Monsieur Bernard KOUCHNER Ministre des affaires étrangères et ...

complexité, pour tentative d'assassinat sur la personne de l'un de ses clients. ... politique, ce Docteur, euh, [l'auteur des propos se reprend], cet Avocat doit ...
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Monsieur Bernard KOUCHNER Ministre des affaires étrangères et européennes 37, Quai d’Orsay 75351 PARIS Cedex 07 PAI/DL/2008.07 Paris, le 28 juillet 2008

Monsieur le Ministre, J’ai l’honneur d’attirer votre attention sur le cas de Monsieur Ivan JURASINOVIC, avocat au Barreau d’Angers, qui, dans le cadre de l’exercice de la défense des intérêts de l’un de ses clients, a fait l’objet de menaces d’internement psychiatrique proférées publiquement par Monsieur Stjepan MESIC, Président de la République de Croatie. Ces propos font suite à la plainte déposée par Maître Ivan JURASINOVIC devant le Tribunal de Grande Instance de Nanterre, qui l’a renvoyée au JIRS de Paris du fait de sa complexité, pour tentative d’assassinat sur la personne de l’un de ses clients. Cette plainte visait, entre autres, Monsieur Stjepan MESIĆ, actuel Président de la République de Croatie, et Monsieur Hrvoje PETRAČ qui aurait financé les campagnes électorales de Monsieur Stjepan MESIĆ et que ce dernier a toujours nié connaître personnellement. S’exprimant sur cette plainte, Monsieur Stjepan MESIĆ a tenu les propose suivants le 10 novembre 2006 qui ont été diffusés sur la chaîne croate de télévision privée NOVA TV ainsi que par Radio 101 : « Un [l’auteur des propos se répète] un Avocat, mais je ne sais pas ce que j’aurais à lui dire, me lie à [l’auteur des propos se répète à nouveau] à PETRAČ, Hrvoje PETRAČ, que je n’ai rencontré que 2 fois dans ma vie, et ce, en passant. Donc je n’ai eu aucun lien avec cet homme à cette époque et pour cette période pour laquelle ce TOMULIĆ, criminel d’envergure internationale, m’accuse. Je n’ai même pas rencontré Hrvoje PETRAČ, je l’ai [l’auteur des propos hésite et se reprend], avant qu’il ne fuie à l’étranger, rencontré deux fois, tout a fait par hasard, et ce [l’auteur des propos balbutie longuement] dans, dans, dans un [hésitation] bar. Rien d’autre. Pour quelles raisons dit-il que je suis son mentor politique, ce Docteur, euh, [l’auteur des propos se reprend], cet Avocat doit certainement le savoir mais je lui conseillerais quand il viendra à ZAGREB de se rendre à VRAPČE [hôpital psychiatrique de ZAGREB] car ils peuvent là bas fournir à ces gens là une aide efficace. [L’auteur des propos se gratte le visage]. Ce sera une occasion formidable, cela ne lui coûtera pas cher, et nos médecins sont connus pour leur efficacité [l’auteur des propos rit] ».

Maître Ivan JURASINOVIC a alors décidé de poursuivre Monsieur Stjepan MESIĆ en France pour menace de mort et en Croatie pour injure publique, sur les plans pénal et civil. Compte tenu de l'immunité constitutionnelle dont jouit en Croatie le Président de la République, la procédure pénale à son encontre est suspendue jusqu'à l'échéance de son mandat en février 2010, la Cour constitutionnelle de Croatie a, par décision du 18 juin 2008, rejeté la demande de levée d'immunité faite par Maître Ivan JURASINOVIC. A l'inverse, l'immunité ne couvrant pas la matière civile, l'instance en indemnisation du préjudice résultant de l'infraction est actuellement pendante devant le Tribunal civil de Zagreb qui a tenu une première audience le jeudi 17 avril 2008. Maître Ivan JURASINOVIC m’indique que cette audience, à laquelle il a assisté, ne lui a pas permis de faire valoir ses droits du fait d’un huis clos illégal, de pressions sur les personnes présentes dans la salle, de la disparition de pièces du dossier, de l’agressivité du juge à son égard, de menaces de l’expulser de la salle, de menace de le poursuivre pour outrages car il tentait de s’exprimer et, finalement, du renvoi du dossier au jeudi 9 octobre 2008 à 11 heures 45 sans aucune raison valable. Maître Ivan JURASINOVIC doit se rendre dans les prochains jours en Croatie, jusqu'au 15 août 2008, pour y effectuer notamment des démarches et rencontrer plusieurs personnes en lien avec le dossier de son client. Les informations relatives à son déplacement font état d'un risque important pour sa personne. Il indique n’avoir pas trouvé de soutien auprès de l’Ambassade de France à Zagreb. Au regard de ces éléments, l’Assemblée générale du Conseil National des Barreaux, représentant la profession d’avocat, a adopté le 19 juillet, à l’unanimité, une motion, dont vous trouverez copie ci-joint, qui considère comme inacceptables les menaces publiques contre la personne de Maître Ivan JURASINOVIC qui violent le libre exercice des droits de la défense et sont contraires aux règles internationales relatives à l’exercice de la profession d’avocat. Il ne parait pas acceptable que la Croatie, qui se veut un Etat de droit et un pays démocratique, candidat à l'adhésion à l’Union européenne, membre non permanent du Conseil de Sécurité de l'ONU, lié par des conventions internationales protégeant l’exercice de la profession d’avocat, permette qu’un avocat français, dans le cadre de l’exercice de sa mission de défense, soit attaqué par le Président de la République de cet Etat.

Je me permets donc, Monsieur le Ministre, de vous demander de bien vouloir prendre toutes mesures nécessaires pour assurer la protection des droits de citoyen et d’avocat de Maître Ivan JURASINOVIC ainsi que d’intervenir auprès des autorités croates pour que la sécurité et le libre exercice professionnel de notre confrère soient garantis. Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’assurance de ma très vive considération.

Paul-Albert IWEINS Président du Conseil National des Barreaux

PJ : motion du Conseil National des Barreaux du 19 juillet 2008