Vingt ans de partage, d'amitiés, d'appartenance et de souvenirs - SPVM

Plusieurs récits font référence à la notion de couleur pour imager certaines réalités : noire, café, bleue et blanche et ...... Module Vérifications d'antécédents.
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SE RÉAPPROPRIER SON HISTOIRE ET SES VALEURS

Vingt ans de partage, d’amitiés, d’appartenance et de souvenirs

MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Introduction

SE RÉAPPROPRIER SON HISTOIRE ET SES VALEURS

Vingt ans de partage, d’amitiés, d’appartenance et de souvenirs En décembre 1995, le Parlement fédéral du Canada a reconnu officiellement le mois de février comme le Mois de l’histoire des Noirs suite à une motion initiée par l’honorable Jean Augustine, première Canadienne de la communauté noire élue au Parlement. Ce mois est l’occasion pour les citoyens, le personnel civil et policier du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) d’en apprendre davantage au sujet de communautés noires dans la société montréalaise. En février 2011, la thématique porte sur le partage de son histoire, ses valeurs, ses souvenirs, son appartenance et ses amitiés. C’est dans cette optique que le SPVM a décidé de faire un cahier spécial pour permettre ce partage d’histoires sous forme de récits de vie constructifs. Plusieurs citoyens et membres du SPVM ont accepté de consacrer un moment de réflexion à la rédaction d’un texte pour décrire leur propre expérience ou celle d’une personne de la communauté noire qu’il connaissait. Ces gens ont fait preuve d’une grande générosité en partageant des récits de vie afin de nous faire connaître et comprendre les communautés noires. Leurs récits vous feront passer par un éventail d’émotions et vous inciteront à en savoir davantage sur les personnes des communautés noires de votre entourage. Nous profitons de la Semaine d’actions contre le racisme du 21 au 25 mars 2011, portant sur la thématique « Ouvrir les barrières pour célébrer la diversité », pour faire le lancement du cahier spécial de récits de vie du Mois de l’histoire des noirs. THÉMATIQUES ABORDÉES DANS LES RÉCITS DE VIE À travers les récits présentés, certaines thématiques sont plus souvent abordées. Par exemple, dans la majorité des textes, la notion de persévérance malgré les épreuves dans les parcours de vie est soulignée. L’importance accordée aux études pour parfaire ou apprendre de nouvelles connaissances ou pour se faire accréditer est exprimée dans plusieurs textes, tout comme l’amitié entre collègues de travail. Le choix du Québec comme terre d’accueil en raison de l’utilisation de la langue française et la facilité d’intégration vécue sont décrits dans quelques textes. Plusieurs récits font référence à la notion de couleur pour imager certaines réalités : noire, café, bleue et blanche et plusieurs personnes ont émis des citations, soient de leurs pays d’origine ou du Québec pour souligner leurs propos. Ainsi, il est intéressant de voir comment une expérience vécue peut être reflétée par les mots d’auteurs connus. Le SPVM tient à remercier sincèrement tous ceux et celles qui ont répondu à son invitation. Leur contribution nous permet de partager l’histoire personnelle de Montréalais des communautés noires et de rendre hommage à certains de leurs meilleurs ambassadeurs. Bonne lecture !

LES RÉCITS DE VIE RACONTÉS EN 4 THÉMATIQUES Quatre grandes thématiques ont orienté la rédaction des textes : Parcours de vie, Intégration à la société québécoise, Identité culturelle et Réalisations effectuées au Québec. Les récits des participants ont été inspirés par une ou plusieurs de ces thématiques et les textes ont été catégorisés dans la thématique prédominante.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS

Première thématique : Parcours de vie Le participant raconte son parcours de vie de son pays d’origine jusqu’au Québec. Il y relate ses motivations, ses rêves et/ou ses épreuves. Le participant peut également décrire l’histoire d’un collègue, d’un parent ou d’un ami.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

Le français : dénominateur commun Participant : Nadine Rosemont–La petite patrie

Je suis née au Bénin, mais j’ai passé toute mon adolescence en Côte d’Ivoire (ces deux pays se situant en Afrique de l’Ouest). Je viens d’une famille où mes deux parents travaillaient. Mon père, de par ses fonctions, recevait à la maison des gens issus de divers horizons et couches sociales. J’ai donc grandi dans un univers gastronomique et culturel, m’amenant à avoir une plus grande ouverture quand à la différence. Au début de la vingtaine, il a été décidé que j’étudierai le droit en France. Ce que j’ai fait deux ans durant. La France n’étant pas très loin du continent africain et ayant comme dénominateur commun, avec mon pays d’origine : le français. Il était normal, chez les familles plus aisées, d’envoyer leur progéniture poursuivre leurs études dans d’autres pays. Cela contribuait à développer une curiosité saine envers les autres et à développer une solide culture générale. À 25 ans, j’ai eu envie de poursuivre mes études au Québec, en pâtisserie. Je voulais connaître l’Amérique du Nord en français et c’est dans ce contexte que mon choix s’est arrêté au Québec. Même si l’accent était différent de celui de la France, du Bénin ou de la Côte d’Ivoire, je ne me sentais pas dépaysée. Je retrouvais, surtout, la chaleur humaine et le sentiment d’appartenance à une culture, à une société foisonnante et sans cesse en mutation. Bref, je me retrouvais en terrain connu. Tout comme les Africains, les Québécois ont le sens de la vie, de la fête et de la famille. Les gens se chicanent et se réconcilient; ils sont vrais et vont à l’essentiel, ils ne font pas de grands discours creux ou bien fignolés pour ne rien dire. Cela m’a beaucoup fascinée de savoir que je mettais les pieds sur une terre riche en possibilités. Au bout d’un an, j’ai fait le choix de vivre l’aventure humaine dans cette région de lacs, de rivières et de grandes étendues. N’ayant pas de guerre dans mon pays natal, je savais que je pouvais y retourner si je n’aimais pas mon expérience. Le fait que mes deux frères étudiaient également à Montréal a facilité ce choix. J’ai étudié en pâtisserie à l’Institut d’Hôtellerie du Québec (ITHQ) et j’ai travaillé dans mon domaine un peu partout au Québec, avec un court séjour dans le Grand Nord (LG2). Aujourd’hui j’ai changé de domaine et travaille pour le SPVM. Je suis bien intégrée et j’occupe un emploi tout aussi enrichissant et passionnant. Je terminerais avec les propos de l’humoriste Boucar Diouf que je ferais miens. : « S’intégrer à une nouvelle culture c’est comme lire un livre plusieurs fois. La première lecture, généralement, c’est pour se familiariser avec les personnages. À la deuxième lecture, on s’intéresse davantage à l’histoire. Mais, après la troisième lecture, si on arrive à raconter cette histoire avec passion, c’est qu’elle est aussi devenue la nôtre et les personnages, des membres de notre propre famille ». Si vous me demandez ce que je pense de cette parlure québécoise qui nous rassemble aujourd’hui, je vous répondrais que je l’aime.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

Tranche de vie Participant : Bella Montréal-Ouest

Originaire d'Haïti, je me suis établie au Québec en 2005. Comme font la plupart de mes compatriotes, j'ai effectué un voyage préliminaire en 2004 en vue d'avoir une certaine idée de mon nouveau pays d'accueil. Après une courte période d'un mois, je suis donc retournée dans mon pays, et ce, pendant 8 mois afin de régler certains dossiers administratifs et planifier mon départ. Au cours de cette étape prémigratoire, je suis passée par une kyrielle d'émotions, allant de l’excitation, de la joie de pouvoir réaliser certains rêves, à la peur de l'inconnu. Je me suis donc accrochée à ma pensée favorite : «À chaque jour suffit sa peine », si d'autres membres de ma famille, mes amis et anciens collègues ont pu s'établir et s'intégrer, je serai également en mesure de le faire. Le jour venu, je prenais mon avion, laissant derrière moi mon cher pays, certains membres de ma famille, amis, collègues, etc., toute une partie de moi était restée dans ce pays qui m’a vu naitre et grandir. À mon arrivée au Québec, les organismes mis en place, mon réseau de contacts m'ont aidée dans mon processus d'intégration. Maintenant, je travaille et j'étudie afin d'obtenir un baccalauréat en administration l'année prochaine. J'apprends de jour en jour, je m'affirme de plus en plus et j'échange avec mon entourage, ce qui me permet donc de concilier avec cette double identité.

Nouvelle citoyenneté, Peau noire! Participant : Nanta Tshitenge Rosemont–La Petite-Patrie

Née dans ce continent aux couleurs multiples, aux saveurs uniques et de paysages de broussailles Oui, l'Afrique est l'endroit où je vis le jour, mon pays? La République Démocratique du Congo (RDC) ! Anciennement Leopoldville jusqu'en 1966, je vécue le début de ma vie dans la capitale de la RDC, Kinshasa. Agée de 4 ans et demi, j'arrive au Canada, dans la province de Québec, avec mon père, ma mère et mon petit frère. Le Québec est pour moi une terre d'accueil, une maison, une partie de ma culture, une référence et l'avenir! Montréal est un peu comme l'Afrique (sauf pour l'hiver, évidemment!) elle est multiculturelle, il est facile de s'adapter et se trouver une voie. Étant une Afro-Canadienne, mais aussi une Afro-Québecoise, j'ai adopté une nouvelle citoyenneté, dans ma peau noire ! mon entourage, ce qui me permet donc de concilier avec cette double identité.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

Le rêve d’une petite fille Participant : Léonie C. Saint-Louis Dollard-des-Ormeaux

... Il était une fois, une toute petite fille, vivait sur une île, dans une toute petite maison, sur une très grande cour. Sur la cour, il y avait : un puits, d’énormes cocotiers. Derrière la grande cour, il y avait un chemin de l’autre côté du chemin, il y avait la mer... La petite fille allait à tous les jours se baigner à la mer. Elle regardait attentivement les petits poissons rouges au point de s’imaginer qu’ils étaient ses amis et qu’ils la reconnaissaient. En fait, ils étaient ses vrais amis. D’ailleurs, c’est seulement à eux qu’elle racontait son rêve. Ce rêve récurrent qui le hantait...et qu’elle souhaitait un jour qu’il serait réalité. Elle restait longtemps à admirer la mer. Elle avait toujours les yeux rivés vers l’horizon. À tous les soirs, elle priait, elle demandait au petit Jésus garder son rêve intact et surtout de le concrétiser. À tous les matins, elle se dirigeait vers la mer croyant fermement que son rêve allait être réalisé. Un jour, elle a été contrainte de quitter la petite maison, la grande cour avec le puits et les énormes cocotiers. Elle versait toutes les larmes de son corps, assez de larmes pour inonder son cœur et faire flotter son rêve. À bord du gros avion, qui l’éloignait de son île, elle décida enfin de raconter son rêve pour la toute première fois à un adulte qui se précipita pour lui donner une explication qui changea à jamais le cours de sa vie : cet oiseau d’acier lui dit-elle est le symbole de ce poisson de plomb qui franchissait la mer dans ton rêve Depuis ce jour, elle ne veut plus rêver de peur d’être une fois de plus déçue. Quel était ton rêve grande fille? C’était une voiture jaune qui franchissait la ligne d’horizon comme pour se rendre sur l’autre rive de la mer. Dans ma tête de petite fille, je croyais que dans cette voiture il y avait tout ce dont j’espérais : jouets, vêtements, papa et une petite sœur... J’habite depuis ce temps-là sur une autre île. Pourtant, je n’ai plus jamais revu ni la mer, ni les petits poissons, ni les cocotiers. Tout est si différent, les maisons sont plus grandes, mais les cours plus petites; le soleil n’est pas aussi chaud; les voisins n’échangent ni ne partagent rien entre eux; tout se passe à la vitesse de l’éclair. Plus moyen de se prélasser, de rester sous la galerie, à la brunante pour raconter et écouter les histoires de Bouki et de Malice les deux personnages légendaires de la culture haïtienne. Que c’est triste la vie, loin de ces souvenirs d’enfance, essence même de ma vie passée et future. Si seulement je pouvais remonter le temps, me tenir devant la mer attendant l’arrivée de cette voiture jaune qui franchissait la mer m’apportant tous les espoirs de mon rêve d’enfant. Mon rêve de petite fille dissipé pour toujours dans le brouillard, les dédales de l’immigration québécoise qui nous rassemble aujourd’hui, je vous répondrais que je l’aime. Léonie C. Saint-Louis

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

Le seul mulâtre de mon école Participant : Miguël Alston Ville-Marie

Je suis un membre de la communauté noire... mais je tourne plus vers le chocolat. En effet, je suis mulâtre né à Granby de l’union d’un père noir afro-américain et d’une mère blanche québécoise. Mon père est né en 1940 dans l’État de Pennsylvanie. Issus d’une famille pauvre, ils étaient douze enfants au sein de leur famille. Après avoir été diplômé du Buisness College, étant grand sportif, mon père a été repêché par une équipe professionnelle américaine de baseball. Un peu plus tard, ce sont les dépisteurs d’une équipe semiprofessionnelle québécoise qui l’ont repêché. C’est donc en 1966 que, par amour pour son sport, mon père anglophone fait son arrivée au Canada dans un milieu blanc francophone. Il fait ensuite la rencontre de ma mère. Née également en 1940, ma mère est native et a grandi dans la région de Granby avec ses 15 frères et sœurs et travaillait au Mouvement Desjardins. Son père était grandement impliqué dans la communauté et l’école secondaire de Waterloo porte son nom. Mon père décide de s’installer au Québec et marie ma mère en 1969. Marier un Noir ! C’était difficile à accepter pour les parents de ma mère dans ces années. Trois enfants sont nés à Granby de cette union. En 1984, je déménage à St-Hyacinthe où j’ai le plus de souvenirs. J’étais la seule personne de couleur à l’école primaire et secondaire. Malgré cette différence, je ne me suis jamais senti à part des autres camarades et j’ai bénéficié d’une belle intégration. J’ai eu droit à quelques vilains mots de mes confrères de l’école, mais c’était l’exception. En 1999, je fais mon entrée au SPCUM. J’ai eu l’occasion d’occuper différentes fonctions, dont celle d’agent relationniste média. En tant que porte-parole de l’organisation, j’ai été présent dans les différents médias nationaux sur une période de trois ans. Plusieurs membres de la communauté noire, tant à l’interne qu’à l’externe, m’ont fait part de leur fierté de voir un policier de couleur dans les bulletins de nouvelles. J’étais donc fier de représenter notre communauté. Vous pouvez constater par ces quelques lignes que je n’ai pas la culture d’un pays étranger. Je fais partie de notre communauté étant une minorité visible et non culturelle. Il me fait tout de même plaisir de partager ce parcours à la québécoise d’un policier mulâtre ayant grandi dans un monde de Blancs francophones et né d’un père noir afro-américain. Miguël Alston

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

La persévérance Participant : Mackenzie Âge : 40 ans Montréal-Nord Histoire de : Libas

Voilà maintenant 5 ans que docteur Libas est mon médecin de famille et jusqu’à ma dernière visite qui remonte, il y a deux mois je ne le connaissais pas vraiment. Je vous explique. Il y a deux mois, je suis allé le voir parce que j’avais un gros rhume. Avant de me sonder il ma demandé quel traitement que j’avais fait avant de venir a son bureau. Je lui ai dit que sous les conseilles de ma femme qui était étudiante en naturopathie, que j’avais bu des tisanes. Il me répondit qu’il connaissait très bien la médecine douce, car dans son pays natal du Congo que c’est majoritairement de cette façon que les gens malades son traité. Je lui posai quelques questions sur cette forme de médecine et on s’est mis à discuter sur divers sujet. Cette journée-là, ma visite qui habituellement est de 15 minutes a duré plus d’une heure. Durant notre échange j’appris que faute d’argent que mon médecin a mis les pieds pour la première fois à l’école à l’âge de 9 ans et que dans son village natale du Congo, qu’il avait comme travail d’aller chercher de l’eau plusieurs fois par jour dans une petite cour d’eau en plus de s’occuper de ces deux jeunes frères. Qu’à l’âge de 12 ans qu’il est allé rejoindre en France son père biologique là où il est devenu médecin et qu’en l’an 2000 qu’il a immigré à Montréal avec sa femme. J’ai également appris qu’il a dû refaire quelques cours en médecine afin d’obtenir son permis pour pratiquer la médecine au Québec, permis qu’il a obtenu en avril 2001. Docteur Libas est mon médecin de famille depuis mars 2006, mais depuis janvier 2011 il est également mon ami.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Parcours de vie

Espoir Participants : Diawo Diallo Ville-Marie

Mon nom est Diawo Diallo je suis le 8e et dernier enfant chez ma mère parmi mes frères et sœurs je suis le seul à pouvoir accéder à la classe de terminale. Depuis tout petit j’ai rêvé de relever le défit pour que ma mère ait un de ses enfants à pouvoir accéder dans un établissement supérieur pour se faire je suis allé au delà de ce rêve pour me demander pourquoi ne pas aller faire mes études supérieures dans un établissement étranger dont la cote est excellente au niveau mondial afin d’être le premier cadre internationalement reconnu non seulement de ma famille, mais aussi de toute ma région natale dont le taux de scolarité est très faible? Et d’apporter mon grain de sel pour l’édification de la guinée dont je suis originaire. Ma motivation d’aller faire mes études à l’extérieur résidait surtout sur le fait que j’étais le seul espoir de ma mère, le respect, le dévouement, le dynamisme, les connaissances qu’ont acquis certains intellectuels Guinéens qui ont étudiés à l’étranger et aussi sur le fait de pouvoir connaitre d’autres cultures et de nationalités différentes. C’est après l’obtention de mon bac 2 (terminale) qui est le diplôme d’accès aux établissements supérieurs qui a été une fierté pour toute la famille que je me suis dit qu’il est maintenant temps que je mette à exécution mon rêve de poursuivre les études supérieures à l’étranger ce qui d’ailleurs n’a pas causé de problème au sein de ma famille qui a une énorme confiance en ma personne à cause de mes exploits. Mon choix s’est porté sur le Canada et précisément au Québec à cause du français la seule province francophone en Amérique du nord, de l’excellente qualité du système éducatif, la diversité culturelle, le système universel du soin de santé, le fait de pouvoir étudier dans un pays sécuritaire où le taux de criminalité et de violence est parmi les plus bas et aussi le fait d’être dans une société sûre, juste et paisible. J’avoue tout de même que le choix du Canada n’a pas été facile à accepter par ma mère vu que je n’avais aucun parent proche autre que mes cousins ici. Je me suis inscrit à l’UQAM et je suis arrivé au Québec le 4 aout 2007 à 19 h j’avoue que je n’ai pas eu de problème à mon arrivé vu que mon cousin y était déjà qui m’avait trouvé un logement aux résidences universitaires à deux pas de l’université, m’a fait visiter l’université et qui m’a aidé pour l’obtention de mes documents importants et il m’a même trouvé un emploi aux résidences de l’UQAM en entretien ménager ce qui m’a permis d’avoir mon numéro d’assurance sociale et de me faire un peu de sous avant la reprise des cours le 7 septembre 2007. Les différentes manifestations qu’a organisées le service d’accueil des étudiants étrangers m’ont permis d’élargir mon réseau de contacts et de m’intégrer facilement puisque la société québécoise est très facile d’approche, ouverte et est disponible d’après mon expérience. Actuellement, je suis en mesure de confirmer que j’ai cette double identité culturelle maintenant qui me permet de bien me tenir entre ma culture et celle d’ici j’accepte de perdre certains acquis de ma culture qui ne sont pas conforme à celle du Québec, comme par exemple chez moi c’est les hommes ensembles et les femmes ensembles, pour vu que j’acquiers plus de la culture québécoise. La réalisation dont je suis aujourd’hui fier et qui fait la fierté de toute une famille et de toute une région est le fait d’avoir obtenu mon diplôme d’études universitaire d’un grand pays qui est le Canada.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS

Deuxième thématique : Intégration à la société québécoise Le participant raconte son intégration à la société québécoise : les différences constatées (culturelles, économiques, écologiques, etc.), les adaptations réalisées au point de vue personnel ou au sein de sa famille, ses apprentissages et ses expériences constructives. Le participant peut aussi décrire l’histoire d’un collègue, d’un parent ou d’un ami.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Intégration à la société québécoise

La couleur police Participant : Narcisse Ville-Marie

Gilles Vigneault avait bien raison de chanter «Mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver». À chaque fois qu’il fait moins 20 degrés, je me dis : «cet hiver est mon dernier au Québec ». Les grands froids, ce n’est pas pour les Noirs... J’avais 10 ans lorsque j’ai mis les pieds au Québec. Je me souviendrai toujours de ce tour à Trois-Rivières. Mon père qui était en visite chez des amis dans un bloc d’appartement m’avait demandé d’aller chercher son paquet de cigarettes qu’il avait oublié dans sa voiture. Voyant que je ne revenais pas au bout de 15 minutes, il est descendu voir ce qui se passait. Quelle ne fut pas sa surprise de voir que je m’étais barricadé dans la voiture pour échapper à une bande d’enfants qui voulaient me toucher les cheveux parce qu’ils n’avaient jamais vu d’enfant noir. Mon père me dit alors en riant : « Sors, ils ne vont pas te manger ! ». Les blancs ne mangent pas l’homme. Ah les perceptions... Dans la semaine qui a suivi, je me trouvais en visite dans un salon funéraire à Sherbrooke, lorsque j’ai vu, par une fenêtre, la neige tombée pour la première fois. Alors que tout le monde était en pleurs auprès de la famille endeuillée, je me suis précipité dehors en chemise en criant « la neige, la neige... ». Je me suis vite rendu compte de deux facteurs inéluctables : la neige contrairement a ce que je pensais, ne fait aucun de bruit quand elle tombe et l’hiver il faut s’habiller pour sortir dehors. Après une année, je suis retourné en Afrique et suis revenu vivre définitivement au Québec à l’âge de 15 ans. Un jour, je me suis dit, je vais faire un métier qui vous en fait voir de toutes les couleurs : policier. Et pour ça, j’ai vaincu mes perceptions sur le racisme après avoir hésité durant trois années. Être noir et policier à Montréal a ceci de particulier que les gens vous voient d’abord noir et au final bleu. Ce bleu police, cette couleur police, qui fait qu’une police reste une police, et pour rien au monde ne changerait de métier. C’est métier est honorable. Il est souvent le premier rempart face aux échecs et à la détresse dans notre société occidentale, engluée dans ses critères de consommation effrénée, de performance et de réussite matérielle. Quand la pression, le stress et la dépression font leurs victimes, la police est appelée à intervenir auprès de tous ceux qui ne réussissent pas à suivre cette cadence... Les pressions sociales poussent certains individus vers les actes de toutes sortes pour bien paraître ou sauver les apparences. Mais pourquoi nous consommons tant? Pourquoi tant de pression? Pourquoi courrons-nous tant? A-t-on tant besoin de tout dont on s’entoure. En Afrique, un proverbe dit : on ne court pas pour aller au cimetière. C’est là que ma culture africaine, ma couleur noire, me rattrape et me ramène constamment sur terre. Je me dis alors « Tu cours pourquoi? ». Voilà pourquoi une marche sans but, un repas en bonne compagnie, un film qui fait réfléchir me font tant plaisir. Une vie simple, à l’abri du stress. C’est ça ce petit côté « couleur noire » qui coule dans mes veines. Ce qui est formidable dans ce beau pays, c’est que j’ai ce choix de vivre comme je veux. Pour ça, je serai toujours reconnaissant envers le « meilleur pays au monde ». Un pays dont l’histoire est intimement liée avec le catholicisme et qui est ouvert aux immigrants et respectueux des diversités culturelles. Pour moi, ça va bien, ma devise étant : «À Rome, on se comporte comme les Romains» Ici, je suis Noir. Dans mon pays d’origine, on m’appelle affectueusement «Le Canadien». En Afrique, il y a un proverbe qui dit que durant toute sa vie le chien ne change pas sa façon de s’assoir, ou encore, qu’un bois qu’on jette à l’eau ne se transforme pas en caïman. Comme quoi un arbre ne peut vivre sans ses racines... Malgré les difficultés, les préjugés, il faut faire la part des choses. Il faut toujours rester fier de soi et persévérer dans la vie, car tout n’est jamais blanc ou noir. Narcisse

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Intégration à la société québécoise

Récit de vie Participant : Jean-Ernest Célestin Le Sud-Ouest

Né en Haïti, le 22 septembre 1968, à Croix-des-Bouquets, banlieue de Port-au- Prince. Vers 1972, dans le but d’un avenir meilleur, mon père immigra au Québec afin d’y trouver un travail convenable. En 1974, toute la famille vint le rejoindre; nous étions 9 enfants et moi j’avais 6 ans. Imaginez notre émerveillement lorsque nous découvrîmes toute cette belle neige blanche l’hiver venu. Nous avons alors emménagé sur le Plateau Mont-Royal. Nous étions l’une des rares familles haïtiennes, mais nous nous sommes rapidement intégrés avec les gens du quartier. Afin d’évaluer mes connaissances de la langue d’ici, entre autres, j’ai entamé mon immersion dans plusieurs écoles primaires. Motivé par la réussite et l’intégration sociales, je fournissais les efforts appropriés dans mes études. La fin de mon primaire fut marquée par la visite d’officiers de l’armée de terre venus recruter des jeunes de 12 à 18 ans dans le corps de cadets des fusiliers Mont-Royal. J’éprouvais beaucoup de fierté à endosser l’uniforme lors d’activités protocolaires, la discipline et, bien sûr, le développement des habiletés, de leadership et d’enseignement, une expérience qui aura certes influencé mon choix de carrière. Motivé par le goût de la réussite et de l’aventure, je m’inscrivis dans une institution privée, soit au Collège Ville-Marie, afin de compléter mon secondaire. Toutefois, je vivais la perte de mes amis, lesquels s’étaient inscrits à l’école secondaire du quartier Émile Nelligan et qui, aujourd’hui, se nomme l’École Nationale d'Administration publique. Cette nostalgie m’amena à supplier ma mère de m’inscrire à cette école et, à ma grande satisfaction, elle acquiesça à ma demande. Successivement, j’ai fréquenté plusieurs écoles secondaires, dont Lucien-Pagé, Père-Marquette et Pierre-Dupuis, dû à mon intérêt pour la danse «break dancing » et mon implication au niveau du soccer intersecondaire. Mon passage au troisième secondaire, dans le cadre du cours de choix de carrière, fut marqué par la visite de deux policiers du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, à l’époque. Ils firent une présentation sur la carrière policière, qui, à ce moment-là, était très traditionnelle et plutôt accessible aux Québécois d’origine. Cette présentation m’avait grandement influencé, me rappelant mon expérience au sein des cadets de terre, par le port de l’uniforme, la discipline personnelle, le service au citoyen, l’autorité et, bien sûr, le modèle positif que je pouvais refléter auprès de la communauté noire. Le défi était grand pour moi, en tant que personne issue de la communauté noire afin de me frayer une place comme policier, par la réussite scolaire, la formation à l’école de police, et surtout, l’intégration au sein de la force policière et la pression familiale à l’égard d’une carrière policière. Lorsque j’ai informé mes parents quant à ce choix de carrière, ceux-ci éprouvaient la crainte d’un métier dangereux, se remémorant les comportements répressifs et corrompus des tontons macoutes en Haïti sous le règne du régime de Jean-Claude Duvalier. Aujourd’hui, mes hantises d’adaptabilité et mes inquiétudes professionnelles face à mes origines sont entièrement dissipées. Je suis conscient que ma réussite peut être inspirante pour les gens de ma communauté qui ont besoin de modèles positifs et significatifs.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Intégration à la société québécoise

Qui l’aurait cru Participant : William Âge : 30 ans Le Plateau-Mont-Royal Histoire de : Bubar

Je me souviens de la première fois que j’ai rencontré mon ami Bubar comme si c’était hier. Il y a 20 ans, j’étais assis dans une classe à l’Université de Montréal. Lorsque j’ai vu la personne qui allait devenir mon meilleur ami faire son entrée dans la classe. Malgré la température agréable du mois de septembre soit environs 15 C, il était vêtu d’un gros manteau noir style Michelin, d’une tuque en laine noire et portait des bottes d’hiver. Le voir arrivée me fît rire que je n’ai pu m’empêcher de lui faire un petit commentaire au sujet de la température. Je lui demandai s’il trouvait qu’il faisait froid. S’en hésiter, il me répondit «ce n’est pas drôle, mon ami » et pris place à côté de moi. Quoiqu’il enleva sa tuque, il garda sur lui son manteau d’hiver. Tous les jours, nous nous rencontrons à l’école et étudions ensemble à l’occasion. À la première neige qui eut lieu au mois de novembre de cette année là, Bubar m’appela à la maison et m’informa qu’il n’allait pas être présent au cours parce qu’il allait mourir de froid s’il allait dehors. Il faisait approximativement -12 C. Hier, j’ai parlé à mon ami Bubar qui était en visite du Mali où il travaille depuis 5 ans comme ingénieur civil pour une multinationale, je lui ai demandé comment était la température là-bas. Il ma répondu «qu’il faisait trop chaud et qu’il était content d’être de retour chez lui».

L’apport aux autres Participant : Marie et Julie Ville-Marie Histoire de : Patrice

Patrice est né à Haïti. Il est arrivé au Québec à l’âge de trois ans avec ses parents et ses quatre frères et sœurs. Ils se sont établis à Rivière-des-Prairies alors que le quartier n’était pas très développé. Sa famille est venue ici par choix et non pas parce qu’elle était en danger. La famille de Patrice était donc ouverte et elle s’est adaptée facilement. En choisissant un métier non conventionnel, Patrice avait des appréhensions, mais il a essuyé les commentaires négatifs. Il a décidé d’ouvrir sa culture et ses connaissances à ses collègues de travail pour leur faire découvrir autre chose et de sortir des sentiers battus. Il a décidé de briser la glace en préparant de la cuisine de son pays lors de réunion d’équipe. Un de ses collègues aimait tellement qu’ils s’échangeaient leurs lunches régulièrement. Patrice considère qu’il a une vision différente des choses à cause de ce qu’il est et de ce qu’il a vécu. Il apporte cette vision à son milieu de travail. Pour la communauté haïtienne, il est un exemple concret d’un gars qui a suivi avec succès une voie non conventionnelle. Lorsqu’il fait bien son métier, en tant qu’Haïtien, il donne aux autres citoyens une vision positive des Haïtiens et il leur démontre que c’est possible. C’est important, car les bons coups des gens issus de la communauté manquent de visibilité.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Intégration à la société québécoise

Une grande passionnée! Participant : Marie et Julie Ville-Marie Histoire de : Yamiley

Yamiley est née à Jacmel, en Haïti. Elle est arrivée au Québec à l’âge de 8 ans, après avoir vécu deux ans au Zaïre, où son père travaillait pour l’ONU. Son père a accepté un poste d’enseignant au Cégep d’Alma dans l’effervescence de l’Expo 67, sans connaître cette région légendaire pour la froideur de ses hivers, mais aussi la chaleur de ses habitants. C’est lors du long voyage entre l’aéroport de Montréal et la Ville d’Alma que la famille s’est aperçue que le Cégep était très loin! À l’époque (fin 60), les gens du Lac St-Jean n’avaient pas vu beaucoup de Noirs, à part quelques musiciens en tournée, encore moins des enfants noirs. Au début, les gens leurs posaient des questions étranges qui démontraient surtout, leur curiosité et le désir de les connaître. Entre enfants, Yamiley s’est déjà fait demander ce que sentait et goûtait sa peau pour vérifier si c’était comme du chocolat, mais c’était innocent et ils en riaient ensemble. Yamiley a remarqué en grandissant que tous avaient les mêmes préoccupations, peu importe leurs origines ethniques. Yamiley a trouvé son adolescence particulièrement difficile, car elle a été élevée à «l’Haïtienne», plus strictement, rendant les choses ardues face aux amis qui, eux, jouissaient d’une plus grande liberté. Yamiley est entrée au 9-1-1 en 1989 avec la volonté d’aider les gens dans le besoin. Pour elle, c’était un travail important et essentiel. Elle a été longtemps une des rares femmes noires au 9-1-1, elle a dû faire face à certains préjugés tant chez les citoyens que chez quelques collègues. Mais la bonne volonté et, surtout l’humour l’ont beaucoup aidée à se faire connaître et à prendre sa place. Avec le temps et les passages au Centre Opérationnel-Ouest et maintenant à la Vérification d’antécédents où elle s’occupe des protocoles pour les clientèles vulnérables, elle a côtoyé plusieurs professionnels qui ont généreusement partagé leurs connaissances et l’ont soutenue avec empathie lors d’incidents difficiles. Elle a perçu leur estime et leur solidarité; cela l’a rassurée quant à sa place et son rôle dans son métier et sur son importance parmi eux. Yamiley aime partager sa motivation, sa passion et son expérience avec des gens de toutes origines culturelles et de nouveaux collègues. Yamiley a participé à plusieurs projets communautaires et elle conserve cet attachement envers son pays d’origine en voulant aider Haïti comme elle le peut. Elle a projet «futur» qui lui tient particulièrement à cœur. Elle voudrait aider Haïti dans l’élaboration et l’implantation d’un service d’urgence 9-1-1 ainsi qu’à d’autres initiatives ou missions civiles adaptées au contexte actuel en Haïti. Pour elle, « le ciel n'a pas de limites». Nous lui souhaiterons persévérance dans l’atteinte de ses buts. Elle en profite pour vous rappeler et vous inviter à lire et à découvrir votre propre histoire durant ce mois. Yamiley est une source d’inspiration pour tous ceux qui la côtoient !

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS

Troisième thématique : Identité culturelle Le participant explique son identité culturelle multiple : entre autres, celle de son pays d’origine ou celui de ses parents et celle de son pays d’accueil. Le participant parle de ses gains et de ses pertes, de son attachement face à la communauté d’accueil et/ou face à son pays d’origine, etc. Encore une fois, le participant peut relater la réalité d’un collègue, d’un parent ou d’un ami.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Identité culturelle

Couleur café Participant : Couleur café LaSalle

Tout a commencé vers l’âge de 6 ans. L’âge de comprendre que j’étais différente. L’âge auquel les enfants sont les plus cruels envers la différence. Cette différence est ma couleur café! «Mais au fait toi tu es quoi? Tu es ni noire, ni blanche !? ! Mais je suis comme toi québécoise! » C’est à partir de ce moment que la possibilité d’avoir été adoptée prit naissance dans mon esprit. Comment est-ce possible d’avoir un père noir, une mère blanche et d’avoir la peau basanée? Durant plusieurs années, j’ai été la fausse blanche, la fausse Noire. J’ai valsé entre les cultures québécoise et haïtienne. Mais un jour, j’ai compris la chance que j’avais. Je garde de très beaux souvenirs de mon enfance, du pays de mon père que j’ai eu l’occasion de visiter, de ces fameux dimanches à l’église et des délicieux pâtés de ma belle-mère ! Mwen kontan sa mwen ye a! Ensemb ensemb nous fo! Couleur café

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Identité culturelle

Ils sont fous ces Québécois !!! Participant : Yamiley Cadet Âge : 52 ans Côte-des-Neiges– Notre-Dame-de-Grâce Histoire de : Arno 10 ans

Je le dédie à mes enfants québécois Arno (10 ans) et Dominique (14 ans) Cette petite histoire se déroule dans une cour d'école typique de Montréal. Les enfants envahissent la grande cour en chahutant et courant dans tous les sens. Ils sont visiblement issus de multiples origines et cela ne semble guère les impressionner. Dans un coin, une discussion animée débute entre deux groupes d’enfants. C’est qu’on ne sait pas trop sur quelle base il faut définir les deux équipes et comme tout le monde veut jouer avec ses amis et que chaque équipe veut avoir les meilleurs joueurs, la partie de soccer n’est pas encore commencée que le ton monte déjà et une bousculade s’ensuit. C’est qu’un des joueurs a eu la brillante idée de proposer de jouer les Noirs contre les Blancs. On n’est pas du tout d'accord, car il y a des bons joueurs des deux côtés qui voulaient jouer ensemble et non l’un contre l’autre... De plus, on a aussitôt â faire face â un premier dilemme : quoi faire avec les mulâtres, les Latinos et les Philipinos? Sont-ils Noirs ou Blancs? Et comment déterminer la place de cet élève amérindien qui a un teint assez foncé pour passer pour un Latino, mais qui s’est toujours vu et considéré comme un « québécois-de-souche-totalement-blanc-purelaine» ??? Soudain, autre chose vient compliquer encore plus la situation : Arno, un des meilleurs joueurs de soccer de l’école, surprend tout le monde, car malgré ses cheveux châtains et sa peau très claire (malgré une mère haïtienne) s’est placé automatiquement du côté des Noirs ! Les Blancs protestent, car tout le monde dit qu’Arno est plutôt blanc, mais Arno et ses amis métissés insistent et précisent : «Non-Non-Non... Ils sont Noirs en dedans et Blancs dehors» et aujourd’hui, ils se sentent plutôt Noirs... Les Blancs sont décontenancés et réclament qu’Arthur qui est Chinois, mais a une des peaux les plus blanches de tous se joignent â eux et double-Zut, voilà que Vladimir, qui est né à Cuba, mais de parents russes décide qu’il est Noir finalement. Et Tarik qui est né au Japon de parents marocains, il fait quoi là au milieu d’un no man’s land virtuel â rigoler avec Arthur??? Au beau milieu de cette grave discussion, Diego un beau petit Péruvien résume très justement la situation en annonçant que cela ne sert plus â rien désormais de se battre entre Noirs et Blancs, car comment savoir qui est quoi et surtout comment arriver à démêler qui est qui aujourd’hui... «On est tous pas mal mêlés de toute façon maintenant » décrète-t-il d’un ton découragé qui fait rire tout le monde ! Sur ce constat hilarant, la cloche qui met fin â la récré replace tout ce petit monde en rangs bien droits et serrés et c’est en une belle file indienne, des plus petits aux plus grands et surtout toutes couleurs confondues que se fait le retour en classe â l’école IONA... Yamiley Cadet Agent de bureau Module Vérifications d’antécédents

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Identité culturelle

Le pouvoir d’oser Participant : Sylvain Brousseau Le Plateau-Mont-Royal

Je suis né au Cap-de-de-la Madeleine, d’un père haïtien et d’une mère québécoise de souche. J’ai été élevé exclusivement par ma mère, dans un milieu ou j’étais le seul Noir et le seul enfant provenant d’une famille monoparentale. Dans ce contexte, la différence m’a bien servi. L’attrait de la nouveauté faisait que tous voulaient être mes amis. Je n’ai jamais eu de contact avec la communauté haïtienne avant de devenir policier au SPVM. Ce sont mes collègues qui m’ont enseigné mes seuls mots créoles : des mauvais mots! J’ai toujours voulu être policier et je me sens tellement Québécois, que je n’ai jamais eu d’appréhensions sur la façon dont je serais reçu. Il y a une croyance bien ancrée que les Noirs ont peur des chiens; cela tient souvent au fait qu’ils n’ont pas vraiment de contacts avec cet animal. J’ai été surpris de voir au Kentucky un maître chien noir et ça m’a incité à amorcer des démarches, car j’ai toujours eu de la facilité avec les chiens. Je suis fier de dire que j’ai été le premier maître chien noir au Québec. À cause du chien, je peux établir des contacts différents avec les gens, notamment ceux de la communauté noire; je peux tenter des interventions plus appropriées. Je ne cherche pas systématiquement à devenir un modèle pour les jeunes Noirs, mais je pense que ma réussite leur fournit un exemple d’intégration.

Une double identité est une force et richesse Participant : Emma Ville-Marie

Avoir une double identité culturelle (dans mon cas haïtienne et québécoise) est à la fois une force et une richesse. Avoir une double identité culturelle, c’est d’avoir la chance de connaître deux cultures, avoir deux histoires d’ancêtres, fêter deux fêtes nationales, deux styles de musique (danser sur bon Kompa !!), de connaître des langues riches en expressions... J’ai la chance de parler le créole, le français et l’anglais. Souvent lorsque je parle avec mes consœurs et confrères, je commence une conversation en français, incorpore un proverbe haïtien (pour mieux faire comprendre mes sentiments) pour terminer une petite expression anglaise. Avoir une double identité c’est avoir la chance de mélanger deux cultures... Emma

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS

Quatrième thématique : Réalisations effectuées au Québec Cette thématique est différente, car elle mentionne les réalisations significatives effectuées au Québec. Le participant peut décrire ses actions méritoires, l’obtention d’un diplôme, son implication comme bénévole, une création artistique, un exploit sportif, un talent artistique et/ou culturel, etc. Cette thématique permet au participant de rendre hommage à des gens dont il estime les réalisations, même à des personnes qui ne sont plus parmi nous.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Réalisations effectuées au Québec

Le Club de boxe l’Espoir Participant : Ju & Li Villeray–Saint-Michel– Parc Extension Histoire de : Evens Guercy

Evens Guercy est policier à Saint-Michel depuis le début de sa carrière, il y a deçà 8 ans maintenant. À côtoyer les jeunes du quartier au quotidien, il a constaté leurs besoins d’appartenir à un groupe, d’être valorisés et d’avoir des modèles positifs. C’est ainsi qu’en 2005, il a décidé de mettre sur pied un club de boxe pour les jeunes, projet qu’il a pu concrétiser au terme de plusieurs efforts et grâce surtout à l’obtention d’appuis financiers de partenaires tant institutionnels que communautaires. Le club de boxe l’Espoir, à ses débuts, avait pour objectif de remédier au flânage des jeunes dans la rue après l’école. Aujourd’hui, Evens s’est donné pour mission de combattre l’exclusion sociale. «Tous les jeunes dans la vie méritent une chance, ceux de Saint-Michel ne font pas exception. Des entraîneurs qui croient en eux, qui font figure de modèles positifs, qui leur inculquent des valeurs positives et leur enseignent la discipline peuvent faire toute la différence dans le parcours de vie de ces jeunes défavorisés. L’Espoir, c’est pour eux aussi!», soutient-il avec conviction. L’on peut penser que sans la boxe, certains jeunes du quartier pourraient se laisser prendre aux pièges de la rue et même décrocher de l’école. Mais, s’il est une condition essentielle pour faire partie du club, c’est bien celle d’aller à l’école, d’assister à ses cours. La motivation de s’entraîner avec des professionnels, d’appartenir à un groupe qui s’encourage est telle que les jeunes restent à l’école. En outre, pour souligner l’accomplissement des jeunes, le club de boxe l’Espoir tient son gala annuellement. Le 6 mai prochain, d’ailleurs, le club connaîtra la 5e édition de son gala annuel et, pour une troisième année, il recevra ses jeunes boxeurs sur l’arène de la Tohu, un fier partenaire de cet événement. C’est l’occasion pour ces jeunes de montrer ce qu’ils ont dans le ventre, de démontrer le fruit de leurs efforts pendant une année tout entière, mais aussi de vivre une valorisation digne des grands galas en livrant une performance unique devant parents et amis, qui les applaudiront. La détermination, la persévérance et les efforts d’Evens dans ce projet ont permis d’aider et de valoriser de nombreux jeunes déjà qui, aujourd’hui, peuvent à leur tour, faire figure de modèles positifs pour la jeunesse d’aujourd’hui. L’espoir est bel et bien présent.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Réalisations effectuées au Québec

Un collègue exceptionnel Participant : Danielle Ville-Marie Histoire de : Herman Okomba-Deparice

Lorsqu'il est arrivé parmi nous avec son sourire taquin, nous étions loin de nous douter, à quel point Herman Okomba-Deparice était une précieuse acquisition pour le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). Né au Congo (Brazzaville), d'une mère Africaine et d'un père français et détenteur d'un doctorat en science politique, nul doute qu'Herman a su «mettre de la couleur » sur notre équipe. En sa qualité de conseiller en matière de relations avec les citoyens et grâce à ses compétences, sa sensibilité politique et son sens de l'humour, il a grandement contribué à ce que notre organisation demeure adaptée à une société en changement. Parmi ses réalisations, Herman a conçu une vingtaine de capsules vidéo sur différentes communautés culturelles de Montréal, contribuant ainsi à développer les compétences policières en contexte multiculturel de manière à favoriser le maintien des liens de confiance avec les citoyens de toutes origines. Il a aussi proposé la «Déclaration de service aux citoyens du SPVM» qui soutient l'importance de la qualité de la prestation de services aux citoyens. La contribution d'Herman envers le SPVM témoigne de la richesse culturelle que nous apportent les citoyens de toutes origines ethniques. Elle rappelle que c'est en unissant nos forces que parviendront, ensemble, à faire de Montréal, une Ville paisible et sécuritaire.

Hommage à Monsieur Jean Jean-Louis, Sécurité du Quartier général, SPVM Participant : Daniel Rousseau Ville-Marie Histoire de : Jean Jean-Louis

Je profite de l’événement annuel, Mois de l’histoire des noirs, pour souligner l’apport de l’agent de sécurité, Monsieur Jean Jean-Louis, au bon fonctionnement et au climat accueillant du Quartier général du SPVM. D’origine haïtienne et intégré à la communauté québécoise depuis de nombreuses années, Monsieur JeanLouis travaille dans l’ombre à notre sécurité quotidienne au travail. Dès notre entrée le matin, Monsieur Jean-Louis nous accueille quotidiennement avec un sourire et un bonjour qui commence notre journée de travail sur une note agréable. Toujours empressé de rendre service et de faire ce « quelque chose» de plus que ce à quoi l'on pourrait s’attendre, tel est le quotidien de Monsieur Jean Jean-Louis. Ne serait-ce que pour apprendre quelques mots de créole, j’ai toujours plaisir à échanger avec lui sur les traditions d’origine haïtienne. Les préoccupations des épreuves qu’ont vécues les proches de Monsieur Jean-Louis, demeurés à Haïti durant l’année 2010, ont souvent fait partie de nos échanges. Nos discussions d’ici et de là-bas meublent nos contacts quotidiens, de la situation internationale au match de hockey de la veille, c’est un plaisir renouvelé de côtoyer cet homme de grande valeur, généreux de sa personne et toujours souriant. Je tiens donc, en ce Mois de l’histoire des noirs, édition 2011, à rendre hommage à celui que je considère comme mon ami, Monsieur Jean Jean-Louis. 21

MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Réalisations effectuées au Québec

Sur la route du succès Participant : Diane Ahuntsic-Cartierville Histoire de : Rolande

Je connais Rolande depuis environ dix ans, car nous partageons le même milieu de travail. Je l'ai toujours connu faisant deux emplois en même temps malgré que ses deux enfants étaient en bas âge. Rolande est originaire de St-Marc en Haïti. Elle est arrivée ici quand elle avait 5 ans. Sa famille devait émigrer aux États-Unis, mais ils sont arrivés au Québec et ils y sont restés. Elle a grandi dans Montréal-Est, où elle est allée dans un pensionnat. Ils n'étaient que trois Haïtiens à l'école, dont elle et sa soeur. Elle a aimé l'expérience d'être en pensionnat, car son père était très strict et au moins là-bas elle pouvait se permettre de faire des choses qui étaient interdites à la maison. Elle a travaillé fort pour s'acheter une maison, ce dont elle a réussi. Par la suite, elle a quitté un de ses emplois pour suivre un cours en coiffure, domaine qui l'intéressait particulièrement. Après ses études, elle s'est trouvé un emploi dans un salon de coiffure, où elle y a travaillé pendant environ deux années. La propriétaire a décidé de vendre son salon de coiffure et Rolande a décidé de l'acheter. Rolande a été très discrète sur ce fait, en ne le mentionnant que lorsque la vente était complétée. Aujourd'hui Rolande continue de travailler avec moi à temps partiel et travaille à temps complet à son salon. Depuis douze mois, ses affaires fluctuent et elle commence à reprendre son souffle. Rolande est quelqu'un que j'admire, car elle va au bout de ses rêves. Félicitations Rolande !

Informations sur l’agent Lyonel Anglade Participant : Danielle Saint-Léonard Histoire de : Lyonel Anglade

Policier d’origine haïtienne au Service de police de la Ville de Montréal depuis 1996, il est au service des citoyens depuis 15 ans et travaille actuellement à la Section des enquêtes multidisciplinaires et coordination jeunesse de la région Est. Instigateur du projet « Le parent, un allié essentiel » en 2004, l’agent Anglade a tenu 72 rencontres auprès de plus de 6500 parents et adolescents de la communauté haïtienne dans 31 églises de Montréal. Ces rencontres visaient à aider les parents dans leur rôle d’éducateur en favorisant l’établissement d’un climat de confiance et de rapprochement avec différentes institutions de leur quartier, susceptibles de leur offrir du soutien. Le bilan de ces rencontres est extrêmement positif, tant auprès des parents et des jeunes rencontrés qu’auprès des leaders religieux de la communauté haïtienne et des partenaires institutionnels. Nul doute que l’agent Anglade a contribué à démystifier plusieurs préjugés, mythes et méconnaissances. Son projet a contribué au décloisonnement significatif et positif des rapports avec les membres de la communauté haïtienne. Les réalisations professionnelles de l’agent Anglade ne s’arrêtent pas là puisqu’il a participé à plusieurs émissions radiophoniques en créole et a produit des capsules de prévention pour la communauté haïtienne. Il a également offert son support à plusieurs familles de nouveaux arrivants de Montréal, en situation de précarité. Enfin l’agent Anglade à effectuer en 2007-2008 une mission extérieure en Haïti, lors de laquelle la population locale a pu bénéficier de son expertise. Lyonel Anglade est un modèle positif, source d’inspiration pour les autres policiers. Son engagement et sa contribution envers la communauté sont exceptionnels et admirables.

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS

Hommage à nos prédécesseurs

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MOIS DE L’HISTOIRE DES NOIRS | Hommage à nos prédécesseurs

Hommage à un pionnier Participant : Patrice Vilcéus LaSalle Histoire de : Édouard Anglade 1944-2007

Edouard Anglade a compté trente ans de carrière à la police de Montréal. Il a reçu beaucoup de prix pour l’ensemble de sa carrière. Il est récipiendaire de deux Prix du Gouverneur général pour services distingués, décernés, le premier, en 1995, par le très honorable Roméo Leblanc, le second en 2004, par la très honorable Adrienne Clarkson. Il a également été fait citoyen d'honneur de la Ville de Montréal. Par ailleurs, la police de Montréal lui a attribué un certificat de reconnaissance pour conduite exemplaire pendant plus de trente ans de service. Le 20 juin 2007, l’Assemblée nationale du Québec a rendu hommage à cet homme irréprochable embauché en 1974, Édouard Anglade a travaillé pendant 30 ans pour la police de la Ville de Montréal. À l'époque, seul Noir parmi 5000 policiers blancs, M. Anglade a vu sa carrière marquée par la lutte contre le racisme. En 1988, il a d'ailleurs gagné le premier procès pour harcèlement racial au Canada. Originaire d'Haïti, M. Anglade s'est battu pour faire une place aux Noirs dans la police

Voyageur des continents Participant : Julie Ville-Marie Histoire de : Mathieu de Costa ~1570-~1623

Originaire d’Afrique, Mathieu de Costa était un navigateur et un traducteur de plusieurs langages. Il parlait l’anglais, le français, le néerlandais, le portugais et le basque. C’est le basque qui lui a servi à communiquer avec les gens des Premières nations qui habitaient le Québec. Il est arrivé au Québec aux alentours de 1603 où il en a profité pour apprendre la langue des Micmacs. Par la suite, il a été engagé par Pierre Du Gua de Monts pour ses services de traducteur en Nouvelle-Écosse et en Acadie vers 1607. En 1608, c’est Samuel de Champlain qui requiert ses services lors d’un voyage au Québec. Mathieu de Costa est la première personne de la communauté noire à fréquenter le Canada. Ses aptitudes à l’égard des langues ont fait de lui un précieux collaborateur pour faciliter la communication entre les différents peuples.

Le Service de police de la Ville de Montréal est fier de participer à l’édition 2011 du Mois de l’histoire des noirs qui lui offre l’occasion de témoigner de son engagement face aux communautés noires de Montréal. Nous tenons également à souligner la contribution de tous ceux et celles qui ont permis la réalisation de ce cahier spécial en partageant des récits de vie. Nous souhaitons que vous apprécierez, autant que nous, la richesse de ces histoires, de même que les émotions, les valeurs, les souvenirs et les amitiés qui s’en dégagent.

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