haïti « un toit, un avenir - Planète Urgence

31 déc. 2013 - furent réalisées quatre maisons prototypes, ce qui a permis d'aboutir au modèle unique finale, grâce à des expertises complémentaires.
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HAÏTI MISE EN ŒUVRE ET IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR »

ACCÈS À UN HABITAT DURABLE ET DÉCENT

DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET ÉCONOMIQUE

RESTAURATION DU COUVERT FORESTIER

ÉTAT DES ACTIVITÉS MISES EN ŒUVRE DANS LA RÉGION DE JACMEL DE MARS 2010 À FIN 2013

310 MAISONS & 4 Écoles

700 ÉLÈVES

bénéficiaires du programme d’éducation numérique

reconstruites ou réparées

UBA Nord - Ouest Nord

70 000 ARBRES

Nord - Est

plantés

HAITI HAÏTI Centre Grand ’Anse Sud

Port-au-Prince

REPUBLIQUE DOMINICAINE

Artibonite

CONSTRUCTION DU CENTRE D’ACTIVITÉS, DE FORMATIONS ET D’ÉCHANGES

Ouest

Jacmel

Sud - Est

Résumé

Présentation de Planète Urgence

Planète Urgence est intervenue en Haïti en mars 2010, sollicitée par ses entreprises partenaires pour venir en appui de la population haïtienne touchée par le séisme qui a causé environ 230 000 morts. Les moyens financiers rassemblés alors ont permis de mettre en œuvre le projet « un toit, un avenir » qui vise à appuyer les habitants de la section communale rurale de Lamontagne de Jacmel dans la reconstruction de leur habitat et la relance économique. Les soutiens obtenus de nombreuses fondations et institutions ont permis, par la suite, d’amplifier une action sur 3 axes : l’accès à un habitat durable et décent, l’appui au développement économique et social local et le renforcement de l’éducation primaire.

Planète Urgence est une ONG de solidarité internationale, reconnue d’utilité publique. Créée en 2000 dans le but de renforcer l’autonomie des populations et la protection de leur environnement, l’association centralise ses actions autour de la formation et de l’accompagnement professionnel des adultes, de l’appui socio-éducatif, de la protection et de la restauration de la biodiversité.Ces actions sont mises en œuvre dans 24 pays grâce à deux programmes :

Ces différents projets, tous mis en œuvre en partenariat avec des organisations internationales et locales ont permis, entre autres résultats : • la construction et la réparation de 310 maisons, de 4 écoles et de deux centres de productions artisanales et agricoles ; Ces constructions ont été mises en oeuvre avec l’organisation française Architecture et Développement, en lançant à Lamontagne une filière constructive très innovante, la « maçonnerie en pierres confinées »; le tout permettant la création d’emplois et l’utilisation de matériaux locaux. • l’appui à la relance de la production agricole locale, d’abord par un soutien d’urgence visant à assurer les premières campagnes agricoles post-séisme , suivi par un appui plus structurel au renforcement des capacités de production et de transformation locales, • la mise en place d’un programme d’enseignement par le numérique bénéficiant à plus de 700 élèves, en partenariat avec l’organisation Haïti Futur • La plantation de plus de 70 000 arbres (principalement fruitiers et caféiers) Toutes ces activités ont été formulées et mises en œuvre par des organisations locales, formées et encadrées par l’équipe de Planète Urgence ; avec la participation très forte des familles et acteurs bénéficiant des actions engagées. Ce sont ces activités, pour certaines encore en cours, dont les résultats sont présentés ici. À la fin 2013, elles qui ont directement bénéficié à environ 19 000 personnes,

Le Congé Solidaire® : ce modèle d’engagement permet à tous les citoyens de s’engager pendant leur temps de congé pour apporter leur compétence au service de projets portés par des acteurs locaux en matière de formation professionnelle, d’appui à l’éducation et de protection de l’environnement. Plus de 6500 personnes ont déjà participé à ce dispositif, avec ou sans le soutien de leur entreprise. Environnement & Développement : dont le but est d’appuyer les organisations paysannes locales dans leurs projets de développement locaux et de concilier développement d’activités économiques et protection de l’environnement.

Partenaires financiers, techniques et opérationnels du projet Planète Urgence adresse ses chaleureux remerciements à l’ensemble des fondations, des entreprises et des donateurs particuliers dont le soutien financier a permis la mise en œuvre des activités décrites dans ce document.

Association Proto 427

CE

Et 1 105 donateurs particuliers Partenaires techniques et opérationnels

L’équipe Planète Urgence Haïti

Organisations Haïtiennes : Chef de mission • Organisation des Paysans Actifs pour le DEveloppement de Lamontagne (OPADEL) • Philippe Petit (depuis juin 2010) • Organisation des Jeunes Universitaires de Carrefour pour l’Avancement d’Haïti (OJUCAH) • Jean Baptiste Coupry (03/2010 - 06/2010) • Conseil d’Administration de la Section Communale (CASEC) de Lamontagne Administrateur/-trice : Organisations Internationales partenaires : • Cindy Mauger (depuis avril 2013) • Architecture & Développement • Philippe Delers (12/2012 - 04/2013) • Haïti Futur • Clémence Hamel (05/2012 - 12/2012) Coopérations opérationnelles : • Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) • MEDAIR • Save The Children • ONU Habitat • CRAterre • Handicap International Atlas Logistique

Equipe technique construction : • Faustin Stanley • Jhonas Milien Chauffeur/logisticiens : • Edwich Romelus • Moise Jean Baptiste Jacques Coordination de programme en France : • Mickaël Berrebi

Sommaire Introduction : agir avec la population haïtienne......................................................................................... 5 Partie 1 : Cadre et périmètre d’intervention..................................................................................................... 6 I- Lamontagne de Jacmel, une zone rurale enclavée dans un pays meurtri................................................ 7 1- Présentation d’Haïti et enjeux généraux..........................................................................................................................................7 2- La décision d’intervenir en Haïti et les principes guidant ce choix..................................................................................7 3- L’ identification de la zone d’intervention........................................................................................................................................7

II- Le projet « Un toit, un avenir », un projet intégré............................................................................................................ 8 1- La conception du projet « Un toit, un avenir »...............................................................................................................................8 2- Une architecture de projet en plusieurs phases...........................................................................................................................9 3- Le choix d’une équipe d’encadrement réduite et de la multiplication des synergies.......................................... 10

Partie 2 : Projets mis en oeuvre et impacts................................................................................................... 10 AXE 1 : L’amélioration des processus constructifs et l’accès à un habitat durable et décent.10 1- L’amélioration de l’habitat..................................................................................................................................................................... 10 2- La construction au service du développement communautaire...................................................................................... 16

AXE 2 : Le développement social et économique local................................................................................................. 17 1- L’appui d’urgence à la production agricole locale................................................................................................................... 18 2- Le CAFE, outil de soutien aux activités économiques et sociales................................................................................... 18 3- Appui à l’éducation et à la formation.............................................................................................................................................. 21

AXE 3 : La restauration du couvert forestier........................................................................................................................... 22 1- Le soutien aux activités d’agro-foresterie d’OPADEL............................................................................................................. 22 2- Le soutien aux actions de reboisement d’OJUCAH.................................................................................................................. 23 3- Impact des projets de reboisement.................................................................................................................................................. 25

Conclusion.......................................................................................................................................................................................................... 26 Rapport financier..................................................................................................................................................................................... 27

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RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

Introduction : agir avec la population haïtienne Le séisme du 12 janvier 2010 qui a frappé Haïti, et dont l’épicentre était situé à quelques kilomètres de la capitale, Port au Prince, a fait environ 230 000 morts et causé le déplacement dans le pays de plus d’un million et demi de personnes. Cette catastrophe a suscité chez de nombreuses entreprises partenaires une mobilisation forte, traduite par la proposition faite à Planète Urgence de financer des actions que pourrait mettre en œuvre l’association pour soutenir la population haïtienne. La décision d’intervention a néanmoins fait l’objet de débats au sein de Planète Urgence. En effet, le mandat de l’association s’inscrit dans une perspective d’appui au développement de long terme, distincte de la réponse d’urgence qui suit une telle catastrophe. Dans ce contexte, le principe acté fut celui d’une action qui s’inscrirait dans le mandat et les savoir faire de l’association, dans le cadre d’une intervention en appui d’organisations haïtiennes déjà implantées en zone rurale dans des zones affectées par le séisme, mais plus encore touchées par la pauvreté et peu couvertes par l’aide internationale déjà mise en œuvre. L’intervention s’est donc placée en réponse à des problématiques de développement de long terme, pour agir ainsi dans la durée en complément du travail réalisé par les ONG spécialisées sur

l’action d’urgence. En cela, l’approche mise en œuvre s’est inscrite dans la mission de Planète Urgence de renforcement des acteurs locaux pour permettre un transfert des compétences et une pleine appropriation des projets, et garantir ainsi la pérennité des actions menées ainsi que l’autonomie des acteurs et des familles concernées. La première phase de projet a été définie en 2010 sur une période de près de 2 ans. Elle se poursuit aujourd’hui encore, en 2014, dans la section rurale de Lamontagne grâce au support des entreprises, fondations et donateurs qui ont, pour plusieurs d’entre eux, permis de mener les projets de façon intégrée à l’échelle du territoire. Si le séisme a fait des ravages considérables mais principalement matériels à Lamontagne (3 morts, 1500 maisons endommagés ou détruites), c’est en large part en raison de la pauvreté structurelle qui affecte cette zone de plus en plus abandonnée par sa jeunesse, très faiblement desservie en services de base (routes peu praticables, faibles moyens des centres de santé et des écoles, absence de réseau électrique, accès difficile à l’eau potable…) et ayant du mal à vivre d’une activité agricole faiblement productive et peu lucrative. C’est donc la lutte contre la spirale de la pauvreté qui constitue le fil conducteur des différentes actions mises en œuvre par Planète Urgence, principalement en coopération avec l’organisation haïtienne OPADEL et en lien très fort avec les populations concernées, dont l’énergie a en grande partie contribuer aux résultats obtenus, et qui constitue un réel motif d’espoir pour l’avenir.

Maison à Lamontagne après le tremblement de terre RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

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I- Lamontagne de Jacmel, une zone rurale enclavée dans un pays meurtri 1) Présentation d’Haïti et enjeux généraux Haïti est un pays des Grandes Antilles, situé dans la mer des Caraïbes, à l’entrée du Golfe du Mexique. Etat indépendant depuis 1804, Haïti occupe un tiers de l’île de Saint Domingue, sur une surface de 27 500 Km² (à titre de comparaison, la Belgique a une superficie de 30 000 Km²). La population résidente est évaluée à 10,5 Millions d’habitants en 2012, dont 4 millions de moins de 18 ans, vivant dans une pauvreté généralisée (l’Indice de Développement Humain du PNUD place Haïti au 161ème rang sur 187 pays). Plus de deux millions d’Haïtiens ont émigré et forment une diaspora essentiellement installée aux USA, au Canada, à Saint Domingue et en France.

Le taux d’alphabétisation des adultes est de 48.7%2 et aujourd’hui encore, le taux d’abandon à l’école primaire reste très élevé (74.7%), la scolarisation des enfants (de moins de 5 ans en moyenne) restant freinée par l’importante pauvreté qui empêche les familles de payer les frais de scolarité ou incite de nombreuses familles paysannes à placer leurs enfants en domesticité (environ 300 000 enfants seraient concernés par ce phénomène de très grande ampleur) ou à les solliciter pour les travaux domestiques ou agricoles. Le 12 janvier 2010, un séisme de 7,3 sur l’échelle de Richter a détruit la partie Ouest et Sud Est de l’île, faisant environ 230 000 morts et 1,5 millions de sinistrés et déplacés. Les dégâts très importants causés aux infrastructures et aux logements, se sont ajoutés aux conséquences des catastrophes naturelles antérieures, pour faire d’Haïti un pays dévasté à reconstruire. En fin d’année 2013, de nombreuses personnes restaient encore déplacées ou en situation de logement précaire (146 500 personnes, soit 39 500 familles, vivaient encore dans 271 camps de déplacés, sous abris temporaires)3; l’insécurité alimentaire touchant 1,5 million de personnes. CUBA

Lorsque Christophe Colomb pose le pied sur l’île, en décembre 1492, la couverture forestière représente 80 % des surfaces. Depuis la fin du XVIIème siècle, la colonisation française entame un processus de déforestation, pour créer des plantations de canne à sucre, de coton et de café dont les productions sont transportées vers la métropole. Le processus s’est poursuivi selon Roger Michel1 : « la plus grave atteinte qui fut portée à l’équilibre de l’écosystème a été observée sous l’occupation américaine de 1915 à 1934, par la politique de concentration des terres au mépris de leurs occupants qui devaient être expulsés ou transformés en simple salariat agricole. » La couverture forestière passe de 60% en 1915, à 21% en 1945, puis 9% en 1954. Le phénomène de déforestation s’est poursuivi essentiellement pour des motifs économiques et politiques. Un exemple, lorsque l’ONU décréta un embargo de 1991 à 1994 et que les dérivés du pétrole firent l’objet d’un blocus, la population n’eut d’autre choix que de déboiser massivement afin d’assurer ses besoins en éclairage et en cuisson d’aliments. Aujourd’hui, la couverture forestière représente moins de 2% du territoire. Le monde paysan a été la principale victime de ces années de misère : Haïti a subi un important phénomène d’exode rural, bien qu’un peu plus de la moitié de la population (51.5%) vive encore en zone rurale. Les pratiques agricoles sont centrées sur quelques variétés de semences de cycle court, (pois, maïs). Les productions maraîchères sont peu développées, alors que celles-ci sont des sources de revenus et de diversification alimentaires importantes. 6

Nord - Ouest Nord

Nord - Est

Artibonite

HAITI HAÏTI Centre Grand ’Anse Sud

Port-au-Prince

REPUBLIQUE DOMINICAINE

PARTIE 1 CADRE ET PERIMETRE D’INTERVENTION (2010-2013)

Ouest

Jacmel

Sud - Est

Le séisme de 2010 a mis en évidence le surpeuplement des villes, en particulier de Port-au-Prince la capitale, dans laquelle l’essentiel des administrations, des grandes entreprises ou des structures d’éducations supérieures sont concentrées. La destruction de grands ensembles urbains par le tremblement de terre a amené à envisager de relancer le développement des zones rurales en cours d’abandon et de désertification et des principales villes de province afin de contribuer à éviter un nouvel engorgement de Port-au-Prince. 2) La décision d’intervenir en Haïti et les principes guidant ce choix Le séisme qui a frappé Haïti a suscité chez de nombreuses entreprises partenaires une mobilisation forte, traduite par la proposition faite à Planète Urgence de soutenir financièrement des actions que pourrait mettre en œuvre l’association pour soutenir la population haïtienne. La décision d’intervenir en Haïti a néanmoins fait l’objet de débats au sein de Planète Urgence. En effet, le mandat

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

de l’association s’inscrit dans une perspective d’appui au développement de long terme, distincte du besoin de réponse urgente qui suit une catastrophe telle que celle engendrée par le séisme qui a frappé Haïti. Aussi, la décision d’intervenir en Haïti a-t-elle été prise en définissant un cadre d’intervention assurant une cohérence avec les savoir-faire et les objectifs déjà posés dans le cadre du programme Environnement & Développement de l’association. Cette orientation a mené à l’établissement de lignes directrices qui ont encadré une première mission d’évaluation organisée en février 2010 pour identifier la zone, les projets et les partenaires d’intervention. L’objectif était de définir les contours d’une action qui s’inscrirait en zone rurale, dans des zones affectées par le séisme mais peu couvertes par l’aide internationale déjà mise en œuvre, afin de répondre à des problématiques de développement de long terme et agir ainsi dans la durée en complément du travail réalisé par les ONG spécialisées sur l’action d’urgence. L’approche mise en œuvre devait également s’inscrire dans la vision de Planète Urgence de renforcement des acteurs locaux et permettre de réaliser un transfert des compétences, une appropriation des projets et garantir ainsi la pérennité des actions menées ainsi que l’autonomie des acteurs. 3) L’identification de la zone d’intervention a. Le processus d’identification Une analyse réalisée avant le départ en Haïti avait permis de définir la région de Jacmel comme zone possible d’intervention. L’équipe de Planète Urgence a donc rencontré les autorités de la ville et a désigné la section rurale de Lamontagne de Jacmel comme la zone rurale sur laquelle une action devait prioritairement être mise en œuvre. Cette rencontre avec la mairie a permis de définir les besoins prioritaires et les acteurs locaux fiables avec lesquels travailler à la mise en œuvre du

projet, en identifiant en particulier pour cela l’organisation paysanne OPADEL (Organisation des Paysans Actifs pour le Développement de Lamontagne). Le dialogue avec OPADEL a permis de constater une convergence de points de vue quant à la nature des actions à engager pour répondre aux besoins immédiats mais surtout aller au-delà de l’urgence, dans le but : • D’améliorer durablement la vie des habitants de la zone rurale, notamment des plus défavorisés et de leur donner la possibilité de casser la spirale de la misère et de la décapitalisation, en leur fournissant des formations débouchant sur des activités génératrices de revenus (AGR), et un appui plus direct pour lancer leur activité. • De répondre aux besoins de logement décents des familles en visant la qualité et la solidité à long terme et non des constructions provisoires d’urgence non durables. • D’être irréprochables et exigeants dans la tenue et la gestion des projets, pour éviter gaspillages et risques de détournements des fonds engagés. b. Présentation de Lamontagne Lamontagne (Lamontay en créole) est une zone rurale de 67 Km² située à 13 Km à l’ouest de la commune de Jacmel, dont elle constitue l’une des sections communales. Elle regroupait, avant le séisme de janvier 2010, une population d’environ 25 000 habitants, constituée essentiellement d’agriculteurs et découpée en quatre grandes zones issues de la situation foncière existante au moment de l’indépendance de 1804 : Lacroix, Terre Rouge, Corail, Bellevue regroupant 54 habitations (entendre : petites localités). Elle est desservie par une mauvaise route en terre battue, qui part de la ville de Jacmel (à l’est) et se poursuit vers Bainet et La Vallée. 95% du territoire est composé de mornes (montagnes) dont le plus haut point culmine aux alentours de 800 m.

Lamontagne

JACMEL

Lacroix

Terre Rouge Corail Bellevue

0

1

2

km

N

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

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Cette zone a été pendant très longtemps un des secteurs clés de l’approvisionnement de Jacmel et du département du Sud Est en produits agricoles, tant pour la consommation locale que pour les produits commercialisés à l’extérieur. Les zones de cultures sont variées, partant d’une plaine littorale, passant par la moyenne montagne ; chaque partie du territoire possède des conditions et des méthodes agricoles très différentes.

ont ainsi souvent été initiées. Néanmoins, l’absence de logement décent et de perspective professionnelle, la pénibilité du travail agricole, l’image peu valorisée des zones rurales et les difficultés d’accès à des services de base (éducation, santé, achats de produits manufacturés de première nécessité) ont ensuite entraîné le retour d’une partie des personnes déplacées à Port-au-Prince.

Aujourd’hui, la culture du maïs, des haricots, du sorgho, est importante et il subsiste des productions de café, de cacao, de manioc, et de fruits divers : papaye, agrumes, mangues… Les femmes pratiquent le petit commerce et viennent vendre les productions familiales sur les marchés. Mais ces activités ne procurent que de faibles revenus et Lamontagne constitue un espace particulièrement pauvre, avant tout tourné vers l’agriculture de subsistance et une forte exploitation des espaces boisés (charbon de bois). Une étude de 2011 (WHH/ ECHO) estime les revenus mensuels moyens des ménages en zone rurale de Jacmel à 4 300 Gourdes, soit 85 Euros. Plus de 50% proviennent de ventes de récoltes et 5 % d’autoconsommation. La proportion des salaires est de 16%, celle des transferts provenant de l’étranger (diaspora) de 3,5%.

La destruction de grands ensembles urbains a néanmoins amené à envisager de relancer le développement des zones rurales en cours d’abandon et de désertification afin d’éviter un nouvel engorgement des villes. Pour de nombreuses familles en effet, pouvoir disposer de son propre toit et d’une assistance pour initier une activité professionnelle (agricole, mais aussi service ou commerce) est un premier levier leur permettant d’envisager de se réinstaller à Lamontagne.

Lamontagne fait face à de nombreuses difficultés et problèmes: • Un accès et une circulation difficile du fait d’un très mauvais état des routes, se dégradant à chaque pluie. • La dégradation des terres, du fait du déboisement, de l’érosion et des cultures intensives non variées causant la disparition des couches fertiles. • Un exode rural important, du fait des conditions économiques et des séquelles des catastrophes naturelles liées essentiellement aux changements climatiques (cyclones réguliers). • Un très grand manque d’infrastructures scolaires, commerciales, sanitaires et administratives. • La taille élevée des familles : plus des 70% des ménages sont d’au moins 4 personnes, et la forte proportion de familles monoparentales. c. Situation à Lamontagne au lendemain du séisme Le séisme du 12 janvier 2010 n’a pas épargné la section de la Montagne : 3 morts, 25 personnes blessées, 695 maisons détruites, 835 maisons gravement endommagées4. Une grande quantité de personnes, sinistrées dans les villes sont revenues s’implanter dans la section rurale pour trouver un abri chez leur famille ou leurs proches, ce qui a accru la pression sur les réserves alimentaires disponibles. Un recensement effectué par OPADEL en 2010 dans les écoles a permis de dénombrer 225 enfants venus de l’extérieur après le séisme. Une part significative de ces personnes, ayant tout perdu à Port-au-Prince, a exprimé la volonté de s’établir ou de se réinstaller à Lamontagne.. Des activités de petits commerces 8

II- Le projet « Un toit, un avenir », un projet intégré 1) La conception du projet « Un toit, un avenir » L’approche prônée par Planète Urgence se situe au niveau d’un territoire, duquel sont analysées les ressources et les vulnérabilités. Le territoire de Lamontagne, comme de nombreuses zones rurales d’Haïti, est marqué par un très fort exode rural. Celui-ci est consécutif au faible niveau de services de bases (éducation, santé, accès à l’eau et à l’énergie…) de ces territoires. Par ailleurs, l’ouverture des frontières qui a suivi la démocratisation du pays et la chute de la dictature des Duvalier, a favorisé une importation massive de produits alimentaires qui sont venus concurrencer l’agriculture locale, devenue de moins en moins rentable, entraînant la forte dépendance alimentaire des familles à ces denrées alimentaires importées. La pauvreté croissante des zones rurales a entraîné une concentration massive de population dans les villes et à Port-au-Prince, dans des conditions de vie très précaires qui expliquent aussi l’importance des dégâts causés par le séisme. Dans les zones rurales, de nombreuses maisons ont été touchées par le séisme, mais pour nombre d’entre elles, la secousse a en fait achevé un processus de dégradation déjà bien avancé. Le sens d’une intervention comme celle de Planète Urgence requérait donc une approche permettant à la fois de répondre à certains besoins immédiats, mais devait également se concevoir dans une perspective durable de renforcement des acteurs locaux (artisans, agriculteurs, organisations paysannes) et de lutte contre la pauvreté. Une telle approche ne pouvait être conçue et mise en œuvre sans une implication très forte de la société civile et des autorités locales pour garantir une réponse adaptée aux besoins des habitants et une bonne dissémination des savoirfaire diffusés.

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

La mission d’évaluation a permis dès février 2010 de nouer avec l’organisation haïtienne OPADEL et l’autorité élue localement, le CASEC (Conseil d’Administration de la Section Communale), les relations permettant de mettre en œuvre l’approche souhaitée par Planète Urgence. OPADEL avait déjà alors formalisé un projet associant reboisement et appui aux activités agricoles qui allait servi de base au volet « relance économique » du projet « Un toit, un avenir » (l’intervention sur la reconstruction de l’habitat n’étant pas intégrée au projet élaboré par OPADEL avant le séisme).

Les actions de Planète Urgence ont ainsi été orientées autour de 3 axes majeurs intégrés dès le lancement du projet « Un toit, un avenir » tel que présenté début 2010 aux entreprises partenaires : • L’amélioration des processus de construction et l’accès à un habitat durable et décent. • Le développement social et économique local, dans l’agriculture essentiellement. • La protection et la restauration de l’environnement, en particulier par des activités de reboisement. Par la suite, différents financements complémentaires provenant d’entreprises, de particuliers et de fondations ont permis d’approfondir les activités initiées, permettant d’aller plus loin dans la réponse apportée aux besoins locaux (projet «Une école, un avenir», plantations réalisées avec Ojucah, révision à la hausse des infrastructures et activités du CAFE...). Plusieurs projets ont ainsi été mis en œuvre, en partie simultanément, sur financements distincts et avec des objectifs spécifiques, concourant tous à la lutte contre la pauvreté et au développement économique et social du territoire.

Organisation des Paysans Actifs pour le Développement de Lamontagne (OPADEL) L’organisation OPADEL a été constituée en 2004, par des jeunes originaires de Lamontagne et comptait en 2010 plus de 600 membres cotisants. L’organisation s’était investie, avant même le séisme, dans les domaines de l’appui à l’agriculture familiale (formations, prêt d’outillage…), la promotion du rôle des femmes, l’appui à la petite enfance (2 jardins d’enfants), l’appui économique (microcrédit, création d’activités de petit commerce). Elle animait également des groupes de jeunes et des activités culturelles (carnaval, journées récréatives ou culturelles, projections de films...). Les responsables d’OPADEL disposent d’un ancrage fort auprès de la population et des pouvoirs publics locaux et composent une équipe pluri disciplinaire (agronomes, économistes, paysans) à même d’œuvrer à la relance économique de la zone et de faciliter l’intégration économique des personnes nouvellement arrivées. 2) Une architecture de projet en plusieurs phases Le projet « Un toit, un avenir » comporte plusieurs volets. Sous cette appellation se fédèrent à la fois des actions pensées et initiées lors du lancement du projet en mars 2010, et d’autres activités prolongeant ce socle initial d’actions. Dès le commencement du projet, Planète Urgence a souhaité développer une intervention intégrée au territoire, transversale, pour concilier une réponse d’urgence post-séisme à une action sur les causes plus structurelles qui conduisent à l’exode rural, vidant ainsi Lamontagne de ses forces vives.

Projets de 2010 à 2013

Période de mise en oeuvre

Secteur d’intervention

Reboisement Habitat « Un toit, un avenir » Phase 1

2010 – 2012

Relance économique et agricole Sécurité alimentaire

« Un toit, un avenir »

Partenaires financiers Alma Consulting group, BIC, FDF*, FAP**, Fondation BEL, Fondation Schneider Electric, Association Proto 427, BPCE, Kraft Food, BPSO, CDC COSOG, Association ISC Environnement, Fondation Credit Coopératif, Rue du Commerce

2012 - 2014

Habitat

FAP**, Secours Catholique, Fondation Schneider Electric

C.A.F.E. Centre d’activités, de Formations et d’Echanges

2012-2014

Relance économique, agriculture, formations

Fondation Daniel et Nina Carasso, FDF*, BIC

« Une école, un avenir »

2012-2013

Education par le numérique en primaire

BIC

Reboisement dans la localité de Lavial, Commune de La Vallée

2013

Reboisement

Donateurs particuliers et entreprises 1euro=1arbre planté

Congé Solidaire®

Depuis octobre 2012

Renforcement de compétences

Particuliers et entreprises partenaires du Congé Solidaire®

Matériel scolaire

Particuliers et entreprises finançant l’opération Kits Scolaires

Phase 2

Kits Scolaires

2011 – 2013

* FDF = Fondation de France ** FAP = Fondation Abbé Pierre

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

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3) Le choix d’une équipe d’encadrement réduite et de la multiplication des synergies L’équipe de Planète Urgence est restée tout au long du projet relativement réduite, composée de 2 à 6 personnes selon l’évolution des projets (au plus fort des activités, l’équipe a été composée d’un chef de mission et d’une administratrice, de 2 chefs de travaux, et de 2 chauffeurs - logisticiens) ; avec en complément l’expertise de l’ONG Architecture & Développement sur le projet « Un toit, un avenir - phase 2 » et un support technique ponctuel pour la construction de certains bâtiments du C.A.F.E.

et des équipements communs permettant de contribuer au dynamisme social et économique local (écoles, centres ruraux…) 1) L’amélioration de l’habitat a. Cadre d’intervention sur l’habitat individuel Le bâti à Lamontagne était un habitat largement répandu dans le milieu rural et déjà très dégradé à l’image de celui que le séisme a contribué à détruire d’un seul coup.

Ce choix se justifie par le positionnement de Planète Urgence comme appui des acteurs locaux, OPADEL et artisans de la zone qui ont été en charge de la mise en œuvre des projets. Il s’agit d’un positionnement qui, sans être atypique, a contrasté avec l’approche d’autres ONG qui se sont souvent positionnées pour réaliser des projets de soutien aux populations souvent temporaires. Par ailleurs, les représentants de Planète Urgence sur le terrain ont toujours systématisé les contacts et rencontres avec les autorités et les acteurs locaux et internationaux du développement, dans tous les domaines d’intervention à Lamontagne, pour éviter des actions en circuit fermé et favoriser les synergies (coopération avec l’organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) ou les ONG internationales MEDAIR ou Save The Children)..  

Maison des années 60, à réparer, avec la toiture dégradée, mais des murs « acceptables ».

PARTIE 2 Projets mis en œuvre et impacts AXE 1 : L’amélioration des processus constructifs et l’accès à un habitat durable et décent Le tremblement de terre de janvier 2010 a entraîné des dégâts considérables sur le parc de logements existants. La très mauvaise qualité et l’usure des constructions a contribué à accroître le nombre des victimes et les dégâts occasionnés par le séisme. Une action urgente sur ce secteur était prioritaire pour reloger un million et demi de personnes vivant dans des camps ou hébergées chez des proches suite à la destruction de leur maison. Planète Urgence a, pour sa part, souhaité positionner son intervention en allant au-delà de ce temps d’urgence, pour faire des constructions réalisées des espaces de formations théoriques et pratiques, sur le terrain, initiant les artisans locaux à de nouvelles techniques et à de meilleurs gestes - chantiers écoles - pour accroître la résistance des constructions aux séismes et aux cyclones qui ravagent régulièrement Haïti. L’intervention sur le champ de la construction aura visé deux types de réalisations : des habitations familiales rurales, 10

Maison à la maçonnerie détruite, reconstituée après 2010 avec des morceaux de tôles usagées.

Maison en blocs, de mauvaise qualité. Cette construction avait été terminée le 29 décembre 2009. Elle a été détruite le 12 janvier 2010.

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• Les maisons rurales sont majoritairement anciennes et n’ont pas été entretenues faute de moyens et de connaissances techniques : beaucoup de maisons détruites datent des années 70/80. Les tôles non remplacées ont rouillé, laissant perdurer des infiltrations dégradant les bois de structure et les murs. Les termites et la pourriture ont fragilisé les poteaux de bois, structurels des maisons..

• La forte participation des familles à la réalisation de leur maison (fourniture et transport de matériaux : roches, sable, eau… et participation aux travaux).

• les savoir-faire ancestraux se sont perdus, suite à la disparition ou à l’exode des « boss » (les artisans) vers la ville ; et la rupture dans la transmission des connaissances et des acquis, notamment concernant la réalisation des charpentes et des toitures : les principes de dessin et de fixation des charpentes, les ancrages des ossatures et les assemblages ne sont plus conformes aux connaissances vernaculaires.

• Le souci de limiter fortement les risques de conflits locaux, liés tant aux besoins importants de logements décents – pour une capacité de réponse limitée-, qu’aux statuts fonciers peu clairs, pouvant générer des conflits sur la propriété des futures maisons (très peu de familles possèdent des titres de propriété). Pour ce faire, un comité de sélection des familles, composé des représentants de Planète Urgence, d’OPADEL et du CASEC a été mis en place. Les familles bénéficiaires potentielles, listées par Le CASEC et OPADEL sont ensuite rencontrées par le représentant de Planète Urgence pour valider le respect des critères de décision initialement établis. Cette conformité validée, l’ensemble des familles bénéficiaires a été choisi à l’unanimité des membres du comité de pilotage.

• la dégradation forte de la qualité des matériaux disponibles localement a entraîné une baisse de la qualité des constructions : la maison paysanne traditionnelle était en structure de bois durs avec des ossatures aux assemblages travaillés et durables, le remplissage des murs étant réalisé avec des mortiers de chaux. La déforestation a, au fil du temps, rendu introuvables les bois durs et empêché la production de chaux (qui requiert ici des quantités de bois très importantes pour être produite). Les matériaux utilisés en remplacement sont de mauvaise qualité (tôles fines, bois importés) ou mal maîtrisés (mauvaise composition du béton, mauvais mélanges des ciments). Ceci fait que des maisons de 25 ou 30 ans, mal construites et mal entretenues, ont beaucoup moins bien résisté que des constructions plus anciennes. L’exode rural a, par ailleurs, essentiellement touché les hommes chefs de familles, partis chercher un travail en ville ou à l’étranger laissant sur place femmes et enfants, peu expérimentés dans l’art de construire. Lamontagne a, enfin, très peu bénéficié des ressources de la diaspora qui, en d’autres endroits ont permis de protéger, entretenir et améliorer les logements. L’action de Planète Urgence sur l’habitat s’est réalisée dans le cadre de deux projets : la phase initiale du projet « Un toit, un avenir », puis sa deuxième phase. Plusieurs principes d’action ont été communs à ces 2 phases : • Le respect des aménagements traditionnels des habitats, avec notamment les cuisines, latrines à l’extérieur des maisons, dans l’environnement familial élargi du « lakou » (la cour). • La réalisation des travaux par des artisans locaux, formés et encadrés pour mettre en œuvre des techniques prenant désormais en compte les risques sismiques et cycloniques.

• Une approche pensée en terme d’habitat, et non seulement de logement, prenant de ce fait en compte l’amélioration du confort (accès à l’eau par récupération et stockage des eaux de pluies, point d’éclairage, latrines, meubles pour les premières maisons).

b. Le projet « Un toit, un avenir » Objectif : la construction de 50 maisons et la réparation de 150 autres ; un accent particulier étant mis sur l’accès au logement des familles les plus défavorisées, et notamment de celles revenues trouver refuge à Lamontagne après le séisme. Fiche descriptive des maisons « Un Toit Un Avenir » Surface : 36m² (quelques constructions plus petites pour des personnes seules, des terrains trop étroits, ou des couples sans enfants). Matériaux : Blocs en ciment achetés localement. Equipement complémentaire : latrine, système de récupération et de stockage des eaux de pluies, 1 point d’éclairage solaire, 1 table et 4 chaises. Prise en compte des risques : sismiques et cycloniques PS/AC Réalisation : Achat des matériaux, logistique et encadrement de chantier par Planète Urgence ; réalisation des chantiers par les artisans locaux. Participation des familles : apport en matériaux locaux, main d’œuvre, nourriture des boss (artisans).

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Techniques : Concernant la construction des maisons, le parti pris initial fut de recourir à un architecte local afin de concevoir des maisons correspondant aux savoir-faire et matériaux disponibles sur place et aux modes de vie local. Sur la base des premières corrections apportées à ce travail furent réalisées quatre maisons prototypes, ce qui a permis d’aboutir au modèle unique finale, grâce à des expertises complémentaires. L’objectif de réparation de 150 maisons a évolué pour prendre en compte la distribution par l’organisation suisse MEDAIR de 800 abris transitoires5 à Lamontagne. Un accord a donc été établi avec MEDAIR pour transformer 100 de ces abris en abris permanents pour des familles relativement petites (ces abris sont d’une surface de 21m²), tout en conservant un objectif de 50 maisons paysannes traditionnelles à réparer. L’ensemble des interventions a été réalisé par les artisans de Lamontagne.

Abris transitoire (évolutif) mis en place par l’ONG MEDAIR à Lamontagne

Résultats : 52 maisons ont été construites au bénéfice de 51 familles ; la maison restante ayant servi de maison de démonstration pour les artisans et les familles et elle sert aujourd’hui d’espace d’hébergement pour des experts, les formateurs (dont les formations réalisées dans le cadre de missions de Congé Solidaire®) ou toute autre personne de passage. La participation des familles à la construction des maisons s’est révélée particulièrement précieuse. Sauf dans 2 cas (impossibilité physique ou financière). Travaux (en cours sur la photo) de pérennisation d’un abri transitoire

L’équipe d’OPADEL, le CASEC et la famille bénéficiaire d’une maison construite 100 abris transitoires prévus ont été pérennisés pour 100 familles. L’intervention a consisté en la réalisation de murs extérieurs en roches permettant de rendre la structure durable, notamment face aux vents et au soleil qui rendent l’espérance de vie des bâches très courte. L’autre effet est de sécuriser ces maisons par rapport aux éventuels agresseurs ou voleurs. Un mur intérieur de séparation a été ajouté pour créer deux pièces séparées. Ce volet s’est révélé particulièrement pertinent pour proposer aux villageois les plus isolés et les plus éloignés des axes carrossables une solution durable ; ce qui a été le cas pour les trois quarts des abris pérennisés.

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Abri après pérennisation et finition faite par son propriétaire 50 maisons ont fait l’objet de réparations. L’action de réparation des 50 maisons endommagées a été réalisée par : • la fourniture seule de matériaux pour 7 familles ayant décidé de réparer ou de réhabiliter elles-mêmes leurs maison (dont, pour la plupart, des familles d’artisans) • l’appui des équipes mobiles de techniciens et d’artisans mises en place par Planète Urgence pour accompagner les villageois dans la réparation de leur habitat, dans les 43 autres cas. L’intervention a alors concerné la rénovation ou la reconstruction des parties les plus

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techniques (charpente, toiture, renforcement de la structure de la maison), qui conditionnent la durabilité du reste des réparations réalisées ensuite par les bénéficiaires. La réparation s’est avérée assez complexe, puisqu’il est difficile de savoir précisément, avant d’avoir commencé les travaux, l’étendue de l’intervention. Ce n’est souvent qu’en ouvrant les murs que l’on découvre l’état des structures. Le diagnostic initial est souvent aggravé après le lancement des opérations.

important de ces parpaings empêchait également de considérer cette solution comme pouvant être répliquée par la majorité des villageois pour leurs constructions futures. Enfin, cette solution, qui répond cependant aux attentes actuelles des villageois, entretient également le phénomène de dévalorisation des savoir-faire traditionnels et vernaculaires. Matthew McDermott / Polaris

Les objectifs fixés pour « Un toit, un avenir » ont donc été atteints. 202 logements durables ont été construits, réparés ou pérennisés permettant à 1132 personnes d’être relogées (dont 55 personnes ayant quitté Port-au-Prince ou Jacmel et établies depuis à Lamontagne). L’ensemble de ces données est répertorié dans une base de données qui a permis de capitaliser les noms des familles, leur nombre de membres respectifs, les coordonnées GPS et l’ensemble des interventions réalisées sur la construction. La géolocalisation des maisons est accessible via le lien : www.planete-urgence.org/environnement-et-developpement/ geolocalisation.htm Impacts : A deux exceptions près, les familles issues de la ville, anciens rescapés, sont restées sur place, à Lamontagne, et y ont trouvé des activités, notamment agricoles, ou de petit commerce. Au-delà, le projet a clairement permis de faire évoluer les pratiques des artisans locaux en terme de prise en compte des risques para sismiques et anti cycloniques dans leurs gestes de travail : 60 d’entre eux ont participé aux chantiers. La participation forte des 200 familles aux chantiers a également contribué à diffuser une culture plus large sur la prise en compte des risques naturels dans les constructions. Quelques rares constructions privées ont été réalisées depuis dans la zone, notamment par les boss impliqués dans la première phase. Dans la mesure des moyens fournis par les propriétaires, elles ont été inspirées des techniques diffusées. En ce qui concerne les maisons, 50% des habitants ont personnalisé leur logement, en peignant les menuiseries, et parfois les murs. Elles se sont aujourd’hui fondues dans le paysage. Par ailleurs, 25 des propriétaires de maisons construites se sont également impliqués dans le reboisement de la cour de leur maison en achetant les arbres vendus à prix réduits diffusés à Lamontagne par un volet d’appui à l’agro-foresterie mis en œuvre par le projet dans sa 1ère phase (voir la description de ces activités dans l’axe 3, page 22) Néanmoins, l’approche technique adoptée, en reposant l’usage de blocs de ciment et la maçonnerie chaînée, présentait plusieurs points de faiblesse en termes de logistique (lourde) et de prise en compte des enjeux environnementaux (basée sur du ciment importé). Le coût

Rare image d’espoir lors des interventions ayant suivies le séisme, la photo de Moïse Joachin, dit Kiki, enfant de 8 ans sorti des décombres par les pompiers américains, a fait le tour du monde. Bénéficiaire du projet Un Toit Un Avenir, la famille de Kiki habite aujourd’hui une maison construite par le projet et peut développer ses revenus par des activités de petit commerce. Kiki, son frère et sa sœur, survivants d’une famille de 6 enfants, ont repris le chemin de l’école, à Jacmel.

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c. La deuxième phase du projet « Un toit, un avenir » C’est sur la base des leçons apprises lors de la phase 1 du projet que Planète Urgence a décidé de mettre en œuvre la proposition de l’ONG Architecture & Développement (A&D)6 consistant au lancement à Lamontagne de l’approche constructive des « matériaux en pierres confinées » (MPC) qu’elle a développée et expérimentée dans d’autres pays. Le projet « Un toit, un avenir » entrait alors dans sa seconde phase, avec le soutien de la Fondation Abbé Pierre et du Secours Catholique - Caritas France. Objectif : la construction de 60 maisons et la réparation de 50 autres ; un accent particulier étant mis sur l’accès au logement des familles les plus démunies, et notamment des plus isolées d’entre elles, qui n’ont pu bénéficier jusque là de l’aide internationale. Le projet prévoit également la construction de deux équipements communautaires (école et centre d’artisanat).

ces ateliers (fabrication des cages de fil de fer tressé et préfabrication des charpentes) emploient une main d’œuvre (encadrement et ouvriers) résidant à Lamontagne. Les premières unités de constructions ont été réalisées sous un encadrement constant du personnel d’Architecture et Développement. Les maisons sont composées de trois éléments : • Un soubassement, réalisé en MPC, cages de gabions remplies de roches et enduites de mortier bâtard. • Une ossature reprenant des savoir-faire traditionnels (roches, terre…) renforcée et améliorée dans les aspects anti sinistres. • Une charpente autoportée (sans poteau central de soutien) et une toiture 4 pans anti-cyclonique. Étapes de construction d’une maison de 7m sur 7m Architecture & Développement

Fiche descriptive des maisons « Un Toit Un Avenir 2 » Surface : 36m² ; prise en compte des risques sismiques et cycloniques. Equipement complémentaire : latrine, système de récupération et de stockage des eaux de pluies, 1 point d’éclairage solaire. Matériaux : base en cages de gabions et roches (MPC) ; ossature en bois et mortier de chaux / terre /ciment ; charpente en bois importé et toiture en tôles. Réalisation : Fabrication des cages MPC et de la charpente dans les ateliers d’OPADEL ; achat des matériaux, logistique et encadrement de chantier par Planète Urgence ; réalisation des chantiers par les artisans locaux. Participation des familles : apport en matériaux locaux, notamment 39m² de roches, main d’oeuvre de soutien. Techniques : La technique est inspirée d’une construction par A&D. Néanmoins, les plans initiaux ont évolué sur le terrain pour prendre en compte les premiers retours d’expérience, et les maisons ont finalement la même distribution intérieure que celles de la phase 1. La maison a une forme carrée d’une surface habitable de 36 m² et intègre, selon les études d’A&D, les contraintes sismiques et cycloniques. Le projet a démarré par une phase initiale de mise en place des ateliers à Lamontagne et de formation des artisans; 14

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Résultats : À la date d’écriture de ce document (début 2014), le projet « Un toit, un avenir - phase 2 » est en cours d’achèvement. 49 maisons sont construites sur les 60 prévues, un équipement communautaire (une école) est terminé et un autre en cours de construction ; 42 réparations ont été réalisées sur les 50 prévues. Une grande partie des équipements de collecte et de stockage des eaux de pluies et des latrines a également déjà été réalisée. 91 nouvelles familles sont donc déjà bénéficiaires d’un logement décent. Des missions de suivi régulières réalisées en accompagnement des chantiers par une représentante d’Architecture & Développement, de même qu’une évaluation externe missionnée par la Fondation Abbé Pierre, ont permis de constater que les processus et les techniques de réalisation sont bien maîtrisés, tant par les artisans fabricants les différents éléments constructifs (charpente, gabions) que par ceux réalisant les interventions sur les chantiers (84 artisans au total7). Un des points forts observé est la très bonne appropriation par les familles de leurs maisons, qui sont souvent déjà peintes et décorées quelques semaines seulement après leur finalisation. Néanmoins, le projet n’est pas encore parvenu à développer une réponse totalement satisfaisante concernant l’enduisage des maisons. La pratique traditionnelle d’utilisation de la chaux génère un impact dramatique sur l’environnement tant les quantités de bois utilisées pour faire fondre la roche calcaire

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sont importantes. Les alternatives couramment utilisées (chaux chimique, ciment) restent des pis-aller onéreux et peu généralisables. Impacts : Si la transmission de savoir faire aux artisans locaux est une réelle satisfaction, la pérennité des ateliers après le projet n’est pas aujourd’hui établie. Il ne s’agissait d’ailleurs pas d’un engagement pris par le projet compte tenu de la durée réduite de celui-ci (18 mois portés à 21 mois), néanmoins, il s’agit bien entendu d’un résultat qui est à rechercher compte tenu des bénéfices en termes d’activité économique et d’emplois locaux. La diversification des types de cages en fil de fer construites, y compris pour répondre à des usages différents de ceux de la construction (par exemple pour des grillages de clôtures, ou pour fixer des sols, protéger des cours d’eau et lutter contre l’érosion) permettra également de conforter la structure et les ressources de l’atelier, dont la gestion pourra après le projet être totalement intégrée à celle réalisée par OPADEL pour le centre rural (voir l’axe 2, page 18)

Planète Urgence orientera une partie de ses efforts futurs pour chercher les moyens financiers qui lui permettront de poursuivre le travail engagé, afin de diversifier les modèles de construction réalisés en MPC pour répondre à une typologie de besoins de logements plus large (familles plus petites), élargir le nombre des possibilités d’utilisations des cages tressées (pour renforcer la rentabilité des ateliers et donc leur autonomie) et accroître le nombre d’acteurs porteurs de cette technologie MPC en Haïti. La recherche de solutions plus durables concernant l’enduisage des maisons en chaux reste également un travail sur lequel un effort important doit être réalisé, tant l’enjeu est important pour valoriser cette pratique traditionnelle, y compris dans les quartiers historiques des villes, tout en diminuant son fort impact sur le maigre couvert forestier subsistant en Haïti.

Cet objectif sera donc recherché dans le cadre de la réalisation de projets ultérieurs mis en œuvre par Planète Urgence en coopération avec Architecture & Développement. Reste que le potentiel du dispositif MPC dans sa capacité à répondre aux besoins de logements décents intégrant les contraintes climatiques et sismiques (notamment dans les zones rurales isolées), reposant sur des techniques de mises en œuvre simples et accessibles aux artisans locaux, valorisant des matériaux essentiellement locaux et contribuant au développement économique local, a été clairement démontré par le projet.

Témoignages Une famille bénéficiaire

Un artisan

Thérèse Désimeau, dont le mari est décédé le jour du commencement des travaux de construction de sa maison en fin 2011. La famille de 7 personnes vivait dans une cabane en bois de palmiste entièrement dégradée. Ses enfants et petits enfants étaient, pour partie, éparpillés dans d’autres familles ou partis en ville.

« Boss » Emile Duffaut, de Morne Laporte, à Lamontagne.

«  Nous n’aurions pas pu reconstruire un logement. Aujourd’hui, en 2013, non seulement nous sommes à l’abri de la pluie, des bêtes et des malveillants, mais nous consacrons le peu que nous avons à l’école des enfants et l’entretien du jardin. Un de mes fils est revenu de la ville et a créé une petite boulangerie artisanale dans la cour. Cela nous rapporte un peu d’argent. »

« J’ai participé à de nombreux chantiers, avec Planète Urgence, et à des formations de charpente avec Aurélio, d’A&D. J’ai poursuivi avec les réparations, que je continue avec les conseils de Jhonas (PU) et Sylvia (A&D). Cela m’a permis de rester sur place, sans devoir courir vers des chantiers lointains, et aussi de gagner un peu d’argent. J’ai commencé à construire ma propre maison. J’ai utilisé, chaque fois que je le peux, les techniques utilisées sur les projets : j’ai mis des chaînages, des poteaux, une toiture carrée… Les projets sont donc enrichissants,et moi-même je forme des apprentis selon ces méthodes. Ma plus grande fierté est d’avoir contribué à construire le C.A.F.E. d’OPADEL »

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2) La construction au service du développement communautaire Planète Urgence participe au redémarrage de la vie communautaire à travers la construction d’équipements collectifs. Au total, ce sont quatre écoles qui ont été construites et réhabilitées, un centre rural (le C.A.F.E.) et un centre d’artisanat (en cours) qui ont été édifiés. Les savoir-faire locaux en matière de construction ont été développés et de nouveaux emplois créés dans les ateliers (MPC et charpente). a. Des bâtiments au service du développement économique (CAFE, centre d’artisanat, ateliers)

La salle de formation a été équipée d’un système de production électrique solaire qui dessert les équipements (lumières, ordinateurs, chargeurs…), et d’un matériel destiné à l’activité d’éducation numérique qui y était prévue (ordinateur, vidéo projecteur). Cet équipement est utilisé par 5 classes de primaire. Trois équipes d’artisans (maçons, ouvriers, charpentiers, menuisiers) représentant environ 25 personnes ont été mobilisées. Ces équipes ont bénéficié de plusieurs formations techniques, notamment les charpentiers, dispensées par un expert d’A&D, en annexe de son activité de construction de maisons.

Lors du lancement de l’intervention de Planète Urgence en Haïti, OPADEL avait présenté son projet de construction d’un centre d’activité qui permettrait de soutenir le développement d’activités économiques locales, l’accès aux produits de base pour les villageois et rendrait le travail d’OPADEL plus efficace en lui permettant de centraliser en un espace unique les différentes activités réalisées.

En complément, une mission de Congé Solidaire® a permis de travailler sur l’aménagement des espaces du centre (circulation, emplacement des latrines et des écoulements d’eaux…), et une autre mission a eu pour objet de former des artisans ébénistes pour la réalisation des aménagements de la bibliothèque/salle informatique.

Sur la base de cette démarche fût présenté à la Fondation de France et à la Fondation Daniel et Nina Carrasso le projet de construction et d’appui au lancement du C.A.F.E., le Centre d’Activités, de Formation et d’Echanges de Lamontagne, auquel l’entreprise BIC allait également apporter son soutien.

Des génératrices mobiles ont été mises en place. Mais leur maintenance est sujette à améliorations et les pannes dues à des défauts d’usage sont fréquentes ; une formation Congé Solidaire® « électro-mécanique» est prévue pour former les utilisateurs d’équipements et limiter les pannes onéreuses.

Le C.A.F.E. se présente sous la forme d’un ensemble de bâtiments répondant aux attentes exprimées par OPADEL. Les surfaces réalisées sont un peu supérieures aux plans de départ, puisqu’elles atteignent 505m², contre les 465m² initialement prévus ; elles se répartissent comme suit :

L’installation de citernes est réalisée, dont un réservoir enterré de 7 x 2 x 2m soit 28 m3 sous la grande salle de Formation.

Surfaces prévues

Construit ou en cours

Surfaces réelles (en m²)

(en m²) Salle de formation

80

115

Bibliothèque

25

35

Administration

50

55

Banque C.A.F.E.

70

70

Banque Semences

70

70

Hébergement 1*

35

70

135

80

465m²

505 m²

A construire Hébergements collectifs Point de vente Total

10

* Maisons réalisées dans le cadre du projet « Un toit, un avenir » 1.Une autre maison a été construite en MPC sur le site dans le cadre de la deuxième phase du projet

La salle de formation, inaugurée en avril 2013, en présence des représentants de la Fondation Daniel et Nina Carasso, a fait l’objet d’un travail plus long et plus poussé que prévu, réalisé avec le soutien et sous le contrôle des experts d’Architecture & Développement afin, notamment, de concevoir et mettre en place une toiture plus conforme aux prescriptions et aux calculs techniques de résistance pour faire de ce bâtiment un recours (escape building) en cas de cyclone. 16

Le C.A.F.E. est donc opérationnel et a commencé à fournir ses services aux paysans de la zone, ainsi qu’aux élèves qui viennent déjà profiter des ordinateurs et des livres disponibles dans la bibliothèque.

Témoignage Romuald Dominique, ancien Coordonnateur d’OPADEL, et directeur du C.A.F.E. « Depuis la création d’OPADEL, en 2004, nos activités ont évolué, se sont multipliées. Aux quelques actions agricoles simples réalisées avec les paysans, nous avons ajouté des formations, des services, des actions communautaires. Avec Planète Urgence, par exemple, nous avons mis en place chaque mois pendant deux ans des formations à l’agroforesterie. Plus de 600 personnes y ont participé, et cela accompagnait notre projet commun qui a permis de diffuser près de 20 000 plantules. Nous avons renforcé nos activités de service à la population, comme le microcrédit pour les marchandes et les banques d’outils et de semences. Il nous fallait un lieu pour regrouper nos activités. Les bâtiments construits pour le C.A.F.E. répondent à nos besoins, et amplifient largement notre impact. La période de construction a été difficile, et laborieuse.Mais le résultat est spectaculaire, et le centre terminé attire de nombreux visiteurs et utilisateurs. »

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Sur le site du CAFE ont également été construits 2 ateliers et d’un espace de stockage visant à permettre la production locale et le stockage de cages MPC et de charpentes. Ces constructions constituent des équipements qui resteront à disposition d’OPADEL à l’issue du projet « Un toit, un avenir phase 2 ». Par ailleurs, l’intervention de Planète Urgence en matière d’équipement collectif concerne également la réalisation d’un bâtiment communautaire servant à la fois de lieu de travail pour des artisans locaux, centre d’artisanat, de lieu de rassemblement pour les événements de la vie locale et d’espace de regroupement en cas de cyclone. Ce bâtiment, constitué de deux blocs de maisons MPC raccordés entre eux, présentera une surface de 72m².

b. La réhabilitation et la construction d‘espaces scolaires Le soutien de l’entreprise BIC et de ses salariés, a permis la mise en place du projet « Une école, un avenir » (voir axe 2, page 21 pour le développement du du volet éducatif du projet). Quatre sites ont été réhabilités et aménagés : 2 salles de classe dans 2 sites de Lamontagne, équipées de matériel numérique permettant la réalisation de cours interactifs ; une école maternelle OPAKINDER, construite suivant la technologie MPC dans la commune de Lacroix ; et enfin la salle de formation du C.A.F.E qui accueille, le matin, les élèves des écoles concernées. Ecoles

Localité

Niveau

Nature de l’intervention

OPA KINDER

Lacroix

Maternelle

Construction

Nationale LACROIX

Lacroix

Primaire

Réparation/ Sécurisation

C.A.F.E. OPADEL

Dénoué

Primaire

Construction

Sable Cabaret

Sable Cabaret

Primaire

Réparation/ Aménagement

Cours dans la salle de classe de l’école de Sable cabaret, réhabilitée par le projet

AXE 2 : Le développement social et économique local

Bâtiments du CAFE

Le projet « Un toit, un avenir », qui a permis de démarrer l’ensemble des activités mises en œuvre par la suite à Lamontagne, se positionne dans une démarche intégrée visant à lier et à agir sur les différentes causes de l’exode rural. Agir pour permettre un accès à un habitat décent ne prend une dimension structurante que s’il s’intègre dans un cadre social et économique offrant aux habitants du territoire les possibilités d’y gagner correctement leur vie et d’offrir à leurs enfants des conditions d’éducation aussi satisfaisantes que possible. C’est ce qui a conduit à la mise en place d’actions d’appui au développement du territoire portant sur le soutien post-séisme à la production agricole, au renforcement plus durable des activités agricoles et de petit commerce, et à l’amélioration de l’éducation primaire.

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Avant le séisme, Haïti était déjà en situation de dépendance alimentaire vis-à-vis des produits importés (70% des produits alimentaires consommés en Haïti). Les campagnes, souséquipées en services de base, voient leur jeunesse partir vers la ville et fuir les métiers de la terre à la fois durs et peu lucratifs, les productions locales (aux rendements variables d’une année sur l’autre et fortement marqués par les événements climatiques extrêmes qui frappent l’île) étant concurrencés par les produits alimentaires importés. Cette situation d’insécurité alimentaire a bien entendu été amplifiée par le séisme. Bien que le bilan humain ait été relativement limité dans les zones rurales, ses conséquences ont malgré tout été importantes, avec un impact indirect sur la situation alimentaire et agricole. Janvier est en effet une période de préparation des terres et des semences avant les plantations prévues en février. Le tremblement de terre a fortement perturbé la capacité des villageois à préparer leurs semis (désorganisation des familles, manque de disponibilité des semences…), tandis que l’afflux de rescapés revenus de Port au Prince pour trouver refuge dans leurs familles a contribué à épuiser les réserves alimentaires et les stocks de grains (maïs, pois) destinés aux semis. L’action de Planète Urgence s’est donc positionnée sur deux niveaux : d’abord l’appui d’urgence à la réussite des premières campagnes agricoles, puis le renforcement plus durable de la capacité de production et de transformation locale par la fourniture des services du C.A.F.E. et la mise en place de jardins maraîchers familiaux et scolaires. 1) L’appui d’urgence à la production locale Dès le mois d’avril 2010, dans le cadre d’un partenariat avec la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture) des semences de maïs, de pois et de légumes, ainsi que des outils agricoles furent distribués aux paysans. Cette action, qui s’est ensuite poursuivie pendant toute l’année 2010, a servi à atténuer l’impact du séisme sur la situation de crise alimentaire en permettant de réduire la perte de production lors des deux saisons de récolte suivant le séisme. Plus de 23 tonnes de semences ont ainsi été distribuées à près de 1000 familles entre 2010 et avril 2011. • pois (haricots) : 13 600 Kgs • mais : 6 980 Kgs • petit mil (sorgho) : 2 500 Kgs Le volet maraîchage a été développé en 2010 avec la distribution et la semence dans les jardins individuels familiaux de 18 kilos de graines : choux, tomates, aubergines, piments et poivrons, carottes. Dans le cadre de l’appui à cette activité, 3 230 outils de jardins ont été distribués à plus de 600 familles. Une partie de ces outils a par ailleurs été donnée à OPADEL pour alimenter sa banque d’outils. 18

Depuis plusieurs années, OPADEL développe une activité d’achat/vente de semences, notamment de haricots. Ce négoce interne à la zone a constitué l’embryon des futures banques de semences décrites par ailleurs. L’apprentissage par les enfants de la réalisation de jardins de légumes aura un impact sur les habitudes alimentaires devenues déplorables, même en zone rurale. 2) Le CAFE, outil de soutien aux activités économiques et sociales Le C.A.F.E. (Centre d’Activités, de Formation et d’Echanges) était la demande centrale d’OPADEL, dans les premières rencontres avec l’association haïtienne en février 2010. Il vise à appuyer la relance économique durable de la zone, par la création d’activités employant les ressources humaines locales et valorisant les produits agricoles de la section rurale de Lamontagne. Le C.A.F.E. se compose de bâtiments simples et fonctionnels qui accueillent et regroupent les activités mises en œuvre par OPADEL : • Des activités de formation, réalisées notamment grâce à un tableau numérique interactif. Ces formations concernent par exemple : • les artisans, les chefs de chantier, les charpentiers, les menuisiers et les maçons, qui sont dotés d’un savoir-faire en matière de construction durable, • les enfants de 5 écoles environnantes qui viennent à tour de rôle participer à des cours interactifs • les paysans locaux, qui viennent y suivre des formations sur les techniques de stockage et de production des semences. Ces formations sont complétées par des visites dans des structures paysannes équivalentes existant dans le pays (Reccocarno, MPP, APV). • La gestion d’une bibliothèque, salle informatique où plus de 120 jeunes viennent se documenter et étudier, et s’initier aux logiciels informatiques.

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• La réalisation d’une activité de négoce local concernant l’achat et la vente à prix modérés de graines de pois, de maïs et de café. Le centre agit également comme banque de semences et d’outils, en facilitant l’accès des paysans à ces intrants. • La poursuite d’une activité de microcrédit, réalisée pour financer les activités agricoles ci-dessus, en plus d’activités de petit commerce réalisé par des femmes de la zone. Cette plateforme, où finalement se retrouve aujourd’hui le cœur des projets de développement et de construction a permis, depuis 2012, de créer de nombreux emplois de gestion et de production : 6 personnes sont en charge de la gestion quotidienne des activités, plus d’une centaine d’artisans ont été formés aux techniques de constructions et une dizaine de saisonniers se chargent des traitements (tri, séchage, stockage) des semences.

En ce qui concerne l’activité de négoce de semences et de café, le résumé des activités à fin décembre 2013 est le suivant : Pois

Maïs

Café

Poids acheté en kilos

2 175,63

2 408,90

1 070,00

Prix d’achat en gourdes*

192,83

52,11

419,02

Prix d’achat, en gourdes*, par kilo

65,37

15,33

167,61

Total des achats, en gourdes*, au 31/12/2013

142 215,00

36 922,00

179 340,00

Total des achats, en euros, au 31/12/2013

2845,00

740,00

3587,00

* 50 gourdes = 1 euro environ.

250 personnes, productrices de Lamontagne ou marchandes dans les marchés environnants ont vendu leur récolte au C.A.F.E. L’impact a été fort sur les femmes puisqu’elles représentent 233 vendeuses sur les 250. 1 500 personnes ont également été formées ou sensibilisées sur les aspects divers de la culture, de la récolte, du stockage des semences et du café.

Tri et séchage des pois Ce groupe a déjà bénéficié de plusieurs formations (via 5 missions de Congé Solidaire® notamment) diverses spécialisations, telles que la maintenance informatique et bureautique à plusieurs reprises, la tenue de comptabilité et la gestion d’un fond de microcrédit avec un logiciel adapté, la gestion d’un fond de roulement et la communication (supports et contenus). Le lancement des activités du centre a été engagé en juillet 2013, en phase avec le calendrier agricole prévisionnel (première activité liée à l’achat de graines de maïs et de haricots juste récoltées).

Sur une année pleine, entre 400 et 500 paysan(nes) devraient constituer la clientèle régulière des services du centre (hors formation), qui pourront donc lui vendre leur production agricole et y trouver les semences, adaptées à leur terre et à meilleur prix que sur les marchés de la ville, nécessaires à leurs semis. Le projet du C.A.F.E. a été conçu pour devenir autonome : les activités commerciales (achat/revente de semences et de café) combinées avec d’autres actions, comme le microcrédit ou le moulin à maïs, produisent des recettes. Les ateliers de construction construits lors de la phase 2 du projet « Un toit, un avenir » pourront aussi, peut être, constituer une source de revenus futurs pour le centre (par la vente de cages de gabions, de grillages et de charpente).

Témoignage Franck Francky, Responsable de l’activité négoce de café. « Nous avions établi un plan d’actions avec l’équipe du CAFE. J’ai suivi ce plan, et pendant plusieurs mois, j’ai fait des réunions avec les planteurs, les leaders, les organisations de Lamontagne, j’ai visité les marchés, et rencontré beaucoup de planteurs chez eux. L’année 2013 a été catastrophique pour les récoltes de café. Le staff du C.A.F.E. a donc réuni 80 producteurs en novembre pour comprendre clairement les raisons de la chute de production. Et en profiter pour

leur rappeler le débouché assuré à la filière café qu’offre le C.A.F.E. Nous avons résumé les causes de cette baisse des rendements : Un mauvais entretien des jardins par manque de connaissances, de pression sur les terres, et de manque de moyens ; une disparition de la génération de l’époque du café (70/80 ans), et suite à l’embargo, disparition des acheteurs ; un déboisement des arbres de couverture ; une carence de pluies »

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A terme (trois ans), les activités économiques du centre devront dégager suffisamment de marge pour rémunérer les salariés, -qui sont subventionnés dans la phase actuelle de lancement grâce au soutien de la Fondation de France, de la Fondation Daniel et Nina Carasso et de BIC- et financer les formations. C’est un pari sur l’avenir mais dont l’enjeu sur le développement local est important.

paysans. Néanmoins, le lien se renoue depuis septembre 2013, les villageois s’appropriant progressivement les bâtiments. Six mois après le lancement du Centre, il est trop tôt pour évaluer les impacts du projet et la viabilité économique du centre. Néanmoins, le dispositif et l’accompagnement sont en place pour contribuer à redynamiser les activités agricoles et maintenir un niveau d’activités qui attachent les paysans à la zone. D’ores et déjà, également en offrant des débouchés locaux, en supprimant la pénibilité du transport des denrées vers la ville et en permettant aux agriculteurs de trouver facilement, sur place et à bon prix, les semences dont ils vont avoir besoin au moment des semailles (février-mars ; août-septembre), le centre apporte au quotidien des services précieux pour diminuer les difficultés liées à l’isolement de la zone.

Serge Valescot, d’OPADEL , initie des jeunes à l’utilisation d’un ordinateur Impacts : L’impact des activités économiques a été, dans une première phase, conséquent au niveau des artisans constructeurs qui ont pu améliorer leurs revenus en travaillant sur ce chantier. Cette phase de construction a fortement mobilisé l’équipe d’OPADEL (déjà très sollicité sur le projet « Un toit, un avenir phase 2 »), ralentissant l’appui qu’OPADEL fournissait aux

Tri des haricots achetés par le C.A.F.E.

Témoignages Pierre Colin, agriculteur à Dénoué.

Patrick Lemaire, volontaire du Congé Solidaire® pour une mission d’aide à la gestion de projet

« J’ai très vite compris l’intérêt de la banque de semences d’OPADEL en leur vendant une partie de ma production de maïs et de pois, dès la récolte en juillet. Je recommence dès que je peux.

« L’accent a été mis sur la mise en valeur de la zone par l’association OPADEL qui compte aujourd’hui 673 membres.

D’abord, cela me permet de gagner un peu d’argent avec mes récoltes, tout de suite et facilement, sans passer des heures au soleil sur le marché. Le prix est un peu meilleur. Mais je sais que je serai privilégié quand ils vendront, en janvier, juste avant de semer : la récolte a été très faible cette année et le prix des graines va être très élevé. La demande sera forte, et je pourrai en trouver à deux pas, sans devoir descendre en ville comme l’an dernier. En plus, les semences sont adaptées à la région : on sait déjà qu’elles seront bonnes... » 20

Les adultes bénéficiaires de la formation sont actifs et le plus souvent encadrants dans leur activité professionnelle. À ce titre ils doivent organiser ou déléguer leurs tâches quotidiennes pour dégager 3 à 4 heures par jour pour la formation Planète Urgence. Un groupe de 5 personnes est inscrit du lundi au vendredi le matin ; un autre groupe de 4 personnes l’après-midi. La première semaine a été consacrée aux généralités: organisation, prévision, planification, anticipation, formation, management, délégation, contrôle, polyvalence, reporting. La deuxième semaine a été consacrée à l’élaboration d’un plan de financement et de trésorerie avec un focus sur le Fond de Roulement et Besoin en Fond de Roulement. »

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3) Appui à l’éducation et à la formation La population de la section de Lamontagne est essentiellement composée de familles d’agriculteurs qui font le maximum pour pouvoir mettre les enfants à l’école, en vue de leur assurer un avenir meilleur. Pour 20 000 habitants, 8 000 ont moins de 14 ans. 5 000 sont scolarisés dans 35 écoles, publiques ou privées, aux niveaux inégaux et aux moyens humains et matériels très faibles.

Trois des huit établissements concernés par les jardins scolaires (7 écoles primaires et 1 maternelle) sont des centres d’éducation par le numérique.

Faute de moyens financiers suffisants, mais également, pour certaines familles, faute d’un accès satisfaisant à l’éducation pour leurs enfants, des familles envoient leurs enfants en ville, certains dans des conditions proches de la domesticité.. L’intervention de Planète Urgence, qui ne dispose pas sur place d’une compétence spécifique en pédagogie, s’est concentrée sur l’amélioration des conditions dans lesquelles les enfants de Lamontagne qui vont à l’école, peuvent accéder à de meilleures conditions de travail.

Sensibilisation des élèves à l’environnement et au maraîchage dans un des jardins scolaires de Dénoué

Une partie de cette action découle des actions développées précédemment dans ce document et sont liées à la lutte générale contre la pauvreté. Mais d’autres actions spécifiquement ciblées ont également été réalisées : • La mise en œuvre de l’Education par le Numérique : dans le cadre d’un partenariat avec OPADEL, Planète Urgence et l’organisation Haïti Futur, Planète Urgence a encadré l’équipement des 4 salles de classe réhabilités en systèmes d’éducation numérique (TBI : tableau blanc interactif) pour leur permettre de recevoir, par roulement, des classes de 1ère et 2ème année de primaire. Ce projet de TBI bénéficie directement à 740 élèves de Lamontagne.

Utilisation du tableau blanc interactif d’éducation par le numérique par un élève

• La fabrication locale et la distribution de 2 000 kits scolaires : ceux-ci sont constitués de cahiers, stylos, règles et autre petit matériel achetés et fabriqués pour partie sur place (les sacoches en tissus contenant le matériel ont été réalisées par des couturières de Lamontagne). Ces matériels ont pu être financés grâce aux dons collectés en France auprès d’entreprise soutenant ce programme de kits scolaires, déployés actuellement dans 5 pays. • La réalisation de missions de Congé Solidaire® accompagnant la formation des enseignants sur l’utilisation des outils informatiques et numériques et sur le contenu pédagogique. • La réalisation d’actions éducatives centrées sur l’alimentation et la protection de l’environnement, grâce au soutien de la Fondation BEL qui a permis d’agir pour diversifier l’alimentation des enfants par la réalisation d’un projet d’agroforesterie familiale et la réalisation de jardins potagers scolaires dont les productions (aubergines, choux, tomates) sont destinées aux enfants des écoles où se trouvent les jardins (540 élèves).

Formation des enseignants à l’utilisation des outils numériques

Témoignage Mirlène, élève en première année primaire dans l’école de Cité Lumière « Une fois par semaine, je viens au centre de Sable Cabaret avec la classe de Cité Lumière. Le chemin pour venir ici est long. Il faut traverser la rivière. Mais j’aime ce tableau, travailler avec cette ‘machine’ est vraiment mieux. »

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AXE 3 : La restauration du couvert forestier La section de Lamontagne fait face à une grave érosion et une dégradation avancée de ses sols liée à un déboisement réalisé par les populations locales pour satisfaire ses besoins en énergie, générer quelques maigres ressources issues de la vente du charbon et ouvrir de nouveaux espaces cultivables. Face à ces difficultés, Planète Urgence, en partenariat avec les associations OPADEL (dès 2010) et OJUCAH (en 2013), a fourni un accompagnement aux populations les plus défavorisées et aux familles déplacées par le lancement d’activités d’agroforesterie familiale et de reboisement. Cette approche vient compléter les deux axes précédents (reconstruction et support au développement social et économique local) dans l’optique d’améliorer durablement la vie des habitants ruraux. Les actions mises en œuvre visent à restaurer des sols souvent très pentus, aujourd’hui déboisés et érodés. La restauration du couvert forestier mise en œuvre tend, par la plantation d’essences forestières à forte valeur économique, à stopper la dégradation environnementale en faisant coïncider cette action avec les intérêts économiques futurs des villageois.

Cet appui, qui s’intègre dans des habitudes locales –le périmètre autour des maisons, le « lakou», étant souvent valorisé par des activités agricoles ou de petit élevage-, permet de soutenir l’alimentation ainsi que les revenus des familles s’installant dans les maisons construites. Cela constitue un facteur stabilisant supplémentaire pour permettre aux familles de s’installer sur place ou de disposer d’un complément en auto-alimentation ou en produits à commercialiser.

Deux approches ont ainsi été favorisées : • Un soutien aux activités d’agro-foresterie d’OPADEL, essentiellement tourné vers la fourniture d’arbres fruitiers, ainsi qu’une action de reboisement sur 2 hectares de terre qui leur appartiennent. • Un soutien aux actions de reboisement d’arbres fruitiers et de bois d’oeuvre menés par OJUCAH. 1) Le soutien aux activités d’agro-foresterie d’OPADEL L’idée était de relancer certaines productions fruitières recherchées et à haute valeur ajoutée (mandarines, oranges douces, avocats…) pour créer à moyen terme des ressources et améliorer la situation financière et alimentaire des familles de paysans. L’objectif qui a été fixé, pour ce volet, était de produire - sur 18 mois – 18 500 plantules de qualité, destinées à être distribuées, contre le paiement d’un prix abordable, aux familles de paysans les plus défavorisés. Au total, 925 familles étaient ciblées. Pour ce faire, la pépinière d’OPADEL a été financée pendant plus d’un an, afin de regrouper et de produire les plantules prévues. Planète Urgence a soutenu financièrement à la fois l’activité de la pépinière, les formations des paysans, les réunions de sensibilisation à destination des paysans, des groupements de la zone, ainsi que les achats de semences et d’outils. Des postes au sein d’OPADEL ont été créés, avec la rémunération de 6 salariés à plein temps ainsi que l’implication de travailleurs saisonniers pour s’occuper des activités concernant les arbres fruitiers. Les familles, notamment celles participant au volet construction, se sont vues proposer d’intégrer les activités de maraîchage et d’agro-foresterie dans le périmètre de leur parcelle personnelle. 22

Pépinière d’OPADEL Plus de 22 000 plants y furent produits durant le projet Le soutien à la création et à la gestion d’une pépinière a permis d’atteindre les objectifs qui avaient été fixés. En plus de la création de 6 emplois au sein d’OPADEL, 18 990 plantules (café, cacaoyer, avocatiers….), ont été achetées à prix réduit par 925 familles de Lamontagne. Sachant qu’une famille moyenne de Lamontagne est composée de 5 enfants et d’un ou deux parents, cette distribution à coûts adaptés a donc touché indirectement plus de 4 500 personnes (estimation basse). On estime à une centaine de tonnes la production future de fruits et de café pouvant être produite par les plants mis en terre. En outre, sur les 50 propriétaires de maisons construites lors de la 1ère phase du projet, 25 se sont impliqués dans le reboisement de leur parcelle familiale. Ces arbres donneront aux paysans une source de production et de revenus dans un délai de trois à quatre ans après leur mise en terre. Enfin, des formations sur les activités de maraîchage et d’agroforesterie ont été dispensées et des filières économiques ont été relancées et stimulées, telles que la production de café, en lien avec l’activité du centre C.A.F.E. qui intègre une activité d’achat, de décorticage, de stockage et de revente du café.

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Objectifs de plantations

Plantations réalisées

Variété

Quantité

Quantité

Citrus, agrumes

3 400

2 211

Avocatier

2 400

1 669

Manguier

2 400

1 425

Papayer

2 400

1 116

Arbres à pain

2 400

1 109

Cacao

2 400

753

Caféyier

3 100

10 707

Total

18 500

18 990

A l’origine, l’idée du projet consistait à favoriser le développement de pépinières dans le cadre d’une activité économique pouvant assurer à OPADEL des revenus conséquents sur la durée tout en favorisant la poursuite des plantations. Cependant, cela n’a pas été réellement réalisé du fait d’un volume des ventes ne pouvant à lui seul rendre autonome la pépinière. Malgré tout, cette activité d’agroforesterie familiale a été un support pour la sensibilisation à la protection de l’environnement et à la reconstitution du couvert forestier ; près de 1 000 personnes auront en effet été impliqués dans le reboisement des parcelles familiales.

Témoignage Guito Valescot, bénéficiaire «  Je suis l’un des plus anciens membres d’OPADEL. Et dès 2004, j’ai participé aux activités lancées par cette équipe de jeunes de Lamontagne. A cette époque, et au fils des années, j’ai fait greffer dans mon jardin, près de la maison, des mandariniers, des manguiers. Et j’ai planté un peu de caféiers. Au moment du tremblement de terre, ma maison a été très dégradée, et OPADEL a proposé que Planète Urgence la répare. Cela a représenté un gros travail, mais finalement, elle a été consolidée correctement. J’ai acheté une dizaine de plantules d’avocats, d’arbre à pain et de mandariniers. Je vends, je mange et je donne les récoltes de mes premiers arbres greffés, et on me dit que les mandarines sont les meilleures de la région... »

Ces efforts de sensibilisation viennent compléter les démarches engagées et précédemment décrites avec les écoles communautaires autour des jardins scolaires dans 7 écoles (cf. Axe 2 - Développement social et économique local, p.17), et qui bénéficient à l’alimentation des écoliers et qui servent d’outils pédagogiques sur la protection de l’environnement. Enfin, le choix d’équiper les maisons construites de citernes et de gouttières pour récupérer les eaux pluviales contribue à pérenniser et valoriser ces jardins familiaux en accord avec l’axe construction développée dans nos projets (cf Axe 1 Construction, page 10). Outre ces activités d’agro-foresterie, OPADEL, soutenue par Planète Urgence, a développé une action de reboisement sur 2 hectares de terres dégradées acquises par l’association. L’objectif de cette action était de démontrer la possibilité de restaurer ces terres laissées à l’abandon tout en protégeant une source de l’érosion progressive des pans de la colline.

2) Un soutien aux actions de reboisement d’OJUCAH Au cours de l’année 2013, Planète Urgence a choisi d’apporter son appui à l’association haïtienne OJUCAH implanté dans la commune de Lavial, non loin de Lamontagne, qui est une zone extrêmement montagneuse aux sols lessivés . Le projet proposé par OJUCAH consistait à lutter contre l’érosion des sols et à favoriser le développement économique local par la plantation de 50 000 arbres fruitiers et forestiers. Le programme de reforestation en Haïti s’applique à mettre en place une couverture végétale, à même de lutter contre l’érosion mais aussi de fournir des avantages aux bénéficiaires (alimentation , bois d’oeuvre et bois de chauffe) de manière durable. Il développe, pour les familles bénéficiaires, des activités de sensibilisation et de formation aux techniques

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de production de plantules en pépinière, de plantation sur des terres dégradées ou abandonnées, et de protection des parcelles reboisées. Le projet s’est déroulé entre fin 2012 et le premier trimestre 2013. Il a débuté, comme prévu, en commençant par une phase d’évaluation et de formation suivie d’actions de sensibilisation et de formation des propriétaires en tant que bénéficiaires directs. En plus de ces derniers, ce sont aussi les 1 560 habitants de Lavial qui bénéficient indirectement des retombées positives du projet.

Organisation des Jeunes Universitaires de Carrefour pour l’Avancement d’Haïti (OJUCAH) Ancrée dans la région du Sud Est d’Haïti depuis 1998, OJUCAH est une association locale qui favorise le développement économique et environnemental de Lavial. Avec un total de 1 200 membres à son actif, OJUCAH met en œuvre des projets visant à stimuler le développement communautaire principalement par la relance des activités économiques des populations locales et par la protection de l’environnement. Dans l’optique de coupler reforestation et développement économique des zones rurales, l’association se donne pour mission de « travailler pour l’amélioration des conditions de vie de la masse la plus défavorisée des montagnes haïtiennes en y implantant des travaux de développement durable ». OJUCAH a déjà mené à bien de nombreux projets tels que la construction d’une école communautaire, la construction de 100 latrines familiales et l’organisation de temps de formations et de sensibilisations des thèmes variés (techniques de conservation et de protection des sols).

Les semences nécessaires ont été achetées ou produites localement, puis semées et placées en pépinière. Deux pépinières de 25 000 plantules chacune ont été créées et un suivi a été réalisé pour remplacer les jeunes plants qui n’auraient pas poussé, notamment les noix de cajou qui n’ont pas germé. Après 3 mois en pépinière, les arbres ont été mis en terre dans les parcelles des bénéficiaires. Au total, ce sont 57 023 arbres de différentes espèces qui ont été plantés sur 9 parcelles appartenant à autant de familles : manguiers, acacias, cèdres, eucalyptus, casuarina, bayahonde, chêne, acajou et noix. Ces arbres ont été plantés de façon dense sur des pentes très dégradées et, fin 2013, ont correctement repris. L’objectif du projet de reboisement de la section rurale de Lavial a été, à budget constant, dépassé de 7 023 arbres.

Témoignage Wilner Boyer, coordonnateur d’Ojucah « Lavial est une zone difficile d’accès où l’état des mornes est catastrophique. OJUCAH a donc décidé de lancer des activités de toutes sortes (adduction d’eau, écoles, route et reboisement massif) pour redonner vie à ce secteur. Les paysans partenaires s’engagent non seulement à replanter des milliers d’arbres sur des parcelles souvent abandonnées, mais aussi à contribuer à leur survie en intervenant par exemple pour maintenir une discipline stricte afin d’empêcher les bêtes de dévorer les plantules. Le reboisement est une action programmée, avec PU, avec OIM, et de long terme. D’ici quelques années, la zone sera redevenue verdoyante et produira des fruits et du bois de construction. »

Plantations OJUCAH 2013 à Lavial Fruitier

Forestier TOTAL

Propriétaire

Noix de Cajou

Maurice Pierre Mertis Louis Charles Duthon

35

Michel Belizna

450

Cassia

Accacia

Casuarina

1 475

1 257

1 366

1 900

2 600

1 750

1 750

Gisselène Boucard Jean Baptiste Anius

3 560

4 098 1 050

850

8 185 1 560

3 387 6 860

2 140

1 835

3 975

350

1 115

1 775

648

1 190

2 180

2 100

1 870

1 265

125

Jean Philippe Ritelia

3 600

3 500

1 200

Jean Baptiste Marcel

4 295

2 635

1 325

15 510

16 119

12 321

24

Capable

1 550

Jean Fils Anicet

485

Leucena

1 377

Louissant Carmelais

9 parcelles

Bayaonde

3 888 1 345

8 685 9 690 8 255

6 190

3 493

2 905

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

57 023

3) Impact des projets de reboisement

de Lamontagne. Les citrus ont, pour la plupart, servi de portegreffes à des variétés d’agrumes de haute valeur ajoutée (mandarines, pamplemousses, citrons, oranges douces). Ces plants d’arbres fruitiers, mis en terre dans les parcelles des familles entre 2010 et 2011, pourront produire d’ici 3 à 4 ans près de 150 tonnes de fruits (si on considère une production moyenne de 20 kg par arbre) et jusqu’à 100 tonnes de café et permettront alors de dégager des sources de revenus ou d’alimentation complémentaires.

Le premier impact des activités d’OPADEL et d’OJUCAH a été de redonner une valeur à l’arbre. Les paysans ont, peu à peu, au fil des années considéré l’arbre comme un revenu potentiel à court terme, notamment sous forme de charbon de bois. La réussite des expériences de reboisement montre que c’est une action nécessaire possible et positive. Plusieurs experts, notamment du CIRAD, ont salué la performance d’OPADEL dans ce programme, à la fois sur la méthode de plantation dans les parcelles, mais aussi dans le choix des espèces. Cela a donné une forte légitimité aux acteurs du groupement (agronomes, techniciens…) et validé leur démarche.

La pépinière, impeccablement tenue et entretenue a, en plus de son vrai rôle de production et de développement de plantules, attiré de nombreux visiteurs tels que des politiques (députés, sénateurs, délégué départemental), des experts et des techniciens (ministère, experts du Cirad) et enfin la presse (Le Nouvelliste, plusieurs journalistes canadiens). Cette activité a eu un fort impact pédagogique.

Le café a été parmi les espèces les plus demandées à Lamontagne, et son redéploiement participe non seulement à un espoir de relance économique future, mais aussi à une forte action de reboisement indirecte : le café pousse en effet sous un couvert végétal fournissant l’ombrage et sa présence doit donc s’accompagner de ces grands arbres.

A Lavial, les propriétaires de parcelles, qui avaient plus ou moins abandonné l’entretien de leurs terres, ont repris en main ces parcelles. La technique est particulière, OJUCAH ayant choisi des plantations très denses, à la fois pour garantir une bonne proportion de reprises et pour multiplier les espèces sur les mêmes pentes.

Si le café et le cacao ont un impact direct limité sur l’alimentation familiale (les productions seront partiellement vendues), 7 530 arbres fruitiers ont été plantés et sont maintenant en cours de croissance dans les jardins familiaux

Le volet agro-foresterie a donc été un élément donnant au projet une grande visibilité et un impact fort. Depal

Centre d’Activité, de Formation et d’Échanges (CAFÉ)

Maisons « Un toit un avenir » - phase II (en cours)

x x

Duvivier

Pépinières

x

Site de reforestation 5

2

2

2

11 7

4

Bas Fond

5

3

Janette

4

Lavial

JACMEL

2

Cascarre

Bois Charlot

Lacour

Espaces scolaires

x

2

1

1

Maisons « Un toit un avenir » - phase I

x

13

Laratte

5

Langlade

Lacroix 16

2

1

6

1

4

15

Piton

2

1

Samedi Nikola Laporte

Zayi 2

4

2

3

Terre Rouge 19

6

Jacquet 3

Corail

Bello 6

1

8

3

3

1

Sable Cabaret

Bambou

Colin

Denoue

Lanmy Frontal 10

7 29

9

Grefye

1

Jeanot

Francion 1

Mabwote

1

1

3

2

La France 1

3

Belotes 9

4

1

Ka Mambo

Terre Noire

2

Lamontagne

Bellevue 4

4

Baguette 3

1

La Couline 2

0

1

2

km

N

Carte des actions de Planète Urgence en Haïti RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

25

Conclusion Il est difficile de mesurer les impacts des activités mises en œuvre alors que certaines d’entre elles (constructions en MPC, accompagnement du CAFE) ne sont pas même terminées. Néanmoins, un premier bilan peut être établi après 3 ans d’intervention concernant les résultats obtenus. En matière de construction, 310 familles auront bénéficié d’un appui direct pour vivre dans un habitat décent ; 110 de ces familles disposant d’un habitat neuf intégrant les contraintes anticycloniques et para-sismiques ; dotées d’un point d’éclairage solaire, d’un système de récupération des eaux pluviales, d’une latrine et pour certaines de mobilier, elles traduisent la volonté d’accompagner les familles au-delà de l’urgence, dans la construction de leur futur. L’innovation portée par la technologie des matériaux en pierres confinées (MPC) constitue une solution qui semble aujourd’hui pertinente et peut s’inscrire dans le panel de solutions à proposer aux artisans et aux populations locales. Valorisant des matériaux locaux, impliquant les familles et accessible techniquement aux artisans locaux, elle constitue également une technologie pouvant servir de base au développement d’activités et d’emplois locaux. La durée courte du projet « Un toit, un avenir- phase 2 » n’a pas permis de travailler suffisamment dans cette direction pour accompagner OPADEL dans la mise en place d’un « business model » autonome et viable, et permettre de travailler à la conception de produits en fil de fer tressé différents répondant à d’autres utilisations. C’est un réel enjeu que de pouvoir maintenant trouver les moyens nécessaires permettant de pérenniser les ateliers et pousser plus loin le travail de développement de la technologie MPC et de sa diffusion en Haïti. Les espaces d’accès à la culture, culturels et les espaces d’enseignement ou de formation (écoles, bibliothèque informatisée, salle de formation, équipements d’enseignement par le numérique) sont largement utilisés par les villageois, témoignant des attentes fortes des habitants comme de la certitude que c’est par le savoir que pourra s’améliorer leur futur. Les actions réalisées en matière de développement économique demanderont plus de temps pour témoigner de leurs effets. Si les ateliers de production de matériaux constructifs ou les banques de semences gérées par OPADEL au sein du Centre d’Activités de Formation et d’Echanges (CAFE) fonctionnent bien, aucune certitude n’existe aujourd’hui quant à la capacité d’OPADEL à conduire de façon autonome la gestion et les démarches commerciales qui permettront aux dispositifs d’être pérennes une fois les phases d’accompagnement terminées. L’impulsion est donné, mais cette dimension s’inscrit d’accompagnement s’inscrit dans une durée longue, que les financements actuellement acquis ne permettent pas de décrire. Néanmoins, même sans être à plein régime, les services fournis par le CAFE apportent dès aujourd’hui un accès sécurisé aux semences et à des produits de première nécessité qui participent au mouvement de désenclavement général de Lamontagne. En effet, la dynamique impulsée a contribué à attirer l’attention 26

des services de l’Etat et d’autres acteurs sur ce territoire. Des services ou aménagements nouveaux y ont été réalisés : la construction d’un lycée à Colin, le bétonnage de portions de route, la pose de lampadaires solaires sur le principal axe routier, ou la construction d’un pont pour désenclaver la zone… Cet effort d’infrastructure fût complété par un nombre important de formations (en constructions, en agriculture, en comptabilitégestion…), réalisées par des experts locaux, internationaux et des volontaires en Congé Solidaire®, permettant un important transfert de savoir faire. Sans pouvoir clairement dire aujourd’hui, avec si peu de recul dans le temps, les impacts à long terme des savoirs transmis dans les pratiques quotidiennes des acteurs, on observe des changements notables dans diverses techniques : le greffage devient de plus en plus pratiqué pour améliorer la production fruitière ; les maçons appliquent des méthodes constructives sécurisantes, y compris en dehors des projets ; les paysans ont une meilleure connaissances et un meilleur respect de la couverture végétale. Un travail très important reste à réaliser pour assurer le développement autonome des activités de reboisement. 70.000 arbres ont été plantés, pour l’essentiel achetés par les villageois. Mais la dynamique locale reste faible et doit être accompagnée pour poursuivre la sensibilisation à la préservation de l’environnement et faire entrer l’acte de plantation dans les pratiques. Planter suppose une confiance en l’avenir peu favorisée, il est vrai, par l’urgence quotidienne. Néanmoins, la demande très forte des paysans pour des plants de café constitue un axe fort d’action pour agir sur la restauration du couvert forestier (d’autant que le plant de café ont besoin d’ombre, et donc d’autres arbres pour grandir) et fournir aux villageois des revenus conséquents, tout en cherchant à conserver une partie de la valeur ajoutée sur place en y réalisant les phases simples de transformation (décorticage…). Le travail réalisé entre 2010 et début 2014, est donc porteur d’espoir. Il a souligné l’engagement fort dont font preuve les habitants et les acteurs locaux (organisations paysannes, groupements de femmes), qui se sont extrêmement impliqués dans l’ensemble des activités réalisées et ont largement contribué à leur réussite. Il a également souligné que même dans une zone rurale isolée, l’innovation et la culture avaient leur place et, une fois dépassés les blocages initiaux, participaient à mobiliser les énergies et à améliorer le regard porté par les habitants sur eux même. La demande très forte pour l’enseignement par le numérique ou l’appropriation elle aussi très forte des maisons MPC par leurs propriétaires en témoignent, de même que la fréquentation des bibliothèques ou la participation aux différentes sessions de formation (missions de congés solidaires en comptabilité-gestion, formations agricoles…). Les différentes actions engagées ont directement bénéficié à environ 17 750 personnes8. Un résultat important mais limité face aux importants besoins encore existants, qui ne pourront trouver une réponse que par le travail réalisé dans le temps par les acteurs locaux, renforcés dans leur action quotidienne des savoirs et moyens transmis lors des différents projets. L’action de Planète Urgence en Haïti se poursuit à leur côté.

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

Rapport Financier Dépenses (en K€) 2010

2011

2012

2013

Total

Commentaires

Lancement & accompagnement

223

33

1

-

257

Projet achevé

« Un toit, un avenir » - Phase 1

129

171

282

2

584

Projet achevé

« Un toit, un avenir » - Phase 2

-

-

215

472

687

Fin prévue : 1er semestre 2014

Centre d’Activité, de Formation et d’Échange (C.A.F.E.)

-

20

134

148

302

Fin prévue : 4er trimestre 2014

Éducation numérique

-

-

12

61

73

Fin prévue : 1er semestre 2014

Plantations OJUCAH

-

-

-

25

25

Projet achevé

Missions de Congé Solidaire®

-

10

27

21

58

Récurrent tous les ans

311*

311

1 040

2 297

Produits Constatés d’Avance Total

352

234

671

* Les 311 k€ de Produits Constatés d’Avance correspondent à des fonds versés par nos bailleurs pour nos projets en Haïti et qui n’ont pas encore été dépensés au 31 décembre 2013. Ces fonds sont donc réservés à cette destination dans nos comptes 2013, et seront dépensés en 2014 pour la poursuite de ces programmes.

Recettes-bailleurs (en K€) 2010

2011

2012

ALMA consulting

X

X

BIC (n1)

X

Autres donateurs & Fonds PU

X

2013

(K€)

Projets financés

X

211

Lancement & accompagnement « Un toit, un avenir » - Phase 1

X

X

150

Lancement & accompagnement « Un toit, un avenir » - Phase 1

X

X

148

Lancement & accompagnement « Un toit, un avenir » - Phase 1

Fondation de France (n1)

X

X

264

« Un toit, un avenir » - Phase 1

Fondation Abbé Pierre (n1)

X

X

70

« Un toit, un avenir » - Phase 1

X

BIC (n2)

X

X

91

Éducation numérique

BIC (n3)

X

X

61

C.A.F.E.

Fondation de France (n2)

X

X

50

C.A.F.E.

Fondation Daniel & Nina Carasso

X

X

266

C.A.F.E.

Fondation Abbé Pierre (n2, n3, n4)

X

X

410

« Un toit, un avenir » - Phase 2

Secours Catholique - Caritas France

X

X

474

« Un toit, un avenir » - Phase 2

X

X

102

Tous projets

Autres donateurs & Fonds PU Total

27

X

X

2 297

RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

Notes : 1- Docteur. Agro-économiste et géographe aménagiste : http://www.alterpresse.org/article.php3?id_article=2247 2- Rapport sur le Développement Humain, PNUD, 2013 3- Le Cluster CCCM&Abris / Office International des Migrations (OIM) 4- Recensement réalisé par le CASEC, autorité administrative de section communale. 5- Ces abris transitoires consistent en des constructions de 21m² disposant d’une chape en ciment, et d’une ossature en bois traité (importé). La toiture est composée de tôles épaisses, plus durables que les tôles locales, dont la fixation est renforcée par des clous vrillés. La structure comporte des éléments anticycloniques (surfixation des charpentes au moyen d’attaches métalliques, contreventements). Médair d’ailleurs est ré-intervenue à plusieurs reprises pour renforcer ces éléments et a terminé ensuite plusieurs dizaines d’abris, à partir du modèle de Planète Urgence. 6- A&D avait été mandaté par la Fondation de France comme expert en charge du suivi et de l’évaluation des projets de constructions mis en œuvre en Haïti avec son soutien financier. L’association A&D avait donc dans ce cadre évalué la phase 1 de notre projet de construction. 7- 84 artisans au total, dont : 20 fabriquent les gabions, 24 posent les gabions, 24 réalisent la maçonnerie et les enduits, 8 fabriquent et posent les charpentes et 9 sont impliqués dans les réparations. 8- Somme des bénéficiaires ou participants aux différentes actions ; une même personne ayant pu participer ou bénéficier de différentes actions menées.

Directeur de la publication : Mickaël Berrebi Textes rédigés par Philippe Petit et Mickaël Berrebi avec l’appui actif de Pauline Lhéritier Laffargue Conception et réalisation : Julien Genin Crédits photos : Planète Urgence - Philippe Petit RAPPORT DE MISE EN ŒUVRE ET D’IMPACT DU PROJET « UN TOIT, UN AVENIR » EN HAÏTI, RÉGION DE JACMEL - 2010-2013

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