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Evaluation de la production spontanée du langage oral et de l’activité sémantique du récit chez l’enfant d’âge préscolaire Marie-Thérèse Le Normand

Résumé Dans cet article, nous illustrerons les principaux fondements et enjeux de la démarche évaluative chez le jeune enfant en présentant quelques données nouvelles à la méthode d’évaluation de la production spontanée du langage oral accompagnant le jeu chez l’enfant de 24 à 48 mois et l’activité sémantique du récit utilisant un livre d’images sans texte (récit de la grenouille, Mayer, 1969) chez l’enfant de 4 à 6 ans. L’objectif est de décrire de manière précise le développement de l'acquisition du langage oral des jeunes enfants dans sa composante dynamique, c'est-à-dire son rythme, sa régularité, ses variations et de prendre en compte l’organisation linguistique liée au système de traitement de la parole et du langage particulièrement dans sa composante lexicale et morphosyntaxique. Les résultats montrent que pour une durée de 20 minutes, les performances moyennes de la productivité, de la diversité lexicale et de la maturité syntaxique (LME) évoluent de manière très significative chez les enfants entre 24 et 33 mois et qu’elles se stabilisent après surtout à partir de 36 mois. L’évaluation précoce de la production du lexique, de la morphologie grammaticale et de la représentation sémantique des récits devrait permettre au praticien de définir des objectifs d’éducation mais de repérer aussi les retards d’acquisition du langage et des asynchronies de développement qui peuvent exister chez certains enfants. Mots clés : morphosyntaxe, évaluation, acquisition du langage, lexique, récit

Rééducation Orthophonique - N° 231 - septembre 2007

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Assessment of the spontaneous production of oral language and of the semantic activity of story-telling in the preschool child. Abstract Main fundamental issues of child language assessment will be presented in this paper. New data derived from naturalistic assessments of language production accompany symbolic play in young normal children (2-4 years old) and from a wordless picture book (Frog, where are you, Mayer, 1969) in children aged 4 to 6 will also be provided. The aim of such assessment is to describe the development of child spoken language acquisition in its dynamic component, i.e its rhythm, its regularities, its variations and to take into account lexical and morphosyntactic processing. The results show that mean scores of measures of productivity, lexical diversity and grammatical maturity (MLU) significantly increase in young children between ages 24 to 33 months and stabilize beyond age 36 months, for a 20 minutes play session. Early assessment of lexical production, grammatical morphology and semantic representation of narratives should allow the practitioner to clearly define educational goals and to identify late talkers and developmental asynchronies suspected in some children. Key Words : morphosyntax, assessment, language acquisition, lexicon, narratives

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Marie-Thérèse LE NORMAND Directeur de recherche INSERM Service d’audiophonologie, de génétique médicale et de neurologie pédiatrique Hôpital Robert Debré 18 Boulevard Sérurier 75935 Paris Courriel : [email protected]

L

a pratique orthophonique s’orientant actuellement vers une prise en charge très précoce, la nécessité d’outils adaptés à l’évaluation du langage oral d’enfants d’âge pré-scolaire s’impose de plus en plus. Il existe plusieurs façons d'évaluer le langage chez le tout jeune enfant : l’adaptation française du compte-rendu parental Bates-McArthur (Fenson et coll 1994, voir Kern, 2003, Bovet et coll, 2005 pour évaluer les premiers mots 1), l’administration de tests standardisés (Chevrie-Muller et coll, 1997, Piérart et coll, 2004 ; Coquet et coll, à paraître) et l’observation dite « naturelle », permettant des relevés exhaustifs de comportements pour en faire ensuite des analyses verbales et non verbales (Le Normand, 1986, 1991). Dans cet article, nous illustrerons les principaux fondements et enjeux de la démarche évaluative chez le jeune enfant en présentant quelques données nouvelles à la méthode d’évaluation de la production du langage oral accompagnant le jeu chez l’enfant de 24 à 48 mois ainsi qu’à celle de l’activité du récit utilisant un livre d’images sans texte (récit de la grenouille, Mayer, 1969) chez l’enfant de 4 à 6 ans.

♦ Méthode d’évaluation du langage oral accompagnant le jeu (Le Normand, 1986, 1991) Cette méthode d’observation directe du comportement permet de déterminer comment les enfants s'engagent dans des interactions effectives avec l'adulte, d’évaluer leurs capacités cognitives et symboliques, puis d'apprécier la place qu'occupe le langage au sein de ces interactions et dans le jeu symbolique. 1. La production des premiers mots de l’enfant se réfère à des contextes familiers : personnes et objets avec lequel il est le plus souvent en contact, et qui font partie de son univers familier : membres de sa famille, animaux, nourriture, boissons et jouets. Il a été estimé, dans des études à grande échelle qu’en moyenne un enfant produit 10 mots à 13 mois, 50 mots à 17 mois, plus de 300 mots à 24 mois. La croissance du vocabulaire serait critique entre 16 et 20 mois, période de l’explosion lexicale des 50 mots qui s’étendrait sur une période de 4 à 5 mois.

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Une telle démarche d’évaluation a comme objectif de décrire précisément le développement de l'acquisition du langage oral des jeunes enfants dans sa composante dynamique, c'est-à-dire son rythme, sa régularité, ses variations individuelles et de prendre en compte l’organisation linguistique liée au système de traitement de la parole et du langage particulièrement dans sa composante lexicale et morphosyntaxique.

Matériel Le matériel est standardisé. Il s’agit de la maison de famille « Fisher Price », constitué de 4 pièces, 5 personnages évoquant des figurines familiales (2 adultes, 2 enfants, un bébé), un chien, 11 éléments appartenant au mobilier (2 tables, 4 chaises, 2 fauteuils, et 3 lits), et plusieurs éléments figuratifs/miniatures (un escalier avec porte mobile, un garage avec porte coulissante, une sonnette à la porte d’entrée, un cheval à bascule, une poussette, deux voitures) qui sont les mêmes pour chaque enfant. Ainsi, le vocabulaire utilisé par les enfants sera relativement uniforme. Le contexte de la maison « Fisher Price » se veut un support familier, grâce à une palette d’objets et d’espaces facilement identifiables, pour recueillir et analyser du langage spontané, dans une situation naturelle. En effet, pour évaluer la production du langage du jeune enfant, le meilleur moyen reste encore de le laisser parler. Ainsi, la situation de jeu, familière aux jeunes enfants, favorise la détente, et semble donc être un cadre d'observation des plus appropriés pour laisser s'exprimer la spontanéité de l'enfant. Il peut s’exprimer sans contrainte, commenter ses actes, raconter des événements vécus ou imaginaires, initier toutes sortes d'actions et de sentiments attribuées à des personnages en séquences isolées comme en scénarios complexes (scène du repas, du réveil, du coucher, de la promenade).

Procédure d’évaluation et recueil des données La séance du jeu, d’une durée de 20 à 30 minutes, est enregistrée sous forme d’un format vidéo ou audio, ce qui permet d'obtenir les quelques 50 énoncés généralement nécessaires pour toute analyse statistique fiable (Rondal et coll, 1985, 1997, 1999). Ainsi, pour certains enfants inhibés, pour lesquels le nombre de productions recueillies lors de la première évaluation est trop faible, une seconde séance s’avère nécessaire. Celle-ci, en mettant l’enfant dans une situation déjà vécue, permet souvent d’obtenir plus de productions. Le recueil a lieu dans le milieu éducatif de l'enfant c'est-à-dire à domicile, dans sa crèche ou son école. Les sessions se déroulent de façon identique d’une séance à l’autre : l’enfant est assis devant une table à sa hauteur où sont disposés la maison ouverte et

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les jouets, il peut jouer librement avec le matériel proposé. L’adulte assis à ses côtés, doit se comporter comme un partenaire de jeu bienveillant. Il répond aux requêtes verbales et non verbales de l’enfant, l’accompagne dans son jeu par des interactions verbales ou gestuelles, le laisse parler autant que possible sans intrusion et l’incite à parler, s’il reste silencieux, sans lui poser de questions mais en l’encourageant par l’utilisation au plus près du contexte de jeu. Constitution des corpus, transcription des données et procédures d’analyse L’enregistrement vidéo de la scène de jeu est nécessaire pour pouvoir précisément observer les comportements et noter les productions verbales de l’enfant. En effet, pour réaliser une transcription de qualité des énoncés, il faut pouvoir visionner et réécouter l’enregistrement car une transcription en temps réel est quasiment impossible, sauf pour les enfants parlant très peu. Lorsque les enfants sont peu audibles ou peu compréhensibles, la vidéo se révèle être un support important pour réaliser un décodage correct. La saisie et le traitement des productions linguistiques des enfants sont effectués par ordinateur. La transcription de l'enregistrement sur bandes vidéo, respecte les particularités phonologiques du discours de l’enfant par l’utilisation de l’A.P.I. (Alphabet Phonétique International) dans le cas de productions très déformées. Le discours des enfants a été segmenté en énoncés selon certains critères permettant le traitement automatisé des transcriptions et l’analyse des corpus par divers codeurs conformément au format CHAT (Codes for Human Analysis of Transcripts) qui est l'outil standard du système CHILDES (Child Language Data Exchange System) (Mc Whinney, 2000) ou « Système d'Échange de Données sur le Langage de l'Enfant ». Ce système établit des règles de transcription des données afin que celles-ci soient accessibles à tous les chercheurs, linguistes, intervenants, travaillant sur le langage enfantin. Lorsque les mots sont trop déformés, il est nécessaire de réaliser une transcription phonétique. Cependant, pour pouvoir effectuer une analyse statistique du développement lexical et/ou syntaxique de l’enfant, nous avons dû compléter la transcription phonétique, qui ne permet pas de comprendre ce que l’enfant a voulu dire, par une indication graphémique correspondant au mot attendu, et appelée forme « redressée ». Lorsque les productions de l’enfant sont de bonne qualité, on réalise directement une transcription graphémique sans intermédiaire phonologique, en redressant de façon rigoureuse certains mots de l’enfant, si besoin est, tout en étant prudent à ne pas « améliorer » le langage de l’enfant lors de la transcription.

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Le logiciel Clan Pour effectuer les analyses des productions orales recueillies, nous avons utilisé les outils du CHILDES (http://childes.psy.cmu.edu/). Ces outils permettent de manipuler et d'étiqueter le langage oral : il donne entre autres la possibilité de faire des alignements audio et vidéo avec les transcriptions (conformes aux conventions de transcription CHAT). Il est ainsi possible de réaliser des relevés exhaustifs de tous les types de mots de la langue cible en utilisant le code du CHILDES (Child Language Data Exchange System = Système d’Echanges des Données du Langage chez l’Enfant) qui ont révolutionné depuis 1981 les opérations de transcription, de codage, de stockage, d’analyse automatique, et de transfert et partage des données (McWhinney, 2000 ; Parisse et Le Normand, 2000b). Indices de productivité, de diversité lexicale et de maturité syntaxique A titre d’illustration, nous rapportons ici dans le tableau 1 quelques résultats de notre base de données incluant des indices de productivité, de diversité lexicale et de maturité syntaxique en moyenne et en écart-type. Ces indices sont utilisables par le clinicien pour repérer précocement un retard de langage. Le logiciel peut ainsi calculer : • le nombre total d'énoncés • le nombre total de mots (nombre d’occurrences) • le nombre de mots différents dans les différentes catégories syntaxiques (mot-type, indice de diversité lexicale ou de richesse du vocabulaire) • la LME (Longueur Moyenne des Énoncés, indice de maturité syntaxique qui se calcule en divisant le nombre total de mots sur le nombre d’énoncés)

Tableau 1 : Moyenne et écart-type des indices de productivité, de diversité lexicale et de maturité syntaxique en fonction de l’âge On constate que pour une durée de 20 minutes, les performances moyennes en productivité, en diversité lexicale et en maturité syntaxique des enfants évo-

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luent de manière très significative entre 24 et 33 mois et qu’elles se stabilisent après surtout à partir de 36 mois. Plus précisément, la production d’énoncés et des verbes se stabilise à partir de 33 mois. Les mots grammaticaux composés des déterminants, des prépositions et des pronoms se stabilisent à partir de 36 mois. La production d’occurrences et les mots types se stabilisent à partir de 39 mois. La base de données lexicales comprend 108,675 mots recueillis avec le contexte de la maison Fisher Price. Le détail de l’analyse de ces résultats est rapporté dans Parisse et Le Normand, 2006 et Le Normand et coll, 2007. Comment l’enfant maîtrise-t-il les contraintes sémantiques et syntaxiques qui président à l’organisation séquentielle des énoncés ? Pour répondre à cette question de l’assemblage des mots, nous postulons comme beaucoup d’autres auteurs deux mécanismes d’apprentissage : (1) un mécanisme analytique qui permettrait aux enfants de décomposer la parole entendue (l’input) en unités pertinentes pour construire des représentations adéquates, (2) un mécanisme holistique qui permettrait à l’enfant de se souvenir et de reproduire de larges segments de type mots ou phrases bien avant que ceuxci ne soient analysés. A partir de 20 mois, qui correspond au stade moyen des 50 mots, les assemblages de mots se mettent en place très rapidement. La question ici est celle des relations formes - fonctions et particulièrement celle de l’organisation des mots selon leur fonction. L’agencement des premiers mots ne semble donc pas être laissé au hasard. Très vite l’enfant repère un petit nombre de formes verbales dans le langage de l’adulte et les utilise dans ses propres productions. Le tableau 2 indique la fréquence très élevée de l’omission des catégories syntaxiques dans le système nominal (déterminants, prépositions, adjectifs possessifs ou démonstratifs) et dans le système verbal (pronoms sujet) chez les sujets de 24 à 30 mois.

Tableau 2 Pourcentage d’enfants qui omettent les catégories syntaxiques dans le système verbal en fonction de l’âge

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Quelle est la nature de ces omissions ? Radford (1990) avance l’hypothèse qu’au début, la grammaire de l’enfant est limitée aux catégories lexicales, le système grammatical/fonctionnel étant soumis à une maturation plus tardive. Wexler (1994) montre aussi qu’il existe un stade dans le développement linguistique du jeune enfant, au cours duquel celui-ci n’utilise pas forcément les marques de temps dans des phrases principales bien qu’il connaisse les propriétés de la flexion des verbes. Il rapporte également que dans d’autres langues, en français (Pierce, 1992) et en allemand (Poeppel et Wexler, 1993), mais aussi en danois, en norvégien, en suédois notamment, le jeune enfant de 2 ans utilise parfois les formes infinitives des verbes alors que des formes fléchies sont attendues. En outre, dans ces contextes grammaticaux et pour une même phrase, des infinitifs peuvent être, selon lui, présents ou absents, donc optionnels. Ces infinitifs ont été nommés infinitifs racines (root infinitives) par Rizzi (1994) et infinitifs facultatifs (optional infinitives) par Wexler (1994). Cette période d’acquisition caractérisée par la possibilité de produire des énoncés déclaratifs à l’infinitif se retrouve aussi dans un grand nombre de langues comme l’anglais, l’allemand, le néerlandais, le suédois, le danois et le norvégien. Le phénomène est apparemment quasi inexistant dans les langues permettant l’omission libre du sujet, comme l’italien, l’espagnol et le catalan (Guasti, 1994 ; Sano et Hyams, 1994) ou le japonais (Sano, 1996). Chez les enfants francophones, il est difficile de repérer clairement cette période de l’infinitif racine et facultatif à cause de l’homophonie « é »/« er » que l’on retrouve dans ces verbes du premier groupe qui sont très fréquemment utilisés par l’enfant francophone au début de la construction de la formation du verbe. Statut morphologique de l’article La chronologie approximative de l’acquisition de l’article dans le système du nom chez l’enfant se réalise en moyenne dans le sens de la maîtrise de l’accord (masculin et féminin) et du nombre (singulier et pluriel) sur les articles indéfinis vers 3 ans avant de porter sur celui des articles définis vers 3 ans et demi. Peu d’études ont analysé systématiquement le « statut » morphologique des articles définis dans le langage enfantin. Celles qui existent soulignent qu’au début, l’unité [déterminant+nom] semble difficilement décomposable. Selon certains auteurs, l’article a le statut d’« un préfixe », pour d’autres, il s’agit d’une partie non segmentée de la représentation phonologique du nom dépourvue de statut morphologique indépendant. C’est seulement dans un deuxième temps que les articles sont (ré)analysés en tant que morphèmes indépendants. Clark (1998) affirme que les enfants francophones ont tendance jusqu’à l’âge de

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six ans à sur employer l’article défini, comme si les référents de l’unité [Déterminant+nom] étaient connus des auditeurs alors qu’ils ne le sont pas. La relation entre la connaissance mutuelle et l’emploi des articles n’est pas facile à maîtriser. Une perspective similaire est défendue par Karmiloff-Smith (1979) pour qui l’article défini est d’abord utilisé dans une fonction déictique, c’est-à-dire en situation « hic and nunc ». C’est dans un deuxième temps que l’enfant prend en considération la situation extralinguistique. Du point de vue des phonologues, l’article est considéré comme un élément inaccentué qui dépend de l’élément lexical qui suit (l’adjectif/le nom). L’article n’a pas d’accent individuel. En français, cette dépendance de l’article est explicite, dans le contexte d’un mot lexical qui commence par une voyelle ou un « h » dit « muet ». Le français connaît un allomorphe élidé de l’article défini dans ce contexte : • « l’avion » peut devenir « le navion » • « l’éléphant » peut devenir « le néléphant ». Lorsque l’article défini masculin est sélectionné par les prépositions « à », ou « de », deux autres allomorphes apparaissent comme le résultat de la contraction de l’article défini et la préposition. Étant donné que seuls les éléments ayant le statut de têtes syntaxiques peuvent s’amalgamer, il est attendu que cette opération ne s’étende pas aux démonstratifs qui sont des catégories maximales : • « à » + « le » devient « au » ; • « de » + « le » devient « du ». La capacité qu’a l’article défini de s’élider et de se contracter avec les prépositions (« à » et « de ») relève d’une propriété plus générale d’éléments nommés « clitiques ». Statut morphologique du pronom La chronologie approximative généralement admise dans la plupart des études sur les pronoms est la suivante : « moi » au cours des premiers mots à partir de 18 mois, « je », « tu » « il », « elle »… à partir de 30 mois (Jakubowicz et Faussart, 1998 ). Entre 3 ans et 3 ans et demi, apparaissent les acquisitions des pronoms objets comme « le » et « la » et des pronoms réfléchis comme « se ». D’autres études ont montré que la restructuration prosodique (comme l’élision, l’amalgame, et le phénomène de liaison) sont des processus transitoires fréquents entre 2 et 4 ans qui apparaissent fréquemment dans les pronoms peu accentués (Wauquier-Graveline, 2004).

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La tableau 3 indique le pourcentage d’enfants qui construisent correctement les catégories syntaxiques dans le système verbal

Tableau 3. Pourcentage d’enfants qui construisent correctement les catégories syntaxiques dans le système verbal en fonction de l’âge Ce qui est à souligner ici, c’est le processus très rapide de grammaticalisation mis en œuvre par l’enfant pour apprendre à utiliser de manière appropriée les catégories du système verbal (auxiliaires, verbes modaux) avec les pronoms sujets et pronominaux qui sont utilisés par plus la moitié des enfants entre 30 et 36 mois dans nos corpus. Ceci n’est pas le cas pour les pronoms personnels objets qui sont d’apparition beaucoup plus tardive.

♦ Méthode d’évaluation sémantique du récit utilisant un livre d’images sans texte (Récit de la grenouille, Mayer, 1969) chez l’enfant de 4 à 6 ans Les recherches à propos du récit oral chez l’enfant ont conduit les auteurs à distinguer différents niveaux d’analyse non verbale. Tout récit met en scène un ou plusieurs personnage(s) qui doive(nt) être introduit(s) dans la narration puis ré-évoqué(s) au fur et à mesure des épisodes narratifs. Nous avons retenu l’activité sémantique non verbale du récit qui a trait à la représentation de cinq épisodes narratifs selon une grille de codage que nous avons mis au point (voire annexe, pour la cotation et la description du récit de la grenouille). Soixante enfants appartenant à la base de données de Sophie Kern (1997) ont participé à cette grille de cotation sémantique. Pour chaque variable, une analyse de variance à un facteur a été réalisée. Un groupe de 20 enfants a été réparti en trois classes d’âge (4 ans, 5 ans et 6 ans). L’effet de groupe s’est révélé significatif pour l’ensemble des variables examinées sauf pour l’épisode I (3 images, 9 points).

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L’effet de groupe est significatif (p