Le 14 novembre 2005 Monsieur Thomas Mulcair

14 nov. 2005 - Monsieur Réal Laporte, Président, Hydro-Québec Équipement ... techniques à de plus grandes pénétrations de production variable telles que ...
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Le 14 novembre 2005

Monsieur Thomas Mulcair, Ministre, Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs Monsieur Réal Laporte, Président, Hydro-Québec Équipement Madame Nathalie Normandeau, Ministre des Affaires municipales et des Régions Monsieur Pierre Corbeil, Ministre des Ressources naturelles et de la Faune Madame Pauline Marois, Députée de Taillon OBJET : Mises au point concernant le potentiel de l’éolien au Québec en relation avec le réseau d’Hydro-Québec Mesdames, Messieurs, Lors du colloque sur l’énergie éolienne en régions éloignées aux îles de la Madeleine, le 20 octobre dernier, le ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs, Thomas Mulcair, a affirmé vouloir que le Québec devienne un leader du développement éolien. Les plans actuels visent 3500 MW pour 20131. Selon le World Market Update de mars 2005, on prévoit plus de 200 000 MW de capacité installée dans le monde, ce qui fera du Québec une région à faible développement, classée dans « autres ». C’est du moins l’opinion exprimée par M. Paul Gipe, conférencier invité au même colloque. Presque en même temps, lors d’une cérémonie d’inauguration de l’usine de pales de LM à Gaspé2, les ministres des Affaires municipales et des Régions, Nathalie Normandeau, et des Ressources naturelles et de la Faune, Pierre Corbeil, ont parlé d’un troisième et possiblement d’un quatrième appel d’offres (de 2000 MW chacun ?), ce qui pourrait monter la capacité installée au Québec à 7 500 MW. Est-ce le message que M. Mulcair voulait transmettre ? Bien que l’annonce de plus de deux fois les 3500 MW prévus pour 2013 soit intéressante, voire encourageante, Nature Québec / UQCN voudrait insister sur le fait que l’objectif primordial pour le développement de l’éolien au Québec devrait être d’assurer son jumelage avec le réseau de réservoirs et de centrales déjà existantes, jumelage qui permet d’atteindre le 1 2

Windsight, vol 18, no. 5, October 2005, page 16 Le Soleil, mercredi 12 octobre, 2005, page C1

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double objectif d’une meilleure sécurité pour le réseau hydroélectrique et une meilleure efficacité de l’apport éolien. Le développement dans la Gaspésie répond certainement à un objectif de développement régional, mais nullement à l’objectif primordial. Dans ce contexte, Nature Québec / UQCN voudrait que le gouvernement rende publics le plan d’ensemble, les objectifs, les efforts mis en place pour assurer le jumelage qui doit être visé, et serait intéressé à connaître aussi, dans le souci du développement de la filière avec des retombées régionales, ce qui est planifié pour attirer un ou deux fabricants (et leurs sous-traitants) et ainsi assurer un contenu québécois plus élevé. À cet égard, nous aimerions aussi insister sur l’erreur dans la déclaration de monsieur Laporte, président d’Hydro-Québec Équipement, lors de son allocution devant l’Association de l’industrie électrique (AIEQ), rapporté dans La Presse Affaires du 21 octobre 2005. Selon monsieur Laporte, le complexe Eastmain-Rupert constitue la clé pour le développement du jumelage entre les deux filières, tel que mentionné et tel que proposé par Nature Québec / UQCN. Nous aimerions souligner, comme nous l’avons fait dans notre mémoire de janvier dernier (mémoires déposés par le Syndicat professionnel des scientifiques de l’IRÉQ (SPSI) et par Nature Québec / UQCN aux travaux de la Commission parlementaire de l’économie et du travail), que les chercheurs d’HydroQuébec utilisant les logiciels de gestion des réservoirs d’Hydro-Québec ont démontré que l’ensemble du stockage fourni par les réservoirs actuels d’Hydro-Québec peut accommoder une pénétration de 20 % en énergie (soit environ 36 TWh d’énergie éolienne fournie par 12 000 MW de capacité éolienne installée) sans coûts additionnels 5. Il est également intéressant de noter les différences de vision exprimées récemment dans un autre contexte par des intervenants dans le dossier éolien, soit le ministre Corbeil et la députée de Taillon et candidate à la présidence du Parti québécois, Pauline Marois. Alors que Mme Marois propose d’installer 10 000 MW en 10 ans6, le ministre Corbeil croit que « le réseau d’Hydro-Québec pourra absorber un maximum de 4000 mégawatts d’énergie éolienne d’ici 2015 »7 (ce qui suggère, par ailleurs, que pour le gouvernement les deux nouveaux appels d’offre ne viseraient pas le jumelage, mais seulement du développement énergétique en région). Le ministre Corbeil ne doit pas être très bien conseillé, puisque l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) dit qu’il n’y a pas de limites techniques à de plus grandes pénétrations de production variable telles que l’éolien et que les chercheurs d’Hydro-Québec ne voient pas de problèmes à intégrer jusqu’à 12 000 MW d’éolien dans le réseau actuel d’Hydro-Québec8. M. Corbeil semble s’inquiéter beaucoup de la complémentarité de l’éolien à l’hydraulique et de la garantie de puissance. Il est évident qu’avec 36 000 MW de puissance hydraulique installée, 4000 MW d’éolien ne peut qu’être complémentaire, mais techniquement il n’y a pas de barrières à la 3

Windsight, vol 18, no. 5, October 2005, page 16 Le Soleil, mercredi 12 octobre, 2005, page C1 5 Forcione, A., Saulnier, B., Krau, S., IREQ et Lafrance, G., INRS « Integration of Wind and hydro Power Systems, A discussion of costs (or optimization of value?) of wind integration for grid operators », IEA R&D Wind, Topical Expert Meeting # 41, Portland, Oregon, November 5-6, 2003 6 La Presse, mardi 8 novembre 2005, page A5 7 La Presse Affaires, 9 novembre 2005 8 IEA study : « Variability of wind power and other renewables, management options and strategies », rapporté dans Windpower Monthly de novembre 2005, page 31 et la présentation de Forcione, Saulnier et al rapportée au paragraphe précédent. 4

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pénétration éolienne et l’éolien n’a pas à être tributaire d’un développement additionnel de l’hydraulique. De plus, il faut rappeler l’étude ontarienne qui montre une présence à la pointe d’hiver de l’ordre de 47 % pour l’éolien – l’éolien ayant un facteur de capacité d’environ la moitié de celle de l’hydraulique, pour un besoin en énergie donnée, il faut installer une capacité éolienne double de celle de l’hydraulique, et on obtient donc une présence à la pointe de 94 % pour l’éolien, d’où les besoins additionnels de puissance peuvent être couverts par de légers ajustements aux centrales hydrauliques existantes. Voir à cet effet le mémoire du SPSI de janvier et le rapport d’expert du sous-signé pour le Regroupement pour la responsabilité sociale des entreprises (RRSE) devant la Régie de l’énergie en mai 2004 dans le dossier du Suroît. M. André Boulanger, président d’Hydro-Québec Distribution, présent au même colloque que le ministre Corbeil, s’inquiète des infrastructures de transport qu’il faudra construire pour aller chercher l’énergie éolienne. Mais si la demande croît, que la nouvelle énergie provienne de l’éolien ou de l’hydraulique, ne devra-t-on pas construire de nouvelles lignes pour aller chercher cette nouvelle énergie ? Nature Québec / UQCN souligne : la qualité de la ressource éolienne québécoise ( 4 millions de MW, plus de 100 000 MW à moins de 25 km des lignes de transport électriques actuelles); l’épuisement de la ressource hydraulique, : (il ne reste que 8 TWh à moins de 5 ¢/kWh, à peine suffisant pour alimenter une aluminerie de 900 MW9); les coûts du gaz naturel (le carburant seul coûterait plus de 9 ¢/kWh pour une centrale à cycle combiné du genre Suroît10); la facilité d’intégration de l’éolien avec l’hydraulique (les études d’intégration de grandes quantités d’éolien par les chercheurs d’Hydro-Québec montrent qu’il n’y a pas de problèmes à une pénétration énergétique de 20 %, soit approximativement 12 000 MW); la présence à la pointe de l’éolien (47 %, selon une étude ontarienne11); la stabilité de la production éolienne : selon une étude albertaine, « les fluctuations diminuent avec l’accroissement de la puissance éolienne installée [une étude albertaine montre qu’avec près de 2000 MW d’éolien sur une demande de pointe d’un peu plus de 9000 MW, les fluctuations ne sont que de 3,5 % de la puissance éolienne installée (70 MW dans le cas étudié12)]. Pour notre organisme, il est en effet grand temps que le Québec se donne des cibles ambitieuses, pour la réduction de la consommation énergétique des Québécois, mais aussi pour : rencontrer l’accroissement éventuel de la demande électrique du Québec avec l’électricité de source éolienne; se servir de l’éolien pour redonner à Hydro-Québec l’énergie voulue pour supporter ses activités d’exportation; garder à l’état naturel les dernières rivières qui ne sont pas encore harnachées. 9

Hélène Baril, La Presse, 27 novembre 2004 source : Nymex Henry-Hub, Natural Gas, Daily Price, http://www.oilenergy.com, fin octobre 2005 11 AWS Truewind, « An Analysis of the Impacts of Large-Scale Generation on the Ontario Electricity System », March 14, 2005, aussi rapporté dans Windsight, octobre 2005 12 voir Windpower Monthly, October 2005, p. 31-32 10

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Comme Nature Québec / UQCN, les chercheurs de l’IRÉQ et plusieurs autres organismes l’ont suggéré lors de la Commission parlementaire de l’hiver dernier, le gouvernement devrait mandater Hydro-Québec pour développer l’éolien. Hydro-Québec, via son centre de recherche et son ingénierie, a les connaissances nécessaires pour en assurer l’intégration harmonieuse. Hydro choisira, via des appels d’offres, un (ou deux) fabricants éoliens et un ou des constructeurs de parcs éoliens qui lui livreront des parcs éoliens, clés en mains, avec garantie de performance. De cette façon, on obtiendra l’électricité éolienne au moindre coût pour la société québécoise, en plus de créer environ 12 000 emplois permanents via un contenu local élevé (environ 80 %)13. Nous sommes conscients que le gouvernement est actuellement à peaufiner une dernière version de l’énoncé de stratégie qu’il a promis de rendre public pour commentaires, avant la tenue de la Conférence des parties du Protocole de Kyoto qui aura lieu à Montréal dans quelques semaines. Nous espérons que ces commentaires arrivent à temps pour corriger (1) l’impression que le Québec se dirige actuellement vers un statut de leader mondial dans l’éolien et (2) l’erreur qui ne reconnaît pas l’énorme potentiel déjà existant pour le jumelage avec le réseau d’Hydro-Québec. Nous vous remercions de votre attention.

Réal Reid Pour la commission Énergie de Nature Québec / UQCN

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« Choix de la filière énergétique pour la production d’électricité au Québec – Éolien vs Thermique », rapport d’expertise pour le Regroupement pour la Responsabilité Sociale des Entreprises (RRSE), Dossier R-3526-2004 (dossier du Suroît), Régie de l’énergie du Québec, avril 2004, voir aussi, « La filière éolienne pour assurer l’approvisionnement électrique du Québec, pour raffermir la capacité d’exportation d’Hydro-Québec, pour améliorer la profitabilité d’HydroQuébec », Syndicat Professionnel des scientifiques de l’IREQ (SPSI), mémoire déposé dans le cadre des travaux de la commission parlementaire de l’économie et du travail, janvier 2005, disponible sur le site http://www.spsi.qc.ca.