Les explosifs utilisés dans le BTP - OPPBTP

Cette décomposition provoque le dégagement de gaz à très haute température, à haute pression et à une vitesse telle qu'il peut en résulter des dommages sur ...
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Fiche Prévention - D5 F 07 13

Les explosifs utilisés dans le BTP

La matière explosive est à considérer comme un outil de précision. Chaque produit permet de réaliser des opérations de génie civil précises et de qualité. Pour cela, il est impératif de choisir à bon escient le produit explosif nécessaire aux travaux à réaliser (extraction de matériaux, démolition, déroctage sous-marin, etc.). Cette fiche technique apporte un éclairage sur les explosifs généralement utilisés sur les chantiers du BTP.

Définition Un explosif est une substance ou un mélange de substances susceptibles de se décomposer très rapidement, par réaction chimique. Cette décomposition provoque le dégagement de gaz à très haute température, à haute pression et à une vitesse telle qu’il peut en résulter des dommages sur les personnes ou sur les biens.

Lexique Déflagration La matière se décompose sous la forme d’une combustion rapide de l’ordre de 340 à 1 000 m/s. Cette décomposition développe une énergie de gaz. Les effets ressentis sur l’environnement sont mécaniques et correspondent à ceux d’une poussée. La poudre noire comprimée est l’explosif déflagrant type, qui est utilisé uniquement dans les carrières d’extraction de produits ornementaux (marbre, granit).

Détonation La réaction chimique d’un explosif, déclenchée par une onde de choc ou par la chaleur, dégage un grand volume de gaz porté à haute température et conduit à la formation d’une onde de détonation. La propagation de la détonation est considérée comme la résultante d’une onde de choc et d’une onde de combustion (front de gaz). Les caractéristiques du processus sont : – une réaction exothermique (production de gaz entre 1 000 et 4 000°) ; – une vitesse de propagation de la détonation de l’ordre de 103 à 104 m/s ; – la production d’un grand volume de gaz.

Classification des explosifs On distingue, généralement, deux types de classification : les effets produits par les explosifs et l’énergie nécessaire à leur décomposition.

Les effets produits par les explosifs • Déflagrant : la transformation chimique de la matière est plus lente que le transfert thermique. La poudre noire est un explosif déflagrant, dont la vitesse de détonation est inférieure à 1 000  m/s. Elle est utilisée dans l’extraction de pierres ornementales. La faible poussée de la poudre permet de séparer la quantité désirée de matière de son gisement, sans altération. • Détonant  : la décomposition explosive se propage à la fois avec l’onde de choc et par la réaction de combustion. La vitesse de détonation des explosifs utilisés dans le BTP est supérieure à 1 000 m/s. (Fig. 1)

vées pendant une période de dix ans à compter de la livraison ou de la date d’utilisation ou de destruction du produit explosif, même si l’entreprise concernée a mis fin à son activité.

Figure 1 Vitesse de détonation des principaux explosifs

Variétés d’explosifs Nous retrouvons, dans les explosifs commerciaux courants, deux familles.

L’énergie nécessaire à la décomposition des explosifs • Primaire : explosif sensible qui, sous une faible énergie extérieure, atteint immédiatement le régime de la détonation. Les explosifs primaires sont contenus dans les détonateurs (ex. azoture de plomb, fulminate de mercure). • Secondaire : la détonation de ce type d’explosif ne peut avoir lieu que par une énergie explosive initiale. Selon la sensibilité de l’explosif secondaire (ou dit «  de chargement »), il est nécessaire de l’initier par un détonateur ou par un «  booster  », qui est une charge d’explosif solide puissant (tolite, pentolite, TNT, etc.).

Réglementation Les produits explosifs mis sur le marché doivent être certifiés CE. Ils doivent, en outre, être autorisés à l’emploi (Décret n° 2010-455 du 4 mai 2010 relatif à la mise sur le marché et au contrôle des produits explosifs). Le décret n° 2012-1238 du 07/11/12 relatif à l’identification et à la traçabilité des explosifs à usage civil complète les dispositions relatives à l’identification. La partie « Identification des explosifs » est entrée en vigueur le 5 avril 2013. Les dispositions relatives à la traçabilité entreront en vigueur le 5 avril 2015. Ce nouveau texte précise que :

• Les dynamites. Elles sont constituées de nitroglycérine (pourcentage variable de 10 à 90  %). Les produits actuellement commercialisés contiennent de moins en moins de nitroglycérines et sont complétés par du nitrate d’ammonium. Ce sont des produits utilisés plus rarement en raison de leur toxicité, de leur sensibilité au choc et aux amplitudes thermiques. La dynamite conserve l’avantage de posséder une forte vitesse de détonation (4 000  à 6 000 m/s) ainsi qu’une bonne résistance à l’humidité (Fig. 2). • Les explosifs nitratés. Ils sont constitués de nitrate d’ammonium (environ 80 %) associé à un explosif tel que le TNT ou la pentrite, et que l’on trouve sous différentes formes : en granulés pour les nitrates-fuels, en pâte pour les gels et, également, en liquide pour les émulsions. Ce sont des explosifs peu sensibles aux chocs, mais sensibles à l’humidité. Leur vitesse de détonation varie de 3 500 m/s pour les nitrates-fuels à 6 000 m/s pour les émulsions. –– Les nitrates-fuels ordinaires Le nitrate-fuel est composé de 94 % de nitrate d’ammonium et de 6 % de fuel. Ce produit se présente sous la forme de granulés. Il est livré en vrac, en sac de 25 kg. Le nitrate-fuel est versé directement dans le trou de mine vertical ou par procédé pneumatique pour les trous horizontaux (Fig. 3). La vitesse de détonation du nitrate-fuel est de l’ordre de 3 500 à 4 000 m/s. L’effet recherché par la détonation est une

Figure 2 Explosif encartouché dynamite

Lorsqu’un produit explosif fait l’objet de processus ultérieurs de fabrication, les fabricants ne sont pas tenus d’apposer une nouvelle identification unique sur le produit explosif, à moins que l’identification unique originale n’apparaisse plus de manière lisible sur l’un au moins des sous-ensembles unitaires du produit. Cela concerne donc les utilisateurs d’UMFE, dont la fabrication sur site relève de l’absence d’une nouvelle identification sur le produit explosif produit. Par contre, les entreprises qui fabriquent des produits explosifs mettent en place un système de traçabilité constitué de la collecte de données sur ces produits, y compris leur identification unique tout au long de la chaîne logistique et de leur durée de vie. Les données collectées, y compris le numéro d’identification unique, sont enregistrées et conser-

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Figure 3 Nitrate-fuel ordinaire

Utilisation des émulsions et du système MORSE La production de l’explosif se fait uniquement à l’extrémité du flexible de pompage chargeant le trou de mine. La mise à feu est réalisée par un dispositif de transmission d’onde de choc (DTOC).

Pas de transfert d’explosifs • Sécurisation de l’usage des explosifs : réduction de la manipulation de produits pyrotechniques, suppression des ateliers de préconditionnement de charges, stockage réduit sur site. • Facilité de chargement, rapidité de mise en œuvre.

Inconvénients poussée (front de gaz) sur le matériau fragilisé par l’onde de choc d’un explosif de charge postérieure plus puissant (dynamite, émulsion). √√  Caractéristiques : – La faible sensibilité au choc ne permet pas d’amorcer directement le nitrate-fuel avec un détonateur. Il est nécessaire de l’amorcer par une charge amorce ou un cordeau détonant de 18 gr/m minimum. – Une grande sensibilité à l’eau le rend inutilisable dans les trous contenant de l’eau. – Il est déconseillé d’utiliser le nitrate-fuel dans les endroits mal aérés en raison de la forte quantité de vapeurs nitreuses toxiques qui s’échappent lors de la détonation du produit. Il est important d’attendre l’évacuation des fumées avant de reconnaître le chantier. – Le stockage du nitrate-fuel doit éviter toute mise en contact avec des matières organiques. – Le diamètre critique du nitrate-fuel est de l’ordre de 40 mm minimum. Il est impératif que le trou de chargement soit supérieur à cette valeur.

• Énergie massique un peu faible dans certaines roches par rapport à la dynamite.

Inconvénients de l’utilisation des émulsions et du système MORSE • Dégagement de gaz de nature différente et en quantité plus importante par rapport à l’utilisation de la dynamite : – ammoniac (NH3) ; – monoxyde de carbone (CO) ; – pas de vapeurs nitreuses (NOx).

Figure 4 Fabrication d’explosif avec une UMFE

–– Les nitrates-fuels alourdis Il s’agit d’un mélange de nitrate-fuel (granulé) et d’émulsion liquide. La proportion entre les deux produits modifie leur texture, leur sensibilité au choc et à l’humidité. √√  Moins de 50  % d’émulsion dans le mélange : le nitrate-fuel alourdi se présente sous forme de granulé enrobé. Il est sensible à l’humidité. √√  Au-delà de 50 % d’émulsion dans le mélange : le nitrate-fuel alourdi s’épaissit. Il est pompable. Le produit est insensible à l’eau. Les nitrates-fuels alourdis sont généralement de faible densité ; cela peut poser des problèmes de remplissage des trous s’ils contiennent de l’eau. –– Les émulsions Elles sont constituées d’un mélange de solution aqueuse de nitrate d’ammonium de l’ordre de 80 à 90  % (comburant) avec une matrice liquide à base de 4 à 10 % d’huile minérale (combustible) et de paraffine contenant une faible proportion d’émulsifiant. Sous cette forme, l’émulsion mère n’est pas explosive. La sensibilité de l’émulsion mère sera assurée par un ajout de gaz (gazéification) ou par ajout de microbilles de verre creuses.

Le produit est insensible à l’eau et peu sensible aux chocs. L’amorçage doit être réalisé à l’aide d’un booster, ou d’une charge amorce dans le cas des émulsions sous forme de vrac. Par contre, les émulsions peuvent être sensibles à la pression (Il sera important de prendre en compte ce critère pour un emploi subaquatique.). Pour limiter ce risque, il est préférable d’utiliser des émulsions contenant des microbilles de verre qui résisteront à la pression.

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Les émulsions se présentent soit en cartouches, amorçables par un détonateur et qui peuvent avoir une vitesse de détonation proche de celle des dynamites (de l’ordre de 6 000 m/s), soit en vrac (mode pompable). Dans ce dernier cas, leur mise en place est réalisée par une unité mobile de fabrication d’explosifs (UMFE, Fig. 4). Certaines unités UMFE peuvent également permettre une sécurité de fabrication supplémentaire. Il s’agit du système MORSE (module de repompage et de sensibilisation des émulsions) qui rend l’émulsion explosive uniquement dans le trou de chargement. Ce système réduit considérablement le rayon de sécurité, qui se trouve limité à celui de la matière introduite dans le trou au fur et à mesure de son chargement.

Caractéristiques des explosifs Plusieurs critères caractérisent les explosifs. Ils permettent de connaître : •  les effets attendus d’un explosif (énergie choc, énergie gaz, etc.) pour rechercher un rendement maximum ; • leur sécurité d’emploi en évitant les ratés ; • leur sécurité de transport et de stockage. Les explosifs sont des substances utilisées pour leurs effets destructeurs (fragmentation de roches, démolition…), et leur conception y est donc dédiée par intention. Lors de leur conception, il est nécessaire de respecter des objectifs de sécurité très stricts qui sont validés par des épreuves ou essais déterminant leurs propriétés spécifiques.



Le cordeau détonant Il s’agit d’un explosif qui se présente sous la forme d’un cordeau plastifié. Son rôle est de transmettre la détonation initiée par un détonateur à une charge d’explosif. Il est également utilisé comme explosif de chargement (pour les tirs de post- ou prédécoupage). Il contient de la pentrite (vitesse de détonation 7 000 m/s). Pour des travaux spéciaux (découpage de métaux, sous forte pression dans le cas des forages pétroliers), l’explosif contenu dans le cordeau détonant est de l’exogène. La quantité d’explosif (pentrite) contenue dans le cordeau détonant varie de 3 à 70 g/m. Le plus fréquemment utilisé contient 12 g/m. Les plus gros (40 g/m) sont utilisés pour le découpage de massif. Les petits cordeaux (3 à 8 g/m) servent à la transmission de la détonation (amorçage d’un tube conducteur d’onde de choc) ou à des travaux particuliers (démolition dans un bâtiment).

La densité C’est le rapport de la masse d’un certain volume d’un corps à celle du même volume d’eau. Cette notion vaut aussi bien pour les explosifs encartouchés que pour les explosifs en vrac. On distingue la « densité d’encartouchage », utilisée pour les explosifs encartouchés, et la « densité de chargement », qui correspond à la quantité d’explosifs logée dans une cavité de volume donné. Sur un plan pratique, la densité d’un explosif permet de savoir s’il sera facilement introduit dans un trou rempli d’eau ou de boue (une densité inférieure à 1 rend plus difficile l’introduction de l’explosif). Mais, sur le plan efficacité de la matière explosive, la densité est un des facteurs influençant la fragmentation des roches. C’est un paramètre important puisqu’il conditionne la quantité maximale d’explosifs pouvant être chargée dans un trou de mine. L’énergie volumique peut donc être affectée par des variations non négligeables de la densité. La vitesse de détonation est également influencée par la densité. La densité de chargement a un rôle important sur la pression maximale de détonation et, par conséquent, sur l’énergie de choc. Exemple : dans le cas des émulsions fabriquées sur site (UMFE ou MORSE), ces dernières deviennent sensibles lorsque la densité est inférieure à environ 1,15. On parle alors de densité critique. Au-dessus de 1,15, le nombre et la taille des bulles d’azote produites ne sont pas suffisants pour permettre la propagation de la détonation de proche en proche. Le contrôle de la gazéification de l’émulsion (donc de sa densité) est le seul moyen de s’assurer que le produit sera conforme aux attentes.

La résistance à la chaleur L’élévation de température peut entraîner des changements de condition physique des explosifs ainsi qu’un dégagement de gaz nocifs. La nitroglycérine contenue dans la dynamite peut provoquer des céphalées plus ou moins fortes. De plus, des risques de pénétration percutanée sont à craindre et il est conseillé de se munir de gants spéciaux. La chaleur peut provoquer une exsudation de la nitroglycérine dans les dynamites. La cartouche devient alors extrêmement sensible au choc ; il convient de ne pas utiliser ces cartouches et de les éliminer de manière appropriée. L’effet le plus courant d’une élévation de température (3040 °C) est un ramollissement de la cartouche et une accélération du vieillissement de l’explosif. Pour les émulsions, la résistance à la chaleur est bonne et elles peuvent être mises en œuvre sans problème jusqu’à + 60 °C. Néanmoins, leur stockage ne peut être maintenu à cette température.

La résistance au froid

Figure 5 Cordeau détonant

Le froid augmente les contraintes de friction par la cristallisation de la nitroglycérine. Ainsi, la sensibilité au choc de la dynamite s’en trouve fortement augmentée. La substitution partielle de dinitroglycol par la nitroglycérine (en proportion 50/50) assure de bonnes propriétés (jusqu’à - 25 °C). La sensibilité des émulsions est garantie jusqu’à - 10 °C sans conditions spéciales. Cependant, pour une utilisation infé-

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rieure à - 10 °C, il est nécessaire de renforcer l’amorçage. Le froid rend également plus difficile le perçage des cartouches en raison de l’augmentation de leur rigidité.

La résistance à l’eau L’humidité réduit la sensibilité à l’amorce et l’aptitude à la transmission de la détonation. Les gels y sont pratiquement insensibles, les dynamites-gommes également. Les explosifs nitratés sont moins résistants à l’eau. Le nitrate-fioul est soluble dans l’eau et son utilisation est impossible lorsque les trous de mine contiennent de l’eau.

La durée limite de conservation Au bout d’une certaine durée de stockage, certains explosifs peuvent devenir dangereux ou perdre leurs qualités explosives. À quelques exceptions près, la durée limite de conservation des explosifs n’est pas fixée réglementairement. Il est conseillé de se renseigner auprès des fabricants et de se procurer, lorsqu’elle existe, la fiche de données de sécurité. En général, ils préconisent de ne pas dépasser une durée de 6 à 12 mois entre la date de fabrication et la date du tir. Concernant le stockage des émulsions fabriquées sur site par UMFE ou Morse, la réglementation ICPE (installations classées protection de l’environnement) impose que des aménagements soient prévus au niveau du stockage des matières premières avec des bacs de rétention.

Les propriétés de sensibilité Ces propriétés caractérisent l’aptitude du produit à amorcer et à propager la détonation en sécurité dans les conditions normales d’utilisation prévues par le fabricant.

La vitesse de détonation Elle donne une idée de la puissance du produit (ex : nitrate-fuel = 3 500 m/s ; émulsion = 5 000 m/s ; pentrite = 7 000 m/s).

L’énergie dégagée par l’explosif Elle est estimée au moyen de différents tests. • Coefficient d’utilisation pratique (CUP) : test qui consiste à faire détoner un explosif dans un bloc de plomb et à comparer l’évasement provoqué par la détonation avec celle d’un explosif de référence (CUP =  100 pour l’acide picrique). • Test mortier balistique (TMB) : pendule dont le déplacement varie avec la détonation de l’explosif étudié par rapport à la mélinite, l’explosif de référence. • Test en piscine, plus réaliste et qui peut fournir l’énergie choc fournie par l’explosion de la matière ainsi que l’énergie gaz. Il est possible de connaître l’onde de choc ainsi que le volume de gaz de l’explosion. Cela permet de savoir si l’explosif utilisé développe plus d’effet choc que de front de gaz. Selon la matière, le choix et le paramétrage de la charge unitaire utilisée optimiseront le tir. Les valeurs du test piscine sont indiquées sur la fiche commerciale du produit. C’est un critère d’achat important.

Le diamètre critique C’est le plus petit diamètre de matière explosive à partir duquel la détonation d’un explosif peut se propager, à l’air libre.

Le diamètre critique d’un produit dépend de la nature et de la densité de cette substance. Bien que l’utilisation dans un trou de mine puisse, du fait du confinement exercé par les terrains, abaisser la valeur du diamètre critique de détonation de l’explosif, il est souhaitable que le diamètre du trou soit supérieur au diamètre critique de détonation mesuré à l’air libre. Certains nitrates-fuels ayant un diamètre critique de 50 mm ne peuvent pas être utilisés dans des mines de petits diamètres.

La sensibilité à l’amorçage C’est l’aptitude de l’explosif à détoner sous l’effet d’une onde de choc. Dans la pratique, on distingue les explosifs qui sont sensibles à un détonateur seul, contenant 0,8 g de pentrite, et ceux qui n’y sont pas sensibles. Ces derniers nécessitent un amorçage par une cartouche amorce, un booster ou un cordeau détonant contenant de 10 à 20 g de pentrite par mètre. La sensibilité à l’amorce dépend de la densité de l’explosif. Un explosif peut devenir insensible à son mode d’amorçage habituel s’il n’est pas assez comprimé (cas du nitrate-fuel), ou au contraire trop comprimé (dynamite). Les explosifs peu sensibles ont besoin d’une énergie d’activation très importante pour développer et transmettre le régime de détonation. Les pertes d’énergie latérales sur les cartouches de petit diamètre sont très fortes et la transmission de la détonation n’est plus correctement assurée. À puissance égale, l’aptitude à transmettre la détonation sera d’autant plus faible que la sensibilité à l’amorce sera faible.

Le coefficient de self-excitation (ou CSE) C’est l’aptitude à transmettre la détonation d’une cartouche à une autre placée à une certaine distance et dans son prolongement. Ce coefficient est évalué en mesurant la distance en centimètres, qui correspond à une probabilité de détonation de 50  % entre une cartouche amorcée et une cartouche non amorcée, placée dans le prolongement de la première. Une valeur de CSE trop faible entraîne des risques de raté par arrêt de détonation dans les files de cartouches placées dans le même trou de mine, suite à une mauvaise continuité des cartouches.

La résistance à la compression Les conditions de pression auxquelles est soumis un explosif peuvent influer sur l’amorçage et la transmission de la détonation. Statique ou dynamique, la pression résulte : • soit des effets de points chauds provoqués par l’onde de choc ; • soit des conditions de chargement (chargement en grande hauteur, chargement sous forte profondeur dans l’eau, condition de pression initiale des terrains…) ; • soit des effets de l’onde de choc provoquée par une charge voisine. Au-delà d’une certaine limite de pression, certains explosifs peuvent ne plus détoner. Cette pression limite est spécifique à chaque explosif.

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Utilisation des explosifs Le choix d’un explosif est déterminé par les travaux à réaliser. Une connaissance de la matière à détruire, à déplacer, à couper, etc., est nécessaire. L’explosif peut apporter une onde de détonation qui fissure et ébranle un massif, ou plutôt un front de gaz qui pousse la matière préalablement ébranlée. Il est également possible de découper ou de percer de la matière métallique (charpente) à l’aide de faibles quantités d’explosif en charges préformées (charge creuse, de découpage) ou bien de dérocter les fonds marins à l’aide d’explosifs. Pour cela, la puissance, la densité, l’insensibilité à l’eau seront les critères de choix principaux. L’utilisateur prendra également en compte la texture du produit explosif (vrac, pour une occupation maximale du trou de minage, ou encartouché pour des explosifs plus puissants, résistants à l’eau), mais également la nocivité constitutive des produits utilisés ou provoquée par leur détonation. Les explosifs sont utilisés principalement pour extraire et concasser de la roche. Quand une charge détonne, l’explosif solide est alors transformé à très grande vitesse (1 800 à 2 200  m/s) en gaz à haute pression (600 à 900 MPa). En contact avec la paroi, ce gaz crée une onde de choc au niveau de la roche, qui se propage dans le massif sous forme de contrainte compressive isotrope en s’atténuant au fur et à mesure que l’on s’éloigne du point d’explosion. Cette contrainte permet un broyage complet de la roche sur une distance de 3 à 5 cm de diamètre du trou. Cette contrainte diminue en s’éloignant du trou de mine et ne développe plus qu’un réseau de fracture radiale sur une distance de l’ordre du mètre. Au-delà, le champ de contraintes se propage sans provoquer de rupture, mais simplement un mouvement oscillatoire de la matière (vibrations). Quand l’onde de choc compressive rencontre une discontinuité comme un front de taille, elle se réfléchit en traction et permet une fracturation parallèle au plan de la discontinuité (écaillage) qui, en se propageant, va croiser le réseau de fissurations radiales initialement formées. Le travail de l’onde de choc est donc d’autant plus efficace que l’on dispose de beaucoup de plans de discontinuité où peuvent se réfléchir les ondes, en particulier les surfaces libres. Le travail des gaz succède à celui de l’onde de choc. Les gaz qui pénètrent dans le réseau de fracturation l’ouvrent et se détendent en disloquant le massif et en projetant au

Tir de mine

loin les blocs rocheux. Le travail des gaz complète donc celui de l’onde de choc mais si ce dernier est insuffisant, les gaz ne peuvent travailler correctement et le tir rate. Par ailleurs, l’énergie développée au cours d’un tir se partage en deux : • une énergie utile et recherchée, qui fissure, fragmente et expulse la roche ; • une énergie nuisible se dissipant dans l’environnement en nuisances diverses, notamment en vibrations. À énergie égale, toute mesure permettant d’augmenter la part d’énergie utile, c’est-à-dire d’optimiser un tir, contribuera à diminuer la part d’énergie nuisible. De même, si on conçoit mal un tir, c’est-à-dire si on dimensionne mal ses divers paramètres (nature des explosifs employés, répartition des charges dans l’espace, dans le temps…) au regard des contraintes (nature du massif rocheux, blocométrie recherchée), on augmentera de manière importante les nuisances.

Effets sur la santé Les explosifs sont des composés chimiques qui peuvent provoquer des effets indésirables sur la santé au contact de la peau ou par inhalation, mais également par la production de gaz toxiques lors des explosions.

Concernant les dynamites La manipulation de la dynamite engendre, soit par inhalation, soit par contact cutané, des symptômes, tels que de violents maux de tête, contre lesquels il convient de se prémunir. Le port de gants est impératif. Un syndrome de surcharge ou d’accoutumance à la nitroglycérine peut également apparaître. La manipulation de l’explosif doit se faire dans un lieu aéré et correctement ventilé. La concentration de nitroglycérine doit être inférieure à la valeur moyenne d’exposition (VME) suivante : VME nitroglycérine = 0,1 ppm (1 mg/m3) Les salariés doivent également respecter les règles d’hygiènes élémentaires, telles que se nettoyer régulièrement les mains et ne pas manger à proximité de matière explosive.

Concernant les explosifs nitratés La nocivité des explosifs à base de nitraté d’ammonium réside essentiellement dans les gaz qui résultent de l’explosion de ces produits. Ils provoquent des vapeurs nitreuses NOx (vapeurs nitreuses NOx = NO + NO2) extrêmement toxiques et une production importante de dioxyde et de monoxyde de carbone. Il est important de ne pas respirer les gaz issus de l’explosion (ne pas se placer sous le vent lors de l’explosion). Il faut attendre l’évacuation totale des gaz en lieu confiné et le temps réglementaire minimum pour reconnaître un chantier aérien. Il est également essentiel de considérer la toxicité des gaz d’explosion lors de tirs souterrains. L’usage des émulsions peut engendrer des dégagements d’ammoniac dès le chargement (réaction de l’émulsion avec la chaux des bétons), dans les fumées et durant les phases de marinage, dans le cas des travaux souterrains.

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Les différents symptômes observés en fonction de la concentration dans l’air et de la durée d’exposition aux vapeurs nitreuses ou oxydes d’azote Parties par million (cm3/m3)

Durée d’exposition

Symptômes et risques

0,1

Seuil de l’odorat

0,5

Odeur caractéristique

5

Concentration maximale admissible dans l’air en industrie

10 à 40

Faible irritation

80

3 à 5 minutes

Oppression au niveau du thorax

90

30 minutes

œdème pulmonaire

100 à 200

30 à 60 minutes

Très dangereux

250

quelques minutes

Mort

Les différents symptômes observés en fonction de la concentration dans l’air et de la durée d’exposition au monoxyde de carbone Parties par million (cm3/m3)

Durée d’exposition

Symptômes et risques

50

8 heures

néant

100 200

sans danger occasionnellement 2 heures

1 000

nausées, céphalées, vertiges, difficultés respiratoires intoxication grave

2 000

4 à 5 heures

mort

4 000

1 heure

mort

5 000

20 minutes

mort

10 000

1 minute

mort

Les symptômes Les vapeurs nitreuses ou oxydes d’azote Les symptômes immédiats peuvent se limiter à quelques troubles irritatifs : toux, picotements, larmoiements, irritation oculaire et pharyngée. Ces symptômes s’arrêtent dès que l’intoxiqué est mis à l’air libre. Il peut alors reprendre son activité malgré une légère lassitude, mais 2 à 36  heures plus tard, il risque de présenter des troubles graves signant un

Fig. 6 Brumisation pour neutralisation de l’ammoniac dans un tunnel

œdème pulmonaire aigu : toux, cyanose, expectoration rosée ou jaune saumonée, anxiété, sueurs froides, forte soif. La mort survient dans la plupart des cas en 24 à 48 heures. À signaler : les vapeurs nitreuses sont solubles dans l’eau (par brumisation dans les souterrains (Fig. 6).

Le monoxyde de carbone Le monoxyde de carbone (CO) est la cause d’intoxications très fréquentes. Ce gaz est d’autant plus redoutable qu’il est incolore, inodore, sans saveur et non irritant. Ses effets toxiques sont dus à l’hypoxie tissulaire (c’est-à-dire un manque d’oxygène des tissus). L’affinité de l’hémoglobine (notre principal transporteur d’oxygène dans le sang) pour l’oxyde de carbone est deux fois supérieure à celle de l’oxygène.

L’association oxyde de carbone-vapeurs nitreuses La toxicité totale est supérieure à celle de chacun des constituants.

L’ammoniac NH3 Le gaz ammoniac (NH3) est incolore, à odeur piquante, plus léger que l’air (densité de vapeur = 0,59), et qui se liquéfie facilement ; les solutions obtenues sont appelées ammoniaque (NH4OH). L’ammoniac présente des risques de toxicité par inhalation, ingestion ou par voie cutanée. C’est un puissant irritant des voies respiratoires et il provoque également une irritation immédiate des muqueuses oculaires. On peut le sentir à des concentrations allant de 0,6 à 53 ppm. Les brûlures

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chimiques dues à l’ammoniaque (solution) sont  liées à son caractère basique (pH de l’ordre de 11). Une exposition à des concentrations élevées provoque une irritation trachéo-bronchique (toux, essoufflement de type asthmatiforme, parfois des spasmes bronchiques pouvant être responsables d’une détresse respiratoire). Des complications à court ou moyen terme sont possibles : • un œdème aigu du poumon (OAP) survenant habituellement entre la 6e et la 24e heure, avec insuffisance respiratoire aiguë par hypersécrétion bronchique ; • une surinfection bactérienne ; • un œdème et une ulcération des muqueuses nasales, pharyngée et laryngée.

L’atteinte oculaire, quant à elle, se traduira par des larmoiements, une rougeur conjonctivale, voire des ulcérations conjonctivales et cornéennes, une cataracte. Des brûlures chimiques peuvent également survenir sur les parties découvertes de la peau, provoquées par la dissolution des vapeurs d’ammoniac due à l’humidité de la peau qui forme de l’ammoniaque corrosive pour le revêtement cutané. Si l’exposition à l’ammoniac est prolongée et répétée, cela entraîne une tolérance. L’odeur et les effets irritants du gaz sont perçus à des concentrations plus élevées qu’initialement. Par contre, l’ammoniac ne s’accumule pas dans l’organisme. Il n’y a aucun effet significatif sur l’appareil respiratoire pour une exposition au gaz sur une longue période.



Valeurs limites d’ammoniac Les valeurs limites réglementaires de concentration d’ammoniac sont contraignantes. Des valeurs limites d’exposition professionnelles (VLEP) dans l’air des locaux de travail ont été établies pour l’ammoniac (art. R.4412-149 du Code du travail). Au-dessous de ces concentrations, le risque d’altération de la santé est considéré comme suffisamment négligeable. – Valeur limite à court terme (VLCT) mesurée sur 15 minutes : 20 ppm ou 14 mg/m3. –V  aleur limite de moyenne exposition (VME) mesurée sur 8 heures : 10 ppm ou 7 mg/m3. –V  aleur limite à court terme mesurée sur 15 minutes : 20 ppm, soit 14 mg/m3.



Bibliographie • Travaux à l’explosif – CPT Généralités. Ouvrage D5 G 02 12, OPPBTP, octobre 2012.

• Travaux à l’explosif – CPT 1 Option travaux souterrains. Ouvrage D5 G 01 12, OPPBTP. • Détonateurs électriques. Fiche prévention D5 F 01 10, OPPBTP.

• Contrôle du circuit de tir lors du tir électrique. Fiche prévention D5 F 02 11, OPPBTP.

• Tir au cordeau détonant. Fiche prévention D5 F 03 10, OPPBTP.

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• Décret n° 2010-455 du 4 mai 2010 relatif à la mise

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• Guide de mise en œuvre des explosifs en milieu subaquatique. Synduex, décembre 2008.

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