Panorama de jurisprudence - La Lettre des Réseaux

29 janv. 2016 - établissements de service ou de location de matériel. (comme les ..... l'article L. 341-2, sont exonérées de cette qualification les clauses dont il ...
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Introduction Ce « Panorama de jurisprudence » rassemble les principales décisions (environ 120) ayant retenu notre attention au titre de l’année 2015, en droit de la distribution et droit de la franchise. Ces décisions ont été sélectionnées à partir de différents critères : leur intérêt pratique, leur valeur de principe, leur caractère novateur ou simplement « éclairant » pour celles et ceux qui s’intéressent à ce domaine du droit, et ont la volonté d’anticiper ses évolutions, plutôt que de les subir. Il s’inscrit bien sûr dans la continuité des chroniques de jurisprudence que nous avions publiées aux Petites Affiches à compter de 2006 et du Panorama de Jurisprudence publié il y a un an, dont la vocation commune est de présenter les solutions dégagées par la jurisprudence, exercice stimulant et stimulé par la nature prétorienne de la matière. Nos commentaires s’articulent en trois rubriques : « Ce qu’il faut retenir », pour résumer le sens de la solution dégagée ;

« Pour approfondir », pour mettre en évidence les motifs de la décision ; « A rapprocher », qui renvoie à une décision antérieure. L’ensemble s’articule autour de treize thèmes : la formation du contrat, sa requalification, son interprétation, son exécution, sa résiliation ; à quoi il faut ajouter les obligations post-contractuelles, le contentieux de l’indemnisation, la rupture des relations commerciales établies, les aspects processuels du droit des contrats, le droit de la concurrence, le déséquilibre significatif, le droit de la consommation, le droit international. Cet ensemble est précédé d’une présentation rapide des textes qui, au titre de l’année 2015, ont également retenu notre attention. Nous espérons ainsi que ce « Panorama de jurisprudence » constituera un véritable outil, simple et complet, dans la gestion quotidienne de vos problématiques. Excellente lecture. SIMON Associés

SOMMAIRE TEXTES MAJEURS L’impact de la loi Macron sur les contrats de distribution Loi n°2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques du 6 août 2015 La loi du 31 juillet 2014 (loi ESS) déclarée pour partie non conforme à la Constitution Décision n°2015-476 QPC, 17 juillet 2015 Impact de la loi Hamon sur les négociations entre fournisseurs et distributeurs Réponse ministérielle du 15 octobre 2015 Délais de paiement pour certains secteurs d'activité présentant un caractère saisonnier Décret n°2015-1484 du 16 novembre 2015, JORF 17 novembre 2015, p. 21425 Le « Name and Shame » et les nouvelles mesures destinées à réduire les délais de paiement Communiqué de presse, Ministère de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, 23 novembre 2015

p. 7 p. 15 p. 16 p. 17 p. 18

FORMATION DU CONTRAT La clause de « déclarations préalables » dans les contrats de franchise Réflexion d’ensemble Le franchiseur qui n'a pas remis d’état local du marché peut-il reprocher à son franchisé de n’avoir pas réalisé d’étude de marché ? Analyse jurisprudentielle d'ensemble Devoir du franchisé de se renseigner CA Paris, 7 octobre 2015, RG n°13/09827 L’étendue de l’information précontractuelle Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-15.052 L’obligation de mentionner le parcours judiciaire antérieur du dirigeant dans le DIP CA Paris, 14 janvier 2015, RG n°12/18716 Le franchisé doit démontrer les insuffisances du DIP ayant effectivement vicié son consentement Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-15.052 L’absence de responsabilité pour les prévisionnels : panorama des critères pris en compte CA Paris, 16 septembre 2015, RG n°13/08191 Responsabilité du franchiseur dans l’établissement des prévisionnels : système du « tout ou rien » Cass. com., 17 mars 2015, pourvoi n°13-24.853 Comptes d’exploitation prévisionnels et défaut de responsabilité de la banque CA Metz, 26 mai 2015, RG n°14/00446 Comptes prévisionnels irréalistes et devoir de mise en garde de la Banque CA Versailles, 5 novembre 2015, RG n°13/06537 Comptes prévisionnels et clause d’objectif minimum CA Montpellier, 10 mars 2015, RG n°13/06718 Absence de caractère sérieux des prévisionnels et nullité du contrat de franchise Cass. com., 17 mars 2015, pourvoi n°13-24.853 Nullité du contrat de franchise : causes incertaines et conséquences pérennes CA Colmar, 30 septembre 2015, RG n°14/02315 Titularité du savoir-faire et validité du contrat de franchise de l’établissement pilote CA Bordeaux, 13 janvier 2015, RG n°12/03199 Absence de vice du consentement et rejet de la demande de nullité du contrat CA Paris, 7 janvier 2015, RG n°12/19741 Concession exclusive : territoire concédé et dol Cass. Com., 17 mars 2015, pourvoi n°14-10.595, 296 Juris-Data n°2015-006070 Rétractation de l’offre avant son acceptation CA Paris, 28 mai 2015, RG n°14/01791

p. 19

p. 20 p. 22 p. 23 p. 24 p. 24 p. 25 p. 26 p. 26 p. 28 p. 32 p. 34 p. 35 p. 36 p. 36 p. 37 p. 38

REQUALIFICATION DU CONTRAT Le statut de gérant de succursale Tour d’horizon (mise à jour au 11 septembre 2015) Application aux contrats de distribution du statut de gérant de succursales Cass. soc. 16 septembre 2015, pourvoi n°14-17.371, publié au Bulletin L’exclusivité d’approvisionnement dans les faits : le franchisé devient gérant de succursale Cass. soc., 23 juin 2015, pourvoi n°13-26.361 Distinction agent commercial et apporteur d’affaires CA Grenoble, 3 septembre 2015, RG n°14/00467, Juris-Data n°2015-020177 Agent commercial et contrat de travail CA Paris, 26 mai 2015, RG n°12/12014  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

p. 38 p. 41 p. 43 p. 44 p. 44

Société créée de fait entre un agent commercial et ses sous-agents Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-14.636 Requalification d’une clause d’astreinte en clause pénale ème Cass. civ. 2 , 3 septembre 2015, pourvoi n°14-20.431, Juris-Data n°2015-019449

p. 45 p. 46

INTERPRETATION DU CONTRAT Nature juridique de la pénalité de retard de l’article L.441-6 du Code de commerce Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-15.968 Exclusivité territoriale et interprétation stricte des termes du contrat CA Paris, 15 janvier 2015, RG n°12/12120 Budget de communication et affectation des dépenses engagées par le franchiseur CA Versailles, 29 septembre 2015, RG n°14/00467 La relation entre un avocat et son client confrontée au droit économique Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-22.578

p. 47 p. 48 p. 49 p. 50

EXECUTION DU CONTRAT Contrat de distribution sélective et revente par un distributeur non agréé Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12.272 Le changement de contrôle de la société franchiseur sans incidence sur la poursuite du contrat Trib. com., 12 juin 2015, RG n°2014J01221 Agent commercial : modification du contrat et clause de non-concurrence Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-14.820 Exception d’inexécution : la charge de la preuve appartient au débiteur Cass. com., 4 février 2015, pourvoi n°13-28.808 Rejet de l’exception d’inexécution pour justifier du non-paiement de redevance CA Paris, 28 janvier 2015, RG n°10/15692 Conséquences de l’absence de critiques du franchiseur au cours de l’exécution du contrat CA Angers, 17 février 2015, RG n°13/00964 Juris-Data n°2015-004872 Application d’une clause pénale prévue dans les conditions générales d’achat CA Paris, 2 juillet 2015, RG n°13/22486 La transaction doit être exécutée de bonne foi CA Paris, 30 octobre 2015, RG n°14/23955

p. 52 p. 53 p. 53 p. 54 p. 55 p. 56 p. 57 p. 58

RESILIATION DU CONTRAT Précisions sur l’application des procédures contractuelles de résiliation CA Rouen, 2 juillet 2015, RG n°13/06851 Relation de confiance affectée : résiliation immédiate et sans indemnité des contrats Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-25.783 Résiliation fautive du franchisé ne justifiant pas d’un manquement grave du franchiseur CA Nîmes, 7 mai 2015, RG n°14/02593 Condamnation à la poursuite du contrat après application de mauvaise foi d’une clause résolutoire CA Paris, 10 février 2015, RG n°14/02110 Résiliation anticipée d’un contrat avant le terme et sans préavis et paiement des mensualités Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-22.573 Extinction du droit à commission de l’agent commercial Cass. com., 31 mars 2015, pourvois n°14-10.346 et 14-10.654

p. 58 p. 59 p. 59 p. 60 p. 61 p. 62

OBLIGATIONS POST-CONTRACTUELLES Contrat de réservation contenant une clause de non-concurrence post-contractuelle CA Limoges, 5 novembre 2015, RG n°13/01241 Clause de non-concurrence : le partenaire doit connaître l'étendue de ses droits Cass. soc., 2 décembre 2015, pourvoi n°14-19.029, Juris-Data n°2015-027022, Publié au Bulletin Interdiction d’utiliser les couleurs liées aux signes distinctifs d’un réseau : engagement perpétuel ? CA Colmar, 3 juin 2015, RG n°14/03031 Sortie de réseau et cessation d’usage des signes distinctifs CA Douai, 8 avril 2015, RG n°14/02671

p. 63 p. 65 p. 65 p. 66

CONTRAT ET INDEMNISATION Le juge ne peut refuser l’indemnisation pour un manquement avéré à une obligation de résultat Cass. com., 23 juin 2015, pourvoi n°14-10.133 Violation des critères de qualité du site internet du distributeur : préjudice non prouvé CA Lyon, 7 mai 2015, RG n°14/01041 Rupture fautive du contrat de franchise et préjudice par ricochet CA Toulouse, 21 janvier 2015, RG n°12/03975 Responsabilité du concédant par suite d’une faute de son concessionnaire auprès d’un tiers Cass. com. 6 octobre 2015, pourvoi n°13-28.212

 Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

p. 67 p. 67 p. 68 p. 69

Indemnité de l’agent commercial et rupture des négociations pour le renouvellement du contrat CA Paris, 17 décembre 2015, RG n°14/05560

p. 61

RUPTURE DES RELATIONS COMMERCIALES ETABLIES La notification de la rupture doit être dépourvue de toute équivoque CA Paris, 20 mai 2015, RG n°13/03888 La détermination du point de départ du préavis en présence d’un appel d’offres notifié par courriel Cass. com., 8 décembre 2015, pourvoi n°14-18.228 Durée du préavis : rupture des relations avec deux sociétés d’un même groupe Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°14-19.499 Renégociation du contrat et préavis en cas de rupture d’une relation commerciale établie CA Paris, 14 octobre 2015, RG n°13-09.610 Rupture brutale des relations commerciales et charge de la preuve CA Paris, 17 décembre 2015, RG n°14/18277 La rupture n’est pas brutale lorsque le concédant ne fait que constater une rupture déjà intervenue CA Paris, 2 septembre 2015, RG n°13/06947

p. 70 p. 71 p. 73 p. 74 p. 75 p. 76

CONTRAT ET ASPECTS PROCESSUELS Le fabuleux destin de la clause pénale CA Toulouse, 14 octobre 2015, RG n° 13/00325, et projet de réforme Le projet de réforme du droit des contrats et la lutte contre les clauses abusives Commission des clauses abusives, communiqué du 22 mai 2015 Prescription de l’action pour dol : rien ne sert de courir… ère Cass. civ. 1 , 10 septembre 2015, pourvoi n°14-13.863 Le régime contractuel des factures, prescription et responsabilité ère Cass. civ. 1 , 3 juin 2015, pourvoi n°14-10.908 La clause attributive de juridiction demeure applicable à la suite de la résiliation du contrat CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639 Arbitrage : la notion de clause compromissoire « manifestement inapplicable » ère er Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, pourvois n°14-11.587 et n°14-13.648 (deux arrêts) Arbitrage interne et rupture brutale de relations commerciales établies ère Cass. civ. 1 , 21 octobre 2015, pourvoi n°14-25.080 Clause compromissoire et action fondée sur l’article L.442-6 du Code de commerce ère Cass. civ. 1 , 21 octobre 2015, pourvoi n°14-25.080 Cessation des commandes et existence de contestations sérieuses CA Poitiers, 30 octobre 2015, RG n°15/03468 Référé-provision et bouleversement des circonstances d'exécution CA Paris, 5 mars 2015, RG n°13/21497 Le franchiseur peut faire interdire sous astreinte l’activité concurrente de son franchisé CA Montpellier, 17 décembre 2015, RG n°15/04662

p. 77 p. 78 p. 78 p. 79 p. 80 p. 80 p. 82 p. 83 p. 83 p. 84 p. 85

CONCURRENCE Avis n° 15-A-06 du 31 mars 2015 relatif au rapprochement des centrales d’achat et de référencement dans le secteur de la grande distribution Regroupements de centrales d'achat dans le secteur de la grande distribution et pratiques restrictives de concurrence Réponse ministérielle Seuils de chiffres d’affaires pour l’information préalable de l’Autorité de la concurrence Décret n°2015-1671 du 14 décembre 2015 Injonction structurelle : le renforcement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence jugé non conforme à la Constitution Décision n°2015-715 DC du 5 août 2015 du Conseil constitutionnel Nouvelles règles applicables au programme de clémence Communiqué de procédure du 3 avril 2015 relatif au programme de clémence Lourdes sanctions infligées à une entente entre fournisseurs de la grande distribution alimentaire ADLC, 11 mars 2015, décision n°15-D-03 L’engagement de Booking.com devant l’Autorité de la concurrence : la fin des clauses de parité ? Décision n°15-D-06 du 21 avril 2015 de l’Autorité de la concurrence française L’annonce publique du prix de vente de ses produits par le fournisseur constitue une évocation des prix er ADLC, 1 décembre 2015, 15-D-18 Condamnation record d’Orange pour des abus sur le marché de la clientèle « entreprise » Décision 15-D-20 de l’Autorité de la concurrence du 17 décembre 2015 Droit de préemption et Pratique anticoncurrentielle CA Metz, 27 janvier 2015, RG n°15/00042 Droit de préemption et pratiques anticoncurrentielles CA Metz, 27 janvier 2015, RG n°12/02421 Contrat d'importation et absence de restriction de concurrence prohibée CA Paris, 24 juin 2015, Juris-Data n°2015-015706  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

p. 86 p. 88 p. 88 p. 89 p. 94 p. 95 p. 96 p. 98 p. 99 p. 100 p. 101 p. 102

L.442-6 I 1° C. com. : condamnation de grossistes pour tentative et obtention d’avantage indu CA Paris, 15 janvier 2015, RG n°13/03832 Prix de référence dans les publicités de réduction de prix CJUE, 8 septembre 2015, Aff. C-13/15 Vers une obligation de préciser le prix des logiciels pré-installés sur un ordinateur ? ère Cass. civ. 1 , 17 juin 2015, pourvoi n°14-11.437 Contrat de distribution sélective et concurrence déloyale Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12.272 Juris-Data n°2015-007283 Concurrence parasitaire et reprise du slogan d’un concurrent Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242 Le parasitisme par la reprise (approximative) d’un slogan Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242

p. 102 p. 103 p. 104 p. 105 p. 106 p. 106

DESEQUILIBRE SIGNIFICATIF Le déséquilibre significatif, entre droit spécial de la concurrence et droit commun Projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats Déséquilibre significatif : appréciation de l’équilibre global de la relation Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-27.525 Indice du déséquilibre significatif : absence de réciprocité et de contrepartie TC Paris, 7 mai 2015, RG n°205000040 Déséquilibre significatif : nouveau revers pour la distribution alimentaire Cass. com., 27 mai 2015, pourvoi n°14-11.387 Déséquilibre significatif et juridiction des référés CA Paris, 22 janvier 2015, RG n°14/17588

p. 107 p. 109 p. 109 p. 110 p. 111

CONSOMMATION Composition et fonctionnement du Conseil national de la consommation depuis l’entrée en vigueur du décret du 12 janvier 2015 Annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur Arrêté du 11 mars (JO 24 mars 2015, p. 5378) L’allègement des règles en matière d’annonces de réductions de prix Arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur Paiement et Moyens de paiement Présentation du Décret n°2015-293 du 16 mars 2015 Communication des références de carte bancaire et protection du consommateur Réponse ministérielle Article 210 de la loi Macron : exclusion du droit de rétractation de 14 jours pour les contrats hors établissement en matière immobilière L’envoi d’un courrier personnalisé suivi d’une vente en magasin constitue un « démarchage » ère Cass. civ. 1 , 4 février 2015, pourvoi n°14-11.002 Modification du bon de commande et nouveau délai de rétractation CA Grenoble, 5 mai 2015, RG n°12/02255 L’étiquetage de denrées alimentaires ne doit pas induire le consommateur en erreur CJUE, 4 juin 2015, Aff. C-195/14 Vente et garantie des biens de consommation : clarification des règles de protection des consommateurs CJUE, 4 juin 2015, Aff. C-497/13

p. 111 p. 112 p. 113 p. 114 p. 115 p. 115 p. 116 p. 116 p. 117 p. 120

INTERNATIONAL Conflit de lois en matière contractuelle ère Cass. civ. 1 , 16 septembre 2015, pourvoi n°14-10.373 Contrats internationaux et application de la loi française CEPC, avis n°15-08, 26 mars 2015 Régime juridique des clauses attributives de juridiction dans l’Union Européenne ère Cass. civ. 1 , 7 octobre 2015, pourvoi n°14-16.898 En droit international privé, connaître le droit applicable n’est pas connaître le juge compétent Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-14.924 Agent français, mandant allemand, clientèle algérienne : quel est le juge compétent ? Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°13-18.704 Compétence des juridictions judiciaires en matière d'exequatur de sentences arbitrales étrangères Cass. civ. 1, 8 juillet 2015, pourvoi n°13-25.846 Echange de devises traditionnelles contre des « bitcoin » : exonération de TVA CJUE, 22 octobre 2015, Aff. C-264/14 Directive relative aux actions civiles en réparation des dommages concurrentiels Directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil, 26 novembre 2014 Rapport 2015 de l’OMPI Rapport 2015 de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI)  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

p. 120 p. 123 p. 125 p. 126 p. 127 p. 127 p. 127 p. 128 p. 129

Nouvelle réglementation sur les investissements étrangers en Chine Décret n°2 de l’année 2015 du MOFCOM La Loi sur les marques en vigueur en Chine : Bilan et perspectives Mise à jour au 13 avril 2015 Nouvelle loi sur la publicité en Chine Loi du 24 avril 2015 Réglementation relative au commerce extérieur au Maroc Projet de loi du 22 octobre 2015

 Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

p. 130 p. 132 p. 133 p. 135

TEXTES MAJEURS L’impact de la loi Macron sur les contrats de distribution Loi n°2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques du 6 août 2015 Ce qu’il faut retenir : Au nombre des textes majeurs adoptés au cours de l’année 2015, figure la loi n°2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques du 6 août 2015, laquelle comporte des dispositions impactant directement les réseaux de distribution.

commerçants, autre que celles mentionnées aux er chapitres V et VI du titre II du livre I du présent code, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l'article L. 330-3 et, d'autre part, toute personne exploitant, pour son compte ou pour le compte d'un tiers, un magasin de commerce de détail, ayant pour but commun l'exploitation de ce magasin et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d'exercice par cet exploitant de son activité commerciale prévoient une échéance commune. « La résiliation d'un de ces contrats vaut résiliation de l'ensemble des contrats mentionnés au premier alinéa du présent article.

Pour approfondir :

« Le présent article n'est pas applicable au contrat de bail dont la durée est régie par l'article L. 145-4, au contrat d'association et au contrat de société civile, commerciale ou coopérative.

L’article 31 de la loi Macron (anciennement 10 A) complète le livre III du Code de commerce d'un titre IV intitulé « Des réseaux de distribution commerciale » comportant deux nouveaux articles L. 341-1 et L. 3412. Ainsi que l’a précisé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 5 août 2015, ces deux textes ont vocation à « encadrer les relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les exploitants de ème commerces de détail affiliés à de tels réseaux » (20 Considérant).

« Art. L. 341-2. - I. - Toute clause ayant pour effet, après l'échéance ou la résiliation d'un des contrats mentionnés à l'article L. 341-1, de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant qui a précédemment souscrit ce contrat est réputée non écrite. « II. - Ne sont pas soumises au I du présent article les clauses dont la personne qui s'en prévaut démontre qu'elles remplissent les conditions cumulatives suivantes :

I/ TEXTE DEFINITIF

« 1° Elles concernent des biens et services en concurrence avec ceux qui font l'objet du contrat mentionné au I ;

 Texte. L’article 31 de la loi Macron (anciennement 10 A) complète le livre III du code de commerce d'un titre IV intitulé « Des réseaux de distribution commerciale » comportant deux nouveaux articles L. 341-1 et L. 341-2. Ainsi que l’a précisé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 5 août 2015, ces deux textes ont vocation à « encadrer les relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les exploitants de commerces de détail affiliés à de tels ème réseaux » (20 Considérant). Le texte définitivement adopté est rédigé comme suit : « I. - Le livre III du code de commerce est complété par un titre IV ainsi rédigé : « TITRE IV « DES RÉSEAUX DE DISTRIBUTION COMMERCIALE « Art. L. 341-1. - L'ensemble des contrats conclus entre, d'une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des

« 2° Elles sont limitées aux terrains et locaux à partir desquels l'exploitant exerce son activité pendant la durée du contrat mentionné au I ; « 3° Elles sont indispensables à la protection du savoirfaire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat mentionné au I ; « 4° Leur durée n'excède pas un an après l'échéance ou la résiliation d'un des contrats mentionnés à l'article L. 341-1. II. - Le I s'applique à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la date de promulgation de la présente loi. III. - Dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dans lequel il présente des mesures concrètes visant à renforcer la concurrence dans le secteur de la grande distribution en facilitant les changements d'enseignes afin

 Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

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d'augmenter le pouvoir d'achat des Français, de diversifier l'offre pour le consommateur dans les zones de chalandise tout en permettant au commerçant de faire jouer la concurrence entre enseignes, notamment au niveau des services que celles-ci proposent. » Ce texte alambiqué suscite le commentaire.

II/ COMMENTAIRE  Distinction. En introduisant les nouveaux articles L.341-1 et L.341-2 au code de commerce, l’article 31 de la loi Macron instaure un droit spécial des contrats de distribution, qui conduit l’analyse à distinguer, d’une part, la notion de contrat relevant de l’article L.341-1 du code de commerce (1) et, d’autre part, le régime applicable aux contrats ainsi définis (2).

1/

Notion de contrat relevant de l’article L. 3411 du code de commerce

 Critères. Tous les contrats de distribution n’entrent pas dans la notion des contrats relevant de l’article L.341-1 du Code de commerce. Le champ d’application de ce texte reste assez flou compte tenu de la maladresse rédactionnelle qui le caractérise. Aussi, convient-il de revenir sur les deux séries de critères cumulatifs qui déterminent les contrats entrant dans le champ d’application de ce texte : le premier est relatif aux personnes signataires du contrat (a) ; le second concerne la nature même du contrat considéré (b).

a/

Personnes concernées

 Rappel du texte. Sont visés par l’article L.341-1 du code de commerce, les contrats conclus entre deux catégories de personnes : -

-

d’une part, « une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, autre que celles mentionnées aux er chapitres V et VI du titre II du livre I du présent code, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l'article L. 3303 [du code de commerce] » (i) ; et, d’autre part, « toute personne exploitant, pour son compte ou pour le compte d’un tiers, au moins un magasin de commerce de détail » (ii).

Il convient de commenter chacune de ces deux propositions.

i/

Les personnes physiques ou morales de droit privé autres que celles mentionnées aux chapitres V et er VI du titre II du livre I du présent code  Commerçants et services mentionnés à l’article L. 330-3 du code de commerce. En premier lieu, en visant toute personne « mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l’article L. 330-3 [du code de commerce] », l’article 31 de la loi Macron s’avère a priori d’application large dès lors que l’article L.330-3 du code de commerce vise la mise à disposition d'un « nom commercial, une marque ou une enseigne » ; sont ainsi visés tous les réseaux de distribution regroupant des magasins sous une enseigne (un nom commercial ou une marque) commune.  Exclusion implicite. Toutefois, il convient de s’interroger sur la portée exacte du membre de phrase « regroupant des commerçants » qui, séparé du reste de la phrase par la conjonction de coordination « ou », pourrait donner le sentiment d’y intégrer, plus largement encore, l’ensemble des groupements de commerçants, disposant – ou non – des services mentionnés au premier alinéa de l’article L. 3303 précité ; à cet égard, le texte n’est pas d’une grande clarté. Autrement dit, les magasins de commerce de détail qui ne seraient pas regroupés sous une enseigne commune pourraient également entrer dans les prévisions de ce texte. Mais, selon nous, le champ d’application du texte n’englobe pas les contrats de distribution signés par les exploitants de commerce de détail avec des entités autres que les réseaux de distribution. D’une part, tel ne semble pas être l’objectif poursuivi par le législateur. D’autre part, c’est ce que le Conseil constitutionnel souligne nettement lorsqu’il précise expressément, pour justifier de l’absence d’atteinte manifestement disproportionnée à la liberté contractuelle et aux conventions légalement conclues, que « les dispositions des articles L.341-1 et L.341-2 du code de commerce ne s’appliquent qu’aux contrats conclus entre des réseaux de distribution et des exploitants de ème commerce de détail » (25 Considérant). Au plan pratique, devraient donc échapper à l’application de ce texte les contrats signés par les commerçants exploitant un magasin de commerce de détail et les fournisseurs (autres que les fournisseurs entrant dans la catégorie des réseaux de distribution, c’est-à-dire disposant d’une centrale d’achat).  Exclusion expresse. Les personnes morales mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier du code de commerce, c'est-à-dire les magasins collectifs de commerçants indépendants (chapitre V)

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et les sociétés de caution mutuelle (chapitre VI), sont expressément exclues de son champ d’application.

des commerçants qui exploitent un « magasin de commerce de détail ».

Les magasins collectifs de commerçants indépendants sont mentionnés au chapitre V du titre II du livre Ier du code de commerce. Ils sont définis par l'article L. 125-1 du code de commerce, selon lequel : « Les dispositions du présent chapitre s'appliquent aux personnes physiques ou morales réunies dans une même enceinte, sous une même dénomination, pour exploiter, selon des règles communes, leurs fonds de commerce ou leurs entreprises immatriculées au répertoire des métiers sans en aliéner la propriété, créant ainsi un magasin collectif de commerçants indépendants ». On le sait, la forme juridique du magasin collectif de commerçants indépendants est déterminée par ses membres, conformément à l’article L. 125-1, alinéa 3 du code de commerce, selon lequel : « peuvent seuls être considérés comme

La notion de « magasin de commerce de détail » ne fait l’objet d’aucune définition légale, même si cette terminologie est fréquemment utilisée (voir par exemple l’article L. 430-2 du code de commerce ; voir aussi, pour un exemple récent : décret n° 2015-165 du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial) ; elle ne souffre en soi aucune difficulté significative. Aussi, on rappellera – pour mémoire – la définition qu’en donne l’Autorité de la concurrence (Lignes directrices de l’Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, spéc. §.75) : « La notion de commerce de détail doit être définie par référence aux règles applicables en matière d’équipement commercial. Un magasin de commerce de détail s’entend comme un magasin qui effectue essentiellement, c’est-à-dire pour plus de la moitié de son chiffre d’affaires, de la vente de marchandises à des consommateurs pour un usage domestique. Est incluse la vente d’objets d’occasion (brocante, dépôts vente, etc.). Sont traditionnellement assimilées à du commerce de détail, bien que ne constituant pas de la vente de marchandises, un certain nombre de prestations de service à caractère artisanal (pressing, coiffure et esthétique, cordonnerie, photographie, entretien véhicules et montage de pneus). Sont toujours exclues les prestations de service à caractère immatériel ou intellectuel (comme les banques, l’assurance, ou les agences de voyage) ainsi que les établissements de service ou de location de matériel (comme les laveries automatiques ou les vidéothèques), et les restaurants. Sont aussi exclues les entreprises qui réalisent la totalité de leurs ventes en ligne, l’article L. 430-2, II précisant que ne sont concernées que les entreprises qui exploitent au moins un magasin » [Voir aussi, la définition moins « juridique » que l’Insee donne de la notion de « commerce de détail » : « Le commerce de détail consiste à vendre des marchandises dans l'état où elles sont achetées (ou après transformations mineures) généralement à une clientèle de particuliers, quelles que soient les quantités vendues. Outre la vente, cette activité de commerce de détail peut aussi recouvrir la livraison et l'installation chez le client (de meubles ou d'électroménager par exemple) »]. Une liste des commerces de détail figure en outre sous l’annexe 7-4 à l’article A.713-26 du code de commerce.

magasins collectifs de commerçants indépendants, et sont seuls autorisés à prendre ce titre et à l'adjoindre à leur dénomination, les groupements d'intérêt économique, les sociétés anonymes à capital variable et les sociétés coopératives de commerçants détaillants qui se conforment, pour leur constitution et leur fonctionnement, aux prescriptions du présent chapitre ». Dans tous les cas et conformément à l’article L. 125-2 du code de commerce, la personne morale ainsi constituée dispose de la propriété et la jouissance (ou seulement la jouissance) des bâtiments et aires annexes du magasin collectif, définit et met en œuvre la politique commune, et organise et gère les services communs. Les sociétés de caution mutuelle sont mentionnées au chapitre VI du titre II du livre Ier du code de commerce. Il s’agit des établissements de crédit constitués en sociétés coopératives entre commerçants, industriels, artisans, sociétés commerciales et membres de professions libérales ayant pour objet d'apporter une garantie bancaire à leurs membres. Elles garantissent le remboursement d'un emprunt bancaire réalisé dans le cadre d'investissements professionnels en garantissant directement l'emprunteur auprès de la banque ou en contre-garantissant la banque qui prend le risque. ii/

Personnes exploitant, pour leur compte ou pour le compte d’un tiers, un magasin de commerce de détail

 Magasins de commerce de détail. Le texte précise que les contrats considérés doivent être conclus par

 Exclusions. En visant tous les commerces de détail mais rien que les commerces de détail, le champ d’application du texte n’englobe donc pas les contrats de distribution signés par les réseaux de distribution (ou tête de réseau) avec :

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en amont, leur fournisseurs, en aval, des commerces n’entrant pas dans la catégorie des commerces de détail, tels que (notamment) les grossistes, les restaurants, les agences de voyage, etc.

 Pour leur compte ou pour le compte d’un tiers. Les modalités d’exploitation du commerce de détail sont indifférentes au regard du champ d’application du texte ; sont ainsi visées toutes les formes d’exploitation, sans exception. b/

Nature du contrat

 Rappel du texte. Le nouvel article L.341-1 du code er de commerce vise en son 1 alinéa : « l’ensemble des contrats […] ayant pour but commun l’exploitation de ce magasin et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son ème activité commerciale » (nous soulignons). Son 3 alinéa précise toutefois : « Le présent article n'est pas applicable au contrat de bail dont la durée est régie par l'article L. 145-4, au contrat d'association et au contrat de société civile, commerciale ou coopérative ». Autrement dit, relèvent ainsi du champ d’application du texte les contrats remplissant deux conditions cumulatives (i), à savoir : d’une part, avoir pour but commun l’exploitation du magasin (i.α) ; et, d’autre part, comporter des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant (i.β). Les contrats d’association et les contrats de société civile, commerciale ou coopérative échappent par nature à l’application du texte (ii). i/ Double condition (α) Contrats ayant pour but commun l’exploitation de ce magasin  But commun. L’exigence d’un « but commun » des contrats renvoie à la notion d’ensemble contractuel ou de groupe de contrats. Les ensembles contractuels se réfèrent en effet à « une association de contrats concomitants ou successifs » visant une « opération économique » commune ou ayant le même objet. Cette notion a été largement consacrée au fil des années par la jurisprudence, en dépit du caractère fluctuant des solutions retenues. Ainsi, en 1995, dans un arrêt de principe, la Cour de cassation a tout d’abord retenu que « l’indivisibilité des conventions [repose] sur la considération de

chacune d’entre elles par les parties comme une condition de l’existence des autres et non pas sur la nature spécifique de l’objet loué par rapport aux utilisations envisagées » (Cass. com. 4 avr. 1995, n°9314.585 et 93-20.029). Par la suite, pour qualifier un ensemble contractuel, la jurisprudence a pu retenir les notions d’« interdépendance » (Cass. com., 12 juin 2001, n°98-19.787) ou d’« indivisibilité » (Cass. com., 5 juin 2007, n°04-20.380), exigeant que les conventions concernées participent à une opération économique envisagée comme commune, tout en prenant en compte la volonté des parties de rendre les contrats en question interdépendants ou indivisibles (Cass. civ. ère 1 , 13 nov. 2008, n°06-12.920). Dans cette configuration, la notion d’ensemble contractuel est subjective et varie en fonction du cas d’espèce. Dès lors, l’interprétation de la volonté des parties à de telles opérations est réservée à l’appréciation ère er souveraine des juges du fond (Cass. civ. 1 , 1 juil. 1997, n°95-15.642), ces derniers motivant leurs décisions sur des critères concrets, pouvant éventuellement permettre d’identifier un contrat principal et un ou plusieurs contrats accessoires. La liberté contractuelle a donc une place importante, notamment en ce qui concernait les clauses de divisibilité insérées à l’ensemble contractuel. Par deux arrêts du 17 mai 2013, la Cour de cassation réunie en chambre mixte est intervenue afin de clore un débat jurisprudentiel et doctrinal sur cette notion d’interdépendance ou d’indivisibilité des contrats (Cass. Ch. Mixte, 17 mai 2013, n°11-22.768 et 1122.927). Dans ces arrêts, la Cour de cassation pose le principe selon lequel « les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance ». La Cour s’appuie ainsi sur une approche résolument objective de l’indivisibilité qui consacre la théorie suivant laquelle plusieurs contrats concourant à la même opération économique sont réputés indivisibles, nonobstant toute clause écrite contraire. Notons que certaines décisions ont déjà abouti à la même solution, y compris en matière de distribution ; ainsi, dans un arrêt du 12 mai 2010, la Cour d’appel de Caen a considéré que l'indivisibilité doit s'entendre de la situation dans laquelle se trouvent deux contrats, constituant une opération économique unique, dès lors que l'exécution de l'un devient impossible sans l'exécution de l'autre : l'analyse des conventions d'approvisionnement et de franchise fait apparaître un lien d'indivisibilité entre elles. La Cour a jugé que, dès lors qu'il n'est pas reproché au franchisé d'avoir régulièrement mis fin à ses relations contractuelles résultant du contrat d'approvisionnement, le terme de

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ce contrat emporte nécessairement l'extinction du contrat de franchise à la date de l'arrivée du terme du premier contrat. Elle déboute, par conséquent, le franchiseur de sa demande d'indemnité pour rupture abusive du contrat de franchise. Ce faisant, la disparition du contrat de fourniture emporte la caducité du contrat de franchise (CA Caen, 12 mai 2010, RG n°08/04076, Juris-Data n°2010-018620 ; Contrats, conc. consom. 2011, comm. 8, N. Mathey). A cet égard, l’article L.341-1 du code de commerce établissant une indivisibilité entre les contrats ayant pour but commun l’exploitation du magasin, se contente de codifier la jurisprudence préexistante.  Exploitation du magasin. La seule constatation d’un but commun aux différents contrats considérés ne suffit pas par elle-même à caractériser l’existence de contrats relevant du champ d’application de ce texte ; encore faut-il en effet, précise le texte, que ce but commun ait pour objet l’exploitation du magasin considéré. (β) Contrats comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant  Clause susceptible de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant. Le nouvel article L.341-1 du code de er commerce vise en son 1 alinéa « l’ensemble des contrats […] comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son activité commerciale » ; de même, le Conseil Constitutionnel a rappelé « que les dispositions de l'article L. 341-1 ne s'appliquent qu'aux contrats comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d'exercice par un exploitant de son activité ème commerciale » (25 Considérant). Se pose alors la question de savoir ce que recouvre exactement la notion de « contrat comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par un exploitant de son activité commerciale ». Par exemple les contrats de distribution sélective purement qualitatifs (ou qualitatifs et quantitatifs) ne devraient pas entrer dans le cadre de cette notion dès lors qu’ils ne comportent pas d’obligation d’exclusivité. D’une manière plus générale, les clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant désignent assurément les clauses de nonconcurrence et de non-affiliation post contractuelle. Si ces clauses sont assurément visées, d’autres clauses sont probablement visées dans la mesure où le texte ne vise pas littéralement « les clauses de nonconcurrence et de non-affiliation post contractuelles » mais bien les clauses « clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son activité

commerciale ». Qu’en serait-il – pour ne citer que deux exemples – d’une clause de non-sollicitation de personnel ou d’une clause de partage du fichier client ? Il appartiendra sans doute au juge d’apprécier au cas par cas si telle ou telle clause présente un objet ou un effet limitatif de sa liberté d’exercice par cet exploitant de son activité commerciale ; mais son appréciation risque d’être elle-même très limitée dès lors que le texte vise les clauses « susceptibles » de présenter un tel effet.  Cas particulier. Il convient par ailleurs de s’interroger sur le sort de la situation mettant en présence un contrat comportant une clause susceptible de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant et un contrat n’en comportant pas. La question qui se pose ici est donc de savoir si, dans une telle configuration, ce groupe de contrats relève (ou non) du champ d’application du texte. Si l’on adopte une interprétation littérale, la réponse devrait être négative ; en effet, le texte vise « l’ensemble des contrats (…) comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son activité commerciale », de sorte que le contrat ne comportant pas une telle clause ne pourrait ainsi par définition faire partie de l’ensemble contractuel désigné à l’article L. 341-1 du code de commerce. A l’inverse, si l’on retient une interprétation téléologique, la réponse devrait être positive, dans la mesure où l’ensemble contractuel, caractérisé par la seule existence d’un but commun quant à l’exploitation d’un magasin, aura bien pour effet, par la présence d’une telle clause dans l’un des contrats de l’ensemble, de limiter la liberté d’exercice par l’exploitant de son activité commerciale. ii/

Exceptions

 Exceptions. Des exceptions sont limitativement énumérées à l’alinéa 3 du nouvel article L. 341-1 du code de commerce, selon lequel : « Le présent article n'est pas applicable au contrat de bail dont la durée est régie par l'article L. 145-4, au contrat d'association et au contrat de société civile, commerciale ou coopérative ». La liste des contrats exclus du champ d’application des dispositions du nouvel article L. 341-1 du code de commerce s’est allongée au cours du processus législatif. Initialement en effet, le texte n’excluait que le seul contrat de bail du champ d’application du texte, celui-ci faisant l’objet d’un régime spécial, institué à l’article L.145-4 du code de commerce. Afin de renforcer l’effectivité du texte, et de limiter les dérogations à celui-ci, l’article 10 A du projet de loi (devenu article 31 de la loi) précisait même : « les

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règles statutaires et les décisions collectives adoptées conformément aux dispositions législatives relatives aux associations et aux sociétés civiles, commerciales ou coopératives ne peuvent déroger aux articles L. 341-1 à L. 341-3 ». Cette disposition n’aura pas résisté à la navette législative ; elle a été supprimée dès la transmission du texte au Sénat, pour ne jamais être réinstaurée. Outre le contrat de bail, sont donc désormais exclus du champ d’application du texte les contrats d’association ainsi que les contrats de société civile, commerciale ou coopérative.  Portée. La portée pratique de ces exceptions n’est pas neutre. En effet, les clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par un exploitant de son activité commerciale n’entrent pas dans le champ d’application de l’article L.341-1 du code de commerce dès lors qu’elles sont insérées dans un bail commercial ou dans les statuts d’une société distributrice (telle que notamment une société franchisée, une société commissionnaire-affiliée, une société concessionnaire, une société coopérative, etc.). Cette disposition pourrait donc conduire certaines têtes de réseau à prendre une participation au capital pour insérer dans les statuts de la société distributrice une ou plusieurs stipulations susceptibles de limiter la liberté d’exercice par la société exploitante de son activité commerciale.

2/

Régime juridique des contrats soumis à l’article L. 341-1 du code de commerce

 Spécificités. Les contrats relevant de la notion dont les contours viennent d’être évoqués obéissent désormais à un régime juridique autonome. Ce régime juridique – dont on a vu qu’il ne visait désormais plus la durée du contrat et l’interdiction de la tacite reconduction – se singularise toutefois au regard de l’existence d’une échéance commune à ces contrats (a), et de l’encadrement légal des clauses postcontractuelles restrictives de la liberté d’exercice de l’activité commerciale qu’ils pourraient contenir (b). a/

 Ratio legis. Les contrats relevant du groupe de contrats ont une échéance unique. L’objectif ainsi poursuivi par le législateur consiste à éviter que l’enchevêtrement des différents contrats formant la relation contractuelle et prévoyant des durées distinctes, échelonnées dans le temps, n’empêche un partenaire de sortir du réseau quand il le souhaite. Le Conseil Constitutionnel l’a lui-même confirmé dans sa décision du 5 août 2015 : « les articles L. 341-1 et L. 341-2 visent à mettre un terme aux pratiques contractuelles des réseaux de distribution commerciale qui concluent avec les exploitants de commerce de détail qui leur sont affiliés des contrats différents n'ayant pas les mêmes durées, les mêmes échéances ou les mêmes conditions de résiliation, de sorte qu'il en résulte une prolongation artificielle des contrats qui peut s'apparenter à une restriction de la liberté d'entreprendre des exploitants de commerce de détail ». Le Conseil Constitutionnel va même plus loin, estimant qu’en adoptant les articles L. 341-1 et L. 3412, « le législateur a entendu assurer un meilleur équilibre de la relation contractuelle entre l'exploitant d'un commerce de détail et le réseau de distribution auquel il est affilié », poursuivant ainsi « un objectif ème d'intérêt général » (24 Considérant).  Contrats à durée déterminée. Ainsi que cela a été précédemment indiqué, l’article L.341-1 du code de commerce adjoint une indivisibilité légale aux contrats entrant dans son champ d’application, l’ensemble formant alors un groupe de contrats. L’instauration d’une échéance commune à l’ensemble contractuel vise deux cas distincts. D’une part, cette notion fait référence à la survenance du terme, certain ou incertain, de l’un des contrats composant le groupe ; cette hypothèse est implicitement envisagée par l’article L.341-1 en son alinéa premier in fine. En prévoyant que l’ensemble des contrats formant l’ensemble contractuel ont une échéance commune, le législateur s’assure que la survenance du terme de l’un des contrats entraîne la survenance du terme de l’intégralité des contrats du groupe. En d’autres termes, le contrat ayant la durée la plus courte et donc le terme le plus rapproché, influencera le maintien du groupe dans son ensemble en déterminant l’échéance de ce dernier.

Echéance commune

 Rappel du texte. L’article L.341-1 du code de er commerce prévoit à l’alinéa 1 que « l’ensemble des contrats conclus entre […] prévoient une échéance commune » puis à l’alinéa suivant que « la résiliation d'un de ces contrats vaut résiliation de l'ensemble des contrats mentionnés au premier alinéa du présent article ».

D’autre part, l’échéance commune renvoie à la résiliation anticipée de l’un des contrats formant l’ensemble, expressément prévue à l’alinéa 2 de l’article L.341-1 du code de commerce : la résiliation de l’un des contrats entraîne de plein droit la résiliation des autres. Cette solution tend à codifier la jurisprudence existant en matière d’ensemble contractuel ou de groupe de contrats, et répond à la

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volonté du législateur de créer une synchronisation des contrats, afin de faciliter les changements d’enseigne.  Contrats à durée indéterminée. De prime abord, le sort des contrats à durée indéterminée peut apparaître incertain. Ces engagements ne sont ni formellement interdits, ni expressément autorisés par le nouvel article L. 341-1 du code de commerce. Le Conseil Constitutionnel n’a précisément pas répondu à ce point pourtant soulevé dans le contenu de sa saisine. Sans se prononcer explicitement sur cette question, le Conseil Constitutionnel se contente d’énoncer que les dispositions de l’article L.341-1 du code de commerce laissent les parties libres de fixer la durée et l’échéance commune et de prévoir leur tacite reconduction.

contrat concerné ; cette clause peut être ressentie comme plus sévère que la jurisprudence existante car, mis à part un arrêt qui avait retenu que la clause devait être limitée à la seule agence dans laquelle l’activité était exercée (Cass. com., 3 avril 2012, pourvoi n°11-16.301), l’on pouvait considérer que l’interdiction de non-concurrence pouvait être élargie à la zone d’exclusivité (CA Rennes, 17 janvier 2012, RG n°10/07801) ou encore à un rayon de plusieurs kilomètres autour du point de vente (Cass. com., 4 décembre 2007, pourvoi n°06-15.137) ; -

Selon nous, faute d’interdiction, les parties pourront donc continuer de conclure un contrat à durée indéterminée.  Critique. Ce texte, vidé de son contenu au fil du processus législatif, n’est plus qu’un outil de complication inutile de l’exercice de l’activité des entreprises. Les échéances fixes et les résiliations automatiques et généralisées des contrats ainsi imposées aux entreprises vont à l’encontre de la liberté et de la souplesse dont celles-ci ont besoin pour organiser leurs relations contractuelles. b/

Encadrement des clauses post-contractuelles restrictives de la liberté d’exercice de l’activité commerciale

 Interdiction de principe. Concernant les clauses post-contractuelles restrictives de la liberté d’exercice de l’activité commerciale comprises dans les contrats relevant du champ d’application de l’article L. 341-1 du code de commerce, le paragraphe I de l’article L. 341-2 du code de commerce pose un principe d’interdiction : ces clauses sont réputées non écrites.  Conditions requises. Ce même texte prévoit cependant une exception lorsqu’une telle clause réunie les quatre conditions cumulatives posées par le texte. La clause doit : -

-

concerner des biens et services en concurrence de ceux qui font l’objet du contrat ; cette première condition est conforme aux solutions jusqu’alors dégagées par la jurisprudence ; être limitée aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée du

être indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du même contrat ; Cette troisième condition n’ajoute pas grandchose, le texte ne faisant que reprendre les exigences posées par la jurisprudence. Toutefois, par l’effet du nouvel article L.341-2 du code de commerce, la jurisprudence pourrait exclure du bénéficie de l’exception les réseaux de distribution organisés par des contrats ne comportant pas transmission de savoir-faire (certains contrats de concession ou de contrats de partenariats, etc.). Il est à noter que certaines décisions ont déjà validé la clause de non-concurrence prévue dans un contrat de concession, estimant que même s’il s’agissait d’un contrat de concession, le partenaire avait communiqué « des informations pratiques, indispensables en vue de la revente des produits de la société X, assimilables à un savoir-faire » : manuel de procédures, book, formation et assistance au démarrage, impliquant la fourniture de logiciels (de gestion des prospects, de gestion commerciale) et d'un listing des prospects de son er secteur (voir notamment CA Montpellier, 1 juillet 2014, RG n°13/00567 : en l’espèce, le contrat n’a pas pour autant été requalifié en contrat de franchise, la transmission du savoir-faire n’étant pas l’élément essentiel du contrat). Ainsi, cette condition sera vérifiée dès lors que le contrat comporte une dose suffisante d’informations transmises au partenaire pour démontrer l’existence d’un savoir-faire spécifique, alors même que la transmission de ce savoir-faire ne constituerait pas une obligation essentielle du contrat. En outre, pour le cas où le contrat de distribution considéré ne comporterait aucune transmission de savoir-faire (ni en tant qu’obligation essentielle, ni même en tant qu’obligation accessoire) les têtes de réseaux pourraient convenir de prendre une participation au capital des distributeurs pour insérer, dans le contrat de société, une telle clause de non-

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concurrence et surmonter ainsi la difficulté posée par cette troisième condition ; -

ne pas excéder un an après l’échéance ou la résiliation de l’un des contrats mentionnés à l’article L. 341-1 ; cette ultime condition est conforme à la plupart des solutions jusqu’alors dégagées par la jurisprudence.

Rappelons qu’au plan du droit communautaire, en matière de franchise, l'obligation de non-concurrence post-contractuelle pour fabriquer, acheter, vendre ou revendre imposée à l'expiration de l'accord vertical n'est en principe pas exemptée (Règl. Comm. UE no 330/2010, 20 avr. 2010, art. 5, § 1, b), sauf si quatre conditions sont cumulativement vérifiées (Règl. Comm. UE no 330/2010, 20 avr. 2010, art. 5, § 3) : l'interdiction vise des biens ou services concurrents aux biens ou services contractuels ; l'interdiction est géographiquement limitée au lieu où l'acheteur a opéré pendant le contrat ; l'interdiction est indispensable à la protection d'un savoir-faire transmis par le fournisseur, et l'interdiction est limitée à un an à compter de l'expiration de l'accord (Règl. Comm. UE no 330/2010, 20 avr. 2010, art. 5, § 1, b) et art. 5, § 3 remplaçant Règl. Comm. CE no 2790/1999, 22 déc. 1999, art. 5, b). Le nouvel article L. 341-2 du code de commerce retranscrit donc les critères déjà mentionnés à l’article 5 §.3 précité. De ce fait, cette disposition ne semble pas constituer une avancée législative fondamentale.  Charge de la preuve. Il appartiendra au créancier de l’obligation de prouver que les conditions requises au paragraphe II de l’article L. 341-2 du code de commerce sont réunies, dès lors que ce texte précise que ne sont pas soumises au principe d’interdiction posé au paragraphe I « les clauses dont la personne qui s'en prévaut démontre qu'elles remplissent les conditions cumulatives suivantes » ; c’est ce que souligne le Conseil Constitutionnel lorsqu’il précise : « qu'en vertu du paragraphe II de l'article L. 341-2, sont exonérées de cette qualification les clauses dont il est démontré qu'elles satisfont ème quatre conditions cumulatives » (20 Considérant). ***  Régime transitoire. Selon le paragraphe II de l’article 31 de la loi Macron, les articles L. 341-1 et L. 341-2 s'appliquent « à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi », ainsi que le souligne le Conseil Constitutionnel dans sa décision du ème 5 août (20 Considérant). Ce régime transitoire a été grandement simplifié par rapport à celui initialement envisagé dans le projet de loi ; le délai d’application a

été raccourci et uniformisé, sans prendre en compte la durée restant à courir des contrats. Les articles L. 3411 et L. 341-2 du code de commerce s’appliquent désormais à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la date de promulgation de la loi, c'est-à-dire le 6 août 2016. Les réseaux concernés disposent d’un délai plutôt court pour s’organiser et s’adapter à ce nouveau régime. La question se pose toutefois de savoir si les articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de commerce ont vocation à s’appliquer aux « contrats en cours », ce d’autant que le texte est muet sur ce point précis. Or, on le sait, en matière contractuelle, le principe de non rétroactivité (code civil, article 2) s’apprécie en distinguant : -

les conditions de validité d’un contrat ou d’une clause : les conditions de validité d'un contrat sont appréciées au regard de la loi en vigueur au jour de la conclusion du contrat (voir par exemple : pour la ème législation sur les clauses abusives : Cass. civ. 2 , 5 juillet 2006, Bull. civ. II, n° 180), sauf si la loi dispose expressément le contraire et que l'application aux contrats en cours est justifiée par des considérations d'ordre public particulièrement impérieuses (Cass. com., 3 mars 2009, n° 07ère 16527 ; v. aussi, Cass. civ. 1 , 17 mars 1998, Bull. civ. I n° 115 ; RTD civ. 1999, p. 378, obs. J. Mestre ; ème Cass. civ. 2 , 5 juillet 2006, Bull. civ. II, n° 180 : le caractère « particulièrement impérieux » est d'autant plus important que le fait qu'une loi soit d'ordre public ne suffit pas à la rendre applicable aux contrats en cours) ;

-

les effets légaux d’un contrat : les effets légaux d'un contrat sont soumis à la loi en vigueur au jour où l'effet légal du contrat à vocation à se produire ème (Cass. civ. 3 , 3 juillet 2013, n° 12-21541 : en matière de bail commercial, les règles entourant les délais dans lequel le congé doit être donné sont régies par la loi en vigueur au jour du congé).

Sur ce point, le Conseil Constitutionnel a donc cru bon de souligner dans son communiqué de presse présentant la décision du 5 août (et non dans la décision proprement dite) : « L'article 31 encadre les relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les commerces de détail. Il (…) impose la mise en conformité des contrats en cours un an après la promulgation de la loi (...) ». A rapprocher : Pour plus de détails sur la loi Macron, consultez notre Numéro spécial concernant le volet relatif aux relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les commerces de détail (CLIQUEZ ICI)

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La loi du 31 juillet 2014 (loi ESS) déclarée pour partie non conforme à la Constitution Décision n°2015-476 QPC, 17 juillet 2015 Ce qu’il faut retenir : La décision n°2015-476 QPC du Conseil Constitutionnel du 17 juillet 2015 a abrogé la sanction associée au non-respect du devoir d’information des salariés en cas de cession de la société dans laquelle ils sont employés ou du fonds de commerce dans le cadre duquel ils travaillent. Pour approfondir : Pour rappel, la loi ESS du 31 juillet 2014 a instauré dans les entreprises de moins de 250 salariés, ayant ou non obligation d’instaurer un comité d’entreprise, et remplissant les critères des petites et moyennes entreprises (PME) au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 (chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros), un droit d’information destiné à permettre aux salariés de formuler une offre de rachat en cas de cession de fonds de commerce (L. n°2014-856, art. 19 ; C. com., art. L.141-23 nouveau) ou de titres « représentant plus de 50 % des parts sociales d’une société à responsabilité limitée ou d’actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d’une société par actions » (L. n°2014-856, art. 20 ; C. com., art. L.23-10-1 nouveau). Ce devoir d’information est devenu obligatoire par suite de la parution du décret n° 2014-1254 du 28 octobre 2014 aux opérations de cession de fonds de commerce ou de parts sociales, actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital social conclues à compter du 1er novembre 2014. Depuis, le propriétaire qui envisage une telle cession a désormais l’obligation d’informer l’ensemble des salariés de son projet de cession, soit au plus tard deux mois avant la réalisation de la cession (dans les entreprises de moins de 50 salariés), soit au plus tard concomitamment à l’information du comité d’entreprise (dans les entreprises de 50 salariés et plus), afin de leur permettre de formuler une offre. Jusqu’à la décision du Conseil constitutionnel, la sanction du non-respect de ce droit était lourde de conséquences puisque la cession intervenue en méconnaissance du mécanisme mis en place par la Loi ESS encourrait la nullité, laquelle pouvait être sollicitée par tout salarié dans un délai de deux mois après la cession. En l’état, cette sanction, invalidée par le Conseil Constitutionnel, ne pourra plus être mise en

œuvre. L’obligation d’information demeure mais sans sanction associée.

des

salariés

Décision du conseil constitutionnel du 17 juillet 2015 : La décision du conseil constitutionnel déclare le mécanisme de l’obligation d’information préalable des salariés conforme à la constitution, tandis qu’il retient – contraire – que la sanction de nullité attachée au non-respect de ce mécanisme est contraire à la constitution. En effet, sont déclarés conformes à la constitution les trois premiers alinéas de l'article L.23-10-1, le premier alinéa de l'article L.23-10-3 (concernant les entreprises de moins de cinquante salariés), les premier, deuxième et cinquième alinéas de l'article L.23-10-7 ainsi que le premier alinéa de l'article L.23-10-9 du Code de commerce (concernant les entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés) issus de l'article 20 de la loi du n°2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, selon lesquels : -

« Dans les sociétés qui n'ont pas l'obligation de mettre en place un comité d'entreprise en application de l' article L.2322-1 du code du travail , lorsque le propriétaire d'une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d'une société à responsabilité limitée ou d'actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d'une société par actions veut les céder, les salariés en sont informés, et ce au plus tard deux mois avant la cession, afin de permettre à un ou plusieurs salariés de présenter une offre d'achat de cette participation » (C.com., art. L.23-10-1, alinéa er 1 );

-

« Le représentant légal notifie sans délai aux salariés cette information, en leur indiquant qu'ils peuvent présenter au cédant une offre d'achat » ème (C.com., art. L.23-10-1, alinéa 2 ) ;

-

« La cession peut intervenir avant l'expiration du délai de deux mois dès lors que chaque salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d'offre » (C.com., art. L.23-10-1, alinéa ème 3 );

-

« L'information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par er ces derniers » (C.com., art. L.23-10-3, alinéa 1 ) ;

-

« Dans les sociétés soumises à l'obligation de mettre en place un comité d'entreprise en application de l' article L. 2322-1 du code du travail

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et se trouvant, à la clôture du dernier exercice, dans la catégorie des petites et moyennes entreprises au sens de l' article 51 de la loi n° 2008776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, lorsqu'il veut céder une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d'une société à responsabilité limitée ou des actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d'une société par actions, le cédant notifie sa volonté de céder à la société » (C.com., art. L.23er 10-7, alinéa 1 ) ; -

-

« Au plus tard en même temps qu'il procède, en application de l’article L. 2323-19 du code du travail, à l'information et à la consultation du comité d'entreprise, le chef d'entreprise porte à la connaissance des salariés la notification prévue au premier alinéa du présent article et leur indique qu'ils peuvent présenter au cédant une offre de ème rachat » (C.com., art. L.23-10-7, alinéa 2 ) ; « L'information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par er ces derniers » (C.com., art. L.23-10-9, alinéa 1 ).

En revanche, sont déclarés contraires à la constitution les quatrième et cinquième alinéas de l'article L.23-101 (concernant les entreprises de moins de cinquante salariés) et les troisième et quatrième alinéas de l'article L.23-10-7 du Code de commerce (concernant les entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés) issus de l'article 20 de la loi n°2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, selon lesquels : -

-

Enfin, le 18ème considérant de la décision commentée précise : « la déclaration d'inconstitutionnalité des quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 23-10-1 et des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 2310-7 du code de commerce prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date ». Loi MACRON : Précisons aussi que la Loi Macron (qui a été définitivement adoptée par le Parlement) prévoit en son article 204, codifié aux articles L.141-23 et suivants du Code de commerce, une modification des dispositions relatives au droit d’information des salariés. Il est prévu que l'information des salariés est désormais limitée au seul cas de la vente du fonds de commerce ou de 50 % des parts d'une SARL et d'une SA, et non à tous les cas de transfert que recouvre la cession (donation, échange, apport, etc.), comme c'est le cas aujourd'hui. L'information des salariés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est également précisée. La date de réception de la lettre par le salarié est fixée « à la date de la première présentation de la lettre ». Enfin, la sanction du non-respect du devoir d’information sera une amende civile dont le montant ne pourra excéder 2 % du montant de la vente. A rapprocher : Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire

« La cession intervenue en méconnaissance du présent article peut être annulée à la demande de ème tout salarié » (C.com., art. L.23-10-1, alinéa 4 ) ; « L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de la cession de la participation ou de la date à laquelle tous les salariés en ont été informés » (C.com., art. L.23-10ème 1, alinéa 5 ) ;

-

« La cession intervenue en méconnaissance du présent article peut être annulée à la demande de ème tout salarié » (C.com., art. L.23-10-7, alinéa 3 ) ;

-

« L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de la cession de la participation ou de la date à laquelle tous les salariés en ont été informés » (C.com., art. L.23-10ème 7, alinéa 4 ).

Impact de la loi Hamon sur les négociations entre fournisseurs et distributeurs Réponse ministérielle du 15 octobre 2015 Ce qu’il faut retenir : Une réponse ministérielle du 15 octobre 2015 (JO Sénat Q 15 oct. 2015, p. 2438 Rép. min. n° 15636) concerne l'impact de la loi Hamon sur les négociations entre fournisseurs et distributeurs en précisant que les dispositions de cette loi n'impliquent nullement une impossibilité de modifier en cours d'année le prix fixé dans la convention annuelle, créée par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME), en cas de variation importante du cours des matières premières ou des devises.

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Pour approfondir : La convention annuelle obligatoirement conclue entre le fournisseur et le distributeur, fixe le prix des produits vendus par le fournisseur au distributeur et revendus en l'état par celui-ci, dès lors qu'il y a négociation commerciale sur les conditions générales de vente du fournisseur (CGV). Ce prix doit être déterminé, à partir du prix fixé par le fournisseur dans ses CGV, en fonction du « barème de prix tel qu'il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, ou les modalités de consultation de ce barème dans la version ayant servi de base à la négociation » mentionné à l'article L. 4417 du Code de commerce modifié par la loi Hamon. Cette nouvelle obligation n'a pas modifié la possibilité pour le fournisseur de prévoir une augmentation de son tarif en cours d'année, et de modifier alors, le cas échéant, ses CGV, sous réserve de l'accord du cocontractant. Les parties peuvent aussi prévoir, dès l’origine, dans la convention, le principe et les modalités pratiques de l'acceptation par le client de chaque proposition d'évolution du tarif par le fournisseur. Concernant les variations des cours des matières premières, l'article L. 441-8 du Code de commerce, introduit par la loi Hamon, prévoit notamment que « les contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois portant sur la vente des produits figurant sur la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 442-9, complétée, le cas échéant, par décret, dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires comportent une clause relative aux modalités de renégociation du prix permettant de prendre en compte ces fluctuations à la hausse comme à la baisse ». Lorsque les conditions de mise en œuvre de la clause, définies en référence à un ou plusieurs indices publics des prix des produits agricoles ou alimentaires, sont réunies, la renégociation doit être conduite de bonne foi, dans un délai qui ne peut être supérieur à 2 mois. Elle doit tendre à une répartition équitable entre les parties de l'accroissement ou de la réduction des coûts de production résultant des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires. Afin de s'assurer de l'effectivité de la renégociation, un compte rendu de celle-ci doit être établi. Enfin, conformément à l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce, le fait « de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » peut être sanctionné. Ce texte a vocation à s’appliquer pour le cas où l'une des parties refuserait de renégocier un contrat dont

l'économie se trouve bouleversée. Les modifications issues de la loi relative à la consommation en matière de relations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs, n'impliquent pas une impossibilité de modifier en cours d'année le prix fixé dans la convention annuelle en cas de variation importante du cours des matières premières ou des devises. A rapprocher : Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation

Délais de paiement pour certains secteurs d'activité présentant un caractère saisonnier Décret n°2015-1484 du 16 novembre 2015, JORF 17 novembre 2015, p.21425 Ce qu’il faut retenir : Le décret n°2015-1484 du 16 novembre 2015 fixe la liste des secteurs d’activité qui, mentionnés à l'article L.441-6 du Code de commerce, présentent un caractère saisonnier particulièrement marqué leur permettant de bénéficier de manière durable de plafonds dérogatoires au droit commun en matière de délais de paiement. Pour approfondir : Le Code de commerce fixe comme principe général que le délai de paiement entre professionnels ne peut dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d'émission de la facture (C. com., art. L.441-6, al. 9). Certains secteurs économiques, caractérisés par la très forte saisonnalité de leurs ventes, bénéficient toutefois, à titre transitoire, de dérogations à ce principe, dans le cadre d'accords interprofessionnels conclus par tous les acteurs d'une même filière. L'article 46 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (loi Macron) a modifié la rédaction des dispositions relatives aux délais de paiement. Le texte prévoit désormais que (i) le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser 60 jours à compter de la date d'émission de la facture et que (ii) par dérogation, un délai maximal de 45 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier (C. com., art. L.441-6, al. 9 mod.). Comme auparavant, en cas de facture périodique, le

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délai convenu entre les parties ne peut dépasser 45 jours à compter de la date d'émission de la facture. Par ailleurs, l'article 46 de la loi revient à pérenniser le régime dérogatoire pour les secteurs à saisonnalité marquée. Ainsi, le décret n°2015-1484 du 16 novembre 2015 fixe la liste des secteurs d'activité présentant un caractère saisonnier particulièrement marqué qui peuvent bénéficier de manière durable de plafonds dérogatoires au droit commun en matière de délais de paiement comme prévu au dernier alinéa du I de l'article L.441-6 du Code de commerce. Après l'article D.441-5 du Code de commerce, il est inséré un article D.441-5-1 qui prévoit des délais dérogatoires pour les secteurs d’activité suivants.

ou 74 jours nets à compter de la date d'émission de la facture. Secteur du commerce du jouet : pour les ventes entre les fabricants et les distributeurs spécialisés, le délai de paiement convenu par les parties ne peut dépasser : (i) pour la période « du permanent » s'étendant du mois de janvier au mois de septembre inclus, 95 jours nets à compter de la date d'émission de la facture ; (ii) pour la période de fin d'année, s'étendant du mois d'octobre au mois de décembre inclus, 75 jours nets à compter de la date d'émission de la facture. er

Ce texte entrera en vigueur le 1 janvier 2016. Secteur de l'agroéquipement : pour les ventes de matériels d'entretien d'espaces verts et de matériels agricoles à l'exception des tracteurs, matériels de transport et d'élevage, entre, d'une part, les industriels de l'agroéquipement, constructeurs et importateurs, et, d'autre part, les entreprises de distribution spécialisées et de réparation, le délai de paiement convenu par les parties ne peut dépasser : (i) 55 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture pour les matériels d'entretien d'espaces verts ; (ii) 110 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture pour les matériels agricoles.

A rapprocher : Article 46 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (loi Macron)

Le « Name and Shame » et les nouvelles mesures destinées à réduire les délais de paiement Communiqué de presse, Ministère de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, 23 novembre 2015

Secteur des articles de sport : pour les ventes d'équipements nécessaires à la pratique des sports de glisse sur neige entre les fournisseurs et les entreprises dont l'activité est exclusivement ou quasi exclusivement saisonnière, un délai supplémentaire de 30 jours peut être ajouté au délai prévu au neuvième alinéa du I de l'article L.441-6 pour le règlement du solde des factures relatives à des livraisons effectuées avant l'ouverture de la saison d'activité.

Ce qu’il faut retenir :

Secteur de la filière du cuir : pour les ventes entre les fournisseurs et les distributeurs spécialisés, le délai de paiement convenu par les parties ne peut dépasser 54 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture.

Pour approfondir :

Secteur de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie : pour les ventes entre, d'une part, les fournisseurs, fabricants, importateurs ou grossistes et, d'autre part, les distributeurs spécialisés, au titre de leur activité au sein d'un point de vente ou dans le cadre de leur activité de vente à distance ou les centrales d'achat dont l'activité principale est de revendre des produits de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie à des distributeurs spécialisés, le délai de paiement convenu par les parties ne peut dépasser 59 jours fin de mois

Afin d’améliorer la compétitivité des entreprises, le Gouvernement a annoncé, le 23 novembre 2015, l’adoption de nouvelles mesures visant à réduire les délais de paiement. Celles-ci s’articulent autour des trois axes principaux suivants : le durcissement des sanctions, l’exigence d’une transparence accrue et la généralisation des bonnes pratiques.

Emmanuel Macron, Ministre de l’Economie, après avoir fait le bilan des mesures existantes et rappelé qu’un tiers des entreprises sont aujourd’hui touchées par des retards de paiement, a annoncé la mise en place de nouvelles réformes. Tout d’abord, de nouvelles mesures seront adoptées pour renforcer les contrôles effectifs et les sanctions : -

renforcement des contrôles par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) ;

-

relèvement du plafond par amende, lequel sera porté de 375.000 à 2 millions d’euros.

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En outre, la transparence sera favorisée :

Pour approfondir :

-

mise en place de la pratique anglo-saxonne du « Name and Shame » visant à publier, sur le site internet de la DGCCRF, les noms des 5 entreprises qui se sont vues infliger les plus importantes amendes pour leur politique de paiements tardifs et répétés en 2015 ;

-

publication, dans le rapport de gestion des entreprises, des retards de paiement à la date de clôture des comptes, tant côté clients que fournisseurs ;

 Formulons tout d’abord quelques mots de politique juridique : l’article L.330-3 du Code de commerce fait peser une obligation d’information précontractuelle à la charge du franchiseur, mais n’en fait – curieusement – peser strictement aucune à la charge du franchisé ; tout au plus, le Code européen de déontologie de la franchise prévoit-il que le « le futur franchisé se doit d’être loyal quant aux informations qu’il fournit au franchiseur sur son expérience, ses capacités financières, sa formation, en vue d’être sélectionné » mais, par sa nature même, ce texte n’a pas force de loi (CA Colmar, 28 mai 1993, Juris-Data n°048286).

-

relance de l’observatoire des délais de paiement.

Enfin, de nouvelles mesures tendant à généraliser les bonnes pratiques seront adoptées : -

création d’une « médiation des entreprises », fusion des médiations interentreprises et marchés publics, qui deviendra l’interlocuteur unique en matière de médiation des relations clients / fournisseurs ;

-

observatoire des délais de paiement étendu aux donneurs d’ordres publics (Etat, collectivités territoriales, secteur hospitalier) ;

-

label de bonne conduite.

A rapprocher : Loi Consommation et Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques

Ce déséquilibre légal – critiquable car totalement injustifié –, pose difficulté, en particulier lorsque le franchisé n’a pas fourni à son franchiseur une information complète et sincère sur sa situation réelle.  La jurisprudence actuelle s’en tient – et c’est normal – à une approche stricte. En l’absence de stipulation contractuelle, le franchisé reste tout au plus tenu à une obligation générale de contracter de bonne foi : la Cour de cassation reconnaît l'existence d'un principe autonome d’obligation de contracter de bonne foi dont la violation suffit à entraîner la nullité des conventions ; la solution est connue (Cass. com., 27 novembre 2007, pourvoi n°06-17.060 ; Cass. com., 20 septembre 2005, Bull. IV, n° 176, p. 191 ; Cass. Civ. ère 1 , 15 mars 2005, RTD civ. 2005, p. 381, obs. J. ère Mestre ; Civ. 1 , 16 mai 1995, arrêt n° 911).

Ce qu’il faut retenir :

Ce principe essentiel trouve à s’appliquer en toutes circonstances, notamment lorsque la loi n’a prévu aucun devoir d'information à la charge de l’une des ère parties (Cass. 1 civ., 16 novembre 1991, Bull. civ. I, ème n° 331 ; Cass. civ. 3 , 27 mars 1991, Bull. civ. III, n° 108 ; Cass. com., 8 nov. 1983 : Bull. civ. IV, n° 98), ce qui est précisément l’hypothèse réservée par l’article L.330-3 du Code de commerce. La jurisprudence fait donc peser une obligation de contracter de bonne foi sur les deux parties au contrat de franchise : la solution est consacrée par les juridictions du fond (CA Amiens, 19 janvier 2004, inédit) et la Cour de cassation (Cass.com., 12 février 2008, pourvoi n°07-10.462 ; Cass.com., 14 juin 2005, pourvoi n°04-13.947).

La clause de déclarations préalables permet de faire entrer dans le champ contractuel les éléments d’information communiqués par le candidat franchisé, c’est-à-dire à intégrer dans le contrat de franchise (ou l’une de ses annexes) les informations qui, fournies par le franchisé durant la phase précontractuelle, ont convaincu le franchiseur de contracter.

La protection que la jurisprudence accorde ainsi logiquement au franchiseur, sur le terrain de la bonne foi, pourra bien souvent ne pas suffire ; encore faudrat-il en effet que le franchiseur parvienne à prouver que l’information dont il a été privé était véritablement déterminante de sa volonté de conclure le contrat de franchise. Et l’on sait bien qu’à cet égard les juridictions du fond peuvent considérer que telle ou

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FORMATION DU CONTRAT La clause de « déclarations préalables » dans les contrats de franchise Réflexion d’ensemble

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telle information communiquée par le franchisé au franchiseur durant la phase précontractuelle n’entre pas nécessairement dans le champ contractuel, en particulier lorsque la teneur de cette information ne figure pas dans le contrat de franchise ou l’une de ses annexes (Trib. Com., Quimper, 20 février 2009, inédit). Ainsi, à défaut pour ces informations de figurer en annexe du contrat, il appartient au franchiseur de prouver que les renseignements omis ou erronés qui lui ont été transmis étaient effectivement déterminants de sa volonté de contracter, ce qui peut parfois être délicat à démontrer en pratique.  L’intérêt de la clause de « déclarations préalables » consiste donc à faire entrer dans le champ contractuel les éléments d’information communiqués par le candidat franchisé, c’est-à-dire à intégrer dans le contrat de franchise (ou l’une de ses annexes) les informations qui, fournies par le franchisé durant la phase précontractuelle, ont convaincu le franchiseur de contracter. En pareil cas, le juge se trouve alors tenu par la loi des parties et l’obstacle probatoire illustré par la décision précitée du Tribunal de commerce de Quimper se trouve dissipé.  Quel peut être alors les caractéristiques de la clause de « déclarations préalables » ? Cette clause – qui prendra le plus souvent la forme de déclarations formulées par le franchisé en annexe du contrat de franchise – prendra soin de préciser, d’une part, que la société franchisée et son dirigeant garantissent que chacune des informations communiquées au franchiseur en annexe du contrat sont exactes et complètes et, d’autre part, qu’ils reconnaissent que le franchiseur a conclu le contrat de franchise en considération de chacune de ces informations.

engagement, de quelque nature que ce soit, contraire au contrat de franchise ou susceptible de les empêcher de conclure un tel contrat ; qu’aucune société concurrente du franchiseur n’a d’intérêt dans l’une ou l’autre des sociétés dans lesquelles ils détiennent une participation.

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Le contenu de la clause participe de la liberté contractuelle. A rapprocher : CA Rennes, 6 décembre 2011, RG n°09/02275

Le franchiseur qui n'a pas remis d’état local du marché peut-il reprocher à son franchisé de n’avoir pas réalisé d’étude de marché ? Analyse jurisprudentielle d'ensemble Ce qu’il faut retenir : Le franchiseur est légalement tenu de réaliser un état local du marché et, de son côté, le franchisé a le devoir de se renseigner (voir notre étude consacrée au devoir du franchisé de « se » renseigner), en réalisant notamment une étude de marché. Qu’en est-il alors lorsque le franchiseur et le franchisé ont l’un comme l’autre failli à ce qui constitue une obligation de source légale pour le premier et un devoir de source jurisprudentielle pour le second ? Dans cette situation particulière, le franchiseur peutil encore reprocher à son franchisé de n’avoir pas réalisé d’étude de marché ? Cette étude propose analyse jurisprudentielle d’ensemble de ces différentes problématiques. Pour approfondir :

Cette clause énoncera par ailleurs les informations communiquées par la société franchisée et son dirigeant, qui pourront ainsi notamment déclarer : -

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les expériences professionnelles passées du dirigeant de la société franchisée ; disposer, en fonds propres et en fonds d’emprunt, de la trésorerie nécessaire (dont le montant pourra être précisé) pour faire face au BFR ; répondre à toutes les exigences légales imposées par leur activité ; n’avoir fait l’objet d’aucune interdiction bancaire et d’aucune interdiction de gérer ; n’avoir fait l’objet d’aucune condamnation pénale pour un délit ou un crime ; être libres de toute clause de non-concurrence et de non-affiliation et ne tomber sous aucun

Force est de constater que la jurisprudence offre des solutions apparemment divergentes (I) qui s’expliquent essentiellement par des motifs d’ordre factuel (II), échappant par nature au contrôle de la Cour de cassation (III). I. Divergence apparente des solutions On le sait, le franchiseur est en effet tenu de remettre au candidat à la franchise, au minimum vingt jours avant la signature du contrat, un document d’information précontractuelle (DIP) contenant un certain nombre d’informations, afin de permettre au candidat de s’engager en pleine connaissance de cause. Le DIP doit à ce titre notamment contenir « une présentation de l’état général et local du marché des

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produits ou services devant faire l’objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché » (article R. 330-1 du code de commerce). L’état local du marché comprend généralement, s’agissant de la zone territoriale concernée, l’indication du nombre d’habitants, la liste exhaustive des concurrents situés sur cette zone, les performances du réseau sur celle-ci par rapport à la concurrence. Il est à rappeler que l’obligation du franchiseur se limite sur ce point à une présentation de données brutes, celui-ci étant en effet uniquement contraint de dresser un simple « état » du marché. Dans une première affaire (CA Paris, 14 septembre 2011, RG n°09/02320), un franchisé invoquait la nullité du contrat de franchise pour manquement du franchiseur à son obligation d’information précontractuelle, le DIP ne comportant pas d’état local du marché. La Cour d’appel de Paris rejette la demande de nullité du contrat formée par le franchisé ; en effet, les magistrats ont relevé que le DIP était effectivement incomplet, puisqu’il ne comportait pas d’état local du marché, mais ils ont jugé qu’il appartenait au franchisé de s’informer par lui-même en réalisant une étude de marché ; selon la Cour, il appartient au franchisé de compléter ces informations en réalisant quant à lui une véritable « étude » du marché, qui doit correspondre à un travail plus approfondi d’analyse des données ; de ce fait, selon la Cour, le manquement du franchiseur à son obligation d’information précontractuelle ne pouvait suffire en l’espèce – faute d’étude – à considérer que le consentement du franchisé avait été vicié. Les juges du fond écartent la possibilité d’une remise en cause de la validité du contrat de franchise, y compris (selon cette décision) lorsqu’aucun état de marché local n’a été remis au franchisé, dès lors que ce dernier n’a pas réalisé lui-même (ou fait réaliser) l’étude de marché qui lui incombe malgré le laps de temps particulièrement long dont il a bénéficié. A été mis en avant le fait que le franchisé avait disposé d’un « délai supérieur aux usages » entre la remise du document d’information précontractuelle et la signature du contrat, en l’occurrence six mois, pour compléter les éventuelles insuffisances dans l’information fournie par le franchiseur. Le franchisé avait donc eu du temps nécessaire pour « affiner son appréciation du marché local ». Dans une deuxième affaire (CA Paris, 19 février 2014, RG n°11/19999), un franchisé formulait une demande de dommages-intérêts pour vice du consentement, le DIP ne comportant pas d’état local du marché. La Cour d’appel de Paris retient « que le document d'information précontractuelle adressé le 19 novembre 2007 à monsieur Cave ne comportait pas la

présentation du marché local et ses perspectives de développement qui sont obligatoires selon les termes de l’article R.330-1 du code de commerce ; que monsieur Cave allègue sans toutefois rapporter la preuve qu'il se serait déterminé différemment sinon ; que le contrat de franchise précisait dans son article 4 .2 que le franchisé «déclare avoir effectué sous sa propre responsabilité une étude de marché, et le cas échéant, une étude d'implantation dans la zone de recherche. Le franchisé assume la responsabilité de son étude d'implantation, de son étude de faisabilité et du choix de son point de vente s'il n'en dispose pas déjà d'un ; qu'il incombait donc à monsieur Cave de faire une étude de marché et qu'il ne peut imputer la responsabilité de sa carence au franchiseur ; que de ces éléments, il s'infère que l'absence de présentation du marché local, et de ses perspectives n'a pas été pour lui un élément déterminant ». A l’inverse, dans une troisième affaire (CA Colmar, 30 septembre 2015, RG n° 14/02315), les juges du fond précisent que, pour opposer utilement au franchisé de n’avoir pas réalisé une étude de marché, encore faut-il que le franchiseur ait lui-même transmis un état du marché au franchisé. Selon cette décision en effet : « Attendu en outre que les informations sur l'état du marché local sont inexistantes à la lecture du document d'information précontractuelle et ce, en contravention avec les dispositions précitées du code de commerce ; Attendu que ces informations sont essentielles puisque seul le concédant est en mesure de fournir une évaluation de la clientèle locale potentielle ; qu'à l'opposé, il ne peut être utilement reproché aux candidats à la franchise de ne pas s'être livré euxmêmes à cette étude en l'absence de données préalables pour ce faire ». II. Appréciation au cas par cas On le voit, la question de savoir si, pour opposer valablement au franchisé de n’avoir pas réalisé une étude de marché, le franchiseur doit avoir lui-même transmis l’état local du marché prévu à l’article R. 3301 du code de commerce, relève de l’appréciation souveraine des juridictions du fond. Mais cette appréciation souveraine n’est pas (seulement) le fruit du hasard, de l’aléa judiciaire. En effet, dans la première affaire, il est souligné que le franchisé avait disposé d’un « délai supérieur aux usages » entre la remise du DIP et la signature du contrat, en l’occurrence 6 mois, pour compléter les éventuelles insuffisances dans l’information fournie par le franchiseur. De même, dans la deuxième affaire, le franchisé déclare dans le contrat de franchise avoir effectué sous sa propre responsabilité une étude de

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marché. Ainsi, le laps de temps important laissé au franchisé dans un cas (6 mois) et l’engagement pris par lui (et non respecté) dans l’autre viennent faire logiquement « pencher » les choses en sa défaveur. III. Absence de contrôle de la Cour de cassation La question de savoir si le franchiseur doit avoir transmis un état de marché pour pouvoir utilement reprocher au franchisé de n’avoir pas réalisé d’étude de marché relevant de l’appréciation souveraine des juridictions du fond, la Cour de cassation n’entend pas opérer de contrôle. C’est d’ailleurs ce qu’elle indique ; statuant sur le pourvoi formé dans l’une des affaires précitées (CA Paris, 14 septembre 2011, RG n°09/02320), la Cour de cassation retient en effet (Cass. com., 28 mai 2013, n° 11-27.256) : « Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que M. X... a eu à sa disposition le document d'information précontractuelle, qu'il a disposé d'un délai supérieur aux usages pour s'informer sur les potentialités économiques du fonds et, plus généralement pour compléter d'éventuelles insuffisances dans l'information fournie et que si le document ne comportait pas d'état local du marché et s'il appartenait effectivement au franchiseur de présenter l'état général et local du marché, le candidat à la franchise devait réaliser lui-même une étude précise du marché local et que, compte tenu du temps dont M. X... avait disposé pour affiner son appréciation du marché local, les éventuels manquements à telle ou telle exigence légale n'auraient pu, de toute façon, être constitutifs d'un dol ou d'une erreur de nature à vicier son consentement ; que de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a pu déduire que M. X... ne rapportait pas la preuve d'un vice du consentement ». A rapprocher : voir notre étude consacrée au devoir du franchisé de « se » renseigner

Pour approfondir :  Ainsi que nous l’avons souligné dans une étude récente, le franchisé est tenu, en toutes circonstances, par un devoir général de se renseigner. Sous l’impulsion de la doctrine civiliste (v. not., G. Viney, Traité de droit civil sous la dir. de J. Ghestin, La responsabilité : conditions, t. 4, LGDJ, 1982, n° 503 ; P. Jourdain, Le devoir de se renseigner, D. 1983. Chron. 139) et commercialiste (Ph. Le Tourneau, De l’allégement de l’obligation de renseignement ou de conseil, D. 1987, chron., p. 101 ; P. Durand, L’information pré-contractuelle obligatoire du concessionnaire exclusif, Cah. dr. entr. 1990, n°5, p. 21), puis de la Cour de cassation (Cass. com., 7 octobre 2014, pourvoi n°13-23.119, Juris-Data n°2014-023200 ; Cass.com., 28 mai 2013, pourvoi n°11-27.256 : deux arrêts rendus spécifiquement en matière de droit de la franchise) et les juridictions du fond s’attachent à rappeler que le franchisé est tenu par un devoir général de se renseigner. C’est pourquoi le devoir de « se » renseigner s’impose au franchisé que le réseau soit de taille limitée (CA Paris, 16 février 2005, Juris-Data n°273091 ; CA Toulouse, 25 mai 2004, Juris-Data n°247226 ; CA Paris, 29 mai 1991, Juris-Data n°022336) ou non (CA Nîmes, 23 juin 2005, Juris-Data n°282018 ; Trib. com. Paris, 28 septembre 2005, RG n°2002/055929, inédit). Ainsi, la jurisprudence écarte régulièrement les actions en nullité du contrat initiées par les franchisés, notamment lorsque : -

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le franchisé a disposé dans le DIP des coordonnées des autres membres du réseau (CA Paris, 19 mars 2014, Juris-Data n°2014-005428 ; CA Paris, 24 avril 2013, Juris-Data n°2013-008231 ; CA Nîmes, 23 juin 2005, Juris-Data n°2005-282018) ou a effectivement pris contact avec certains d’entre eux (CA Paris, 11 janvier 2012, Juris-Data n°2012002711) ; le franchiseur a invité le franchisé à réaliser sa propre étude de marché (CA Paris, 2 juillet 2014, RG n°11/19239, inédit).

 C’est très exactement dans ce courant jurisprudentiel que s’inscrit la décision commentée qui, pour écarter la demande de nullité du franchisé, retient à son tour que :

Devoir du franchisé de se renseigner CA Paris, 7 octobre 2015, RG n°13/09827 Ce qu’il faut retenir :

En sa qualité de commerçant indépendant, le franchisé est tenu en toutes circonstances par un devoir général de se renseigner.

d’une part, le franchisé « pouvait notamment réunir les éléments relatifs à la rentabilité des autres franchisés en les contactant dès lors qu'il disposait de leurs coordonnées »

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et, d’autre part, que « le Guide créateur qui lui a été remis comportait la recommandation d'établir les comptes prévisionnels ainsi qu'une étude de marché ».

 Le devoir du franchisé de se renseigner oblige le franchisé à se renseigner par lui-même sur les éléments de nature à déterminer son consentement. Il ne peut donc reprocher au franchiseur un défaut d'information qu’à la condition de justifier d’une ignorance légitime de l'information. En pratique, l’intérêt du franchiseur (comme celui du franchisé) recommande donc de permettre à ce dernier, durant la phase précontractuelle, de disposer du temps nécessaire pour réaliser toutes les diligences requises par sa qualité de commerçant indépendant, de disposer des coordonnées des autres membres du réseau, de voir son attention attirée sur la nécessité de réaliser sa propre étude de marché ainsi que ses propres comptes prévisionnels, et de s’engager ainsi en toute connaissance de cause. A rapprocher : Cass. com., 7 oct. 2014, n°13-23.119, Juris-Data n°2014-023200

le franchisé de démontrer que son consentement a été vicié du fait du manquement du franchiseur, le franchisé pourra demander à ce que la nullité du contrat soit prononcée, avec toutes les conséquences y attachées. En l’espèce, la société A., à la tête d’un réseau de pizzerias, a conclu un contrat de franchise avec la société C. Le franchisé laisse des factures impayées et face au défaut de règlement, le franchiseur assigne la société C. afin d’obtenir la résiliation du contrat pour redevances impayées ; le franchisé lui oppose la nullité du contrat pour vice de son consentement en soutenant notamment le fait que le franchiseur n’aurait pas respecté son devoir d’information précontractuelle. Le franchiseur a remis le DIP au franchisé le 4 avril 2006 ; trois mois plus tard, le franchiseur remet au franchisé un document complémentaire sur l’état du marché local dans lequel il est fait état de l’attraction de la zone concédée au franchisé pour les enseignes du secteur de la restauration et le risque de saturation. En juillet 2007, un magasin concurrent de la société C. ouvre dans la zone concédée à cette dernière ; le contrat de franchise ayant été signé le 14 mai 2007. Le franchisé considère que le franchiseur n’a pas respecté le devoir d’information précontractuelle auquel il est tenu et que son consentement a été vicié.

L’étendue de l’information précontractuelle Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-15.052 Ce qu’il faut retenir : Le franchiseur est tenu à une obligation d’information précontractuelle à l’égard du franchisé afin de permettre à ce dernier de s’engager en connaissance de cause. Cependant, en n’informant pas le franchisé d’un évènement qui s’est produit après la signature du contrat de franchise, le franchiseur n’a pas manqué à son obligation.

La Cour de cassation confirme la position adoptée par les juges du fond : le magasin concurrent ayant ouvert après la signature du contrat, il ne peut donc être reproché au franchiseur de ne pas avoir informé le franchisé sur un événement qui s’est produit postérieurement à la signature du contrat. L’arrêt rendu par la Cour de cassation est l’occasion de rappeler, d’une part, que même si le franchiseur est tenu à un devoir d’information précontractuelle à l’égard du franchisé, ce dernier est pour sa part tenu de se renseigner.

Pour approfondir : Préalablement à la signature d’un contrat de franchise, la tête de réseau est tenue, ainsi que le prévoient les articles L.330-3 et R.330-1 du Code de commerce, à une obligation d’information précontractuelle à l’égard du franchisé, matérialisée par la remise d’un document d’information précontractuelle. L’information ainsi délivrée par le franchiseur vise à permettre au franchisé de s’engager en connaissance de cause.

D’autre part, l’information précontractuelle délivrée par le franchiseur vise à permettre au franchisé de s’engager en connaissance de cause ; il doit donc lui remettre les informations dont il dispose avant la signature du contrat sans qu’il puisse lui être reproché un manquement au titre d’informations dont il a eu connaissance ultérieurement, après la signature du contrat. A rapprocher : article L.330-3 du Code de commerce

Dans l’hypothèse où le franchiseur ne respecterait pas l’obligation à laquelle il est tenu, et sous réserve pour  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

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L’obligation de mentionner le parcours judiciaire antérieur du dirigeant dans le DIP CA Paris, 14 janvier 2015, RG n°12/18716

ne faisait pas état du parcours judiciaire antérieur de l’un de ses dirigeants, développeur régional du réseau.

Ce qu’il faut retenir : L’omission par le franchiseur de mentionner dans le DIP la liquidation judiciaire antérieure de l’un de ses dirigeants peut constituer une réticence dolosive susceptible de justifier la nullité du contrat de franchise. Pour approfondir : Cette décision conforte l’importance donnée par les juridictions à l’information précontractuelle prévue par la Loi Doubin et les articles L.330-3 et R.330-1 du Code de commerce. La Cour apporte également et surtout un éclairage sur les informations relatives aux dirigeants de la société franchiseur que cette dernière doit impérativement communiquer. Une société exploite, par le biais d’un réseau d’agents, un concept reposant sur des prestations de conseil et d’accompagnement auprès d’entreprises en matière de réduction de leurs coûts et frais généraux. En 2006, elle signe un contrat de franchise avec une société pour exploiter cette activité sur certaines régions du territoire français. Considérant que son cocontractant ne remplissait pas ses obligations contractuelles, le franchisé suspend le règlement des redevances du contrat de licence. Le franchiseur résilie le contrat de franchise, demande le paiement de redevances impayées et sollicite l’application de la clause de non-concurrence. Apprenant que son ex-franchisé a conclu un nouveau contrat de franchise avec une autre société, en dépit de son obligation de non-concurrence, le franchiseur l’assigne référé en paiement d’une provision. En réponse, l’ex-franchisé assigne le franchiseur devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins de voir prononcer la nullité du contrat de franchise sur le fondement des articles L.330-3 et R.330-1 du Code de commerce. En première instance, les juges du fond font droit à sa demande et prononce la nullité du contrat de franchise. Par sa décision du 14 janvier 2015, la Cour d’appel de Paris confirme le jugement du Tribunal de commerce.

Le DIP limitait sa présentation des expériences passées de son dirigeant en matière de franchise à la poursuite « d’autres activités dans le secteur de la franchise ». Le dirigeant du franchiseur avait en réalité précédemment dirigé un réseau de master franchise en France, sous une autre enseigne, qui avait été liquidée judiciairement. La Cour relève que « compte tenu de l’organisation du réseau qui devait être mise en place, […], reposant sur une master franchise régionale, l’échec de Monsieur […] était un élément que devait connaître tout candidat, fût-ce même sous un contrat de licence, dès lors que la fonction de "directeur" de Monsieur […], qui lui a d’ailleurs permis de signer le contrat au nom du concédant, donnait à penser qu’il avait la responsabilité et les compétences requises pour assurer le développement et l’animation du réseau et pour choisir les développeurs compétentes ». La Cour considère en l’espèce que la dissimulation de cette information sur le passé de l’un de ses dirigeants par le franchiseur constitue un manque de transparence à l’égard de son candidat. Caractérisé comme une réticence, voire une manœuvre dolosive, cette omission conduit ici la Cour à confirmer l’annulation du contrat de franchise. La solution dégagée par cette décision ne doit pas être généralisée ; tout est affaire d’espèce. A rapprocher : CA Paris, 29 octobre 2014, RG n°13/24671

Le franchisé doit démontrer les insuffisances du DIP ayant effectivement vicié son consentement Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-15.052 Ce qu’il faut retenir : Selon la Cour de cassation, il appartient au franchisé de démontrer, en se référant à des éléments précis, les informations dont la méconnaissance l’ont empêché de s’engager en toute connaissance de cause. Pour approfondir :

Au soutien de sa demande de nullité, le franchisé arguait que le document d’information précontractuelle (DIP) communiqué par le franchiseur

 En l’espèce, un franchisé reprochait à son franchiseur de lui avoir remis un DIP incomplet,

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comportant selon lui des omissions de nature à vicier son consentement. En définitive, le franchisé reprochait au franchiseur de ne pas lui avoir signalé l’ouverture d’un point de vente concurrent situé dans sa zone de chalandise, survenue postérieurement à la signature du contrat de franchise. La réponse de la Cour de cassation est double : elle retient tout d’abord, sans grande surprise, qu’il ne peut être reproché au franchiseur de n’avoir pas signalé, avant la signature du contrat de franchise, un événement s’étant produit postérieurement à cette signature ; tout cela est aussi évident que logique. Ensuite et surtout, la Cour de cassation souligne qu’« en l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel, qui n’avait pas à procéder à d’autres recherches dès lors que la société (franchisée) ne précisait pas les informations, autres que celles relatives à l’ouverture d’un restaurant concurrent, qui auraient dû être actualisées et dont la méconnaissance l’avait empêché de s’engager en toute connaissance de cause, a légalement justifié sa décision ». A rapprocher : CA Montpellier, 10 décembre 2013, inédit

L’arrêt a l’intérêt de passer en revue un certain nombre de faits pris en compte par le juge lorsqu’il doit se prononcer sur la responsabilité de la tête de réseau quant à l’établissement des prévisionnels du distributeur. Ainsi, pour écarter la responsabilité de la tête de réseau, la Cour d’appel de Paris retient que : -

le prévisionnel a été élaboré par les associés de la société distributrice ;

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il a été le « résultat abouti » de plusieurs échanges de correspondance avec la tête de réseau au cours desquels cette dernière a donné des éléments d’information sur l’exploitation d’un autre magasin du réseau et l’exploitation du concept par la tête de réseau ;

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la tête de réseau a attiré l’attention du distributeur candidat, « par deux fois », sur le caractère trop optimiste de certains éléments du prévisionnel (notamment les charges salariales) ;

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il n’est pas établi que la version finale du prévisionnel ait été validée par la tête de réseau de sorte qu’elle aurait garanti sa réalisation ;

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le chiffre des ventes effectivement réalisées se trouvait en rapport avec l’activité prévu sur le marché en cause ;

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le distributeur ne fait qu’alléguer (sans établir) que l’implantation d’un magasin sous la même enseigne à « proximité » (50 km) aurait affecté ses ventes ;

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l’écart entre le prévisionnel et le chiffre d’affaires réalisé n’est pas suffisant pour établir une faute de la tête de réseau dans la transmission d’informations ;

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les associés de la société distributrice étaient des chefs d’entreprise et, en cette qualité, savaient ce qu’est un prévisionnel, comment il est élaboré et quelles en sont les limites ;

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la tête de réseau n’a pas d’autres obligations d’information que celle que la loi lui impose par la remise d’un DIP et donc elle n’a pas d’obligation de mise en garde de son distributeur (et encore moins d’obligation de le dissuader de contracter) ;

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compte tenu du fait que plus d’un an s’est écoulé entre l’entrée en relations, puis l’élaboration du prévisionnel (qui a été réalisé en 5 mois), suivi de la remise du DIP et enfin, 3 mois et demi plus tard, de la signature du contrat, c’est « manifestement

L’absence de responsabilité pour les prévisionnels : panorama des critères pris en compte CA Paris, 16 septembre 2015, RG n°13/08191 Ce qu’il faut retenir : Pour examiner la responsabilité de la tête de réseau quant aux prévisionnels, le juge s’attache aux échanges intervenus entre les parties, aux remarques formulées par la tête de réseau, au chiffre d’affaires effectivement réalisé et à son écart avec le chiffre d’affaires prévu, aux compétences professionnelles du dirigeant, à la durée qui s’est écoulée entre la remise du DIP et la signature du contrat. Pour approfondir : Un distributeur d’une enseigne de vente de motos a assigné la tête du réseau après avoir été placé en liquidation judiciaire. Parmi ses demandes, figuraient la nullité du contrat de distribution conclu au regard du compte de résultat prévisionnel ; contentieux assez classique jusque-là.

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après mûre réflexion exclusive de tout vice du consentement que ce contrat a été signé ». A rapprocher : CA Lyon, 4 novembre 2010, RG n°09/05848

Responsabilité du franchiseur dans l’établissement des prévisionnels : système du « tout ou rien » Cass. com., 17 mars 2015, pourvoi n°13-24.853 Ce qu’il faut retenir : Les juges sont de plus en plus sévères en ce qui concerne l’établissement des prévisionnels du franchisé : ne s’agissant pas d’une obligation pour le franchiseur, mieux vaut qu’il n’intervienne pas dans leur réalisation car s’il choisit d’y jouer un rôle actif il n’aura droit à aucune erreur. Pour approfondir : Un franchiseur avait souhaité assister son franchisé en lui fournissant une « étude portant sur la viabilité technique et économique de l’implantation d’une franchise » (comportant notamment le chiffre d’affaires d’exploitation prévisionnel). En ressortait un CA prévisionnel compris entre 1.759.078 €, en période basse, et 5.583.718 €, en période haute. Le franchisé ayant obtenu des résultats très inférieurs à ceux ainsi annoncés par le franchiseur, et après avoir dû déposer le bilan et se placer en liquidation judiciaire au bout de quelques mois d’activité seulement, le liquidateur avait assigné le franchiseur en nullité du contrat de franchise pour défaut d’information précontractuelle et obtention de dommages et intérêts. La Cour d’appel de Paris a donné raison au liquidateur, suite à quoi le franchiseur a formé un pourvoi en cassation. La Haute Cour a confirmé la décision rendue par la Cour d’appel, relativement à l’annulation du contrat de franchise. La Cour de cassation a considéré que le résultat obtenu par le franchisé correspondait à seulement 30% du prévisionnel fourni par le franchiseur, ce qui était un écart considérablement important.

de commerce et non de reprendre un fonds qui exploitait auparavant une activité similaire, au surplus dans une galerie marchande. Par ailleurs, les juges ont relevé que si, d’un côté, le franchiseur justifiait l’écart de chiffre d’affaires par le fait que l’ouverture du magasin du franchisé avait été retardée par rapport à la date annoncée et que le franchisé avait dû payer un droit d’entrée au profit du bailleur du centre commercial dans lequel il s’implantait, le franchiseur, d’un autre côté, n’avait pas pris en compte ces circonstances dans les prévisionnels qu’il avait établis. De ce point de vue, la décision paraît toutefois critiquable : la responsabilité du franchiseur est semble-t-il étendue au-delà des limites raisonnables des capacités de toute personne (franchiseur, franchisé ou prestataire spécialisé) en charge d’établir des prévisionnels. Enfin, même si on peut douter du fait que dans le cas contraire, la nullité du contrat n’aurait pas été prononcée, la Cour de cassation a rappelé qu’aucune faute de gestion n’avait pu être imputée au franchisé. Voici donc une décision (une de plus) responsabilisant de façon très dure le franchiseur jouant un rôle actif dans l’établissement des prévisionnels de son franchisé. A rapprocher : Cass. com., 25 novembre 2014, pourvoi n°13-24.658

Comptes d’exploitation prévisionnels et défaut de responsabilité de la banque CA Metz, 26 mai 2015, RG n°14/00446 Ce qu’il faut retenir : L’obligation de mise en garde pesant sur l’établissement de crédit est subordonnée à la réunion de deux conditions : d’une part la qualité d’emprunteur ou de caution non averti (e), et d’autre part, l’existence d’un risque d’endettement significatif. Pour approfondir :

A aussi été pris en considération le fait que les comptes prévisionnels fournis reposaient sur des données d’autres franchisés qui n’étaient pas dans des situations comparables au franchisé en cause puisque, à la différence des autres membres du réseau, ce franchisé était dépourvu d’expérience professionnelle dans ce type d’activité et avait choisi de créer un fonds

On le sait, l’existence de comptes d’exploitation prévisionnels exagérément optimistes peut parfois justifier une action en responsabilité de l’emprunteur et/ou de la caution à l’encontre de l’établissement dispensateur de crédit. Ainsi, un établissement de crédit peut éventuellement engager sa responsabilité

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à l'égard de la société franchisée et/ou de la caution, pour avoir failli à son devoir de mise en garde, lorsque l’emprunteur et/ou la caution ne sont pas des opérateurs avertis et qu'il existe un risque d’endettement significatif ; selon la décision commentée, tel ne peut être le cas lorsque, comme en l’espèce, l’emprunteur et la caution n’établissent pas la preuve du caractère « manifestement irréaliste » des comptes d’exploitation prévisionnels sur la base desquels l’établissement de crédit a financé l’opération. La règle est simple. L'obligation de mise en garde qui pèse sur l’établissement de crédit est subordonnée à la réunion de deux conditions, à savoir : d’une part, la qualité d'emprunteur ou de caution non averti(e) et, d’autre part, l'existence d'un risque d'endettement significatif. Revenons sur chacune de ces deux conditions. Sur la première condition : Dans cette affaire, les juges du premier degré avaient jugé que la caution devait être considérée comme une caution avertie dans la mesure où celle-ci était parfaitement averti des risques liés à l'opération compte tenu de sa qualité d'associé détenant 36 % des parts sociales de la société cautionnée et alors qu'il avait été en mesure d'apprécier les capacités de remboursement de cette société en considération des comptes prévisionnels sur la base desquels le prêt avait été accordé, ledit dossier prévisionnel ne faisant apparaître aucun risque particulier autre que celui lié à tout investissement lors de la création d'une société, de sorte que les demandes et prétentions des cautions ont été également repoussées quant à ce chef du litige. Pour ce qui concerne cette première condition, la Cour d’appel de Metz écarte la solution des premiers juges : « Attendu que des conclusions des parties et des pièces qu'elles ont produites il découle que (la caution) ne peut être considéré comme étant une caution avertie du seul fait de sa qualité d'associé, à concurrence de 36 % des parts sociales, de la société emprunteuse et cautionnée ou encore en sa qualité de beau-père du gérant de cette société et alors qu'il n'a nullement été allégué qu'il se serait immiscé dans la gestion de la société (franchisée) ou qu'il en aurait été le gérant de fait ; Que la banque admet que Mme C… peut quant à elle se voir reconnaître la qualité de caution profane ; Attendu que par suite il y a lieu de juger que la banque était effectivement tenue à l'égard des cautions d'un devoir de mise en garde concernant les risques

découlant de l'endettement né de l'octroi du crédit consenti à la débitrice principale et concernant leurs capacités financières à supporter les conséquences de la défaillance de l'emprunteur ». Sur la seconde condition : Pour ce qui concerne la fiabilité de l'opération financée grâce au prêt de la Banque, les juges du second degré relèvent ensuite que cette fiabilité pouvait être considérée comme établie à l'égard de celle-ci par la production des comptes prévisionnels qui lui ont été soumis, les cautions ne démontrant par que la conclusion par la société franchisée d'un contrat de franchise avait pour conséquence un « aléa spécifique » ou supérieur de nature à affecter le succès de cette entreprise et susceptible de générer un risque d'endettement accru à la fois pour la débitrice principale et les cautions, devant être observé que la débitrice principale a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire en juin 2008 et d'une procédure de liquidation judiciaire en octobre 2008, soit également postérieurement à la souscription de leurs engagements. Autrement dit, dès lors que l’emprunteur et la caution n’établissent pas la preuve du caractère « manifestement irréaliste » des comptes d’exploitation prévisionnels sur la base desquels l’établissement de crédit a financé l’opération, ce dernier ne peut – sauf circonstances particulières non établies au cas présent – voir sa responsabilité engagée pour manquement à son devoir de mise en garde. En l’espèce, la Cour d’appel ajoute, au surplus, que « la banque est tout à fait fondée à se prévaloir de la déloyauté (des cautions), au sujet desquels il a été définitivement jugé qu'ils lui ne lui ont pas fourni, lors de l'établissement de la fiche de renseignements et de la souscription du cautionnement, des renseignements exacts relativement aux prêts déjà en cours en novembre 2005, avec cette conséquence que (l’établissement de crédit) n'a pas été mis lui-même en mesure d'apprécier le risque d'endettement pouvant exister au détriment (des cautions) par la souscription du cautionnement litigieux, puisque précisément cet établissement bancaire ignorait une partie des charges de ce couple ». A rapprocher : CA Montpellier, 8 février 2012, RG n°11/01238

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Comptes prévisionnels irréalistes et devoir de mise en garde de la Banque CA Versailles, 5 novembre 2015, RG n°13/06537 Ce qu’il faut retenir : Une Banque peut engager sa responsabilité à l'égard de la société franchisée et de son dirigeant caution, pour manquement à son devoir de mise en garde, lorsque ceux-ci ne sont pas « avertis » et qu'il existe un risque d’endettement significatif, résultant par exemple du caractère « manifestement irréaliste » des comptes prévisionnels sur la base desquels le projet a été financé. Pour approfondir : La décision commentée permet de revenir sur la situation classique suivante : le candidat à la franchise entame différentes démarches auprès du franchiseur, se voit remettre un document d’information précontractuelle, réalise en tant que commerçant indépendant les démarches qu’il estime nécessaires pour être suffisamment informé de l’opportunité de son choix, en réalisant une étude de marché, puis des comptes prévisionnels, puis un dossier qu’il remet à la banque pour justifier la viabilité de son projet, avant d’obtenir le crédit souhaité en se portant caution personnel. Lorsque les choses tournent mal, que la société franchisée dépose le bilan et qu’il s’avère que les comptes prévisionnels étaient manifestement irréalistes, se pose alors (notamment) la question de savoir à quelles conditions la société franchisée emprunteur et/ou son dirigeant caution peuvent engager la responsabilité de la banque pour manquement à son « devoir de mise en garde » ? Pour le dire autrement, quelles sont donc les conditions de mise en œuvre de la responsabilité de la Banque par suite de l’octroi de crédits à la société franchisée cautionnés par son gérant ? En l’espèce, les faits soumis à l’appréciation de la Cour d’appel de Versailles se rapprochaient de ce schéma classique ; il faut néanmoins revenir en détail sur le déroulement des faits de l’espèce pour mieux comprendre la portée de la décision rendue. Au cas présent, une société franchisée S. avait ouvert un compte courant dans les livres d’une Banque et avait souscrit auprès de cet établissement, le 19 mai 2009, un prêt de 185.927 euros remboursable en 85 mensualités ; le 22 mai 2009, Monsieur S., gérant de la société S., s'est rendu caution solidaire des engagements de la société S. dans la limite de la somme de 241.705,10 euros en principal, intérêts, et le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, et ce pour une durée de 133 mois ; son épouse donnait

alors son accord au cautionnement le même jour. Par acte sous seing privé du 17 février 2012, Monsieur S. s’était rendu caution solidaire de la société S. dans la limite de 7.800 euros pour une durée de sept mois. Par jugement du 22 mars 2012, le tribunal de commerce d'Évreux avait ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société S. La liquidation judiciaire était prononcée le 17 janvier 2013. Par lettre RAR du 16 mai 2012, la Banque déclarait au passif une créance chirographaire de 6.187,74 euros (au titre du solde débiteur du compte courant) et une créance privilégiée (152.060,05 euros au titre du prêt). Le même jour, la Banque avait informé Monsieur S. du montant de sa déclaration de créance en l'informant qu'elle lui réclamerait le paiement de la somme de 158.247,79 euros en principal à la fin de la période d'observation fixée au 22 septembre 2012. Puis, par jugement du 17 janvier 2013, le tribunal prononçait la liquidation judiciaire de la société S. C’est dans ce contexte que la Banque poursuivait la caution en exécution de ses engagements devant le Tribunal de commerce de Versailles et, par jugement assorti de l’exécution provisoire (Trib. Com. Versailles, 5 juillet 2013, RG n°2013F00195) devait condamner la caution à lui payer, d’une part, 241.705,10 euros au titre de son engagement de caution sur le prêt et, d’autre part, 7.533,17 euros au titre de son engagement de caution sur le compte courant, tout en ordonnant, comme il est d’usage, la capitalisation des intérêts au taux légal sur la somme de 5.733,17 euros et au taux annuel de 7,85 % sur la somme de 128.718,51 euros. Face à cette solution, la caution faisait valoir devant la Cour d’appel de Versailles que les cautionnements étaient disproportionnés à ses biens et revenus lors de leurs conclusions, et qu'au jour où il était appelé, il ne disposait pas davantage d'un patrimoine lui permettant de faire face à son obligation. Il invoquait par ailleurs un manquement de la Banque, d’une part, à son obligation d'information sur la portée de l'engagement et, d’autre part, à son obligation de mise en garde à l'égard de l'emprunteur et à son égard ; la caution soulignait être « non avertie », n’avoir aucune expérience dans le secteur d’activité de la société franchisée, n’avoir même jamais géré de société commerciale, et avoir été incapable de percevoir l'aspect irréaliste du compte d'exploitation prévisionnel établi par le franchiseur, alors que selon lui : -

la Banque, spécialisée dans la franchise et bénéficiaire des services de son pôle national franchise, disposait d'informations sur les risques et la viabilité de l'opération financée que lui-même ignorait ;

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l'opération était particulièrement risquée puisque le prévisionnel établi par le franchiseur et communiqué à la banque était avéré totalement idéaliste et insincère, ce que la Caisse aurait dû déceler. Il en déduisait être fondé à obtenir la décharge de son engagement et la réparation de son préjudice, caractérisé par la perte des sommes qu'il avait personnellement investies dans l'opération, soit 192.409,87 euros.

La solution issue de la décision commentée : la décision commentée infirme la solution des premiers juges puisqu’elle retient : -

-

d’une part, que le cautionnement souscrit le 22 mai 2009 en garantie du prêt consenti par la Banque à la société S. n'était pas manifestement disproportionné à ses revenus et à ses biens au moment de sa conclusion, de sorte que la Banque pouvait valablement s'en prévaloir (à ce titre la caution est ici condamnée au paiement de la somme de 152.060,05 euros) ; d’autre part, que la Banque a toutefois manqué à son « devoir de mise en garde » concernant le second cautionnement, consenti le 17 février 2012, de sorte que la Banque ne peut s’en prévaloir (à ce titre la demande de condamnation de la caution est ici rejetée et la Banque se trouve par ailleurs condamnée au paiement de la somme de 50.000 euros, à titre de dommages-intérêts).

Au-delà de la solution ainsi dégagée par la Cour d’appel de Versailles, c’est sa motivation qui retient avant tout l’attention, motivation dont la présentation implique de différencier successivement la question (ici préalable) du caractère manifestement disproportionné (ou non) des cautionnements litigieux, puis celle – plus générale – du manquement (ou non) de la Banque à son devoir de mise en garde. Il conviendra, pour chacune de ces deux questions, d’envisager distinctement les deux cautionnements, intervenus dans des circonstances différentes, et conduisant la Cour d’appel à dégager des solutions elles-mêmes différentes. Sur le caractère manifestement disproportionné (ou non) des cautionnements litigieux : en droit, il faut rappeler tout d’abord le sens des dispositions de l'article L. 341-4 du Code de la consommation, selon lequel « un créancier professionnel (telle une Banque) ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique : -

dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus ;

-

à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».

Autrement dit, l’appréciation porte donc sur deux instants « t » bien distincts l’un de l’autre : le premier à la souscription de la caution ; le second à la date à laquelle celle-ci est appelée. Cette disposition s'applique à toutes les cautions qu'elles soient averties ou novices, dirigeantes ou non, dès lors que leur engagement a été souscrit pour un montant excédant manifestement leurs facultés financières (V. récemment, en ce sens, CA Pau, 22 juin 2015, RG n°14/00310). Concernant le premier point, la disproportion de l'engagement de caution s'apprécie à la date de la conclusion du cautionnement sur la base des éléments alors connus et l'appréciation de la disproportion doit être effectuée au vu des déclarations de la caution concernant ses biens et revenus dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude ; au sens de ce texte, la disproportion s'apprécie, lors de la conclusion du contrat de cautionnement, au regard du montant de l'engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global dont le créancier avait (ou pouvait avoir connaissance) en tant que professionnel normalement avisé et vigilant, y compris l'endettement résultant d'autres engagements de caution (V . très récemment, sur cette question : CA Poitiers, 24 novembre 2015, RG n° 14/04201). Par ailleurs, il résulte du texte précité que l'inopposabilité du cautionnement à la caution est conditionnée par l'existence, lors de sa souscription, d'une double disproportion manifeste de l'engagement, à ses revenus, d'une part, et à ses biens, d'autre part, et ce cumulativement et non alternativement. Ajoutons également que la preuve du caractère disproportionné du cautionnement au moment de sa souscription pèse sur la caution qui s'en prévaut et ce en application des dispositions de l'article précité. Concernant le second point, il convient de rappeler qu’en présence d'un cautionnement qui n'était pas disproportionné lors de sa conclusion, il est alors inopérant de rechercher s'il est devenu disproportionné au moment où la caution est appelée. Ceci étant rappelé, en l’espèce, pour ce qui concerne la souscription du premier cautionnement, le 22 mai 2009, la Cour d’appel retient « que le cautionnement souscrit à concurrence de 241.705,10 euros au regard d'un patrimoine immobilier commun de 200.000 euros

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et d'un patrimoine mobilier de 60.000 euros, fût-il amputé de la somme de 54.000 euros, et d'un revenu annuel d'environ 50.000 euros pour garantir le remboursement d'un emprunt à raison de mensualités de 2.748,04 euros n'apparaît pas manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution à la date de sa souscription » et « qu'il n'y a donc pas lieu de rechercher si Monsieur S. peut y faire face au moment où il est appelé ». Pour ce qui concerne la souscription du second cautionnement, le 17 février 2012, la Cour d’appel retient qu’ « aucune fiche d'information sur les revenus et les biens de Monsieur S. n'a été établie de sorte qu'il peut apporter la preuve qui lui incombe de la disproportion manifeste de ce cautionnement à ses biens et revenus par tout moyen », « qu'en février 2012, alors qu'il était déjà engagé à concurrence de 241.705,10 euros au titre du premier cautionnement, Monsieur S. avait perçu (…) 98.130,50 euros, amputé d'un capital de 50 000 euros dû au titre de la prestation compensatoire de 62.500 euros mise à sa charge (…) » et « qu'il a déclaré avoir perçu en 2012 la somme de 76 euros ; que les avances en compte courant d'associé réalisés par Monsieur S. se sont élevées à la somme totale de 166.497,34 euros au 30 septembre 2011, et s'il faut relever que M. S. ne fournit aucune information sur le montant de son compte courant d'associé en février 2012, il convient de le suivre lorsqu'il affirme que, compte tenu de la situation de la société S. en février 2012, laquelle sera mise en redressement judiciaire un mois plus tard, le remboursement de ce compte courant était illusoire ». La Cour d’appel conclut « qu'en considération de ces divers éléments d'appréciation, il faut retenir que le cautionnement supplémentaire des engagements de la société S. à concurrence de 7.800 euros le 17 février 2012 était manifestement disproportionné aux biens et revenus de M. S. » et que la Banque « sur laquelle pèse la charge de la preuve d'un retour à meilleure fortune de la caution, ne soutient pas que Monsieur S. peut faire face à cet engagement au moment où il est appelé, de sorte qu'il convient de dire qu'elle ne peut se prévaloir du cautionnement du 17 février 2012 ».

sollicite (ou qu’il cautionne) ; autrement dit, il s'agirait pour le banquier d'insister sur les risques ou les conséquences négatives de l'octroi du prêt. En deuxième lieu, l’on peut comprendre, à la lumière de ce qui semble constituer les premiers contours de ce devoir de mise en garde que le banquier dispensateur de crédit n’y soit tenu qu’en présence de conditions relativement contraignantes ; or, selon la jurisprudence, ce devoir s’impose tant à l'égard de l'emprunteur non averti qu'à celui de la caution non avertie, à raison de leurs capacités financières et des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt qui constitue l'opération cautionnée. Autrement dit, l'obligation de mise en garde est ainsi subordonnée à deux conditions cumulatives, la qualité d'emprunteur (ou de caution) non averti(e) et l'existence d'un risque d'endettement ; on y reviendra. En troisième lieu, lorsque ces deux conditions cumulatives sont vérifiées et que le Banque se trouve alors tenue par ce devoir de mise en garde, il appartient alors à cette dernière de rapporter la preuve de ce qu’elle y a satisfait. En quatrième lieu, la sanction d'un manquement du banquier dispensateur de crédit à son obligation de mise en garde réside dans la réparation de la perte de chance pour la caution de ne pas contracter pouvant, le cas échéant, donner lieu à l'octroi de dommagesintérêts ; il ne prive pas cependant le banquier de la possibilité de se prévaloir du cautionnement, pas plus qu’il n'entraîne la décharge de la caution. Ce rappel juridique préalable effectué, il convient de revenir sur les faits de l’espèce. Pour ce qui concerne l'octroi le 22 mai 2009 à la société S., nouvellement constituée, d'un prêt de 185.927 euros, destiné à financer les investissements liés à la création du fonds de commerce de centre de bronzage sous franchise à Evreux, la Cour d’appel retient : -

qu’il est intervenu après la remise par Monsieur S. à la Banque d'un document intitulé « synthèse du compte de résultat prévisionnel » qui, selon Monsieur S., aurait été établi directement par le franchiseur et serait insincère ;

-

que le document d'information précontractuelle communiqué par le franchiseur à Monsieur S. versé aux débats stipule en son article II, B, 4, que « le franchiseur remet au franchisé ... un modèletype de compte de résultat prévisionnel, ainsi que le montant des investissements, les principaux ratios, les principales charges permettant au franchisé d'établir son propre compte d'exploitation prévisionnel, avec l'aide de ses propres conseils et en fonction des facteurs locaux de son implantation » et que « le franchisé reconnaît que la responsabilité du franchiseur ne

Sur le devoir de mise en garde de la Banque : en droit, il convient tout d’abord de rappeler quatre observations de principe. En premier lieu, les contours du « devoir de mise en garde » ne sont pas précisément définis, ni par la loi (qui n’en donne aucune définition), ni par la jurisprudence, la cour de cassation laissant ce soin aux juridictions du fond, sans doute car l’intensité même de ce devoir relève de la casuistique ; en substance, le devoir de mise en garde imposerait à l'établissement d'alerter l'emprunteur (ou la caution) sur le caractère excessif du prêt qu'il

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pourra, en aucun cas, être recherchée en cas de non-réalisation des prévisions dans la mesure, notamment où, d'une part, le franchisé a une part prépondérante dans la réussite de l'exploitation de son centre, d'autre part, qu'il lui appartient de faire procéder à toute étude de marché approfondie en fonction du choix qu'il fait de son emplacement, enfin, parce que les outils prévisionnels ne peuvent préjuger du comportement d'une population locale spécifique pour un produit de confort proposé dans le cadre d'un concept original » ; -

que le prévisionnel était « manifestement irréaliste » dans les circonstances de l'espèce ;

-

« que l'octroi du prêt présentait de sérieux risques d'endettement et excédait les capacités financières prévisibles de la société S. ; que Monsieur S. était le créateur de l'entreprise, n'avait aucune qualification ni compétence ni expérience dans la gestion d'un commerce ou dans la finance, exploitant de surcroît un domaine d'activité totalement étranger à sa profession habituelle d'ingénieur en informatique ; que la société S. doit donc en conséquence être considérée comme un emprunteur non averti, de même que Monsieur S. doit être qualifié de caution non avertie ; que (la Banque), qui, dans le cadre de son obligation de prudence et de vigilance, devait se renseigner sur la viabilité du projet et les capacités financières de la société S. sans s'en tenir aux informations contenues dans des documents peu fiables ou irréalistes, était débitrice d'une obligation de mise en garde qu'elle ne justifie par avoir remplie » ;

-

et qu’en conséquence que Monsieur S. est « en droit d'obtenir la réparation de la perte de chance de ne pas contracter qui ne saurait correspondre au montant de la dette, ni au montant de toutes les sommes engagées pour financer la création et l'exploitation du fonds de commerce » ;

-

qu’en l’espèce il y a lieu de retenir que « s'il est certain que le défaut d'exécution du devoir de mise en garde a privé Monsieur S. de l'éventualité favorable qu'aurait constitué pour lui le fait de renoncer à son projet, l'éventualité de ce renoncement apparaît faible, de sorte que le préjudice sera réparé par l'allocation d'une somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts, venant se compenser avec le montant de la condamnation restant à déterminer (…) ».

subordonné : la qualité d'emprunteur non averti et l'existence d'un risque significatif d'endettement. Chacune de ces conditions mérite quelques commentaires supplémentaires. Le caractère « averti » (ou non) de l’emprunteur est par nature une question subjective. Elle se rattache néanmoins à des critères, un peu plus objectifs, tels que notamment : -

le profil de l’intéressé bien sûr, encore que, contrairement à une idée reçue, cet élément ne constitue pas le seul élément à prendre en considération (Th. Favario, Les contours jurisprudentiels du devoir de mise en garde du banquier à l’égard de l’emprunteur non averti, Revue de Droit bancaire et financier n° 3, Mai 2010, étude 12 : soulignant même, à propos des deux arrêts rendus le 27 juin 2007 par la chambre mixte de la cour de cassation, que l'un laissait entendre qu'un agriculteur empruntant pour les besoins de son exploitation n'était pas nécessairement un emprunteur averti, et que l’autre suggérait qu'une institutrice co-emprunteur avec son époux d'un prêt pour l'achat d'un fonds de commerce n'était pas nécessairement un emprunteur non averti) ;

-

la durée pendant laquelle l’emprunteur (ou son dirigeant) ont pu exercer l’activité professionnelle financée par le prêt litigieux et/ou une activité impliquant des compétences financières ; en l’espèce, il n’est pas neutre de relever qu’il s’agissait d’un emprunteur non averti dès lors que « Monsieur S., créateur de l'entreprise (emprunteuse), n'avait aucune qualification ni compétence ni expérience dans la gestion d'un commerce ou dans la finance, exploitant de surcroît un domaine d'activité totalement étranger à sa profession habituelle d'ingénieur en informatique » (v. par ailleurs, pour un exemple récent d’emprunteur « averti » : CA Aix-enProvence, 25 Juin 2015, RG n°14/06188 ; CA Amiens, 22 janvier 2015, RG n°13/02916) ;

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le nombre de prêts professionnels que l’emprunteur (ou son dirigeant) ont pu contracter par le passé ;

-

la présence ou non de professionnels ayant pu entourer l’emprunteur avant la souscription du crédit litigieux (v. en ce sens, CA Pau, 22 juin 2015, RG n°14/00310 : soulignant que le dirigeant « a donc su s'entourer de l'avis de professionnels et a pu en conséquence prendre une décision réfléchie

Par sa motivation, la décision commentée reprend donc successivement les deux conditions cumulatives auxquelles le devoir de mise en garde de la Banque est

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et éclairée lorsqu'il a souscrit son engagement de caution ») ; -

étant précisé que la cour de cassation se livre régulièrement à un contrôle de la notion d’emprunteur averti ou de caution avertie (v. par ex., Cass. civ. 1ère, 27 février 2013, n°12-13.950) et qu’il appartient au demandeur et à lui seul de rapporter la preuve de sa qualité de profane (v. CA Rouen, 23 avril 2015, RG n° 13/02791 ; v. surtout, Cass. com., 17 nov. 2009, Juris-Data n° 2009050458).

L’existence d’un risque significatif (ou non) d’endettement est également une question subjective. Elle se rattache néanmoins à des critères, un peu plus objectifs, tels que notamment : -

-

-

l’existence (ou non) d’une disproportion entre l'engagement de l’emprunteur (ou de la caution) et la capacité de remboursement du crédit par l’emprunteur (les revenus et patrimoine de la caution), induisant un risque d'endettement excessif (V. très récemment, sur cette question : CA Poitiers, 24 novembre 2015, RG n° 14/04201) ; l’existence (ou non) d’informations financières communiquées à la Banque (CA Versailles, 19 juin 2014, RG n°12/03725 : soulignant au cas particulier « que la banque, qui ne justifie d'aucune demande de renseignements vis à vis des cautions, quant à leur capacités financières, ce dont il résulte qu'elle n'a pas vérifié la proportionnalité de leur engagement à leurs biens et revenus, ne peut sérieusement prétendre, alors qu'elle était le partenaire financier du vendeur, avoir ignoré la fragilité de la situation économique et financière de la société cédante et partant, les risques d'endettement encourus par les appelants en leur qualité de cautions de la société cessionnaire » ; v. aussi sur ce point, CA Angers, 30 mai 2014, RG n°12/02571, Juris-Data n°2014-012089) ; lorsque des informations financières ont communiquées à la Banque – ce qui le cas en règle générale évidemment –, leur exactitude (CA Metz, 26 Mai 2015 RG n° 14/00446), sinon même l’existence (ou non) d’anomalies apparentes dans les éléments transmis à la Banque (CA Rouen, 23 avril 2015 – RG n° 13/02791 : soulignant que « la banque, qui n'a pas à s'immiscer dans la gestion des affaires de ses clients pour apprécier la viabilité et la rentabilité de leurs projets, qui n'avait pas à procéder à des investigations supplémentaires sur la situation de la société au vu de documents qui étaient cohérents et sans

anomalie apparente, dont il n'est pas démontré qu'elle aurait eu, sur le projet financé et la situation de la société des informations qui n'étaient pas en possession de la caution, a pu accorder le prêt » ) ; dans l’espèce commentée, la Cour infère le devoir de mise en garde de la Banque de ce que le prévisionnel, établi par le franchiseur, était « manifestement irréaliste » ; -

l’existence (ou non) d’informations connues de la Banque et ignorées de l’expert-comptable ayant réalisé les comptes prévisionnels (CA Amiens, 22 janvier 2015, RG n°13/02916) ;

-

étant précisé qu’il appartient par nature au demandeur de rapporter la preuve que la Banque lui a fait prendre un risque inconsidéré d’endettement (v. récemment en ce sens, CA Metz, 26 Mai 2015, RG n° 14/00446).

A rapprocher : Cass. ch. mixte, 29 juin 2007 (deux arrêts), Juris-Data n° 2007-039908 et 2007-039909 ; RTD civ. 2007, p. 779, note P. Jourdain ; JCP G 2007, II, 10146, note A. Gourio ; D. 2007, p. 2081, note S. Piedelièvre ; JCP E 2008, 2105, note D. Legeais

Comptes prévisionnels et clause d’objectif minimum CA Montpellier, 10 mars 2015, RG n°13/06718 Ce qu’il faut retenir : Sauf circonstances exceptionnelles, le franchisé ne disposant pas de comptes prévisionnels d'activité ne peut reprocher au franchiseur de l'avoir trompé en fixant, par une clause d’objectif minimum, des quotas de chiffres d'affaires irréalistes. Pour approfondir : Le commentaire de cette décision impose tout d’abord de situer les choses dans leur contexte. La clause d’objectif minimum est celle par laquelle un cocontractant (le plus souvent une tête de réseau) fixe au distributeur (un franchisé, affilié, concessionnaire, licencié, etc.) un chiffre d’affaires minimum à atteindre (lorsqu’il s’agit de tenir compte des ventes devant être réalisées). Il peut s’agir également d’un montant minimum des achats à réaliser par ce distributeur auprès de fournisseurs référencés ou d’une centrale d’achats par exemple, exprimé en volume ou en proportion ; on utilise alors le plus souvent l’expression « clause d’achat minimum » ou «

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clause de quotas d’achats » pour les désigner. De telles clauses prévoient le montant exact des objectifs attendus du distributeur ainsi que les modalités d’appréciation, par exemple sur l’année écoulée, sur les derniers trimestres consécutifs, etc. Elles prévoient également la sanction attachée au non-respect de cette obligation, qui varie selon l’économie générale du contrat ; il peut s’agir notamment de la résiliation du contrat (CA Grenoble, 10 janvier 2013 ; Cass. com., 16 déc. 1997, n°96-14.515 ; Cass. com., 21 mai 1996, n°94-17.452), ou de la perte de l’exclusivité territoriale (CJCE 30 avr. 1998, aff. C-230/96, Cabour SA et Nord Distribution Automobile SA c/ Arnor Soco SARL). On a déjà eu l’occasion de signaler bon nombre des subtilités attachées à l’utilisation de telles clauses (F.L. Simon, Les mystères de la clause d’« objectif minimum » : CLIQUEZ ICI). Les comptes prévisionnels sont constitués d’un ensemble de données chiffrées destinées à anticiper la rentabilité future la plus probable de l’activité d’une entreprise et à obtenir le financement nécessaire au démarrage de celui-ci. Selon les cas, il peut s’agir (i) de comptes prévisionnels stricto sensu, qui désignent alors l’équivalent d’un compte de résultat (on parle alors de « comptes de d'exploitation prévisionnels ») ; (ii) de comptes prévisionnels simplifiés, faisant apparaitre les principaux postes d’un compte de résultat sans toutefois tous les reprendre de manière exhaustive (on parle alors parfois de simple « Business plan ») ; (iii) d’un CA prévisionnels, qui ne désigne alors que le seul poste se rapportant aux ventes devant être réalisées (on parle alors de « CA prévisionnels »). Et, au plan juridique, que la tête de réseau n’est pas légalement tenue de fournir des comptes prévisionnels au distributeur, mais qu’elle peut toutefois engager sa responsabilité lorsqu’il est démontré qu’elle a établi ou validé des comptes prévisionnels manifestement irréalistes. Il ne va pas de soi, du moins de prime abord, que ces deux notions se correspondent. C’est pourtant la leçon principale, au demeurant logique, qui découle de l’arrêt rendu le 10 mars 2015 par la Cour d’appel de Montpellier. Dans cette affaire, une société franchisée se prévalait de quotas exagérément optimistes l'ayant induite en erreur sur la rentabilité de la franchise, alors même qu’aucun compte prévisionnel n’avait été établi (tant par le franchiseur que par le franchisé). Par l’arrêt commenté, la Cour d’appel de Montpellier écarte cette demande par une motivation s’articulant en trois propositions ; les juges du fond retiennent tout d’abord qu’il ne peut pas être reproché utilement à la société franchiseur d'avoir trompé son partenaire « en fixant des quotas de chiffres d'affaires prétendument irréalistes alors même que (le franchisé)

n'a pas fourni de comptes prévisionnels d'activité » ; la Cour d’appel de Montpellier ajoute aussitôt qu’« en sa qualité de commerçant indépendant, il appartenait, le cas échéant, (au franchisé) de faire procéder à un compte d'exploitation prévisionnel en fonction de la situation existant avant la conclusion du contrat de franchise, en tenant compte notamment des quotas fixés par le franchiseur », avant de conclure que « le fait que la société (franchisée) n'ait pas atteint ces quotas, ne sauraient caractériser une tromperie délibérée du franchiseur sur la rentabilité de l'activité et sur l'espérance de gain », de sorte que « le dol et l'erreur substantielle allégués ne sont pas avérés ». Cette motivation, assez riche, suscite plusieurs observations. En premier lieu, tout objectif figé dans une clause – qu’il s’agisse d’une clause d’objectif minimum ou d’une clause d’achat minimum – doit être « réalisable », « réaliste », « atteignable », « proportionnée », selon les expressions indistinctement utilisées en jurisprudence, à défaut de quoi la jurisprudence les répute non écrite (Cass. com., 29 janv. 2008, n°06-20.808, Juris-Data n°042625 ; CA Paris, 20 avril 2000, Juris-Data n°2000-112577 ; Cass. com., 13 mai 1997, Juris-Data n°1997-002082 ; Cass. com., 13 mai 1997, Juris-Data n°002082) ; cette jurisprudence est connue. En second lieu, il incombe au débiteur de l’obligation (le franchisé au cas d’espèce) de rapporter la preuve du caractère irréaliste des objectifs contractuellement envisagés. Ce faisant, le fait que le franchisé n'ait pas atteint ces objectifs, ne sauraient caractériser en soi une tromperie délibérée du franchiseur sur la rentabilité de l'activité et sur l'espérance de gain, ce que souligne expressément la Cour d’appel. En troisième lieu, la nature de l’obligation qui pèse sur le franchisé diffère d’un contrat à l’autre. Dans certains cas, il ne s’agit que d’une obligation de moyens ; dans d’autres, il s’agit au contraire d’une obligation de résultat. Tout dépend de la manière dont la clause est rédigée. En l’espèce, la discussion ne portait pas sur ce point, que nous signalons pour mémoire, la clause litigieuse comportant ici, à n’en pas douter, obligation de résultat. En quatrième lieu, lorsque la preuve du caractère irréaliste des objectifs contractuellement envisagés n’est pas rapportée ou que ces objectifs ne sont pas même contestés, il appartient alors au franchisé de respecter la clause, autrement dit le quota d’achats minimum ou le CA minimum selon le contenu de la clause considérée. Néanmoins, et pour des raisons tout aussi évidentes, le franchisé n'engage pas sa responsabilité contractuelle lorsqu'il refuse d'acheter au franchiseur un nombre de produits excédant les quotas contractuels, de sorte qu'il reste seul juge de l'intérêt à accroître ou diminuer le rythme de son activité, pour autant qu'il respecte les quotas

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(Cass. com., 28 avr. 2004, n 02-18.392). En cinquième lieu, sauf volonté contraire des parties, il appartient au franchisé, commerçant indépendant, d’établir ses propres comptes prévisionnels. En sixième lieu, pour conclure, il est considéré que le franchisé ne peut d’autant pas se prévaloir du caractère irréaliste des objectifs lorsqu’il ne justifie pas disposer de comptes prévisionnels. Cette solution ne doit pas être systématisée car l’absence de comptes prévisionnels n’augure pas, en définitive, le caractère réaliste des quotas litigieux ; l’un n’exclut pas l’autre, et réciproquement. Mais, audelà de ces considérations d’ordre factuel, la motivation retenue est en soi logique. Voici en effet que le devoir du franchisé de se renseigner remonte de nouveau à la surface. Une fois le DIP transmis, il appartient en effet au franchisé de se renseigner. Traditionnellement, la jurisprudence écarte la demande de nullité du contrat de franchise lorsque, par exemple, le franchisé a disposé du temps nécessaire pour se renseigner, a pu entrer en contact avec les membres du réseau et n’a pas lui-même réalisé une étude de marché, propre à le renseigner sur l’opportunité d’intégrer ou non le réseau. Ainsi, et c’est là l’apport le plus remarquable de la décision commentée, qui ajoute une nouvelle illustration du devoir de se renseigner, en faisant grief au franchisé de n’avoir pas réalisé en temps voulu les comptes prévisionnels qui auraient été de nature à lui permettre d’apprécier par avance la pertinence des objectifs fixés par la clause litigieuse, qu’il croit devoir subitement contester a posteriori. A rapprocher : F.-L. Simon, Le devoir du franchisé de « se » renseigner : CLIQUEZ ICI

Pour approfondir : Un franchisé mis en liquidation judiciaire peu de temps après la conclusion du contrat de franchise, incombe la faiblesse des résultats obtenus à des manquements du franchiseur à son obligation d’information précontractuelle. Le liquidateur judiciaire, agissant ès qualités, a demandé la nullité du contrat de franchise et la condamnation solidaire du franchiseur et du fournisseur au paiement de dommages et intérêts, en invoquant, notamment, l'insuffisance de l'information précontractuelle fournie au franchisé. Condamné en appel, c'est en vain que le franchiseur fait grief à l'arrêt d'annuler le contrat de franchise pour vice du consentement et de le condamner à payer des dommages-intérêts au liquidateur judiciaire, ès qualités. Après avoir relevé que la Cour d’appel avait violé les articles 1110 et 1382 du Code civil en concluant à la nullité du contrat de franchise pour manquement du franchiseur à son obligation d’information précontractuelle en matière de prévisionnels, la Cour de cassation rejette pourtant le pourvoi. Cette décision est pour le moins paradoxale et en tous les cas, extrêmement sévère envers les franchiseurs. En effet la Cour de cassation relève tout d’abord que le franchiseur avait remis au franchisé des observations sur l’environnement du projet de franchise en cause et avait émis des réserves auprès de ce dernier, l’invitant notamment à prendre en compte la concurrence des enseignes - spécialisées ou non - sur sa zone, de renforcer la signalétique autour du magasin pour pallier son manque de visibilité, de tenir compte du risque représenté par la création d'une zone commerciale voisine (en Belgique). Elle reconnait ensuite que le franchiseur n’est pas tenu de fournir au candidat à la franchise un chiffre d’affaires prévisionnel, et que s'il lui communique néanmoins, il ne lui appartient pas de déterminer l'ensemble des charges que le franchisé serait susceptible d'assumer (niveau de la masse salariale et des investissements en l’espèce).

Absence de caractère sérieux des prévisionnels et nullité du contrat de franchise Cass. com., 17 mars 2015, pourvoi n°13-24.853 Ce qu’il faut retenir : Le franchiseur n’est pas tenu de fournir au candidat à la franchise un chiffre d’affaires prévisionnel ; si le franchiseur communique néanmoins des comptes prévisionnels au franchisé, il doit être vigilent dans leur établissement, les juridictions étant toujours plus exigeantes et sévères vis-à-vis du franchiseur lorsqu’elles constatent l’échec du franchisé dans le projet de franchise.

La Haute juridiction ajoute que le franchiseur n’est pas non plus tenu de fournir un chiffre d'affaires prévisionnel pour l'hypothèse dans laquelle le franchisé débuterait l'exploitation à une autre date que celle initialement prévue. La Haute juridiction souligne également que le franchiseur n'est pas tenu de retracer l'historique de

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ses franchisés et les conditions dans lesquelles ils ont rejoint le réseau et exploitent leur commerce. La Cour de cassation confirme pourtant la décision de la Cour d’appel en ce qu’elle a annulé le contrat de franchise en raison du vice du consentement provoqué par les manquements du franchiseur à son obligation d’information précontractuelle. Elle estime que le franchiseur, chargé d'une étude portant sur la viabilité et la rentabilité du projet de franchise, avait réalisé une étude dépourvue de caractère sérieux et fourni au futur franchisé des éléments trompeurs lui laissant escompter des résultats bénéficiaires. Elle relève que la société franchisée, contre laquelle aucune faute de gestion n'était démontrée, avait été contrainte de déposer son bilan quelques mois après le démarrage de son activité, son chiffre d'affaires n'ayant jamais dépassé 30 % du chiffre d'affaires prévisionnel. Selon les juges, le franchiseur s’est gravement trompé lors de l’établissement des comptes prévisionnels et énumèrent à cet effet les différents points ayant fondé leur décision : -

-

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le franchiseur n’aurait pas dû prendre pour base les chiffres d’affaires des autres magasins franchisés existants. Leurs données ne sont pas comparables dans la mesure où le franchisé ne disposait pas de l’expérience personnelle dans ce type d’activité et qui, contrairement aux entités existantes du réseau, ne reprenait pas un fonds de commerce ayant eu une activité similaire mais créait un nouveau fonds et s'installait dans une galerie marchande, elle-même en cours de création ; le déficit d'analyse pertinente du chiffre d'affaires a été aggravé par un manque de rigueur du franchiseur dans l'analyse des charges prévisibles auxquelles le franchisé allait devoir faire face (niveau de la masse salariale et des investissements, retard dans l'ouverture du magasin, versement d'une somme au profit du bailleur du centre commercial etc.) ; les circonstances invoquées par le franchiseur pour expliquer le déficit de la société franchisée, tels le retard dans l'ouverture du magasin ou le paiement d'un droit d'entrée au profit du bailleur du centre commercial, sont des éléments qui auraient dû être pris en compte dans un prévisionnel sérieux.

erronées et trompeuses et d’un prévisionnel non sérieux. Son contrat a été vicié, justifiant ainsi pour la Cour de cassation l’annulation du contrat de franchise. A rapprocher : CA Paris, 17 décembre 2014, RG n°13/08615

Nullité du contrat de franchise : causes incertaines et conséquences pérennes CA Colmar, 30 septembre 2015, RG n°14/02315 Ce qu’il faut retenir : Si le caractère largement ancien des informations de l’état général de marché peut entraîner l’annulation du contrat, l’absence d’établissement pilote paraît être un critère moins certain. Cependant, l’arrêt a le mérite d’être très rigoureux sur les conséquences de la nullité : pas d’indemnisation au-delà de la simple remise en l’état antérieur à la conclusion du contrat. Pour approfondir : Plusieurs franchisés, membres d’un réseau portant sur la mise à disposition chez les très petites entreprises d’un logiciel de gestion, ont assigné leur franchiseur aux fins d’obtenir, à titre principal, l’annulation de leur contrat de franchise et, à défaut, leur résiliation. L’intérêt de l’arrêt porte, d’une part, sur les causes retenues par la Cour pour prononcer l’annulation des contrats de franchise et, d’autre part, les conséquences circonscrites de cette annulation. En premier lieu, s’agissant des causes de la nullité des contrats de franchise pour dol, la Cour d’appel de Colmar retient que : -

les informations intégrées dans l’état général du marché sont trop générales (la proportion des entreprises disposant d’un outil informatique n’est pas renseignée alors que l’objet de la franchise est la distribution d’un logiciel informatique) et surtout obsolètes (les chiffres indiqués remontant à 2003/2004 alors que les contrats ont été conclus en 2009/2010 et le DIP avouant lui-même qu’il a été impossible de fournir des éléments plus récents) ;

-

aucune information n’est fournie relativement à l’état local de marché. Sur ce point, en relative contradiction avec d’autres décisions jurisprudentielles, la Cour refuse de retenir

En raison de l’erreur d’analyse initiale du franchiseur, le franchisé s’est déterminé sur la base d’informations

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l’argument du franchiseur qui exposait que les candidats à la franchise auraient dû se livrer euxmêmes à une étude du marché local puisque, selon la Cour, cette étude nécessiterait les données de l’état local du franchiseur pour être réalisée ; -

-

Titularité du savoir-faire et validité du contrat de franchise de l’établissement pilote CA Bordeaux, 13 janvier 2015, RG n°12/03199 Ce qu’il faut retenir :

le DIP ne fait pas mention de la proportion entre les partenaires présents et les partenaires sortants et se contente de détourner l’attention du candidat en relatant la progression du nombre de secteurs qui peut laisser croire à un développement important alors qu’en cinq ans, seuls sept nouveaux franchisés ont rejoint le réseau ;

La validité du contrat de franchise implique que le franchisé n’ait pas eu connaissance du savoir-faire dans son intégralité avant la signature du contrat. Le savoir-faire, même initié au sein d’une franchise pilote, est inconnu par ce franchisé lorsqu’il a été conceptualisé par la tête de réseau.

enfin, et c’est là que l’incertitude demeure, les franchisés ont bénéficié d’une information précontractuelle trompeuse du fait de la vente d’un savoir-faire, d’abord, qui n’a pas été préalablement expérimenté dans un établissement pilote et, ensuite, dont la viabilité est contrariée par l’important renouvellement de ses membres en cinq ans (le réseau s’étant renouvelé deux fois et aucun franchisé n’ayant signé un second contrat).

La transmission du savoir-faire du franchiseur au franchisé est l’un des éléments essentiels du contrat de franchise. La décision commentée en est une illustration. En l’espèce, la société sous-franchisée avait en réalité été créée par le fondateur du réseau de franchise, qui avait également créé la société master-franchiseur puis la société master-franchisée, avant de céder les parts de la société sous-franchisée, qualifiée d’établissement pilote, à une société tierce. Peu après cette cession, la société avait violé plusieurs de ses obligations. Poursuivie par le masterfranchiseur qui lui reprochait l’inexécution de ses obligations, la société sous-franchisée invoquait la nullité du contrat de franchise pour défaut de cause : selon elle, aucun savoir-faire ne lui avait été transmis, dans la mesure où c’est elle-même qui l’avait mis au point et qui en était titulaire. La Cour d’appel de Bordeaux ne suit pas cet argument et considère que c’est la société master-franchisée qui a conceptualisé le savoir-faire et en est seule propriétaire. Ce raisonnement sauve la validité du contrat de franchise.

En second lieu, s’agissant des conséquences de la nullité prononcée des contrats de franchise litigieux, la Cour rappelle aux franchisés égarés qu’ils « ne sauraient obtenir valablement une indemnisation allant au-delà de la seule stricte remise en état des parties dans l’état antérieur où elles se trouvaient avant la souscription des contrats ». Par conséquent, les différents postes d’indemnisation présentés par les franchisés sont tour à tour examinés par la Cour qui les accepte ou les écarte selon ce principe élémentaire. Est ainsi accordée, l’indemnisation correspondant : au droit d’entrée, aux redevances de formation et d’assistance, aux redevances de communication, aux frais de matériel publicitaire logoté à l’enseigne du réseau (flyers et cartes de visite notamment). En revanche, sont exclus des condamnations à indemnisation : les frais engagés pour développer l’activité (tout commerçant indépendant engageant des frais pour développer son activité), les rémunérations attendues et nonobtenues par les gérants des sociétés franchisées, le passif déclaré par les sociétés franchisées, l’apport en capital au sein des sociétés franchisées, le manque à gagner. A rapprocher : Cass. com., 17 mars 2015, pourvois n°13-24.853 et n°14-10.365

Pour approfondir :

A rapprocher : CA Paris, 3 octobre 2012, RG n°11/05235

Absence de vice du consentement et rejet de la demande de nullité du contrat CA Paris, 7 janvier 2015, RG n°12/19741 Ce qu’il faut retenir : Le contrat peut être annulé en cas de vice du consentement de l’affilié. Le dol, qui consiste pour la tête de réseau à induire son partenaire en erreur afin de le pousser à contracter constitue un vice du consentement et peut ainsi justifier l’annulation du contrat ; il convient toutefois au franchisé d’établir que son consentement a été vicié.

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Pour approfondir :

précontractuelle par la tête de réseau, l’annulation du contrat n’a pas été prononcée.

Un contrat d’affiliation a été conclu entre deux sociétés, la société B. (cédée ensuite à la société DP.) et la société D., dont cette dernière, l’affiliée, demande la nullité. En première instance, le tribunal déboute l’affiliée de sa demande et prononce la résiliation du contrat aux torts de la société DP. L’affiliée interjette appel du jugement. Elle prétend que son consentement aurait été vicié, la société DP. (venant aux droits de la société B.), ayant méconnu son obligation d’information précontractuelle en s’abstenant de remettre, dans le délai prévu à l’article L.330-3 du Code de commerce, un certain nombre d’informations, ce qui serait constitutif de dol et de réticences dolosives. Le dol suppose toutefois, pour être caractérisé, que la preuve de l’intention dolosive de son auteur soit rapportée. Les juges du fond confirment le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de nullité du contrat. Sur la remise du DIP, ils relèvent que l’absence de remise d’une seule annexe du DIP portant sur l’état local du marché des produits et les perspectives de développement ne suffit pas à démontrer que le consentement de l’affiliée aurait été vicié. Sur l’indication des franchisés ayant quitté le réseau, les magistrats rappellent que, au regard de l’article R.3301, 5°c) du Code de commerce, il appartient à la tête de réseau de mentionner à l’affiliée les fermetures de points de vente (liés à la tête de réseau par un contrat de même nature que l’affiliée) intervenues au cours de l’année précédant la remise du DIP, mais qu’il n’avait pas à mentionner les fermetures intervenues dans les cinq années ayant précédé la conclusion du contrat. Il convient également, selon le texte, de préciser si les points de vente ont fermé suite à l’annulation du contrat, la résiliation du contrat, ou si le contrat est venu à expiration ; or, il n’est ici pas démontré que le fait, pour la tête de réseau, de ne pas l’avoir mentionné à l’affiliée aurait vicié son consentement. Enfin, en ce qui concerne la remise d’un état du marché local et de ses perspectives de développement, il n’est également pas démontré que la tête de réseau aurait donné une description inexacte telle que l’affiliée aurait été induit en erreur. Dans la mesure où il n’a pas été démontré par l’affilié que son consentement aurait été vicié au titre du nonrespect de son obligation d’information

A rapprocher : Cass. com., 8 juillet 2003, pourvoi n°02-11.691

Concession exclusive : territoire concédé et dol Cass. com., 17 mars 2015, pourvoi n°14-10.595, 296 Ce qu’il faut retenir : La dissimulation par le concédant de la conclusion antérieure d’un autre contrat sur le territoire concédé, en violation de la clause d’exclusivité territoriale, constitue une réticence dolosive ; en pareil cas, le concessionnaire est susceptible d’être indemnisé au titre du préjudice résultant du dol du concédant, distinct de la seule perte de chance de contracter en toute connaissance de cause. Pour approfondir :  Les parties étaient liées par un contrat de concession exclusive portant la vente de bateaux et matériels nautiques. Soutenant que le concessionnaire avait manqué à ses obligations contractuelles, le concédant lui a notifié la résiliation du contrat. En réponse, le concessionnaire soutient que le territoire lui ayant été concédé par le contrat de concession exclusive faisait antérieurement l’objet d’un autre contrat de concession. Il estime que ses manœuvres de son cocontractant sont constitutives d’un dol, et choisit d’assigner le concédant en responsabilité délictuelle pour obtenir réparation du préjudice qu’il a ainsi subi. Notons qu’en tant que victime d’un dol, concessionnaire aurait tout à fait pu décider demander l’annulation du contrat pour vice consentement plutôt que d’agir sur le fondement l’article 1382 du Code civil.

le de du de

L’information ne lui ayant pas été communiquée dans le DIP ou par tout autre moyen, le concessionnaire assigne donc le concédant en paiement de dommages et intérêts aux motifs que ce dernier n’aurait pas respecté l’obligation d’information précontractuelle prévue par l’article L.330-3 du Code de commerce, ainsi que la clause d’exclusivité territoriale stipulée dans le contrat.

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 La Cour d’appel a considéré que l'absence d'information déterminante donnée par le concédant au concessionnaire sur la conclusion antérieure d'un autre contrat de concession exclusive sur le territoire qui lui avait été concédé, en violation de la zone d'exclusivité, constituait une réticence dolosive. L'arrêt énonce que, la seule faute commise par le concédant étant un manquement à l'obligation précontractuelle d'information, le concessionnaire ne peut prétendre être indemnisée que du préjudice direct. Selon la Cour d’appel, ce préjudice est constitué par la perte de la chance de contracter en toute connaissance de cause des éléments d'information légalement exigés, et donc, de refuser éventuellement de contracter à d'autres conditions.  La Haute juridiction casse l’arrêt d’appel, estimant qu’en se prononçant ainsi, les juges du fond ont les articles 1116 et 1382 du Code civil. Ainsi la Cour de cassation estime que le concessionnaire doit obtenir réparation au titre du préjudice résultant du dol du concédant, distinct de la seule perte de chance. A rapprocher : Cass. com., 25 septembre 2007, RG n°05-20.922, Juris-Data n°2007-040545

Rétractation de l’offre avant son acceptation CA Paris, 28 mai 2015, RG n°14/01791

vente. Or, C. considère que la vente a été formée le 24 juillet 2010, dès réception du courrier par M. et Mme L. les informant que C. acceptait l’offre. La Cour de cassation a confirmé le jugement rendu par le TGI de Créteil et considéré qu’il n’y avait pas eu vente, en l’absence de rencontre de volontés. La Haute Cour relève en fait le fait que M. et Mme L. avaient déjà rétracté leur offre avant l’acceptation par C., même si cette rétractation n’a pas été formulée par courrier recommandé - ce qui ne constitue pas une obligation - , et que cette rétractation était intervenue dans un délai raisonnable. Cet arrêt rappelle ainsi que l’offre ne constitue pas un engagement contractuel - lequel n’existe que lorsque l’offre a été acceptée - et qu’en conséquence, l’offre peut être rétractée tant qu’elle n’a pas été acceptée. Il est toutefois à souligner que la jurisprudence se montre parfois plus réservée, distinguant notamment les offres stipulées avec et sans délai de réflexion, considérant ainsi que lorsque l’offrant a indiqué un délai de réflexion, celui-ci engage sa responsabilité lorsqu’il la rétracte avant l’expiration de ce délai. Il existe également des domaines dans lesquels le législateur impose à l’offrant de maintenir son offre pendant un certain délai. A rapprocher : Cass. civ. 3 pourvoi n°13-21.824

ème

, 17 septembre 2014,

Ce qu’il faut retenir : ***** La Cour de cassation revient ici sur la valeur juridique de l’offre avant acceptation et relève que l’offrant est libre de rétracter son offre, dans un délai raisonnable eu égard aux circonstances de l’espèce, dès lors que l’offre n’a pas encore été acceptée.

REQUALIFICATION DU CONTRAT Le statut de gérant de succursale Tour d’horizon (mise à jour au 11 septembre 2015)

Pour approfondir : L’article 1583 du Code civil dispose : « Elle [la vente] est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

Ce qu’il faut retenir :

En l’espèce, M. et Mme L. formulent une offre de vente le 26 mai 2010, sans mentionner de délai pour son acceptation, laquelle est acceptée par C. qui adresse un courrier recommandé à M. et Mme L. le 23 juillet 2010, reçu par les époux le 24 juillet 2010. Quelques jours plus tard, le 27 juillet 2010, M. et Mme L. indiquent à C. qu’ils renoncent finalement à la

Pour approfondir :

Nous envisageons ici le recours au statut de « gérant de succursale », tel que prévu par les articles L.73211 et suivants du Code du travail.

Le statut de gérant de succursale est parfois dicté par les contraintes suivantes : -

d’une part, le recours à des gérantmandataire, souvent envisagé en tant que

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système alternatif à celui du statut de gérant de succursale, apparaît parfois trop risqué et coûteux (indemnités de licenciement et risques de requalification) ; -

En pratique, cela signifie qu’en cas de recours au statut de gérant de succursale, la tête de réseau pourra imposer ses process commerciaux aux gérants de succursale ; il en va ainsi notamment pour :

d’autre part, le maintien du statut de salarié n’est pas toujours adapté, en particulier au plan juridique lorsque l’on sait qu’il implique une égalité de traitement entre salariés occupant des mêmes fonctions ; autrement dit, il est impossible de prévoir un régime différencié entre salariés responsables d’établissement, consistant à réserver une part variable de rémunération à certains d’entre eux seulement, tout en imposant une rémunération à 100% fixe pour les autres.

-

-

Que faut-il alors retenir du statut de « gérant de succursale » ?

-

Afin de préciser l’analyse, il convient d’approfondir les points (majeurs) suivants : -

l’avantage que constitue le gérant de succursale en matière de process commerciaux, avec la possibilité pour la tête de réseau de transmettre des instructions précises et impératives (I) ;

-

le risque associé à ce recours qui, pour être évité, implique de laisser au gérant de succursale une autonomie totale quant à la détermination des conditions de travail (II).

I. La possibilité pour la tête de réseau de transmettre des instructions commerciales précises et impératives Le statut de gérant de succursale est prévu par les articles L.7321-1 à L.7321-5 du Code du travail. Il s’agit d’un régime hybride entre le commerçant indépendant et le salarié. Ainsi, il n’est pas subordonné au chef d’entreprise, mais le chef d’entreprise peut lui donner des instructions précises et impératives. L’article L.7321-2 du Code du travail précise que la profession de gérant de succursale consiste « à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ».

-

le système de fidélité ; l’ensemble de la politique tarifaire, y compris les remises et promotions ; la détermination de la marge commerciale ; l’obligation d’avoir un assortiment donné ; l’interdiction de commercialiser tel ou tel produit ; l’obligation d’effectuer telle ou telle opération de publicité ou de promotion des ventes ; l’obligation d’utiliser un matériel donné ; l’obligation d’agencer le magasin d’une manière spécifique ; l’obligation de faire remonter le fichier client et les chiffres commerciaux ; etc.

Il convient d’ajouter que, du point de vue du droit de la concurrence, le gérant de succursale est intégré à l’entreprise. Le droit des ententes anticoncurrentielles (qui apporte de nombreuses limites en matière de réseau d’indépendant) n’est donc pas applicable. La tête de réseau est donc libre d’imposer des clauses d’approvisionnement exclusif (y compris pour des produits et services non spécifiques à l’enseigne), des obligations de non-concurrence contractuelles et postcontractuelle (si celles-ci sont proportionnées et rémunérées), etc. La véritable limite quant aux obligations que la tête de réseau peut imposer à ses gérants se situe en matière de management et de détermination des conditions de travail. Ainsi, un process purement commercial, qui n’a pas pour objet ni pour effet d’influer sur les conditions de travail des salariés peut être imposé (exemple : le système de la carte fidélité). En revanche, un process commercial qui aurait pour objet ou pour effet de d’influer sur les conditions de travail des salariés ne peut pas être imposé (ex : ouverture du magasin un jour férié, ou obligation d’ouvrir entre 12h et 14h). Pour bénéficier du statut de gérant de succursale, il est donc impératif que le gérant conserve effectivement la mainmise totale sur la fixation des conditions de travail au sein de la succursale (cf. II. infra).

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II. La nécessité d’une autonomie totale du gérant de succursale quant au management et aux conditions de travail L’autonomie du gérant de succursale quant au management et aux conditions de travail est impérative au regard de deux risques identifiés : -

un risque de déchéance des avantages du statut de gérant de succursale ; un risque de requalification en contrat de travail.

avoir une part de rémunération variable (les gérants de succursale) et pas les autres (les salariés). L’autonomie du gérant de succursale quant à la détermination des conditions de travail permet également d’alléger les obligations de la tête de réseau en matière de droit du travail. Les règles relatives à la durée du travail, aux congés et repos, au compte épargne-temps ainsi que celles relatives à la santé et à la sécurité au travail sont applicables au gérant de succursale si :

A. Le risque de déchéance des avantages

-

Le recours au statut de gérant de succursale prévu par les articles L.7321-1 et suivants du Code du travail peut permettre à la tête de réseau de bénéficier de divers avantages en matière de gestion du management.

-

Il convient de rappeler que le gérant de succursale n’est pas véritablement un salarié (Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 11-20.597 ; Cass. soc., 4 mars 2015, n° 1324.373). A ce titre, l’employeur peut imposer certaines obligations ou insérer certaines clauses qui sont interdites dans un contrat de travail (par ex. Cass. soc., 27 mars 2013, n° 12-12.892 : admission d’une clause faisant peser sur le gérant la responsabilité d’un déficit d’inventaire et le condamnant à rembourser l’écart). Bien qu’il ne soit pas salarié, les dispositions du Code du travail lui sont applicables. Ainsi, notamment, sa rémunération est un salaire (et est chargée comme telle) et le contrat ne peut être rompu à l’initiative de la tête de réseau que par voie de licenciement (Cass. soc., 5 mars 2014, n° 12-27.050). Le gérant de succursale n’est pas un indépendant devant s’affilier au RSI ; il est au contraire assimilé à un salarié et relève donc du régime général. Pour ce qui concerne la rémunération, il n’existe donc pas une différence fondamentale entre un gérant de succursale et un salarié à la tête d’un établissement : -

la tête de réseau fixe les conditions de travail, de santé et de sécurité ; ou si les conditions de travail, de santé et de sécurité sont soumises à la tête de réseau pour approbation.

Le gérant de succursale doit donc fixer lui-même les conditions de travail ; corrélativement, la tête de réseau doit totalement déchargé de ces obligations à l’égard du gérant. Le gérant dispose de toute latitude en matière d’embauche, de licenciement ou de fixation des conditions de travail à l’égard des salariés de la succursale, et c’est lui et lui seul qui doit assumer les obligations de l’employeur vis-à-vis de ces salariés (il s’agit du second intérêt du recours au statut de gérant de succursale dans la mesure où cela libère le chef d’entreprise des obligations vis-à-vis des salariés de la succursale). Par conséquent, si le choix s’oriente vers le statut de gérant de succursale, la tête de réseau a tout intérêt à laisser une entière et totale liberté au gérant sur le recrutement, le licenciement et la détermination des conditions de travail. En effet, si la tête de réseau devait conserver la mainmise (de droit ou en fait) sur les conditions de travail ou de la masse salariale de la succursale, alors la tête de réseau perdrait le bénéfice du statut de gérant de succursale. Le risque est à double sens :

ni quant aux règles applicables ; ni quant aux charges sociales ; ni quant aux modalités possibles de la rémunération.

-

Le principal intérêt quant à la rémunération vient de ce que certains directeurs d’établissement puissent

d’une part, la tête de réseau pourrait (par habitude) donner des consignes aux salariés qui sont sous la responsabilité du gérant de succursale ; d’autre part, les salariés sous la responsabilité du gérant de succursale pourraient demander des consignes à la tête de réseau.

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Ce faisant, et si des consignes venaient de la tête de réseau à direction des salariés sous la responsabilité du gérant de succursale, alors il pourrait être établi que le gérant de succursale n’a pas toute la liberté voulue en matière de conditions de travail. Dans ce cas, et même en l’absence de requalification en contrat de travail, la tête de réseau perdrait les avantages liés au statut de gérant de succursale : -

-

la non-application des règles relatives à la durée du travail et à la santé et sécurité au travail dépend du fait que les conditions de travail ne sont ni fixées par la tête de réseau, ni soumises à la tête de réseau pour approbation : une immixtion de la tête de réseau empêcherait donc de bénéficier de cet avantage ; la responsabilité du gérant vis-à-vis des salariés de la succursale nécessite une pleine et entière liberté du gérant dans le recrutement, le licenciement et la fixation des conditions de travail : une immixtion de la tête de réseau empêcherait donc de bénéficier de cet avantage.

B. Le risque de requalification en contrat de travail Dans cette même veine, il existe en outre un risque de requalification du contrat en contrat de travail. Cette requalification est d’autant plus sensible que les salariés sous la responsabilité du gérant de succursale seront parfois d’anciens salariés de la tête de réseau. Bien que le contrat conclu ne soit pas un contrat de travail, les gérants pourront demander ultérieurement (NB : en cas de litige avec la tête de réseau lors de la rupture du contrat) à ce que le contrat soit requalifié en contrat de travail. La requalification en contrat de travail suppose que soit établi un lien de subordination (Cass. soc., 19 juin 2013, n° 12-17.913), et le fait que le gérant de succursale dispose d’une certaine marge de manœuvre pour organiser son activité et l’activité de l’établissement n’est pas – en soi – un élément suffisant pour écarter l’existence d’un lien de subordination.

requalification en contrat de travail (Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-15.066). Aussi, pour éviter une requalification, il est nécessaire de déléguer au gérant de succursale le recrutement ainsi que de lui laisser une totale marge de manœuvre sur l’opportunité de recourir à un recrutement (maîtrise de la masse salariale partagée), ou sur le choix du recrutement (CDI, CDD, intérim). Autrement dit, le statut de gérant de succursale peut s’avérer être un choix judicieux pour alléger la tête de réseau de ses obligations en matière de management ; le dessaisissement ne peut pas en revanche être partiel ; il doit être total. A rapprocher : Voir notre étude « Les prix conseillés par la tête de réseau » (Cliquez ici)

Application aux contrats de distribution du statut de gérant de succursales Cass. soc. 16 septembre 2015, pourvoi n°14-17.371, publié au Bulletin Ce qu’il faut retenir : Les notions d’« agrément du local » et de « prix imposés », au sens de l’article L.7321-2 du code du travail relatif au statut de gérant de succursales, s’apprécient largement pour la première et de manière distincte de celle issue du droit de la concurrence pour la seconde. Pour approfondir :  Au regard de la décision commentée (Cass. soc., 16 septembre 2015, n°14-17.371), publiée au Bulletin, les distributeurs indépendants (franchisés, affiliés, concessionnaires, etc.) devraient invoquer de plus en plus souvent les dispositions protectrices de l’article L.7321-2 du code du travail relatif au statut de gérant de succursales, tant il est vrai que, par cette décision, la Cour de cassation facilite les conditions d’application de ce texte, selon lequel est gérant de succursale toute personne :

Le critère retenu comme principal par la jurisprudence est celui du recrutement. Ainsi, le gérant de succursale ne sera pas salarié s’il dispose de la possibilité effective d’embaucher son personnel. Si la liberté d’organisation relève uniquement de son propre travail (faculté de déterminer soi-même ses horaires ou de recruter un remplaçant lorsqu’il est lui-même en congé), cela ne suffit pas pour exclure une

« 1° Chargée, par le chef d'entreprise ou avec son accord, de se mettre à la disposition des clients durant le séjour de ceux-ci dans les locaux ou dépendances de l'entreprise, en vue de recevoir d'eux des dépôts de vêtements ou d'autres objets ou de leur rendre des services de toute nature ; 2° Dont la profession consiste essentiellement :

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a) Soit à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise ; b) Soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ».  Dans cette affaire, un franchisé invoquait l’application des dispositions protectrices de l’article L.7321-2 du Code du travail relatif au statut de gérant de succursales. Parmi les trois conditions d’application de ce texte, deux d’entre elles étaient en cause : la notion d’agrément du local, la notion de prix imposés. Les juges du fond (CA Bordeaux, 18 mars 2014, RG n°11/07782) avaient accueilli la demande du franchisé, de sorte que le franchiseur soutenait, devant la Cour de cassation, que ces deux conditions n’étaient pas réunies. Sur notion d’« agrément » du local : Tout d’abord, selon le pourvoi, il était fait grief à la Cour d’appel d’avoir considéré que le franchiseur avait « agréé » le local au sens de l’article L.7321-2 du Code du travail, alors que la Cour d’appel avait par ailleurs constaté que le local n’était plus aux normes et avait donc perdu les qualités requises pour l’obtention d’un tel agrément. Autrement dit, selon le franchiseur, le fait que le local ne soit plus conforme aux normes imposées au sein du réseau, constituait bien la preuve que son « agrément » n’était pas nécessaire à la poursuite de l’activité, et que la condition, tenant à l’exercice de l’activité dans un local fourni ou agréé, n’était donc pas remplie. Sur ce point, la Cour de cassation ne l’entend pas ainsi ; elle approuve les juges du fond d’avoir décidé qu’en « poursuivant la relation contractuelle puis en concluant un contrat à durée indéterminée » en dépit de la non-conformité du local aux normes qu’il recommandait », le franchiseur « avait nécessairement maintenu son agrément pour toute la période contractuelle » et que le franchiseur « ne pouvait donc utilement se prévaloir d’un défaut d’agrément du local de sa part dès lors (qu’il) avait maintenu une relation contractuelle avec [la franchisée] pour la poursuite par celle-ci de la commercialisation des produits [du franchiseur]». Ainsi, selon la Cour de cassation, le fait que le distributeur soit resté dans un lieu ne remplissant plus les critères du réseau était finalement sans importance dès lors que le franchiseur avait en

quelque sorte donné son agrément en acceptant que le franchisé continue d’y exercer son activité. Il faut retenir de cette décision que la notion d’agrément au sens de l’article L.7321-2 du code du travail doit être comprise dans un sens large. Sur notion de « prix imposé » : Ensuite, le pourvoi faisait valoir « qu’en vertu du règlement CE 2790/1999 applicable en la cause et du nouveau règlement 330/2010 (art. 4), les accords verticaux relatifs aux conditions de prix entre des partenaires qui se situent à un niveau différent au sein d’un même réseau peuvent améliorer l’efficience d’une chaîne de distribution et autoriser le fournisseur à imposer un « prix de vente maximal » ou à « recommander » un prix de vente sous certaines conditions ; que la société [franchiseur] faisait précisément valoir qu’elle se borne à fixer des prix maximaux en cas de campagne promotionnelle et, pour les autres cas, à indiquer dans le logiciel de gestion des « prix conseillés » que le distributeur est totalement libre de modifier par une simple manipulation informatique, ce que confirmait l’analyse à laquelle avait procédé le Conseil de la concurrence dans sa décision du 6 juillet 1999 ; qu’en refusant d’examiner ces pratiques particulières, propres au réseau de distribution, et en affirmant sans discernement que l’exploitante franchisée n’avait pas la liberté de fixer les prix de vente des marchandises de telle sorte que Mme X… pouvait revendiquer l’application du code du travail, la cour d’appel a privé la société [franchiseur] de la faculté d’exercer normalement son activité en pratiquant seulement des « prix maxima » ou des « prix conseillés » dans un réseau constitué par des entreprises intervenant à un niveau différent, en conformité avec le droit européen et a violé ensemble les articles 101, §3 du Traité, et les articles 4 des règlements 2790/1999 et 330/2010, les principes de primauté, d’effet direct, d’effectivité et de confiance légitime relevant du droit européen, et, par fausse application les articles L.7321-1 et L.7321-2 du code du travail ». Le pourvoi ajoutait : « que la société [franchiseur] avait fait valoir dans ses conclusions d’appel auxquelles les juges du fond se réfèrent, qu’il lui était impossible d’imposer des prix de vente à Mme X… dès lors qu’en vertu du règlement CE 2790/1999 applicable en la cause et du nouveau règlement 330/2010 (art. 4), les accords verticaux relatifs aux conditions de prix entre des partenaires qui se situent à un niveau différent au sein d’un même réseau peuvent seulement autoriser le fournisseur à imposer un « prix de vente maximal » ou à « recommander » un prix de vente sous certaines conditions ; que la société [franchiseur] faisait

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précisément valoir qu’elle se bornait, en application de ces règles dont l’application directe découlait du contenu des accords contractuels qui la liaient à Mme X…, à fixer des prix maximaux en cas de campagne promotionnelle et, pour les autres cas, à indiquer dans le logiciel de gestion des « prix conseillés » que le distributeur est libre de modifier par une simple manipulation informatique, ce que confirmait l’analyse à laquelle avait procédé le Conseil de la concurrence dans sa décision du 6 juillet 1999 ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen de défense décisif, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ». La Cour de cassation rejette l’argument en retenant, par un attendu ayant valeur de principe (d’où la publication au Bulletin) que « la circonstance que les pratiques de prix mises en œuvre par la société [franchiseur] dans ses rapports avec ses distributeurs échapperaient, en vertu de règlements communautaires d’exemption, à la prohibition des ententes entre entreprises découlant des articles 81 et 82 du traité CE est dépourvue de lien avec la prise en considération, au titre des dispositions de l’article L.7321-2, 2° du code du travail, qui permettent à des gérants de succursales de se prévaloir à l’égard de la société-mère de l’application de dispositions de ce code, de l’existence de prix imposés aux gérants de ses succursales par la société [franchiseur] sans qu’il en résulte la moindre prohibition de cette pratique qu’elle met ainsi en œuvre ». Il faut retenir de cette décision que la notion de « prix imposés » au sens de l’article L.7321-2 du code du travail doit être comprise dans un sens distincte de celle issue du droit de la concurrence. A rapprocher : CA Bordeaux, 18 mars 2014, RG n°11/07782

L’exclusivité d’approvisionnement dans les faits : le franchisé devient gérant de succursale Cass. soc., 23 juin 2015, pourvoi n°13-26.361

Pour approfondir : La société Carrefour Proximité France et son franchisé ont mis fin amiablement aux contrats de franchise et de location-gérance qu’ils avaient conclus. Pour autant, l’ancien franchisé a saisi la juridiction prud’homale en revendiquant l’application de l’article L7321-2 du Code du travail. Selon cet article, est notamment considérée comme gérant de succursale toute personne dont la profession consiste essentiellement « à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ». Pour considérer que les 4 conditions susvisées sont remplies, la Cour de cassation (confirmant en cela la Cour d’appel de Rennes) a retenu que si le franchisé n’avait pas été contractuellement contraint de s’approvisionner exclusivement (ou « presque exclusivement ») auprès du franchiseur, il avait été dans les faits obligé de le faire dans la mesure où : -

il était tenu de respecter un assortiment minimum de marchandises ;

-

il ne pouvait adhérer à un groupement autre que celui du franchiseur (étant précisé que dans ce secteur de la grande distribution la force des groupements permet un approvisionnement à des prix négociés) ;

-

le franchiseur pouvait discrétionnairement résilier le contrat en cas de manquement à ces deux précédentes obligations contractuelles.

Dans ce cadre, les deux conditions de vente (le franchiseur définissant l’achalandage du magasin et la disposition des linéaires) et les prix imposés étant objectivement remplies, et la Cour considérant que le contrat de franchise et de location-gérance étaient interdépendants – ce qui implique donc que le local était fourni au franchisé par le franchiseur – l’application de l’article L7321-2 du Code du travail a été retenue.

Ce qu’il faut retenir : La condition d’un approvisionnement exclusif, exigée par l’article L.321-2 du Code du travail relatif au statut de gérant de succursale, est réputée remplie si, de facto, le franchisé ne peut s’approvisionner qu’auprès du franchiseur, peu important qu’une telle exclusivité ne soit pas prévue au contrat de franchise.

Cette décision n’est pas surprenante et rappelle l’importance que doit porter le franchiseur à la préservation de l’indépendance de son franchisé. A rapprocher : Cass. soc., 18 janv. 2012, pourvoi n°1016.342

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Distinction agent commercial et apporteur d’affaires CA Grenoble, 3 septembre 2015, RG n°14/00467, JurisData n°2015-020177 Ce qu’il faut retenir : L’application du statut d’agent commercial (invoquée ici par un apporteur d’affaires) ne dépend tant de la volonté exprimée par les parties ou de la dénomination par elles retenue pour qualifier leur contrat, mais des conditions effectives dans lesquelles l’activité est exercée. Pour approfondir :  On le sait, les dispositions de l’article L.134-2 du Code de commerce ne subordonnent pas la preuve d'un contrat d'agence commerciale à l’exigence d’un écrit ; ainsi, la preuve d’un tel contrat peut être rapportée par tout moyen. Aussi, la tentation est grande pour certains professionnels de faire qualifier leur contrat de contrat d’agent commercial afin de bénéficier des dispositions protectrices de ce statut.  En l’espèce, Monsieur A, qui exerçait son activité auprès d'une agence immobilière, avait apporté à une Banque, depuis 2003, divers dossiers de financement er contre le paiement de commissions jusqu'au 1 octobre 2010.

Elle souligne aussi que l’intéressé n'offre d'ailleurs pas de démontrer que les demandes et les offres de prêts étaient établies par son intermédiaire et ne fait donc pas la preuve, qui lui incombe, de sa qualité prétendue d'agent commercial de la banque au sens de l'article L.134-1 du Code de commerce qui définit l'agent commercial comme le mandataire « chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux ». La Cour d’appel de Grenoble retient ainsi que l'intéressé n’était qu’un apporteur d’affaires, activité déployé à titre accessoire de l’activité d’agent immobilier qu’il exerçait par ailleurs. Ainsi, l’application du statut d’agent commercial ne dépend tant de la volonté exprimée par les parties ou de la dénomination qu’elles se sont proposé de retenir pour qualifier le contrat, mais des conditions effectives dans lesquelles l’activité est exercée. A rapprocher : CA Paris, 3 juillet 2015, RG n°13/00684 ; CA Colmar, 17 juillet 2012, RG n°09/06006

Il soutenait avoir agi au nom et pour le compte de la Banque A auprès des tiers acquéreurs, au motif, selon lui, qu’il disposait du pouvoir de négocier les modalités des contrats de crédit.

Agent commercial et contrat de travail CA Paris, 26 mai 2015, RG n°12/12014 Ce qu’il faut retenir :

Pour rejeter la demande de requalification de son contrat en contrat d’agent commercial et bénéficier ainsi du versement de l'indemnité compensatrice due en cas de cessation des relations avec l’agent, la Cour d’appel de Grenoble retient que l'intéressé n'apporte en l’espèce aucun élément de preuve à l'appui de son affirmation, selon laquelle il aurait agi au nom et pour le compte de la Banque auprès des acquéreurs de biens immobiliers et aurait disposé à cet effet du pouvoir de négocier les modalités des contrats de crédit ; à ce titre, la Cour souligne qu’il n’est produit aucun dossier de financement ni aucun document de travail attestant du rôle effectif que l'intermédiaire aurait joué dans la mise en place des concours bancaires nécessaires à la réalisation des opérations de vente d'immeubles ou de fonds de commerce, alors que l'aide éventuelle apportée aux acquéreurs dans la définition des éléments essentiels des contrats de prêt n'implique nullement qu'il ait eu le pouvoir d'engager l'établissement prêteur sur des modalités de financement particulières.

Le fait, pour un agent commercial, d’exercer ses activités dans les locaux de l’entreprise qui est sa seule cliente ne suffit pas à emporter la requalification de son contrat en contrat de travail. Pour approfondir : Le régime très protecteur du salarié attire certains professionnels indépendants (par exemple les agents commerciaux, les franchisés, etc.) qui estiment, précisément, que leur indépendance n’est pas réelle et qui cherchent par conséquent à obtenir la requalification de leur contrat en contrat de travail. Cette situation s’observe fréquemment lorsque leur contrat est rompu.

L’arrêt commenté porte sur une telle demande, formulée par un agent commercial dont le contrat avait été rompu.

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Au soutien de sa demande, l’agent faisait valoir qu’après avoir été stagiaire au sein d’une société pendant 4 mois, il était devenu agent commercial pour cette société, qui avait été son seul client jusqu’à la rupture de son contrat, et dans les locaux de laquelle il travaillait, bénéficiant en outre d’une adresse e-mail au nom de domaine de ladite société. L’agent indiquait qu’il avait travaillé de façon continue et soutenue pour cette société, fournissant à l’appui de ses allégations plusieurs milliers d’e-mails reçus et envoyés à partir de l’adresse e-mail précitée. Ces différents éléments n’emportent néanmoins pas la conviction de la Cour d’appel, qui relève qu’aucun lien de subordination n’est prouvé. En effet, parmi les nombreux e-mails versés aux débats, la plupart constituaient des échanges avec des personnes étrangères à la société et aucun n’était de nature à établir que le dirigeant de la société avait donné à l’agent des directives et instructions l’empêchant d’organiser son travail librement, selon ses convenances.

commercial. La mandante s’opposa à ce paiement en invoquant l’existence d’une société créée de fait entre l’agent commercial et ses sous-agents qui empêchait l’agent commercial principal de résilier seul et personnellement le mandat. Pour appuyer sa thèse d’une société créée de fait, la mandante invoquait une apparence globale d’une telle société résultant : -

de l’absence de connaissance par elle du contenu des contrats de sous-agents commerciaux ;

-

de l’existence de courriers à entête commune des 3 agents commerciaux envoyés à des clients de la mandante et renvoyés ensuite à la mandante par lesdits clients ;

-

du fait que si la mandante adressait ses courriers et relevés de commission au seul agent commercial principal, c’est parce qu’elle s’adressait en réalité au représentant de la société qu’elle pensait créée de fait entre l’agent commercial principal et ses sous-agents.

La demande de l’agent est donc rejetée. A rapprocher : CA Toulouse, 5 septembre 2014, RG n°12/03884

Rejetant ces arguments, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel et considère qu’aucune société créée de fait entre les trois agents commerciaux ne pouvait être retenue à l’égard de la mandante. En effet : -

les courriers à en-tête commune des trois agents commerciaux étaient en grande majorité adressés aux seuls clients et non à la mandante (les courriers adressés à la mandante directement étaient très rares) ;

-

seul l’agent commercial principal adressait ses factures de commissions ;

-

la mandante ne s’adressait qu’au seul agent commercial principal, notamment pour l’envoi des relevés de commission sur lesquels ne figurait que le nom de cet agent principal ;

-

enfin, les courriers qu’envoyait l’agent principal à la mandante directement n’indiquaient que ses propres coordonnées (adresse, mail, etc.) alors que les coordonnées du bureau physique dans lequel il travaillait avec ses sous-agents étaient différentes.

Société créée de fait entre un agent commercial et ses sous-agents Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-14.636 Ce qu’il faut retenir : L’apparence d’une société créée de fait par un agent commercial et ses sous-agents commerciaux n’est pas prouvée par le mandant dès lors que plusieurs éléments démontrent un lien exclusif entre le mandant et l’agent commercial, notamment dans les relevés de commission et factures liées. Pour approfondir : En l’espèce, une société mandante avait conclu un contrat d’agent commercial avec une personne physique pour négocier la vente de ses produits. Cet agent a eu recours à des sous-agents pour l’exercice de son activité avec lesquels il était contractuellement lié par deux contrats distincts. Après avoir notifié à la mandante sa volonté de mettre fin à leur relation, l’agent commercial principal lui réclama l’indemnité de cessation de contrat d’agent

Il résulte de cette décision que, pour apprécier l’existence d’une société créée de fait par un agent commercial et ses sous-agents notamment, il faut que tous les indices (ou en tout cas une majorité pertinente d’indices) convergent vers cette apparence, ce qui n’est bien évidemment pas le cas en l’espèce puisque les éléments les plus pertinents, à savoir les

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actes liés à la commission versée par la mandante, ne font pas référence aux prétendus associés de fait de l’agent principal.

expressément l’article L.131-2, alinéa 1 du Code des procédures civiles d’exécution (« L'astreinte est indépendante des dommages-intérêts »).

A rapprocher : article 1832 du Code civil

Cette différence entre les deux notions est importante au plan pratique car le bénéficiaire de la clause pénale peut toujours agir en exécution forcée, dès la simple constatation du manquement du débiteur, alors que le bénéficiaire de l'astreinte doit attendre que celle-ci soit liquidée ; de plus, le bénéficiaire de l'astreinte pourra demander en plus des dommages et intérêts ème (Cass. civ. 2 , 2 déc. 1992, n°91-16.618, Juris-Data n°1992-002701).

Requalification d’une clause d’astreinte en clause pénale ème Cass. civ. 2 , 3 septembre 2015, pourvoi n°14-20.431 Ce qu’il faut retenir : Le juge tient de l’article 12 du Code de procédure civile le pouvoir de restituer leur exacte qualification aux actes sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, et peut donc requalifier une clause d’astreinte en clause pénale. Pour approfondir :  Pour comprendre la portée de cette décision, il convient de rappeler les intérêts pratiques de la distinction entre ces deux types de clauses, d’apprécier dans quelle mesure le juge peut effectivement procéder à la requalification d’une clause d’astreinte en clause pénale, puis d’envisager quelques situations mises en perspective. I. Intérêts pratiques de la distinction entre ces deux types de clauses  Rappelons tout d’abord que la clause d'astreinte et la clause pénale se différencient essentiellement sur deux points – leur finalité et l’exercice par le juge de son pouvoir modérateur –, qui l’un comme l’autre emportent des conséquences pratiques bien précises.  Quant à leur finalité : la clause pénale remplit une fonction indemnitaire, qui résulte de l’article 1152, er alinéa 1 du Code civil lui-même (« Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommagesintérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre ») et de la définition qu’en donne régulièrement la cour de cassation (Cass. ère civ. 1 , 10 oct. 1995, n° 93-16.869, Bull. civ., I, n° 347 : la définissant comme « la clause d’un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle donnera lieu l’inexécution de l’obligation contractée »). A l’inverse, la clause d’astreinte ne poursuit aucune fonction indemnitaire, comme l’indique d’ailleurs

 Quant à l’exercice par le juge de son pouvoir modérateur : le montant de la clause pénale peut être révisé par le juge, conformément à l’article 1152, alinéa 2 du Code civil (« Néanmoins, le juge peut même d'office modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite »). A l’inverse, le montant de la clause d’astreinte ne peut pas être révisé par le juge, seule l’astreinte provisoire pouvant être réduite conformément à l’article L.131-4, er alinéa 1 du Code des procédures civiles d’exécution (« Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter »). Autrement dit, la somme prévue par les parties dans la clause d’astreinte (non provisoire) s’impose tant aux parties qu’au juge (CA Paris, 10 sept. 2008, Juris-data n° 2008-371740), le rôle du juge se limitant en définitive à contrôler que les conditions d’application de la clause sont remplies.

II. Requalification d’une clause d’astreinte en clause pénale  En l’espèce, l’arrêt objet du pourvoi (CA Nîmes, 3 avr. 2014) avait retenu qu'aucune astreinte ne pouvait donner lieu à une mesure d'exécution forcée avant sa liquidation, que cette astreinte soit prononcée par un juge ou qu'elle soit convenue entre les parties dans un acte pour assurer l'exécution d'une obligation de faire. Selon la deuxième chambre civile de la cour de ème cassation (Cass. civ. 2 , 3 sept. 2015, n°14-20.431, Juris-Data n°2015-019449) en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse s'analysait en une clause pénale qu'il lui appartenait de qualifier et d'apprécier, la cour d'appel, investie des pouvoirs du juge de l'exécution, a violé l'article 12 du Code de procédure civile et

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l'article L. 131-3 du Code des procédures civiles d'exécution et l'article 1152 du Code civil. III. Perspectives  En présence d’un contrat de distribution, il peut s'avérer particulièrement opportun d'insérer une clause pénale dans plusieurs hypothèses, et notamment en cas : -

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2010 au 14 avril 2011, se voit-il condamné (CA Paris, Pôle 5, chambre 3, 19 nov. 2014, Juris-Data n°2014028497) au paiement du montant de la clause pénale, égale à 25 jours de chiffre d'affaires, soit 152.449 euros. A rapprocher : Cass. soc., 26 juin 2010, pourvoi n°0914.123 ; Juris-Data 2010-010738 ; RDC 2011, p. 47, obs. J.-M. Laithier.

de non-respect par le distributeur de son obligation de non-concurrence post-contractuelle (CA Lyon, 4 déc. 2014, Juris-Data n°2014-03062 ; CA Paris, Pôle 5, chambre 3, 19 nov. 2014, JurisData : 2014-028497 ; CA Aix-en-Provence, 24 sept. 1998 : Juris-Data n°1998-046926) ; de non-respect par le distributeur de son obligation de non-affiliation (CA Paris, 12 sept. 1997 : Juris-Data n°1997-023002) ; de non-respect par le distributeur de son obligation de cesser l’usage des signes distinctifs postérieurement à la cessation du contrat de distribution (CA Colmar, 30 octobre 2013, RG n°12/03546) ; de non-respect par le distributeur de son obligation de confidentialité (CA Lyon, 22 janv. 2004 : Juris-Data n°2004-237515) ; de cession par le distributeur de son contrat de distribution ou de son fonds de commerce en violation de la clause d'agrément (CA Paris, 25 juin 2009 : Juris-Data n°2009-011672) ; de résiliation du contrat de distribution (CA Caen, 15 janv. 2009 : Juris-Data n°2009-003040).

 En présence d’une clause pénale, le pouvoir modérateur du juge reste d’application raisonnable. Si le montant de la clause pénale est réduit lorsque – le plus souvent – la violation de l’obligation a été réalisée sur une période de temps limitée (v. par ex. : CA Lyon, 11 février 2000, Juris-Data 2000-151453), le juge ne peut user de son pouvoir modérateur que si le montant de la clause pénale est « manifestement » excessif ou dérisoire. Par exemple, le juge (CA Lyon, 4 déc. 2014, Juris-Data n°2014-03062) écarte la demande de révision sollicitée par le franchisé et le condamne, en conséquence, au paiement de la somme de 160.000 euros par suite de la violation de non-concurrence post-contractuelles prévue par le contrat de franchise. De même, le franchisé ayant violé son obligation de non-concurrence en exploitant le fonds sous une autre enseigne du 1er septembre

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INTERPRÉTATION DU CONTRAT Nature juridique de la pénalité de retard de l’article L.441-6 du Code de commerce Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-15.968 Ce qu’il faut retenir : La pénalité de retard prévue par l’article L.441-6 du Code de commerce en matière de délais de paiement constitue un intérêt moratoire permettant la capitalisation des intérêts – anatocisme – prévu par l’article 1154 du Code civil. Pour approfondir : Dans cette affaire, un acheteur ne s’étant pas acquitté de ses factures de marchandises envers le vendeur dans les délais requis reproche aux juges du fond d’avoir assujetti les pénalités de retard prévues par l’article L.441-6 du Code de commerce (d’un taux de 10,65% et 10,38% par an), à la capitalisation des intérêts prévue par l’article 1154 du Code civil, dite anatocisme. En d’autres termes, l’anatocisme signifie que les intérêts produisent eux-mêmes des intérêts. L’acheteur estime que la pénalité de retard prévue par l’article L.411-6 du Code de commerce n’ayant pas la nature d’intérêts moratoires, l’article 1154 du Code civil ne lui est pas applicable ; il considère donc que les juges du fond ont violé l’article 1154 du Code civil en décidant de faire droit à la demande du vendeur tendant à appliquer la règle de l’anatocisme à la majoration de 10% issue de l’application de l’article L.441-6 du Code de commerce. La capitalisation des intérêts est prévue par l’article 1154 du Code civil dans les termes suivants : « les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une

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convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ». En vertu de ce texte, la capitalisation des intérêts s’applique aux intérêts légaux, dits aussi moratoires, de même qu’aux intérêts conventionnels. Dès lors, la question qui se pose en l’espèce est celle de déterminer quelle est la nature de la pénalité prévue par l’article L.441-6 du Code de commerce. L’article L.441-6 du Code de commerce dispose que « les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date ».

prévue par l’article 1154 du Code civil conformément à la demande du créancier impayé. A rapprocher : Cass. com., 2 novembre 2011, pourvoi n°10-14.677

Exclusivité territoriale et interprétation stricte des termes du contrat CA Paris, 15 janvier 2015, RG n°12/12120 Ce qu’il faut retenir : A défaut d’exclusivité contractuellement concédée au mandataire sur un territoire donné, rien n’interdit au mandant de vendre directement ses produits sur le même territoire. Pour approfondir :

Le texte ajoute que « sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, [le taux d’intérêt des pénalités de retard] est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage ». Tout d’abord, l’intérêt prévu par ce texte ne constitue pas un intérêt conventionnel ; le défaut de caractère conventionnel de cette pénalité a d’ores et déjà été reconnu par la Cour de cassation qui a jugé que les pénalités dues par l’application de l’article L.441-6 du Code de commerce ne constituent pas une clause pénale (Cass. com., 2 novembre 2011, pourvoi n°1014.677, D. 2011. 2788, obs. E. Chevrier; RTD com. 2012. 182, obs. B. Bouloc). La Cour de cassation devait donc statuer sur le point de savoir si la pénalité constitue ou non un intérêt moratoire permettant ainsi l’application de l’article 1154 du Code civil, étant précisé que l’intérêt moratoire peut être défini comme le mode forfaitaire de réparation du dommage résultant du retard dans l’exécution d’une obligation (F. Terré, P. Simler et Y. e Lequette, Droit civil. Les obligations, 10 éd., Dalloz, coll. « Précis », 2009, n° 190). Le débiteur le contestait. Toutefois, confirmant la solution de la Cour d’appel, la Cour de cassation qui rejette sur ce point le pourvoi du débiteur, affirme dans un attendu de principe limpide, que « la pénalité de retard prévue par l’article L.441-6 du Code de commerce constitue un intérêt moratoire » ; la Cour d’appel pouvait donc légitimement assortir la pénalité de la capitalisation

Deux sociétés ont conclu un contrat par lequel l’une donne mandat à l’autre de la représenter sur un territoire déterminé. Le contrat est résilié à l’initiative de la société mandante. Le mandataire assigne alors son ancien cocontractant aux fins d’obtenir le paiement de commissions supplémentaires sur le fondement du contrat. A l’appui de sa demande, le mandataire soutient que le mandant a procédé à des ventes directes sur le territoire lui ayant été concédé, violant ainsi l’exclusivité consentie par le contrat. Pour débouter la société mandataire de sa demande, la Cour d’appel retient qu’aucune des stipulations contractuelles ne prévoyait que la mission de représentation confiée aurait un caractère exclusif et qu’il serait interdit au mandant de vendre directement ses produits à des clients établis dans le même territoire que celui délimité dans le contrat. Plus précisément, la Cour relève que l’engagement du mandant de s’assurer que le mandataire dispose des moyens nécessaires au bon accomplissement de la mission de représentation qui lui est confiée n’est nullement la contrepartie nécessaire d’une exclusivité qui lui aurait été implicitement accordée ; que l’interdiction contractuellement faite au mandant de distribuer ou promouvoir des matériels concurrents à ceux du mandant a pour corollaire, non une exclusivité consentie à son profit, mais les conditions financières et le niveau de rémunération accordée au mandataire ; que le fait que le mandant n’ai jamais eu recours à aucun autre représentant ou distributeur n’implique pas pour autant que le mandant aurait par là-même souscrit l’engagement de ne pas vendre elle-

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même ses produits ; que les attestations transmises par le mandant à l’occasion d’un appel d’offre, et dans lesquelles il « atteste avoir confié [au mandataire] le représentation de ses produits et opérations de service qui leur sont liées pour le territoire [X] », ne sauraient être interprétées comme un engagement souscrit, en marge du contrat, par la société mandante de ne pas procéder à des ventes directes. Une telle interprétation serait contraire aux termes clairs et précis du contrat et constituerait une dénaturation de ces stipulations. Le mandant n’ayant pas accordé d’exclusivité au mandataire, la Cour d’appel confirme le jugement de première instance ayant jugé que le mandant avait pu procéder à des ventes directes de matériels à des clients situés dans les départements mentionnés au contrat de représentation, sans contrevenir aux droits que le mandataire tirait du contrat.

de distribution consiste à prévoir, dans le contrat signé entre la tête de réseau et ses distributeurs, une clause par laquelle sont fixées les règles relatives au budget de communication : -

d’un côté, le distributeur est tenu à une obligation de paiement d’une participation financière (qui est généralement fonction du montant de son chiffres d’affaires ; plus rarement, il est simplement prévu un montant fixe ; dans un cas comme dans l’autre, le contrat prévoit parfois que cette obligation de paiement est conditionnée à la présence, au sein du réseau, d’un nombre de points de vente déterminé, autrement dit d’un seuil au-delà duquel la clause trouve à s’appliquer) ;

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de l’autre, la tête de réseau est tenue à une obligation de gestion de ce budget (cette clause précise tout d’abord qui décide de l’affectation de fonds, soit en règle générale la tête de réseau, qui dispose de la vision d’ensemble et qui veut le plus souvent restée maître de sa stratégie de communication ; cette clause donne aussi généralement lieu à l’énoncé des postes de dépenses de nature à pouvoir entrer dans le budget de communication ; parfois, il est prévu que les sommes reçues des distributeurs par la tête de réseau mais non dépensées seront reportées pour le budget de l’année suivante, autrement dit dans un compte de report à nouveau).

En conséquence, la Cour déboute également le mandataire de sa demande de réparation au titre du préjudice d’image auprès de la clientèle prétendument causé par la violation par la société mandante de l’exclusivité. A rapprocher : CA Dijon, 2 juillet 2013, RG n°12/00442

Budget de communication et affectation des dépenses engagées par le franchiseur CA Versailles, 29 septembre 2015, RG n°14/00467 Ce qu’il faut retenir : La clause du contrat de franchise relative au budget de communication peut librement fixer les conditions dans lesquelles les dépenses liées à ce budget sont affectées ; en cas de silence ou d’ambiguïté du contrat, le juge interprète la volonté des parties en application des articles 1156 et suivants du Code civil. Pour approfondir :  Les décisions relatives à la question de l’affectation du budget annuel de communication par le franchiseur ne sont pas si nombreuses, de sorte que l’un des mérites de la décision commentée – mais ce n’est pas le seul – est de revenir en détail sur cette question, qui se trouvait au cœur des débats. Avant d’entrer dans le vif du sujet, il faut rappeler tout d’abord que l’usage le plus répandu dans les réseaux

Chacun le sait, la question du budget de communication reste un sujet sensible. Sensible au plan financier d’abord, car les distributeurs sont – et c’est normal – soucieux de savoir comment leur argent est dépensé par la tête de réseau. Sensible au plan juridique ensuite, car l’expérience montre que la clause fixant les règles relatives au budget annuel de communication prête parfois à interprétation.  Cette problématique se trouve au cœur du litige soumis à l’appréciation de la Cour d’appel de Versailles ; en l’espèce, en effet, les données du litige sont les suivantes : le franchiseur a averti les franchisés de ce qu’il entendait imputer sur le budget de communication les frais de personnel affectés aux missions ayant trait aux actions publicitaires et promotionnelles qu’il gardait jusqu’alors à sa charge. Considérant que le franchiseur méconnaissait ainsi ses obligations contractuelles en imputant ces frais aux franchisés, ces derniers ont assigné le franchiseur afin de faire constater ce manquement contractuel et lui faire injonction de respecter ses obligations à ce titre. En première instance, le tribunal de commerce de

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Nanterre avait condamné le franchiseur à reverser les sommes prélevées en méconnaissance de ses engagements, soit en l’espèce environ 1,2 million d’euros. Le franchiseur devait faire appel de cette décision. La décision de condamnation est confirmée dans son principe, et alourdie dans ses conséquences financières, la cour d’appel condamnant le franchiseur à reverser les sommes indument perçues au titre de trois années, les franchisés ayant entre-temps demandé d’ordonner cette restitution au titre de deux années supplémentaires. Il convient dès lors de commenter cette décision, en répondant à la question centrale en l’espèce de savoir si les frais internes constitués des salaires supportés par le franchiseur à raison des actions marketing pouvaient (ou non) relever du budget de communication. Pour répondre à la question, il convient de distinguer deux hypothèses totalement distinctes, selon que le contrat envisage ou non cette question.  Dans la première hypothèse, le contrat de distribution prévoit expressément que la tête de réseau dispose de la faculté d’imputer sur le budget de communication tout ou partie des dépenses salariales qu’il a réalisées au titre de la communication et/ou de la publicité du réseau. Dans cette hypothèse, il n’y a pas de difficulté particulière puisque le contrat de distribution répond par avance à la question ; aussi est-il vivement recommandé à la tête de réseau d’anticiper ce point dans son contrat de distribution et d’entrer dans le plus grand détail. Et, de manière beaucoup plus générale, il convient de rappeler que le contrat de distribution pourra apporter des précisions sur toute une série de questions se rapportant au budget de communication. Par exemple, et sans que cette liste soit exhaustive, le contrat de distribution peut préciser la politique publicitaire à laquelle la tête de réseau s’engage, et notamment les parts qui sont affectées à tel ou tel poste de publicité ; la tête de réseau ne saurait alors modifier la politique définie au contrat sans l’accord du distributeur (Cass. com., 3 janv. 1996, pourvoi n°94-12.314), alors même que la majorité des distributeurs se serait prononcée en faveur de ce changement (CA Bordeaux (trois arrêts), 24 janv. 2007, RG n°04/06592, 04/06593 et 04/06594, inédits : en l’espèce, la tête de réseau, sur proposition de la commission de communication approuvée à la majorité des deux tiers par l’assemblée des distributeurs, avait utilisé une partie du budget affecté à la publicité locale à la publicité nationale). Dans d’autres cas, la tête de réseau ne peut décider seul de la politique publicitaire lorsque le contrat prévoit la consultation d’une commission des distributeurs (CA Paris, 22 oct. 1992, Juris-Data n°2002-023058).

 Dans la seconde hypothèse, le contrat de distribution ne prévoit pas expressément que la tête de réseau dispose de cette faculté ou – comme en l’espèce – la volonté des parties, exprimée dans le contrat de distribution, reste ambiguë. Tel était la problématique à laquelle se heurtaient les parties au cas d’espèce. A rapprocher : Articles 1156 et suivants du Code civil

La relation entre un avocat et son client confrontée au droit économique Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-22.578 Ce qu’il faut retenir : L’article L.442-6 du Code de commerce n’est pas applicable à la relation nouée entre un avocat et son client, la profession d’avocat étant en effet incompatible avec toute activité à caractère commercial. L’existence d’une convention-cadre conclue entre l’avocat et son client doit être prouvée, et la constance des relations entre les parties se traduisant par un flux de dossiers confiés par le client à l’avocat pendant une longue période ne suffisant pas à démontrer que ces relations étaient encadrées. Pour approfondir : Dans cette affaire, une société d’avocats a assigné l’un de ses anciens clients – une banque – (i) en responsabilité pour rupture brutale d’une relation commerciale établie, sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce, et (ii) subsidiairement, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil arguant qu’il existait entre eux une convention-cadre dans le contexte de laquelle s’inscrivait chaque dossier confié par le client et que la rupture brutale de celle-ci par le client lui avait causé un préjudice. Cet arrêt apporte ainsi des précisions intéressantes, d’une part, sur les contours de la notion de « relation commerciale établie » et l’applicabilité de celle-ci dans le cadre de la relation entre un avocat et son client et, d’autre part, sur la possibilité de caractériser l’existence d’une convention-cadre entre les deux parties. ▪ Le rejet de l’existence d’une relation commerciale établie entre un avocat et son client. La profession d’avocat est une profession réglementée et soumise à un statut composé d’un corpus de règles strictes. L’article 111 du décret n° 91-1197 du 27 novembre

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1991 édicte notamment que « la profession d’avocat est incompatible avec toutes les activités de caractère commercial, qu’elles soient exercées directement ou par personne interposée ». Cette règle est l’une des plus ancrées de la profession d’avocat ; elle est justifiée par le fait que l’exercice de la profession d’avocat n’est pas supposée avoir pour considération essentielle la recherche du profit - qui caractérise la relation commerciale -, l’article 3 du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 prévoyant au contraire que l’avocat doit faire preuve de désintéressement dans l’exercice de sa fonction et dans sa relation avec son client. Ainsi que le rappelle la Cour d’appel, l’avocat doit prioritairement avoir le souci de nouer avec le client une relation reposant d’abord sur la confiance réciproque. Dans son pourvoi, la société d’avocats a soutenu, d’une part, que le caractère non lucratif d’une activité de service ne fait pas obstacle à l’existence d’une relation commerciale au sens de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce. Dès lors, en estimant que ce texte n’était pas applicable dans les relations entre un avocat et son client en raison du désintéressement dont doit faire preuve l’avocat dans ses rapports avec son client, la Cour d’appel a ajouté au texte susvisé une restriction qu’il ne comporte pas, et a ainsi violé, par refus d’application, l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce et, par fausse application, l’article 3 du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005. D’autre part, la société d’avocats a relevé que l’interdiction faite aux avocats d’accomplir des actes de commerce ne faisait pas obstacle à la caractérisation d’une relation de nature commerciale entre l’avocat et son client, condition de mise en œuvre des dispositions de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce. En effet, l’avocat, qui exerce, contre rémunération, une activité qui le conduit à offrir des services dans le domaine économique, se trouve avec son client, a fortiori s’agissant d’une banque commerciale, dans une relation qui est ellemême de nature commerciale, et qui entre ainsi dans le champ du texte susvisé. La société conclut qu’en jugeant le contraire, au motif que la profession d’avocat était incompatible avec une activité de commerce, la Cour d’appel a violé l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce par refus d’application et l’article 111 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 par fausse application. Cependant dans un attendu de principe catégorique, la Cour de cassation a estimé « qu’ayant énoncé que, selon

l’article 111 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, la profession d’avocat est incompatible avec toutes les activités de caractère commercial, qu’elles soient exercées directement ou par personne interposée, l’arrêt retient que les textes organisant la profession d’avocat excluent expressément que l’avocat puisse exercer une activité s’apparentant à une activité commerciale ; que de ces seules énonciations et appréciations […] la cour d’appel a exactement déduit que l’article L. 442-6 I 5° du Code de commerce n’était pas applicable à la relation nouée entre la Selarl et son client ». La Cour de cassation est stricte, la profession d’avocat est incompatible avec l’exercice de toute activité s’apparentant à une activité commerciale ; la relation nouée entre un avocat et son client ne saurait donc s’apparenter de quelque manière que ce soit à une relation commerciale. En conséquence, à l’instar d’autres professions libérales telles les notaires ou encore les médecins, les avocats se voient exclus du bénéfice de l’action en responsabilité instaurée par l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce en matière de rupture brutale d’une relation commerciale établie. ▪ Le rejet de l’existence d’une convention-cadre établie entre l’avocat et son client. La société d’avocats a ensuite soutenu que sa cliente a résilié unilatéralement la convention-cadre existant entre elles, violant l’article 1134 du Code civil et lui causant ainsi un préjudice dont elle demande réparation sur le fondement de l’article 1147 du Code civil. La convention-cadre est l’accord dans le cadre duquel viennent s’inscrire des contrats particuliers et dont le régime ne se confond pas avec celui de chacun de ces contrats particuliers. La société d’avocats, sur laquelle repose la charge de la preuve de l’existence de la convention alléguée, a soutenu que les liens entre les parties étaient caractérisés par « la constance de leurs relations communes qui s’est traduite par un flux de dossiers relevant de la compétence des juridictions quimpéroises que la [banque] a confié à la société d’avocats pendant une trentaine d’années », ce dont résultait nécessairement l’existence d’une conventioncadre dans le contexte de laquelle s’inscrivait chaque dossier confié à l’avocat. La Cour de cassation, suivant en ce sens le raisonnement tenu par le client devant les juges du fond, a retenu que la société recevait mandat, dossier par dossier, de représenter et défendre les intérêts de sa cliente et que la constance des relations entre les parties se traduisant par un flux de dossiers confiés

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par la banque à son avocat pendant une trentaine d’années ne suffit pas à démontrer que les relations étaient encadrées.

EXÉCUTION DU CONTRAT

La Haute juridiction en déduit que la société d’avocats n’a pas rapporté la preuve de l’existence de la convention-cadre invoquée et confirme en conséquence la solution retenue par la Cour d’appel.

Contrat de distribution sélective et revente par un distributeur non agréé Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12.272 Ce qu’il faut retenir :

Toutefois, la Haute Cour ne répond pas à l’argument de l’avocat sur le point de savoir si l’intuitu personae prévalant dans les relations entre l’avocat et son client est, ou non, par nature incompatible avec l’existence d’une convention-cadre entre les parties. La banque prétendait en effet que le lien unissant l’avocat à son client étant avant tout un lien de confiance, lorsque celui-ci, à tort ou à raison, est rompu, la relation fondée sur l’intuitu personae qui en découle ne peut perdurer ; elle en déduisait que le client avait la faculté de mettre un terme à cette relation sans être tenue de respecter un quelconque délai de préavis, peu important le bien ou mal fondé des critiques ayant pu expliquer sa décision, le motif de la perte de confiance étant indifférent. La solution retenue par la Cour de cassation ne semble donc pas devoir être généralisée. En effet, la Haute juridiction n’apparaît pas exclure de manière catégorique toute convention-cadre pouvant exister entre un client et son avocat comme elle l’a fait en revanche s’agissant de l’existence d’une relation commerciale établie. A rapprocher : Cass. com., 23 octobre 2007, pourvoi n°06-16.774 ; Cass. com., 20 janvier 2009, pourvoi n°07-17.556

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Un distributeur agréé pour la vente de produits de luxe assigne d’une part l’un de ses concurrents pour avoir revendu des produits de mêmes marques que ceux qu’il commercialise au mépris du réseau de distribution sélective et, d’autre part, le fabricant de ces produits, pour violation du contrat de distributeur agréé pour avoir permis à son concurrent de revendre lesdits produits ; le distributeur agréé a été débouté de l’intégralité de ses demandes. Pour approfondir : La société X. exploitant une bijouterie a conclu un contrat de distribution sélective avec un fabricant de montres de luxe. La société Y., situé à proximité du point de vente exploité par la société X., propose des montres des mêmes marques que celles commercialisées par la société X. Cette dernière intente alors une action en concurrence déloyale à l’encontre de la société Y. et en responsabilité contractuelle à l’encontre du fabricant pour violation du contrat de distribution agréé. S’agissant de l’action en concurrence déloyale, la Haute Cour relève que la société Y., qui avait vendu deux montres de marques de luxe, dont la société X. était distributeur agrée, n’était certes pas un distributeur agréé mais n’avait fait que répondre à une demande particulière de clients et respectait l’usage applicable en matière de joaillerie selon lequel un bijoutier peut vendre occasionnellement un produit qui n’est pas distribué par lui mais par un de ses confrère, en vue de répondre à une demande particulière d’un client. La société Y. n’ayant pas procédé, en dehors des deux montres susvisées, à la vente d’autres produits, la Cour de cassation a confirmé la position adoptée par les juges du fond en considérant que la société Y. n’avait commis aucun acte de concurrence déloyale. S’agissant de l’action engagée à l’encontre du fabricant, la société X. se prévalait du non-respect, par le fabricant, des dispositions de l’article L.442-6, I, 6° du Code de commerce qui prévoit qu’« engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur,

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commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (…) de participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ». La société X., considérant que le fabricant avait conféré la qualité de distributeur agréé à la société Y., laquelle était implantée à quelques mètres seulement de son point de vente, estimait que le fabricant avait violé le contrat de distribution sélective. La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société X. sur ce fondement aux motifs que « la responsabilité d’un fournisseur au titre de l’agrément prétendument fautif d’un nouveau distributeur ne relève pas des dispositions de l’article L.442-6, I, 6° du code de commerce qui sanctionnent la participation à la violation de l’interdiction de revente hors réseau ». De ce fait, la Cour de cassation n’a pas condamné le fabricant.

de contrôle de la société franchiseur par un concurrent aurait dû faire l’objet d’un accord préalable des franchisés du réseau au regard du caractère intuitu personae du contrat de franchise. Le franchisé formulait également d’autres griefs accessoires pour justifier sa décision. Le franchiseur avait alors assigné le franchisé devant le Tribunal de commerce de Lyon afin que la résiliation intervenue soit jugée fautive et donne lieu à une indemnisation à son bénéfice en application des dispositions du contrat prévoyant en pareil cas le paiement d’une indemnité.

La Cour de cassation a reconnu que dans le domaine de la joaillerie, un distributeur pouvait, sans avoir la qualité de distributeur agrée, vendre deux produits dont la commercialisation était confiée à un distributeur agréé, sans être poursuivi pour concurrence déloyale.

Le Tribunal a donc jugé que le franchisé ne pouvait sérieusement invoquer dans ce contexte une modification de l’intuitu personae pour résilier son contrat de franchise. De ce fait et considérant que les autres reproches accessoires formulés par le franchisé n’étaient pas suffisamment démontrés, le Tribunal a jugé que la résiliation du contrat de franchise était intervenue aux torts exclusifs du franchisé.

A rapprocher : CA Paris, 21 novembre 2013, RG n°12/05692

Le Tribunal de commerce de Lyon, saisi de ce contentieux, a relevé, à juste titre, que le contrat de franchise en cause ne prévoyait pas de stipulations spécifiques relatives au changement de contrôle de la société franchiseur et en a déduit que le changement de contrôle de la société franchiseur était donc sans effet sur le caractère intuitu personae, les personnalités morales jouant leur rôle normal d’écran.

Dans son pouvoir d’appréciation, le Tribunal a limité le montant de la clause pénale prévue au contrat de franchise en cas de résiliation anticipée du contrat de franchise à la somme de 100.000 euros. Le changement de contrôle de la société franchiseur sans incidence sur la poursuite du contrat Trib. com., 12 juin 2015, RG n°2014J01221

A rapprocher : Cass. com., 29 janvier 2013, pourvoi n°11-23676

Ce qu’il faut retenir : Le changement de contrôle de la société franchiseur ne nécessite pas d’obtenir l’accord préalable des franchisés du réseau, sauf stipulation contraire prévue au contrat de franchise.

Agent commercial : modification du contrat et clause de non-concurrence Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-14.820

Pour approfondir :

Ce qu’il faut retenir :

La société franchiseur d’un réseau de franchise avait fait l’objet d’une prise de contrôle par l’un de ses concurrents.

Le mandant ne peut modifier unilatéralement les termes du contrat conclu avec l’agent commercial sans l’accord de son partenaire. L’agent commercial est quant à lui tenu, en application de l’article L.134-3 du Code de commerce, à l’égard du mandant, à une obligation de non-concurrence, ce qui ne l’empêche pas de commercialiser des produits dits complémentaires et non concurrents de ceux de son mandant.

A la suite de cette opération, un franchisé avait décidé de résilier son contrat de franchise considérant que le changement d’actionnariat de la société franchiseur constituait une violation du caractère intuitu personae du contrat. En effet, le franchisé soutenait que la prise

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Pour approfondir : Une célèbre société spécialisée dans les couverts, la société G., était en relation avec la société S., avec laquelle elle avait conclu un contrat d’agent commercial ; la société S., en qualité de mandataire, était ainsi chargée de la distribution des produits de la société G. (mandant) dans plusieurs pays du Maghreb, du Moyen-Orient et de l’Inde. Le mandant a rompu le contrat et la société S. l’a assigné aux fins d’obtenir le paiement d’indemnités de cessation de contrat, de préavis et des commissions.

Toutefois, il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier ». Les juges du fond ont cependant relevé que les produits commercialisés par le mandant et ceux commercialisés par les sociétés pour le compte duquel était ensuite intervenue la société S. n’étaient pas interchangeables, le mandant ayant par ailleurs accepté la représentation de ces produits complémentaires, et non concurrents, par le mandataire qui lui avait indiqué l’intérêt commercial que cela pouvait représenter.

Le mandant, quant à lui, a formulé une demande reconventionnelle et réclamé l’indemnisation du préjudice subi du fait de la violation par le mandataire de la clause de non-concurrence, ce dernier ayant représenté des sociétés qui, selon le mandant, étaient concurrentes puisqu’elles commercialisaient de la porcelaine de table et de cuisine. S’agissant de la rupture de leur relation, la société G. avance que, dès la fin de l’année 2007, une rupture partielle du contrat d’agent commercial était intervenue entre les parties. Le mandant se réfère ainsi à une réunion qui s’est tenue entre les parties et au compte-rendu qui s’en est suivi et dont il ressort que le mandant a entendu modifier l’étendue du territoire d’intervention confié à l’agent. Les juges du fond ont toutefois considéré que la modification du contrat d’agent commercial qui avait été effectuée par le mandant était équivoque, qu’aucun accord écrit n’avait été formalisé entre le mandant et le mandataire afin d’acter des modifications proposées par le mandant et enfin que le mandataire avait poursuivi son activité conformément à l’accord initial conclu entre les parties. Les juges du fond ont ainsi relevé que le mandant avait commis une faute grave, rejetant toute idée de rupture partielle du contrat d’agent commercial à partir de décembre 2007, considérant ainsi que le contrat d’agent s’était poursuivi jusqu’en 2009 pour condamner la société G. au paiement d’indemnités et commissions. La Cour de cassation a confirmé la position retenue par les juges du fond.

La société S. n’a donc pas violé la clause de nonconcurrence à laquelle elle est tenue.

S’agissant de la clause de non-concurrence, le mandant soutient qu’un agent commercial ne peut représenter une entreprise concurrente à celle de son mandant sans accord de ce dernier - accord qui en l’espèce faisait défaut - et que, en effectuant une telle représentation de produits concurrents en violation de la clause de non-concurrence, la société S avait nécessairement subi un préjudice. La société G. se fondait ainsi sur le non-respect par l’agent des dispositions de l’article L.134-3 du Code de commerce qui dispose : « L'agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants.

Dans cette affaire, il s’agissait d’un contrat intitulé « licence d’exploitation d’un site internet ». Il s’agissait pour une société de créer un site internet au profit d’un client et d’en assurer le référencement. Ce contrat est conclu sur une longue durée et le client s’engage à un paiement mensuel. Sitôt conclu, le contrat est généralement cédé par le prestataire à un tiers pour le recouvrement de la créance mensuelle, ce qui était effectivement le cas en l’espèce.

Cet arrêt revient ainsi sur l’une des obligations essentielles de l’agent commercial. Ce dernier est en effet tenu pendant la durée du contrat à une obligation de non-concurrence à l’égard du mandant, ce qui suppose, s’il souhaite représenter une entreprise exerçant une activité concurrente à celle de son mandant, de recueillir au préalable l’autorisation de ce dernier, sous peine de manquer à son obligation de loyauté. A rapprocher : Cass. com., 15 mai 2007, pourvoi n°0612.282

Exception d’inexécution : la charge de la preuve appartient au débiteur Cass. com., 4 février 2015, pourvoi n°13-28.808 Ce qu’il faut retenir : Lorsque le débiteur d’une obligation souhaite opposer l’exception d’inexécution, c’est à lui qu’il incombe de prouver l’inexécution censée la justifier. Pour approfondir :

La cliente a été assignée en résiliation du contrat à ses torts exclusifs et en paiement des mensualités

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impayées par la société qui était devenue créancière des mensualités. La cliente a alors opposé l’exception d’inexécution, car le prestataire n’avait pas respecté son obligation en termes de référencement du site. En effet, le prestataire avait livré un site satisfaisant, mais il ne justifiait pas avoir assuré le référencement par des opérations de maintenance et de mises à jour. Ce faisant, la Cour d’appel de Paris avait admis l’exception d’inexécution et la cliente était libérée de l’obligation de payer. Toutefois, la Cour de cassation a censuré la décision en exposant que la Cour d’appel avait inversé la charge de la preuve. En effet, selon la Cour de cassation, les juges du fond avaient interprété de manière erronée l’article 1315, alinéa 2, du Code civil. Considérant que le prestataire était débiteur de l’obligation de référencement, la Cour d’appel de Paris avait jugé que c’était à lui de prouver la bonne exécution de son obligation. Or, c’était oublier que le moyen était soulevé par le biais d’une exception d’inexécution. Le débiteur, au sens de l’alinéa 2 de l’article 1315, était bien la cliente. C’est la cliente qui était débitrice et qui invoquait une circonstance de nature à démontrer qu’elle était libérée de son obligation. C’est donc bien sur elle que devait reposer la charge de la preuve. La preuve de l’inexécution incombe donc à celui qui se prévaut de l’exception d’inexécution. A rapprocher : CA Paris, 28 janvier 2015, RG n°10/15692

Rejet de l’exception d’inexécution pour justifier du non-paiement de redevance CA Paris, 28 janvier 2015, RG n°10/15692 Ce qu’il faut retenir : L’exception d’inexécution est régulièrement soulevée par le franchisé pour tenter de justifier le nonpaiement de ses redevances, le franchiseur y faisant échec dans de nombreux cas. Pour approfondir : Un contrat de franchise a été conclu entre la société M. (franchiseur) et la société A. (franchisé) aux termes duquel le franchisé s’engageait à verser au franchiseur une redevance mensuelle dont le montant était calculé à partir des déclarations portant sur le chiffre

d’affaires faites par le franchisé, ce dernier s’engageant néanmoins à régler un montant de redevance minimum. Le franchisé a cessé de payer ses redevances et effectué des déclarations de chiffres d’affaires erronées auprès du franchiseur. Ce dernier résilie le contrat conformément aux termes du contrat de franchise, met en demeure le franchisé de procéder au règlement des factures impayées, et assigne le franchisé. Le tribunal de commerce de Paris constate la résiliation de plein droit du contrat de franchise et condamne le franchisé au paiement. Le franchisé interjette appel, soutenant que le franchiseur a manqué à ses obligations contractuelles et, en conséquence, invoque le principe de l’exception d’inexécution pour tenter de justifier le non-paiement de ses factures. Le franchisé tente en effet de faire valoir que le contrat de franchise est un synallagmatique mettant à la charge des parties des obligations réciproques et interdépendantes, ce dont il résulte que, si l’une des parties n’exécute pas ses engagements, l’autre partie est en droit de refuser d’exécuter sa propre prestation en opposant l’exception d’inexécution et avance le fait que le franchiseur n’aurait pas honoré ses engagements (notamment en matière de transmission de savoirfaire, de promotion et publicité, d’assistance). Il en résulte, selon le franchisé, que le franchiseur ne serait pas en mesure d’exiger que le franchisé respecte ses propres obligations. Les juges du fond relèvent que le franchisé a formulé tardivement ses griefs à l’égard du franchiseur, en reprenant à son compte des reproches formulés par l’association des franchisés et non par lui-même et, au surplus, retiennent que le franchiseur rapporte la preuve du respect de ses obligations, aucune faute ne pouvant ainsi être reprochée à ce dernier et, en conséquence, l’exception d’inexécution ne pouvait être invoquée. L’exception d’inexécution est en effet régulièrement invoquée par le franchisé pour tenter de s’affranchir du paiement de ses redevances, ce qui suppose toutefois que le franchiseur ait effectivement manqué à ses obligations et que le manquement commis soit suffisamment grave pour justifier le non-paiement des redevances. A rapprocher : Cass. com., 23 janvier 2007, pourvoi n°04-20.647

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Conséquences de l’absence de critiques du franchiseur au cours de l’exécution du contrat CA Angers, 17 février 2015, RG n°13/00964 Juris-Data n°2015-004872

préserver son réseau et de tenter de trouver une solution amiable, mais sans aucunement renoncer à les invoquer ».

Ce qu’il faut retenir : Selon cette décision, le franchiseur ne peut utilement se prévaloir d’un manquement du franchisé lorsqu’il ne l’a pas critiqué au cours de l’exécution du contrat. Pour approfondir :  En règle générale, la jurisprudence se montre prudente quant à l’interprétation à donner au silence du franchiseur en présence d’une faute contractuelle commise par le franchisé au cours de l’exécution du contrat. Ainsi, la jurisprudence considère-t-elle notamment que : -

le franchiseur peut se prévaloir de la violation du concept par le franchisé, jusqu’à la signification par celui-ci de la résiliation du contrat, alors même que ces manquements, constatés antérieurement, n’avaient donné lieu à aucune réclamation ou critique (CA Bordeaux, 24 janv. 2007, RG n°04/06594) ;

-

le fait d’avoir perçu les redevances sur la totalité du chiffre d’affaires, comprenant la commercialisation de produits non référencés par le franchiseur, ne constitue pas de la part de celuici une acceptation de la vente par le franchisé desdits produits (CA Angers, 19 déc. 2006, JurisData n°330903).

 Dans ce contexte, la décision commentée (CA Angers, 17 février 2015, RG n°13/00964, Juris-Data n°2015-004872) nous paraît critiquable. En effet, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchiseur, pour manquements contractuels au contrat de franchise à effet de sa décision, la Cour d’appel d’Angers écarte certains des griefs du franchiseur, au motif que celui-ci ne les aurait pas formulés au cours de l’exécution du contrat de franchise. En l’espèce, le franchiseur prétendait que la société franchisée était à l'origine de plusieurs manquements contractuels importants justifiant la résiliation du contrat de franchise, tout en précisant qu'avant d'être assignée en résiliation du contrat, elle avait fait le choix de ne pas se prévaloir expressément de ces inexécutions, « afin de

A cet égard, la Cour d’appel d’Angers retient : « Attendu en ce qui concerne les fautes reprochées par la société [franchiseur] à son franchisé, qu'il est constant que la société [franchisée] n'a pas respecté le taux de fidélité (achats de produits dans le référencement du franchiseur) de 80% imposé à l'article 6-5-2 du contrat ; que les mails échangés le 8 octobre 2008 ne permettent pas de considérer que les parties avaient entendu déroger à cette obligation, dès lors qu'elle a été reprise dans la convention signée après, et ce d'autant plus qu'ils peuvent être interprétés dans un sens comme dans l'autre, la société [franchisée] demandant le maintien de 'la prime RFA même si les 80% achats n'est pas respecté' et la société [franchiseur] répondant 'nous en avons parlé hier au téléphone. Nous privilégions le commerce' ; que cependant, force est de constater que la société [franchiseur] n'a jamais fait état dans ses comptes rendus de visite du non respect de ce taux de fidélité, alors pourtant que les achats de produits référencés M… par la société [franchisée] étaient bien inférieurs à ce qui figurait au contrat (56% en 2009-2010, 59% en 2010-2011 et 37% en 2011-2012) ; que s'il ne peut en être déduit qu'elle a renoncé à s'en prévaloir, en revanche, son attitude démontre qu'elle ne considérait pas cette obligation comme importante, se satisfaisant de ce que la redevance était payée sur le chiffre d'affaire total ». Cette solution peut paraître d’autant plus problématique que l’interprétation du comportement des parties par le juge du fond participe de son pouvoir souverain d’appréciation, dont le franchiseur peut craindre qu’il échappe au pouvoir de contrôle de la Cour de cassation.  Ce faisant, la solution ainsi retenue par la décision commentée invite à rappeler l’intérêt de recourir à l’insertion d’une clause d’immutabilité dans le contrat de franchise. La clause d’immutabilité consiste en effet à interdire à une partie d’opposer à son cocontractant l'inapplication par ce dernier de l’une des clauses du contrat. Ainsi, le fait pour le franchiseur de ne pas faire application de telle ou telle clause du contrat pendant un laps de temps ou une période, même longue, ne peut en aucun cas être interprété comme valant renonciation par le franchiseur aux droits qu’il tient de ladite clause. Une telle clause évite donc d’analyser le comportement du franchiseur – quels qu’en soient la

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nature, la fréquence, et les modes de manifestation – comme une renonciation à invoquer un droit qu’il tient des stipulations du contrat de franchise. Autrement dit, les droits et obligations du contrat sont immuables et le comportement du franchiseur – qui peut parfois être amené à consentir quelques « largesses » ou à se contenter d’un simple silence – ne pourra donc jamais s’analyser en une remise en cause du contrat. Par exemple, la clause d’immutabilité doit permettre que tout délai supplémentaire accordé par le franchiseur doit être considéré comme ayant été donné à titre exceptionnel et ne saurait donc en aucun cas avoir pour effet de modifier le délai initial fixé aux termes du contrat ; de même, en présence d’une telle clause, l’absence de contestation du franchiseur face à l’ouverture d’un nouveau point de vente par le franchisé sans l’autorisation requise par le contrat, empêche de considérer que le franchiseur a pu accepter l’ouverture du point de vente considéré. L’on mesure, à travers ces deux exemples simples, l’importance d’une telle clause, apparemment anodine mais qui, au plan contentieux, pourra faire la différence. A rapprocher : CA Bordeaux, 24 janv. 2007, RG n°04/06594

condamnation de la société A. au paiement des sommes impayées. Les juges du fond relèvent tout d’abord que les conditions générales d’achat ont vocation à s’appliquer à la présente espèce. En effet, la société A., après avoir reçu une offre de commande de la part du vendeur faisant référence aux conditions générales de vente, a cependant rédigé un ordre de commande visant ses conditions générales d’achat ; cet ordre de commande a été retourné daté et signé par le vendeur avec la mention « La société accepte ladite commande sans réserve et s’engage à se conformer à tous les termes de celle-ci ». Le vendeur a également adressé un « accusé de bon de commande » comportant les mêmes références que l’ordre de commande et indiquant « nous avons bien reçu votre commande ». Il en ressort donc que le vendeur avait nécessairement pris connaissance des conditions de l’acheteur puisqu’il y a fait référence et qu’il les a acceptées. Les conditions générales de la société A. faisaient donc partie du contrat et sont opposables au vendeur. Les conditions générales de vente jointes à l’offre initiale adressée par le vendeur ont donc été balayées par les conditions générales d’achat. Or, les conditions générales d’achat prévoient qu’en cas de retard dans la livraison, l’acheteur sera en droit d’obtenir des pénalités d’un montant de 0,5% du prix total de la commande, par jour calendaire commencé. Il ressort des éléments du débat que les retards de livraison sont imputables à la société R. et que ceux-ci ont affecté la finalisation du projet de la société A.

Application d’une clause pénale prévue dans les conditions générales d’achat CA Paris, 2 juillet 2015, RG n°13/22486 Ce qu’il faut retenir : Les conditions générales d’achat (CGA) peuvent primer sur les conditions générales de vente proposées par le vendeur, ce dernier ayant accepté les CGA. En conséquence, le vendeur peut être condamné, en cas de retard de livraison, au paiement d’une pénalité, conformément à ce que prévoit la clause pénale insérée dans les conditions générales d’achat. Pour approfondir : La société A. (acheteur) a passé commande de différents matériels auprès de la société R. (vendeur). Cette dernière n’ayant pas obtenu le règlement de l’intégralité des factures adressées à l’acheteur, elle a assigné la société A. Le Tribunal de commerce a débouté la société R. de sa demande, laquelle a donc interjeté appel de la décision rendue, sollicitant la

En conséquence, la clause pénale - dont les juges du fond rappellent la définition, « clause par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle donne lieu l’inexécution de l’obligation contractée ; son application est subordonnée à une inexécution imputable au débiteur » - telle que prévue dans le contrat, avait donc vocation à s’appliquer, celle-ci ne présentant pas un caractère disproportionné au regard des circonstances de l’espèce. La société R. qui invoquait le retard de paiement des factures, ne se prévalait quant à elle d’aucun rappel ou mise en demeure adressée à l’acheteur. En conséquence, la société R. a été déboutée de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société A. au règlement des factures impayées. A rapprocher : article 1134 du Code civil

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La transaction doit être exécutée de bonne foi CA Paris, 30 octobre 2015, RG n°14/23955

lorsqu’une telle action a été engagée, il ne faut pas perdre de vue que, comme tout contrat, la transaction doit être exécutée de bonne foi.

Ce qu’il faut retenir : A rapprocher : article 1134 du Code civil La transaction, comme tout contrat, doit être exécutée de bonne foi ce que nous rappelle la Cour d’appel à l’occasion de cet arrêt.

*****

Pour approfondir : Dans cette affaire, une grande maison de joaillerie avait assigné en contrefaçon de modèles et de droit d’auteur une société qui commercialisait des bagues constituant la contrefaçon de certains de ses modèles. Suite au jugement de première instance qui avait retenu la contrefaçon et condamné en conséquence la société poursuivie, et afin de mettre un terme au litige, les parties ont conclu un protocole transactionnel aux termes duquel, notamment, la société condamnée s’était engagée à cesser la commercialisation des bijoux litigieux.

RÉSILIATION DU CONTRAT Précisions sur l’application des procédures contractuelles de résiliation CA Rouen, 2 juillet 2015, RG n°13/06851 Ce qu’il faut retenir : La procédure contractuelle de résiliation n’a à être respectée que pour les cas de résiliation prévus à la clause de résiliation.

Postérieurement à la signature de ce protocole, la société Chaumet engagea une nouvelle action en raison de la commercialisation de modèles qui étaient la copie servile des modèles objets de la transaction. Elle faisait ainsi valoir l’exécution de mauvaise foi du protocole transactionnel aux termes duquel il était prévu de cesser la commercialisation des modèles litigieux. En défense, la partie adverse faisait valoir que la transaction ne portait que sur les modèles objets de la condamnation et non sur le modèle objet de la présente procédure dont les différences étaient mises en exergue pour justifier du fait qu’ils ne pouvaient pas relever de l’objet de la transaction.

Pour approfondir :

La Cour d’appel après un examen attentif des bagues en cause conclut que la commercialisation de bagues quasiment identiques à celles visées dans la transaction caractérise un manquement à la bonne foi exigée par l’article 1134 du Code civil dans l’exécution des conventions.

Cette résiliation a été validée en première instance et le prestataire a été condamné à payer les factures impayées.

Pour réparer le préjudice subi par la société Chaumet, la Cour d’appel prononce une condamnation au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts ; en revanche aucune demande en résolution du protocole transactionnel n’ayant été formée celui-ci est maintenu en dépit du manquement fautif. Si la transaction est un moyen largement utilisé pour prévenir un différend avant l’introduction d’une action en contrefaçon, ou mettre un terme au litige

Dans cette affaire, il était question d’un contrat-cadre de recyclage de palettes usagées, par lequel une centrale de la grande distribution s’engageait à vendre ses palettes usagées en exclusivité à un prestataire de recyclage de ces déchets. En contrepartie, le prestataire devait bien évidemment payer le prix convenu. Or, le prestataire n’a pas payé le prix convenu par palette, ce qui a conduit la centrale à résilier le contrat.

En réalité, le prestataire était en grandes difficultés financières qui ont conduit à sa liquidation judiciaire, ce qui explique pourquoi il n’a pas payé les factures sur près d’une année. Reprenant le dossier, le liquidateur a interjeté appel en contestant la résiliation. Dans son appel, le liquidateur judiciaire s’est notamment prévalu du défaut de formalisme pour la mise en œuvre de la résiliation du contrat. Le contrat prévoyait une clause de résiliation en cas de manquement si un différend intervenait sur les quantités de palettes reprises, et cette clause stipulait un formalisme spécifique. Le liquidateur soutenait

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donc que, par analogie, le contrat ne pouvait être résilié, en cas de non-paiement, selon le même formalisme. La Cour ne l’a pas suivi dans son argumentation. Selon la Cour d’appel de Rouen, à partir du moment où le litige ne constitue pas un différend sur les quantités de palettes reprises, la clause prévoyant un formalisme particulier pour la résiliation du contrat n’a pas vocation à s’appliquer. La clause de résiliation est donc d’interprétation stricte. Dès lors que la résiliation en cause n’entre pas dans un cas prévu par cette clause, la résiliation obéit au droit commun. Par conséquent, il est admis que la victime de l’inexécution puisse résilier le contrat sur le fondement de l’article 1184 du Code civil, le manquement de l’autre partie à son obligation essentielle justifiant la résiliation du contrat. A rapprocher : article 1184 du Code civil

manquement était de nature à affecter les relations de loyauté, de confiance et de partenariat entre les parties, être mis fin à l’ensemble des contrats liant les parties, et notamment au contrat de réparateur agréé. La société K. reprochant ainsi différents manquements à son partenaire, a notifié à la société B. la résiliation du contrat de concession mais également du contrat de réparateur agréé, avec effet immédiat et sans indemnité. La société B. a alors assigné la société K. pour rupture injustifiée des contrats. Les juges du fond ont rejeté la demande de la société B. et relevé que la résiliation du contrat de réparateur agréé était bien fondée dès lors qu’il était prévu dans le contrat de concession qu’en cas de manquement commis au titre de l’exécution du contrat de concession affectant les relations de confiance entre les parties, le contrat de réparateur agrée pouvait également être résilié. La société K. contestait le fait que la résiliation soit intervenue sans mise en demeure préalable.

Relation de confiance affectée : résiliation immédiate et sans indemnité des contrats Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-25.783 Ce qu’il faut retenir : Un manquement commis par l’une des parties au titre de l’exécution d’un contrat peut justifier la résiliation immédiate et sans préavis, par son partenaire, de tous les contrats liant les parties dès lors que le manquement commis est de nature à affecter les relations de loyauté, de confiance et de partenariat entre les parties. Pour approfondir :

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Dans la mesure où les manquements commis par la société B. au titre de l’exécution du contrat de concession entrainaient une dégradation de l’image de la marque de la société K. et affectaient en conséquence les relations nouées entre les parties, la société K. était donc en mesure, conformément aux termes du contrat de concession, de résilier l’ensemble des contrats la liant à la société B. sans qu’il soit nécessaire pour cette dernière d’adresser à son partenaire une mise en demeure préalable. A rapprocher : Cass. com., 11 septembre 2012, pourvoi n°11-23.067

La société K., importateur et distributeur de véhicules en France, et la société B. ont conclu un contrat de concession et un contrat de réparateur agrée ; les deux contrats étaient conclus pour une durée indéterminée. Dans le contrat de concession il était prévu : -

La Cour de cassation a confirmé la position adoptée par les juges du fond.

d’une part, que le contrat de concession pouvait être résilié par l’une des deux parties, de plein droit, sans préavis ni indemnité, dès lors que l’une des parties manquait de façon grave et répétée à ses obligations contractuelles ; d’autre part, que, même si le manquement commis ne concernait que l’exécution du contrat de concession, il pouvait toutefois, dès lors que le

Résiliation fautive du franchisé ne justifiant pas d’un manquement grave du franchiseur CA Nîmes, 7 mai 2015, RG n°14/02593 Ce qu’il faut retenir : Si la résiliation unilatérale d’un contrat de franchise à durée déterminée est possible, elle a lieu aux risques et périls de son auteur. Dans ce cadre, la notification de résiliation devra indiquer avec précision le manquement grave sur lequel il se fonde.

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Pour approfondir : Une société franchisée a rompu unilatéralement le contrat de franchise qu’elle avait conclu, avant le terme de celui-ci, en adressant au franchiseur un courrier invoquant de manière vague les inexécutions contractuelles qu’elle reprochait à ce dernier. La Cour d’appel de Nîmes a donc eu à se prononcer sur la légitimité de la résiliation unilatérale opérée par le franchisé. On rappellera que si un contrat à durée déterminée ne prévoit pas expressément de droit de résiliation avant son terme, la clause résolutoire est toujours sous entendue dans un tel contrat (article 1184 du Code civil) et son acquisition doit être demandée en justice. Cela étant, outre ce cas de la demande judiciaire de constatation de la rupture du contrat, la jurisprudence reconnait la possibilité pour une partie à un contrat de le rompre unilatéralement avant son terme sans passer par la « case » juge mais exige dans ce cas que la volonté de rompre le contrat soit justifiée par une violation grave ou répétée de ses clauses essentielles par l’autre partie. Ainsi, le cocontractant qui résilie unilatéralement son contrat avant son terme le fait « à ses risques et périls » jusqu’à un éventuel contrôle du juge. En l’espèce, la Cour d’appel de Nîmes s’est fondée sur le courrier de résiliation adressé par un franchisé à son franchiseur lui indiquant qu’il déposait l’enseigne. Or, si ce courrier invoquait bien des manquements du franchiseur, ceux-ci étaient trop vagues. Par ailleurs, ce courrier de résiliation faisait référence à de nombreux autres courriers de griefs envoyés par le franchisé mais un seulement (une mise en demeure) était versé au débat. La Cour a donc repris un par un les griefs présents dans la mise en demeure (visée dans le courrier de résiliation et versée au débat) pour décider qu’aucun ne justifiait la résiliation unilatérale du contrat. En effet, le premier de ces griefs portait sur le rétablissement d’un climat de confiance au moyen de la communication par écrit aux franchisés sur l’état et les problèmes du franchiseur. Les juges ont, sur ce point, raisonnablement décidé que la politique de communication sur les difficultés internes de la société franchiseur lui était propre, que le franchisé n’avait pas à s’immiscer dans le

fonctionnement du franchiseur et que le contrat ne faisait pas obligation au franchiseur de procéder ainsi (ni même de faire en sorte de garder ou entretenir la confiance des franchisés). Sur le deuxième grief de la mise en demeure, lequel reprochait au franchiseur de ne pas avoir tenu une de ses promesses faite lors d’un congrès (la mise en place d’un véritable back office), la Cour a jugé que cette notion de « véritable back office » était trop imprécise et que le contrat n’imposait pas au franchiseur de réaliser des améliorations techniques. Le franchisé reprochait en troisième lieu un manque d’assistance, grief une nouvelle fois écarté par les juges puisque le contrat ne prévoyait pas de fréquence de visites et que le franchisé n’avait jamais sollicité de visites supplémentaires à celles reçues. Ayant donc jugé que la résiliation unilatérale était fautive et que le franchisé était tenu de réparer le préjudice du franchiseur, la Cour l’a condamné au paiement du montant de la clause pénale prévue au contrat (jugée donc non manifestement excessive) qui équivaut à la moitié des redevances qui auraient été dues jusqu’au terme du contrat. A rapprocher : CA Paris, 10 février 2015, RG n°14/02110

Condamnation à la poursuite du contrat après application de mauvaise foi d’une clause résolutoire CA Paris, 10 février 2015, RG n°14/02110 Ce qu’il faut retenir : La mise en œuvre, de mauvaise foi, d’une clause de résiliation de plein droit constitue un trouble manifestement illicite que le juge des référés peut faire cesser en ordonnant la reprise et le maintien du contrat de franchise sous astreinte. Pour approfondir : Une société franchisée s’est plainte auprès de son franchiseur des défauts causés par le logiciel préconisé par lui en lui adressant une mise en demeure d’avoir à pallier aux problèmes rencontrés sous 15 jours. Bien avant l’expiration de ce délai de 15 jours, le franchiseur a répondu par trois fois au franchisé en lui proposant de mettre à sa disposition, dès le lendemain du premier courrier de réponse, un autre logiciel (tout en précisant que cela ne valait pas reconnaissance des griefs qui lui étaient opposés) et en lui proposant de

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convenir d’un rendez-vous pour l’installation du logiciel de remplacement. Pourtant, quelques jours après la réception des deux premiers courriers de réponse du franchiseur et la veille de la réception du dernier, le franchisé a écrit à la société tête de réseau pour lui faire savoir qu’il prenait acte de la reconnaissance par cette dernière de ses défaillances et que la solution proposée ne répondait pas à la mise en demeure originelle, ce dont il résultait la mise en jeu de la clause de résiliation de plein droit (prévue en cas de manquement de l’une des parties au contrat de franchise). C’est dans ce contexte que le franchiseur a saisi le juge des référés sur le fondement de l’article 873 du CPC afin de solliciter des mesures visant à prévenir le dommage imminent et à faire cesser le trouble manifestement illicite constitués par la résiliation unilatérale du contrat par le franchisé et la cessation de l’exploitation de son magasin sous les signes distinctifs du réseau du franchiseur.

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que le franchiseur avait expressément précisé que sa proposition de modification de logiciel ne valait pas reconnaissance des griefs invoqués par le franchisé ; et que simultanément à sa mise en demeure le franchisé avait cédé ses parts à un groupe concurrent de celui du franchiseur ce qui n’avait pu avoir lieu qu’après avoir préparé la cession de longue date.

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la Cour a considéré que le franchisé échouait à démontrer la mise en œuvre de bonne foi de la clause résolutoire et que la dépose de l’enseigne immédiatement après constituait bien un trouble manifestement illicite (mais pas un dommage imminent puisqu’au jour de l’assignation en référé le contrat avait déjà cessé d’être exécuté par le franchisé) qui autorise la juridiction des référés à prendre les mesures nécessaires, à savoir la poursuite forcée du contrat de franchise, dans l’attente d’une décision au fond.

Suite à l’ordonnance rendue en faveur du franchiseur (le Tribunal ayant ordonné la reprise et le maintien des relations contractuelles sous astreinte de 10.000€ par jour de retard et par manquement), le franchisé a fait appel.

A rapprocher : Cass. com., 29 janvier 2013, pourvois n°11-28.576 et 11-28.979

La Cour d’appel de Paris a d’abord rappelé la différence à observer entre un trouble manifestement illicite et un dommage imminent, deux fondements avancés indistinctement par le franchiseur : le trouble manifestement illicite est constitué par « toute perturbation résultant d’un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit » (règle légale ou contractuelle), et peut donc être soulevé une fois que la perturbation est effective, alors que le dommage imminent est un « dommage qui n’est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer ».

Résiliation anticipée d’un contrat avant le terme et sans préavis et paiement des mensualités Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-22.573 Ce qu’il faut retenir : La résiliation d’un contrat de prestation de services par l’une des parties avant le terme, sans préavis, du fait de la fermeture de son établissement ne permet pas, de ce seul fait, de justifier le non-paiement des mensualités dues jusqu’au terme du contrat. Pour approfondir :

La Cour a ensuite souligné que si la clause résolutoire insérée dans le contrat dispense la partie qui s’en prévaut de faire constater judiciairement la résiliation du contrat, elle « ne saurait priver l’autre partie d’un recours judiciaire si elle entend contester le bien-fondé de sa mise en œuvre ».

La société S. a conclu un contrat de prestation de nettoyage avec la société M. pour une durée d’un an, renouvelable par tacite reconduction pour une durée d’un an, sauf dénonciation par l’une des parties par lettre recommandée trois mois au moins avant l’expiration de chaque terme annuel.

Aussi, après avoir constaté :

La société S. a résilié le contrat le 3 juin 2010, sans préavis en raison de la fermeture totale et définitive de son établissement.

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qu’aucun grief n’avait été émis par le franchisé quant au logiciel avant sa mise en demeure ; que le franchiseur avait répondu très rapidement au franchisé suite à la signification de la mise en demeure ;

La société M. considérant que la résiliation du contrat était intervenue en méconnaissance des stipulations contractuelles a assigné la société S. afin d’obtenir le

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paiement des mensualités dues jusqu’à l’échéance annuelle. Les juges du fond ont rejeté la demande de la société M. aux motifs que, du fait de la fermeture du site de la société S., l’exécution de sa prestation contractuelle par cette dernière était devenue impossible et cette impossibilité devait nécessairement entrainer la caducité du contrat. Dans la mesure où le contrat ne prévoyait, dans une telle hypothèse, le versement d’aucune pénalité et que l’exécution du préavis supposait qu’il puisse être exécuté - ce qui n’était pas le cas - il résultait qu’aucune rémunération ne devait être versée par la société S. à la société M. après la fermeture du site de la société S. La Cour de cassation casse la décision rendue par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 6 juin 2013 au visa des articles 1134 et 1148 du Code civil, relevant le fait que les juges du fond n’avaient pas recherché si la fermeture du site de la société S. était imputable à un évènement de force majeure. L’article 1148 du Code civil prévoit en effet que : « Il n'y a lieu à aucun dommages et intérêts lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ». Selon la Haute Cour, il convenait donc, avant de considérer que la société S. n’était pas tenue au paiement des mensualités, de vérifier si la fermeture du site qui empêchait la poursuite de l’exécution du contrat conclu avec la société M. était due à un événement de force majeure. A rapprocher : article 1148 du Code civil

Extinction du droit à commission de l’agent commercial Cass. com., 31 mars 2015, pourvois n°14-10.346 et 1410.654

Pour approfondir : L’agent commercial est défini comme le mandataire (personne physique ou morale) qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et éventuellement de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autre agents commerciaux (art. L.134-1 C. com.). En contrepartie de sa mission, l’agent reçoit une commission, dont le montant varie en fonction du nombre ou de la valeur des affaires conclues. L’article L.134-10 du Code de commerce prévoit que : « Le droit à la commission ne peut s’éteindre que s’il est établi que le contrat entre le tiers et le mandant ne sera pas exécuté et si l’inexécution n’est pas due à des circonstances imputables au mandant. » En l’espèce, la société F. (venant aux droits de la société T.) et la société L. ont conclu un contrat d’agent commercial. La société L. (l’agent) assigne son partenaire afin d’obtenir la réparation de son préjudice et le paiement des commissions restant dues. La Cour d’appel condamne le mandant à payer l’agent au titre des commissions lui étant dues. Le mandant forme un pourvoi et avance le fait que les parties avaient convenu des modes preuve permettant au mandant d’établir l’extinction du droit à commission de l’agent et, qu’en conséquence, la perte du droit à commission résulterait de la production de fiches informatiques et des indications qui y seront portées par le mandant. La Cour de cassation rejette le pourvoi et relève que les éléments rapportés par le mandant sont insuffisants, ce dernier ne rapportant pas la preuve de l’extinction de son obligation de payer. La Haute Cour rejette les éléments de preuve qui étaient produits et ne dépendaient en réalité que du seul mandant, protégeant ainsi l’agent commercial. A rapprocher : Article L.134-10 du Code de commerce

Ce qu’il faut retenir : La Cour de cassation réaffirme le principe selon lequel le droit à commission de l’agent commercial ne peut s’éteindre que s’il est établi que le contrat conclu entre le tiers et le mandant ne sera pas exécuté et si l’inexécution n’est pas due à des circonstances imputables au mandant.

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OBLIGATIONS POST-CONTRACTUELLES Contrat de réservation contenant une clause de nonconcurrence post-contractuelle CA Limoges, 5 novembre 2015, RG n°13/01241 Ce qu’il faut retenir : Les règles concernant la validité d’une clause de nonconcurrence post-contractuelle, insérée au cas présent dans un contrat de réservation, ne touchent pas à l’ordre public, de sorte que le juge n’est pas tenu de relever d’office le moyen tiré de l’exception de nullité de la clause de non-concurrence poster contractuelle (1 aspect de la décision commentée). Lorsque les termes de la clause de non-concurrence post-contractuelle le permettent, celle-ci trouve à s’appliquer, y compris lorsque le franchiseur, par son comportement fautif, est à l’origine de la cessation nd du contrat (2 aspect de la décision commentée). Pour approfondir : Aux termes d’un contrat de réservation conclu le 12 octobre 2011, un franchiseur consent à un candidat franchisé une option sur un territoire défini pour l'implantation d'un point de vente pendant une durée d'un an à compter de la date de signature de ce contrat de réservation. Ce contrat de réservation comprend une clause de non-concurrence post-contractuelle, selon laquelle il est stipulé que dans l'hypothèse où l'option ne serait pas levée par le candidat franchisé dans le délai contractuel d’un an, celui-ci s'interdirait alors d'exploiter, directement ou indirectement, et de quelque façon que ce soit, toute activité identique (ou similaire) sur l'ensemble du territoire français, pendant une durée de deux ans à compter de la cessation du contrat de réservation. L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Limoges attire notre attention sur deux points, l’un concernant le droit processuel, l’autre le droit substantiel. En premier lieu, fait marquant, le candidat franchisé ne contestait pas la validité même de cette clause, pas plus que celle du contrat dans lequel elle était insérée ; l’arrêt commenté en tire pour conséquence que la clause de non-concurrence post-contractuelle doit recevoir application. La validité de cette clause de non-concurrence postcontractuelle pouvait pourtant prêter à discussion

dans la mesure où elle semblait de prime abord disproportionnée, à la fois au regard du critère de limitation géographique exigé en jurisprudence (en l’espèce, l’interdiction de non-concurrence visait le territoire national, alors que), mais également au regard de sa limitation temporelle (en l’espèce, l’interdiction de non-concurrence était de deux ans après la cessation du contrat de réservation, alors que la jurisprudence tend désormais à exiger un délai d’un an seulement). En dépit du fait que cette clause paraissait donc « doublement » disproportionnée, les juges du fond retiennent sobrement : « que cette clause, dont la validité n'est pas contestée pas plus que celle du contrat dans lequel elle est insérée, doit recevoir application ». L’intérêt de l’arrêt commenté se déplace alors sur le terrain du droit processuel ; autrement dit, les juges pouvaient-ils (ou devaient-ils) relever d’office la question – qui leur tendait les bras – de savoir si cette clause était valable ou non. Ici, les juges du fond n’évoquent pas même ce point. En définitive, le juge n’est pas tenu de relever d’office un moyen de droit non expressément invoqué par les parties, hormis les cas limitatifs où la loi lui en fait expressément l’obligation, ainsi que la Cour de cassation l’a très clairement indiqué il y a quelques années, par sa plus haute formation (C. Cass., Ass. Plén., 21 déc. 2007, n°06-11.343) ; cet arrêt de 2007, arrêt de référence en la matière, se situe dans le sillage d’une évolution marquée par le décret n°981231 du 28 décembre 1998 modifiant le Code de l'organisation judiciaire et le nouveau Code de procédure civile et un précédent arrêt rendu par l’assemblée plénière le 7 juillet 2006 (C. Cass., Ass. Plén., 7 juillet 2006 - Bull., A. plén, n° 8) qui, redéfinissant quelque peu le rôle des parties et du juge dans le procès civil, reposent sur l’idée que si le juge doit jouer un rôle actif dans le déroulement du procès, il n’a pas, hors cas particulier, à remplir tous les rôles, et qu’il revient alors aux parties, et à elles seules, d’invoquer tous les moyens susceptibles de fonder leurs prétentions. Ainsi, concrètement, force est de constater au plan procédural que : par principe, le juge dispose, tout au plus, de la simple « faculté » de relever un moyen d’office et, dans l’affirmative, doit alors respecter le principe du contradictoire, en invitant les parties à présenter leurs observations (CPC, art. 16, al. 3 : « Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ») ;

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sous réserve de l’application de deux types d’exception, à savoir :  celle où un texte spécifique envisage expressément l’obligation ou l’interdiction pour le juge de relever d’office certains moyens de droit, que ces textes spécifiques soient d’ordre er procédural (V. par ex., CPC, art. 120, al. 1 : « Les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public » ; er CPC, art. 125, al. 1 : « Les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours ») ou de droit substantiel (v. par ex., l’article L.141-4 du Code de la consommation, qui énonce que « le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application »).  celle – plus insidieuse – où la jurisprudence identifie l’existence d’une règle touchant ème véritablement à l’ordre public (Cass. civ. 2 , 20 janv. 2000, pourvoi n°98-13.871 : à propos de l’application de la loi du 5 janvier 1985 alors que le demandeur fondait son action sur l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil) ; à ne pas confondre avec l’ordre public de simple « protection » car, de principe constant, la Cour de cassation interdit au juge du fond de relever d’office une méconnaissance de certains textes relevant d’un « ordre public de protection », que seule peut opposer la personne que ces dispositions ont pour objet de protéger (v. par ème ex., Cass. civ. 2 , 4 déc. 2003, Bull., II, n° 367, p. ère 302, pourvoi n°02-04.162 ; Cas. civ. 1 , 15 fév. 2000, Bull., I, n° 49, p. 34, pourvoi n°98-12.713), soit le justiciable lui-même. Implicitement mais nécessairement, l’arrêt commenté considère-t-il que les règles relatives à la validité de clauses de non-concurrence ne touchent pas à l’ordre public et que, partant, les juges du fond avaient tout au plus la simple « faculté », non exercée au cas présent, de relever d’office le moyen tiré de l’exception de nullité de la clause de non-concurrence post-contractuelle. En second lieu, le candidat franchisé, faute d’avoir attaqué la validité de cette clause de non-concurrence post-contractuelle, en discutait néanmoins les conditions de mise en œuvre, au motif que, selon lui,

le défaut de levée de l'option prévue dans le contrat de réservation était imputable aux seules carences du franchiseur dans l'exécution de ses obligations ; autrement dit, selon le candidat franchisé, le franchiseur ne pouvait se prévaloir de cette clause de non-concurrence post-contractuelle dès lors que, par son comportement, il avait lui-même provoqué la cessation du contrat de réservation emportant application de cette clause. L’arrêt commenté concède que le franchiseur ait commis une faute mais écarte l’argumentation du candidat franchisé en ces termes : « Attendu que, même si le défaut de levée de l'option prévue dans le contrat de réservation apparaît imputable aux carences de la société (franchiseur) dans l'exécution de ses obligations (…), la société (franchisée) ne pouvait, sans méconnaître l'interdiction précitée, ouvrir en octobre 2012 son (activité) sous (une autre) enseigne (…) ; que, la violation de cette interdiction s'étant prolongée sur une période d'une année, le préjudice en résultant pour la société (franchiseur) sera réparé par l'allocation de dommages-intérêts (…) ». La décision commentée retient donc qu’une telle clause, du moins celle dont les termes exacts étaient soumis à son appréciation, s’applique, y compris lorsque le franchiseur, par son comportement fautif, est à l’origine de la cessation du contrat. En définitive, tout dépend de la manière dont la clause de non-concurrence est rédigée (v. sur ce point, F.-L. Simon, Théorie et Pratique du droit de la franchise, éd. Joly, 2009, spéc. §. 554). Le contrat peut parfaitement prévoir que la clause ne sera applicable que pour telle ou telle cause d’extinction des relations contractuelles. Par exemple, il est possible de prévoir que la clause ne sera pas applicable si le contrat a été résilié aux torts exclusifs du franchiseur (V. pour un ex. de clause en ce sens, CA Paris, 21 sept. 2005, Juris-Data n°2005293492 ; pour une clause limitant l’interdiction de concurrence au cas de résiliation aux torts du franchisé, CA Lyon, 17 févr. 2005, RG n°03/01960, inédit ; v. également, pour une décision estimant que les fautes du franchiseur libèrent le franchisé de son obligation de non-concurrence post-contractuelle, Trib. com. Paris, 9 août 1995, Juris-Data n°1995047408). Le contrat peut au contraire retenir que la clause sera applicable quelle que soit l’origine de la cessation des relations contractuelles (V. pour une clause rédigée en termes généraux, CA Bordeaux, 23 mars 1989, JurisData n°1989-041727) : dans ce cas, le franchisé sera

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débiteur de l’obligation de non-concurrence en dépit du fait que la résiliation est due aux manquements contractuels du franchiseur (CA Aix-en-Provence, 24 sept. 1998, Juris-Data n°1998-046926). A rapprocher : Sur le premier aspect de la décision commentée (C. Cass., Ass. Plén., 21 déc. 2007, n°0611.343) ; Sur le second aspect de la décision commentée (CA Aix-en-Provence, 24 sept. 1998, Juris-Data n°1998-046926)

Clause de non-concurrence : le partenaire doit connaître l'étendue de ses droits Cass. soc., 2 décembre 2015, pourvoi n°14-19.029, Juris-Data n°2015-027022, Publié au Bulletin Ce qu’il faut retenir : Est illicite l’obligation de non-concurrence, réservant à son créancier la faculté de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, aux obligations qu'elle fait peser sur le débiteur de l’obligation.

contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives (v. par ex., Cass. soc. 18 sept. 2002, n°9946.136, Publié au Bulletin). En pratique, la question de savoir si est licite (ou non) la clause de non-concurrence post-contractuelle réservant à la tête de réseau la faculté de renoncer à tout moment aux obligations qu'elle faisait peser sur le distributeur ne se pose pas véritablement puisque, en droit de la distribution, la validité de ces clauses n’est pas subordonnée à l’existence d’une contrepartie financière et que cette faculté n’a a priori pas de raison d’être ; les clauses en « circulation » n’envisagent qu’exceptionnellement cette hypothèse. Pour le cas où viendrait l’idée à telle ou telle tête de réseau d’inclure cette faculté dans ses clauses de nonconcurrence post-contractuelle, comme pour donner à ses cocontractants le sentiment d’une plus grande souplesse, mieux vaudrait alors sagement se souvenir de l’arrêt qui vient d’être rendu. A rapprocher : Tour d’horizon sur les clauses de nonconcurrence et de non-affiliation post-contractuelles

Pour approfondir : Dans un contentieux classique de droit du travail, un employeur faisait grief à une décision d’avoir déclaré illicite la clause de non-concurrence, au motif qu’elle réservait à l'employeur la faculté de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, aux obligations qu'elle faisait peser sur le salarié. La Cour de cassation vient de rejeter le pourvoi formé contre cette décision par un arrêt, publié au Bulletin (Cass. soc., 2 déc. 2015, n°14-19.029), par lequel elle pose : « Mais attendu qu'ayant relevé que la clause réservait à l'employeur la faculté de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, aux obligations qu'elle faisait peser sur le salarié, la cour d'appel qui a retenu que ce dernier avait été laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler, en a exactement déduit que cette clause devait être annulée en son ensemble; que le moyen n'est pas fondé ». Voilà pour le droit du travail, qui consacre la règle selon laquelle la clause de non-concurrence est licite si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié, outre – différence notable avec le droit de la distribution –, qu’elle doit comporter l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une

Interdiction d’utiliser les couleurs liées aux signes distinctifs d’un réseau : engagement perpétuel ? CA Colmar, 3 juin 2015, RG n°14/03031 Ce qu’il faut retenir : La clause contractuelle imposant à l’ancien membre du réseau de ne plus utiliser les couleurs distinctives de l’enseigne produit ses effets au jour de la cessation du contrat ; il s’agit d’une obligation ponctuelle et non-perpétuelle. Pour approfondir : Après la cessation de son contrat de franchise « Eléphant bleu », un ancien franchisé avait l’obligation, prévue audit contrat, de ne plus utiliser les signes distinctifs du réseau et de ce fait de repeindre notamment sa station de lavage automobile avec d’autres couleurs que le bleu et blanc (dont on sait qu’elles rappellent l’enseigne de lavage). L’ancien franchisé ne respectant pas son engagement postcontractuel, le franchiseur a été contraint d’engager une première action aux fins de forcer le fautif à modifier l’aspect extérieur de la façade de sa station de lavage, puis, une seconde action (notre affaire) dans l’objectif d’obtenir réparation du préjudice subi par l’utilisation des signes distinctifs pendant la période post-contractuelle.

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Les premiers juges ont rejeté les demandes indemnitaires du franchiseur. Pour autant, la Cour d’appel de Colmar a infirmé le premier jugement et condamné l’ancien franchisé au paiement de la somme de 50.000 euros. De son côté, l’ancien franchisé soutenait que l’interdiction qui lui était faite de ne plus utiliser les couleurs bleu et blanche après la cessation de son contrat devait être analysée comme constituant une obligation perpétuelle, et en cela une obligation prohibée. Comme exemple d’engagement perpétuel prohibé on peut citer le cas du peintre qui donne mandat illimité à un marchand pour vendre ses ère tableaux (Cass. 1 civ., 5 mars 1968). La Cour n’a pas suivi cette argumentation en retenant au contraire que l’obligation d’enlever les signes distinctifs d’un réseau quitté constitue une obligation ponctuelle découlant de la rupture du contrat de franchise. La distinction est ténue mais finalement évidente : la clause en cause stipulait que l’ancien membre du réseau avait l’obligation de repeindre, sous 6 mois à compter de la cessation du contrat, son centre dans d’autres couleurs que le bleu et le blanc propres à l’enseigne ; l’ancien franchisé n’avait à exécuter son obligation qu’une seule et unique fois à la différence du peintre qui devait ad vitam aeternam solliciter le même marchand d’art à chaque opération de vente de ses œuvres. Outre cette décision logique des juges d’appel, il faut retenir que la rédaction des clauses encadrant la phase post-contractuelle, dont les effets ne sont pas limités dans le temps, doit être réalisée avec attention et soin de façon à éviter une contestation fondée sur l’interdiction de perpétuité. A rapprocher : CA Paris, 6 novembre 2014, RG n°14/14062

Sortie de réseau et cessation d’usage des signes distinctifs CA Douai, 8 avril 2015, RG n°14/02671 Ce qu’il faut retenir : L’appartenance à un réseau de distribution permet à ses membres de bénéficier de l’usage des signes distinctifs en particulier de la marque pendant toute la durée du contrat. Dès sa sortie, l’ancien membre doit cesser tout usage de la marque à défaut de quoi il commet des actes de contrefaçon ainsi que l’illustre l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai le 8 avril 2015.

Pour approfondir : Cette affaire opposait la société exploitant un réseau sous forme de coopérative intervenant dans le secteur de la vente et de l’installation de stores à l’un de ses ancien adhérent lequel avait poursuivi l’usage de la marque du réseau après sa sortie. Afin de faire cesser cet usage et obtenir réparation de son préjudice, la tête de réseau engagea une action en contrefaçon accueillie par la Cour d’appel dans l’arrêt commenté. La Cour d’appel reconnaît en premier lieu l’existence d’actes de contrefaçon du fait du maintien de la marque sur les locaux et le véhicule commercial postérieurement à la sortie du réseau de la société poursuivie. Au surplus, les difficultés techniques invoquées relativement aux difficultés pour enlever la marque sur la façade de l’immeuble et la voiture et pour faire modifier le site sont inopérantes. La contrefaçon est donc caractérisée. Pour déterminer les modalités de la réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon, la Cour d’appel rappelant les dispositions de l’article L.716-14 du Code de la propriété intellectuelle, va prendre en considération le fait que la société poursuivie a modifié ses documents commerciaux dans les semaines suivants sa sortie du réseau puis, du fait de son déménagement a cessé ses actes de contrefaçon à une date déterminée. Elle confirme le montant de l’indemnisation allouée en première instance (2000 euros). En revanche, la Cour va considérer que l’impossibilité de mettre en place un nouvel adhérent sur le secteur de l’ancien membre du fait de la poursuite de l’usage de la marque ne constitue pas, au cas d’espèce, un préjudice réparable dans la mesure où le lien causal avec les faits de contrefaçon n’est pas justifié. L’utilisation de la marque d’autrui, au-delà de la durée de l’autorisation conférée, est susceptible de constituer une contrefaçon notamment lorsqu’il s’agit de l’ancien membre d’un réseau qui, en dépit de sa sortie, persiste à utiliser les signes distinctifs du réseau dont il n’est plus membre. A rapprocher : Article L.713-1 du Code de la propriété intellectuelle

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appartenaient pas de porter, refuser l’application de l’article 1147 du Code civil en estimant que l’omission du distributeur était justifiée.

CONTRAT ET INDEMNISATION Le juge ne peut refuser l’indemnisation pour un manquement avéré à une obligation de résultat Cass. com., 23 juin 2015, pourvoi n°14-10.133 Ce qu’il faut retenir : Dès lors que le contrat de distribution prévoit expressément que le distributeur est tenu à une obligation de résultat, le juge viole l’article 1147 du Code civil en retenant que l’obligation en cause n’a pas été respectée par le distributeur et en considérant malgré cela que celui-ci n’est pas tenu de réparer ce manquement.

On rappellera que les seuls cas d’exonération de responsabilité contractuelle dans cette situation sont la force majeure, le fait d’un tiers et la faute du créancier de l’obligation. A aucun moment un juge ne peut, de son propre chef, outre ces trois circonstances, reconnaître un manquement à une obligation de résultat et refuser l’indemnisation du créancier en s’appuyant sur le manque de griefs de ce dernier vis-à-vis de son débiteur défaillant ou en émettant des suppositions quant à la justification de cette omission. A rapprocher : article 1147 du Code civil

Pour approfondir : Dans le contrat de distribution qu’elle avait conclu, la société distributrice s’était engagée à intégrer des produits identifiés dans son catalogue en ligne et dans son catalogue sur papier ainsi qu’à mettre ces produits en avant sur son site internet.

Violation des critères de qualité du site internet du distributeur : préjudice non prouvé CA Lyon, 7 mai 2015, RG n°14/01041 Ce qu’il faut retenir :

Reprochant à son distributeur de n’avoir pas respecté cette obligation, le fournisseur l’a assigné en résiliation du contrat et en paiement de dommages et intérêts. La Cour d’appel a pourtant rejeté ses demandes aux motifs que : -

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le distributeur avait adressé un mail à plus de 8.000 contacts pour promouvoir ces produits, sans que ce mail n’ait reçu « l’enthousiasme escompté » par les destinataires ; qu’il avait également assuré la promotion des produits aux salons des maires ; qu’il a continué, malgré le manque d’enthousiasme des clients et prospects, a demandé à ses commerciaux de tenter de vendre ces produits ; que le seul grief fait par le fournisseur au distributeur relevait d’une unique lettre qui n’a été suivie d’autres relances ; que le peu d’intérêt de la clientèle relativement à ces produits s’était révélé dès l’origine et justifiait sans doute l’omission reprochée.

Logiquement, la Haute Cour n’a pu que casser l’arrêt d’appel. En effet, les juges du fond, alors qu’ils avaient relevé expressément le manquement contractuel du distributeur quant à l’obligation de parution des produits sur le catalogue et sur le site internet ne pouvaient, par le biais de considérations qui ne leur

La violation de l’obligation du distributeur de faire valider son site Internet avant sa mise en ligne n’entraîne la responsabilité de ce dernier que si la tête de réseau prouve son préjudice. Pour approfondir : Si les distributeurs ont le droit de commercialiser leurs produits via Internet, les têtes de réseau encadrent ce droit de manière à protéger l’image du réseau, ce qui se manifeste en pratique, d’une part, par la communication d’une charte graphique relative au site Internet et, d’autre part, par le contrôle du respect de cette charte avant la mise en ligne du site du distributeur. Le contrat de distribution sélective signé entre les parties à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté prévoyait que le distributeur qui souhaitait ouvrir son site internet marchand devait demander à la tête de réseau les conditions devant être remplies pour ce type de vente puis obtenir l’accord préalable et écrit de la tête de réseau sur le site Internet. Le distributeur avait néanmoins commercialisé les produits objets du réseau de distribution sélective sur son site Internet sans avoir sollicité au préalable l’autorisation de la tête de réseau. Cette dernière demandait donc à la Cour d’appel de Lyon de

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condamner le distributeur à lui payer des dommagesintérêts. Si la faute du distributeur était ainsi incontestablement établie, la demande de dommagesintérêts a été écartée par la Cour, faute pour la tête de réseau d’avoir prouvé son préjudice. Pour constater ce défaut de preuve, la Cour a relevé que la tête de réseau n’avait versé aux débats ni les critères de vente en ligne qui auraient dû être sollicités et respectés par le distributeur, ni d’exemples de sites Internet autorisés pour d’autres distributeurs, mettant ainsi la Cour dans l’impossibilité d’apprécier l’existence, la nature et l’importance des différences ayant pu exister entre le site incriminé et les critères établis par la tête de réseau. A rapprocher : CA Paris, 13 mars 2014, RG n°2013/00714

Rupture fautive du contrat de franchise et préjudice par ricochet CA Toulouse, 21 janvier 2015, RG n°12/03975 Ce qu’il faut retenir : La société chargée de l’approvisionnement des franchisés est fondée à demander la réparation du préjudice par ricochet résultant du manquement du franchisé à l’obligation d’approvisionnement minimum, en raison de la rupture fautive par lui du contrat de franchise. Pour approfondir : Dans cette affaire, la Cour d’appel de Toulouse avait à se prononcer sur le préjudice prétendument subi par une société, qui, au sein du réseau, approvisionnait les franchisés, du fait de la résiliation anticipée du contrat de franchise par un franchisé. Le 24 juin 2002, un franchisé a conclu un contrat de franchise avec la société X…, filiale d’un groupe de distribution alimentaire, ayant pour objet l’exploitation sous enseigne d’un fonds de commerce de détail. En parallèle, deux autres contrats ont été conclus, le 8 décembre 2004 : -

un contrat d'approvisionnement entre la société Y…, une autre filiale du groupe, et une société coopérative de commerçants détaillants du secteur

de l'alimentation de proximité, afin que cette société approvisionne les franchisés ; un contrat de partenariat entre la société franchiseur X… et la société coopérative de commerçants détaillants aux termes duquel le franchiseur déléguait à la société coopérative certaines de ses missions de franchiseur.

Le 30 septembre 2005, les sociétés X… et Y… ont rompu leurs relations contractuelles avec la société coopérative de commerçants et ont été reconnues responsables de la rupture des relations contractuelles par deux instances arbitrales. Le 3 novembre 2005, le franchisé met fin par anticipation au contrat de franchise le liant à la société X... La société Y… a alors assigné le franchisé, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, pour obtenir l'indemnisation de sa perte de marge sur la durée restant à courir du contrat de franchise. La société Y… estime avoir subi un préjudice par ricochet du fait de la rupture du contrat de franchise, résultant du fait qu'elle n'a plus assuré l'approvisionnement des magasins jusqu'à l'expiration du contrat de franchise, notamment au titre de l'obligation relative à l'assortiment minimum. En première instance, les juges du fond ont débouté la société Y… de l’ensemble de ses demandes, jugeant que la rupture du contrat de franchise était très directement causée par la décision fautive prise par la société Y… de rompre son contrat avec la société coopérative de commerçants détaillants. La Cour d’appel infirme la décision de première instance et retient la responsabilité délictuelle du franchisé. A l’appui de sa décision, la Cour commence par rappeler qu’en l’absence de tout lien contractuel entre la société Y… et le franchisé, en dépit de l’obligation d’approvisionnement prévue au contrat de franchise, la responsabilité de ce dernier doit être appréciée sur le fondement de la responsabilité délictuelle : le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. La Cour énonce ensuite que le franchisé était tenu à une obligation d’assortiment minimum à l’égard du franchiseur en exécution du contrat de franchise, indépendamment des manquements commis par la société Y… à l’égard de la coopérative et de la rupture du contrat d’approvisionnement intervenue le 30 septembre 2005. La société X… n’ayant que la qualité de franchiseur et non celle de fournisseur, elle ne peut demander la réparation du préjudice consistant en la

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perte de marges susceptibles d’être réalisées en exécution du contrat d’approvisionnement. Dès lors, la Cour conclut que la société Y… est fondée à se prévaloir du dommage résultant pour elle du manquement du franchisé à l’obligation d’approvisionnement minimum, manquement résultant de la rupture fautive par lui du contrat de franchise. Le montant des dommages et intérêts octroyés par la Cour d’appel en réparation du préjudice subi est égal à un certain pourcentage des achats qui auraient dû être réalisé par le franchisé sur la période du contrat de franchise restant à courir, en application de l’obligation d’assortiment minimum prévue par l’article 2-4 du contrat de franchise. A rapprocher : Cass. com., 9 octobre 2012, pourvoi n°11-25.515

Responsabilité du concédant par suite d’une faute de son concessionnaire auprès d’un tiers Cass. com. 6 octobre 2015, pourvoi n°13-28.212 Ce qu’il faut retenir : Une tête de réseau (ici un concédant) peut être condamnée in solidum avec un distributeur (ici un concessionnaire) à réparer le préjudice que ce dernier a causé à un tiers par suite de la rupture fautive du contrat les unissant dès lors que, par le pouvoir que la tête de réseau possède sur ce distributeur, elle est à l’origine de cette situation.

à cette résiliation, le concessionnaire l’avait assignée en résiliation du contrat à ses torts exclusifs. La société S décidait d’appeler la tête de réseau en intervention forcée. Statuant sur renvoi après cassation (Cass. com., 15 mai 2012, n°11-17.431), les juges du fond condamnaient la société A, tête de réseau, in solidum avec la société concessionnaire, à réparer le préjudice résultant de la rupture du contrat d’agent relais et à garantir la société concessionnaire de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre au bénéfice de la société S.  Par son appréciation souveraine, la cour d’appel constate, d’une part, que l’organisation du système mis en place par la tête de réseau était telle en l’espèce que l’agent relais n’avait pas véritablement le choix de son concessionnaire de rattachement dès lors que les quotas l’obligeaient de fait à travailler avec un concessionnaire de proximité déterminé, ayant luimême l’obligation de réaliser un montant de revente sur la zone géographique attribuée par le constructeur, l’obligeant ainsi à imposer des quotas à ses agents relais et, d’autre part, que cette organisation favorisait les pressions sur les agents par le concessionnaire de rattachement, ceux-ci ne pouvant pas, de fait, nouer de relations contractuelles avec un autre concessionnaire agréé, à peine d’exclusion du réseau. La Cour de cassation retient que « de ces constatations et appréciations, la cour d’appel de Paris a pu déduire que le constructeur, qui était à l’origine des conditions de mise en œuvre du contrat litigieux, devait supporter la charge définitive des condamnations in solidum prononcées contre lui et la société (concessionnaire) ».

Pour approfondir :  En l’espèce, par acte du 30 septembre 2003, un concessionnaire automobile sous la marque A avait conclu avec un agent, la société S, un contrat dit « d’agent relais » dont l’objet était de confier à cette dernière la réparation et l’entretien des véhicules sous marque A, la commercialisation des pièces de rechange fournies et distribuées par la société A, achetées notamment auprès de son concessionnaire, ainsi que la réalisation de diverses prestations. La société S ayant refusé, au mois d’avril 2004, de signer un avenant fixant les objectifs de commercialisation de pièces de rechange pour l’année 2004, puis ayant cessé progressivement tout approvisionnement auprès de la société concessionnaire, cette dernière avait résilié le contrat signé avec son agent et avait invité ce dernier à procéder à la dépose de l’enseigne A dont il disposait jusqu’alors. La société S s’opposant

A rapprocher : Cass. com., 15 mai 2012, pourvoi n°1117.431

Indemnité de l’agent commercial et rupture des négociations pour le renouvellement du contrat CA Paris, 17 décembre 2015, RG n°14/05560 Ce qu’il faut retenir : L’indemnité due à l’agent commercial n’est pas due en cas de cessation du contrat mais de ses relations avec le mandant qui par perdurent pendant les négociations convenues en vue du renouvellement du contrat ; la rupture de ces négociations du fait de l’agent l’empêche d’obtenir son indemnité.

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Pour approfondir : Deux sociétés ont conclu un contrat d’agent commercial puis un second par lesquels le mandant confiait à l’agent commercial la distribution d’ouvrages édités par le mandant. A l’arrivée du terme de ces deux contrats distincts, mandant et agent ont souhaité négocier la signature d’un nouveau contrat censé remplacer les deux premiers. Les pourparlers n’ayant pas abouti, l’agent a sollicité du mandant le paiement de l’indemnité due en cas de rupture du contrat d’agent commercial, estimant que le nonrenouvellement du contrat était du fait du mandant, puis l’a assigné à cette fin. Le mandant invoquait quant à lui le fait que c’était l’agent qui avait brutalement mis fin aux pourparlers en cours qui avaient pour objet le renouvellement des contrats. Le Tribunal a refusé de faire droit à la demande d’indemnisation de l’agent. On rappellera pour mémoire que les articles L134-12 et L134-13 du Code de commerce prévoient qu’ « en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi », cette réparation n’étant pas due, notamment, dans le cas où « la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial » ou encore lorsque « la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ». Pour rejeter la demande de l’agent et confirmer en cela le jugement de première instance, la Cour retient que l’article L134-12 vise une indemnité due en cas de cessation des relations avec l’agent et non en cas de cessation du contrat. Par conséquent – et logiquement –, le renouvellement du contrat après son terme exclu le droit à indemnité, même si ce renouvellement a lieu sur des bases nouvelles issues de négociations. Or, en l’espèce, les négociations avaient été entamées en cours d’exécution du préavis des deux contrats initiaux, des échanges entre les parties montrent la bonne foi du mandant dans les pourparlers (notamment car certaines des bases nouvelles du dernier projet de contrat proposé par le mandant étaient plus favorables à l’agent que les conditions contenues dans les contrats s’achevant) et l’agent ne versait au débat aucun écrit établissant des contestations de sa part quant au dernier projet de contrat proposé par le mandant. De cela, la Cour conclut que le mandant a proposé, « dans des conditions loyales », le renouvellement des contrats par la conclusion d’ « un nouveau contrat qui ne remettait pas en cause les intérêts économiques de

[l’agent] » et que l’agent, après en avoir accepté et mis en œuvre certaines modalités, a décidé de refuser ce renouvellement. A rapprocher : Cass. com., 4 février 2014, pourvoi n°12-14.466

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RUPTURE DES RELATIONS COMMERCIALES ÉTABLIES La notification de la rupture doit être dépourvue de toute équivoque CA Paris, 20 mai 2015, RG n°13/03888 Ce qu’il faut retenir : L’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce sanctionne la rupture brutale, même partielle, des relations commerciales établies. Parmi les conditions à remplir pour justifier une condamnation sur ce fondement, encore faut-il qu’il y ait véritablement « rupture » et, qu’en conséquence, la notification de la rupture soit dépourvue de toute ambiguïté, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. Pour approfondir : La société J. confectionne des articles textiles de décoration et d’ameublement pour de grandes marques de la distribution. A ce titre, elle a conclu un contrat-cadre le 29 juillet 1999 avec une célèbre enseigne de distribution, la société A. Suite à une forte augmentation des coûts des matières premières à partir de 2008, la société J. a rencontré des difficultés financières, nécessitant une hausse de ses tarifs ; la société A. a cependant refusé, par message électronique du 12 mai 2011, une telle augmentation. La société A. a parallèlement considérablement réduit er ses commandes auprès de la société J. Le 1 septembre 2011, les parties ont signé un nouvel accord. Quelques mois à peine après, la société J. informe la société A. d’une nouvelle hausse de ses tarifs en deux temps, une première augmentation à er partir du 1 janvier 2012, puis une seconde à partir du 12 mars 2012. Si la société A. a accepté la première augmentation, elle a en revanche refusé la seconde et, par un message électronique adressé à la société J. le 12 mars 2012, elle a annoncé à cette dernière qu’elle refusait de subir de nouvelles augmentations et qu’elle allait donc définitivement stopper les commandes de cette gamme.

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La société J. a été placée en redressement puis en liquidation judiciaire. La société J. a assigné la société A. en soulevant différents griefs et notamment la rupture brutale des relations commerciales sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce, soutenant le fait qu’aucun préavis ne lui avait été accordé alors qu’un préavis d’une durée de deux ans aurait dû être respecté. L’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce sanctionne le fait de « rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ». Le Tribunal de commerce de Marseille n’a pas fait droit à cette demande, considérant que la société A. n’avait commis aucune faute, le message électronique du 12 mars 2012 ne constituant pas un élément de rupture. Le liquidateur de la société J. a interjeté appel du jugement rendu. La société A. soutenait que le message électronique adressé le 12 mars 2012 ne constituait pas une rupture mais seulement l’arrêt des commandes pour une gamme déterminée de produits et qu’il n’avait jamais été indiqué que la rupture prendrait effet immédiatement. Les juges du fond ont confirmé la position adoptée par les premiers juges et ont ainsi considéré que le message électronique adressé le 12 mars 2012 était dépourvu de tout formalisme et « ne constituait qu’une annonce, un message d’arrêt de commandes, sans prise d’effet ferme et immédiate, et ne pouvait constituer, ainsi que l’ont estimé les Premiers Juges, une notification de rupture brutale, qui doit être dépourvue de toute équivoque ». Pour rappel, la rupture brutale peut être sanctionnée même si elle n’est pas totale. Une baisse importante du rythme des commandes, sans justification économique, peut ainsi constituer une rupture partielle qui sera sanctionnée, encore faut-il qu’il y ait une véritable « rupture ». En l’espèce, les juges du fond n’ont même pas eu à examiner ce point puisqu’ils ont considéré que le principe même de la « rupture » faisait débat et en ont conclu que, dès lors que le message de la société A. était équivoque, il n’y avait pas lieu de considérer qu’il y avait « rupture ». A rapprocher : Article L.442-6 du Code de commerce

La détermination du point de départ du préavis en présence d’un appel d’offres notifié par courriel Cass. com., 8 décembre 2015, pourvoi n°14-18.228 Ce qu’il faut retenir : La notification du lancement d’un appel d’offres par courriel vaut notification de la rupture commerciale et constitue le point de départ du préavis mais à la condition que l’intégrité de ce message électronique et, plus largement, celle de sa copie informatique par capture d’écran, ne puissent être mises en cause. Pour approfondir : L’arrêt sous commentaire est intéressant en ce qu’il rappelle utilement que la notification du lancement d’un appel d’offres vaut notification de la rupture de la relation commerciale et constitue le point de départ du préavis et en ce qu’il précise, dans le même temps, que ce principe s’applique même lorsque cette notification aurait eu lieu par courriel mais sous certaines conditions. En l’espèce, une société exploitant un magasin de bricolage avait confié le transport de ses marchandises à un transporteur dans le cadre d’un contrat conclu le 19 septembre 2002. Puis, elle décide de lancer un appel d’offres par courrier électronique le 25 février 2009 afin de transférer une partie de ce transport à d’autres prestataires. Suite à l’issue de l’appel d’offres, elle notifie alors au transporteur par lettre du 18 juin er 2009 une modification de son contrat à compter du 1 juillet 2009. Ce dernier l’a assigné en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d’une relation commerciale établie sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce aux motifs que ce préavis n’était pas de quatre mois mais de dix jours. En effet, il affirmait que le préavis n’avait commencé à courir qu’à compter de la date de notification de la modification du contrat par courrier postal et non pas de celle du lancement de l’appel d’offres par message électronique, n’ayant soit disant jamais reçu celui-ci. Les juges de la Haute juridiction approuvent la Cour d’appel qui a considéré que l’appel d’offres avait bien été notifié au transporteur dans la mesure où il résultait de la capture d’écran versée aux débats par l’auteur de la rupture que le transporteur faisait bien partie des destinataires du message électronique comportant l’appel d’offres, que certains y avaient même répondu, et que celui-ci lui avait été envoyé à son adresse effective ce qui lui a permis d’en déduire, sans inverser la charge de la preuve, que l’intégrité de ce document ne pouvait être mise en cause et que la

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notification du lancement de l’appel d’offres valait alors notification de la rupture de la relation commerciale établie et constituait le point de départ du préavis. Il faut d’abord observer que ce n’est pas la première fois que les juges affirment un tel principe. En effet, comme la brutalité de la rupture, au sens de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce, correspond à l’exigence d’un préavis suffisant et raisonnable, lequel doit être écrit, il faut alors calculer la durée de celui-ci. Autrement dit, il faut déterminer son point de départ et son point d’arrivée. Or, à partir de quand peut-on considérer qu’un préavis a été donné ? Il sera dans l’intérêt de l’auteur de la rupture de faire remonter le plus loin possible le point de départ du préavis, à l’inverse de la victime. Cette question sur le point de départ du préavis s’est justement posée en présence d’un appel d’offres. Or, les juges de la Haute juridiction estimaient déjà que le délai de préavis courait à compter de la notification de l’appel d’offres dans la mesure où, par la notification de celui-ci, l’appelant manifestait son intention de rompre la relation commerciale établie dans les conditions antérieures (Cass. com., 2 nov. 2011, n°1026.656). Cependant, même si la question ne s’est pas posée en l’espèce, il convient de rappeler que l’auteur de l’offre doit préciser de façon claire et nette qu’il entend remettre en cause la relation antérieure. En effet, les juges retiennent comme point de départ l’issue de l’appel d’offres et non pas celle de sa notification si celle-ci comporte une ambiguïté (CA Paris, 21 mars 2011, n°07/07337). Il faut donc que l’appel d’offres notifié au partenaire précise suffisamment à celui-ci qu’il est parfaitement possible qu’il le perde. La nouveauté de cet arrêt est qu’il semble admettre, de manière indirecte, que ce principe puisse s’appliquer même lorsque la notification du recours à un appel d’offres a eu lieu par courriel mais c’est à la condition que son intégrité et, plus largement, celle de sa copie informatique par capture d’écran, ne puissent être mises en cause. C’est une des conditions que pose l’article 1316 du Code civil pour que l’écrit sous forme électronique soit admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier. Sur la première condition qu’exige l’article précité, à savoir que cet écrit électronique doit permettre d’identifier la personne dont il émane, les juges ne se prononcent pas. C’est peut-être parce qu’elle ne posait pas de difficultés en l’espèce. Sur la deuxième, à savoir qu’il doit être établi et conservé dans des conditions permettant d’en garantir

l’intégrité, il semblerait que le seul fait de verser aux débats une capture d’écran dont il résulte que la victime de la rupture faisait bien partie des destinataires de ce message électronique, que certains y avaient même répondu et que celui-ci lui avait bien été envoyé à son adresse effective suffise à montrer que son intégrité n’a pu être mise en cause ce qui peut paraître étonnant. N’aurait-il pas fallu comparer plusieurs éléments et non s’en remettre à ce seul document pour justifier de son intégrité ? En outre, il subsiste un autre problème : qui doit prouver que la copie informatique ou le message électronique n’a pas été établi et conservé dans des conditions permettant d’en garantir son intégrité ? Selon la Cour d’appel, c’était à la victime de la rupture de rapporter une telle preuve. En effet, elle estime que le transporteur, en plus des autres éléments cités plus haut, ne démontrait pas que le message électronique avait pu être tronqué ou manipulé et que l’intégrité de ce document ne pouvait alors être mise en cause. Les juges de la Haute juridiction ne reprenant pas cet élément-là pour rendre leur solution, il n’est donc pas possible de se prononcer sur la personne qui a la charge de rapporter la preuve de l’intégrité de l’écrit électronique même si ceux-ci affirment que la Cour d’appel n’avait pas inversé la charge de la preuve, les autres éléments rapportés étant apparemment suffisants. Et puis, la Cour d’appel avait aussi relevé que, malgré la connaissance par le transporteur de ce que son contrat avait été modifié en raison d’un appel d’offres, ce dernier avait poursuivi les relations commerciales avec son partenaire aux nouvelles conditions pendant plusieurs mois sans même protester. Il aurait donc bien eu connaissance de cet appel d’offres bien avant la notification de la modification de son contrat qui y faisait référence. La solution est donc peut-être ici justifiée… Attention donc à l’utilisation de l’écrit électronique pour notifier le lancement d’un appel d’offres à son partenaire. En attendant que la Cour de cassation précise sa solution, mieux vaut lui préférer la notification par lettre recommandée avec accusé de réception. A rapprocher : Cass. civ. 2ème, 4 déc. 2008, pourvoi n°07-17.622

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Durée du préavis : rupture des relations avec deux sociétés d’un même groupe Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°14-19.499 Ce qu’il faut retenir : En cas de rupture des relations commerciales entre deux entités d’un même groupe et un même fournisseur, la durée du préavis ne prend en compte le chiffre d’affaires global généré par les deux sociétés auprès du fournisseur que dans l’hypothèse où ces dernières ont agi de concert. Pour approfondir : Dans cette affaire, deux sociétés produisant des équipements industriels et appartenant toutes deux au même groupe se sont approvisionnées auprès d’une même société pour l’acquisition d’un même composant de leurs produits, respectivement à compter de septembre 2004 et juin 2004. Les deux filiales ayant mis fin à leurs relations commerciales avec le fournisseur courant 2009, ce dernier les a assignées en réparation de son préjudice sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5°, du Code de commerce pour rupture brutale d’une relation commerciale établie. Le fournisseur a obtenu gain de cause devant les juges du fond. La Cour d’appel a en effet estimé que le fournisseur aurait dû bénéficier d’un préavis d’une durée d’un an de la part des deux sociétés. A l’appui de cette décision, la Cour a relevé : -

-

-

que les « deux sociétés ont, de façon concomitante, noué des relations commerciales avec [le fournisseur], qu’elles y ont mis fin dans des conditions identiques, respectivement en octobre et juin 2009, sans aucun préavis et qu’elles justifient de leur rupture par des motifs similaires » ; que « les conséquences de ces ruptures pour [le fournisseur] ont nécessairement été amplifiées dans la mesure où elles se sont cumulées et qu’il convient, pour apprécier la durée du préavis, de prendre en compte le chiffre d’affaires global généré par les [deux] sociétés, dans la mesure où elles ont entretenu une relation commerciale avec [le fournisseur], sur une même période et sur des produits identiques, avec des exigences similaires en termes quantitatifs » ; que « ce chiffre d’affaires ayant augmenté de manière importante au cours des années 2007 et 2008 pour atteindre 10,20 % en 2007 et 9,75 % en 2008, il en résulte qu’en termes de réorganisation,

[le fournisseur] a dû, au cours d’une même période, pallier la perte de deux clients avec lesquels elle avait un chiffre d’affaires conséquent ». Les deux sociétés faisant partie du même groupe et ayant noué des relations commerciales identiques avec le même fournisseur, la Cour a ainsi considéré qu’elles devaient être appréhendées comme une entité économique unique. En conséquence, les juges du fond ont estimé que l’appréciation de la durée du préavis doit prendre en compte non seulement la durée des relations commerciales nouées mais également le chiffre d’affaires global – c'est-à-dire généré par les deux sociétés – auprès du fournisseur. En effet, la double perte concomitante des deux filiales accroit la difficulté pour le fournisseur subissant la rupture de trouver des clients de substitution, ce qui justifie selon la Cour l’allongement de la durée du préavis dû au fournisseur. La Cour de cassation censure cependant l’arrêt de la Cour d’appel au visa de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce. La Haute juridiction considère en effet que bien qu’appartenant à un même groupe et ayant la même activité, les deux sociétés n’en demeurent pas moins deux entités autonomes et ont entretenu avec le fournisseur des relations commerciales distinctes ; dès lors, les chiffres d’affaires qu’elles génèrent auprès d’un même fournisseur doivent s’apprécier séparément. La Cour de cassation précise qu’il n’en aurait été autrement que si les deux filiales avaient coordonné leur comportement et avaient, selon la terminologie employée par la Haute juridiction, « agi de concert ». L’expression employée par la Cour de cassation peut surprendre dans un litige relatif aux pratiques restrictives de concurrence ; elle n’est toutefois pas anodine. La référence à l’action de concert renvoie directement au droit des sociétés cotées et en particulier aux dispositions de l’article L.233-10 du Code de commerce, selon lequel sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir, de céder ou d'exercer des droits de vote, pour mettre en œuvre une politique commune vis-à-vis de la société ou pour obtenir le contrôle de cette société ; de même, un tel accord est présumé exister entre : une société, le président de son conseil d'administration et ses directeurs

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généraux ou les membres de son directoire ou ses gérants ; une société et les sociétés qu'elle contrôle au sens de l’article L.233-3 du Code de commerce ; des sociétés contrôlées par la même ou les mêmes personnes ; les associés d'une société par actions simplifiée à l'égard des sociétés que celle-ci contrôle ; le fiduciaire et le bénéficiaire d'un contrat de fiducie, si ce bénéficiaire est le constituant. En la matière, lorsque des personnes sont reconnues comme agissant de concert, les fractions de capital ou de droit de vote qu’ils détiennent chacun sont appréciées globalement pour déterminer le franchissement des seuils de participation déclenchant l’obligation de déclaration à l’AMF prévue articles L.233-7 et L.233-7-1. A rapprocher : CA Douai, 6 juillet 2009, RG n°09/00519

Renégociation du contrat et préavis en cas de rupture d’une relation commerciale établie CA Paris, 14 octobre 2015, RG n°13-09.610 Ce qu’il faut retenir : Lorsque le contrat ne comportant pas de clause de tacite reconduction arrive à son terme, naît un nouveau contrat, résiliable à tout moment moyennant un préavis raisonnable, qui court du jour où ce contrat est né, pour autant que l’auteur de la rupture n’ait pas maintenu l’autre partie dans la croyance légitime qu’il poursuivrait des relations contractuelles pérennes. Pour approfondir :  En l’espèce, les parties avaient conclu un contrat de franchise à durée déterminée, expirant le 28 juillet 2009, non renouvelable par tacite reconduction. Le 24 mars 2009, le franchiseur avait rappelé au franchisé la date d’expiration de ce contrat et lui avait proposé un nouveau contrat de franchise, pour une durée de 18 mois, lui précisant que l'absence de retour d'un dossier d'acceptation de ce nouveau contrat sous 45 jours, aurait pour conséquence l'expiration du contrat en cours. Le franchisé n’avait pas donné suite à cette proposition au motif que ce contrat mettait à sa charge de nouvelles obligations sans justification. Le 4 janvier 2010, le franchiseur avait néanmoins adressé une lettre au franchisé, dont l'objet mentionné était « Expiration du contrat de franchise », ainsi qu’un nouveau contrat de franchise pour une durée de 5 ans. Le 17 mars 2010, le franchisé avait répondu ne

pouvoir accepter en l'état ce nouveau contrat, compte tenu des obligations nouvelles qui lui étaient imposées. Le 13 juillet 2010, le franchiseur avait pris acte de l'expiration du contrat de franchise, du refus de renouvellement du contrat par le franchisé, et rappelait à ce dernier l'impossibilité d'utiliser dorénavant la marque du franchiseur sous quelque forme que ce soit. Le 22 juillet 2010, le franchisé faisait part de sa stupéfaction devant le refus du franchiseur d'aménager le projet de contrat, et lui rappelait avoir continué à investir sur ses sollicitations alors que rien ne lui permettait de penser que le contrat ne serait pas renouvelé. Le 30 juillet 2010, le franchiseur proposait de nouveau de signer le nouveau contrat adressé le 4 janvier 2010 et à défaut, « à titre exceptionnel » de proroger le contrat initial du 29 janvier 2004 jusqu'au 30 janvier 2011 et ce, afin de lui permettre de « prendre les dispositions utiles ». C’est dans ces conditions que, n'ayant opté pour aucune de ces deux propositions, le franchisé avait saisi le tribunal de commerce afin de voir constater la rupture abusive et brutale du contrat de franchise au regard des dispositions de l’article L.442-6-I 5° du Code de commerce.  Aux termes du jugement entrepris, le franchiseur n'avait pas abusivement et brutalement rompu le contrat de franchise du 29 janvier 2004 et, pour solliciter l'infirmation du jugement, le franchisé faisait valoir que si le contrat initial du 29 janvier 2004 avait pris fin le 28 juillet 2009, les relations contractuelles entre les parties avaient perduré au-delà de cette date, soit pendant un an au cours duquel le franchiseur avait continué de percevoir les redevances et elle-même, d'investir sur et pour la marque ; ce faisant, le franchisé soutenait avoir naïvement cru qu'un contrat se négociait et qu'ainsi, les parties avaient entendu renoncer à la non reconduction du contrat initial qui s’était poursuivi, en sorte qu'il ne pouvait y être mis fin sans préavis.  La Cour d’appel de Paris retient que le contrat de franchise a été conclu sans possibilité de tacite reconduction ; qu'il en résulte que le franchisé « connaissait nécessairement dès son origine la date de la fin de ce contrat » et que le franchiseur « était alors libre, soit de renégocier les conditions d'un nouveau contrat, soit de ne pas le reconduire », ce qui n’était pas même contesté. Et, il faut bien le dire, nul n’est tenu de renouveler un contrat. Ce faisant, la Cour d’appel de Paris retient qu'à compter du 28 juillet 2009 « est né un nouveau contrat précaire résiliable à tout moment » et que le fait que le franchiseur ait envisagé la signature d'un nouveau contrat « ne démontre pas qu'elle ait entendu poursuivre des

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relations contractuelles pérennes », les courriers échangés entre les parties étant exempts de toute ambiguïté. La Cour d’appel de Paris en conclut « qu'il ne ressort d'aucun élément que la société (franchisée) ait été maintenue dans l'illusion d'une poursuite des relations contractuelles et ait pu raisonnablement croire à la nécessaire poursuite des relations commerciales ; que le fait qu'elle ait continué de se comporter comme un franchisé bénéficiant de l'enseigne, de la publicité et du savoir-faire (du franchiseur) et qu'elle ait réglé les redevances prévues au contrat du 29 janvier 2004 est inopérant à cet égard », puis qu’ainsi le franchisé « a donc bénéficié d'un préavis d'une année lui permettant de prendre toutes dispositions utiles ; que le terme prédéfini du contrat outre le délai d'un an donné après le terme du contrat excluent toute brutalité dans la rupture des relations commerciales ». On le voit, les choses sont simples. Le contrat de franchise ne comportant pas de clause de tacite reconduction donne naissance, lorsque les parties poursuivent leur relation contractuelle, à un contrat à durée indéterminée. Ce contrat à durée indéterminée peut être résilié à tout moment, moyennant un préavis raisonnable, qui court du jour où ce contrat est né, pour autant que le franchiseur n’ait pas maintenu le franchisé dans la croyance légitime qu’il poursuivrait des relations contractuelles pérennes. ère

A rapprocher : Cass. civ. 1 , 15 nov. 2005, pourvoi n°02-21366, Publie au Bulletin

Rupture brutale des relations commerciales et charge de la preuve CA Paris, 17 décembre 2015, RG n°14/18277 Ce qu’il faut retenir : L’article L.442-6 I. 5° du Code de commerce sanctionne la rupture brutale de relations commerciales établies, ce qui suppose de démontrer le caractère « brutal » de la rupture ; à défaut, cette disposition n’a pas lieu de s’appliquer. Par ailleurs, pour obtenir l’indemnisation du préjudice subi, encore faut-il rapporter la preuve de celui-ci. Pour approfondir : En l’espèce, la société B. exploitait des distributeurs automatiques de denrées appartenant à la société C., aucun contrat n’ayant cependant été régularisé entre

les parties. La société C. a adressé des factures à la société B. au titre de la mise à disposition de ces distributeurs automatiques ; cette dernière a cependant refusé de procéder au règlement desdites factures au motif qu’aucun contrat n’avait été signé. Pour l’approvisionnement, la société B. faisait appel à la société K. La société B. ne procédant toutefois pas au règlement des factures qui lui étaient adressées par la société K. au motif que les produits livrés disposaient d’une date de péremption très proche, la société K. a suspendu l’approvisionnement. La société B., considérant que la société K. était le mandataire de la société C., a alors mis en demeure, sans succès, la société K. et la société C. de reprendre les livraisons. C’est dans ces circonstances que la société B. a assigné la société C. afin d’obtenir l’indemnisation des préjudices dont elle se prétendait être victime, ainsi que la société K. en intervention forcée, au titre notamment de la rupture brutale et abusive des livraisons. Cette décision est l’occasion de revenir sur l’application de l’article L.442-6 I. 5° du Code de commerce en ce qu’il sanctionne la rupture brutale de relations commerciales établies. Celui qui rompt une relation commerciale établie peut en effet engager sa responsabilité s’il rompt le contrat sans respecter une durée de préavis minimale. Cela suppose toutefois que plusieurs conditions soient réunies : l’existence d’une relation commerciale, le caractère établi de la relation, une rupture (qui peut être totale ou partielle), le caractère brutal de la rupture (c’est-à-dire avec un préavis inexistant ou insuffisant au regard de la durée des relations commerciales). En l’espèce, les juges du fond relèvent que la société B., qui fonde son action sur l’article L.442-6 du Code de commerce, n’invoque cependant pas le caractère « brutal » de la rupture, condition qui pourtant est nécessaire à l’application de l’article précité, mais uniquement le caractère « abusif » de la rupture, en avançant le fait que la société C. aurait rompu leur relation sans motif légitime. Les conditions d’application de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce n’étant pas réunies, cette disposition n’avait donc pas lieu de s’appliquer. Par ailleurs, s’agissant du caractère abusif de la rupture, les juges du fond relèvent qu’aucun abus dans la rupture n’a été démontré et que, par ailleurs, la société B. se fonde uniquement sur des faits commis par la société K., laquelle est tiers à la relation nouée entre la société B. et la société C.

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La société B. n’a donc pas été indemnisée du préjudice dont elle se prévalait au titre de la rupture brutale et abusive des livraisons. La société C. forme quant à elle une demande reconventionnelle et sollicite le paiement d’une indemnité d’occupation au titre de la mise à disposition des distributeurs automatiques. Aucun contrat n’ayant toutefois été régularisé entre les parties, la société C. n’était pas en mesure de démontrer l’existence de l’accord de la société B. sur le montant de l’indemnité à payer ; la société C. ne pouvait donc pas se prévaloir de l’application de er l’article 1315 alinéa 1 du Code civil qui prévoit que : « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ». La société C. a donc cherché à engager la responsabilité délictuelle (article 1382 du Code civil) de la société B. ; mais, dès lors qu’elle n’a pas été en mesure de rapporter la preuve de l’existence d’un préjudice, sa demande d’indemnisation a été rejetée. En effet, pour prétendre à l’indemnisation du préjudice invoqué, encore convient-il de démontrer l’existence d’une faute, d’un lien de causalité et d’un préjudice ; à défaut, la demande d’indemnisation ne peut qu’être rejetée, ainsi que le rappelle la présente décision. A rapprocher : article L.442-6 du Code de commerce et article 1315 du Code civil

En l’espèce, après des relations commerciales ayant perduré pendant plusieurs années au moyen de contrats à durée déterminée successifs (mais pour lesquels le renouvellement tacite était exclu), les parties étaient entrées en négociations en vue de conclure un nouveau contrat, tout en poursuivant leurs relations commerciales. Après plusieurs mois de négociations, le concédant avait notifié à son distributeur que leurs relations contractuelles avaient pris fin avec l’expiration du dernier contrat en vigueur entre elles, et qu’il serait supprimé de la liste des distributeurs du réseau trois mois plus tard. Peu après l’expiration de ce délai, le concédant avait informé, par courrier circulaire, les clients de son ancien distributeur que ce dernier n’appartenait plus au réseau et leur avait indiqué les coordonnées de ses distributeurs dans la région. Le distributeur avait poursuivi son ancien concédant en invoquant, d’une part, une rupture brutale des relations commerciales et, d’autre part, des actes de concurrence déloyale. S’agissant en premier lieu de la rupture des relations commerciales, après avoir constaté que ces relations avaient duré 11 ans, la Cour d’appel de Paris a examiné les conditions de la rupture et soulevé, ce faisant, plusieurs éléments démontrant le désintérêt du distributeur pour la poursuite des relations commerciales avec le concédant. A cet égard, sont soulignés les éléments suivants : -

les stipulations contractuelles précisaient que le distributeur était supposé ne pas poursuivre les relations commerciales à défaut de signer un nouveau contrat ;

-

le distributeur avait disposé, au cours des négociations, de différents documents écrits (projet initial de contrat puis annexes modifiées à sa demande) lui permettant de maintenir une relation contractuelle avec le concédant ;

-

le distributeur n’avait pourtant pas retourné le contrat signé ;

-

le concédant, ainsi que l’huissier diligenté par lui, avait constaté le désintérêt du distributeur pour ses produits, au profit d’autres produits.

La rupture n’est pas brutale lorsque le concédant ne fait que constater une rupture déjà intervenue CA Paris, 2 septembre 2015, RG n°13/06947 Ce qu’il faut retenir : Lorsqu’un ensemble d’éléments montre le désintérêt du distributeur pour la poursuite des relations contractuelles avec le concédant, celui-ci ne rompt pas brutalement les relations commerciales établies avec le distributeur en lui notifiant la fin de son appartenance au réseau, mais ne fait que constater une rupture des relations déjà intervenue. Pour approfondir : L’arrêt commenté offre une illustration des circonstances qui excluent la nécessité du respect d’un préavis lors de la rupture des relations commerciales par la tête de réseau.

Ayant relevé ces éléments, la Cour constate que la rupture des relations entre les parties n’est pas imputable au concédant qui n’a fait que constater la rupture des relations entre les parties.

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Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de statuer sur le préavis qui aurait dû être respecté. S’agissant en second lieu de la concurrence déloyale, la Cour relève que le caractère objectif des termes du courrier adressé par le concédant aux clients du distributeur est exclusif d’un quelconque dénigrement ou d’une entrave à sa reconversion. A rapprocher : CA Paris, 6 juin 2013, RG n°10/25099

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CONTRAT ET ASPECTS PROCESSUELS Le fabuleux destin de la clause pénale CA Toulouse, 14 octobre 2015, RG n° 13/00325, et projet de réforme Ce qu'il faut retenir : Conformément à l'article 1152 du Code civil, le juge peut augmenter le montant de la clause pénale insérée dans un contrat de franchise. Pour approfondir : On le sait, la clause pénale (D. Mazeaud, La notion de clause pénale, LGDJ, 1992, coll. Bibl. de droit privé, t. 223), actuellement régie par les articles 1152 et 1226 et suivants du Code civil, fascine par sa simplicité et son apparente efficacité : par la stipulation d’une clause pénale, les parties peuvent évaluer par avance les dommages et intérêts dus par le débiteur en cas de retard ou d’inexécution par l’une des parties. Ainsi, selon les cas, la clause pénale pourra prévoir soit un montant fixe et forfaitaire (v. par ex., CA Lyon, 7 Octobre 2015 – RG n° 13/09827 ; CA Lyon, 4 Décembre 2014 – RG n° 14/00912 ; CA Paris, 4 avr. 1998, Juris-Data n°022498 ; v. aussi, (Cass. civ. 1ère, 10 oct. 1995, n° 93-16.869, Bull. civ., I, n° 347, et notre commentaire), soit un montant variable, en pratique le plus souvent fonction de la durée restant à courir au moment du fait générateur jusqu’au terme du contrat (v. par ex., CA Nîmes, 7 mai 2015, RG n°14/02593 ; CA Lyon, 31 mars 2000, Juris-Data n°120706 ; CA Lyon, 11 févr. 2000, Juris-Data n°151453). Et, dans tous les cas, le juge dispose du pouvoir modérateur que lui confère l’article 1152 du Code civil, qui lui permet notamment de réduire le montant ainsi prévu par le contrat lorsque celui-ci

s’avère manifestement excessif (v. par ex., CA Colmar, 13 août 2013, RG n°12/04063 : réduisant le montant de la clause pénale faute de préjudice effectif ; CA Colmar, 17 juin 2013, RG n°12/03155 et CA Paris, 27 juin 2012, RG n°11/01181 : réduisant le montant de la clause pénale en raison d’objectifs irréalisables). L’arrêt commenté (CA Toulouse, 14 Oct. 2015, RG n°13/00325) fournit une illustration supplémentaire de ce pouvoir modérateur, mais la décision présente cette particularité de réviser le montant de la clause pénale à la hausse, ce montant étant manifestement dérisoire au sens de l’article 1152 précité. L’hypothèse est plus rare dans la pratique contentieuse ; cet arrêt méritait donc d’être souligné. En l’espèce, la clause pénale examinée prévoyait un montant égal à « la moyenne des 12 dernières redevances mensuelles payées par le franchisé multiplié par le nombre d'années restant à courir jusqu'au terme normal du contrat ». La Cour d’appel de Toulouse retient : « l'application de la clause ainsi stipulée, alors qu'il restait trois ans et six mois et donc trois années pleines à courir, conduit à une indemnité contractuelle d'un montant de 8.163 €. (…) Au regard du préjudice effectivement subi par le franchiseur, tel que la cour peut l'apprécier à la date où elle statue et alors que le franchisé a poursuivi l'exploitation du même fonds de commerce, sur le même site, mais sous sa propre enseigne, en s'abstenant du paiement de toute redevance, la clause pénale est manifestement dérisoire et le premier juge doit être confirmé en ce qu'il en a révisé le montant pour le porter à celui justement fixé de 50.000 € ». De quoi évoquer enfin le fabuleux destin de la clause pénale. L’actuel projet de réforme définit la notion de clause pénale (sans la citer comme telle) et en précise le régime, par un article unique, l'article 1231-5, ainsi rédigé : « Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la sanction convenue peut, même d'office, être diminuée par le juge à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent. Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite. Sauf clause contraire, la peine n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure ». A rapprocher : CA Nîmes, 7 mai 2015, RG n°14/02593

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Le projet de réforme du droit des contrats et la lutte contre les clauses abusives Commission des clauses abusives, communiqué du 22 mai 2015 Ce qu’il faut retenir : La rédaction du nouvel article 1169 envisagée par le projet de réforme du droit des contrats, prévoyant le pouvoir du juge de supprimer les clauses abusives, suscite des interrogations de la part de la Commission des clauses abusives. Pour approfondir : Le projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, prévoit l’introduction d’un article 1169 dans le Code civil octroyant au juge, sous certaines conditions, le pouvoir de supprimer une clause qui créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Dans une note, datée du 9 avril 2015, la Commission des clauses abusives a émis plusieurs remarques relatives au projet de réforme et, plus précisément, à ce nouvel article 1169. Sans prendre position sur l'opportunité d'étendre au droit commun des contrats la protection contre les clauses abusives, elle s'interroge sur les trois points suivants :  la nécessité de préciser dans l’article 1169 que ses dispositions sont d'ordre public : les parties seraient en effet dans l’impossibilité d’exclure l’intervention du juge par une clause contraire. Le pouvoir du juge serait alors renforcé par cette disposition et le mécanisme de lutte contre les clauses abusives n’en serait que plus efficace.  le choix de la sanction de la « suppression » des clauses abusives, plutôt que la sanction de « réputée non écrite » : le terme « supprimé » crée, en effet, une ambiguïté inopportune. Le terme « supprimé » désigne plutôt l’effet attendu qu’une notion juridique précise ; s’agissant d’un vice affectant le contenu du contrat, le législateur utilise d’ordinaire la technique du « réputé non écrit » pour sanctionner la clause. Par ailleurs, le terme « supprimé » est absent du reste du projet. Dès lors, il est légitime de s’interroger sur le choix de cette sanction par les rédacteurs.  l'articulation de l'article 1169 avec l'article L. 132-1 du Code de la consommation et, en particulier, la primauté de l'un de ces deux textes sur l'autre : l’ordre juridique français compte en effet un autre texte permettant de sanctionner les clauses

abusives. L’article L.132-1 du Code de la consommation prévoit que « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du nonprofessionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». S’il ressort expressément des dispositions de ce texte qu’il n’a vocation à s’appliquer qu’aux relations entre professionnels et consommateurs, le champ d’application du nouvel article 1169 du Code civil n’est quant à lui pas limité. Il serait opportun de préciser si ce texte a vocation à faire office de droit commun en matière de déséquilibre significatif et par conséquent de préciser l’articulation des deux textes. Par ailleurs, certains observateurs ont suggéré de limiter la protection de l’article 1169 aux seuls contrats d’adhésion. Or, le nouvel article 1108 du Code civil, issu du projet de réforme, prévoit que le contrat d’adhésion est celui dont les stipulations essentielles, soustraites à la libre discussion, ont été déterminées par l'une des parties. La Commission s'interroge donc, en ce cas, sur le fait que l'article 1108 alinéa 2 du Code civil semble exclure de la catégorie des contrats d'adhésion, ceux dont le prix ou la prestation auront été négociés, alors même que les autres stipulations auront été soustraites à la libre discussion des parties. Limiter la protection du nouvel article 1169 aux seuls contrats d’adhésion reviendrait à affaiblir le dispositif, légitimant alors les craintes soulevées par la Commission. A rapprocher : Projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations

Prescription de l’action pour dol : rien ne sert de courir… ère Cass. civ. 1 , 10 septembre 2015, pourvoi n°1413.863 Ce qu’il faut retenir : La prescription de l’action en nullité fondée sur le dol ne peut commencer à courir avant la signature du contrat. Pour approfondir : Après avoir acquis, le 26 mai 2003, le contrôle d’une société du secteur cinématographique, l’acquéreur a assigné la cédante le 22 mai 2008 aux fins de faire

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annuler la cession pour dol après que la cible ait perdu la propriété des droits d’exploitation de douze films. L’article 1304 du Code civil enferme l’action en nullité pour dol dans un délai de 5 ans à compter du jour où le dol a été découvert. Dans le cas d’espèce, l’assignation est intervenue quatre jours seulement avant le cinquième anniversaire du contrat ; inévitablement, la cédante a cherché à se prévaloir de la prescription de l’action et le débat s’est cristallisé sur la détermination du point de départ de l’action en nullité pour dol. En effet, quelques mois avant la cession, la cible avait obtenu un arrêt de la Cour d’appel de Paris confirmant sa propriété sur les films litigieux. A la suite de cette décision, l’acquéreur avait, par une lettre du 16 décembre 2002, évoqué ce litige et informé la cédante de son intérêt pour l’acquisition des actions de la cible. Cependant, postérieurement à la cession, la Cour d’appel de Versailles, statuant sur renvoi après cassation, cassait l’arrêt précité et dépossédait la cible des droits d’exploitation sur les films litigieux. L’acquéreur, arguant qu’elle n’avait pas été informée du pourvoi formé contre la décision initiale, se prévaut d’un dol de la cédante et demande l’annulation de la cession. La question est de savoir si le délai de prescription de l’action pour dol a commencé à courir à compter du 26 mai 2003, date de la cession, ou à compter du 16 décembre 2002, date de la lettre de l’acquéreur démontrant sa connaissance du litige, ce qui rendrait l’action prescrite et irrecevable au 22 mai 2008.

La décision évoquée ici fait application du seul article 1304 du Code civil et la victime sollicite seulement la nullité du contrat ; à cet égard, la solution retenue semble raisonnable : le point de départ de l’action en nullité d’un contrat ne peut être antérieur à la conclusion dudit contrat ; autrement dit, la prescription de l’action en nullité pour vice du consentement ne peut pas courir avant le consentement. Sur le fondement du dol, la victime aurait pu, cumulativement ou alternativement, demander l’allocation de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382 du Code civil (Cass. com., 10 janvier 2012, pourvoi n°11-21.954). Dans ce cas, la prescription de l’action en réparation aurait dû être régie par l’article 2224 du Code civil qui fait courir le délai quinquennal du jour où la victime a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’agir et l’on peut se demander si la haute juridiction aurait pu juger autrement. A rapprocher : Cass. com., 10 janvier 2012, pourvoi n°11-21.954

Le régime contractuel des factures, prescription et responsabilité ère Cass. civ. 1 , 3 juin 2015, pourvoi n°14-10.908 Ce qu’il faut retenir : La prescription biennale pour une action en paiement contre un consommateur court à compter de l’émission de la facture. Pour approfondir :

Dans sa décision du 8 janvier 2014, la Cour d’appel de Paris a retenu que le point de départ du délai de prescription devait être le 16 décembre 2002, date à laquelle l’acquéreur avait connaissance du litige, « ce qui lui permettait aisément de s’informer sur l’existence du pourvoi en cassation » contre l’arrêt de la Cour d’appel. La Cour, mettant à la charge de l’acquéreur une véritable obligation de s’informer, a donc considéré que l’action était prescrite. A l’inverse, par un arrêt du 10 septembre 2015, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel en toutes ses dispositions en retenant que le délai de prescription d'une action fondée sur le dol ne peut commencer à courir avant la date de la convention prétendument affectée d'un vice du consentement.

La Cour de cassation a précisé le régime des factures aux consommateurs, au regard du droit des contrats, en précisant la prescription de l’action en paiement et l’action en responsabilité contractuelle pour facture irrégulière. Dans cet arrêt, il était question de travaux commandés par un couple de particuliers à un entrepreneur. Une des factures étant demeurée impayée, l’entrepreneur a assigné les consommateurs en paiement. Ceux-ci ont opposé la prescription pour s’opposer à la demande en paiement et ont demandé reconventionnellement la responsabilité de l’entrepreneur au titre de l’irrégularité de ses factures. S’agissant de la prescription, la Cour de cassation a fixé le point de départ au jour de la facture. En effet, les consommateurs souhaitaient que le délai (désormais

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biennal pour les actions contre les consommateurs) soit calculé à compter de la prestation de travaux. Cela n’a pas été retenu. L’action en paiement d’une facture contre un consommateur se prescrit par deux ans à compter de l’émission de la facture. S’agissant de la responsabilité civile, la demande reconventionnelle consistait à dire que le couple a perdu le bénéfice d’un crédit d’impôt à cause de l’irrégularité de certaines factures de l’entrepreneur. La Cour d’appel les en avait déboutés sur un motif étrange, en considérant que le fait qu’il n’était pas fait droit à leurs prétentions et que par conséquent il n’y avait pas lieu d’examiner la demande reconventionnelle. Cela est logiquement cassé. La Cour admet par conséquent que la responsabilité de l’entrepreneur puisse être engagée, le cas échéant, s’il apparaît qu’une faute de l’entrepreneur dans le libellé de la facture a causé un préjudice fiscal. A rapprocher : Article 1147 du Code civil ; article L.137-2 du Code de la consommation

Contestant la compétence territoriale du tribunal saisi, l’ancien franchisé a argué du fait que l’action du franchiseur constituait en réalité une action en concurrence déloyale qui, en raison de sa nature délictuelle, supposait la compétence du tribunal du lieu de situation du défendeur, en l’espèce le tribunal de Montpellier. La question qui pouvait donc se poser était de savoir si la clause contractuelle prévoyant la compétence du tribunal de Strasbourg devait s’appliquer alors que le contrat dans lequel cette clause était insérée avait été résilié au jour de l’assignation. Bien que le juge de la mise en état du tribunal de Strasbourg ait d’abord conclu à l’incompétence du tribunal saisi, le franchiseur a trouvé appui en appel, et cela est tout à fait logique. La résiliation n’emporte pas anéantissement du contrat, à la différence de la nullité ou de la caducité. Par conséquent, la clause attribuant compétence territoriale à un juge nonnaturel continue de produire ses effets en cas de résiliation du contrat, d’autant plus lorsque cette clause attributive de juridiction stipule expressément qu’elle est applicable « en cas de difficulté survenant […] par suite de [la] résiliation [du contrat] pour quelque cause que ce soit ». A rapprocher : Cass. com., 7 février 2012, pourvoi n°11-10.851

La clause attributive de juridiction demeure applicable à la suite de la résiliation du contrat CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639 Ce qu’il faut retenir : Le manquement aux obligations encadrant la période post-contrat est de nature contractuelle de sorte que la clause attributive de juridiction prévue au contrat trouve pleine application bien que le contrat ait été résilié. Pour approfondir : A la suite de la résiliation du contrat de franchise du réseau de stations de lavage automobile « Eléphant Bleu », le franchiseur a assigné son ancien franchisé aux fins de demander l’application de la clause du contrat qui prévoyait que l’ancien franchisé, à la cessation du contrat, devait modifier les couleurs de l’enseigne apposée sur son point de lavage de façon à ne plus créer de confusion avec les couleurs « Eléphant Bleu » (le bleu et le blanc). Faisant application de la clause attributive de juridiction prévue au contrat, le franchiseur a attrait son ancien franchisé devant le tribunal de Strasbourg.

Arbitrage : la notion de clause compromissoire « manifestement inapplicable » ère er Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, pourvois n°14-11.587 et n°14-13.648 (deux arrêts) Ce qu’il faut retenir : En matière d’arbitrage, le principe de « compétence compétence », énoncé à l’article 1448 du Code de procédure civile, pose la règle selon laquelle il appartient à l’arbitre, et à lui seul, de statuer prioritairement sur la validité ou les limites de sa propre compétence, sous le contrôle du juge de l'annulation (c’est l’effet positif de ce principe) ; autrement dit, le juge étatique doit donc se déclarer incompétent lorsqu’un litige relève d’une convention d’arbitrage, sauf – précise le texte – « si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable » (c’est l’effet négatif de ce principe).

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Pour approfondir :  La Cour de cassation et la doctrine rappellent constamment que le caractère manifestement nul ou inapplicable des clauses compromissoires doit être interprété de manière restrictive. Ainsi, un auteur souligne-t-il que « l’inapplicabilité manifeste se constate prima facie. Elle ne suscite aucun doute tellement elle est évidente. Pour cette raison, la Cour de cassation interdit aux juges du fond de procéder à un examen substantiel et approfondi de e la convention d’arbitrage (Cass.1 civ., 7 juin 2006 : Rev.arb. 2006, p.945) » (E. Loquin, Juris-Classeur Procédure civile, Fasc. 1020. Arbitrage, §.67 ; v. aussi, ère Th. Clay, note sous Cass. civ. 1 , 6 octobre 2010, pourvoi n°09-68731, D.2010, p.2441). En effet, selon la Cour de cassation, lorsqu’une interprétation est nécessaire, l’inapplicabilité de la clause n’est pas ère manifeste (Cass. civ. 1 , 30 sept. 2009, pourvoi n°0815.708 : « ... l’argumentation développée par les défenderesses au contredit démontrait par elle-même qu’une interprétation de la situation juridique des différents intervenants était nécessaire, écartant ainsi le moyen retenu par le tribunal, la Cour d’appel a pu en déduire que l’inapplicabilité de la clause compromissoire n’était pas manifeste »). De même, lorsqu’une action est engagée sur le fondement délictuel, notamment pour rupture abusive des relations commerciales, l’inapplicabilité ère de la clause n’est pas manifeste (Cass. civ. 1 , 8 juill. 2010, pourvoi n° 09-67013 (Publié au Bulletin)), pareillement pour une action en nullité d’un contrat de franchise et donc relative à la période ère précontractuelle (Cass. civ. 1 , 4 juill. 2006, pourvoi n°05-17460 (Publié au Bulletin)), ou l’action en responsabilité engagée par l’ancien franchisé, le liquidateur, le dirigeant et la société holding de la société franchisée, contre le franchiseur en nullité du ère contrat (Cass. civ. 1 , 3 fév. 2010, pourvoi n°0912669). Ce faisant, ce corpus de décisions montre aussi que toute la difficulté – s’il en est – tient à l’application du caractère « manifestement inapplicable » de la convention d’arbitrage ; celle-ci étant en effet rarement mal rédigée, il est tout aussi rare de voir l’une ou l’autre des parties soulever son caractère « manifestement nul ».

er

 Par le premier arrêt commenté (Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, pourvoi n°14-11.587), la Cour de cassation retient que la clause compromissoire comprise dans un contrat d’enseigne, en l’espèce conclu entre un distributeur et une tête de réseau de la grande distribution, est « manifestement inapplicable » à l'instance dont elle était saisie, qui concernait, non une contestation relative au contrat d’enseigne, mais le paiement des parts sociales détenues par le dirigeant de la société distributrice dans le capital de la SCI de la tête de réseau. L’auteur du pourvoi faisait valoir : -

d’une part, que la clause d'arbitrage manifestement inapplicable est celle sans lien aucun avec le litige ; qu'une simple relation avec le litige suffit à exclure le caractère manifestement inapplicable de la clause d'arbitrage ; qu'en rejetant l'exception d'incompétence des juridictions étatiques au profit de la juridiction arbitrale, tout en constatant, d'une part, que la clause compromissoire litigieuse contenue dans le contrat de franchise portait sur tous les litiges pouvant survenir entre les parties en exécution de ce contrat et de ses suites et, d'autre part, que la rupture du contrat d'enseigne entrainait le retrait de M. S. par application des dispositions du règlement intérieur de la société, ce dont il résultait que la clause d'arbitrage ne pouvait être réputée manifestement inapplicable dès lors que la perte de la qualité d'associé constituait l'une des conséquences de la résiliation du contrat de franchise, la Cour d'appel a excédé l'étendue de ses pouvoirs et a violé l'article 1448 du Code de procédure civile et le principe compétence compétence ;

-

d’autre part, que de la même manière, la seule circonstance qu'une clause attributive de juridiction soit stipulée par ailleurs ne suffit pas à retenir le caractère manifestement inapplicable de la clause d'arbitrage ; qu'il appartient alors à l'arbitre, à qui il revient de statuer prioritairement sur sa propre compétence, de faire le départ entre le champ d'application respectif de chacune de ces deux clauses ; qu'en rejetant l'exception d'incompétence des juridictions étatiques au profit de la juridiction arbitrale au motif que les statuts de la SCM prévoyait une clause attributive de juridiction désignant le tribunal de grande instance de Paris pour les litiges pouvant naître entre la société et ses associés, cependant qu'il appartenait à la juridiction arbitrale de se prononcer sur le point de savoir si l'existence de cette clause attributive de juridiction faisait échec à la clause compromissoire applicable aux litiges nés de la

Par les deux arrêts commentés, dont on présume qu’ils ont été volontairement rendus le même jour, la première chambre civile de la Cour de cassation contribue de nouveau à tracer les contours de la notion même de la convention d'arbitrage « manifestement inapplicable », dans deux espèces mettant en présence des contrats de distribution.

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rupture du contrat de franchise, la Cour d'appel a excédé l'étendue de ses pouvoirs et a violé l'article 1448 du Code de procédure civile et le principe compétence compétence. La Cour de cassation rejette le pourvoi, et retient que la clause compromissoire comprise dans un contrat d’enseigne, en l’espèce conclu entre un distributeur et une tête de réseau de la grande distribution, est « manifestement inapplicable » à l'instance dont elle était saisie, qui concernait, non une contestation relative au contrat d’enseigne, mais le paiement des parts sociales détenues par le dirigeant de la société distributrice dans le capital de la SCI de la tête de réseau. ère

er

 Par le second arrêt commenté (Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, pourvoi n°14-13.648), la Cour de cassation adopte une solution complémentaire de la précédente.

Elle retient en effet que pour rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société tête de réseau, l'arrêt critiqué, « après avoir relevé l'indivisibilité et l'interdépendance des différents contrats, retient que le simple fait que l'acquisition des parts des sociétés [distributrices] se soit faite par l'intermédiaire et sur la base des éléments fournis par [la société tête de réseau] et que la cession des parts ait été faite à une des structures du groupe ne suffit pas à permettre d'étendre le champ des clauses compromissoires qui figurent dans d'autres actes juridiques que celui attaqué », avant de conclure qu’« en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir le caractère manifestement inapplicable des clauses d'arbitrage stipulées au « protocole » de cession d'actions et au contrat d'enseigne, seul de nature à faire obstacle à la compétence de l'arbitre pour statuer sur l'existence, la validité et l'étendue de ces clauses, la cour d'appel a violé le texte susvisé ». A rapprocher : Cass. com., 25 novembre 2008, pourvoi n°07-21.888

Pour approfondir : Une sentence arbitrale a condamné une société à payer à son ancien cocontractant diverses sommes en réparation du préjudice résultant d’une rupture brutale de relations commerciales établies. Insatisfaite, la partie succombant a introduit un recours devant la Cour d’appel de Paris aux fins d’obtenir l’annulation de la sentence arbitrale au motif que la responsabilité pour rupture brutale de relations commerciales établies, régie par l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce, aurait une nature délictuelle, ce qui exclurait l’application de la clause compromissoire, peu important l’existence d’un cadre contractuel donné à la relation. La Cour de cassation, saisie après que la Cour d’appel de Paris ait rejeté le recours de l’appelante, était appelée à répondre à la question suivante. Les parties pouvaient-elles valablement déroger, par le jeu d’une clause compromissoire, aux articles L.442-6, III et D.442-3 du Code de commerce qui donnent compétence exclusive à certaines juridictions étatiques pour statuer sur les litiges relatifs à la rupture d'une relation commerciale établie ? A cette question, la Cour de cassation répond par l’affirmative et reconnaît la validité de la sentence arbitrale rendue sur le fondement de l’article L.442-6 du Code de commerce en précisant « que l'action aux fins d'indemnisation du préjudice prétendument résulté de la rupture de relations commerciales n'était pas de celles dont la connaissance est réservée aux juridictions étatiques ». La Cour de cassation rappelle également qu’une attention particulière doit être portée à la rédaction de la clause compromissoire pour qu’elle s’applique à la rupture brutale de relations commerciales établies : elle doit traduire la volonté des parties de soumettre à l'arbitrage tous les litiges découlant du contrat. En définitive, lorsque sont invoquées les dispositions de l’article L.442-6 du Code de commerce, la question de la compétence peut se résumer ainsi : -

Arbitrage interne et rupture brutale de relations commerciales établies ère Cass. civ. 1 , 21 octobre 2015, pourvoi n°14-25.080 Ce qu’il faut retenir : Une clause compromissoire peut valablement s’appliquer à un litige interne de rupture brutale de relations commerciales établies.

par défaut, si les parties n’ont rien convenu : la compétence matérielle est attribuée à l’une des huit juridictions visées par l’article D.442-3 C. com., la compétence territoriale est déterminée en fonction des règles habituelles de procédure civile (lieu du siège du défendeur, etc.) ; si les parties ont désigné une juridiction étatique : sous peine d’incompétence, la juridiction choisie devrait figurer parmi les huit juridictions visées par l’article D.442-3 C. com ;

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si les parties ont conclu une clause compromissoire : compétence du tribunal arbitral.

En tout état de cause, qu’elle désigne un tribunal étatique ou un tribunal arbitral, une vigilance particulière devra être portée à la rédaction de la clause d’aménagement de compétence si l’on souhaite qu’elle s’applique aux litiges « non contractuels » découlant du contrat. A rapprocher : Article Annexe 4-2-1 du Code de commerce

Clause compromissoire et action fondée sur l’article L.442-6 du Code de commerce ère Cass. civ. 1 , 21 octobre 2015, pourvoi n°14-25.080

l’article L.442-6 du Code de commerce relèvent de la compétence exclusive des juridictions désignées par l’article D.442-3 du même code. er

La Cour d’appel de Paris, dans une décision du 1 juillet 2014, a ainsi relevé que « si les articles L.442-6 et D.442-3 du code de commerce attribuent de manière impérative à certains tribunaux et, en appel, à la seule cour de Paris, la connaissance des pratiques restrictives de concurrence, et si le premier de ces textes offre aux juges la faculté de solliciter l’avis de la Commission d’examen des pratiques commerciales, de telles dispositions ont pour objet d’adapter les compétences et les procédures judiciaires à la, technicité de ce contentieux mais non de le réserver aux juridictions étatiques ». En conséquence, les juges du fond ont considéré que le tribunal arbitral était compétent pour connaître de l’action en indemnisation fondée sur la rupture de relations commerciales établies.

Ce qu’il faut retenir : Nonobstant les termes de l’article D.442-3 du Code de commerce, un tribunal arbitral est compétent pour connaître d’une action en indemnisation fondée sur l’article L.442-6 du Code de commerce au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies. Pour approfondir : L’article D.442-3 du Code de commerce prévoit que lorsqu’une action est engagée sur le fondement de l’article L.442-6 du Code de commerce, seules les juridictions commerciales limitativement énumérées sont compétentes en première instance et, en appel, seule la Cour d’appel de Paris est compétente pour connaître des appels formés contre les décisions de première instance. En l’espèce, deux sociétés étaient en relation et avaient conclu un contrat de fabrication, lequel contenait une clause compromissoire. Un différend est survenu entre elles ; l’une des sociétés se fondait notamment sur les termes de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce pour obtenir l’indemnisation du préjudice dont elle se prétendait victime du fait de la rupture brutale de leur relation, invoquant le délai de préavis insuffisant dont elle avait bénéficié. Le tribunal arbitral qui avait été saisi du différend opposant les parties s’est déclaré compétent et a condamné l’une des sociétés à verser la somme de 2,5 millions d’euros à son partenaire. La société condamnée a formé un recours contre cette sentence et a soulevé l’incompétence du tribunal arbitral pour statuer sur une telle demande, avançant ainsi notamment le fait que l’application des dispositions d’ordre public de

La Haute Cour confirme la position adoptée par les juges du fond et relève que « la circonstance que le premier de ces textes [l’article L.442-6 du code de commerce] confie au ministre chargé de l’économie et au ministère public une action autonome aux fins de protection du marché et de la concurrence n’a pas pour effet d’exclure le recours à l’arbitrage pour trancher les litiges nés, entre les opérateurs économiques de l’application de l’article L.442-6 ». Ainsi que le souligne la Cour de cassation dans sa décision du 21 octobre dernier, l’action en indemnisation fondée sur l’article L.442-6 du Code de commerce au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies n’est pas de celles dont la compétence est réservée aux juridictions étatiques ; un tribunal arbitral est donc compétent pour connaître d’une telle action. A rapprocher : article D.442-3 du Code de commerce

Cessation des commandes et existence de contestations sérieuses CA Poitiers, 30 octobre 2015, RG n°15/03468 Ce qu’il faut retenir : Le juge des référés ne peut pas ordonner la poursuite d’un contrat et imposer de ce fait à l’une des parties de passer les commandes qu’elle s’était contractuellement engagée à effectuer dès lors qu’il existe des contestations sérieuses.

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Pour approfondir : L’article 873 du Code de procédure civile dispose : « Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. » En l’espèce, la société D., distributeur de produits pharmaceutiques et paramédicaux, a conclu un contrat de distribution exclusive avec la société M. pour une durée d’un an.

En l’espèce, il a été relevé le fait que le contrat prévoyait expressément la possibilité d’une résiliation en cas de manquements par l’une des parties à ses obligations. De ce fait, les juges du fond ont considéré que « le juge des référés ne pouvait s’en tenir au seul caractère ferme et définitif de l’engagement de [la société D.] pour la contraindre à passer commandes en exécution des termes du contrat » et ainsi constaté l’existence de contestations sérieuses, invitant ainsi la société M. à saisir la juridiction compétente afin d’obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la rupture du contrat. A rapprocher : CA Paris, 10 février 2015, RG n°14/02110

Aux termes de ce contrat, la société D. s’engageait à passer commandes auprès de la société M., de 7.500 produits, sans possibilité de revenir sur cet engagement.

Référé-provision et bouleversement des circonstances d'exécution CA Paris, 5 mars 2015, RG n°13/21497 Ce qu’il faut retenir :

Après quelques mois d’exécution du contrat, la société D. n’ayant pas effectué le nombre de commandes qu’elle s’était engagée à passer auprès de la société M., cette dernière a assigné son partenaire devant le juge des référés afin qu’il soit enjoint à la société D. d’effectuer les commandes qu’elle s’était engagée à passer en signant le contrat.

La Cour d'appel de Paris a rendu une décision très contestable en matière de référé-provision alors que le bouleversement des circonstances d'exécution constituait vraisemblablement une contestation sérieuse. Pour approfondir :

Le juge des référés a fait droit à cette demande. Le distributeur a alors relevé appel de cette décision, en invoquant l’existence de contestations sérieuses. Selon le distributeur, l’article 873 alinéa 1 n’était pas applicable dans la mesure où le fait d’enjoindre à une partie d’exécuter ses obligations ne constitue ici, ni une mesure conservatoire, ni une mesure de remise en état. Par ailleurs, le distributeur soutenait que, malgré l’engagement pris en termes de volumes de commandes en signant le contrat, la poursuite du contrat était devenue impossible du fait des circonstances survenues - en effet, les produits que la société D. s’était engagée à commander ne convenait pas aux patients, de sorte que la société D. s’était retrouvée confrontée à une absence de commandes concernant les produits qu’elle s’était elle-même engagée à commander - et dès lors, la suspension du contrat ne revêtait pas un caractère manifestement illicite.

Par un arrêt du 5 mars dernier, la Cour d'appel de Paris a rendu une décision dont la motivation ne peut que faire réagir, et dont la sévérité dans l'application à la lettre des stipulations contractuelles ne peut que surprendre. En l'espèce, une entreprise avait conclu un contrat de 48 mois auprès d'une société de communication, laquelle devait assurer la diffusion d'un message publicitaire dans un hypermarché. L'hypermarché ayant déménagé, la diffusion s'est interrompue avant de reprendre dans une toute autre configuration. Malgré ce, le communicant a exigé le paiement des échéances mensuelles et, devant le refus de son cocontractant, l'a assigné en référé. Le Tribunal de commerce puis la Cour d'appel ont condamné à une provision correspondant au montant des impayés. Mais, la motivation des décisions laisse la part belle aux critiques. En effet, deux circonstances ont été considérées comme déterminantes pour éluder le sérieux des contestations.

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C'est d'abord le déséquilibre significatif qui a été éludé, au motif d'une part que l'argument est évoqué dans le corps des écritures de l'appelante mais sans que la nullité ne soit demandée dans le dispositif. Cela est très surprenant, car l'exception de nullité est une contestation qui peut être sérieuse (à la condition bien sûr que l'argument repose sur de réels griefs bien évidemment) sans pour autant que la nullité soit demandée dans le corps des conclusions. En effet, la nullité est une question qui relève du fond et elle n'a donc pas à être demandée dans le cadre d'une instance en référé. L'on peut en revanche, sans demander la nullité, développer les causes de nullité pour démontrer qu'il existe une contestation sérieuse. La Cour a, qui plus est, relié cette question à la législation sur les clauses abusives - alors que ce fondement n'était pas avancé par l'appelante - pour mieux dire que ce texte n'est pas applicable entre professionnels ; rappelons que l'article L.442-6, I, 2°) du Code de commerce sanctionne entre professionnels les déséquilibres significatifs. Enfin, l'on rappellera que la Cour de cassation a expressément censuré une Cour d'appel qui avait éludé le bouleversement des circonstances économiques pour faire droit à une action en référé provision (Cass. com., 29 juin 2010, n°09-67.369). Cet argument ne semble pas avoir été avancé par l'appelant et le détail des faits n'est pas connu, ce qui explique peut-être que cela n'ait pas été retenu, mais le bouleversement des circonstances économiques qui modifiait l'objet même du contrat aurait peut-être pu (ou dû) permettre de faire échec à une demande de provision. A rapprocher : Cass. com., 29 juin 2010, pourvoi n°0967.369

Le franchiseur peut faire interdire sous astreinte l’activité concurrente de son franchisé CA Montpellier, 17 décembre 2015, RG n°15/04662 Ce qu’il faut retenir : Le juge des référés est compétent pour faire cesser, au besoin sous astreinte, le trouble manifestement illicite résultant de la violation par le franchisé de son obligation de non-concurrence post-contractuelle. Pour approfondir : On le sait, la Cour de cassation a donné il y a environ dix ans une impulsion certaine aux pouvoirs du juge des référés, en affirmant fermement que celui-ci

demeure compétent pour faire cesser un trouble manifestement illicite et trancher toute contestation s’y rapportant, y compris en présence d’une contestation sérieuse (Cass. com., 7 juin 2006, pourvoi n°05-19.633 : « Attendu, selon ce texte, que le juge peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; (…) qu'en écartant l'existence d'un trouble manifestement illicite en considération d'un simple doute sur la résiliation du contrat dont la violation était dénoncée, alors qu'il lui incombait de trancher en référé la contestation, même sérieuse, en examinant la réalité de cette résiliation, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et ainsi violé le texte susvisé »). Cette impulsion a permis notamment d’imposer la poursuite de contrats en cours, à l’encontre de cocontractants ayant décidé unilatéralement de résilier leur contrat ; ce phénomène a été observé dans différentes matières (CA Paris, 21 janvier 2009, RG n°08/15864 : à propos d’un contrat de télésurveillance ; CA Caen, 10 oct. 2013, Juris-Data n°2013-023545 : à propos d’un contrat d’approvisionnement), avant de gagner le droit de la franchise par trois décisions successives (Trib. Com. Montpellier, 18 juillet 2014, RG n°2014010500, et notre commentaire ; Trib. Com. Pontoise, 30 octobre 2014, RG n°2014R00258 ; CA Paris, 10 févr. 2015, n°14/02110, et notre commentaire). Au cas présent, la situation était sans doute plus simple encore que dans les trois décisions précitées, car il ne s’agissait plus d’imposer au franchisé (ayant résilié le contrat) de poursuivre la relation contractuelle, mais de faire cesser le trouble, manifestement illicite, tenant au non-respect par ce dernier de sa clause de non-concurrence postcontractuelle. Cette clause stipulait : « (…) Pendant toute la durée du présent contrat et sauf autorisation écrite du franchiseur, le franchisé s'interdit, directement ou indirectement, pour son propre compte ou par l'intermédiaire ou pour le compte ou en association avec toute personne physique ou morale ou tout associé : 1° de détourner ou de tenter de détourner une activité ou un client de l'entreprise franchisée ou d'une autre entreprise (…) au profit d'un concurrent, par incitation directe ou indirecte ou autrement, ou d'effectuer, directement ou indirectement, tout autre acte nuisible à l'image associée aux marques exclusives et au système ; 2° de retenir ou de chercher à retenir les services, à titre de travailleur salarié ou indépendant ou de consultant à temps pleins ou à

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temps partiel, toute personne alors employés par le franchiseur ou par tout autre activité (…) ou d'inciter directement ou indirectement ladite personne a quitté son emploi ; 3° de posséder, d'entretenir, de conseiller, d'assister ou de franchiser toute entreprise ayant une activité identique ou quasi identique à celles de l'entreprise franchisée, de s'y impliquer d'y être employé de lui faire des préaux d'en détenir une participation majoritaire (…) » ; de même, il était par ailleurs stipulé : « Le franchisé n'utilisera ni les marques exclusives, ni une abréviation quelconque, ni un autre nom associé au franchiseur ou au système pour former une partie quelconque d'une adresse électronique, d'un nom de domaine site Internet, moteur de recherche de tout autre forme d'identification du franchisé dans un médium électronique quelconque sans l'accord préalable par écrit du franchiseur ». La décision de la Cour d’appel de Montpellier retient que : -

la création de l'agence et du site internet du franchisé contrevient indiscutablement à cette obligation ;

-

il convient de constater trouble manifestement illicite que constitue la création déloyale et parasite d'une entreprise commerciale et d'un site Internet concurrent ;

CONCURRENCE Avis n° 15-A-06 du 31 mars 2015 relatif au rapprochement des centrales d’achat et de référencement dans le secteur de la grande distribution Ce qu’il faut retenir : L’Autorité de la concurrence (ADLC), ayant constaté que, dans le secteur de la distribution alimentaire, les distributeurs sont incités à se regrouper aux termes d’accords de coopération générant des risques concurrentiels aussi bien sur les marchés aval de la distribution que sur le marché amont de l’approvisionnement, liés au renforcement du pouvoir d’achat des distributeurs, émet deux types de préconisations dans son avis du 31 mars 2015 : (i) l’introduction d’une obligation légale d’information de l’ADLC de la part des distributeurs pour tout nouvel accord de rapprochement à l’achat préalablement à son entrée en vigueur, et (ii) l’adaptation du dispositif permettant d’appréhender les abus de dépendance économique dans le cadre des relations entre distributeurs et fournisseurs en vue d’assouplir le standard strict actuellement applicable. Pour approfondir :

-

afin de le faire cesser, il y a lieu de faire droit aux demandes de fermeture du site Internet sous astreinte et d'interdiction d'exercer une quelconque activité susceptible de concurrencer la requérante.

A rapprocher : Ord. TC Quimper, 23 août 2012, inédit, et notre commentaire

*****

Il n’appartient certes pas à ADLC, dans le cadre d’une saisine pour avis, de qualifier les comportements sur un marché au regard des articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne et des articles L.420-1 et L.420-2 du Code de commerce. Seule la mise en œuvre d’une procédure pleinement contradictoire, telle qu’organisée par l’article L.463-1 du Code de commerce, lui permet de porter une telle appréciation. Le présent avis a pour objet de fournir aux intéressés une « grille d’analyse » afin de leur permettre de mieux appréhender les enjeux concurrentiels, et d’adapter ainsi, le cas échéant, leur comportement. Par souci de commodité, est reproduite ici la conclusion même de cet avis, dont le texte in extenso est disponible sur le site de l’ADLC (Veuillez cliquer ICI). Conclusion : « 306. Pour autant, l’Autorité identifie certains risques concurrentiels qui peuvent résulter des accords de

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coopération à l’achat entre distributeurs, notamment, des risques de coordination entre les distributeurs ou de limitation de l’offre sur les marchés situés en amont (voir supra §§ 136 à 223). Elle constate que s’ils peuvent générer des gains non négligeables en termes de réduction des coûts d’achat, la probabilité qu’ils génèrent globalement des gains d’efficience susceptibles de compenser les risques identifiés reste incertaine (voir supra §§ 224 à 234). 307. En pratique, la portée de cette analyse des effets est toutefois limitée dans la mesure où le caractère très récent et la variété de ces accords ne permet pas, à ce stade, de se prononcer sur le niveau précis des risques concurrentiels identifiés, sur l’effet cumulatif des accords, ou sur les gains d’ordre qualitatif qui pourraient en résulter. 308. De plus, l’analyse opérée par l’Autorité montre que des disparités importantes existent, tant en ce qui concerne les distributeurs, qu’en ce qui concerne les fournisseurs, suivant les catégories de produits considérées, si bien que les effets pourraient être sensiblement différents suivant le cas d’espèce. Cela implique une analyse au cas par cas qui tienne compte du degré de concurrence qui s’exerce non seulement à l’aval entre les partenaires, et plus globalement sur le marché, mais aussi à l’amont pour chaque catégorie de produits. 309. Le présent avis intervient au moment où le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques prévoit un ensemble de dispositions visant à renforcer la concurrence dans la grande distribution. Ce projet de loi vise tout d’abord à donner à l’Autorité la possibilité de traiter les situations où le niveau de concurrence existant au niveau de certaines zones de chalandises déterminées serait insuffisant, et ce, par l’intermédiaire d’un pouvoir d’injonction structurelle. Il prévoit aussi de permettre à l’Autorité de donner son avis sur les documents d’urbanisme commercial, afin de vérifier notamment qu’ils n’ajoutent pas de conditions qui restreindraient de manière excessive l’implantation des différentes formes de commerce. Il prévoit enfin, suivant les préconisations formulées par l’Autorité dans son avis n° 10-A-25, de renforcer l’animation de la concurrence dans les zones de chalandises en favorisant la mobilité inter-enseignes.

secteur de la grande distribution justifie le maintien de sa vigilance concernant d’éventuels risques de coordination sur le marché aval entre les distributeurs, ou de mise en œuvre de pratiques pouvant affecter la concurrence sur le marché amont de l’approvisionnement, et in fine, la diversité de l’offre proposée au consommateur. 311. L’Autorité a donc proposé l’introduction d’une obligation légale d’information de la part des distributeurs pour tout nouvel accord de rapprochement afin de lui permettre d’assurer son rôle de veille de manière efficace. Cette proposition a été retenue dans le projet de loi précité qui prévoit l’obligation pour les opérateurs d’informer l’Autorité de tout accord de rapprochement à l’achat préalablement à son entrée en vigueur. 312. L’Autorité précise également à l’égard des opérateurs concernés qu’il apparaît souhaitable, lorsqu’ils mettent en place un tel accord, qu’ils s’assurent de l’utilisation de critères objectifs et non discriminatoires aux fins de la sélection des fournisseurs concernés, en tenant compte de l’impact que peuvent avoir leurs rapprochements sur les modes de négociation, et potentiellement sur la situation concurrentielle de l’ensemble des fournisseurs sur les marchés concernés. 313. Enfin, dans un contexte d’accroissement de la puissance d’achat des distributeurs qui pourrait servir d’assise à des pratiques abusives, susceptibles d’avoir un impact sur la concurrence à plus ou moins long terme, et notamment de réduire l’offre ou l’incitation des fournisseurs à investir et innover, l’Autorité évoque des pistes d’adaptation du dispositif permettant d’appréhender les abus de dépendance économique dans le cadre des relations entre distributeurs et fournisseurs en vue d’assouplir le standard strict actuellement applicable. L’Autorité souligne cependant que la question de l’opportunité d’une telle adaptation s’inscrit dans un contexte plus large qui suppose de considérer l’ensemble des autres outils à la disposition de la puissance publique pour traiter des dérives inhérentes au déséquilibre de la relation entre fournisseur et distributeur ». A rapprocher : Avis n° 15-A-06 du 31 mars 2015

310. Le présent avis concerne quant à lui des rapprochements à l’achat et donc la relation des distributeurs avec leurs fournisseurs à l’amont. Si l’Autorité souhaite limiter son intervention dans les négociations commerciales entre les partenaires commerciaux, elle estime que la situation actuelle du  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

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Regroupements de centrales d'achat dans le secteur de la grande distribution et pratiques restrictives de concurrence Réponse ministérielle

Seuils de chiffres d’affaires pour l’information préalable de l’Autorité de la concurrence Décret n°2015-1671 du 14 décembre 2015 Ce qu’il faut retenir :

Ce qu’il faut retenir : Une réponse ministérielle aborde la question lancinante du traitement par les pouvoirs publics des effets anticoncurrentiels éventuels pouvant résulter des accords d'achat groupé.

Le décret n°2015-1671 du 14 décembre 2015, publié au Journal officiel le 16 décembre 2015, est venu déterminer les seuils de chiffre d’affaires fixés pour l’information préalable de l’Autorité de la concurrence en matière d’accords d’achats groupés prévue à l’article L.462-10 du Code de commerce.

Pour approfondir : Pour approfondir : Selon cette réponse ministérielle, de tels accords horizontaux sont susceptibles d'être considérés comme restrictifs de concurrence, lorsqu'ils sont utilisés pour parvenir à une entente déguisée, c'est-àdire à des pratiques interdites telles que la fixation des prix, la limitation de la production, et/ou la répartition des marchés. On le sait, le dispositif de sanction a été renforcé par l'article 34 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 qui permet au juge de porter le plafond de l'amende à 5 % du chiffre d'affaires hors taxes de l'entreprise afin de prendre en compte la puissance économique réelle de l'entreprise à l'origine des pratiques illicites. Selon l'article 34 précité, la quatrième phrase du deuxième alinéa du III de l'article L.442-6 du Code de commerce est complétée par les mots : « ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France par l'auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques mentionnées au présent article ont été mises en œuvre ». De plus, depuis l'entrée en vigueur de la loi n°2014344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, les services de la DGCCRF peuvent enjoindre tout professionnel, en lui accordant un délai raisonnable, de se conformer à ses obligations, de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite, et peuvent également prononcer des amendes administratives sanctionnant les manquements constatés. A rapprocher : M.-E. Pancrazi, Loi Macron Nouveautés dans le secteur de la distribution : JCP E 2015, 1405 ; voir également, l’analyse par Simon Associés de l’article 31 de la loi Macron : Cliquez ICI.

L’article 37 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite loi Macron) est venu insérer, au chapitre II du titre VI du livre IV du Code de commerce, un nouvel article L.462-10 ainsi rédigé : « Doit être communiqué à l'Autorité de la concurrence, à titre d'information, au moins deux mois avant sa mise en œuvre, tout accord entre des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales exploitant, directement ou indirectement, un ou plusieurs magasins de commerce de détail de produits de grande consommation, ou intervenant dans le secteur de la distribution comme centrale de référencement ou d'achat d'entreprises de commerce de détail, visant à négocier de manière groupée l'achat ou le référencement de produits ou la vente de services aux fournisseurs. » L’alinéa 2 du même article précise toutefois que l’obligation d’information de l’Autorité de la concurrence prévue par le texte en cas d’accord d’achats groupés entre des entreprises du secteur de la distribution de produits de grande consommation et/ou centrales de référencement ou d’achats s’applique uniquement « lorsque le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales parties à l'accord et le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé à l'achat en France dans le cadre de l'accord par l'ensemble des parties à l'accord excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat ». Le décret n°2015-1671 du 14 décembre 2015, relatif aux seuils de chiffre d’affaires fixés pour l’information préalable de l’Autorité de la concurrence en matière d’accords d’achats groupés, publié au Journal officiel le 16 décembre 2015, détermine ainsi les seuils visés à l’alinéa 2 de l’article L.462-10 du Code de commerce. Le décret crée un nouvel article R.462-5 du Code de commerce, prévoyant que l'Autorité de la concurrence

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doit être informée de façon préalable des accords d'achats groupés mentionnés au premier alinéa de l'article L.462-10 lorsque deux conditions sont réunies : 1/ le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales parties à de tels accords est supérieur à 10 milliards d'euros ; 2/ le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé à l'achat en France dans le cadre de ces accords par l'ensemble des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales parties à de tels accords est supérieur à 3 milliards d'euros. Le texte précise par ailleurs que pour l’appréciation de ce seuil, deux ou plusieurs accords conclus au cours d'une période de deux années entre les mêmes entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales sont considérés comme un seul accord intervenant à la date du premier. er

Ces dispositions entreront en vigueur dès le 1 janvier 2016. A rapprocher : L’article 37 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite loi Macron)

Injonction structurelle : le renforcement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence jugé non conforme à la Constitution Décision n°2015-715 DC du 5 août 2015 du Conseil constitutionnel

la part d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail, l'Autorité de la concurrence peut procéder aux injonctions et aux sanctions pécuniaires prévues à l’article L.464-2. Si les injonctions prononcées et les sanctions pécuniaires appliquées n'ont pas permis de mettre fin à l'abus de position dominante ou à l'état de dépendance économique, l'Autorité de la concurrence peut, par une décision motivée prise après réception des observations de l'entreprise ou du groupe d'entreprises en cause, lui enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé, tous accords et tous actes par lesquels s'est constituée la puissance économique qui a permis ces abus. Elle peut, dans les mêmes conditions, lui enjoindre de procéder à la cession de surfaces, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective dans la zone de chalandise considérée. » L'article 39 renforçait le pouvoir d'injonction structurelle en prévoyant qu'il s'applique non plus en cas d'abus, mais « en cas d'existence d'une position dominante et de détention par une entreprise ou un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail d'une part de marché supérieure à 50 % » et dès lors que l'Autorité de la concurrence constatait : « 1° D'une part, que cette concentration excessive porte atteinte à une concurrence effective dans la zone considérée ;

Ce qu’il faut retenir :

« 2° D'autre part, que cette atteinte se traduit, dans la même zone, par des prix ou des marges élevés pratiqués par l'entreprise ou le groupe d'entreprise en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné. »

Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions du 2° de l'article 39 de la loi déférée créant une procédure d'injonction structurelle dans le secteur du commerce de détail en France métropolitaine sur le fondement de l'atteinte disproportionnée portée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre.

Saisine. Conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a été saisi. Le texte de la saisine formulait 5 séries de griefs propres à justifier la non-conformité de l’article 39 de la loi Macron à la Constitution ; le texte de la saisine faisait valoir ce qui suit :

Pour approfondir :

« 1/ Le territoire métropolitain ne présente pas de caractéristiques particulières justifiant le renforcement de l'injonction structurelle

Rappel du texte objet de la saisine. L’article L.752-26 du Code de commerce, qui encadre les pouvoirs de l'Autorité de la Concurrence en matière d'injonction structurelle, dispose : « En cas d'exploitation abusive d'une position dominante ou d'un état de dépendance économique de

Comme le rappelle le rapport législatif de l'Assemblée nationale, l'article 39 « s'inspire largement » du dispositif mis en place par l'article 10 de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer (Rapport Assemblée nationale, n° 2498,

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volume 1, p 287). Il convient néanmoins de préciser qu'aux termes de cette loi, l'article L 752-27 du code de commerce met en place une injonction spécifique pour l'outre-mer « eu égard aux contraintes particulières de ces territoires découlant notamment de leurs caractéristiques géographiques et économiques ». L'étude d'impact présentée avec le projet de loi s'attachait d'ailleurs à démontrer les différences structurelles entre les territoires ultra-marins et la métropole pour justifier un projet de loi spécifique de régulation économique en outre-mer (Cf. notamment le chapitre 1er de l'étude d'impact (p 5 à 16)). Ainsi l'article 5 du projet de loi (devenu article 10) avait vocation à « donner à l'Autorité de la concurrence un pouvoir d'injonction structurelle en matière de grande distribution, uniquement en outre-mer où les structures historiques des marchés rendent particulièrement difficile l'installation de nouveaux compétiteurs ». La « loi du pays » du 24 octobre 2013 relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie instaure, dans son article 16, un mécanisme d'injonction structurelle en cas de position dominante prononcée par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, similaire dans son principe à celle prévue par l'article 11 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Et d'ailleurs, si dans sa décision du 1er octobre 2013 « Loi du pays relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie », le Conseil a validé la constitutionnalité de l'injonction structurelle mise en place sur le territoire néo-calédonien, c'est « compte tenu de la situation particulière de la concurrence dans certains secteurs économiques en Nouvelle-Calédonie » (Décision n° 2013-3 LP du 1er octobre 2013 « Loi du pays relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie », cons. 15). Dans la même décision, le Conseil affirme d'ailleurs que la Nouvelle-Calédonie présente des « particularités économiques » et des « insuffisances de la concurrence sur de nombreux marchés » (Décision n° 2013-3 LP du 1er octobre 2013 « Loi du pays relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie », cons. 4). En conséquence, cette décision ne peut aucunement justifier la constitutionnalité du renforcement de l'injonction structurelle en métropole prévu par l'article 39. En effet, comme le relève justement le constitutionnaliste Didier MAUS, l'espace métropolitain n'est pas un « espace économique limité ». « Dans l'Hexagone il est parfaitement possible à des concurrents d'entrer sur le marché, voire de développer leur présence sans être entravés par des barrières géographiques et des distances qui rendent les investissements impossibles. Si dans une zone donnée les conditions du commerce de détail sont attractives, qu'il s'agisse de commerce traditionnel ou

des moyennes et grandes surfaces, il est relativement aisé de créer de nouveaux points de vente et donc de vivifier la concurrence. Les conditions mêmes de l'espace métropolitain rendent donc sans objet les limitations à la liberté d'entreprendre envisagées par la loi Macron (Tribune libre « Loi Macron, concurrence et respect de la Constitution », L'Opinion, 16 avril 2015). » Enfin, les justifications données par l'étude d'impact pour renforcer le pouvoir d'injonction structurelle de l'Autorité de la concurrence sont discutables. Il y aurait nécessité de légiférer au regard de la situation du commerce alimentaire à Paris et d'un seul groupe en particulier. Or, d'une part l'étude d'impact ne tient absolument pas compte des autres formes de commerce, comme par exemple le commerce par Internet qui connait un succès significatif notamment dans la capitale. D'autre part, et en tout état de cause, la situation du commerce à Paris ne saurait justifier une extension générale de l'injonction structurelle à l'ensemble du territoire. 2/ L'article 39 devrait être déclaré inconstitutionnel en ce qu'il porte atteinte à la liberté d'entreprendre, garantie par l'article 4 de la DDHC. Si le Conseil admet que le législateur peut porter atteinte à ces principes, ces limitations doivent être « liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi ». Or, eu égard aux considérations exposées précédemment, contrairement à des territoires insulaires et géographiquement isolés, le commerce en métropole ne souffre pas d'absence de diversité justifiant de porter atteinte aux principes garantis par la Constitution. En outre, les injonctions prononcées par l'Autorité de la concurrence présentent un caractère disproportionné puisqu'elles interviendraient directement dans la vie de l'entreprise, dans sa stratégie économique voire son existence même. Ainsi l'Autorité de la concurrence pourra « enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder six mois, tous accords et tous actes par lesquels s'est constituée la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés. Elle peut, dans les mêmes conditions, lui enjoindre de procéder, dans un délai qui ne peut être inférieur à six mois, à la cession d'actifs, y compris de terrains, bâtis ou non, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective. »

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En autorisant l'injonction de céder des actifs, l'article 39 de la loi relative à la croissance et à l'activité va audelà d'une régulation préventive des concentrations économiques. L'obligation de céder des actifs emportera des conséquences sur la valeur des actifs concernés, et donc sur l'ensemble de la valorisation de l'entreprise. Et tout cela alors même que l'Autorité de la concurrence ne relève pas d'abus de position dominante mais constate seulement « des prix ou des marges élevés ». Autrement dit, la réussite d'une entreprise ou sa stratégie financière qui consiste simplement à pratiquer des prix élevés (le niveau de ces prix pouvant être justifié par exemple par une qualité de produit supérieure) ou bénéficier de marges élevées (le niveau de ces marges pouvant être justifié par exemple par l'objectif de faire des investissements de long terme) justifierait de porter atteinte à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété. Bien que sans faire référence à la liberté d'entreprendre, le Conseil constitutionnel a déjà censuré des dispositifs législatifs conduisant des entreprises à procéder à des cessions d'actifs afin de se conformer à de nouveaux plafonds que le législateur entendait instituer (Décision n° 84-181 DC du 11 octobre 1984, « Loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse », cons. 46 à 50). Aux termes de cette décision, le législateur ne pouvait « s'agissant de situations existantes intéressant une liberté publique, les remettre en cause que dans deux hypothèses : celle où ces situations auraient été illégalement acquises ; celle où leur remise en cause serait réellement nécessaire pour assurer la réalisation de l'objectif constitutionnel poursuivi ». L'analogie est de grand intérêt puisque, mutatis mutandis, c'est ce à quoi conduirait le pouvoir d'injonction structurelle que l'article 39 établit. Le raisonnement est aisément transposable : l'article 39 créant l'injonction structurelle aura pour effet de placer des entreprises dont la situation n'est pas anticoncurrentielle, a fortiori si l'on songe qu'elles ont pu être autorisées de manière préalable au titre des concentrations, sous le coup de mesures restrictives de leur liberté d'action alors même qu'elles n'abusent aucunement de la position qui est la leur. De même, le Conseil a récemment censuré des dispositions de la Loi visant à reconquérir l'économie réelle au motif que le juge (Tribunal de commerce) est conduit à « substituer son appréciation à celle du chef d'une entreprise, qui n'est pas en difficulté, pour des choix économiques relatifs à la conduite et au développement de cette entreprise » et que « l'obligation d'accepter une offre de reprise sérieuse en l'absence de motif légitime et la compétence confiée à

la juridiction commerciale pour réprimer la violation de cette obligation font peser sur les choix économiques de l'entreprise, notamment relatifs à l'aliénation de certains biens, et sur sa gestion des contraintes qui portent tant au droit de propriété qu'à la liberté d'entreprendre une atteinte manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi » (Décision n°2014-692 DC du 27 mars 2014, « Loi visant à reconquérir l'économie réelle », cons. 19 et 20) . En l'espèce, l'article 39 conduit l'Autorité de la concurrence à se substituer au chef d'entreprise et à intervenir dans les choix économiques de l'entreprise. 3/ L'article 39 porte également atteinte au droit de propriété. Aux termes de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ». La disposition est suffisamment explicite pour que le Conseil constitutionnel en fasse strictement application dès lors qu'est en cause l'un des droits que, par ailleurs, le constituant présente comme « naturels et imprescriptibles de l'Homme » (Art. 2, DDHC). En prévoyant que « l'Autorité de la concurrence peut (...) enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder trois mois, tous accords et tous actes par lesquels s'est constituée la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés [et] (...), dans les mêmes conditions, (...) enjoindre de procéder, dans un délai qui ne peut être inférieur à six mois, à la cession d'actifs, y compris de terrains, bâtis ou non, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective », l'article 39 lui est assurément contraire. D'une part, la cession forcée d'actifs autant que la modification ou la résiliation forcée de conventions en cours, l'une et l'autre exigées dans un « délai déterminé » ne peuvent se réaliser que dans des conditions financières défavorables à l'opérateur qui, dans les deux hypothèses, perd par le fait même toute capacité de négocier. Dans le cas de la cession forcée d'actifs, nul n'est besoin de longuement gloser pour démontrer qu'elle emporte nécessairement un effet d'aubaine que l'acheteur serait prompt à exploiter pour bénéficier d'un achat à vil prix. Quant à la modification ou la résiliation forcée de conventions, elle conduit nécessairement l'opérateur à prendre en charge les conséquences financières en résultant pour ses cocontractants. Dans l'un et l'autre cas, il n'est pas

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abusif de considérer que le dispositif emporte dépossession, fût-elle partielle, et, par le fait même, violation du droit de propriété puisque, assurément, c'est la condition du juste prix qui serait ici en cause. La violation se trouve encore aggravée par le caractère non suspensif du recours en annulation ou en réformation que l'opérateur peut engager dans le délai d'un mois, le législateur n'ayant ainsi pas institué les garanties procédurales permettant effectivement qu'il ne fût pas porté atteinte au droit de propriété. D'autre part, le Conseil constitutionnel porte une attention particulière au respect des conditions que l'article 17 de la Déclaration impose en cas de privation du droit de propriété. L'atteinte au droit de propriété résultant de la vente forcée d'actifs devrait donc être justifiée par une nécessité publique, légalement constatée, qui l'exigerait évidemment. Sans nullement en préjuger in concreto, c'est le pouvoir d'appréciation de l'Autorité de la concurrence qui serait alors une fois encore en cause. A titre de comparaison, examinant une disposition du code de l'urbanisme permettant aux communes d'imposer aux constructeurs la cession gratuite d'une partie de leur terrain, le Conseil a considéré que, en attribuant « à la collectivité publique le plus large pouvoir d'appréciation sur » son application, le législateur avait méconnu l'étendue de sa compétence et, par suite, porté atteinte à l'article 17 de la Déclaration (Décision n° 2010-33 QPC du 22 sept. 2010, « Société Esso SAF [cession gratuite de terrain] », cons. 4). Toute chose égale par ailleurs, le même raisonnement peut être appliqué à l'article 39 qui, en n'instituant pas « les garanties permettant qu'il ne soit pas porté atteinte à l'article 17 » (Ibid) , met assurément en cause le droit de propriété par incompétence négative.

4/ L'article 39 porte en outre atteinte au principe de légalité des délits et des peines et méconnait l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi. Alors que l'Autorité de la concurrence peut prononcer des sanctions, le principe de légalité des délits et des peines, garanti par l'article 8 de la DDHC, doit être respecté. Or, les critères qui fondent sa décision restent juridiquement flous, ce qui lui donne une marge d'appréciation significative. Ainsi, celle-ci pourra baser sa décision au regard de « moyennes habituellement constatées » dans la zone de chalandise. La loi ne donne aucune information sur les modalités de calcul de ces moyennes ni sur la manière dont une zone est considérée comme pertinente.

La comparaison des décisions de l'Autorité de la concurrence démontre que l'autorité administrative retient et utilise des critères différents pour qualifier une zone de chalandise, notion qui n'est pas juridiquement définie. Ainsi, par exemple, en juin 2011, dans une même décision, l'Autorité de la concurrence délimite le périmètre des zones de chalandises parfois à partir d'un temps de trajet de 20 minutes en voiture et parfois en utilisant le lieu de résidence des clients (Décision n° 11-DCC-87 du 10 juin 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Media Concorde SNC par la société High Tech Multicanal Group). La subjectivité avec laquelle l'Autorité de la concurrence pourra apprécier la situation et donc, le cas échéant, prononcer des sanctions et des injonctions, porte atteinte au principe de légalité des délits et des peines. L'atteinte au principe de légalité des délits et des peines est d'autant plus avérée que l'article 39 méconnait l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, le Conseil constitutionnel ayant précisé « qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier son article 34 ; que le plein exercice de cette compétence, ainsi que l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration (...) lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ; qu'il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d'arbitraire, sans reporter sur les autorités administratives ou juridictionnelle le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi » (Décision n° 2006-540 DC du 27 juil. 2006, « Loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information », cons. 9). Or, les notions de « concentration excessive », de « zone considérée », de « secteur économique concernée » ou encore de « zone de chalandise concernée » ne sont pas précisément définies. Dans la mesure où ces notions conditionnent la mise en œuvre du pouvoir d'injonction dont l'article 39 dote l'Autorité de la concurrence, leur imprécision est assurément contraire à l'objectif d'intelligibilité. 5/ L'article 39 porte enfin atteinte à la garantie de droits. Le Conseil constitutionnel a progressivement développé sur le fondement de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 une jurisprudence relative à la garantie des droits qui le conduit à considérer que, s'« il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le

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domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autre dispositions », il ne saurait « sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations » (Décision n° 2013-682 DC du 19 déc. 2013, « Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 », cons. 13 et 14). A ce titre encore, et pour deux motifs, l'article 39 devrait être déclaré contraire à la Constitution. D'une part, la garantie des droits est mise en cause dès lors que la situation des entreprises visées par une injonction structurelle est parfaitement légale. En effet, et c'est la particularité en même temps que l'aberration du dispositif, l'article 39 vise à contraindre, au titre du droit de la concurrence, des opérateurs dont la situation n'est pas anticoncurrentielle. Dès lors, c'est bien une situation légalement acquise et les effets qui peuvent légitimement en être attendus qui se trouvent mis en cause sans qu'aucun motif d'intérêt général soit invoqué. Outre qu'il est peu probable que la « stimulation de la concurrence » pût être ainsi qualifiée, l'effet de l'injonction structurelle est assimilable à celui d'une sanction que l'Autorité de la concurrence infligerait au motif qu'elle estime possible que la situation se mue en infraction. Pour le dire autrement, enjoindre une entreprise de prendre toute mesure de nature à faire mettre un terme à une situation qui s'analyserait en une préoccupation de concurrence de l'Autorité de la concurrence, jusques et y compris une cession d'actifs, reviendrait à retirer son véhicule à un automobiliste au motif que, roulant à 110 km/h sur une autoroute, on soupçonnerait qu'il pût ne pas respecter la limitation fixée à 130 km/h. Appliquée à la sphère de l'entreprise, sanctionner l'exercice légal de la liberté pour éviter le risque d'en abuser prend assurément des allures d'économie dirigée et c'est donc la garantie des droits qui se trouve violée. D'autre part, l'injonction « de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder trois mois, tous accords et tous actes pas lesquels s'est constituée la puissance économique » emporterait nécessairement une atteinte grave à l'économie de contrats légalement conclus. Il s'agit là d'un autre aspect de la garantie des droits dont le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de dire que la contribution à la réalisation d'un objectif, fût-il de valeur constitutionnelle, ne suffisait à la justifier (Décision n° 2000-436 DC du 7 déc. 2000, « Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains », cons. 50). Le moyen est sérieux puisque, au-delà même des

effets de l'injonction sur l'opérateur qui en est destinataire, c'est l'ensemble de ses partenaires qui en subiront les conséquences. Seraient ainsi ensemble mises en cause la garantie des droit de l'entreprise visée par l'injonction et la garantie des droits d'autrui, la première se voyant reproché une situation acquise en toute légalité et les seconds d'avoir en toute bonne foi contracté avec une entreprise n'ayant commis aucune irrégularité. L'article 39 encourt donc la censure sur le fondement de la violation de la garantie des droits. Pour l'ensemble de ces motifs, l'injonction structurelle prévue par l'article 39 du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques apparaît donc contraire à la Constitution. » Décision n°2015-715 DC du 5 août 2015 du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions du 2° de l'article 39 de la loi déférée créant une procédure d'injonction structurelle dans le secteur du commerce de détail en France métropolitaine sur le fondement de l'atteinte disproportionnée portée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre. Le Conseil constitutionnel a souligné à juste titre les contraintes que cette procédure pouvait faire peser sur les entreprises concernées, dès lors qu'elle peut conduire à une cession forcée d'actifs, alors même que ces entreprises n'ont commis aucun abus. Le Conseil constitutionnel a par ailleurs relevé que le dispositif institué par le législateur devait s'appliquer à l'ensemble du territoire et à l'ensemble du commerce de détail, alors que l'objectif du législateur était de remédier à des situations particulières dans le seul secteur du commerce de détail alimentaire. Il a également censuré les dispositions du 1° de l'article 39, indissociables de celles du 2° de l'article 39 de la loi déférée. A rapprocher : Voir aussi, le commentaire de l’article 31 de la loi Macron relatif aux relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les commerces de détail (Cliquez ICI).

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Nouvelles règles applicables au programme de clémence Communiqué de procédure du 3 avril 2015 relatif au programme de clémence Ce qu’il faut retenir : L'Autorité de la concurrence a publié le 3 avril 2015 un nouveau communiqué de procédure relatif au programme de clémence, remplaçant le communiqué du 2 mars 2009 relatif au programme de clémence. Il sera appliqué, à compter du 3 avril 2015, pour le traitement de toutes les demandes d’exonération de sanctions pécuniaires reçues à partir de cette date et concernant des affaires dans lesquelles aucune entreprise n’a déjà présenté de demande d’exonération de sanctions pécuniaires au titre du communiqué de procédure du 2 mars 2009. Pour approfondir :  Il convient de rappeler tout d’abord que le programme de clémence français trouve son origine dans la loi (loi n°2001-420 relative aux nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, dite loi NRE), différence notable avec les programmes de clémence applicables dans de nombreux autres Etats, qui résultent souvent de communications adoptées par les autorités de concurrence : en effet, le IV° de l’article L. 464-2 du Code de commerce (modifié depuis la NRE), en fixe le principe même, tandis que l’article R. 464-5 du même code en précise le régime juridique plus en détail. Dans ce contexte, le Conseil de la concurrence avait adopté le 11 avril 2006 un communiqué de procédure relatif au programme de clémence français, dans lequel il avait précisé la manière dont il mettait en œuvre ces dispositions, et le réseau européen de concurrence (REC) s’était accordé, le 29 septembre 2006, sur un « programme modèle » en matière de clémence, préparé par un groupe de travail ; les autorités de concurrence membres du REC s’étaient engagées à mettre tout en œuvre pour homogénéiser leur programme de clémence respectif avec le « programme modèle » commun. Afin de respecter l’engagement ainsi souscrit dans le cadre du REC, le Conseil de la concurrence avait publié, le 29 janvier 2007, un projet de communiqué de procédure révisé, que l’Autorité de la concurrence avait adopté, le 2 mars 2009, aussitôt après sa création. Le programme modèle en matière de clémence avait ensuite fait l’objet d’une révision et une nouvelle version du programme avait été adoptée le 22 novembre 2012 ; cette nouvelle version renforçait

tout particulièrement le système de demandes sommaires, au bénéfice des entreprises et des autorités de concurrence.  Le communiqué publié le 3 avril 2015, modifie le communiqué de procédure relatif au programme de clémence dont la précédente version datait donc de mars 2009, en prenant notamment en compte les résultats de l’étude du 15 avril 2014 relative à la clémence, ainsi que les modifications apportées au programme de modèle européen par le REC de novembre 2012.  Quels sont les innovations issues du nouveau texte ? En premier lieu, la visibilité du conseiller clémence, qui joue déjà aujourd'hui un rôle central pour la mise en œuvre de la procédure, est renforcée : ses fonctions sont détaillées, notamment en tant que point d'entrée pour les entreprises désireuses de déposer une demande de clémence, et de nouvelles clarifications sont apportées pour tenir compte des résultats de la consultation publique. Le nouveau communiqué explicite ensuite les étapes-clés de l'instruction de la demande de clémence, en particulier entre le moment où le délai imparti pour la transmission des informations et éléments de preuves fondant la demande est échu et le moment où la séance devant l'Autorité – préalable à l'adoption d'un avis de clémence – se tient. Ce point a également fait l'objet d'adaptations sur la base des résultats de la consultation publique. En deuxième lieu, l'Autorité de la concurrence intègre un certain nombre de principes développés dans le cadre de sa pratique décisionnelle. Les précisions apportées sont de deux ordres : elles visent (i) à clarifier les obligations des entreprises en matière de coopération avec l'Autorité et (ii) à apporter des précisions quant aux entités juridiques bénéficiaires d'une seule et même demande de clémence. En troisième lieu, le nouveau communiqué intègre une innovation majeure prévue dans la version révisée de 2012 du programme modèle de clémence : l'extension de la recevabilité des demandes sommaires à toute demande, quel que soit son type et son rang d'arrivée. Cette innovation est de nature à alléger les charges administratives induites par le dépôt d'une demande de clémence, lorsque plusieurs autorités de concurrence en Europe sont susceptibles d'être compétentes. En quatrième lieu, l'Autorité de la concurrence a souhaité apporter deux modifications substantielles au communiqué intégrant les demandes exprimées dans les réponses à la consultation publique. Elle précise

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ainsi dans le communiqué de procédure que les communiqués de presse publiés à la suite d'opérations de visite et saisie ne mentionneront pas l'identité des entreprises visitées et que leur contenu sera rédigé dans le respect du principe de la présomption d'innocence. Il est enfin précisé que lorsqu'un communiqué de presse est publié à la suite d'opérations de visite et saisie, l'Autorité publiera un second communiqué de presse dans l'hypothèse où elle décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'enquête ou clôt l'affaire au bénéfice d'entreprises visitées. Enfin, le communiqué prévoit d'accroître la transparence pour les entreprises en publiant des fourchettes de réduction pour les demandeurs de type 2, tout en faisant en sorte qu'elles se chevauchent pour partie afin de conserver une nécessaire flexibilité permettant de récompenser la qualité des éléments fournis. A rapprocher : Le programme de Clémence français (ADLC)

Lourdes sanctions infligées à une entente entre fournisseurs de la grande distribution alimentaire ADLC, 11 mars 2015, décision n°15-D-03 Ce qu’il faut retenir : L’Autorité de la concurrence a prononcé 192,7 millions d’euros d’amende à l’encontre de fournisseurs de produits laitiers sous marques de distributeur, pour s’être entendus sur les prix de vente de leurs produits aux distributeurs de la grande distribution alimentaire.

et avait pour objet de coordonner les demandes de hausses tarifaires des fournisseurs auprès de la grande distribution. Ainsi, les fournisseurs concurrents s’échangeaient secrètement des informations sur les hausses de prix qu’ils avaient pratiquées, et fixaient ensemble les hausses à venir, ainsi que les arguments qu’ils évoqueraient pour les justifier (notamment en évoquant des hausses de matières premières). En dehors de la fixation des augmentations tarifaires, les fournisseurs avaient également conclu des accords sur les volumes (sous formes de récupération ou de compensation de volumes, d’accords de gel de volumes, ou encore d’accords sur les cotations lors de certains appels d’offres initiés par les distributeurs). Ces accords avaient pour objet de permettre à un fournisseur qui perdait des volumes, de les récupérer par un autre biais. Cette entente a été dénoncée par l’un de ses participants – comme c’est de plus en plus souvent le cas –, l’entreprise étant à l’origine de la dénonciation ayant pu ainsi bénéficier d’une exonération totale de sanction, en contrepartie de sa coopération avec l’Autorité de la concurrence, et ce en application de la procédure de clémence (elle a ainsi évité une sanction de 44,7 millions d’euros d’amende). Une autre entreprise a bénéficié du programme de clémence en se présentant comme demandeur de clémence de second rang après les opérations de visites et saisies menées suite à la dénonciation de l’entente par la première entreprise, et a ainsi vu sa sanction non pas écartée mais réduite (de 101,3 millions à 46 millions d’euros d’amende, ce qui représente tout de même l’amende la plus lourde prononcée dans la décision).

Dans une décision n°15-D-03 du 11 mars 2015, et après les imposantes sanctions prononcées à la fin de l’année 2014 à l’encontre de fournisseurs de produits d’entretien, d’insecticides, d’hygiène et de soin pour le corps (plus de 950 millions d’euros), l’Autorité de la concurrence sanctionne cette fois, pour les mêmes types de motifs, des fournisseurs de produits laitiers vendus sous marques de distributeur (MDD) aux distributeurs du secteur de la grande distribution alimentaire. Cette décision mérite qu’on s’y attarde pour en dégager les principaux enseignements.

Considérant que les pratiques des fournisseurs étaient particulièrement graves, compte tenu de leur ampleur (puisqu’elles couvraient tout le territoire national et représentaient plus de 90% du marché), et du fait qu’elles portaient sur des produits de consommation courante, l’Autorité de la concurrence a entendu faire preuve de sévérité. Cette sévérité a d’ailleurs été aggravée, selon l’Autorité de la concurrence, par le fait que l’entente était demeurée secrète et avait fait l’objet d’une mise en œuvre sophistiquée (notamment au moyen de rencontres dans des lieux différents, y compris aux domiciles privés des participants, par l’utilisation de téléphones personnels, sur des lignes pour certaines souscrites par des tiers, etc.).

L’entente, qui s’est déroulée entre 2006 et 2012 (avec une durée variable selon les entreprises concernées), impliquait au total 11 fournisseurs de produits laitiers

Si l’Autorité de la concurrence a tenu compte des difficultés financières de certaines entreprises pour adapter ses sanctions, l’Autorité de la concurrence a

Pour approfondir :

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néanmoins prononcé un total de 192,7 millions d’euros d’amende à l’encontre de 10 fournisseurs, allant pour chacun d’entre eux de 300.000 euros à 46 millions d’euros d’amende. A rapprocher : Avis de l’Autorité de la concurrence n°14-D-19 du 18 décembre 2014

s’engager à ne plus stipuler de telles clauses dans les contrats conclus avec les hébergements. Booking.com er a mis en œuvre ses engagements le 1 juillet 2015. En l’espèce, cinq syndicats hôteliers français – l’UMIH, le GNC, la CPIH, le SYNHORCAT et la FAGIHT – ainsi que le groupe hôtelier Accor, ont saisi l’Autorité de la concurrence, qui a joint l’instruction des affaires le 25 février 2015. I. Les griefs soulevés par les parties saisissantes

L’engagement de Booking.com devant l’Autorité de la concurrence : la fin des clauses de parité ? Décision n°15-D-06 du 21 avril 2015 de l’Autorité de la concurrence française Ce qu’il faut retenir : La plateforme de réservation hôtelière en ligne Booking.com s’est engagée à cesser de stipuler des clauses de parité dans ses contrats avec les er hébergements partenaires à partir du 1 juillet 2015.

Les parties saisissantes ont exposé six griefs à l’encontre du site de réservation et de référencement en ligne des hôtels Booking.com, lui reprochant d’imposer aux hôteliers dans ses Conditions Générales de Prestations (les « CGP ») : -

« des clauses contractuelles dites «de parité», en vertu desquelles les plateformes exigent des hôteliers de bénéficier d’un tarif, d’un nombre de nuitées et de conditions d’offre (conditions de réservation, inclusion ou non du petit-déjeuner, etc.) au moins aussi avantageux que ceux proposés sur les plateformes concurrentes ainsi que sur l’ensemble des autres canaux de distribution (en ligne et hors ligne), parmi lesquels les canaux de distribution propres à l’hôtel (site Internet, téléphone, e-mail, au comptoir de l’hôtel, etc.) ;

-

des commissions prohibitives ;

-

des clauses contractuelles donnant le droit aux plateformes d’utiliser le nom de l'hôtel, ce qui leur permettrait ainsi d'améliorer leur référencement au détriment de celui des sites Internet de réservation des hôtels et de lancer des campagnes marketing sur Internet ;

-

des clauses contractuelles interdisant à l'hôtelier de contacter directement les clients obtenus via ces intermédiaires, ce qui permettrait aux plateformes de garder la mainmise sur les clients de l'hôtel ;

-

des clauses de suspension et/ou résiliation unilatérale ;

-

des clauses d’exonération de responsabilité. »

Pour approfondir : Le 21 avril 2015, l’Autorité de la concurrence a rendu une décision contraignant la plateforme de réservation hôtelière en ligne (Online Travel Agency ou OTA) Booking.com à cesser de stipuler dans ses contrats avec les hôtels référencés sur son site des clauses de parité. Les clauses de parité interdisent à un hôtelier de proposer, elle-même ou par le biais d’autres OTA, des conditions plus favorables que celles proposées par une OTA spécifique à ses clients. En l’espèce, le site Booking.com avait l’habitude de soumettre ses hébergements partenaires à une obligation de parité des tarifs, des conditions et des disponibilités : ainsi les hébergements ne pouvaient proposer à leurs clients des tarifs, conditions ou disponibilités plus avantageux que ceux proposés par Booking.com sur son site. Le groupe hôtelier Accor et plusieurs syndicats hôteliers français ont saisi l’Autorité de la concurrence afin que celle-ci se prononce sur la conformité des pratiques de Booking.com aux articles 101 et 102 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) ainsi qu’aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce. L’Autorité a jugé que les pratiques de Booking.com ne soulevaient pas de préoccupations de concurrence et n’a pas engagé de procédure au fond. Elle a cependant eu recours à la procédure d’engagements, contraignant ainsi Booking.com à

(directes

ou

indirectes)

Les parties saisissantes considéraient que ces clauses constituaient, d’une part, des « restrictions verticales de concurrence », prohibées par l’article L. 420-1 du Code de commerce et l’article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (le « TFUE »), et, d’autre part, un « abus de position dominante »,

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prohibé par l’article L. 420-2 du Code de commerce et l’article 102 du TFUE. II. Les moyens de Booking.com L’Autorité de la concurrence s’est particulièrement intéressée aux problèmes que posent les clauses de parité. Elle a ainsi exposé les justifications apportées par Booking.com pour l’utilisation de telles clauses. Tout d’abord, Booking.com explique que ces clauses permettent de « limiter le parasitisme » : en effet, les plateformes telles que Booking.com se rémunèrent par une commission perçue sur le prix de séjour dépensé par un client ayant réservé sur la plateforme. Si aucune réservation n’est faite, Booking.com n’est pas rémunéré pour le référencement en ligne procuré aux hébergements partenaires. Ainsi, si la clause de parité venait à disparaître, Booking.com craint que les clients ne se servent de la plateforme qu’à titre de site de référencement d’hôtels, sans jamais effectuer de réservation sur Booking.com, préférant ainsi réserver par le biais d’autres plateformes ou les canaux en ligne et hors ligne de l’hôtel, qui proposeraient des prix ou disponibilités plus avantageux. Deuxièmement, Booking.com ajoute que les clauses de parité permettent de « garantir le meilleur prix et limiter les coûts de recherche » : les clients potentiels verraient leurs coûts de recherches augmentés si les plateformes ne garantissaient plus le « meilleur prix ». Une conséquence possible serait l’augmentation du tarif des nuitées, notamment puisque les hôtels pourraient considérer que les clients ne seront plus en mesure d’identifier des tarifs avantageux. Enfin, Booking.com indique que les clauses de parité permettent d’« éviter une distorsion de concurrence entre petits et grands hôtels ». Booking.com argumente que la disparition des clauses de parité atténuerait fortement la distinction entre les fonctionnalités de recherche et de comparaison offertes par les plateformes de réservation en ligne et par des moteurs de recherche ou sites comparateurs. Les grands hôtels bénéficieraient dans cette hypothèse d’une plus grande visibilité que les petits, puisqu’ils sont en mesure de référencer directement leur site sur les moteurs de recherche et sites comparateurs.

III. La décision de l’Autorité de la concurrence En vertu de l’article L. 464-2 du Code de commerce, l’Autorité de la concurrence peut mettre en œuvre une procédure d’engagements, c’est-à-dire une

procédure par laquelle elle va accepter que l’entreprise ou l’organisme auquel on reproche une activité anticoncurrentielle s’engage à cesser toute pratique soulevant de telles préoccupations. C’est la procédure que l’Autorité a engagée en l’espèce. Les engagements initialement proposés par Booking.com ont été révisés par l’Autorité, assistée d’autres autorités nationales de la concurrence de l’Union Européenne. En effet, ces autorités ont mis en place, avec le soutien de la Commission européenne, une coopération renforcée afin de traiter d’affaires similaires présentées devant les juridictions nationales. L’Autorité a jugé que les clauses insérées par Booking.com dans ses CGP ne soulevaient, à l’exception des clauses de parité, aucune préoccupation de concurrence. Quant aux clauses de parité, l’Autorité a accepté engagements de Booking.com : la plateforme réservation en ligne s’est engagée à supprimer clauses de parité tarifaire, de conditions et disponibilités de ses CGP.

les de les de

Concrètement, cela signifie que Booking.com s’engage à ne plus obliger les hébergements partenaires à proposer, eux-mêmes ou par le biais d’autres plateformes de réservation en ligne : -

-

des tarifs au moins équivalents à ceux proposés sur le site de Booking.com ; des conditions (par exemple le petit-déjeuner inclus ou le spa) au moins aussi avantageuses que celles proposées sur le site ; et des disponibilités qui n’apparaissent pas sur le site.

Cependant, l’Autorité fait une distinction entre les canaux en ligne et hors ligne des hôteliers dans le cas des clauses de parité tarifaire. En effet, Booking.com ne s’est pas engagée à supprimer les clauses de parité obligeant les hôteliers à ne proposer sur leurs canaux en ligne (site internet) que des tarifs de nuitées supérieurs ou équivalents à ceux proposés par Booking.com. Seuls les tarifs avantageux proposés sur les canaux hors ligne (par exemple, lorsque des réservations sont effectuées par téléphone, par le biais d’une agence de voyage ou en personne à la réception) échappent à la stipulation d’une clause de parité.

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En acceptant ces engagements, l’Autorité considère que toute préoccupation de concurrence est éliminée et il ne pourrait être reproché à Booking.com d’appliquer des pratiques anticoncurrentielles. Cette décision s’inscrit dans un contexte national et européen de suppression des clauses de parité. En effet, le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances (dite loi Macron) prévoit en son article 33 octies A la modification de l’article L.311-5-1 alinéa 2 en ces termes : « L’hôtelier conserve la liberté de consentir au client tout rabais ou avantage tarifaire, de quelque nature que ce soit, toute clause contraire étant réputée non écrite ». De plus, cette condamnation des clauses de parité n’est pas cantonnée au milieu hôtelier. Le 11 juin 2015, la Commission Européenne a ouvert une procédure formelle d’examen à l’encontre d’Amazon, qui a inséré des clauses de parité dans ses contrats avec des maisons d’éditions. En effet, ces clauses stipulent au profit d’Amazon : -

-

« Le droit d’être informée de toutes conditions différentes, voire plus favorables, accordées à ses concurrents ; et/ou Le droit de bénéficier de modalités et de conditions analogues à celles qui sont accordées à ses concurrents ».

La Commission entend ainsi examiner si de telles pratiques contractuelles constituent un abus de position dominante ou des pratiques commerciales restrictives. A rapprocher : Aut. conc., déc. n° 15-D-06, 21 avril 2015 sur les pratiques mises en œuvre par les sociétés Booking.com B.V., Booking.com France SAS et Booking.com Customer Service France SAS dans le secteur de la réservation hôtelière en ligne

Pour approfondir : Cette décision de l’Autorité de la concurrence est intéressante en ce qu’elle vient rappeler et préciser utilement quels sont les trois indices permettant de caractériser l’existence d’une entente sur les prix convenue entre un fabricant et un ou plusieurs distributeurs avant de rechercher si ceux-ci étaient ou non réunis en l’espèce. Il était ici reproché à un constructeur de consoles de jeux vidéo d’avoir émis des recommandations de prix pour la revente de ses produits auprès de ses distributeurs par le bais d’une conférence de presse qui s’était tenue à Londres et, qui plus est, en anglais. En effet, il avait annoncé lors de ce communiqué le prix de vente « estimé » de ses produits sur le marché européen. En outre, les distributeurs auraient ensuite fait l’objet d’une surveillance destinée à contrôler l’application effective des prix évoqués et, enfin, il résultait de l’ensemble des pièces versées aux débats que ces prix évoqués avaient été suivis par la majorité des distributeurs. A la lumière de ce faisceau d’indices, ce constructeur aurait alors convenu d’une entente sur les prix de revente au consommateur de ses produits avec l’ensemble de ses distributeurs, pratique qui est contraire aux articles L.420-1 du Code de commerce et 101 du TFUE. Il est fait le même grief s’agissant, cette fois, de l’annonce d’une baisse de prix de ses produits par le même constructeur qui avait été reprise dans un article du Figaro. Pour rendre sa solution, l’Autorité de la concurrence rappelle d’abord que, de jurisprudence constante (Cass. com., 07 avr. 2010, n°09-11.853), la preuve d’une entente verticale sur les prix convenue entre un fabricant et un ou plusieurs distributeurs résulte de la réunion d’un faisceau d’indice précis, graves et concordants comprenant : -

L’annonce publique du prix de vente de ses produits par le fournisseur constitue une évocation des prix er ADLC, 1 déc. 2015, 15-D-18

-

Une évocation des prix : les prix de revente des produits au public doivent être évoqués entre le fournisseur et le distributeur ; Une police des prix : le fournisseur doit contrôler les prix de revente pratiqués par les distributeurs ; Un taux de respect suffisamment élevé : les prix évoqués doivent être appliqués de manière quasiuniforme par l’ensemble des distributeurs.

Ce qu’il faut retenir : L’annonce du prix de vente « estimé » de ses produits par un fournisseur à l’occasion d’une communication publique constitue une évocation des prix qui est nécessaire mais insuffisante pour établir qu’une entente sur les prix a effectivement été convenue entre ce dernier et un ou plusieurs distributeurs.

S’agissant du premier indice, est-ce qu’une annonce indiquant le prix de vente « estimé » de ses produits par le constructeur lors d’une conférence de presse suffit à caractériser l’existence d’une évocation des prix au sens de la jurisprudence précitée ? L’Autorité de la concurrence commence par rappeler que « l’évocation des prix de vente entre un fournisseur et

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ses distributeurs s’entend de tout procédé par lequel le fournisseur fait connaître à ses distributeurs le prix auquel il souhaite que son produit soit vendu au consommateur, sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence d’une négociation préalable » (point 141) pour en déduire alors que, comme « la jurisprudence nationale interprète donc de manière extrêmement large la notion d’évocation des prix, en incluant toutes les formes de communication susceptibles d’être utilisées par un fournisseur pour diffuser auprès de ses distributeurs des prix de vente conseillés », l’évocation des prix peut aussi avoir lieu « à l’occasion d’un évènement médiatique comme une conférence de presse dont l’objectif est précisément d’inviter des journalistes à relayer des informations auprès des consommateurs ou des professionnels d’un secteur » (point 142). Ainsi, pour retenir en l’espèce que cette annonce du prix de vente « estimé » de ses produits par le constructeur faite à l’occasion d’une conférence de presse constituait bien une évocation des prix, l’Autorité de la concurrence relève que : -

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-

ces annonces « concernaient bien le marché français et visaient la diffusion, pour les produits concernés, de prix de vente au détail conseillés à destination des distributeurs » (point 144) ; le même jour que la tenue de la conférence de presse, le constructeur avait clairement annoncé, en langue française, que son produit serait vendu à un prix « conseillé » de X… euros sur son site européen (point 145) ; les médias français avaient largement relayé auprès du public les prix de vente diffusés par le constructeur, en les présentant comme des prix de vente au consommateur, sans que ces informations ne soient à aucun moment démenties par le constructeur (point 146).

Ces éléments suffisent alors à caractériser une évocation des prix. Ceci dit, pour le second grief, l’Autorité de la concurrence estime que l’annonce d’une baisse du prix de l’un seulement de ses produits phare par le constructeur, reprise par un article du Figaro, ne constituait pas une évocation des prix dans la mesure où elle ne concernait pas le prix de détail mais de gros, donc du fournisseur à l’égard de ses distributeurs et non pas des consommateurs (point 166). Ce deuxième grief est donc rejeté (point 167). S’agissant du deuxième indice, l’Autorité de la concurrence rappelle qu’il suffit de prouver, par exemple, que le fournisseur contrôlait régulièrement les prix pratiqués par ses distributeurs pour caractériser l’existence d’une police des prix sans qu’il

ne soit nécessaire d’établir que les distributeurs aient subi des « représailles » en bonne et due forme de la part du fournisseur dans le cas où ceux-ci n’auraient pas respecté les prix évoqués (point 156). En l’espèce, l’Autorité de la concurrence a notamment relevé que certains distributeurs ne faisaient état d’aucune visite des commerciaux de la marque dans leurs locaux et que, dans le cas contraire, celles-ci n’étaient que ponctuelles et ne portaient pas, la plupart du temps, sur les prix qu’ils pratiquaient (point 157). Par ailleurs, l’Autorité constate qu’aucun élément du dossier ne permet de rapporter la preuve « d’éventuels reproches ou de mesures de représailles mises en œuvre par la constructeur » (point 158) et en conclut que les quelques relevés de prix effectués par le constructeur dans les locaux des distributeurs lors de certaines de ces visites étaient insuffisants, à eux seuls, pour caractériser l’existence d’une police ou d’une surveillance des prix de la part du constructeur (point 159). Le premier grief doit donc ici aussi être rejeté « sans qu’il soit nécessaire d’examiner la troisième branche du faisceau d’indices concernant l’application significative par des distributeurs des prix évoqués par le fournisseur » (point 160). A rapprocher : ADLC, 20 déc. 2007, n°07-D-50

Condamnation record d’Orange pour des abus sur le marché de la clientèle « entreprise » Décision 15-D-20 de l’ADLC du 17 décembre 2015 Ce qu’il faut retenir : L’Autorité de la concurrence inflige une amende de 350 millions d’euros à Orange et lui impose des injonctions pour quatre pratiques d’abus de position dominante sur le marché de la clientèle « entreprise » depuis la moitié des années 2000. Pour approfondir : Bouygues Telecom en avril 2008 (dont celle-ci s’est désistée en avril 2014), puis SFR en aout 2010, ont saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles reprochées à Orange sur le marché de la clientèle « entreprise ». La position dominante d’Orange sur les marchés en cause n’est pas contestée et ressort notamment, sur le marché des services fixes à destination de la clientèle non résidentielle, de son ancien monopole historique sur la gestion de la boucle locale cuivre, et, sur le

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marché des services mobiles à destination de la clientèle non résidentielle, de sa forte part de marché (70% sur l’ensemble des services fixes et mobiles en 2008). Dans ce contexte, des pratiques tendant à freiner le développement de la concurrence et/ou évincer la concurrence étaient susceptible d’avoir un impact majeur sur la concurrence et de constituer des abus de position dominante condamnables.

délais, selon les conditions, et à un niveau identique de fiabilité et de performance que ceux dont bénéficient ses propres services commerciaux ; -

prendre toutes les mesures nécessaires utiles pour faire cesser les pratiques de remises fidélisantes et s'abstenir à l'avenir de mettre en œuvre des pratiques ayant un objet ou des effets équivalents ;

-

cesser de pratiquer la remise d'exclusivité pour les prestations VPN et s'abstenir de mettre en œuvre toute pratique équivalente.

Ses concurrents reprochaient à Orange les pratiques suivantes : -

-

-

-

Sur le marché de détail des services « fixes » à destination des entreprises : la discrimination dans l’accès des concurrents aux informations relatives à la boucle locale ; Sur le marché des services mobiles : la mise en œuvre par Orange de son programme « Changer de Mobile » conduisant à une fidélisation anticoncurrentielle de la clientèle ; Sur l’ensemble du secteur non résidentiel : la mise en place d’un système de remises fidélisantes en fonction de la durée de l’engagement et du nombre de lignes ouvertes ayant de potentiels effets de verrouillage du marché et d’éviction des concurrents ; De juillet 2006 à juillet 2015, la mise en place d’une remise d’exclusivité pour les prestations de réseaux privés virtuels (VPN).

A rapprocher : Sur la position dominante de France Telecom – Décision n° 05-D-59 du Conseil de la concurrence du 8 novembre 2005

Droit de préemption et Pratique anticoncurrentielle CA Metz, 27 janvier 2015, RG n°15/00042 Ce qu’il faut retenir : N’encourt pas la nullité le pacte de préférence ou droit de préemption ne limitant pas la possibilité de rachat du fonds de commerce par des groupes de distribution concurrents. Pour approfondir :

L’Autorité de la concurrence, dans sa décision, souligne la particulière gravité de ces pratiques tenant, notamment, à leur durée (près de 10 ans), à la « fluidité réduite » du marché en cause, et au fait qu’Orange, opérateur historique occupant de ce fait une position stratégique dans le secteur des communications électroniques, assume une responsabilité particulière. En définitive, Orange ne conteste ni les griefs qui lui ont été notifiés par l’Autorité, ni la sanction qui lui est infligée, ni les injonctions qui lui sont imposées pour rétablir un fonctionnement concurrentiel du marché. L’Autorité précise dans son communiqué de presse que cette amende constitue à ce jour la sanction la plus élevée qu’elle ait jamais prononcée pour une entreprise individuelle. Cette lourde sanction est assortie d’injonctions comportementales mises à la charge d’Orange ; Orange devra : -

mettre en place dans un délai de 18 mois un dispositif garantissant la fourniture aux opérateurs des informations de la boucle locale cuivre issues des mêmes sources, dans les mêmes

L’arrêt commenté rappelle qu’il est de jurisprudence constante que le pacte de préférence ou le droit de préemption peut être considéré comme une pratique anticoncurrentielle quand bien même seule la liberté de choisir son contractant est affectée par le pacte et qu'il n'oblige pas les parties à conclure le contrat pour lequel la préférence est donnée, le cédant n'étant pas obligé de céder le fonds et le bénéficiaire n'étant pas obligé de l'acquérir. L’arrêt souligne qu’il convient donc de rechercher si le droit de préemption figurant dans un contrat de franchise, valable durant toute la durée de cette convention et cinq ans après son échéance, a limité la possibilité de rachat de tout ou partie du fonds de la société K… par des groupes de distribution concurrents de la société C… et a restreint artificiellement le jeu de la concurrence sur le marché du détail de la distribution à dominante alimentaire. En l'espèce, la Cour retient que le droit de préemption tel que figurant à l'article 4.1 du contrat de franchise liant la société C… et la société K… ne limite pas la

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possibilité de rachat du fonds de commerce par un groupe de distribution concurrent et ce, avant même l'arrivée à échéance du contrat, dès lors que : -

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d'une part, ledit droit met comme seule condition pour la mise à l'écart du compromis de vente passé entre la société K… et un groupe de distribution concurrent, la décision de la société C… de faire une offre à prix et conditions égales ; d'autre part, le franchisé ne soit pas placé dans une position captive c'est-à-dire ait toute latitude pour procéder à une cession totale ou partielle du fonds et, dans ce dernier cas, conserver à son profit les activités qu'il détermine.

Pour conclure sur ce point, la Cour retient que l'analyse faite par elle sur le point précédent relatif à l'absence de rupture anticipée du contrat de franchise imputable au franchisé confirme, dans l'interprétation qu'elle en fait, que ledit contrat ne s'inscrit pas dans une pratique anticoncurrentielle et de nature à restreindre artificiellement le jeu de la libre concurrence. A rapprocher : CA Metz, 27 janvier 2015, RG n°12/02421.

Droit de préemption et pratiques anticoncurrentielles CA Metz, 27 janvier 2015, RG n°12/02421 Ce qu’il faut retenir : Le droit de préemption stipulé au profit d’un franchiseur n’est pas entaché d’illicéité dès lors qu’il ne limite pas la possibilité de rachat de tout ou partie du fonds de commerce de la société franchisée par des groupes de distribution concurrents du franchiseur. Pour approfondir : Le 31 octobre 2003, une société exploitant une activité de boucherie, à laquelle elle a adjoint une activité de boulangerie industrielle et d’épicerie, a conclu un contrat de franchise. Par acte sous seing privé du 13 avril 2006, le franchisé convient avec une autre société de distribution alimentaire, sous réserve de l'agrément du franchiseur, comme l'exige l'article 4.2 du contrat de franchise, d’une cession du fonds à l'exclusion de la branche boucherie-charcuterie traditionnelle et de la fabrication du point chaud. Le 12 juillet 2006, le franchiseur refuse de donner son agrément à cette

opération et, se fondant sur diverses violations du contrat de franchise par le franchisé, décide de résilier unilatéralement le contrat de franchise en se prévalant des manquements de la société franchisée. Par acte authentique du 21 juillet 2006, la cession prévue par l'acte sous seing privé du 13 avril 2006 est réalisée entre les deux sociétés moyennant un prix de 230.000 €. Par suite, le franchiseur assigne son exfranchisé et le cessionnaire au motif que la rupture est intervenue aux torts de la société franchisée dès lors que cette dernière a violé le pacte de préférence prévu au contrat de franchise en cédant une partie de son fonds de commerce à un concurrent, sans lui permettre de faire jouer ses droits de préférence et d’agrément contractuels. La Cour d’appel, après avoir précisé que le pacte de préférence aurait dû être intitulé droit de préemption dans le contrat de franchise, estime qu’il n’est entaché d’aucune illicéité, avant de conclure que la société franchisée n’a pas violé le pacte. Sur la licéité du droit de préemption, la Cour rappelle qu'il est de jurisprudence constante que le pacte de préférence ou le droit de préemption peut être considéré comme une pratique anticoncurrentielle quand bien même seule la liberté de choisir son contractant est affectée par le pacte et qu'il n'oblige pas les parties à conclure le contrat pour lequel la préférence est donnée, le cédant n'étant pas obligé de céder le fonds et le bénéficiaire n'étant pas obligé de l'acquérir. En l’espèce, il convient de rechercher si le droit de préemption prévu au contrat, valable pendant toute la durée de la convention et cinq ans après son échéance, a limité la possibilité de rachat de tout ou partie du fonds de commerce de la société franchisée par des groupes de distribution concurrents du franchiseur et a restreint artificiellement le jeu de la concurrence sur le marché du détail de la distribution à dominante alimentaire. La Cour considère que le droit de préemption, tel que figurant au contrat de franchise, ne limite pas la possibilité de rachat du fonds de commerce par un groupe de distribution concurrent et ce, avant même l'arrivée à échéance du contrat, dès lors que, d'une part, ledit droit met comme seule condition pour la mise à l'écart du compromis de vente passé entre la société franchisée et le cessionnaire ou tout autre groupe de distribution concurrent, la décision du franchiseur de faire une offre à prix et conditions égales et que, d'autre part, le franchisé ne soit pas placé dans une position captive, c'est-à-dire ait toute latitude pour procéder à une cession totale ou partielle du fonds et, dans ce dernier cas, conserver à son profit les activités qu'il détermine.

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La Cour en déduit que le droit de préemption figurant au contrat de franchise n’est entaché d’aucune illicéité. A rapprocher : Cass. com., 4 novembre 2014, pourvoi n°12-25.419

modifié les critères de sélection de ses concessionnaires. Selon la Cour d’appel de Paris, ces circonstances objectives ne participent pas d'une restriction de concurrence au sens du règlement 1400/2002, et la résiliation en cause n'est donc pas illicite au regard du règlement communautaire n° 1400/2002. A rapprocher : Règlement (ce) n°1400/2002 de la commission du 31 juillet 2002

Contrat d'importation et absence de restriction de concurrence prohibée CA Paris, 24 juin 2015, Juris-Data n°2015-015706 Ce qu’il faut retenir : La résiliation d’un contrat d’importation ne constitue pas une restriction de concurrence prohibées par le règlement d’exemption CE 1400/2002 du 31 juillet 2002, les motifs de résiliation étant clairement expliqués et reposant sur la mise en œuvre d’une nouvelle politique de développement et de croissance appliquée indistinctement à tous les concessionnaires des ses réseaux en France et en Europe.

L.442-6 I 1° C. com. : condamnation de grossistes pour tentative et obtention d’avantage indu CA Paris, 15 janvier 2015, RG n°13/03832 Ce qu’il faut retenir : Outre le défaut d’effectivité du service rendu, le juge s’attache également à la définition contractuelle du service commercial à rendre pour l’application de l’article L.442-6 I 1°) du Code de commerce. Pour approfondir :

Pour approfondir : Une société importait et distribuait des véhicules neufs et des pièces de rechange automobiles, en application d'un contrat d'importation à durée indéterminée conclu avec un constructeur automobile, lui conférant le droit (non exclusif en l’espèce) d'importer à la Réunion les produits de la marque et les distribuer en qualité d'importateur grossiste. Le constructeur avait mis un terme au contrat suivant un préavis de deux ans. La Cour d’appel de Paris retient que, conformément à l'article 17 du contrat qui transpose l'article 3-4 du règlement d'exemption CE 1400/2002 du 31 juillet 2002 concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du Traité (devenu 101, paragraphe 3 du TFUE) à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile, les motifs invoqués dans la lettre de résiliation (à savoir la mise en œuvre de sa nouvelle politique de développement et de croissance, reposant sur le développement de la gamme et de nouvelles exigences visant à renforcer la satisfaction de la clientèle) ne constituent pas des restrictions de concurrence caractérisées. De plus, il est relevé que le constructeur atteste avoir résilié l'ensemble des contrats de ses réseaux en France et en Europe, pour le même motif, et avoir

Le Ministre de l’Economie a fait assigner deux sociétés d’un groupe de grossistes en fruits et légumes exerçant sur le Marché d’Intérêt National (le MIN) à Marseille afin de les faire condamner pour obtention et tentative d’obtention d’avantage sans contrepartie. Il faut en effet rappeler que, selon l’article L442-6 I 1°) du Code de commerce, « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout […] commerçant […] d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu […] ». En l’espèce, une des deux sociétés assignées avait conclu, avec 40 fournisseurs, un contrat stipulant dans l’une de ses clauses la souscription à un service de mise en avant consistant en la mise « à la disposition du fournisseur [d’] un espace clairement séparé, spécialement adapté et exclusivement dédié à ses produits, permettant […] d’identifier aisément les produits de la marque du fournisseur ». Elle avait également conclu le même type de contrat pour une mise en avant des fournisseurs sur son site internet. Le Tribunal de commerce de Marseille a débouté le Ministre de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à indemniser le préjudice moral des

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sociétés défenderesses à hauteur de 15.000 euros chacune, outre la publication du dispositif du jugement. Pourtant, la décision a été tout autre en appel : la Cour d’appel de Paris a jugé que les services de mise en avant étaient fictifs puisque, notamment, (i) les grossistes se contentaient de placer les produits des fournisseurs signataires en premier rang par rapport aux autres fournisseurs, le Directeur Général d’une des sociétés assignées ayant d’ailleurs lui-même déclaré qu’il était techniquement impossible de modifier les airs de présentation des produits pour créer les espaces réservés prévus au contrat, (ii) le service de mise en avant visait l’identification de la « marque du fournisseur » or seuls 3 des fournisseurs signataires disposaient d’une marque et (iii) le site internet des grossistes n’était pas en activité pendant la durée d’exécution du contrat de sorte que la prestation était tout bonnement irréalisable. Par conséquent, la Cour a condamné les sociétés grossistes pour obtention d’un avantage indu s’agissant des prestations facturées aux fournisseurs et pour tentative d’obtention d’avantage indu s’agissant des contrats litigieux n’ayant donné lieu à aucune facturation des fournisseurs. Partant, considérant que ces pratiques sont de nature à léser le consommateur en maintenant les prix à un niveau artificiellement élevé, la Cour a prononcé la nullité de la clause illicite, ordonné le remboursement des sommes payées à ce titre par les fournisseurs signataires et condamné les sociétés grossistes à une amende civile de 80.000€, outre la publication de l’arrêt sur le site des grossistes.

Pour approfondir :  Il convient tout d’abord de revenir brièvement sur l’état du droit positif français, avant de commenter les termes de la décision rendue par la CJUE. On le sait, notre régime des publicités portant sur des réductions de prix a été allégé par l’arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réductions de prix à l’égard des consommateurs. Ainsi que cela a été souligné dans un précédent commentaire, cet arrêté a mis un terme aux règles relativement strictes, trop peu assouplies par la réforme de décembre 2008, encadrant les annonces de réductions de prix selon un formalisme parfois difficile à respecter pour les opérateurs. Désormais : -

l’arrêté du 11 mars 2015 rappelle le principe (qui figure aujourd’hui dans la plupart des nouveaux textes modifiés à la suite de la directive n°2005/29), à savoir que toute annonce de réduction de prix est licite sous réserve qu’elle ne constitue pas une pratique commerciale déloyale. Ainsi, l’annonceur devra veiller à ce que sa publicité ou annonce en magasin ne soit pas trompeuse à l’égard du public (étant rappelé que le caractère promotionnel du prix, le prix lui-même ou encore son mode de calcul sont des éléments expressément visés par les textes sur la publicité trompeuse) ;

-

l’arrêté du 11 mars 2015 ne maintient de véritable encadrement que pour les annonces de réductions effectuées en magasin, où il est toujours prévu le double affichage résultant du « prix de référence » et du « prix réduit », sauf en cas de taux de réduction uniforme effectué par escompte de caisse ; dans ce dernier cas, et sous réserve que l’annonce de réduction de prix se rapporte à des produits ou services parfaitement identifiés, le vendeur n’est pas tenu de faire état du prix réduit mais uniquement le prix de référence (le nouvel arrêté prévoit que la réduction par escompte de caisse doit faire l’objet d’une information ; précédemment il était prévu que le vendeur ou prestataire devait en faire une « publicité ») ;

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l’arrêté du 11 mars 2015 retient que, ce qui constitue le prix de référence (dans le lieu de vente ou en dehors de ce dernier), c’est-à-dire le prix barré sur lequel s’effectue la réduction, n’est plus fixé par la réglementation, mais directement par l’annonceur.

A rapprocher : CA Orléans, 12 avril 2012, RG n°11/02284

Prix de référence dans les publicités de réduction de prix CJUE, 8 sept. 2015, Aff. C-13/15 Ce qu’il faut retenir : Selon la CJUE, la France ne peut pas obliger de manière générale les commerçants à indiquer le prix de référence à partir duquel sont calculés les prix réduits dont il est fait publicité. La pratique commerciale de promotions sans prix de référence n’est donc pas en soi une pratique déloyale, elle doit être examinée au cas par cas.

C’est là le point central de l’arrêté. La limite du prix le plus bas pratiqué dans les 30 jours précédant

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l’opération n’existe donc plus, laissant une plus grande liberté aux commerçants quant à la détermination du prix à partir duquel ils déterminent la réduction. En pratique, il est donc parfaitement possible d’anticiper qu’un commerçant pourrait être autorisé à annoncer un prix de référence comme le prix de vente initial de son produit, même s’il a récemment procédé à une promotion ponctuelle sur ce dernier. Si les commerçants se réjouissent de la souplesse qui leur est ainsi accordée dans la détermination du prix de référence qu’ils annoncent aux consommateurs, celle-ci s’effectue désormais à leurs « risques et périls », les commerçants supportant la charge de déterminer si le prix de référence ainsi fourni au consommateur sera ou non considéré comme loyal ; -

enfin, l’arrêté du 11 mars 2015 n’impose aucune durée pour limiter les opérations d’annonces de réduction de prix. Cependant, par définition, ces opérations doivent rester marginales au regard des périodes de vente normales.

 L’ordonnance rendue le 8 septembre 2015 par la CJUE (CJUE, 8 sept. 2015, Aff. C-13/15) pose la question de savoir si l’arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réductions de prix à l’égard des consommateurs est conforme ou non à la directive européenne du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales. Dans cette affaire, les services de la répression des fraudes avaient dressé un procès-verbal à une société pour défaut d’affichage du prix de référence de produits vendus à prix réduits.

poursuivent des finalités tenant à la protection du consommateur ». La directive européenne du 11 mai 2005 s’oppose ainsi à l’arrêté du 11 mars 2015 qui prévoit que « lorsqu’une annonce de réduction de prix est faite dans un établissement commercial, l’étiquetage, le marquage ou l’affichage des prix réalisés doivent préciser le prix annoncé et le prix de référence ». Selon la CJUE, l’absence d’indication du prix de référence dans une annonce de réduction de prix ne figure pas parmi les pratiques commerciales réputées systématiquement déloyales par la directive européenne. Il est donc interdit d’obliger les commerçants à indiquer le prix de référence d’un produit à partir duquel une réduction de prix annoncée est calculée ; l’éventuel caractère déloyal de cette pratique ne peut que s’apprécier au cas par cas. A rapprocher : Arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réductions de prix à l’égard des consommateurs

Vers une obligation de préciser le prix des logiciels pré-installés sur un ordinateur ? ère Cass. civ. 1 , 17 juin 2015, pourvoi n°14-11.437 Ce qu’il faut retenir : La Cour de cassation a renvoyé à la CJUE une question préjudicielle pour déterminer si la vente d’un ordinateur avec des logiciels préinstallés peut s’analyser en une pratique commerciale déloyale. Pour approfondir :

Appelés à statuer sur le contentieux qui s’en est suivi, les juges ont décidé de solliciter la CJUE afin de savoir si l’obligation imposée aux commerçants d’indiquer le prix de référence dans une annonce de réduction de prix était contraire ou non à la réglementation européenne. La CJUE a répondu par l’affirmative, en jugeant que la directive européenne du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales « doit être interprétées en ce sens qu’elle s’oppose à des dispositions nationales, telles celles en cause au principales (les dispositions françaises), qui prévoient une interdiction générale, sans évaluation au cas par cas permettant d’établir le caractère déloyal, des annonces de réduction de prix qui ne font pas apparaître le prix de référence lors du marquage ou de l’affichage des prix, pour autant que ces dispositions

Les faits sont très simples. Un consommateur a acquis un ordinateur sur lequel des logiciels avaient été préinstallés. Le consommateur s’est plaint de cette pré-installation et a demandé le remboursement de la fraction du prix correspondant auxdits logiciels. La Cour d’appel de Versailles l’a débouté en considérant qu’il ne s’agissait ni d’une pratique commerciale déloyale, ni d’une pratique commerciale trompeuse ou agressive. Le consommateur, visiblement déterminé, a formé un pourvoi en cassation en se référant à la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005. La Cour de cassation est moins sûre de son fait. Après avoir relevé que la pratique n’était pas visée en annexe et rappelé qu’il fallait par conséquent opter pour une analyse contextuelle de la pratique, elle s’est principalement

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intéressée à la question de savoir s’il n’était pas déloyal de préinstaller ces logiciels, mais sans préciser le coût ou la fraction du prix qui leur est associée. La Cour a donc renvoyé à la CJUE les questions suivantes : 1°) les articles 5 et 7 de la Directive 2005/29 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur doivent-ils être interprétés en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale trompeuse l'offre conjointe consistant en la vente d'un ordinateur équipé de logiciels préinstallés lorsque le fabricant de l'ordinateur a fourni, par l'intermédiaire de son revendeur, des informations sur chacun des logiciels préinstallés, mais n'a pas précisé le coût de chacun de ces éléments ? 2°) l'article 5 de la Directive 2005/29 doit-il être interprété en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale l'offre conjointe consistant en la vente d'un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, lorsque le fabricant ne laisse pas d'autre choix au consommateur que celui d'accepter ces logiciels ou d'obtenir la révocation de la vente ? 3°) l'article 5 de la Directive 2005/29 doit-il être interprété en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale l'offre conjointe consistant en la vente d'un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, lorsque le consommateur se trouve dans l'impossibilité de se procurer auprès du même fabricant un ordinateur non équipé de logiciels ?

Pour approfondir :  Dans cette affaire, une société exploitant un fonds de commerce de bijouterie, joaillerie et horlogerie qui distribuait plusieurs marques de montres de luxe, se prévalant des contrats de distribution sélective conclus avec certains fabricants, avait agi : - d’une part, sur le terrain de la concurrence déloyale à l’encontre d’une société exploitant une bijouterie dans sa zone de chalandise, laquelle proposait à la vente des montres de mêmes marques ; - et, d’autre part, sur celui de la responsabilité contractuelle à l’encontre de l'un des fabricants de montres concernés. De son côté, ce fabricant avait demandé, à titre reconventionnel, la résiliation du contrat de distribution sélective qu'il avait conclu avec la société ayant initié l’instance.  Pour écarter le premier moyen objet du pourvoi, la cour de cassation observe que la Cour d'appel a légalement justifié sa décision en constatant successivement que : -

l'exploitant de la bijouterie, qui n'était pas distributeur agréé des marques R… et C…, avait tout au plus vendu une montre de marque C…, en août 2007, et une montre de marque R…, en novembre 2008 ;

-

ces ventes n'ont pas été initiées par l'exploitant, lequel ne proposait pas ces marques en vitrine et n'avait fait que répondre à des demandes particulières de clients ;

-

ces deux reventes s'inscrivaient donc dans le cadre d'un usage en matière de joaillerie, selon lequel un bijoutier peut vendre occasionnellement un produit non distribué par lui et fourni par un confrère, pour répondre à une demande particulière d'un client ;

-

et qu'il n'est pas établi que l'exploitant aurait procédé à d'autres ventes de montres en violation d'accords de distribution sélective.

Prudence donc pour les vendeurs. A rapprocher : Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005

Contrat de distribution sélective et concurrence déloyale Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12.272 Ce qu’il faut retenir : Ne constitue pas un acte de concurrence déloyale le fait de répondre à une sollicitation spécifique d’un client dès lors que la vente en résultant s'inscrit dans le cadre d'un usage professionnel selon lequel un commerçant peut vendre occasionnellement un produit non distribué par lui et fourni par un confrère.

Selon la Cour de cassation, en l'état de ces constatations et appréciations dont elle a pu déduire qu'aucun acte de concurrence déloyale n'était caractérisé à l'encontre de l'exploitant de la bijouterie, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision.

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 Pour écarter le deuxième moyen objet du pourvoi, la Cour de cassation souligne que la responsabilité d'un fournisseur au titre de l'agrément prétendument fautif d'un nouveau distributeur ne relève pas des dispositions de l'article L. 442-6 I 6° du Code de commerce qui sanctionnent la participation à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou de distribution exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence. Ce faisant, la Haute juridiction retient que l'arrêt critiqué a pu exactement considérer qu'en agréant l'exploitant de la bijouterie, le fabricant n'a pas violé l'interdiction de revente hors réseau, ni directement ni indirectement, et n'a, dès lors, pas engagé sa responsabilité au titre de ce texte. A rapprocher : Cass. com., 4 juillet 2006, pourvoi n°03-16383

Concurrence parasitaire et reprise du slogan d’un concurrent Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242

de tout risque de confusion » : rien de nouveau, le grief du parasitisme ne nécessite en effet pas la démonstration d’un risque de confusion propre à la concurrence déloyale, le fait fautif réside dans la captation des efforts et des investissements d’autrui. Dans un deuxième temps, la Cour va approuver la décision de condamnation en relevant en premier lieu, que l’association de deux groupes de mots de trois syllabes : « gros volume = petits prix » est distinctive de la société Cora car il est démontré que ce slogan est associé par le public et les professionnels de la grande distribution à l’enseigne et, en second lieu, que cette formule a fait l’objet d’efforts de promotion et d’investissements grâce à de nombreuses opérations publicitaires qui ont contribué à son lancement et sa réputation. Ce préalable pour établir le parasitisme étant établi, la Cour approuve les juges d’appel d’avoir condamné la concurrence parasitaire dès lors qu’il était démontré l’utilisation d’une formule identique variant simplement par le remplacement du signe = par une virgule et que les formules « prix mini sur gros volumes » et « gros volumes à prix mini » ont une consonance et une résonnance équivalente (le slogan « gros volumes grosses économies » n’étant pas retenu car trop différent). Surtout, la reprise du slogan n’était pas nécessaire puisque la même idée pouvait être reprise de façon différente.

Ce qu’il faut retenir : Les slogans peuvent accéder à la protection par le droit des marques et/ou le droit d’auteur sous certaines conditions. Les circonstances peuvent également être de nature à caractériser une concurrence parasitaire de la part d’un concurrent indélicat voulant profiter des retombées de la bonne formule. Pour approfondir : L’affaire opposait deux grands acteurs du secteur de la grande distribution : la société Cora, qui exploite depuis de nombreuses années le slogan « gros volume = petits prix » reprochait à la société Auchan l’utilisation de slogans : « prix mini sur gros volumes », « gros volumes à prix mini », « gros volumes grosses économies ». Au vu des circonstances de l’affaire, la Cour d’appel a retenu le grief de concurrence parasitaire, ce que contestait le pourvoi.

On retient donc que le parasitisme nécessite en premier lieu d’établir que la valeur concurrentielle reprise est le fruit d’efforts intellectuels et/ ou d’investissements. Ce point établi, il convient ensuite de justifier de la reprise de cette valeur qui va consister en un acte de parasitisme. A rapprocher : Article 1382 du Code civil

Le parasitisme par la reprise (approximative) d’un slogan Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242 Ce qu’il faut retenir :

Dans cet arrêt, la Cour rappelle la définition du parasitisme déjà connue : « le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à sa placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indument de sa notoriété ou de ses investissements, indépendamment

La reprise d’un slogan, même de manière approximative et même si ce slogan est composé de mots banals, est constitutive de parasitisme dès lors que le slogan est un signe distinctif d’une enseigne.

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Pour approfondir :

DESEQUILIBRE SIGNIFICATIF La reprise d’un slogan est considérée comme un acte de parasitisme économique, ainsi qu’il a été révélé par la protection d’un slogan célèbre : « À fond la forme ! » (TGI Paris, 3e ch., 8 janvier 2002, RG n° 00/16345). Cette règle a été rappelée par la Cour de cassation dans l’arrêt du 9 juin commenté.

Le déséquilibre significatif, entre droit spécial de la concurrence et droit commun Projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats

Il s’agissait d’une enseigne de la grande distribution, connue pour son slogan « gros volumes = petits prix », qui a agi en responsabilité contre l’un de ses concurrents qui avait utilisé des slogans approchants : « Prix mini sur gros volumes » ou encore « Gros volumes à prix mini ». Le concurrent indélicat s’est défendu en exposant que d’une part, le slogan n’était pas repris en lui-même, et d’autre part, qu’il était banal.

Ce qu’il faut retenir :

Il est vrai que la Cour avait déjà considéré que la banalité d’un slogan « purement descriptif et usuel » empêchait la qualification de parasitisme (Cass. com., 9 juillet 2013, pourvoi n°12-23.389). Il n’en a pas été ainsi cette fois. Après avoir rappelé la définition du parasitisme (le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de sa notoriété ou de ses investissements, indépendamment de tout risque de confusion), la Cour a admis que le slogan pouvait être considéré comme distinctif de l’enseigne de grande distribution, notamment au regard de la construction syllabique et de l’idée d’équivalence associée à l’antinomie qui existe entre « gros » et « petits ».

Pour approfondir :

Ce slogan a donc été développé suite à des efforts certains, et donc le parasitisme est caractérisé. A rapprocher : Cass. com., 9 juillet 2013, pourvoi n°12-23.389

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Le projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations introduit un article 1169 dans le Code civil ayant vocation à former le droit commun en matière de déséquilibre significatif ; son articulation avec les dispositions spéciales de l’article L.442-6 du Code de commerce reste encore à préciser.

 Le projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, prévoit l’introduction d’un article 1169 dans le Code civil octroyant au juge, sous certaines conditions, le pouvoir de supprimer une clause qui créerait un déséquilibre significatif. Or, le Code de commerce envisage déjà en son article L.442-6, la possibilité d’engager la responsabilité de celui qui soumet ou tente son partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et les obligations des parties.  La question se pose alors de savoir comment s’opérera l’articulation entre le droit commun et le droit spécial du déséquilibre significatif et quelles en seront les répercussions sur les contrats commerciaux. Cette problématique nouvelle peut être approchée selon deux angles complémentaires. D’une part, l’instauration de ce texte nécessite de déterminer les relations commerciales qui échapperont au droit de la concurrence pour être régies par le Code civil (domaine ratione personae du déséquilibre significatif). D’autre part, les situations dans lesquelles l’un des textes primera sur l’autre méritent également d’être précisées (domaine ratione materiae du déséquilibre significatif).  S’agissant du domaine ratione personae du déséquilibre significatif, l’article L.442-6 du Code de commerce pose le critère du « partenaire commercial » ; l’application du texte spécial est ainsi délimitée.

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La CEPC dans son Avis n°12-07 définissait le partenaire commercial comme « le professionnel avec lequel une entreprise commerciale entretient des relations commerciales pour conduire une action quelconque, ce qui suppose une volonté commune et réciproque d’effectuer de concert des actes ensemble dans les activités de production, de distribution ou de services ». Ainsi, l’application du texte général est réservée aux contrats non conclus entre partenaires commerciaux. En dépit de l’apparente limpidité de cette distinction, la mise en œuvre de ces dispositions ne manquera pas d’être malaisée. Ainsi que l’explique la CEPC dans son avis 15-01, le partenariat « implique un examen concret de la relation et de l’objet du contrat ». Or, en fonction des situations concernées, et de la jurisprudence existant dans la matière considérée, la conclusion à adopter n’ira pas nécessairement de soi. De même cela donnera largement matière aux parties d’argumenter en faveur de l’application d’un texte plutôt que l’autre et de retenir ainsi l’interprétation qui en découle de ses relations avec son partenaire.  S’agissant du domaine ratione materiae du déséquilibre significatif, la rédaction des deux textes est concordante. La condition posée par le Code de commerce de « soumission » ou « tentative de soumission » du partenaire à des obligations déséquilibrées, n’est pas formellement reprise dans le projet de réforme du Code civil. Cette condition, qui a vocation à permettre de surveiller les clauses qui auraient été imposées à l’une des parties sans négociation, peut être implicitement exigée dans le nouveau texte, à travers l’expression « contractant au détriment duquel (la clause) a été stipulée ». Le contrôle d’un déséquilibre significatif devrait alors être conditionné à un défaut de négociabilité de la clause querellée, d’autant plus lorsque le postulat en matière de contrats civils est celui de l’égalité des contractants.  Le critère de « la clause créant un déséquilibre significatif » posé par le nouvel article 1169 du Code civil vise à faire de la clause le fait générateur du déséquilibre et se retrouve dans le Code de commerce plus indirectement par la référence aux « obligations », formant elles-mêmes l’objet d’une clause.

Parmi les clauses, l’article 1169 susvisé érige néanmoins deux exceptions évinçant tout contrôle : la définition de l’objet du contrat et l’adéquation du prix à la prestation. Ces exclusions dérivent du Code de la consommation et ne sont pas formellement reprise dans le Code de commerce. La logique requiert toutefois la même éviction. La définition de l’objet du contrat et l’opération contractuelle envisagée ressort de la volonté même des parties et justifie l’exclusion de l’intervention du juge. L’exception de l’adéquation du prix à la prestation est quant à elle dans la lignée de tradition civiliste du rejet de la lésion.  Par ailleurs, le texte n’envisage pas la méthode préconisée pour qualifier le déséquilibre significatif. L’appréciation globale du contrat ne saurait être retenue dès lors que les textes ne visent à s’attacher qu’à un déséquilibre créé par une clause, c’est-à-dire à un déséquilibre entre les stipulations contractuelles, et non entre les prestations. L’analyse du déséquilibre significatif à retenir semble donc être celle clause par clause, déjà adoptée en droit de la concurrence ou en droit de la consommation.  S’agissant enfin de la sanction du déséquilibre significatif, le Code de commerce prévoit que la responsabilité de l’auteur de la clause peut être retenue ; de plus, la jurisprudence a transposé aux contrats commerciaux la sanction tirée du droit de la consommation et visant à « réputer non écrite » la clause incriminée, elle a également dans certains cas considéré qu’il s’agissait d’une nullité absolue, et a même récemment ordonné la suppression de la seule partie litigieuse d’une clause ainsi que sa réécriture. L’article 1169 susvisé semble suivre cette voie lorsqu’il édicte la suppression de la clause, la responsabilité pouvant également être recherchée, dans les conditions de droit commun, en cas de préjudice subi du fait de la clause stipulée. A rapprocher : Projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations

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Déséquilibre significatif : appréciation de l’équilibre global de la relation Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-27.525 Ce qu’il faut retenir : La Cour de cassation approuve la méthode d’appréciation « globale » du déséquilibre significatif utilisée par les juges du fond, conduisant à un examen des clauses du contrat afin d’apprécier l’équilibre global de la relation commerciale. Pour approfondir :

Une fois le caractère déséquilibré d’une clause rapporté, il appartient au défendeur de justifier de l’éventuel rééquilibrage que peuvent offrir d’autres stipulations du contrat. Dans cet arrêt, la Cour de cassation affirme en effet que les juges du fond, en exigeant du défendeur, ici le distributeur, qu’il établisse que la clause litigieuse a bien été rééquilibrée par d’autres clauses du contrat, n’ont pas inversé la charge de la preuve. Le défendeur doit « prouver l’éventuel rééquilibrage par d’autres clauses du contrat ». A rapprocher : CEPC, avis n°15-1 ; CA Paris, 4 juillet 2013, RG n°11/17941

Dans cette affaire, le ministre chargé de l'économie, reprochant à une centrale d'achats une pratique créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, résultant des clauses des conventions régissant les relations entre cette société et ses fournisseurs, a assigné celle-ci en nullité de ces clauses, en cessation des pratiques. Depuis la création de la notion du « déséquilibre significatif » issue de la LME du 3 janvier 2008, les juges hésitaient entre deux méthodes d’appréciation du déséquilibre significatif : soit clause par clause ; soit de manière globale. Il semblerait que la Cour de cassation ait opté pour la deuxième. Dans cet arrêt, la Haute juridiction affirme que « l’article L.442-6, I, 2° invite à apprécier le contexte dans lequel le contrat est conclu et son économie » et que, en l’espèce, la Cour d’appel « ne s’est pas déterminée en considération des seules clauses litigieuses » mais a au contraire « a procédé à une appréciation concrète et globale des contrats en cause ». La Cour de cassation en déduit que la Cour d’appel a bien « caractérisé le déséquilibre significatif » et a donc « satisfait aux exigences de l’article L.442-6, I, 2 ». Les juges du fond prennent ainsi en compte l’ensemble des clauses contenues dans le contrat pour déterminer si la clause litigieuse crée ou non un déséquilibre. Il se peut que, prise individuellement les clauses soient déséquilibrées, mais l’important est que, au final, le contrat, lui, soit équilibré. L’arrêt apporte également un éclairage intéressant sur la question de la charge de la preuve de « l’éventuel rééquilibrage par d’autres clauses du contrat ». En effet, l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ne prévoyant aucun régime probatoire, il appartient au demandeur de démontrer le caractère déséquilibré de la clause litigieuse au titre de l’article 1315 du Code civil.

Indice de déséquilibre significatif : absence de réciprocité et de contrepartie TC Paris, 7 mai 2015, RG n°205000040 Ce qu’il faut retenir : La clause tendant à assurer au distributeur un alignement des conditions tarifaires que le fournisseur serait amené à consentir à d’autres canaux de distribution ou qu’il pratiquerait lui-même est sans contrepartie et de nature à constituer un indice de déséquilibre significatif. Pour approfondir : Selon la jurisprudence, le déséquilibre significatif peut se manifester par divers indices, notamment par le caractère général de la clause litigieuse ou l’absence de réciprocité. Les contours de la notion de déséquilibre significatif – validée par le Conseil Constitutionnel – restent encore à dessiner par la jurisprudence. Plusieurs indices sont utilisés pour retenir un déséquilibre significatif, au nombre desquels l’absence de réciprocité et de contrepartie. Dans cette décision, les juges considèrent qu’une clause qui tend à assurer au distributeur un alignement des conditions tarifaires que le fournisseur serait amené à consentir à d’autres canaux de distribution ou qu’il pratiquerait lui-même est sans contrepartie. Au cas d’espèce, le site de réservation en ligne n’achetait ni ne revendait les nuitées et ne supportait donc aucun risque lié à la réservation ou non d’une chambre. Le vrai déséquilibre entre les droits et obligations des parties résultait du fait que l’hôtelier n’était plus totalement libre dans la fixation de son prix en raison de l’obtention automatique des

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meilleures conditions tarifaires par la centrale de réservation considérée. Deux remarques peuvent être formulées. La première est que la stipulation d’une telle clause dite « du client le plus favorisé » est strictement interdite par l’article L.442-6, II, d) du Code de commerce. Au cas d’espèce, ce texte qui n’est pas une loi de police, contrairement au dispositif de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce sur le déséquilibre significatif, n’était pas applicable dès lors que le contrat conclu entre les parties était soumis au droit anglais. La seconde est que la solution retenue dans cette décision a été confortée par la loi Macron : en effet, ont été créés les articles L.311-5-1 et L.311-5-4 dans le Code du tourisme qui disposent que « l’hôtelier conserve la liberté de consentir au client tout rabais ou avantage tarifaire, de quelque nature que ce soit, toute clause contraire est réputée non écrite » et cette règle s’applique « quel que soit le lieu d’établissement de la plateforme de réservation en ligne dès lors que la location est réalisée au bénéfice d’un hôtel établi en France ». A rapprocher : Cons. const., déc., n°2010-85, QPC, 13 er janvier 2011 ; CA Paris, 1 juill. 2015, RG n°13/19251

position de la Cour d’appel de Paris dont on avait déjà pu ressentir les effets en pratique dans les négociations des accords en 2014 et 2015. Cependant, l’arrêt n’en demeure pas moins intéressant, dans la mesure où il aborde plusieurs aspects des conventions annuelles et de leur négociation, qui doivent guider les parties en position de force dans la négociation des conventions annuelles (souvent les distributeurs, mais pas toujours), tous secteurs confondus, en vue d’un équilibre relatif dans les droits et obligations des parties, voire même d’une réciprocité plusieurs fois soulignée, et que l’on pourrait parfois considérer excessive… On pense ici notamment au fait que faisaient partie des motifs de condamnation du distributeur l’absence d’escompte au bénéfice du fournisseur en cas de règlement anticipé, alors que le distributeur bénéficiait parallèlement d’un escompte lorsqu’il réglait en avance, ou encore la différence de délais de paiement entre les sommes dues par le fournisseur au distributeur, et celles dues par le distributeur qui bénéficiait de délais de paiement plus longs (jusqu’au double). Bien entendu, ces pratiques n’ont pas été analysées isolément, et la simple existence d’une différence d’escompte ou de délais de paiement ne crée pas automatiquement un déséquilibre significatif au sens de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce. Pour cela, la Cour de cassation confirme qu’un des éléments permettant d’appliquer l’interdiction du déséquilibre significatif est l’existence d’une soumission de la partie désavantagée à la partie bénéficiaire du déséquilibre.

Déséquilibre significatif : nouveau revers pour la distribution alimentaire Cass. com., 27 mai 2015, pourvoi n°14-11.387 Ce qu’il faut retenir : L’interdiction du déséquilibre significatif est renforcée par la Cour de cassation qui confirme en tous points la condamnation d’une enseigne de grande distribution alimentaire sur ce fondement. Pour approfondir : Par un arrêt du 27 mai 2015, la Cour de cassation inflige un troisième revers en quelques semaines aux enseignes de grande distribution alimentaire, s’agissant des actions menées par le Ministre de l’Economie à l’encontre des distributeurs, sur le fondement du déséquilibre significatif des contrats conclus avec leurs fournisseurs. Cet arrêt ne révolutionne pas l’état de la jurisprudence, puisque la Cour de cassation entérine la

En l’espèce, le distributeur contestait la preuve d’une contrainte pesant sur les fournisseurs, dont l’existence devait selon lui être établie au cas par cas, fournisseur par fournisseur. Reprenant le raisonnement de la Cour d’appel, la Cour de cassation considère que la soumission de chaque fournisseur est établie par différents éléments. Le premier, était que « les clauses litigieuses étaient insérées dans tous les contrats signés par les fournisseurs, lesquels ne disposaient pas du pouvoir réel de les négocier », seuls 3% d’entre eux étant des grands groupes. Le second, était que les fournisseurs ne pouvaient pas prendre le risque d’être déréférencés par le distributeur concerné, eu égard à sa position sur le marché. On notera avec intérêt que le distributeur détenait à l’époque près de 17% de parts de marché, et que la problématique se pose nécessairement avec plus de force aujourd’hui en raison des divers regroupements à l’achat intervenus à la fin de l’année 2014 (objets d’un avis de l’Autorité de la concurrence

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le 31 mars dernier), qui renforcent le pouvoir de négociation – et donc de soumission – des distributeurs par rapport à leurs fournisseurs. Par ailleurs, et la Cour de cassation le rappelle au long de sa décision, le déséquilibre n’est pas apprécié clause par clause, mais au regard de l’équilibre plus général du contrat. Il est ainsi nécessaire que soit établie l’absence d’autres clauses permettant de rééquilibrer les obligations des parties. Plus exactement, la Haute Juridiction retient que c’est à la partie au bénéfice de laquelle sont conclues les obligations déséquilibrées (ici, le distributeur), qu’il appartient de rapporter la preuve que d’autres clauses du contrat permettent de rééquilibrer les obligations des parties. En l’espèce, la Cour de cassation a considéré que le distributeur n’avait pas rapporté une telle preuve, et surtout que ce mode d’analyse ne constituait pas une inversion de la charge de la preuve. Les acteurs du secteur et les praticiens impliqués dans les négociations des conventions annuelles entre fournisseurs et distributeurs ont pu noter cette année encore un assouplissement des positions des distributeurs dans la négociation, dont on ne peut que se satisfaire dans la mesure où la législation, modifiée à de multiples reprises ces dix dernières années, semble enfin influencer les rapports en vue d’une relation plus équilibrée (qui demeure néanmoins déséquilibrée, au regard du pouvoir de négociation des enseignes).

Pour approfondir : Dans cette affaire, une SCI avait donné à bail à une société A exploitant une boutique de prêt-à-porter des locaux commerciaux dépendant d'un immeuble situé dans un centre commercial. Le bailleur avait fait délivrer au preneur un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail, avant de l’assigner devant le juge des référés. En première instance, le juge des référés se déclarait incompétent aux motifs que les griefs allégués par le preneur caractérisaient l'existence d'une contestation sérieuse dont l'appréciation n'entrait pas dans ses pouvoirs. Devant la Cour, le preneur faisait notamment valoir que les clauses de non-responsabilité invoquées par le bailleur étaient constitutives de déséquilibres significatifs au sens de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce. Après avoir par ailleurs caractérisé l’existence d’une contestation sérieuse faisant obstacle à la demande en paiement, la Cour d’appel de Paris retient par principe : « Qu'il relève du seul juge du fond d'interpréter les clauses invoquées par [le bailleur] pour prétendre être exempte de toute responsabilité, alors, en outre, que le preneur soutient que ces stipulations sont constitutives de déséquilibres au sens de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce, l'appréciation du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties échappant aux pouvoirs du juge des référés ».

Au vu de la confirmation apportée par la Cour de cassation quant à l’application quelque peu étendue de la notion de déséquilibre significatif, et au regard du renforcement de la puissance d’achat des enseignes de la grande distribution alimentaire, il est légitime d’anticiper que l’évolution se poursuivra lors des prochaines négociations.

A rapprocher : CA Paris, 11 mars 2014, RG n°13/11938

A rapprocher : Cass. com, 3 mars 2015 pourvoi n°1327525

CONSOMMATION

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Composition et fonctionnement du Conseil national de la consommation depuis l’entrée en vigueur du décret du 12 janvier 2015 Déséquilibre significatif et juridiction des référés CA Paris, 22 janvier 2015, RG n°14/17588

Ce qu’il faut retenir :

Ce qu’il faut retenir : Le juge des référés n’est pas compétent pour se prononcer sur l’existence d’un déséquilibre significatif au sens de l’article L. 442-6 I 2° du Code de commerce.

Le décret n° 2015-23 du 12 janvier 2015, relatif à la composition et au fonctionnement du Conseil national de la consommation (CNC), entré en vigueur le 15 janvier 2015, simplifie de manière significative le cadre réglementaire régissant la composition et le fonctionnement du CNC.

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Pour approfondir : Le Conseil national de la consommation (CNC), organisme consultatif placé auprès du Ministre chargé de la consommation, poursuit deux grandes missions : -

permettre la confrontation et la concertation entre les représentants des intérêts collectifs des consommateurs et usagers et les représentants des professionnels, des services publics et des pouvoirs publics pour tout ce qui a trait à la consommation ;

-

être consulté par les pouvoirs publics sur les grandes orientations de leur politique concernant les consommateurs et les usagers, en particulier à l'occasion des discussions communautaires ayant une incidence sur le droit français et sur les projets ou propositions de lois et de règlements susceptibles d'avoir une incidence sur la consommation.

Annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur Arrêté du 11 mars (JO 24 mars 2015, p. 5378) Ce qu’il faut retenir : L’arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur indique les nouvelles conditions à respecter pour la validité de telles réductions ; ce texte abroge le précédent arrêté en la matière, en date du 31 décembre 2008. Pour approfondir :

Entré en vigueur le lendemain de sa publication au Journal Officiel, le décret n° 2015-23 du 12 janvier 2015, relatif à la composition et au fonctionnement du CNC, simplifie de manière significative le cadre réglementaire régissant la composition et le fonctionnement du CNC. Ainsi, il assouplit le processus par lequel une organisation désigne son représentant au sein de cette instance, en prévoyant la nomination au CNC par le ministre de personnes morales (associations de défense des consommateurs, organisations professionnelles, entreprises assurant des missions de service public, à charge pour chacune d'entre elles de notifier au secrétariat du CNC les personnes physiques participant concrètement aux réunions). Il instaure également la parité entre les deux collèges du CNC. Par ailleurs, chaque membre titulaire des deux collèges disposera de deux suppléants au lieu d'un actuellement. Un arrêté précisera le nombre de membres titulaires ou de membres suppléants dont dispose chaque association ou chaque organisation. Enfin, il prévoit la mise en place d'une formation plénière extraordinaire du CNC où tous les titulaires et les suppléants pourront simultanément siéger pour un débat sans vote, à côté de la formation plénière ordinaire et assouplit les dispositions relatives à la convocation des membres de droit aux réunions du CNC. A rapprocher : D. n°2015-23, 12 janv. 2015 JO 14 janv. 2015, p.577

 Les opérateurs peuvent informer les consommateurs qu'ils baissent leurs prix par le biais d'annonces de réductions de prix chiffrées. Les publicités effectuées à l'occasion de ces opérations commerciales doivent cependant obéir à des modalités précises. La remise annoncée ne peut être établie que par rapport à un prix de référence défini de manière stricte par la réglementation. Ces règles visent à protéger le consommateur des pratiques commerciales qui consisteraient à lui faire croire indûment que le prix d'un article ou d'une prestation a baissé, alors qu’il n’en est rien. Les commerçants annoncent des réductions de prix dans le cadre de promotions pour dynamiser leurs ventes. Les commerçants peuvent annoncer des réductions de prix pour déstocker en dehors des périodes de soldes : il s'agit de promotions de déstockage. En périodes de soldes ou lorsqu'ils effectuent des liquidations, les commerçants annoncent également des réductions de prix.  L’arrêté du 11 mars 2015, relatif aux annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur précise er en son article 1 que « Toute annonce de réduction de prix est licite sous réserve qu'elle ne constitue pas une pratique commerciale déloyale au sens de l'article L.120-1 du Code de la consommation » et qu'elle soit conforme aux exigences suivante : - lorsqu'une annonce de réduction de prix est faite dans un établissement commercial, l'étiquetage, le marquage ou l'affichage des prix réalisés conformément aux dispositions en vigueur doivent préciser, outre le prix réduit annoncé, le prix de référence qui est déterminé par l'annonceur et à partir duquel la réduction de prix est annoncée (article 2 du nouvel arrêté) ; - lorsque l'annonce de réduction de prix est d'un taux uniforme et se rapporte à des produits ou services parfaitement identifiés, cette réduction peut être faite par escompte de caisse. Dans ce cas, cette modalité doit faire l'objet d'une

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information, l'indication du prix réduit n'est pas obligatoire et l'avantage annoncé s'entend par rapport au prix de référence (article 3 du nouvel arrêté) ; - l'annonceur doit pouvoir justifier de la réalité du prix de référence à partir duquel la réduction de prix est annoncée (article 4 du nouvel arrêté). A rapprocher : Arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur

L’allègement des règles en matière d’annonces de réductions de prix Arrêté du 11 mars 2015 Ce qu’il faut retenir : Un arrêté du 11 mars 2015, relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur, abroge les règles précédentes, particulièrement contraignantes, applicables aux annonces de réductions de prix et met en place un régime plus souple, mais pas nécessairement source de sécurité juridique pour les entreprises. Pour approfondir : Sous la pression des instances communautaires, le régime français des publicités portant sur des réductions de prix a été considérablement allégé par l’arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réductions de prix à l’égard des consommateurs.

l’obligation de viser un prix de référence, qui était généralement constitué par le prix le plus bas pratiqué par le commerçant dans les 30 jours précédant le début de la publicité, notamment lorsque le commerçant n’était pas en mesure de se référer à un prix conseillé par le fabricant ou par l’importateur du produit, ou encore au prix maximum résultant d’une disposition de la réglementation économique). Afin d’éviter une inéluctable condamnation de la France pour manquement au droit communautaire, l’arrêté du 11 mars 2015 met fin aux règles strictes, insuffisamment assouplies par la réforme de décembre 2008, qui encadraient les annonces de réductions de prix dans un formalisme pas toujours simple à respecter en pratique, notamment s’agissant du calcul du prix de référence (également appelé « prix barré »). En premier lieu, l’arrêté rappelle le principe qui figure désormais dans la plupart des nouveaux textes modifiés à la suite de la directive n°2005/29, à savoir que toute annonce de réduction de prix est licite sous réserve qu’elle ne constitue pas une pratique commerciale déloyale. Ainsi, bien entendu, l’annonceur devra notamment veiller à ce que sa publicité ou annonce en magasin ne soit pas trompeuse à l’égard du public (étant rappelé que le caractère promotionnel du prix, le prix lui-même ou encore son mode de calcul sont des éléments expressément visés par les textes sur la publicité trompeuse).

En effet, appliquant les mêmes principes que pour d’autres dispositions (ventes liées, ventes avec prime, etc.), la Cour de justice avait utilement rappelé que la directive n°2005/29 du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises visà-vis des consommateurs interdit aux Etats membres d’adopter des mesures plus restrictives que celles prévues par la directive.

En second lieu, l’arrêté ne maintient de réel encadrement que pour les annonces de réductions effectuées dans les établissements commerciaux (c’est-à-dire en magasin en pratique), où il est toujours prévu le double affichage : prix de référence et prix réduit, sauf en cas de taux de réduction uniforme effectué par escompte de caisse. Dans ce dernier cas, et sous réserve que l’annonce de réduction de prix se rapporte à des produits ou services parfaitement identifiés, le vendeur (ou prestataire) n’est pas tenu de faire état du prix réduit mais uniquement le prix de référence (le nouvel arrêté prévoit également que la réduction par escompte de caisse doit faire l’objet d’une information ; précédemment il était prévu que le vendeur ou prestataire devait en faire une « publicité » : en pratique, cela ne devrait rien changer).

La réglementation belge imposait que toute annonce de réduction de prix devait faire référence au prix le plus bas appliqué durant le mois précédant le premier jour de l’annonce en question (la France imposait quant à elle une règle similaire, en prévoyant

En outre, et il s’agit là de la modification centrale apportée par l’arrêté, ce qui constitue le prix de référence (dans le lieu de vente ou en dehors de ce dernier), c’est-à-dire le prix barré sur lequel s’effectue la réduction, n’est plus fixé par la réglementation,

A la suite de la condamnation de la Belgique en juillet 2014 par la Cour de justice de l’Union européenne, la France savait sa réglementation définitivement contraire au droit communautaire.

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mais directement par le vendeur ou le prestataire. La limite du prix le plus bas pratiqué dans les 30 jours précédant l’opération n’existe donc plus, laissant une plus grande liberté aux commerçants quant à la détermination du prix à partir duquel ils déterminent la réduction. En pratique, il est donc possible d’anticiper qu’un commerçant pourrait être autorisé à annoncer un prix de référence comme le prix de vente initial de son produit, même s’il a récemment procédé à une promotion ponctuelle sur ce dernier. Cependant, et c’est là qu’apparaît l’insécurité juridique issue du nouveau texte, si les commerçants se réjouissent nécessairement de la souplesse qui leur est accordée dans la détermination du prix de référence qu’ils annoncent aux consommateurs, celleci s’effectue désormais à leurs risques et périls, les commerçants supportant la charge de déterminer si le prix de référence fourni au consommateur sera, ou non, considéré comme loyal. On rappellera que le Code de la consommation qualifie de déloyale toute pratique commerciale contraire aux exigences de la diligence professionnelle qui altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.

Pour approfondir :  Précisions sur les dispositions légales visées par ce texte. Lorsqu'un consommateur se verra proposer, sur le lieu de vente ou par un moyen de vente de biens ou de services à distance, un contrat de crédit renouvelable pour financer l'achat de biens ou de prestations de services particuliers pour un montant supérieur à 1.000 euros, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit devra accompagner l'offre de crédit renouvelable d'une proposition de crédit amortissable. Cette proposition devra comporter les informations permettant au consommateur de comparer de façon claire le fonctionnement, le coût et les modalités d'amortissement des deux crédits proposés selon au moins deux hypothèses de délai de remboursement (C. consom., art. L.311-8-1 et D.311-10-1). Ces informations ainsi que les conditions de leur présentation viennent d'être définies par le décret du 16 mars 2015.  Prévisions du texte. Ce décret modifie l'article D.311-10-1 du Code de la consommation qui précise que les informations mentionnées à l'article L.311-8-1 doivent être présentées conformément au document d'information joint en annexe.

Dans l’attente d’éventuelles positions de l’Administration ou des tribunaux sur la mise en œuvre de l’arrêté du 11 mars 2015, il est recommandé aux commerçants de se départir le moins possible des règles établies précédemment, et dans l’hypothèse où le prix de référence ne correspondrait pas à son ancienne définition, d’indiquer expressément dans l’annonce comment a été déterminé le prix de référence sélectionné par le commerçant pour son offre.

Ce document d'information se présente sous la forme d'un tableau comparatif entre la proposition de crédit renouvelable et celle de crédit amortissable. Il détaille, pour les deux propositions de crédit, selon deux hypothèses de délai de remboursement, le fonctionnement, le TAEG, le montant, le nombre et la périodicité des mensualités, le montant total dû (c'està-dire, le montant du capital emprunté majoré des intérêts et des frais éventuels liés au crédit, hors coût d'assurance facultative).

A rapprocher : Arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur

L'article D.311-10-1 du Code de la consommation prévoit qu'à compter du 17 décembre 2015, le prêteur devra fournir ce tableau comparatif au consommateur, par écrit ou sur un autre support durable, au plus tard lors de la remise de la fiche d'information prévue par l'article L.311-6 préalablement à la conclusion du contrat.

Paiement et Moyens de paiement Présentation du Décret n°2015-293 du 16 mars 2015 Ce qu’il faut retenir : Le 17 mars 2015 a été publié au Journal Officiel le décret n°2015-293 du 16 mars 2015 relatif à l'information du consommateur lors de l'offre d'un crédit renouvelable sur le lieu de vente ou en vente à distance.

Ce dispositif d'information du consommateur entrera en vigueur 9 mois après la publication du présent décret, soit le 17 décembre 2015. A rapprocher : C. consom., art. L.311-8-1 et D.311-10-1

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Communication des références de carte bancaire et protection du consommateur Réponse ministérielle

A rapprocher : Arrêté du 17 mars 2015 relatif à l'information préalable du consommateur sur les prestations de services à la personne

Ce qu’il faut retenir : Certaines sociétés de location demandent communication des informations relatives à la carte bancaire du locataire afin de pouvoir, en cas de besoin, débiter le compte de leur client des frais pouvant être liés à la location.

Article 210 de la loi Macron : exclusion du droit de rétractation de 14 jours pour les contrats hors établissement en matière immobilière Ce qu’il faut retenir :

Si cette pratique n'est pas illicite per se, une réponse ministérielle (Rép. min. Commerce n° 85662 : JOAN Q 15 sept. 2015, p. 7005) rappelle la protection devant être garantie aux consommateurs en pareil cas. Pour approfondir : L'article L.133-25 du Code monétaire et financier dispose que le client peut obtenir de sa banque le remboursement d'une opération de paiement si l'autorisation donnée n'indique pas le montant exact de l'opération de paiement et si le montant de l'opération dépasse celui auquel le payeur pouvait raisonnablement s'attendre. Le consommateur qui, en application de l’article L.314-14 du Code monétaire et financier, est informé au moins une fois par mois par sa banque de l'exécution des opérations de paiement doit contester l'opération dans les huit semaines du débit de sa carte. La banque, destinataire de la contestation, peut demander des précisions à son client et doit rembourser les sommes débitées dans les dix jours. À défaut, elle doit rappeler à son client qu'il peut recourir au système de médiation qu'elle a mis en place. Par ailleurs, l'information précontractuelle et contractuelle dans le domaine de la location de véhicule est étroitement encadrée. L'arrêté du 17 mars 2015 exige spécifiquement une information préalable sur les modalités de facturation du carburant, notamment les prix forfaitaires (ou unitaires) appliqués ainsi que sur les garanties, exclusions, et franchises des autres assurances incluses dans la location. Cette information est mise à la disposition du consommateur par tous moyens, en application de l'article 2 de l'arrêté du 17 mars 2015, et doit figurer dans le devis prévu à l'article 3 dudit arrêté. Au-delà er d'un seuil de 25 euros fixé à l'article 1 de l'arrêté 8350/A du 3 octobre 1983 relatif à la publicité des prix de tous les services, le loueur est tenu d'adresser une note au consommateur pour ce qui concerne tout frais supplémentaire qui lui serait facturé ex post.

L’article 210 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a supprimé les deux derniers alinéas de l’article L.121-21 du Code de la consommation, excluant ainsi les contrats hors établissement en matière immobilière du droit de rétractation de 14 jours. Pour approfondir : L’article L.121-21 du Code de la consommation avait instauré un droit de rétractation de 14 jours, notamment applicable aux contrats en matière immobilière conclus hors établissement : « Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L.121-21-3 à L.121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle. Le délai mentionné au premier alinéa du présent article court à compter du jour : 1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L.121-16-2 ; 2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens. Le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat. Dans le cas d'une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d'une commande d'un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

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Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien. Lorsque le contrat ayant pour objet l'acquisition ou le transfert d'un bien immobilier est précédé d'un contrat préliminaire prévu à l’article 261-15 du code de la construction et de l'habitation ou d'une promesse synallagmatique ou unilatérale de vente, conclus hors établissement, le délai de rétractation court à compter de la conclusion de ce contrat préliminaire ou de cette promesse.

société G… automobiles pour conclure un contrat de location portant sur un véhicule Jaguar neuf avec option d'achat, d'où il résultait que M. X... avait fait l'objet d'un démarchage ». Par cet arrêt, la Cour de cassation effectue tout au plus une distinction entre : -

Pour les contrats ayant pour objet la construction de biens immobiliers, le délai de rétractation court à compter de leur conclusion ». L'article 210 de la loi Macron supprime les deux derniers alinéas de ce texte et exclut donc du droit de rétractation de 14 jours les contrats hors établissement en matière immobilière. A rapprocher : Voir également : notre article dédié aux articles L.341-1 et L.341-2 du Code de commerce, introduits par l'article 31 de la loi Macron

L’envoi d’un courrier personnalisé suivi d’une vente en magasin constitue un « démarchage » ère Cass. civ. 1 , 4 février 2015, pourvoi n°14-11.002 Ce qu’il faut retenir : Les règles relatives aux démarchages s’appliquent alors même que la vente a lieu en magasin, si le client a été sollicité par un envoi de courriers.

d'une part, les envois personnalisé qui, s'ils conduisent à la conclusion d'un contrat dans l'établissement de l'émetteur, sont considérés comme un démarchage ; et, d'autre part, les envois non personnalisé, qui ne sont généralement pas considéré comme réalisons un démarchage.

Cette règle jurisprudentielle est désormais énoncée à l'article L.121–16,2°-b° du Code de la consommation, en application duquel constitue un « Contrat hors établissement », « tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur (…) dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ». A rapprocher : voir aussi notre article sur la vente à distance et démarchage suite à l’adoption du Décret n° 2014-1061 du 17 septembre 2014 relatif aux obligations d'information précontractuelle et contractuelle des consommateurs et au droit de rétractation (Cliquez ici).

Pour approfondir : En l’espèce, un consommateur était invité à se rendre dans un magasin à la suite de l'envoi d'un courrier personnalisé émanant du vendeur. Après avoir conclu son contrat dans le magasin, le consommateur souhaitait se rétracter et demandait donc à bénéficier de la protection liée au démarchage. La Cour de cassation y est favorable et retient que les règles relatives aux démarchages s’appliquent alors même que la vente a lieu en magasin, si le client a été sollicité par un envoi de courriers : « M. X... avait reçu à son domicile la lettre circulaire l'incitant, par le biais de cadeaux offerts, à se faire livrer un véhicule neuf et qu'à la suite de cette correspondance, il s'était déplacé dans les locaux de la

Modification du bon de commande et nouveau délai de rétractation CA Grenoble, 5 mai 2015, RG n°12/02255 Ce qu’il faut retenir : En cas de contrats conclus à distance et hors établissement, le consommateur dispose d’un délai de rétractation qui, suite à la loi Hamon du 17 mars 2014, est passé de sept à quatorze jours. Lorsque le consommateur modifie son bon de commande et qu’en conséquence un nouveau bon de commande est conclu, il convient de considérer que l’ensemble des dispositions relatives au droit de rétractation doivent s’appliquer avec comme point de départ la date de conclusion de ce nouveau bon de commande.

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Pour approfondir : L’article L.121-21 du Code de la consommation prévoit que : « Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L.121-21-3 à L.12121-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle ». Il est à préciser que suite à la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, dite loi Hamon, la durée du délai de rétractation est passée de sept à quatorze jours. L’article L.121-26 du Code de la consommation (dans sa version applicable aux faits de l’espèce, cette disposition ayant depuis été supprimée) prévoyait que : « Avant l’expiration du délai de réflexion prévu à l’article L. 121-25, nul ne peut exiger ou obtenir du client, directement ou indirectement, à quelque titre ni sous quelque forme que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement ni effectuer des prestations de services de quelque nature que ce soit ». En l’espèce, suite à un démarchage à domicile, Mme C. signe un bon de commande le 29 décembre 2010 auprès de la société A. concernant la réalisation de menuiseries et verse un acompte de 6.300 euros. Deux jours plus tard, le 31 décembre 2010, le représentant de la société A. revient chez Mme C. et les termes du bon de commande sont modifiés. Mme C. allègue l’irrégularité des bons de commande signés les 29 et 31 décembre 2010 et assigne la société A. aux fins d’obtenir la nullité des bons de commande et la condamnation de son partenaire à lui payer diverses sommes. En première instance, le Tribunal fait droit aux demandes de Mme C. La Cour d’appel confirme cette décision. En effet, le bon de commande passé le 29 décembre 2010 a été modifié et annulé par le nouveau bon de commande régularisé deux jours plus tard. Les dispositions de l’article L.121-21 et suivants du Code de la consommation devaient donc être respectées s’agissant de ce nouveau bon de commande. Plus précisément, le nouveau bon de commande devait contenir l’ensemble des mentions obligatoires pour tout bon de commande, ainsi qu’un bordereau de rétractation. De plus, un nouveau délai de rétractation a débuté à compter de cette date, la société A. n’était donc pas en droit de percevoir une contrepartie quelconque - en ce compris un acompte avant l’expiration de ce délai de rétractation.

Or, tel n’a pas été le cas puisque la société A. a reçu un acompte de 6.300 euros. Le bon de commande du 31 décembre 2010 a donc été annulé et la société A. a été condamnée à restituer l’acompte perçu. Il convient donc de se montrer vigilant en cas de modification du bon de commande et de veiller à ce que l’ensemble des dispositions soient respectées s’agissant du nouveau bon de commande qui annule et remplace le précédent. A rapprocher : article L.121-21 du Code de la consommation

L’étiquetage de denrées alimentaires ne doit pas induire le consommateur en erreur CJUE, 4 juin 2015, Aff. C-195/14 Ce qu’il faut retenir : L’étiquetage d’une denrée alimentaire ne doit pas induire le consommateur en erreur en suggérant la présence d’un ingrédient qui est en réalité absent du produit. Pour approfondir : Le 4 juin 2015, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a répondu à une question préjudicielle provenant de la Cour fédérale de justice allemande statuant sur l’affaire Teekanne. En effet, une association allemande de protection des consommateurs a assigné la société Teekanne afin qu’elle cesse de faire la promotion d’une infusion aux fruits, appelée « Felix aventure framboise-vanille », promotion que l’association considérait comme contraire à la Directive 2000/13 du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000, relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard. En l’espèce, l’emballage de l’infusion comportait les mentions « avec des arômes naturels » et « ne contient que des ingrédients naturels » ainsi que des images de framboises et de fleurs de vanille. En réalité, la liste d’ingrédients n’indiquait pas la présence de composants de framboises ou de fleurs de vanille, ni même d’arômes de framboises ou de vanille. La CJUE a jugé que l’étiquetage d’une denrée alimentaire ne doit pas induire le consommateur en

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erreur en suggérant la présence d’un ingrédient qui est en réalité absent du produit, absence qui n’est révélée que par la liste d’ingrédients figurant sur l’emballage. Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence communautaire constante protectrice des consommateurs : en vertu d’un arrêt de la CJUE, Commission européenne c/ République italienne, du 25 novembre 2010, le consommateur doit disposer « d’une information correcte, neutre et objective qui ne l’induise pas en erreur » lorsqu’il achète des denrées alimentaires. Le renvoi préjudiciel est une procédure prévue à l’article 267 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne. Grâce à cette procédure, une juridiction nationale de l’Union Européenne saisie d’un litige peut interroger la CJUE sur l’interprétation du droit de l’Union. La CJUE ne tranche pas le litige national qui lui a été présenté. En revanche, la juridiction nationale sera liée par son interprétation. Dans cet arrêt, une Cour allemande a posé à la CJUE la question préjudicielle suivante : « L’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard peuvent-ils suggérer, au moyen de l’apparence, de la description ou d’une représentation graphique, la présence d’un ingrédient déterminé alors que, en fait, cet ingrédient y est absent et que cette absence ressort uniquement de la liste des ingrédients visée à l’article 3, paragraphe 1, point 2, de la directive 2000/13 ? ».

-

Considérant 14 ; Article 1, paragraphes 1 et 3, sous a) ; Article 2, paragraphe 1, sous a), i) ; Article 3, paragraphe 1 ; Article 6.

En vertu de cette Directive, les consommateurs ne doivent pas être induits en erreur par un étiquetage (mentions, indications, marques de fabrique ou de commerce, images ou signes se rapportant à une denrée alimentaire…). Ainsi, tout étiquetage de denrées alimentaires doit comporter la dénomination de vente ainsi que la liste d’ingrédients. Cette Directive a été complétée par le Règlement n°178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires. La Cour a rappelé deux articles importants du Règlement n°178/2002 : -

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l’article 8 qui dispose que la législation alimentaire protège les intérêts du consommateur en prévenant les pratiques frauduleuses, la falsification des denrées alimentaires et toute pratique pouvant induire le consommateur en erreur ; et l’article 16 qui indique les manières dont les distributeurs peuvent induire en erreur le consommateur.

I. Fondements textuels La Directive 2000/13 est relative à l'étiquetage et à la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard. Son principal objectif est la protection des consommateurs : ils doivent être informés de la nature exacte et des caractéristiques des produits. On retrouve cet objectif dans le droit français, à travers la notion de transparence du marché (Livre Ier du Code de la consommation).

Enfin, la Cour s’est référée au droit allemand, afin de permettre à la juridiction nationale qui l’a saisie de trancher le litige. Deux lois sont citées : -

la loi relative à la concurrence déloyale (Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb – l’UWG) qui définit cette pratique comme l’infraction à « une disposition légale destinée […] à réglementer le comportement sur le marché dans l’intérêt des opérateurs du marché », soit « toute pratique commerciale trompeuse », c’est-à-dire le fait d’impliquer des allégations inexactes ou de nature à induire en erreur. Par exemple, le fait d’induire le consommateur en erreur sur la composition exacte d’un bien ; et

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le Code allemand relatif aux denrées alimentaires (Lebensmittel, Bedarfsgegenstände und Futtermittelgesetzbuch – le LFGB) qui interdit en son article 11 la commercialisation de denrées alimentaires « sous une dénomination trompeuse

Elle a été abrogée par le Règlement européen n°1169 du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires mais elle était toujours applicable en l’espèce (à la date des faits du litige, la Directive était en vigueur). La Cour a rappelé les dispositions nécessaires à la résolution du litige : -

Considérant 6 ; Considérant 8 ;

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ou avec des indications ou une présentation trompeuses ». II. Procédure nationale 1. Jugement rendu en première instance En l’espèce, l’association allemande Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraudcherverbände (BVV) a saisi le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) afin que la société Teekanne soit contrainte à cesser la promotion de l’infusion aux fruits « Felix aventure framboise-vanille ».

goût de cette infusion serait déterminé notamment par des arômes obtenus à partir de framboises et de fleurs de vanille ». Selon elle, cette suggestion serait de nature à dissuader le consommateur de s’intéresser à la liste exacte des ingrédients qui, ajoute-t-elle, figure sur l’emballage « en caractères plus petits ». La Cour fédérale s’en est remise à l’interprétation de la Directive 2000/13 par la CJUE : elle a décidé de surseoir à statuer et de poser à la CJUE une question préjudicielle.

III. Raisonnement de la CJUE L’association s’est fondée sur la Directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 qui dispose que l’étiquetage des denrées alimentaires doit permettre au consommateur « d’opérer son choix en toute connaissance » (considérant 8) et ainsi l’étiquetage ne saurait « induire l’acheteur en erreur » (considérant 14). Par décision du 16 mars 2012, le Landgericht de Düsseldorf a accueilli la demande de l’association. 2. Jugement en appel La société défenderesse a interjeté appel auprès de l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) qui a infirmé, le 19 février 2013, le jugement du Landgericht au motif que les informations données dans la liste d’ingrédients suffisaient à écarter tout risque de tromperie du consommateur : en effet, selon le tribunal, les dispositions légales allemandes (les lois UWG et LFGB) s’interprètent comme protégeant le consommateur moyen, que la CJUE définit dans le paragraphe 36 comme le consommateur « normalement informé et raisonnablement attentif et éclairé » (on parle au Royaume-Uni de « reasonable man »). Ainsi, un consommateur moyen sait, en lisant la liste d’ingrédients, que l’infusion est composée d’arômes « au goût » framboise et vanille et non obtenus à partir de ces fruits. Selon le tribunal, « l’information exacte et complète qui ressort de la liste des ingrédients figurant sur l’emballage suffirait à écarter le risque de tromperie du consommateur ». 3. Jugement en dernier ressort L’association a formé un recours contre cette décision devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice). La juridiction de renvoi a jugé que les mentions et images apposées sur l’emballage « suggèrent que le

En délimitant le cadre juridique, la CJUE s’est posée la question suivante : un étiquetage de denrées alimentaires induit-il les consommateurs en erreur s’il présente des mentions contradictoires par rapport à la liste des ingrédients ? Après avoir rappelé qu’il ne lui appartient pas de trancher le litige au fond, la CJUE s’est reportée au précédent Alberto Severi c. Regione Emilia Romagna du 10 septembre 2009 dans lequel elle avait jugé que l’appréciation de la capacité d’un étiquetage à induire en erreur se fonde « sur l’attente présumée d’un consommateur moyen […] quant à l’origine, la provenance et la qualité liée à la denrée alimentaire, l’essentiel étant de ne pas induire le consommateur en erreur et de ne pas l’amener à considérer, de façon erronée, que le produit a une origine, une provenance ou une qualité différentes de ce qu’elles sont en réalité ». La jurisprudence semble d’accord pour dire que le consommateur souhaitant acheter un produit va avant tout lire la liste d’ingrédients, et qu’ainsi si la liste est exacte, il ne devrait pas être induit en erreur. Cependant, cette position est à tempérer dans le cas où un étiquetage est composé de mentions ou d’images influençant le consommateur. En effet, la présence d’une liste d’ingrédients exacte – obligatoire en vertu de l’article 3 paragraphe 1 de la Directive 2000/13 – n’exonère pas le distributeur de denrées alimentaires d’appliquer le même standard d’information exacte aux autres mentions figurant sur l’emballage. Ainsi, la CJUE a jugé qu’une liste d’ingrédients, certes exacte et exhaustive, ne suffit pas à corriger des mentions inexactes figurant sur l’emballage : la présence de mentions contradictoires conduit le consommateur à se faire une impression erronée du produit, susceptible de l’induire en erreur quant à sa composition exacte.

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Reste à savoir si le Bundesgerichtshof tranchera le fond du litige de la même façon.

livraison du bien en question. Lorsque ces faits sont établis, le consommateur est alors dispensé d'établir que le défaut de conformité existait effectivement à la date de la livraison du bien. Il incombe alors au professionnel de rapporter, le cas échéant, la preuve que le défaut de conformité n'était pas présent au moment de la délivrance du bien, en établissant qu'il trouve sa cause ou son origine dans un acte ou une omission postérieure à cette délivrance ;

A rapprocher : CJUE, 25 novembre 2010, Aff. C-47/09

Vente et garantie des biens de consommation : clarification des règles de protection des consommateurs CJUE, 4 juin 2015, Aff. C-497/13

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Ce qu’il faut retenir : Par l’arrêt du 4 juin 2015, la CJUE clarifie les règles relatives à la protection des consommateurs en matière de vente et de garantie des biens de consommation.

la qualité de « consommateur » au sens de la directive 1999/44 s’apprécie sans considération du fait que le consommateur ait bénéficié (ou non) de l'assistance d'un avocat.

A rapprocher : Parlement et Conseil de l'Union européenne, dir. n°1999/44/CE, 25 mai 1999, JOUE n° L 171, p. 12

Pour approfondir :

*****

Les enseignements de fondamentaux en pratique : -

-

cette

décision

sont

INTERNATIONAL

la directive 1999/442 (Parlement et Conseil de l'Union européenne, dir. n°1999/44/CE, 25 mai 1999, JOUE n° L 171, p. 12) permet aux États membres de l'Union européenne de prévoir que le consommateur doit, afin de bénéficier de ses droits, informer le vendeur du défaut de conformité dans un délai de 2 mois à compter de la date à laquelle il l'a effectivement constaté. L'obligation à la charge du consommateur se limite donc à informer le vendeur de l'existence d'un défaut de conformité. Autrement dit, le consommateur n'est pas tenu, à ce stade, de rapporter la preuve qu'un défaut de conformité affecte le bien qu'il a acquis, ni d'indiquer la cause de ce défaut de conformité ; pour le cas où le défaut de conformité est apparu dans un délai de 6 mois à compter de la délivrance du bien, la directive allège la charge de la preuve qui incombe au consommateur en prévoyant que le défaut est présumé avoir existé au moment de la délivrance. Pour bénéficier de cet allègement, le consommateur doit néanmoins rapporter la preuve que le bien vendu n'est pas conforme au contrat. Le consommateur n'est tenu de prouver que l'existence du défaut ; il ne doit pas prouver la cause de celui-ci et/ou établir que son origine serait imputable au vendeur. Le consommateur doit prouver que le défaut de conformité en cause est apparu, c'est-à-dire s'est matériellement révélé, dans un délai de 6 mois à compter de la

Conflit de lois en matière contractuelle ère Cass. civ. 1 , 16 septembre 2015, pourvoi n°1410.373 Ce qu’il faut retenir : Lorsqu’un contrat est conclu par des parties n’ayant pas la même nationalité, un choix relatif à la loi applicable peut être effectué en amont selon la Convention de Rome du 19 juin 1980 (la « Convention de Rome »). En l’absence de choix, la Convention de Rome admet comme loi applicable celle du pays avec lequel il existe les liens les plus étroits. Pour approfondir : En l’espèce, une banque italienne conclut un contrat de prêt le 19 avril 2006 avec une personne résidant habituellement en Italie, son garant réside habituellement en France. Après déchéance du terme, la banque assigne l’emprunteur et le garant en paiement des sommes restant dues. La Cour d’appel déboute la banque, laquelle forme un pourvoi en cassation. I- Détail de la décision L’arrêt de la Cour de cassation détaille trois moyens.

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Concernant le premier relevé d’office, l’arrêt d’appel ne reconnait pas la loi italienne comme applicable audit contrat de prêt puisque « aucun justificatif sérieux du montant de la créance dont elle se prévaut à l’encontre de l’emprunteur n’est fourni ». En revanche, la Cour de cassation soutient qu’il incombe au juge français de « rechercher la loi compétente, puis de déterminer son contenu, et de l’appliquer ». S’agissant du quatrième moyen pris en sa première branche, la Cour d’appel retient que « les textes du droit français relatifs à la protection de la caution et au formalisme de son engagement ont un caractère impératif ».

suite, tous les nouveaux Etats adhérents à la Communauté Européenne sont invités à y adhérer.

La Cour de cassation infirme cette décision, au motif que les mentions prévues par ces textes sont destinées à assurer une meilleure protection de la personne qui s’engage mais ne déterminent pas pour autant l’applicabilité de la loi française telle que loi de police. L’essentiel de l’arrêt se trouve dans le moyen qui suit. En effet le troisième moyen pris en sa quatrième branche traite du conflit de lois lors d’une obligation contractuelle.

Les deux protocoles ont été signés le 19 décembre er 1988, ratifiés par la France le 1 décembre 1995, er entrés en vigueur le 1 août 2004, publiés par le décret n°2005-17 du 5 janvier 2005.

D’après l’arrêt d’appel, la loi française est applicable au contrat puisque « le cautionnement est un contrat autonome et que c’est avec la France que le contrat litigieux présentait les liens les plus étroits puisque le garant résidait en France au moment de la signature ». Sur le fondement de l’article 4 de la Convention de Rome, la Cour de cassation relève qu’en l’absence de choix par les parties, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Par ailleurs, le pays présumé présenter de tels liens est celui dont la partie devait fournir la prestation caractéristique qui a sa résidence habituelle au moment du contrat. Ainsi, la Cour de cassation conclut que le contrat est régie par la loi italienne puisque, le contrat est rédigé en Italie, le prêteur détient son siège en Italie, la résidence habituelle de l’emprunteur se situe en Italie et que le contrat de prêt dont l’acte de cautionnement constituait la garantie était régi par la loi italienne. II- Rappel de la Convention de Rome La Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles a été conclue le 19 juin 1980 par les neufs Etats membres de la Communauté Européenne de l’époque (la France, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Irlande et le Danemark). La Convention de er Rome est entrée en vigueur le 1 avril 1991. Par la

Un premier protocole a été rédigé concernant l’interprétation par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de la Convention de Rome. (Journal officiel n° C 027 du 26/01/1998 p. 0047 0051). Un second protocole attribue à la CJUE une compétence pour interpréter la Convention de Rome. (Journal officiel n° C 027 du 26/01/1998 p. 0052 – 0053) ».

Par ailleurs le texte de la Convention de Rome est complété par plusieurs déclarations communes relatives à l’harmonie entre les mesures à adopter par les pays membres de la Communauté européenne en termes de règles de conflit notamment avec les dispositions de la Convention de Rome. La Convention de Rome détaille deux situations, la détermination de la loi applicable (i) par un choix des contractants, ainsi (ii) qu’en l’absence de choix des contractants.  La détermination de la loi applicable en présence d’un choix de la part des contractants Selon l’article 1 de la Convention de Rome, « le contrat est régi par la loi choisie par les parties». Il n’y a aucune contrainte concernant le choix de la loi. Ainsi, une loi d’un Etat tiers aux parties peut être appliquée. Le choix de la loi applicable doit être « exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause ». Par ailleurs, les parties sont libres de « désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat », tout en veillant bien entendu à la cohérence du contrat. Les parties sont également libres de modifier la loi applicable lorsqu’elles le souhaitent d’un commun accord. En cas de conflit le juge ne pourra contester le choix de la loi applicable retenue par les parties.  La détermination de la loi applicable en l’absence d’un choix de la part des contractants

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En l’absence de choix de la loi applicable par les parties, le contrat est régi en principe par « la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits » conformément à l’article 4 de la Convention de Rome. La détermination des « liens les plus étroits » se fait par le principe de proximité c’est-à-dire du lieu de la résidence habituelle ou de l’administration centrale pour les personnes morales. Toutefois, lorsque le contrat est conclu dans l’exercice d’une activité professionnelle, le lieu déterminant est celui du principal établissement. La Convention de Rome distingue les contrats ayant pour objet un droit réel immobilier en disposant qu’à défaut de choix par les parties, la loi applicable est celle du pays où se situe l’immeuble. Les contrats de transport de marchandises sont également soumis à un régime spécifique visé par la Convention de Rome laquelle établit que la loi applicable est déterminée en fonction du lieu de chargement, de déchargement de l’établissement de l’expéditeur. Enfin, la Convention de Rome contient des dispositions particulières s’agissant des contrats conclus par les consommateurs et des contrats de travail. ► Contrat de consommation S’agissant des contrats conclus par des consommateurs, la Convention de Rome s’applique seulement aux contrats conclus à des fins personnelles : fourniture d’objets meubles corporels ou de services, ainsi que tous les contrats ayant trait au financement de ces objets (article 5). Dans les cas où les parties ont préalablement choisi la loi applicable, ce choix prévaut. Cependant, ce choix ne peut avoir pour effet de « priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle ». A défaut de choix, le contrat de consommation sera régi par la loi du pays où se situe « la résidence habituelle du consommateur ». ► Contrat de travail Concernant les contrats de travail, la loi applicable est présumée être celle du pays de l’exécution habituelle du travail (article 6). En présence d’un choix des parties, les règles sont les mêmes qu’en matière de contrat de consommation,

c’est-à-dire que le choix est valable mais ne peut priver le « travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable ».

III- Mise en place d’un instrument communautaire : le règlement européen n°593/2008 Le programme de La Haye de 2004 réaffirme l’importance de poursuivre les travaux sur les règles de conflits de lois pour les obligations contractuelles dans le cadre de son plan d’action en faveur de l’adoption de la proposition «Rome I». Le règlement qui en découle remplace la convention de Rome de 1980 concernant la loi applicable aux obligations contractuelles. Il en fait un instrument communautaire et le modernise. Le règlement n°593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 Juin 2008 établit ainsi un ensemble de règles contraignantes de droit international privé pour les obligations contractuelles et non contractuelles avec le règlement de Bruxelles I et de Rome II. Cela implique ainsi une uniformisation du droit international privé pour les Etats membres ainsi qu’une compétence d’interprétation à la Cour de justice. Le règlement n°593/2008 s’applique aux obligations contractuelles en matière civile et commerciale lors de conflit de lois et s’agissant des contrats conclus depuis le 17 décembre 2009. Il est construit de la même manière que la convention de Rome mais apporte plus de précisions concernant certains points particuliers. Aux termes de l’article 12 du règlement n°593/2008, la loi considérée comme applicable au contrat devra régir : son interprétation, l’exécution des obligations qu’il engendre, les sanctions en cas de non-respect des obligations, l’évaluation des dommages, l’extinction des obligations, les mesures d’exécution et les sanctions en cas d’invalidité du contrat.  Loi applicable à défaut de choix Lorsque les parties n’ont pas choisi la loi applicable, le règlement n°593/2008 vise en article 4 les modalités des lois applicables en fonction des types de contrats quand la Convention de Rome restait beaucoup plus vague : -

concernant les contrats de vente de biens, de prestation de services, de franchise ou de

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distribution, la loi applicable sera celle du pays de résidence du principal exécutant du contrat ; -

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la loi applicable en matière de bail d’un bien immeuble est celle du pays où le bien se situe, à l’exception d’un usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs. Le cas échéant, la loi applicable est celle du pays de résidence du propriétaire ; s’agissant de la vente de biens aux enchères, la loi applicable est celle du pays ou l’enchère a lieu.

D’autre part, le règlement renforce les modalités de sélection de la loi applicable en l’absence de choix concernant les contrats de transport (article 5), de consommation (article 6), d’assurance (article 7), et enfin les contrats individuels de travail (article 8). A rapprocher : Convention de Rome du 19 juin 1980

Contrats internationaux et application de la loi française CEPC, avis n°15-08, 26 mars 2015 Ce qu’il faut retenir : La Commission d’Examen des Pratiques Commerciales se prononce, dans un avis rendu le 26 mars 2015, sur les hypothèses dans lesquelles la loi dite LME, et plus généralement la loi française, peut s’appliquer dans le cadre d’un contrat international. Pour approfondir :

que le fait de refuser les CGV avant même l’ouverture des négociations était illégal ; cela revenant à refuser de contracter avec ce fournisseur. Les CGV étant ainsi le socle unique de la négociation, cela signifie que les négociations ne peuvent pas se fonder sur la base des seules conditions d’achats ou des seuls contrats types des clients, lesquels peuvent être pris en compte dans les négociations mais pas de manière exclusive. La Cour d’appel de Paris a notamment sanctionné une clause qui prévoyait que les conditions générales d’achat (CGA) se substitueraient purement et simplement aux conditions générales de vente dès lors que les CGV et les CGA seraient contradictoires (CA Paris, 18 décembre 2013, RG n°12/00150).

II. Dans le cadre d’un contrat international La CEPC s’est ensuite interrogée sur la primauté des CGV dans les contrats internationaux. Est-il en effet possible de se prévaloir des dispositions de l’article L.441-6 du Code de commerce dans le cadre d’un contrat international ? Dans ce cadre, la CEPC s’est ainsi prononcée, de manière plus générale, sur les hypothèses dans lesquelles la loi française - et donc les dispositions de la loi LME (codifiées dans le titre IV du livre IV du Code de commerce), en ce qu’elles font notamment référence aux conditions générales de vente - peuvent s’appliquer aux contrats internationaux, en effectuant pour ce faire les distinctions suivantes.

A. Les dispositions de la loi LME sanctionnées pénalement

La Commission d’Examen des Pratiques Commerciales (CEPC) a été saisi d’une question portant sur la primauté des conditions générales de vente dans les contrats franco-français et dans les contrats internationaux, ce qui l’a principalement amené à s’interroger sur l’application de la loi dite LME dans le cadre des contrats internationaux.

I. Dans le cadre d’un contrat franco-français L’article L.441-6 du Code de commerce prévoit expressément que : « Les conditions générales de vente constituent le socle de la négociation ». Les conditions générales de vente(CGV) constituent ainsi le point de départ des négociations entre les parties. La CEPC avait déjà eu l’occasion de souligner

L’article 113-2 du Code pénal prévoit que : « La loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République. L’infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu’un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire ». Il résulte ainsi de l’application de ce texte, selon la CEPC que « lorsque l’acte matériel de l’infraction réside dans l’achat et que l’acheteur est établi est établi en France », les dispositions de la loi LME sanctionnées pénalement s’appliquent. Celles-ci peuvent toutefois également s’appliquer, même dans l’hypothèse où les actes constitutifs de l’infraction se produisent à l’étranger, dès lors que leurs effets se produisent sur le territoire français.

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B. Les dispositions de la loi LME sanctionnées civilement

en France pour y être distribués », que le fournisseur soit français ou étranger.

1. Les contrats de vente

Application des dispositions du Règlement Rome II n°864/2007 du 11 juillet 2007 lorsque la sanction encourue relève de la matière extra-contractuelle

S’agissant des contrats de vente internationale de marchandises, il convient de se référer à la Convention de Vienne du 11 avril 1980, qui s’applique lorsque les parties sont situées dans deux Etats parties à la Convention différents, ou lorsque la règle de conflit de lois désigne la loi d’un Etat partie. La Convention s’applique uniquement aux relations entre vendeur et acheteur (et non à leur relation avec des tiers), et uniquement en ce qui concerne la formation du contrat et les droits et obligations des parties résultant de la conclusion du contrat ; tout ce qui ne relève pas de l’application de la Convention de Vienne sera ainsi régi par la lex contractus. S’agissant des contrats de vente à caractère international d’objets mobiliers corporels, il convient de se référer à la Convention de la Haye du 15 juin 1955, qui prévoit l’application de la loi choisie par les parties et, à défaut, celle du lieu de résidence habituelle du vendeur, sauf motif d’ordre public.

2. Les contrats de distribution S’agissant des contrats de distribution, la CEPC opère une distinction entre les dispositions de la loi LME dont l’inobservation entraine une sanction de nature contractuelle ou une sanction de nature extracontractuelle. Application des dispositions du Règlement Rome I n°593/2008 du 17 juin 2008 lorsque la sanction encourue relève de la matière contractuelle La loi française, et donc la loi LME, peut s’appliquer dans deux hypothèses : d’une part, lorsque les parties l’ont expressément choisi, ou, à défaut de choix des parties dans le contrat, si le distributeur a sa résidence habituelle en France et, d’autre part, si l’on peut considérer que la loi LME est une loi de police du juge saisi et que la situation en cause entre dans son champ d’application. La CEPC semble se montrer plutôt favorable au fait que les dispositions du titre IV du livre IV du Code de commerce puissent être qualifiées de loi de police. Si tel est le cas, c’est-à-dire si les dispositions de la loi LME s’analysent comme des lois de police, les dispositions de la loi LME pourraient donc s’appliquer « dès lors que les produits ou services seraient vendus

L’article 6 du Règlement Rome II prévoit une règle de conflit spéciale pour les délits concurrentiels selon laquelle « la loi applicable à une obligation noncontractuelle résultant d’un acte de concurrence déloyale est celle du pays où les relations de concurrence ou les intérêts collectifs des consommateurs sont affectés ou susceptibles de l’être ». Selon la CEPC, les actions en responsabilité prévues par l’article L.442-6 du Code de commerce pourraient être régies par ce texte dès lors que la responsabilité encourue résulte d’un acte de concurrence déloyale. Les actions civiles fondées sur la violation des dispositions de la loi LME relèveraient ainsi de la loi « du pays où les relations de concurrence ou les intérêts collectifs des consommateurs sont affectés ou susceptibles de l’être » et donc, si le client est établi en France, on pourra considérer que « les relations de concurrence » se nouent en France et, de même, si les produits sont revendus en France, le territoire français sera également celui sur lequel « les intérêts collectifs des consommateurs » seront affectés ou susceptibles de l’être. En revanche, si un acte de concurrence déloyale affecte uniquement un concurrent déterminé, les dispositions de l’article 6 du Règlement Rome II ne sont pas applicables et, dans ce cas, selon l’article 4 du Règlement Rome II, la loi applicable est celle du lieu où le préjudice est directement subi (sauf si le fait dommageable présente un lien manifestement plus étroit avec un autre Etat). La loi LME peut également s’appliquer, dans l’hypothèse où l’article 6 du Règlement Rome II serait inapplicable et où une loi étrangère serait applicable sur le fondement de l’article 4 du Règlement, dans deux hypothèses particulières : d’une part, sur le fondement de l’article 17 du Règlement Rome II qui prévoit que : « pour évaluer le comportement de la personne dont la responsabilité est invoquée, il est tenu compte, en tant qu’élément de fait et pour autant que de besoin des règles de sécurité et de comportement en vigueur au lieu et au jour de la survenance du fait qui a entrainé la responsabilité » et, d’autre part, sur le fondement de l’article 16 du Règlement Rome II qui prévoit que « les dispositions du présent règlement ne portent pas atteinte à

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l’application des disposition de la loi du for qui régissent impérativement la situation, quelle que soit la loi applicable à l’obligation non contractuelle ». A rapprocher : article L.441-6 du Code de commerce

Régime juridique des clauses attributives de juridiction dans l’Union Européenne ère Cass. civ. 1 , 7 octobre 2015, pourvoi n°14-16.898 Ce qu’il faut retenir : Une clause attributive de juridiction, qui permet d’identifier les juridictions pouvant être saisies par suite d’un litige opposant les parties dans le cadre de l’exécution ou de l’interprétation du contrat, répond à l’impératif de prévisibilité auquel doivent satisfaire les clauses d’élection de for en application du règlement du Conseil du 22 décembre 2000 dit « Bruxelles I ».

qui, quant à elle, ne pouvait saisir que les juridictions irlandaises. Le demandeur au pourvoi s’appuyait sur un arrêt (Cass. civ. 1ère, 26 sept. 2012, n° 11-26.022), qui avait approuvé les juges du fond d’avoir retenu que la clause attributive, selon laquelle l’une des parties se réservait le droit d’agir au domicile de l’autre ou devant « tout autre tribunal compétent », ne liait, en réalité, que cette autre partie et revêtait donc un caractère potestatif à l’égard de la banque. La situation était toutefois différente en l’espèce puisque même si les parties n’avaient pas la même latitude dans le choix de la juridiction compétente, la clause n’en permettait pas moins d’identifier les juridictions éventuellement amenées à se saisir d’un litige entre les parties. Ce faisant, la clause répondait bien, selon l’expression consacrée par la Cour de cassation, « à l’impératif de prévisibilité auquel doivent satisfaire les clauses d’élection de for ». Le moyen n’était donc pas fondé de ce chef.

Pour approfondir : En l’espèce, une société irlandaise et une société française avaient conclu un contrat contenant une clause attributive de juridiction désignant les juridictions irlandaises et permettant à la société irlandaise de saisir les juridictions françaises ainsi que les juridictions de tout pays où elle aurait subi un préjudice. Etait applicable l’article 23 du règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, qui prévoit la possibilité d’une prorogation de compétence, par la voie de la conclusion d’une clause attributive de compétence. La société française saisit le tribunal de commerce de Paris. Une exception d’incompétence, soulevée au profit des juridictions irlandaises, avait été accueillie. Le contredit ayant été rejeté par le juge du fond, un pourvoi en cassation devait être formé. L’arrêt rendu par la Cour de cassation permet de retenir deux enseignements. En premier lieu, le pourvoi faisait grief à l’arrêt critiqué d’avoir retenu que la clause attributive de juridiction ne présentait pas de caractère potestatif, alors que la société irlandaise pouvait saisir les juridictions de plusieurs États, contrairement à la société française

En second lieu, les juges du fond avaient retenu que la clause attributive de juridiction avait vocation à s’appliquer à tout litige né par suite de leur exécution. Néanmoins, en l’espèce, la société française invoquait l’existence de pratiques anticoncurrentielles et d’actes de concurrence déloyale. Or, ainsi que le souligne la Cour de cassation par l’arrêt commenté, la Cour de justice a dit pour droit que « l’article 23, paragraphe 1, doit être interprété en ce sens qu’il permet, dans le cas où des dommagesintérêts sont réclamés en justice en raison d’une infraction à l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de prendre en compte les clauses attributives de juridiction contenues dans des contrats de livraison, même si une telle prise en considération a pour effet de déroger aux règles de compétence internationale prévues aux articles 5, point 3, et/ou 6, point 1, du règlement, à la condition que ces clauses se réfèrent aux différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d’une infraction au droit de la concurrence » (CJUE 21 mai 2015, aff. C-352/13). Or, en l’espèce, la clause attributive ne se référait pas à une infraction au droit de la concurrence. Ce faisant, l’arrêt objet du pourvoi est censuré. A rapprocher : CJUE, 21 mai 2015, Aff. C-352/13 ; CA Paris, 8 avril 2014, inédit

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En droit international privé, connaître le droit applicable n’est pas connaître le juge compétent Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-14.924 Ce qu’il faut retenir : En droit international privé, l’applicabilité au fond du litige de dispositions impératives constitutives de lois de police issues d’un doit national ne doit pas entrer en compte pour déterminer la juridiction compétente. Pour approfondir : Une société allemande, après avoir confié pendant vingt ans à une société française la distribution de ses produits sur le territoire français, lui a notifié la rupture de leur relation commerciale avec un préavis de huit mois. Cette dernière, s’estimant victime d’une rupture brutale de relations commerciales établies, l’a alors assignée devant le tribunal de commerce de Pontoise sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce français. La société allemande arguait de l’incompétence des juridictions françaises au profit des juridictions allemandes en faisant valoir que la mention « Gerichtstand München » (tribunal compétent Munich) figurait sur l’ensemble des factures et des correspondances adressées par elle au distributeur français, celui-ci ayant tacitement accepté la clause attributive de juridiction en ne s’y opposant pas. Pour rejeter l’exception d’incompétence et donner compétence aux juridictions françaises, la Cour d’appel de Versailles retenait que la mention d’attribution de juridiction alléguée ne constituait pas une convention attributive de juridiction, au sens de l'article 23 du Règlement (CE) n°44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 (« Bruxelles I ») au motif : -

qu’elle n’avait pas fait l’objet d’une acceptation tacite par le distributeur et, qu’elle ne donnait aucune définition du rapport de droit déterminé pouvant donner lieu à la prorogation de compétence prévue par l'article 23 du Règlement de Bruxelles I.

Pour rejeter l’exception d’incompétence, la Cour d’appel retenait encore que, s'agissant d'une demande fondée sur la rupture brutale d'une relation commerciale établie entre un fournisseur et un distributeur qui n'ont pas conclu de contrat écrit ni de clause attributive de compétence valable, l'article

L.442-6 I 5° du Code de commerce est reconnu comme loi de police au sens de l'article 3 du Code civil, qui s'impose en tant que règle obligatoire pour le juge français. Insatisfaite, la société allemande a formé un pourvoi devant la Cour de cassation. Dans un arrêt ayant eu les honneurs de la publication au Bulletin comme étant particulièrement motivé, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en ce que l’appelante échouait à démontrer l’existence d’une convention attributive de juridiction, au sens de l'article 23 du Règlement Bruxelles I. Cependant, érigeant l’article 3 du Code civil en attendu de principe – « Attendu qu’une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre ne peut être attraite devant les tribunaux d’un autre Etat membre qu’en vertu des compétences spéciales énoncées par le règlement susvisé » – elle casse l’arrêt d’appel en ce qu’il a justifié le rejet de l’exception d’incompétence par l’application d’une loi de police fondant la demande et s'imposant en tant que règle obligatoire pour le juge français. En effet, selon la Cour, seules les règles de conflit de juridictions doivent être mises en œuvre pour déterminer la juridiction compétente, des dispositions impératives constitutives de lois de police, seraient-elles applicables au fond du litige, ne sont pas des règles de conflit de juridiction ; elles ne sauraient être retenues pour déterminer la compétence d’une juridiction. On relèvera ici, au surplus, que l’article L.442-6 du C. com. donne compétence à une liste limitative de juridictions pour connaître de son application, parmi lesquelles ne figure pas le tribunal de commerce de Pontoise. En conclusion et pour rappel, les juridictions amenées à se prononcer sur leur compétence en vertu du règlement Bruxelles I doivent, pour y parvenir, déterminer : 1) si le rapport entre les parties est contractuel ou délictuel ; 2) dans le cas où il s’agit d’un rapport délictuel, si les parties ont conclu une convention/clause attributive de juridiction valable ; 3) à défaut de convention/clause attributive de juridiction valable, faire application des règles spéciales des articles 5 et suivants du Règlement Bruxelles I (ex. en matière contractuelle, compétence du tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée). A rapprocher : Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°13-18.704

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Agent français, mandant allemand, clientèle algérienne : quel est le juge compétent ? Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°13-18.704 Ce qu’il faut retenir : Le territoire attribué à un agent commercial n’est pas nécessairement le lieu où il fournit sa prestation de services au sens du règlement Bruxelles I.

En définitive, écartant les arguments de la mandante, la Cour de cassation a considéré que, l’agent commercial ayant piloté toutes ses prestations vers la clientèle algérienne depuis son siège à Boulogne, et n’ayant aucun lieu de représentation ou d’implantation en Algérie, Boulogne était le lieu de la fourniture principale des services et le Tribunal de commerce de Nanterre était compétent. ère

Pour approfondir :

A rapprocher : Cass. civ. 1 , 19 novembre 2014, pourvoi n°13-13.405

Une société de droit allemand et un agent commercial français spécialisé dans la promotion et la commercialisation de produits industriels, ont conclu, en mai 1984, un contrat d'agence commerciale aux termes duquel l’agent commercial était chargé de promouvoir sur le territoire algérien les produits fabriqués par la société mandante. Le 25 mai 2010, la mandante a notifié à l’agent commercial la résiliation du contrat en proposant une indemnité de rupture. L’agent commercial, contestant le montant de cette indemnité, a assigné sa mandante devant le Tribunal de commerce de Nanterre. Avant tout débat sur le fond du dossier, la mandante a soulevé l'incompétence de ce tribunal au profit d'une juridiction allemande en application du règlement (CE) n°44/2001 dit « Bruxelles I ». En l’absence de clause attributive de juridiction dans le contrat d’agence commerciale, le Tribunal de commerce de Nanterre était donc tenu de se prononcer sur sa compétence au regard des règles édictées par le droit européen des conflits de juridictions. En matière contractuelle, la compétence est régie par l'article 5-1 du règlement Bruxelles I. S’agissant d’un contrat d’agence commerciale, la jurisprudence, tant française qu’européenne, et la doctrine sont unanimes pour considérer qu’il s’agit d’un contrat de fourniture de services au sens des règles européennes de conflits de juridictions ; par conséquent, c’est l’article 5-1 b) deuxième tiret du règlement Bruxelles I qui trouve à s’appliquer.

Compétence des juridictions judiciaires en matière d'exequatur de sentences arbitrales étrangères ère Cass. civ. 1 , 8 juillet 2015, pourvoi n°13-25.846 Ce qu’il faut retenir : L’exequatur des sentences arbitrales rendues à l'étranger est exclusif de tout jugement sur le fond et relève de la compétence des juridictions judiciaires Pour approfondir : Selon un arrêt rendu par la première chambre civile de la cour de cassa on (Cass. civ. 1ère, 8 juillet 2015, pourvoi n 13-25.846), la sentence internationale, qui n'est rattachée à aucun ordre juridique étatique, constitue une décision de justice internationale dont la régularité doit être examinée au regard des règles applicables dans le pays où la reconnaissance et l'exécution sont demandées ; l'exequatur des sentences arbitrales rendues à l'étranger est exclusif de tout jugement sur le fond et relève de la compétence des juridictions judiciaires. A rapprocher : voir notre article que le nouveau pôle de compétence du TGI de Paris en matière d’exequatur (Cliquez ici).

Le Tribunal de commerce de Nanterre devait donc déterminer s’il était le tribunal du lieu « où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ». Pour la mandante allemande, ce lieu devait se trouver sur le territoire algérien, non en France, puisque c’est sur ce territoire que l’agent commercial était chargé de promouvoir les produits contractuels.

Ce qu’il faut retenir :

Le contrat prévoyait expressément que l’agent commercial aurait une activité de bureau de liaison sur ce territoire.

L’échange réalisé entre des « bitcoin » et des devises traditionnelles ne constitue pas une opération soumise à TVA.

Echange de devises traditionnelles contre des « bitcoin » : exonération de TVA CJUE, 22 octobre 2015, Aff. C-264/14

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Pour approfondir : La directive TVA énonce que les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux sur le territoire d'un État membre de l’UE par un assujetti agissant en tant que tel sont soumises à la TVA. Toutefois, les États membres de l’UE doivent notamment exonérer les opérations qui portent sur « les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux ». Par la décision commentée, la CJUE estime que des opérations d'échange de devises contre des unités de la devise virtuelle « bitcoin » (et inversement) constituent des prestations de services fournies à titre onéreux au sens de la directive, dès lors qu'elles consistent en l'échange de différents moyens de paiement et qu'il existe un lien direct entre le service rendu et la contrevaleur reçue. La Cour de justice considère aussi que ces opérations sont exonérées de la TVA en vertu de la disposition concernant les opérations portant sur « les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux ». A rapprocher : Conseil de l'UE, dir. n°2006/112/CE, 28 nov. 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée

Directive relative aux actions civiles en réparation des dommages concurrentiels Directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil, 26 novembre 2014 Ce qu’il faut retenir : La Directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 innove par l’édiction de règles facilitant l’indemnisation des préjudices causés par les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l'Union européenne. Pour approfondir : La Directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l'Union européenne (JOUE 5/12/2014) a été adoptée. Cette directive énonce certaines règles nécessaires pour faire en sorte que toute personne ayant subi un préjudice causé par une infraction au droit de la concurrence commise par une entreprise ou une

association d'entreprises puisse exercer effectivement son droit de demander réparation intégral de ce préjudice à ladite entreprise ou à ladite association. Elle établit des règles qui favorisent une concurrence non faussée sur le marché intérieur et qui suppriment les obstacles au bon fonctionnement de ce dernier, en garantissant une protection équivalente, dans toute l'Union, à toute personne ayant subi un tel préjudice. Elle fixe les règles coordonnant la mise en œuvre des règles de concurrence par les autorités de concurrence et la mise en œuvre de ces règles dans le cadre d'actions en dommages et intérêts intentées devant les juridictions nationales. Ainsi, cette directive tend vers une amélioration du sort des victimes, un renforcement de l’efficacité des actions civiles, au moyen notamment de règles de procédure visant à simplifier leur indemnisation. Pour ce qui concerne la prescription, l’article 10 de la Directive retient notamment que les délais de prescription ne commencent pas à courir avant que l'infraction au droit de la concurrence ait cessé et que le demandeur ait pris connaissance ou puisse raisonnablement être considéré comme ayant connaissance : a) du comportement et du fait qu'il constitue une infraction au droit de la concurrence ; b) du fait que l'infraction au droit de la concurrence lui a causé un préjudice ; et c) de l'identité de l'auteur de l'infraction. Toujours selon ce texte, les États membres veillent à ce que les délais de prescription applicables aux actions en dommages et intérêts soient de cinq ans au minimum. Les États membres veillent à ce qu'un délai de prescription soit suspendu ou, selon le droit national, interrompu par tout acte d'une autorité de concurrence visant à l'instruction ou à la poursuite d'une infraction au droit de la concurrence à laquelle l'action en dommages et intérêts se rapporte. Cette suspension prend fin au plus tôt un an après la date à laquelle la décision constatant une infraction est devenue définitive ou à laquelle il a été mis un terme à la procédure d'une autre manière. Pour ce qui concerne l’administration de la preuve, l’article 5 de la Directive retient notamment que chaque juridiction nationale doit pouvoir, si la victime en fait la demande, enjoindre à une autre partie ou à un tiers de produire des documents pertinents déterminés voire même toute une catégorie de documents. La juridiction doit cependant vérifier que la demande de dommages-intérêts obéit à une condition de plausibilité tout en mettant en œuvre un test de proportionnalité. Par ailleurs, la Directive prévoit que lorsqu’une infraction au droit de la concurrence est constatée par une décision définitive émanant d’une

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autorité de concurrence ou par une instance de recours, elle est alors nécessairement considérée, par les juridictions judiciaires du même pays, comme établie de manière irréfragable. Autrement dit, toute juridiction judiciaire sera liée à cet égard par une décision rendue par une autorité administrative.

Il examine trois domaines d’innovation actuels potentiellement révolutionnaires :

A rapprocher : Articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

1. La robotique

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l’impression 3D, la nanotechnologie et la robotique.

Les entreprises japonaises sont les chefs de file de l'innovation dans le domaine de la robotique. Parmi les 10 principaux déposants dans ce domaine, huit sont japonais, à savoir Toyota, Honda, Nissan, Denso, Hitachi, Panasonic, Yaskawa et Sony. Les deux autres sont Bosch (Allemagne) et Samsung (République de Corée).

Rapport 2015 de l’OMPI Rapport 2015 de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) Ce qu’il faut retenir :

2. L’impression 3D

Le 11 novembre 2015, OMPI a publié son rapport 2015 (ci-après « le Rapport ») sur la propriété intellectuelle dans le monde.

Les entreprises américaines sont également à l’origine de la plupart des demandes de brevet dans le domaine de l’impression 3D, avec 3D Systems et Stratasys en tête des principaux déposants et General Electric et United Technologies figurant parmi les 10 principaux déposants. Trois entreprises allemandes, à savoir Siemens, MTU Aero Engines et EOS, ainsi que trois entreprises japonaises, à savoir Mitsubishi, Hitachi et Toshiba, viennent compléter la liste des 10 principaux déposants dans le domaine de l’impression 3D.

Pour approfondir : Le 11 novembre 2015, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a publié son rapport 2015 sur la propriété intellectuelle dans le monde. Le Rapport, intitulé “Innovation et croissance économique”, examine le rôle de la propriété intellectuelle au service de l’innovation et de la croissance économique en mettant l’accent sur les innovations révolutionnaires. Les avancées technologiques extraordinaires réalisées au cours des 30 dernières années ont eu des incidences sur pratiquement tous les aspects de l’activité humaine et ont transformé les économies mondiales. Le Rapport montre comment trois innovations importantes, à savoir l’avion, les antibiotiques et les semi-conducteurs, ont favorisé de nouvelles activités commerciales. Il étudie également les perspectives futures d’une croissance axée sur l’innovation. Le Rapport montre, sur la base d’une cartographie originale des brevets par domaine d’innovation, que l’Allemagne, les États Unis, la France, le Japon, la République de Corée et le Royaume Uni représentent au moins 75% de l’ensemble des dépôts de demandes de brevet dans les domaines de l’impression 3D, de la nanotechnologie et de la robotique.

3. La nanotechnologie Bien que les entreprises américaines représentent ensemble le plus grand nombre de dépôts de demandes de brevet dans le domaine des nanotechnologies, Samsung reste le principal déposant et parmi les 10 principaux déposants, six sont japonais, à savoir Nippon Steel, Toshiba, Canon, Hitachi, Panasonic et TDK. IBM, l’Université de Californie et Hewlett Packard, des États Unis d'Amérique, viennent compléter la liste des 10 principaux déposants. *** *** La Chine est le seul pays émergent à revenu intermédiaire à s’approcher de ce groupe de pays industrialisés avancés. Si l’on examine l’histoire récente et en particulier l’évolution des dépôts de demandes de brevet depuis 2005, on constate que les déposants chinois représentent plus d’un quart des demandes de brevet déposées dans le monde dans les domaines de l’impression 3D et de la robotique, soit le pourcentage le plus élevé parmi tous les pays. La Chine connait un réel bond des dépôts de brevet à partir de 2005, notamment par le biais d’entreprises

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comme TierTime ou Hunan Farsoon, mais aussi par de nombreuses universités et organismes de recherche public aidées par le gouvernement. La Chinese Academy of Sciences, la Huazhong University of Science & Technology, la Xi’an Jiaotong University, la South China University of Technology, la Harbin Institute of Technology et la Beijing University of Technology comptent ainsi près de 230 brevets déposés depuis 1995. Le Rapport souligne les composantes essentielles d'un écosystème de l'innovation fructueux : des fonds publics pour financer la recherche scientifique et faire évoluer les technologies prometteuses du laboratoire à l'étape de production; un marché concurrentiel pour encourager les entreprises à innover, qui repose sur des marchés financiers dynamiques et une réglementation saine; et des liens étroits entre les acteurs de l'innovation du secteur public et du secteur privé. Le Rapport explique également comment l'innovation est de plus en plus étroitement liée aux universités et aux organismes de recherche publics. Davantage de demandes de brevet ont été déposées par les universités dans les domaines de l'impression 3D, de la nanotechnologie et de la robotique que dans ceux de l'aéronautique, des antibiotiques et des semiconducteurs. La nanotechnologie arrive en tête, avec près d'un quart des demandes de brevet dans le monde déposées par des universités.

modification d’une partie des règlements et des directives » 《商务部关于修改部分规章和规范性文件的决定》 Le Décret modifie 29 règlements et directives notamment dans les domaines des investissements étrangers en Chine, et des règles en matière de commerce intérieur en Chine. L’objectif du Décret est (i) de promouvoir la réforme du système d’enregistrement et de souscription du capital social et (ii) d’améliorer l’environnement dans le monde des affaires. L’esprit essentiel du Décret est de supprimer la restriction sur le seuil minimum du capital social enregistré, le délai de souscription du capital, les pourcentages de souscription du capital par l’investisseur étranger et les choix des monnaies pour la souscription du capital dans le domaine des investissements étrangers en Chine. Le Décret traite une quantité de sujets. Nous attirons ici plus particulièrement votre attention sur les articles suivants : -

1, 3, 6, 7, 8, 14 (la société d’investissement établie par un investisseur étranger) ; 10, 13 (la société cotée en bourse financée stratégiquement par un investisseur étranger) ; 17, 18, 22 (création d’une société par l’apport d’actions d’un investisseur étranger).

A rapprocher : Rapport sur le site de WIPO Le Décret a notamment modifié les règlements et directives suivants dans le domaine des investissements étrangers en Chine : Nouvelle réglementation sur les investissements étrangers en Chine Décret n°2 de l’année 2015 du MOFCOM

1. « Dispositions sur la création des sociétés par actions à responsabilité limitée ayant un investissement étranger » (《关于设立外商投资股份有限公司若干问题的暂行 规定》)

Ce qu’il faut retenir : L’essentiel de ce Décret est de promouvoir la réforme du système d’enregistrement et de souscription du capital social en supprimant notamment la restriction sur le seuil minimum du capital social enregistré pour l’investisseur étranger en Chine. Pour approfondir : Le Ministère du Commerce de la République populaire de Chine (MOFCOM) a publié le 28 octobre 2015 (date d’entrée en vigueur) le Décret n°2 de l’année 2015 du MOFCOM (商务部2015年第2号令) (le « Décret »), intitulé « Décision du MOFCOM concernant la

Antérieurement au 28 octobre 2015, les associés d’une société par actions à responsabilité limitée ayant un investissement étranger devaient souscrire et libérer l’intégralité du capital social enregistré auprès de l’administration chinoise. Désormais, l’obligation de libérer l‘intégralité du capital social a été supprimée. De même a été supprimée la règle selon laquelle (i) le seuil minimum du capital social est 30 millions RMB, (ii) les investisseurs étrangers doivent détenir au moins de 25% du capital, ainsi que (iii) le délai de 90 jours dans lequel il fallait auparavant libérer. Il n’y a donc plus de délai, puisqu’il n’y a plus d’obligation de libérer.

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2. « Dispositions provisoires sur les investissements en Chine par les sociétés ayant un investissement étranger » (《关于外商投资企业境内投资的暂行规定》)

6. « Dispositions relatives aux sociétés d’investissement créées par un investisseur étranger » (《关于外商投资举办投资性公司的规定》)

Avec l’entrée en vigueur du Décret, il n’y a plus d’interdiction à ce que le montant cumulé des investissements réalisés en Chine, par les sociétés ayant un investissement étranger, dépasse 50% de leurs propres actifs.

Depuis le 28 octobre 2015, les sociétés d’investissement créées par un investisseur étranger ne sont plus liées par l’obligation de respecter l’ancien seuil minimum du capital social fixé à 30 millions de dollars. Ces sociétés d’investissement créées par un investisseur étranger peuvent donc désormais librement fixer le montant de leur capital social.

3. « Dispositions sur la fusion ou la scission des sociétés ayant un investissement étranger » (《关于外商投资企业合并与分立的规定》) Depuis le 28 octobre 2015, les sociétés ayant un investissement étranger, peuvent désormais réaliser une opération de fusion ou de scission avant même la libération du capital ou l’obtention des autorisations administratives nécessaires le cas échéant pour e.g. l’exploitation ou la fabrication. 4. « Dispositions sur l’investissement étranger dans les entreprises innovantes » (《外商投资创业投资企业管理规定》) Désormais, il n’y a plus de seuil minimum de souscription du capital fixé à (i) 10 millions USD pour l’investisseur étranger personne physique, et (ii) 5 millions de USD pour l’investisseur étranger personne morale.

De plus, l’obligation de libérer le capital social dans le délai maximum de 2 ans à partir de l’obtention de la « business licence » a été supprimée. Le Décret a également modifié les dispositions complémentaires relatives aux sociétés d’investissement créées par un investisseur étranger (《关于外商投资举办投资性公司 的补充规定》) en prévoyant que l’investisseur étranger est désormais autorisé à effectuer un apport numéraire (i) en devises convertibles ou (ii) en monnaie chinoise résultant des profits réalisés en Chine continentale. 7. « Dispositions relatives à l’investissement étranger dans le secteur locatif » (《外商投资租赁业管理办法》) Le seuil minimum du capital social fixé à 10 millions de dollars a été supprimé.

Par ailleurs, désormais : -

le délai de libération du capital par l’investisseur étranger dans les entreprises innovantes n’est plus encadré par le délai maximum de 5 ans ;

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l’investisseur étranger peut désormais réduire le montant de la souscription (par voie d’annulation de titres) pendant la première année de l’existence de l’entreprise innovante.

5. « Dispositions relatives aux secteurs commerciaux de l’investissement étranger » (《外商投资商业领域管理办法》) Dans ces secteurs commerciaux (grossistes, ventes au détail, distribution e.g. franchise etc.), les associés des sociétés ayant un investissement étranger n’ont plus d’obligation de libérer la totalité du capital social. De plus, ces mêmes sociétés ne sont plus soumises à « l’examen annuel de conformité relatif aux sociétés ayant un investissement étranger » réalisé par l’Administration for Industry and Commerce.

8. « Dispositions sur l’investissement étranger dans le sociétés mandataires du transport international de marchandises » (《外商投资国际货物运输代理企业管理办法》) Le seuil minimum du capital social fixé à 10 millions de dollars a été supprimé. 9. « Dispositions en matière de financement stratégique de l’investisseur étranger dans des sociétés cotées en bourse en Chine » (《外国投资者对上市公司战略投资管理办法》) Le Décret a instauré un nouveau système d’approbation préalable donné d’abord par le MOFCOM, puis par le China Securities Regulatory Commission pour tout financement stratégique d’un investisseur étranger dans une société cotée en bourse en Chine. A rapprocher : La Franchise en Chine (Mars 2011)

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La Loi sur les marques en vigueur en Chine : Bilan et perspectives (mise à jour au 13 avril 2015)

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Ce qu’il faut retenir : Un an après l'entrée en vigueur de la loi chinoise sur er les marques le 1 mai 2014, quelles sont les conséquences tirées de sa mise en pratique ? Certes, la nouvelle loi apporte des avancées considérables, pourtant ses conséquences ne sont pas que positives.

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Pour approfondir :

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A l’heure actuelle, la Chine est le premier pays déposant de marques au monde. Un tel constat peut surprendre, la législation chinoise n’étant pas, en la matière, la plus favorable aux titulaires de marque. Dans l’objectif permanent d’améliorer le système juridique, la « Loi sur les marques de la République populaire de Chine », dans sa version telle qu’elle a été adoptée le 23 août 1982, puis substantiellement révisée en 1993 et 2001 afin de satisfaire aux exigences de l’Organisation Mondiale du Commerce, a été révisée en 30 août 2013 avec entrée en vigueur au er 1 mai 2014 (ci-après « la Loi »). Quelles sont les évolutions apportées par la Loi au droit des marques en Chine ? Il convient de rappeler tout d’abord que la Loi prévoit de nouvelles dispositions influençant significativement l’état du droit des marques en Chine. Le texte instaure ainsi notamment : -

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la reconnaissance d’un statut propre aux marques notoires (驰名商标 chimingshangbiao) en dérogeant au principe de « premier arrivé, premier servi » ; l’interdiction d’utiliser les termes de « marque notoire » sur les emballages et dans la communication a ainsi normalisé les pratiques ; l’enregistrement des marques sonores ; le dépôt multi-classes ; la mise en place d’un système de dépôt en ligne.

En outre, afin de diminuer la longueur des procédures, certains délais obligatoires s’imposant à l’Office des marques et à la Chambre d’examen des marques et d’arbitrage (« Trademark Review and Adjudication Board », le « TRAB ») ont été raccourcis. Ainsi, dans le cadre de procédures telles que l’enregistrement, l’opposition, la nullité et l’annulation de marque, l’Office doit désormais se positionner dans le respect des délais suivants : -

nouvelles demandes de marques : 9 mois ;

-

recours à l’encontre des décisions de refus d’enregistrement d’une marque : 9 mois avec une possibilité de prolongation de 3 mois ; oppositions et recours à l’encontre des décisions d’opposition : 12 mois avec une possibilité de prolongation de 6 mois ; annulations sur le fondement de la validité d’une marque : 9 mois avec une possibilité de prolongation de 3 mois ; annulations sur le fondement d’un droit antérieur : 12 mois avec une possibilité de prolongation de 6 mois ; annulations pour défaut d’usage : 9 mois avec une possibilité de prolongation de 3 mois.

Un an après la mise en œuvre de la loi, le bilan reste toutefois mitigé. Pour ce qui concerne l’enregistrement de marque notoire, le changement majeur provient essentiellement de la rédaction de l’article 59 de la Loi. Ce texte institue un statut propre aux marques notoires et crée ainsi une exception notable au principe du « premier arrivé, premier servi ». Le troisième alinéa de cet article ajoute en effet une exception. Celui-ci considère l’hypothèse où la marque, dont l’enregistrement est demandé, est déjà antérieurement utilisée pour les mêmes biens ou services que ceux du déposant. Dès lors que la preuve d’un usage antérieur au dépôt et connu sur le territoire de la Chine est rapportée, le titulaire de la marque postérieurement déposée ne peut interdire à l’utilisateur de la marque de poursuivre l’usage de celle-ci. Cela signifie que le premier propriétaire légitime de droits antérieurs peut continuer à commercialiser ses produits et services sur le territoire de la Chine, tout en préparant sa stratégie judiciaire face aux déposants de mauvaise foi. Cette disposition représente une avancée très bénéfique puisqu’elle permet de contrer les abus de personne mal intentionné qui procéderait au dépôt d’une marque en Chine aux seules fins de s’approprier une marque dont elle connaît le potentiel. Néanmoins, l’article 14 de la Loi définit plusieurs critères à prendre en compte s’agissant de la marque notoire : i) la connaissance acceptée par le grand public chinois de cette marque ; ii) la durée d’existence de cette marque ; iii) la durée et le degré de la communication de cette marque sur le territoire chinois ; iv) l’historique de la protection de cette marque. En définitive, les exigences sont tellement nombreuses que cette règle ne peut être appliquée effectivement afin d’éviter les abus des enregistrements frauduleux des marques notoires par les déposants de mauvaise foi. En réalité, aucune marque étrangère n’a encore bénéficié du statut de marque notoire en Chine.

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Pour ce qui concerne l’opposition à l’enregistrement, la Loi retient que seuls les titulaires des droits de marque antérieurs ont la capacité de former une opposition à l’encontre d’une demande de marque (« motifs relatifs »). Il est fait exception à cette règle lorsque la marque publiée ne peut être acceptée à l’enregistrement sur le fondement de son caractère contraire à la morale (« motifs absolus ») ; dans cette hypothèse, quiconque disposant d’un intérêt peut former une opposition à l’encontre de cette demande de marque publiée. Cette nouvelle disposition a eu pour conséquence d’augmenter le nombre de contentieux intenté de mauvaise foi sur la base de ces motifs absolus. En outre, concernant les opposant de bonne foi, en cas de décision favorable de l’Office des marques au déposant de la marque, l’opposant ne pourra pas former directement de recours à l’encontre de cette décision, mais devra, s’il souhaite poursuivre la procédure, engager une action en annulation de la marque auprès du TRAB une fois l’enregistrement de la marque accordé. Par ailleurs, cette décision de l’Office des marques étant exécutoire immédiatement, des contre-pouvoirs sont parfois regrettés afin d’éviter que l’Office des marques n’abuse de ses fonctions. En pratique, le système d’opposition à l’enregistrement de marque manque sans doute encore de cohérence.

Pour approfondir : I. Sanctions pour publicité mensongère La Loi définit de façon assez générale une publicité mensongère comme une publicité qui déçoit, trompe ou porte atteinte aux intérêts du consommateur. La Nouvelle Loi recense expressément une liste des 4 types de publicités mensongères qui pourra être complétée par l’Administration pour l’Industrie et le Commerce (AIC) d’ici la publication officielle de la er Nouvelle Loi qui entrera en vigueur le 1 septembre 2015. Ces catégories sont les suivantes (art. 28) : -

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publicités pour des produits ou des services fictifs ; déclarations non-conformes à propos du produit ou du service qui jouent un rôle majeur dans la décision d’achat (prix, origine, ingrédients, fabricant, fonctionnalité, performance) ; utilisation de données, résultats de recherches scientifiques ou sondages, statistiques ayant été falsifiées ou ne pouvant pas être vérifiées ; inventions de toute pièce d’informations concernant les performances du produit ou du service.

La Nouvelle Loi prévoit des sanctions en cas de diffusion d’une publicité mensongère (art. 55-73). Nouvelle loi sur la publicité en Chine Loi du 24 avril 2015

Le publicitaire peut : être contraint à payer une amende, voir sa licence d’exploitation révoquée, assumer sa responsabilité civile en cas de dommages causés aux consommateurs, voire même être inculpé si la publicité constitue un crime.

Ce qu’il faut retenir : La loi sur la publicité en Chine du 27 octobre 1994 de ème ème la 10 session du 8 Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire chinoise (la « Loi ») n’a pas été mise à jour depuis plus de 20 ans. Compte tenu de cela, le Comité permanent de l’Assemblée Nationale Populaire chinoise (APN), a publié une proposition de loi en janvier 2015. Cette proposition ème a été ensuite votée et adoptée par la 14 session du ème 12 Comité permanent de l’ANP en date du 24 avril 2015. Cette nouvelle loi est intitulée « la loi sur la publicité en Chine du 24 avril 2015 de la 14ème session du 12ème Comité permanent de l’ANP » « 中华人民共和国广告法(1994年10月27日第八届 全国人民代表大会常务委员会第十次会议通过 2015年4月24日第十二届全国人民代表大会常务委 员会第十四次会议修订) » et entrera en vigueur le er 1 septembre 2015 (la « Nouvelle Loi »). La Nouvelle Loi a pour vocation de mieux encadrer l’industrie de la publicité en Chine.

Si l’agent publicitaire ou le distributeur avaient connaissance de la nature mensongère de la publicité, ils pourront faire l’objet de sanctions similaires. Dans le cas d’une publicité trompeuse pour des produits ayant des conséquences sur la santé des consommateurs, le publicitaire, l’agent, le distributeur et le porte-parole sont solidairement responsables. Pour les autres types d’annonces mensongères, l’agent, le distributeur et le porte-parole sont responsables seulement s’ils savaient ou auraient dû savoir que la publicité était fausse. II. Porte-parole publicitaire La Nouvelle Loi proposera aussi de nouvelles réglementations concernant le porte-parole publicitaire.

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Le terme porte-parole désigne toute personne ou organisation utilisant son nom ou son image pour faire la promotion d’un produit. Le porte-parole ne pourra désormais plus recommander des traitements, équipements médicaux ou médicaments. Cela inclut les publicités pour les hôpitaux, les instituts de recherches, les organisations professionnelles, les praticiens ou les patients. Le publicitaire ne pourra pas non plus faire appel à des enfants âgés de moins de 10 ans pour promouvoir un produit (art. 38). Enfin, le porte-parole ne pourra pas recommander un produit qu’il n’a pas lui-même utilisé. III. Mieux protéger les enfants face aux publicités Actuellement, pour les publicités visant directement les enfants, la Loi stipule simplement et généralement que les publicités ne doivent pas porter atteinte aux enfants. La Nouvelle Loi, quant à elle, stipule plus de détails en interdisant notamment la tenue de campagnes marketing à proximité des écoles et des jardins d’enfants, et interdit aussi les placements publicitaires sur les uniformes, les bus et les fournitures scolaires. Dans les programmes télévisés destinés aux enfants, les publicités pour les médicaments, les cosmétiques, la chirurgie esthétique, l’alcool ou les jeux vidéo ne seront pas autorisées (art. 39). IV. Pouvoirs d’investigation de l’Administration pour l’Industrie et le Commerce AIC est l’autorité chargée de la supervision de l’industrie de la publicité. Dans le cadre de la Nouvelle Loi, elle dispose des pouvoirs suivants (art. 49) : -

inspecter les locaux d’une entreprise suspectée de violer la Nouvelle Loi ; interroger les représentants légaux et les employés à l’origine des suspicions ; demander à l’entreprise suspecte de fournir des documents dans un délai déterminé ; consulter et confisquer des copies des contrats, reçus, publicités, archives et autres documents ; saisir et confisquer des outils ou équipements ; stopper les activités suspectes.

V. Catégories spécifiques de produits La Nouvelle Loi couvre un spectre beaucoup plus important, avec une régulation plus rigoureuse pour certaines catégories spécifiques de produits :

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les médicaments et équipements médicaux (art. 16, 17 et 18) Les publicités pour les médicaments, les fortifiants, les équipements médicaux et les services médicaux ne doivent pas utiliser les organismes de recherche pharmaceutique, les académies, les établissements de médecine, les associations industrielles, les experts et les patients, afin de recommander ou d'examiner les effets de certains produits. -

les pesticides, traitements vétérinaires, fourrages et additifs de fourrage (art. 21) Il est interdit désormais d’affirmer catégoriquement l’efficacité et la fiabilité des produits, d’utiliser les titres des professionnels-experts ou les académies ou les organismes de recherche afin de recommander ou d’examiner les effets des produits. le tabac et l’alcool (art. 22 et 23) La Nouvelle Loi introduit aussi des interdictions plus sévères contre les publicités pour le tabac. Au lieu d'énumérer les lieux publics où serait interdit ce genre de publicités, la Nouvelle Loi élargit directement l'interdiction aux endroits publics, à proximité des hôpitaux et des écoles, ainsi que dans les transports en commun. La publicité pour le tabac sera interdite en plein air et sur les vitrines des magasins. l’éducation et la formation (art. 24) Il est interdit de garantir expressément ou implicitement les résultats de formation et d’utiliser les organismes, les académies, les experts et les patients, afin de recommander ou d'examiner les effets de certains produits. -

les produits et services promettant un retour sur investissement (art. 25) Il est obligé d’avertir le public sur les risques éventuels de l’investissement et il est interdit de garantir, expressément ou implicitement, les profits espérés. De même, il est interdit d’utiliser les organismes, les académies, les experts et les patients, afin de recommander ou d'examiner les effets de certains produits. l’immobilier et les annonces liées (art. 26) Il est obligé d’avertir le public sur les risques éventuels de l’investissement et il est interdit de garantir, expressément ou implicitement, les profits espérés. De même, il est interdit d’utiliser les organismes, les académies, les experts et les patients, afin de recommander ou d'examiner les effets de certains produits.

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- les semences et les animaux (art. 27) Il est interdit de garantir les résultats qui ne peuvent pas être prouvés scientifiquement. Il est interdit d’affirmer catégoriquement l’efficacité et la fiabilité des produits. De même, il est interdit d’utiliser les organismes, les académies, les experts et les patients, afin de recommander ou d'examiner les effets de certains produits. VI. Autres clauses Il convient de souligner que la Nouvelle Loi supprime l’obligation pour le publicitaire de ne promouvoir que des produits faisant partie de sa licence d’exploitation. La Nouvelle Loi s’est aussi adaptée aux nouvelles technologies. Par exemple, elle stipule que les fenêtres pop-up ne doivent pas gêner la lecture normale du site internet et doivent pouvoir être fermées en un seul clic. Elle interdit aussi de contacter les clients potentiels directement par mail, appel téléphonique ou SMS dans le but de promouvoir leurs produits sans leur accord préalable. La Nouvelle Loi couvre également les publicités en ligne qui entreront dans le cadre de cette loi. La Nouvelle Loi interdit l'utilisation dans les publicités du drapeau, de l'emblème et de chansons de l'armée chinoise, ainsi que l'utilisation du drapeau, de l'emblème et de l'hymne national chinois (art. 9). La Nouvelle Loi reconnait par ailleurs le rôle des associations de consommateurs, qui pourront superviser les publicités portant atteinte aux libertés des consommateurs. A rapprocher : Loi sur la publicité en Chine du 27 octobre 1994

Réglementation relative au commerce extérieur au Maroc Projet de loi du 22 octobre 2015 Ce qu’il faut retenir : Un projet de loi relatif au commerce extérieur au Maroc a été adopté le 22 octobre 2015 pour accompagner les changements marquant la politique commerciale du Maroc. Pour approfondir :

extérieur (ci-après le « Projet ») a été adopté le 22 octobre 2015 par le Conseil du gouvernement marocain. Initié le 22 septembre 2014 par le Ministre de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique, ce Projet vise à accompagner les profonds changements marquant la politique commerciale du Maroc, liés notamment aux nouveaux engagements du Royaume. Ce Projet abroge et remplace la loi n°13-89 du 9 novembre 1992 relative au commerce extérieur (ciaprès la « Loi n°13-89 ») et a pour objectif d'accompagner ces mutations à la lumière des nouveaux engagements au titre des accords de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), de la conclusion de plusieurs accords de libre-échange, du développement de l'échange de données informatisées du commerce international, outre la prolifération de pratiques commerciales déloyales préjudiciables à la production nationale. En effet, la Loi n°13-89 élaborée à la fin des années 80 consacre le principe de la libéralisation du commerce extérieur par rapport à la réglementation en vigueur antérieurement à 1983 (où l’interdiction des importations constituait le principe fondamental). Ces changements de politique se sont inscrits dans le cadre des réformes réalisées dans le sillage du programme d’ajustement structurel (« PAS ») et des engagements découlant de l’adhésion du Maroc au GATT en 1987. Par ailleurs, les développements qui se sont accentués au cours des 5 dernières années ont exigé la refonte du dispositif législatif et réglementaire régissant le commerce extérieur au Maroc de sorte à fournir des réponses adéquates aux différentes problématiques. A cette fin, le Projet, tout en continuant de s’inscrire dans le principe de la libéralisation des échanges, a intégré des dispositions supplémentaires en matière de restriction au commerce et de protection de la production nationale qui sont conformes aux engagements internationaux du Maroc, mais qui n’étaient pas prévues dans la Loi n°13-89. Le texte du Projet prévoit notamment : -

Présenté aux membres du gouvernement le 10 avril 2015, le projet de loi n°91-14 relatif au commerce

d’accompagner les changements marquant la politique commerciale du Royaume ; de mettre en œuvre les accords de l’OMC et les autres accords conclus dans le cadre de l’échange de données informatisées du commerce international ;

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d’instaurer un registre des opérateurs du commerce extérieur comme formalité à l’exercice des activités d’importation et d’exportation ; de simplifier les procédures d’exportation en supprimant la formalité de souscription de l’engagement de change prévu par la Loi n°13-89 ; de mettre en place de nouvelles prescriptions encadrant les négociations commerciales internationales.

En effet, le Projet a intégré des dispositions supplémentaires, qui n'étaient pas prévues dans la Loi n°13-89, portant sur la restriction du commerce et visant la protection de la production nationale qui sont conformes aux engagements internationaux du Royaume au regard des accords de l’OMC. Au niveau des procédures d'importation et d'exportation, et afin de cerner les entreprises opérant dans le commerce extérieur, le Projet a prévu l'instauration d'un registre des opérateurs du commerce extérieur comme formalité préliminaire à l'exercice de l'activité d'importation et d'exportation. La formalité de souscription de l'engagement de change, prévue dans la Loi n°13-89, a été supprimée par le Projet en vue de simplifier les procédures d'exportation. ***** Le Projet concrétise la mise en œuvre des engagements du Maroc découlant des accords commerciaux conclus par le Royaume, à travers la mise en place d'un mécanisme de gestion des contingents tarifaires. Dans un souci d’amélioration de sa transparence et la bonne gouvernance, ce mécanisme a été formalisé dans le Projet. En matière de négociation des accords commerciaux internationaux, le Projet énonce des prescriptions qui encadreraient les négociations de sorte à ce que le processus de négociation soit plus inclusif et transparent. Il importe de signaler en dernier lieu que les volets relatifs aux pratiques commerciales déloyales préjudiciables à la production nationale et le contrôle stratégique des échanges pour motif de sécurité international, ont été pris en charge par des lois particulières, notamment la loi n°15-09 relative aux mesures de défense commerciale et le projet de loi sur le contrôle des exportations des produits et technologies à double usage. L’objectif visé est d’assurer une stabilité régionale grâce notamment à des échanges économiques plus souples. A rapprocher : texte du Projet  Paris - Nantes - Montpellier - Grenoble - Fort-de-France   Bordeaux - Clermont-Ferrand - Lyon - Le Havre - Poitiers - Rouen - Strasbourg - Toulouse   Belgique - Brésil - Cameroun - Chine - Chypre - Côte d’Ivoire - Etats-Unis - Indonésie - Luxembourg - RD Congo - Sénégal 

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