[PDF] Manager les conditions de travail - ARACT Bourgogne

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N O 320 JUILLET/AOÛT 2008

Revue de la qualité de vie au travail

Travail &CHANGEMENT

Manager Man Man nager g less conditions ns s de travail e • des accords d'entreprise a • dess outils de pilotage • dess formations adaptées es

ARGUMENTS (P.

4 À 6)

Pierre Chartron (UIMM) ; Jean-François Naton (CGT) ; Bernard Salengro (CFE-CGC) Norbert Alter (Université Paris 9 - Dauphine et directeur du Cerso), Thierry Montfort (cabinet conseil Équidistance, président du CA d’Aravis). CÔTÉ ENTREPRISES (P. 07-12) Industrie

Manager les managers Énergie

Les centres d’appel d’EDF sur une nouvelle ligne managériale BTP

Sur la bonne voie avec GPS Pays anglo-saxons

Le poids de la balance

Bimestriel du réseau Anact pour l’amélioration des conditions de travail

TRAVAIL ET CHANGEMENT

N°320 juillet/août 2008

ENJEUX

Manager les conditions Les conditions de travail doivent devenir une clef essentielle du management global des entreprises. À de nouveaux outils mis en application dans certaines entreprises s’ajoutent ceux qui, existant déjà, nécessitent un travail de coordination et de croisement de données. Quelques traces à suivre pour voir se profiler les managers de demain.

L Par Thierry Rochefort (département changements technologiques et organisationnels de l’Anact) et Michel Weill (directeur général adjoint de l’Anact) Coordinateurs de ce dossier

es conditions de travail sontelles les parents pauvres du management ? Variables d’ajustement, regardées a posteriori ou tardivement voire pas du tout, elles échappent le plus souvent à la vigilance des managers. Et si, au contraire, elles devenaient une clé essentielle du management global des entreprises et ouvraient une nouvelle voie pour piloter différemment le travail ? Deux avantages à cela : hiérarchiser les actions à mener face aux nouveaux enjeux économiques et sociaux et articuler des pratiques de management déjà existantes, comme les ressources humaines, la santésécurité et la production. Comment faire ? Certaines entreprises, petites et grandes, ont commencé à chercher d’autres outils de pilotage, à travers des accords ou des observatoires sur les conditions de travail, préalablement négociés autour de sujets précis ou sensibles.

> Des priorités mieux ciblées Premier intérêt d’un management par les conditions de travail : apporter

Accords et observatoires des conditions de travail : ça démarre. Ils ne sont pas encore très nombreux mais gagnent du terrain… Les accords et observatoires des conditions de travail émergent. On peut citer, à partir d’une préoccupation « gestion des âges », l’accord Adapei de l’Ain dans le secteur social, l’accord national de la branche papier carton (Formapap) qui fait le lien entre les parcours et les questions de santé ou encore, avec des perspectives de performance en toile de fond,

l’accord d’entreprise au sein de la direction Commerce d’EDF. La construction d’observatoires des conditions de travail ou de la qualité de vie au travail (EDF, ANPE, ST-Micro…) est aussi utilisée pour mettre en place des outils d’observation de l’évolution du travail et des conditions de travail, pour partager des diagnostics entre partenaires sociaux, voire construire des orientations, des stratégies ou des plans d’action.

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des réponses aux évolutions et aux préoccupations nouvelles concernant le travail. L’enjeu actuellement le plus fort: celui des seniors. La mise en œuvre de la réforme des retraites et l’allongement des carrières supposent d’améliorer leurs conditions de travail pour permettre leur maintien dans l’emploi. Aménagements de postes, d’horaires, de statut, valorisation de l’expérience : les seniors sont des atouts que les entreprises ont tout intérêt à jouer. Autre urgence: celle de la prévention de l’usure prématurée pour tous les salariés. Précarité, forte exposition aux risques professionnels, accès insuffisant à la formation : certains cumulent les difficultés. Rendre employables les salariés, c’est aussi préserver leur santé au travail. Troisième enjeu : l’amélioration des conditions de travail renforce l’engagement des salariés. Ouvrir le débat sur les organisations, les styles et les contraintes de management, l’articulation vie au travail et hors-travail et la reconnaissance peut contribuer à résoudre des problèmes rarement abordés. Enfin, l’accélération de la compétition économique complète le tableau. Pour attirer et garder les meilleurs, le niveau de qualité de vie au travail devient déterminant, au moins autant que la seule préoccupation de rémunération.

> Du trois en un Ces enjeux incitent à regarder plus souvent ce qui se passe dans le travail réel et quotidien des salariés. Les entreprises le font déjà mais de manière éclatée et cloisonnée, à travers trois types de management. Le management de la production est le plus ancien. Niveaux de charge, standards de temps, ressources en termes d’effectifs: il envisage le travail

ÉDITORIAL Jean-Baptiste Obéniche, directeur général de l’Anact

de travail Un master pour manager les conditions de travail En fin d’année, l’Anact et l’université Paris Dauphine proposeront aux professionnels (managers, partenaires sociaux, consultants, préventeurs…) une formation diplômante : « Management, travail et développement social ». Objectifs : articuler apports et outils

sous forme d’opérations facilement décomposables en tâches. Ses limites: les questions d’innovation, de service, de délais, de qualité, d’interaction entre les collectifs sont peu ou mal prises en compte.

des sciences de gestion et sciences humaines, construire, animer et coordonner des dispositifs d’observatoire des conditions de travail, ancrer les conditions de travail dans un management global de l’entreprise.

lité de vie au travail (voir encadré p.3). La formation des managers aux conditions de travail ou la structuration d’une fonction « management du travail » est également un levier puissant qu’expérimente l’ANPE et que le

Manager les conditions de travail, c’est un moyen

anager les conditions de travail ? Ils vont encore faire un observatoire et pfuitt ! comme d’habitude, plus rien. Et puis c’est bon pour les grandes boîtes, mais dans une PME, c’est impossible. » Manager les conditions de travail… Est-ce difficile ? Comment faire pour avancer concrètement et utilement sur la question ? Insensiblement, la valeur ajoutée

« M

« Piloter la performance, c’est donc aussi piloter le travail et ses conditions. »

de réunir et de croiser ces différents regards et d’avoir ainsi une approche pluridisciplinaire, globale, du travail. Le management des ressources humaines, lui, confond implicitement travail, emploi et personnes. Rémunérations, compétences, carrières: des outils et des démarches individuelles (entretien d’évaluation, référentiels métiers…) en permettent le suivi. Mais le travail reste encore et toujours en arrière-plan, angle mort des démarches de GRH. Le management de la santé-sécurité au travail est plus récent. Normalisation et réglementation l’ont porté, permettant de professionnaliser la fonction et de diffuser des référentiels connus des managers. Mais le travail est analysé sous l’angle unique de potentiels risques professionnels et non d’un potentiel levier de développement des hommes et des organisations. Manager les conditions de travail, c’est un moyen de réunir et croiser ces différents regards, de les coordonner pour les piloter ensemble en les rendant cohérents et d’avoir ainsi une approche pluridisciplinaire, globale, du travail. Des entreprises ou des branches ont déjà exploré des pistes: accords sur les conditions de travail, observatoires des conditions de travail ou de la qua-

Réseau Anact va développer à destination de professionnels, avec l’université Paris Dauphine (voir encadré p.2).

> L’efficacité en quatre modalités Un bon management du travail et des conditions de travail est possible, même pour une PME ou une TPE, aux moyens plus limités, moins outillée, s’il réunit quatre modalités : • l’engagement de la direction de l’entreprise pour manager le travail et le piloter sur la durée: un gage de pérennité pour le développement social et la performance de l’entreprise ; • l’ouverture du champ du management du travail simultanément à la santé, la sécurité, l’organisation, les compétences, la qualité de vie, la production, la performance… pour construire un dispositif de suivi large mais précis ; • l’élaboration des constats et des actions dans la concertation ; • la formation des managers aux questions du travail, voire l’invention d’une nouvelle fonction de management des conditions de travail dans l’entreprise, lorsque sa taille le permet… ■

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du travail ne se repère plus dans la seule production visible mais dans des interstices d’innovation et de régulation. Pour « voir cet invisible » qui impacte les résultats des ventes ou de la productivité, il devient nécessaire de manager les conditions de travail dans la durée. Piloter la performance, c’est donc aussi piloter le travail et ses conditions. Pas si simple, effectivement… Mais des solutions existent, ce numéro en propose un premier aperçu. Plus fondamentalement, le management des conditions de travail n’est pas réservé à quelques élites en mal de nouvelles problématiques RH. Il est une question d’avenir pour les entreprises de notre pays, une des conditions de l’attractivité des emplois et de la performance des entreprises sur les marchés nationaux et internationaux. Celles qui ne relèveront pas ce défi auront-elles des regrets ? Rendez-vous dans dix ans.

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ARGUMENTS

Les conditions de travail sont-elles négociables ? Les discussions entre partenaires sociaux pour aboutir à des accords sur les conditions de travail reflètent indéniablement des différences de perception : culture de la négociation, difficultés à surmonter, vision de la situation… CGT, CFE-CGC et UIMM en témoignent.

Le point de vue des partenaires sociaux Propos recueillis par Béatrice Sarazin (rédactrice en chef)

représentant de l’UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie) au sein de l’observatoire prospectif des métiers et qualifications

Q

Que pensez-vous des accords sur les conditions de travail qui commencent à émerger ? Les conditions de travail recouvrent un large spectre du travail qu’il est difficile d’appréhender complètement dans un accord de branche ou d’entreprise. Les négociations autour des conditions de travail, au sens « exécution du travail », dépendent beaucoup du contexte propre à l’entreprise. Celles que nous avons menées au niveau de la branche sont ciblées sur des sujets bien précis et communs à plusieurs entreprises : le temps de travail, l’organisation, le travail posté, de nuit, etc. L’amélioration des conditions de travail d’un poste ou d’une équipe ne se réalise pas au niveau d’une branche mais au sein de l’entreprise. Comment aborder le sujet dans les entreprises et avec le management ? Il faut qu’il y ait une prise en compte des conditions de travail par le management, c’est évident et c’est déjà bien souvent le cas. C’est un état d’esprit que le manager doit intégrer dans sa pratique. Il faut faire de la sensibilisation, mobiliser des aides au bon moment et si nécessaire. En revanche, imaginer une fonction dédiée au management des conditions de travail ne me paraît pas une solution très convaincante sauf, peut-être, quand la taille de l’entreprise le justifie. On peut aider les dirigeants à réfléchir, leur transmettre des méthodes, mais les réponses adaptées aux difficultés de terrain ne s’inventent pas à l’université. N’oublions pas que les progrès dus aux

cercles de qualité et, depuis, à tous les dispositifs d’amélioration permanente que l’on trouve quasiment partout dans les industries, viennent avant tout des personnes travaillant dans l’entreprise. Comment faire dans les PME et TPE où existent peu de moyens de négociation, peu d’outils ? Nous travaillons avec les PME pour les accompagner dans cette prise en compte des conditions de travail. Cela peut être un regard extérieur, soit en posant un diagnostic, soit en les orientant vers la prestation qui leur permettra de traiter tel ou tel problème, avec, le cas échéant, un dossier de financement. Cela peut être une intervention d’un ingénieur sécurité… Il existe une gamme de services de plus en plus utilisée par nos adhérents. Par ailleurs, la négociation collective peut effectivement être le bon vecteur lorsqu’il s’agit d’améliorer, par exemple, des

secrétaire national confédéral de la CFE-CGC (Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres)

Q

Que pensez-vous des accords sur les conditions de travail qui commencent à émerger ? C’est un phénomène microscopique, reflet d’un dialogue social en panne, problème numéro un en France. Nous vivons dans un pays soumis et nobiliaire : les cadres sont managers par héritage familial ou issus de grandes écoles, très rarement des entreprises. Le dialogue social ne fait pas partie de leur culture, ils le voient

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conditions de travail à caractère collectif dans une entreprise, ou dans des structures différentes partageant la même difficulté. Les conditions de travail se sont-elles améliorées ? Oui, nettement. Mais comme les aspirations évoluent et que les exigences de bienêtre augmentent aussi, la tendance est toujours à croire que rien n’a été fait. Il est évident que les nouvelles générations placent plus haut les valeurs de confort, de convivialité… C’est un phénomène global de société que l’on retrouve dans la façon d’appréhender le travail. Les dirigeants d’entreprises en sont tout à fait conscients, et notre rôle est de les aider à cette prise en compte et à les outiller. Certes, il y a encore des efforts à faire pour intégrer l’enjeu d’amélioration des conditions de travail, le plus en amont possible, dès la conception de machines. Mais il y a eu beaucoup de progrès en la matière.

même avec une certaine condescendance. Dans ce contexte, les accords se négocient en fonction du bon vouloir du chef d’entreprise. C’est le « fait du prince ».

BERNARD SALENGRO, © V. Jacob

PIERRE CHARTRON,

Comment surmonter les difficultés de négociation ? Le management doit être mieux formé. En cela, la création d’un diplôme de management du travail que proposeront bientôt Paris Dauphine et l’Anact est d’un grand intérêt. La formation initiale est fondamentale et elle permettra de faire bouger les choses. Car ce n’est pas lorsque le manager a 50 ans et des habitudes du même âge qu’il peut changer. Mieux manager les conditions de travail et mieux les négocier passent aussi par une autre approche du salarié. Il doit être un sujet

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Q

Que pensez-vous des accords sur les conditions de travail qui commencent à émerger ? Tout ce qui concourt à apporter des améliorations, à parler du travail, à se mettre autour d’une table, à faire travailler ensemble directions et organisations syndicales va dans le bon sens. Et nous l’encouragerons toujours. C’était une revendication que nous avons portée au moment de la conférence nationale sur les conditions de travail : parler du travail, penser le travail et le transformer lorsqu’il engendre pénibilité et mal-être. Mais la rareté de ces accords est un symptôme d’un malaise du dialogue social. Nous avons besoin de changer d’état d’esprit. Comment surmonter les difficultés de négociation ? Le travail n’est pas seulement la chasse gardée des directions d’entreprises. Il faut que les organisations patronales, notamment le Medef, acceptent que les situations de travail soient analysées, que les conditions de travail soient discutées. C’est un enjeu de démocratie. La crise est totale : la déferlante médiatique autour des suicides a mis en avant des enjeux de société forts, un vrai questionnement sur ce qui se passe dans le monde du travail. Les organisations syndicales sont interpellées pour agir et

à part entière et non considéré – cela est souvent le cas – comme un « problème » pour l’entreprise. Les salariés français sont recherchés car ils sont très bien formés, ils s’impliquent et placent haut la valeur travail. Quand nos dirigeants en auront-ils conscience ? Je reste convaincu que, sans motivation financière, sans démonstration faite que de mauvaises conditions de travail ont un coût élevé, rien ne changera. Comment faire dans les PME et TPE où existent peu de moyens de négociation ? Des leviers existent mais ils ne sont pas utilisés. La médecine du travail est là, les préventeurs sont nombreux, peut-être même trop… Les petites entreprises peuvent les interpeller. Le premier levier,

JEAN-FRANÇOIS NATON, conseiller confédéral, représentant de la CGT (Confédération générale des travailleurs) à la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la Cnamts (Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés)

transformer. Stress, pénibilité… Nous osons penser que nous allons enfin réellement négocier et aider au changement dans les entreprises. Il y a urgence à se parler. Comment faire dans les PME et TPE où existent peu de moyens de négociation ? Les conclusions de la conférence sur les conditions de travail avaient permis de valider une proposition : ouvrir le droit au CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) à tous. Comment être au plus près des besoins des salariés dans les territoires, et agir sur les champs professionnels ? Nous avons à inventer. En se fixant des objectifs d’expérimentations sur de nouveaux territoires de négociation.

encore une fois, c’est l’incitation financière. Il faut que le système de tarification de la branche accidents du travail et maladies professionnelles soit incitatif. Achetons le droit d’esquinter des salariés. Celui qui se rendra compte que cela lui coûte cher le fera beaucoup moins… Comment a-t-on fait baisser le nombre de morts sur la route ? Grâce à des amendes et des radars, des bonus et des malus, des limitations… Second levier : la structuration des services de médecine du travail. Les médecins du travail sont trop contraints dans des activités de visites médicales. Elles sont importantes mais insuffisantes et, surtout, rarement suivies d’effets. Le médecin du travail connaît bien les entreprises dans lesquelles il intervient. S’il est alerté, il peut faire venir la Cram, l’Aract,

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Cela fait partie de propositions que nous avons faites et que nous voulons mener. Il n’y a pas qu’un enjeu revendicatif de la condition de travail. Devant les défis qui nous sont lancés, nous pouvons aussi faire valoir l’enjeu économique induit par de mauvaises conditions de travail : les dirigeants commencent à prendre conscience de cela, face à l’allongement des carrières et la gestion des âges. Il serait irresponsable de leur part de ne rien faire. Les conditions de travail se sont-elles améliorées ? Bien sûr ! Tout n’est pas noir. Mais, dans ce monde de la modernité, il ne faut pas croire que des pénibilités primaires telles que le bruit, les odeurs, les ports de charge etc. ont disparu. Des bâtiments neufs sont construits mais, à l’intérieur, les salariés vivent des conditions de travail toujours aussi difficiles. Aussi, si les risques psychosociaux font l’actualité, nous ne devons pas oublier nos fondamentaux : travailler le travail, et agir sur tout ce qui fait souffrance… Je crois très fortement à l’approche « bassin de vie » pour se fixer des objectifs atteignables et travailler ensemble, organisations syndicales, Aract, médecine du travail, direction du travail…: transformer le travail en fonction des situations, des différences locales ; agir de manière positive…

l’OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics)… Il sait où sont les leviers et comment les actionner. Les conditions de travail se sont-elles améliorées ? Non, la situation s’est aggravée. Nous devons désormais faire face à des risques invisibles ou différés. La charge mentale est également plus forte : c’est une pression peu visible, encore mal définie, difficile à contrer. Les salariés, eux, font ce qu’on leur demande, pour garder leur travail. Ce n’est pas un hasard si la France est l’un des pays européens le moins syndiqué : les syndicalistes sont victimes d’une chasse aux sorcières dès lors qu’ils s’engagent dans une action revendicative.

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ARGUMENTS

Manager les conditions de travail : immersion dans le réel Le management des conditions de travail n’en est qu’à ses balbutiements. Il nécessite une profonde réflexion sur les relations à entretenir avec les femmes et les hommes dans leur milieu professionnel. Une approche qui va, grande première, jusqu’à être désormais enseignée en université.

Les invités du réseau Anact Propos recueillis par Muriel Jaouën (journaliste)

THIERRY MONTFORT, président fondateur du cabinet conseil Équidistance et président du conseil d’administration d’Aravis (Agence RhôneAlpes de valorisation de l’innovation sociale)

L

Le management des conditions de travail a-t-il un sens ? Si oui, peut-on le formaliser dans l’entreprise ? Je pense qu’il faut considérer l’amélioration des conditions de travail dans une logique contractuelle. Toutes les avancées sociales ont un coût. Celui-ci doit être connu de tous dans l’entreprise, donc expliqué. C’est la condition du dialogue, lui-même condition de tout accord d’entreprise. D’où l’importance cruciale des instances représentatives du personnel. Vous avez été en charge de la politique sociale de Boiron, entreprise souvent citée comme référence en matière d’accords sociaux… J’y ai en effet travaillé vingt-deux ans, dont huit à la tête de la filiale américaine et douze à la direction générale. Le chantier social chez Boiron a débuté dans les années 1970. Le premier accord d’entreprise (l’un des tout premiers en France), qui porte sur la préparation à la retraite, a été signé en 1976. Depuis, 24 autres accords ont été validés, dont beaucoup liés aux conditions de travail : intéressement, temps partiel, formation, individualisation, flexibilité des horaires, 35 heures, aide à l’engagement dans la vie politique, aide aux projets personnels… À la base de l’édifice, il y a une réflexion radicale sur le financement des avancées sociales, qui débouche sur la notion de productivité. L’idée centrale étant d’indexer cette productivité sur le nombre d’heures travaillées et non sur le nombre de personnes. Lorsqu’on raisonne en heures travaillées, on s’autorise une vision beaucoup plus souple du temps de travail, avec une plus grande ouverture sur le temps partiel, ce qui est socialement pertinent dans une organisation employant à 80 % des femmes. L’entreprise a

défini un seuil minimal de productivité, audelà duquel tout gain se partage et se répartit sur des avancées sociales en fonction d’indicateurs choisis par les salariés euxmêmes (hausse des salaires, réduction du temps de travail, préparation à la retraite...). C’est à partir de ces indicateurs que les accords d’entreprise ont été définis. Quels sont selon vous les conditions d’une politique d’avancées sociales ? Il faut faire preuve de discernement, établir en commun des points de repères et partager une conception de l’entreprise. Et une entreprise, ce sont des hommes et des femmes qui travaillent ensemble pour faire avancer un projet. Il faut se départir de toute vision angélique. Les conditions de travail sont une conséquence, pas un objectif. Le social, c’est du pragmatique : concilier les aspirations des salariés et les contraintes de fonctionnement de l’entreprise.

NORBERT ALTER, professeur de sociologie à l’Université Paris 9 - Dauphine, directeur du Centre d'étude et de recherche en sociologie des organisations (Cerso)

L’

L’université de Paris Dauphine et l’Anact ouvrent en novembre 2008 un master « management, travail et développement social ». C’est une première ? Sans doute. Il s’agit d’un cursus en formation continue de quatre cents heures, dispensé en quatorze mois. ll s’adresse à des professionnels occupant des fonctions de management, aux experts (consultants, syndicalistes), aux techniciens (médecins, ergonomes, psychologues…) et, de manière plus générale, à tous ceux qui s’intéressent au développement social des établissements. C’est à ce jour la première formation construite autour de la nécessité d’une articulation entre management et travail.

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Il y avait urgence ? On managera toujours mal les hommes et les organisations si on ne comprend pas la valeur réelle du travail. D’un côté, on demande aux salariés de prendre de plus en plus d’initiatives, de l’autre, on exige d’eux qu’ils respectent un nombre toujours plus astronomique de règles. Bref, on met les gens sous tension. Or, il n’y a pas de développement économique sans développement social. En France, dans les pratiques managériales des entreprises comme dans les enseignements, on associe volontiers le management aux ressources humaines, ou encore aux organisations. Mais jamais au travail. Et lorsque nous parlons de travail, il ne s’agit pas de ce qu’on appelle le travail prescrit, c’est-à-dire tel qu’il est formellement décrit dans la fiche de poste ou le contrat. Nous parlons du travail réel. Ce qui nous intéresse, ce sont les interactions entre le management et le travail tel qu’il est exercé concrètement : activation des ressources effectives comme le réseau, initiatives, prises de risques, capacités d’innovation… Et ce travail réel n’est pas pris en compte dans les entreprises ? Aujourd’hui, les actions et dispositifs mis en œuvre par les entreprises s’inscrivent davantage dans une logique curative, avec pour finalité une action sur les symptômes. Mais les baromètres sociaux, qui existent au demeurant depuis trente ans, n’ont d’utilité que si on les exploite pleinement. En fait, la question qu’il faut poser en priorité est celle de la relation sociale au travail. Il s’agit d’intervenir en amont de problématiques comme celle de la santé. Le master de Dauphine va dans ce sens. L’idée est d’accompagner les participants dans l’accomplissement d’une réflexion approfondie et de faire en sorte qu’ils soient reconnus comme des experts et des professionnels de cette articulation entre management et travail. D’une certaine manière, il s’agit de jeter les bases d’un métier qui n’existe pas encore : manager du travail.

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CÔTÉ ENTREPRISES

Grâce à un dialogue instauré sur les compétences, un bilan d’étape chez Novoferm donne à voir une amorce de management du travail. Mais l’entreprise doute du type de management attendu et se rend compte du soutien qu’elle doit apporter aux managers.

Manager les managers L Par Antoine Masson (Aract des Pays de la Loire)

POUR ALLER PLUS LOIN : des témoignages vidéo du DRH de Novoferm et d’un chercheur sont sur le site www.demarchecompetence.com

Lorsque Novoferm lance une démarche compétence (projet de développement et de valorisation des compétences), la volonté de la direction est d’aider à structurer le développement de cette PME de Machecoul (LoireAtlantique) récemment intégrée dans un groupe international. La croissance est forte et les défis nombreux (qualité, flexibilité, étoffement de l’organigramme, etc.). Deux ans après le déploiement du projet, la direction demande à l’Aract des Pays de la Loire et à une équipe de recherche (université de Nantes) de réaliser un bilan d’étape. Trentecinq personnes sont interviewées, des opérateurs au comité de direction. Si l’appréciation des salariés est diversifiée vis-à-vis des impacts du projet compétences, l’avis de six chefs d’ateliers, sortis du rang et encadrant 15 à 35 personnes, est cohérent et homogène du point de vue des conséquences de la démarche sur leur fonction. Mais sont-ils à la hauteur ? Quelles clés leur permettraient de mieux manager le travail, le management des compétences ayant déjà apporté sa

NOVOFERM Secteur : industrie Activité : fabrication de portes de garages et de portes coupe-feu Effectifs : 280 salariés Région : Pays de la Loire

pierre à l’édifice ? L’entreprise s’interroge et comprend qu’elle doit accompagner aussi ses managers.

Une amorce de management du travail Les six chefs d’atelier partagent le même constat : la réalisation périodique d’entretiens individualisés a modifié leur manière d’appréhender les individus dans l’équipe. Ces entretiens constituent des temps de dialogues respectés. Ils y collectent les besoins de formation et proposent des évolutions de compétences. Mieux, les augmentations individuelles des ouvriers, décidées auparavant deux niveaux hiérarchiques audessus d’eux, ont été déléguées aux chefs d’atelier qui disposent

Lorsque que le doute s’installe Les modifications profondes de l’organisation sur plusieurs points sont sans doute à l’origine des profonds questionnement des personnes du management. Tout d’abord, la mise en place d’un progiciel de gestion intégré a chamboulé leur travail et a fortement chargé leurs journées. L’encadrement a dû aussi prendre en main une démarche d’amélioration continue (réunion de cinq minutes, résolution de problèmes). Mais la liste

de dysfonctionnements à régler par les services techniques s’allonge… Enfin, la prime de productivité est calculée différemment. Elle n’est plus basée sur des indicateurs sensibles pour les ateliers et motive donc moins. Chaque mois, elle doit être réexpliquée par les managers… Un contexte qui montre que l’encadrement est surchargé, car il est le creuset de tous les projets actuels de l’entreprise.

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d’une enveloppe annuelle. Le management des compétences a donc permis à l’encadrement de production de s’engager dans un rôle de manager plus complet, qui facilite le dialogue sur les conditions de travail, les contraintes d’organisation, les façons de faire face aux difficultés.

Les clés de l’organisation Il n’en demeure pas moins qu’un doute est très souvent exprimé par la direction et surtout par les chefs d’atelier eux-mêmes sur « leur capacité à réaliser le poste de manager de terrain » (voir encadré). Un plan d’action est donc ensuite mis en place par l’entreprise, qui vise à structurer un soutien organisationnel… aux managers euxmêmes : décentralisation de la prime de productivité, meilleur suivi local de la qualité, allocation de ressources en atelier sur le remplissage du progiciel de gestion intégré. Il s’agit finalement de donner aux responsables les vraies clés pour agir avec leurs équipes dans les projets d’entreprise. L’entreprise doit donc enrichir et décentraliser ses projets pour permettre aux chefs d’ateliers de continuer à être des ressources pour les salariés, dans leur travail et leur évolution professionnelle. Manager le travail, c’est donc surtout avoir les clés de l’organisation. ■

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CÔTÉ ENTREPRISES

Les centres d’appel d’E sur une nouvelle ligne La division commerce d’EDF a signé un accord sur les conditions de travail avec les cinq organisations syndicales. Celui-ci fait du management un axe majeur du mieux-être au travail. Des observatoires régionaux sont chargés de sa bonne application.

D

epuis le 1er juillet 2007 et l’ouverture à la concurrence des marchés de l’énergie, EDF a perdu son monopole de fournisseur de l’électricité auprès des particuliers. Deux mois et demi plus tard, elle lançait « Bleu Ciel » pour à la fois garder ses clients particuliers et reconquérir ceux qui seraient partis à la concurrence. À la division Particuliers et Professionnels (DP&P) d’EDF Commerce, cette libéralisation s’est accompagnée de la mise en place d’une nouvelle organisation : près de 6 000 personnes ont rejoint la relation clients, s’ajoutant aux 3000 agents déjà en poste. Et la fonction de conseil a cédé la place à la fonction de vente.

«

EDF COMMERCE Secteur : énergie Activité : commercialisation auprès des particuliers et des professionnels Effectifs : 9 000 salariés, dont 7 000 dans la relation clients France entière

C’est dans ce contexte que la DP&P et ses partenaires sociaux ont entamé, en avril 2007, des négociations sur l’amélioration des conditions de travail. Le 22 février 2008, elles ont abouti à la signature d’un accord sur le sujet. Particularité à souligner, car très rare à EDF, les cinq organisations syndicales y ont chacune apposé leur paraphe. Il pose

QUESTIONS À HERVÉ BERTIN,

Des managers de tous niveaux

animateur fédéral CGT pour l’ensemble du commercial du secteur de l’énergie

Pourquoi avoir signé l’accord ?

Au départ, nous n’étions pas pour la signature d’un accord, qui ne nous semblait pas répondre suffisamment aux préoccupations des agents, comme, par exemple, celle du nombre d’heures passées au téléphone. Ceci étant, les retours que nous avons eus de notre consultation auprès des agents étaient plutôt favorables à ce que l’on a signé. En outre, seuls les signataires peuvent participer aux observatoires régionaux. Comment concevez-vous votre rôle au sein de ces observatoires ?

À partir du moment où nous allons au plus près des agents, c’est mieux. Ce n’est pas du national que nous réglerons les choses, même s’il y a des questions très sensibles comme celle des effectifs. De même, pour la pause entre deux appels, cela ne peut venir que d’une directive

nationale. Toutefois, plus nous aurons une demande « en bas », plus nous serons efficaces « en haut ». Ces observatoires vont permettre de révéler certains dysfonctionnements. La question maintenant reste de savoir comment répondre à ces différentes attentes. Un accord n’est viable que si on a les moyens d’y répondre. C’est l’interrogation que nous avons. Quelle est votre principale préoccupation ?

Aujourd’hui, l’accord n’a pas changé l’organisation du travail. Or c’est cette organisation qui génère un certain stress. Il faut être attentif à la façon dont le management est mis en exergue. Il ne faudrait pas que la direction reporte la responsabilité de ce qui ne va pas sur les managers intermédiaires. C’est aussi notre rôle d’organisation syndicale de veiller à cela. page 8

comme principe que bien-être et performance au travail sont intimement liés. Quatre thématiques sont abordées, qui expriment autant d’objectifs à atteindre : travailler ensemble, mieux organiser l’activité, favoriser un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée et, enfin, encourager les parcours professionnels, ce dernier point ayant été ajouté au cours des négociations, à la demande des syndicats.

»

L’accord se veut un outil d’évolution du modèle managérial de la division commerce d’EDF. De fait, le rôle du management dans l’amélioration des conditions de travail est particulièrement mis en avant. Il lui incombe d’assurer la cohésion des équipes et d’instaurer un climat de confiance favorisant l’écoute des agents. Des formations doivent être mises en place pour aider les managers à accomplir leur mission, leur professionnalisation constituant un axe important de l’accord. Celuici déclare en outre la nécessité qu’« émergent des managers de tous niveaux qui soient issus du métier de conseillers clients ». Un référent RH aura pour tâche d’informer les agents des possibilités

DF managériale d’évolution professionnelle. Des mesures concrètes visent à améliorer la visibilité qu’ont les salariés sur leur travail. Les plannings, affichés à l’avance, permettront aux agents de savoir à quelle activité ils sont affectés.

pause est au libre choix de l’agent, qui devra cependant respecter la courbe d’appels et le bon équilibre avec les autres membres de l’équipe. La responsabilité individuelle et collective est ainsi posée comme un axe majeur de l’accord.

Avec cet accord, le rôle du management dans l’amélioration des conditions de travail est particulièrement mis en avant. Une vision annuelle des jours de forte intensité téléphonique, avec mise à jour mensuelle, sera communiquée aux personnels des centres d’appels afin de mieux anticiper et gérer le nombre de requêtes des clients. La question des challenges commerciaux est aussi évoquée, certains personnels désapprouvant ce type de pratique jugée trop commerciale. L’accord stipule que les organisations syndicales et les agents seront informés au préalable de la tenue de ces challenges mais, plus encore, que ceux-ci « ne peuvent être un mode permanent d’animation des centres de relations clients ». Une charte éthique des challenges est en cours d’élaboration, en association avec les organisations syndicales signataires.

60-40, la bonne cote Concernant l’organisation de l’activité, l’accord indique que le modèle d’activité du métier de conseiller client doit tendre vers 60% du temps de travail à s’occuper de l’accueil client au téléphone, les 40% restant étant consacrés à gérer les dossiers, le management devant veiller à cette alternance. L’accord reconnaît, en outre, la nécessité d’une pause (hors pause physiologique et pause méridienne), dont la durée est de l’ordre de quinze minutes par demi-journée. Le moment de la

Une volonté commune est aussi affichée pour développer les crèches d’entreprise, les services à la personne et les plans de déplacement d’entreprise. Sur ces sujets, les situations varient souvent d’une région à l’autre, la division com-

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merce en comptant huit. Des observatoires régionaux des conditions de travail – composés de représentants syndicaux, de représentants de la direction de vente et de la DRH – seront chargés de suivre la bonne application de l’accord, et d’échanger sur les bonnes pratiques. Un comité de suivi national se réunira également tous les trimestres. Pour l’heure, les efforts se concentrent sur le déploiement de ce qui est convenu avec, notamment, un kit de communication distribué aux managers. L’enjeu est déterminant afin que chacun des acteurs en ait une vision partagée. ■ Caroline Delabroy (journaliste)

QUESTIONS À MARTIN LEŸS, directeur des ressources humaines et de la conduite du changement de la DP&P

Pourquoi cet accord ?

Dès 2006, nous avons souhaité afficher notre ambition sociale; EDF a été le premier opérateur important des centres d’appel à obtenir le label « responsabilité sociale ». Lors de la préparation de l’ouverture des marchés, nous avons négocié un volet social pour accompagner l’entrée de 6000 personnes dans la fonction clientèle. Dans ce cadre, les organisations syndicales ont demandé l’ouverture d’une négociation sur les conditions de travail. En 2008, notre projet managérial est d’améliorer celles-ci, ce qui atteste du volontarisme de notre démarche. Quel était votre mandat de négociation ?

Nous n’avons pas voulu faire un accord « classique », mais une déclinaison de notre projet social, qui est de concilier la performance sociale et économique, parce que nous croyons que l’une ne va pas sans l’autre. Nous ne souhaitions pas de mesures trop statiques, et surtout pas de mesures figées comme, par exemple, ce que demandaient certaines organisations: « Pas plus de quatre heures de téléphone par jour. » page 9

Qui, au sein de l’entreprise, va être chargé de la bonne application de l’accord ?

Sa bonne application repose sur le management de proximité, notamment sur les responsables des centres d’appel. Les résultats sociaux seront inclus dans l’appréciation de la performance du management. Dans le contrat de performance d’une entité, le domaine social pèse 9 % du contrat, dont 5 % pour la bonne application de l’accord, ce qui atteste l’importance que nous y apportons. In fine, comment mesurer l’évolution des conditions de travail ?

Nous avons mis en place un outil de suivi sous la forme d’un baromètre social trimestriel, enquête anonyme et confidentielle menée par Ipsos auprès de tous les conseillers clients. Pour le management, c’est un outil essentiel, qui permettra à chaque chef de centre d’appel de mesurer l’efficacité de ses actions et ses impacts sur le climat social. Pour le personnel, c’est un moyen d'exprimer ses attentes et de contribuer à l'évolution des conditions de travail.

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CÔTÉ ENTREPRISES

Sur la bonne voie avec GPS Évaluer la perception qu’ont les salariés de leurs conditions de travail : c’est la vocation de la Gestion des perspectives sociales (GPS), dispositif conçu par l’Aract Aquitaine et qu’a testé Secma, entreprise de BTP, auprès de ses collaborateurs.

I

nitier et mettre en œuvre une politique de gestion des compétences et d’amélioration des conditions de travail, rien n’est moins évident pour une PME. Il en est ainsi pour Secma : créée en 1972, implantée à Bordeaux. Secma est une PME indépendante, spécialisée dans la construction, la rénovation et l’entretien de bâtiments industriels, commerciaux ou collectifs. Ses trente-neuf salariés travaillent en majorité sur les chantiers, pour le compte d’une clientèle essentiellement girondine, partagés entre marchés privés (70 %) et publics (30 %). Comme toute entreprise soucieuse de s’inscrire dans une stratégie de performance et d’assurer son développement, Secma est confrontée à des enjeux de fidélisation de ses effectifs, mais aussi de recrutement. Attractivité et rétention des collaborateurs, un double objectif qui nécessite des moyens de management adaptés.

Une attente insoupçonnée

C O N TA CT

Jean-François Thibault, Aract Aquitaine : [email protected]

Or les méthodes, outils et prestations disponibles sur le marché répondent essentiellement aux besoins et capacités d’entités suffisamment structurées pour administrer des processus lourds. Pour sa part, le PDG de Secma n’a pas les moyens de mettre sur pied une usine à gaz. Il recherche un outil pratique, léger et compréhensible par tous. Après un premier contact avec l’Aract Aquitaine, il sera décidé

SECMA Secteur : BTP Activité : construction, rénovation et entretien de bâtiments Effectifs : 39 salariés Région : Aquitaine

d’adopter la méthode GPS. « L’outil nous a intéressés pour plusieurs raisons : rapidité de mise en œuvre, objectivité, garantie de confidentialité pour les salariés, qui ont pu trouver ici la possibilité de s’exprimer sans contrainte et sans peur d’être jugés », explique Jean-Yves Ségura,

travaux, chefs de chantier et ouvriers. Une population souvent issue d’une première génération d’immigration et ne maîtrisant pas toujours les subtilités de la langue française. « C’est sans doute la principale limite de cet outil : la conception du questionnaire,

Pour sa part, le PDG de Secma n’a pas les moyens de mettre sur pied une usine à gaz. Il sera décidé d’adopter la méthode GPS. chef de projet chez Secma. La direction, épaulée par les représentants du personnel, a réuni l’ensemble des salariés pour présenter l’outil, sa finalité, ses modalités d’administration et les garanties de confidentialité associées. Et chacun est reparti avec un questionnaire en poche. Première surprise pour la direction: la rapidité et l’ampleur de l’écho rencontré : « En moins de quinze jours, près de 70 % des collaborateurs avaient répondu », commente le chef de projet. Surprise d’autant plus forte que les effectifs de Secma se composent en grande partie de conducteurs de

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explique Jean-Yves Ségura. Nos salariés de chantiers sont d’origines différentes, ont quitté assez tôt le milieu scolaire, et certains ont été rebutés par la complexité des questions. » Clause de confidentialité oblige, la direction s’est trouvée dans l’impossibilité d’aider les collaborateurs en difficulté devant la formulation des items – notamment devant certaines tournures négatives. « Certains se sont fait assister par leurs enfants », raconte le chef de projet. Second facteur d’étonnement : le contenu des réponses. Un bilan global en décalage assez radical, non seulement avec le niveau de

perception communément véhiculé autour des entreprises et métiers du bâtiment, mais aussi avec les moyennes cumulées par l’ensemble des entreprises ayant décliné l’outil GPS, tous secteurs confondus. « 75 % de nos salariés pensent que l’entreprise est capable d’assurer leur avenir, contre 47 % pour le total de la base de données GPS », relève Jean-Yves Ségura.

Un outil pour des mesures concrètes Le questionnaire a également permis de pointer quelques potentielles améliorations : politique d’intéressement, rôle et importance des délégués du personnel, gestion des compétences et perspectives d’évolution dans l’entreprise, la communication interne… Secma va de fait lancer un train de mesures concrètes. En dégageant des investissements conséquents : aménagement d’un réfectoire, de sanitaires et douches, achat de mobiles de chantier comprenant kitchenette, réfectoire, douches, sanitaires, achat de vêtements de travail, renouvellement du parc de fourgons. Mais aussi en engageant des mesures managériales inédites pour la PME : signature d’un contrat de prévention avec la Cram Aquitaine, et mise en place d’une formation de l’ensemble du personnel à la prévention des risques professionnels, conception d’un livret d’accueil pour les intérimaires et nouveaux entrants, signature d’un accord d’intéressement des salariés aux résultats. « Nous avons également défini les divers postes de l’entreprise et mis en place des entretiens individuels avec grille d’évaluation, recensement des besoins de formation, plan de formation annuel en concertation avec les délégués du personnel », développe Jean-Yves Ségura. La démarche GPS a en outre incité la direction à programmer des réunions mensuelles d’information avec l’encadrement et les délégués du personnel, ainsi que des débriefings bimensuels avec les chefs de chantiers pour faire le point sur le fonctionnement de

LA GPS, UNE BOUSSOLE POUR LES RH La GPS, quèsaco ? GPS : un sigle de trois lettres facilement mémorisable – la résonance avec la technique bien connue de géolocalisation n’est pas anodine – pour désigner le dispositif de mesure de satisfaction professionnelle, défini et animé par l’Aract Aquitaine. GPS, pour « Gestion des perspectives sociales ». Objectif : mesurer le degré de satisfaction des salariés envers l’entreprise, le travail, le relationnel et les perspectives individuelles. La GPS repose sur deux outils complémentaires : un baromètre, dédié à l’évaluation, et une base de données, baptisée Géode. Celle-ci compile l’ensemble des données barométriques recueillies au fil des applications pour offrir un référentiel. Il permettra à chaque entreprise de projeter ses propres résultats sur une moyenne globale, et de se positionner au regard d’un certain nombre d’indicateurs spécifiques. Le baromètre est articulé autour d’un questionnaire validé, disponible et immédiatement opérationnel, permettant aux acteurs de l’entreprise de fixer des objectifs opérationnels pour la performance de l’entreprise, la démarche qualité et, de manière plus générale, la qualité de vie au travail par l’amélioration des conditions de travail. L’outil va également apporter

des informations sur les attentes des salariés, par exemple en termes de carrière et de perspectives d’évolution. Il s’agit, entre autres, de se donner les moyens de prévenir les conflits et la dégradation du climat social dans l’entreprise, de circonscrire rapidement les priorités, d’aider à la décision pour créer un contexte apaisé de dialogue social.

Concrètement, comment ça marche ? Dans l’entreprise, le pilotage de la mesure relève d’un comité de quatre à douze personnes représentant la direction et les salariés. Mission dudit comité: communiquer auprès des salariés, distribuer les questionnaires et les enveloppes T, impulser les retours vers l’Aract, analyser et restituer aux salariés les résultats du baromètre. La mise en œuvre et la réalisation de la mesure sont de la responsabilité de l’Aract Aquitaine, qui garantit une totale confidentialité des réponses de chacun, l’impartialité vis-à-vis des directions et des salariés, et l’objectivité des résultats restitués au comité de pilotage sous forme d’un CD-Rom.

Combien ça coûte ? Hors cofinancement possible des pouvoirs publics, le coût moyen de la mesure barométrique s’élève pour l’entreprise à 1 500 €, forfait auquel il faut ajouter 9 € par salarié.

Voir réf. site GPS page 15.

l’entreprise. Enfin, la société bordelaise a créé ex nihilo une société de services, Secma Logistic, dédiée à l’amélioration de l’accueil et du confort des travailleurs sur les chantiers du BTP, de l’industrie et de l’événementiel. « L’outil GPS fournit une photographie des conditions de travail et de leur perception dans l’entreprise, à un instant T, avec un angle de vue assez large. Pour nous, ça

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aura été un élément déclencheur important dans notre politique d’optimisation des ressources humaines », énonce Jean-Yves Ségura. Un levier d’action que Secma pourrait bien réarmer fin 2008 ou début 2009, afin d’établir des premiers constats d’évolution et, partant, de mesurer les effets de la stratégie mise en œuvre. ■ Muriel Jaouën (journaliste)

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Manager les conditions de travail: un objectif que les entreprises anglo-saxonnes poursuivent aussi, à travers notamment le Work-Life Balance, ou comment trouver la façon de mieux équilibrer vie professionnelle et vie privée. Au Canada, il existe même, au sein des entreprises, une fonction dédiée…

Pays anglo-saxons, le poids de la balance D Par Julien Pelletier (responsable veille et prospective internationale de l’Anact)

epuis vingt ans, l’opposition entre travail et vie personnelle ne cesse d’augmenter, jusqu’à devenir l’un des principaux problèmes rencontrés par les managers : c’est ce que démontrent de multiples enquêtes au RoyaumeUni, au Canada, en Australie et aux États-Unis. Dans ces pays anglosaxons, le Work-Life Balance (WLB), qui permet de trouver l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle, est l’une des clés du management de la qualité de vie au travail. Les transformations spectaculaires de la main-d’œuvre (féminisation, vieillissement, attentes des jeunes…) et des modes de vie (loisirs, place de la famille, soins aux aînés, transport…) incitent entreprises et gouvernements (voir encadré) à mettre en place de nouveaux équilibres entre sphère privée et sphère professionnelle.

Sur tous les fronts Du côté des entreprises, on constate que le management du WLB mobilise une grande diversité de pratiques et mesures ayant trait aux

avantages sociaux, comme des services de garderie en milieu professionnel, des salles de conditionnement physique, un aiguillage vers des services de soins pour personnes âgées, des programmes de promotion de la santé, la retraite graduelle et le partage de l’emploi… À ces « services », les entreprises incluent parfois des actions sur l’organisation du travail en envisageant la charge qu’il représente, et en préférant le travail en équipe; elles interviennent aussi sur les responsabilités et la rémunération, l’environnement physique du travail, le télétravail, l’aménagement du temps de travail, la gestion de carrière… En résumé tout ce qui se rattache à la gestion de l’activité professionnelle entre dans les préoccupations des entreprises, qui, avec le WLB, ont envisagé une démarche globale. Certaines ont même créé un poste de responsable du WLB. Comme Kraft Canada, où il existe un manager « harmonie travail-vie et mieux-être » chargé de concevoir, de manière participative, un programme WLB et de le mettre en

Comment fonctionne le WLB dans les politiques publiques ? Du côté des gouvernements, on trouve généralement trois types de programmes d’appui : ☛ des études et les enquêtes visant à suivre l’évolution des besoins des salariés sur ce sujet ; ☛ des programmes et politiques de management du WLB au sein du secteur public ; ☛ la valorisation des bonnes pratiques des entreprises et l’encouragement à la négociation sociale sur le sujet. Par exemple, au Canada, il existe le ministère des Ressources humaines et du Développement social (voir sur le site www.rhdsc.gc.ca) dont l’objectif est d’« aider les Canadiennes et Canadiens à faire les bons choix afin que leurs vies soient productives et gratifiantes, et d’améliorer leur qualité de vie ».

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œuvre : enquêtes, groupes de discussion, évaluation de la charge de travail, simplification des tâches, création d’un « conseil travailvie » (constitué de douze personnes démographiquement représentatives de tous les secteurs), formations… Le dispositif est de taille.

Un effet neutre sur la productivité Objectif premier de ces nouvelles pratiques managériales : marier la diversité des attentes des salariés et les besoins de flexibilité de l’entreprise. Est-ce que cela a un effet positif sur la productivité ? Une étude récente(1) auprès de 732 entreprises (États-Unis et RoyaumeUni essentiellement) indique qu’il n’y a pas de corrélation significative entre un bon WLB et la productivité. Les entreprises ayant progressé dans l’équilibre travailvie ont tantôt connu une meilleure p ro d u c t i v i t é , ta n t ô t n o n . E n revanche, on constate une relation positive entre un management de qualité et une meilleure conciliation profession - sphère privée, c’est-à-dire que les entreprises ayant des pratiques diversifiées et cohérentes de management du WLB sont aussi celles où cet équilibre est, d’après les salariés, le mieux atteint. Des résultats qui montrent qu’une bonne harmonie travail-vie est socialement désirable puisqu’appréciée par les salariés tout en demeurant neutre sur le plan de la productivité. ■ Work-Life Balance, Management Practices and Productivity, Nick Bloom, Center for Economic Performance de la London School of Economics, 2006.

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ALLER PLUS LOIN

POINTS DE VIGILANCE 1

FORMER LES MANAGERS OU LES ACTEURS DE L’ENTREPRISE Fédérer les énergies et les expertises autour du travail en formant, ou au moins en sensibilisant, ceux qui, dans l’entreprise, peuvent agir :

• QUI – les managers d’équipes confrontés aux changements d’organisation – les managers « fonctionnels » accompagnant les changements – les représentants du personnel, en particulier ceux des CHSCT – les consultants et les acteurs de la prévention des risques psychosociaux

• QUOI

• COMMENT

comprendre les nouvelles problématiques de l’entreprise : – les nouvelles formes d’organisation – l’articulation travail et hors-travail – les identités professionnelles et les transformations des métiers – les nouveaux risques (stress, risques psychosociaux, usure prématurée, vieillissement…) – les liens entre travail et performance globale

– articuler données et diagnostics de santé, de GRH, de production – analyser les situations de travail – concevoir des stratégies d’action et des dispositifs de suivi

E Cette étape de formation permet d’articuler les apports et outils des sciences de gestion et des sciences humaines pour construire une compétence d’analyse et d’intervention.

2 PILOTER ET SUIVRE • DES PRÉALABLES : – l’identification des situations de travail clés et l’anticipation des nouveaux risques – la mise en débat et la concertation sur des sujets précis ou sensibles

• DES OUTILS – des accords sur les conditions de travail ou sur la qualité de vie au travail autour de sujets précis – des observatoires nationaux ou régionaux, d’entreprises ou de branches – des outils et des questionnaires de diagnostic pour connaître la situation de l’entreprise. Un exemple : la Géode des perspectives sociales (GPS) : se connaître et se situer par rapport à un secteur, un bassin d’emploi, des entreprises de même taille, etc. E Ces outils permettent essentiellement de comprendre les situations de travail et d’accompagner le développement social de l’entreprise.

3 ÉVALUER RÉGULIÈREMENT • METTRE EN RAPPORT COÛT ET VALEUR DU TRAVAIL – mesurer les coûts directs du travail dans les prix de revient – mesurer les coûts indirects liés à l’absentéisme, aux maladies professionnelles, à la gestion des remplacements – mesurer les gains de performance liés à un investissement dans les conditions et la qualité de vie au travail: fidélisation des clients/innovation/baisse de non-qualité… – inclure le management du travail dans l’évaluation des managers

• PRENDRE LA TEMPÉRATURE DE L’ENTREPRISE À INTERVALLES RÉGULIERS – construire le suivi avec un groupe de travail dédié – réorganiser la concertation et la négociation – informer et communiquer régulièrement – rediscuter autour des accords et des observatoires les sujets de la négociation

E L’évaluation des actions permet une adaptation aux contraintes économiques et sociales. Elle inscrit la démarche dans une gestion globale de l’entreprise par la qualité de vie au travail. page 13

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ALLER PLUS LOIN

MANAGEMENT À CONTRESENS : COMBIEN COÛTE LA DÉMOTIVATION ? C’est un mot à la mode mais il y a une raison à cela : la démotivation serait le nouveau mal des entreprises, se répandant comme une traînée de poudre… Un tableau noir dans lequel le management joue un rôle, produisant le contraire de ce qu’il devrait être : mobilisateur et fédérateur. Mais la force de l’ouvrage d’Anne Dousset est de ne pas s’arrêter à ce sombre constat mais d’en analyser les causes profondes. Puis de proposer des solutions pour tordre le cou (le coût ?) au « management à contresens ».

à lire

Management à contresens : combien coûte la démotivation ?, par Anne Dousset, éditions d’Organisation, 2007

Mettre le plaisir de travailler au poste de commande pour gagner en efficacité? Voilà la thèse audacieuse qu’Anne Dousset développe dans son ouvrage Management à contresens: combien coûte la démotivation? Elle parle d’expérience, elle qui a occupé pendant une quinzaine d’années des postes de DRH ou de conseil dans des environnements très concurrentiels et, même dans un lointain passé, quelques temps à l’Anact… Si le plaisir est le moteur de l’action, le moteur serait-il grippé? Nous serions en tout cas, d’après Anne Dousset, en phase de rendement fortement décroissant. Elle l’attribue essentiellement à trois raisons: la centralisation des décisions, la pression du court terme et la distanciation des pouvoirs. Le changement rapide « pour s’adapter, pour anticiper, pour inventer avant et mieux que les concurrents » est confondu avec un « bal des girouettes » qui systématise le « faire différemment des précédents ». Face à cette situation, « les salariés éprouvent le sentiment douloureux que l’entreprise est dans l’erreur, que leur avis n’est pas important, que leur apport est de peu de valeur et que leur engagement est sans effet ». Bref, elle constate qu’un fossé contre-productif se creuse entre les stratèges siégeant dans des technostructures matricielles et les opérationnels de terrain.

Un modèle pour convaincre ? L’originalité de l’ouvrage tient dans le fait qu’il combine des éléments rarement réunis. Il illustre tout d’abord ce phénomène de déplaisir du travail, à travers la présentation de trois cas individuels qui fleurent bon leur vécu et démont(r)ent les mécanismes par lesquels la démotivation, le désengagement, voire le divorce, s’installent entre l’entreprise et ses salariés. page 14

Mais, chaque fois, le « comment aurait-on pu éviter cela? » incite à réfléchir positivement sur les conduites à tenir. Fidèle à sa préoccupation économique, mais aussi consciente de ce qui peut toucher les managers, l’auteure propose ensuite un « modèle pour chiffrer le taux de productivité du facteur humain ». Tant pour mesurer le coût du désengagement que le bénéfice de l’engagement individuel et collectif. Un modèle pour convaincre? Même pas. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: si on additionne l’impact du management sur le présentéisme, l’efficacité collective et « l’énergie motivationnelle individuelle », on arrive facilement à des écarts de 200 % entre une situation initiale où l’on aurait fait confiance aux personnes concernées pour trouver une solution adaptée et une situation finale, à laquelle on est arrivé par un tout autre chemin… Pour beaucoup, cet écart représente le coût de l’incapacité à fidéliser ou du remplacement d’un employé ou d’un cadre ancien et expérimenté. Une troisième partie, très substantielle, le tiers de l’ouvrage, propose enfin trois clés pour faire renaître l’engagement: créer une identité d’entreprise qui donne envie d’en être acteur; créer une relation de confiance qui conduit au dépassement de soi; enfin, impliquer les personnes dans les différents processus de l’entreprise, en redonnant corps à l’initiative individuelle et à l’expression de l’intelligence collective, en jouant la transparence. On est frappé par le contraste entre le tableau sombre dressé au début de l’ouvrage et la lumière qui se dégage progressivement de l’analyse et des propositions: pessimisme de l’intelligence et optimisme de la volonté? Rassurez-vous: dans les propositions aussi, il y a de l’intelligence! Michel Weill

ARTICLES

Le travail, un défi pour la GRH,

« Schneider met un pilote dans son accord», Patricia Sudolski, Entreprise & carrière, n° 895, 26 février 2008, p. 17.

Rachel Beaujolin-Belletn, Michel Parlier et Pierre Louart, éd. De l’Anact, 2008, 270 p.

Qualité de vie et santé au travail - Guide pour le management et la négociation des conditions de travail dans la société d'information, Yves Lasfargue et Pierre Mathevon, Octares Éditions, 2008, 306 p.

Le Capitalisme d’héritiers : la crise française du travail, Thomas Philippon, éd. du Seuil, coll. «La république des idées», 2007, 109 p.

Les Compétences managériales : enjeux et réalités, Françoise Dupuich-Rabasse, éd. L’Harmattan, 2007, 313 p.

Le Carnet de bord du manager de proximité, Pascal Poudereaux, éd. d’Organisation, coll. «Livres outilsEfficacité professionnelle», 2007.

L’Entreprise réconciliée. Comment libérer son potentiel économique et humain, Jean-Marie Descarpentries et Philippe Korda, éd. Albin Michel, 2007, 254 p.

Management de la santé et de la sécurité au travail : un champ de recherche à défricher, Emmanuel Abord de Chatillon, Olivier Bachelard, Jean-Marie Peretti, éd. L’Harmattan, coll. «Conception et dynamique des organisations», 2006, 467 p.

Les Enjeux sociaux de l’innovation, Yves Lasfargue, éd. Images pour la formation, coll. «CJD», 2006.

Manager par le sens : les clés de l’implication au travail, David Autissier et Frédéric Wacheux, éd.d’Organisation, 2006, 246 p.

Le Manager au quotidien : les 10 rôles du cadre, Henry Mintzberg, éd.d’Organisation, coll. «Références Poche», 2006, 283 p.

Changer le travail… Oui mais ensemble, Henri Rouilleault

« Management participatif. Les salariés de la RATP écrivent le plan stratégique de l’entreprise », Entreprise & carrière, n° 898, 24 mars 2008, p. 14 à 16. « Un salarié au conseil d'administration », Pierre Alanche, Alternatives économiques, n° 241, décembre 2007, p. 74 et 75. « Le travail contemporain est insuffisamment managé », Entreprise & carrière, n° 869, août 2007, p. 17. « Le management intermédiaire en transformation », Christian Mahieu, Revue française de gestion, n° 172, mars 2007, p. 49 à 61. « Les relations sociales, oubliées du programme des grandes écoles », Liaisons sociales, n° 83, juin 2007, p. 42 à 44. « Manager le changement : comment impliquer son personnel », L’Expansion management review, complément rédactionnel au n° 119, décembre 2005, p. 30 à 32. « Des observatoires de branche pour montrer le cap », Chantal Attane, Entreprises formation, n° 145, octobre 2004, p. 34 et 35. « Changement : nouveaux défis, nouveaux outils », dossier de L'Expansion management review, n° 113, juin 2004, p. 41 à 86. « Mise en œuvre des accords européens sur les conditions de travail dans le rail », Liaisons sociales Europe, n° 97, 5 février 2004, p. 4.

sur le web

à lire

OUVRAGES

Consultez toutes les ressources sur la qualité de vie au travail et l’amélioration des conditions de travail et le contenu pédagogique ainsi que les modalités d’inscription au master « management, travail et développement social » sur

www.anact.fr Tout sur la Géode des perspectives sociales (GPS) mise en œuvre par l’Aract Aquitaine… Renseignements pratiques, ressources et pilotage, perspectives : www.gps-aract.fr

FAIRE FACE AUX EXIGENCES DU TRAVAIL CONTEMPORAIN Les entreprises, les organisations syndicales, mais aussi les pouvoirs publics n'ont pas le choix: il faut analyser le travail pour mieux en comprendre les nouvelles exigences. Là où les interprétations les plus courantes parlent d'intensification du travail, cet ouvrage propose une grille de lecture revisitée des conditions de travail. Ce faisant, il s'interroge sur les conditions nouvelles dans lesquelles on demande aux gens de travailler. Les clés? Du côté des travailleurs mais aussi du côté du management : comment l'activité est-elle organisée? Sait-on gérer la montée des exigences ? Afin d'éviter de s'enfermer dans la seule dénonciation du sort vécu par les salariés, l'auteur a construit une perspective analytique qui fait se croiser les évolutions des stratégies d'entreprise, les transformations de l'activité de travail et les effets des outils de gestion. Faire face aux exigences du travail contemporain, Pascal Ughetto, éd. de l’Anact, mai 2007, 157 p.

et Thierry Rochefort éd. de l’Anact, 2005, 509 p.

TRAVAIL ET CHANGEMENT , le bimestriel du réseau Anact pour l’amélioration des conditions de travail. Directeur de la publication: Jean-Baptiste Obéniche – directeur de la rédaction: Gilles Heude – responsable des éditions: Sylvie Setier – rédactrice en chef: Béatrice Sarazin, [email protected] Contributeurs au dossier : Antoine Masson, Julien Pelletier, Thierry Rochefort, Michel Weill. Réalisation Reed Publishing – chef de projet : B. Lacraberie ; journalistes : C. Delabroy ; M. Jaouën ; secrétaire de rédaction : G. Hochet ; illustrateur : Tino ; directrice artistique : A. Ladevie ; fabrication : P. Spadari – 2, rue Maurice-Hartmann, 92133 Issy-Les-Moulineaux – impression : Imprimerie Chirat, 744, rue Sainte-Colombe, 42540 Saint-Just-La-Pendue. Dépôt légal : 3e trimestre 2008. Une publication de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, 4, quai des Étroits, 69321 Lyon Cedex 05, tél. : 04 72 56 13 13.