Étude de faisabilité d'une intervention d'autogestion de la ...

Self-management support: a new approach still anchored in an old ... your health. British Columbia: Balma Creative; 2009 [cited June, 2011]; Available from:.
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Résumé

Étude de faisabilité d’une intervention d’autogestion de la dépression offerte avec soutien téléphonique pour les adultes avec des maladies physiques chroniques, qui sont suivis en première ligne

Centre de recherche St. Mary 3830 avenue Lacombe Montréal, Québec, H3T 1M5, Canada

16 janvier 2013 0

Ce document est disponible, dans son intégralité, en format électronique (PDF) sur le site web du Centre de recherche du Centre hospitalier de St. Mary à l’adresse suivante : http://www.recherchestmary.ca

Dépôt légal – 3e trimestre 2013 Bibliothèque et Archives nationales du Québec Bibliothèque et Archives Canada ISBN: 978-2-924092-20-0 (PDF) © Centre de recherche, Centre hospitalier de St. Mary (2013)

ÉTUDE DE FAISABILITÉ D’UNE INTERVENTION D’AUTOGESTION DE LA DÉPRESSION OFFERTE AVEC SOUTIEN TÉLÉPHONIQUE POUR LES ADULTES AVEC DES MALADIES PHYSIQUES CHRONIQUES, QUI SONT SUIVIS EN PREMIÈRE LIGNE Date du rapport :

16 janvier 2013

Organisme subventionnaire :

Fonds de la recherche du Québec - Santé (FRQ-S) 1er mai 2009 - 30 avril 2013

Auteurs :

Jane McCusker, MD, DrPH, Département d’épidémiologie, de biostatistiques et de santé au travail, Université McGill; Centre de recherche St. Mary. Centre hospitalier St. Mary 3830 avenue Lacombe Montréal, Québec, H3T 1M5 Tél.: (514) 345-3511 poste5060 Téléc.: (514) 734-2652 [email protected] Mark Yaffe, MDCM, MClSc, CCFP, FCFP Martin Cole, MD, FRCPC Tamara Sussman, PhD Erin Strumpf, PhD Maida Sewitch, PhD Kim L. Lavoie, PhD Deniz Sahin, MD, MSc Russell Simco, MSc Manon de Raad

Remerciements :

Eric Belzile (statisticien), Cindy Ibberson (recrutement des médecins), et membres du comité consultatif: Dan Bilsker, Jean Bourbeau, Antonio Ciampi, André Delorme, Iryna Dulka, Lynda Egglefield, Janie Houle, Mimi Israël, Johanne Laplante, Robert Perreault, Pasquale Roberge, Ellen Rosenberg, Kim Wilson.

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Autogestion de la dépression avec soutien

RÉSUMÉ Des méta-analyses montrent que les interventions d’autogestion de la dépression chez les personnes avec des maladies chroniques peuvent être efficaces pour réduire les symptômes de dépression et pour améliorer l’autogestion de la maladie chronique. Toutefois, peu d’études ont été menées auprès de populations cliniques plus âgées. De plus, les interventions d’autogestion de la dépression, parfois nommées interventions d’auto-soins, ne commencent seulement que récemment à être offertes au Canada. Les objectifs de ce projet de recherche mené entre avril 2009 et juillet 2011 étaient d’évaluer la faisabilité et l’acceptabilité d’une intervention d’autogestion de la dépression offerte avec un soutien téléphonique pour les adultes suivis en première ligne, ayant 40 ans et plus et présentant des maladies physiques chroniques. L’intervention comprenait une « trousse d’outils » contenant une variété d’approches pour l’autogestion de la dépression, incluant des outils audiovisuels, des liens internet, et des documents sur papier pour répondre aux styles d'apprentissage différents. Deux coachs bilingues (non-thérapeutes) étaient formés pour offrir du soutien téléphonique aux patients pour une période de 6 mois. Ce soutien comprenait de courts appels hebdomadaires pendant les 3 premiers mois, et des appels mensuels par la suite, jusqu’au 6e mois. La recherche impliquait 3 groupes: des médecins de famille, leurs patients, et les proches/amis des patients. Un échantillon aléatoire de médecins de famille pratiquant à Montréal était invité à participer. Les patients éligibles (40 ans ou plus, présence au minimum de symptômes légers de dépression, et présence d’une des maladies chroniques visées) étaient recrutés dans les pratiques des médecins participant, par une procédure de dépistage à deux étapes. Les participants ont reçu la trousse d’outils ainsi que des appels téléphoniques de soutien (offerts pour un maximum de 6 mois). Indépendamment de l’intervention, les patients étaient suivis par le personnel de recherche 2 mois et 6 mois après l’inscription pour déterminer l’acceptabilité de l’intervention et les résultats cliniques. Des questionnaires, entrevues semi-structurées et des groupes de discussion ont permis de collecter des données des médecins et proches/amis participant. Un total de 59 médecins de famille, 63 patients et 19 proches/amis ont participé à l’étude. Les résultats principaux de l’étude étaient: 1. L’intervention d’autogestion de la dépression avec soutien téléphonique offerte aux patients en première ligne avec des maladies physiques chroniques était faisable et acceptable parmi les participants; 2. L’observance de l’intervention (utilisation des outils, réalisation des contacts avec le coach), l’acceptabilité et les résultats étaient similaires parmi les différents groupes d’âge, entre les hommes et les femmes, et parmi ceux avec différents niveaux de santé physique; 3. Les médecins de famille ont assisté avec le recrutement, mais peu se sont impliqué dans le soutien de l’intervention; 4. Plusieurs proches/amis fournissent du soutien émotionnel et de l’aide avec les tâches quotidiennes mais restent incertains quant au soutien à fournir pour l’autogestion de la dépression. Un essai randomisé contrôlé de cette intervention est justifié.

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RÉSUMÉ EXÉCUTIF INTRODUCTION La dépression est un problème répandu, sérieux et souvent chronique, géré principalement dans la première ligne.1, 2 Elle est plus fréquente chez les personnes avec des maladies physiques chroniques.3 Dans cette population souvent plus âgée, la dépression a un impact négatif sur les traitements et l’autogestion de la maladie physique chronique (par ex. par une observance médicamenteuse réduite).4, 5 Les médicaments antidépresseurs et les thérapies psychologiques sont des méthodes efficaces pour traiter la dépression,6 mais de nombreux aînés préfèrent ne pas prendre de médicaments et l’accès à la thérapie psychologique reste limité.7, 8 Les interventions d’autogestion de la dépression sont donc des traitements alternatifs intéressants et potentiellement rentables. Notre équipe a complété une étude de faisabilité de différentes interventions d’autogestion pour la dépression, et nous menons actuellement un essai randomisé contrôlé pour comparer l’efficacité d’une intervention d’autogestion de la dépression offerte avec du soutien téléphonique à une intervention sans soutien téléphonique. Dans ce rapport, nous présentons les résultats de l’étude de faisabilité. LES INTERVENTIONS D’AUTOGESTION DE LA DÉPRESSION Les interventions d’autogestion (parfois appelées interventions d’auto-soins) sont souvent une composante importante des programmes de gestion des maladies chroniques.9 Lors de notre travail, nous avons adopté cette définition largement utilisée de l’autogestion : « … les tâches que doit entreprendre un individu pour bien vivre avec une ou plusieurs affectations chroniques. Ces tâches incluent l’obtention de la confiance nécessaire pour pouvoir faire face à la gestion des soins médicaux, à la gestion des rôles, et à la gestion des émotions. »10 L’autogestion soutenue comprend : « … l’approvisionnement systématique d’enseignements et de soutien de la part du personnel de soins de santé pour augmenter les capacités et la confiance des patients à gérer leurs problèmes de santé, incluant l’évaluation régulière des progrès et des problèmes, l’établissement d’objectifs, et le soutien pour la résolution de problèmes. »10 Les interventions d’autogestion de la dépression incluent généralement la réactivation, la remise en question des pensées négatives, et la résolution de problèmes. 11 Elles incluent généralement moins de 3 heures de soutien professionnel au total, pour les différencier des brèves interventions psychologiques,12 et sont livrées par le biais d’une variété d’outils et de structures de soutien, par ex. du soutien individuel, offert en personne ou au téléphone, par un coach ou guide formé (un professionnel de la santé, un non-professionnel rémunéré, ou un bénévole); du soutien offert en groupe; des programmes interactifs sur internet; ou du soutien d’un médecin. Des métaanalyses indiquent que ces interventions peuvent être efficaces, mais la plupart des données à date portent sur des populations de jeunes adultes bénévoles, ou sur des populations non-cliniques.12-15 Peu d’études ont été menées avec des populations cliniques et d’âge avancé,16, 17 ou avec des populations avec des maladies physiques chroniques et des symptômes dépressifs. 18-20 Des interventions d’autogestion ont été mises en œuvre dans plusieurs provinces du Canada, en tant que composantes de programme de gestion de maladies chroniques. Toutefois, des interventions d’autogestion de la dépression ne sont offertes que dans certaines régions choisies du pays, soit en format individuel ou en groupe.21, 22 23, 24

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OBJECTIFS Les objectifs de ce projet de recherche étaient d’évaluer la faisabilité et l’acceptabilité d’une intervention d’autogestion de la dépression offerte avec un soutien téléphonique pour des adultes de 40 ans et plus avec des maladies physiques chroniques, suivis en première ligne. Nous avons visé cette population pour les raisons suivantes : 1) les interventions pour la dépression dans cette population ont potentiellement un impact important sur les couts des soins de santé dans le long terme, puisque cette population consomme une quantité disproportionnée de ressources de soins de santé; 25, 26 2) la dépression est plus répandue et persistante dans cette population 3; 3) les besoins non comblés en matière de soins de santé sont plus importants parmi ceux avec des affectations chroniques, particulièrement parmi ceux avec des troubles de l’humeur; 27 4) il y a un accroissement important dans la prévalence des maladies physiques chroniques chez les adultes de 40 ans et plus; 26 5) les interventions d’autogestion de la dépression mènent à une meilleure observance des traitements et à l’amélioration des comportements liés à la santé, et donc pourraient avoir un impact positif sur l’état physique des personnes avec des maladies chroniques. 4 APERÇU DES MÉTHODES L’étude, menée entre avril 2009 et juillet 2011, a impliqué le développement de l’intervention et l’évaluation de sa faisabilité et acceptabilité. Développement de l’intervention Nous avons développé l’intervention en incorporant les contributions des médecins de famille, travailleurs sociaux, psychologues, et infirmières qui ont participé à des groupes de discussion et consultation. Tous avaient de l’expérience en gestion de la dépression dans la première ligne. L’intervention comprenait une « trousse d’outils » contenant une variété d’approches pour l’autogestion de la dépression, incluant des outils audiovisuels, des liens internet, et des documents sur papier pour répondre aux styles d'apprentissage différents. Tous les outils étaient disponibles en anglais et en français. Trois outils incorporaient les principes de la thérapie cognitivocomportementale (outils dits « comportementaux ») : le Guide d’autosoins pour la dépression,28 un plan d’action et un carnet de suivi de l’humeur. Trois autres outils étaient principalement destinés à fournir de l’information (outils dits « informationnels ») : un pamphlet, un vidéo/DVD sur la dépression, et des informations sur des ressources disponibles sur internet. Des outils supplémentaires incluaient des informations sur des ressources communautaires (groupes de soutien disponible dans la communauté); et un livret d’information pour les proches. Deux coachs bilingues (non-thérapeutes) étaient formés pour offrir du soutien téléphonique aux patients pour une période de 6 mois. Un calendrier d’appels hebdomadaires brefs pour les 3 premiers mois était suivi par des appels mensuels pouvant aller jusqu’au sixième mois. Les coachs étaient guidés par des instructions textuelles dans le but de fournir de l’information, de l’encouragement et de l’orientation pour les patients utilisant les outils, et aussi pour éviter les échanges pouvant s’apparenter à de la thérapie. Faisabilité et acceptabilité Médecins de famille : Nous avons envoyé une lettre d’invitation à un échantillon aléatoire de 375 médecins de famille pratiquant dans la région de Montréal. La participation des médecins impliquait la distribution d’un bref formulaire de dépistage à leurs patients et la complétion d’un questionnaire au début et à la fin de l’étude. Il n’y avait pas de rôle prescrit aux médecins dans l’étude ; ceux-ci devaient fournir les soins habituels à leurs patients. 4

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Patients: Les patients éligibles pour l’étude avaient 40 ans ou plus; avaient été diagnostiqués avec au moins une des maladies chroniques visées (arthrite, hypertension artérielle, diabète, cardiopathie, asthme, et/ou maladie pulmonaire chronique); présentaient des symptômes dépressifs; ne recevaient pas de psychothérapie; ne présentaient pas d’handicap physique ou mental qui empêcherait l’utilisation des outils ou du téléphone. Les patients potentiellement éligibles étaient identifiés grâce à l’utilisation d’un formulaire de dépistage à auto-compléter dans la clinique ou le bureau du médecin. Un membre du personnel de recherche vérifiait ensuite l’éligibilité du patient par téléphone, et l’invitait alors à participer à l’étude. Les patients participant recevaient une trousse d’outil par courrier, et étaient alors rapidement contacté par l’un des coachs. Les entrevues de recherche s’effectuaient par téléphone à l’inscription, à 2 mois et à 6 mois pour pouvoir évaluer : l’acceptabilité des outils et des appels des coachs; l’utilisation des outils d’autogestion, l’évolution des symptômes dépressifs, l’état global de la santé physique et mentale, et les comportements liés à la santé (activité physique, contacts sociaux, etc). Proches/amis: Un total de 19 proches/amis ont complété des questionnaires sur le type de soutien offert aux patients; 7 ont aussi participé à des entrevues qualitatives approfondies. RÉSULTATS Médecins de famille Des 375 médecins invités à participer, 63 (16.8%) étaient joignables, éligibles et ont consenti à participer et 59 (15.7%) sont demeurés dans l’étude. Les raisons prédominantes données pour expliquer la participation étaient : implication antérieure dans des projets de recherche, un intérêt pour les soins de la santé mentale, un enthousiasme pour l’autogestion, et un sentiment de collégialité.29 Deux-tiers des médecins participant ont conformé à des degrés différents avec le recrutement des patients, la conformité étant plus importante chez les médecins de famille en pratique autonome ou chez ceux avec un implication antérieure dans des projets de recherche. 29 Les médecins qui ont participé semblent avoir joué un rôle mineur dans le soutien de l’intervention, et leur implication était principalement limitée à répondre aux patients initiant des discussions sur les outils. Patients Au total, 254 patients potentiellement éligibles ont été référés à l’étude, 216 ont été rejoints pour une vérification d’éligibilité par téléphone; 63 patients éligibles ont donné leur consentement écrit et ont complété l’entrevue d’inscription; 57 (90%) et 55 (87%) ont complété les entrevues de suivi à 2 et 6 mois, respectivement. Les adultes plus âgées avec des maladies physiques plus sévères, les hommes, et les patients avec un niveau de scolarité plus faible apparaissent sous-représentés parmi les participants. Au suivi de 6 mois, 84% des participants reportaient qu’au moins un des outils avait été utile. Presque tous avaient lu le pamphlet d’information, 76% avaient visionné le vidéo/DVD, mais seulement 25% avaient essayé les outils internet. Environ deux-tiers des patients avaient essayé le Guide d’autosoins, le plan d’action et le carnet de suivi de l’humeur, respectivement. Les coachs ont complété en moyenne 10.5 appels par participant, correspondant à un temps de contact total de moins de 2 heures par participant. Plus de 91% des patients ont trouvé les appels utiles, mais 47% sentaient qu’ils auraient pu utiliser les outils par eux-mêmes. En général, il y avait une amélioration cliniquement significative entre les symptômes dépressifs à l’inscription à l’étude et à 6 mois. L’amélioration dans la gravité de la dépression a été 5

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constatée plus fréquemment parmi ceux qui avaient utilisé un des outils comportementaux, mais n’était pas associée avec l’utilisation des outils informationnels ou avec le nombre de contacts avec le coach. Des améliorations similaires dans les symptômes dépressifs ont été constatées parmi les patients de différents groupes d’âge et sexe, et parmi les différents niveaux de santé physique. Proches/amis Un tiers des patients ont déclaré avoir reçu du soutien de leurs proches/amis lors de l’utilisation des outils d’autogestion. Notamment, les patients ayant déclaré avoir adhéré à l’utilisation des outils comportementaux déclaraient plus souvent qu’ils avaient reçu du soutien de proches/amis avec les outils, et leurs proches/amis déclaraient plus souvent qu’ils avaient offert du soutien dans les activités quotidiennes comme le transport et les tâches ménagères. Les proches/amis semblaient intéressés par l’implication dans l’intervention d’autogestion de la dépression, mais ne savaient pas quel type et quelle quantité de soutien à offrir. CONCLUSIONS Les résultats de cette étude de faisabilité devraient être interprétés avec précaution car l’étude étaient non-comparative et de taille modeste. Les conclusions préliminaires qui suivent peuvent être déduites pour l’implication des médecins, patients et proches/amis dans l’intervention : Médecins de famille 1. Même si les médecins de famille sont vraisemblablement ouverts à faire valoir les avantages des interventions d’autogestion de la dépression, le volume et la complexité de leur travail signifient qu’ils n’ont vraisemblablement pas les capacités ou le temps pour offrir et soutenir de telles interventions, particulièrement pour leurs patients avec des maladies physiques chroniques. 29-34 2. Des sources de soutien communautaires supplémentaires et alternatives pour l’autogestion de la dépression pourraient être utiles (par ex. des agences gouvernementales et nongouvernementales qui offrent des services aux personnes avec des maladies physiques chroniques).13 Patients 1. Notre intervention d’autogestion de la dépression avec soutien pour les patients avec maladies physiques chroniques qui sont suivis dans la première ligne était faisable et acceptable parmi ceux qui ont participé à cette étude, incluant les patients plus âgés (60+) et d’âge moyen (