La voie à suivre - SNAP Québec

aux effets des changements climatiques. Un réseau d'aires protégées connectées comprenant des milieux ..... sont chose courante dans ce réseau des parcs sous-financé et débordé de la. Colombie-Britannique. ..... extraordinaires dans la vallée de Wentworh, dans les hautes-terres, au Cap Breton et le long de la rivière St ...
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Une publication de la SNAP • Automne 2017-hiver 2018

Préservons la nature du Canada:

La voie à suivre

Offert jusqu’en AVRIL 2018

Entente pour publication 40033545

MOT DU PRÉSIDENT

Récit des préparatifs de mes vacances d’été

AUTOMNE 2017-HIVER 2018 VOLUME 13, NUMÉRO 2

MIKE ROBINSON Il est maintenant chose courante à la SNAP, que ce soit dans les sections régionales ou au bureau national, de tenir compte du savoir autochtone et des relations avec les collectivités lors de l’élaboration de stratégies sur les aires protégées et de propositions pour la création de parcs. Il est tout à fait logique de mettre à profit les Autochtones pour assurer la gérance des terres. Considérés dans leur ensemble, les partenariats de la SNAP avec les Premières Nations, les Inuits, les Métis et les administrations et les collectivités locales témoignent d’un vrai esprit de réconciliation au sein de notre ONG à vocation écologique. On pourrait également mettre à profit cet esprit de réconciliation dans nos vies personnelles. Par exemple, en intégrant le savoir autochtone dans la planification de nos vacances en famille. Posez-vous une question toute simple : qui connaît mieux l’arrière-pays que les Autochtones habitués à parcourir leurs territoires ancestraux ? Pour moi, la réponse est évidente. Alors, lorsqu’il est venu le temps de planifier les vacances annuelles en famille - une expédition dans la lagune Nuchatlitz sur l’île Nootka, au large de la côte ouest de l’île de Vancouver - j’ai lâché un coup de fil à mon ami de longue date (quelque 40 ans), Ray Williams, alias Ghoo - Noon - Nm Tuk - Pomlth, ou l’esprit du loup. Ray est membre de la Première Nation Mowachaht (clan du chevreuil), qui depuis plus de sept décennies a acquis une connaissance approfondie de l’île Nootka et de Yuquot, le village Mowachaht où le capitaine Cook a accosté en 1778. Dans le coin, on appelle Ray le « protecteur de Yuquot ». Ray ne s’est pas fait prier pour me donner quelques conseils pratiques : comment négocier les étendues d’eau à découvert (« Partez tôt, Michael ») ; où trouver de l’eau (« En juillet, transportez votre eau ») ; les meilleurs endroits pour observer les loutres de mer (« Dans la lagune à la tombée de la nuit, quand elles viennent Explorer la lagune de Nuchatlitz en Colombie-Britannique. près des berges ») ; où Photo : Lynn Webster pêcher le saumon (« Essayez la pêche à la ligne à main le long des bordures des récifs où vous verrez du hareng ») ; ainsi que le sens des toponymes traditionnels. Par exemple, l’un des seuls toponymes Mowachaht figurant sur la carte de l’inlet Esperanza du Service hydrographique du Canada est Owossita Lake. Ray d’expliquer : « Ça veut dire lac Sockeye ». L’heure passée au téléphone avec Ray m’a permis de passer des vacances mémorables. Je n’ai pas manqué de lui téléphoner à nouveau pour lui dire un gros merci. Mais vous savez quoi ? Après mes échanges avec lui, je me suis dit qu’il est temps de s’atteler à une nouvelle tâche - celle de remettre les toponymes Mowachaht sur la carte. J’ai même un nom pour cette initiative : la réconciliation topographique. Je pense que c’est une bonne idée… et vous ?

La SNAP est un organisme canadien dont la mission est la protection d’au moins 50 % de notre nature sauvage. Depuis 1963, nous avons joué un rôle de premier plan dans l’établissement de plus des deux tiers des aires protégées du Canada. CONSEIL D’ADMINISTRATION NATIONAL Michael Robinson, président (C.-B) ​Alex Abboud (AB)​ Vincent Castellucci (QC) Laura Colella​, président, comité du contentieux (ON)​ Elmer Ghostkeeper (AB)​ John Grandy (ON)​ Bob Halfyard​(T.-N.-L.)​ Kwiaahwah Jones (C.-B) Philippa Lawson, présidente, Comité de gouvernance​(YT) Nikita Lopoukhine, président, Comité de la conservation​(ON) Amber Nicol, présidente, Comité de l’engagement (N.-E.) Lavinia Mohr, trésorière (C.-B) Erik Val​(YT)​ ADMINISTRATEURS HONORAIRES Stephanie Cairns Al Davidson Phil Dearden David Lang Harvey Locke Gordon Nelson Bob Peart Sherri Watson ÉQUIPE ÉDITORIALE Éric Hébert-Daly : Directeur exécutif au Bureau national Karen Turner : Directrice nationale, communications et développement Stacy Corneau : Responsable des communications au Bureau national Janice McLean : mise en page COMITÉ ÉDITORIAL Alex Abboud Rick Boychuk Laura Colella Bob Halfyard Cathy Wilkinson ISSN 1717-8894. Maître de poste : Faire parvenir tout changement d’adresse au Canada à la SNAP : 250, av. City Centre, bureau 506, Ottawa, ON K1R 6K7. Toute Nature est publié deux fois par an (au printemps et à l’automne) par la Société pour la nature et les parcs du Canada (no d’enregistrement 10686 5272 RR0001). © 2017 Société pour la nature et les parcs du Canada. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite sans l’autorisation écrite expresse de la SNAP.

Mike Robinson est le président du Conseil d’administration de la SNAP.

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DANS CE NUMÉRO À LIRE Conservation : la solution naturelle aux défis du Canada • 4 par Éric Hébert-Daly

De nouvelles avenues pour protéger nos océans • 6 L’établissement d’autres mesures de conservation efficaces par zone (AMECZ) et le rôle du Canada par Alex Barron et Elizabeth Good

SUIVEZ-NOUS SUR LA TOILE (EN ANGLAIS SEULEMENT) Accédez à du contenu supplémentaire en ligne à

www.cpaws.org/canadian-wilderness • Entrevue de fond avec Erinn Drage, notre coordonnatrice nationale de la conservation, au sujet de sa récente nomination dans le top 25 des environnementalistes âgés de moins de 25 ans. • Entretien vidéo avec Gordon Nelson, défenseur de la nature, activiste et auteur. • Juste au cas où vous l’auriez manqué : retour sur des faits saillants du dernier numéro.

RUBRIQUES 2 • MOT DU PRÉSIDENT Récit des préparatifs de mes vacances d’été

8 • LA SNAP PRÉSENTE PARTOUT AU CANADA 11 • DES RÉPONSES AUX QUESTIONS DE LA SNAP 12 • LA FAMILLE SNAP • Gordon Nelson et la majestueuse Nahanni • Une contributrice de la SNAP supporte la protection de l’orignal

14 • CONTACTEZ-NOUS PREMIÈRE DE COUVERTURE : Grizzly dans le Yukon. Photo : Peter Mather. CI-DESSUS : Trembles dans une tempête de neige.

LA SURVIE DES ESPÈCES : les aires

protégées sont cruciales pour permettre aux espèces et à leurs habitats de résister aux effets des changements climatiques. Un réseau d’aires protégées connectées comprenant des milieux terrestres ou aquatiques aide les espèces à s’adapter aux changements climatiques en facilitant leurs déplacements vers des écosystèmes en bonne santé plus habitables.

L’APPROVISIONNEMENT EN AIR PUR ET EN EAU PROPRE : la

Parc national de Banff Photo : Alben Osaki

CONSERVATION : LA SOLUTION NATURELLE AUX DÉFIS DU CANADA

C

PAR ÉRIC HÉBERT-DALY

ertaines personnes voient la conservation de la nature comme quelque chose de « superflu », et les parcs et les aires protégées comme des endroits agréables pour les amateurs de camping et des sports de pagaie. Par ailleurs, nombreux sont ceux qui ne saisissent pas leur importance dans le contexte des défis environnementaux et économiques. Or, la conservation contribue, de manière très efficace, à la vitalité et à la prospérité d’un pays. La conservation peut servir de solution à différents enjeux. En voici des exemples :

LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES : cet enjeu représente

bien plus que les émissions industrielles et d’échappement. La dégradation des écosystèmes causée par les activités industrielles contribue également au réchauffement planétaire alarmant. En effet, la forêt boréale canadienne stocke plus de carbone par hectare que la forêt tropicale amazonienne, et le parc

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national Nahanni dans les Territoires du Nord-Ouest stocke presque autant de carbone que les émissions annuelles du Canada provenant des activités industrielles. La conservation de nos forêts, de nos tourbières et de nos milieux humides contribue ainsi largement à l’atténuation des effets des changements climatiques.

nature nous assure de nombreux services écologiques gratuitement. Par exemple, les arbres nettoient l’air et les écosystèmes en santé purifient notre eau. Les analystes les plus conservateurs estiment la valeur économique réelle de la nature dans la case des billions de dollars. Malgré cela, un arbre ne vaut rien tant qu’il n’a pas été coupé et les cours d’eau n’ont aucune valeur économique avant d’être aménagés ou pollués au profit des activités économiques « légitimes ». Remplacer ce que nos écosystèmes nous offrent gratuitement est une démarche ardue et dispendieuse.

LA PRÉVENTION DES CATASTROPHES NATURELLES :

les inondations à l’échelle du Canada nous coûtent des milliards de dollars, et elles devraient s’intensifier sous l’influence des changements climatiques. Le fait d’enlever les arbustes, les arbres et les plantes qui bordent les berges de nos rivières a pour effet d’éliminer aussi leur fonction « d’éponge naturelle ». Sans cette végétation, les pluies et les eaux de fonte entraîneront des crues qui feront peser des risques sur les collectivités en aval des plans d’eau.

LA PERTE DE LA BIODIVERSITÉ :

des centaines d’espèces au Canada sont en voie de disparition en raison de la perte de leur habitat. Les aires protégées sont essentielles pour assurer leur survie à long terme. En protégeant l’habitat des espèces « parapluie », comme le caribou forestier qui a besoin de vastes zones de forêt pour survivre, nous protégeons également l’habitat de bien d’autres espèces.

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À LIRE LA RÉCONCILIATION AVEC LES COMMUNAUTÉS AUTOCHTONES : dans le passé, la

planification de l’utilisation des terres faite par les communautés autochtones n’était pas prise en considération par les autres gouvernements au Canada. Au contraire, les régions que les communautés autochtones désignaient aux fins de conservation étaient plutôt jalonnées pour l’exploitation minière ou forestière, mettant ainsi en péril leur valeur écologique et culturelle. Le soutien aux décisions liées à la conservation prises par les communautés autochtones est un moyen de respecter et d’honorer les véritables relations de nation à nation.

LE RESPECT DES ACCORDS INTERNATIONAUX : en 2010, le

Canada est devenu signataire de la Convention internationale sur la diversité biologique et s’est alors engagé à protéger 17 % de nos terres et 10 % de nos océans d’ici 2020. Cet objectif représente un premier pas vers la cible de protection de 50 %, que les scientifiques considèrent comme nécessaire pour maintenir les écosystèmes vitaux et les services rendus par la biodiversité qui sont essentiels à la survie de l’homme et de la nature. Jusqu’à maintenant, le Canada ne protège que 10 % de ses terres et 1 % de ses océans.

LE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS FRONTALIERS :

plusieurs régions à l’échelle du Canada font l’objet de différends concernant

des ressources ou des voies d’accès. Les mesures de conservation peuvent s’avérer une solution diplomatique à différents enjeux, comme la question de la souveraineté dans l’Arctique, les conflits sur les limites maritimes et les répercussions du développement en amont sur les bassins hydrographiques. La création des parcs internationaux de la paix prévoyant l’application de mesures de conservation aidera à réduire les différends sur les questions de propriété.

LA PROTECTION DE L’ÉCONOMIE DES RESSOURCES :

les pressions que l’homme exerce sur l’environnement mettent à mal nos industries primaires traditionnelles. La foresterie et la pêche sont deux exemples d’industries qui nécessitent des mesures de conservation pour assurer leur viabilité à long terme. Les aires marines protégées permettent aux populations de poissons de se développer et de prospérer, alors que les forêts protégées favorisent la régénération naturelle des arbres.

LE SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE : Le Canada est

réputé pour ses beautés naturelles majestueuses et ses vastes étendues sauvages. Des gens du monde entier viennent nous visiter chaque année pour vivre l’expérience du Canada grandeur nature. Bien que les secteurs de la culture et de l’écotourisme

soient souvent considérés comme des moteurs économiques secondaires, il convient de noter que l’écotourisme génère des emplois dans les régions du pays les plus vulnérables à l’instabilité économique. Une économie axée sur l’extraction n’est pas durable à long terme, en plus d’être assujettie à des hauts et des bas. Dans le monde entier, les pays cherchent à adopter des modèles de développement économique axés sur les expériences plutôt que les produits. Le Canada pourrait jouer un rôle de chef de file à ce chapitre, au lieu de dépendre si lourdement de l’extraction des ressources. Les mesures de conservation, dont les aires protégées sont la pierre d’assise, ne sont pas nécessairement la seule solution pour assurer notre survie à long terme. Toutefois, une chose est certaine : elles constituent une variable importante de l’équation. En effet, les mesures de conservation nous font économiser de l’argent, nous font gagner de l’argent, contribuent à préserver notre faune, améliorent nos relations avec les communautés autochtones, nous protègent contre les catastrophes naturelles et nous fournissent l’eau propre et l’air pur essentiels à notre survie. Plus nous voyons la nature comme quelque chose de « superflu », moins nous disposons de temps pour prendre les bonnes mesures et contribuer à résoudre bon nombre des problèmes complexes de notre pays.

La conservation contribue à garder un pays sain et prospère. Photos, de gauche à droite : Duane Fuerter, Irwin Barrett, Martin Berkman.

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À LIRE

´ OCEANS

DE NOUVELLES AVENUES POUR PROTÉGER NOS

L’établissement d’autres mesures de conservation efficaces par zone (AMECZ) et le rôle du Canada

B

PAR ALEX BARRON ET ELIZABETH GOOD

ordé par les océans Arctique, Atlantique et Pacifique, le Canada possède l’un des plus vastes territoires océaniques et le plus long littoral du monde. Fort d’un tel patrimoine, le Canada a une responsabilité mondiale de protection et de conservation de la diversité de ses écosystèmes marins. Le Canada a pris des engagements internationaux importants visant à protéger au moins 10 % de ses océans d’ici 2020, mais il a encore beaucoup à faire pour y parvenir. Selon Pêches et Océans Canada (MPO), 1,5 % du patrimoine océanique du Canada est protégé au sein d’aires marines protégées (AMP). Comme c’est le cas pour les parcs nationaux, le processus d’établissement d’une AMP peut durer des dizaines d’années. Le gouvernement cherche donc de nouveaux moyens pour faciliter la réalisation de ses objectifs en matière de conservation marine. Parmi celles envisagées figurent les « autres mesures de conservation efficaces par zone (AMECZ) ». Dans cette démarche, il est nécessaire de reconnaître les zones qui assurent une conservation efficace par d’autres moyens que l’établissement d’une aire protégée, comme par exemple des zones importantes sur le plan culturel qui sont

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gérées ou protégées par les peuples autochtones. Toutefois, des questions demeurent sur la façon d’établir les AMECZ. En outre, on craint que dans la course pour atteindre ses objectifs, le Canada en vienne à inclure des mesures qui ne protègent pas efficacement la biodiversité : par exemple, les périodes d’interdiction de pêcher qui ciblent une seule espèce ou dont le but est d’assurer une exploitation durable plutôt que la conservation. À la lumière de ces préoccupations, des critères clairs ont été demandés en vue de préciser les AMECZ. Sabine Jessen, notre directrice nationale du Programme des océans, fait partie du groupe de travail international de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICA). Composé de plus de 100 membres d’une trentaine de pays, le groupe a été chargé d’élaborer des lignes directrices internationales en la matière. Début 2017, la SNAP a accueilli une réunion du groupe de travail à Vancouver, en Colombie-Britannique. Un éventail d’experts en conservation terrestre et maritime s’y sont donné rendezvous pour assister à des présentations d’études de cas et discuter des défis et des possibilités liés à l’instauration potentielle d’AMECZ au Canada et dans le monde.

Pêches et Océans Canada a également élaboré ses propres directives opérationnelles sur les AMECZ et organisera en 2018 une réunion de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique sur cette question. Des discussions préliminaires indiquent que le MPO a établi des normes rigoureuses pour l’application de ses directives. D’ailleurs, seule une faible part des mesures d’interdiction de pêcher ayant été évaluées jusqu’à présent remplissaient les conditions pour être considérées comme des AMECZ. Nous sommes heureux de constater cette rigueur dans l’application des directives du MPO, mais nous restons préoccupés par l’absence de dispositions visant à éviter que de futurs gouvernements moins sensibles à la cause de la conservation considèrent des zones bien

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Lagune Murchison, Gwaii Haanas. Photo : Sabine Jessen

moins efficaces comme des AMECZ, ce qui compromettrait l’objectif d’assurer une réelle protection de nos océans. Jusqu’à maintenant, les directives du MPO n’ont été appliquées que pour les restrictions concernant la pêche, laissant ainsi les écosystèmes exposés à d’autres risques comme les dommages causés par les ancres, la pollution, le développement industriel, la pollution sonore ainsi que les activités pétrolières et gazières. Étant donné que toutes ces activités peuvent avoir lieu à l’intérieur d’une même zone, il est important de les gérer simultanément pour pouvoir y conserver la biodiversité. Habituellement, les périodes d’interdiction de pêcher ont pour but de rétablir ou de maintenir un stock

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particulier de poisson (par exemple le moratoire sur la pêche à la morue sur la côte Est ou les aires de conservation des sébastes en Colombie-Britannique), ou un habitat précis (par exemple les récifs d’éponges siliceuses). Par conséquent, les mesures de gestion mises en place sont généralement très spécifiques et n’interdisent que certains types d’engin de pêche. Les périodes d’interdiction de pêcher et l’interdiction d’activités nuisibles constituent un bon départ, mais n’assurent pas la protection exhaustive nécessaire pour conserver l’ensemble de la biodiversité dans une zone donnée. La connectivité entre les écosystèmes marins et les activités humaines souvent multiples et redondantes dans une zone donnée représentent un défi de taille

pour ce qui est de la caractérisation et de la désignation des AMECZ. Cette réalité nécessite la gestion de ces activités multiples et redondantes, lesquelles relèvent normalement de la compétence de différents organismes. Bien que Pêches et Océans Canada soit sélectif dans la désignation des AMECZ, ses directives opérationnelles ne permettent pas d’assurer l’efficacité de la gestion ou la conservation de la biodiversité. Alors que 2020 arrive à grands pas, il faut s’attendre à une intensification des pressions pour désigner davantage d’AMECZ. Le Canada doit rester à l’affût de la publication prochaine des lignes directrices de l’UICA sur les AMECZ de manière à assurer l’efficacité de la conservation de notre biodiversité marine.

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LA SNAP PRÉSENTE PARTOUT AU CANADA

Les parcs de la Colombie-Britannique : sous-financés et débordés a annoncé une légère augmentation du financement dans le but de résorber la crise, mais nous savons tous que cette mesure est loin d’être suffisante pour ramener la véritable protection dans ces parcs. Les parcs de la Colombie-Britannique protègent certaines des plus vastes forêts pluviales tempérées encore intactes dans le monde. Pourtant, de nombreux récits révèlent un côté peu reluisant de ces parcs. Des récits parlant de sentiers jonchés de déchets et d’infrastructures endommagées sont chose courante dans ce réseau des parcs sous-financé et débordé de la Colombie-Britannique.

Parc provincial Elk Lakes Photo : Tori Ball

Depuis 2000, la superficie des aires protégées en Colombie-Britannique a doublé. Il y a de quoi se réjouir lorsqu’on pense aux quatre millions d’hectares de nouvelles aires protégées. Toutefois, la réalité sur le terrain est loin d’être idéale.

Malgré l’agrandissement du réseau, le budget de fonctionnement de BC Parks a stagné autour de 31 millions de dollars, et le nombre de gardes de parc a diminué considérablement. L’an dernier, le gouvernement de la Colombie-Britannique

En théorie, la province fait un travail exceptionnel pour protéger ses paysages diversifiés et grandioses. Mais en réalité, elle consacre plus d’argent à la promotion qu’à la protection de ces endroits uniques. Si nous voulons atteindre l’objectif à court terme de protéger 17 % du patrimoine naturel du Canada, nous devons à la fois nous doter d’une stratégie à long terme de conservation, et préserver des lieux sains pour la faune et la flore. - Tori Ball, SNAP Colombie-Britannique Pour en savoir plus, visitez StandUpForParks.ca (en anglais)

Les gens du Manitoba refusent de cesser de se battre pour le caribou Cela fait déjà plus de dix ans que le Manitoba a inscrit le caribou forestier dans la liste des espèces menacées de la province. Les autorités ont identifié 15 aires de répartition identifiées au Manitoba, qui s’étendent sur des millions d’hectares de forêt boréale. Les efforts déployés par la province se sont traduits par une stratégie de rétablissement avec des orientations fortes pour la conservation de l’espèce. Toutefois, on attend encore les plans d’action prévoyant des mesures concrètes sur le terrain. Le gouvernement fédéral a demandé aux provinces et aux territoires d’achever ces plans pour octobre 2017. La province a proposé une échéance en 2018 pour la mise en œuvre des plans d’action visant les cinq aires où le caribou est le plus menacé, et en 2020, pour les quatre aires restantes. Mais la population manitobaine pousse le gouvernement à agir plus vite. Caribou au Manitoba. Photo : Ron Thiessen Dans la foulée d’une nouvelle campagne de sensibilisation fructueuse menée à l’été, la SNAP Manitoba a présenté au gouvernement une pétition contenant plus de 21 000 signatures lui demandant d’intensifier ses actions en faveur de la protection du caribou. La mise en place de ces plans d’action pour la protection de l’habitat du caribou permettrait également à la province de donner un sérieux coup de main au Canada dans ses efforts visant à respecter son engagement international de protéger au moins 17 % de ses terres d’ici 2020. - Josh Pearlman, SNAP Manitoba. Pour en savoir plus, visitez wwww.cpawsmb.org

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Séjour dans la maison du caribou avec des jeunes de la Première Nation Innue de Pessamit Citoyenne Na Cho Nyäk Dun Elizabeth Moses lors d’un rassemblement de 2014. Photo : Tyler Kuhn

Un travail en collaboration pour la protection du bassin versant de la rivière Peel Comme vous le savez peut-être déjà, la SNAP Yukon travaille depuis de longues années à protéger le bassin versant de la rivière Peel. En mars, le cas du bassin de la Peel a été entendu devant la Cour suprême du Canada. Le plus haut tribunal du Canada devrait rendre sa décision d’ici la fin de l’année, et nous espérons que cette décision viendra couronner des années d’efforts concertés. La décision de la Cour exigera une interprétation historique des accords définitifs avec les Premières Nations. Si nous avons gain de cause, l’intégrité de ces accords sera maintenue et, par le fait même, 80 % du bassin hydrographique seront protégés. Il s’agit de la toute première fois que la Cour suprême est saisie d’une affaire où des organisations non gouvernementales environnementales et les Premières Nations figurent comme coauteures d’un appel. Notre organisation consacre beaucoup de temps et de ressources au renforcement de ses relations avec les quatre premières nations dont les territoires ancestraux se trouvent dans le bassin hydrographique : les Premières Nations Tr’ondëk Hwëch’in, Na Cho Nyäk Dun et Vuntut Gwitchin, ainsi que la Première Nation Tetlit Gwich’in in dans les Territoires du Nord-Ouest. Nos relations sont fondées sur la collaboration, le respect, l’écoute et l’apprentissage. Même si notre histoire ainsi que notre façon de voir le monde et d’y vivre sont très différentes, nous avons un objectif commun : protéger le bassin de la Peel et les droits du traité. - Nadine Sander-Green, SNAP Yukon Pour en savoir plus, visitez www.protectpeel.ca

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Du 20 au 25 août dernier, la SNAP Québec, en partenariat avec la Nation Innue de Pessamit, a accompagné 12 jeunes de la communauté pour une expérience unique dans le secteur du réservoir Pipmuacan. Pendant cette semaine d’immersion en forêt boréale, les jeunes ont participé à la vie de campement traditionnel innu, comme le montage des tentes, le sapinage, la préparation de la bannique, la prise du poisson, la trappe du castor et la cueillette. Ils ont également eu l’occasion de parcourir le territoire en randonnée pédestre ou en bateau, et de prendre part à des cercles de discussion et des ateliers éducatifs sur la protection du territoire et sur l’importance du caribou dans la culture innue. Le réservoir du Pipmuacan est en effet un secteur prioritaire pour le rétablissement du caribou forestier et un secteur d’importance pour la sauvegarde des valeurs culturelles innues. Une proposition d’aire protégée y est à l’étude, un projet que la SNAP Québec et la Nation Innue de Pessamit entendent faire aboutir ! En signe d’encouragement, un magnifique caribou est venu saluer les participants juste avant leur départ du Pipmuacan. Un beau cadeau de la Nature ! - Charlène Daubenfeld, SNAP Québec. Pour en savoir plus, visitez www.snapqc.org. Vous pouvez voir des photos de l’excursion sur la page Facebook de la SNAP Québec.

Une protection accrue des zones représentant une valeur particulière L’engagement international du Canada de protéger 17 % de ses terres et de ses eaux intérieures représente un premier pas vers la conservation de la nature. Toutefois, il ne faut pas limiter les actions Montagne dans la brume. uniquement en fonction de cette cible. L’exploitation Photo : Audrey Parnell forestière imminente dans la partie supérieure de la région de Highwood illustre bien pourquoi il faut avoir une vue d’ensemble pour pouvoir dresser un portrait exact de la situation. Classifiée comme une sous-région montagnarde des Montagnes Rocheuses, la région de Highwood est protégée à 30 %, en plus d’être entourée d’une zone subalpine protégée. Sur papier, des campagnes visant à accroître la protection dans la région peuvent paraître insensées. Toutefois, il faut regarder au-delà des chiffres et se concentrer sur le paysage pour comprendre la complexité historique et la valeur écologique de ces zones. Renfermant les eaux en amont de la rivière Highwood, la région est source d’eau potable pour les collectivités dans l’est de la province. La région est par ailleurs vulnérable aux inondations - nous avons pu voir les impacts en aval en 2013. La dégradation continue des forêts situées en amont de nos rivières pourrait compromettre la qualité de l’eau et entraîner de nouvelles inondations ou sécheresses. Cette région est l’habitat de la truite fardée versant de l’ouest, aujourd’hui menacée, en plus d’être un corridor faunique et un endroit propice aux activités récréatives et à la communion avec la nature. Il est donc important que les cibles permettent de conserver l’ensemble de la biodiversité de la province. En plus de respecter nos engagements en matière d’aires protégées, nous devons accorder une attention particulière aux caractéristiques des paysages qui représentent des valeurs intrinsèques.

- Katie Morrison, SNAP Sud de l’Alberta Pour en savoir plus, visitez www.cpaws-southernalberta.org

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LA SNAP PRÉSENTE PARTOUT AU CANADA

La planification par aires de répartition du caribou en Alberta peut contribuer à atteindre l’objectif de 17 % À l’approche imminente de l’échéance pour la présentation des plans par aires de répartition du caribou, le gouvernement de l’Alberta, les organisations non gouvernementales environnementales, et les groupes communautaires se sont employés à trouver les meilleurs moyens de protéger et de rétablir l’habitat essentiel du caribou dans la province. La SNAP Alberta nord est d’avis que ce processus est très prometteur. En fait, en établissant de nouvelles aires protégées à l’intérieur des aires de répartition du caribou, le gouvernement de la province non seulement assurerait la protection du caribou et de nombreuses autres espèces, mais il aiderait aussi le Canada à respecter son engagement de protéger 17 % des terres et des eaux intérieures d’ici 2020. Le gouvernement albertain a réitéré sa volonté de respecter cet objectif. Le ministre de l’Environnement et des Parcs de la province est même coprésident du Comité directeur national de l’initiative en route vers l’objectif 1 du Canada. Nous devons tout de même demeurer attentifs, car des pressions sont exercées en faveur de l’adoption de mesures provisoires qui n’assurent ni la protection, ni le rétablissement de l’habitat du caribou. La SNAP Alberta nord a recommandé des zones hautement prioritaires de protections dans chacune des aires de répartition. En outre, elle continue à inciter toutes les parties à proposer des solutions concrètes qui protègent à la fois le caribou et la biodiversité.

- Kecia Kerr, SNAP Nord de l’Alberta Pour en savoir plus, visitez www.cpawsnab.org

La SNAP Vallée de l’Outaouais organise le premier Camp des artistes de la rivière Dumoine

Corridor sauvage Restigouche Photo : Roberta Clowater

Le gouvernement du Nouveau-Brunswick doit agir sur la question des aires protégées La plupart des provinces ont accepté d’aider le Canada à respecter son engagement international de protéger au moins 17 % de ses terres et de ses eaux intérieures. Pourtant, le gouvernement du Nouveau-Brunswick ne dispose d’aucun plan en ce sens, et se trouve ainsi en queue de peloton au chapitre des aires protégées au Canada. Dans ce contexte, la SNAP Nouveau-Brunswick exhorte le gouvernement provincial à agir, et ce, tout en lui formulant les recommandations suivantes afin de l’aider à contribuer aux objectifs du Canada : 1) Que le Nouveau-Brunswick se fixe un nouvel objectif de préserver juridiquement au moins 10 % de son territoire à l’intérieur de parcs et d’aires protégées axées sur la protection de la nature.

Depuis plus d’une décennie, la SNAP vallée de l’Outaouais se bat pour la protection du bassin hydrographique de la rivière Dumoine, au Québec. Ses efforts ont contribué à faire passer la superficie de l’aire protégée de 1445 km2 à presque 2200 km2, grâce à des agrandissements et à la connexion avec une autre aire protégée de moindre envergure. En août, la SNAP Vallée de l’Outaouais a invité des artistes pour faire du camping pendant cinq jours le long de la rivière Dumoine dans le but de célébrer nos réussites et susciter l’intérêt du public à l’égard de notre campagne. Le camp des artistes a eu lieu au lac Robinson, un élargissement de la rivière juste après l’impressionnante Grande Chute. En tout, 15 artistes des différents horizons et proposant des styles et des médiums variés ont participé à l’activité. On leur a demandé d’offrir au moins une œuvre d’art à titre de don. Ces œuvres seront mises aux enchères lors d’un événement que la SNAP organisera à l’automne. Les fonds amassés permettront de soutenir les efforts soutenus pour protéger le riche patrimoine naturel de l’ouest du Québec, notamment par l’adoption de mesures législatives visant à reconnaître officiellement les limites de la Dumoine et à protéger la Noire et la Coulonge, deux rivières avoisinantes. - John McDonnell, SNAP Vallée de l’Outaouais. Pour en savoir plus, visitez www.cpaws-ov-vo.org

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2) Que le gouvernement néo-brunswickois collabore avec le gouvernement fédéral en vue de la création d’aires protégées côtières autour des vasières qui constituent des haltes essentielles pour les oiseaux de rivage migrateurs en quête de nourriture, dans les eaux océaniques entourant les réserves naturelles insulaires, et dans les zones intertidales à proximité des parcs côtiers, comme le parc national Fundy. 3) Que le Nouveau-Brunswick saisisse l’occasion de protéger la région sauvage du bassin de la rivière Restigouche, ainsi que les dernières forêts anciennes sur les terres publiques. À l’automne et à l’hiver, la SNAP NouveauBrunswick mènera des campagnes de sensibilisation auprès des communautés pour faire la promotion de ses initiatives. Nous vous invitons à être des nôtres ! - Roberta Clowater, SNAP Nouveau-Brunswick Pour en savoir plus, visitez www.cpawsnb.org

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La protection tarde à arriver pour 100 aires protégées en Nouvelle-Écosse Commençons par les bonnes nouvelles : le gouvernement de la Nouvelle-Écosse s’est doté d’un plan plutôt raisonnable pour établir un réseau d’aires protégées dans la province. Intitulé Our Parks and Protected Areas Plan (Plan sur les parcs et les aires protégées), ce plan a pour but de protéger certains des derniers sites naturels de la province. Il envisage de préserver des sites extraordinaires dans la vallée de Wentworh, dans les hautes-terres, au Cap Breton et le long de la rivière St Mary. Des sites au sud de la province considérés comme des points névralgiques sur le plan écologique devraient également être inclus dans ce plan. Maintenant les mauvaises nouvelles : le plan n’avance pas. À l’heure actuelle, une centaine de nouvelles aires protégées, totalisant une superficie de 83 500 hectares, flottent dans les limbes gouvernementaux en attente de la protection juridique du gouvernement provincial. Ces aires attendent la désignation officielle depuis l’approbation de la version définitive du Plan sur les parcs et les aires protégées, en 2013. Cela fait quatre ans, un délai plus que suffisant pour permettre d’établir officiellement ces aires protégées. Il est temps que le gouvernement finisse le travail. - Chris Miller, SNAP Nouvelle-Écosse Pour en savoir plus, visitez www.cpawsns.org

DES RÉPONSES AUX QUESTIONS DE LA SNAP Dans la dernière édition printemps/été de Toute Nature, nous avions demandé votre opinion sur l’initiative d’entrée libre dans les parcs nationaux au Canada.Voici un échantillon de vos réponses : Quand j’étais jeune, lorsqu’on prenait la route pour se rendre au parc ou bien pour se promener dans le parc, on devait payer cinq dollars, mais on recevait un laissez-passer. Comme tout le monde doit prendre la route, que l’on reste dans le parc ou aux alentours, le montant me paraît raisonnable. Pourquoi ne pas rétablir un tel modèle? Ou alors pourquoi pas un modèle hybride proposant un tarif annuel à moindre prix jumelé à un péage autoroutier? -Allan M. Je pense que l’idée est bonne, mais totalement impraticable, car cela donnerait lieu à une fréquentation massive dans les parcs, qui n’ont pas nécessairement les infrastructures d’accueil nécessaires. La faune subit déjà tellement de pressions, alors pourquoi empirer la situation? Bien sûr, les parcs sont destinés aux personnes aussi, mais il faut gérer les répercussions de leur présence sur la faune. Il faut donc avoir plus de personnel sur les terrains de camping pour gérer les gens indisciplinés, la collecte des déchets; du personnel pour gérer les embouteillages causés par la faune, des agents préposés à la circulation, du personnel de maintenance pour assurer la propreté des toilettes… la liste n’en finit pas. Il faut s’assurer que les visiteurs reçoivent des renseignements explicatifs sur les parcs, comme l’interdiction de nourrir les animaux, mais aussi des renseignements qui leur permettront de comprendre la nature, les raisons pour lesquelles nous avons des parcs, et l’importance de les protéger.

Les nouvelles zones naturelles protégées de la Nouvelle-Écosse attendent la désignation officielle. Photo : Darin Ruangruchira

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Les humains ont tendance à apprécier davantage les choses lorsqu’il faut payer pour les avoir. Et le fait d’avoir à payer permettrait d’accueillir les gens qui

veulent vraiment profiter des parcs et de limiter le nombre de visiteurs qui ne veulent que faire un petit tour en auto.  -Al C. En général, je suis favorable à l’idée de permettre aux gens d’aller au-delà des zones aménagées dans les parcs. Je suis de Calgary, et il est très facile pour moi d’avoir accès aux parcs des Rocheuses. Je ne me décris pas comme un aventurier pur et dur, mais je pourrais dire que j’ai déjà mis les pieds sur des endroits où des milliers de mes concitoyens n’ont jamais été. J’ai commencé en explorant les parties accessibles du parc, puis j’ai parcouru des coins reculés, loin des foules. Mon amour et mon respect pour les aires intactes ont augmenté parce que je connaissais les zones très achalandées. Et le fait d’avoir pu connaître des milieux sauvages a aussi fait augmenter mon désir qu’ils soient protégés. La communion avec la nature est au cœur de la préservation. Nos parcs devraient encourager les gens à sortir des sentiers battus et à connecter avec la nature. Les gens apprécieront davantage leurs parcs et voudront les protéger. S’il vous plaît, ne limitez pas l’accès d’une façon que seulement les mieux nantis et les plus aptes pourront aller dans les zones éloignées. Mon amour et mon respect pour les parcs a augmenté dans les zones achalandées. On demande au public d’assumer la gérance des milieux naturels. On ne devrait pas imposer ce fardeau aux gens qui aiment, respectent et protègent ce patrimoine national. La gratuité d’accès permettra aux Canadiens d’explorer les contrées éloignées et l’émerveillement éveillera en eux le désir de protéger.  -David B.

D’après vous, quel pourcentage des terres et des océans du Canada devraiton protéger, et pourquoi? Faites parvenir vos opinions à [email protected]. Nous en présenterons une brève compilation dans notre prochain numéro.

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LA FAMILLE SNAP

GORDON NELSON ET LA MAJESTUEUSE NAHANNI Gordon Nelson est un défenseur de l’environnement qui collabore avec la SNAP depuis ses débuts. Son activisme social, ses publications professionnelles, ses conférences thématiques et son rôle de mentor auprès d’étudiants qui s’investissent aujourd’hui dans des domaines liés aux parcs et aux aires protégées dans tout le pays constituent un solide pilier de la cause de la conservation au Canada. Gordon a récemment publié The Magnificent Nahanni : The struggle to protect a wild place, un livre qui jette un regard sur les quelques quarante ans d’efforts déployés pour protéger la rivière Nahanni contre la pollution, la perturbation des habitats, et la disparition de la faune causée par l’exploitation minière et d’autres activités. C’est dans les années 1970 que Nelson a commencé à s’intéresser à la Nahanni, lors de l’annonce de la création d’un parc national. Alison Ronson, notre directrice nationale du programme des Parcs, a eu le privilège s’entretenir avec lui au sujet de sa collaboration avec la SNAP, de ses réflexions sur la conservation et de son livre. Alison Ronson (AR) : Comment êtes-vous tombé dans la marmite de la conservation et comment avez-vous commencé à collaborer avec la SNAP? Gordon Nelson (GN): J’ai d’abord étudié à l’Université McMaster, puis j’ai fait des études supérieures aux États-Unis, où j’ai été pour la première fois exposé au concept de parc national : le parc national des montagnes Rocheuses, au Colorado. J’ai poursuivi ensuite des études postdoctorales dans la vallée du Susquehanna, ce qui m’a permis de renouer avec la nature. Par la suite, j’ai commencé à travailler à l’Université de Calgary, et c’est là que j’ai vraiment commencé mon travail dans les domaines de la conservation et des parcs des Rocheuses. J’ai eu la chance de commencer à travailler avec les parcs à un moment où l’on passait d’un modèle informel de protection vers la mise en place de plans directeurs et de plans de gestion. On voyait dans ce processus que l’appareil gouvernemental déployait des efforts dans une tentative d’organiser et de protéger les parcs. Certains efforts ont été fructueux, d’autres à mon avis moins judicieux, mais c’est à travers cet emploi que j’ai commencé à percevoir ce qui se passait. Cela m’a préoccupé et a inquiété mes étudiants. Et c’est là que tout a commencé. Les Jeux olympiques étaient le sujet de l’heure à l’époque, et il était notamment question d’un important projet de

développement au lac Louise. Par ailleurs, on attendait l’adoption imminente d’un nouveau régime de plans directeurs. Chaque parc majeur allait avoir son plan directeur, ce qui voulait dire qu’il allait falloir revoir leur statut et décider de l’importance qu’ils allaient avoir dans le réseau.

AR : C’était au début des années 1960? GN : Je suis arrivé là-bas en 1960, et tout s’est passé les 11 années suivantes; des années les plus passionnantes que j’ai jamais vécues! Les gens ont vraiment commencé à porter beaucoup d’attention à la conservation et à l’environnement. Beaucoup de jeunes se sont ralliés à ces causes, à un point qui nous paraît presque inimaginable aujourd’hui tant l’économie a changé.

AR : Vous avez évoqué les pressions d’une candidature aux Jeux olympiques et d’un projet d’agrandissement au lac Louise. Estce que ce sont ces deux évènements ou d’autres qui ont joué un rôle de catalyseur dans la création de la SNAP?

GN : Je pense que d’une certaine manière ils ont tous servi à susciter l’intérêt. La question des Jeux olympiques était comme en arrière-plan. Je n’ai rien contre les Jeux olympiques. En fait, ce qui me préoccupait c’était l’idée de les organiser dans un parc national. Un gros projet hôtelier, l’agrandissement des installations récréatives et le tourisme de masse ont favorisé l’éveil chez des gens

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qui n’étaient pas particulièrement friands de voir ce genre d’activités dans le parc. C’est alors que différents groupes se sont progressivement mobilisés autour de certains de ces enjeux. Je m’y suis investi moi-même et, d’après moi, nous avons été d’une certaine manière à l’origine de la première section de la SNAP. J’avais quelques brillants étudiants de deuxième et troisième cycle à l’époque, et ils se sont intéressés aux enjeux car ils travaillaient dans des parcs, tout comme moi. Ils ont commencé à tenir des rencontres et à discuter entre eux. Ils m’ont invité à me joindre à eux, et la dynamique a été telle que j’ai fini par créer un cours sur les parcs nationaux destiné aux cycles supérieurs de l’Université de Calgary. L’intérêt était tellement fort, que nous avons commencé à établir des contacts avec des personnes en dehors de notre travail, comme des membres de la communauté qui partageaient certaines de nos inquiétudes. Nous avons commencé à travailler avec d’autres gens, à échanger des informations et à participer à divers projets – tout cela a fini par donner naissance à la section.

AR : Quels ont été les défis en matière de conservation que vous avez observés au cours de votre carrière?

GN : Des défis, il y en a tout le temps. Ils sont parfois plus présents, parfois moins présents, mais on n’insistera jamais sur l’extrême l’importance de rester toujours à l’affût. Pensez au nombre de fois que

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fois. J’étais dans mon bureau à l’Université Western, et j’ai reçu un appel d’un avocat qui représentait le groupe travaillant sur la première revendication territoriale. Il m’avait alors invité à aller visiter le coin et à me joindre à l’organisation en tant que consultant pour prodiguer des conseils sur les parcs et les ressources renouvelables. J’ai accepté l’invitation. C’était certainement l’un de ces moments remarquables de la vie sur le plan de l’expérience personnelle. Je ne connaissais absolument rien sur les peuples des Premières Nations. J’ai rencontré les Inuits, et ce fut une expérience renversante. J’ai connu tellement d’endroits et rencontré tellement de gens. Puis je me suis intéressé à la rivière Nahanni.

Chutes Virginia, Nahanni. Photo : Mike Beedell

la question des Jeux olympiques a refait surface. On entend dernièrement des voix favorables à l’idée d’accueillir les Jeux olympiques à nouveau. On voit des exemples similaires dans tout le pays. Des personnes qui embarquent dans l’industrie du tourisme dans la perspective de profiter d’un tel évènement pour développer leur propre entreprise. Il faut donc faire preuve de vigilance, en tout temps. Les Jeux olympiques représentent un enjeu toujours présent, au même titre que l’importance qu’on veut accorder aux espèces sauvages, ou bien leur rôle dans le parc au regard du tourisme, ou encore d’autres questions de zonage. Les routes et les voies d’accès sont sources de préoccupations permanentes aussi. Même les personnes représentent un enjeu, qui pour le moment demeure sans solution. En fait, les gens sont de plus en plus nombreux à vouloir une offre d’activités plus diversifiée dans le parc, et le Canada semble enclin à favoriser une fréquentation à grande échelle. Les volontés de générer plus de revenus, d’accroître la prospérité, de mieux profiter de la vie et de chercher des sources de bonheur exercent beaucoup de pression sur le parc. Ces facteurs sont bien cernés pour certains enjeux qui sont là depuis longtemps. Mais pour moi, ce sont les enjeux et la compréhension de ces enjeux qui peuplent mes réflexions sans cesse.

AR : À votre avis, qu’est-ce qui motive et soutient la passion pour la conservation?

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GN : Je ne saurais vous dire s’il y a un modèle figé. J’ai quelque peu réfléchi à cette question, en me demandant s’il y a une façon d’identifier un groupe de personnes qui seraient systématiquement des partisans de ces enjeux. La chose qui m’inquiète le plus, c’est la différence que j’observe entre les jeunes des années 1960 et 1970 et les jeunes d’aujourd’hui. À mon époque, ils étaient très dynamiques et très sensibles aux questions environnementales, d’une part en raison des conférences tenues auxquelles ils participaient, et d’autre part, parce que les années 1950 ont totalement été axées sur l’exploitation. Cette dynamique n’est pas la même aujourd’hui. On remarque certes un intérêt pour l’environnement, mais d’une façon plutôt mécanique et pragmatique qu’avant. Pour moi, le plus grand défi pour les groupes voués à la conservation est d’attirer plus de jeunes pour qu’ils se mobilisent autour de ces questions. Je suis souvent dans des réunions où la conservation est le thème principal, et je m’étonne de voir le faible nombre de jeunes qui y participent.

AR : Pourquoi vous êtes-vous intéressé à la Nahanni et qu’est qui vous a inspiré à écrire The Magnificent Nahanni (La Majestueuse Nahanni)?

GN : Le Nord me fascine depuis longtemps, mais c’est dans les années 1970 que j’ai eu l’occasion d’y intervenir pour la première

AR : Dans le titre de votre livre, il est question de la lutte pour protéger un endroit sauvage (The struggle to protect a wild place). En plus, vous avez dit vouloir documenter les décennies d’efforts qui ont mené à la création et à l’agrandissement du parc Nahanni. Pouvez-vous parler un peu de cette volonté? GN : Cet endroit m’a attiré en raison de sa grande renommée. J’ai visité pas mal d’endroits autres que la Nahanni pendant une quinzaine d’années, et j’ai souvent été à Yellowknife pour le travail. C’est donc l’attrait naturel de la région qui a suscité mon intérêt. Je suivais au même moment le travail que la SNAP accomplissait en vue d’établir un parc national dans cette région. Lorsque la chose s’est concrétisée, je me suis dit : « Enfin, voilà quelque chose à laquelle les gens devraient vraiment réfléchir. » L’idée de coucher quelque chose sur papier commençait à me trotter dans la tête. J’ai rédigé un article de vingt pages et l’ai envoyé à certaines personnes, pour qu’elles me donnent leur avis. Quelqu’un m’a suggéré de plutôt écrire un livre. J’ai commencé à penser qu’un tel livre aurait probablement sa raison d’être. Le livre repose sur l’idée de changer notre perception à l’égard des parcs nationaux au Canada; l’idée de délaisser une vision idéale d’une place où les gens n’ont jamais mis les pieds, d’autant plus que l’archéologie et l’histoire nous ont démontré depuis 1960 que cela devient de plus en plus rare. Le livre se penche aussi sur les changements dans l’organisation des parcs, le rôle croissant des peuples locaux et les transformations majeures dans la science liée aux écosystèmes pendant les années 1970. Pour voir un extrait vidéo de cette entrevue, rendez-vous à cpaws.org/canadian-wilderness (en anglais).

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LA FAMILLE SNAP

UNE CONTRIBUTRICE DE LA SNAP SUPPORTE LA PROTECTION DE L’ORIGNAL Le travail de la SNAP Wildlands League est rendu possible grâce aux subventions et aux contributions de personnes comme Anita North, de Dryden, en Ontario. La contribution d’Anita est plus que financière, car elle veille aussi à la bonne gérance des forêts et met à contribution ses connaissances des enjeux touchant le nord-ouest de l’Ontario. Anita est née et a grandi à Dryden. Son père, qui travaillait pour l’usine de produits forestiers locale, l’a initiée à la pêche, au camping et aux marches dans le bois alors qu’elle était encore toute jeune. Plus tard, elle est devenue neurochirurgienne, mais a toujours entretenu ses liens avec le Nord. Après avoir pris sa retraite en tant que chirurgienne, Anita est retournée dans le nord-ouest de l’Ontario pour diriger le Basket Lake Camp, un camp de pêche fondé par ses parents il y a 50 ans. Anita est très préoccupée par les répercussions des activités forestières sur la faune. À cet égard, elle collabore avec les sociétés forestières et le ministère des Richesses naturelles et des Forêts. Elle accorde d’ailleurs une attention particulière au sort de l’orignal. Au cours des dernières années, Anita a observé une diminution du nombre de ces animaux, que l’on voyait jadis assez fréquemment. Elle consacre d’ailleurs énormément d’énergie et toute sa curiosité scientifique au déclin de la population des orignaux. Ces temps-ci, elle dévore les recherches sur l’orignal, un peu comme elle le faisait pour des articles sur la neurologie. Anita en connaît probablement plus sur la gestion de l’orignal que de nombreux biologistes du gouvernement! Ce sont les renseignements fournis par Anita, ses efforts de défense de l’espèce et son soutien qui ont mis la table pour que la SNAP Wildlands League lance sa campagne sur l’orignal. En fait, Anita a sonné l’alarme quant à la disparition de l’orignal non seulement dans sa région, mais aussi dans de nombreuses autres de ses aires de répartition en Amérique du Nord. La chasse des jeunes orignaux qui se poursuit, même lorsque la population est en déclin, l’élargissement continu des chemins forestiers financés par le gouvernement et le manque d’argent pour assurer l’intendance de l’espèce figurent parmi les menaces que l’Ontario pourrait contrer facilement. Jusqu’à maintenant, la réponse du gouvernement laisse à désirer. La SNAP Wildlands League continue de demander à l’Ontario de mettre fin à la chasse aux jeunes orignaux, de créer des aires de refuge pour l’espèce ayant un accès routier limité, et de consacrer davantage de ressources à la recherche, à la surveillance et à l’application de la loi. Ce sont là quelques mesures de départ pour aider l’orignal. L’atteinte de l’objectif de protection de 17 % d’ici 2020 permettrait également à l’Ontario de consacrer davantage de terres au rétablissement de l’orignal. Merci Anita d’avoir été l’élément déclencheur de nos efforts en faveur de l’orignal!

Photo : Istock

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CONTACTEZ-NOUS SNAP Canada 506-250, av. City Centre Ottawa, ON K1R 6K7 613-569-7226 ou 1-800-333-9453 [email protected] www.snapcanada.org SNAP Colombie-Britannique 604-685-7445; www.cpawsbc.org SNAP Sud de l’Alberta 403-232-6686 www.cpaws-southernalberta.org SNAP Nord de l’Alberta 780-424-5128; www.cpawsnab.org SNAP Saskatchewan 306-469-7876; www.cpaws-sask.org SNAP Manitoba 204-949-0782; www.cpawsmb.org SNAP Vallée de l’Outaouais 819-778-3355 www.cpaws-ov-vo.org SNAP Wildlands League 416-971-9453 ou 1-866-510-9453 www.wildlandsleague.org SNAP Québec 514-278-7627; www.snapqc.org SNAP Nouveau-Brunswick 506-452-9902; www.cpawsnb.org SNAP Nouvelle-Écosse 902-446-4155; www.cpawsns.org SNAP Terre-Neuve-et-Labrador 709-726-5800; www.cpawsnl.org SNAP Yukon 867-393-8080; www.cpawsyukon.org SNAP Territoires du Nord-Ouest 867-873-9893; www.cpawsnwt.org

- Dave Pearce, SNAP Wildlands Leagues Pour en savoir plus, visitez www.wildlandsleague.org

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Partenaires en

CONSERVATION

La magnifique Nahanni: la lutte pour protéger un lieu sauvage “Inspirant” — Cristina Eisenberg

“Fascinant et impressionnant” — Thomas Gunton

Par GORDON NELSON Avant-propos de Harvey Locke Disponible dans les librairies indépendantes et en ligne (en anglais seulement)

Pour explorer les opportunités de partenariat avec la SNAP, contactez Max Brennan à [email protected]