Structuration sémantique de la réglementation - Semantic Scholar

... en tant que modèle opérationnel, dans le domaine hybride de l'IA et du document ..... Concept est représentée au sein de la DTD SGML par l'entité paramètre ...
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Structuration sémantique de la réglementation David Jouve1,2, Bertrand Chabbat2, Youssef Amghar1 et Jean-Marie Pinon1 1

Insa de Lyon – 20 av. Albert Einstein – 69 621 Villeurbanne Cedex Cnedi – Cnaf – Tour du Crédit Lyonnais – 129 rue Servient – 69 326 Lyon Cedex 03

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e-mail : {djouve@lisisun1, amghar@ifhpserv, pinon@if}.insa-lyon.fr 2 e-mail : {david.jouve, bertrand.chabbat}@cnedi69.cnafmail.fr

Résumé Nous abordons, dans cet article, la problématique liée aux changements de réglementation sur le corpus réglementaire et sur ses implémentations calculatoires. A partir de l’ontologie de loi proposée par R. van Kralingen, nous élaborons une structure documentaire générique qui rend explicite la sémantique des documents réglementaires. Celle-ci est représentée d’une manière suffisamment fine et rigoureuse pour mettre en relation des documents appartenant à des niveaux de droit distincts. C’est ainsi que nous identifions la nature de la relation qui unit les sémantiques issues de textes réglementaires de niveaux hiérarchiques distincts. Une structure générique de mise en relation est alors proposée pour être instanciée en termes d’hyperliens. L’ensemble de nos propositions permet de modéliser, non seulement la sémantique de chacun des documents réglementaires, mais aussi les relations qui les unissent verticalement au sein de la réglementation. La sémantique de la réglementation est explicitée de manière globale sous forme d’un hyperdocument, depuis les textes les plus généraux, jusqu’aux textes les plus proches des spécifications des systèmes qui mettent en œuvre cette réglementation. Nous établissons ainsi un support essentiel et nécessaire offrant en perspective l’instauration d’un contrôle de la cohérence et de la conformité et d’étude d’impact au sein de la réglementation.

Mots clefs Réglementation, Document Réglementaire, Sémantique, Modélisation de liens, SGML, XML, DTD

Abstract In this paper, we address the problems caused by changes in the regulations on the legal corpus and its calculative implementations. From the ontology of law suggested by R. van Kralingen, we construct a generic document structure, which renders explicit the semantics of legal documents. These are represented in a sufficiently fine and rigorous way to link together documents belonging to distinct levels of right. Thus we identify the nature of the relation which links semantics emerging from legal texts from distinct hierarchical levels. A generic matching structure is then proposed that can be instanciated in terms of hyperlinks. The whole of our proposals makes it possible to model not only the semantics of each legal document, but also the relations linking them vertically within the regulations. The semantics of the regulations are then clarified globally in the form of an hyperdocument, from the most general texts to the most specific texts of regulation implementing systems. Thus, we establish an essential and necessary support, which provides the opportunity for the establishment of coherency and conformity checking and an automatic impact study within the regulation.

Key words Regulation, Legal Document, Semantics, Link modelling, SGML, XML, DTD

1 Introduction Le document réglementaire est à la source de la représentation et de la restitution des connaissances juridiques. Il est essentiel à l’accomplissement même de la fonction de la loi, et détient de par ce rôle des spécificités qui le distinguent des autres types de textes que l’on a coutume d’analyser et de gérer dans le domaine de la modélisation documentaire : une sémantique sujette à interprétation, des textes normatifs, fortement hiérarchisés, empreints d’une forte caractérisation temporelle… De nombreux travaux scientifiques ont permis d'élaborer des modèles de représentation et de manipulation pour les documents réglementaires : logique déontique [WRIG63] [ROYA00], ontologies [KRAL95] [VALE95], argumentation juridique [BENC97], indexation et recherche d’information [PIET99] [WINK00], représentations non formelles et traitements [MERK99], etc. Mais peu se sont attachés à la problématique engendrée par les changements de réglementation sur le corpus documentaire et sur ses implémentations calculatoires au sein des systèmes d’information. Ce travail s'inscrit dans le contexte de la Caisse Nationale des Allocations Familiales dont la mission principale est l’attribution des Prestations Familiales. La législation du domaine est extrêmement complexe, les allocataires se comptent par millions, l’Institution a fait appel à la machine pour l’assister dans cette tâche. Mais la nature instable de la législation rend la maintenance de tels systèmes particulièrement lourde. La section suivante énonce plus précisément cette problématique. Après un état de l’art (section 3), nous présentons un modèle de représentation sémantique (section 4) à partir duquel nous élaborons une structure documentaire générique pour les textes réglementaires (section 5). Les documents ainsi structurés sont alors mis en relation verticalement jusqu’au niveau des spécifications des systèmes d’information (section 6). Après une brève discussion (section 7), nous concluons en présentant quelques perspectives (section 8).

2 Problématique Les textes réglementaires considérés ici sont, de manière générique, des textes exprimant une réglementation liée à la législation, indépendamment de leur valeur juridique [CHAB97]. Certaines de leurs caractéristiques les distinguent des autres types de documents. Parmi elles, deux jouent un rôle prépondérant dans l’articulation de la problématique abordée dans cet article : − Les textes réglementaires sont normatifs. La loi est généralement acceptée en tant qu’instrument de conduite sociale, sa fonction entraîne la communication de règles générales, de standards de comportement et de principes auxquels les sujets de la loi doivent se soumettre [HART61] : les normes. Leur communication requiert l’utilisation du langage [KRAL93], et notamment, leur formulation au sein des textes réglementaires. Nous considérons donc qu’elles sont inhérentes à la nature même des textes réglementaires, en accord avec l’approche, couramment admise, consistant à représenter la réglementation ou la législation sous forme de règles. − Les textes réglementaires sont hiérarchisés [CHAB97], et le niveau de chaque texte au sein de cette hiérarchie détermine sa valeur juridique ainsi que son degré d’applicabilité (cf. fig. 1). Généralement, le degré d’applicabilité d’un texte est inversement proportionnel à sa position hiérarchique. Nous faisons référence aux niveaux hiérarchiques en employant le terme niveaux de droit.

Nous estimons qu'un ensemble d'entités syllogistiques abstraites peut être extrait depuis tout corpus réglementaire : les règles de droit. Nous considérons qu’une règle de droit est une règle de manière générale, une certaine abstraction, qui constitue une particule élémentaire du droit. Celle-ci est élaborée puis raffinée tout au long du processus de création du droit, et ce même processus est prolongé jusqu'à ce que les règles de droit soient directement applicables au monde réel. Ainsi, les règles de droit peuvent être extraites au cours d'une phase d'analyse descendante et de consolidation sémantique des niveaux de droit. Nous considérons que la plupart des systèmes d’information implémentant une réglementation sont conçus et fonctionnent à base de règles de droit. Lorsqu'une réglementation fait l'objet d'une implémentation calculatoire, l’objectif est d’obtenir un ensemble de déclarations visant à faire dérouler des syllogismes par la machine. Ces syllogismes sont généralement déterminés plus ou moins implicitement à partir des règles de droit par application de certains schémas de translations sémantiques permettant : − de passer d’une sémantique s’adressant à un groupe d’individus, à une sémantique s’adressant à un individu particulier externe à ce groupe (la machine) ; − et de passer d’un domaine sémantique ouvert à un domaine fermé représentable en machine. Une implémentation calculatoire de la réglementation, comme toute application informatique, est spécifiée au travers d’une documentation. Celle-ci doit être perçue comme le fruit du prolongement du processus de création du droit [CHAB97]. Si bien que de tels documents se localisent à la base de la pyramide réglementaire (cf. fig. 1), et doivent être en conformité totale avec le reste de la réglementation. Ainsi, lorsqu’un changement intervient au sein de la réglementation, il faut impérativement que celui-ci leur soit répercuté. Évaluer l’impact d’une modification réglementaire sur des systèmes d’information est un problème qui prend toute son ampleur lorsque l’on considère le nombre de règles généralement implantées (environ 15000 dans Cristal1). Comment mettre en relation les textes réglementaires et la documentation de spécification et de conception de ces systèmes ? L’explicitation d’une telle relation incarne un support nécessaire et incontournable à l’instauration de processus de vérification de la conformité, de vérification de la cohérence, et d’étude d’impact. Cette problématique, spécifique aux plus bas niveaux de la pyramide réglementaire, est révélatrice d’une problématique plus générale. Effectivement, lorsqu’une modification intervient à un certain niveau de la pyramide, l’ensemble des textes en aval peut devoir être impacté. Ainsi, dans cet article nous aborderons la problématique générale consistant à expliciter les relations sémantiques existant entre textes réglementaires de niveaux distincts. Type de texte Constitution Loi Décret Circulaire ministérielle Textes de ref. interne Instructions techniques Spécification des règles de gestion

Origine Parlement Assemblée nationale Conseil des ministres Ministère Organisation niv. 1 Organisation niv. 2 Organisation niv. 3

Niveau hiérarchique

fig. 1 - La hiérarchisation du droit et des objets réglementaires

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Cristal est le système de gestion des prestations de la Caisse Nationale des Allocations Familiales.

3 État de l’art Établir une relation explicite entre les différents niveaux de droits suppose d'avoir déterminé préalablement quelles sont, et comment s’articulent, les entités qui caractérisent leur sémantique. Cet ensemble constitue une conceptualisation, c'est à dire une collection d'objets abstraits, de concepts et d'autres entités supposées exister dans un domaine et leurs relations [GENE87]. La spécification explicite d'une conceptualisation est une ontologie [GRUB93]. Dans le domaine de l'Intelligence Artificielle et la Loi, peu d'ontologies ont été élaborées [VISS98a]. Les principales sont au nombre de quatre : le LLD de McCarty, la NORMA de Stamper, l'ontologie fonctionnelle de Valente et l'ontologie en frames de Van Kralingen et Visser. Elles divergent de par la perspective choisie par leurs auteurs lors de leur élaboration. Aucune n’est fondamentalement meilleure qu’une autre [VISS98b]. Le choix de l’ontologie est alors totalement dépendant de l’application particulière qu’elle aura à soutenir. L’ontologie en frames [KRAL95], conçue afin de représenter la loi en tant qu’élément de connaissance [VISS97] et de capturer son essence grâce à un nombre limité de primitives [KRAL97], permet de structurer très fortement la sémantique d’un ensemble de textes réglementaires [CHAB97].

3.1 Ontologie en frames L'ontologie en frames de van Kralingen2 et Visser [KRAL93] [KRAL95] [KRAL97] décompose la connaissance juridique en trois entités distinctes : les normes, les actes et les descriptions de concepts. Pour chacune, l'ontologie définit une structure en frame qui organise l'ensemble de ses attributs caractéristiques. Les normes (cf. tab. 1) sont des règles générales, des standards et principes comportementaux auxquels les sujets de loi doivent se soumettre. Elles constituent le plus important élément des systèmes juridiques [HART61] [WRIG63] [ROSS68]... Les actes (cf. tab. 2) représentent les aspects dynamiques qui induisent des changements dans l'état du monde. Les descriptions de concepts (cf. tab. 3), aussi appelées concepts par raccourci de langage, traitent de la signification des concepts présents dans le domaine. L’approche de van Kralingen, s’inscrivant notamment dans le prolongement de la logique déontique de von Wright [WRIG63], a pour but de déterminer quels sont précisément les éléments de lois manipulés par les juristes. Elle établit une typologie des éléments à extraire de la législation et à organiser en unités sémantiques ou frames valuées grâce à des expressions logiques à base de prédicats. Il s’agit d’une approche orientée sémantique se basant sur les propriétés normatives des textes de loi. Les normes, actes et concepts permettent de structurer très fortement la sémantique issue des textes réglementaires.

tab. 1 – Frame structurant les normes [KRAL95]

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Bien qu’il existe quelques différences mineures entre l’ontologie définie par Van Kralingen et celle définie par Visser, leurs similarités permettent de les traiter comme une même ontologie [VISS97]. Pour sa description, nous renvoyons ici principalement à [KRAL95].

tab. 2 – Frame structurant les actes [KRAL95]

tab. 3 – Frame structurant les concepts [KRAL95] Le modèle de R. van Kralingen se situe au niveau ontologique. Sans remettre en question sa validité et sa valeur, certains de ses aspects constituent une limitation lorsque l’on désire l’appliquer directement, en tant que modèle opérationnel, dans le domaine hybride de l’IA et du document : − Les frames sont instanciées à partir des textes, mais ne conservent qu’une relation de référence avec eux (élément ‘Promulgation’, cf. tab. 1,2,3). Comme nous l’avons montré [CHAB97], il est impossible de déterminer de manière fiable quelles sont les portions textuelles qui ont permis de valoriser les éléments de leur structure. − Seuls les concepts introduits par la réglementation trouvent une définition de leur sémantique dans le modèle. Cependant, lorsque la sémantique est structurée en vue d’une implémentation calculatoire, il nous semble judicieux d’intégrer aussi une description sémantique des concepts dont la signification peut paraître évidente pour un humain, mais qui ne l’est pas forcément pour une machine. − Aucun contrôle de la cohérence n’est instauré quant à la correcte utilisation des prédicats. Une réglementation constitue un système sémantique complexe dont la représentation devient faillible si l’on ne peut garantir l’obtention d’une instanciation fiable et rigoureuse. − La notion de concept manque d’uniformité. Un acte est aussi une forme de concept qui peut être introduit par la loi. Par exemple : ‘ouvrir le droit à une personne’. Il devient alors plus difficile de prétendre obtenir une gestion homogène de l’ensemble du système d’information.

3.2 Langages de structuration de documents. Le principal concept et l’intérêt des langages de structuration de documents est d’attacher de manière explicite des informations ou des propriétés à des portions de texte. Des langages tels que SGML [SGML1] ou XML [WWWC1] mettent en œuvre un système de balisage. Celui-ci permet de représenter explicitement des informations implicites contenues dans le texte ou qui lui sont attachées. Ces langages peuvent être utilisés dans plusieurs intentions : − Afin de construire une représentation de l’information utile. Dans ce contexte, seules les informations pertinentes, selon un point de vue considéré, sont explicitées.

− En vue d’une interprétation textuelle. Dans ce cas, les informations textuelles originelles peuvent être confrontées avec d’autres sources d’informations (tels que des préconstruits culturels, des connaissances sociales, philosophiques ou autres…), puis traduites en un formalisme donné (structures physiques, interfaces génériques) avant d’être associées conjointement et explicitement avec les portions textuelles concernées. − Afin d’établir ou de rétablir les relations entre les informations modélisées.

3.3 Modélisation sémantique Afin de relier les frames de van Kralingen aux textes réglementaires dont elles sont issues, nous avons proposé, au sein d’un modèle multiparadigme [CHAB97], une modélisation sémantique. Les frames et leurs éléments sont représentés sous forme de règles à l’intérieur même des textes réglementaires. L’idée est d’attribuer aux portions de texte des propriétés appartenant aux éléments des frames qui y sont liées, aboutissant ainsi, à la construction d’une structure sémantique générique de documents réglementaires. La norme SGML est utilisée pour élaborer les éléments composites et la structure sémantique générique dans laquelle ils s’intègrent. Les éléments des différentes frames sont incarnés par des attributs ou des éléments SGML. Cette modélisation sémantique est composée de trois niveaux. Chacun d’eux permet d’accroître le degré d’intégration des frames au sein des textes. Nous avons montré que le modèle proposé ne permet pas d’établir une « équivalence stricte » (bijection) entre les frames et les textes instanciés [CHAB97]. A un prédicat issu des documents instanciés en SGML peut correspondre n prédicats dans les frames. Les documents réglementaires sont sémantiquement structurés, cependant le manque de granularité de la structure générique proposée ne nous permet pas d’établir une relation suffisamment fine entre les niveaux de droit.

4 Structuration sémantique de la réglementation Nous avons vu précédemment que les frames de R. W. van Kralingen permettent de structurer très fortement la sémantique des textes réglementaires. A cette occasion nous avons dénombré certains aspects qui ne nous permettent pas de l’accepter pleinement dans sa forme originale en tant que modèle opérationnel. Au cours de la section suivante, nous en proposons une adaptation, afin d’y intégrer une représentation homogène des concepts réglementaires et des concepts génériques et d’y implanter certains mécanismes qui garantiront une instanciation plus rigoureuse.

4.1 Notion de concept La réglementation manipule un certain nombre de concepts. Certains d’entre eux lui sont spécifiques, et sont introduits par la loi pour la loi. D’autres, fournissent une représentation de la réalité, à partir de laquelle la connaissance juridique peut être définie [VALE95]. L’utilisation de la notion de ‘concept’ n’est pas restreinte ici à la seule représentation des concepts introduits par la loi. La sémantique de la réglementation est structurée en vue de sa mise en relation avec celle de ses implémentations calculatoires. Et, il nous semble judicieux de manipuler la notion de concept selon son sens générique et d’introduire ainsi au sein du modèle des descriptions qui peuvent paraître évidentes pour un humain, mais qui sont à mettre explicitement en corrélation avec leurs représentations modélisées en machine. Ainsi, par exemple le concept recouvrant l’expression le « Xième anniversaire d’une personne physique Y »

pourrait être décrit en tant que « Xième occurrence de l’événement annuel marquant la naissance de Y ». La sémantique véhiculée par un concept est positionnée relativement à celles recouvertes par d’autres concepts. Ainsi, décrire la signification d’un certain concept consiste en l’explicitation de ces relations de positionnement. Il est fondamental de distinguer la déclaration d’un concept et les références faites à un concept. La déclaration d’un concept est l’énonciation formelle de sa sémantique. Une référence à un concept, dénotée par l'emploi d’un prédicat, permet de fixer une certaine signification (relative au concept auquel elle réfère) à l’objet juridique au sein duquel elle est employée. Un prédicat est la représentation manipulable d’un concept (cf. fig. 2). Par exemple, il peut être fait référence au concept « allocataire », lorsque celui-ci est défini, en employant le prédicat Allocataire(…). prédicat

représente Concept 1..1 1..1

fig. 2 - Relation unissant les prédicats et les concepts Dans la représentation en frames de R. Kralingen [KRAL95], tous les prédicats ne sont pas associés à un concept défini explicitement dans le modèle. Or, prétendre modéliser de manière exhaustive la sémantique d’un texte réglementaire requiert que la sémantique de chacun des concepts manipulés soit parfaitement connue. Nous considérons la sémantique d’un concept connue dès lors que celui-ci est déclaré et défini : − soit par une règle d’appartenance (les conditions d’application dans le modèle de R. Kralingen [KRAL95]) ; − soit en répertoriant l’ensemble fini de ses instances ; − soit en précisant que ce concept est parfaitement connu des agents ou systèmes auxquels s’adresse le modèle (ou en l’exigeant si ce n’est pas le cas), et que la granularité sémantique recherchée est obtenue (concepts primitifs dans l’ontologie de Valente [VALE95]).

4.2 Taxinomie des concepts R. van Kralingen propose un processus de catégorisation du vocabulaire à appliquer en tant qu’étape lors de l’instanciation des frames [KRAL95]. Ce processus consiste à classifier les éléments du vocabulaire extraits des textes réglementaires selon qu’ils sont relatifs à une personne, un lieu, un objet… De même, il permet de distinguer les termes spécifiques au texte modélisé et les termes génériques. Il aboutit alors à la construction d’une liste de prédicats associée aux éléments textuels. Nous proposons ici d’exploiter plus avant ce mécanisme de catégorisation en étendant son application au typage des concepts révélés par les prédicats, et en le formalisant au sein même du modèle conceptuel. Ainsi, chaque concept mentionné par la réglementation est caractérisé par son appartenance à un certain type. Plusieurs typologies peuvent être dressées, selon la granularité et les types sémantiques désirés. Nous proposons en fig. 3 une typologie dérivée de celle utilisée par R. Kralingen lors de la phase de catégorisation du vocabulaire. Elle nous paraît être suffisamment générique pour prétendre être applicable à la quasi-totalité des textes réglementaires. Cependant elle ne se revendique ni exhaustive ni universelle, et pourra être adaptée selon les aspirations fonctionnelles que devra satisfaire le modèle vis à vis des applications et des agents manipulateurs. A chacun des types de concept est attachée une signification particulière : − Nous considérons ici qu’un Acte est une forme particulière de Concept. Par exemple, « Ouvrir le droit aux Prestations Familiales » se révèle être un concept de type Acte.

− Un concept de type Agent représente une classe d’individus (personnes physiques, personnes morales...). Le type Agent caractérise des concepts capables d'accomplir des Actes. − Les Objets sont des concepts caractérisés par leur inaptitude à accomplir des Actes. Par exemple une « Prestation ». − Les Relations incarnent les liens existant entre les concepts. Par exemple, « La personne P1 est à charge de la personne P2 », le concept recouvert par le terme « à charge » est une Relation qui unit deux personnes. − Une Propriété permet de caractériser un Concept. Par exemple, « La personne P est âgée de 35 ans », le concept d’ « âge » peut être modélisé comme étant une certaine Propriété de la « personne physique » P. − Les Concepts Temporels sont relatifs à l'espace temporel. R. Kralingen [KRAL95] remarque que la plupart des prédicats relatifs au temps sont des prédicats génériques (non spécifique à un texte particulier). − Les Concepts Spatiaux sont des Concepts relatifs aux lieux. Par exemple : la « France Métropolitaine », la « CEE » … − Les Opérations Arithmétiques sont généralement des Concepts génériques. Par commodité, nous les référençons par leur expression mathématique habituelle (lorsqu’elle existe). − Les Événements sont fréquemment rencontrés dans la réglementation et ne peuvent pas être convenablement représentés en se rapportant uniquement aux types mentionnés précédemment. Par exemple, le concept recouvert par l’expression « Naissance d’un individu P » est un Événement. Acte

Evénement Temps

Agent

Objet

Concept

Relation

Espace

Propriété Arithmétique

fig. 3 - Typologie des concepts

4.3 Organisation des frames Intégrer ce mécanisme de typage requiert d’apporter un certain nombre de modifications au modèle en frames de R. van Kralingen. En premier lieu, afin d’obtenir une vision uniforme de la notion de Concept, le découpage des frames évolue (cf. fig. 4). La structure de la Norme n’est pas impactée. La frame Concept centralise les éléments structurants génériques à l’ensemble des concepts. Un Concept ne peut pas être directement instancié, il s’agit d’une frame abstraite. Lorsqu’une spécialisation de Concept est instanciée (par exemple un Acte), la frame Concept l’est aussi de manière à incorporer automatiquement les éléments génériques (à l’ensemble des concepts) au sein de l’instance créée. Un tel mécanisme pourrait être qualifié d’héritage structurel. La sémantique des Actes et des Evénements est représentée selon des structures distinctes de celles des autres formes de Concepts. Leurs éléments spécifiques sont structurés au sein de frames spécifiques, tandis que les autres formes de concepts (Agent, Objet…), moins spécifiques à la loi, peuvent être représentées selon une même structure (cf. fig. 4).

Temp s

Norme

Norme

Acte

Espace Agent

Acte

Concept

Concept

Aut res Co ncept s Evénement

Objet Relation Propriété Arithmétique

fig. 4 - Évolution du découpage en frames La différence structurale entre les frames représentant les divers types de concepts est loin d’être incompatible avec notre vision uniforme de la notion de concept. Effectivement, chaque type de concept se distingue par la sémantique véhiculée. Aussi, les frames peuvent être structurées de manière à intégrer et mettre en valeur ces particularités sémantiques. De même, le modèle proposé peut faire l’objet d’évolutions ultérieures tendant à définir une structure spécifique pour chacun des types de concept identifiés, sans pour autant remettre en cause l’uniformisation de la notion de concept. On pourrait par exemple définir une frame spécifique aux Opérations Arithmétiques de manière à caractériser la transitivité des opérations, l’Opération Arithmétique n’en demeurerait pas moins un Concept. En second lieu, nous proposons d’ajouter un élément ‘Classe’3 valué à partir de la typologie des Concepts. Ainsi, l’ensemble des valeurs admissibles, selon notre typologie, est : {Acte, Agent, Objet, Relation, Propriété, Temps, Espace, Arithmétique, Evénement}

4.4 Héritage de la sémantique entre les concepts Les concepts de même type peuvent être liés par des relations d’héritage de la sémantique. Un concept Y peut être une spécialisation du concept X. X est un hyperonyme de Y, et Y est un hyponyme de X. Cette relation d’héritage est orientée de l’hyponyme Y vers l’hyperonyme X. L’héritage de la sémantique est à distinguer de la relation d’héritage structural existant, par exemple, entre la frame Concept et la frame Acte. Dans le premier cas, c’est la sémantique contenue dans la structure de l’objet qui est héritée, alors que dans le second c’est la structure elle-même qui est héritée. Afin de formaliser ce mécanisme au sein du modèle en frames, nous proposons d’inclure un élément ‘Héritage Sémantique’ dans la structure générique du Concept. Les relations de subsomption sont ainsi définies dynamiquement lors de l’instanciation des concepts. Par exemple, le concept « Allocataire du CF4 » se définit comme un « Allocataire » par l’intermédiaire de son élément ‘Héritage Sémantique’. Nous pouvons noter que, de façon similaire, l’ontologie fonctionnelle proposée par Valente [VALE95] organise les concepts du monde réel en hiérarchies de classes.

4.5 Typage des variables Considérons la portion textuelle « L’allocataire réside en France métropolitaine », trois Concepts sont référencés : le Concept « Allocataire » de type Agent, le Concept « Résider » de type

3

Nous avons nommé cet élément ‘classe’ et non simplement ‘type’ afin de ne pas introduire d’ambiguïté avec l’élément ‘type de concept’ (définition, facteur, référence ou méta-concept) défini par van Kralingen. 4 Le Complément Familial est une prestation gérée par la Caisse Nationale des Allocations Familiales.

Relation, et le Concept « France métropolitaine » de type Espace. Au sein des frames, cette portion textuelle sera représentée au travers de l’expression suivante : Allocataire(a1), Résider(a1, e1), France_Métropolitaine(e1)

Ainsi, le Concept « Résider » établit une Relation entre un Agent et un Espace, et par exemple, il serait aberrant d’appliquer la même Relation « Résider » entre un Concept Temporel et un concept de type Objet. L’intérêt de l’instauration d’un contrôle de la cohérence proscrivant de telles utilisations devient alors évident. Dans cette intention, nous proposons d'implanter un mécanisme de typage des variables complémentaire à celui défini pour les concepts. Pour chacune des frames, nous distinguons deux ensembles de variables : − Les variables utilisées uniquement pour la définition de la sémantique interne à la frame : les variables internes. Elles sont déclarées à l’intérieur d’un élément ‘Déclarations internes’ ajouté à la structure, et selon la syntaxe : type_variable1 nom_variable1, ... , type_variablei nom_variablei

− Les variables interfaces qui permettent d’interfacer la sémantique de la frame avec l’extérieur. Elles apparaissent au sein de l’élément ‘Expression’, et n’existent que pour les Concepts. L’élément ‘Expression’ permet de définir l’expression utilisée pour faire référence au Concept. C’est lors de la déclaration d’une telle expression que les contraintes concernant le typage des ces variables doivent apparaître. Selon la convention d’écriture fournie en annexe (cf. tab. 9), la syntaxe de déclaration de l’expression du Concept s’énonce : déclaration_expression : nom_ref_concept ( { { déclaration_variable , }* déclaration_variable } ? ) déclaration_variable : type_variable nom_variable type_variable : agent | espace | temps | objet | nombre | événement nom_ref_concept : {a..z | A..Z | 0..9 | _ | . }+ nom_variable : {a..z | A..Z | 0..9 | _ | . }+

Ainsi, l’expression du Concept « Résider » est déclarée : Résider(agent a1, espace e1).

4.6 Contrôle de la cohérence Certaines règles peuvent être établies afin de garantir un certain degré de cohérence lors de la définition de la sémantique. Il ne peut être fait référence à un Concept qu’au travers de son expression (son definiens), en conséquence l’expression d’un Concept doit refléter la sémantique de celui-ci. Et, la déclaration de l’expression d’un Concept devrait spécifier la manière dont il doit être fait référence au Concept. Ainsi l’expression du Concept « Allocataire » de type Agent ne doit être employée qu’afin d’affecter certaines propriétés ou d’instaurer certaines contraintes sur une variable de type Agent. Et il serait absurde d’écrire Allocataire(o) avec o se rapportant à une variable de type objet. Un ensemble de contraintes formulées en termes de relations d’admissibilité entre types de variables et types de Concepts peut être défini. Elles sont entièrement dépendantes et des typologies dressées et de la signification affectée à chacune de leurs composantes. Si les typologies ou leur interprétation évoluent, l’ensemble de ces relations doit évoluer en conformité. Nous noterons qu’il s’agit ici des contraintes minimales pour l’obtention d’une sémantique congrue.

4.7 Répercussion sur les frames : synthèse La frame relative à la structuration des Normes (cf. tab. 4) n’est impactée que par l’ajout de l’élément ‘Déclarations internes’.

tab. 4 - Structure de la Norme La frame abstraite structurant la sémantique générique à l’ensemble des Concepts est donnée par tab. 5.

tab. 5 - Structure des éléments génériques à l'ensemble des Concepts La sémantique des Actes est structurée d’une part en héritant de la structure générique donnée par tab. 5, et d’autre part par la frame décrite par tab. 6. Les éléments ‘Identificateur’ et ‘Type d’acte’, présents dans le modèle initial de R. van Kralingen, ont été supprimés : − Le premier était utilisé lors des références à un acte. L’Acte étant une sorte de Concept, le référencement se fait désormais par l’intermédiaire de l’élément ‘Expression’. − Le second, en tant que description abstraite de l’acte, entre en redondance avec l’élément ‘Héritage sémantique’ inhérent à l’ensemble des Concepts.

tab. 6 - Structure des éléments sémantiques spécifiques de l’Acte La sémantique spécifique de l’Événement est structurée selon la frame présentée par tab. 7. La sémantique des événements peut être caractérisée par les éléments : − ‘État initial’ afin de décrire l’état des choses dans lequel peut survenir l’événement ; − ‘État final’ afin d’exposer les résultats et conséquences de l’événement ; − ‘Condition d’application’ lorsqu’il s’agit de caractériser la transition elle-même ou les circonstances générales dans lesquelles le concept est applicable.

tab. 7 - Structure des éléments sémantiques spécifiques de l’Événement Les sémantiques des Agent, Objet, Relation, Propriété, Espace, Temps ou Arithmétique sont structurées selon un même modèle présenté par tab. 8.

tab. 8 - Structure des éléments sémantiques spécifiques de Agent, Objet, Espace, Temps …

5 Relation entre frames et textes Dans cette section, afin de relier explicitement la représentation en frames présentée précédemment aux textes réglementaires à partir desquels elles sont instanciées, nous présentons une extension au modèle documentaire de B. Chabbat [CHAB97]. Celle-ci repose, en premier lieu, sur la volonté d’atteindre une granularité structurale équivalente à la granularité sémantique fixée par le prédicat, afin de pouvoir définir une relation sémantique plus fine entre les niveaux de droit. En second lieu, il convient de répercuter au modèle proposé par B. Chabbat les modifications apportées à la structuration sémantique de R. van Kralingen. Le modèle initial, ainsi que notre extension, structurent les documents réglementaires afin de rendre explicite leur sémantique. Ils sont proposés sous la forme de DTDs SGML5. Les symboles utilisés pour leur représentation sont donnés en annexe par tab. 10.

5.1 Obtenir une granularité correspondant au prédicat En appelant f-prédicat un prédicat d’une frame, et s-prédicat un prédicat SGML instancié. Le modèle initial définit un élément générique SGML distinct pour chaque s-prédicat distinct. Ainsi, la portion de texte A « l’allocataire réside en France métropolitaine » est instanciée de la manière suivante : 3 f-prédicats

Allocataire(a1), Résider(a1, e1), France_Métropolitaine(e1)

1 s-prédicats

L’allocataire réside en France métropolitaine

Un s-prédicat peut correspondre à plusieurs f-prédicats : la relation n’est pas complète. La granularité sémantique maximale atteignable par le modèle est de l’ordre du groupe de prédicat, et non du prédicat même. La sémantique d’un texte est explicite, mais le manque de granularité se révèle être une certaine limite dès lors qu’il s’agit de mettre en relation des sémantiques issues de différents niveaux de droit. Par exemple, la portion A (se situant au niveau hiérarchique α), peut être précisée au niveau α+1 par une portion B « vérifier que le champ réside est à France-métropolitaine ». A est représentée par un seul s-prédicat. Le corollaire est que si la portion A est retravaillée de façon à remplacer « France métropolitaine » par « C.E.E », la sémantique de A sera remise en cause dans son intégralité, et une étude d’impact automatisée remettra inéluctablement l’ensemble de la 5

Contrairement à SGML, XML n’intègre pas le connecteur d’agrégation, particulièrement utile pour ce type de modélisation. Cependant les prototypes ont été développés pour XML après modifications des DTDs (rendues moins expressives).

portion B en cause. Si la granularité du f-prédicat était obtenue, les termes « Résidence » et « France métropolitaine » de la portion A seraient représentés par deux prédicats distincts et seul le terme France-métropolitaine de la portion B serait impacté. Nous proposons ici d’abandonner ce mode de structuration des prédicats au profit d’une nouvelle représentation. Celle-ci est fondée sur l’intégration des variables en tant que liens sémantiques. De surcroît, elle nous permet d’incorporer le mécanisme de typage développé dans notre adaptation du modèle de Kralingen. Nous représentons ici les prédicats au travers d’un même élément générique predicat doté de deux attributs obligatoires permettant d’identifier le concept auquel il est fait référence : le nom et la classe du concept. Par exemple la portion de texte donnée précédemment en exemple sera instanciée de la manière suivante : 3 f-prédicats

Allocataire(a1), Résider(a1, e1), France_Métropolitaine(e1)

L’allocataire 3 s-prédicats réside en France métropolitaine .

Cette formalisation permet de structurer sémantiquement le texte selon une granularité plus fine correspondant au f-prédicat. La seconde phase consiste en la représentation des liens sémantiques qui unissent les prédicats ainsi explicités. Les variables jouent un rôle essentiel de liaison sémantique entre les différentes références faites aux Concept (prédicats). Elles permettent de spécifier la façon dont sont articulés les différents prédicats, et ainsi de passer du statut de simple juxtaposition de sémantiques fragmentaires à celui de réelle construction sémantique. Le principe adopté ici est présenté en fig. 5. Les prédicats France_Métropolitaine(…) et Allocataire(…) manipulent une seule variable, tandis que le prédicat Résider(…) en manipule deux. Chaque prédicat admet un certain nombre d’emplacements propres à recevoir des références à des variables que nous désignons par le terme slot. Remarquons que l’ordre dans lequel apparaissent les slots dans l’expression d’un prédicat est primordial. La figure suivante illustre ce mécanisme et présente les variables en tant que liens d’articulations sémantiques inter-slots. variable

Allocataire (a1), Résider(a1, e1), France_Métropolitaine(e1)

prédicat

a1 Allocataire 1

Résider 1 2

e1 France_Métropolitaine 1

1

slot ordonné liens d’articulation sémantique

fig. 5 - Les variables en tant que liens sémantiques Ainsi, nous introduisons l’élément slot-var dans le modèle de contenu de l’élément predicat, cf. fig. 6. L’ordre des éléments spécifiques slot-var au sein d’un élément spécifique predicat correspond à celui des slots dans l’expression du prédicat associé.

fig. 6 - Modèle de contenu de l'élément prédicat Dans notre interprétation du rôle de liaison sémantique tenu par une variable λ dans une expression logique à base de prédicats, la déclaration de λ lie l’ensemble des slots se référant à λ, cf. fig. 5. Une déclaration de variable est représentée ici par un lien étendu inclus (selon la terminologie de XML Linking Language [WWWC2]), c’est à dire un lien possédant un nombre arbitraire de cibles et dont l’origine est la ressource dans laquelle celui-ci est défini. C’est ainsi que nous définissons l’élément decl-var. Chacune des cibles de decl-var (les slots) est identifiée et caractérisée par un élément cible-slot, cf. fig. 7. fig. 7 - Modèle de contenu de l'élément decl-var Pour une frame donnée, les variables internes sont déclarées au sein de l’élément ‘Déclarations internes’, représenté dans notre modèle documentaire par l’élément decl-var-int, cf. fig. 8. fig. 8 - Modèle de contenu pour l'élément 'Déclarations internes' Les variables interfaces sont déclarées lors de la définition de l’expression du Concept. Définir l’expression d’un Concept équivaut à établir le modèle générique utilisé pour y faire référence. De tels modèles sont basés sur les déclarations de prédicats, représentées ici par les éléments decl-predicat, cf. fig. 9. Le modèle de contenu de l’élément expression qui en découle est décrit par la fig. 10.

fig. 9 – Modèle de contenu de l'élément

fig. 10 - Modèle de contenu pour l'élément

decl-predicat

expression

Au sein de la réglementation, certaines portions textuelles expriment des constantes. Leur représentation au sein de notre modèle est proche de celle des variables : elles sont pour nous des variables dont la valeur est connue et fixée définitivement. Ainsi, constantes et variables partagent une même taxonomie. Cependant, contrairement aux variables, les constantes apparaissent généralement sous une forme explicite dans le texte, si bien que l’élément declconst (déclaration de constante) peut être instancié partout où l’élément predicat est applicable.

5.2 Intégrations des modifications relatives aux éléments des frames Le second objectif de notre extension est de répercuter au modèle initial les modifications apportées à la structuration sémantique de R. van Kralingen. Nous conservons ici le principe général adopté lors de l’élaboration du modèle initial : transformer les types de frames en modèles de contenu SGML équipotents. La fig. 11 présente le modèle contenu de la Norme à laquelle les modifications suivantes ont été apportées : − l’introduction de l’élément decl-var-int qui correspond à l’élément ‘Déclaration interne’ des frames ; − le sujet de la Norme (élément sujet) est rendu obligatoire puisque même si l’information est implicite, elle est nécessaire à l’explicitation de sa sémantique ;

− l’introduction de l’élément acte-associe permet de spécifier l’Acte associé à la Norme en termes de référence à un Concept et de contraindre sa présence. Un acte peut ainsi être défini et référencé dans le texte à différents endroits.

fig. 11 - Détermination du modèle de contenu de la Norme Notre vision uniforme de la notion de concept est répercutée au sein même de la DTD proposée au travers de l’entité paramètre concept-gen (cf. fig. 12). Celle-ci représente une déclaration de Concept de manière générique, c’est-à-dire d’Acte (élément acte), d’Événement (élément evenement) ou d’un autre Concept (élément concept pouvant représenter un Agent, un Objet…). Un Concept est représenté par une frame abstraite ne pouvant pas être instanciée directement. Nous propageons cette perception du Concept lors de notre extension. Ainsi la frame abstraite Concept est représentée au sein de la DTD SGML par l’entité paramètre elem-concept-gen qui rassemble les éléments génériques à l’ensemble des Concepts (‘Expression’, ‘Champ d’application’, ‘Déclarations internes’, ‘Héritage sémantique’, ‘Instances’) comme le montre la fig. 13.

fig. 12 – Représentation de l'uniformisation du Concept

fig. 13 - Les éléments génériques à l'ensemble des Concepts

Les modèles de contenu de l’Acte, Événement et des autres Concepts, déterminés à partir de leur frame respective, intègrent alors l’entité paramètre elem-concept-gen complétant ainsi la représentation du mécanisme de l’héritage structural présenté précédemment. Le modèle de contenu de la racine du document sémantique générique est fourni en fig. 14. Un document réglementaire doit contenir au moins la formulation d’une Norme ou d’un Concept.

fig. 14 - Racine de la structure sémantique générique

6 Relation sémantique entre textes de niveaux de droit distincts La fig. 15 présente une pyramide réglementaire simple. Le texte A (de niveau α) détient la valeur juridique la plus élevée, et spécifie un ensemble de normes prescrivant un certain comportement à adopter. Le texte B, de niveau hiérarchique α+1, précise le comportement fixé par A, le rend plus apte à être adopté au quotidien. A et B décrivent ainsi un même comportement, à des niveaux de précision différents : − A le spécifie de manière plus générale et plus abstraite en utilisant des termes plus généraux,

− B le décrit de manière plus précise et plus spécifique à son champ d’application. A B

fig. 15 - Exemple de pyramide de textes réglementaires Si une situation du monde réel se présente, le comportement à adopter pourra être indiqué plus précisément dans B que dans A, cependant il est probable que cette description ne soit pas fournie et qu’il faille alors se référer au texte A lui-même. La sémantique de B doit être conforme à celle de A. Le corollaire est que si A évolue (par exemple suite à la promulgation d’un nouveau décret par le parlement), B doit évoluer dans le sens de A. Les sémantiques de A et de B sont donc liées, et l’objet de cette section est de proposer un modèle générique de mise en relation.

6.1 Relations entre les déclarations d’objets juridiques Les modèles décrits dans les sections 4 et 5 nous permettent de structurer la sémantique des textes réglementaires en deux grands types d’objets : les Normes et les Concepts. Dès lors, deux types de relations peuvent être identifiés : − Les relations Normes-Normes, qui permettent de mettre en correspondance la déclaration au niveau α d’une Norme (notée Nα ) avec un ensemble de Normes (Nα +1) déclarées au niveau α+1. Une norme Nα peut ainsi être précisée par un ensemble de normes Nα +1. Et, une norme Nα +1 peut préciser une norme Nα. − Les relations Concepts-Concepts sont des relations similaires, mais appliquées aux déclarations de Concepts. Ainsi, nous notons Cα, un Concept déclaré au niveau α, et Cα+1 un Concept déclaré au niveau α+1. Les Concepts et les Normes véhiculent des sémantiques bien distinctes. Par conséquent, nous considérons qu’une Norme Nα ne peut être « précisée » par la déclaration d’un Concept Cα+1, de même qu’un Concept Cα ne peut être « précisé » par une Norme Nα +1. Les deux types de relations définies précédemment ne peuvent suffire à établir une réelle mise en relation sémantique des textes A et B. Par delà les Concepts et les Normes, il est nécessaire de s’intéresser aux règles au sens général. A. Elhag et al. observent qu’en dehors des normes, la loi contient d’autres règles [ELHA99], par exemple les règles d’appartenance utilisées pour la caractérisation d’un Concept. Les règles, de manière générale, sont représentées dans notre modèle par des expressions logiques à base de prédicats. Elles caractérisent la majeure partie des éléments qui composent la structure des Normes et de Concepts. Nous pouvons alors formuler un troisième type de relation : la sémantique véhiculée par un ensemble de n prédicats (références à un Concept) exprimés au niveau α peut être mise en correspondance avec la sémantique véhiculée par un ensemble de m prédicats (références à un Concept) du niveau α+1, avec généralement n ≤ m. La relation Prédicats-Prédicats définit une relation sémantique particulièrement fine entre les textes réglementaires de niveaux hiérarchiques différents. La granularité de la structure documentaire est complètement exploitée puisqu’elle permet de mettre en correspondance les particules sémantiques les plus élémentaires : les prédicats.

6.2 Structure générique de liens Afin de mettre en correspondance les documents réglementaires structurés, nous proposons en fig. 16 une structure générique de mise en relation sémantique. Le formalisme utilisé pour la

définition de ce modèle de mise en relation est le même que celui utilisé précédemment pour spécifier la structure sémantique des textes au sein même des niveaux de droit : les langages de structuration de documents. Les relations Norme-Norme, Concept-Concept et prédicat-prédicat sont représentées ici par des liens étendus exclus (selon la terminologie XML Linking Language [WWWC2]). Cette structure générique peut ensuite elle-même être instanciée afin d’obtenir un document spécifique de mise en relation qui contiendra l’ensemble des liens de mise en correspondance sémantique. L’élément Relations est la racine de cette structure générique, son modèle de contenu est défini en tant qu’ensemble d’éléments relation. Chaque élément relation représente une relation existant entre deux textes réglementaires instanciés appartenant des niveaux de droit distincts : − un texte en amont dans la pyramide qui peut être décrit au travers des attributs de l’élément texte-amont (tels que son titre, sa localisation…) ; − un texte en aval dans la pyramide qui peut être caractérisé au travers des attributs de l’élément texte-aval. Chaque élément relation intègre dans son modèle de contenu l’ensemble des liens permettant de mettre en relation les sémantiques des deux textes instanciés. Chacun de ces liens, selon qu’il se rapporte à une relation Norme-Norme, Concept-Concept ou prédicat-prédicat est défini dans l’un des éléments norme-norme, concept-concept, predicat-predicat correspondant. L’élément lien-norme représente une relation Norme-Norme élémentaire unissant des déclarations de Norme. Il s’agit d’un lien possédant une cible sur une déclaration de norme dans le texte en amont (élément cible-amont), et au moins une cible sur une déclaration de norme dans le texte en aval dans la pyramide (élément cible-aval). L’élément lien-concept représente une relation Concept-Concept unissant des déclarations de Concept. Sa structure est similaire à celle de l’élément norme-norme. L’élément lien-predicat représente une relation prédicat-prédicat. Il s’agit d’un lien possédant au moins une cible sur un prédicat du texte en amont (élément cible-amont), et au moins une cible sur un prédicat du texte en aval dans la pyramide (élément cible-aval).

fig. 16 - structure générique de mise en relation

7 Discussion 7.1 Structuration sémantique des textes réglementaires Théoriquement, nous étions assurés de l’existence d’une réelle bijection entre les frames et les instances de notre structure documentaire. L’expérimentation nous a permis de mettre en valeur

une faiblesse de notre modèle qui doit être corrigée si l’on désire obtenir une parfaite intégration des frames dans les textes. Un élément predicat spécifique correspond à un prédicat des frames, cela reste effectivement vérifié. Cependant une portion de texte relative à un prédicat ne correspond pas forcément à une portion textuelle structurable par un élément predicat spécifique. Ainsi, certaines constructions syntaxiques ne peuvent pas être convenablement représentées, notamment lorsque des mots relatifs à un même prédicat sont disséminés dans le texte sans être adjacents. Par exemple : Assumer la charge jusqu'au 31 décembre 1999 d’au moins 3 enfants tous âgés de trois ans et plus et de moins de vingt ans au sens des PF.

Ici, les séquences de mots « assumer la charge » et « au sens de PF6 » sont relatives à un même Concept : celui de « charge d’enfant au sens des Prestations Familiales ». Or le modèle que nous proposons ne convient pas à la structuration de telles constructions textuelles. Un des moyens qu’il faudrait employer, serait de réduire encore la granularité structurale par introduction d’un nouvel élément (par exemple composante-predicat) et d’implanter un système de liens les mettant en relation lorsqu’ils sont relatifs à un même prédicat. Cependant, le processus d’instanciation est déjà long et complexe et cela le rendrait encore plus laborieux.

7.2 Mise en relation des textes instanciés La seconde phase de notre expérimentation a été de mettre en relation les documents instanciés. L’instanciation se révèle être particulièrement complexe et doit être menée avec rigueur. Le modèle de mise en relation des niveaux de droit proposé est en quelque sorte un méta-modèle de mise en relation. La cohérence de la relation ne dépend majoritairement que de la façon dont a été conduite l’instanciation. Pour améliorer ces résultats, nous pensons qu’il serait intéressant d’étudier la possibilité d’instaurer d’un contrôle fin (au moins minimal) de la cohérence lors de l’instanciation.

8 Conclusion et perspectives Dans un premier temps, les travaux relatifs à cette recherche ont permis d’établir un modèle de représentation sémantique ainsi qu’une structure sémantique générique de documents réglementaires. Tous deux permettent de modéliser la sémantique des textes réglementaires d’une manière suffisamment fine et rigoureuse pour les mettre en relation lorsqu’ils appartiennent à des niveaux de droit distincts. C’est ainsi, que dans un second temps, nous avons déterminé la nature de la relation sémantique existant entre des documents réglementaires de niveaux hiérarchiques différents, et proposé une structure générique de mise en relation sémantique des textes de niveaux de droit distincts. L’ensemble de nos modèles permet ainsi de modéliser, non seulement la sémantique de chacun des documents réglementaires, mais aussi les relations qui les unissent verticalement au sein de pyramide réglementaire. La sémantique d’une réglementation est ainsi explicitée de manière globale au travers d’un hyperdocument, depuis les textes les plus généraux, jusqu’aux textes les plus proches des spécifications des systèmes d’information qui mettent en œuvre cette réglementation. Ainsi, notre contribution a permis d’établir un support essentiel et nécessaire offrant, en perspective l’instauration d’un contrôle de la cohérence et de la conformité au sein de la réglementation. Afin d’améliorer notre structuration sémantique, nous souhaitons aborder plusieurs autres points : 6

Prestations Familiales

− Le processus d’instanciation de nos modèles documentaires est particulièrement lourd. Il serait intéressant de converger vers une instanciation semi-automatique. − Le modèle proposé dans cet article présente une vision statique de la loi. Or la matière réglementaire est en mouvement perpétuel. Une certaine dimension temporelle doit être intégrée afin de parvenir à un modèle dynamique de la réglementation. − Une dernière perspective, qui se situe à plus long terme, serait d’automatiser en partie l’implémentation des règles de droit à partir des connaissances représentées dans les instances documentaires. Notamment, un des problèmes soulevés est celui qui consiste à déterminer un schéma de translation permettant de passer d’une sémantique s’adressant à un groupe d’individus vers une sémantique s’adressant à un individu particulier externe à ce groupe (ex : une machine).

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10 Annexe – Notations utilisées

tab. 9 - Convention d'écriture utilisée pour les syntaxes de déclaration

tab. 10 - Symboles utilisés pour la représentation des modèles de contenu SGML