Les forêts de Scandinavie : le cas de la Suède

communauté scientifique a pointé du doigt les pratiques de la Suède, car il a été démontré ... que la Loi sur les forêts est appliquée et respectée. À titre d'acteur ...
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FICHE

FORÊT BORÉALE DE LA SCANDINAVIE / SUÈDE

© Franck Tuot 2010

La bioénergie est une source d’énergie provenant de la matière organique (biomasse). Aussi simple que cela puisse paraître, les bûches de bois que vous utilisez en camping sont une forme de bioénergie. Il est aussi possible de transformer les résidus forestiers en granules utilisés pour chauffer des maisons ou de grands édifices. Ainsi, en Suède, 25 % de l’énergie consommée appartient à cette catégorie. En 2009, pour approvisionner en biomasse cette industrie de fabrication de granules, les résidus forestiers ont été récoltés sur près de 88 000 hectares. L’utilisation de la bioénergie réduit la consommation de pétrole et permet d’envisager, un jour, une société sans pétrole.

La forêt suédoise est un lieu d’une extraordinaire richesse, où de nombreux acteurs interagissent : les Samis y élèvent des rennes, les propriétaires non industriels possèdent plus de la moitié des forêts suédoises, les compagnies forestières y produisent du bois et ses dérivés, et la population utilise la forêt pour y pratiquer ses activités de plein air. Une des particularités de ce pays est le droit d’accès public, appelé allemansrätt en suédois. Il s’agit d’un droit ancestral permettant à toutes et tous d’accéder à l’ensemble du territoire, que ce soit sur des terrains privés ou publics. Cependant, ce droit d’accès vient avec des responsabilités, puisque chacune et chacun se doivent de laisser les sites visités dans le même état qu’à son arrivée, et de ne pas déranger les propriétaires. Il est possible, pour toute personne suédoise ou non, de jouir des grands espaces sans aucuns frais que ce soit pour du camping, de la randonnée à pied ou à cheval, du kayak, de la bicyclette ou pour observer le paysage. Tout le monde peut profiter du grand air, partout au pays.

La gestion des forêts est faite par l’Agence suédoise des forêts ou, en suédois, Skogsstyrelsen. Cette agence est rattachée au gouvernement et relève du ministère des Affaires rurales. Il s’agit d’une structure autonome décidant des moyens de mise en œuvre pour l’atteinte des objectifs fixés par les autorités Empilement de billots publiques. Son mandat principal est de maintenir des rendements élevés en bois, tout en préservant la biodiversité et le info in patrimoine culturel. C’est aussi elle qui est chargée de faire fo inf . infooinfo ininfofo in . in f f info o info réaliser les inventaires forestiers, et qui sensibilise la popuQUELQUES FAITS infoo in info . fo in fo .lation à l’importance de la forêt et de sa valeur comme lieu de ...sur les Vikings, ces ingénieurs du bois récréation. L’Agence a aussi un rôle de surveillance et s’assure que la Loi sur les forêts est appliquée et respectée. À titre On ne peut parler de la Scandinavie, sans évoquer les grands guerriers conquérants qui ont occupé ce d’acteur important en foresterie, l’Agence suédoise des forêts territoire du nord de l’Europe : les Vikings. Découlant offre également des formations aux propriétaires privés afin du mot vikingr, viking signifie « pirate » dans les lanque des pratiques de gestion durable des ressources forestières gues anciennes scandinaves et reflète assez bien les soient mises en œuvre, partout sur le territoire. activités d’exploration, de commerce, de pillage et de

© Franck Tuot 2010

Source 1

piraterie pratiquées par ce peuple. En terrorisant les îles britanniques et le nord de l’Europe par leurs raids, entre le VIIIe et le XIe siècle, ces marins ont affirmé leur puissance, grâce, entre autres, à leurs navires insubmersibles : les drakkars. Ces bateaux de guerre, conçus complètement en bois, étaient tout à fait innovateurs pour l’époque, surtout en raison de leur très grande hauteur par rapport à leur largeur. Les Vikings, par leur ingéniosité, sont les ancêtres des ingénieurs du bois !

Représentation d’un drakkar viking au XIe siècle

Références pour photos : 1

upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/fe/Flotte_normande.jpg

Maison de pêcheur

Les forêts de Scandinavie : le cas de la Suède La Scandinavie correspond, au sens large, à la région géographique du nord de l’Europe, qui inclut l’Islande, les Îles Féroé, le Danemark, la Norvège, la Suède et la Finlande. La ceinture de forêt boréale de cette région du monde couvre essentiellement la Norvège, la Suède et la Finlande. Dans ces deux derniers pays, la forêt joue un rôle économique primordial. Cette fiche aborde plus spécifiquement la situation du secteur forestier de la Suède. Les essences forestières d’importance dans ce pays sont l’épinette de Norvège (Picea abies), le pin sylvestre (Pinus sylvestris) et le bouleau pubescent (Betula pubescens). Une des caractéristiques principales de ce secteur forestier est l’aménagement intensif pratiqué dans ses forêts dites commerciales.

QUELQUES CHIFFRES

12 54 867 3 967 37 07 254 46 5907 57

• 5  % des forêts boréales de la planète sont en Scandinavie. • 70 % de la superficie de la Suède est couverte de forêts. • La Suède compte 28,4 millions d’hectares de forêt, dont 22,5 millions d’hectares sont couverts de forêts productives pour des fins commerciales. • 51 % de la superficie des forêts suédoises appartient à des propriétaires privés, non industriels, tandis que l’industrie forestière et l’État suédois détiennent respectivement 31 % et 18 % des forêts. • Le secteur forestier représente environ 3 % du produit intérieur brut (PIB) du pays, qui s’élève à 571,6  milliards de dollars américains courants en 2011. • 12 % des exportations du pays relèvent du commerce des produits forestiers. • La population suédoise est estimée à 9,1 millions de personnes en 2012.

Biodiversité Depuis 1950, la coupe totale est la principale technique de récolte en Suède. Étant efficace et rentable, ce type de coupe est basé sur la rentabilité économique plutôt que sur un équilibre entre la viabilité des écosystèmes, les besoins de la société et le développement économique. La récolte est toujours suivie d’une plantation d’arbres pour conserver un couvert forestier, mais ces pratiques sont néanmoins néfastes à la biodiversité. En effet, la monoculture, le scarifiage, l’utilisation de pesticides et la plantation d’espèces exotiques sont des techniques d’aménagement courantes, qui, utilisées sur de grandes superficies, affectent négativement l’intégrité de l’écosystème. La communauté scientifique a pointé du doigt les pratiques de la Suède, car il a été démontré qu’un siècle d’aménagement intensif a nui à la biodiversité des forêts de ce pays. En Suède, 90 % des forêts sont classées comme forêts productives, dites commerciales, ce qui signifie qu’elles peuvent être récoltées. Or, on y compte environ 2 000 espèces en danger à des niveaux variables, et des centaines d’entre elles sont sévèrement à risque de s’éteindre définitivement à la suite des pratiques forestières intensives. En 1993, une nouvelle loi forestière visant à porter une égale considération à la production et à la conservation lors des opérations forestières a été sanctionnée. Le bilan, après deux décennies d’application de cette loi, montre que la restauration de la biodiversité se fait lentement. Le maintien des attributs de conservation en forêt commerciale constitue un grand défi.

© Franck Tuot 2010

La bioénergie, vers un futur sans pétrole

S

BREF Gouvernance 

Biome BORÉAL

NOUVELLE EN BREF



9

Paysage forestier en Suède

QUELQUES CHIFFRES

...sur la biodiversité totale terrestre de la Suède NOMBRE D’ESPÈCES Plantes

4 755

Arbres

45

Mammifères

71

Oiseaux

245

Amphibiens

13

Insectes

29 060

Aurore boréale dans le nord de la Suède

© Franck Tuot 2009

Le peuple suédois éprouve un très grand sentiment d’appartenance à son patrimoine forestier. La forêt, que la grande majorité des Suédoises et Suédois fréquente régulièrement, constitue une réelle source de fierté pour ce peuple.

Services environnementaux

Troupeau de rennes au nord de la Suède

De nombreuses recherches ont démontré que les vieilles forêts du biome boréal jouent un rôle très important dans la séquestration de carbone terrestre. Pour cette raison, certains scientifiques évaluent que 50 % des forêts boréales devraient être protégées de toute activité. Bien que certains scientifiques suédois aient démontré qu’en vieillissant, l’écosystème forestier boréal séquestre moins de carbone au-dessus du sol (dans les arbres, par exemple) que dans le sol, les vieilles forêts constituent des banques de carbone importantes. De plus, la biodiversité floristique et faunique présente dans les vieilles forêts y est unique, ce qui leur donne une importance écologique non négligeable. En laissant intacte une partie de ces forêts, les scientifiques considèrent que les arbres et le sol forestier conserveraient leurs fonctions de puits de carbone, tout en répondant à la conservation de la biodiversité, à la régulation du climat et aux besoins récréotouristiques de la population.

© Anne Bernard 2010

Perturbations

Vieilles forêts de Suède

La Suède est un pays où se pratiquent de grandes monocultures et où des espèces d’arbres exotiques sont introduites. Toutefois, il faut noter que les superficies plantées en espèces exotiques (Pinus contorta principalement) en Suède ont grandement diminué depuis 1995, ne dépassant pas plus de 7 000 hectares par an, alors qu’elles atteignaient 37 000 hectares par an dans les années 1980. À première vue, planter des arbres est un geste positif.

Économie  Les Suédoises et Suédois sont des pionniers en ce qui a trait à l’aménagement des forêts. En effet, déjà au Moyen Âge, les forêts sont récoltées pour l’exportation de matériaux de construction navale. Durant plusieurs siècles, la production de charbon de bois est à l’origine du développement du secteur métallurgique, et le commerce du goudron de bois joue un rôle économique majeur pour le pays. Le bois est aussi utilisé pour consolider les galeries des mines de charbon, un secteur d’activité en plein essor à cette époque. Au XIXe siècle, en raison de l’absence d’un cadre réglementaire, la surexploitation du bois conduit à une dégradation marquée des forêts. À la même période, la croissance démographique entraîne l’agrandissement des terres agricoles, qui empiètent grandement sur les massifs forestiers du sud du pays. En 1903, le gouvernement suédois, tout comme son voisin la Finlande, décide de passer à l’action et adopte la Loi sur les forêts pour affronter la pénurie de bois que rencontrent plusieurs régions du pays. En ce début de XXe siècle, seuls ces deux pays ont mis sur pied des mesures légales qui obligent à reboiser après récolte, afin d’assurer la pérennité de la ressource. C’est aussi à cette époque que les industries forestières prennent de l’ampleur dans le nord du pays. Grâce aux nombreuses rivières qui parcourent le pays, les bois coupés sont dravés jusqu’à la mer Baltique où s’installent les scieries. L’industrie forestière suédoise est florissante et est considérée à l’époque comme un des chefs de file de l’exportation de bois sur le marché européen. La presque totalité des forêts suédoises a été soumise à des perturbations anthropiques qui ont transformé les forêts vierges et primaires en forêts secondaires à aménagement intensif. Ceci a amené les Suédoises et Suédois à développer la sylviculture intensive, cette science qui s’intéresse à la culture de la forêt, et à mettre au point des techniques d’aménagement des forêts boréales très performantes. Entre 1850 et 1950, la majorité des forêts suédoises est touchée par les coupes forestières, à l’exception de 4 millions d’hectares situés à proximité de la Norvège, jamais récoltés, et qui constituent aujourd’hui l’unique forêt primaire du pays. Ce modèle « suédois » très performant du secteur forestier s’accompagne toutefois de répercussions environnementales négatives, entre autres sur la biodiversité.

© Franck Tuot 2008

Le peuple sami, évalué à 70 000 personnes, dont 20 000 vivent en Suède, est considéré comme étant le plus grand peuple autochtone encore existant sur le territoire européen. Le territoire ancestral des Samis se trouve au nord des pays scandinaves et dans le nord-ouest de la Russie. À cet endroit, en hiver, on y vit dans la noirceur continuelle, où les aurores boréales teintent le ciel de vert émeraude, de violet et de rouge, tandis que l’été, le soleil de minuit y brille. Historiquement, ce peuple vivait de la chasse, de la pêche et de l’élevage de rennes. Encore aujourd’hui, l’élevage des rennes constitue une part importante de l’économie samie et la forêt boréale est le lieu de prédilection pour faire brouter les troupeaux. La langue et la culture uniques des Samis les distinguent des autres Scandinaves. À compter du XIe siècle, ils ont adopté le christianisme mais, au départ, ils étaient animistes, ce qui signifie que la nature était à la base de leur spiritualité. Les montagnes, les rochers et les lacs inspirent bon nombre de leurs prières. La création d’un parlement de 31 membres samis en 1993, confère à ce peuple une reconnaissance officielle, une plus grande mainmise sur son développement, et un droit d’autodétermination sur son patrimoine culturel. Cependant, certaines tensions persistent avec le gouvernement suédois, puisque ce parlement sami ne peut agir comme gouvernement autonome et se trouve sous la responsabilité d’un ministère suédois.

Pourtant, cette pratique peut avoir certaines conséquences négatives sur l’environnement. Des espèces exotiques introduites en milieu forestier peuvent, si les conditions de développement sont optimales, envahir les sites avoisinants et nuire, voire éliminer certaines espèces indigènes. Par ailleurs, des insectes ou pathogènes indigènes peuvent attaquer les arbres exotiques et atteindre des niveaux de population épidémique très dommageables. Dans une monoculture, les dommages et les pertes économiques peuvent s’avérer plus importants qu’en milieu naturel, car la propagation de l’agent nuisible y est facilitée. L’impact est moins néfaste en forêt naturelle, où la plus grande diversité des essences permet des susceptibilités et des vulnérabilités variées aux insectes et pathogènes. Il est donc important de limiter les monocultures et la plantation d’espèces exotiques, d’en contrôler la dispersion dans la nature, et de continuer à limiter les répercussions de ce type d’aménagement sur l’environnement.

Monoculture et récolte forestières en Suède NOUVELLE EN BREF

BREF

IKEA, une entreprise à l’image de la Suède Il est très probable que vous ayez, chez vous, au moins un meuble IKEA, que vous ou vos parents avez eu à assembler. Eh bien, saviezvous qu’IKEA est née en Suède et que monsieur Ingvar Kamprad en est le fondateur ? C’est dans les années 40 et 50 que monsieur Kamprad explore le design du meuble, mais c’est officiellement dans les années 60 et 70 que le concept prend réellement forme. Depuis les années 70, IKEA a été en constante expansion et, aujourd’hui, les magasins de cette bannière se trouvent dans plus de 40 pays. Cette compagnie est très engagée dans les causes environnementales de la planète, et elle s’est fixé une liste d’objectifs qu’elle s’engage à respecter pour aider à protéger l’environnement et les ressources de celui-ci. Le bois est, par exemple, une des principales ressources utilisées par IKEA, car il s’agit d’une ressource renouvelable, d’une matière qui séquestre le carbone, et qu’il nécessite moins d’énergie pour sa production que ses substituts. De plus, IKEA s’approvisionne uniquement dans des forêts certifiées, où la gestion de la ressource forestière est réalisée de façon durable.

SAVIEZ-VOUS QUE ...

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Il est possible de produire du goudron à partir du bois. Résultant d’un procédé de carbonisation et de distillation du bois, une substance liquide et goudronneuse est recueillie. Lors de la fabrication de charbon de bois, le goudron de bois récupéré est ensuite utilisé dans la fabrication de cordes pour les rendre imputrescibles, d’onguents à usage médicinal, de savons, de shampoings, et dans l’industrie métallurgique (fabrication de l’acier).

© Anne Bernard

© Anne Bernard 2010

Société 

Le Vasa, unique vaisseau complet datant du XVIIe siècle, exposé au musée Vasa à Stockholm