Christian Nicol

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mardi 18 décembre 2018 / La Marseillaise

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L’ÉVÉNEMENT

Christian Nicol : « la mairie a toujours été dans le déni » soit pas un prétexte pour évacuer de chez eux toutes ces populations.

ENTRETIEN En 2015, Sylvia Pinel, alors ministre du Logement, charge Christian Nicol de rédiger un rapport sur la requalification du parc privé à Marseille. Son constat est sans appel : un Marseillais sur huit vit dans un logement en état d’insalubrité ou d’insécurité. Trois ans après, il dénonce l’inaction des autorités et appellent à changer de pratiques. Il sera ce soir au débat organisé par « La Marseillaise ». Entretien. La Marseillaise : votre rapport date de 2015, trois ans plus tard, plus d’un mois après le drame de la rue d’Aubagne, qu’est-ce qui a changé ? Christian Nicol : Le constat est assez simple, entre le moment où j’ai rendu mon rapport et le 5 novembre 2018, j’ai l’impression qu’il ne s’est strictement rien passé... Les collectivités ont visiblement passé leur temps à se renvoyer la balle. J’espère que l’électrochoc va provoquer une vraie réaction. Et que le drame ne

RASSEMBLEMENT Les délogés de Noailles manifestent devant la préfecture

Plus de 150 personnes ont manifesté hier en fin d’aprèsmidi devant la préfecture des Bouches-du-Rhône à l’appel du collectif du 5 Novembre, avant la réunion hebdomadaire du comité de pilotage réunissant État, Mairie et associations. « La mobilisation paye. On est reçu et entendu, on doit maintenir la pression », explique Kevin Vacher, du collectif du 5 novembre. « Les collectivités disent qu’elles font tout ce qu’elles peuvent, pourquoi elles ne réquisitionnent pas les 30 000 logements vides dans ce cas ? » s’interroge-t-il. « Si Gaudin n’est pas à la hauteur, mais qu’il dégage ! », s’exclame-t-il avant d’appeler la foule à scander « Réquisition des logements vides ! ». Prochain rendez-vous, jeudi, à 8h, devant le conseil municipal. M.Ri. PHOTO M.RI.

Pourquoi votre rapport n’a-t-il pas été suivi d’effet selon vous ? C.N : Marseille a toujours été dans le déni. Pour la municipalité, le problème n’existe pas ou n’est pas pire qu’ailleurs. Ça rend toute discussion avec les partenaires assez difficile à mener. Il y a aussi le problème de la continuité politique. Entre le début et la fin de ma mission, il y a eu un changement de préfet. Le nouveau ne semblait pas avoir les mêmes priorités. Tous les ans, l’administration pondait un rapport dans lequel tout le monde expliquait qu’ils travaillaient beaucoup mais, dans les faits, rien n’a bougé. Marseille est championne des diagnostics sans lendemain. Quel est le problème à Marseille ? C.N : Ce qui m’a frappé lors de mon arrivée à Marseille, c’estle manque de volonté politique d’en finir avec l’habitat indigne. Et surtout, les fonctionnaires concernés ne font pas leur boulot ! Je ne veux pas généraliser, mais dans les services que j’ai pu voir, la sécurité et l’hygiène, c’était quand même flagrant. Et ça c’est une caractéristique marseillaise. Tous les signalements d’habitants étaient ignorés. La plupart des employés de ces services ne faisaient rien : ils classaient sans suite, sans même se rendre sur place ! À Lyon, Lille ou Paris, tout le monde a pris à bras le corps ce sujet-là. Mais, à Marseille, qui a potentiellement le parc immobilier le plus indigne de France, les élus font comme si le problème n’existait pas. Les mesures annoncées par la Métropole pour lutter contre l’habitat indigne vont-elles dans le bon sens ? C.N : La Métropole dit vouloir passer de l’incitatif au coercitif, très bien. Mais,

À l’angle du boulevard Libération et de la rue Saint-Vincent de Paul. PHOTO D.C

le point de départ, c’est la prise d’arrêté de péril ! Sans arrêté, pas d’expropriation. La Déclaration d’utilité publique défendue par Martine Vassal est plus coûteuse et plus compliquée à appliquer qu’une expropriation après arrêtés de péril. C’est à la municipalité d’appliquer ce pouvoir de police. Les 600 millions annoncés me paraissent bien faibles vu l’ampleur des dégâts à Marseille. À Paris, il a fallu bien plus pour réhabiliter 1 030 immeubles. Quel est le plan de relogement à Marseille ? Qu’est ce qu’on propose aux habitants évacués des immeubles indignes ? Je n’ai rien lu là-dessus. On pourrait imaginer un pourcentage de logements sociaux attribués aux personnes évacuées dans le cadre d’un plan d’éradication de l’habitat indigne. Lorsque je demandais aux élus locaux quelle était l’utilisation des logements sociaux, on me répondait : ils ne sont pas faits

pour ça. Les logements sociaux étaient la chasse gardée des élus... qu’ils distribuaient dans un but clientéliste. N’y a-t-il pas un manque de coordination entre les collectivités ? C.N : Si bien sûr. Mais à Marseille, tout est compliqué à cause de la carence généralisée de la municipalité. Dans une ville normalement constituée, les élus fonctionnent main dans la main avec les services de l’État. Pas ici. Il faut que l’État assume son rôle de coordinateur général. Propos recueillis par M.Ri.

Débat sur le logement indigne ce soir à 19h30 dans la salle des rotatives de « La Marseillaise » en présence de Ian Brossat, adjoint PCF au logement de la mairie de Paris

Comment faire un don au collectif du 5 novembre ? Vous êtes nombreux à organiser des événements, des collectes, des concerts ou tout simplement à vouloir donner pour les sinistrés du 5 novembre. Emmaüs Pointe Rouge à Marseille propose de collecter vos dons qui, par le biais de l’Ampil (association humanitaire d’entraide sociale), seront reversés directement aux victimes via le collectif du 5 novembre. Une grille de critères a été établie pour garantir la meilleure équité possible. Sur demande auprès de l’Ampil, il est possible de connaître à qui et comment l’aide a été attribué. Marie-Laure Thomas

Renseignements auprès de l’Ampil: 04 96 17 63 40 et [email protected]