Sauvons le caribou forestier

L'enfeuillement des sites coupés favorise la présence des ... transport des sites d'exploitation des ressources ..... ces secteurs, tout comme ceux du lac Evans,.
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Vers une forêt qui fait vivre ...

Sauvons le caribou forestier

Le caribou forestier :

un symbole menacé Le caribou forestier est l’un des trois écotypes de caribou que l’on retrouve au Québec. Il se distingue du caribou toundrique du nord du Québec et du caribou de la Gaspésie par son écologie, son habitat, son comportement, et même par son bagage génétique. Associé à la forêt boréale, le caribou forestier prospère dans les grands massifs de conifères matures. Ces peuplements sont généralement riches en lichens terrestres, principale ressource alimentaire du caribou. Contrairement au caribou toundrique, lequel forme d’énormes troupeaux, le caribou forestier est plutôt solitaire et n’effectue pas de grandes migrations.

Un déclin marqué Autrefois présent dans le sud du Québec et dans le nord des États-Unis, le caribou forestier ne se retrouve plus qu’au nord du 49e parallèle, à l’exception de deux petites hardes isolées qui subsistent, non sans difficulté, autour de Val-d'Or et dans le parc national des Grands-Jardins de Charlevoix.

Une modification de l’habitat qui ne pardonne pas

2000, 6000 ou 12 000 caribous ?!?

La précarité du caribou forestier est principalement reliée à la perte d’habitat causée par les activités humaines. L’exploitation forestière représente actuellement la principale menace pour la population de caribous car elle en modifie profondément l’habitat.

Il est difficile d’inventorier une population présente sur une aire de répartition aussi grande que celle du caribou forestier. Les inventaires réalisés dans certains secteurs de la forêt boréale montrent que les densités moyennes varient de 1 à 3 caribous par 100 km². En reportant cette densité sur l’ensemble de l’aire de répartition, on estime que le nombre de caribous forestiers présents au Québec varie de 6 000 à 12 000 individus. Toutefois, s’il est considéré que certains secteurs de l’aire de répartition ne sont pas fréquentés par les caribous, l’estimation du nombre de caribous présents au Québec pourrait se situer plutôt entre 2000 et 3000 individus.

En effet, les pratiques forestières en usage au Québec favorisent l’augmentation de la proportion de feuillus présents dans un peuplement initialement dominé par les conifères. Ce phénomène est appelé enfeuillement. L'enfeuillement des sites coupés favorise la présence des orignaux, ainsi que celle du loup, leur principal prédateur. La présence accrue de ce dernier augmente donc le risque de prédation pour le caribou. De plus, les coupes diminuent de façon considérable les peuplements matures essentiels à l’alimentation du caribou. Moins évidents, mais tout aussi désastreux, sont les effets de la présence des voies de transport des sites d’exploitation des ressources naturelles et celle des lignes de transport d’énergie. Autrefois absentes du territoire, ces structures linéaires sont maintenant omniprésentes en forêt boréale. Elles ont pour effet de fragmenter le territoire et d’augmenter la présence humaine dans l’habitat du caribou. Cet important dérangement contribue à repousser le caribou. La chasse, le braconnage et la motoneige, ainsi que les maladies sont d’autres facteurs qui contribuent au déclin des populations.

2003

2001

Interdiction de la chasse sportive au caribou forestier.

La diminution de l'aire de distribution du caribou forestier, la perte de son habitat critique et la faible densité de sa population ont mené le gouvernement canadien à le désigner « espèce menacée » en regard de la Loi sur les espèces en péril. Ce n'est que trois ans plus tard, en 2005, que le Québec lui a accordé le statut d'espèce vulnérable, en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. © Luc Durocher

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Désignation du caribou des bois à titre d’espèce menacée, au niveau canadien Au Québec, mise sur pied du comité de rétablissement du caribou forestier. Création de la réserve de biodiversité projeté du lac Sabourin, pour protéger le caribou de Val-d’Or.

2002

Vers un rétablissement ? Un (trop) long délai ? La rédaction du plan de rétablissement du caribou forestier 20052012 était terminée dès la fin de 2006. Toutefois, ce n’est qu’au printemps 2009, soit 4 ans après que le caribou forestier ait été désigné vulnérable, que le plan a été publié par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Ce délai a été causé par l’analyse des impacts du plan sur la possibilité forestière, effectuée par le Forestier en chef. Cette analyse a retardé la mise en œuvre des mesures de rétablissement. Pendant ce temps, les compagnies forestières ont continué à exploiter les forêts matures qui constituent l’habitat critique du caribou forestier. Les zones intactes n’ont pas cessé de diminuer.

La désignation du caribou forestier comme espèce vulnérable a mené à la création d’une équipe de rétablissement dont le mandat était d’identifier les actions nécessaires pour freiner le recul de l’aire de distribution du caribou et permettre le maintien des habitats favorables. Ce comité regroupe des membres du milieu gouvernemental et universitaire, les Premières Nations, l’industrie forestière et des organismes environnementaux. Le travail de cette équipe a permis la rédaction d’un plan de rétablissement dont les objectifs sont : n de maintenir l’occupation de l’aire de distribution actuelle ; n d’atteindre et de maintenir une population d’au moins 12 000 caribous forestiers, bien répartie sur l’ensemble du territoire ; n de maintenir et consolider les hardes isolées. Pour atteindre ces objectifs, les membres de l’équipe proposent 30 actions touchant la survie des caribous, la conservation de leur habitat, l’aménagement forestier, la sensibilisation du public et la recherche.

2009 2006 2005

Désignation du caribou forestier à titre d’espèce vulnérable, au Québec.

Rédaction du plan de rétablissement du caribou forestier.

2008 Protection partielle de la vallée des Montagnes Blanches.

Publication du plan de rétablissement du caribou forestier Mise sur pied de l’équipe de rétablissement.

Qu’est-ce qui a été fait jusqu’à maintenant ? La situation du caribou forestier est alarmante. Il convient donc de mettre rapidement en œuvre l’ensemble des actions préconisées par le plan de rétablissement. Actuellement, très peu des mesures proposées par le plan de rétablissement ont été appliquées. Des mesures de protection, dont l’arrêt de la chasse, sont en vigueur pour réduire le taux de mortalité des caribous. Mais considérant les pressions sans cesse croissantes exercées par la présence humaine, il est urgent d’assurer rapidement la protection d’habitats de qualité pour l’espèce. Le réseau d’aires protégées dans l’aire de distribution du caribou forestier atteint maintenant 7,9 %. Toutefois, en forêt boréale commerciale, où les pressions sont les plus grandes, seulement 5 % du territoire est protégé. De plus, plusieurs des aires protégées, souvent trop petites, sont inadéquates pour assurer la protection de l’habitat du caribou forestier. Une stratégie d’aménagement de l’habitat du caribou est aussi appliquée dans certaines unités d’aménagement forestier. Cette stratégie pourrait permettre le maintien d’habitats adéquats pour le caribou forestier. Cependant, comme nous allons l’expliquer plus loin, son efficacité doit encore être démontrée. Finalement, plusieurs projets de recherche sont en cours et devraient permettre de mieux connaître l’utilisation de l’habitat par le caribou forestier. Espérons que les travaux de la nouvelle équipe de rétablissement, constituée au cours de l’automne 2009, permettra la mise en œuvre des différentes mesures prévues au plan de rétablissement.

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aménagement forestier et conservation du caribou ? Peut-on concilier

Le caribou et les forêts intactes tes dont il dépend sont devenus des enjeux ux internationaux au niveau de la conservation vation de la biodiversité. Tous les yeux sont tournés ournés vers le Québec, gardien de ces grandes des richesses écologiques. La crédibilité des démarches entreprises par le gouvernement ement pour aménager de façon durable la forêt orêt boréale déquate du passe par une protection adéquate caribou forestier.

Urgence en forêt boréale ! Protéger le caribou au sud de e la limite nordique d’attribution des forêts, s, voilà tout un défi ! Une vaste partie de l’aire de distribution du caribou forestier se retrouve dans la portion exploitée de la forêt rêt boréale, où les coupes forestières modifient rapidement les habitats essentiels ls à l’espèce et favorisent la création d’habitats ts favorables aux prédateurs. Le caribou, très sensible au dérangement, ne peut survivre à long terme dans des habitats perturbéss (coupes forestières…) ou fragmentés (traversés raversés par des routes, des lignes à haute tension, sion, etc.).

Plus de perturbations… moins de caribous ! ations ayant L’impact cumulatif des perturbations lieu dans l’habitat du caribou forestier peut avoir des conséquences importantes sur le maintien de l’espèce. L’examen scientifique aux fins de désignation de l’habitat essentiel de la population boréale du caribou des bois au Canada, effectué par Environnement Canada, a permis de démontrer que plus l’habitat du caribou forestier est perturbé, plus les chances de survie des faons sont faibles. Selon les chercheurs responsables de l’examen, le seuil critique pour permettre le maintien des populations serait de 38 %... En d’autres termes, la superficie des habitats perturbés (moins de 50 ans) par les routes, les coupes forestières ou encore le feu, ne devrait pas dépasser 38 % du territoire. Au-delà de cette superficie, le recrutement des faons devient si faible que la population de caribous ne peut plus se maintenir et risque de subir un déclin important.

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© CCDMD, Le Qué;bec en images, employé de la réserve faunique de M’atane

En Ontario, le seuil critique de 38 % de perturbations aurait été dépassé sur une vaste proportion de l’habitat du caribou forestier, ce qui suggère que le risque de déclin des populations est élevé et qu’il ne devrait pas y avoir davantage de développement industriel dans ces secteurs.

Qu’en est-il au Québec ? Le risque de voir le caribou forestier décliner en forêt boréale commerciale est très élevé. En effet, à l’instar de l’Ontario, il est fort probable que le seuil de perturbation de 38 % soit atteint, voire dépassé. On estime que chaque année, c’est environ 1 % du territoire forestier qui est coupé. Pour le caribou forestier, c’est trop ! Effectivement, à ce rythme, cela implique qu’au bout de 38 ans, on se retrouve avec 38 % de la forêt âgée de moins de 50 ans… Et ce, sans considérer que d’autres perturbations, telles les feux de

forêt et les épidémies d’insectes, modifient et rajeunissent le paysage. Le risque de dépasser le seuil de 38 % de perturbations cumulatives est donc bien réel, les forêts étant exploitées depuis plusieurs décennies. Par ailleurs, selon Courtois (2008), si le rythme actuel de coupes se maintient, les massifs d’habitats essentiels pour le caribou auront disparu d’ici 50 ans. Ainsi, non seulement le niveau de perturbations dans l’aire de distribution du caribou forestier augmente rapidement, mais les coupes forestières diminuent également, de façon drastique, les peuplements mûrs et surannés recherchés par le caribou. On doit donc, dès maintenant, mettre en place des actions qui permettront de limiter les impacts des activités forestières dans l’habitat du caribou.

Stratégies d’aménagement forestier Des stratégies d’aménagement forestier ont été implantées sur le territoire québécois et ailleurs au Canada. Le but de ces stratégies est de diminuer les impacts des interventions forestières sur le milieu, par exemple en favorisant le maintien de massifs de forêt mature ou en appliquant des méthodes sylvicoles limitant l’enfeuillement des sites coupés. Au Québec, la Stratégie d’aménagement de l’habitat du caribou forestier repose sur la mise en place de massifs de protection et de massifs de remplacement. La rotation entre ces différents massifs permettrait de maintenir constamment des blocs d’habitats favorables au caribou forestier. Ces différents massifs devraient être interconnectés afin de permettre le déplacement des caribous d’un massif à l’autre. La stratégie prévoit également que l’aménagement du reste du territoire devra se faire selon une approche écosystémique.

Une hypothèse optimiste ! Actuellement, la stratégie proposée par Québec constitue une hypothèse optimiste qui reste à démonter. Compte tenu que ce n’est que depuis 10 ans que l’on teste la stratégie des massifs de protection, il peut s’écouler encore plusieurs décennies avant de pouvoir juger de son efficacité. Effectivement, certaines hardes peuvent subsister dans des habitats de moindre qualité, mais la santé et la reproduction de l’espèce peuvent être affectées. Ainsi, à moyen ou long terme, ces hardes sont appelées à disparaître. La présence de caribous dans un milieu aménagé ne veut donc pas dire que l’aménagement forestier qu’on y fait permet de maintenir les populations. Si actuellement on ne peut statuer sur l’efficacité de la stratégie, il est tout de même possible de souligner quelques éléments inquiétants…

Des massifs trop petits… Selon la Stratégie d’aménagement de l’habitat du caribou forestier, les massifs de protection doivent être d’une superficie minimale de 100 km2 et, idéalement, de plus de 250 km2. Au Québec, le domaine vital du caribou forestier atteint en moyenne 200 à 300 km2, avec des variations importantes selon les individus et les régions. Ainsi, il est de 360 km2 dans Charlevoix et de 495 km2 en Haute-Côte-Nord. Avec cette superficie, on ne comble les besoins que d’un individu… pas d’une harde ! Les superficies proposées par la stratégie d’aménagement apparaissent donc insuffisantes pour assurer les besoins des individus et des hardes. Le problème est d’autant plus important que les massifs de protection proposés par les compagnies forestières dans leur plan généraux d’aménagement forestier (PGAF) ne mesurent en moyenne que 150 km2… ce qui est nettement en deçà de la taille « idéale » de 250 km 2.

Mais est-ce efficace ? Des massifs isolés L’analyse des PGAF expose un deuxième problème. Il apparait clairement que les massifs de protection seront entourés de coupes forestières. Or, des études réalisées en Côte-Nord ont montré que les massifs de protection sont désertés par le caribou lorsqu’ils se retrouvent entourés de coupes forestières. On peut donc se questionner sur l’efficacité de ces massifs, surtout s’ils se retrouvent éloignés de la forêt encore intacte.

Exemple de plan général d’aménagement forestier (PGAF) 5

Comment intégrer la protection du caribou forestier dans l’aménagement forestier ? Le nouveau régime forestier favorisera l’implantation de l’aménagement écosystémique, une approche également préconisée par le plan de rétablissement du caribou forestier. Ce type d’aménagement pourrait permettre de maintenir des forêts qui s’apparentent à des forêts naturelles. Afin d’assurer la conservation du caribou forestier, il faudra s’assurer que cet aménagement réponde aux besoins et à l’écologie de l’espèce. Cela implique, entres autres, de maintenir et de protéger de grands massifs de forêt intacte, de limiter la fragmentation du territoire et l’enfeuillement des parterres de coupes, d’éviter de créer des conditions favorables aux prédateurs et de maintenir la connectivité entre les zones intactes. L’aménagement doit être adaptatif et reposer sur le principe de précautions,. Plusieurs questions concernant l’impact de la foresterie sur les populations de caribous demeurent toujours sans réponse.

Le gouvernement du Québec définit l’aménagement écosystémique ainsi : aménagement qui consiste à assurer le maintien de la biodiversité et la viabilité des écosystèmes en diminuant les écarts entre la forêt aménagée et la forêt naturelle.

© ARUC

Les points à considérer n Allonger le temps de rotation des coupes… Actuellement, l’âge à laquelle une forêt est exploitable repose essentiellement sur la croissance des arbres. La période de rotation, c'est-à-dire le temps qui s’écoule entre deux coupes ayant lieu au même endroit, est d’environ 60 à 90 ans, selon l’essence, ce qui correspond à un peuplement considéré mature. Il est clair que la période de rotation actuelle est trop courte. Elle oblige à revenir plus rapidement sur un même site et contribue à maintenir une proportion importante de jeunes forêts (moins de 50 ans) dans le paysage. Il est essentiel que le taux de rotation reflète davantage le cycle naturel des feux, qui peut atteindre 100 à 200 ans dans certaines régions, ce qui implique d’augmenter, dans la plupart des régions, la période de rotation. Cela permettrait d’augmenter la proportion de forêt mature, essentielle pour le caribou, mais également diminuerait l’augmentation du niveau de perturbation de l’environnement.

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n Éviter l’agglomération des coupes… On observe actuellement, dans les forêts québécoises, un phénomène d’agglomération des coupes, c'est-à-dire que l’on juxtapose plusieurs coupes. Cette façon de faire est proposée par la stratégie d’aménagement de l’habitat du caribou forestier. L’agglomération des coupes permettrait d’obtenir un patron qui ressemble à un paysage créé par une dynamique forestière basée sur les feux. Mais ATTENTION ! Dans certains secteurs de la Côte-Nord, les aménagistes semblent agglomérer… des agglomérations ! Cette façon de faire apparaît inacceptable car elle crée d’immenses perturbations et élimine tout habitat potentiel pour le caribou sur de grands territoires. Les conditions pour assurer la viabilité de cette approche ? Disperser les agglomérations sur le territoire et laisser en place des blocs de forêt résiduelle de tailles variables…

Établir des cibles afin de mieux gérer le risque… L’utilisation d’indicateurs et de cibles, reliés à l’enjeu « caribou forestier », permettrait d’encadrer la prise de décision. Le maintien d’habitats adéquats pour le caribou forestier est essentiel. Ainsi, la présence de forêts résineuses mûres et surannées pourrait constituer un indicateur intéressant. Toutefois, le niveau de perturbation du milieu pourrait s’avérer plus utile. La probabilité que les populations de caribous décroissent augmente au fur et à mesure que le niveau de perturbations augmente lui-aussi. Ainsi, le niveau de perturbation serait un meilleur indicateur du risque de déclin (ou des possibilités de survie) des populations de caribous. Outre le niveau de perturbation du milieu, la densité des structures linéaires et celle des populations de loups sont deux autres indicateurs permettant d’évaluer la possibilité que les populations de caribous soient autosuffisantes.

Protégeons les habitats du caribou forestier «««

Avec ses 970 km2, la réserve de biodiversité projetée de la vallée des Montagnes Blanches assure la protection d’un territoire important pour le caribou forestier. Mais il faudra plus d’une aire de cette taille pour assurer la conservation du caribou forestier.

Dans le contexte où les grands massifs forestiers fortement convoités par les compagnies forestières se font de plus en plus rares en forêt boréale, la protection du territoire apparaît comme une mesure de précaution nécessaire afin de garder intactes des portions importantes de l’habitat du caribou forestier. Les différents intérêts économiques rendent difficile la protection du territoire en forêt boréale commerciale. Ainsi, seulement 5 % de ce territoire est protégé. Dans cette zone, les aires protégées sont généralement trop petites (en deçà de 250 km2) pour protéger adéquatement l’habitat du caribou. En zone commerciale, on ne retrouve que deux massifs d’aires protégées de plus de 1000 km2.

L’analyse des noyaux de conservation est encore plus révélatrice. Le noyau de conservation correspond à la portion des aires protégées qui n’est pas influencée par les activités périphériques, telle la coupe. Les données du Portrait du réseau d’aires protégées au Québec montrent que ces noyaux de conservation sont presque inexistants en forêt boréale commerciale. En forêt boréale non-commerciale, on retrouve des aires protégées plus grandes qui peuvent assurer une meilleure protection de l’habitat du caribou forestier. Il n’en demeure pas moins qu’environ 85 % des aires protégées présentes dans l’aire de répartition du caribou forestier font moins de 100 km2. Par ailleurs, la majeure partie des zones connues pour être très fréquentées par le caribou forestier sont à l’extérieur du réseau d’aires protégées. Toujours selon le Portrait du réseau d’aires protégées, seulement 6,7 % des réseaux de pistes hivernales du caribou se retrouvent dans une aire protégée. De plus, seulement 5 aires protégées recoupent des

Exemple de cadre de référence pour incorporer les préoccupations associées au caribou forestier dans les considérations d’aménagement du territoire Tableau adapté de Dzus, E., Ray, J., Thompson, I. et Wedeles, C. (2010)

Risque de déclin des populations

Niveau de perturbation de l’habitat *

Considérations pour l’aménagement

Risque faible

0 - 20 %

Une planification prudente et proactive, permettant l’expansion des activités industrielles, est possible.

20 - 40 %

Nécessité de considérer la contribution de tout développement additionnel aux impacts cumulatifs. La restauration des habitats de façon coordonnée doit être priorisée.

Risque modéré

Risque élevé

40 % et plus

aires de forte densité des réseaux hivernaux de pistes. Des ces aires, 2 ont une superficie moindre que celle proposée par le plan de rétablissement (250 km2) pour assurer une conservation adéquate de l’habitat du caribou forestier, et une troisième ne mesure que 268 km2.

5 000 à 7 000 km ! Voilà la superficie que devrait mesurer les grandes aires protégées pour assurer la protection à long terme du caribou forestier. Une étude ontarienne parle même d’aires protégées de plus de 9 000 km2 ! Selon cette étude, ce n’est que dans les secteurs comprenant de vastes aires protégées que le caribou se maintient en abondance. En leur absence, dans un paysage fragmenté par les perturbations, les populations de caribous déclinent. Cette taille permet également de s’assurer que le passage d’une grande perturbation, un feu par exemple, ne détruira pas toute l’aire protégée. C’est pourquoi les scientifiques recommandent que les aires protégées, en forêt boréale soient au moins 3 fois plus grandes que les plus importantes perturbations naturelles agissant sur l’écosystème.

Où protéger ? En 2008, Nature Québec a publié une importante étude sur les secteurs d’importance pour la protection du caribou forestier. Cette étude a permis d’identifier cinq secteurs d’intérêt de grande superficie qui ont été proposés pour créer de grandes aires protégées. Parmi ceux-ci, le secteur de la vallée des Montagnes Blanches, au Saguenay, est apparu comme une véritable pouponnière à caribous, devant faire l’objet d’une protection urgente de la part du gouvernement du Québec. La carte des zones prioritaires pour la conservation du caribou forestier est disponible sur le web à l’adresse suivante :

http://www.naturequebec.org/caribou

L’augmentation des impacts industriels ne doit se produire en aucun cas. Des actions coordonnées pour restaurer l’habitat doivent être mises en oeuvre.

* Basé sur les données de Environnement Canada (2008) 7

meilleure protection du territoire Vers une

Afin de mieux protéger l’habitat du caribou forestier, le gouvernement doit créer rapidement au moins une grande aire protégée, idéalement plus, dans des territoires reconnus pour être utilisés par le caribou forestier. La vallée des Montagnes Blanches est l’un de ces secteurs, tout comme ceux du lac Evans, de la Manicouagan et de Petit-Mécatina. De plus, il est nécessaire d’améliorer le réseau d’aires protégées en forêt boréale commerciale. D’environ 5 %, il est nécessaire d’atteindre un minimum de 12 % pour assurer la conservation de cet écosystèmes, tant pour protéger le caribou que l’ensemble de la biodiversité de la forêt boréale. Les nouvelles aires protégées devront être de taille suffisante (supérieures à 250 km2) et de forme adéquate pour permettre le maintien des habitats du caribou forestier. Pour en savoir plus : http://www.naturequebec.org /caribou

Références sélectionnées Ces références ne constituent qu’une partie des documents utilisés pour ce texte. Pour une liste plus complète, visitez notre page web : http://www.naturequebec.org/ pages/caribouforestier.asp. Comité de rétablissement du caribou forestier au Québec (2006). Plan de rétablissement du caribou forestier (Rangifer tarandus) au Québec – 2005-2012. Ministère des Ressources naturelles et de la Faune, secteur Faune Québec, Direction du développement de la faune. 72 pages et annexes. Courtois, R. (2003). « La conservation du caribou dans un contexte de perte d’habitat et de fragmentation du milieu ». Thèse de doctorat, Université du Québec à Rimouski, Rimouski. 350 pages. de Bellefeuille, S. (2001). Le caribou forestier et la sylviculture : revue de littérature et synthèse de la recherche et de l’aménagement en cours au Québec. Ministère des Ressources naturelles du Québec. Québec. 86 pages. Environnement Canada (2008). Examen scientifique aux fins de la désignation de l'habitat essentiel de la population boréale du caribou des bois (Rangifer tarandus caribou) au Canada. Environnement Canada. Ottawa. 80 pages et annexes. Nature Québec (2007). « Revue de littérature des connaissances sur le Caribou forestier », réalisée dans le cadre du projet Critères et propositions d’aires protégées pour le Caribou forestier, 24 pages. Racey, G., A. Harris, L. Gerrish, T. Armstrong, J. McNicol et J. Baker (1999). Forest Management Guidelines for the Conservation of Woodland Caribou: a Landscape Approach. Ms Draft. Ontario Ministry of Natural Resources, Thunder Bay (Ontario). 69 pages.

Nature Québec est un organisme national à but non lucratif qui regroupe des individus et des organismes œuvrant à la protection de l'environnement et à la promotion du développement durable. Travaillant au maintien de la diversité des espèces et des écosystèmes, Nature Québec souscrit depuis 1981 aux objectifs de la Stratégie mondiale de conservation de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), soit maintenir les processus écologiques essentiels à la vie, préserver la diversité biologique et favoriser le développement durable en veillant au respect des espèces et des écosystèmes. Nature Québec intervient pour protéger la nature lors de l’aménagement du territoire agricole et forestier, de la gestion du Saint-Laurent et de la réalisation de projets de développement urbains, routiers, industriels et énergétiques. De plus, Nature Québec sensibilise la population à la protection de l’environnement par la publication du webzine FrancVert (www.francvert.org). Nature Québec 870, avenue De Salaberry, bureau 270 Québec (Québec) G1R 2T9 tél. (418) 648-2104 Téléc. (418) 648-0991

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© Nature Québec, 2011 978-2-923731-16-2 (imprimé) 978-2-923731-17-9 (PDF) Rédaction : Édith Cadieux Photographie de couverture : © Québec couleur nature 2006, Mathieu Hack Graphisme : Marie-Claude Chagnon Imprimé sur du papier contenant 100 % de fibres postconsommation