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sous-marins. Le scaphandre Newtsuit est égale- ... Nous avons déployé le Newtsuit, scaphandre de plongée ...... pompiers de Marseille et remise de casques.
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L’OPTIMISATION DE NOS ÉQUIPAGES Corsican Lion

Planète mer

Gestion des officiers

Entente cordiale au large PAGE 20

La France, un pays maritime PAGE 24 qui l’ignore

L’envers du décor PAGE 28



LE MAGAZINE DE LA MARINE NATIONALE

ÉDITORIAL

SOMMAIRE AZIMUT

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ACTUALITÉS

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6

Piraterie : le Floréal patrouille dans l’IRTC • Croix du Sud : neuf nations s’entraînent dans le Pacifique 7 Entraînement de lutte antipollution au large de Cherbourg • La force maritime des fusiliers marins et commandos 8 Le Vigilant sort de grand carénage • La Marine présente à Euronaval 9 Antilles : entraînement bilatéral aux techniques amphibies • Vous aussi, participez à la réflexion sur le Livre blanc 10 La Fayette : retour après 103 jours d’opération • Fort-de-France : à l’heure mexicaine 11 Corymbe : la Marine gabonaise à l’école du Siroco

PASSION MARINE

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DE L’AVANT

L’OPTIMISATION DE NOS ÉQUIPAGES VIE DES UNITÉS

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20 Corsican Lion : entente cordiale au large 22 Cephismer : ils ont plongé sur la Lune 23 Un petit village de marins au Pays basque

PLANÈTE MER

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24 La France, un pays maritime qui l’ignore

CHRONIQUE DU PERSONNEL

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27 120 ans de Marine… et toutes leurs dents 28 Gestion des officiers : l’envers du décor 29 La Villa Kérozen à la disposition des familles • Séminaire des marins du ciel

ESPACE LOISIR

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30 Toujours à quelques pas du Président • Hier, la Marine

HISTOIRE

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31 Mont-Valérien, la Marine se souvient

AGENDA

Le tiers :

L

’effectif d’un équipage est défini dans un document que l’on appelle le plan d’armement(1). Il fixe le nombre de marins dans chaque catégorie de grades, en fonction de la spécialité et précise si besoin, les brevets et qualifications nécessaires à chacun pour tenir son rôle dans l’équipage. C’est donc bien plus qu’un document comptable. Sur un bâtiment de combat, c’est l’aboutissement d’une savante alchimie. Il résulte en réalité de la combinaison de plusieurs exigences, qui ont pour fondement que l’équipage est un et indivisible. D’une part, la permanence et la continuité de l’action. Dès que le bâtiment appareille, de jour comme de nuit et le plus souvent dans la durée, des marins assurent la conduite et la sécurité nautique, la mise en œuvre de la propulsion et la sécurité, l’emploi du système de combat pour la veille et la mise en œuvre des armes. Ce sont des « quarts », donc une fraction de l’équipage, qui se relaient sans interruption, mais en quantité variable, en fonction de la situation tactique. D’autre part, de nombreuses autres tâches se superposent à ce « de quart à la mer ». La maintenance préventive et corrective, l’entretien général (propreté, peintures…), le soutien de l’homme (alimentation, restauration, activités sportives et de cohésion, formation…), sans oublier bien sûr l’entraînement. Enfin, lorsque des missions parfois de plus de six mois se terminent et que le bâtiment est à quai, il faut que ces mêmes marins assurent la sûreté, la sécurité et l’entretien du navire, tout en s’entraînant et en se formant. Quand tout cela est fait, ils peuvent bénéficier de permissions. Les plus anciens d’entre nous ont connu des organisations basées sur le « tiers ». Un tiers de l’équipage assurait le quart à quai ou au mouillage, les autres pourvoyaient au reste. Qu’en est-il aujourd’hui ? À la mer, le « quart par tiers » est resté dans les sonneries réglementaires, mais c’est tout. Le « service au mouillage » s’effectue au « tour de liste » géré sur mesure. Sur un BPC par exemple, ce sont donc toujours « les 177 mêmes » qui, grâce à de savantes combinaisons et des enchaînements chirurgicalement orchestrés dans différents postes, font fonctionner le deuxième plus grand bâtiment de combat de la Marine nationale. Révolution ou évolution quand un équipage d’une Fremm est presque divisé par trois par rapport à un F67 ? Je vous propose de découvrir dans ce numéro, la thématique des « équipages optimisés » et, comment la Marine nationale s’y prépare et opère cette transformation.

Capitaine de vaisseau Philippe Ebanga Directeur de la publication 33

(1) On trouve parfois dans les unités à terre, surtout lorsqu’elles ont une dimension interarmées, la notion de REO (Référentiel en organisation).

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  3

Amers et Azimut Situation des bâtiments déployés au 13 novembre 2012 51 bâtiments à la mer 4 600 marins en mer

Au large de Brest B BBorda é l i éploiemen t hydrographique hydr d ographiqu hi ue BH Déploiement FASM De D Grasse Préparation éparation opérationnelle opérationnelle FASM CMT L'Aigle L'Aigle épar p ation opérationnelle opérationnellee CMT Préparation MTT Andromède M Androm paration opérationnelle opérationnelle CMT Préparation C T Cassiopéee par a ation opérationnelle opérationn CMT Préparation M Malabar aration opérationnelle opératio RHM Préparation

St-Pierre-et-Miquelon ST-PIERRE-ET-MIQUELON

large de la Guy Au large Guyane La CCapricieuse apricieu apricie u P400 La Patrouille

BHO Beautemps-Beaupré s pré St-Barthélemy St-Martin Guadeloupe Martinique

Au large de la Polynésie FS Prairial Déploiement PSP Arago Opération Kurukuru

CLIPPERTON Clipperton

ANTILLE-GUYANE ANTILLE -GUYANE A

Déploie Déploie

Dakar Dakar

Aviso CDT Blaison Opération ération Atlantic Atlantic Wa Wa Guyane française

TCD Siroco

Opérat

POLYNÉSIE FRANÇAISE Polynésie française

Au large PSP Le M Point d’appui Bases permanentes à l’étranger et outre-mer Département, collectivité ou territoire d’outre-mer Zones économiques exclusives françaises 4  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

EN MISSION PERMANENTE : Sous-marin lanceur d’engin (SNLE) Atlantique II Commandos

Manche/mer mer du Nord CMT Éridan Opération Otan de déminage an dééminage g PSP Pluvier Patrouille vier i atrouil o

Méditerranné Médit erranné occidentale occcidentale Patrouille PSO L'Adroit L'Adroit Patrouille

ment ment hhydrographique ographique Abu Dhabi

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large Au lar ge de TToulon ooulon FDAA CChevalier opérationnelle FD hevalierr PPaul aul PPréparation réparation opér ationnelle opérationnelle FFAA AA Jean BBart art PPréparation réparation opér ationnelle opérationnelle FLF AAconit conit PPréparation réparation opér onnelle opérationnelle FLF SSurcouf urcouf PPréparation rép ationn opérationnelle BCR Meuse PPréparation ré a ration CDTT BBouan opérationnelle AAviso viso CD ouuan PPréparation réppa atio CDTT BBirot AAviso viso CD irot o PPréparation répara opérationnelle péé Jacoubet AAviso viso EEVV Jac oubet PPréparation par ion opérationnelle pa CMTT OOrion Préparation CM rion épara i opérationnelle Hallebarde Préparation opérationnelle CDIC Hallebar épa Montcalm opérationnelle FFASM ASM M tca m PPréparation rép CDT Ducuing AAviso viso CD u uui Préparation opérationnelle Préparation opérationnelle BCR VVar a Préparation opérationnelle BPC DDixmude ixm FAA Cassard Préparation opérationnelle BBPDD AAchéron Préparation opérationnelle c

D jibouti Djibouti

Lib breville Libreville Mayotte

tion Corymbe Corymbe 118

e de La Réunion Malin

La Réunion

Océan Indien FASM Dupleix FS Floréal

Wallis-et-Futuna WALLIS-ET-FUTUNA

Opération Atalantee Opération Atalante alante

RÉUNION-MAYOTTE-ÎLES ÉPARSES

Patrouille

NOUVELLE-CALÉDONIE Nouvelle-Calédonie

TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES

Au large de la Nouvelle-Calédonie FS Vendémiaire Déploiement P400 La Glorieuse Patrouille

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  5

INFO

actus

PIRATERIE LE FLORÉAL PATROUILLE DANS L’IRTC

SURVEILLANCE DE LA ZONE DEPUIS LA PASSERELLE DU FLORÉAL.

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DUPLEIX : COOPÉRATION OPÉRATIONNELLE AVEC LA MARINE INDIENNE

Début novembre, la frégate Dupleix a mené une activité de coopération avec la Marine indienne. À ses côtés, la frégate Ganga, le patrouilleur Abhay et un avion de patrouille maritime indien. Le programme de coopération incluait des exercices de logistique, de manœuvre et opérationnels. Le Dupleix a conclu sur un exercice de lutte antipiraterie et a pu présenter aux marins indiens l’ensemble de la procédure depuis la détection d’une embarcation suspecte jusqu’au placement en rétention de pirates présumés. La réalisation d’un entraînement mutuel sur trois jours de mer marque à cet égard la réalité de l’interopérabilité franco-indienne à la mer.

1 Depuis le 26 octobre 2012, la frégate de surveillance Floréal, engagée dans l’opération européenne Atalante, patrouille dans l’International Recommended Transit Corridor (IRTC), couloir de navigation recommandé à tous les bâtiments souhaitant traverser le golfe d’Aden. La présence de navires de guerre au sein de ce dispositif rassure les quelque 20 000 bâtiments de commerce qui y transitent chaque année et dissuade

d’éventuels actes de piraterie. Le golfe d’Aden est une des routes maritimes les plus empruntées au monde avec, par jour, plus de 50 navires et 30 % des approvisionnements européens en pétrole et en gaz qui y passent. Ainsi, l’approvisionnement de la France et plus largement de l’Europe dépend très largement des flux maritimes transitant dans cette zone s’étendant sur 480 miles marins (soit 890 km). Différentes marines des pays limitrophes patrouillent également dans l’IRTC assurant une protection d’une partie du corridor ou de certains bâtiments directement liés aux intérêts de leur pays. Depuis la création de ce couloir en 2008, aucun navire du Programme alimentaire mondial (PAM) l’empruntant n’y a été attaqué. Cela fait maintenant quelques semaines que l’on note une reprise des activités de piraterie avec le retour de conditions climatiques plus clémentes. Dans l’océan Indien, le mois d’octobre sonne en effet la fin de la mousson et le début de l’été. Le Floréal a donc redoublé de vigilance, vérifiant chaque navire de commerce identifié avec la liste du Maritime Security Center Horn of Africa (MSCHOA). Ce centre, situé à l’état-major de l’opération Atalante, à Northwood, près de Londres, entretient une liste complète des bâtiments de commerce, recensant de nombreuses données comme leur taille, la nature de leur cargaison ou encore leur numéro International Maritime Organisation (IMO), véritable plaque d’immatriculation. 

CROIX DU SUD NEUF NATIONS S’ENTRAÎNENT DANS LE PACIFIQUE

RETOUR À BREST APRÈS L’ENTRAÎNEMENT JOINT WARRIOR

Après un mois et demi de mer, la frégate anti-sous-marine LatoucheTréville était de retour à Brest fin octobre. Pendant douze jours, le Latouche-Tréville a été le seul bâtiment français à participer à l’entraînement Joint Warrior, organisé par l’Angleterre dans le Nord de l’Écosse. 25 bâtiments et 10 nations de l’Otan participaient à cet entraînement multimenace (exercices de lutte antipiraterie, antiterrorisme, anti-sous-marine…). Après cette préparation opérationnelle, le Latouche-Tréville a effectué deux Passex : un avec un sous-marin norvégien et un autre avec deux navires allemands. 6  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

1 Organisé tous les deux ans par les Forces armées en Nouvelle-Calédonie, l’entraînement Croix du Sud a rassemblé 1 260 militaires de neuf nations du Pacifique(1), du 12 au 26 octobre 2012. Le Pacifique, c’est d’abord les immensités océaniques, de nombreux États insulaires et des risques spécifiques, naturels principalement (cyclones, tsunamis…). Les forces armées des nations riveraines doivent donc s’entraîner pour des missions de projection de forces ou d’assistance humanitaire. L’exercice Croix du Sud 2012 a permis de simuler une opération de projection de forces. Il s’agissait de conforter les capacités d’actions communes et de développer l’interopérabilité des partenaires. Le volet

APPAREILLAGE DE LA FRÉGATE DE SURVEILLANCE VENDÉMIAIRE POUR L’ENTRAÎNEMENT CROIX DU SUD.

maritime de l’exercice, structurant pour ce théâtre, impliquait pour la France la frégate Vendémiaire, le Batral Jacques Cartier et le patrouilleur La Glorieuse. Le volet terrestre, quant à lui, impliquait les fusiliers marins de la base navale de Nouméa qui fournissaient des éléments de force adverse, tandis que des missions de Gardian contribuaient à l’entraînement de la force.  (1) Les États engagés dans l’exercice : Australie, France, Nouvelle-Zélande, Papouasie Nouvelle-Guinée, Royaume du Tonga, Vanuatu et pour la première fois le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni.

ENTRAÎNEMENT DE LUTTE ANTIPOLLUTION AU LARGE DE CHERBOURG 1 La préfecture maritime Manche-mer du Nord a organisé un exercice de lutte antipollution au large de Cherbourg, les 17 et 18 octobre 2012. Un cargo entre en collision avec un navire transportant du gaz liquéfié. Le centre opérationnel de la Marine à Cherbourg est rapidement alerté par le Cross À BORD DE L’ARGONAUTE, LE DIRECTEUR DU CEPPOL COORDONNAIT L’ENSEMBLE Jobourg. L’équipage est sain et DES MOYENS SUR ZONE DONT L’ABEILLE LIBERTÉ, LE PATROUILLEUR DE SERVICE sauf ; voie d’eau et gîte sont PUBLIC CORMORAN ET LES REMORQUEURS PORTUAIRES ET CÔTIERS SAIRE ET FRÉHEL. maîtrisées. Toutefois, l’absence d’électricité ne permet plus de réfrigérer la cargai- tion. Le directeur du centre d’expertises pratiques son, qui menace d’exploser. Une équipe d’évalua- de lutte antipollution (Ceppol), à bord du bâtition et d’intervention est rapidement dépêchée à ment d’assistance de soutien et de dépollution Argobord. Tel était le scénario de l’exercice « papier » joué naute était à la manœuvre et coordonnait l’enle 17 octobre à la préfecture maritime et qui a per- semble des moyens sur zone : le remorqueur mis de mettre en œuvre les procédures prévues par d’intervention, d’assistance et de sauvetage l’Abeille le dispositif Orsec maritime dans son niveau 3. Il Liberté, le patrouilleur de service public Cormoran, s’agissait en particulier de mettre sur pied une équipe les remorqueurs portuaires et côtiers Saire et Fréde gestion de crise capable d’anticiper et d’agir dans la hel et divers moyens nautiques mobilisés par la durée. base navale de Cherbourg. Le lendemain, un pétrolier était cette fois privé de En outre, un navire affrété par l’Agence européenne propulsion et perdait une partie de sa cargaison au de sécurité maritime (EMSA) a par ailleurs apporté large de Cherbourg. Cette journée avait pour objec- son concours et mis en œuvre ses capacités de tif de « mécaniser » les moyens de lutte antipollu- ramassage et de pompage d’hydrocarbures. 

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B R E F

UN DIPLOMATE AU CIN DE BREST

Le 25 octobre 2012, le centre d’instruction naval de Brest a reçu Jean-Noël Bonnieu, rédacteur au ministère des Affaires étrangères (MAE), direction des Nations unies et des organisations internationales. Le diplomate est intervenu sur le thème du métier diplomatique et du système international de gestion de crise. Il a rappelé que la diplomatie et la Marine nationale sont deux fonctions clés de la puissance internationale de la France. Il a également expliqué l’articulation de la diplomatie et des forces armées dans les relations internationales. Pour ce faire, il s’est appuyé sur trois opérations de la Marine qui ont nécessité, en amont, un travail des diplomates au Conseil de sécurité : l’opération européenne de lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes (Atalante), l’opération militaire de l’Otan en Libye (Harmattan) et la force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul).

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  7

INFO

actus

LE VIGILANT SORT DE GRAND CARÉNAGE

APRÈS 30 MOIS DE GRAND CARÉNAGE, LE SNLE LE VIGILANT EST SORTI DU BASSIN LE 22 OCTOBRE 2012.

1 Le programme Coelacanthe prévoit que trois des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) voient leur armement modernisé. Le 22 octobre 2012, après 30 mois de grand carénage, Le Vigilant est ainsi sorti du bassin en étant le second à être doté du missile balistique M51. Le programme de modernisation des SNLE a débuté fin 2010 et s’étalera sur huit années. Il concernera trois des SNLE type Le Triomphant : Le Vigilant, Le Triomphant et Le Téméraire. Ces travaux sont menés en E N

B R E F

SÉANCE INAUGURALE DU COURS DE GÉNIE ATOMIQUE

La séance inaugurale du cours de Génie atomique de l’année scolaire 2012-2013, à l’École des applications militaires de l’énergie atomique (EAMEA), a eu lieu le 25 octobre 2012. Sous la présidence du viceamiral d’escadre Bruno Nielly, préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, la leçon inaugurale a été donnée par M. Pierre Léna, astrophysicien et membre de l’académie des sciences, qui est intervenu sur le thème « Sciences et éducation ». Cette séance a également été pour l’EAMEA l’occasion de proposer une rencontre entre ses différents partenaires, notamment industriels, tel que DCNS ou le Commissariat à l’énergie atomique (CEA).

parallèle avec les indisponibilités périodiques pour entretien et réparations (IPER). Durant la période de grand carénage du Vigilant, trois types d’équipements ont été adaptés : l’armement (avec le missile à portée intercontinentale M51), le système de combat tactique est modernisé, ainsi que le système global de navigation. Afin de disposer d’un missile capable d’une portée intercontinentale, il a fallu accroître sa masse de l’ordre de 50 % sans pour autant engendrer d’impor-

Retrouver cet événement en vidéo :

LA MARINE PRÉSENTE À EURONAVAL 1 La Marine nationale était présente à la 23e édition du salon Euronaval qui a réuni 400 exposants du secteur naval et maritime, du 22 au 26 octobre 2012, au parc des expositions de Paris le Bourget. Elle

LA MARINE ANIMAIT LE STAND DE LA DÉFENSE QUI PRÉSENTAIT LES DIFFÉRENTS ASPECTS DES OPÉRATIONS AMPHIBIES. 8  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

tantes modifications du sous-marin. Ceci a été en grande partie rendu possible par l’utilisation intensive des matériaux composites à base de fibres de carbone. Par ailleurs, la précision du missile a été améliorée. En visite à bord du SNLE Le Terrible le 4 juillet dernier, le Président François Hollande a confirmé que la modernisation de notre dissuasion était indispensable pour renforcer la performance des équipements et par là même la crédibilité de notre défense. « La dissuasion nucléaire est le patrimoine de toute la nation. Comme chef des armées, j’ai la responsabilité de sa continuité, je dois en assurer la poursuite. Je dois préserver à la fois un niveau technique qui doit rester de très grande qualité et puis une recherche qui doit être en permanence renouvelée. » L’invulnérabilité des SNLE et le niveau de performance de ses missiles fondent en effet la crédibilité de la composante océanique stratégique. Pour faire peser cette menace absolue sur quiconque intenterait aux intérêts vitaux de la France, ou pour prévenir toute surprise stratégique, le défi technologique est grand : il consiste à lancer l’équivalent de seize minifusées Ariane à partir d’un sous-marin en immersion. Il importe donc de maintenir le bâtiment et ses armes au meilleur niveau disponible. Le Vigilant entre à présent en phase d’essais et d’entraînement avant de rejoindre le cycle opérationnel. 

a naturellement animé le stand de la Défense, qui, sur 152 m2, a présenté les différents aspects des opérations amphibies. Du personnel des trois armées, reflets de la complémentarité dans les actions amphibies, était présent pour présenter ses expériences opérationnelles aux visiteurs. Des écrans permettaient de visualiser le savoir-faire opérationnel des forces et les différents systèmes développés par l’industrie française pour accomplir les missions aéromaritimes. La présence de la Marine nationale aux côtés des industriels s’inscrivait dans le cadre des intérêts convergents des deux parties. Les matériels utilisés par la Marine sont en effet construits pour l’essentiel par des industriels français ou en coopération avec nos alliés. Leur utilisation par la Marine permet ainsi de prouver leurs capacités opérationnelles et d’obtenir le label « Sea/Combat Proven » (éprouvé en opérations), qui est à l’évidence une caution pour l’exportation. C’est aussi dans ce but que plusieurs dizaines de délégations étrangères se sont rendues à Toulon le 22 octobre. Elles ont ainsi pu visiter in situ les plus récents bâtiments de la Marine nationale. 

ANTILLES ENTRAÎNEMENT BILATÉRAL AUX TECHNIQUES AMPHIBIES 1 Dans le cadre de la coopération militaire bilatérale avec Trinidad, le bâtiment de transport léger (Batral) Francis Garnier a mis en œuvre une compagnie de l’armée de Terre française et une de l’armée de Terre trinidadienne pour un entraînement aux techniques amphibies (Techphib), du 11 au 13 octobre 2012. L’objectif de cet entraînement était de former et d’accoutumer les militaires aux spécificités des opérations amphibies à partir du Batral Dumont d’Urville. Le Batral a effectué plusieurs opérations d’embarquement et de débarquement amphibies entre la base navale de Fort-de-France et la plage du Carbet, de jour comme de nuit. Pendant ces trois jours, les militaires français et trinidadiens ont été sensibilisés aux opérations amphibies à travers un cycle d’instructions donné par l’équipage du Batral. Ils ont reçu des formations élémentaires sur la sécurité et la survie en mer et des formations techniques, individuelles et collectives, de manœuvres à la mer et de mise à terre des hommes et des véhicules. Dans le cadre de leurs missions, les FAA mènent des actions de coopération régionale et entretiennent des relations privilégiées avec l’ensemble des nations présentent dans la zone maritime Antilles. Dans le cadre de la réorganisation des armées, les FAA constituent avec les forces armées en Guyane (FAG) le « théâtre » Antilles-Guyane. Dans une logique de complémentarité et de mutualisation, les FAA mettent ainsi en œuvre un dispositif interarmées à dominante maritime et les FAG, principal point d’appui du « théâtre » AntillesGuyane, un dispositif interarmées à dominante aéroterrestre. 

Que deviennent vos contributions ? Après leur publication sur le site Intradef, vos contributions font l’objet de synthèses préparées par le cabinet du ministre de la Défense. Ces synthèses sont régulièrement transmises à la Commission du Livre blanc. Elles participent donc à la réflexion

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PASSEX FRANCO-KOWEITIEN SUR LE DUPLEIX

Le 18 octobre 2012, la frégate Dupleix a effectué un entraînement conjoint avec la Marine royale koweitienne. À cette occasion, deux officiers du Dupleix se sont rendus sur le patrouilleur koweitien Maskan afin de faciliter les échanges entre les deux bâtiments. Au cours de cet entraînement bilatéral, l’équipe de visite koweitienne a été mise en œuvre sur le Dupleix, tandis que des membres de l’équipage de la frégate se sont rendus sur le patrouilleur koweitien pour un exercice de sécurité. Le partage d’expériences et la comparaison des procédures ont permis un échange fructueux, facilité notamment grâce aux nombreux officiers francophones formés à l’École navale depuis plusieurs années. LA MARINE RÉCOMPENSÉE

LE BATRAL DUMONT D’URVILLE A EFFECTUÉ PLUSIEURS OPÉRATIONS D’EMBARQUEMENT ET DE DÉBARQUEMENT AMPHIBIES DANS LE CADRE DE LA COOPÉRATION MILITAIRE BILATÉRALE AVEC TRINIDAD.

VOUS AUSSI, PARTICIPEZ À LA RÉFLEXION SUR LE LIVRE BLANC ! 1 Avez-vous pensé à apporter votre réflexion pour l’élaboration du Livre blanc ? En vous connectant sur Intradef, vous pouvez désormais consulter les contributions en accès libre mais surtout participer aux réflexions en cours en vous créant un compte personnel grâce à votre adresse mail intranet. Vous pourrez ainsi contribuer, déposer un message, recommander une publication ou faire un commentaire.

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pour ce nouveau Livre blanc et plus largement à la vie du ministère de la Défense.

Comment ça marche ? Connectez-vous à l’adresse http://portail-livreblanc.intradef.gouv.fr pour suivre les actualités liées à l’élaboration du Livre blanc. Si vous ne bénéficiez pas d’adresse mail intranet ou si vous ne souhaitez pas voir vos contributions publiées sur la plate-forme intranet, il est possible d’envoyer via Internet ou Intranet vos contributions à l’adresse [email protected]. Dans votre message, vous préciserez si vous souhaitez que votre contribution apparaisse ou non sur le portail Intradef et précisez, le cas échéant, votre pseudonyme qui sera utilisé sur le portail intranet. 

Plusieurs films réalisés par la Marine nationale ont été primés lors du dernier festival du film de la Défense et de la sécurité intérieure, organisé à Antibes Juan-Les-Pins du 19 au 21 octobre dernier. Ce rendez-vous bisannuel des productions multimédia des ministères de la Défense et de l’Intérieur permet de faire connaître leurs travaux au public. Cette année, la concurrence était rude. Pour autant, les clips réalisés par le Sirpa Marine ont reçu le deuxième prix du festival. L’Hommage à Pierre Schoendoeffer a été le plus applaudi. Il a reçu le premier prix du festival et le deuxième prix du jury jeune. Stéphane Dugast, de la cellule production du Sirpa Marine, a réalisé ce documentaire. Il se réjouit de la visibilité offerte à ce « cinéaste et écrivain de renom qui a su capter l’âme du marin et sa quête perpétuelle d’horizons lointains ». Découvrez les vidéos primées : La Marine en 75 secondes :

L’hommage à Pierre Schoendoeffer :

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  9

INFO

actus

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B R E F

INTERVENTION DU GROUPEMENT DES PLONGEURS DÉMINEURS AU LARGE DE BELLE-ÎLE

Le 22 octobre 2012 au large de Belle-Île, un chalutier récupère à son bord un obus d’un mètre de long et de 40 cm de diamètre. Alerté, le Cross Etel demande immédiatement l’intervention du groupement des plongeurs démineurs (GPD) de la Marine nationale. Parallèlement, la vedette de la gendarmerie départementale est dépêchée sur zone par mesure de sécurité. Quatre plongeurs démineurs sont hélitreuillés à son bord par un hélicoptère EC 225 de la Marine, puis transférés à bord du chalutier. L’obus est remis à l’eau puis contre-miné par l’équipe du GPD. HÉLITREUILLAGE D’UN PLONGEUR DÉMINEUR DE LA MARINE NATIONALE À BORD DE LA VEDETTE DE LA GENDARMERIE DÉPARTEMENTALE.

JUMELAGE ENTRE LA FRÉGATE ACONIT ET LE RÉGIMENT DES CHASSEURS DE GAP

Les 23 et 24 octobre 2012, le quartier général Guillaume du 4e régiment de chasseurs alpins de Gap a accueilli une délégation de la frégate furtive Aconit à l’occasion d’une cérémonie de jumelage entre les deux unités. Ce jumelage s’inscrit dans une démarche de rapprochement entre les armées qui, malgré les différences de milieu (maritime et terrestre), sont animées des mêmes valeurs. UNE ASTRONAUTE À L’ÉCOLE NAVALE

Le 26 octobre 2012, Mme Claudie Haigneré, première femme astronaute française, est intervenue devant plus de 300 élèves de l’École navale et du groupe des écoles du Poulmic (ENGEP) pour la conférence inaugurale de l’année scolaire 2012-2013. La présidente d’Universcience a évoqué la « Place des Sciences, au XXI e siècle, dans un environnement en perpétuelle évolution ». Tout au long de l’année scolaire, plusieurs conférences d’intérêt général seront ainsi proposées aux élèves, dans le cadre de la formation humaine et militaire, afin d’acquérir une culture générale et maritime. 10  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

LA FAYETTE RETOUR APRÈS 103 JOURS D’OPÉRATION 1 Après 103 jours de déploiement au sein de la force européenne de lutte contre la piraterie Atalante, la frégate La Fayette est rentrée à Toulon le 6 novembre dernier. « En mer, l’efficacité de la lutte est due à une connaissance plus fine des modes d’action des pirates. Grâce aux nombreuses patrouilles d’hélicoptères, d’avions ou des autres bâtiments de la force, nous décelons au plus tôt les velléités des pirates », explique le CV Guillaume Merveilleux du Vignaux, commandant de la frégate. « Une grande partie du travail consiste à consolider notre connaissance de la zone et à rassurer les gens de mer qui la fréquentent, ajoute le commandant. Nous avons donc énormément échangé avec les pêcheurs locaux ou les acteurs du théâtre et interrogé de nombreux boutres. » Témoin de l’approche globale menée par l’Union européenne sur le dossier de la piraterie, l’événement le plus marquant de la mission restera d’ordre diplomatique. Mme Catherine Ashton, la haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la Politique

EN 103 JOURS DE DÉPLOIEMENT, L’ÉQUIPE DE VISITE DU LA FAYETTE A INVESTIGUÉ DE NOMBREUX BOUTRES.

de sécurité est venue en visite officielle à bord du La Fayette. Elle était accompagnée de diplomates de haut rang et des chefs des trois opérations de sécurité et de défense mises en œuvre par l’UE dans la région. « Au cœur du théâtre d’opérations, ils ont ainsi pu juger du bien-fondé et de la cohérence des actions qu’ils dirigent. Le commandant de la force Atalante a d’ailleurs tenu à souligner à l’issue de cette visite toute l’efficacité de la force à la mer au sein du dispositif européen global. » 

FORT-DE-FRANCE À L’HEURE MEXICAINE 1 Le Cuauhtméoc, navire-école de la Marine nationale mexicaine a fait escale à Fort-de-France du 11 au 17 octobre 2012. Ce grand voilier de type troismâts barque accueille actuellement à son bord 93 cadets de l’École navale mexicaine. Quelques semaines plus tôt, il avait déjà fait escale à Cherbourg, Brest et Bordeaux. En parallèle, un groupe de travail opérationnel franco-mexicain, présidé par le contre-amiral Georges Bosselut, commandant supérieur des Forces armées aux Antilles (Comsup FAA), et le contre-amiral Islas

Sanchez, sous-chef opérations à l’état-major de la Marine mexicaine. La délégation mexicaine a assisté à un exposé sur la zone de responsabilité permanente Amérique latine-Caraïbes, confiée aux Forces armées des Antilles et de Guyane, avec un focus particulier sur le volet maritime Caraïbe/Pacifique. Après une présentation des moyens et des missions des FAA, la délégation mexicaine a pu observer grandeur nature les capacités de la base navale de Fort-deFrance et notamment ses moyens de lutte contre les pollutions maritimes. Au cours de la visite de la frégate de surveillance Germinal, elle a assisté à une démonstration dynamique d’interception de go-fast par l’équipe de visite embarquée sur Etraco. Elle s’est ensuite rendue à l’antenne de Fort-de-France de l’Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS). Cet échange faisait suite à une visite officielle du contre-amiral Georges Bosselut et d’une délégation des FAA au Mexique en septembre dernier, au cours de laquelle les liens ARRIVÉE À FORT-DE-FRANCE DU VOILIER-ÉCOLE CUAUHTÉMOC DE LA MARINE entre les armées française et mexiNATIONALE MEXICAINE, ESCORTÉ PAR LE REMORQUEUR PORTUAIRE CÔTIER MAÏTO DE LA BASE NAVALE DE FORT-DE-FRANCE. caine s’étaient déjà resserrés. 

CORYMBE LA MARINE GABONAISE À L’ÉCOLE DU SIROCO

MANŒUVRE AVIATION ET DE CHALANDS DE TRANSPORT DE MATÉRIEL DE FAÇON SIMULTANÉE.

1 Engagé dans le 118e mandat de l’opération Corymbe, le transport de chalands de débarquement Siroco a profité de deux escales successives à PortGentil (Gabon) du 17 au 22 octobre, puis du 27 octobre au 2 novembre 2012, pour organiser un stage d’initiation aux opérations amphibies au profit des forces armées gabonaises. Avec une période d’instruction opérationnelle qui s’inscrit pleinement dans la mission Corymbe, quinze marins gabonais ont ainsi eu l’opportunité de découvrir ce concept d’emploi des forces. Après trois jours de relâche opérationnelle consacrés à une formation initiale, une phase pratique de cinq jours s’est déroulée en mer et sur la plage de Nyonié située sur l’équateur, à mi-chemin entre Libreville et Port-Gentil. Avec le Siroco oscillant entre les hémisphères nord et sud, le détachement gabonais a pu mettre en pratique les connaissances acquises par la mise en œuvre des moyens embarqués de la flottille amphibie. Les marins ont ainsi embarqué à bord des chalands de transport de matériel, appréhendé le travail de la section navale de plage dans sa reconnaissance de

site et effectué des manœuvres de plageage. Les stagiaires ont pu prendre en compte la composante aéromobile des opérations amphibies puisque cette période à la mer a été l’occasion d’un entraînement conjoint entre le Siroco, deux hélicoptères Puma de l’aviation légère de l’armée de Terre et un Fennec de l’armée de l’Air prépositionnés à Libreville. En parallèle, les plongeurs de bord ont pu effectuer deux plongées en coopération avec leurs homologues gabonais tandis qu’une dizaine de marins gabonais étaient intégrés aux exercices sécurité effectués quotidiennement à quai par la fraction de service. Le Siroco est engagé dans la mission Corymbe depuis le 8 octobre 2012. Il s’agit d’une mission de présence permanente des forces armées françaises dans le golfe de Guinée. Elle constitue un complément au dispositif français prépositionné en Afrique occidentale (forces françaises au Gabon et éléments français au Sénégal), tout autant qu’un appui pour d’éventuelles opérations (de la contribution à la sécurisation d’un pays à l’appui aux opérations d’évacuation de ressortissants). 

E N

B R E F

LA FRÉGATE GUÉPRATTE REÇOIT LA CROIX DE LA VALEUR MILITAIRE

Le vice-amiral d’escadre Xavier Magne, commandant la Force d’action navale, a décoré la frégate légère furtive Guépratte de la Croix de la Valeur militaire avec palme de bronze, le 11 novembre 2012 à Metz, sa ville marraine. Cette décoration lui a été attribuée pour son engagement dans l’opération Harmattan au large des côtes libyennes du 6 juin au 2 juillet 2011. Le Guépratte a participé notamment à des missions de surveillance et de dissuasion, de protection du porte-avions et de soutien aux opérations du groupe aéromobile par des frappes de protection avant et après leur action. Parmi les faits marquants, elle a effectué des tirs contre des positions d’artillerie des forces pro-Kadhafi, des tirs en riposte de tirs essuyés par le bâtiment en provenance de batteries canons et roquettes des forces pro-Kadhafi, mais aussi des incursions à proximité des ports tenus par les forces pro-Kadhafi de jour comme de nuit. GUERRE ÉLECTRONIQUE : LA FRÉGATE JEAN BART RÉCOMPENSÉE PAR L’OTAN

L’AOC (Association des Old Crows), sur proposition de la NEWAC (NATO Electronic Warfare Advisory Committee) décerne annuellement un prix à une unité de l’Otan ayant œuvré de manière particulièrement brillante dans le domaine de la guerre électronique. Cette année, l’AOC a décidé de distinguer la frégate antiaérienne Jean Bart pour ses actions de brouillage, de leurrage et d’interception électromagnétique effectuées lors de l’opération Unified Protector devant la Libye en 2011. Lors des combats littoraux, sous la menace de l’artillerie des forces proKadhafi, l’utilisation des brouilleurs et des leurres mis en œuvre par le Jean Bart avait permis, à plusieurs reprises, de protéger les actions de la frégate et celles de certaines unités de l’Otan agissant sous mandat de l’ONU. Le CV de Jerphanion, commandant de la frégate jusqu’en août dernier, a officiellement reçu cette distinction, source de fierté pour le Jean Bart, à Phoenix, en Arizona le 24 septembre 2012. Elle a ensuite été solennellement remise à l’équipage par le vice-amiral d’escadre Xavier Magne, commandant la Force d’action navale au cours d’une cérémonie le 8 octobre dernier. COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  11

PASSION

Marine

LES FREMM, CE SONT DES ÉQUIPAGES RÉDUITS À 108 MARINS (Y COMPRIS LE DÉTACHEMENT AÉRO POUR LE NH-90 CAIMAN). UN CHIFFRE À COMPARER AUX 298 MARINS POUR LES FRÉGATES DE TYPE TOURVILLE, ÉQUIVALENTES EN TONNAGE, AUX 240 MARINS POUR LES FRÉGATES DU TYPE GEORGES LEYGUES, ET AUX 153 MARINS DE FRÉGATES DE TYPE LA FAYETTE.

12  COLS BLEUS  N°3002  17 NOVEMBRE 2012

ouvelle donne. Les bâtiments de la Marine nationale, marine océanique parmi les premières du monde, doivent répondre à des exigences accrues en matière d’interopérabilité, de performances militaires, de polyvalence d’emploi et de facilités d’entretien, tout en respectant le principe de la « juste suffisance technologique ». La réponse passe notamment par une plus grande automatisation des systèmes embarqués, mais aussi par une optimisation de leurs équipages en volume et qualité, sans pour autant sacrifier leur efficacité opérationnelle. Dans ce domaine, les équipages des bâtiments de projection et de commandement (BPC) et des frégates de défense aérienne (FDA) préfigurent ceux des frégates multimissions (Fremm). Ces bâtiments de premier rang, conçus pour former la colonne vertébrale de la Marine nationale, sont caractéristiques de la thématique des équipages optimisés et du concept afférent de « reachback ». À Brest, Lorient, Toulon ou en mer, des changements sont d’ores et déjà sensibles dans la vie des marins du fait de l’optimisation des équipages, qu’ils appartiennent à la Force d’action navale (FAN) ou à la Force océanique stratégique (Fost). « Reachback », équipages optimisés, automatisation des bâtiments… Quelles sont exactement les évolutions et les conséquences auxquelles le marin doit s’attendre ? Premiers éléments de réponse dans ce dossier consacré à un sujet central de la Marine nationale de ce début de XXIe siècle. S’articulant d’abord autour de retours d’expérience du BPC et de ses marins, placés aux premières loges de la réduction des équipages, ce dossier se focalisera ensuite sur les Fremm, un exemple parlant à bien des titres. Seront également évoqués le soutien à terre, notamment l’émergence d’une nouvelle structure baptisée « reachback », et les changements que ces nouveaux concepts induisent en matière de ressources humaines. 

N

DOSSIER RÉALISÉ PAR STÉPHANE DUGAST

DE L’AVANT

L’OPTIMISATION DE NOS ÉQUIPAGES COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  13

PASSION

Marine

Échos du bord (1)

« RETEX » BPC

Le bâtiment de projection et de commandement (BPC) est un bâtiment novateur aux performances considérables dont l’équipage est fortement optimisé. Trois questions au capitaine de corvette Laurent Nicolas, commandant adjoint équipage du Dixmude. Par quoi la diminution de l’équipage sur BPC est-elle compensée ? 177 marins, c’est le plan d’armement « socle » du BPC, soit son dimensionnement au plus juste pour la mise en œuvre du bâtiment dans la durée et pour ses missions génériques. Il faut également prévoir, selon le cas, le soutien nécessaire à l’accueil des « modules mission » qui constituent le système d’armes du BPC. Le nombre de militaires présents à bord peut alors passer de 177 jusqu’à environ 650 lorsque le BPC est déployé avec un état-major tactique et la capacité de projection de force (groupe aéromobile) et de puissance (engins et troupes de débarquement). Quels sont les impacts concrets pour un commandant adjoint équipage ? Un équipage moins nombreux ne veut pas dire moins compétent, bien au contraire ! Les savoirfaire reposent alors sur un nombre plus restreint de marins. L’une des principales difficultés identifiées est la formation des marins, notamment la formation à l’emploi, mais également de spécialité des plus jeunes. Pour pallier ces problématiques et la charge importante d’entretien qui

EN PLUS DU BÂTIMENT DE PROJECTION ET DE COMMANDEMENT (BPC) MISTRAL (CF CI-DESSUS), LA MARINE NATIONALE DISPOSE DE DEUX AUTRES BÂTIMENTS DE CE TYPE : LE TONNERRE ET LE DIXMUDE, ADMIS AU SERVICE ACTIF EN JUILLET DERNIER.

TRÈS POLYVALENTS, LES BPC SONT À LA FOIS PORTE-HÉLICOPTÈRES, TRANSPORTS DE TROUPES, DE MATÉRIEL ET DE CHALANDS DE DÉBARQUEMENT, HÔPITAUX FLOTTANTS, BÂTIMENTS DE COMMANDEMENT. À BORD, LES EFFECTIFS PEUVENT DONC CONSIDÉRABLEMENT VARIER D'UNE MISSION À L'AUTRE. EN PLUS DE SON ÉQUIPAGE (177 MARINS), LE BPC PEUT, PAR EXEMPLE, EMBARQUER UN ÉTAT-MAJOR JUSQU’À 200 PERSONNES, PLUSIEURS CENTAINES DE SOLDATS DE L'ARMÉE DE TERRE.

revient aux équipages, les BPC mutualisent un module de renfort dit « renfort escouade(2) ». Les marins qui y sont affectés pour une durée de principe d’un an servent en priorité de renfort à quai ou à la mer pour se former(3), tout en renforçant l’équipage en titre qui doit souvent faire face à des surcroîts d’activité opérationnelle ou de maintenance. Ces marins seront ensuite mutés sur BPC. Il faut donc que je gère des compétences globalement au niveau du bord et ensuite que j’adapte, avec une bonne dose de flexibilité, les équipes de quart pour faire face à toutes les situations.

tion des connaissances, plus centralisée et plus fine de l’ensemble des compétences présentes à bord. La répartition des responsabilités permet d’exposer tout le monde différemment, notamment les plus jeunes. Je constate, au quotidien, une plus grande interdépendance entre les officiers, les officiers mariniers, les quartiers-maîtres et matelots. Cela renforce l’esprit d’équipage et nos marins se sentent certes extrêmement sollicités mais très largement responsabilisés et valorisés quels que soient les grades. 

Y a-t-il de grandes différences d’impacts selon les grades ? Un équipage moins nombreux appelle une ges-

(1) Retour d’expérience. (2) Il est composé d’environ 90 marins de toutes spécialités et de tous grades. (3) Dans la perspective de s’approprier le fonctionnement du bâtiment.

TÉMOIGNAGES DU BORD  « Il me semble que l’équipage réduit est une bonne chose mais il faut du temps pour s’approprier les outils et savoir les utiliser convenablement. » OMS, responsable du secteur sécurité

légèrement différente par rapport aux bâtiments d’ancienne génération. Les officiers mariniers travaillent autrement en équipe et les fonctions d’encadrement sont souvent différentes. » OM, manœuvrier

 « Au sein d’un équipage optimisé sur un bateau moderne et fortement automatisé comme le BPC, la pyramide des grades est

 « Concernant la vie à bord, j’ai l’impression qu’on se repose moins sur les autres, qu’on a parfois le sentiment d’être esseulé, d’autant que le bateau

14  COLS BLEUS  N°3002  17 NOVEMBRE 2012

est immense. Il y a une sensation de vide, le soir. Là encore, c’est à nous de nous adapter, notamment en effectuant un travail permanent de cohésion pour souder les membres du carré et de redoubler d’efforts pour animer les espaces communs le soir. Les repas sont, du coup, des moments essentiels pour se rencontrer et se retrouver. » OM, fusilier

Ressources humaines & gestion

« ON AVANCE EN MARCHANT » En charge de la gestion de 1 300 officiers de Marine « grosso modo de la formation initiale à Lanvéoc-Poulmic jusqu’à l’École de guerre », le capitaine de frégate Julien Duthu mesure d’ores et déjà les changements survenus et ceux à venir dans le recrutement et la gestion des officiers dans ce contexte nouveau.

PARMI LES NOMBREUSES CAPACITÉS NOUVELLES DES FREMM, IL Y AURA LA POSSIBILITÉ D’EMBARQUER DES MISSILES DE CROISIÈRE. LE SCALP NAVAL AURA UNE PORTÉE DE PLUSIEURS CENTAINES DE KILOMÈTRES. CE SERA LA PREMIÈRE FOIS QUE DES BÂTIMENTS DE SURFACE FRANÇAIS EN SERONT ÉQUIPÉS. CE TYPE D’ARMES A ÉTÉ MIS EN ŒUVRE DANS TOUS LES GRANDS CONFLITS DEPUIS L’OPÉRATION DESERT STORM EN 1991, JUSQUE PLUS RÉCEMMENT PENDANT UNIFIED PROTECTOR PRINCIPALEMENT PAR L’US NAVY AVEC LES MISSILES TOMAHAWK.

DANS LE DOMAINE DE LA SÉCURITÉ, UNE FREMM EST DIVISÉE EN ONZE TRANCHES ET SÉPARÉE, EN SON CENTRE, PAR UNE DOUBLE CLOISON, DÉLIMITANT DEUX DAMAGE CONTROL ZONE PERMETTANT LE CONFINEMENT EN CAS DE SINISTRE. POUR ÉVITER TOUTE MAUVAISE SURPRISE AVEC LE RECOURS MASSIF À L’AUTOMATISATION, L’ENSEMBLE DES SYSTÈMES DISPOSE DE REDONDANCES AVEC, PAR EXEMPLE, DEUX RÉSEAUX DE CÂBLES IDENTIQUES SUR CHAQUE BORD. LE PC SÉCURITÉ, SITUÉ À L’ARRIÈRE, EST EN OUTRE DOUBLÉ D’UN PC SÉCU DE SECOURS DERRIÈRE LA PASSERELLE.

Impacts

Répercussions

Concernant les Fremm, nous ne sommes pas encore en « régime établi ». Cependant, les évolutions sont déjà palpables. Sur une FDA par exemple, même si les équipages ne sont pas complètement optimisés au sens propre du terme, je constate qu’il faut y affecter, autant que possible, des officiers avec une expérience robuste et de solides savoir-faire. C’est encore plus vrai sur un BPC où il faut compter sur une structure de commandement réduite, mais devant faire face à une extraordinaire variété de missions donc de situations dans un cadre interarmées en général. C’est un concept novateur qui nous impose d’avancer en marchant et de constamment nous adapter afin de naviguer sur l’avant…

Pendant une période d’armement, les commandants me demandent logiquement du « super solide ». Au lieu d’un enseigne de vaisseau, on préfère souvent un « louffiat(1) » ayant effectué son école de spécialité de deuxième niveau(2). Même tendance sûrement chez les OM et les OMS. Pour préparer l’avenir, nous devons cependant veiller à faire des gestions de compétences, j’entends par là « injecter » des marins parfois un peu moins expérimentés afin qu’ils puissent progresser et donc accéder à leur tour à des postes de complexité croissante au fur et à mesure de l’avancement de leur carrière. Cela nécessite un surcroît d’encadrement et de supervision des niveaux supérieurs. C’est le prix à payer car on ne rentre pas dans la Marine « Lieutenant de vaisseau expérimenté »…

Contreparties

Fremm, FDA ou BPC, ce sont des bâtiments à bord desquels les marins affectés sont certes spécialistes de leur domaine mais en même temps extrêmement polyvalents. Il faut donc repenser la façon de servir en équipage. C’est une évolution significative, qui a des conséquences inévitables sur le recrutement, la formation et la gestion des carrières, à laquelle nous continuons de travailler, même si les BPC ou les FDA ont amorcé la tendance.

Solutions

Le « reachback » est par ailleurs un bon moyen pour acquérir les prérequis (cf. pp. 18 et 19). Grâce à ce « sas », la maîtrise préalable et progressive de l’essentiel des équipements, des processus et des procédures est possible. 

LE CF JULIEN DUTHU, ADJOINT AU CHEF DE BUREAU OFFICIER À LA DIRECTION DU PERSONNEL.

(1) Nom traditionnel du lieutenant de vaisseau (capitaine). (2) ESCAN : École des systèmes de combat et armes navales.

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  15

Avant

Frégate « ancienne» type FASM

100 %

100 %

100 %

Conduite

Mise en condition opérationnelle (MCO)

Service au mouillage

250 - 300

marins

(dont 14 pour le détachement aéro)

Équipages optimisés & Reachback Maintenant

+

FREMM

100 %

50 %

50 %

Conduite

Mise en condition opérationnelle (MCO)

Service au mouillage

Le Reachback

94

marins

14

marins

54

marins

SPE*

Gardiennage Alerte Formation Soutien

Conduite *Structure de pré-embarquement

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50 %

50 %

Mise en condition opérationnelle (MCO)

Service au mouillage

PASSION

Marine

Fremm

L’EXEMPLE LE PLUS ABOUTI Navires furtifs de nouvelle génération, les frégates européennes multimissions (Fremm) vont former la colonne vertébrale de la flotte de surface de la Marine nationale. Principales caractéristiques de ces bâtiments du XXIe siècle, un équipage réduit grâce à une automatisation poussée, une optimisation des processus de conduite et des conditions de vie à bord, ainsi que des conditions de maintenance facilitées. Trois questions au capitaine de vaisseau Benoît Rouvière, commandant de la Fremm Aquitaine. Avec son équipage, il poursuit les essais du bâtiment. Commandant, en quoi une Fremm se distinguet-elle ? D’abord par une automatisation très poussée. Cela a permis de réduire le format de l’équipage. Il est composé de 94 marins, femmes et hommes qui, du coup, sont affectés à plusieurs tâches tout au long de leur quart. Le centre opérationnel mobilise 8 à 15 marins, selon le niveau d’alerte. À la passerelle, il n’y a que trois marins de quart en permanence. À titre de comparaison, les frégates De Grasse ou Tourville, vieilles de plus de 30 ans, nécessitaient 300 marins. La frégate de type Horizon, récente, nécessitant, quant à elle 170 membres d’équipage. L’objectif affiché est de garantir en permanence au bâtiment un haut niveau de performance opérationnelle, tout en conduisant à une réduction du nombre de marins embarqués nécessaire pour mettre en œuvre le bâtiment dans toutes les configurations. Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de cette optimisation et automatisation très poussée ? Les fonctions de gestion de la plate-forme sont très automatisées. Le but est de permettre aux opérateurs de se focaliser le mieux possible sur le contrôle, la navigation et les opérations en cours. Ainsi, la passerelle intégrée possède des consoles pour toutes les opérations essentielles, notamment pour la navigation, le commandement et les communications. Pour optimiser le travail en passerelle, les opérateurs travaillent sur des consoles multifonc-

d’ancienne génération, il fallait s’appuyer sur 10 à 12 marins. Sur Fremm, ce module remplit le même rôle et les mêmes fonctions mais il est armé par 4 marins.

LE CAPITAINE DE VAISSEAU BENOÎT ROUVIÈRE, COMMANDANT DE LA FREMM AQUITAINE.

tions, qui permettent de réaffecter les tâches des opérateurs en temps réel en fonction de la situation. À mes yeux, c’est une avancée significative par rapport à des consoles spécifiques à une fonction. Autre exemple marquant, le module de lutte anti-sous-marine (ASM). Sur des bâtiments

Les performances d’un navire dépendant d’un équipage, qu’a-t-il été prévu dans ce domaine ? Les performances du bâtiment dépendent, en effet, de l’équipage et de son moral, lié notamment à ses conditions de vie. Sur Fremm, les espaces et les installations sont adaptés aux charges de travail de l’équipage, aux besoins de repos et de récupération. En résumé, l’équipage de conduite, détachement « aéro » compris, est constitué de 108 personnes, soit deux fois moins que celui des frégates des générations précédentes, tout en disposant d’une capacité de logements de 145 personnes permettant ainsi d’embarquer un état-major tactique ou des modules mission sans empiéter sur les espaces dédiés à l’équipage. 

QUATRE DIESELS GÉNÉRATEURS D’UNE PUISSANCE UNITAIRE DE 2200 KW ET DEUX MOTEURS ÉLECTRIQUES DE PROPULSION, CE SONT LES CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME PROPULSIF DES FRÉGATES EUROPÉENNES MULTIMISSIONS. UN MODE HYBRIDE PERMET AUX FREMM D’OPÉRER SILENCIEUSEMENT JUSQU’À PRÈS DE 16 NŒUDS. AU-DELÀ ET JUSQU’À 27 NŒUDS, UNE TURBINE À GAZ (TAG) PREND LE RELAIS.

LA SÉRIE EST LANCÉE… Les premières Fremm sont à divers stades d’assemblage à Lorient. La Fremm Aquitaine devrait être livrée à la Marine nationale avant la fin de l’année. Deuxième de série, la Fremm Mohammed VI est, quant à elle, destinée à la Marine royale du Maroc et armée jusqu’à sa livraison par un équipage de conduite composé en grande majorité de marins français. Troisième de série, la Fremm Normandie vient d’être mise à flot le 18 octobre dernier à Lorient, en présence du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian et du ministre du Budget, Pierre Moscovici. La Fremm Provence, quatrième de série, va quant à elle être prochainement assemblée dans la forme de construction, en lieu et place de la Fremm Normandie. Quant aux Fremm Languedoc et Auvergne, cinquième et sixième de série, elles ont vu leur construction débuter respectivement en septembre 2011 et août 2012.

«

Le reachback, c’est un équipage à terre qui sera amené à embarquer en mer mais qui d’abord assurera des missions de soutien ou de gardiennage au port du navire. Un peu à la façon de l’équipage vert dans les SNLE.

»

AMIRAL BERNARD ROGEL, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE LA MARINE.

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  17

PASSION

Marine

LE REACH QUOI ? Équipages réduits et missions opérationnelles de plus en plus complexes, ce qui ne se fait plus à bord se fait à terre, autrement. Une nouvelle structure a d’ailleurs été créée : le « reachback », afin de soutenir les bâtiments déployés dans des tâches aussi diverses que le maintien en condition opérationnelle (MCO), l’alerte, le service à quai, le soutien logistique et administratif ou encore l’entretien des surfaces.

LONGUES DE 142 MÈTRES POUR UNE LARGEUR DE 20 MÈTRES ET UN DÉPLACEMENT DE 6 000 TONNES, LES FREMM DEVRAIENT REMPLACER LES FRÉGATES ANTI-SOUS-MARINES DE LA CLASSE GEORGES LEYGUES MISES EN SERVICE À LA FIN DES ANNÉES 70, AINSI QUE LES FRÉGATES ANTI-SOUS-MARINE DE LA CLASSE DUGUAY-TROUIN AYANT ÉTÉ CONÇUES À LA FIN DES ANNÉES 60. LE DE GRASSE FAIT ENCORE PARTIE DE LA FORCE NAVALE ET BASÉ À BREST.

u’ils s’agissent de son système de combat intégré, des senseurs, des armes, des systèmes de communication ou de sa propulsion hybride, les Fremm seront des navires de combat en pointe. Les Fremm, « système de systèmes » et irremplaçables outils de la tactique et « effecteur »(1) de la haute mer ne sont pourtant armées que par un équipage très optimisé pour lequel les impératifs sont restés les mêmes : mener des opérations de haute intensité et durer à la mer.

Q

Le « reachback », c’est faire face aux enjeux majeurs que représentent, pour la Marine, les équipages optimisés sur des navires modernes fortement armés.

Autant de raisons ayant conduit la Marine à mettre en place à terre une structure appelée « reachback », créée depuis le 1er juillet dernier. En charge de cette toute nouvelle struc18  COLS BLEUS  N°3002  17 NOVEMBRE 2012

ture à Brest où sera basée la première, composée de marins(2) relevant de la Force d’action navale, le capitaine de frégate Guillaume Arnoux est intarissable : « Cette structure est un prolongement des équipages des Fremm. Pour garantir le fonctionnement et la disponibilité de ces unités dans la durée, le “reachback” a pour vocation de renforcer au besoin les équipages des Fremm et d’apporter dans les meilleurs délais des réponses à ses diverses sollicitations. »

Les deux missions du « reachback » ? Renforcer les équipages optimisés sur Fremm et assurer la « transformation » des marins qui y sont affectés.

Réduire le format d’équipage de près de 2/3 est la conséquence de tout un processus méthodique qui s’est d’abord intéressé aux postes indispensables à la conduite nautique et des opérations. Précédemment officier

chargé du programme Fremm, à présent commandant de la Fremm D601 destinée à la Marine royale du Maroc, le capitaine de vaisseau Charles-Henri Ferragu est lui aussi très dissert sur l’optimisation des équipages : « 94 marins, c’est la résultante de nombreuses réflexions et études. Nous nous sommes concentrés sur les postes indispensables en évitant les doublons ou d’autres volants de gestion, tout en prenant en compte les automatisations rendues possible par les technologies modernes. En contrepartie, ce format réduit a impliqué de pouvoir disposer d’un « vivier » de compétences à terre. Car, un marin vous manque et la Fremm vous paraît dépeuplée ! Du quartier-maître à la maistrance et aux officiers, chacun joue un rôle crucial à bord. En cas de pépin, comme une indisponibilité médicale, il faut que très rapidement on soit capable de trouver un marin de la même spécialité et possédant des savoir-faire similaires pour

STRUCTURE CRÉÉE DEPUIS LE 1ER JUILLET SUR DÉCISION DU MINISTRE, LE « REACHBACK » VISE À FAIRE FACE AUX ENJEUX MAJEURS QUE REPRÉSENTENT POUR LA MARINE, LES ÉQUIPAGES OPTIMISÉS SUR DES BÂTIMENTS MODERNES ET FORTEMENT ARMÉS.

rallier le bord afin que la Fremm n’arrête pas de tourner. »

La structure de pré-embarquement (« SPE »). C’est un « sas de transformation » des marins du « reachback ».

Au « reachback » est ainsi logiquement adossée une structure de pré-embarquement (SPE), procédant de l’analyse selon laquelle un marin ne peut plus être formé in situ par un tuteur et évoluer en binôme. Tout nouvel embarquant sur Fremm se doit d’être « prêt à l’emploi » pour chacun des rôles lui étant assignés à bord, qu’il s’agisse de son rôle de quart, de sécurité, de service courant ou de protection. Chacun doit pouvoir être « lâché ». Nouveaux éclaircissements du commandant Ferragu : « Comme cela existe à la guerre des mines ou dans les forces sous-marines, la SPE est un sas qui ne vise pas à former mais bien à transformer le marin : à le “Fremm-iser” en quelque sorte ! La formation est et sera toujours dispensée au CIN de Saint-Mandrier. » Composée d’une dizaine de tuteurs experts des systèmes de la Fremm, la SPE prépare ainsi tout nouvel embarqué à son futur emploi en s’appuyant sur l’expérience des tuteurs et sur de nombreuses mises en situation réalisées sur simulateurs comme celui de conduite plate-forme (SIM CP), le simulateur de passerelle ou celui de manœuvre. Un simulateur pour les opérations est également envisagé.

Le « reachback » est une affectation d’un an et la voie privilégiée pour les marins souhaitant servir sur Fremm.

PRINCIPALE CARACTÉRISTIQUE DES FRÉGATES MULTIMISSIONS, LEUR FORTE AUTOMATISATION VISANT À RÉDUIRE LE FORMAT DE L’ÉQUIPAGE. TOUT EN ACCROISSANT LA PERFORMANCE OPÉRATIONNELLE, LE COÛT GLOBAL DE L’ÉQUIPAGE AVEC DES QUALIFICATIONS POURTANT SUPÉRIEURES EN RAISON DE LA POLYVALENCE EXIGÉE EST DE 54 % INFÉRIEUR À CELUI DE LA FRÉGATE DE GRASSE.

sions opérationnelles, la polyvalence du marin sur Fremm va dès lors être mise à l’épreuve. Un thème cher au chef d’état-major de la Marine : « Cette polyvalence est nécessaire pour se confronter à l’imprévisibilité des crises. Qui pouvait anticiper le Printemps arabe ? Les nouvelles frégates disposent d’équipages réduits à haute technicité, qui sont, en quelque sorte, l’équivalent de ce qu’on a déjà sous la mer sur nos sous-marins qui concentrent une petite ville, une base spatiale et une centrale nucléaire. Toutes proportions gardées, la Fremm sera la même chose, en surface. Il faut par contre assurer la résilience de nos équipages. Et qu’ils soient capables de gérer des avaries de combat avec cet effectif réduit. » À ceux s’interrogeant sur la mise en œuvre complexe d’équipements en matière de défense antiaérienne, de lutte antisurface ou anti-sous-marine par un équipage réduit, le commandant Ferragu développe ses arguments : « D’abord, les missions se déroulent rarement avec la même intensité dans les domaines de lutte au-dessus de la surface ou en dessous. De surcroît, nos jeunes marins sont bien formés et ont cette curiosité intellectuelle, plus cette aisance avec les nouvelles technologies. Les consoles multifonctions d’un CO leur sont vite familières. C’est presque pour eux une interface de war game ! “SPE”, “reachback” et admission au service actif des frégates d’une année sur l’autre, nos équipages vont se succéder. Ceux du reachback vont intégrer dans un an une Fremm. C’est pour cela aussi que le futur équipage de la Fremm n°2, la Normandie, commence déjà à embarquer à bord de l’Aquitaine, pour se préparer à son propre embarquement. » À écouter le commandant Ferragu pendant la mise à l’eau de la Normandie le 18 octobre dernier à Lorient, nul doute que les marins des Fremm ont la foi chevillée au corps. Celle qui anime les pionniers, celle des « défricheurs », de ceux qui s’engagent en premier dans une entreprise et qui prennent l’engagement de la mener à bien.  (1) Qui produit des effets militaires. (2) Actuellement de 54 marins.

OPTIMISATION DES ÉQUIPAGES ET DE LA LOGISTIQUE À QUAI Un ponton d’un nouveau genre vient d’être installé à l’épi porte-avions n°3 dans la base navale de Brest. Mis en place perpendiculairement, entre le quai des flottilles et le musoir (un coffre de béton de 21 m de haut sur 14 m de diamètre servant de point d’ancrage), les dimensions de cette nouvelle infrastructure sont imposantes : 160 m de long, 17 m de large pour un poids de près de 9 000 tonnes. Autre particularité de ce ponton, ses deux étages. Une astuce architecturale afin de simplifier les flux ainsi que les avitaillements pendant les passages à quai au port-base. Piétons et véhicules circuleront ainsi sur l’étage supérieur, situé 4 m au-dessus de l’eau, tandis que les « flux » – eaux, électricité haute et basse tension, gazole et air comprimé ou télécommunications – seront acheminés par les réseaux d’alimentation du niveau inférieur. C’est également depuis cet étage que se situent les points d’amarrage. Quant à la capacité d’accueil de ce ponton, elle correspond à deux Fremm, l’équivalent de 4 avisos 69. Premier des bâtiments à tester ce ponton nouvelle génération : l’Aquitaine, première des nouvelles frégates multimissions.

Équipage optimisé et large éventail de misCOLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  19

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Corsican Lion

ENTENTE CORDIALE AU LARGE 5 000 hommes et 13 bâtiments de combat constituaient l’effectif engagé par la Royal Navy et la Marine nationale pour l’entraînement majeur commun que les deux marines ont récemment mené à proximité du littoral corse.

CORSICAN LION PERMET DE METTRE EN ŒUVRE LE CONCEPT D’EMPLOI À LA MER DE LA FORCE EXPÉDITIONNAIRE COMMUNE INTERARMÉES (CJEF).

1 18 octobre 2012. L’exercice Corsican Lion débute en Méditerranée. Il concrétise l’un des objectifs du traité de Lancaster House, la mise sur pied d’une force expéditionnaire d’intervention rapide destinée à être opérationnelle en moins de 30 jours. Dans ce but, les deux marines ont mis en place une importante et inédite manœuvre aéronavale et amphibie franco-britannique. Pour la première fois, les deux pays ont affiché la volonté d’engager cette force expéditionnaire en deux Task Group (TG). Le premier, amphibie, était composé du HMS Bulwark et de l’Illustrious pour la Royal Navy, et du bâtiment de projection et de com-

mandement (BPC) Mistral pour la Marine nationale. Le second Task Group autour du porte-avions Charles de Gaulle et de ses bâtiments de soutien était renforcé d’une frégate britannique.

Le scénario : restaurer la stabilité et la sécurité La force amphibie, composée d’unités françaises et britanniques, devait intervenir sous mandat international dans un pays politiquement affaibli avec pour mission de rétablir la stabilité et la sécurité, alors que les côtes étaient en proie à des actes de piraterie. Pour atteindre ces objec-

tifs, des actions ont été conduites sur deux sites distincts : Frasseli, au sud de la Corse et le champ de tir de Diane, à l’est. La manœuvre avait été conjointement planifiée avant le D-Day, c’est-àdire le jour du « débarquement ». Tout au long de la préparation, militaires français et britanniques ont travaillé ensemble, en étroite collaboration, l’objectif étant d’améliorer l’interopérabilité des tactiques et des procédures des deux marines à tous les échelons. Le contre-amiral Dupuis, commandant le Task Group 473 articulé autour du porte-avions attendait beaucoup de ces manœuvres : « C’est la preLES OPÉRATIONS COMMUNES SONT MINUTIEUSEMENT PLANIFIÉES PAR DES ÉQUIPES FRANCOBRITANNIQUES.

20  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

LE GROUPE AÉRONAVAL APPORTE L’APPUI DE SES AVIONS À LA MANŒUVRE AMPHIBIE.

CES MANŒUVRES FACILITENT LE DIALOGUE TACTIQUE ET L’ÉCHANGE DE DONNÉES EN TEMPS RÉEL.

mière étape de la concrétisation de cette future force expéditionnaire franco-britannique avec, pour l’occasion, l’engagement des aéronefs du Charles de Gaulle en soutien des opérations amphibies conduites par le Task Group britannique. »

La visite des ministres Pour montrer l’importance à la fois militaire et politique de cet entraînement commun, les ministres français et britannique de la Défense, M. Jean-Yves Le Drian et M. Philip Hammond se sont rendus à bord du porte-avions le 26 octobre. 

JOUR ET NUIT, LES ÉQUIPES ASSURENT LA DISPONIBILITÉ DES ÉQUIPEMENTS.

APPUYÉ PAR LES MOYENS DU GROUPE AÉRONAVAL (AU PREMIER PLAN) FORMÉ AUTOUR DU PORTEAVIONS CHARLES DE GAULLE, UNE FORCE AMPHIBIE (AU SECOND PLAN) DOIT DÉBARQUER SUR LA CÔTE EST DU PAYS EN PROIE À L’ANARCHIE.

ASP MARGOT PERRIER

DÉCLARATION COMMUNE DE M. JEAN-YVES LE DRIAN ET DE M. PHILIP HAMMOND (EXTRAITS)

LE COMMANDANT DU PORTE-AVIONS ACCUEILLANT LES MINISTRES FRANÇAIS ET BRITANNIQUE DE LA DÉFENSE À BORD DU CHARLES DE GAULLE LE 26 OCTOBRE.

« Aujourd’hui 26 octobre 2012, nous nous sommes retrouvés en mer Méditerranée, à l’occasion de la phase finale de l’exercice Corsican Lion. C’est avec une grande satisfaction que nous avons pu constater le niveau d’interopérabilité croissant de nos forces armées, qui détiennent sans aucun doute les capacités les plus importantes que l’on puisse trouver en Europe. Notre capacité à œuvrer ensemble est la pierre angulaire du traité de Lancaster House. (…) Nous avons salué les progrès accomplis dans la mise au point du concept de la force expéditionnaire conjointe. Corsican Lion 2012 est une claire démonstration de ces progrès et représente une composante importante qui permettra de mettre sur pied en 2016 une force expéditionnaire conjointe opérationnelle. Cet exercice a renforcé la confiance et la capacité de nos états-majors interarmées et de nos forces à œuvrer ensemble. Nous avons accompli des progrès dans le domaine du commandement et du contrôle ainsi que dans celui de l’interopérabilité et de la connectivité de l’information. Nous avons également analysé l’échange de renseignement entre nos étatsmajors afin de l’améliorer. » COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  21

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Cephismer

ILS ONT PLONGÉ SUR LA LUNE Le début de l’automne aura été un peu particulier pour les hommes de la cellule de plongée profonde de la Marine (Cephismer), qui ont contribué à l’exploration, au large de Toulon, de l’épave d’un trois-mâts datant du Roi-Soleil. 1 Sur le plan d’eau au large du cap de Carqueiranne, l’activité est intense. La Marine nationale a déployé le bâtiment de soutien Jason pour soutenir les hommes de la Cephismer et leurs robots sous-marins. Le scaphandre Newtsuit est également à l’honneur dans cette mission archéologique sous-marine. L’objectif de cette mission n’est autre que l’exploration de la Lune, un vaisseau de la flotte de Louis XIV. Le trois-mâts gît depuis 1664 par 90 mètres de fond au large de Toulon (voir encadré). « Cette mission archéologique permet à la cellule de plongée profonde d’effectuer une requalification de son matériel et de ses hommes, dans des conditions bien plus séduisantes que les exercices classiques sur maquettes », explique le CF Jord Lucas, commandant de la Cephismer. Aux côtés de la Cephismer, le tout récent navire de recherche archéologique André Malraux du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines du ministère de la Culture et le catamaran Minibex de la Comex (ingénierie du monde sous-marin). Un industriel est là aussi, avec du matériel d’imagerie 3D. À la clé : la double ambition de remonter à la surface un certain nombre de souvenirs et de recomposer en 3D ce joyau disparu. Les marins de la cellule de plongée humaine et intervention sous la mer ont pour missions habituelles la récupération du matériel perdu en eaux profondes, l’évacuation d’équipages de submersibles en difficulté.  EN SAVOIR PLUS Retrouver en vidéo les secrets de la Lune :

À 90 MÈTRES DE FOND, UN PETIT PAS POUR LE SCAPHANDRIER, UN GRAND PAS VERS LA LUNE.

TROIS QUESTIONS À : LV LAURENT HEYER, CHEF DE LA SECTION INTERVENTION À LA CEPHISMER Quels moyens avez-vous mis en œuvre ? L’opération Lune nous a permis de mettre en œuvre la quasi-totalité de notre matériel, hormis les systèmes de ventilation pour les submersibles en difficulté. Nous avons déployé le Newtsuit, scaphandre de plongée profonde, mais aussi les ROV, les robots d’intervention sous-marine qui assurent la sécurité du Newtsuit et les prises de vues.

HISTOIRE : LE DÉSASTRE DE LA LUNE 6 novembre 1664. Le navire amiral du Roi-Soleil est de retour de l’actuelle Algérie, d’où il vient d’extraire plusieurs centaines de soldats du Royaume, tout juste défaits par l’armée ottomane. Approchant des côtes toulonnaises, la Lune reçoit l’ordre de repartir immédiatement en quarantaine, car des cas de peste sont détectés dans la région. Le vaisseau, devenu le symbole d’une défaite pour le Roi-Soleil, est « éclipsé ». Le commandant tentera bien de faire fléchir les autorités, mais en vain. Son navire, percé de toutes parts, surchargé, fatigué par de longs jours de navigation, ne résistera pas à cette période de mer supplémentaire. Il sombre corps et biens, en face du cap de Carqueiranne, avec près d’un millier de soldats à bord.

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Il s’agit en effet d’un chantier pas comme les autres… C’est certain que le côté historique, la rareté d’une telle épave et son état remarquablement conservé font de la plongée sur la Lune une expérience unique par rapport à nos missions habituelles. Mais d’un autre côté, nous avons été confrontés à toutes les problématiques d’une intervention sous-marine classique. Comment placer le matériel sous l’eau ? Comment remonter telle ou telle pièce délicate ou effectuer des prises de vues ? Comment gérer les médias sur la zone et la coopération avec d’autres organismes ? Toute l’équipe était particulièrement motivée ? On en retire une véritable expérience opérationnelle. C’est à la fois motivant et valorisant, car il s’agit d’une expérience unique et mythique. C’est une chance de maintenir et d’améliorer nos savoir-faire grâce à ce type d’activité. L’autre intérêt est médiatique. Nous pratiquons un métier de niche, très technique, qui est un véritable travail de l’ombre. Cette opération va nous permettre de faire connaître notre savoirfaire au grand public.  LV COLOMBAN ERRARD

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unités

UN PETIT VILLAGE DE MARINS AU PAYS BASQUE Les Assises de l’économie de la mer se dérouleront les 20 et 21 novembre prochains à Bayonne et Biarritz. Rendez-vous annuel de tous les acteurs du monde maritime, le choix de la côte basque rappelle l’importance du monde maritime pour cette région, notamment la présence d’une base navale de la Marine. 1 Depuis plusieurs de siècles, la Marine nationale est présente à Bayonne. Son plus célèbre commandant est certainement le capitaine de vaisseau Julien Viaud, plus connu sous le nom de Pierre Loti. Zone frontalière longtemps sensible, la Marine y assure, outre les fonctions traditionnelles d’un commandant de la marine (Comar), la charge administrative des eaux transfrontalières de la Bidassoa et la surveillance des pêches. Survivance du passé, le commandant de la marine à Bayonne est vice-roi de l’île des Faisans (un îlot au centre de la Bidassoa) comme son homologue espagnol à San Sebastian.

Des fonctions opérationnelles Depuis 1983, Comar Bayonne commande également la base navale de l’Adour qui se situe sur les berges du fleuve homonyme. Vingt militaires, douze civils de la Défense épaulés par quelques réservistes assurent plusieurs missions opérationnelles de la Marine. Il dispose de plusieurs bâtiments pour assurer ses missions. Des patrouilleurs de surveillance de sites (PSS) qui sécurisent les zones de tir de Biscarosse et participent, avec la vedette de gendarmerie, aux missions de l’action de l’État en mer. Le soutien spécifique de ces bâtiments est assuré par le personnel de la base navale qui s’occupe aussi de celui du bâtiment affrété par la DGA, des Douanes et des Affaires maritimes. Les infrastructures permettent également d’accueillir des bâtiments en escale. La frégate anti-sous-marine Primauguet sera ainsi en escale à Bayonne durant les Assises de l’économie de la mer.

Des actions au quotidien Cinquième port militaire de métropole, souvent oublié ou méconnu, Marine Bayonne et la base

ATHOS ET ARAMIS PATROUILLENT DANS LE GOLFE DE GASCOGNE. LES DEUX PATROUILLEURS DE SURVEILLANCE DE SITES SONT DES BÂTIMENTS ACQUIS PAR LA DGA POUR « BLANCHIR » LES ZONES OÙ SE DÉROULENT NOTAMMENT LES TIRS DE MISSILES. LE SITE DE DGA ESSAIS MISSILES À BISCAROSSE EFFECTUE PLUS DE 300 TIRS PAR AN. LES PATROUILLEURS SONT DONC TRÈS RÉGULIÈREMENT SOLLICITÉS POUR ASSURER LA POLICE ET LA SURVEILLANCE DU CHAMP DE TIR.

UNE FEMME À LA BARRE. LE LIEUTENANT DE VAISSEAU ADELINE DUC A PRIS LE COMMANDEMENT DE L’ATHOS À L’ÉTÉ 2012.

navale de l’Adour sont des entités bien implantées et reconnues dans une région où les autres armées sont très présentes. L’atelier de la base navale, dans la modestie de ses installations et de ses effectifs, est un véritable couteau suisse pour la disponibilité des bâtiments stationnés ou ceux qui viennent en escale. Réactif et efficace, le savoir-faire du personnel est reconnu audelà de la Marine. Récemment, le 1er régiment des parachutistes d’infanterie de Marine a décidé de leur confier l’entretien de leurs hors-bords. La Marine travaille avec d’autres institutions : la Douane et les Affaires maritimes qui bénéficient d’un accueil privilégié dans une enceinte protégée avec un service de soutien spécifique. Par ailleurs, le commandement de la Marine à Bayonne assure des missions de rayonnement dans les trois départements les plus proches. La base navale accueille entre autres des préparations militaires marine (PMM) animées par des réservistes.  CC CHRISTELLE HAAR

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VIE DES PLANÈTE

unités mer

LA FRANCE, UN PAYS MARITIME QUI L’IGNORE

Le « fait maritime » a toujours constitué un des moteurs de l’histoire : les grandes découvertes, l’essor du capitalisme marchand… De nos jours, les espaces maritimes sont un élément clé de la mondialisation : développement des flux maritimes, exploitation des mers à des fins énergétiques ou nourricières, littoralisation croissante des populations. Parallèlement, les activités illégales se développent et la pression sur le milieu marin impose une protection accrue. En douze épisodes, Cols Bleus va présenter quelques aspects de ce « fait maritime » moderne, sous une forme intentionnellement simplifiée et pédagogique. 1 La France d’hier et d’aujourd’hui est un pays maritime. Le fait est pourtant souvent méconnu ou simplement mal appréhendé. Ses atouts maritimes sont nombreux, mais en partie fragiles. « Victime d’un tropisme métropolitain des esprits, la mer est depuis longtemps la grande oubliée du débat public et des stratégies nationales », a déclaré M. François Hollande, au début de l’année 2012.

Les atouts maritimes de la France

● Le deuxième territoire maritime du monde Il couvre 19 fois le territoire métropolitain (soit 10,2 millions de km2), dont la majorité (97 %) outre-mer. L’extension du plateau continental, prévue par la convention de Montego Bay, pourrait encore l’augmenter de 10 % (1 million de km2). 24  COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012

● Elle est présente sur trois océans Le France est le seul État riverain des trois océans. Elle est ainsi voisine de nombreux pays. Cette présence lui permet aussi de disposer de nombreux points d’appui et de faire vivre ses partenariats stratégiques. ● Tout un spectre des ressources naturelles connues ou non Ces espaces maritimes renferment des ressources sous-marines fossiles, minérales, énergétiques et halieutiques considérables, mais à l’heure actuelle en grande partie peu ou pas exploitées ou simplement méconnues. ● Une industrie maritime puissante et diversifiée La France est présente dans tous les domaines économiques maritimes : construction navale civile et

militaire, recherche océanographique, transports (1 200 navires, dont 618 battant pavillon français), exploitations offshores, industriels de l’énergie, tourisme littoral…

LA FRANCE MARITIME EN QUELQUES CHIFFRES • 10,2 millions de km2 (19 fois la métropole) • 310 000 emplois directs (hors secteur touristique) • 52 milliards d’euros de valeur de production (autant que le secteur automobile)

DEUX EXEMPLES D’EXPLOITATIONS FUTURES DES ESPACES MARITIMES • Du pétrole en Guyane Sur une zone d’exploitation de 24 100 km2 sur le bord du talus continental. La production pourrait débuter en 2019 et fournir à terme 200 000 barils par jours (soit 2 % de la production de l’Arabie Saoudite). • Des éoliennes dans la Manche et en Atlantique À l’horizon 2020, 1 200 éoliennes en Manche et Atlantique pourraient produire 6 000 kW de capacité. 10 000 emplois directs seraient créés. L’investissement est estimé à 7 milliards d’euros.

Ces atouts maritimes sont cependant fragiles et vulnérables

● Le territoire maritime est très dispersé. L’exercice de la souveraineté sur cet immense territoire sans unité physique est un défi majeur et nécessite des moyens adéquats et conséquents, d’autant que la délimitation de certaines zones économiques exlusives (ZEE) n’est pas encore complète. ● Des voies d’approvisionnement vulnérables, alors que la majorité de nos importations, notam-

ment énergétiques, passent par la mer et nous en rendent dépendants. ● Des ressources maritimes encore imprécises. Le potentiel des ressources minérales est considérable, mais il est encore largement méconnu et la rentabilité économique à moyen terme n’est pas garantie. ● Une très forte concurrence dans presque tous les secteurs : asiatique pour la construction navale, de la Chine et de la Russie pour les

recherches minérales sous-marines entre autres. ● Des infrastructures portuaires encore inadaptées aux besoins d’une économie moderne largement dépendante du transport maritime.  CF JÉROME BAROË

RAPPORT DU SÉNAT SUR LA MARITIMISATION « La mondialisation s’est traduite par une montée en puissance des enjeux maritimes, aussi bien en termes de flux que de ressources (…) L’importance économique, diplomatique, écologique croissante des espaces maritimes dans la mondialisation fait plus que jamais de la mer un enjeu politique grâce auquel un État peut rayonner et affirmer sa puissance sur la scène internationale. »

COLS BLEUS  N° 3002  17 NOVEMBRE 2012  25

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