maroc-France « Entreprises COP22 » Un réseau d’entreprises concernées par les enjeux climat a été lancé pour la COP22. Objectif : créer une coordination France-Maroc et développer des coopérations sur l’Afrique. Une première réunion a eu lieu le 17 mai pour faire le point sur la mobilisation des entreprises françaises et proposer des pistes d’actions communes. Le réseau est présidé par Brice Lalonde, Conseiller du Global Compact France de l’ONU. Il permettra aux entreprises de partager des informations, de participer à des réunions régulières en France et au Maroc et de concrétiser des synergies. Prochaine réunion le 13 juillet. Pour en savoir plus : [email protected] n ÉTUDE

La Fabrique de l’Industrie veut « libéraliser le travail » L’autonomie au travail est un facteur d’engagement et de performance. Mais les entreprises françaises semblent l’ignorer. A l’heure où le concept d’entreprise libérée est sur le devant de la scène, la Fabrique de l’Industrie (avec l’Aract Ile de France et Terra Nova) veut, elle, mettre un coup de projecteur sur le concept d’organisations « responsabilisantes ». Celui-ci doit permettre de favoriser l’autonomie dans ses trois dimensions : la tâche ellemême, la coopération dans l’activité de travail et la gouvernance. Parmi les entreprises que la Fabrique estime être sur la voie : Airbus avec son fonctionnement en mini usines A380 sur le site de Saint Nazaire, Renault pour son dialogue sur la qualité du travail sur le site de Flins ou encore Michelin pour sa configuration en îlots de production. Des cas qui seront développés avec d’autres dans une étude à paraître à l’automne. Pour en savoir plus : http://www.la-fabrique.fr n

L’essentiel de la RSE est une publication trimestrielle de Novethic. Rédactrice en chef : Béatrice Héraud ([email protected]). Rédaction : Concepcion Alvarez et Béatrice Héraud. Directrice de la publication : Anne-Catherine Husson-Traore, DG de Novethic. Contact rédaction : [email protected] L’essentiel de la RSE est imprimée sur papier recyclé à 60 % et 40 % d’origine FSC avec des encres végétales. Copyright Novethic. La reproduction du contenu de la revue est interdite pour tous pays, tous supports, tous procédés, sauf autorisation expresse de l’éditeur. Lettre éditée par Novethic - ISSN 2430-6967 - SASU au capital de 1 668 260 euros - RCS Paris B 437 499 296 - 56 rue de Lille 75007 Paris

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