enseigner et apprendre dans la complexite - Espace Educatif - Rennes

Le déficit d'intégration scolaire déborde du cadre de l'école lors que l'école .... La lecture du témoignage de la maman de Mathieu* est édifiante pour comprendre la relation des acteurs de ... vise la formation d'un être ouvert aux changements.
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Yves EVEILLARD, Renaud BEUCHER, Julien GAGNEBIEN, Anne-Claire HOUZE, Samuel LE GAOUYAT , Cédric LE GUEN, Pascal MONIOT, Michaël PASTOL, Michel PONCELET, Alain SAINT-JALMES , Jacques SALAÜN

ENSEIGNER ET APPRENDRE DANS LA COMPLEXITE

Coordonné par Michel BUTTIFANT IA.IPR d’EPS (Académie de Rennes) et Yves EVEILLARD faisant fonction d’ IA.IPR d’EPS (Académie de Rennes)

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Sommaire

Préambule : De l’intégration à l’inclusion. Yves Eveillard Introduction : Une école inclusive. Yves Eveillard Cadre conceptuel : La formation d’un être éclairé, physiquement et socialement éduqué. Yves Eveillard L’enseignement du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Yves Eveillard Lexique. Yves Eveillard

Différentes illustrations du processus enseigner / apprendre Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : multibond Renaud Beucher, Julien Gagnebien Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : natation Michel Poncelet Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : acrosport Pascal Moniot, Alain Saint-Jalmes Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : danse Jacques Salaün Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : gymnastique sportive Michaël Pastol Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : volley-ball Samuel Le Gaouyat, Yves Eveillard Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : lutte Anne-Claire Houzé, Cédric Le Guen

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PREAMBULE

De l’intégration à l’inclusion [Les encadrés permettent de faire ressortir des points importants de votre texte ou d’ajouter des informations pour référence (par exemple, un planning). Ils sont généralement placés à gauche, à droite, en haut ou en bas de la page. Vous pouvez les faire glisser vers n’importe quel emplacement de votre choix. Lorsque vous êtes prêt à ajouter votre contenu, cliquez ici et commencez à taper.]

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a vertu intégrative du système, la pensée égalitaire, la volonté de faire réussir tous les élèves…..qui se retrouvent dans les déclarations d’intention des différentes lois d’orientation ont toujours poussé les différents partenaires du système éducatif à placer l’élève au centre de leurs préoccupations. C’est cette idée qui semble animer en permanence les décideurs. « L’enfant au cœur du système éducatif, enfin ! » écrit Michel Ménard, député socialiste, dans Ouest France du 13 mars 2013 au sujet de la refondation de l’école. Malgré toutes ces bonnes intentions il semble bien que l’école soit en panne d’intégration. 1. L’école, malgré de nombreuses bonnes volontés, peine à amener tous les élèves au « même niveau ».

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es mesures des résultats scolaires mettent en avant les difficultés vécues par un grand nombre d’élèves et soulignent une grande hétérogénéité de la répartition des performances des élèves sur l’ensemble du territoire national. Au-delà de l’illettrisme et de la sortie du système scolaire sans véritable qualification, les enquêtes européennes (enquêtes PISA, PIRLS) sont en effet édifiantes au sujet des difficultés éprouvées par les élèves français. Deux analyses de leurs résultats scolaires sont particulièrement significatives :  Au niveau de leurs performances : - Les élèves français sont moins performants que les autres élèves en Europe. La France se situe au 16èmerang sur 20. - Le groupe faible est surreprésenté : 35% contre 25% au niveau européen - Le groupe fort est sous représenté : 17% contre 25%  Au niveau de leurs compétences : les élèves français savent restituer des connaissances, trouver des informations directement accessibles, produire des écrits courts. Ils ne savent pas mobiliser ces ressources pour traiter des situations complexes.

Xavier Roegiers 2010. L’école et l’évaluation

Même les résultats aux examens peuvent être trompeurs et il faut tempérer l’ardeur mise par certaines académies ou certains établissements à s’enorgueillir de leurs résultats. En effectuant une analyse qualitative des résultats on repère qu’au-delà de la réussite ou de l’échec aux examens, l’école produit des faux forts qui apprennent par bachotage des contenus inertes accompagnés des contextes de leur restitution ainsi que des faux faibles qui ne se retrouvent pas dans le système d’apprentissage et d’évaluation auquel ils sont soumis .

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La tentation est forte pour la société de chercher des coupables à ces dysfonctionnements. Les accusations se reportent tout naturellement sur l’enseignement qui est déclaré insuffisant au primaire, voire impossible en collège, et sur les élèves qui ne sont plus motivés et qui subissent trop d’influences extérieures. C’est pour ces raisons que renaissent certaines solutions. Qu’il s’agisse d’un retour en arrière pour faire apprendre des fondamentaux par des méthodes qui ont fait leurs preuves (exemple de la méthode syllabique) ou de l’instauration d’une rigueur salvatrice (la blouse pour tous, l’autorité du maître, la présence policière…), de la restauration des filières (suppression du collège unique) quand ce n’est pas du rappel des bienfaits de l’enfermement (internats). C’est cependant un fait, l’école, et plus particulièrement le collège, éprouve une grande difficulté à prendre en compte tous les élèves, ce qui permet à certains analystes d’invoquer l’incompétence des enseignants ou la nullité des élèves pour expliquer une baisse de niveau généralisée. 2. Le déficit d’intégration scolaire déborde du cadre de l’école lors que l’école peine à faire apprendre la totalité des élèves, se développent des phénomènes d’absentéisme et de décrochage qui trouvent sans aucun doute leurs origines dans l’échec scolaire et qu’il faut relier au développement du communautarisme, de l’intégrisme religieux et de la délinquance. P.Blanchard Ne faudrait-il pas voir dans cette difficulté scolaire à faire apprendre l’exacerbation d’une difficulté sociétale à accepter la diversité, la N.Bancel, S.Lemaire différence. S’il est vrai que sous couvert d’égalitarisme la République 2005. La fracture a développé dans son système éducatif une incapacité à penser les coloniale différences au sein d’une population scolaire, elle éprouve la même difficulté à considérer le citoyen en A.Van Zanten tant qu’individu à part entière, à s’affranchir d’un passé colonial et à envisager la diversité socio culturelle ou la diversité 2001. L’école de la régionale. périphérie

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l’absence de prise en compte de ces différences culturelles, la conception même des programmes impose un temps B.Charlot d’apprentissage contraint, identique pour tous, phénomène renforcé par l’utilisation de manuels avec lesquels ils sont confondus. On peut même 1999. Le rapport au s’accorder à penser que le système d’évaluation qui accompagne savoir en milieu l’enseignement de ces programmes vise à sécuriser l’enseignant en cherchant populaire à retrouver « objectivement » ce qui a été dit ou fait à leur sujet. Il serait en effet beaucoup plus risqué pour le charisme du maître de tenter d’inférer des qualités à une réponse d’élève. Cette façon de procéder donne de fait une priorité absolue à l’acte d’enseignement sur l’acte d’apprentissage. Au-delà de

La question est sans doute encore beaucoup plus complexe puisque l’on peut se demander si le système ne se nourrit pas de l’échec de certains pour justifier la valeur de son propre fonctionnement en se dédouanant de ses insuffisances sur ses propres utilisateurs. En effet, puisque certains réussissent, puisque tout est fait pour faire réussir tout le monde, la faute incombe forcément aux utilisateurs du système qui ne se donnent pas les moyens d’exploiter la chance qui leur est offerte de pouvoir réussir. La réflexion sur l’école tourne en rond, on s’évertue à vouloir donner plus à ceux qui peuvent le moins et les enseignants se tuent à la tâche dans la gestion de classes de moins en moins gérables puisque de plus en plus multiples. La prise en considération du rythme d’apprentissage n’étant pas combinée à la définition de ce qui s’apprend et concomitamment à la façon d’apprendre, rien ne changera jamais sinon un peu moins de fatigue pour les uns et un 5

allongement du temps de présence pour les autres, sans transformer la qualité et la nature du processus enseigner/apprendre. Dans le même ordre d’idée, la modification des rythmes scolaires s’attaque à juste titre à une nécessaire réorganisation du temps de la présence des élèves à l’école, mais ne touche pas à la réorganisation didactique de la journée de classe et évince de ce fait le questionnement sur le sens. De plus, et il faudra être vigilant à cet égard, elle peut médicaliser l’apprentissage (l’appel à la chronobiologie comporte ce risque) et placer l’attention de l’élève à l’acte d’enseignement comme principale source de l’apprentissage, ce qui conduirait à renvoyer ainsi ipso facto à une certaine conception de l’apprentissage peu adaptée aux enjeux de notre époque. Enfin, de façon générale, il semble évident que la succession des réformes ou des prescriptions qui accompagnent chaque nouvelle élection ou prise de fonction contribue à plonger le corps enseignant dans une posture attentiste qui encourage inexorablement la reproduction des pratiques. 3. Le système éducatif éprouve de grosses difficultés à faire face aux besoins d’une société qui évolue sans cesse ean François Bouthors, écrivain, émet un avis à propos des examens qu’il est semble-t-il pertinent de relever : « Dans la vie professionnelle à laquelle les candidats se destinent, à plus ou moins longue échéance, leur aptitude à sélectionner des connaissances valides, à les stocker, à les organiser de manière à pouvoir les utiliser sera précieuse, tout comme celle de solliciter les compétences d’autrui. On peut donc se demander si la forme actuelle des examens correspond bien aux nécessités de la vie réelle. Nous sommes encore trop tributaires d’un modèle d’appréciation des aptitudes centré sur la capacité de mémorisation du savoir. » « …dans ces conditions ne nous étonnons pas de constater que notre pays est non seulement en retard en terme de créativité, mais très souvent méfiant et rétif à l’égard de ceux qui innovent.» Tout ce qui est dit ici n’est pas nouveau, Montaigne (1533-1592) distinguait déjà la tête bien faite de la tête bien pleine. « Savoir par cœur n’est pas savoir » disait-il, voulant faire « apprendre à penser » à l’enfant. Bien que dans la mouvance des réformes le vent souffle vers la tête bien faite, dans les faits les programmes sont encore majoritairement organisés en hiérarchie de savoirs à faire apprendre. Il en va de même des conceptions des parents et des élèves qui sont encore malgré tout construites à partir de hiérarchies et de quantités de savoirs. La lecture du témoignage de la maman de Mathieu* est édifiante pour comprendre la relation des acteurs de l’école à l’apprentissage. Nous y percevons tout ce qui fait actuellement obstacle à la réussite scolaire et non pas seulement à « surmonter la peur des maths » comme le titre l’article du journal : la conception cumulative des apprentissages, la confusion entre ressources et démarches, entre produit et processus, la conception de l’enseignant distributeur d’informations, la finalité applicative donnée à la connaissance, le caractère vérificateur de l’évaluation et l’importance de la maîtrise de la langue dans la réussite scolaire.

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*Témoignage de la maman d’un élève éprouvant des difficultés en mathématiques (Ouest France du 22/01/2011) « En 6ème les résultats de Mathieu ont flanché en maths et plus particulièrement en géométrie. Nous avons rencontré son professeur et essayé de faire le point pour comprendre ce qui se passait. Il avait accumulé pas mal de lacunes notamment en CE2. Nous nous 6

sommes rendu compte que des bases importantes de l’apprentissage lui faisaient défaut en maths comme les tables de multiplication….. Nous avons constaté qu’il comprend ce que le professeur lui explique, mais qu’il a des difficultés à l’appliquer lors des contrôles. Lorsqu’on lui demande de restituer une définition par exemple c’est souvent confus. Il a du mal à retranscrire ce qu’il a appris. Ces différents propos nous amènent à penser que le système éducatif se sclérose à partir de deux grandes difficultés : - D’une part, à l’impossibilité pour l’école d’atteindre les moteurs de l’action chez les élèves (les connaissances opératoires) s’ajoute manifestement son incapacité à développer et à repérer leur aptitude à mener des opérations mentales (voir tableau dans le lexique) sur et dans l’action et à s’investir dans une intelligence collective. Alors que dans le monde de la recherche la pensée créatrice est fondamentale et que la sauvegarde de l’environnement dépend fortement de la capacité de chacun à mener une activité réflexive sur le sens de la vie (Albert Schweitzer en parlait déjà en 1913), il se crée évidemment un décalage important entre les attentes et les nécessités sociales et la formation des élèves, décalage qui ne demande qu’à s’accroître avec ceux qui ne disposent pas d’une aide extérieure qui stimule leur créativité et leur activité réflexive. - D’autre part, l’école peine à s’emparer d’une activité didactique qui ne s’attache pas uniquement à produire des contenus d’apprentissage dans le seul domaine Coordonné par des savoirs disciplinaires mais qui en produit également dans le domaine de C.Volant la pensée réflexive sur/dans l’action et de l’engagement dans l’action. Dans les divers documents produits par le GAIPAR (groupe académique 2009. Construire des d’innovation pédagogique de l’académie de Rennes) ces trois composantes connaissances en EPS apparaissent sous l’appellation : Réalisation Pensée Investissement. Il y a donc de ce fait urgence pour les disciplines à confronter l’élève à des situations de production qui les sollicitent simultanément. - Nous ajouterons en aparté que la construction et la mobilisation de connaissances liées à l’Investissement dans des situations dont la complexité impose un traitement personnalisé devraient favoriser la structuration d’une personne socialement adaptée au système auquel elle appartient et ouverte à l’évolution de ce système (adaptativité). Elles donnent une solution concrète à l’enseignement d’une morale laïque. 4. Il existe pourtant une tentative méritoire pour enrayer l’échec : un socle commun à l’ensemble de la population scolaire onner à l’école comme objectif obligatoire l’accès de tous les élèves à un socle commun de connaissances, de compétences et de culture constitue sans aucun doute une des solutions pour combler son déficit d’intégration. Encore faut-il, pour éviter les pièges dénoncés ci-dessus, que le socle:  soit conçu comme une propédeutique à l’évolution du futur adulte et non comme un viatique à utiliser pour survivre dans la R.F.Gauthier vie. Tout ceci demande à l’enseignant de s’intéresser au M.Le Gouvello développement des potentialités d’action des élèves et non à l’amoncellement de mémorisations disparates ou de procédures 2009. L’instauration d’un socle spécifiques. commun de connaissances et de  vise la formation d’un être ouvert aux changements compétences systémiques, à l’incertitude et à la diversité des contextes auxquels il se confronte.  efface la hiérarchisation des disciplines au profit de leur complémentarité, offre la possibilité de multiples mises en relation de E.Morin connaissances

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1999. Relier les connaissances

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 s’inscrive dans une réelle perspective curriculaire seule véritable solution à l’abandon du redoublement On perçoit bien que l’application du concept de socle commun à l’ensemble d’une population scolaire oblige à envisager les apprentissages sous un angle nouveau. Elle offre l’occasion de sortir de cette logique d’apprentissage par accumulation qui se réfère à un élève qui apprend pour conserver en mémoire le traitement qu’il fait des informations qui lui ont été délivrées. Cependant :  Elle nécessite de s’inscrire dans un cadre théorique en adéquation avec un enseignement finalisé par la structuration d’une conduite scolaire adaptative, c'està-dire qui vise le développement d’un potentiel de traitement de situation transférable d’un contexte disciplinaire à l’autre.  Elle donne au concept de situation une place prépondérante et oblige les disciplines à penser les contextes auxquels elles confrontent les élèves pour que ceux-ci puissent mobiliser des processus spécifiques dans des contextes à fort degré de similitude.  Elle impose à l’enseignant un traitement des contenus disciplinaires qui l’oblige à expliciter les connaissances opératoires que l’élève doit construire pour produire des actions adaptées.  Elle demande à l’enseignant de concevoir son enseignement à partir de la compétence attendue à l’issue du cycle d’apprentissage. Les savoirs disciplinaires deviennent alors des ressources pour le traitement de situations d’expression de cette compétence, à des niveaux de complexité plus ou moins importants. 5. Il est donc urgent de changer de point de vue sur l’apprentissage scolaire

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e corps enseignant subit avec courage et souvent avec douleur les effets de l’hétérogénéité de la population scolaire. Tout en manifestant la volonté d’évoluer dans le sens de la tête bien faite, il exprime ainsi plusieurs contradictions qui lui paraissent le plus souvent insurmontables :  avoir une influence sur l’apprentissage de tous les élèves alors que le nombre d’élèves par classe ne cesse de croître  intéresser l’ensemble de la classe alors que les centres d’intérêts sont multiples  faire progresser tout le monde alors que les compétences sont extrêmement différentes Pour tenter d’aplanir ces contradictions l’école s’est essayée à différents modèles d’intégration après s’être appuyée sur un modèle de N.Mons la séparation des élèves suite à un tronc commun court. Elle a ainsi Les nouvelles politiques envisagé l’intégration individualisée qui s’appuie sur l’aide éducatives individualisée, l’intégration à la carte qui regroupe les élèves par niveaux ou par choix, l’intégration uniforme pour tous avec son incessant recours aux redoublements. Les différents éléments diagnostiques que nous avons énumérés précédemment nous autorisent à mettre en cause une école qui persisterait à s’engluer dans une visée intégrative et à s’efforcer d’amener tous les élèves au même niveau de « savoir ». Pour parvenir à éviter les faiblesses de la démarche intégrative l’école doit changer sa façon de concevoir ce qui s’apprend en son sein ainsi que la manière dont les élèves apprennent. Ce changement ne se fera pas sur simple injonction. Il ne pourra s’initier que par une politique volontariste de formation visant le déplacement des préoccupations des enseignants dans deux directions : a) La focalisation sur l’élève qui apprend en situation 8

Pour provoquer des acquisitions durables et mobilisables par un être socialement éduqué pour agir dans le XXIème siècle, il convient d’inverser les priorités et de mettre le savoir scolaire au service du développement de l’adaptativité, de l’éducabilité et de la créativité. C’est l’obligation impérieuse faite au système pour aider chaque citoyen à affronter un avenir changeant et à être acteur de l’évolution de son groupe social d’appartenance. Montrer comment cela est possible, c’est l’objet de notre travail d’innovation pédagogique. S’il faut changer de point de vue, il faut changer le paradigme (annexe 1 : schéma du changement de paradigme) dans lequel s’inscrit la réflexion didactique et pédagogique. Edgar Morin nous incite à juste titre à aller dans cette voix et à substituer à un paradigme qui impose de connaître par disjonction et réduction un paradigme qui impose de connaître par distinction et conjonction. Ce qui signifie redéfinir ce qui s’apprend à l’école et en conséquence repenser la manière de provoquer les apprentissages. Il faut arrêter de faire tourner en rond les réformes en réutilisant sans arrêt les mêmes conceptions dans un cadre conceptuel qui ne leur correspond pas. Il en va ainsi du malheureux concept de compétence qui demeure inopérant parce que bien trop souvent employé dans une définition déjà utilisée dans un autre contexte d’enseignement (en Pédagogie Par Objectifs : « l’aptitude à réaliser une action dans des conditions observables, selon des exigences »). C’est pourtant un concept particulièrement heuristique, à condition de l’employer dans un sens qui suggère la conjonction efficiente et personnalisée de multiples paramètres. En réalité, la notion d’enseignement par compétences succède à deux courants pédagogiques : - La pédagogie par objectifs qui a permis de centrer l’apprentissage sur l’essentiel : l’activité de l’apprenant (processus / produit). Malheureusement, ses dérives ont conduit à un découpage des apprentissages. - La pédagogie de maîtrise qui a permis de mettre l’accent sur le fait que tout le monde peut tout apprendre pourvu qu’on lui en donne le temps. Une approche qui vise la construction de compétences devrait donc pouvoir réunir ces deux courants fondateurs et donner à l’enseignant des solutions pour éviter de tomber dans le piège de la disjonction et se centrer sur la personne et son engagement global dans le traitement de situations. (voir le tableau des types d’enseignement dans le lexique) Il est manifeste que le concept de compétence renvoie à la tête bien faite (utiliser à bon escient ses ressources pour traiter des situations), encore faut-il savoir éviter le mirage de la performance pour s’attacher à la recherche de l’efficience. Encore faut-il parvenir à s’appuyer sur des modèles qui singularisent la perception (la phénoménologie de Merleau-Ponty, les théories de l’énaction de Francisco.Varela, le cerveau émulateur d’Alain Berthoz, les théories écologiques), s’écarter d’un modèle focalisé sur les P.Jonnaert entrées (modèle de l’ordinateur qui traite des informations) et oublier la dualité corps esprit au profit d’une conception incarnée de la connaissance. 2002. Compétences et socio constructivisme

agit. Il inférer les

joue groupe

E.Morin 2005. Introduction à la pensée complexe

Pour l’enseignant tout repose sur une transformation radicale du regard porté sur l’élève qui apprend et qui lui faut en effet parvenir à développer la capacité à la présence de processus sous-jacents aux actions et à identifier pour comprendre ce qui se joue à chaque seconde pour chaque élève. Il lui faut également pouvoir prendre en compte la singularité de ce qui se pour chaque élève dans un contexte commun à tout un classe. Dans cette perspective, l’enseignant doit 9

s’emparer des concepts de situation, de complexité, de systémique, de connaissance et de capacité et s’attacher à la transformation structurale des individus.

Pour éviter à l’école de perpétuer l’enseignement de « savoirs » isolés, décontextualisés, identiques pour tous, on mesure l’importance qu’il y W.M.Roth aurait à organiser les activités d’apprentissage de l’élève en situation. C’est D.Morel là tout l’intérêt de l’introduction de la notion de compétence si on l’associe aux idées forces qui définissent toute situation : 2008. Enaction. Apprendre  Comprendre le en situation comme étant un et enseigner en situation couplage individu / contexte. L’élève s’y situe en y E.Abiven actualisant la représentation qu’il a de ses J.Gagnebien potentialités d’actions (ce qu’il peut y faire) alors que le contexte lui pose des contraintes et lui fournit des J.M.Volant prises pour développer ses actions. 2010. Penser et enseigner la  Penser le contexte comme devant être complexité pour enseigner nécessairement complexe, de façon à faire en sorte des compétences que l’adaptation provienne d’une conjonction de ressources et non d’un cumul d’éléments disparates. C’est cette complexité qui doit placer l’élève face à des dilemmes qui le poussent à réaliser des compromis dans la combinaison de ses potentialités d’actions pour produire la réponse qui lui paraît satisfaisante : sa réponse. C’est donc dans la situation et dans la possibilité de faire des choix (responsabilisation) qui doit lui être offerte pour la traiter et en réguler le niveau de complexité et de difficulté, et non dans une quelconque motivation extrinsèque dépendante de la notation ou d’une envie de réussir dans la vie, que l’élève trouvera le sens nécessaire à son investissement. D.Masciotria

b) L’adoption d’un modèle d’enseignement qui personnalise les apprentissages Pour dépasser la centration sur la matière et atteindre chaque élève dans sa singularité, l’enseignant est contraint de se construire une cohérence d’action en prenant appui : - sur une conception opératoire de la connaissance (source d’actions) qui nourrit des potentialités d’action (actualisables dans diverses situations) et ceci dans les trois composantes de l’apprentissage (Réaliser Penser s’Investir) - sur une conception combinatoire de la réponse significative de la compétence atteinte (réseau de capacités mobilisé) qui demande à être comprise comme étant une combinaison des trois composantes et une combinaison au sein même de ces composantes. Concernant l’EPS, l’analyse didactique de l’activité sociale de référence devrait donc permettre de comprendre les réponses motrices des élèves comme résultant d’une combinaison singulière de connaissances et non d’une succession de procédures. Il sera ainsi amené à : - Faire apprendre par l’expérience active, et engager l’apprenant dans un double processus dans lequel il transforme quelque chose en se transformant lui-même. - Développer des préoccupations qui l’encouragent à observer pour comprendre, à ouvrir la voie à de multiples possibles, à provoquer l’apparition de besoins et à les satisfaire, à susciter la recherche de stratégies, à faire dissocier les buts d’action des buts d’apprentissage, à permettre la mesure de l’efficience des démarches ou des actions, à provoquer des interactions entre pairs, à stimuler la mise en relation de données qualitatives et quantitatives, à référer les apprentissages à l’atteinte d’une compétence, à provoquer la production d’une réponse personnelle justifiable…… 10

Provoquer la validation ou l’invalidation de certaines connaissances et l’émergence de connaissances nouvelles ou du besoin de connaissances nouvelles, dans le traitement de la complexité. Il est bien entendu nécessaire de rendre possible la modulation de cette complexité au regard des couplages structurels des élèves, ce qui positionne la différenciation au niveau des paramètres variables de la situation et non au niveau des savoirs. C’est là que se situe la différence majeure entre une pratique d’enseignement personnalisée et une pratique d’enseignement individualisée. - Organiser l’emboîtement de moments didactiques (construction) et adidactiques (mobilisation), chacun de ces moments devant également être G.Brousseau utilisé pour développer chez l’élève la capacité à structurer son apprentissage La théorie des et la capacité à mobiliser ses ressources situations didactiques - Permettre la construction de connaissances métacognitives, pour faire prendre conscience à l’élève de son couplage structurel avec le contexte d’apprentissage ou d’expression. Cette construction n’est évidemment possible que dans un contexte qui offre à chacun la possibilité d’exister pleinement, c'est-à-dire d’agir à un niveau de difficulté ou de complexité supportable et de produire une réponse dont la validité dépend plus de son caractère satisfaisant pour l’auteur, et donc justifiable par lui, que d’une norme attendue par un correcteur. -

Conclusion : bâtir une école inclusive

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n mettant en scène tous les ingrédients pédagogiques et didactiques qui accompagnent le changement de point de vue sur l’apprentissage les travaux du GAIPAR s’attellent à montrer comment il est possible de « prendre en considération d’emblée la diversité des caractéristiques de tous les élèves pour les faire participer à la même expérience d’apprentissage et en tirer leur propre profit. » (se reporter au lexique). Ils se situent donc dans une perspective totalement différente de celle d’une école qui s’évertue à vouloir vainement amener de force tous les élèves au même niveau de savoir disciplinaire (école intégrative). C’est donc d’une nouvelle école qu’il est question ici, d’une école qui cherche à optimiser les potentialités de chacun et à les inscrire dans une perspective de développement permanent, c’est ce que nous nommons une école inclusive, sans la limiter à l’obligation faite au système éducatif d’accueillir les élèves en situation de handicap (loi du 11 février 2005). Les propos d’Eric Lacascade décrivant l’école de théâtre du TNB dont il a la responsabilité illustrent parfaitement la réflexion sur l’école inclusive en la situant dans un autre contexte d’apprentissage : « Chaque exercice, chaque cours ou intervention pédagogique sont conçus comme un tout organique où émergent les qualités et les particularismes de chacun, et non comme un empilement de connaissances et de compétences….Il s’agit de leur donner le goût, l’envie et la capacité de développer leur puissance personnelle sans avoir à tricher pour plaire…... L’école est un temps de recherche, tant pour celui qui enseigne que pour celui qui apprend. » Sans doute l’école de la République pourrait-elle s’inspirer des hommes qui comme lui s’attachent à l’expression et au développement de toutes les personnalités.

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Bibiographie Eric Abiven, Julien Gagnebien, Jean-Marc Volant Penser et enseigner la complexité pour construire des compétences : Les Dossiers de l’EPS de l’Académie de Rennes N°2 (octobre 2010) Nicolas Bancel, Pascal Blanchard et Sandrine Lemaire (2005) La fracture coloniale : Éditions La Découverte Alain Berthoz. (1997) Le sens du mouvement : Paris Odile Jacob Alain Berthoz. (2003)) La décision: Paris Odile Jacob Guy Brousseau La théorie des situations didactiques Cours donné lors de l’attribution à Guy Brousseau du titre de Docteur Honoris Causa de l’Université de Montréal. A paraître dans «Interactions didactiques » (Genève) Bernard Charlot (1999) le rapport au savoir en milieu populaire Editions Anthropos Gérard De Vecchi. (2010) Aider les élèves à apprendre : Paris Hachette Marc Durand. (1998). L’enseignement comme action située. Éléments pour un cadre d’analyse. Actes de la Biennale de l’Education et de la Formation. Paris. Yves Eveillard La modélisation de l’acte d’enseignement : Les Dossiers de l’EPS de l’Académie de Rennes N°2 (octobre 2010) Roger François Gauthier, Margaux Le Gouvello 2009. L’instauration d’un socle commun de connaissances et de compétences en fin de scolarité obligatoire en France en 2005-2006 Philippe Jonnaert. (2002) Compétences et socio constructivisme Bruxelles : De Boeck Université Philippe Jonnaert. (2003) Créer les conditions d’apprentissage Bruxelles : De Boeck Université Jean-Louis Le Moigne (1995) la modélisation des systèmes complexes : Paris Dunod Dominico Masciotra, Wolff-Michael Roth, Denise Morel (2008) Enaction Apprendre et enseigner en situation Bruxelles : De Boeck Université Maurice Merleau Ponty. (1976) Phénoménologie de la perception : Galimard Nathalie Mons. Les nouvelles politiques éducatives – la France fait-elle les bons choix ? : Paris PUF Edgar Morin. (1994) La complexité humaine : Paris Flammarion Edgar Morin (2005) Introduction à la pensée complexe : Seuil Edgar Morin (1999) Le défi du XXIe siècle Relier les connaissances : Paris Seuil Xavier Roegiers. (2010) L’école et l’évaluation Bruxelles : De Boeck Université Jacques Theureau. (1992). Le cours d’action : analyse sémiologique. Berne : Peter Lang. Yannick Vanpoulle (2011) Epistémologie du corps en STAPS. Paris : l’Harmattan Coordonné par Claude Volant (2009) Construire des connaissances en EPS : scérEn CRDP Bretagne Agnès van Zanten (2001) L’école de la périphérie Paris PUF Francisco J. Varela (1989) Autonomie et connaissance : Paris Seuil

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Annexe 1

L’école intégrative cherche à adapter l’élève au type de scolarité qu’il rencontre et met à sa disposition des services (cours particulier, soutien, remédiations) pour rétablir l’égalité

Le temps scolaire est organisé pour permettre l’accès de tous aux notions disciplinaires

Application de connaissances disciplinaires à la résolution de problèmes simples : approche notionnelle

CHANGEMENT DE PARADIGME

Point de tension du système éducatif

Conflit de conceptions

Réponse singulière multicritère au traitement d’une situation qui introduit de la complexité : approche par compétences

L’école inclusive prend en considération d’emblée la diversité des caractéristiques des élèves pour les faire participer à la même expérience d’apprentissage

L’activité adaptative est sollicitée dans des situations qui favorisent le développement des potentialités de tous les élèves

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INTRODUCTION Une école inclusive

Notre production s’inscrit dans une réflexion plus vaste sur la gestion de l’hétérogénéité scolaire. Dans ce domaine, la loi du 11 février 2005 qui fait obligation au système scolaire d’accueillir les élèves en situation de handicap a exacerbé la nécessité de s’ouvrir à de nouvelles conceptions qui viennent entrechoquer les conceptions existantes. Le concept d’INCLUSION recouvre ces nouvelles conceptions et demande au système de s’éloigner du concept d’INTEGRATION qui lui imposait d’aider tous les élèves à s’adapter à ses exigences. Il met le système éducatif dans l’obligation de tenir compte d’entrée de jeu de la diversité des besoins d’apprentissage des élèves. Cette nouvelle conception exige de l’enseignant une transformation radicale de ses préoccupations. 1. D’une part il ne s’agit plus de chercher à mettre tous les savoirs disciplinaires à la portée de tous les élèves, mais de viser à optimiser les conduites individuelles dans leur confrontation aux contextes disciplinaires. Le savoir disciplinaire doit devenir de ce fait une ressource pour la construction des connaissances nécessaires à l’action efficace et acquérir le statut de besoin dans la pensée de l’élève. 2. D’autre part il ne s’agit plus de se référer à des modèles préétablis de réponses aux questionnements disciplinaires, mais bien au contraire d’accepter la production de réponses singulières et même de les encourager. Pour donner vie à ces préoccupations fondamentales, la situation d’enseignement devra s’organiser à partir de différents principes. Nous en avons dénombrés sept qui sont à notre sens incontournables.

Le principe n°1 concerne ce qui est attendu des élèves à l’issue d’une période d’enseignement

Viser pour l’élève l’accès à des compétences qui se donnent à voir dans le traitement de situations porteuses de complexité (programmes)

Ce n’est pas le réinvestissement d’informations mémorisées ou de comportements modèles qui va guider l’action de l’enseignant mais le développement de l’aptitude de l’élève à s’investir avec efficacité dans le traitement de situations, en y mobilisant des savoirs issus des disciplines. C’est le sens de certains programmes disciplinaires conçus à partir de compétences attendues, c’est l’exigence du socle commun. Dans ce cadre la singularité des réponses ne peut s’obtenir qu’à partir de situations qui nécessitent d’effectuer des choix, de réaliser des compromis, de produire la solution qui semble actuellement globalement la plus satisfaisante pour soi. Seul un environnement complexe peut le permettre

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Le principe n°2 concerne la nature des contenus de l’enseignement

Donner à la connaissance une dimension opératoire incarnée et à la capacité un caractère transposable ou généralisable d’une situation à une autre

La connaissance inerte qui correspond en fait à un stockage d’informations, offre une vision courttermiste de l’apprentissage et des conditions d’utilisation limitées à des contextes fermés et reproductibles. Ce qui intéresse notre démarche c’est l’accès des élèves à la construction de processus qui génèrent de l’action et qui se réinvestissent dans des contextes qui possèdent des similitudes. Ces processus s’organisent en deux catégories, les connaissances qui diffèrent par leur degré de généralisation et les capacités qui diffèrent par l‘importance du réseau de connaissances qu’elles structurent.

Le principe n°3 s’intéresse aux origines de l’action

Concevoir l’action comme étant le résultat de la mobilisation de connaissances actualisées par la signification attribuée au contexte

En conséquence, il nous faut concevoir l’action comme résultant de la conjonction de ces processus sous-jacents, et comprendre que c’est en fonction de ses actions potentielles que l’élève trouve dans le contexte des prises, des ancrages qui actualisent ses connaissances. L’action est donc toujours à envisager dans une double dimension :  Situante parce que ce sont les potentialités d’action de l’élève qui déterminent les prises qu’il trouve dans le contexte  Située parce que chaque contexte apporte des prises particulières à l’action Le principe n°4 précise notre conception de l’apprentissage

Comprendre l’apprentissage comme résultant d’une activité adaptative face à un contexte qui contraint l’élève à s’adapter tout en lui apportant des appuis à l’élaboration de ses actions.

Apprendre ne consiste donc pas à ingurgiter pour reproduire.

Dans ce document, nous considérerons que la connaissance émerge de la confrontation déséquilibrante d’un élève avec un contexte et de l’activité qu’il mène pour retrouver un niveau d’adaptation satisfaisant pour lui.

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Nous verrons qu’il trouve dans la mesure de ses résultats des raisons d’invalider ou de valider ce qu’il mobilise et de rechercher d’autres façons de se reconstruire.

Le principe n°5 définit le résultat de l’apprentissage

Envisager l’apprentissage comme étant créateur de nouvelles potentialités d’action

L’émergence de connaissances nouvelles débouche sur de nouvelles actions possibles qui, de manière circulaire, amène l’élève à trouver d’autres éléments signifiants dans le contexte. Pour l’observateur les actions produites par l’élève dénotent une façon de comprendre le contexte et expriment des potentialités existantes. Le principe n°6 exprime la manière de prendre en considération la réponse de l’élève en situation

Concevoir la réponse de l’élève comme étant significative d’une forme d’adaptation et non comme exprimant un décalage avec un modèle comportemental

On comprend aisément que dans cette conception c’est le regard porté par l’enseignant sur la réponse de l’élève qui transforme sa relation à l’apprentissage. Puisqu’il n’est plus question d’y voir l’écart à un modèle d’excellence mais l’expression d’une conduite adaptée, l’élève n’est plus en situation de manque ou d’insuffisance mais exprime des besoins. Les notions d’erreur, de problème, de difficulté et de remédiation y perdent leur sens.

Le principe n°7 finalise l’activité de l’enseignant

Inscrire les actions d’enseignement dans un processus d’optimisation du niveau d’adaptation de chaque élève

L’activité de l’enseignant doit donc fondamentalement être une activité de compréhension et de décodage des actions des élèves qui débouche soit sur une aide à la satisfaction de besoins, soit sur une complexification déstabilisante du contexte d’action.

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17

La formation d’un être éclairé, physiquement et socialement éduqué

Le modèle qui sert de cadre à notre production se démarque résolument d’un modèle qui expliquerait l’apprentissage par la transmission des connaissances. Il s’écarte résolument du mystère de la transmission (centration sur l’enseignant), réservé à quelques privilégiés, pour se centrer sur l’acte d’apprendre (centration sur l’élève).

Une activité d’apprentissage Ce modèle postule que l’apprentissage résulte de l’activité adaptative que produit l’élève lorsqu’il est confronté à des conditions environnementales contraignantes. Il postule également que c’est au regard de ses potentialités du moment que l’élève trouve des raisons d’agir dans le contexte et qu’il produit des actions plus ou moins adaptées aux exigences de la situation. Dans ce cadre le regard que l’élève porte sur le résultat de ses actions l’invite à valider ou invalider les connaissances investies et à provoquer l’émergence de connaissances nouvelles. Dans nos réflexions sur l’apprentissage nous ne considérerons jamais l’élève comme un élément neutre cherchant à plus ou moins capter des informations provenant d’une source organisée dans une perspective programmatique (enseignant, documents visuels ou sonores). Ce point de vue qui sous-tend les notions de motivation, de concentration, d’intérêt, de compréhension, de mémorisation, de restitution, de remédiation, nous semble en effet réservé à une catégorie d’élèves socialement conditionnés à une certaine norme scolaire et exclut d’emblée tous ceux qui s’éloignent de cette norme. Plutôt que de passer un temps et une énergie considérables tenter de rapprocher de la norme les brebis égarées (intégration), il nous paraît préférable de reconsidérer l’expérience d’apprentissage commune à l’ensemble des élèves, d’analyser les liens qui unissent le sujet et l’environnement, de façon à donner à chaque personne l’occasion d’apprendre dans l’environnement didactique élaboré par l’enseignant. En nous plaçant dans une perspective constructiviste et en la dépassant à maints égards (énaction), nous considérerons que cet environnement didactique doit constituer un système de contraintes et de ressources pour l’individu, chacun y structurant ses possibles pour agir, chacun y développant une activité lui permettant d’effectuer les actions qui lui semblent satisfaisantes pour traiter la situation. C’est de cette activité qu’émergeront les connaissances nécessaires à l’ajustement de la réponse développant ainsi de nouvelles potentialités d’action. Pour mieux comprendre le cadre de notre réflexion il faut s’imprégner de deux idées force : 1. La sollicitation du concept de couplage structurel (F.Varela) pour saisir la réalité individuelle dans une expérience d’apprentissage collective. 2. La nécessaire confrontation de l’élève à la complexité d’une situation adaptative pour l’inciter à s’engager dans la recherche d’une solution globalement satisfaisante pour lui, sachant pertinemment que de multiples réponses sont possibles. C’est la seule solution pour favoriser l’accès de chaque 18

individu à la construction de compétences dans le cadre d’une expérience d’apprentissage qui réunit une population hétérogène (inclusion).

Une activité d’apprentissage singulière Le caractère unique de l’apprentissage de chaque individu dans une expérience d’apprentissage collective oblige l’enseignant à prendre en compte le caractère personnalisé du temps de l’apprentissage et à permettre à tous les élèves de se confronter à un niveau de complexité tolérable, ce dernier pouvant évoluer dans la durée. A tout moment l’enseignant doit savoir trouver où se situe pour chacun le seuil critique qui se situe entre la nécessité d’un déséquilibre pour provoquer l’apprentissage et le refus de l’engagement de l’élève dans le traitement de la situation.

Deux processus imbriqués Cette façon d’aborder l’expérience d’apprentissage nous oblige à prendre en considération la coexistence d’une double imbrication : l’individu et l’environnement ainsi que le processus enseigner et le processus apprendre. Cette double imbrication impose à l’enseignant la permanence d’une activité qui oriente l’élève vers la recherche de possibles, qui l’encourage à agir et qui favorise l’expression de son activité réflexive dans l’action et autour de l’action. Le caractère scolaire de la situation adaptative oriente le processus enseigner vers l’accès des élèves à la maîtrise du programme. Conçu à partir de compétences attendues il permet d’envisager facilement : 1. Des réponses personnalisées empreintes de créativité 2. Des apprentissages opératoires construits dans l’interaction active avec l’environnement et avec les pairs. On comprend bien que ces apprentissages ne peuvent se limiter à la dimension disciplinaire (capacités permettant la Réalisation des actions) et qu’ils concernent les capacités à traiter la complexité des situations (capacités permettant de Penser dans et en dehors de l’action) et les capacités à s’Investir individuellement et collectivement avec efficacité dans le traitement des situations. 3. Une mesure des acquis qui distingue et met en relation les processus mobilisés dans l’action, le niveau de complexité de la situation traitée et la qualité de la production finale (produit).

Pour devenir opératoire le modèle doit être décliné Cette déclinaison demande d’une part de savoir clairement dissocier l’activité adaptative de l’élève, les actions qu’il effectue, les constructions personnelles qu’il mobilise ou qui émergent de l’adaptation et les potentialités d’actions qu’il développe. D’autre part, les conditions environnementales doivent se décliner sous la forme d’un système d’influences en direction de l’élève agissant, et mettre en synergie l’activité d’enseignement, l’interaction entre les pairs, l’utilisation d’outils de repérage et les consignes qui orientent l’action et lui fixent un cadre. Décliner le modèle c’est donc : 1. Préciser les processus qui contribuent à l’expression des conditions personnelles : 

Expliciter l’activité que l’élève met en œuvre pour effectuer des opérations réflexives sur l’action, résoudre des problèmes, confronter ses idées, se confronter aux idées des autres, aider, rechercher de l’aide, mobiliser des capacités, valider ou invalider des connaissances, autoréguler ses actions, « Procéduraliser » pour imaginer des actions, combiner différentes ressources 19



2.

Définir les constructions opérées et les potentialités d’action qu’elles nourrissent, c'est-à-dire d’une part nommer les éléments cognitifs qui autorisent la transformation structurelle de sa conduite (réponses adaptées) et d’autre part formuler les actions virtuelles qui composent son potentiel.

Formuler les éléments qui composent un environnement didactique qui sollicite et facilite l’adaptation : 

Une orientation de l’action porteuse de sens C’est au travers des consignes que l’enseignant permet à l’élève de se fixer des buts. Ce sont ces derniers qui lui font attribuer du sens aux actions qu’il entreprend. Elles organisent un système contraignant qui oriente l’action, mais elles offrent des possibilités d’accéder à de l’aide et d’auto déterminer le niveau de complexité / difficulté du système de contraintes. On saisit toute l’importance de cette composante tant pour le développement de la pensée de l’élève que pour son accès à la culture commune. Le définition du cadre de l’action, les variables d’ajustement mises à la disposition de l’élève et la manière dont l’action est finalisée sont entièrement dépendantes des préoccupations de l’enseignant pour : - Susciter l’activité réflexive (qualité et quantité), par la présence de dilemmes ou d’une problématique -Provoquer l’engagement individuel (sentiment de compétence / auto détermination / défi) -Inscrire l’activité de l’élève dans le référent culturel (type de conduite / déterminants de l’action) -Focaliser l’action sur des processus particuliers -Offrir un appui (ressources externes)



Des outils de repérage Les outils de repérage ont pour fonction essentielle de stimuler chez l’élève la combinaison des facteurs de la réussite et de l’aider à situer le niveau de cette réussite. La régulation de l’action dépend en effet de la mesure que l’élève fait de l’efficacité de ses actions et de sa mise en relation avec les procédures, les démarches, les stratégies, les connaissances qu’il utilise. L’élaboration d’outils qui concrétisent et stimulent de façon simple (à la portée de tous) ces mises en relation est donc d’une importance capitale pour apprendre. Ils viennent illustrer les préoccupations de l’enseignant relatives au rôle de l’évaluation dans l’apprentissage. -Stimuler la mise en relation de données (qualitatif/ quantitatif) -Aider à la validation/invalidation des connaissances mobilisées -Permettre la mesure de l’efficience des démarches et des stratégies d’actions -Référer les résultats à la compétence attendue -Autoriser l’auto régulation de l’activité d’apprentissage



La présence de pairs en tant que vecteur de transformations Le dialogue avec les pairs est fondamental pour déplacer le sens donné à l’action, accéder à de nouveaux éléments signifiants dans le contexte, valider ou invalider ses connaissances, réorganiser l’action, conscientiser, stabiliser et formaliser son savoir. De plus, il favorise la confrontation de la subjectivité (ressenti) et de 20

l’objectivité (recueil de données), la formalisation des règles (synthèses) et l’accès à une activité projective Il s’agit donc pour l’enseignant d’anticiper avec précision ce qu’il attend des interactions entre pairs puisqu’il peut, en fonction des groupements qu’il organise, provoquer des conflits ou des convergences d’intérêt pour aboutir à des coopérations, des divergences, des concessions…… 

Une posture et une activité de l’enseignant Un postulat doit guider son intervention : ce ne sont pas les connaissances de l’enseignant qui sont importantes, ce sont celles que l’élève construit grâce à lui. Sa posture doit l’aider à mesurer objectivement en permanence l’influence qu’il exerce de par son activité sur la relation que l’élève entretient avec l’apprentissage. Cette activité doit donc être en cohérence avec l’ensemble de ses préoccupations et s’appuyer sur une compréhension fine des couplages individuels pour : -Susciter la recherche de stratégies -Stimuler les possibles (ZPD) -Guider vers des ressources externes -Stimuler les interactions élèves/élèves-élèves/enseignant-élèves/contexte. -Observer pour comprendre l’activité des élèves au regard des attendus. -Proposer des situations visant à satisfaire les besoins

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L’enseignement du socle commun de connaissances, de compétences et de culture

Dans notre conception l’enseignement du socle s’inscrit parfaitement dans une démarche inclusive à condition d’en respecter son caractère curriculaire (donner à chacun le temps d’apprentissage qui lui est nécessaire) et de concevoir les contenus de l’apprentissage en termes de potentialités d’action susceptibles d’être mobilisées dans des contextes multiples aussi bien dans le cadre scolaire qu’à l’extérieure de l’école. Deux conséquences à ce positionnement :  

Le socle est à décliner pour être intégré à l’enseignement disciplinaire et pour être enseignable par toutes les disciplines dans sa totalité. La maîtrise du socle n’est effective que si l’élève a développé toutes les potentialités d’actions et les mobilise à un niveau de complexité minimal, le seuil d’acceptation étant à définir par le collège des enseignants.

A) Décliner le socle commun Voici un exemple de déclinaison parmi une multitude de possibilités, sachant cependant que celle-ci offre l’avantage de faire appel à l’ensemble des items qui composent le livret personnel de compétences. C1 : Maîtrise de la langue française 1. Transmettre un message qui synthétise des informations sans en dénaturer le sens. 2. Rassembler les éléments d’une réflexion pour exprimer une idée en la rendant compréhensible à un ensemble de personnes 3. Exprimer avec précision ses ressentis, ses émotions, ses sentiments 4. Enoncer des arguments pour participer activement à l’élaboration d’un projet collectif 5. Mettre en relation des données diverses pour les articuler dans un projet d’action communicable C2 : Pratique d’une langue vivante étrangère 1. Comprendre l’essentiel d’annonces et de messages simples pour répondre à un besoin immédiat 2. Prendre part à une conversation : échanger des informations simples sur des sujets familiers 3. S’exprimer oralement en continu : se présenter aux autres (décrire son entourage, son parcours, énumérer ses activités, ses goûts et loisirs) 4. Rédiger des messages simples et courts (lettre, courriel, etc.) pour établir un contact, proposer un projet, une idée ou donner un avis 5. Trouver dans un texte court et simple (annonce, affiche…) les informations factuelles et/ou utiles à un projet individuel ou collectif C3 : Les principaux éléments de mathématiques et la culture scientifique et technologique 1. Exposer des propositions en mobilisant des connaissances scientifiques 2. Mobiliser des éléments mathématiques pour répondre individuellement ou collectivement à une question d’ordre pratique 3. Utiliser des outils mathématiques pour mettre en relation des données et exposer son raisonnement

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4. Agir et réfléchir en prenant en compte l’impact sur l’environnement 5. Mettre en œuvre individuellement ou collectivement une démarche conduisant à traiter une situation C4 : La maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication 1. Echanger en ligne dans le cadre d’un travail collaboratif 2. Produire un document exploitable par un groupe de travail 3. Utiliser toutes les possibilités de son environnement informatique de travail 4. Agir après avoir vérifié le caractère légal et moral de ses actions 5. Rechercher et exploiter des informations C5 : Culture humaniste 1. Mener à terme un processus de création à visée artistique 2. Participer à un débat sur un fait d’actualité 3. Faire la présentation d’un élément de la culture patrimoniale 4. Exposer un parti pris sur un problème de société 5. Faire partager une expérience sensible C6 : L’autonomie et l’initiative 1. Réaliser des compromis entre ses ressources et les exigences du milieu 2. Impulser des projets ou se faire force de propositions dans des projets existants 3. Auto réguler son activité d’apprentissage ou son engagement dans une action 4. Accepter de jouer différents rôles dans un projet collectif 5. Prendre en compte les apports possibles des partenaires dans une action collective C7 : Les compétences sociales et civiques 1. Agir et réfléchir en prenant en compte les fondements de la vie civique et sociale 2. Utiliser avec discernement les informations extraites des médias 3. Participer à la vie et à la gestion d’une association 4. Inscrire son comportement dans un cadre réglementé 5. Accepter les contraintes liées à la conservation de la santé et de la sécurité

B)

Une démarche d’enseignement qui intègre le socle dans l’enseignement disciplinaire

Pour y parvenir, le travail didactique suppose de :  

 

 

planifier l’enseignement disciplinaire à partir de compétences attendues et non à partir des notions des programmes décliner ces compétences attendues pour définir les potentialités d’action qu’elles sollicitent en réseau. Celles-ci seront d’une part disciplinaires, en lien avec les programmes, et d’autre part issues de notre déclinaison du socle commun. décliner ces potentialités d’action pour formuler les capacités, les connaissances qui les nourrissent et ceci dans les trois dimensions de la conduite élaborer une situation complexe sous la forme d’un un système de contraintes / ressources qui met en synergie la posture et activité de l’enseignant, le rôle joué par les pairs, des outils de repérage, une orientation de l’action porteuse de sens. prévoir des situations didactiques complémentaires visant la construction de connaissances ciblées constituer un outil critérié de mesure de la performance réalisée

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C) Un exemple pris en Sciences de la Vie et de la Terre 1. Formuler la compétence attendue au terme de la séquence d’apprentissage Exprimer des choix et des principes en matière de santé pour convaincre un auditoire

2. Décliner cette compétence en potentialités d’actions 5 potentialités d’action à développer :  relier les maladies à des excès ou des insuffisances (capacité disciplinaire en SVT)  développer un propos argumenté (capacité disciplinaire en français)  exposer des propositions en mobilisant des connaissances scientifiques (C3)  accepter de jouer différents rôles dans un projet collectif (C6)  transmettre un message qui synthétise des informations sans en dénaturer le sens (C1).

3. Formuler les contenus de l’apprentissage Compétence attendue: exprimer des choix et des principes en matière de santé pour convaincre un auditoire  5 potentialités d’action à développer : relier les maladies à des excès ou des insuffisances, développer un propos argumenté, exposer des propositions en mobilisant des connaissances scientifiques (C3), accepter de jouer différents rôles dans un projet collectif (C5), transmettre un message qui synthétise des informations sans en dénaturer le sens (C1).

REALISER (produire)

PENSER (traiter)

S’INVESTIR (s’engager)

Capacités

Capacités

Capacités

Mettre en relation des données

Se concevoir membre d’un collectif

Emettre des hypothèses

Accepter la répartition des tâches,

Rechercher et extraire les informations utiles / Adapter son mode de lecture à la nature du texte proposé

Assumer des rôles

Actions

Actions

Lire un tableau à double entrée Déduire les conséquences d’un excès ou d’une insuffisance Prendre appui sur des informations

Prendre des décisions à deux

Connaissances

Connaissances

Connaissances

La valeur énergétique des aliments Le besoin énergétique et la dépense énergétique Les conséquences des excès de consommation de graisse Les éléments caractéristiques d’un propos argumentatif La relation du type de propos avec l’effet produit

La donnée, mise en relation entre deux propositions La dissociation de la cause et de l’effet La nécessité de fonder une proposition La valeur informative d’une proposition

La co responsabilité du résultat

    

Relier les maladies à des excès alimentaires Relier les maladies à l’insuffisance d’activité physique Savoir planifier et organiser son travail Développer un propos argumentatif Manifester de la créativité

Actions Formuler des arguments Composer un texte Enoncer son propos Susciter l’intérêt, provoquer la surprise

Mettre en informations

commun

des

Le gain obtenu par la coopération Le partenaire comme ressource

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4. Élaborer une situation complexe sous la forme d’un un système de contraintes / ressources

Ce qui est attendu des élèves : Par deux, élaborer et présenter un message radiophonique d’une durée inférieure à 1mn, destiné à inciter la population à des comportements responsables face à l’augmentation des cas d’obésité. Consignes : Vous disposez de 30mn pour préparer votre intervention

Des documents sont à votre disposition. Pour les obtenir vous devez formuler clairement ce que vous en attendez « je souhaite un document qui me permettrait de………………. »

Une personne ressource se trouve dans la salle vous avez le droit de la consulter deux fois pendant 30s.

Vous écouterez chacun des messages au travers des critères indiqués ci-dessous en donnant la priorité à la correction, la cohérence et la complétude :

Correction

Validité des connaissances disciplinaires mobilisées

Cohérence

Recevabilité des arguments

Pertinence

Leur mise en relation Caractère incitatif des propositions

Complétude

0

+

++

Force du message en ce qui concerne la responsabilisation de l’auditeur Prise en compte des contraintes : durée, obésité, message, partage des rôles

Originalité

Caractère inattendu de la proposition

Expression

Fluidité du discours

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Les composants de la situation

UN SYSTEME DE CONTRAINTES ET DE RESSOURCES

Des conditions : temps contraint, durée de la production, durée et nombre des entretiens avec l’élève ressource, type de production (message radiophonique) Des consignes : élaborer et présenter à deux

UNE ORIENTATION DE L’ACTION PORTEUSE DE SENS

Des points d’appui : des documents dont l’accès est conditionné à une attente expressément formulée Un pair ressource Il s’agit de produire dans le cadre d’une problématique précise : responsabiliser les auditeurs. La diffusion du message représente un défi et impose la réalisation de compromis (nombre d’éléments / temps d’expression / pertinence du message)

UNE POSTURE ET UNE ACTIVITE DE L’ENSEIGNANT

L’enseignant est porteur d’un questionnement compréhensif qui doit lui permettre de repérer les stratégies et le niveau d’intégration des connaissances présentes dans les documents.

DES OUTILS D’EVALUATION UNE ACTIVITE ADAPTATIVE DE L’ELEVE

DES CONSTRUCTIONS PERSONNELLES émergentes ou mobilisées

Il organise l’interaction avec le contexte et avec les pairs Un outil de mesure accompagne l’action. Il permet à l’élève d’orienter le traitement du problème et de mettre en relation des procédures et des résultats. Il permet à l’enseignant de repérer par inférence les capacités réellement mobilisées L’élève effectue des opérations (extraire de l’information, synthétiser des informations, faire des hypothèses, …..) fait des choix (axe du traitement du problème, forme du traitement ), prend des décisions , régule le niveau de complexité du contexte (le nombre d’informations à prendre en compte, le nombre de connaissances disciplinaires à intégrer au traitement du problème), interagit (au sein du groupe de production, avec l’enseignant et avec l’élève ressource) et communique avec les pairs (exprimer le message)… En relation avec les disciplines scolaires Le classement des aliments en fonction de leur valeur énergétique La relation entre l e besoin énergétique et la dépense énergétique La mesure de l’obésité L’influence des conduites alimentaires et de l’activité physique sur l’obésité, en fonction de l’âge Les conséquences des excès de consommation de graisse Les composants d’un propos argumenté Dans la composante réflexive de la conduite La mise en relation de deux propositions par la même donnée (tableau à double entrée) La dissociation de la cause et de l’effet La nécessité de fonder une proposition Au niveau de l’engagement socio affectif dans la production et dans l’apprentissage La co responsabilité dans la qualité d’une production Le gain obtenu par la coopération Le partenaire comme ressource

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5. Constituer un outil critérié de mesure de la performance réalisée Situation à traiter : Par deux, élaborer et présenter un message radiophonique, d’une durée inférieure à 1mn, destiné à inciter la population à des comportements responsables face à l’augmentation des cas d’obésité. Vous disposez de 30mn pour préparer votre intervention. Des documents sont à votre disposition. Pour les obtenir vous devez formuler clairement ce que vous en attendez « je souhaite un document qui me pe Niveau de complexité : niveau élevé 3 (pas d’accès à des ressources externes), niveau moyen (accès aux ressources externes), niveau bas(augmentation du temps de traitement rmettrait de………………. » Une personne ressource se trouve dans la salle vous avez le droit de la consulter deux fois pendant 30s. Vous pouvez choisir le niveau de complexité qui vous convient : niveau élevé 3 (pas d’accès à des ressources externes), niveau moyen (accès aux ressources externes), niveau bas(augmentation du temps de traitement

Champs

Observables

Critères

Indicateurs

Les capacités mobilisées

Correction

Les concepts utilisés

Validité des connaissances disciplinaires mobilisées Recevabilité des arguments

Le nombre de vérités scientifiques mobilisées

S’appuyer sur des connaissances scientifiques

Les « vérités scientifiques » reliées faiblesse / puissance

Rechercher, extraire, organiser de l’information utile Relier les maladies à des excès alimentaires Relier les maladies à l’insuffisance d’activité physique Développer un propos

Les mises en relation Cohérence

Leur mise en relation

Les composants de la réponse

Pertinence

Le contenu de la réponse

Complétude

La forme de la réponse

Originalité

Caractère incitatif des propositions Recevabilité du message → responsabiliser Prise en compte des contraintes : durée, obésité, message, partage des rôles Caractère inattendu de la proposition

Le discours Fluidité du discours

Expression

Les «éléments» linguistiques produisant un effet -inciter -responsabiliser Ecart au temps Présence de termes Forme du discours Alternance des actions de A et B Les éléments surprenants Les temps d’hésitation La nature des hésitations (mémorisation, lecture…)

Adapter son mode de lecture à la nature du texte proposé Planifier et organiser son travail

Assumer des rôles

Faire preuve de créativité

Formuler clairement un propos simple

Un exemple de hiérarchisation des niveaux de maîtrise des critères

Validité des connaissances disciplinaires mobilisées Recevabilité des arguments et leur degré de pertinence Caractère incitatif des propositions Prise en contraintes

compte

Caractère inattendu proposition

Fluidité du discours

Niveau de maîtrise des critères Non maîtrisé Maîtrise partielle

Maîtrise suffisante

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6. Nomogramme de mise en évidence de la compétence ou de la potentialité d’action Nous utilisons l’outil nomogramme pour que l’élève puisse mettre en relation ses choix de complexité avec la qualité du résultat qu’il obtient. La compétence sera validée lorsque la relation entre ces deux données place l’élève au-dessus du seuil de compétence. Les progrès sont donc de deux ordres possibles : vers plus de complexité ou vers plus de qualité.

Exemple correspondant au traitement de la situation complexe de sciences de la vie et de la terre

27 Niveau 3 20 Niveau 2 Niveau 1 Complexité Nombre d’éléments à mobiliser Nature des éléments à mobiliser Modes opératoires autorisés Temps alloué au traitement Présence de ressources externes Distance à l’apprentissage (temps, niveau de similitude des problèmes à traiter)

Compétence ou potentialité d’action

15 10 5 Qualité de la production Critères

Indicateurs

Notre production intègre cette démarche pour les élèves du primaire ou du collège. Concernant les élèves du lycée nous avons opté pour une déclinaison des compétences méthodologiques en potentialités d’action issues de notre déclinaison du socle commun

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Différentes illustrations du processus enseigner / apprendre en EPS Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : multibond Renaud Beucher, Julien Gagnebien Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : natation Michel Poncelet Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : acrosport Pascal Moniot, Alain Saint-Jalmes Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : danse Jacques Salaün Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : gymnastique sportive Michaël Pastol Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : volley-ball Samuel Le Gaouyat, Yves Eveillard Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : lutte Anne-Claire Houzé, Cédric Le Guen

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Conclusion et perspectives Les documents qui composent cette production s’inscrivent dans une conception de l’école qui met en synergie les disciplines au service du développement des potentialités de tous les élèves. C’est cette vision inclusive de l’école que notre groupe cherche à illustrer par l’invention de séquences qui mettent simultanément en situation tous les élèves d’un groupe classe. Ces illustrations écartent le faux problème de la gestion de l’hétérogénéité et s’attachent à responsabiliser les élèves dans l’auto détermination de leur action et dans l’auto régulation de leur activité, en leur donnant accès à des ressources externes si le besoin s’en fait sentir. Elles montrent qu’en les aidant à faire les choix opportuns pour agir à un seuil de complexité tolérable et en leur donnant le temps nécessaire pour apprendre l’enseignant met en œuvre des stratégies de personnalisation. Elles écartent également l’autre faux problème de la motivation et se centrent sur le sens que l’élève peut trouver dans la situation en lui ouvrant l’accès à sa propre solution (compromis), en lui donnant les moyens de mesurer ce qu’il y produit (résultats) et comment il le produit (procédures) et enfin en lui permettant de comprendre ce qu’il mobilise dans l’action (processus) pour analyser ses échecs et envisager ses progrès. Au-delà de cette vision inclusive de l’école, notre document est porteur pour les enseignants d’une incitation à se focaliser sur le processus enseigner / apprendre pour analyser l’évolution des élèves. C’est une perspective qui peut demander à l’enseignant une modification de conceptions qui lui paraissent pourtant incontournables. Il lui faut en effet entrer dans la classe en étant persuadé que ce qui importe n’est pas ce qu’il sait (transmission) mais ce que chaque élève peut construire et en étant prêt à partager la responsabilité de l’apprentissage. De même, c’est une invitation au conseil de classe à effectuer des bilans sur des processus, et non à délibérer sur des produits en fonction d’attentes normées, pour promouvoir des actions concertées visant à aider les élèves à dépasser leurs faiblesses opératoires (PPRE, accompagnement personnalisé). Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture offre déjà cette opportunité, à condition d’adhérer au point de vue que nous défendons ici. Enfin, cette production ouvre la voie à la conception d’une formation professionnelle ancrée sur deux composantes :  d’une part le développement chez les enseignants ou les futurs enseignants de capacités à décliner les processus sous-jacents à l’action et à inventer des systèmes de contraintes / ressources pertinents au regard des compétences attendues des élèves  d’autre part le développement d’un système cohérent de préoccupations au regard du cadre conceptuel qui organise leur conception de l’école. C’est un temps long et couteux en énergie mentale qui attend le formé. Sa formation ne peut s’accommoder de formules ponctuelles (journées, stages courts) ou de préceptes injonctifs, mais nécessite d’être en situation, accompagné d’un médiateur (formateur) concepteur du système de contraintes / ressources duquel émergeront ses connaissances.

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