la régulation du système éducatif - Site en construction

... de A. Vvan Zanten,. Paris, Presses Universitaires de France (2008). .... plupart des États (voir la liste en fin de document). L'enga- ... une régulation démocratique (plurielle, contextualisée et partenariale). ...... République centrafricaine • Chypre • Comores • Congo • République démocratique du Congo • Côte d'Ivoire • Dji-.
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LA RÉGULATION DU SYSTÈME ÉDUCATIF : UNE OBLIGATION POUR ATTEINDRE L’ÉQUITÉ ET AMÉLIORER LA QUALITÉ

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SOMMAIRE

Des scénarios préoccupants

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Le concept de régulation

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Des enjeux importants de la régulation

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Les modes et les champs de la régulation du système éducatif

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Les acteurs régulateurs

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Les outils de régulation

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Conclusion : une question de volonté politique et un pilotage participatif

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Annexes 31 

DES SCÉNARIOS PRÉOCCUPANTS

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DU NORD AU SUD, quel que soit le contexte éducatif, on constate régulièrement combien l’idéal d’équité et de qualité dans l’éducation est mis à mal. Dans tous les domaines et à tous les échelons du système éducatif, des scénarios préoccupants foisonnent et indiquent une nécessité constante de s’interroger sur les moyens de maintenir un dispositif efficace de régulation.

UNE QUALITÉ ÉBRANLÉE La pauvre qualité de trop nombreuses écoles publiques et privées, pour lesquelles les parents paient cependant d’une façon ou d’une autre, est d’abord perceptible au niveau des infrastructures et des ressources, surtout dans les pays en développement. Ainsi, trop de classes se résument à quatre murs et un toit de paille, qui ne résistent pas à la saison des pluies (pas loin de 50% dans certains pays) ; trop souvent, le sol est de terre battue ; les bancs sont trop peu nombreux pour accueillir décemment les élèves dont les effectifs sont pléthoriques ; le tableau noir est minuscule et grumeleux et constitue le seul matériel didactique ; les latrines sont inexistantes… Quand les enseignants sont peu, voire pas du tout, formés, la qualité de l’éducation est directement menacée. Dans des pays où plusieurs langues coexistent, on assiste à un tel brassage des populations, qu’il est très fréquent de voir réunis dans une même classe des enfants de langues maternelles différentes. Très souvent, l’enseignant affecté dans ces classes ne maîtrise correctement aucune des langues maternelles de ses élèves, ou est incapable de faire converger langue maternelle et langue d’enseignement. Pire encore, les examens nationaux conduits auprès des candidats enseignants révèlent fréquemment que ceux-ci ont d’énormes difficultés à maîtriser la langue officielle dans laquelle ils sont censés enseigner et, dans le cas des mathématiques, à résoudre des opérations ou des problèmes simples. Ces éléments, parmi bien d’autres, ne permettent pas d’instaurer un environnement éducatif de qualité. Et ils ne sont pas spécifiques aux pays en développement. Un peu partout dans le monde, l’incapacité des enseignants à adapter leur pédagogie aux élèves et aux conditions éducatives, les mauvais résultats scolaires, un environnement où règne l’indiscipline, voire la violence, sont autant d’éléments qui viennent ternir la qualité de l’éducation. La qualité de l’éducation est une problématique mondiale : quel que soit le niveau de développement socioéconomique atteint, le maintien de la qualité exige un effort constant. De la même manière, les disparités territoriales qui existent un peu partout, entre régions, villes

ou quartiers, témoignent qu’à la question de la qualité s’adjoint celle de l’accès, l’accès à une école qui offre un enseignement de qualité.

DE GRAVES DISPARITÉS DANS L’ACCÈS Le maillage territorial L’insuffisance du nombre d’écoles et de classes sur le territoire national oblige les enfants à parcourir de longues distances, souvent sur de mauvaises voies de communication, non sécurisées et impraticables en cas d’intempéries (saison des pluies). Elle favorise de ce fait la non-scolarisation ou, au mieux, un absentéisme chronique. Dans l’enseignement secondaire, les difficultés des régions à offrir certaines disciplines ou options viennent renforcer les lacunes infrastructurelles existantes (au Sud) ou souligner les inégalités territoriales (au Nord).

Des facteurs socioculturels Si la plupart des pays ont fait de gros efforts pour accroître le nombre d’écoles, l’accès à celles-ci est encore trop souvent fermé à certains publics. C’est le cas des filles, retenues pour les travaux domestiques quotidiens, ou pour des raisons culturelles ou religieuses. C’est aussi le cas quand l’école n’a pas été construite autour d’un point d’eau : les filles étant le plus souvent chargées de l’approvisionnement de la famille en eau, le site même de l’école représente un obstacle à leur scolarisation, surtout dans le monde rural. La conjoncture également peut être en cause : toujours dans le monde rural, si les horaires d’enseignement sont incompatibles avec certains travaux, comme les travaux saisonniers, les enfants sont déscolarisés, réquisitionnés pour aider leur famille. Lorsque des enseignants ne parviennent pas à s’intégrer dans la communauté au sein de laquelle ils doivent travailler, ou qu’ils se mettent à dos les autorités locales, c’est la survie de l’école tout entière qui est menacée. Parfois, leurs comportements poussent les familles à ne

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pas scolariser ou à déscolariser leurs enfants, particulièrement les filles. Mais ils peuvent également être rejetés parce qu’ils ne parlent pas la langue locale, qu’ils ne sont pas originaires du village ou de la région où ils sont affectés ; ne pouvant directement chasser les enseignants, les parents peuvent décider de garder les enfants à la maison.

Le fonctionnement de l’école Alors même qu’elle est censée être gratuite dans les textes officiels, dans les faits, l’école reste payante et inabordable pour nombre de familles. Dans les pays où les écoles ont une certaine autonomie, on constate qu’elles font des choix (frais de scolarité, langues d’enseignement, activités extrascolaires…) qui fonctionnent comme des stratégies d’évitement de certains publics, et qui se résument à de la ségrégation et à de la discrimination scolaires. Quand le recrutement des élèves (par les écoles) et le choix de l’école (par les parents) sont libres, les écoles mettent au point des pratiques de recrutement pour s’assurer les meilleurs publics scolaires, garantir ainsi les meilleurs résultats et maintenir leur réputation. Délibérément ou involontairement, elles encouragent les parents à mettre au point des stratégies de contournement des politiques d’accès (comme la sectorisation en fonction du domicile). Dans le secondaire, la combinaison du maillage territorial inégal des disciplines et des options rares avec le principe d’accès à l’école (sectorisation ou pas) est une subtilité supplémentaire qui prévaut dans la ségrégation des publics scolaires.

UNE DIVERSIFICATION DU CHAMP SCOLAIRE CENSÉE AMÉLIORER LA QUALITÉ ET L’ACCÈS Du Nord au Sud, en raison des défis que posent l’accès et la qualité, de nombreux opérateurs interviennent dans l’éducation. Dans les pays les plus démunis, des opérateurs paraétatiques, les communautés locales, des ONG, des instances religieuses ou des entreprises privées participent à l’offre éducative en construisant des écoles, en formant et rémunérant des enseignants, ou encore en donnant aux écoles diverses ressources, parfois dans le cadre de projets de développement intégrés. Dans les pays les mieux lotis, les collectivités territoriales interviennent en dotant les écoles en personnel d’appui, ce qui, malgré les normes en vigueur, peut varier considérablement d’une collectivité à l’autre du fait des dispa-

rités budgétaires entre régions. Avec les politiques de décentralisation en vigueur dans certains pays, il arrive que des projets d’éducation ciblés en direction des élèves en difficulté viennent accompagner l’action éducative territoriale. Pour que ces projets soient bénéfiques et participent à la diversification du champ scolaire, il faudrait qu’il y ait une bonne coordination entre les instances éducatives nationales (centrale ou déconcentrées) et les collectivités locales, que les personnels soient formés et bien informés, autrement les activités pédagogiques de soutien ou le suivi des élèves risquent de ne pas être adaptés et de ne pas jouer leur rôle complémentaire pour favoriser la réussite des élèves, voire, qu’elles contribuent à renforcer les inégalités éducatives.

UNE MARCHANDISATION EN MARCHE Dans ce champ scolaire diversifié, les opérateurs privés, internationaux ou locaux, sont de plus en plus nombreux. Des consortiums internationaux se sont spécialisés dans la vente d’éducation. De nombreuses personnalités locales (dont beaucoup d’enseignants et même des autorités éducatives) créent des écoles à des fins lucratives, se tournant tantôt vers des familles aisées avec des slogans vantant la qualité, tantôt vers des publics délaissés ou défavorisés avec des slogans altruistes, qui cachent souvent mal le caractère lucratif ou politique de leur entreprise. Dans un certain nombre de pays, l’enseignement public est quelquefois complice de cette tendance, soit en jouant lui-même le jeu du privé par l’instauration de droits d’inscription dissuasifs (souvent officiellement interdits), soit en acceptant comme une fatalité le fait d’être d’une qualité moindre que le privé et d’être donc réservé à une population peu favorisée. On voit surtout des phénomènes de quasi marché apparaître.

LES MENACES SUR LE RÔLE DE L’ÉDUCATION DANS LA CONSTRUCTION D’UNE IDENTITÉ COMMUNE Dans les pays du Sud, dont les frontières ont souvent été délimitées arbitrairement à l’issue d’un processus de décolonisation, l’identité commune est fragilisée, comme en témoignent les conflits armés, ou les tensions religieuses et ethniques. Dans les pays du Nord, où l’on constate une forte ségrégation urbaine et une ghettoïsation de certaines couches de la population, des revendications s’expriment par la violence ou par un rejet de l’État et de ses institutions, dont l’école. Certains opérateurs du système

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éducatif peuvent aggraver cet état de fait en utilisant l’école pour encourager différentes formes de communautarismes séparatistes de nature religieuse, ethnique, régionale, sexiste, socioculturelle, ou élitiste, etc.

À propos des langues d’enseignement et de la langue des enseignants Dans les pays de pluralité linguistique, lorsque l’enseignant ne maîtrise pas la langue d’enseignement censée fédérer la société, la construction de l’identité commune est mise à mal. Mais, la langue officielle peut être parfois rejetée par les populations car perçue comme un élément d’oppression. De même, le fait que les enseignants ne maîtrisent pas la langue parlée par leurs élèves contrevient à l’idée de l’éducation adaptée au creuset social. C’est là aussi que la notion de qualité de l’éducation se révèle relative et complexe. L’imposition d’une langue à l’école facilite l’enseignement et participe de la construction d’une identité commune, à condition qu’il y ait un consensus autour de cette langue. En cas de diversité culturelle et linguistique, il faut trouver d’autres moyens d’identification à l’État-nation et mettre au point des dispositifs éducatifs qui consolident la construction de l’identité commune.

La part de la pédagogie, des résultats scolaires et des certifications dans la transformation des valeurs Dans le contexte actuel, les résultats scolaires et les certifications ont acquis une nouvelle valeur ; alors que la mission de l’école est de véhiculer et de renforcer le sentiment d’une appartenance commune et de donner la capacité de participer pleinement à la société, de par ce qu’elle transmet et ce qu’elle promet, comme l’accès au monde du travail, dans les faits, l’école est trop souvent élitiste et devient de plus en plus une instance de compétition plutôt que de transmission aux élèves de connaissances, de savoir-faire et d’une culture du collectif. En mettant en place des stratégies de recrutement des élèves pour garantir le « bon niveau » de leur établissement, les écoles favorisent l’entre soi et l’exclusion, au lieu de promouvoir la mixité sociale et scolaire, des valeurs telles le vivre ensemble et la solidarité. Le fait que la passerelle entre éducation et emploi ne se franchisse plus automatiquement, que ceux qui ne parviennent pas à l’emploi, malgré leurs études soient de plus en plus nombreux, crée un sentiment d’exclusion et de révolte, surtout chez les plus démunis. Pour ces derniers, les perspectives d’avenir sont minces et l’école ne tient pas ses promesses d’ascension sociale.

Il est prioritaire de garantir un niveau de qualification et de certification, ainsi qu’un accompagnement, qui permettent un accès à l’emploi pour les moins qualifiés, des possibilités véritables de participer à la vie de la cité. Il faut donc fournir une pédagogie adaptée aux publics scolaires et fournir une aide pédagogique aux enseignants. Or, les responsables et les cadres de trop nombreux systèmes éducatifs se contentent d’assurer les rentrées scolaires et d’éviter tout mouvement d’humeur de la population qui remettrait en cause leur nomination et les bénéfices qu’ils peuvent retirer de leur position dans le système. Trop souvent, ces bénéfices ne servent pas une éducation de qualité pour tous. C’est évidemment le cas lorsque la position de ces responsables dans le système permet de rentrer dans des mécanismes de corruption rémunérateurs. Mais c’est aussi le cas lorsque les comportements ne sont pas proactifs mais passifs, indifférents, résignés voire complices de l’inertie. Les exemples ci-dessus montrent la fragilité des systèmes éducatifs et indiquent une nécessité de veille, de contrôle, et même de réparation par l’État pour garder à l’éducation son statut de bien public : une régulation. Mais comment faut-il entendre la notion de régulation ? Qu’est-ce au juste que la régulation d’un système éducatif ?

LE CONCEPT DE RÉGULATION

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LA RÉGULATION implique une mobilisation de l’État et de toutes les composantes du système éducatif autour d’une vision globale du développement du pays où l’éducation joue un rôle clé. Elle est aussi une instance d’innovation qui tient compte des publics scolaires et du fonctionnement de la société. C’est en cela qu’elle s’inscrit dans un projet : celui de l’État.

Pour clarifier le concept de régulation, on peut s’inspirer des travaux de Legendre1 et de la théorie de la régulation sociale de Reynaud2. Selon ces deux apports, on peut définir la régulation de la façon suivante : La régulation est un processus pluriel et conflictuel de production et de mise en œuvre de règles du jeu, comme un entrelacs d’actions et de dispositifs de coordination, par nature situés et en continuelle interaction, dans le but de maintenir l’équilibre d’un système complexe ou de le modifier en vue d’obtenir un fonctionnement jugé optimal. Adaptée à l’éducation, la définition retenue pour la régulation est : La régulation concerne les politiques et l’action publique. C’est un processus pluriel qui conduit l’autorité publique à produire, par des négociations multiples, des règles du jeu pour mener le système éducatif à développer une éducation de qualité pour tous. Dans la plupart des pays, et depuis une trentaine d’années, ces normes sont produites et pilotées à plusieurs niveaux, du global au local. Cette définition mérite un certain nombre de commentaires : •  Tout processus de régulation est un processus orienté vers un « fonctionnement jugé optimal », en l’occurrence, des systèmes éducatifs qui offrent une éducation de qualité pour tous (EQPT). L’éducation de qualité pour tous est un objectif qui n’est jamais acquis une fois pour toute. Comme le montre la situation de certains pays du Nord, la qualité de l’éducation est fragile et demande un effort qui s’inscrit dans la durée. Si des pays ont réalisé une scolarisation universelle, de nombreuses composantes de leur système éducatif nécessitent de la régulation, tant en termes de qualité que d’équité.

•  C’est un « processus pluriel qui implique des négociations multiples » : –– C’est un processus pluriel : car il est lié à de nombreux systèmes externes (politique, économique, culturel…) et à de nombreux sous-systèmes internes de gestion (de l’accessibilité, de la logistique matérielle et financière, des ressources humaines…). La régulation suppose donc de travailler sur plusieurs champs et avec une pluralité d’acteurs. –– C’est un processus qui implique des négociations multiples parce que potentiellement conflictuel : les différentes catégories d’acteurs ont des intérêts multiples et il s’agit d’engager régulièrement des négociations pour faire converger certains de ces intérêts vers la mise en œuvre d’une EQPT. •  Les règles du jeu constituent une façon d’opérationnaliser une vision de l’éducation inscrite dans le cadre plus large du développement du pays, dans le contexte où se trouve le pays à un moment donné de son histoire et compte tenu des engagements internationaux contractés et du contexte global. –– Les règles du jeu prescrites et les règles mises en œuvre sont par nature situées et en interaction. Elles sont situées car les contextes nationaux et locaux ne sont pas les mêmes : une zone de conflit armé amène à conduire des actions spécifiques ; une école rurale dans de nombreux pays ne peut fonctionner de façon optimale sans une synergie avec le chef du village ; un habitat regroupé, ou au contraire dispersé, amène à concevoir autrement la problématique de l’accessibilité ; les rythmes saisonniers des cultures conduisent à aménager les horaires d’enseignement ; dans certains pays, la nécessité pour les enseignants de se rendre au district pour toucher leur salaire est une occasion de les regrouper pour des actions d’information et de formation continue… Ces exemples, et bien d’autres, montrent combien les actions et les dispositifs de coordination entrent en interaction étroite et peuvent se différencier, tout en poursuivant un objectif ultime commun, une EQPT.

1. Dans son Dictionnaire actuel de l’éducation, (1993, Montréal-Paris, Éditions Guérin-ESKA) Renald Legendre a étudié le sens donné au concept de régulation dans différentes disciplines pour en dégager des caractéristiques communes. 2. J.-D. Reynaud expose sa théorie de la régulation sociale dans le son Dictionnaire de l’éducation publié sous la direction de A. Vvan Zanten, Paris, Presses Universitaires de France (2008).

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–– Mais il s’agit aussi de règles du jeu qui se traduisent par la mise en œuvre d’un entrelacs d’actions à mener (favoriser l’accès, créer des environnements scolaires réellement éducatifs, fournir des outils pédagogiques, former les maîtres, tout cela de façon conjuguée) et des dispositifs de coordination (faire circuler l’information, distribuer les outils pédagogiques, accompagner les acteurs sur le terrain, évaluer les acquis des élèves, soutenir les initiatives heureuses et cela en respectant le principe du « juste à temps »). Ainsi comprise, la régulation est un processus dialectique entre régulation de contrôle (par l’autorité) et régulation autonome (par les acteurs de terrain). On le voit bien, quand on parle de régulation, on parle des politiques et de l’action publique. Or, la définition de celles-ci renvoie à une norme préalablement établie, comme l’indique la définition ci-dessus et celle de Pierre Bauby1 : « (…) la régulation [est] l’ajustement conformément à une règle ou à une norme, d’une pluralité d’actions et de leurs effets (…) ». Mais quelle est cette norme et sur quels principes s’appuie-t-elle ? Concernant l’éducation, les normes prescrites recouvrent divers domaines, aussi bien des principes fondamentaux relevant d’engagements internationaux, comme la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, que des objectifs nationaux inscrits dans le curriculum. Autrement dit, ces normes et ces règles du jeu sont produites à différents niveaux et dans un contexte donné ; en l’occurrence, un contexte mondial dominant avec lequel les États doivent composer. À la norme est donc associé le rôle de l’État. Depuis une trentaine d’années, les politiques publiques sont soumises à la ligne de l’économie mondiale : une libéralisation des services publics pour réduire les déficits des États et favoriser la concurrence, réputée être source d’efficacité. Les instances internationales édictent des directives auxquelles les pays se soumettent, au Nord comme au Sud. Dans les pays en développement, l’État-développeur des années postindépendances a dû s’effacer sous le poids de la dette, limiter massivement les dépenses, privatiser le secteur public, conditions de l’aide accordée par les bailleurs internationaux. C’est dire que, depuis les années 1980, la norme de l’action publique est partout produite et pilotée à plusieurs niveaux, du global au local. Cette caractéristique de la globalisation politico-économique a donné naissance à une « gouvernance multi-niveaux » et « polycentrique »2, d’autant plus qu’elle s’est

largement accompagnée d’un processus de décentralisation. Il faut noter également que les pays en développement ne sont pas les seuls à connaître une multiplication des acteurs, des instances et des niveaux de régulation dans leur système éducatif. Cela a favorisé de nouveaux modes de régulation, avec des pratiques contradictoires, qui sont révélatrices de l’appropriation ou du rejet des directives internationales par les différents niveaux, les États et les sociétés. La qualité de l’éducation pour tous dépend en partie de la capacité des États et des acteurs traditionnels de la régulation : •  à s’inscrire dans ce nouveau paradigme de l’horizontalité et du multi-acteur ; •  à en identifier les enjeux. Ainsi, si l’on prend le seul niveau international du cadre normatif, on distingue au moins deux dimensions à prendre en compte dans l’analyse de la régulation : •  des conventions et des engagements internationaux par nature politiques et éthiques, qui remportent une forte adhésion et dont seuls certains éléments font l’objet de résistances (culturelles), considérées marginales : personne ne saurait s’opposer à un objectif tel celui d’atteindre une éducation de qualité pour tous ; •  des politiques publiques acquises aux engagements économiques mondiaux, libéraux de par leur nature et qui sont beaucoup plus problématiques et controversés par diverses instances et à différents niveaux. Ces deux orientations, l’une de nature éthique et politique et l’autre économique et libérale, peuvent donc diverger, voire être contradictoires ; c’est le hiatus de la globalisation politico-économique en cours. En faveur de quelle orientation un pays doit-il trancher ? Y a-t-il une articulation possible entre ces deux orientations permettant une régulation optimale ? De même, comment articuler l’orientation traditionnelle de l’action publique d’un pays avec les directives internationales ? Quels sont les réajustements possibles au niveau d’une nation souveraine avec ses modes de fonctionnement, politiques et sociaux (dialogue des structures intermédiaires comme les partenaires sociaux avec l’État, revendications des citoyens et approbation ou sanction par le vote) ? Ces questions montrent que parler de régulation pour atteindre l’équité et améliorer la qualité demande d’appréhender la norme (internationale) dans ses diverses dimensions. Comment traiter alors les enjeux de la régulation des systèmes éducatifs ?

1. P. Bauby (1998), Reconstruire l’action publique. Services publics, au service de qui ? In Yves Dutercq éd. (2005), p. 9. 2. Voir Dutercq (2005), p.11, citant Marks et al (1998).

DES ENJEUX IMPORTANTS DE LA RÉGULATION

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L’ÉDUCATION est un bien public : l’État doit fédérer les initiatives des divers acteurs qui participent à l’offre éducative à tous les échelons du système. Il doit faire valoir sa légitimité et assumer sa responsabilité de régulateur pour garantir une éducation de qualité pour tous.

Comme l’indiquent les chartes et traités internationaux signés par les États, l’éducation doit être considérée comme un « bien public » ; or, elle est trop souvent traitée comme une marchandise par des opérateurs privés, internationaux ou locaux, de plus en plus nombreux. Dans les pays du Sud, l’urgence du développement et les préoccupations matérielles font parfois « oublier » les questions de qualité et d’équité, bien semblables à celles qui se posent au Nord. Mais surtout, au Sud comme au Nord, l’objectif et la valeur de l’éducation sont les mêmes.

LA QUALITÉ POUR TOUS, UN ENJEU CENTRAL ET UNE NOTION DIFFICILE À CERNER Il n’existe pas de définition type de la qualité de l’éducation et, selon les acteurs, plusieurs critères peuvent ou non être privilégiés pour juger de la qualité d’une école.

La régulation au service d’une EQPT relève plutôt de ces dernières conceptions que des premières. Si, de prime abord, on considère – surtout les parents – qu’une bonne école est celle dont les résultats aux examens sont supérieurs ou très supérieurs à la moyenne, d’autres éléments doivent également être pris en considération, dont l’acquisition de savoir-faire et de savoirêtre, ou encore, ce qu’apporte vraiment l’école, sa valeur-ajoutée, son efficacité. Même s’il apparaît évident qu’une éducation de qualité est forcément équitable, l’utilisation des deux termes « qualité » et « équité » est maintenue pour des raisons opérationnelles1. Toujours dans une approche opérationnelle, on peut retenir que la qualité de l’éducation est un concept multidimensionnel qui recouvre quatre aspects interdépendants : •  la qualité des moyens humains et matériels disponibles (ressources) ;

La qualité est un concept qui permet de multiples interprétations :

•  la qualité de la gestion et des processus d’enseignement-apprentissage à l’œuvre (processus) ;

•  la qualité représente l’exception, c’est-à-dire ce qui est rare ;

•  la qualité des résultats obtenus et l’importance des progrès réalisés dans une période donnée (produits) ;

•  la qualité se rapporte à la perfection, à ce qui est parfait ou s’y rapproche ;

•  et la qualité des valeurs et des attitudes créées (l’impact).

•  la qualité est ce qui répond aux objectifs fixés, c’est-àdire ce qui obtient les effets attendus ;

À PROPOS DE L’ÉQUITÉ1

•  La qualité est ce qui amène une transformation des personnes et de l’organisation, c’est-à-dire ce qui donne à toutes les personnes et entités de l’organisation la possibilité d’être meilleures ;

L’éducation étant un « bien public », un droit pour tous et un devoir pour l’État, un système éducatif sera d’autant plus équitable que les bénéfices de l’éducation sont distribués de façon juste entre les différentes catégories de public, sans discrimination de genre, de niveau socioculturel et économique, d’appartenance religieuse ou ethnique ou philosophique, de lieu de résidence (urbaine, péri-urbaine, rurale) ou de tout autre facteur de discrimination.

•  la qualité est une construction en marche, une approche qui implique tous les acteurs d’une organisation à la poursuite d’objectifs qu’ils s’approprient en cours de processus.

1. Cette approche et la définition qui suit sont celles retenues par l’Organisation internationale de la Francophonie suite à un séminaire d’experts nationaux et internationaux qui se sont penchés sur cette question (OIF, 29-31 mai 2012).

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Plusieurs niveaux d’équité sont à prendre en considération : •  L’accès de tous les publics concernés aux différents niveaux d’enseignement et l’accessibilité (l’existence de conditions permettant l’accès) ; •  La jouissance par tous de la qualité des ressources, des processus, des résultats et de l’impact.

UN ENJEU POLITIQUE CENTRAL : GARANTIR LE DROIT DE TOUTES ET DE TOUS À L’ÉDUCATION DE QUALITÉ Les enjeux sont importants, comme l’ont montré de nombreuses réunions internationales dont les recommandations ont fait l’objet d’un accord et d’un engagement de la plupart des États (voir la liste en fin de document). L’engagement par l’adoption de déclarations solennelles, ou la signature de chartes et de conventions est de faire respecter le droit de tous à l’éducation : accès, accessibilité, qualité, distribution équitable de la qualité, formations diversifiées pour l’épanouissement des individus et leur participation dans la société. L’État doit élaborer des politiques publiques qui garantissent ce droit. À partir de là, Il faut identifier clairement les possibilités d’intervention de l’État : les moyens dont il dispose, les modalités qu’il peut mettre en œuvre et leur mise en cohérence. Cette articulation entre les moyens dégagés, les modalités de mise en œuvre et la mise en cohérence est révélatrice des priorités, du positionnement et de la vision politique de l’éducation et donc, de la vision de la société à un moment donné. De fait, par sa conception de l’équilibre du système social, qui repose sur des fondements idéologiques, l’État oriente la transformation du système éducatif2. Il est donc important que soient clarifiés les enjeux dérivés de l’enjeu central.

•  Fédérer les forces issues des secteurs public, privé, de l’éducation non formelle ou de la société civile et qui existent désormais de fait dans le système éducatif. L’époque d’un État qui assure à lui seul la poursuite de l’EQPT est révolue ; les tâches sont partagées à différents niveaux du système éducatif, dont celles de la régulation. •  Faire converger les initiatives des différents opérateurs de l’éducation vers l’objectif d’une EQPT. Cela implique que l’État connaisse ces opérateurs et leurs activités. •  Faire reconnaître la légitimité du rôle régulateur de l’État et sa capacité de définir des priorités, une stratégie, les moyens et le cadre d’action. Ces enjeux supposent que les États se posent un certain nombre de questions fondamentales et qu’ils y donnent des réponses pertinentes : •  Qu’est-ce que réguler pour une EQPT ? •  Quels sont les devoirs d’un État régulateur ? •  Quels sont les modes de régulation à promouvoir si l’on veut développer une EQPT ? •  Quels sont les outils ? •  Comment faire émerger des stratégies de régulation cohérentes dans un contexte donné ? Dans ces contextes où l’État doit compter avec des acteurs éducatifs variés, impliqués dans les domaines de l’offre ou de la régulation, quel est au juste le rôle régulateur de l’État et quels sont les champs de régulation du système éducatif ?

LES ENJEUX DÉRIVÉS •  Faire reconnaître l’éducation comme un « bien public », dont la qualité est avérée (fonctionnement, certifications…), même s’il n’est pas directement produit par l’État. C’est à dire que l’État assume sa responsabilité de garantir sur son territoire une éducation de qualité, même si elle est offerte par d’autres opérateurs.

2. Voir G. Solaux, Les régulations des politiques d’éducation, In Yves Dutercq éd. (2005).

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LES MODES ET LES CHAMPS DE LA RÉGULATION DU SYSTÈME ÉDUCATIF

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POUR APPRÉCIER la capacité que l’État se donne pour atteindre l’objectif

d’une éducation de qualité pour tous, il faut tenir compte des domaines sur lesquels il concentre ses efforts de régulation, mais aussi de sa capacité à mettre en place une régulation démocratique (plurielle, contextualisée et partenariale).

Dans beaucoup de pays, l’État se trouve dans une situation paradoxale : il doit s’attaquer à des problèmes éducatifs importants, divers et complexes alors même que sa capacité d’action est limitée et sa légitimité menacée. Les scénarios décrits précédemment questionnent la place de l’État dans la régulation du système éducatif et la capacité qu’il se donne pour exercer un contrôle dans ce domaine. Cette place que prend l’État dans la régulation se traduit notamment dans le mode de redistribution éducatif, à travers des systèmes plus ou moins décentralisés, des priorités politiques et des modes de régulation spécifiques, qui s’exercent dans divers champs/domaines du système éducatif. La question est de savoir sur quels domaines l’État doit se concentrer en priorité : •  Est-ce sur la pertinence des contenus et des objets de l’enseignement ? •  Est-ce sur la disponibilité et la qualité des ressources ? •  Est-ce sur l’organisation et la gestion (gouvernance, administration, « carte scolaire » …) au service d’une éducation de qualité pour tous ? Il existe plusieurs modes de régulation mis en œuvre ; ces modes de régulation produisent des effets divers. Ils peuvent être appliqués à divers champs du système éducatif, dont voici quelques exemples : •  La régulation bureaucratique ou régulation de contrôle par les normes et les règles : si les normes et les règles sont nécessaires, elles ne peuvent produire, à elles seules, les changements souhaités. La régulation de contrôle est liée au respect des règles prescrites par l’État régulateur. C’est un devoir pour lui de prévoir et de mettre en œuvre des actions de contrôle, en n’oubliant pas que c’est l’esprit de la loi qu’il s’agit de faire appliquer et non simplement la lettre. •  La régulation stratégique par la performance (organisationnelle ou pédagogique), c’est-à-dire par l’obligation de résultats : s’il est important de se fixer des résultats à atteindre, ces derniers ne peuvent être atteints

que s’il y a aussi l’obligation de fournir les moyens et d’adopter des stratégies d’accompagnement. Il faut également garder à l’esprit que les mêmes résultats ne peuvent pas être atteints dans le même temps par toutes les composantes du système : les contextes économiques et socioculturels étant différents à chaque fois, il est nécessaire d’adapter les ressources. Il faut noter que les réformes des instances de pilotage comme l’inspection se sont accompagnées d’une augmentation de la régulation par les résultats. •  La régulation de l’offre et de la demande scolaires et du recrutement des élèves par le marché ou le quasi-marché. La liberté des parents et l’autonomie des établissements sont prônées : s’il est normal pour les parents de vouloir le meilleur pour leurs enfants, les études montrent que ce type de régulation mène, par différents mécanismes, à des situations inéquitables : –– Le tri à l’entrée, tant dans le programme proposé que dans la composition des groupes classes et dans les options d’études. –– La liberté de choix qui n’est pas la même pour tous, puisque seules certaines familles sont en mesure d’exercer effectivement un choix. –– L’influence du marché sur l’éthique professionnelle et la mise en péril des valeurs démocratiques : promotion de la compétition aux dépens de la solidarité ; promotion des valeurs de l’argent et de l’appartenance à des classes sociales aisées aux dépens des valeurs liées à la diversité, à la solidarité, à la justice sociale, etc. Pour développer une éducation de qualité pour tous, il faut faire le choix d’une régulation démocratique qui tient compte de tous les acteurs du système éducatif. Il s’agit d’une régulation plurielle, contextualisée et partenariale : •  Régulation plurielle : elle s’appuie sur de multiples leviers, tels que faciliter et promouvoir l’accès ; fournir des ressources diversifiées en fonction des besoins spécifiques ; asseoir un socle commun de compétences à chaque niveau d’enseignement ; mais aussi permettre des parcours diversifiés dans l’esprit d’un apprentissage tout au long de la vie.

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•  Régulation contextualisée et régulation autonome : elle tient compte des environnements, les adapte et s’appuie sur les ressources qui y sont présentes. C’est la régulation mise en œuvre par les acteurs de terrain eux-mêmes en vertu du caractère situé (« ici et maintenant ») des pratiques. Les problèmes rencontrés et les ressources (directes ou indirectes) ne sont pas les mêmes d’un environnement à l’autre ; et c’est un leurre de croire que des réponses uniques et communes existent et sont toutes à trouver dans les prescrits. •  Régulation partenariale : elle est le fruit de négociations régulières entre les acteurs de terrain sans lesquels rien ne peut réellement changer (régulation autonome) et les autorités qui sont les garants des objectifs nationaux et internationaux (régulation de contrôle) et qui ont la charge de soutenir les efforts menés sur le terrain (posture d’accompagnement, de reconnaissance et de soutien). •  Régulation par les valeurs : ce sont les valeurs qui orientent les décisions, les actions, les évaluations. Le cas de la Finlande est exemplaire à ce niveau : celles-ci sont déterminées fondamentalement par des valeurs, telle « le maintien d’une bonne estime de soi chez chaque élève ». C’est le cas aussi de certaines politiques d’éducation prioritaire où tout est mis en œuvre pour faire de l’établissement scolaire « un environnement de qualité et qui respire le professionnalisme ».

Seule une régulation qui tient compte de tous les acteurs du système éducatif (régulation démocratique) est susceptible de provoquer le changement pouvant mener à une EQPT. Les travaux sur les réformes et les transformations des systèmes éducatifs montrent bien que la seule posture de contrôle ne permet pas de changer fondamentalement les pratiques de terrain : même si l’on augmente fortement les contrôles administratifs, les changements qui pourraient advenir risquent d’être uniquement des changements de surface. Ces mêmes travaux montrent que les changements désirés ne se réalisent que si l’on peut compter sur la capacité et la volonté locales : l’engagement professionnel des acteurs passe par l’adoption d’une posture de reconnaissance de l’autorité vis-à-vis des acteurs de terrain, aux différents niveaux du système, notamment dans la relation inspecteur et enseignant, mais aussi dans la relation enseignant et élève. Mais l’objectif d’une régulation démocratique implique aussi d’identifier les acteurs de la régulation aux côtés de l’État et la latitude de leur participation.

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LES ACTEURS RÉGULATEURS

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MÊME SI l’État est le premier responsable de la régulation et qu’il doit imposer

sa légitimité dans ce domaine, c’est une prérogative qu’il partage désormais avec tous les acteurs du système éducatif. Cette participation démocratique est un atout dès lors qu’elle est pleinement coordonnée par l’État et ses instances déconcentrées et décentralisées.

Précisément parce que l’État s’est engagé à respecter le droit à une éducation de qualité pour tous, mais qu’il n’a pas la capacité et les ressources pour assurer seul ce droit, il faut inclure autant que possible d’autres acteurs qui ont un intérêt dans l’éducation et qui peuvent exercer un rôle de régulation. Parmi ces acteurs, nous pouvons mentionner : •  les collectivités territoriales comme les communes, les quartiers, voire dans certains cas des entités plus vastes ; •  les réseaux des écoles non publiques (réseaux d’écoles religieuses par exemple) ; •  les syndicats ou associations des enseignants ; •  les associations des parents d’élèves, et même des parents à titre individuel susceptibles de représenter un ensemble de parents non regroupés en association (ce qui est assez fréquemment le cas pour certaines catégories d’écoles privées) ; •  les associations d’étudiants et d’élèves lorsqu’elles existent ou, dans le cas contraire, des délégations ; •  les représentants de la société civile qui ont conscience des enjeux de l’éducation pour le devenir de la société ; •  les médias dont le pouvoir d’influence est de plus en plus grand (l’exemple du Brésil est particulièrement intéressant : avec l’aide de l’Unesco, il assure une formation des journalistes chargés de la rubrique éducation dans la presse) ; •  les partis politiques, dont les représentants sont souvent élus sur la base de leur programme dans le domaine de l’éducation. Les États généraux de l’Éducation sont un moment important de régulation démocratique, car elles déterminent les grandes orientations du système éducatif, en relation étroite avec les orientations plus larges du développement du pays dans toutes ses composantes. Les résultats, dûment consignés dans un document de référence, devraient pouvoir constituer la base d’une

régulation par les valeurs. Cependant, ces valeurs demeurent souvent de l’ordre du prescrit général et un processus constant d’opérationnalisation est nécessaire. C’est à ce niveau qu’apparaissent le plus souvent les différences de compréhension et les désaccords entre les diverses catégories d’acteurs. Des organes permanents de concertation et de négociation doivent alors être mis en place par l’État, puisque celui-ci a la responsabilité première de la régulation. L’État ne pouvant plus, dans de nombreux pays, faire respecter son cadre régulateur uniquement à travers son administration éducative au niveau central et déconcentré, la régulation démocratique est une alternative porteuse : dans ce type de régulation, chacun des acteurs a un rôle à jouer en fonction des tâches assumées, de ses capacités, de ses atouts, de ses intérêts et de sa légitimité. Les autorités publiques devraient construire la légitimité de leur responsabilité dans la régulation. Cette légitimité sera d’autant plus grande et forte qu’elle leur sera reconnue aussi bien à l’intérieur du système éducatif public, que par les opérateurs partenaires. Cela suppose que l’autorité publique commence par mettre en place des stratégies de régulation au sein de l’école publique, et que ces efforts soient connus et reconnus par les partenaires. Actuellement, certains États perdent de leur pouvoir parce qu’ils n’assurent pas suffisamment, ou efficacement, la régulation interne du système public. Les autorités intermédiaires de l’éducation : les acteurs intermédiaires sont les personnes qui ont pour mission d’assurer le contrôle, le suivi et le soutien des acteurs de terrain ; ils jouent un rôle important d’interface entre ceux-ci et les autorités nationales. Certaines négociations devraient aboutir à faire jouer ce rôle par des acteurs intermédiaires issus d’opérateurs différents, en fonction de besoins partagés. Comme le montrent certaines études, on reproche aux autorités intermédiaires, tels les inspecteurs, un manque d’efficacité (les résultats observés ne sont pas la hauteur des résultats attendus) et d’efficience (leur coût est exorbitant par rapport aux résultats atteints, dans des

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contextes où les ressources financières sont déjà trop faibles). Des stratégies de régulation sont alors nécessaires pour permettre à ces acteurs de mieux remplir leurs missions et se sentir pleinement responsables de la qualité et de l’équité dans les territoires dont ils ont la charge. Les opérateurs privés de l’éducation : dans beaucoup de pays, les opérateurs privés sont de plus en plus nombreux et diversifiés, ce qui rend particulièrement difficile la mise en œuvre d’une politique cohérente de régulation. Comme le montrent de nombreuses études menées dans des champs aussi divers que l’eau, la santé, la gestion des déchets, ou encore l’éducation, la notion d’opérateur privé est particulièrement complexe et le langage utilisé n’a pas nécessairement le même sens d’un pays à l’autre. Dans le séminaire international de Paris (OIF, 29-31 mai 2012) où étaient réunis des experts nationaux en provenance de différents pays de la Francophonie, les participants ont retenu la dimension de « statut » pour différencier les écoles privées des écoles publiques ou semi-publiques. Les écoles privées sont des écoles où une, ou plusieurs personnes, physiques ou morales, sont propriétaires de l’établissement et fournissent un service éducatif à un public plus ou moins spécifique selon les cas. Dans les pays représentés à ce séminaire, un éventail très large d’écoles privées a été identifié. Différents paramètres les caractérisent, dont le croisement révèle l’existence d’un nombre potentiellement important de cas de figures : •  des écoles initiées par des personnes physiques (souvent des enseignants et même des autorités éducatives) versus des écoles initiées par des personnes morales (comme des ONG, des associations de droit privé, des entreprises qui, pour leurs besoins spécifiques, créent leurs propres écoles de formation professionnelle et parfois organisent aussi l’éducation de base) ; •  des écoles à but lucratif (dans de nombreux cas, elles reposent sur une sélection par l’argent et vont à l’encontre des critères d’équité) versus des écoles sans but lucratif (leur motivation peut dans certains cas rejoindre les objectifs du public, mais dans d’autres cas, elles s’en écartent plus ou moins fortement et recherchent des objectifs spécifiques, dont certains peuvent être non acceptables) ; •  des écoles non confessionnelles (car aucun cours de religion n’y est dispensé ; elles sont qualifiées de « laïques » dans certains pays, mais cette qualification est rejetée dans des pays où une seule religion est reconnue par l’État) versus des écoles confessionnelles (le plus souvent d’obédience musulmane, catholique,

protestante, ou hindoue, mais bien d’autres cas de figure existent dans certains pays) ; •  des écoles regroupées officiellement en association ou en réseau (c’est le cas de beaucoup d’écoles confessionnelles) versus des écoles non regroupées (ces dernières sont souvent plus difficiles à identifier, à caractériser, à intégrer dans des négociations, et à en obtenir des données statistiques) ; •  des écoles sous contrat avec l’État (qui peut donc user de son pouvoir de régulation) versus des écoles totalement indépendantes. Les écoles semi-publiques sont des écoles qui appartiennent à des personnes dont certaines occupent des postes publics. Le plus souvent, il s’agit d’écoles communales ou communautaires : la communauté a ressenti la nécessité de créer une école, de recruter les enseignants (souvent avec un niveau d’éducation faible et une absence de formation pédagogique) et d’en assurer la gestion, avec l’espoir qu’à terme cette école rentrera dans le giron du ministère. Ces écoles sont implantées le plus souvent dans des zones rurales peu accessibles et disposent de moyens limités, surtout si elles ne sont pas aidées par des ONG. Les écoles étrangères présentent deux grands cas de figures : –– les écoles dépendant d’un ministère de l’Éducation d’un pays étranger (les cas les plus fréquents sont les écoles françaises, américaines, belges, australiennes), destinées avant tout aux enfants des ressortissants du pays en question, mais pouvant accepter des enfants du pays hôte ; –– des écoles étrangères privées à vocation le plus souvent lucrative. Cet inventaire montre que le système éducatif peut offrir un paysage complexe, surtout dans certains pays. Si beaucoup de ministères ont réussi à inventorier et situer les différentes écoles qui composent le paysage national, ils en connaissent souvent mal les caractéristiques, qui peuvent varier sur bien des aspects. Souvent, les autorités publiques connaissent encore plus mal leurs résultats et comment ils se différencient en fonction des caractéristiques des écoles. Trop de bases de données nationales sont incomplètes à ce niveau, ce qui complique l’établissement des diagnostics nécessaires à une politique pertinente de régulation.

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Cette complexité peut être envisagée comme une contrainte  : les stratégies adéquates de régulation peuvent être plus ou moins difficiles ou faciles à conduire selon leur degré d’autonomie, ou au contraire de dépendance : –– dans la prescription des normes, –– dans leur financement, –– dans la fonction de contrôle et de sanction, –– dans l’évaluation et la certification. Mais cette complexité peut être aussi perçue, du moins dans certains cas, comme une richesse potentielle : ces écoles peuvent contribuer à assurer une meilleure qualité ou / et équité1 : elles peuvent renfermer en leur sein des ressources qui peuvent bénéficier à l’école publique ou à d’autres écoles, notamment pour la formation, la création de supports pédagogiques, l’expérimentation de certains dispositifs pédagogiques, etc. Dans ce dernier cas, une régulation partenariale peut s’engager sur de bonnes bases.

1. Malheureusement, beaucoup d’entre elles recherchent la qualité par des mécanismes de sélection qui se font au détriment de l’équité.

LES OUTILS DE RÉGULATION

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L’ÉTAT possède une capacité de régulation dès lors qu’il se fixe des objectifs et

des priorités clairs, qu’il identifie et mobilise les bons outils dans une démarche partenariale avec les acteurs.

L’État a le devoir d’assumer une politique de régulation au service d’une EQPT. Le plus souvent, il n’assume plus seul cette politique (tant au niveau de la couverture pour tous qu’au niveau de la qualité). Une politique de régulation ne peut réussir sans la pression, le soutien et le partenariat des différents opérateurs (privés mais aussi publics) et des acteurs de terrain. À cet égard, l’État possède plusieurs outils dans les processus de négociation.

LE CADRE NORMATIF Les grandes orientations du système éducatif et, tout particulièrement, les valeurs qui inspirent les décisions, les actions, la gestion et l’évaluation : les États généraux de l’Éducation sont le plus souvent la voie privilégiée pour les définir. Leurs résultats auront d’autant plus d’impact que : –– les différents opérateurs et les différentes catégories d’acteurs y participent activement, –– ces résultats sont cohérents avec les engagements internationaux signés, –– l’État s’est engagé à mettre en cohérence les décisions prises avec ces résultats. Les programmes d’enseignement : s’il est raisonnable dans la négociation de permettre aux différents opérateurs de poursuivre certains objectifs spécifiques, il est important pour une régulation réussie de : –– se mettre d’accord sur un noyau commun d’objectifs et de performances à atteindre par chaque opérateur, –– prévoir les outils de pression et de contrôle pour en évaluer la réussite, –– mettre en place des stratégies différenciées de soutien aux différents opérateurs et acteurs de terrain en fonction des caractéristiques de contexte (voir les autres outils de la régulation). Les règles éthiques à respecter : il est surtout important de définir les règles déontologiques à respecter, les comportements inacceptables et, en conséquence, les modalités de sanction à mettre en œuvre en cas de nonrespect.

LE FINANCEMENT PUBLIC La question qui se pose ici porte sur ce que l’État doit financer et sur la manière d’utiliser le financement comme outil de pression, de contrôle, de soutien et, en définitive, de régulation. •  Si, à des degrés divers, les opérateurs privés (et même publics dans certains cas) ont leurs propres sources de financement, l’État peut établir des stratégies de financement différenciées dans les négociations avec les opérateurs privés ou semi-publics, comme certaines écoles communautaires. Les États qui disposent de peu de ressources ont toutefois la capacité de négocier des financements auprès des bailleurs de fonds ayant inscrit dans leur politique une aide en faveur d’une EQPT. Par réciproque, il revient aux États concernés de respecter les règles d’allocation de ces ressources aux publics visés. •  Le financement des infrastructures : c’est surtout le cas dans les zones où la couverture du système éducatif n’est pas assurée et ne peut être assurée par les communautés locales ou des opérateurs privés. •  Le financement de la maintenance des infrastructures : la dégradation des infrastructures est incompatible avec une EQPT puisqu’elle est cause, bien souvent, de la régression des taux d’accès ou de maintien dans les établissements. •  Le financement des supports pédagogiques (manuels, outils didactiques, matériels didactiques à renouveler chaque année) : une politique de régulation doit se pencher prioritairement sur les supports pédagogiques indispensables à une EQPT et sur la meilleure façon de distribuer ceux-ci dans les délais adéquats. •  Le financement des ressources humaines requises : tous les opérateurs (y compris publics) ne disposent pas nécessairement des ressources humaines, tant sur le plan quantitatif (occupation des postes), que qualitatif (niveau suffisant de formation pour assurer leur rôle). L’État peut négocier des accords avec des opérateurs privés dans le besoin et, réciproquement, les opérateurs

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privés peuvent négocier des accords de mise à disposition de ressources humaines pour certains besoins prioritaires du public. •  Le financement d’actions ponctuelles de promotion de la qualité pour tous : on peut citer des exemples comme le financement d’Olympiades scientifiques dans des systèmes éducatifs où la désaffection pour les filières scientifiques pose un grave problème au pays (c’est le cas actuel au Sénégal et dans de nombreux pays, comme le montre le numéro spécial n° 51 de la Revue internationale d’Éducation).

LES CERTIFICATIONS ET LES ACCRÉDITATIONS La certification en éducation désigne un mécanisme de reconnaissance institutionnelle des compétences requises des élèves sous forme de certificat de réussite d’un niveau donné d’études, ou de certificat d’accès à un niveau supérieur d’études, ou encore de diplôme. L’accréditation désigne le plus souvent une reconnaissance par une autorité institutionnelle légitimée permettant à une institution d’exercer une mission dans le respect de certaines règles. Ce sont là deux puissants outils de régulation. •  L’État doit pouvoir se donner le droit légitime d’accorder (ou non) des accréditations à des opérateurs privés pour exercer la mission d’assurer une éducation de qualité pour tous. •  L’État a le pouvoir et le droit d’assurer lui-même la certification de réussite, d’accès ou de diplomation à certains niveaux d’enseignement, sur la base de l’identification d’un noyau commun de performances à atteindre : dans ce cas, il prend en charge lui-même les procédures d’évaluation certificative à l’aide d’épreuves standards externes. Mais il a aussi le droit de permettre à différents opérateurs accrédités de certifier les performances à des niveaux intermédiaires d’enseignement : c’est un outil de négociation important de la régulation.

LES SYSTÈMES D’INFORMATION / OUTILS DE DIAGNOSTIC Les États ne peuvent assurer adéquatement leur mission de régulation s’ils ne disposent pas de bons outils de diagnostic. Cela implique plusieurs choses :

•  Une identification des indicateurs prioritaires en fonction des caractéristiques du pays. •  Une identification des opérateurs publics, semi-publics et privés, avec une connaissance suffisamment précise de : –– leurs caractéristiques, –– leur couverture du territoire (zones et niveaux où ils interviennent, public ciblé), –– des résultats obtenus à la lumière des indicateurs prioritaires retenus. Dans beaucoup d’États (et donc aussi d’organismes internationaux), on ne dispose pas encore de données suffisamment précises et exhaustives dans ces domaines. •  Une identification des zones territoriales où une action prioritaire de régulation doit être menée pour assurer une meilleure EQPT. •  Une structure dotée des ressources matérielles et humaines, aux compétences reconnues, pour assurer le rassemblement, l’analyse et l’attribution de sens à l’ensemble des données recueillies. Dans beaucoup d’États, trop peu d’attention est accordée à cette structure. •  Un processus d’attribution de sens qui repose sur un « raisonnement diagnostic » qui fonctionne sur la base d’une succession cohérente de « si… alors… ». L’exemple suivant illustre ce type de raisonnement : si le taux d’accès à l’éducation de base n’est pas acceptable, alors on examine les indicateurs d’accessibilité ; si par contre il est acceptable, alors on prend en considération le taux d’achèvement du primaire ; si ce dernier n’est pas acceptable, alors on identifie les indicateurs de ressources et de gestion susceptibles d’en rendre compte. Et, au besoin, on poursuit ainsi le raisonnement aux autres niveaux d’enseignement ; encore faut-il déterminer le niveau d’acceptabilité en fonction du contexte, sans oublier de prendre en considération, non seulement les indicateurs nationaux, mais aussi et surtout les indicateurs territoriaux et par catégories de public. •  L’existence ou la mise en place d’un organe permanent de concertation où sont représentés les différents opérateurs. Cela implique d’inciter ces opérateurs à se regrouper en associations pour rendre les négociations plus aisées et parvenir ainsi à une régulation démocratique plurielle, contextualisée et partenariale, où les valeurs jouent un rôle central.

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UNE QUESTION DE VOLONTÉ POLITIQUE ET UN PILOTAGE PARTICIPATIF

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L’ÉDUCATION

est un bien public. Sa régulation implique une mobilisation de l’État et de toutes les composantes du système éducatif autour d’une vision partagée du développement du pays où l’éducation joue un rôle clé. C’est en cela qu’elle s’inscrit dans un projet : celui de l’État.

Nous l’avons bien vu, une régulation réussie repose sur l’implication des acteurs concernés dans un esprit de partenariat. La méta analyse de Lieberman (2005) sur l’évaluation de la réussite des politiques de changement dans les systèmes éducatifs évoque cinq conclusions majeures : •  Le changement ne se décrète pas. Il repose sur la capacité et la volonté locales. •  Le changement dépend en définitive des acteurs en bout de chaîne (de leurs conceptions, de leurs pratiques anciennes). •  Le changement repose aussi sur une posture de la reconnaissance des responsables (pression et soutien). •  La qualité est un processus de construction toujours inachevé : processus itératif et par strates ; émergence de nouveaux besoins et défis. •  Les effets ne sont jamais rapides : impliquer les opérateurs privés est donc une nécessité ; la qualité de leur implication au service d’une EQPT dépendra essentiellement d’une politique de réel partenariat et de la prise de responsabilité de l’État (garant de la régulation). La plupart des États se sont engagés, au niveau international, à orienter leur politique vers une EQPT. Encore faut-il qu’ils : –– se dotent des structures, des ressources humaines et des outils de diagnostic adéquats, –– analysent et donnent du sens aux résultats récoltés, –– prennent des décisions réalistes de régulation sur les cibles prioritaires, –– débloquent les ressources matérielles et humaines requises, –– assurent un contrôle et un suivi des mesures prises. Si l’État a le devoir et la responsabilité de piloter une politique de régulation, il ne peut y aboutir raisonnablement s’il ne met pas en place une structure de pilotage participatif avec les opérateurs, les acteurs de terrain et les acteurs intermédiaires. Les différents outils mentionnés

précédemment sont des armes puissantes pour permettre ce pilotage participatif, où chacun des opérateurs et des acteurs peut trouver sa place et son intérêt. Cette volonté politique et ce pilotage participatif signifient, comme on l’a vu plus haut, que la régulation, contrairement à certaines idées reçues, ne concerne pas uniquement un niveau local en proie à des intérêts particuliers. S’il faut tenir compte des risques encourus par rapport à la notion de bien commun, on ne peut pas se contenter de « diaboliser » ce niveau de décision et d’action et ses acteurs. Il permet aussi de réguler les effets des politiques et des actions venant d’en haut et de donner la parole aux bénéficiaires du système éducatif.

ANNEXES

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LE DROIT À L’ÉDUCATION

est un principe universel accepté par tous. Proclamé par l’article 26 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), il est repris et conforté dans tous les grands instruments de protection des droits de l’homme (plus de 8 conventions, chartes, déclarations et pactes régionaux et internationaux), auxquels il faut ajouter les déclarations de représentants d’État et de gouvernement dans différentes enceintes nationales et internationales, tels l’Appel de Bruxelles (mai 2008), les Sommets des chefs d’État et de gouvernement de la Francophonie (2006, 2008 et 2012), l’Unesco (2008 et 2009) et le Bureau international d’éducation (2008).

PRINCIPAUX TEXTES INTERNATIONAUX ET RÉGIONAUX CONSACRANT LE DROIT DE TOUS À L’ÉDUCATION: •  1948 : la Déclaration universelle des droits de l’homme, et tout particulièrement l’article 26 qui prescrit et précise le droit à l’éducation ; •  1960 : la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement ; •  1966 : le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, art. 13 et 14 ; •  1979 : la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ; •  1981 : la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ; •  1989 : la Convention relative aux droits de l’enfant, tout particulièrement l’article 29, par. 1 ; •  1990 : la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous : répondre aux besoins éducatifs fondamentaux (Jomtien) ; •  2000 : les objectifs du Millénaire pour le développement ; •  2000 : le Cadre d’action de Dakar et la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous.

DÉCLARATIONS ISSUES DE CONCERTATIONS INTERNATIONALES : Les extraits ci-dessous montrent l’évolution de cette réflexion ainsi que la volonté des États de veiller à la qualité de l’éducation.

Sommets des chefs d’État et de gouvernement de la Francophonie : «… réserver à la puissance publique la responsabilité de la politique d’éducation tout en permettant, dans les conditions déterminées par elle, le partenariat avec le secteur privé… » (Sommet de Bucarest, 2006) « … en développant un enseignement public et privé de qualité… » (Sommet du Canada-Québec, 2008) « Nous nous engageons à renforcer notre coopération pour atteindre l’objectif d’une éducation de qualité pour tous (EQPT) ainsi qu’à mettre en place et maintenir un dispositif efficace de régulation de nos systèmes éducatifs. Nous demandons à l’OIF, l’AUF, l’Université Senghor et la Confemen de poursuivre la réflexion concernant les instruments permettant d’assurer la qualité et l’équité de l’ensemble des services éducatifs, tant publics que privés, et à renforcer l’accompagnement des États et gouvernements dans leur mise en place. » (Sommet de Kinshasa, 2012)

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Unesco : •  Huitième réunion du Groupe de haut niveau sur l’Éducation pour tous, 16-18 décembre 2008, Oslo, Norvège : « … les gouvernements intéressés doivent être soutenus pour développer des indicateurs, pour établir des instruments contextualisés et des normes d’évaluation et de suivi de la qualité de l’éducation... » « ... l’introduction d’un choix et d’une concurrence élargis dans l’offre éducative, doivent comporter des garanties adéquates contre d’éventuelles conséquences inéquitables sur les pauvres et les exclus. » •  Le rapport 2009 sur l’éducation pour tous (EPT) met en évidence les carences de nombreuses initiatives privées en matière d’éducation. •  La Conférence mondiale sur l’enseignement supérieur (Unesco juillet 2009) : le communiqué final réaffirme le caractère de « bien public » de l’enseignement (supérieur), fait plusieurs références à « l’assurance-qualité », et demande « des mécanismes de contrôle et d’assurance-qualité pour tout le secteur de l’enseignement supérieur ». •  La Conférence générale de l’Unesco (septembre/octobre 2009) : Le texte adopté stipule notamment : «… appuyer la mise en place de cadres pour l’ensemble du secteur de l’éducation en renforçant les capacités nationales afin de planifier et gérer tout le secteur éducatif et veiller à ce que les systèmes éducatifs soient de qualité et équitable… ».

Bureau international d’éducation : Conclusions et recommandations de la 48e session de la Conférence internationale de l’éducation (CIE), Genève, 25-28 novembre 2008 : « Renforcer la capacité des gouvernements d’orienter, de promouvoir et d’assurer le suivi de la mise en œuvre d’une éducation équitable de haute qualité, en étroite collaboration avec la société civile et le secteur privé. » « … la responsabilité générale de la promotion de l’inclusion implique l’engagement actif de tous les acteurs sociaux, le gouvernement ayant un rôle directeur et régulateur, conformément, le cas échéant, à la législation nationale. »

L’Appel de Bruxelles, mai 2008 : Un symposium réunissant plus de 50 représentants d’États et d’organisations internationales a été organisé à Bruxelles en février 2008 par la Communauté française de Belgique, avec le soutien de l’OIF et de l’Unesco. Des organisations aussi importantes que l’Union africaine, la Francophonie (OIF et Confemen), l’Alecso, l’Unesco (par la voix du président de son Conseil exécutif) ou l’Internationale de l’éducation, y ont fait part de leur engagement affirmé en faveur de la régulation par l’État du système éducatif national. Le symposium a adopté « l’Appel de Bruxelles », document diffusé en 4 langues : français, anglais, espagnol et arabe.

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Wallonie-Bruxelles International (WBI) est l’agence chargée des relations internationales Wallonie-Bruxelles. Elle est l’instrument de la politique internationale menée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, la Wallonie et la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale. Dans le cadre d’accords avec 71 pays et régions, WBI soutient les créateurs et entrepreneurs de Wallonie-Bruxelles. WBI fait la promotion des composantes de Wallonie-Bruxelles en tant qu’entités dotées d’une capacité d’action internationale et défend les valeurs et intérêts de chacune des parties, dans un esprit de coopération et d’entraide mutuelle. Des actions sont menées dans le cadre de la culture, des droits de l’homme, des échanges de jeunes, de l’enseignement et de la formation, de l’enseignement supérieur, de la santé et des affaires sociales, de l’environnement, de la recherche scientifique, de la coopération au développement ainsi que dans le domaine sportif. Wallonie-Bruxelles International exerce aussi son action à travers un réseau de Délégations ayant statut diplomatique à Alger, Berlin, Bucarest, Dakar, Genève, Hanoï, Kinshasa, La Haye, Paris, Pekin, Prague, Québec, Rabat, Santiago du Chili, Tunis, Varsovie et Bruxelles ( Représentation auprès de l’Union Européenne).

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L’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) est une institution fondée sur le partage d’une langue, le français, et de valeurs communes. Elle rassemble à ce jour 77 États et gouvernements dont 57 membres et 20 observateurs, totalisant une population de 900 millions de personnes. Le Rapport sur la langue française 2010 établit à 220 millions le nombre de locuteurs de français. Présente sur les cinq continents, l’OIF mène des actions politiques et de coopération dans les domaines prioritaires suivants : la langue française et le multilinguisme ; la diversité culturelle ; la paix, la démocratie et les droits de l’Homme ; l’éducation et la formation ; l’économie ; le développement durable. Dans l’ensemble de ses actions, l’OIF accorde une attention particulière aux jeunes et aux femmes ainsi qu’à l’accès aux technologies de l’information et de la communication. Depuis 2010 l’OIF s’est résolument engagée auprès de ses États et gouvernements membres pour les appuyer dans leur rôle régulateur de la qualité de l’éducation et de l’équité de sa distribution sur le territoire national.

57 États et gouvernements membres Albanie • Principauté d’Andorre • Arménie • Royaume de Belgique • Bénin • Bulgarie • Burkina Faso • Burundi • Cambodge • Cameroun • Canada • Canada-Nouveau-Brunswick • Canada-Québec • Cap-Vert • République centrafricaine • Chypre • Comores • Congo • République démocratique du Congo • Côte d’Ivoire • Djibouti • Dominique • Égypte • Ex-République yougoslave de Macédoine • France • Gabon • Ghana • Grèce • Guinée • Guinée-Bissau • Guinée équatoriale • Haïti • Laos • Liban • Luxembourg • Madagascar • Mali • Maroc • Maurice • Mauritanie • Moldavie • Principauté de Monaco • Niger • Qatar • Roumanie • Rwanda • SainteLucie • Sao Tomé-et-Principe • Sénégal • Seychelles • Suisse • Tchad • Togo • Tunisie • Vanuatu • Vietnam • Fédération Wallonie-Bruxelles

20 observateurs Autriche • Bosnie-Herzégovine • Croatie • République dominicaine • Émirats arabes unis • Estonie • Géorgie • Hongrie • Lettonie • Lituanie • Monténégro • Mozambique • Pologne • Serbie • Slovaquie • Slovénie • République tchèque • Thaïlande • Ukraine • Uruguay

Édité par la Direction de la communication et des partenariats, juillet 2014. Photo de couverture : École d’Ambohibao (Madagascar), ©Ifadem, 2012. ISBN : 978-92-9028-391-1