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Tribunal pénal fédéral (TPF) de la plainte de la Fondation liechtensteinoise ... fédéral (TF) contre le feu vert donné par le Tribunal pénal fédéral (TPF) à la.
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Collectif contre l’impunité

Mémoire Du Collectif contre l’impunité et d’Avocats sans frontières Canada (ASFC) Présenté à la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) À l’occasion de l’audience thématique du 28 mars 2014 - – 150ème session Portant sur les obstacles à l’accès à la justice Rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

Annexes Section I

28 mars 2014

Liste des annexes – Section I

Annexe 7.1 : CIDH, audience thématique de la 150ème session : Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti................. 4 Annexe 7.1.1 : Demande d’audience thématique à la CIDH, en date du 20 janvier 2014, du Collectif et d’ASFC .............................................................................................................................................. 4 Annexe 7.1.2 : Document d’appui, soumis à la CIDH par le Collectif et ASFC, 20 janvier 2014 ........... 10 Annexe 7.1.3: CIDH, lettre accordant audience pour le 28 mars 2014, au Collectif et à ASFC, 28 février 2014 ................................................................................................................................... 15 Annexe 7.2 : Présentation du Collectif contre l’impunité ....................................................... 20 Annexe 7.3: Site Haïti lutte contre l’impunité ......................................................................... 21 Annexe 7.4 : Actions du Collectif contre l’impunité ................................................................ 22 Annexe 7.5. : Articles, communiqués de presse, documents de référence ........................... 29 Annexe 7.5.1 : Inadmissibilité au Canada de Jean-Claude Duvalier et des dignitaires de son gouvernement ............................................................................................................................... 29 Annexe 7.5.2 : Le CEDH face au retour du dictateur........................................................................................ 30 Annexe 7.5.3 : Déclaration de Jean-Claude Duvalier au point de presse du 18 janvier 2011 .................. 32 Annexe 7.5.4: Premières plaintes déposées contre Jean-Claude Duvalier.................................................... 33 Annexe 7.5.5: Jean-Claude Duvalier prône la réconciliation nationale .......................................................... 34 Annexe 7.5.6: Jean-Claude Duvalier déclare avoir lancé le processus démocratique en Haïti ................ 35 Annexe 7.5.7: Lettre ouverte de victimes et témoins de la dictature au gouvernement Préval ............. 36 Annexe 7.5.8: Juger Duvalier n’est pas une priorité du Président Martelly .................................................. 38 Annexe 7.5.9: Protestation contre l’invitation de Duvalier à l’investiture du Président élu, Michel Martelly ........................................................................................................................................... 39 Annexe 7.5.10: Communiqué du Collectif relatif à la Déclaration du 17 mai 2011 de la CIDH ............ 40 Annexe 7.5.11: Craintes du Collectif par rapport à l’instruction de 2011.................................................... 42 Annexe 7.5.12: Agressions perpétrées par des duvaliéristes contre Amnesty international ................... 44 Annexe 7.5.13: Dénonciation des agressions des duvaliéristes contre Amnesty international ............... 45 Annexe 7.5.14: Le Président Martelly pour la réconciliation sans justice ..................................................... 46 Annexe 7.5.15: Duvalier peut être poursuivi selon la législation haïtienne et le droit international ...... 48

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Annexe 7.5.16: Duvalier convié par le Président Martelly à la commémoration du séisme de janvier 2010................................................................................................................................................. 50 Annexe 7.5.17: Un an après l’introduction des plaintes Duvalier échappe toujours à la justice ............. 51 Annexe 7.5.18: Protestation contre la présence de Duvalier aux cérémonies officielles du 12 janvier 2012................................................................................................................................................. 52 Annexe 7.5.19: Le Président Martelly défavorable à un procès contre Jean-Claude Duvalier ................. 54 Annexe 7.5.20: Le Président Martelly nuance sa position sur l’ex dictateur ................................................ 55 Annexe 7.5.21: Analyse de l’ordonnance du 27 janvier 2012 du juge d’instruction ................................... 56 Annexe 7.5.22: L’Office de la protection du citoyen déplore que la justice n’assume pas ses responsabilités .............................................................................................................................. 62 Annexe 7.5.23: Position du Collectif sur l’ordonnance du 27 janvier 2012 .................................................. 63 Annexe 7.5.24: Lettre du 15 février 2012 du Collectif aux Chefs et cheffes d’État de l’Amérique latine .......................................................................................................................................................... 64 Annexe 7.5.25: Les victimes contestent l’ordonnance du 27 janvier 2012 ................................................... 66 Annexe 7.5.26: Poursuites des audiences à la Cour d’appel débutées le 13 décembre 2012 .................. 67 Annexe 7.5.27: Appel du Collectif à la solidarité pour le refus de l’impunité .............................................. 68 Annexe 7.5.28: L’étrange attitude du Ministère public à la Cour d’appel de Port-au-Prince ................... 69 Annexe 7.5.29: Correspondance de Jean-Claude Duvalier à la Cour d'appel de Port-au-Prince............ 71 Annexe 7.5.30: Le révisionnisme affiché par les duvaliéristes .......................................................................... 73 Annexe 7.5.31: Déclaration conjointe d’organisations haitiennes ................................................................... 74 Annexe 7.5.32: Jean-Claude Duvalier est un inculpé et sa comparution personelle est exigée .............. 75 Annexe 7.5.33: La Cour d’appel somme Jean-Claude Duvalier de se présenter le 28 février ................. 77 Annexe 7.5.34: La Cour d’appel rejette les manœuvres dilatoires des avocats de Duvalier.................... 78 Annexe 7.5.35: Le mandat d’amener contre Duvalier, une première avancée ............................................ 79 Annexe 7.5.36: Duvalier forcé de se présenter devant la Cour d’appel........................................................ 81 Annexe 7.5.37: Audition de Jean-Claude Duvalier à la Cour d’appel, une avancée historique ................ 83 Annexe 7.38: Comparution de Duvalier: une première brèche dans le mur de l’impunité ...................... 85 Annexe 7.5.39: Audition publique de victimes de la dictature duvaliériste................................................... 86 Annexe 7.5.40: Témoignages sur les tortures, exécutions et disparitions .................................................... 87 Annexe 7.5.41: Le fils de Jean-Claude Duvalier rend hommage à l’ex Président à vie François Duvalier .......................................................................................................................................................... 89

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Annexe 7.5.42: Appel du Collectif à la vigilance citoyenne pour contrer le révisionnisme ...................... 90 Annexe 7.5.43: A la Cour d’appel, le Ministère public plaide pour l’abandon des charges contre Duvalier .......................................................................................................................................... 91 Annexe 7.5.44: Sortie le 10 décembre du film « Haïti : le règne de l’impunité » ........................................ 93 Annexe 7.5.45: La Suisse statue définitivement sur l’origine illicite des fonds du clan Duvalier .............. 95 Annexe 7.5.46: La Plate-Forme Haïti de Suisse veillera à ce que les fonds soient restitués de façon transparente .................................................................................................................................. 96 Annexe 7.5.47: Récapitulatif sur les fonds Duvalier déposés en Suisse ......................................................... 97 Annexe 7.5.48: Protestation contre la présence de Duvalier à la commémoration officielle de l’indépendance ........................................................................................................................... 102 Annexe 7.5.49: Le gouvernement justifie l’invitation de Duvalier à la fête de l’indépendance .............. 103 Annexe 7.5.50: Huit mois après la fin des audiences, la Cour d’appel n’a toujours pas rendu sa décision. ....................................................................................................................................... 104 Annexe 7.5.51: Pardonner à qui? Se réconcilier avec qui? ............................................................................. 105 Annexe 7.5.52 : 28 ans après la victoire sur la terreur et l’obscurantisme il faut à nouveau faire front ....................................................................................................................................................... 106 Annexe 7.5.53: La Cour d’appel ordonne un complément d’instruction incluant les collaborateurs de Duvalier ....................................................................................................................................... 107 Annexe 7.5.54: La Cour d’appel casse l’ordonnance du 27 janvier 2012 ................................................... 109 Annexe 7.5.55 : Le Canada attentif à l’affaire Duvalier comme gage de la gouvernance démocratique et de l’État de droit ....................................................................................................................... 110 Annexe 7.5.56 : Les avocats de Duvalier fulminent contre l’arrêt de la Cour d’appel ........................... 111 Annexe 7.5.57: Analyse du RNDDH du pourvoi de Duvalier contre l’arrêt de la Cour d’appel ......... 113

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Annexe 7.1 : CIDH, audience thématique de la 150ème session : Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti.

Annexe 7.1.1 : Demande d’audience thématique à la CIDH, en date du 20 janvier 2014, du Collectif et d’ASFC Formulaire pour demande d’audience sur l’affaire Duvalier dans le cadre de la 150e période de sessions de la CIDH 1. Indiquer le type de demande :* Audience Réunion de travail 2. Type d'audience :* Pétition ou Affaire Mesure Conservatoire Thématique Sujet thématique :* Accès à la justice, garanties judiciaires Crimes de Droit Pénal International Défenseurs des droits humains Déplacement forcé Droit d’association Droit de liberté d’expression Droit du travail Droits des Enfants Droits des femmes Droits des migrants et de leurs familles Droits des personnes d'ascendance africaine / Discrimination raciale Droits des personnes handicapées Droits des personnes LGBTI Droits des personnes privés de la liberté Droits des Peuples indigènes Droits économiques, sociaux et culturels Droits politiques Environnement

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État de droit, indépendance du pouvoir judiciaire Impact de la violence et conflits armés Justice militaire Justice transitionnelle Mise en œuvre des décisions du Système interaméricain Sécurité Citoyenne Situation générale des droits humains Torture et autres traitements cruel, inhumains ou dégradants Autre, indiquer s’il vous plait 4. Indiquer quel(s) État(s) membre(s) de l’OEA serait/seraient impliquées:* ANTIGUA ET BARBUDA ARGENTINE BARBADE BELIZE BOLIVIE BRAZIL BAHAMAS CANADA COLOMBIE COSTA RICA CUBA CHILI DOMINIQUE EQUATEUR EL SALVADOR ETATS UNIS GRENADE GUATEMALA GUYANA HAITI HONDURAS JAMAIQUE MEXIQUE NICARAGUA PARAGUAY CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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PEROU PANAMA REPUBLIQUE DOMINICAINE SAINT-KITTS-ET-NEVIS SAINT-VINCENT-ET-LES-GRENADINES SAINTE-LUCIE SURINAME TRINIDAD ET TOBAGO URUGUAY VENEZUELA Tous les états membres de l’OEA Régionale Sujet et objet 5. Indiquer le sujet de l'audience ou réunion de travail demandée :* (Par exemple : Audience sur un sujet, affaire ou situation dans un ou plusieurs pays ; Réunion de travail sur une mesure conservatoire ou règlement à l´amiable.) Audience thématique sur les obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes de Jean-Claude Duvalier et de ses collaborateurs dans leur quête de justice 6. Présenter un résumé de l'objet et le contenu proposé pour l'audience ou réunion de travail demandée (de préférence jusqu'à 4 paragraphes) : L’information donnée ici est fondamentale pour la considération et décision de la CIDH.*

L’objet de la demande d’audience porte sur les obstacles rencontrés par les victimes du régime de JeanClaude Duvalier, président « à vie » d’Haïti de 1971 à 1986, dans le cadre du processus de justice contre lui et certains de ses plus proches collaborateurs entamé depuis son retour au pays en janvier 2011. Les délais déraisonnables et injustifiés des procédures, le sort outrageux réservé aux plaignants et plaignantes lors des audiences et le manque d’indépendance affiché par le personnel judiciaire chargé de cette affaire, constituent des violations aux droits des victimes aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire protégés par les articles 8 et 25 de la Convention américaine relative aux droits de l’Homme (ci-après « Convention »). On déduit de l’ensemble de ces facteurs, et du contexte politique Ŕ marqué par une attitude complaisante du pouvoir exécutif envers d’anciens dirigeants autoritaires, dont JeanClaude Duvalier, et une hostilité ouverte à l’endroit des défenseurs des droits humains, et notamment des avocats Ŕ une absence de volonté de la part de l’État haïtien de se conformer à l’obligation générale, qui découle de l’article 1.1. de la Convention, d’enquêter, de poursuivre et, le cas échéant, de

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sanctionner les atteintes les plus graves aux droits humains protégés par cette dernière. Face à ce risque palpable de déni de justice, il est urgent que la Commission invite à nouveau l’État haïtien à lui expliquer dans quelle mesure il s’est conformé à la déclaration qu’elle a émis le 17 mai 2011, dans laquelle elle l’enjoignait à mener cette procédure avec diligence. En premier lieu, les pétitionnaires entendent dresser un portrait des procédures judiciaires menées à ce jour en lien avec ce dossier, dont la décision erronée du 27 janvier 2012 du juge d’instruction Carvès Jean de ne pas retenir les plaintes pour crimes contre l’humanité, et de renvoyer à procès au correctionnel uniquement pour les allégations de détournement de fonds. Les plaignants et plaignantes ayant interjeté appel de cette décision, il sera également question des audiences historiques tenues par la Cour d’appel de Port-au-Prince entre le mois de décembre 2012 et le mois de mai 2013. Par la suite, les pétitionnaires exposeront les obstacles rencontrés par les représentants des victimes en vue de l’exercice effectif de leurs droits. Alors que les plaignants et plaignantes ont interjeté appel de la décision du juge d’instruction en février 2012, la Cour d’appel n’a tenu sa première audience que dix mois plus tard, soit le 31 janvier 2013, et sa décision est attendue depuis qu’elle a pris la cause en délibéré en mai 2013. La longueur déraisonnable et injustifiée des délais judiciaires menace les droits des victimes. L’instabilité du pouvoir judiciaire, marquée notamment par la rotation du personnel du parquet - cinq Commissaires du gouvernement (Procureurs) se sont succédés depuis l’ouverture du dossier laisse transparaître un manque d’indépendance du pouvoir judiciaire face aux pressions externes. Par ailleurs, le traitement indigne et agressif réservé aux victimes pendant leurs dépositions par les avocats de la défense et le Ministère public lors des audiences tenues par la Cour d’appel ne sont pas conformes aux obligations d’impartialité et de neutralité dont devraient faire preuve des officiers de l’État. Les pétitionnaires aborderont aussi le contexte politique plus général, dont l’attitude clémente du gouvernement actuel envers l’ancien dictateur. Cette situation alarmante reflète un manque de volonté politique, le gouvernement actuel dirigé par M. Michel Martelly ayant signalé à de nombreuses reprises qu’il estimait que les procédures judiciaires intentées contre M. Duvalier nuisaient à la réconciliation nationale, et laisse présager un déni de justice. Enfin, les pétitionnaires entendent souligner le climat d’intimidation dans lequel travaillent les avocats défenseurs des droits humains en Haïti, y compris ceux et celles qui s’intéressent au dossier Duvalier. Compte tenu des nombreux obstacles rencontrés par les victimes et leurs représentants, les pétitionnaires demandent respectueusement à la Commission de rappeler à l’État haïtien ses obligations internationales, comme celles de permettre la conduite d’enquêtes et de procédures judiciaires diligentes sur les crimes contre l’humanité commis sous le régime Duvalier et ce, sans entraves, interférences et délais déraisonnables; de garantir au pouvoir judiciaire toute l’indépendance digne de ses fonctions; de sanctionner les officiers de l’État qui compromettraient leurs devoirs d’éthique, d’impartialité et de neutralité conformément aux droits garantis par la Convention; et de solliciter de la communauté internationale qu’elle augmente son soutien apporté au système judiciaire en Haïti. 7. Le cas échéant, joindre un document plus détaillé d’appui de votre demande d’audience ou réunion de travail.

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La partie requérante 8. La partie requérante :* Le Pétitionnaire est une personne ou groupe de personnes, out entité non gouvernementale légalement reconnue dans un ou plusieurs états membres de l’OEA Pétitionnaire L’État Le pétitionnaire

9. Noms complets de toutes les personnes et/ou organisations requérantes (sigles inclues) qui présentent cette demande, séparées par la virgule :* Danièle MAGLOIRE, coordonnatrice du Collectif contre l’impunité; Centre œcuménique des droits humains (CEDH), point focal du Collectif; Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), membre du Collectif; Kay Fanm (Maison des femmes), membre du Collectif; Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED), membre du Collectif;

Avocats sans frontière Canada (ASFC), partenaire du Collectif; Michèle MONTAS, membre du Collectif, plaignante; Nicole MAGLOIRE, membre du Collectif, plaignante; Adrienne GILBERT, membre du Collectif, plaignante; Denise PROPHÈTE, membre du Collectif, plaignante; Michelle DORBES-ROMULUS, membre du Collectif, plaignante; Manuel ROMULUS, membre du Collectif, plaignant; Alix FILS-AIMÉ, membre du Collectif, plaignant; Robert DUVAL, membre du Collectif, plaignant. Information de contact et documentation Danièle MAGLOIRE, coordonnatrice du Collectif conte l’impunité; Centre œcuménique des droits humains (CEDH), point focal du Collectif. 10 Le courrier électronique (cette personne recevra une copie de la demande une fois fini) :* Courrier électronique Danièle Magloire, coordonnatrice du Collectif contre l’impunité : [email protected]; Courrier électronique du CEDH, point focal du Collectif : [email protected]

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11. L'adresse additionnelle de contact, séparée par la virgule : Philippe Tremblay, directeur des services juridiques et du développement institutionnel, ASFC : [email protected]

12. Le téléphone(s) de contact : Danièle MAGLOIRE, coordonnatrice du Collectif contre l’impunité : (509) 34 65 01 75 / 37 57 23 26 Centre œcuménique des droits humains (CEDH), point focal du Collectif : (509) 48 89 20 19 / 34 54 43 40 Philippe TREMBLAY, directeur des services juridiques et du développement institutionnel, ASFC : +1 418 907 2607 (poste 102) Joindre le document relevant 1 : Il n’est pas obligatoire de joindre des documents. La dimension du document permise : .DOC, .DOCX, .PDF, .ZIP. Cliquer sur BROWSE pour trouver le document et après UPLOAD pour le joindre. Joindre le document relevant 2 : Il n’est pas obligatoire de joindre des documents. La dimension du document permise : .DOC, .DOCX, .PDF, .ZIP. Cliquer sur BROWSE pour trouver le document et après UPLOAD pour le joindre. Des remarques complémentaires 15. Si vous avez une autre remarque complémentaire, indiquez-le ici :

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Annexe 7.1.2 : Document d’appui, soumis à la CIDH par le Collectif et ASFC, 20 janvier 2014

Document d’appui à la demande d’audience thématique Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime dirigé par Jean-Claude Duvalier dans leur quête de justice en Haïti

1. Audience thématique du 28 mars 2011 Le 28 mars 2011, le Collectif contre l’impunité (ci-après « Collectif »), qui regroupe certaines des plus importantes organisations non-gouvernementales de défense des droits humains en Haïti et la plupart des victimes du régime Duvalier ayant décidé de porter plainte contre l’ancien président, a pris part à une audience thématique convoquée à sa demande par la Commission, afin de faire la lumière sur les conséquences juridiques du retour de M. Duvalier en Haïti, survenu deux mois plus tôt. À cette occasion, le Collectif a dit douter de la capacité du système judiciaire haïtien, caractérisé par des dysfonctionnements et affaibli par le tremblement de terre du 12 janvier 2010, de rendre justice dans des conditions respectueuses des standards internationaux applicables. Il importe de rappeler qu’à cette occasion, le représentant du gouvernement alors en place en Haïti avait endossé les propos des représentants du Collectif, en insistant sur l’importance de ce procès pour le renforcement de l’État de droit en Haïti, et invitait la communauté internationale à accompagner les efforts qui seraient déployés afin que ce procès puisse être mené à terme. Dans la foulée de cet échange, la Commission a émis le 17 mai 2011 une déclaration qui a notamment : 

rappelé que les violations systématiques des droits humains commises sous le régime Duvalier constituent des crimes contre l’humanité qui ne sont pas prescriptibles et ne peuvent faire l’objet d’une amnistie, et que l’obligation internationale d’enquêter sur eux et de les sanctionner est une norme impérative de jus cogens;



exprimé sa reconnaissance envers l’État haïtien pour avoir reconnu publiquement que les enquêtes lancées contre M. Duvalier depuis son retour étaient devenues une priorité pour lui;



exhorté l’État haïtien à continuer ses enquêtes et, s’il y a lieu, de poursuivre ses auteurs et permettre la réparation des victimes;



prié la communauté internationale « d’accorder toute l’aide possible à Haïti en cette occasion historique pour le système judiciaire haïtien »1.

Le Collectif et son partenaire privilégié dans cette affaire, Avocats sans frontières Canada (ASFC), ont salué et largement diffusé cette prise de position2.

CIDH, Déclaration de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme concernant le devoir de l’État haïtien d’enquêter sur les graves violations des droits humains commises sous le régime de Jean-Claude Duvalier, 17 mai 2011; en ligne : http://www.cidh.oas.org/pronunciamientocidhhaitimayo2011.fr.htm 2 ASFC, La CIDH donne suite à la requête du Collectif contre l’impunité et enjoint l’État haïtien à enquêter et poursuivre les crimes commis sous le régime de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier, 24 mai 2011, en ligne : http://www.asfcanada.ca/fr/nouvelles/-38. 1

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2. L’appui de la communauté internationale est crucial pour cette affaire importante à l’échelle nationale, régionale et internationale Cette mise à jour, plus de trois ans depuis le retour de Jean-Claude Duvalier et l’audience du 28 mars 2011 à Washington, est d’autant plus nécessaire que cette affaire revêt une importance cruciale pour l’ensemble de la société haïtienne, qui peine toujours à tourner la page sur un passé marqué par de nombreux épisodes sanglants. À un moment où de nombreux jeunes nés après la dictature se laissent facilement convaincre par un discours révisionniste soutenant que ce régime n'était peut être pas si mauvais, ce procès est d’autant plus pertinent et représente un pas de plus vers la fin de l’impunité. Comme le soulignait la Commission dans le rapport qu’elle a publié en 1979 au terme d’une visite in loco en Haïti, le régime présidé par Jean-Claude Duvalier s’est caractérisé par d’innombrables violations très graves et systématiques des droits humains : déportations et disparitions forcées, exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, détentions et arrestations arbitraires et illégales, actes de tortures et traitements cruels, inhumains et dégradants, etc3. Or, malgré la nature notoirement criminelle de ce régime, M. Duvalier et ses collaborateurs ont joui jusqu’à présent d’une impunité totale, favorisée par l’attitude du pouvoir judiciaire. Alors que les partenaires d’ASFC au Guatemala ont essuyé un échec douloureux à la suite de l’annulation, pour des raisons de forme, du verdict de culpabilité pour crimes de guerre et génocide prononcé à l’encontre de l’ancien chef d’État José Efraín Rios Montt, l’affaire Duvalier en Haïti risque elle aussi, sans soutien de la communauté internationale et sans une volonté claire de l’État haïtien de permettre au système de justice de faire son travail, de voir les impératifs procéduraux prévaloir sur l’analyse du fond du dossier. Toutefois, comme ce fut le cas dans d’autres pays des Amériques, elle a le potentiel transformateur d’établir une jurisprudence exemplaire en faveur des droits humains et à ainsi contribuer à lutter contre l’impunité sur le continent4. Bien que la mise en accusation de M. Duvalier pour crimes contre l’humanité représenterait une première à l’échelle des Caraïbes, cette quête de justice entreprise par les plaignants et les plaignantes ne semble pas figurer parmi les priorités identifiées par les bailleurs de fonds, qui doivent répondre à des demandes provenant de tous les secteurs d’activité, affaiblis par des décennies de mauvaise gouvernance. Malgré l’appel lancé à la communauté internationale par la CIDH en 2011, afin qu’elle accompagne les procédures judiciaires en cours contre Jean-Claude Duvalier et la tenue possible d’un procès contre lui pour crimes contre l’humanité, cet appui souhaité n’a pour le moment que pris la forme d’une observation bienveillante de la part de diplomates en poste à Port-au-Prince. Mis à part l’appui technique offert par ASFC, les victimes réunies au sein du Collectif n’ont pu compter que sur leurs propres moyens pour affronter une justice manifestement hostile à leurs prétentions.

Pour plus d’informations sur les exactions commises sous le régime Duvalier, veuillez notamment consulter le rapport suivant: Amnistie internationale, On ne peut pas tuer la vérité : le dossier Jean-Claude Duvalier, 2011; en ligne: http://www.amnesty.org/fr/library/asset/AMR36/007/2011/fr/e976f442-a0c1-4474-a13a-b09d1b4f70bf/amr360072011fr.pdf. 4 « Rapport de l’expert indépendant sur la situation des droits de l’Homme en Haïti, Michel Forst », Doc. Off. A/HRC/20/35, 23 avril 2012, au para. 97, en ligne : http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G12/132/08/PDF/G1213208.pdf?OpenElement 3

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3. Les procédures judiciaires relatives à l’affaire Duvalier et consorts Le 27 janvier 2012, le juge d’instruction en charge de l’affaire, M. Carvès Jean, a décidé de ne pas retenir les plaintes pour crimes contre l’humanité mais de tenir un procès au correctionnel pour détournements de fonds contre Jean-Claude Duvalier. Concernant les crimes allégués les plus graves, le juge conclut erronément que les règles juridiques internationales entourant l’incrimination et l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité sont étrangères au droit haïtien, et que Jean-Claude Duvalier ne peut par conséquent être jugé en Haïti en fonction de celles-ci. En réaction à cette décision, la Commission a exprimé, le 1er février 2012, son inquiétude quant à cette décision en réitérant que « l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité est une règle impérative du droit international »5. Le 7 février 2012, le Collectif a tenu une conférence de presse, et la nécessité que Jean-Claude Duvalier soit jugé pour crimes contre l’humanité a été soulignée et appuyée par plusieurs organisations internationales6. Le 9 février 2012, l’ordonnance commença à être signifiée aux plaignants et plaignantes. Ceux-ci avaient alors 10 jours pour interjeter appel, ce qui fût fait pour tous les plaignants et toutes les plaignantes. Du 13 décembre 2012 au 16 mai 2013, les audiences de la Cour d’appel de Port-au-Prince se sont déroulées chaque jeudi, donnant lieu à l’audition de monsieur Jean-Claude Duvalier et de huit plaignants et plaignantes, en plus de dépositions écrites de trois autres plaignants et plaignantes actuellement à l’étranger. Ces audiences sont symboliques et très importantes puisqu’elles permettent pour la première fois aux plaignants et plaignantes d’être entendus en cour7. Après près de 30 ans d’attente, il était temps que les victimes présumées du régime Duvalier puissent relater publiquement les violations de leurs droits fondamentaux. La représentation des plaignants et plaignantes devant la Cour d’appel a été assumée par le Collectif, ASFC étant associée de près à la préparation des audiences, en plus d’assister à celles-ci8. Cette connaissance intime du dossier et de la façon dont les audiences se sont déroulées permettent aux pétitionnaires de poser un regard critique et informé sur la performance de la justice haïtienne à l’égard d’un dossier complexe et hautement symbolique.

CIDH, La CIDH appelle les autorités haïtiennes à enquêter, juger, sanctionner les graves violations aux droits de la personne, 1er février 2012, en ligne : http://www.cidh.oas.org/Comunicados/French/2012.10.htm 6 ASFC, ASFC appuie le Collectif contre l’impunité : Jean-Claude Duvalier doit faire face à la justice pour crimes contre l’humanité », 7 février 2012, en ligne : http://www.asfcanada.ca/fr/nouvelles/-105; Haiti Press Network, Haïti-Duvalier : le Collectif anti-impunité s’insurge contre l’ordonnance de Carvès Jean, 7 février 2012, en ligne : http://hpnhaiti.com/site/index.php/politique/5424-haiti-duvalier-le-collectif-anti-impunite-sinsurge-contre-lordonnance-du-jugecarves-jean 7 ASFC, Les victimes du régime Duvalier enfin entendues en justice, 20 mars 2013, en ligne : http://www.asfcanada.ca/documents/file/cdp-plaignants-entendus-proces-duvalier-2013-03-20.pdf 8 ASFC, Une autre avancée historique dans le procès Jean-Claude Duvalier, selon Avocats sans frontières Canada, le 1er mars 2013, en ligne : http://www.asfcanada.ca/documents/file/cdp-asfc-audience-duvalier-2013-03-01%281%29.pdf; ASFC, Avocats sans frontières Canada aide les victimes à remporter une manche dans le procès Duvalier, 21 février 2013, en ligne : http://www.asfcanada.ca/documents/file/cdp-manche-gagnee-proces-duvalier-v2-2013-02-21.pdf ASFC, Avocats sans frontières Canada soutient les victimes dans le procès contre Jean-Claude Duvalier, 20 février 2013, en ligne : http://www.asfcanada.ca/documents/file/cdp-fokal-partenaire-d-asfc-et-du-ccih-2013-02-20.pdf 5

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Lors de l’audience devant la Cour d’appel du 21 février 2013 les avocats de la partie civile ont obtenu:  La reconnaissance du statut de partie civile pour les personnes, de toutes conditions, qui ont porté plaintes contre Jean-Claude Duvalier pour crimes contre l'humanité;  Le maintien de l'exigence de comparution en personne de Jean-Claude Duvalier. Le 28 février 2013, Jean-Claude Duvalier, contre qui un mandat d’amener avait été émis le 21 février 2013, a comparu devant la Cour d’appel à la suite de son troisième refus de se présenter devant le tribunal. Enfin, le 16 mai 2013, la Cour d’appel a déclaré l’affaire entendue9. 4. Les obstacles rencontrés par les victimes pour exercer un recours effectif, rapide et effectif devant un tribunal compétent, indépendant et impartial Les droits des victimes à un recours simple, rapide et effectif devant un tribunal compétent, indépendant et impartial, protégés par les articles 8 et 25 de la Convention américaine relative aux droits de l’Homme (ci-après « Convention), sont sévèrement remis en question. Alors que les victimes de la dictature duvaliériste attendent que justice soit faite pour elles et pour leurs proches depuis trois décennies et que certaines d’entre elles ont porté plainte dès le 19 janvier 2011, aucune accusation n’a encore été portées contre M. Duvalier ou d’autres dirigeants de son régime pour les graves violations de droits humains commises alors qu’ils détenaient le pouvoir, soit entre 1971 et 1986. La Cour d’appel de Port-au-Prince en est encore à décider si le juge d’instruction a erré, notamment en refusant de tenir un procès contre M. Duvalier pour des accusations de crimes contre l’humanité. Aucun procès n’a encore été ouvert pour examiner le fond de l’affaire, soit les cas allégués d’arrestations et de détentions illégales et arbitraires, de tortures, de traitements cruels, de meurtres, d’exécutions sommaires, de disparitions et de déportations forcées, d’actes inhumains et dégradants, etc. La longueur déraisonnable des délais encourus par chacune des instances avant d’entamer des procédures et de rendre leur décision n’est pas une démonstration de célérité et de diligence requises par leurs fonctions et la Convention. De plus, le temps écoulé depuis les faits de l’affaire fait en sorte que certains personnes, en plus d’être à l’extérieur du pays ou réticentes à témoigner par craintes de représailles, sont âgées, ce qui signifie que le risque de la perte ou de l’altération de la preuve est réel. Ces délais injustifiés, tout comme l’instabilité du pouvoir judiciaire, marqué par une grande rotation du personnel, et le traitement agressif et partial réservé aux victimes pendant leurs dépositions par les avocats de la défense et du Ministère public sont des indicateurs du manque d’indépendance du pouvoir judiciaire. En 2013, l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits humains en Haïti a dressé un portrait dysfonctionnel du système de justice et a exprimé ses préoccupations quant à la corruption, la nomination et la destitution de juges à des fins politiques et au manque de protection des juges - chargés de procès relatifs à des crimes graves - qui font l’objet de menaces10.

En mars 2013, Me Pascal Paradis a notamment obtenu une rencontre officielle avec les responsables du dossier haïtien de la CIDH pour leur présenter les développements dans l’affaire Duvalier et échanger sur le rôle que pourrait continuer à jouer la CIDH. 10 « Rapport de l’expert indépendant sur la situation des droits de l’Homme en Haïti, Michel Forst », Doc. Off. A/HRC/22/65, le 7 février 2013, para. 27 à 30, en ligne : http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G13/106/72/PDF/G1310672.pdf?OpenElement 9

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Alors que le Ministère public a la responsabilité, à défaut de chercher activement à ce qu’un prévenu soit cité à procès, de tenter de comprendre la nature des allégations portées contre ce dernier et d’en soupeser la crédibilité, ses représentants se sont livrés à de véritables contre-interrogatoires, semblant remettre en question ouvertement la véracité des propos tenus par les plaignants et plaignantes et également posé des questions qui visaient à démontrer que les plaignants et plaignantes étaient des opposants politiques mus par un désir de déstabiliser l’État. La désinvolture avec laquelle la justice haïtienne a jusqu’à présent appréhendé ce dossier donne l’impression qu’elle ne considère pas que les allégations pourtant très graves portées contre Jean-Claude Duvalier méritent qu’elle s’y intéresse avec sérieux. Il s’agit là d’un message dangereux adressé à la population haïtienne, susceptible d’alimenter leur cynisme à l’égard du système judiciaire. Il est par ailleurs aujourd’hui largement établi que l’absence de justice et d’imputabilité rend illusoire la quête de réconciliation nationale et menace l’État de droit, en Haïti comme ailleurs11. 5. Absence de volonté de l’État haïtien de poursuivre et sanctionner les auteurs d’exactions commises sous le régime Duvalier La proximité entre le chef de l’État et M. Duvalier, qui se sont côtoyés à de multiples reprises depuis le début de l’instruction du dossier, compromet sérieusement toute possibilité de voir les victimes exercer leur droit à un recours interne effectif pour les graves violations de droits humains évoquées dans les plaintes. Par ailleurs, l’assignation à résidence de Jean-Claude Duvalier, qui avait été ordonnée le 22 mars 2011, a été levée et ce dernier est désormais libre de participer aux événements publics, dont les commémorations de l’indépendance du pays le 1er janvier 2014, à l’invitation même de l’actuel gouvernement12. Le Président Martelly a entrepris plusieurs démarches, afin d’entamer un processus de « réconciliation nationale » avec tous les anciens Chefs d’État, incluant des réunions décriées par plusieurs organisations de la société civile13. Les déclarations publiques du Président démontrent ses intentions de favoriser la clémence envers Jean-Claude Duvalier. Par exemple, en avril 2011, il aurait même invoqué la possibilité d’une amnistie14. Dans un communiqué rendu public à l’occasion du

Une véritable réconciliation ne peut être achevée en faisant fi des éléments fondamentaux d’une politique intégrale de justice transitionnelle, soit la recherche de la vérité et de la justice : « Rapport du Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-concurrence, Pablo de Greiff », Doc. Off. AG NU, A/HRC/21/46, le 9 août 2012; en ligne : http://www.ohchr.org/Documents/HRBodies/HRCouncil/RegularSession/Session21/A.HRC.21.46_fr.pdf 12 Agence France-Presse, La présence de Duvalier au 210e anniversaire d’Haïti fait polémique, 6 janvier 2014; en ligne : http://www.lapresse.ca/international/amerique-latine/201401/06/01-4725849-la-presence-de-duvalier-au-210e-anniversairedhaiti-fait-polemique.php; Tout Haïti, Déclaration conjointe : Contre la présence de l’inculpé Jean Claude Duvalier aux cérémonies officielles du jour de l’indépendance d’Haïti, 7 janvier 2013, en ligne : http://www.touthaiti.com/touthaiti-actualites/3176declaration-conjointe-contre-la-presence-de-l-inculpe-jean-claude-duvalier-aux-ceremonies-officielles-du-jour-de-lindependance-d-haiti 13 Haiti Press Network, Haïti-politique: Jean-Claude Duvalier réagit aux propositions du président Martelly, 15 mai 2013; en ligne : http://www.hpnhaiti.com/site/index.php/politique/9447-haiti-politique-jean-claude-duvalier-reagit-aux-propositions-du-presidentmartelly 14 La Presse, Michel Martelly songe à amnistier Duvalier et Aristide, 18 avril 2011; en ligne : http://www.lapresse.ca/international/dossiers/elections-en-haiti/201104/18/01-4390824-michel-martelly-songe-a-amnistierduvalier-et-aristide.php 11

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troisième anniversaire du retour en Haïti de Jean-Claude Duvalier, le 16 janvier 2014, le Collectif fustigeait l’immobilisme de la justice et l’attitude du gouvernement ouvertement favorable au prévenu 15. De plus, Amnistie internationale a récemment dénoncé le manque de volonté politique de l’État haïtien qui permet à Jean-Claude Duvalier de s’échapper de la justice16. Par ailleurs, plusieurs organisations internationales ont dénoncé à plusieurs reprises la détérioration du climat dans lequel les défenseurs des droits humains exercent leur profession en Haïti. Les menaces et les actes de criminalisation à l’encontre de Maître Patrice Florvilus, un des principaux partenaires d’ASFC en Haïti, qui a été contraint de quitter le pays en décembre 201317 ainsi que la grève générale illimitée des avocats qui a eu lieu en 2013 constituent des exemples frappants de la recrudescence des atteintes au libre exercice de la profession d’avocat en Haïti. Cet environnement de travail menaçant n’est pas propice à l’établissement de conditions favorables à une représentation pleine et entière des victimes ce qui fragilise l’exercice de leurs droits aux garanties judiciaires. 6. Requête à la Commission Bien qu’il soit souhaitable qu’un procès contre les principaux auteurs de violations de droits humains commis sous le régime Duvalier se tienne devant un tribunal haïtien, si la situation dénoncée dans la présente demande devait se poursuivre, la compétence de la CIDH pourrait être enclenchée en vertu de l’art. 46 (2) b) et c) de la Convention. Compte tenu des nombreux obstacles rencontrés par les victimes et leurs représentants, les pétitionnaires demandent respectueusement à la Commission de rappeler à l’État haïtien ses obligations internationales, comme celles de permettre la conduite d’enquêtes et de procédures judiciaires diligentes sur les crimes contre l’humanité commis sous le régime Duvalier et ce, sans entraves, interférences et délais déraisonnables; de garantir au pouvoir judiciaire toute l’indépendance digne de ses fonctions; de sanctionner les officiers de l’État qui compromettraient leurs devoirs d’éthique, d’impartialité et de neutralité conformément aux droits garantis par la Convention; et de solliciter de la communauté internationale qu’elle augmente son soutien apporté au système judiciaire en Haïti.

Annexe 7.1.3: CIDH, lettre accordant audience pour le 28 mars 2014, au Collectif et à ASFC, 28 février 2014

Collectif contre l’impunité, Le jugement de Duvalier, toujours un enjeu pour la démocratie haïtienne, 16 janvier 2014; en ligne : http://asfcanada.ca/documents/file/collectif-communique-16-janvier-2014-francais.pdf 16 Amnistie internationale, Lack of Political will allows ex-dictator Duvalier to escape justice, 15 janvier 2014; en ligne: http://amnesty.org/en/news/haiti-lack-political-will-allows-ex-dictator-duvalier-escape-justice-2014-01-15#.UtaLk9CciwU.twitter 17 ASFC, L’avocat défenseur des droits humains Patrice Florvilus contraint de quitter Haïti, 12 décembre 2012; en ligne : http://www.asfcanada.ca/fr/nouvelles/laeavocat-dafenseur-des-droits-humains-patrice-florvilus-contraint-de-quitter-haati-317 15

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Annexe 7.2 : Présentation du Collectif contre l’impunité www.haitiluttecontre-impunite.org

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)-Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

[email protected]

Le sens d’un combat Le 16 janvier 2011, l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier était de retour en Haïti, après 25 ans d’un exil doré. Le jour même, des citoyennes et des citoyens se mobilisaient pour réclamer son inculpation. Le 19 janvier, des plaintes pour crimes contre l’humanité* étaient déposées contre Duvalier et consorts. Le Collectif contre l’impunité est né de la rencontre solidaire de victimes du régime duvaliériste et de défenseur-e-s des droits de la personne, et de leur volonté de s’unir pour exiger le jugement de Duvalier et de ses acolytes, afin que justice soit rendue aux milliers de personnes, de toutes conditions sociales que, pendant 29 ans de règne absolu, le régime a emprisonnées, torturées, exécutées, fait disparaitre, déportées. Le Collectif contre l’impunité œuvre pour : 

Obtenir la tenue d’un procès contre Jean-Claude Duvalier et d’autres responsables de son régime dictatorial;



Faire la lumière sur les crimes perpétrés par le régime des Duvalier, de 1957 à 1986;



Effectuer l’indispensable devoir de mémoire.

La démarche du Collectif est ancrée dans une quête de justice et donc de vérité. Elle vise à contribuer à ce que la nation confronte son histoire, plutôt que de la subir ou de feindre de l’ignorer. Refuser la négation des droits et l’impunité qu’elle engendre; exiger que la justice se prononce sur des crimes qui ont douloureusement marqués notre vie de peuple; inviter nos compatriotes à réfléchir sur les mécanismes de la dictature; refuser le révisionnisme et la réhabilitation qu’elle implique; c’est une manière citoyenne de contribuer à transformer notre système de justice et, ainsi, ouvrir la voie pour que d’autres violateurs, quels qu’ils soient, rendent comptent à la nation. Notre histoire de peuple nous a placés au cœur même de l’humanité**. L’impunité ne peut donc être le destin d’Haïti.

Port-au-Prince, le 3 février 2014 Danièle Magloire Coordonnatrice

* Arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc. ** Révolution anti-esclavagiste de 1804; aide aux combattants de la liberté à travers les Amériques; appartenance au groupe des 19 pays signataires de la Charte de Nuremberg en 1945; membre fondateur des Nations Unies en 1948, etc.

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Annexe 7.3: Site Haïti lutte contre l’impunité

www.haitiluttecontre-impunite.org

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org Dépêches Haïti-Dictature : Lancement ce 7 février d’un site internet pour entretenir la mémoire http://www.alterpresse.org/spip.php?article15949#.UzxD11eXa6Y

vendredi 7 février 2014 P-au-P, 7 févr. 2014 [AlterPresse] --- Le Collectif contre l’impunité, un regroupement de victimes du régime des Duvalier, a lancé ce 7 févier un site internet rassemblant des documents sur la dictature et la lutte des victimes pour obtenir justice. Baptisé « Haïti : lutte contre l’impunité », le site documentaire www.haitiluttecontre-impunite.org offre un aller-retour historique entre les années du père(François) et du fils (Jean Claude) ainsi que la lutte depuis 2011 pour faire juger Jean Claude Duvalier. On y retrouve des espaces pour des documents sonores, audio-visuels, et surtout des textes, le tout en quatre langues (Créole haïtien, Français, Espagnol et Anglais). L’initiative "Haïti lutte contre l’impunité", sur le mode d’une "bibliothèque virtuelle accessible sur Internet" a pour mission de "repérer différentes formes ou manifestations d’impunité qui ont eu cours dans l’histoire Haïti et plus particulièrement à partir de l’avènement du duvaliérisme en 1957", indique le Collectif. Le 7 févier demeure une date symbolique pour la démocratie haïtienne car elle marque la chute de Jean Claude Duvalier et de la dictature de 29 ans que lui et son père ont imposée au pays. De retour en Haïti le 16 janvier 2011, Jean Claude Duvalier est accusé devant la justice de crimes contre l’humanité et de crimes économiques. Le dossier se trouve à la Cour d’appel de Port-au-Prince qui n’a pas encore rendu son verdict, alors que la dernière séance remonte à mai 2013. [kft gp apr 7/2/2014 9 :05]

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Annexe 7.4 : Actions du Collectif contre l’impunité http://www.fokal.org/fr/index.php?option=com_content&view=article&id=1109:michele-montas-retrace-lecombat-du-collectif-contre-limpunite&catid=83:nos-programmes&Itemid=54

Affaire Duvalier: le combat du Collectif contre l’impunité Michèle Montas-Dominique18

15 novembre 2013 Fokal - Haiti day events, Open society foundations (OSF), New York

Danièle Magloire, qui a coordonné ─très efficacement, je devrais ajouter─ la mobilisation de notre Collectif contre l'impunité, pour porter l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier à comparaître devant une cour de justice à Port-au-Prince, m'a demandé de présenter un résumé de cette mobilisation, du soutien que nous avons reçu ─celui de FOKAL n’étant pas des moindres─, de notre position actuelle et des enjeux à envisager pour Haïti et pour notre lutte commune contre l'impunité. Me Jean-Joseph Exumé, ancien ministre de la Justice d'Haïti, qui a saisi sans relâche la justice haïtienne de notre requête, a rejoint Danièle sur notre tribune cet après-midi et pourra vous parler des implications juridiques du dossier. Comme ils ont tous les deux travaillé sur une base quotidienne à ces problèmes en Haïti, ils seront plus aptes que moi à répondre aux questions que vous pourriez avoir. Permettez-moi de commencer sur une note personnelle. J'ai vécu dans la peur et dans le silence quand j'avais 12Ŕ14 ans, sans jamais comprendre entièrement pourquoi il y avait tant de sujets tabous à table le soir ou à l'école, ou pourquoi, au cours de cette journée mémorable du 26 avril 1963, il y avait des cadavres dans ma rue. En été 1964 ─j'avais 17 ans─ ma famille a dû entrer dans la clandestinité, après qu’une tante et quatre cousins eurent sommairement «disparus». Nous vivions sous la dictature de François Duvalier. Je suis devenue journaliste de radiotélévision parce que je ne pouvais plus accepter le silence assourdissant de mon enfance et parce que j'ai refusé de continuer à me cacher. Je pense que la plupart des Haïtiens qui ont vécu de 1957 à 1986, les 29 années de dictature des Duvalier, père et fils, partagent tous les mêmes souvenirs qui ont eu un impact si profond sur nos vies. Les faits reprochés à Jean-Claude Duvalier Cinquante ans plus tard, nous sommes 29 plaignants qui, avec le soutien d’organisations haïtiennes et internationales des droits humains19, exigeons que le soi-disant «président à vie» Jean-Claude Duvalier, soit tenu pour responsable des violations massives des droits humains sous son régime de 15 ans, et de crimes contre l'humanité. En avril 1971, il avait «hérité» notre pays de son père, comme un morceau de terrain, avec un appareil répressif impitoyable. Renversé en 1986, il est revenu d’exil, de façon inattendue, le 16 janvier 2011, un an après le tremblement de terre qui a ravagé plusieurs villes d'Haïti, tué plus de 200.000 personnes, fait plus d'un million de sans-abri et détruit une grande partie de notre capitale, Port-au-Prince, faisant disparaître dans le processus, autant de lieux de mémoire qui faisaient partie de notre identité en tant qu’Haïtiens. 18

Membre du Collectif contre l’impunité, journaliste, ancienne porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, veuve du journaliste Jean Dominique assassiné le 3 avril 2000. 19 Notamment Avocats sans frontière Canada (ASFC) qui, depuis 2011, apporte un appui technique solidaire au Collectif. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Au regard des difficultés que vivait le pays à l'époque et compte tenu du climat d'impunité qui prévaut en Haïti, Duvalier aurait pu imaginer qu'il ne serait jamais poursuivi. Et que, sans poursuites, il pourrait tranquillement récupérer ses avoirs gelés dans des banques suisses et ainsi être réinséré dans l'avenir politique d’Haïti. Mais au contraire, il a été convoqué par le Commissaire du gouvernement (procureur), le lendemain de son retour, et deux jours plus tard, accusé par une poignée de victimes de son régime, de violations massives des droits humains. Pour nous, à part obtenir justice, nos plaintes individuelles ont eu pour but, symboliquement, de parler au nom de tous ceux qui ne pouvaient pas ou ne voudraient pas le faire. Nous étions convaincus que nos griefs individuels ─les exécutions, les disparitions, les arrestations et détentions illégales, la torture ou l'exil─ représentaient, au-delà du cadre judiciaire, ces milliers de victimes du régime des Duvalier de tous les milieux et toutes classes sociales confondues qui s’étaient vu refuser le droit à la justice. Engager des poursuites contre l'ancien dictateur, devant les mêmes tribunaux qui avaient été si corrompus et affaiblis par des années de dictature, était aussi une tentative de relancer un système judiciaire qui a été incapable de répondre aux exigences de justice, et par là, forcer ce même système à fonctionner. Nous espérons à long terme et à la faveur d’un cas si emblématique, creuser une brèche importante dans la culture de l'impunité qui règne en Haïti depuis 1957. Notre difficile combat devrait également s’inscrire dans la grande et historique lutte du Peuple haïtien pour les droits humains. Haïti est le premier pays de cet hémisphère à avoir mis fin à l'esclavage et celui qui a soutenu au XIXème siècle les mouvements de libération à travers les Amériques. Rappelons qu'une des conditions à l'appui donné à Simon Bolivar, qui a reçu un abri et des armes de notre nouvelle République d'Haïti, était de donner la liberté à tous les esclaves, dans les territoires libérés de la couronne d’Espagne. Haïti a également été l'un des 19 signataires de la Charte de Nuremberg et membre fondateur de l'Organisation des Nations Unies. Nos premières requêtes auprès d’une juridiction pour violations massives des droits humains ont été déposées en janvier 2011, trois jours après le retour inattendu de Jean- Claude Duvalier. Le gouvernement de l'époque avait, par l'intermédiaire du Commissaire du gouvernement, rouvert une action en justice intentée précédemment contre Duvalier et ses associés en France, aux États-Unis, en Suisse et en Haïti parmi d'autres pays, pour détournement de fonds publics et violations des droits humains. Le mois suivant, nous avons créé le « Collectif contre l'Impunité » qui a réuni 22 des plaignants, de tous les milieux, des intellectuels ou des paysans, ainsi que quatre organisations haïtiennes de droits humains. Aujourd'hui la Cour d'appel de Port-au-Prince doit encore décider si Duvalier devrait être jugé pour violations massives des droits humains, pour les meurtres, la torture, l'exil forcé ou tout simplement pour crimes financiers, comme le juge d’un tribunal de première instance en avait décidé plus tôt. Lorsque Jean-Claude Duvalier a été contraint, cette année20, à comparaître devant le tribunal, les quelques journalistes internationaux qui ont couvert l'audience, on parlé d’un procès comme celui de Rios Montt par un tribunal pénal de Guatemala City, ignorant apparemment que nous sommes encore loin d'un procès et toujours à la phase d'instruction d’un parcours qui risque d’être long, laborieux et dangereux.

20 Le jeudi 28 février 2013. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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De février à mai 2011, des plaignants, ainsi que Jean Claude Duvalier lui-même, ont témoigné devant le premier juge d'instruction, Carvès Jean. Seul l'un des anciens ministres de Duvalier a été entendu21. Les mêmes questions ont été posées à chacun, sans qu’il ne soit procédé à aucun suivi des investigations. En janvier 2012, le juge d'instruction a décidé que la législation haïtienne ne permettait pas les dénonciations de crimes contre l'humanité et a rendu un non-lieu, tout en jugeant recevables les accusations de crimes financiers, de détournement de fonds, qui seraient traitées par un tribunal pénal comme simples délits, passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de trois ans22. Auparavant, le Commissaire du gouvernement traitant ce dossier23, avait également décidé que le Code pénal haïtien, fixant les délais de prescription, empêchait toutes poursuites pour les meurtres, les disparitions, la torture et les autres violations graves des droits humains commises par le gouvernement Duvalier de 1971 à 1986. Analysant les décisions rendues par le Commissaire du gouvernement sur le dossier et l’ordonnance du juge d'instruction, Bill O'Neil, avocat international et directeur du Forum sur la prévention des conflits et la paix, qui est un programme du Conseil de Recherche en Sciences sociales de Brooklyn, a souligné que « les deux décisions sont truffées d’erreurs en fait et en droit. » Le Collectif a immédiatement déclaré qu'il épuiserait tous les recours en vigueur contre cette ordonnance. Je cite: « Cette fois, sur ce dossier emblématique, l'impunité ne prévaudra pas. Il ne peut y avoir de démocratie sans justice. » L’affaire a été portée en appel et des audiences se sont tenues à la Cour d'Appel du 13 décembre 2012 au 16 mai 2013.

Les obstacles à la justice Un climat politique défavorable et de multiples obstacles ont fait du chemin qui mène à la justice, une épreuve difficile. Elles étaient évidentes depuis le jour du retour inattendu de Jean-Claude Duvalier de son exil en France, où il a été escorté jusqu’à sa résidence par des policiers sur motocyclettes. Un discours révisionniste tente de réécrire l'histoire et de convaincre la jeunesse que les choses allaient mieux sous Duvalier. Cette campagne agressive a parfois usé de menaces et d'intimidations, comme lorsque le 22 septembre 2011, un groupe de partisans de Duvalier a tenté de perturber une conférence de presse que donnait Amnesty International autour des crimes commis sous la dictature. Les arguments utilisés par les avocats de Duvalier, selon lesquels le Code pénal haïtien, fixant les délais de prescription, empêche toutes poursuites pour meurtres, disparitions, torture et autres violations graves des droits humains commises par le gouvernement Duvalier, ont été largement divulgués dans les médias, avec peu d'espace accordé à l'argument opposé, l'existence de conventions signées par Haïti et aux nombreuses décisions internationales établissant qu'il ne peut y avoir délai de prescription pour les crimes contre l'humanité ou les disparitions définies comme crimes continus.

M. Jean-Robert Estimé, ministre des affaires étrangères du 3 février 1982 au 30 décembre 1985. Ordonnance du 22 janvier 2012 du juge d’instruction, Carvès Jean, Tribunal de première instance de Port-au-Prince. 23 Me Félix Léger qui a succédé à Me Harycidas Auguste qui lui avait émis, en janvier et avril 2011, des réquisitoires supplétifs pour crimes contre l’humanité et crimes financiers. 21 22

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Étonnamment, les partis politiques qui avaient été presque annihilés sous la dictature ont gardé le silence. La vue de l'ancien « président à vie »circulant librement dans des restaurants ou assistant à des concerts de jazz a envoyé un message clair d’impunité continue, du moins jusqu'à ce que Duvalier ait été contraint de témoigner devant la Cour. L'attitude du gouvernement néo-duvaliériste actuel a renforcé ce message, avec la déclaration, dès le début du Président Michel Martelly, disant qu'il était prêt à amnistier Duvalier, à un moment où l'ancien dictateur n'avait même pas encore été inculpé. Il a rendu visite à l'ancien dictateur, comme il l'a fait dans le cas d'autres anciens dirigeants et l'a officiellement invité à la commémoration du deuxième anniversaire du tremblement de terre de janvier 2010. Le Collectif contre l'impunité et d'autres organisations de la société civile ont dénoncé cette tendance à banaliser la dictature et ce mépris des revendications légitimes de justice. En outre, l'Etat n'a pris aucune mesure pour utiliser concrètement l'assistance technique offerte par la Commission interaméricaine des droits de l’Homme sur ce dossier. Il n'y a eu aucune demande de renseignements, ni aucune recherche de preuves, adressées à d'autres pays, ou à des instances internationales. De plus, en dépit des poursuites engagées par le gouvernement précédent contre Duvalier, l'ancien dictateur a été gratifié d’une pension présidentielle. Ses biens lui ont été restitués. Il dispose d'un passeport diplomatique et de la protection de la police. Il n'est pas surprenant que des duvaliéristes notoires soient membres de l'actuel gouvernement, le ministre de l'Intérieur étant le chef du parti duvaliériste, le PUN (Parti de l'unité nationale). Le Collectif a constamment dénoncé l'atmosphère malsaine des audiences de la Cour d'appel, à l'intérieur et à l'extérieur de la salle d'audience, le manque de respect le plus élémentaire envers les victimes, traitées comme si elles étaient les accusées, et l'attitude étrange du Commissaire du gouvernement, censé être le «défenseur de la société», mais se mettant systématiquement du côté des avocats de Duvalier. Le Collectif et notre propre avocat, Me Jean-Joseph Exumé ont également noté que le dossier de l'instruction, composé essentiellement de documents provenant du côté Duvalier, n'a jamais été disponible à la Cour d'appel. En outre, les plaignants ont été continuellement confrontés aux menaces proférées par des foules pro-duvaliéristes à l'extérieur de la salle d'audience. En mai 2013, lorsque les audiences ont été bouclées, la plupart des plaignants, membres du Collectif ou ceux qui sont représentés par Me Mario Joseph, n'avaient jamais été entendus par la Cour d'appel. Au-delà des déclarations de principes, la communauté internationale ne s’est pas beaucoup, voire pas du tout, impliquée pour faire pression sur le gouvernement haïtien afin qu’il respecte ses obligations en matière de droits humains. Une lettre adressée à cet effet par notre Collectif aux pays fournisseurs de troupes d'Amérique Latine à la MINUSTAH24, la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti, est demeurée sans réponse. C'est uniquement après des appels publics en février 2013 que les missions diplomatiques en Haïti, l'OÉA, les États-Unis, le Canada, la France, la Suisse ont affectés des observateurs aux séances à la Cour d'appel. L'ambivalence de la communauté internationale a été parfaitement illustrée par l’échange d’une poignée de mains entre Jean-Claude Duvalier et Bill Clinton lors d'une cérémonie officielle, marquant le

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Lettre du Collectif, en date du 15 février 2012, aux Chefs et Cheffes d’État de UNASUR impliqués dans la MINUSTAH.

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deuxième anniversaire du tremblement de terre, le 12 janvier 2012, une photo vite devenue populaire sur Internet. Quelques exceptions cependant, sur la scène internationale dans son ensemble, le Tribunal administratif fédéral suisse, l'un des tribunaux de grande instance de la Suisse, a confirmé, le 25 septembre 2013 le blocage des fonds des Duvalier, environ 5 millions de francs suisses, gelés depuis 1986. Le tribunal a décidé de bloquer les fonds qui pourraient être utilisés pour améliorer les conditions de vie du peuple haïtien, renforcer l'Etat de droit et la lutte contre l'impunité. Compte tenu du climat politique qui prévaut actuellement, nous croyons fermement que nous avons gagné une grande victoire lorsque le 28 février 2013, Duvalier a été contraint de comparaître devant le tribunal en tant qu’accusé et de répondre aux questions d’une cour constituée de trois juges. Aujourd'hui, six mois plus tard, aucun jugement n'a été rendu et la Cour d'appel n'a même pas annoncé de date pour rendre un jugement. Dans l’éventualité où nos requêtes seront rejetées une fois de plus, nous saisirons la Cour de cassation et une fois épuisés tous les moyens à l’échelle nationale, nous nous adresserons à la Cour interaméricaine.

Le soutien reçu Tout au long de ce douloureux processus de 18 mois, nous avons reçu le soutien efficace de plusieurs instances internationales, d’associations de la société civile et d’organisations des droits humains. En février 2011, un mois après le retour de Duvalier, le Haut Commissariat des Nations Unies a rappelé au gouvernement haïtien son obligation « d'enquêter sur les violations graves et bien documentées des droits humains qui ont eu lieu pendant le règne de M. Duvalier et de poursuivre les responsables. » Je cite: « Ces violations systématiques des droits ne peuvent rester sans réponse. Les milliers d'Haïtiens qui ont souffert sous ce régime méritent justice », a déclaré le Haut Commissaire, Navy Pillay. Elle a appelé les autorités haïtiennes à envoyer un message au monde « que leurs tribunaux nationaux peuvent assurer la reddition de comptes pour les violations graves des droits de l'Homme, même dans les contextes humanitaires et politiques les plus difficiles». Un mois plus tard, le Secrétaire Général de l'ONU, Ban Ki-moon, a déclaré « Qu’il est d'une importance capitale que les autorités haïtiennes prennent toutes les mesures juridiques et judiciaires dans le dossier de Jean-Claude Duvalier. Engager des poursuites contre ceux qui commettent des judiciaires dans le dossier de Jean Claude Duvalier. Engager des poursuites contre ceux qui commettent des crimes contre leur propre peuple, est un message clair aux Haïtiens que l'impunité ne sera plus la règle dans leur pays. » Suite à une déposition de notre Collectif contre l'impunité à Washington le 28 mars 2011, la Commission interaméricaine des droits de l'Homme (CIDH) a opiné que « le gouvernement de JeanClaude Duvalier a été caractérisé par des violations systématiques des droits de l'Homme telles les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et la torture. D’après le droit international, ces actes constituent des crimes contre l’humanité. L'interdiction de ces crimes, le fait qu'ils ne soient soumis à aucune restriction légale, l'obligation d'enquêter et de punir et l'interdiction absolue de la torture, font maintenant partie du jus cogens. En d'autres termes, ce sont des normes impératives auxquelles les Etats ne peuvent déroger... Haïti a maintenant une opportunité unique. L'investigation et le châtiment de ces crimes pourraient devenir des étapes fondamentales dans le renforcement de l’administration du droit et le rétablissement de la confiance dans le système judiciaire haïtien et un exemple de respect de bonne foi avec les engagements internationaux».

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A l’audience du 28 mars 2011 à Washington, l’Etat haïtien a été représenté par l'ancien Directeur général du ministère de la Justice du gouvernement Préval25 qui s'est engagé à poursuivre l’action contre les violations des droits humains sous la dictature des Duvalier. Des organisations de défense des droits humains comme Amnesty International et Human Rights Watch ont documenté ces violations, avec des preuves de détentions arbitraires, de torture, de cas de décès en détention, de meurtres et de disparitions sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier. Avocats sans frontières Canada ASFC), le Centre International pour la Justice Transitionnelle, l'Institut pour la Justice et la Démocratie en Haïti et Human Rights Watch ont soutenu la Commission interaméricaine et ont exhorté le gouvernement du Président Michel Martelly à affecter suffisamment de ressources humaines aux investigations et aux poursuites. Ils ont encouragé la communauté internationale à soutenir la lutte contre l'impunité et la recherche de la justice en Haïti. Dans le cadre de notre action contre l'ancien dictateur, notre Collectif contre l'Impunité a reçu le soutien juridique de l'Open Society Justice Initiative avec un « Amicus Curiae » consultatif déposé devant les tribunaux haïtiens en décembre 2011. Il a reçu le soutien technique constant d’Avocats sans frontières Canada (ASFC), et des conseils juridiques de Human Rights Watch, du Bureau du Haut Commissaire des Droits Humains en Haïti et d'autres organisations internationales, qui ont travaillé avec nous pendant tout le processus. FOKAL (Fondation connaissance et liberté) a dès le début soutenu activement le travail du Collectif par une série d'activités de reconstruction et de stimulation de la mémoire avec des films, des expositions, des conférences analysant l'impact de la dictature sur l’Haïti d'aujourd'hui, ou par la création d'un espace où les survivants peuvent s’exprimer, dans un pays où la plupart des Haïtiens sont trop jeunes pour se souvenir de la répression de 1957 à 1986. C'est un pays où beaucoup de ceux qui ont vécu la dictature ont choisi de cacher sous un voile de silence des plaies qui ne se sont jamais cicatrisées. Et c’est aussi un pays où la transition tumultueuse vers un régime démocratique, les nombreux coups d'État militaires, les assassinats politiques demeurés impunis et le massacre causé par le tremblement de terre de janvier 2010, ont poussé un grand nombre dans l'indifférence ou l'amnésie volontaire. Il est ironique de constater que tandis que d'autres dictateurs sont jugés à travers le monde, le poids des poursuites engagées contre Duvalier est retombé sur les victimes elles-mêmes. Le contexte politique qui prévaut a amoncelé des nuages lourds sur un éventuel procès juste et impartial qui apporterait une lumière de vérité sur un régime qui a eu un impact désastreux sur le présent et l’avenir d’Haïti. Notre quête de la vérité et de la justice s’est centrée essentiellement sur la construction de l’État de droit dans une nation démocratique où les libertés fondamentales et les droits les plus élémentaires seraient garantis par un système judiciaire indépendant et impartial, soucieux du bien commun, de sorte que Haïti et les Haïtiens, forts de leur passé, puissent affronter leur histoire récente, au lieu de continuer à en être les victimes.

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M. Antoine André.

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Choqués par les tentatives de certains des partisans de Duvalier à réviser l'histoire, une campagne a finalement été lancée cette année, à travers les médias, par un certain nombre de survivants26, pour marquer le 50ème anniversaire du 26 avril 1963, l'un des jours les plus sombres de la dictature, où adolescente, j'ai vu des corps ensanglantés qui jonchaient la rue où j’habitais. De plus en plus de survivants, dont quelques-uns encore évidemment traumatisés, se prononcent maintenant pour témoigner et dénoncer une fois de plus, comme certains l'ont fait en 1986 et 1987 dans des lieux publics et surtout dans les médias. À un moment où un certain nombre de duvaliéristes sont de retour au pouvoir et où certaines tentations dictatoriales sont en train de refaire surface, reconstruire la mémoire nous donne le pouvoir de soulever le voile épais de 29 années de répression. Que la Cour d'appel accepte ou rejette nos revendications, dire la vérité au pouvoir a été un développement positif des 18 derniers mois. Le «Devoir de mémoire», cette obligation, est perçue par de plus en plus de personnes comme une nécessité de se souvenir afin de ne plus jamais répéter le passé.

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Le Comité devoir de mémoire.

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Annexe 7.5. : Articles, communiqués de presse, documents de référence

Annexe 7.5.1 : Inadmissibilité au Canada de Jean-Claude Duvalier et des dignitaires de son gouvernement

Selon une décision du gouvernement canadien et la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, Jean-Claude Duvalier, et les personnes ayant occupé un poste de haut rang dans son gouvernement, est inadmissible au Canada vu les crimes contre l’humanité et les violations graves et répétées des droits de la personne commis. Canada: ENF 2/OP 18 Evaluating Inadmissibility - 2013-12-02; page 24 http://www.cic.gc.ca/English/resources/manuals/enf/enf02-eng.pdf 7. Human or international rights violations The CBSA has the policy responsibility with respect to human and international rights violations [A35] For assistance in the context of security screening, officers should contact the appropriate section in NSSD as noted in section 4 of this manual. For cases that do not fall under the purview of NSSD or if officers require general assistance in researching or obtaining additional information, they may contact the Security Intelligence Section of the IOAD for information on section 35 of IRPA. […] 7.3. Crimes against humanity, genocide, war crimes and terrorist acts The following descriptions apply: Crimes against humanity Murder, extermination, enslavement, imprisonment, torture, sexual violence, or any other inhumane “act” or “omission” that is committed against any civilian population or any identifiable group, whether or not the state is at war, and regardless of whether the “act” or “omission” is a violation of the territorial law in force at the time. The acts or omissions may have been committed by state officials or private individuals, and against their own nationals or nationals of other states 7.4. Senior members/officials of governments designated by the Minister of PSEP A35(1)(b) describes senior members or officials of governments designated by the Minister of PSEP as governments that engage in terrorism, systematic or gross human rights violations, genocide, war crimes or crimes against humanity. This allegation may not be used unless a government is designated. As of this writing (i.e., February 2002), the following governments have been designated Designated 8 April 1994: the former military governments in Haiti between 1971 and 1986, and between 1991 and 1994, except the period August-December 1993.

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Annexe 7.5.2 : Le CEDH face au retour du dictateur

O-R ONÈ-RESPÈ

HONNEUR-RESPECT

Sant Ekimenik Dwa pou Tout Moun

Centre Œcuménique des Droits Humains

Un président de la République, quelques jours, avant la fin de son mandat, trahit sa mission de gardien de la loi et du droit Haïti a été pendant longtemps un pays respecté. A travers le monde. Un pays qui s’était libéré d’un effroyable système d’esclavage qui avait aidé les combattants de la liberté à travers les Amériques, un Miranda, un Simon Bolivar. Et même jusqu’en Europe avait aidé la Grèce. Voici maintenant un héritage jeté par-dessus bord. Voici que nous avons, maintenant, le privilège d’offrir refuge à ceux là même qui ont massacré nos frères nos sœurs. A ceux qui ont lentement exterminé nos jeunes, nos militants, nos pères, nos mères, nos épouses et nos enfants, le peuple haïtien, dans le marécage de Fort-Dimanche et partout dans le pays profond. Refuge et impunité à ceux qui avaient tranquillement détourné l’argent du pays dépensant et gaspillant à tous vents , le confiant à la garde de banques étrangères. OUI, VOICI LE MOMENT DE S’INDIGNER, OUI, VOICI LE MOMENT DE SE METTRE DEBOUT et de crier d’une seule voix contre les pasteurs voleurs de troupeaux ou qui le sont devenus ces chefs d’État transgressant leur mandat, gardiens de la maison offrant à des brigands refuge et protection au delà de toute décence et de tout honneur. Sous le prétexte fallacieux qu’il serait venu le temps pour le pays de se réconcilier avec soi-même En accueillant à la même table les coquins d’hier et d’aujourd’hui Pour que le bien se réconcilie avec le mal.

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Parce qu’il serait venu le temps de prêcher l’oubli des souffrances de tant de familles les tortures et la lente extermination à Fort-Dimanche la permanente humiliation des sans droits la différence entre le mal et le bien qu’il serait venu le temps pour tous d’être compagnons de marche vers l’avenir en honorant et acceptant l’ignominie d’hier et qu’il soit dorénavant connu que la République d’Haïti désormais ne reconnait plus l’existence du crime. Qu’elle accepte de recevoir sans problème ceux qui ont fait couler le sang de ses fils et de ses filles ceux qui ont maintenu tout un peuple prisonnier de la faim et de la misère. Telle est la nouvelle qu’un chef d’état a lancée au monde a annoncée à son peuple vingt et un jours avant le terme de son mandat. Jean-Claude Bajeux Directeur exécutif 17 janvier 2011

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Annexe 7.5.3 : Déclaration de Jean-Claude Duvalier au point de presse du 18 janvier 2011 Chers amis de la presse, Je vous remercie d’avoir répondu à mon invitation de ce jour et saisis cette opportunité qui m’est offerte de m’adresser à mes concitoyens. Très brièvement, je vous dirai combien j’ai été favorablement impressionné par l’accueil qui m’a été réservé depuis l’Aéroport International François Duvalier pour cette visite, surtout par cette foule de jeunes qui ne m’ont pas connu. Cela donne chaud au cœur. Mwen di yo mèsi anpil, mwen te kontan viv moman sa a27. Cela dit, je sais à quel point nombre de vous sont curieux de savoir l’objet de mon retour à Port-auPrince après un quart de siècle d’absence. Cette question est sur toutes les lèvres. En effet, j’ai voulu rendre un hommage aux nombreuses victimes du séisme dévastateur du 12 janvier 2010 qui a fait, selon des estimations officielles, 316.000 morts. Malheureusement, je ne suis pas arrivé à temps pour cette commémoration. Chers compatriotes, Me voici revenu vous témoigner de ma solidarité en cette période extrêmement difficile de la vie nationale où vous êtes encore des centaines de milliers à vivre à la belle étoile, au milieu des ruines. Dès l’instant que j’ai pris la décision de revenir en Haïti pour commémorer avec vous, dans notre pays, ce triste anniversaire, je m’attendais à toute sorte de persécutions; mais croyez-moi, le désir de participer à vos cotés, à cette Konbit pour la reconstruction nationale, dépasse de loin les tracasseries auxquelles je pourrais être confronté. Peu importe le prix à payer, l’essentiel pour moi étant de me trouver avec vous. Et j’affirme qu’à ce titre, tous les Haïtiens et Haïtiennes de bonne volonté ont le droit de vouloir y prendre part. Je saisis cette occasion pour présenter publiquement mes sympathies à mes millions de partisans qui, après mon départ volontaire d’Haïti, afin d’éviter un bain de sang et de faciliter le dénouement rapide de la crise politique, en 1986, ont été livrés à eux-mêmes. Des milliers ont été lâchement assassinés, boucanés, grillés, suppliciés au «pè Lebrun», mot devenu tristement célèbre ; leurs maisons, leurs biens pillés, déchoukés, incendiés. Et tout cela, sous les feux des caméras du monde entier. Je saisis aussi cette occasion pour exprimer, une fois de plus, ma profonde tristesse à l’endroit de mes compatriotes qui se reconnaissent, à juste titre, d’avoir été victimes sous mon gouvernement. Jeunesse de mon pays, Durant mon long séjour en France, j’ai toujours été attentif à vos cris et à vos malheurs. J’ai vécu vos moments difficiles avec beaucoup de peine et de chagrin. C’est à vous, futurs leaders de ce pays, qu’il convient d’assumer la relève et montrer au monde que l’âme haïtienne est bien vivace et forte. Et comme pour parodier le Révérend Martin Luther King : « quand vous ferez en sorte que la cloche de la réconciliation nationale puisse résonner dans tous les cœurs et que nous la laissions carillonner dans chaque commune, dans chaque ville, dans chaque quartier , dans chaque foyer, alors, nous pourrons hâter la venue du jour où tous les enfants d’Haïti, hommes et femmes, vieux et jeunes, riches et pauvres, ceux de l’intérieur comme ceux de la diaspora, puissent marcher la main dans la main sans exclusion et participer ensemble à la renaissance d’Haïti ». Tel est le message de mon retour. Vive Haïti ! Que Dieu nous bénisse ! Merci.

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Traduction littérale: Je les remercie, j’ai été heureux de vivre ce moment.

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Annexe 7.5.4: Premières plaintes déposées contre Jean-Claude Duvalier

http://lenouvelliste.com/

Haïti: 4 plaintes déposées contre Duvalier pour crimes contre l'humanité Le Nouvelliste | Publié le : 19 janvier 2011 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/87981.html

La journaliste haïtienne Michèle Montas, ancienne porte-parole du secrétaire général de l'ONU Ban Kimoon, et trois autres personnes, ont porté plainte mercredi pour crimes contre l'humanité contre l'exdictateur Jean-Claude Duvalier, a annoncé Mme Montas à l'AFP. "Nous venons de déposer des plaintes pour crimes contre l'humanité devant le commissaire du gouvernement", a dit Michèle Montas, précisant que le dossier serait transmis à un juge d'instruction. Les autres plaignants sont deux anciens prisonniers politiques, Alix Fils-Aimé et Claude Rosier, incarcérés pendant 10 ans pendant la dictature, ainsi que Nicole Magloire. Michèle Montas, dont l'époux défunt, le journaliste Jean Dominique, avait été intimidé puis exilé sous le régime Duvalier, avait été elle-même envoyée en exil après la destruction de Radio Haïti, où elle travaillait, par des proches de Duvalier. "Nous avons porté plainte pour séquestration arbitraire, exil, destruction de biens privés, torture physique et morale, violation des droits civils et politiques", a-t-elle énuméré, après avoir rencontré le commissaire du gouvernement (procureur général) Auguste Aristidas. D'autres personnes se préparent à déposer des plaintes contre l'ex-dictateur revenu dimanche en Haïti après 25 ans d'exil en France et inculpé mardi pour corruption, détournements de fonds et association de malfaiteurs, avant d'être laissé en liberté par la justice haïtienne.

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Annexe 7.5.5: Jean-Claude Duvalier prône la réconciliation nationale

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org

Dépêches Haïti-Duvalier : Réconciliation nationale, profonde tristesse et sympathies http://www.alterpresse.org/spip.php?article10566#.UzEE0oWXa6Y

samedi 22 janvier 2011

P-au-P., 22 janv. 2011 [AlterPresse] --- L’ancien dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier a plaidé en faveur de la réconciliation nationale tout en exprimant sa tristesse pour les victimes de son gouvernement et en présentant ses sympathies à ses partisans pourchassés à sa chute en février 1986. Lors de ses premières déclarations à la presse après son retour le 16 janvier dernier, Duvalier a souhaité que « la cloche de la réconciliation nationale puisse résonner dans tous les cœurs » en vue de la « renaissance d’Haïti », alors que l’ex tyran est poursuivi pour crimes contre l’humanité, détournements de fonds et corruption. Dans la résidence privée de Montagne Noire (périphérie est) où il a pris logement la veille après avoir laissé l’hôtel où il était hébergé depuis dimanche, Duvalier a exprimé sa « profonde tristesse » à l’endroit de ses « compatriotes qui se reconnaissent à juste titre d’avoir été victimes » durant son régime.

Des citoyens continuent de porter plaintes contre l’ancien président à vie, qui doit rester à la disposition de la justice et qui est sous le coup d’une interdiction de départ. « Je m’attendais à toute sorte de persécutions », déclare Duvalier qui s’exclame : « peu importe le prix à payer ». Jean-Claude Duvalier présente ses « sympathies » à ses « millions de partisans » qui ont été pourchassés après son « départ volontaire » du pays le 7 février 1986 « afin d’éviter un bain de sang et de faciliter un dénouement de la crise politique ». Il souligne que « des milliers » de ses disciples étaient « lâchement assassinés, boucanés, grillés (…) leurs maisons, leurs biens, pillés, déchouqués (…) ». Duvalier déclare aussi avoir voulu rendre un hommage aux victimes du séisme dévastateur du 12 janvier 2010 et témoigner de sa « solidarité » en cette période difficile. Âgé aujourd’hui de 59 ans, l’ancien dictateur a régné sur Haïti de 1971 à 1986, succédant à son père Francois Duvalier qui est arrivé au pouvoir en 1957. Les Duvalier ont établi un régime de fer en Haïti et sont responsables de la mort de milliers d’opposants et du détournement d’importantes ressources du pays durant 29 ans. La chute de la dynastie des Duvalier, le 7 février 1986, sous la pression de la lutte démocratique et populaire, avait été saluée par la population, à travers des manifestations monstres dans tout le pays et avait été considérée comme un tournant. Le retour de Jean-Claude Duvalier intervient dans un contexte de crise politique, suite au premier tour des élections présidentielles et législatives contestées du 28 novembre 2010. La communauté internationale accentue la pression contre les autorités en place afin d’écarter de la course le candidat du pouvoir, Jude Célestin, qui serait arrivé frauduleusement en deuxième position. Suivant les recommandations d’un rapport dévaluation de l’OEA, un second tour devrait se tenir entre Mirlande Manigat et Michel Martelly. [gp apr 16/01/2011 20 :00] CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.6: Jean-Claude Duvalier déclare avoir lancé le processus démocratique en Haïti

http://lenouvelliste.com/ Jean-Claude Duvalier se défend d'avoir été un "tyran" Le Nouvelliste | Publié le : 02 février 2011 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/88593.html L'ancien dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier, de retour dans son pays après 25 ans d'exil, s'est attribué le mérite, dans un entretien télévisé, d'avoir "lancé" le processus démocratique en Haïti, estimant que ceux qui le qualifient de "tyran" souffrent d'"amnésie". "C'est moi qui ait lancé le processus démocratique. Lorsque l'on me traite de tyran, ça me fait rire, parce que les gens souffrent d'amnésie, ils ont oublié dans quelles conditions je suis parti d'Haïti", a déclaré M. Duvalier, dans un entretien à la chaîne hispanophone Univision diffusé aux Etats-Unis. "Baby Doc", chassé après quinze ans de pouvoir dictatorial par un soulèvement populaire en 1986, n'a pas souhaité en revanche, dans cette interview diffusée mardi, aborder la question des "tontons macoutes", la milice privée mise en place par son père François Duvalier, alias "Papa Doc", et accusée des pires crimes pendant les 29 ans de régime des Duvalier. Il a estimé par contre que "les léopards", autre milice armée du régime Duvalier à la sinistre réputation, étaient "destinés à combattre la rébellion, parce que mon père a connu 14 invasions". Moins de 48 heures après son retour en Haïti le 16 janvier, Jean-Claude Duvalier a été inculpé de corruption, détournements de fonds publics et association de malfaiteurs et plusieurs plaintes ont été déposées contre lui pour crimes contre l'humanité. "La justice fera ce qu'elle doit faire pour répondre à ces accusations", a simplement commenté l'ancien dictateur, revenu en Haïti à la surprise générale, alors que le pays traverse une grave crise politique née de la contestation des résultats préliminaires du premier tour de la présidentielle du 28 novembre. M. Duvalier a admis avoir rencontré au cours des derniers jours ses partisans et ceux qui lui sont restés fidèles et a redit être revenu afin d'aider à la reconstruction d'Haïti, frappé par un violent séisme le 12 janvier 2010 qui a fait plus de 220.000 morts. "Port-au-Prince n'est pas la ville que j'ai connue, la ville que j'ai quittée. Je crois que personne ne peut rester indifférent devant tant de souffrance et tant de misère. C'est pour cela que je me trouve en Haïti, pour aider le peuple haïtien à se reconstruire", a-t-il assuré. L'ancien dictateur a par ailleurs affirmé que les avoirs haïtiens gelés sur des comptes en Suisse n'étaient pas à lui, ajoutant qu'ils devraient être consacrés à la reconstruction d'Haïti, pays le plus pauvre des Amériques. Le gouvernement suisse a franchi mercredi une nouvelle étape vers une restitution de cet argent à Haïti, en lançant formellement une demande de confiscation auprès de son ministère des Finances. Depuis 1986, la Suisse bloque de manière continue quelque 6 millions de francs suisses (4,6 millions d'euros) qu'elle estime être propriété de "Baby Doc". CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.7: Lettre ouverte de victimes et témoins de la dictature au gouvernement Préval Lettre ouverte au Président de la République, au Premier Ministre et au Ministre de la Justice Port-au-Prince, le 14 février 2011 Monsieur René Préval Président de la République Monsieur Jean Max Bellerive Premier Ministre Monsieur Paul Denis Ministre de la Justice et de la sécurité publique Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la Justice, Nous, les soussignés, tous victimes et/ou témoins des nombreux crimes et exactions commis sous la dictature de l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier (21 avril 1971- 7 février 1986) et qui ont traumatisé toute une nation, avons, comme l'ensemble de la population haïtienne, été surpris par le retour du dictateur, mais surtout choqués de l'accueil qui lui a été réservé par les différents agents de la fonction publique en faction à l'aéroport Toussaint Louverture de la capitale. Le spectacle du dictateur se pavanant dans un cortège de véhicules précédé de motards de la police nationale enthousiastes et serviles, a été particulièrement révoltant. Nous l’avons vu ensuite entouré d’ancien macoutes et de membres de sa garde prétorienne (notamment des membres de l’ex FRAPH, groupe paramilitaire qui a sévit durant le coup d’État militaire de 1991-1994), narguant les consignes d’un juge d’instruction lors de ses multiples déplacements, de Peligre à Léogane, alors qu’il est prétendument « assigné à résidence » selon ce qui a été dit aux victimes qui ont témoigné. Nous avions vu dans le retour inopiné de Jean-Claude Duvalier une opportunité pour que les autorités judiciaires haïtiennes lui demandent enfin compte des crimes imprescriptibles perpétrés sous son règne. Nous nous attendions donc, au nom de la vérité, de la justice et du plus élémentaire bon sens, que Duvalier soit inculpé et immédiatement incarcéré dans l'attente de son procès pour crimes contre l'humanité et pour le pillage éhonté des finances d'un pays réputé le plus pauvre de l'hémisphère. Nous avons vu au contraire, l’accusé traité avec un laxisme surprenant et la plus grande déférence, par les autorités nationales. Il jouit d'une totale liberté de déplacement, dont il profite pour mener campagne, conspirer avec ses associés et complices, réactiver son réseau d'hommes de main, festoyer avec ses compagnons de débauche et narguer avec arrogance les victimes survivantes de son régime. L'interdiction de départ prononcée contre lui, nous semble une mesure bien dérisoire, compte-tenu de la porosité de nos frontières et des complicités avérées développées par les Duvalier en République Dominicaine. Par ailleurs, Jean-Claude Duvalier profite de son accès illimité à la presse pour déployer une offensive de propagande mensongère, analogue à celles que nous avaient infligées son sinistre père et lui-même.

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S'ajoutant à l'attitude menaçante des partisans de Duvalier lors des dépositions des plaignants et à l’attitude pour le moins provocante de ses avocats, ces cafouillages de la justice haïtienne contribuent à intimider les victimes qui ont eu le courage de porter plainte et à dissuader les nombreuses autres qui seraient prêtes à le faire ou à venir témoigner. La place de Duvalier est en prison et la disponibilité de cellules répondant aux normes internationales dans le nouveau pénitencier de la Croix-des Bouquets, permet son incarcération dans des conditions acceptables et totalement différentes de celles que son régime a imposées à ses innombrables victimes ; des conditions dans lesquelles doivent vivre nos compatriotes actuellement détenus. Jean-Claude Duvalier en liberté, les victimes et témoins de ses méfaits, se sentent à juste titre sous la menace de ses puissants complices incrustés dans l'appareil d'État et dans la société. Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la Justice, L'État haïtien doit arrêter de jouer les Ponce Pilate et prendre clairement parti pour la justice et la vérité. 25 ans après le départ de Jean-Claude Duvalier pour son exil doré, il serait temps que tout l'appareil étatique, et notamment le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique, mais également ceux de la Communication et de la culture, de la Jeunesse et des sports, de l'Éducation Nationale remplissent leur mission de faire connaître à nos jeunes compatriotes, désarçonnés par des déclarations ambigües des autorités ou leur silence inquiétant et une propagande délétère des duvaliéristes, la vérité sur la dictature héréditaire la plus sanglante de notre histoire. Les signataires osent croire que le gouvernement prendra les dispositions qui s’imposent pour que justice soit enfin rendue au peuple. Dans cette optique, le gouvernement devrait prendre des mesures pour que nos compatriotes vivant à l’étranger puissent également porter plainte à travers les représentations diplomatiques et consulaires. Patriotiquement votre. Suivent les premières signatures. CIUS, Wisly pour Jn Robert Cius BLANCHET, Max J. DUVAL, Robert SIMON, Paul-Émile ÉLIE, Patrick DOMINIQUE, Jan J. FAUSTIN, Henri DOMINIQUE-BILLOT, Micheline FILS-AIMÉ, Alix BILLOT, Jean MAGLOIRE, Nicole BILLOT, Sylvie MONTAS, Michèle CONDÉ-ICART, Renée PROPHÈTE, Denise DUPUY, Rudolph ROSIER, Claude PASQUET, Fabienne FRÉMONT, Erge CÔTÉ, Mireille BOUCARD, Françoise DIEUJUSTE, Ulrick BARON, Paul Avin (Jean François) ICART, Reynold KLANG, Gary ICART, Jean-Claude LARGE, Josaphat-Robert RICARD, P. Cassagnol BERROUÉT-ORIOL, Robert SIMON, Marcel-Franck DESILIER, Margarett CORBANESE, Paul Adolphe LÉGER-ROY, Michaëlle LEMOINE, Patrick CHÉRY, Jean Roland Cette lettre reste ouverte aux signatures de survivants et de témoins.

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Annexe 7.5.8: Juger Duvalier n’est pas une priorité du nouveau Président Michel Martelly

En Haïti, juger l'ex-dictateur Duvalier pour crimes contre l'humanité n'est pas la priorité du nouveau pouvoir | 14.04.11 | 14h43 • Le jugement de l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier (au pouvoir de 1971 à 1986) ne figure pas parmi les priorités du président élu d'Haïti, Michel Martelly. Le chanteur, qui hérite d'un pays dévasté par le séisme de janvier 2010 et en proie à une épidémie de choléra, veut d'abord s'attaquer au relogement des 700 000 sinistrés qui vivent encore dans des camps de fortune alors que la saison cyclonique approche. "Pour parvenir à la paix et à la prospérité durables, les Haïtiens doivent instaurer l'Etat de droit", soulignait, fin mars, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. "Il est capital que les autorités haïtiennes prennent toutes les mesures judiciaires pour régler cette affaire", ajoutait-il à propos du retour en Haïti de Jean-Claude Duvalier, "Bébé Doc", le 16 janvier. "Traduire Duvalier en justice, dans le cadre d'un procès équitable, permettrait de restaurer la confiance des Haïtiens en la justice et en l'Etat de droit", soutient l'organisation non gouvernementale (ONG) Human Rights Watch (HRW). "L'Etat d'Haïti est tenu, au regard du droit international, d'enquêter et, si nécessaire, d'engager des poursuites judiciaires concernant les graves violations des droits humains commises sous le régime de Duvalier", ajoute l'ONG dans un rapport diffusé jeudi 14 avril, "Haïti, un rendez-vous avec l'histoire". ACCOINTANCES Assigné à résidence, l'ancien "président à vie" est poursuivi pour corruption et détournement de fonds. Seize victimes de la dictature ont porté plainte pour crimes contre l'humanité. Les avocats de "Bébé Doc", dont le bâtonnier de Port-au-Prince, Me Gervais Charles, un proche collaborateur de M. Martelly, font valoir que des poursuites ne peuvent être engagées contre leur client en raison du délai de prescription de dix ans. Un argument non recevable, selon HRW, qui souligne qu'il n'y a pas de prescription pour les crimes contre l'humanité ni pour les "crimes continus" tels que les "disparitions forcées". L'ONG ne cache pas que les difficultés sont "énormes". Pour pallier la grande faiblesse du système judiciaire haïtien, elle réclame un soutien technique et financier de la communauté internationale. Le principal obstacle pourrait bien être "l'absence de volonté politique d'une nouvelle administration potentiellement moins engagée dans les poursuites contre Duvalier". Un euphémisme alors que le président élu ne fait pas mystère de ses accointances avec le camp duvaliériste. M. Martelly n'a pas exclu de prendre l'ancien dictateur comme conseiller s'il était blanchi par la justice. "C'est à la justice de travailler sur les reproches faits à l'ancien président Jean-Claude Duvalier", a-t-il répété. "Plus encore que le résultat, c'est le processus qui est important, il faut engager la lutte contre l'impunité", a confié au Monde Michèle Montas, l'une des premières victimes à avoir porté plainte. "Sans ce climat d'impunité, Jean (Jean Dominique, son mari journaliste assassiné en 2000) ne serait pas mort", ajoute-t-elle. "J'ai vu le retour de la peur", confie Michèle Montas. Des membres de sa famille ont tenté de la dissuader de porter plainte. "Notre génération n'a pas fait le travail de mémoire et lorsqu'on parle de Duvalier aux jeunes, c'est comme si on parlait d'une autre planète", déplore-t-elle. Jean-Michel Caroit Article paru dans l'édition du 15.04.11 CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.9: Protestation contre l’invitation de Duvalier à l’investiture du Président élu Michel Martelly

RÉSEAU NATIONAL DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS (RNDDH)

Communiqué de presse http://rnddh.org

Investiture du Président élu Le RNDDH est scandalisé par l’invitation lancée à l’ex-dictateur Jean-Claude DUVALIER http://rnddh.org/?s=investiture+martelly&lang=fr

Le RNDDH a appris avec indignation qu’une invitation a été lancée à l’ex-président dictateur JeanClaude DUVALIER en vue de prendre part, le 14 mai 2011, à la cérémonie d’intronisation du nouveau chef d’Etat, Monsieur Michel Joseph MARTELLY. Le RNDDH rappelle que l’ex-président à vie Jean-Claude DUVALIER, de retour au pays le 16 janvier 2011, est inculpé pour les nombreux crimes commis sous son règne et qui lui sont reprochés. Cependant, en raison de son refus de répondre aux convocations du Magistrat instructeur sous prétexte que son état de santé est précaire, des mesures restrictives de liberté ont été prises à son encontre Le RNDDH souligne que le Président élu Michel Joseph MARTELLY a, à plusieurs reprises, manifesté son attachement au régime totalitaire des DUVALIER marqué, pendant vingt neuf (29) ans, par des actes condamnables tels que tortures, viols, viols collectifs, assassinats, disparitions, exils forcés, traitements inhumains et dégradants, arrestations illégales, détentions arbitraires, exécutions sommaires, atteintes aux biens et à la liberté d’expression, vols, pillages. Conséquemment, l’inculpation de Jean Claude DUVALIER offre à la Nation Haïtienne une occasion unique de faire la lumière sur les nombreux crimes perpétrés sous son régime, à travers un procès juste et équitable vu que l’ex-dictateur ainsi que les tortionnaires du peuple haïtien ont toujours bénéficié d’une impunité officielle. En lançant une telle invitation à l’ex-Président Jean Claude DUVALIER, dans le mépris total des dizaines de milliers de victimes, le Président élu entend-il inaugurer son quinquennat sous le signe de l’oubli et de l’impunité ? Cette invitation, lancée à l’ex-Président à vie et dictateur Jean Claude DUVALIER représente une obstruction à la Justice, une gifle à la mémoire des dizaines de milliers de personnes tuées ou portées disparues. En aucune manière, cette invitation ne favorise l’indépendance du pouvoir judiciaire et est contraire à l’aboutissement de l’instruction criminelle ouverte contre l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER. L’image d’un pouvoir prônant le changement et s’affichant avec ceux-là même qui ont pillé les caisses de l’Etat et instauré la terreur comme mode de gestion du pouvoir politique, est inquiétante et invite à la vigilance. Port-au-Prince, le 11 mai 2011

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Annexe 7.5.10: Communiqué du Collectif relatif à la Déclaration du 17 mai 2011 de la CIDH

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)-Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

[email protected]

La Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) Donne suite à la requête du Collectif contre l’impunité Et enjoint l’État haïtien à enquêter et poursuivre Les crimes commis sous le régime de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier Ce 17 mai 2011, la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) a formellement donné suite à l’audience du 28 mars écoulé accordée au Collectif contre l’impunité réunissant des plaignants-es, contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts, et des organisations de défense des droits humains. L’Etat haïtien, qui était présent à cette audience par l’entremise du Ministère de la justice, avait exprimé sa volonté de juger les violations des droits humains en question et sollicité l’appui technique de la CIDH. La Commission est, avec la Cour interaméricaine des droits de l'Homme, l'un des deux organismes de protection des droits humains de l'Organisation des États américains (OEA). Créée en 1959, la CIDH vérifie l'accord du droit de chaque État avec la Convention américaine des droits de l'Homme, dite « Pacte de San Jose de Costa Rica » ; Convention à laquelle Haïti a adhéré le 14 septembre 1977. La Déclaration de la Commission28 rappelle à l’État haïtien son devoir d’enquêter sur les crimes commis sous le régime du Président à vie Jean-Claude Duvalier, de 1971 à 1986. La Déclaration souligne qu’Haïti a «l’obligation internationale d’enquêter sur les graves violations des droits humains commises sous le

régime de Jean-Claude Duvalier et, s’il y a lieu, d’en punir les auteurs ». Certains prétendent que les délais pour poursuivre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier sont échus en raison des règles sur la prescription prévues par la législation haïtienne. La Commission a cependant relevé que, selon une jurisprudence constante de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme, « sont inadmissibles les dispositions relatives à l’amnistie, [et] les dispositions relatives à la prescription […] qui prétendent empêcher les enquêtes et la sanction des responsables des violations graves des droits humains, comme la torture, les exécutions sommaires, extrajudiciaires ou arbitraires et les disparitions forcées ». Les interprétations de la Convention américaine des droits de l'Homme font autorité et s’appliquent à Haïti. La Commission a donc conclu que « [les] exécutions extrajudiciaires et les disparitions forcées commises sous le régime de Jean-Claude Duvalier constituent des crimes contre l’humanité, lesquels sont imprescriptibles et ne peuvent pas faire l’objet d’une amnistie».

28

Rf. Site Commission: http://www.cidh.org/pronunciamientocidhhaitimayo2011.fr.htm

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La Déclaration de la Commission renforce celle du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme qui, en la personne de Navi Pillay, avait relevé le 1er février 2011 que « Haïti a l’obligation d’enquêter sur ces violations graves des droits de l’Homme commises pendant le règne de M. Duvalier qui sont bien documentées. Haïti a également l’obligation de poursuivre ceux qui sont responsables ». En mars 2011, le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki Moon, avait également soutenu qu’il «est capital que les autorités haïtiennes prennent toutes les mesures juridiques et judiciaires pour régler cette affaire. Traduire en justice ceux qui se livrent à des crimes contre leur propre peuple, est un message clair aux Haïtiens que l’impunité n’est pas de mise dans le pays ». Pour le Collectif contre l’impunité, la Commission s’est exprimée très clairement sur le dossier de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier. Le Collectif estime qu’il est essentiel, pour les victimes et pour la société haïtienne toute entière, que lumière soit faite sur les crimes du régime Duvalier. Le Collectif réitère sa détermination à œuvrer, avec la collaboration d’autres organisations nationales et internationales, pour que justice soit rendue aux victimes et que les mécanismes de la dictature soient mis en lumière. Port-au-Prince, le 23 mai 2011 Pour le Collectif contre l’impunité Michèle Montas, pour les plaignants-es Danièle Magloire, pour les organisations de droits humains

Les organisations suivantes s’associent à cette déclaration du Collectif contre l’impunité et invitent le gouvernement du Président Michel Martelly à affecter les ressources humaines suffisantes à l’enquête et aux poursuites. Elles invitent les pays amis d’Haïti et la communauté internationale à appuyer la lutte contre l’impunité et la recherche de la justice quant aux violations des droits humains alléguées dans les plaintes déposées contre Jean-Claude Duvalier. 1. Avocats sans frontières Canada (ASFC) Geneviève Villeneuve-Patry [email protected] - Tel: +1.418.907.2607 #107, 2. Bureau des avocats internationaux (BAI) Mario Joseph [email protected] - Tel: + 509 37-01-98-79 3. Centre international pour la justice transitionnelle (CIJT) Marieke WIERDA, [email protected] - Tel: +1 917 637 3840 4. Institut pour la justice et la démocratie en Haïti (IJDH) Brian Concannon Jr., Esq. [email protected] - Tel : +1 541-263-0029 5. Human Rights Watch Reed Brody [email protected] - Tel: +32 49-86-25-7-86

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Annexe 7.5.11: Craintes du Collectif par rapport à l’instruction de 2011

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)-Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

[email protected]

L’impunité ne peut-être le destin d’Haïti Dès le retour en Haïti le 16 janvier 2011, de l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier, des Haïtiens et Haïtiennes se sont mobilisés pour dire NON à l’accommodation à l’inacceptable ; Pour rappeler que notre «pays qui s’était libéré d’un effroyable système d’esclavage, qui avait aidé les combattants de la liberté à travers les Amériques » ne pouvait jeter un tel héritage par-dessus bord et «offrir refuge à ceux-là même qui ont lentement exterminé […] le peuple haïtien, dans le marécage de Fort-Dimanche et partout dans le pays profond. […] Refuge et impunité à ceux qui avaient tranquillement détourné l’argent du pays, dépensant et gaspillant à tous vents, le confiant à la garde de banques étrangères29». Des organisations citoyennes de divers pays et des instances internationales se sont également élevées pour réclamer que l’ex dictateur réponde des crimes contre l’humanité commis sous son règne. Amnistie internationale rappelait que « Tout au long des quinze années pendant lesquelles Jean-Claude Duvalier a occupé le pouvoir (1971-1986), la torture systématique et les autres formes de mauvais traitements étaient monnaie courante en Haïti (17 janvier)». La Concertation pour Haïti (CPH) de Montréal soulignait que «La justice, l’une des bases fondamentales de la démocratie, doit être incluse dans le plan de reconstruction d’Haïti. Sa refondation passe inexorablement par la fin de l’impunité (20 janvier)». Le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme rappelait «qu’Haïti a l’obligation d’enquêter sur ces violations graves des droits de l’Homme commises pendant le règne de M. Duvalier qui sont bien documentées. Haïti a également l’obligation de poursuivre ceux qui sont responsables (1er février)». Le Secrétaire général de l’ONU soutenait qu’il «est capital que les autorités haïtiennes prennent toutes les mesures juridiques et judiciaires pour régler cette affaire. Traduire en justice ceux qui se livrent à des crimes contre leur propre peuple, est un message clair aux Haïtiens que l’impunité n’est pas de mise dans le pays (mars)». Suite aux démarches entreprises en mars par le Collectif contre l’impunité, la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) a produit le 17 mai une Déclaration qui rappelle à l’État haïtien son «obligation internationale d’enquêter sur les graves violations des droits humains commises sous le régime de Jean-Claude Duvalier et, s’il y a lieu, d’en punir les auteurs ». Les plaintes déposées à date, au Tribunal de première instance de Port-au-Prince, ont été considérées recevables et ont été traitées. Le cabinet d’instruction a procédé à des auditions, entre févier et juillet, et a transmis au début du mois de septembre le dossier au Commissaire du gouvernement (Procureur).

29

Prise de position de Jean-Claude Bajeux, directeur du CEDH, 17 janvier 2011, publié par AlterPresse. http://www.alterpresse.org/spip.php?article10532#.Uy_Qg4WXa6Y CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Ce dernier devra sortir une ordonnance. Au regard des déficiences et dysfonctionnements du système judicaire, le dossier a relativement bien avancé au niveau des premières étapes du processus. Cependant, le contexte actuel fait peser d’énormes risques quant à la tenue d’un procès digne de ce nom; un procès sérieux, équitable, mettant en lumière les mécanismes de la dictature duvaliériste. Aucune disposition n’a été prise pour bénéficier concrètement de l’appui technique de la CIDH; Aucune demande d’informations, de recherche de preuves n’a été produite par devant d’autres pays ou instances; Depuis l’ouverture du dossier, trois Commissaires du gouvernement se sont succédés; Des mesures sont adoptées en catimini afin de restaurer l’ex dictateur dans des prétendus droits (pension présidentielle, restitution de biens saisis), ce malgré les poursuites engagées par l’État à son encontre; poursuites introduites depuis 1987 et reprises en 2011. En choisissant, en dépit des difficultés connues, de porter plainte contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier, les parties prenantes du Collectif expriment et persistent dans leur refus de la négation du droit et donc de l’impunité qu’elle engendre. Juger Jean-Claude Duvalier peut être une opportunité de transformer notre système de justice, d’ouvrir la voie pour exiger que d’autres violateurs, quels qu’ils soient, rendent comptent à la nation. Port-au-Prince, le 22 septembre 2011 Pour le Collectif contre l’impunité Danièle Magloire

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Annexe 7.5.12: Agressions perpétrées par des duvaliéristes contre Amnesty international

http://lenouvelliste.com/ Amnesty International/Rapport Des partisans de Duvalier marquent le 22 septembre Le Nouvelliste | Publié le : 22 septembre 2011 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/97481.html

Ce 22 septembre 2011, 54 ans jour pour jour après l'élection de son père François Duvalier, des sympathisants de l'ancien président Jean-Claude Duvalier ont perturbé ce jeudi, à Port-au-Prince, la cérémonie de présentation d'un nouveau rapport d'Amnesty International sur l'ancien dictateur, rentré au pays le 16 janvier 2011 après 25 ans d'exil. Des représentants d'Amnesty international n'ont pas pu présenter ce jeudi 22 septembre leur dernier rapport sur les violations des droits humains commises sous le régime de l'ancien président haïtien JeanClaude Duvalier. Une dizaine de sympathisants de ce dernier, dont les avocats Mes Reynold Georges et Osner Févry, ont fait irruption à l'hôtel Le Plaza où allait avoir lieu la cérémonie et perturbé la présentation. Les partisans de l'ancien président ont crié à la démagogie et qualifient les représentants de l'organisme international de défense des droits humains d' « imposteurs ». « Nous n'avons pas besoin de vous, nous allons régler nos affaires seuls », a tempêté incessamment Me Reynold Georges. Un comportement que les représentants de l'organisme de défense des droits humains considèrent comme une « honte ». Alors qu'une dizaine de proches de l'ancien président discutaient avec les représentants d'Amnesty international, un autre groupe, banderoles en main, manifestait devant l'hôtel pour souhaiter « bonne fête » à Jean-Claude Duvalier. Selon ce dernier rapport, Amnesty international demande au gouvernement haïtien de traduire en justice l'ex-dictateur pour violation des droits de l'homme. « Il existe suffisamment d'éléments permettant de poursuivre en justice Jean-Claude Duvalier », estime Javier Zúñiga, conseiller spécial d'Amnesty International. Il appuie son opinion sur des cas de détention arbitraire, tortures, morts en détention, des homicides et des disparitions enregistrés sous le régime de l'ancien président qui a dirigé le pays de 1971 à 1986. Selon M. Zúñiga, l'ouverture d'une enquête après le retour de Jean-Claude Duvalier est une « occasion historique de commencer la construction d'un Etat haïtien qui défend les droits humains ». Pour les sympathisants de Jean-Claude Duvalier, c'est tout à fait le contraire. Ils estiment que toutes les démarches menées par Amnesty International demeureront vaines. Depuis son retour au pays, diverses plaintes ont été déposées contre l'ancien président à vie. Jean-Claude Duvalier a même été inculpé par les autorités haïtiennes pour détournement, vol de fonds publics et crime contre l'humanité. Amnesty international, de son côté, fournit à la justice haïtienne des éléments établissant l'atteinte aux droits humains entre 1971 et 1986. Dans un premier rapport, Amnesty International avait donc fait état des témoignages de détentions arbitraires, de morts en détention, d'homicides et de disparitions qui ont eu lieu sous la présidence de Duvalier. «Le gouvernement haïtien actuel, dirigé par le président Michel Martelly, est tenu, aux termes du droit international, de traduire en justice les responsables présumés des crimes contre l'humanité commis pendant les années Duvalier », exhorte le dernier rapport. Valéry Daudier CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.13: Dénonciation des agressions des duvaliéristes contre Amnesty international Le RNDDH condamne les agressions perpétrées contre des Représentants de Amnesty International http://rnddh.org/content/uploads/2012/05/Agressions-sur-Amnesty-International.pdf Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) est profondément consterné par le comportement scandaleux des partisans et défenseurs de l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER qui ont brutalement interrompu une conférence de presse donnée par l’organisation Amnesty International à l’occasion de la présentation de son dernier rapport sur la dictature de Jean Claude DUVALIER. En effet, le 22 septembre 2011, à la salle Toussaint Louverture II de l’Hôtel le Plaza sis à la rue Capois, Champ de Mars, Amnesty International s’apprêtait à présenter aux communautés nationale et internationale, son dernier rapport intitulé «On ne peut pas tuer la vérité. Le Dossier de Jean Claude Duvalier», quand plusieurs individus, sous l’instigation des défenseurs de l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER se sont brutalement introduits dans la salle. Ils ont scandé des propos hostiles à Amnesty International et ont proféré des menaces à l’encontre des représentants de l’organisation, perturbant ainsi une activité réalisée dans un lieu que les organisateurs avaient le droit d’utiliser. Le RNDDH tient à souligner à l’attention de tous, que Amnesty International a élaboré un rapport de (34) pages, bien documenté, décrivant le contexte dans lequel l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER a pris le pouvoir, relatant la mise en place des appareils étatiques de répression contre les opposants au pouvoir dont Les Volontaires de la Sécurité Nationale (VSN) communément appelés Tontons Macoutes, racontant les conditions de détention et les exécutions extrajudiciaires, les tortures et autres formes de traitement cruel, inhumain et dégradant dont étaient victimes les opposants au pouvoir. Les faits relatés dans le rapport sont illustrés par des cas emblématiques et des témoignages poignants d’anciens prisonniers. Ce rapport présente aussi une analyse sur les crimes contre l’humanité commis par le régime de Jean Claude DUVALIER et sur leur imprescriptibilité au regard du droit international. En effet, en écho à une étude récemment présentée par le RNDDH et la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH), ce rapport démontre que les crimes commis sous le gouvernement de Jean Claude DUVALIER constituent des crimes contre l’humanité qui conséquemment, sont imprescriptibles. Il demeure donc une obligation pour l’Etat haïtien de procéder au jugement de Jean Claude DUVALIER car tel que mentionné dans le dernier rapport de Amnesty International, « les différentes exactions commises sous le régime de l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER ont été perpétrées par des Hommes de mains placés sous ses ordres et non par des entités abstraites». L’interruption forcée de la présentation du rapport de Amnesty International par les partisans et défenseurs de l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER constitue une atteinte aux libertés d’expression et d’association consacrées par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, en ses articles 19 et 201 qui stipulent respectivement : «Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.» «Toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques. » Le RNDDH présente ses sympathies à Amnesty International tout en lui assurant son indéfectible support dans sa lutte pour porter les autorités haïtiennes à combattre l’impunité en général et à juger l’ex-dictateur Jean Claude DUVALIER en particulier. Port-au-Prince, le 26 septembre 2011. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.14: Le Président Martelly pour la réconciliation sans justice

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Martelly rencontre Avril, Aristide et Duvalier Le Nouvelliste | Publié le : 12 octobre 2011 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/98234.html

Le président de la République Michel Joseph Martelly a pris son bâton de pèlerin. Depuis mardi il a rencontré successivement en leur résidence respective les anciens chefs d'État haïtiens Prosper Avril, Jean-Bertrand Aristide et Jean-Claude Duvalier pour discuter des défis politiques et économiques auxquels fait face le pays. Partout le président prêche l'urgence de l'unité nationale. Tous ses interlocuteurs en sont eux aussi convaincus. 24 heures après avoir initié sa démarche de dialogue et de réconciliation avec les anciens dirigeants haïtiens par un entretien avec l'ancien général Prosper Avril (1988-1990), le chef de l'État haïtien, Michel Joseph Martelly, s'est entretenu ce mercredi avec les anciens présidents, Jean-Bertrand Aristide et JeanClaude Duvalier, en leur résidence respective à Tabarre et à Thomassin. Rien n'a filtré de la rencontre tenue mardi en la résidence de l'ex-général président Prosper Avril, selon des sources concordantes. Par contre, selon le bureau de communication de la présidence, cette démarche du chef de l'Etat vise à encourager le dialogue et l'union entre tous les acteurs et anciens leaders du pays. Au cours de sa rencontre avec le leader emblématique du Parti Fanmi Lavalas qui a duré près de deux heures, Martelly s'est fait accompagner d'une dizaine de proches ainsi que de Rodolphe Joazile et de Sorel Jacinthe, respectivement présidents du Sénat et de la Chambre des députés, qui en ont profité pour féliciter le président Martelly de son initiative. Pour sa part, l'ancien président Jean-Bertrand Aristide avait à ses côtés son épouse Mildred Aristide, l'homme d'Affaire Jean-Marie Vorbe, le Dr Maryse Narcisse - importante personnalité de l'organisation politique Fanmi Lavalas - et un ancien membre de son cabinet particulier, Gladys Péan. C'est le Dr Narcisse qui s'est occupée au cours de la rencontre des aspects relatifs aux questions politiques, avons nous appris. Cette visite est historique et les deux anciens présidents y voient une démarche vers le renforcement des liens entre les citoyens. Ce fut la même réaction, mardi, chez l'ancien président Prosper Avril, lit-on dans un communiqué acheminé au journal par la présidence. Ces visites s'effectuent sous le signe de la paix, du respect, du dialogue, de la fraternité entre les fils de la nation. Une attitude qui, selon le président Martelly, conduira le pays vers le changement réel.

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Dans ses interventions, le chef de l'État a rappelé que la seule façon de résoudre les problèmes auxquels le pays fait face aujourd'hui est de réconcilier les Haïtiens avec eux-mêmes, inviter tous les leaders, nouveaux et anciens, à se pardonner, à se comprendre et à oublier les querelles du passé pour faciliter le développement. «Si les Haïtiens ne peuvent pas s'entendre sur tous les points, ils doivent au moins s'entendre quand il s'agit des intérêts et de l'avenir d'Haïti », a martelé le président Martelly, qui invite tous les fils du pays à constituer une chaîne de solidarité en faveur du développement. De son côté, l'ex-président, Jean-Claude Duvalier croit que c'est une initiative noble du président Martelly. Il en a profité pour lancer un appel solennel à tous les leaders des partis politiques pour le progrès du pays. «Ce projet que vous préconisez est à la fois noble et ambitieux. C'est un préalable au développement économique et à la reconstruction d'Haïti. Je profite de l'opportunité pour lancer un appel solennel à tous les leaders politiques de la vie nationale pour qu'ils s'y mettent de côté toutes leurs rancunes et qu'ils comprennent l'impérieuse nécessité de se mettre ensemble en vue de faire face aux nombreux défis. Monsieur le président, vous pouvez être rassuré de mon soutien pour la pleine réussite de cette entreprise», a affirmé M. Duvalier qui intervenait chez lui à Thomassin. Soulignons que tous les anciens chefs ont promis leur plein appui au président Martelly pour la réussite de son quinquennat. Amos Cincir [email protected]

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Annexe 7.5.15: Duvalier peut être poursuivi selon la législation haïtienne et le droit international

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org

Haïti-Duvalier : Onze mois depuis que des organisations nationales et internationales réclament le jugement de l’ex-dictateur http://www.alterpresse.org/spip.php?article12071#.U0HS21eXa6Y

jeudi 15 décembre 2011 Communiqué du Collectif contre l’impunité Soumis à AlterPresse le 14 décembre 2011

Cela fait 11 mois depuis de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier est revenu en Haïti après s’être exilé pendant 25 ans en France. 11 mois depuis que des plaignants-es se sont présentés par-devant les tribunaux pour exiger le jugement de l’ex Président à vie pour des crimes contre l’humanité commis sous son gouvernement; pour réclamer que justice soit rendue aux milliers de personnes de toutes conditions que le régime a emprisonnées, torturées, exécutées, fait disparaitre, déportées. 11 mois depuis que des organisations nationales et internationales exhortent l’État haïtien à se plier à ses obligations en matière de respect des droits humains. Le Collectif contre l’impunité a symboliquement choisi la période de commémoration de la Déclaration universelle des droits humains (10 décembre) pour réaffirmer sa détermination à poursuivre les démarches visant au jugement de Jean-Claude Duvalier pour crimes contre l’humanité. En tant qu’Haïtiens et Haïtiennes, nous sommes au cœur même de l’humanité. En nous libérant de l’esclavage en 1804, nous avons proclamé notre humanité pleine et entière. En étant, en 1945, parmi les 19 pays signataire de la charte de Nuremberg établissant le tribunal pour juger les crimes du nazisme, nous avons à nouveau attesté de notre appartenance à l’humanité. En 1946, en étant membre fondateur des Nations Unies, nous avons contribué à codifier de manière irrévocable les droits humains. En 1986, en mettant fin à la féroce dictature des Duvalier, nous avons réitéré notre volonté de construire un État de droit démocratique, donc soucieux du respect de l’intégrité des personnes. Haïti a donc toute légitimité pour poser la question des crimes contre l’humanité. Le Collectif a expliqué le sens de sa démarche, une quête de justice et donc de vérité pour contribuer à ce que la nation confronte son histoire plutôt que de la subir ou de feindre de l’ignorer. Réclamer que la justice se prononce sur des crimes qui ont si douloureusement marqués notre vie de peuple, inviter nos compatriotes à réfléchir sur les mécanismes de la dictature des Duvalier, cela ne s’apparente en rien à une stérile recherche de vengeance.

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Depuis que le Collectif s’est lancé dans ce combat spécifique contre l’impunité et le révisionnisme, d’autres voix, d’ici et d’ailleurs, se sont solidairement mêlées à la nôtre. Ainsi, avec le concours de juristes internationaux30 il a été élaboré un Amicus, c'est-à-dire un commentaire juridique destiné à aider les autorités judiciaires. Le document indique comment le cas de Jean-Claude Duvalier peut être traité et en quoi les allégations concernant le caractère soit disant illégal d’une inculpation de l’ex dictateur ne sont pas fondées, tant au regard de la législation haïtienne que du droit international obligeant Haïti. L’Amicus, démontre que: -

le droit international s’applique en Haïti ;

-

il n’y a pas de prescription, ni d’amnistie pour les crimes contre l’humanité ;

-

des crimes contre l’humanité ont été allégués sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier ;

-

des crimes dans le droit haïtien en vigueur peuvent constituer des crimes contre l’humanité ;

-

Jean-Claude Duvalier est responsable des actes délictueux commis par l’État haïtien ; et

-

Jean-Claude Duvalier peut être poursuivi.

Le contexte national continue cependant à provoquer de graves inquiétudes et porte notamment à s’interroger sur la volonté politique de l’État à tout mettre en œuvre pour que la justice puisse effectivement suivre son cours. Réclamer que Jean-Claude Duvalier rende compte des actes de ses 15 ans de pouvoir sans partage est une exigence éthique. Port-au-Prince, le 14 décembre 2011 Pour le Collectif Danièle Magloire

Patricia Sellers, ex cheffe adjointe de la Section des avis juridiques, Bureau du Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et conseillère juridique spéciale à la Division Genre et Droits de la Femme de Haut Commissaire des Nations Unies pour les Droits de l’Homme, Open Society Justice Initiative et Avocats sans frontière Canada (ASFC). 30

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Annexe 7.5.16: Duvalier convié par le Président Martelly à la commémoration du séisme de janvier 2010

http://lenouvelliste.com/ Martelly, Duvalier et Avril sur un même podium Le Nouvelliste | Publié le : 13 janvier 2012 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/101628.html

Le président Martelly a rendu hommage jeudi aux victimes du séisme du 12 janvier lors d'une cérémonie tenue à l'endroit où des dizaines de milliers de personnes ont été enterrées dans une fosse commune, l'ex-président à vie Jean Claude Duvalier et l'ancien général-président Prosper Avril ont assisté à la cérémonie sur le même podium. Les trois hommes se sont longuement salués quelques minutes avant l'ouverture de la cérémonie sous les applaudissements des membres de l'assistance, a constaté Haiti Press Network. Duvalier accompagné de Véronique Roy sa compagne était assis à côté de Prosper Avril. Les deux anciens présidents ont eu des conversations tout au cours de la cérémonie, mais n'ont pas fait de déclaration publique. Jean-Claude Duvalier revenu au pays, il y a un an environ et qui fait l'objet de poursuites judiciaires, a été applaudi à sa sortie par une foule alors qu'il se trouvait au volant de sa voiture dans un cortège de ses anciens collaborateurs et de supporters.

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Annexe 7.5.17: Un an après l’introduction des plaintes Duvalier échappe toujours à la justice

http://lenouvelliste.com Jean-Claude Duvalier n'a toujours pas été déféré à la justice Le Nouvelliste | Publié le : 17 janvier 2012

http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/101711/Jean-Claude-Duvalier-na-toujours-pas-ete-defere-a-la-justice.html

Une année après l'ouverture par les autorités d'une enquête sur les crimes contre l'humanité commis sous son régime, « Bébé Doc », l'ancien président d'Haïti Jean-Claude Duvalier, échappe toujours à la justice, a déclaré Amnesty International le lundi 16 janvier 2012. Jean-Claude Duvalier est retourné en Haïti en janvier 2011, après 25 ans d'exil en France. Depuis lors, il fait l'objet d'une enquête pour des violations graves des droits humains - torture, disparitions forcées et exécutions extrajudiciaires notamment - commises alors qu'il était au pouvoir de 1971 à 1986. «Les crimes contre l'humanité perpétrés sous le régime de Jean-Claude Duvalier ont bénéficié à ce jour de l'impunité la plus totale », a déclaré Javier Zúñiga, conseiller spécial d'Amnesty International. « Les autorités ne se sont toujours pas mobilisées pour examiner un pan de l'histoire du pays où une génération d'Haïtiens a subi des tortures, des disparitions forcées, des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires et d'autres violations graves des droits humains. » Les instances régionales et internationales spécialisées dans les droits humains telles que la Commission interaméricaine des droits de l'homme et le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme ont réitéré l'obligation qu'avait Haïti d'enquêter sur ces crimes et de déférer à la justice les personnes soupçonnées d'en être responsables. Le ministre de la Justice s'est engagé récemment à mettre fin à l'impunité pour les crimes commis depuis 2 000, ce qui ne couvre pas les crimes commis sous le régime Duvalier. Depuis que le président Michel Martelly est entré en fonction en mai 2011, les multiples changements au poste de commissaire du gouvernement, dont les décisions sur la progression de l'enquête sur Jean-Claude Duvalier sont déterminantes, ont considérablement ralenti les investigations. À la fin du mois de septembre 2011, le chef du parquet, Félix Léger, avait indiqué à Amnesty International que son bureau s'était vu confier en juillet le dossier de l'enquête sur les crimes contre l'humanité commis dans les années Duvalier et qu'un groupe spécial allait être créé pour examiner les résultats des investigations et décider des prochaines étapes à suivre. Félix Léger a été remplacé au poste de commissaire du gouvernement en octobre et depuis lors cette fonction a été remplie par trois personnes différentes. René Cénatus, le plus récent chef du parquet est entré en fonction le 4 janvier 2012. « Il semblerait que les changements répétés à ce poste aient eu pour objectif de ralentir l'enquête », a déclaré Javier Zúñiga. « Il ne fait plus de doute que l'indépendance de la justice en Haïti est devenue un mirage. » Les plus hautes autorités haïtiennes ont fait preuve jusqu'à maintenant de beaucoup d'indulgence à l'égard de JeanClaude Duvalier et d'un grand mépris pour les victimes de violations des droits humains, qui attendent toujours justice et réparation. Alors qu'il est censé être assigné à résidence pendant la durée de l'enquête, Jean-Claude Duvalier continue de participer à des événements publics en compagnie de ses avocats et de ses sympathisants. En octobre, sous le couvert de la réconciliation nationale, le président Martelly a effectué au domicile de l'ancien président une visite dont les médias se sont amplement fait l'écho. Jean-Claude Duvalier a également pris part à une cérémonie officielle ce mois-ci pour célébrer le deuxième anniversaire du séisme qui a ravagé Haïti. « Le gouvernement haïtien doit mettre fin à ce faux-semblant de justice et adopter une position claire sur l'affaire introduite contre Jean-Claude Duvalier, a déclaré Javier Zúñiga. Il faut que les autorités judiciaires haïtiennes reçoivent - y compris des Nations unies - toutes les ressources et le soutien dont elles ont besoin pour conclure l'enquête et juger les responsables présumés dans le respect des normes internationales. » En septembre 2011, dans un rapport intitulé « On ne peut pas tuer la vérité ». Le dossier Jean-Claude Duvalier, Amnesty International a donné un nouvel éclairage aux recherches menées précédemment par l'organisation sur les atteintes aux droits humains commises en Haïti dans les années 1970 et 1980. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.18: Protestation contre la présence de Duvalier aux cérémonies officielles du 12 janvier 2012

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org/ Documents Haïti-Duvalier : Des organisations et personnalités expriment leurs inquiétudes et indignation au président Martelly http://www.alterpresse.org/spip.php?article12262#.UzD73IWXa6Y

lundi 23 janvier 2012

Lettre ouverte, en date du 23 janvier 2012, de plusieurs organisations et personnalités au président Michel Martelly sur le dossier de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier. Document soumis à AlterPresse le 23 janvier 2012. Monsieur le Président, Nous, signataires de cette lettre ouverte, estimons de toute première importance qu’au nom de la vérité et de la justice, la nation soit informée des suites de la mise en mouvement de l’action publique contre l’exdictateur Jean-Claude Duvalier, revenu après 25 ans, dans le pays qu’il a dévasté, après avoir été contraint par une révolte populaire de se réfugier en France. Quelques jours seulement après ce retour, plusieurs plaintes ont été déposées par des victimes du régime dictatorial. Le parquet du Tribunal de première instance de Port-au-Prince s’est empressé de les acheminer au Cabinet d’instruction, sans tenter, comme la loi lui en fait obligation, de mener des enquêtes préliminaires, d’identifier les auteurs, co-auteurs et complices de tous les actes répréhensibles indexés. Au Cabinet d’instruction, hormis l’audition des plaignants-es, aucune enquête approfondie n’a eu lieu. Nous voulons rappeler qu’il est de la responsabilité de l’État de prendre toutes les dispositions pour établir les faits relatifs aux crimes commis sous la responsabilité de l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier qui s’était proclamé chef suprême et effectif des Forces Armées d’Haïti et des Volontaires de la Sécurité Nationale (alias les Tontons Macoutes) et qui régnait sans partage. Pour cela, il est indispensable de faire preuve de volonté ferme et absolue, d’abord en donnant au Magistrat instructeur les moyens humains et matériels pour mener une enquête approfondie et, ensuite, en faisant appel aux expertises offertes au gouvernement et à la justice haïtienne par des organismes faisant autorité, notamment la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH). Nous rappelons que les crimes contre l’humanité se définissent tant par leur nombre et leur nature systématique que par leur brutalité et l’inhumanité de leur exécution. Les crimes commis sous le régime de Jean-Claude Duvalier répondent bien à cette définition, conformément à la pratique du Droit international auquel Haïti est soumis. Contrairement à ce que prétendent les partisans de l’ex- dictateur, ces infractions systématiques et graves sont imprescriptibles et les tribunaux haïtiens ont compétence pour les juger. Nous constatons avec inquiétude et indignation, qu’après une année, Jean-Claude Duvalier, n’a guère été inquiété, alors même qu’il est l’objet de poursuites de la par le l’Etat et de plaintes introduites par des victimes. Les co-auteurs et complices de ces crimes perpétrés ne sont nullement inquiétés. Le dossier n’a pas avancé de manière satisfaisante au regard de la nécessité de rendre justice. Nous nous insurgeons de la manière la plus formelle contre cette tendance à la banalisation de la dictature, contre ce mépris des revendications légitimes de justice des populations qui ont souffert et continue de souffrir en silence, face à l’arrogance et aux menaces de ceux pour qui la loi n’est que chimère. Qui a ordonné de remettre à Jean-Claude Duvalier les biens qu’il a acquis au prix du sang des Haïtiens et des Haïtiennes ? Comment accepter que lui soit payée une pension comme s’il avait été un bon président ayant servi la patrie avec honneur et probité ? CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Monsieur le Président, les instances étatiques ne peuvent plus continuer à jouer au Ponce Pilate. Le rôle de l’Exécutif et du Parlement c’est justement de veiller à ce que les moyens adéquats soient mis à la disposition de la justice afin qu’elle puisse mener à bien sa mission fondamentale : Que la vérité soit faite. La réconciliation de la nation avec elle-même, tant attendue et désirée, passe nécessairement aussi par la vérité sur cette tranche de notre histoire qui a si durablement marqué la société. Nous, fils et filles d’Haïti, protestons contre tous ces affronts à répétition subis par les victimes directes et indirectes du régime des Duvalier. Après la provocation du « parrainage de promotion de l’École de droit et des sciences économiques des Gonaïves », il est intolérable de voir Jean-Claude Duvalier à Titanyen aux côtés du Président de la République. Monsieur le Président, cette présence de Jean-Claude Duvalier à Titanyen, peut-être assimilée à un acte de profanation et de complicité. C’est une insulte inqualifiable à la Nation et un affront que nous ne pouvons accepter. Peut-on oublier, qu’à l’instar de Fort Dimanche, Titanyen constitue le tombeau de milliers d’Haïtiens et d’Haïtiennes, torturés par les sbires des Duvalier père et fils, déshumanisés et dont les cadavres ont été livrés en pâture aux chiens ? Monsieur le Président, au cours de votre campagne électorale et dans le programme du gouvernement que vous dirigez avec le Premier Ministre, Monsieur Gary Conille, vous avez promis de vous consacrer à l’instauration de l’État de droit dans notre pays meurtri. L’impunité et l’État de droit ne peuvent en aucun cas coexister. Il ne peut y avoir de réconciliation sans justice. Pour respecter les promesses faites, il faut, conformément à vos prérogatives constitutionnelles, engager les citoyens et citoyennes à résolument tourner dos aux pratiques anciennes pour privilégier l’application de la loi, sans parti pris, sans exception aucune. Jean-Claude Duvalier doit être jugé pour les crimes contre l’humanité dont il s’est rendu coupable et pour les détournements de fonds scandaleux, ainsi reconnus, par un tribunal de Suisse. C’est le message tant attendu, sans équivoque, de la volonté de mettre fin à l’impunité, condition sine qua non de la refondation/reconstruction nationale. Recevez, Monsieur le Président, nos salutations patriotiques. Organisations et personnalités signataires 1. Collectif contre l’impunité (structure regroupant des plaignants-es et des organisations de droits humains) 2. Centre Œcuménique des droits humains (CEDH) 3. Centre Pétion Bolivar 4. Centre de recherches et de formation économique et sociale pour le développement (CRESFED) 5. Commission épiscopale Justice et paix (JILAP) 6. Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés (GARR) 7. Groupe de recherche et d’intervention en éducation alternative (GRIEAL) 8. Kay Fanm (Maison des femmes) 9. Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED) 10. Réseau national de défense des droits humains (RNDDH) 11. Plateforme des organisations haïtiennes de droits humains (POHDH) 12. Alix Ambroise 13. Carlo Cantave 14. Jean-Max Calvin 15. Paul A. Corbanese 16. Eddy Chapoteau 17. Bernac Célestin 18. George Jean-Charles 19. Julien Jumelle 20. Patrick Lemoine 21. Michèle Montas 22. Raoul Peck 23. Elder F. Thébaud Pour authentification Sylvie W. Bajeux Directrice du CEDH Pierre Espérance Directeur exécutif du RNDDH CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.19: Le Président Martelly défavorable à un procès contre Jean-Claude Duvalier

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Martelly prêt à pardonner à Duvalier Le Nouvelliste | Publié le : 26 janvier 2012 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/102039/Martelly-pret-a-pardonner-a-Duvalier.html

Le chef de l'Etat, Michel Joseph Martelly, a déclaré ce jeudi être disposé à passer l'éponge sur le passé très controversé de l'ancien président Jean-Claude Duvalier. Participant cette semaine au Forum économique mondial de Davos en Suisse, le président Martelly s'est dit, dans une interview accordée à l'Associated Press, davantage intéressé à renforcer la réconciliation dans le pays que de poursuivre l'ancien président à vie pour les plaintes de crimes contre l'humanité et de corruption portées contre lui. Martelly a avoué qu'il n'est pas enthousiasmé par la tenue d'un éventuel procès de « Baby Doc », selon l'agence de presse. De l'avis du président haïtien, un tel procès pourrait être « explosif » pour le pays. Toutefois, il promet de respecter la décision du juge si Duvalier aurait dans les jours à venir à comparaître devant la justice. « Ma vision est de créer une situation où nous rallions tout le monde, d'établir la paix, de pardonner aux gens, sans pour autant oublier le passé - car nous devons en tirer des leçons - mais de penser surtout à l'avenir », a-t-il dit. « On ne peut pas oublier les victimes de cette époque, mais nous avons besoin, je le crois, de cette réconciliation », a-t-il poursuivi. Seul « un consensus entre tous les leaders, tous les partis politiques » pourrait rendre effective une pareille réconciliation, reconnaît le chef de l'Etat haïtien. Retourné dans le pays en janvier 2011 après 25 ans d'exil en France, Jean-Claude Duvalier fait depuis un an l'objet d'une enquête pour des violations graves des droits humains commises alors qu'il était au pouvoir de 1971 à 1986. Le juge d'instruction chargé de son dossier, Jean Carvès, a annoncé la présentation de son ordonnance de clôture pour bientôt. Cette annonce a été faite au Palais de justice de Port-au-Prince, la semaine écoulée, lors de l'audition de l'ancien chef d'Etat, assigné à résidence depuis mars 2011, pour avoir dépassé ses limites de déplacement. L'un des reproches du magistrat fut la participation de Duvalier à la cérémonie officielle de commémoration du séisme de 2010, le 12 janvier dernier à Titanyen alors qu'il est sous le coup d'une assignation à résidence qui lui interdit de dépasser les limites de la capitale sans une autorisation préalable des autorités judiciaires. « Les plus hautes autorités haïtiennes ont fait preuve jusqu'à maintenant de beaucoup d'indulgence à l'égard de Jean-Claude Duvalier et d'un grand mépris pour les victimes de violations des droits humains, qui attendent toujours justice et réparation », avait critiqué Amnesty International dans une récent communiqué. De même, le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), réagissant sur le dossier, avait dénoncé le comportement laxiste du pouvoir en place qui, selon lui, ne manifeste aucune volonté de rendre justice aux victimes du régime dictatorial des Duvalier, alors que la lutte contre l'impunité fut le cheval de bataille de Michel Martelly lors de sa campagne électorale. Carl-Henry CADET [email protected]

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Annexe 7.5.20: Le Président Martelly nuance sa position sur l’ex dictateur

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« Pas de pardon pour Duvalier», affirme Martelly Le Nouvelliste | Publié le : 27 janvier 2012 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/102089/Pas-de-pardon-pour-Duvalier-affirme-Martelly.html

Le président, Michel Martelly s'est éloigné vendredi de sa proposition, énoncée la veille lors d'une entrevue, qu'il serait ouvert à l'idée de pardonner l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier. Il a précisé avoir simplement dit vouloir mettre fin au conflit interne qui a longtemps frappé son pays, selon Associated Press. M. Martelly, qui s'exprimait dans le cadre d'une entrevue accordée à une station de radio dublinoise, dit n'avoir « jamais proposé de pardonner» au dictateur connu sous le nom de «Bébé Doc», qui est sous le coup d'une enquête judiciaire pour les crimes commis pendant son règne brutal de 15 ans, au cours des années 1970 et 1980. Le juge doit décider prochainement si Duvalier sera poursuivi pour corruption et crimes reliés aux droits de la personne. Un jour plus tôt, l'Associated Press avait reçu le président Martelly en entrevue en marge du Forum économique mondial à Davos, en Suisse, et l'avait questionné à propos de l'ex-dictateur et la décision à venir. Le président avait suggéré qu'il tenait peu à un procès, disant que la réconciliation pour sa nation était plus importante que le fait de punir Duvalier. M. Martelly avait également déclaré que toute décision concernant un possible pardon ne surviendrait qu'en vertu «d'un consensus parmi tous les leaders, tous les partis politiques». Dans l'entrevue de vendredi avec la station irlandaise Newstalk FM, M. Martelly s'est fait demander pourquoi il pardonnerait à Duvalier, et le président a dit avoir été mal compris par l'Associated Press. Il affirme maintenant que la réconciliation ne concernait pas Duvalier, ajoutant que seul le système judiciaire haïtien peut trancher. Selon le président haïtien, des années de luttes souvent violentes entre les diverses factions de la société haïtienne ont laissé le pays en lambeaux et ce conflit doit prendre fin pour que des progrès aient lieu en Haïti. Duvalier a posé un problème pour Haïti depuis son retour surprise en 2011 après 25 ans d'exil. Le pays possède un système judiciaire faible, avec un historique peu glorieux en termes de traitement des crimes mêmes mineurs, et le gouvernement est préoccupé par la reconstruction à la suite du terrible séisme de janvier 2010. Une majorité d'Haïtiens sont désormais trop jeunes pour se soucier des crimes commis sous Duvalier, mais plusieurs se souviennent des prisons gouvernementales cauchemardesques et des milices spéciales violentes, connues sous le nom de Tonton Macoute, qui ont tué et torturé les opposants politiques avec impunité. Les groupes de défense des droits de la personne ont reproché au gouvernement haïtien d'avoir semblé reporter une décision dans l'affaire Duvalier. Plusieurs Haïtiens et opposants de M. Martelly plus âgés se sont montrés alarmés par le fait que son gouvernement embauche des gens qui avaient travaillé au sein de l'administration de l'ancien dictateur. Les avocats de Duvalier ont argué qu'il y a prescription en ce qui concerne les crimes allégués contre l'ancien politicien, et que leur client ne peut être accusé de crimes supposément commis alors qu'il était au pouvoir. Trenton Daniel Associated Press Port-au-Prince

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Annexe 7.5.21: Analyse de l’ordonnance du 27 janvier 2012 du juge d’instruction Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) Dossier Jean Claude Duvalier : une Ordonnance de la honte a été rendue par le Juge d’Instruction 3 février 2012 http://rnddh.org/dossier-jean-claude-duvalier-une-ordonnance-de-la-honte-a-%C3%A9t%C3%A9-rendue-par-lejuge-d%E2%80%99instruction-fev-2012/

I. INTRODUCTION Le 16 janvier 2011, l’ex-président à vie, Jean Claude DUVALIER est rentré en Haïti après vingt-cinq (25) années d’exil. Au lendemain de son retour, nombre de victimes et de rescapés du régime dictatorial instauré de 1971 à 1986, ont porté plainte contre l'ancien dictateur. Les Chefs d'accusation mis à charge à l'encontre de ce dernier sont entre autres : exécutions sommaires, disparitions forcées, assassinats, meurtres, bastonnades, harcèlements, persécutions politiques, viols, vols, arrestations arbitraires, tortures, emprisonnements, déportations et enlèvements. Dans la volonté d'accompagner les victimes, de lutter contre l'impunité et de contribuer à la manifestation de la vérité, des organisations de droits Humains ont remis aux autorités Haïtiennes des documents retraçant la période de la Présidence à vie de Jean Claude DUVALIER. Le Parquet de Port-au-Prince a transféré le dossier au décanat du Tribunal de Première Instance de ladite juridiction pour enquête judiciaire. Choix a été fait du Juge Carvès JEAN pour l’instruction du dossier. Dans le cadre de son instruction, le Magistrat a choisi d’auditionner certaines victimes et de ne pas inviter d’autres. Toutefois, l’inculpé principal du dossier, Jean Claude DUVALIER a reçu dans le cadre de cette enquête plusieurs invitations. A chaque fois, avec une nonchalance inqualifiable et un non respect dédaigneux de la justice du pays, l’ex-dictateur affirme ne pas pouvoir se déplacer pour des raisons de santé. Parallèlement, invité un peu partout dans le pays, l’ex-dictateur qui se présente dans ses discours comme une victime obligée par le passé de prendre l’exil, participe à toutes les activités mondaines et aux cérémonies officielles. Mais, comme une horloge et avec une lâcheté sans pareil, il tombe toujours malade dès qu’il s’agit de se rendre au Cabinet d’instruction pour répondre des faits qui lui sont reprochés. Face à la fureur des victimes du régime de Jean Claude DUVALIER vis-à-vis du laxisme des autorités à son égard, le Juge d’Instruction Carvès JEAN prend une mesure restrictive de liberté, assignant à résidence l’ex-dictateur. Cette mesure ne sera jamais respectée. Le 27 janvier 2012, après une année de tergiversations, le Juge d’Instruction Carvès JEAN, rend son ordonnance. Qu’en est-il ? II. ANALYSE DE L’ORDONNANCE Le Juge d’Instruction du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, Carvès JEAN, dans le cadre de l’enquête ouverte contre Jean Claude DUVALIER, Michèle B. DUVALIER, Simone O. DUVALIER, Prosper AVRIL, Samuel JEREMIE, Jean SAMBOUR, Auguste DOUYON, Jean Robert ESTIME, Ronald BENNETT ; Frantz MERCERON ; Edouard BERROUET ; Colonel Franck ROMAIN (Ancien Chef de la Police de Duvalier et Ancien préfet de la Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION (Ex-Secrétaire particulier de François et Jean Claude Duvalier) ; Gérard PROPHETE ; Milice MIDI ( Ancien Chef Macoute) Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde présidentielle) ; St Voyis PASCAL, Rony GILOT et consorts a rendu CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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son ordonnance au dispositif suivant : « PAR CES MOTIFS ; Ecartons le réquisitoire définitif du Commissaire du Gouvernement, nous, CARVES JEAN, Disons qu’il existe des indices graves et concordants tendant à renvoyer le Nommé JEAN-CLAUDE DUVALIER au Tribunal Correctionnel pour être jugé pour le délit de détournements de fonds public et déclarons qu’il y a lieu à suivre contre lui, le renvoyons en conséquence au tribunal Correctionnel pour être jugé conformément aux dispositions des articles 117 et 118 du Code d’Instruction Criminelle. Ordonnons enfin que toutes les pièces du dossier ensemble de la présente ordonnance soient transmises au Commissaire du Gouvernement pour les suites de droit. DONNÉ DE NOUS, CARVES JEAN, Juge d’instruction au tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, en son cabinet sis au Palais de Justice de cette ville. Ce jourd’hui vingt sept janvier deux mille douze avec l’assistance de notre greffier ROSE MYRTHA JUDITH NOEL. IL EST ORDONNÉ à tous huissiers sur ce requis de mettre la présente ordonnance à exécution ; aux officiers du ministère public près les tribunaux Civils d’y tenir la main à tous commandants et aux officiers de la force publique d’y prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis. EN FOI DE QUOI, la minute de la présente ordonnance est signée du Juge et du greffier susdits ». Sur le Caractère réducteur de l’Instruction L’instruction est ouverte contre des inculpés nommément cités dans le réquisitoire d’informer. L’enquête est conduite uniquement contre Jean-Claude DUVALIER. Les inculpés n’ont pour la plupart, pas été convoqués encore moins interrogés par le Juge d’Instruction. Le juge d’instruction ne s’est même pas donné la peine d’identifier les inculpés contre qui et en faveur de qui il devait instruire. Il s’est contenté de dire et consorts. Or il s’agit d’une expression que le juge ne pouvait utiliser, dans une ordonnance, vu que la loi lui fait obligation d’analyser la situation de chaque inculpé. Si l’action publique est éteinte contre un inculpé décédé au cours de l’instruction, il est du devoir du magistrat instructeur de consacrer ce fait dans le cadre de son ordonnance. Or le juge signale qu’il a enquêté contre des inculpés tels Simone O. DUVALIER, Frantz MERCERON, Edouard BERROUET et Samuel JEREMIE décédés sans préciser la situation de ces inculpés. Les autres inculpés cités par le réquisitoire d’informer ne bénéficient ni d’ordonnance de non lieu ni d’ordonnance de renvoi. Ils sont tout simplement oubliés par le magistrat instructeur. Quelle est, aujourd’hui, la situation des inculpés Michèle B. DUVALIER, Simone O. DUVALIER, Prosper AVRIL, Samuel JEREMIE, Jean SAMBOUR, Auguste DOUYON, Jean Robert ESTIME, Ronald BENNETT ; Frantz MERCERON ; Edouard BERROUET ; Colonel Franck ROMAIN (Ancien Chef de la Police de Duvalier et Ancien préfet de la Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION (Ex-Secrétaire particulier de François et Jean Claude DUVALIER) ; Gérard PROPHETE ; Milice MIDI ( Ancien Chef Macoute) Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde présidentielle) ; St Voyis PASCAL et Rony GILOT pour lesquels l’ordonnance reste étrangement muette. Le Juge n’a pas tenté d’interroger plusieurs de ces inculpés. Ainsi, il a délibérément choisi de ne pas étendre son instruction jusqu’à certains d’entre eux pour une raison connue de lui seul. Sur les faits de l’instruction Le juge d’Instruction présente l’exposé des faits sur lesquels il a instruit en onze (11) pages dans lesquelles il n’a fait que résumer la journée du 18 janvier 2011 au cours de laquelle le Parquet de Portau-Prince a procédé à l’interpellation de Jean-Claude DUVALIER. Le juge n’a identifié ni les faits infractionnels sur lesquels il devait instruire, ni les prévenus contre qui il a instruit en violation de l’article 120 du Code d’Instruction Criminelle. Il n’a pas, non plus, présenté les témoignages des témoins, les pièces sur lesquelles il s’est basé pour asseoir sa conviction en violation des principes qui régissent l’instruction criminelle en Haïti. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Les infractions d’harcèlement, de persécutions politiques, de viols, de vols, d’arrestations arbitraires, de tortures, d’exécutions sommaires, d’emprisonnements, de déportations, d’assassinats, de meurtres, d’enlèvements, etc. n’ont même pas été citées par le juge Carvès JEAN dans son exposé des faits reprochés à Jean-Claude DUVALIER et à ses complices. Le Juge d’Instruction a donc entendu les plaignants pour amuser la galerie et n’a fait aucun cas des témoignages recueillis. Ce comportement révoltant a déjà été condamné par la Cour de Cassation de la République dans son arrêt du 21 avril 1880 : Il a été jugé : « … Si on ne trouve ni dans les déclarations des plaignants, ni dans les dépositions des témoins, rien qui établisse le vol avec effraction et que l’inculpé en soit l’auteur, c’est à tort que la Chambre du Conseil, en faisant l’historique des faits de la cause dans l’ordonnance, soit arrivée à les mettre à la charge de l’inculpé : ce qui se résume à dire que l’ordonnance ne comporte point des motifs en harmonie avec les déclarations des plaignants et celles des témoins, et qu’elle a, par conséquent, violé le principe qui veut que toute décision comporte les motifs qui l’ont dictée ». (Voir Arrêt du 21 avril 1880 de la Cour de Cassation de la République, in code d’instruction criminelle de Jean Vandal, note j, mise au bas de l’article 116, p. 71). «Une ordonnance de non-lieu qui déclare le fait non punissable doit constater toutes les circonstances du fait imputable au prévenu » ; (Voir Arrêt du 11 juin 1906 de la Cour de Cassation de la République in code d’instruction criminelle de Jean Vandal, note u, mise au bas de l’article 112, p. 65). Sur la prescription Le RNDDH constate que dans le réquisitoire définitif du Commissaire Félix LEGER en date du 3 novembre 2011, l’ancien Commissaire du Gouvernement avait requis le Magistrat Instructeur de dire et déclarer que les faits de répressions politiques, de tortures, de bastonnades, d’assassinats politiques, de violations des droits humains sont prescrits au regard des articles 463, 464, et 465 du Code d’Instruction Criminelle. Sans le dire, le Juge d’Instruction a tenu compte de cette lecture erronée de la loi. Pourtant, l’article 464 du Code d’Instruction Criminelle est clair : « L’action publique et l’action civile résultant d’un crime de nature à emporter la peine de mort ou des peines afflictives ou infamantes, se prescriront après dix années révolues, à compter du jour où le crime aura été commis, si, dans cet intervalle, il n’a été fait aucun acte d’instruction ni de poursuite. S’il a été fait, dans cet intervalle, des actes d’instruction ou de poursuite non suivis du jugement, l’action publique et l’action civile ne prescriront qu’après dix années révolues, à compter du jour du dernier acte, à l’égard mêmes des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d’instruction ou de poursuite ». Or, pour parler de prescription on doit remonter, non à la date de la perpétration du crime (période 1971- 1986) comme le fait le Magistrat Instructeur, mais à la date du dernier acte d’instruction ou de poursuite. Le Juge d’Instruction a visé dans son œuvre le dernier acte de poursuite contre Jean Claude DUVALIER au 29 avril 2008. Le délai de prescription au regard de l’article 464 du Code d’Instruction Criminelle ne commence à courir qu’à partir de cette date. Le Juge d’Instruction, dans l’un des motifs de son œuvre, a écrit noir sur blanc ce qui suit : « ATTENDU QUE les faits reprochés s’étant produit de 1971, à 1986 et qu’une procédure a été entamée en 1986 jusqu’à 2008 sans interruption » (Sic). Il est tout simplement illogique de parler après de prescription sans une mésinterprétation de la lettre de l’article 464 du Code d’Instruction Criminelle. Que font le Commissaire Félix LEGER, le Juge Carvès JEAN et les partisans de l’impunité du dernier alinéa de l’article 464 ? Comment comprennent-ils les expressions : Dans l’intervalle ? Dernier acte d’instruction ? Dernier acte de poursuite ?

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La doctrine pourtant explique clairement ces notions. C’est ce qu’on appelle les actes interruptifs de prescription : les réquisitions du Commissaire du Gouvernement, les procès-verbaux de constat, les actes accomplis par le Juge d’Instruction, la constitution de partie civile, les actes accomplis par les autorités étrangères sont tous considérés comme des actes interruptifs de prescription. (Voir Roger Merle et André VITU, Traité de Droit Criminel, tome II, éditions Cujas, Paris, 1979, PP. 66-67) ; Aucun des partisans de DUVALIER ne peut établir que le dernier acte d’instruction ou de poursuite engagée contre DUVALIER en Haïti ou à l’étranger remonterait à plus de dix (10) ans. Sur les crimes contre l’humanité – nullité de l’ordonnance du Juge Carvès JEAN pour défaut de Motifs – dénaturation des faits de la cause. Dans l’un des motifs de l’ordonnance du Juge Carvès JEAN il est écrit ce qui suit : « Attendu que les faits de crime contre l’humanité n’ont jamais été visés contre l’inculpé dans le réquisitoire d’informer du Parquet qui constitue la boussole du Juge d’Instruction » (Sic) ; Pourtant dans le réquisitoire d’informer du Parquet (pièce 625/08) visée au No. 61 de l’ordonnance du Juge d’Instruction il est écrit ce qui suit : « Attendu qu’il résulte contre les nommés : Jean Claude DUVALIER, Michèle B. DUVALIER, Simone O. DUVALIER, Prosper AVRIL, Samuel JEREMIE, Jean SAMBOUR, Auguste DOUYON, Jean Robert ESTIME, Ronald BENNETT ; Frantz MERCERON ; Edouard BERROUET ; Colonel Franck ROMAIN (Ancien de la Police de Duvalier et Ancien préfet de la Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION (Ex-Secrétaire particulier de François et Jean Claude DUVALIER) ; Gérard PROPHETE ; Milice MIDI ( Ancien Chef Macoute) Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde présidentielle) ; St Voyis PASCAL, Rony GILOT et consorts. Des présomptions graves d’avoir, comme auteurs / complices, commis des :  Crimes contre l’humanité  Crimes financiers  Acte de corruption, forfaiture, concussion de fonctionnaires, détournements de fonds, vols et association de malfaiteurs. Faits prévus et punis par les articles 240, 241, 242, 343, 247, 248, 279, 280, 281, 289, 292, et 293 du Code Pénal ; 137 à 144 du code pénal ; 224 à 227 du code pénal ; 324, 333 du code pénal ; 127, 128 du Code Pénal ; 135 du Code Pénal ; 147 du code pénal ; Vu les articles 35, 37, 42, 43, 51 et 57 du Code d’Instruction Criminelle (CIC) ; Vu l’article 97 du décret du 22 août 1995, relatif à l’organisation judiciaire. Requiert, qu’il plaise à Monsieur le Doyen du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince désigner un Juge d’Instruction pour informer par toutes les voies de droit. Fait au Parquet, le 29 Avril 2008 » Il est donc clair que le Juge Carvès JEAN a volontairement dénaturé les faits de la cause dans l’intérêt des inculpés Jean Claude DUVALIER et de ses complices. Il est de principe que toute décision doit comporter les motifs qui l’ont dictée. Il a été jugé : «Les motifs sont des raisons de décider du Juge ; celles qu’il donne pour justifier sa décision. Parmi ces raisons, il s’en trouve une qui est, capitale, décisive, parce qu’elle suffit pour emporter à elle seule la solution du litige ; elle constitue des lors le motif déterminant de la décision, celui qui influence, c’est-à-dire, qui détermine le dispositif, lequel est l’essence de la décision, la décision elle-même. Un motif déterminant ne donne ouverture à cassation que s’il est erroné.» (Cass. 1ère sect. 6 mai 1957. Dont vu Joseph Chémaly contre Ludovic Laventure, note #58 mise au bas de l’article 282 du Code de Procédure Civile, (CPC) annoté par Luc D. Hector, p. 125). CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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« La dénaturation des faits est une violation de l’article 282 du C.P.C. pour motif erroné équivalant à l’absence de motif, surtout quand ces faits dénaturés ont servi de base au rejet de la demande. « (Cass. 2ème sect. 27 mai 1975, Aff. Mme Borel Sambourg contre son épouse, note # 76 mise au bas de l’article 282 du Code de Procédure Civile (C.P.C.) annoté par Luc D. Hector, p. 128) ; Le Juge Carvès JEAN en prétextant que le réquisitoire d’informer ne visait pas des crimes contre l’humanité Ŕ ce qui est faux Ŕ a dénaturé les faits de la cause et rend son ordonnance nulle. De plus, même si le réquisitoire d’informer n’avait pas visé les crimes contre l’humanité, le Juge d’Instruction se devait d’instruire. Il est de principe que le Juge d’Instruction est saisi des faits qui lui sont déférés et non des titres de la poursuite. « La formalité de la réquisition d’informer étant remplie, le Juge d’Instruction est pleinement saisi du droit de prendre seul toutes mesures tendant à une bonne et prompte administration de la justice. Il peut donc, sans avis préalable du ministère public et pour des raisons de connexité, ordonner, en vue de l’économie des frais et l’accélération de l’instruction, la jonction d’une plainte en faux ». (Cass. Arrêt du 29 mars 1949, note No 6 mise au bas de l’article 36 du Code d’Instruction Criminelle de Menan Pierre-Louis et Patrick Pierre-Louis, p. 36). La réflexion du Juge d’Instruction sur les crimes contre l’humanité témoigne des limites de nos Magistrats par rapport au droit international des droits de l’Homme. En effet, le Juge, à la lumière de l’œuvre qu’il a produite, semble ignorer les notions de "jus cogens" et de "erga omnes". Depuis le 28 mai 1951, dans son avis sur les réserves à la convention pour la prévention et répression du crime du génocide, la Cour Internationale de Justice (CIJ) a reconnu l’existence de règles fondamentales auxquelles les Etats ne peuvent déroger : « Les principes qui sont à la base de la convention sont des principes reconnus par les nations civilisées comme obligeant, même en dehors de tout lien conventionnel » dit la CIJ dans son avis. C’est ce qu’on appelle règles de « jus cogens », c’est-à-dire des règles fondamentales d’origine coutumière qui s’imposent à l’ensemble de la communauté des Etats sans distinction, qu’ils soient partie ou non aux Traités des Droits de l’Homme. D’un autre coté, la Cour Internationale de Justice (CIJ), dans un obiter dictum, de l’arrêt du 5 février 1970 relatif à l’affaire de la Barcelona Traction, a utilisé la notion de Erga omnes en mettant l’accent sur l’intérêt juridique que possèdent tous les Etats à la protection de certains droits et le caractère erga omnes - qui s’impose à tous - des obligations correspondantes. Les crimes odieux commis en Haïti sous le régime de Jean Claude DUVALIER constituent des crimes contre l’humanité en raison de leur nombre, de leur ampleur et de leur caractère odieux et systémique. Haïti ne peut donc, comme l’a écrit le Juge Carvès JEAN dans son ordonnance, prétendre ne pas pouvoir poursuivre Jean Claude DUVALIER et ses complices pour des crimes contre l’humanité sous prétexte que la notion de crime contre l’humanité est inconnue dans son droit interne. Caractère fantaisiste, démagogique de l’ordonnance du Juge Carvès JEAN – violation des règles fondamentales régissant l’instruction criminelle en Haïti. Dans le cadre d’une instruction criminelle, le juge doit entendre les plaignants, les inculpés, les témoins et doit analyser tous les documents utiles à la manifestation de la vérité. Si ceci n’est pas fait, il n’y a pas d’instruction. Une jurisprudence constante de la Cour de Cassation va dans le sens de cette affirmation : «En principe, lorsque l’instruction d’une affaire est déférée au Juge d’instruction, ce magistrat est astreint à procéder à l’audition de toutes les personnes mentionnées dans les pièces essentielles ayant trait à la prévention. Mais si, loin de s’informer conformément à la loi, le Juge d’Instruction s’est borné à interroger l’inculpé et à entendre la partie plaignante, par cette manière de procéder, il est impossible de juger sainement du mérite de la prévention. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Il y a donc lieu d’ordonner un supplément d’information ». (Voir Art du 4 septembre 1871, Not 2, art 58 C. inst. crim. L. Pradines ou note b in code d’instruction criminelle de Jean Vandal, p. 40) Or le Juge d’Instruction Carvès JEAN n’a entendu aucun des inculpés à l’exception de Jean-Claude DUVALIER. Aucune invitation, aucun ordre de convocation, aucun mandat de comparution n’a été émis contre ces inculpés nommément cités dans le réquisitoire du Ministère public. Pire le Juge d’Instruction ignore Ŕ parce qu’il n’y a pas eu d’instruction Ŕ que certains des inculpés contre lesquels il avait obligation d’instruire étaient, dans l’intervalle, décédés. Il n’y a même pas une phrase concernant le cas de ces derniers. Le Juge Carvès JEAN a accouché d’une ordonnance qu’il convient désormais d’appeler l’Ordonnance de la Honte. En effet, le Juge s’est contenté de faire une mise en scène du plus mauvais goût avec l’inculpé Jean-Claude DUVALIER prétendument assigné à résidence en multipliant des déclarations insensées à la presse sans s’occuper de son travail. De plus, le Juge a envoyé l’inculpé Jean Claude DUVALIER par devant le Tribunal correctionnel pour détournement de fonds sans déterminer le montant des fonds détournés ni les circonstances dans lesquelles ces fonds ont été détournés. Il n’a pas non plus révélé avec la complicité de qui, l’ex-dictateur sanguinaire avait détourné lesdits fonds. L’Ordonnance de la Honte du Juge Carvès JEAN n’est ni plus ni moins qu’une plaisanterie, un acte démagogique, une insulte à la mémoire des nombreuses victimes des DUVALIER. Quelles sont les possibilités pour contourner cette ordonnance ? Le Commissaire du Gouvernement près du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, les plaignants peuvent exercer appel de l’ordonnance innommable du Juge Carvès JEAN. Mais le Code d’Instruction Criminelle offre également l’occasion d’ouvrir une nouvelle information sur la base de faits nouveaux, c’est-à-dire tous les faits non analysés par le Juge d’Instruction mais susceptibles de contribuer à la manifestation de la vérité. Les articles 120 et 121 se lisent comme suit : Article 120.- sont considérés comme nouvelles charges, les déclarations des témoins, pièces et procès-verbaux qui, n’ayant pu être soumis à l’examen de la Chambre du Conseil, sont cependant de nature, soit à fortifier les preuves qu’elle aurait trouvées trop faibles, soit à donner aux faits de nouveaux développements utiles à la manifestation de la vérité. Article 121.- L’officier de police ou le juge d’instruction qui aura recueilli les charges nouvelles, adressera, sans délai, copie des pièces au commissaire du Gouvernement, sur la réquisition duquel la Chambre du Conseil pourra nommer un juge devant lequel il sera procédé au supplément d’information. III. CONCLUSION L’ordonnance rendue par le Juge d’Instruction Carvès JEAN expose au grand jour les faiblesses du système judiciaire haïtien et son incapacité à s’élever à la hauteur des revendications de justice du peuple haïtien. L’ordonnance du Juge Carvès JEAN sur les graves crimes perpétrés sous le régime des DUVALIER ne peut en rien contribuer à la manifestation de la vérité et à la justice. C’est une œuvre grotesque, honteuse, insultante qu’il convient de réformer au plus vite. Le RNDDH rappelle qu’une ordonnance de clôture est avant tout un rapport d’instruction qui fait la synthèse des actes d’instruction posés par le Magistrat Instructeur, qui résume les témoignages recueillis, les plaintes déposées, les interrogatoires des inculpés, qui analyse les documents d’instruction, les procès-verbaux et perquisitions. Aucun de ces éléments n’a été retrouvé dans l’œuvre du Juge Carvès JEAN. Cette ordonnance de la honte constitue tout simplement un acte de déni de justice. Elle est de nature à gravement affecter l’image de la justice haïtienne. Le RNDDH encourage les parties concernées à explorer les voies tracées par la Loi pour arriver à la reformation de cette ordonnance inique. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.22: L’Office de la protection du citoyen 31 déplore que la justice n’assume pas ses responsabilités

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L'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne (OPC) salue respectueusement la mémoire des disparus du régime Duvalier et renouvelle ses sympathies aux victimes et à leurs familles. L'OPC déplore profondément que la justice haïtienne n'ait pas été en mesure de faire face à ses responsabilités. Parallèlement, l'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne prend acte de l’ordonnance de non lieu rendue pour les allégations de crimes contre l'humanité, autant que de l’ordonnance de renvoi au correctionnel du cas de Jean Claude Duvalier au Tribunal de Première Instance de la Juridiction de Port-au-Prince. Cependant tout en signalant les faiblesses profondes et graves de notre système pénal, l'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne rappelle que des mécanismes sont prévus pour mettre en cause l’ordonnance d'un juge et sur le plan international la voie de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme s'offre a l'épuisement des recours internes. L'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne profite pour prendre en compte les nombreux rapports produits par les organisations nationales et internationales sur la question et qui constituent des sources d'information utile. Faisant référence a deux procès emblématiques de notre histoire celui du massacre de Raboteau et celui des exécutions somma ires de la Prison Civile des Caves, l'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne réitère ses préoccupations concernant la reforme pénale et saisit l'occasion une fois de plus pour déplorer l'état d'un système qui ne permet pas la conduite d'une justice saine et impartiale et qui de ce fait participe au fléau de l'impunité qui sévit en Haïti a tous les niveaux, dans tous les secteurs de la vie publique et privée et dans les plus petits actes du quotidien. L'Office de la Protection du Citoyen et de la Citoyenne recommande:  La mise en place immédiate et la consolidation urgente des institutions indispensables a la collecte des preuves, a leur identification et leur préservation a savoir: l’institut médico-légal, la police scientifique, Ie corps de police judiciaire, Ie juge de paix ;  La mise en application par tous les acteurs de la chaine pénale des instruments internationaux auxquels Haïti est partie;  La ratification de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants, signée par Haïti en 2002 ;  La création d'une cellule de protection des acteurs judiciaires et civils a toutes les phases de la procédure pénale.  La signature et la ratification du statut de Rome de la Cour Pénale Internationale. Fait à Port-au-Prince, le vendredi 3 février 2012 Florence Élie Protectrice

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Institution nationale de droits humains (INDH); crée par la constitution de 1987, au chapitre des institutions indépendantes. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.23: Position du Collectif sur l’ordonnance du 27 janvier 2012

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)-Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

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La justice contre l’État de droit démocratique Le 27 janvier 2012 le juge d’instruction, Carvès JEAN, a informé la presse de sa décision d’ignorer les plaintes pour crimes contre l’humanité introduites contre l’ex Président à vie Jean-Claude DUVALIER et consorts. Il a déclaré ne retenir que les détournements de fonds. Les charges sont réduites à de simples délits et le dossier est renvoyé à un tribunal correctionnel qui, en cas de condamnation, appliquera une peine maximale de 3 ans d’emprisonnement. La décision s’appuie sur la demande de non lieu formulée, le 3 novembre 2011, par l’ex Commissaire du gouvernement (Procureur) Félix LÉGER qui a ainsi pris le contrepied de son prédécesseur, Harycidas AUGUSTE, qui demandait dès le 19 janvier 2011, de poursuivre Duvalier pour les deux types de crimes. À ce jour, l’ordonnance n’a pas été communiquée aux plaignants-es, alors même que le délai de contestation est très court (10 jours francs à compter de la notification). Pourquoi tarde-t-on tant à transmettre une décision que l’on a pris grand soin de médiatiser? Avec cette ordonnance, notre justice proclame, par devant la nation et le monde, que l’impunité est garantie aux auteurs-es et complices de crimes et que les victimes sont les personnes à blâmer. Notre justice étale au grand jour ses incapacités, son incohérence et son absence d’indépendance. Elle nie notre quête de refondation nationale en occultant le fait qu’en 1986, à travers divers actes, l’État haïtien avait reconnu la nature dictatoriale du régime des DUVALIER qui a sévi de 1957 à 1986: Nombre d’hommes et de femmes ont payé de leurs vies pour que notre pays ne soit pas enveloppé du linceul de la dictature. Ces patriotes étaient souvent aussi jeunes que l’ex dictateur Jean-Claude DUVALIER qui ordonnait à ses sicaires, Tontons macoutes et militaires, de les éliminer sans pitié. Pour toutes les personnes torturées, liquidées, disparues, exilées, vendues; pour toutes les communautés plongées dans le deuil, la peur, l’humiliation et condamnées au silence; pour tous les torts causés au pays à travers le pillage systématique de l’État; pour toutes ces souffrances encore aujourd’hui indicibles, nous disons NON. NON à cette ordonnance qui nous insulte, délégitime et pervertit les fondements de la démocratie et de l’État de droit. Nous avons choisi la date symbolique du 7 février, celle de la chute de la dynastie Duvalier, pour réaffirmer que nous ne courberons point devant les assassins! Quelque soit les appuis dont ils bénéficient. Jean-Claude DUVALIER a été un dictateur qui a régné sans partage, avec droit de vie et de mort dont il usait allègrement. Peu après sa confiscation du pouvoir il déclarait, le 22 septembre 1971, «les individus qui se mettront ouvertement ou de façon dissimulée aux travers des chemins de Notre Révolution seront emportés et balayés systématiquement par cette grande force de l’Histoire ». NON. Non, nous n’accepterons pas que Duvalier nous impose le silence et l’inaction! Port-au-Prince, le 7 février 2012 Danièle Magloire, Coordonnatrice CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.24: Lettre du 15 février 2012 du Collectif aux Chefs et cheffes d’État de l’Amérique latine

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)-Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

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Port-au-Prince, le 15 février 2012 Lettre individuellement adressée à chaque Cheffe et Chef d’État Mme Cristina Fernández de Kirchner Présidente de la République Argentine Mme Dilma Rousseff Présidente du Brésil M. Evo Morales Président de la Bolivie M. Rafael Correa Président de l’Équateur M. José Mujica Président de l’Uruguay M. Sebastián Piñera Président du Chili M. Fernando Lugo Président du Paraguay M. Ollanta Humala Présidente du Pérou Objet : La question de l’État de droit démocratique en Haïti Madame la Présidente, Monsieur le Président, Nous vous adressons cette lettre à titre de dirigeante d’un gouvernement qui participe à la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Nous avons aussi présent à l’esprit le fait que votre pays fait partie de l’Union des nations sud-américaines (UNASUR) ; une organisation d’intégration régionale qui se fonde sur le respect du droit international, la solidarité entre les peuples et la jouissance effective des droits humains pour tous et toutes. Tenant compte de cela, nous voulons attirer votre attention sur une question essentielle pour l’établissement d’un État de droit démocratique en Haïti. La dictature des Duvalier, père et fils (1957-1986), a écrit les pages les plus sanglantes de l’histoire d’Haïti. Sous le régime despotique du Président à vie Jean-Claude Duvalier (22 avril 1971 Ŕ 7 février 1986), il a été commis des violations graves, massives et systématiques des droits de la personne, telles CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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que des exécutions sommaires, des disparitions forcées, des actes de torture, des emprisonnements arbitraires, des déportations forcées, etc. Ces violations constituent de par leur nature des crimes contre l’humanité, sont donc imprescriptibles et ne peuvent rester impunis. Sinon, il est à craindre que tous les efforts visant au développement démocratique d’Haïti resteront vains. Une lettre ouverte, en date du 23 janvier 2012, a été adressée au Président de la République d’Haïti, Monsieur Michel Joseph Martelly, au sujet du scandaleux traitement accordé au dossier de Jean-Claude Duvalier par l’État haïtien. A date, cette lettre est restée sans réponse. Pour votre information, une copie de ladite lettre est annexée à la présente. M. Edmond Mulet, ex Chef civil de la MINUSTAH, en s’adressant au groupe des pays dits amis d’Haïti sur l’État de droit, au siège des Nations Unies à New York le 26 octobre 2010, avait déclaré qu’en matière d’État de droit, «Haïti à bien des égards n’existe pas». Le respect des droits humains est en effet un défi majeur pour Haïti; défi qui est rehaussé par la présence des troupes onusiennes qui s’avère être aussi une donnée du problème. Considérant qu’au sein de l’UNASUR, il a été adopté une clause démocratique qui s’avère être très avancée pour un traité d’intégration régionale, nous pensons que, fort de cette expérience, votre pays pourrait, dans ses relations avec Haïti, jouer un rôle qui contribuerait à promouvoir le changement tant souhaité par le peuple haïtien ; c'est-à-dire la construction d’un véritable État de droit démocratique fondé sur le respect de la dignité humaine, des droits et libertés fondamentales. Cela exige, après une longue période de dictature, la quête de la vérité, le devoir de mémoire, l’œuvre de la justice et la réparation. La difficile mais combien enrichissante expérience de la région sud-américaine en la matière indique également que votre pays peut jouer un rôle positif dans cette perspective. Nous vous prions d’agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations distinguées. Pour le Collectif contre l’impunité Danièle Magloire Coordonnatrice

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Annexe 7.5.25: Les victimes contestent l’ordonnance du 27 janvier 2012

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org Dépêches Haïti-Duvalier-Correctionnel : Les victimes de la dictature font appel http://www.alterpresse.org/spip.php?article12419#.U0Gtl1eXa6Y jeudi 23 février 2012 P-au-P, 23 févr. 2012 [AlterPresse]--- Les plaignantes et plaignants victimes sous le régime dictatorial de Jean-Claude Duvalier ont commencé à faire appel de l’ordonnance du juge d’instruction, Carvès Jean, renvoyant cet exdictateur devant un tribunal correctionnel - pour être jugé sur des cas de corruption et de détournement de fonds publics, informe la coordinatrice du collectif contre l’impunité, Danielle Magloire.

Suite à cette ordonnance transmise le 30 janvier dernier au parquet du tribunal civil de Port-au-Prince, plusieurs organismes nationaux et internationaux ainsi que des victimes de la dictature de Duvalier ont élevé la voix pour condamner cette décision judiciaire. Les victimes de ce régime se sont révoltées en promettant de faire appel de la décision du juge Carvès Jean. « Nous commençons à recevoir la notification de l’ordonnance. Au fur et à mesure, les déclarations d’appels se font », indique la coordinatrice qui ajoute que la signification de cette ordonnance n’est pas envoyée d’un seul coup. « Les plaintes sont individuelles ainsi que les appels », précise t-elle à AlterPresse. Revenu en Haïti le 16 janvier 2011, environ 25 ans après sa chute le 7 février 1986, à la suite d’un soulèvement populaire, Jean-Claude Duvalier fait l’objet de 22 plaintes pour crimes contre l’humanité, déposées par des victimes de son régime, regroupées notamment au sein du collectif contre l’impunité. [emb gp apr 23/02/2012 13:10]

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Annexe 7.5.26: Poursuite à la Cour d’appel de Port-au-Prince des audiences, débutées le 13 décembre 2012

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org

Dépêches Haïti-Duvalier : Nouveau rendez-vous à la cour d’appel le 31 janvier http://www.alterpresse.org/spip.php?article13996#.U0G2MFeXa6Y vendredi 25 janvier 2013 P-au-P, 25 janv. 2013 [AlterPresse] ---- Le dossier de l’ex-dictateur Jean Claude Duvalier a été reporté à la huitaine, soit pour le jeudi 31 janvier, en raison de la mort du juge de la cour d’appel Enock Voltaire, qui a succombé d’une maladie, a appris AlterPresse. Absent de la séance, mais représenté par sa batterie d’avocats, l’ex-tyran fait l’objet de plus d’une vingtaine de plaintes notamment pour crimes contre l’humanité. Reynold George réitère que son client Jean Claude Duvalier s’est montré un véritable « démocrate », parce qu’il s’est présenté aux séances d’audition, contrairement à d’autres personnes qui font le marronnage, faisant référence à l’ex-président jean Bertrand Aristide, qui a été auditionné dans sa résidence à Tabarre (périphérie nord-est). Mais Duvalier n’attendra pas sagement que les mailles de la justice se resserre autour de lui. « Ce mercredi 23 janvier 2013, un arrêt de la de la cour a été déposé au greffe de la cour de cassation, faisant mention que l’on ne peut pas entendre Jean Claude Duvalier pour crime, parce que la cour de cassation a déjà tranché en sa faveur sur ce point », affirme Reynold George. Prétextant que les incidents datent de plusieurs années, en conséquence les victimes ne pourront pas obtenir de certificats médicaux, des témoins, des procès verbaux de constats, Reynold Georges ajoute qu’il faudra « des faits palpables et non des commérages ». « Les gens ont peur que Jean Claude Duvalier se rende aux élections », s’est encore enhardi l’avocat à la voix tonitruante. Depuis quelques mois, tous les biens de Duvalier lui ont été restitués, des fonds de pensions lui ont été accordé, même un passeport diplomatique lui a été octroyé. « C’est un manque de respect pour la justice et pour la population en tant que telle. Cela fait deux années qu’il se pavane dans le pays sans inquiétudes, ce démontre que la justice est piétinée », s’inquiète Danielle Magloire du Collectif contre l’impunité, présente à la cour d’appel. Elle était en compagnie de Marie Yolène Gilles du Réseau national de défense des droits humains (RnddH). Connaissant l’état de la justice dans le pays, Danielle Magloire se dit déterminée à mener la bataille, en épuisant tous les recours prévus par la loi, voire même le recours international, tant que les victimes n’auront pas trouvé justice. [jep kft gp apr 25/01/2013 10 :55] CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.27: Appel du Collectif à la solidarité pour le refus de l’impunité Communiqué La Cour d’appel entendra Jean-Claude Duvalier le 7 février 2013 http://rnddh.org/communique-la-cour-dappel-entendra-jean-claude-duvalier-ie-7fevrier-2013/

Le Collectif contre l’impunité informe la société haïtienne et la communauté internationale qu’une audience se tiendra, à 10 heures, à la Cour d’appel de Port-au-Prince le jeudi 7 février 2013, date de la chute de la dynastie des Duvalier en 1986. La Cour d’appel demande que l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier se présente en personne à l’audience. Jean-Claude Duvalier a été à nouveau mis en cause* par l’État haïtien, le 19 janvier 2011, pour «crimes contre l’humanité, crimes financiers et actes de corruption, forfaiture, concussion de fonctionnaires, détournements de fonds, vol et association de malfaiteurs», selon les termes du réquisitoire supplétif du Ministère public. Une trentaine de victimes, parmi elles 22 personnes du Collectif, ont porté plainte contre Jean-Claude Duvalier et consorts pour crimes contre l’humanité (arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc.). Les victimes, constituées parties civiles, ont interjeté appel de l’ordonnance du 27 janvier 2012 du Juge d’instruction Carvès Jean, renvoyant l’ex dictateur hors des liens d’inculpation pour crimes contre l’humanité et ne retenant que des crimes financiers pour lesquels Jean-Claude Duvalier est renvoyé au correctionnel. Les plaignants et plaignantes ont été représentés aux trois précédentes audiences de la Cour d’appel (13 décembre 2012, 24 et 31 janvier 2013). Le déroulement de l’audience du 31 janvier 2013 a ravivé les craintes du Collectif quant au non respect des droits des victimes et à la volonté de perpétuer l’impunité.  Les plaignants et les plaignantes n’ont pas été dûment cités, tout comme ils n’avaient pas été correctement notifiés de la tenue des audiences.  Pour une affaire de cette importance, le Ministère public n’a été représenté que par une seule personne.  L’atmosphère du tribunal était délétère, sans le décorum et la sérénité requis.  Il a été tenté de récuser le droit des victimes à être parties prenantes.  L’état de l’affaire n’a pas été correctement établi: d’une part, contrairement à l’État, qui avait pourtant repris en janvier 2011 la poursuite initiée contre Jean-Claude Duvalier en 2008, les victimes ont contesté l’ordonnance du 27 janvier 2012; d’autre part, Duvalier fait appel des crimes financiers retenus contre lui. Il est impératif que la société haïtienne, les organisations citoyennes de solidarité internationale et la communauté internationale, en particulier ses instances de droits humains, expriment leur appui au difficile combat que mènent les victimes de la dictature des Duvalier pour faire échec à l’impunité et au révisionnisme. Ce combat est celui de la construction d’un État de droit démocratique, où les libertés et les droits fondamentaux sont effectivement garantis, notamment par un pouvoir judiciaire impartial, indépendant, soucieux de l’intérêt général et donc de la vérité. Port-au-Prince, le 3 février 2013 Danièle Magloire, Coordonnatrice

* Première inculpation: 29 avril 2008. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.28: L’étrange attitude du Ministère public à la Cour d’appel de Port-au-Prince

http://lenouvelliste.com/ Cour d'appel de Port-au-Prince Duvalier n'a pas comparu ce 7 février Au palais de justice Le Nouvelliste | Publié le : 07 février 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/113330.html

Dans une décision rendue à l'audience ordinaire et publique des affaires pénales du jeudi 7 février 2013, « la cour rejette l'exception d'irrecevabilité de l'appel de la partie civile relevée par déclaration au greffe du tribunal de première instance de Port-au-Prince, reconnaît la qualité de partie civile à la partie adverse, fait droit à la demande de report sollicitée par la partie appelante, fixe la comparution personnelle de Jean-Claude Duvalier le 21 février 2013 vers 10h a.m.». Cette décision ne sera ni levée ni signifiée, poursuit la cour. Elle a été lue par le président de ladite cour Jean-Joseph Lebrun. Voyant que toutes les portes leur sont fermées, les avocats de la défense ont sollicité la parole pour une motion d'ordre. La cour ne le leur a pas accordé, alors qu'ils veulent exercer un pourvoi en cassation. Vexé, excité par cette décision, le conseil de la défense étudie la meilleure stratégie lui permettant de faire face à cette situation combien difficile. Pourtant, le réquisitoire du substitut commissaire du gouvernement, Me Florence Mathieu, fait mention du caractère informel de la déclaration d'appel de plusieurs personnes portées partie civile. Me Mathieu a requis la cour de déclarer irrecevable l'appel interjeté contre l'ordonnance du juge instructeur renvoyant Jean-Claude Duvalier par-devant la chambre correctionnelle, vu qu'il n'a présenté aucun préjudice ni aucun grief, a indiqué le ministère public, partie poursuivante. Donc, le ministère public a conclu au rejet de la déclaration d'appel. La comparution personnelle de l'ancien président haïtien Jean-Claude Duvalier comme ordonnée par la cour d'appel de Port-au-Prince n'a pas eu lieu le jeudi 7 février 2013. Il a été représenté par ses avocats Alix Jeanty, Reynold Georges et Fritz Canton. D'entrée de jeu, Me Georges a demandé à la cour de rejeter le mémoire qui a été signifié le 6 février 2013 par des personnes constituées partie civile au procès. La cour n'en a pas fait droit. Cependant, elle a ordonné au conseil de la défense de communiquer la correspondance de Jean-Claude Duvalier aux avocats de la partie civile. Ce qui a été fait. N'ayant pas été consulté, le ministère s'y opposait pour deux raisons : 1) il doit être consulté pour toute demande; 2) la cour n'a pas précisé de quelle partie il s'agit.

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Ces propos ont apporté de l'eau au moulin du conseil de la défense qui voulait à tout prix écarter la partie civile au procès pour faute de qualité. Mais le président de la cour qui a la police de l'audience, le juge Jean-Joseph Lebrun, a, à maintes reprises, montré que la partie civile coiffée de Me Jean-Joseph Exumé, d'autres confrères comme Mario Joseph, Rousse Célestin, Jean-Francisco Alexandre, Jean Lunès Dabia et Dieunel Fleury Jean, est bel et bien constituée. A cette phase, les avocats de la défense ont tour à tour pris la parole, soit pour lire les conclusions signifiées par la partie civile, le 6 février (quelques heures avant l'audience), alors que l'article 17 de la loi du 26 juillet 1979 sur l'appel pénal dispose que « les parties sont admises à déposer leurs mémoires jusqu'au jour de l'audience», soit pour quelques observations ou pour se prononcer sur la noncomparution de Jean-Claude Duvalier à la cour d'appel le 7 février 2013. Un incident malheureux s'est produit. L'audience, qui manquait un peu de sérénité, a failli tourner au vinaigre sur une intervention hasardeuse de Robert Duval, une ancienne victime du régime de Jean-Claude Duvalier. Au moment où Me Georges soulevait une exception de qualité, Boby Duval de lui dire : « Fèmen dyòl ou* ». Frustré, offusqué, Me Georges a sollicité des juges de la cour de demander à M. Duval de quitter la salle d'audience. Les juges de la cour ont dû statuer sur cet incident en ordonnant à Duval de présenter des excuses aux avocats, à la cour et à l'assistance. C'était une occasion pour Me Canton de se questionner sur la qualité d'éducation que Duval a reçue chez lui. Revenant à la barre, Me Exumé a insisté sur la demande de comparution personnelle de Duvalier à la plus prochaine audience pénale, soit le jeudi 21 février 2013. En réplique, Me Canton a renvoyé la balle dans le camp adverse pour dire à leurs collègues qu'ils n'ont pas la qualité pour se constituer partie civile. Et le ministère public a renforcé la position du conseil de la défense sur la comparution personnelle de Duvalier. Selon la partie poursuivante, cette comparution personnelle n'est pas conforme à la loi. Rappelons que l'appel a été interjeté contre l'ordonnance du juge Carvès Jean renvoyant Jean-Claude Duvalier devant la chambre correctionnelle pour y être jugé. Contre cette décision, des personnes victimes de son régime, des organisations des droits humains en ont fait appel. Le procès de Jean-Claude Duvalier est-il imminent ? Jean-Robert Fleury * Littéralement : ferme ta gueule.

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Annexe 7.5.29: Correspondance de Jean-Claude Duvalier à la Cour d'appel de Port-au-Prince

http://lenouvelliste.com/ La correspondance de monsieur Jean-Claude Duvalier aux juges de la cour d'appel de Portau-Prince Le Nouvelliste | Publié le : 07 février 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/113330/Duvalier-na-pas-comparu-ce-7-fevrier.html

Port-au-Prince, le 31 janvier 2013 Aux présidents et membres de la cour d'appel de Port-au-Prince. A l'attention de Me Jean-Joseph Lebrun, cour d'appel de Port-au-Prince Messieurs les présidents de la cour d'appel et membres de la composition des affaires pénales du jeudi Je, soussigné, Jean-Claude Duvalier, ancien président de la République d'Haïti, vous présente mes respects et ai l'avantage de porter à votre connaissance les faits que voici : A la suite d'une ordonnance rendue par le juge d'instruction Carvès Jean du tribunal de première instance de Port-au-Prince, j'ai relevé appel de cette décision de justice et, par mes avocats, j'ai assigné l'État à comparaître à la cour en vue de la reformation de cette ordonnance qui, en partie, a violé la loi, à la suite du réquisitoire du ministère public qui avait renoncé à toute poursuite, en rejetant les charges illégalement retenues et soumises prescrites depuis plus de trente (30) ans. A l'audience du jeudi 31 janvier 2013 de la section des affaires pénales de la cour d'appel, vous avez rendu un arrêt ordonnant ma comparution personnelle à l'audience du jeudi 7 février 2013. Je tiens, par la présente, Messieurs le président et membres de la cour, à soumettre respectueusement trois objections majeures à votre décision dont je sollicite ce jour, dans le délai de la loi, la rétraction pour les motifs ci-après. 1- La demande de comparution personnelle de l'appelant, selon moi, dans sa propre cause, est prématurée, puisque, comme le veut la loi, elle n'a pas été ordonnée à la suite de débats ou de présentation de faits ou d'indices qu'elle viserait à confirmer, à comparer ou à combattre. Aucune des parties en présence ne l'avait d'ailleurs produite. De plus, il est consacré par la pratique haïtienne de nos cours et tribunaux que la cour d'appel faisant fonction de juges d'instruction en collégialité ne peut entendre les parties qu'après avoir infirmé l'ordonnance querellée. C'est l'enseignement des Maîtres haïtiens. Or, même la prétendue partie civile qui s'est présentée sans droit, sans intérêt et sans qualité devant vous, et encore moins le ministère public, n'ont ni sollicité ni compris le sens pour le moins étrange de votre démarche, avant l'examen des pièces du dossier, de l'exposé des parties, et de l'arrêt infirmant l'ordonnance du juge de première instance. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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2- Vous avez ordonné ma comparution personnelle comme appelant dans cette cause contre l'État et le ministère public « en vue de faire luire la vérité» (). Or, les juges d'instruction que vous êtes, investiguant en collégialité à charge et à décharge, à la recherche d'indices concordants, n'ont rien à voir, comme c'est le cas pour un procès pénal en cour d'assise, avec la recherche de la vérité. Il y a donc ici une certaine confusion de rôle et d'attributions qui mérite d'être clarifiée. Car le juge d'instruction est juge des indices et non celui des preuves. 3- J'ai été, comme ancien président de la République d'Haïti, invité à me présenter devant la cour (suivant votre arrêt), le 7 février 2013, 27 ans jour pour jour après mon départ du pouvoir. Cette coïncidence ne peut, en aucun cas, occulter la perception politique que l'on peut avoir de cet arrêt! En effet, le 7 février 1986, jour de ma démission et de mon départ pour l'étranger, les plus graves crimes politiques ont été commis dans ce pays contre des milliers de membres de familles duvaliéristes, des Volontaires de la sécurité nationale (VSN), des milliers de houngans à travers le pays, en particulier à Jérémie et dans le sud du pays, et des milliers de proches, de partisans et d'alliés de mon régime ont été déchouqués ou brûlés vifs par un procédé criminel de justice collective et expéditive appelé « père Lebrun», à un moment ou d'autres, dans la joie, saluaient mon départ du pays comme une date de liberté, de victoire et de révolution. Le 7 février est donc une page de notre Histoire qui charrie discordes, haines, violences et destructions! Il n'eût pas été sage que la politique prenne le droit, la loi et la justice en otage par cette comparution personnelle. Trop de passions se seront réveillées et actualisées pour faire revivre des moments de blessures en cette période difficile où le chef de l'État et les dirigeants politiques actuels parlent avec raison de la Réconciliation nationale nécessaire pour panser et bander les blessures de notre passé encore récent que cette comparution risque de réveiller. Victimes et bourreaux se donneront obligatoirement rendez-vous ce jour-là, à tort ou à raison! Pour toutes ces raisons, Messieurs les présidents et membres de la cour, je vous prie de bien vouloir rétracter cet arrêt avant-faire droit qui ne pourra pas contribuer à faire découvrir la vérité, mais plutôt à semer le doute et créer la confusion et même provoquer des menaces à l'ordre social. Comme appelant, je sollicite la lumière des honorables et distingués membres de la cour d'appel de Port-au-Prince sur des questions spécifiques de droit susceptibles de reformer l'ordonnance fautive de la première instance; et, si le cas y échet, en cas de rejet des trois (03) objections ci-dessus énoncées, fixer par arrêt cette comparution personnelle de l'appelant que je suis, à une date ultérieure du mois de mars, après le carnaval 2013. Persuadé que la présente retiendra votre sage attention pour les suites de droit à sortir, je saisis l'occasion pour vous renouveler, Messieurs les présidents et membres de la composition pénale de la cour d'appel de Port-au-Prince, l'assurance respectueuse de ma très haute considération. Jean-Claude Duvalier Ancien président de la République d'Haïti C.C. Mes avocats, Presse et Médias Lettre reçue à la cour d'appel de Port-au-Prince, le vendredi premier (01) février 2013.

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Annexe 7.5.30: Le révisionnisme affiché par les duvaliéristes

http://lenouvelliste.com/ Jean-Claude Duvalier, la grande victime de l'histoire Le Nouvelliste | Publié le : 2013-02-08 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/113360/Jean-Claude-Duvalier-la-grande-victime-de-lhistoire.html

Arthur V. Calixte Comme il fallait s'y attendre, Jean-Claude Duvalier, vu à travers son père, est banni et persécuté à la manière de tous les leaders progressistes issus de la matrice des classes moyennes auxquels on attribue les monopoles de la dictature et de la violence. A qui veut l'entendre, lors même que Jean-Claude Duvalier fut un dictateur, il faut le reconnaître, ce fut un dictateur progressiste. Car sous son gouvernement régnait une paix totale. Tout le monde indistinctement: duvaliéristes, jean-claudistes, opposants et autres, jouissait d'un certain bien-être: électricité 24/2; eau potable en abondance; le transport à toutes les heures du jour et de la nuit; la propreté en général battait son plein; une vie nocturne agréable. Certains jours, les magasins fermaient leurs portes fort tard jusqu'à 11 heures du soir. Enfin, un respect mutuel à tous les niveaux régnait dans la Cité et sur toute l'étendue du territoire national. Par exemple, les principales artères de la capitale étaient nettoyées, les marchés publics inspectés, lavés chaque après-midi, les produits alimentaires contrôlés par l'Etat, etc. Hommes et femmes, jeunes et vieux, écoliers, écolières, étudiants, étudiantes circulaient librement dans leur tenue vestimentaire classique, impeccable. Voilà, en raccourci, le pays que le peule haïtien a eu il y a 27 ans de cela. Depuis, «manje kwit, manje kri, medikaman ap vann sou pil fatra anba je tout moun *». Un certain secteur de l'opinion publique est à la solde du laboratoire qui fabrique les fausses accusations des plus tendancieuses contre Jean-Claude Duvalier pour avoir enfin et uniquement sa peau. Ivres de vengeance, ils sont redevenus fous. Ils semblent ignorer qu'en droit pénal, il faut des éléments du corps du délit, des auteurs et des complices. Sous toutes réserves de droit et d'équité, Jean-Claude Duvalier est victime à la manière de Lysius Salomon Jeune d'une proscription de 27 ans. Nous évoquons, pour finir, l'arrêt de la Cour de cassation de la République en date du 24 juillet 2011, ordonnant la mise en liberté immédiate des pourvoyants : Alexandre Paul, Jean-Claude Duvalier, Simone O. Duvalier et consorts s'ils ne sont retenus pour autres causes, ce, sans peine ni dépens. Ainsi jugé et prononcé par nous Edouard Jean Raymond, vice-président; Raoul Lyncée, Louis Alex Germain, Charles Danastor, Djkaman Charles, juges en audience publique du mardi 24 juillet 2011. Il est ordonné. «A qui sait comprendre peu de mots suffisent».

*Traduction littérale : La nourriture, cuite et non cuite, les médicaments sont vendus près de piles d’immondices, aux vus et sus de tous. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.31: Déclaration conjointe d’organisations haitiennes Port- au-Prince, 18 février 2013 Arrêtez et jugez Duvalier pour crimes contre l’humanité et crimes financiers Jeudi 21 février 2013, l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier devrait se présenter devant la Cour d’Appel pour répondre des crimes commis sous son régime. Suite au retour de Duvalier au pays, le 16 Janvier 2011, plusieurs personnes ont porté plainte pour les graves violations dont elles ont été victimes sous le régime macoute (dictatorial). Mais, depuis que le Président Michel Martelly est au pouvoir, on constate que l’ex dictateur, criminel et spoliateur des deniers public, jouit d’une solide protection. Lors de la célébration du 2ème anniversaire du tremblement de terre, le 12 janvier 2011, on a pu voir l’ex dictateur, sans inquiétude aucune, aux côtés du Président de la République et de l’ex Président américain Bill Clinton; une véritable insulte pour les victimes. Le 22 septembre 2011, plusieurs tontons macoutes, parmi eux les avocats Renold Georges (conseil de défense de Duvalier) et Osner Févry, sont venus perturber une présentation d’Amnistie Internationale sur les exactions du régime de Jean-Claude Duvalier. Le 16 décembre 2011, l’ex dictateur parrainait une promotion sortante d’étudiants de la faculté de droit des Gonaïves, en toute quiétude, avec la protection du Gouvernement Martelly, dans le mépris que ce même pouvoir affiche pour les victimes. Tous ces évènements se produisent alors que l’ex dictateur est mis en accusation par la Justice. Il se déplace partout où il le souhaite, dans tout le pays. Les pratiques autoritaires du pouvoir actuel garantissent la quiétude d’esprit à l’ex dictateur et à sa cohorte de macoutes; pour les victimes, c’est la douleur qui s’accroit. Lors de la convocation de l’ex dictateur devant la Cour d’Appel, le 7 février 2013, des tontons macoutes ont agressé des militants qui réclamaient le jugement de Duvalier. Les tontons macoutes deviennent de plus en plus arrogants et adoptent l’attitude dite de «bandit légal32». Nous saisissons l’occasion pour dénoncer, avec toute notre énergie, les pratiques macoutes des «bracelets roses33» qui se développent sous le Gouvernement Martelly/Lamothe. Pour illustrer ces pratiques, citons: l’arrestation illégale d’un député en fonction, l’arrestation et l’emprisonnement de militants Lavalas, des actes de répression visant les journalistes, les «comportements Ti Bobo et Boss Pinte34 » de membres de la sécurité du Palais national et de proches du pouvoir, le communiqué du Ministère «de l’injustice» visant à bâillonner la presse.

Si nous ne nous protestons pas la dictature et les tontons macoutes vont nous revenir A l’occasion de la convocation de l’ex dictateur à comparaitre devant la Cour d’Appel, le 21 février prochain, tous les démocrates, les militants progressistes, les révolutionnaires et les victimes de Duvalier doivent s’allier pour demander le jugement de Duvalier, de ses acolytes, des complices de son régime. Si nous ne protestons pas, les victimes du régime macoute n’obtiendront pas justice et la nouvelle dictature qui bourgeonne va nous terrasser. Nous demandons à tous ceux qui, partout dans le pays, s’opposent au retour de la dictature d’appuyer les victimes de Duvalier par leur présence devant le parquet au Bicentenaire, le jeudi 21 février à 10 heures du matin. A bas la dictature! A bas les pratiques macoutes des bracelets roses! Vive le procès du régime! Vive la justice pour les victimes du régime dictatorial des Duvalier! Tèt kole ti peyizan ayisyen, Pati kan pèp La, MODEP, FRAKKA, Sèk Gramsci, FDDPA, RPS, FGPB, GREPS 35

Pour authentification Jean Louis LOUIS

Petit-Jean DERINX

Guy NUMA

Bandit jouissant de l’impunité, parce qu’il occupe un poste officiel. Bracelet symbolisant le support au Président de la République actuel. 34 En référence à deux célèbres tortionnaires sous la dictature des Duvalier. 35 Union des petits paysans haïtiens, Parti du camp du peuple, Mouvement démocratique populaire (MODEP), Force de réflexion et d’action sur la question de l’habitat (FRAKKA), Cercle d’étude en Littérature gramscienne (Cercle Gramsci), Force pour la défense des droits du paysan haïtien (FDDPA), Rassemblement progressiste du Sud (RPS), Fédération des groupements paysans de Belle Fontaine (FGPB), Groupe de réflexion sur les questions sociales (GREPS). 32 33

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Annexe 7.5.32: Jean-Claude Duvalier est un inculpé et sa comparution personnelle est exigée

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Documents Haïti-Duvalier : « La justice haïtienne acceptera-t-elle que Duvalier ignore impunément son injonction ? »

mercredi 20 février 2013 http://www.alterpresse.org/spip.php?article14120#.UzuPcFeXa6Y

Communiqué du Collectif contre l’impunité [1] Document soumis à AlterPresse le 20 février 2013.

Le jeudi 21 février, à 10 heures, la Cour d’appel de Port-au-Prince poursuivra son audience de l’affaire Jean-Claude Duvalier. L’ex Président à vie, qui s’était soustrait à la séance du 7 février, est à nouveau sommé de comparaitre en personne. Ses avocats manœuvrent pour que l’instruction ne se poursuive pas. Les questions suivantes restent et demeurent posées et appellent la même vigilance: 

La justice haïtienne acceptera-t-elle que Duvalier ignore impunément son injonction?



S’attachera-t-elle aux erreurs de droit et de faits qui caractérisent l’ordonnance du 27 janvier 2012, qui a écarté les crimes contre l’humanité pour ne retenir que les crimes financiers?

En dépit de l’ambiance délétère de l’audience du 7 février, et malgré l’étrange attitude du Ministère public réputé défenseur de la société, mais abondant systématiquement dans le même sens que le conseil de la défense de Duvalier les avocats de la partie civile ont obtenu: 

La qualification de Duvalier pour ce qu’il est par le devant le tribunal: un inculpé.



La reconnaissance du statut de partie civile pour les personnes, de toutes conditions, qui ont porté plaintes contre Duvalier pour crimes contre l’humanité (arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc.).



Le maintient de l’exigence de comparution en personne de Duvalier.

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A l’audience du 7 février, outre les membres du Collectif, il y avait divers observateurs et observatrices: l’Office de la protection du citoyen (OPC), des organisations haïtiennes de défense des droits humains, les ambassades du Canada, de la France et des États-Unis, l’Organisations des États américains (OÉA), la section droits humains de la Minustah (Mission des nations unies pour la stabilisation en Haïti), Avocats sans frontières Canada (ASFC). Duvalier, absent, avait adressé au tribunal une lettre datée du 31 janvier 2013. Les motifs de son absence se résument comme suit: 

La demande de comparution est prématurée.



Les juges de la Cour d’appel, dans leur rôle d’instruction, «n'ont rien à voir … avec la recherche de la vérité» … Car le juge d'instruction est juge des indices et non celui des preuves.»



La «perception politique» de la date retenue, qui rappelle le 7 février 1986 où «les plus graves crimes politiques ont été commis dans ce pays». Les passions risquent d’être «réveillées et actualisées … en cette période difficile où le chef de l'État et les dirigeants politiques actuels parlent avec raison de la Réconciliation nationale nécessaire …. Victimes et bourreaux se donneront obligatoirement rendez-vous ce jour-là, à tort ou à raison. »

Des partisans de Duvalier étaient effectivement massés devant le tribunal; munis du drapeau duvaliériste rouge et noir et de matériels de propagande à la gloire des Duvalier et de leur structure politique actuelle, le Parti de l’unité nationale (PUN). Les «menaces à l'ordre social» annoncées dans la lettre de Duvalier n’ont pas eu lieu. Un autre groupe réclamant le jugement de l’ex dictateur, notamment composé d’étudiants et d’étudiantes, n’a pas cédé à la provocation. Le Collectif réitère son appel à la solidarité. Solidarité pour contrer l’impunité. Solidarité pour dire Non au révisionnisme qui tente de banaliser des crimes d’État et de réhabiliter un dictateur, en prenant prétexte des turpitudes d’une Haïti tragiquement plombée par l’héritage du système duvaliériste. Port-au-Prince, le 19 février 2013 Danièle Magloire Coordonnatrice [1] (regroupement de plaignantes et plaignants ─contre l’ex-dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts─ et d’organisations de droits humains) : Centre œcuménique des droits humains (Cedh) - Kay Fanm (Maison des femmes) - Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (Moufhed) - Réseau national de défense des droits humains (rnddh) Point focal : Centre œcuménique des droits humains (cedh) - [email protected]

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Annexe 7.5.33: La Cour d’appel somme Jean-Claude Duvalier de se présenter le 28 février

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Cour d'Appel L'étau se resserre autour de Jean-Claude Duvalier Le Nouvelliste | Publié le : 21 février 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/113703.html

Plus d'artifices juridiques, l'inculpé Jean-Claude Duvalier sera amené à sa prochaine comparution à la cour d'appel de Port au-Prince. L'étau se resserre autour de l'ex-dictateur dont les avocats sont parvenus à le garder loin des tribunaux depuis des mois... Le climatiseur tourne à fond. Mais on sue dans cette salle de la cour d'appel de Port-au-Prince où l'inculpé Jean-Claude Duvalier est absent. Le regard de ses accusateurs, ce jeudi 21 février 2013, ne lui brûlera pas la peau. Parmi eux, Robert Duval, Alix Fils-Aimé, Daniel Magloire... observent, parfois d'un regard interloqué, Me Reynold Georges dans ses prises de parole. Seul dans le box, sans son client, Me Reynold Georges se bat. Quelques-uns de ses arguments, enrobés d'humour, ne tiennent pas la route, commente un homme de la basoche, costume, cravate, toge et un Code d'instruction criminelle(CIC) à la main droite. On ne peut pas interjeter appel en cassation d'une décision non encore rendue par la cour d'appel, jette-t-il discrètement. Les échanges entre les parties enflamment davantage la salle où siègent le juge Jean-Joseph Lebrun, Durin Duret Junior et Jocelyne Cazimir. Des journalistes haïtiens et étrangers prennent quelques notes, tweets aussi. Marie Yolène Gilles du RNDDH, des envoyés d'Amnesty International, de Human Rights Watch et Rodolfo Matarollo de l'UNASUR regardent. Leur position est connue : l'exdictateur Jean-Claude Duvalier doit être jugé pour les crimes de sang et les crimes financiers et économiques commis sous son régime. La cour, après échanges, se retire. Presque une heure s'écroule. Dans une allée, Me Reynold Georges confie qu'il y a des interférences politiques dans ce dossier. En défaveur de votre client ? Oui, lâche-t-il avant d'aller éteindre les phares allumés de son véhicule garé à l'extérieur. Rodolfo Matarollo se confie aussi. Il souhaite que les décisions du tribunal soient respectées, dont celle sur la comparution en personne de Jean-Claude Duvalier. En renfort au vieux climatiseur, deux ventilateurs n'aident en rien. La salle est un sauna. On n'en finit pas de dégouliner quand, brusquement, une cloche sonne. La cour reprend siège. Aux lèvres du président, le juge Jean Joseph Lebrun, s'accrochent tous les yeux de la salle. Et aux termes de considérations juridiques basées sur les articles 323 et 77 du code de procédure criminelle CIC, et 423 du CPC, la cour a jugé « impératif » que l'inculpé lui soit amené à la diligence du ministère public. La salle, malgré la chaleur, est traversée par un silence glacial. Plus de subterfuge, l'ancien homme fort d'Haïti devra comparaître pour soutenir cette fois le regard de ses accusateurs à la prochaine audience et faire valoir ses victoires dans d'autres ressorts, selon ses avocats dont l'un « déplore » la décision de la cour de contraindre JCD à se présenter. Roberson Alphonse CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.34: La Cour d’appel rejette les manœuvres dilatoires des avocats de Duvalier

COMMUNIQUÉ DE PRESSE POUR CIRCULATION IMMÉDIATE

www.asfcanada.ca La Cour d’appel de Port-au-Prince ordonne la comparution du prévenu et la continuation de l’instance Avocats sans frontières Canada aide les victimes à remporter une manche dans le procès Duvalier Port-au-Prince, le 21 février 2013 - Avocat sans frontières Canada (ASFC) se réjouit des décisions interlocutoires rendues aujourd’hui par la Cour d’appel de Port-au-Prince dans l’affaire contre l’ex président à vie Jean-Claude Duvalier. Ces décisions ont été sollicitées et argumentées par le Collectif contre l’impunité qui regroupe les plaignants constitués en partie civile. ASFC est l’organisation partenaire du Collectif et a notamment contribué à la préparation de l’argumentation présentée aujourd’hui par le Collectif et ses avocats. ASFC assistait entre autres le Collectif contre l’impunité à l’audience d’aujourd’hui. L’affaire est actuellement dans l’étape d’appel de l’ordonnance rendue le 27 janvier 2012 par le juge d’instruction Carvès Jean. Cette ordonnance renvoyait Jean-Claude Duvalier à procès uniquement pour les accusations de crimes économiques et rejetait les accusations de violations des droits humains. La Cour d’appel a aujourd’hui émis un mandat d’amener à l’encontre du prévenu Jean-Claude Duvalier, qui avait défié les précédentes ordonnances de comparution émises par la Cour pour les audiences du 31 janvier et du 7 février. La Cour d’appel a également rejeté la demande de la défense qui visait à dessaisir la Cour en raison d’un prétendu recours en cassation. « La Cour d’appel a rendu des décisions importantes aujourd’hui à l’encontre de procédures dilatoires. Ces décisions vont dans le sens d’un plus grand respect de son autorité, de la crédibilité du système de justice et des règles du procès équitable. C’est une manche importante qui a été remportée aujourd’hui par le Collectif contre l’impunité, nous le félicitons de son travail et sommes fiers d’y avoir contribué activement », a déclaré maître Pascal Paradis, directeur général d’ASFC. ASFC continuera de soutenir le Collectif contre l’impunité pour la suite de l’affaire qui a été ajournée. « Un pas de plus a été franchi aujourd’hui en vue d’amener Jean-Claude Duvalier à procès. La Cour d’appel s’est tenue debout et indique que personne n’est au-dessus des lois ou immunisé contre les décisions de la justice. C’est un signe encourageant que la justice haïtienne peut assumer la lourde responsabilité de faire une enquête et un procès à la fois crédibles et équitables », a conclu maître Paradis.

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Annexe 7.5.35: Le mandat d’amener contre Duvalier, une première avancée

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Dépêches

Haïti-Duvalier : Des organisations de droits humains saluent la cour d’appel qui exige un mandat d’amener contre l’ex-dictateur http://www.alterpresse.org/spip.php?article14143#.UzuVOVeXa6Y

vendredi 22 février 2013 P-au-P, 22 févr. 2013 [AlterPresse] --- Cinq organisations nationales et internationales de droits humains manifestent leur satisfaction par rapport à l’ordre de la cour d’appel au ministère public de décerner un mandat d’amener contre Jean Claude Duvalier.

Celui-ci devra être amené, si nécessaire par la force à la cour d’appel le 28 février prochain, ordonnent les juges lors de la séance du 21 février boudée par Duvalier. De façon unanime les cinq organisations de droits humains, dont Human Rights Watch, Amnesty Internationale, le Collectif pour juger Jean Claude Duvalier (sigle créole Kosyjid) et le réseau national de défense des droits humains (Rnddh), ont salué cette décision. « Le résultat obtenu hier est une avancée. Ce n’est pas encore une victoire, mais ça été une longue lutte. C’est le travail acharné, assidu, pénible, pendant deux ans où la justice a donné des rebuffades, mais les groupes de plaignants ont tenu bon pour arriver jusque là », explique la coordonnatrice du Collectif contre l’impunité, Danièle Magloire. Magloire inscrit le combat actuel des victimes de la dictature duvaliériste dans le cadre de la lutte contre l’impunité et le révisionnisme de l’histoire haïtienne. Elle signale particulièrement à cet égard, la tendance de l’un des avocats de Jean Claude Duvalier à essayer de le faire passer pour un honnête homme.

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Pour sa part, la représentante de Amnesty internationale, Beatrice Vauglante, manifeste sa préoccupation par rapport au fait que Duvalier détient un passeport diplomatique, ce qui lui confère une certaine marge de mobilité. « Cette affaire c’est un test pour la justice haïtienne, juger Jean Claude Duvalier dans le contexte d’un procès équitable, où ses victimes ont pour la première fois la possibilité de prendre la parole et d’expliquer ce qui leur est arrivé », relève Reed Brody, conseiller juridique et porte parole de Human rights watch.

« Cette décision ouvre une brèche dans le mur de l’impunité et d’immunité que Jean Claude Duvalier a construit autour de lui. Maintenant il incombe aux autorités haïtiennes, au ministère public de s’assurer que ce dictateur soit présent jeudi prochain », poursuit-il.

Le conseiller juridique critique aussi sévèrement la stratégie des avocats de Duvalier qui tentent d’écarter les victimes de l’affaire, et l’associe en même temps à la défense de criminels reconnus à l’image de Slobodan Milosévic et Augusto Pinochet. A cette stratégie il répond, utilisant un proverbe haïtien : « Bay kou bliye, pote mak sonje » (littéralement : celui qui a porté le coup peut oublier mais pas celui qui en porte la cicatrice). [jep kft gp apr 22/02/2013 15 :25]

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Annexe 7.5.36: Duvalier forcé de se présenter devant la Cour d’appel

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org Documents En prélude à l’audience du jeudi 28 février 2013 Haïti-Duvalier : Les enjeux de l’instruction de la Cour d’appel Appel à la mobilisation pour bloquer les manœuvres dilatoires tendant à paralyser la justice http://www.alterpresse.org/spip.php?article14156#.UzuZF1eXa6Y mercredi 27 février 2013 Par le collectif contre l’impunité [1] Soumis à AlterPresse le 26 février 2013 La Cour d'appel de Port au Prince a fixé au jeudi 28 février 2013, à 10h sa prochaine audience dans l'Affaire de l’ex-Président à vie Jean-Claude Duvalier. A la précédente audience du 21 février, la Cour d’appel a rendu deux décisions importantes: un mandat d’amener est décerné contre l’inculpé et le recours introduit en cassation par ses avocats ne suspend pas l’instruction de la Cour qui se poursuit. Enjeux L’État qui avait introduit la poursuite contre Duvalier le 29 avril 2008, puis le 19 janvier 2011 n’a pas réagi à l’ordonnance du 27 janvier 2012. Duvalier a contesté la décision qui retient contre lui les délits financiers. Le Collectif a contesté la mise à l’écart des crimes contre l’humanité (arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc.) et vise à faire casser l’ordonnance, pour qu’une instruction digne de ce nom soit rouverte. Sans cela, il risquerait de ne plus avoir de cas Duvalier, vu que l’État pourrait agréer à l’abandon des poursuites pour délits financiers. Duvalier pourrait alors accéder aux fonds bloqués en Suisse. Faits saillants de l’audience du 21 février (de 11h45 am 2h45 pm) 1. Sur base d’un recours introduit à la Cour de cassation, la défense a présumé que l’audience du 21

février n’aurait pas lieu. Or, la décision de tenir ou non audience relève exclusivement du tribunal. 2. La partie civile, représentée par les Cabinets Jean-Joseph Exumé et Mario Joseph, a argumenté:

a. Pour ce dossier emblématique, le pays attend que la justice agisse en toute indépendance, avec rigueur, impartialité, en ayant le souci du droit. La justice haïtienne est observée attentivement au niveau international, dans un contexte où les ex dictateurs sont jugés et où les graves violations de droits humains ne sont ni admises, ni tolérées. La Cour a rendu 2 décisions importantes le 7 février: la comparution en personne de l’inculpé et la reconnaissance formelle de la partie civile.

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b. La partie civile a demandé de procéder à l’appel nominal de l’inculpé et de son défenseur principal, Me Reynold Georges. Acte a été pris de leur absence que la partie civile a qualifiée de mépris. c. Trois demandes ont été présentées à la Cour (les juges)  Émettre immédiatement un mandat d’arrêt contre l’inculpé, c'est-à-dire le rechercher, l’arrêter et le mettre en détention pour qu’il soit à la disposition de la justice.  Rejet de la demande de dessaisissement de la Cour car, la défense n’a pas autorité pour ce faire.  Poursuivre l’audience  Aucune disposition n’oblige la Cour à suspendre l’audience car, le recours n’est pas suspensif.  Le recours est une manœuvre pour paralyser la justice. Dès qu’une comparution est exigée, il suffirait d’introduire un recours pour que l’instruction s’arrête net, pour une durée indéterminée.  Le recours est prématuré. Il ne peut être exercé que contre la décision infirmant ou confirmant l’ordonnance du 27 janvier 2012 en cause. A date, la Cour n’a pas encore tranché, mais a pris des mesures relatives à la conduite de son instruction. 3. La défense

En cours d’audience, Me Georges s’est présenté et a été ensuite rejoint par Me Fritso Canton. En dépit de l’irrégularité, le fait a été accepté, par la Cour et la partie civile. Cette dernière l’a toutefois soulignée. a. A fait valoir son recours en cassation pour arrêter l’audience. La Cour a déclaré ne pas être au courant; cela n’ayant pas été fait dans les formes requises. b. A avancé que la Cour ne pouvait aggraver la situation de Duvalier, blanchi par l’ordonnance. c. A déclaré que la plupart des plaignants et plaignantes avaient retiré leur plaintes. d. Au nom de Duvalier, et contre toute logique, la défense s’est portée partie civile contre toutes les personnes qui déposeront contre lui, pour les torts et griefs qui seront causés à cet «homme intègre». 4. Le Ministère public a rejeté la comparution personnelle de Duvalier et le mandat d’arrêt. Il a toutefois

admis que le recours en cassation n’était nullement suspensif. 5. La Cour s’est prononcée pour un mandat d’amener contre Duvalier et la poursuite de l’audience.

Port-au-Prince, le 26 février 2013. Danièle Magloire Coordonnatrice [1] (regroupement de plaignantes et plaignants ─contre l’ex-dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts─ et d’organisations de droits humains)

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Annexe 7.5.37: Audition de Jean-Claude Duvalier à la Cour d’appel, une avancée historique

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Duvalier devant ses juges, affronte des victimes de son régime Le Nouvelliste | Publié le : 28 février 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/113981.html

L'ex-dictateur Jean-Claude Duvalier a soutenu le regard de ses accusateurs à la cour d'appel. Tranquillement, il a donné sa version de certains évènements et revendiqué le droit de savoir pourquoi son pays s'est « effondré » après son départ du pouvoir. 10 heures 21. Quelques dizaines de personnes manifestent à l'entrée du Palais de justice au bicentenaire. Certains, vêtus de chemise rouge et de pantalon noir, brandissent des photos de l'ex-dictateur JeanClaude Duvalier. « Nous sommes des duvaliéristes », crie l'un d'eux, la cinquantaine avancée. « Quand on était au pouvoir, le pays était bon, pas comme il est aujourd'hui », insiste-t-il, lunettes de soleil et chapeau en cuir orange sur la tête. Sous le soleil, il sue et se met à chanter avec les autres ce qui ressemble à un chant de ralliement. Le ton est guerrier : « Duvalier pran yo..., Duvalier pran yo..., pote kolé!*» Des mains simulent des revolvers sous les yeux de policiers anti-émeute, tranquilles comme des participants à une fête foraine. Au frais dans une salle à l'intérieur, l'ex-président à vie attend avant sa comparution forcée par-devant les juges de la cour d'appel après plusieurs rendez-vous repoussés. Dans la salle d'audience bondée dont la température frise celle d'un sauna finlandais, Jean-Claude Duvalier, sous les vivats d'une poignée de sympathisants, s'installe sur une chaise, à côté de sa femme Véronique Roy, à moins d'un mètre du greffier Philippe Mario Milorme. Une voix quelque peu esseulée rétorque : « men kriminel la ». Quelques secondes filent. Il n'y a aucun écho, aucun effet boule de neige. Costume bleu, chemise blanche, cravate grise, Jean-Claude Duvalier, l'air un peu fatigué, la nuque toujours aussi raide, observe et écoute le juge Jean Joseph Lebrun retracer les différentes étapes de la procédure judiciaire. Les curieux, au terme de la décision de la cour que l'audience soit publique, sont à l'affût de scoops, de témoignages choc. L'ex-dictateur, incapable de parler fort, en offre. Il les chuchote à l'oreille du greffier. D'entrée de jeu, l'ex-président à vie nie toute responsabilité dans des actes de torture, d'exécution d'opposants politiques, de violation des droits humains imputés à son régime. Robert Duval, l'un des plaignants, a été arrêté, selon JCD, « pour actions subversives avec des armes illégales à l'aéroport ». Incarcéré, ce dernier a recouvré sa liberté, suite à une grâce présidentielle, ajoute Baby Doc, soulignant avoir protégé des gens à leur insu et passer des instructions pour que la discipline règne, pour que la loi soit respectée quand on signalait des « anomalies » à son attention.

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Jean-Claude Duvalier, sur les traitements infligés à Fort-Dimanche aux «opposants politiques », explique: «Concernant le Fort-Dimanche, on retrouvait toutes sortes de délinquants ». Provocateur, il enchaine : « Au pénitencier, il y avait des dealers de drogues libérés moyennant finance après mon départ. » Pressé afin d'expliquer si la libération de Robert Duval a été ordonné par un tribunal, JCD répond et surprend : « Pour moi, c'est une plaisanterie. C'est une fumisterie ». Sa femme bondit. « Ce n'est pas possible, il n'est pas bien, il fait chaud, il n'a pas bien compris les questions », s'exclame Véronique Roy qui force ses avocats à demander une suspension d'audience, un peu après 12 heures 37. Cependant, avant cette demande de suspension, JCD, lucide et percutant, retient un nom dans la liste des plaignants égrenée. Il connaît Michèle Montas grâce à ses rapports avec Jean Léopold Dominique, journaliste qui l'accompagnait dans ses excursions en province. Journaliste aussi pour lequel JCD dit être intervenu pour qu'il obtienne gain de cause dans un procès face au Widmaer pour avoir Radio Haïti Inter. Politique, il souligne, à l'audience, « avoir fait le maximum pour assurer une vie décente » à ses compatriotes. «A l'époque, soutient JCD, le gouvernement gérait la misère, les entreprises fonctionnaient bien (...) et les parents pouvaient envoyer leurs enfants à l'école. Je ne dis pas que la vie était rose, mais les gens pouvaient vivre décemment », revendique Baby Doc, 61 ans dont plus de 25 ans passés en exil en France. Comme pour donner mauvaise conscience à ceux qui l'ont succédé, JeanClaude Duvalier indique avoir retrouvé à son retour un « pays effondré, ruiné». « A mon tour, je peux dire, qu'avez-vous fait de mon pays ? », s'exclame JCD à qui son père avait remis le pouvoir à l'âge de 19 ans, en 1971. Exhaustif dans certaines réponses, JCD est en revanche laconique dans d'autres. Avez-vous détenu ou détenez vous encore de l'argent dans des banques étrangères ? « Non », répond JCD. Jusqu'au bout de l'audience renvoyée à la huitaine un peu après 3h p.m, Jean-Claude Duvalier souligne qu'il a été un bon gestionnaire des fonds publics. Sur le front du respect des droits de l'homme, en 1976, le Département d'Etat américain et Amnesty International avaient reconnu des progrès notoires, selon l'ex-président à vie qui a soutenu le regard de ses accusateurs. Robert Duval, l'un d'eux, dément, alors que la salle se vidait, avoir été arrêté avec des armes illégales à l'aéroport. « J'ai été arrêté à mon usine et tout ce qu'il a dit ont servi de prétexte pour me maintenir en prison», indique Duval, peu surpris des propos de JCD sur ce qu'a été Fort-Dimanche. « Je suis déjà cuit à son cynisme », souligne Robert Duval. « C'est dans la ligne de défense d'un dictateur. Il est dans le déni des actes perpétrés par le régime », estime Danielle Magloire, satisfaite en revanche que « l'ex-dictateur ait comparu et répondu aux questions de la cour, en présence des victimes ». « C'est historique », ajoute Danielle Magloire, militante des droits de l'homme et présidente du Collectif contre l'impunité. « Satisfait de l'audience!». Me Jean Joseph Exumé et Me Reynold Georges, représentant respectivement les victimes et JCD sont d'accord au moins sur un point. Me Georges, d'un autre côté, estime aussi que toutes les infractions reprochées à son client sont prescrites tandis que la salle continuait à se vidait, tandis que Jean-Claude Duvalier rentrait chez lui après une journée historique. Celle qui a vu un ancien homme fort répondre de ses actes et des accusations portées contre lui. « Jean-Claude Duvalier a donné l'exemple à d'autres », croit Reynold Georges. Roberson Alphonse [email protected]

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Annexe 7.38: Comparution de Duvalier: une première brèche dans le mur de l’impunité

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

L’ex-président à vie comparait enfin devant la justice haïtienne Une autre avancée historique dans le procès Jean-Claude Duvalier, selon Avocats sans frontières Canada

Port-au-Prince, le 1er mars 2013 - Avocat sans frontières Canada (ASFC) salue la comparution devant la Cour d’appel de Port-au-Prince de l’ex-président à vie d’Haïti Jean-Claude Duvalier, contre qui un mandat d’amener avait été émis le 21 février dernier à la suite de son troisième refus de se présenter devant ce tribunal. « Pour la première fois, l'ancien dictateur haïtien se présente devant la justice de son pays dans le cadre d'une audience visant à déterminer s'il doit être jugé pour les crimes commis contre les civils par le régime qu’il a dirigé de 1971 à 1986. C’est une avancée historique et une première brèche dans la mur d’impunité », a déclaré maître Pascal Paradis, directeur général d’Avocats sans frontières Canada. Dans une salle exiguë, journalistes, avocats, militants de droits humains, plaignants, fonctionnaires, et partisans de l'ancien dictateur se sont bousculés pour entendre Jean-Claude Duvalier répondre aux questions qui lui ont été posées par les magistrats, le Ministère public et les avocats du Collectif contre l’impunité, représentants des victimes appuyées par ASFC. « Il faut saluer le courage du tribunal qui, en dépit des manœuvres dilatoires de la défense qui visent à faire avorter les procédures, a refusé de suspendre l’audience et a invité le prévenu à présenter sa version des faits qui lui sont reprochés par les plaignants. Nous attendons impatiemment la suite du procès », a continué maître Paradis. L’audience a été suspendue en fin d’après-midi. Une nouvelle convocation est fixée par la Cour d’appel au jeudi 7 mars.

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Annexe 7.5.39: Audition publique de victimes de la dictature duvaliériste

COMMUNIQUÉ DE PRESSE POUR CIRCULATION IMMÉDIATE

L’instruction des plaintes à l’encontre de Jean-Claude Duvalier se poursuit devant la justice haïtienne Avocats sans frontières Canada : « Les victimes du régime Duvalier enfin entendues en justice »

Port-au-Prince, le 20 mars 2013 Ŕ C’est demain le 21 mars 2013 que se poursuivront les audiences devant la Cour d’appel de Port-au-Prince dans le procès de Jean-Claude Duvalier. À cette séance, la Cour devrait continuer à entendre des plaignants qui font appel de la décision du juge d’instruction de rejeter les accusations de crimes graves (dont crimes contre l’humanité) à l’encontre de l’ex-président à vie d’Haïti. « Avocats sans frontières Canada (ASFC) constate avec satisfaction que ces audiences permettent pour la première fois aux plaignants d’être entendus en cour. Après près de 30 ans d’attente, il était temps que les victimes présumées du régime Duvalier puissent relater publiquement les violations de leurs droits fondamentaux. C’est important pour la justice mais aussi pour la réappropriation de la mémoire collective » a déclaré maître Pascal Paradis, directeur général d’Avocats sans frontières Canada (ASFC). « ASFC se réjouit aussi du fait que les audiences, qui se tiennent chaque jeudi depuis le 31 janvier dernier, se déroulent dans une atmosphère plus sereine, qui contraste avec le climat survolté qui régnait lorsque l’ancien président à vie Jean-Claude Duvalier a comparu », a pour sa part mentionné maître Philippe Tremblay, directeur des services juridiques d’ASFC. Jean-Claude Duvalier, qui a été hospitalisé après sa comparution du 28 février dernier, n’a pas assisté aux dernières audiences des 7 et 14 mars. Trois des personnes qui ont porté plainte contre l’ex chef d’État ont témoigné des traitements cruels, inhumains ou dégradants dont ils disent avoir fait l’objet à l’époque où Jean-Claude Duvalier dirigeait Haïti. Messieurs Alix Fils-Aimé et Robert (Bobby) Duval estiment tous les deux avoir été arrêtés sans motif, détenus sans procès dans des conditions inhumaines et avoir été torturés par leurs geôliers à la Caserne Dessalines et à Fort-Dimanche, deux lieux de détention à la triste réputation pour les prisonniers politiques. Madame Nicole Magloire a, de son côté, relaté son arrestation sans motifs, sa détention subséquente à la Caserne Dessalines et au Pénitencier national, le pillage de son domicile et son exil forcé au Canada, où elle y est demeurée jusqu’à la chute du régime. « ASFC salue le courage des plaignants qui ont amorcé ce processus de justice et qui acceptent de témoigner dans des conditions difficiles compte tenu des faits allégués mais aussi du contexte du procès », a ajouté maître Paradis. « Nous sommes à cet égard préoccupés par l’attitude de la défense, qui tente par des tactiques discutables de miner la crédibilité des plaignants. Nous sommes également préoccupés par le fait que le ministère public semble prendre fait et cause pour la défense » a conclu maître Tremblay.

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Annexe 7.5.40: Témoignages sur les tortures, exécutions et disparitions

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org/ Perspectives Haïti-Duvalier : La victime Raymond Davius partage les souffrances endurées sous l’ancien régime http://www.alterpresse.org/spip.php?article14424#.UzDu7YWXa6Y vendredi 19 avril 2013 P-au-P, 19 avril 2013 [AlterPresse] --- La victime Raymond Davius a raconté, le jeudi 18 avril 2013, les nombreuses tortures subies pendant les sept mois (de février à septembre 1981) passés dans les geôles de l’ancien régime du dictateur JeanClaude Duvalier, lors du procès contre ce dernier poursuivi pour crimes contre l’humanité et détournements de fonds, a observé l’agence en ligne AlterPresse. Âgé actuellement de 57 ans, l’économiste Davius rapporte avoir été battu, à maintes reprises, pendant son passage en prison. Les multiples coups reçus ont fini par laisser des cicatrices sur tout son corps, confesse-t-il attristé. Il se plaint du fait que les sbires du régime ne lui ont jamais offert la possibilité de se rendre à l’hôpital, malgré ses nombreuses blessures. Au cours de l’année 1981, il fut arrêté 17 fois et emprisonné trois fois. « A chaque arrestation, j’ai du vomir du sang. C’est à cause de ces atrocités que j’ai été contraint d’aller me cacher dans la ville de Bainet (Sud-est), alors que je n’avais personne dans cette ville. J’ai passé quelques mois là-bas avant d’être arrêté, ligoté et conduit aux Casernes Dessalines », se souvient, avec amertume, Raymond Davius. En prison, un seul seau lui servait, à la fois, de récipient pour ses besoins physiologiques et de plat pour ses repas. La nourriture lui était servie en-dessous de la porte, avec les pieds, par les geôliers. Davius était fermé dans une cellule étroite, où une ampoule était tenue allumée en vue de permettre au geôlier de vérifier si le maltraité était en vie. Un petit matelas, fabriqué avec des résidus de tissus contenant des épingles, ne lui offrait aucune possibilité de s’allonger dessus convenablement.

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Le régime voulait faire de Davius un "exemple", parce qu’il a laissé l’armée - en tant que soldat de première classe à l’hôpital militaire - pour rejoindre le Parti démocrate chrétien haïtien (Pdch), alors dirigé par le défunt Sylvio Claude. « Le 13 octobre 1982, à la suite des menaces exercées par les sbires du régime, j’ai dû sauter les murs de l’ambassade du Venezuela au Bicentenaire (à proximité du bord de mer de la capitale), pour retrouver un asile politique. L’ambassadeur vénézuélien de l’époque m’a donné près de 250.00 dollars américains pour aller me cacher dans les recoins du pays », relate Davius, la tristesse dans la voix. En janvier 1983, il a tenté, une seconde fois, de s’échapper en s’introduisant, à nouveau, à l’ambassade du Venezuela. « L’ambassadeur m’a mis en résidence surveillée. Un mois plus tard, soit le 1er février 1983, j’ai pris l’exil (pour le Venezuela), qui a duré près de deux ans et demi. Je suis revenu [dans le pays] en juillet 1986, après la chute de Jean-Claude Duvalier », indique la victime Raymond Davius. A l’audience du jeudi 18 avril 2013, Davius a présenté et remis, à la cour d’appel de Port-au-Prince, une liste partielle des séquestrations, tortures, assassinats et exécutions sommaires, perpétrés durant la dictature duvaliériste, notamment en la seule année de 1976. Figurent, dans cette liste, cinq journalistes [1], une dizaine de militaires [2], près d’une quinzaine d’avocats (Benoît Armand, Émile Cauvin, Seymour Cauvin, Max Charlmars, Hervilus Antoine, Henri Carnot, Joseph Vergniaud, Hubert Legros, Christian Nau, Salma Pierre-Paul, Edmond Pierre-Paul, Antoine Pierre-Paul, Pierre Victor Joseph, Roc ainsi connu, Antonio Vieux.] et environ 70 autres citoyens de diverses couches, [3] ayant laissé leur peau dans les geôles du dictateur Duvalier (données tirées de l’ouvrage « le prix du sang », Tome II). La prochaine audition, dans le cadre du procès de Jean-Claude Duvalier est prévue pour le jeudi 25 avril 2013. Le 11 avril 2013, lors de la précédente audience, Henry Faustin a été auditionné comme plaignant après Robert Duval, Alix Fils Aimé et Nicole Magloire, entendus tour à tour dans cette affaire. [jep emb rc apr 19/04/2013 14:50] [1] Les journalistes cités étaient : Ezéchiel Abellard, René Midouin, Gasner Raymond, Saintini ainsi connu, Salès Pierre. [2] Les militaires exécutés en 1976 étaient Dagobert Jean, Jean Paul, Ménélas alias Ayiti, Reynold ainsi connu, René Sajous, Santiague, Gasner Siméon, Vitey ainsi connu, Merceron alias Guantanamo. [3] Les citoyens, disparus en 1976 et rapportés par Raymond Davius dans sa déposition du 18 avril 2013, étaient les suivants : Jean-Claude Alexandre alias Blanco, Macéna Anibot, Renel Baptiste, Justin Bertrand, Ronel Bertrand - le fils de Justin Bertrand -, Blanc Paul, André Bien-Aîmé, Gérard Blanco, Jean-Claude Baucicaut, Joseph Brignol, Noly Buron, Gilbert Cadostin, Muscadin Cajuste, le pharmacien Camille Sébastien, Horace Daccueil, Guélot Daccueil, le prêtre français Albert De Smet, Raphaël Delva, Archer Denis, Cadeau Jean Dérisié, Ambroise Desravines, Serge Donatien, Clotaire Dorneval, Paul Donneur, Ronald Duchemin, Oveze Duquesne, Rameau Estimé, Wilterne Estimé, le professeur Jésulmé Eugène, Exante ainsi connu, Servilus Exantus, Pierre Féquière, Marie Thérèse Féval, Marie Thérèse Gasner, Henri Jean, Morency Jean, Kesnel Jean, Joseph Jean, Théocel Jean, Maurace Jean-Baptiste, Antonio Jean-Baptiste, Lucio Jules, Oswald Jules, Hébert Liautaud, Lener Livert, Chéry Louissaint, Gérard Michel, Milfort alias Joe Malaka, Yves Musac, Jean-Marc Nérestant, Jacques Paul, Luc Pierre-Paul, Pipirit ainsi connu, Dès Prédestant, Eddy Price, Jean-Louis Roy, Jean Robert alias Dérécul, Raymond Saint-Louis, Luc Saint-Vil, Jean-Pierre Saint-Vil alias Ti Dyab, Saladie Thélusmond, Tony Thélusmond, le médecin Watson Telson, Ténor Auguste, Antoine Templier, Jean Rifla Vasseau, Romulus Vilbrun, Pierre Michel Vital, Wellington Élie.

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Annexe 7.5.41: Le fils de Jean-Claude Duvalier rend hommage à l’ex Président à vie François Duvalier

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In memoriam Dr François Duvalier, président à vie Le Nouvelliste | Publié le : 19 avril 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/articleprint/115846.html

En ce 21 avril 2013, je tiens à rendre un hommage à feu mon grand-père, le docteur François Duvalier. A toutes les étapes de sa vie publique, il employa sa finesse d'esprit à défendre les valeurs et les intérêts de la République d'Haïti, notamment comme médecin, codirecteur de la campagne antipianique (où le pseudonyme de PAPA DOC lui fut donné), directeur général puis ministre de la Santé publique et du Travail, écrivain, ethnologue, africologue, sociologue, membres de plusieurs Sociétés scientifiques d'outre-mer, co-fondateur des Griots, journaliste, internationaliste et vice-président du Mouvement antiapartheid (mouvement dont l'aboutissement sera la libération du président Nelson Mandela après 27 ans d'emprisonnement en Afrique du Sud , de concert avec le Dr Fidel Castro et le Colonel Mouammar Kadhafi ) et, enfin comme président à vie de la République. Le Dr François Duvalier a, tout au long de sa vie, défendu les valeurs républicaines qui étaient les siennes: intégrité et dévouement au service de celles et ceux qui lui avaient accordé leur confiance. Il fut un Haïtien convaincu, un grand nationaliste, ayant mis son énergie et ses convictions au service du pays, fidèle à ses engagements. Il fut par ailleurs un chef d'État entreprenant et dynamique, qui ne cessa jamais de promouvoir son idéal. Le docteur François Duvalier fut un homme politique éminent, à l'image de ces grands serviteurs de l'État qui ont bâti la Première République noire de ce monde. Que les dieux tutélaires de la nation veillent sur lui et sur le peuple haïtien! François-Nicolas Duvalier

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Annexe 7.5.42: Appel du Collectif à la vigilance citoyenne pour contrer le révisionnisme

http://lenouvelliste.com/ Communiqué Jean-Claude Duvalier est l'héritier du 26 avril 1963 Le Nouvelliste | Publié le : 24 avril 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/116058/Jean-Claude-Duvalier-est-lheritier-du-26-avril-1963.html

Depuis le retour en Haïti, le 16 janvier 2011, de l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier, un difficile combat est mené pour faire échec à l’impunité, refuser la banalisation de la dictature et la négation des crimes contre l’humanité perpétrés par la dynastie de François et Jean-Claude Duvalier. Depuis février 2013, les plaignants et plaignantes du Collectif témoignent, devant la Cour d’Appel de Port-au-Prince, des violations subies et des innombrables exécutions et disparitions de nos concitoyens et concitoyennes durant le règne duvaliériste. A travers divers actes, notamment l’adoption de la constitution du 29 mars 1987, l’État haïtien a reconnu les 29 ans de la sanglante dictature. Les défenseurs, supporteurs et héritiers de Duvalier tentent cependant de jeter le blâme sur les victimes et d’insulter la mémoire des milliers de personnes broyées par la machine duvaliériste. Le 26 avril est une date symbolique de notre histoire. Le 26 avril 1963, la dictature, toute griffe dehors, avait organisé un massacre. Le 26 avril 1986, le duvaliérisme sans Duvalier s’est montré, avec la répression exercée par l’armée contre la manifestation, devant Fort Dimanche, pour honorer la mémoire des victimes de la dictature. A la veille de la commémoration de la date symbolique du 26 avril, François-Nicolas Duvalier, petit-fils et fils de dictateur, cherche à réhabiliter François Duvalier, sa présidence à vie et sa succession. Si le peuple haïtien n’avait pas fait le 7 février 1986, nous aurions eu droit à un deuxième héritier assumant, comme le premier, le prix du sang et la politique d’anéantissement du pays. Le Collectif mêle sa voix à celle du Comité de commémoration du 26 avril 1963, pour refuser l’oubli, honorer la mémoire des victimes, saluer la résistance et, surtout, appeler à la vigilance citoyenne. Nous n’oublierons pas ce qu’a été la dictature duvaliériste ! Port-au-Prince, le 24 avril 2013 Danièle Magloire Coordonnatrice Collectif contre l’impunité

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Annexe 7.5.43: A la Cour d’appel le Ministère public plaide pour l’abandon des charges contre Duvalier

http://lenouvelliste.com

Affaire Duvalier: La cour d'appel se prononcera bientôt Au palais de Justice Le Nouvelliste | Publié le : 16 mai 2013 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/116891/Affaire-Duvalier-La-cour-dappel-se-prononcera-bientot.html

Le jeudi 16 mai en cours, on a assisté aux débats portant sur les observations sommaires. Les parties au procès, par l'intermédiaire de leurs avocats (partie civile, conseil de la défense et ministère public), se sont prononcées sur l'opportunité d'annuler totalement ou partiellement l'ordonnance du 29 janvier 2012 du juge d'instruction Carvès Jean. Selon le réquisitoire de Me Florence Mathieu qui représente le parquet de ladite cour, Haïti n'a pas ratifié la convention du 26 novembre 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et la convention de Rome sur la Cour pénale internationale (CPI). « Cette notion de crimes contre l'humanité n'existe pas dans notre code. Elle rend caduque l'exigence pour un Etat d'être partie à l'une des deux conventions précitées pour que la notion de crimes contre l'humanité puisse être appliquée par un juge», poursuit le ministère public. Citant une jurisprudence, Me Mathieu a déclaré que le juge d'instruction est le seul souverain appréciateur des faits de l'instruction (arrêt du 7 août 1948 du bulletin 1947-1948 pp392). De 1986 à 2011, les victimes n'ont pas porté plainte, leur action est donc prescrite, de même que celle de l'Etat haïtien, déclare Me Mathieu, arguant que la cour déchargera Jean-Claude Duvalier de toute inculpation. La partie civile, dont la défense conteste la qualité au procès, insiste sur la nécessité pour la cour d'appel de retenir à l'encontre de Jean-Claude Duvalier, l'infraction crimes contre l'humanité. Ces crimes se résument, selon elle, aux faits de bastonnade, de torture, de meurtre, d'emprisonnement et d'exil dont les plaignants auraient été victimes. La partie civile a par ailleurs insisté sur la recevabilité de leurs dossiers. Alors que le conseil de la défense a objecté que leur appel avait été interjeté en dehors du délai de procédure nouvellement prévu. La partie civile abonde aussi dans le sens de détournement de fonds et de concussion. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Les avocats de la partie civile, dont Me Jean-Joseph Exumé, Jean Frisca Alexandre, Mario Joseph, s'étaient montrés convaincants. En déposant leurs mémoires, ils sollicitent des juges le rejet de l'ordonnance du magistrat instructeur renvoyant Jean-Claude Duvalier devant le tribunal criminel, la condamnation de celui-ci pour crimes contre l'humanité. Pour sa part, la défense, représentée par Mes Fritzo Canton, Alix Jeanty, Reynold Georges, insiste avec les règles de droit à l'appui et un arrêt rendu par la Cour de cassation le 24 juillet 2001 relativement à cette affaire. Ces avocats estiment qu'avec cet arrêt, l'action était déja éteinte, se reférant aux articles 464, 465 et 466 du Code d'instruction criminelle sur la prescription formelle desdites actions depuis 1996. Ils rappellent deux « attendus que » du juge d'instruction et du commissaire du gouvernement: aucune plainte n'a été déposée contre Jean-Claude Duvalier de 1986 à 2011. Selon la défense, les plaintes déposées en 2012 sont frappées de forclusion.

Crimes contre l'humanité Quant à la notion de crimes contre l'humanité, la défense a fait une démonstration académique de la nonapplication dans le temps des conventions portant sur cette notion dans notre législation. Elle a démontré à la cour que la coutume internationale ne saurait être érigée en règles impératives qui s'imposent à tous (jus cogens). « Dès lors, des Etats ressentent encore la nécessité d'établir des convention entre eux-mêmes en vue d'une plus large admission de la notion de crimes contre l'humanité dans l'ordonnancement juridique interne de leurs pays.» Dans ce cas, l'article 276-2 de la Constitution haïtienne fait échec à l'application de la notion de crimes contre l'humanité dans notre pays. Les lois haïtiennes de procédure doivent être les seules appliquées dans cette affaire, indique la défense. « La cour, investie seulement du pouvoir judiciaire, aux fins d'appliquer les lois, conventions ratifiées et autres textes de droit positif interne, textes qui, pour être opposables aux tiers, doivent être publiés dans Le Moniteur, ne saurait inventer sa propre loi, pour ensuite la promulguer, la publier et l'appliquer. Le jugement du président Jean-Claude Duvalier dans son pays rend toute autre juridiction internationale incompétente pour connaître de la même affaire, en raison du principe sacré de droit, sanctionné par la Déclaration universelle des droits de l'homme, non bis in idem (nul ne peut être jugé deux fois pour la même cause), conclut le conseil de la défense.

Jean-Robert Fleury

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Annexe 7.5.44: Sortie le 10 décembre du film « Haïti : le règne de l’impunité »

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org Regard (Chronique hebdo) Impunité et violence: deux faces d’une même médaille mardi 17 décembre 2013 http://www.alterpresse.org/spip.php?article15684#.UtkuJbTDwp8

Par Roody Édmé* Spécial pour AlterPresse

« Non, non, tu ne m’auras pas. Je meurs mais mon peuple ne veut pas mourir. Ma parole sera parole d’ensemencement, elle sillonnera le cœur des villes. L’oiseau chantera même si l’arbre tombe. » Rodney Saint-Eloi, Récitatif au pays des ombres. Le dernier documentaire d’Arnold Antonin sur le règne ininterrompu de l’impunité ces cinquante dernières années est chargé de leçons à caractère historique et moral. En donnant la parole aux victimes, mieux en les mettant en scène, Arnold Antonin a voulu non seulement témoigner mais rendre à ces dernières leur histoire. Une sorte de thérapie derrière la caméra, face à l’opinion, pour citer une émission phare d’un journaliste lui aussi doublement victime d’assassinat et de l’impunité rampante qui voile la face du diable. Le film est un survol rapide d’une Histoire ensanglantée par les massacres et tortures qui, ont affligé un demi-siècle de notre vie de peuple, de la dictature duvaliériste à nos jours. On voit défiler des parents de victimes, mais aussi des rescapés, portant dans leurs corps ou dans leur esprit, les stigmates de la violence illégitime de régimes violents et archaïques ou de commandos de l’ombre au service de mandarins politiques. On sent que le cinéaste documentariste a voulu se livrer à une véritable anthropologie des idéologies criminelles et démonté à travers le témoignage des victimes leur mécanisme cynique et aveugle. Et en ne s’arrêtant pas au régime des Duvalier, Antonin pointe du doigt le fait reproducteur de l’impunité. Il peut perdurer sous n’importe quel régime, il peut même annihiler des régimes à caractère démocratique, dans ce cas l’ivraie finit toujours par absorber le bon grain. Le mauvais exemple de l’impunité, la destruction des mémoires, l’amnésie fabriquée constituent les semences productives d’une société marquée du sceau indélébile de la violence. Comment construire une citoyenneté sur les décombres de la mémoire ? Comment construire une identité collective si l’on ne connaît pas bien son passé ? Comment passer le témoin à des plus jeunes, si nous ne nous préoccupons pas de leur déciller les yeux et surtout de baliser le chemin ?

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Il ne s’agit pas ici de rallumer le feu sacré d’une vengeance aussi inutile que stérile. Il s’agit en fait, de comprendre les mécanismes reproducteurs de cette machine infernale, et de s’en servir comme un puissant outil pédagogique qui nous sauvera de l’amnésie coupable. De se regarder dans les yeux et de dire la vérité sur des faits de notre Histoire qui ont impliqué des centaines de milliers de citoyens victimes ou bourreaux. Et pour que comme dans certains cas où l’Histoire bégaie, les victimes ne deviennent pas des bourreaux, il faut rétablir la justice, tout au plus la vérité ! Le pardon et la réconciliation ne peuvent se faire qu’entre gens reconnaissants leurs torts et leurs devoirs. Les cadavres enfouis rapidement finissent toujours par laisser transparaître un bras, une jambe. Les plaies mal fermées finissent par se rouvrir et dégénérer en infection. L’histoire de l’Europe et de l’Afrique est pleine de vieux conflits mal réglés, de comptes mal soldés qui finissent en jeu de massacre en Serbie ou en bain de sang au Burundi et au Rwanda. Le film d’Arnold Antonin est un début dans la longue marche contre l’impunité, en restituant aux victimes leur mémoire et en cherchant à faire s’exprimer certains qui étaient aux commandes, pendant ces années de braise, il lègue à la collectivité un document stratégique, sur le passé et, un outil de réflexion sur comment dépasser nos angoisses historiques. C’est ici l’occasion de remercier les différentes associations militant contre l’impunité et qui par leur patiente, douloureuse, mais ô combien précieuse contribution participent au lancement de cette thérapie collective si nécessaire à notre devenir de peuple. Une manière « d’oser » l’avenir en vidant les contentieux passés. Avec ce film, Arnold rejoint par la grande porte, le bataillon des militants de la caméra qui, à l’instar, de Juan José Logarno et Hollman Morris ont produit des œuvres remarquables sur l’impunité en Amérique Latine. La voix calme et pénétrante de Pierre Brisson accompagne un montage et une réalisation à la hauteur du tragique des événements. Une heure et demie d’Histoire qui nous rappelle que le cinéma est le miroir du monde et que de l’autre coté de l’écran, il y a nous.

*Enseignant, éditorialiste

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Annexe 7.5.45: La Suisse statue définitivement sur l’origine illicite des fonds du clan Duvalier

http://www.20min.ch/ro/

Haïti/Suisse 16 décembre 2013 13:00; Act: 16.12.2013 13:17 http://www.20min.ch/ro/news/suisse/story/Les-fonds-Duvalier-pourront--tre-restitues-24058853

Les fonds Duvalier pourront être restitués La voie est enfin libre pour la restitution des avoirs du clan Duvalier à Haïti. L'ex-dictateur et ses proches n'ont pas recouru contre la décision du TAF qui avait confirmé le blocage des avoirs. Jean-Claude Duvalier et son clan n'ont pas non plus contesté la demande de confiscation des biens qui avait été déposée en avril 2011 par le Département fédéral des finances (DFF). Dans son arrêt, désormais définitif, le Tribunal administratif fédéral (TAF) avait relevé que l'origine de la fortune de l'ex-président JeanClaude Duvalier et de son entourage ne faisait guère de doute. Le degré de corruption de l'État haïtien était «notoirement élevé» durant la période où le clan Duvalier était au pouvoir.

Chassé en 1986, Jean-Claude Duvalier avait effectué un retour spectaculaire en Haïti en janvier 2011 après 25 ans d'exil en France. (photo: AFP)

Cinq millions de francs En l'absence de tout recours au TF, la voie est désormais ouverte pour la procédure de restitution des avoirs de Jean-Claude Duvalier. Fin 2010, les biens gelés en Suisse se montaient encore à plus de 5 millions de francs. Les juges saint-gallois avaient considéré que «la sauvegarde des intérêts de la Suisse justifiait le blocage des fonds». Ils avaient parallèlement donné leur accord à la confiscation des fonds, lancée par le DFF en prélude à la restitution des avoirs. Selon les juges du TAF, l'ex-président d'Haïti Jean-Claude Duvalier et son entourage n'ont pas démontré que l'accroissement de leur patrimoine n'était pas en relation avec l'exercice de leur fonction publique. Les conditions pour admettre l'origine illicite des fonds sont dès lors remplies. Fin d'une longue procédure Le jugement met ainsi un terme à une interminable procédure. En 1986, les autorités haïtiennes avaient demandé à la Suisse de bloquer les avoirs de l'ex-président Jean-Claude Duvalier, peu après le début de son exil en France. Depuis, les fonds sont restés gelés en permanence, soit dans le cadre de l'entraide internationale en matière pénale, soit sur décision du Conseil fédéral. Dès le 1er février 2011, les avoirs sont restés bloqués sur la base de la nouvelle loi sur la restitution des avoirs illicites. Différents mécanismes sont prévus pour une restitution rapide de l'argent et pour éviter qu'il ne tombe entre de mauvaises mains. Les avoirs devront servir à améliorer les conditions de vie de la population haïtienne, renforcer l'Etat de droit et lutter contre l'impunité des criminels.

(ats)

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Annexe 7.5.46: La Plate-Forme Haïti de Suisse veillera à ce que les fonds soient restitués de façon transparente

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org

Documents Voie libre à la restitution des fonds Duvalier à Haïti ... http://www.alterpresse.org/spip.php?article15703#.Us3EsLTDwp8

vendredi 20 décembre 2013 Communiqué de la Plate-Forme Haïti de Suisse (PFHS) Soumis à AlterPresse le 18 décembre 2013

La Plate-Forme Haïti de Suisse (PFHS) s’engage depuis sa création en 1992 à promouvoir la qualité́ de la coopération au développement entre la Suisse et Haïti. Convaincue que les droits humains font partie intégrante du concept de développement durable, elle appuie les efforts de toutes les instances qui, en Haïti, travaillent à l’instauration d’un État de droit et à la lutte contre l’impunité́. La Plate-Forme Haïti de Suisse salue l’annonce que l’arrêt du Tribunal administratif fédéral ordonnant la confiscation des fonds Duvalier est entré en force de chose jugée. Nous ne sommes pas maitres de choisir les projets qui en bénéficieront. Cela reviendra au Département fédéral (suisse) des Affaires Étrangères (DFAE) et à la Direction du Développement et de la Coopération (DDC). Nous veillerons cependant à ce que la somme soit restituée de façon transparente et que les projets soient choisis en consultant notamment les organisations de défense des droits humains avec lesquels la PFHS est en partenariat sur ce dossier depuis des années. Le comité de la PFHS Références d’information: http://www.20min.ch/ro/news/suisse/... http://www.tdg.ch/suisse/La-voie-es...

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Annexe 7.5.47: Récapitulatif sur les fonds Duvalier déposés en Suisse

Deyè mòn gen moun

Plate-forme Haïti de Suisse

http://www.pfhs.ch/ Plate-Forme Haïti de Suisse

A propos des fonds Duvalier déposés en Suisse Eléments chronologiques

L’affaire Duvalier a commencé en 1986 : peu après le départ de Jean-Claude Duvalier en exil, les autorités haïtiennes déposent une demande d’entraide judiciaire requérant la Suisse de bloquer les avoirs de l’ex-président Jean-Claude Duvalier.

En 2002, la Suisse n’a toujours pas reçu les preuves nécessaires au traitement de la demande. Le Conseil fédéral bloque les fonds puis prolonge le blocage des 7,6 millions de francs à deux reprises, avec un dernier délai au 3 juin 2007. Les négociations avec la famille Duvalier n'ayant pas abouti, la Suisse s’estime contrainte de libérer l’argent bloqué pour respecter les règles de l’Etat de droit qui garantissent la propriété de la famille Duvalier, aussi longtemps qu’il s’avère impossible de prouver l’origine frauduleuse de cet argent.

2007 La Plate-Forme Haïti de Suisse (PFHS) se mobilise en apprenant par la presse la nouvelle du prochain déblocage des fonds Duvalier en Suisse par les autorités suisses pour cause de lacune dans la loi helvétique. Mai

Lettre ouverte de la PFHS au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et mobilisation des partenaires européens à travers la Coordination Europe-Haïti (CoE-H). Communiqué de presse des ONG suisses travaillant sur le thème de l'argent des dictateurs (initiative Action Place financière suisse et Déclaration de Berne) pour réclamer le reblocage immédiat de l'argent et une action immédiate pour des mesures légales urgentes.

Juin

Lettre des ONG suisses et européennes au Conseil fédéral, communiqué de presse en Suisse et en Haïti, campagne de protestation (Suisse, Europe, Haïti, Amérique latine, Canada,…)

Il s'en suit une campagne internationale de pressions sur les autorités suisses. Devant l’indignation générale provoquée par cette situation, le gouvernement suisse décide de prolonger encore le blocage des fonds par une mesure urgente pour une nouvelle durée de trois mois, échéant fin août 2007. Juin

Lettre d'ONG suisses (dont la PFHS) au Conseil fédéral et Communiqué de presse : La Suisse ne doit pas récompenser les anciens dictateurs.

Juillet

Lettre de Madame Calmy-Rey, Présidente de la Confédération suisse en 2007, qui transmet en substance "la ferme volonté du gouvernement haïtien de rechercher des voies et moyens permettant leur rapatriement en Haïti et du lancement prochain, par les autorités judiciaires compétentes de Port-au-Prince, de procédures adéquates contre Jean-Claude Duvalier". Lettre au Premier ministre haïtien Jacques-Edouard Alexis pour s'opposer la restitution des fonds Duvalier à la famille JCD et

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Accusé de réception de M. Alexis qui "partage notre avis et transmet la requête au Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique, Monsieur René MAGLOIRE, et au Commissaire du Gouvernement, Claudy GASSANT, afin de prendre les dispositions nécessaires pour permettre à l'Etat haïtien de récupérer ces fonds au profit du peuple haïtien". La PFHS maintient le contact avec les autorités suisses et est informée des contacts qui ont eu lieu entre les autorités haïtiennes et suisses, notamment avec le commissaire du gouvernement haïtien récemment. Le procureur Gassant créée l’Unité de lutte contre la corruption (Ulcc). Octobre : La PFHS exprime sa satisfaction au Président Préval par lettre à la suite de son intervention auprès de la Présidente de la Confédération suisse, Madame Micheline Calmy-Rey, en vue d’une solution à la restitution à Haïti des fonds Duvalier bloqués dans les banques suisses. Décembre: A partir de la Coalition PEP (Personne Exposée Politiquement, soit à grand risque d'être impliquée dans la corruption, désignation qui remonte à l’Affaire Abacha, Nigeria, 2001), les organisations suivantes se constituent en Coalition des ONG suisses pour la restitution des fonds Duvalier en Haïti (la Coalition) (5 décembre) : Action de Carême, Action place financière suisse, Déclaration de Berne, Pain pour le Prochain, Plate-forme Haïti de Suisse, TRIAL, Transparency International Ŕ section suisse. La Coalition cherche des partenaires en Haïti pour le plaidoyer : Coordination Haïti-Europe, vis-à-vis de la Coordination Europe-Haïti ? Organisations haïtiennes de défense des droits humains (POHDH) ? Le DFAE agit de concert avec la Banque mondiale et l’ONU, par le biais de Monsieur Louis Joinet, expert indépendant de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Haïti et qui a joué un rôle actif auprès du gouvernement haïtien dans ses démarches judiciaires contre les Duvalier. Fin 2007 : sur mandat de la coalition, la PFHS prend contact en Haïti avec des personnalités et ONG haïtiennes susceptibles d'être les interlocuteurs haïtiens de la coalition. Dès lors, Centre œcuménique des Droits Humains, Justice et Paix, Transparency International-Haïti, Groupe d'Appui aux rapatriés et réfugiés (GARR) sont tenus au courant de l'avancement des travaux et sollicités au besoin.

2008 Les discussions avec les autorités haïtiennes ont permis de constater la volonté marquée du pays de récupérer les fonds Duvalier se trouvant en Suisse et de mener une procédure pénale permettant le dépôt d’une nouvelle demande d’entraide judiciaire. Nouvelle prolongation du blocage au 31 août 2008. Mars

La coalition rencontre à nouveau la DDIP puis M. Joinet. Sur proposition de M. Joinet, la coalition s'attelle à la recherche et au traitement de la documenta-tion concernant les violations des droits humains et autres crimes commis par Jean-Claude Duvalier sous sa présidence. Une liste de références bibliographiques et documentaires est constituée en partenariat avec des personnalités membres d'organisations de défense des droits humains en Haïti. A partir de là, une liste des sources à traiter est établie. Les documents sont recensés et traités par une juriste de TRIAL (Track impunity always): décisions judiciaires, rapports, livres-témoignages, … Des membres de la PFHS et de la coalition financent les honoraires de la juriste et les frais administratifs de la recherche. Le dossier constitué à date a été remis début novembre 2008 aux ONG haïtiennes, à la DDIP et à l'avocat mandaté par la Suisse auprès du gouvernement haïtien.

Mai

Les autorités haïtiennes ayant complété la demande d’entraide de 1986, l’Office fédéral suisse de la justice (OFJ) se charge de l’exécution de la demande d’entraide judiciaire et ordonne dans ce cadre le blocage des fonds Duvalier. Vu la spécificité de la matière, la complexité et l’ancienneté des faits sur lesquels cette requête porte, il est fait appel, pour sa rédaction, à un avocat suisse expérimenté en la matière. Ses honoraires ont été pris en charge par le DFAE.

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Dans le cadre de la procédure, l’OFJ décide que les détenteurs des comptes bloqués ont jusqu’à la fin septembre 2008 pour prouver que les avoirs ne sont pas d’origine délictueuse. En conséquence, le Conseil fédéral lève sa mesure de blocage des avoirs des Duvalier au 31 août 2008. En effet, comme le clan Duvalier a pillé les caisses de l’Etat d’une manière qui relève de l’organisation criminelle, les dispositions du code pénal sur la confiscation sont aussi applicables dans le domaine de l’entraide judiciaire, en application de la jurisprudence du Tribunal fédéral dans l’affaire Abacha (1A.215/2005), ce qui implique un renversement du fardeau de la preuve. Si les détenteurs des comptes ne répondent pas dans les délais ou ne parviennent pas à apporter la preuve requise, l’OFJ ordonnera la remise des fonds à la République d’Haïti. Les personnes concernées pourront attaquer cette décision devant le Tribunal pénal fédéral.

2009 Février Communiqué de presse de l'OFJ : Les fonds Duvalier bloqués par la Suisse (environ 7 millions de francs) seront remis à Haïti, les détenteurs des comptes n’ayant pu démontrer que ces avoirs ne sont pas d’origine criminelle. Ces avoirs devront être affectés à des projets de développement au profit de la population haïtienne. Cette décision de l’OFJ peut faire l’objet d’un recours devant le Tribunal pénal fédéral, dans les trente jours dès sa communication. Communiqué de presse de la Coalition des ONG suisses, très satisfaite du rejet par le Tribunal pénal fédéral (TPF) de la plainte de la Fondation liechtensteinoise Brouilly en sa qualité de représentante du clan de l'ex-dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier. Cette décision est un signal clair d'un avis de droit qui veut combler des lacunes avec le retournement du fardeau de la preuve. La coalition des ONG espère que le clan Duvalier renoncera à une plainte auprès du Tribunal fédéral et libérera ainsi définitivement la voie pour une restitution prochaine à Haïti des fonds bloqués en Suisse. Mars

Recours de l'avocat de la famille Duvalier au Tribunal pénal fédéral suisse. Dans un nouveau communiqué de presse, la coalition des ONG déplorent des recours douteux contre la restitution des fonds Duvalier.

Août

Décision du Tribunal pénal fédéral (TPF) de la Suisse qui rejette le recours. La Cour a conclu que les fonds devaient être remis en vue de confiscation à l’Etat requérant. Un recours au Tribunal fédéral (TF) est encore (et enfin) possible dans les 10 jours. La Coalition des ONG suisses pour la restitution des fonds Duvalier à Haïti affirme encore par communiqué de presse qu’elle est très satisfaite du rejet par le Tribunal pénal fédéral (TPF) de la plainte de la Fondation liechtensteinoise Brouilly en sa qualité de représentante du clan de l'ex-dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier. Cette décision est un signal clair d'un avis de droit qui veut combler des lacunes avec le retournement du fardeau de la preuve. La coalition des ONG espère que le clan Duvalier renoncera à une plainte auprès du Tribunal fédéral et libérera ainsi définitivement la voie pour une restitution prochaine à Haïti des fonds bloqués en Suisse. CP de la coalition des ONG suisses (dont la PFHS). Le dernier jour du délai, la famille de l'ex-dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier recourt au Tribunal fédéral (TF) contre le feu vert donné par le Tribunal pénal fédéral (TPF) à la restitution de 7 millions de francs toujours gelés en Suisse. Bien décidée à récupérer cet argent, la famille Duvalier avait affirmé que les fonds bloqués en Suisse «avaient pour unique origine la fortune personnelle de Simone Duvalier», la mère de l'ex-dictateur. Le TPF avait balayé cet argument: «il est établi que Simone Duvalier était membre de l'organisation criminelle dirigée par son mari François Duvalier, puis par son fils Jean-Claude, en sa qualité de bénéficiaire de détournements de fonds opérés systématiquement».

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2010 En Haïti : quelques jours après le terrible séisme du 12 janvier, Le 16 janvier 2011, l’ex Président à vie Jean-Claude Duvalier est de retour en Haïti, après 25 ans d’un exil doré. Le jour même, des citoyennes et des citoyens se mobilisent pour réclamer son inculpation. Le 19 janvier, des plaintes pour crimes contre l’humanité étaient déposées contre Duvalier et consorts. Le Collectif contre l’impunité est né de la rencontre solidaire de victimes du régime duvaliériste et de défenseur-e-s des droits de la personne, et de leur volonté de s’unir pour exiger le jugement de Duvalier et de ses acolytes, afin que justice soit rendue aux milliers de personnes, de toutes conditions sociales que, pendant 29 ans de règne absolu, le régime a emprisonnées, torturées, exécutées, fait disparaître, déportées. Janvier

Par arrêt rendu le 12 janvier 2010 - soit juste avant le tremblement de terre en Haïti -, mais rendu public quelques jours plus tard, le Tribunal fédéral a annulé cette décision. Les agissements reprochés à Duvalier sont prescrits selon le droit suisse, ce qui empêche le Tribunal fédéral d'accorder l'entraide judiciaire sur la base de la loi fédérale sur l'entraide judiciaire en matière pénale.

Février Poursuivant sa politique tendant à éviter que la place financière suisse ne serve de refuge à des avoirs acquis illicitement, le Conseil fédéral a décidé de bloquer à nouveau les avoirs Duvalier sur la base de la Constitution. Compte tenu de leur origine criminelle, le Conseil fédéral évite ainsi que ces avoirs (env. USD 5.7 mio.) ne soient libérés au profit du clan Duvalier, considéré comme une organisation criminelle par le Tribunal pénal fédéral. Dans le même temps, le Conseil fédéral a chargé le DFAE de faire le nécessaire pour mettre en consultation, d'ici la fin du mois, un projet de Loi fédérale qui devrait ultérieurement permettre de confisquer ces avoirs. Octobre Nouvelle loi fédérale sur la restitution des valeurs patrimoniales d’origine illicite de personnes politiquement exposées "Loi sur la restitution des avoirs illicites, LRAI", avec délai référendaire au 20 janvier 2011.

2011 Février Entrée en vigueur de la nouvelle loi (LRAI) et nouveau blocage des fonds sur la base de cette loi. Avril

Action en confiscation des fonds Duvalier

Septembre : L’action en confiscation n’a pas pu être notifiée à Nicole Duvalier, à Marie Denise

Duvalier, à Simone Duvalier, à Michèle Duvalier ainsi qu’à Jean-Claude Duvalier; la notification par voie diplomatique a échoué pour ce dernier.

Décembre Le Tribunal administratif fédéral et le Département fédéral des finances invitent les défendeurs à produire leur réponse dans un délai de 30 jours. Invitation au défendeur J.-Cl. Duvalier à désigner un domicile de notification en Suisse et à communiquer l’adresse de ses sœurs et de son ex-épouse.

2012

Septembre : Considérant qu’à ce jour l’action en confiscation n’a pas pu être notifiée à Nicole

Duvalier, à Marie Denise Duvalier, à Simone Duvalier, à Michèle Duvalier ainsi qu’à JeanClaude Duvalier; la notification par voie diplomatique ayant échoué pour ce dernier, qu’en revanche la Fondation Brouilly a déposé sa réponse à l’action le16 février 2012, que le Département fédéral des finances (DFF) a répliqué le 28 août 2012, le Tribunal administratif fédéral invite les défendeurs Jean-Claude Duvalier, Nicole Duvalier, Marie Denise Duvalier,

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Simone Duvalier et Michèle Duvalier, à prendre connaissance auprès du greffe du Tribunal de l’action en confiscation introduite le 29 avril 2011 par le Département fédéral des finances, de la réponse à l’action de la Fondation Brouilly du 16 février 2012 et de la réplique du 28 août 2012 du demandeur à l’action, dans un délai de 30 jours dès la publication du présent dispo-sitif dans la Feuille fédérale. Il informe toutes les parties qu’en l’absence de requête de preuves ou de débats dans le délai de 30 jours dès réception de la présente, respectivement dès l’envoi des actes de procédure pour les défendeurs qui en auront fait la demande conformément au point 2 du présent dispositif, la procédure préparatoire sera close et un jugement sera rendu dans la présente cause.

2013 En Haïti - février : Jean-Claude Duvalier est convoqué à la Cour d'appel de Port-au-Prince. Un Comité de commémoration du 26 avril 1963 (50 ans) et du 26 avril 1986 honorent la mémoire des victimes, saluent la résistance et appellent à la vigilance citoyenne. Septembre : Le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours déposé par JCD et consorts

contre le blocage de leurs fonds décidé par le Conseil fédéral. De même, le TAF a admis l'action en confiscation introduite par le Département des finances. Sous réserve d'un recours la voie est ouverte pour la procédure de restitution des valeurs patrimoniales confisquées.

Décembre : Les avoirs de Jean-Claude Duvalier, considérés illicites et gelés en Suisse depuis

1986, pourront être restitués à Haïti, après la récente confirmation définitive de l’arrêt du Tribunal administratif fédéral (TAF) La Plate-Forme Haïti de Suisse a salué l'annonce que l’arrêt du Tribunal administratif fédéral ordonnant la confiscation des fonds Duvalier est entré en force de chose jugée.

2014 En Haïti, A l’occasion de la date anniversaire du 7 février 1986, date de la fin de la dictature duvaliériste et du départ de Jean-Claude Duvalier d’Haïti, le Collectif contre l’impunité en Haïti lance le site : Haïti - Lutte contre l'impunité http://www.haitiluttecontre-impunite.org/ Dernière minute En Haïti, 20 février 2014, la cour d’appel de Port-au-Prince casse l’ordonnance du juge Carvès Jean rejetant les poursuites contre l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier, pour crimes contre l’humanité. Par ce verdict de la cour d’appel, les actes reprochés contre Jean Claude Duvalier constituent des crimes contre l’humanité et sont de par leur caractère, imprescriptibles, rappellent les juges. Elle exige en même temps l’identification de tous ceux entrant dans la rubrique de consorts, la précision de la situation les inculpés décédés, l’audition à titre de témoins de tous les citoyens cités par les plaignants à l’occasion de leur déposition devant la cour. Secrétariat PFHS - CLZ - 20 février 2014

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Annexe 7.5.48: Protestation contre la présence de Duvalier à la commémoration officielle de l’indépendance

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org Documents Haïti-Duvalier : Des organisations s’expriment contre la banalisation de l’impunité et le révisionnisme mardi 7 janvier 2014 http://www.alterpresse.org/spip.php?article15749#.Us29wbTDwp8

Déclaration conjointe contre la présence de l’inculpé Jean-Claude Duvalier aux cérémonies officielles du jour de l’indépendance d’Haïti Document soumis à AlterPresse le 7 janvier 2014

Nous signataires de cette déclaration, issus de la société civile haïtienne organisée, sommes profondément indignés par la présence du dictateur déchu Jean-Claude Duvalier et de l’ex militaire putschiste Prosper Avril, sur invitation du Président en exercice Michel Martelly, aux cérémonies officielles du jour de l’indépendance d’Haïti, le 1er janvier 2014 aux Gonaïves. Cette présence des anciens tortionnaires est une provocation et une insulte inqualifiable à la nation. Elle est également un affront à la mémoire des milliers de victimes de la dictature duvaliériste. Jean-Claude Duvalier est aujourd’hui inculpé, par devant la justice haïtienne, pour crimes financiers et crimes contre l’humanité. Les victimes, ayant engagé des poursuites contre l’ex-dictateur, attendent encore une décision de la Cour d’appel par rapport aux crimes contre l’humanité ; crimes imprescriptibles et non amnistiables. La justice ne saurait être confondue avec la vengeance. Ce sont les duvaliéristes et leurs tontons macoutes qui ont eu le monopole de la violence d’État, avec tout ce que cela implique. Ils sont jusqu’à présent protégés par l’impunité systémique qui prévaut dans le pays. Les victimes de la dictature et les défenseurs des droits humains, qui ne confondent pas réconciliation et déni de justice, s’insurgent contre la banalisation de l’impunité, le révisionnisme historique et exigent que la Cour d’appel rende enfin sa décision, conformément à son mandat et par respect pour les victimes qui ont courageusement porté plainte contre Duvalier. Nous appelons les différents secteurs de la société à refuser la réhabilitation du duvaliérisme et la banalisation de l’impunité. Port-au-Prince, le 7 janvier 2014. Organisations signataires 1. Collectif contre l’impunité 2. CEDH (Centre œcuménique des droits humains) 3. Centre Pétion Bolivar 4. CRESFED (Centre de recherche et de formation économique et sociale pour le développement) 5. GARR (Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés) 6. Kay Fanm (Maison des femmes) 7. JILAP (Commission épiscopale Justice et Paix) 8. MOUFHED (Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement) 9. POHDH (Plateforme des organisations haïtiennes de défense des droits humains) 10. RNDDH (Réseau national de défense des droits humains) 11. SOFA (Solidarité des femmes haïtiennes). Pour les organisations signataires et authentification Sylvie W. Bajeux, Directrice exécutive CEDH

Pierre Espérance, Directeur exécutif RNDDH

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Annexe 7.5.49: Le gouvernement justifie l’invitation de Duvalier à la fête de l’indépendance

http://lenouvelliste.com/

Jean-Claude Duvalier aux Gonaïves, la présidence s'explique sur l'invitation Le Nouvelliste | Publié le : 09 janvier 2014

«Le président Michel Joseph Martelly n'a pas recouvert l'ancien chef d'État Jean-Claude Duvalier du manteau de l'impunité en l'invitant à la cérémonie de célébration du 210e anniversaire de l'indépendance du pays le 1er janvier aux Gonaives, a admis le porte-parole de la présidence, jeudi sur Magik 9. Non en majuscule et en gras, a martelé l'ancien journaliste avec insistance. Selon lui, le geste du président haïtien survenu à l'occasion de la célébration de l' indépendance du pays, obtenue grâce à l'union des noirs et des mulâtres doit être pris pour ce qu'il est. Un appel à l'unité. «Le président n'avait pas invité uniquement Jean- Claude Duvalier. Mais tous les anciens chefs d'État encore vivants. Les autres ne se sont peut-être pas présentés pour une raison ou pour une autre»,a expliqué Lucien Jurat, invitant ceux qui ont une opinion contraire à ne pas faire d'amalgame. Ce qui les portera, dit-il, à perdre le sens de certains gestes pourtant nobles. Paraphrasant le chef de l'Etat haïtien, Lucien Jurat soutient que l'œuvre de la reconstruction du pays ne doit pas être l'œuvre d'un seul homme ou d'un groupe d'hommes. Cela doit impliquer tout le monde, at-il souligné. De nombreuses organisations de la société civile avaient exprimé au début de cette semaine leur indignation à cause de « la présence du dictateur déchu Jean-Claude Duvalier et de l'ex-militaire putschiste Prosper Avril sur invitation du président en exercice Michel Martelly, aux cérémonies officielles du jour de l'indépendance d'Haïti, le 1er janvier 2014 aux Gonaives(.. .). «Cette présence des anciens tortionnaires est une provocation et une insulte inqualifiable à la nation. Elle est également un affront à la mémoire des milliers de victimes de la dictature duvaliériste», avaient-elles dénoncé. Ces organisations se sont insurgées contre ce qui représente, selon elles, «la banalisation de l'impunité et le révisionnisme historique». Elles exigent que la cour d'appel rende enfin sa décision, conformément à son mandat et par respect pour les victimes qui ont courageusement porté plainte contre Duvalier. Une position saluée par le comité de la Plateforme Haïti de Suisse (PFHS), membre de la Coalition des ONG suisses pour la restitution des fonds Duvalier à Haïti. Danio Darius

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Annexe 7.5.50: Huit mois après la fin des audiences la Cour d’appel n’a toujours pas rendu sa décision Communiqué du Collectif contre l’impunité

Le jugement de Duvalier, toujours un enjeu pour la démocratie haïtienne http://rnddh.org/le-jugement-de-duvalier-toujours-un-enjeu-pour-la-d%C3%A9mocratie-ha%C3%AFtienne-16-jan-2014/

Cela fait 3 ans depuis que l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier est revenu au pays, persuadé qu’il n’aurait pas à craindre l’action de la justice pour les crimes financiers et les crimes contre l’humanité* perpétrés sous sa présidence à vie héritée de son dictateur de père, François Duvalier. Des citoyens et citoyennes, conscients des profonds dommages causés par le pouvoir absolu des Duvalier et refusant l’inacceptable réconciliation sans justice, se sont mobilisés pour exiger le jugement de Jean-Claude Duvalier et de ses complices. Le 19 janvier 2011, l’État haïtien a réactivé la poursuite engagée contre Duvalier en avril 2008. Une trentaine de victimes ont aussi porté plainte. L’instruction bâclée a abouti le 27 janvier 2012 à une ordonnance, truffée d’erreurs de droit et de faits, blanchissant Duvalier pour les crimes contre l’humanité et ne retenant contre lui que de simples délits financiers. Alors que les victimes ont contesté cette honteuse ordonnance, l’État n’a pas fait appel de cette décision. Du 13 décembre 2012 au 16 mai 2013, la Cour d’appel a entendu 8 victimes et Duvalier. Les faits suivants ont caractérisé les audiences: actes d’intimidation de la part des duvaliéristes; attitude du Ministère public défendant ouvertement Duvalier et non la société; avocats du dictateur agressant systématiquement les victimes et tentant d’en faire des accusés; juges peu proactifs pour rétablir le cadre des audiences; silence absolu sur les détournements de fonds. Huit mois après la fin des audiences, la Cour d’appel n’a toujours pas pris de décision. En décembre 2013, les tribunaux suisses ont définitivement statué pour la restitution à Haïti des fonds détournés par Duvalier. Le gouvernement n’a eu aucune réaction officielle. Par contre, il a jugé bon d’inviter Duvalier le 1er janvier 2014, aux commémorations de l’indépendance, ignorant son statut d’inculpé et persistant dans son cautionnement de l’impunité et la banalisation de la dictature. Dans son discours du 13 janvier à l’Assemblée nationale, le Président de la république a déclaré que le pardon et la réconciliation ne signifiaient pas oubli et réhabilitation. Des actes doivent suivre une telle déclaration pour attester d’une réelle volonté politique. Le gouvernement va-t-il retirer à Duvalier son passeport diplomatique? Cesser de lui restituer des biens et de lui payer une pension présidentielle? Formellement aviser les tribunaux haïtiens des résultats du long et minutieux travail effectué en Suisse et établissant l’origine illicite des fonds Duvalier? Duvaliérisme sans Duvalier et vassalisation du système de justice sont de lourds héritages de la dictature. Le défi est de taille pour le Collectif, mais il entend continuer à se mobiliser pour mettre en lumière les crimes de la dictature, obtenir le jugement de Duvalier et de ses acolytes et contrecarrer le dangereux révisionnisme. Le Collectif réclame que la Cour d’appel cesse de bafouer les droits des citoyens et citoyennes et fixe un délai pour statuer sur le dossier. Il exhorte le gouvernement à se plier aux exigences d’un État de droit démocratique, en maintenant les poursuites contre Duvalier et consorts.

Non à l’ignominie duvaliériste ! Non à l’impunité ! Oui à la vérité ! Oui à la justice ! Port-au-Prince, le 16 janvier 2014 Danièle Magloire Coordonnatrice

* Arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc.

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Annexe 7.5.51: Pardonner à qui? Se réconcilier avec qui?

Comité Devoir de Mémoire Déclaration à l‘occasion des trois ans du retour de Jean-Claude Duvalier en Haïti

Le Président de la République ne semble pas avoir conscience des contradictions internes de son message le Jour de l'Indépendance à Gonaïves. Mettre à côté de lui Jean-Claude Duvalier et Prosper Avril n'est pas une invitation à la réconciliation et à l'union, quoi qu'il en pense. C'est encore moins un pardon. Le geste suggère en réalité que le Président a décidé d'ignorer les souffrances des victimes de la dictature sous prétexte de réconciliation, alors qu'il ne fait que renouer des liens personnels qu'il n'a jamais reniés. On ne peut pas lui en vouloir d'être loyal à ses anciennes amitiés. En revanche, on peut, on doit, vivement le condamner de tenter de blanchir des bourreaux, sans que ceux-ci aient au moins reconnu leurs torts, ou à défaut, que la Justice ait établi leur degré de culpabilité dans les crimes, exactions, vols et abus de pouvoir qui ont eu lieu pendant leurs présidences. Car enfin, que nous demande-t-on? D'oublier? De pardonner? De se réconcilier? Oublier? Mais comment peut-on oublier quand on nous a ôté l'affection d'un parent? Comment peut-on oublier quand on nous a dépouillé de nos biens? Comment peut-on oublier un viol? Des tortures? Des humiliations? Pardonner? Mais à qui pardonnerait-on? Les faits ne sont pas officiellement reconnus et établis puisqu'aucune enquête n'a jamais abouti. Se réconcilier? Mais avec qui? Personne n'est jamais passé à l'aveu et personne ne reconnait avoir causé du tort à d'autres. Jusqu'à aujourd'hui, aucun bourreau de la dictature des Duvalier, ou des autres pouvoirs qui ont suivi, n'a jamais exprimé un regret, n'a jamais demandé qu'on lui pardonne quoique ce soit, n'a jamais reconnu aucun tort. Au contraire! Ils se promènent dans la république comme si de rien n'était. Ils sont reçus partout où ils vont, comme si de rien n'était. Et c'est nous, les victimes, qui sommes culpabilisées, parce que nous refusons d'oublier. Parce que nous ne pouvons rien pardonner à personne sans reconnaissance des faits, sans admission d'avoir fait du mal à d'autres. Parce qu'il n'y a pas de réconciliation possible avec des gens qui refusent de reconnaitre leurs torts. À défaut d'oubli et de pardon, la société offre aux bourreaux, comme l'a fait le Président, l'indifférence à la souffrance de l'autre, la banalisation du crime. C'est là sans doute le plus grand danger qui nous guette, en tant que pays, en tant que nation. L'indifférence à l'autre contribue à l'égoïsme et la banalisation du mal encourage l'impunité. Port-au-Prince, le 16 janvier 2014 Pour le Comité Devoir de Mémoire Maguerite Bouchereau-Clérié CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Annexe 7.5.52 : 28 ans après la victoire sur la terreur et l’obscurantisme il faut à nouveau faire front

Collectif contre l’impunité Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains

Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - Kay Fanm (Maison des femmes) Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED) - Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)

Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) -

[email protected]

Communiqué

7 février : Symbole du refus de la dictature Le 7 février 1986, date de la chute de la dynastie Duvalier, est l’aboutissement de longues et terribles années de lutte qui ont emporté des milliers de compatriotes. Après la brutale répression du 28 novembre 1980, qui a particulièrement ciblé la presse, les populations sont à nouveau mises hors jeu. La flamme de la résistance est ravivée en 1984 par les jeunes, en particulier ceux de la ville des Gonaïves, qui expriment leur rejet de la présidence héréditaire et du pouvoir absolu qu’elle implique: « A bas la misère à vie! A bas le chômage à vie! A bas la torture! A bas la dictature! » C’est l’indignation d’une jeunesse meurtrie qui porte les derniers coups de butoir à un régime qui ose encore transformer la seule bibliothèque d’une ville en caserne pour les tontons macoutes. Le refus de l’impunité, pour l’assassinat de trois écoliers ─Jean-Robert Cius, Makenson Michel, Daniel Israël─ tués lors des manifestations du 28 novembre 1985 dans la ville des Gonaïves, est le fer de lance de la contestation qui embrase les jeunes à travers le pays. « Qu’on arrête, juge et condamne, à la fois les criminels qui ont assassiné les trois jeunes et celui qui a donné l’ordre de tirer sur le peuple, même si c’est une des plus hautes autorités de l’État. » Ces jeunes aspiraient à ce « qu’enfin le duvaliérisme soit à jamais déraciné.» Vingt-huit ans après cette victoire sur la terreur et l’obscurantisme, il faut à nouveau faire front pour contrecarrer le retour officiel du duvaliérisme et la volonté de garantir l’impunité à ceux qui ont imposé le silence et fait régner la peur; Ceux là même qui ont sciemment organisé l’infernale machine à avilir, torturer, assassiner, violer, disparaître, exiler, déposséder, siphonner. On veut faire croire à la jeunesse d’aujourd’hui que la soit disant révolution duvaliériste était porteuse de liberté, d’épanouissement et de progrès. On tente de travestir l’histoire en prétendant que ce régime ─ancré dans l’arbitraire, la brutalité féroce, l’oppression, le culte de la personnalité, la domestication des institutions et la terreur─ n’avait rien de particulier. Continuer à refuser l’inacceptable est un choix que le Collectif et bien d’autres, ici en Haïti et ailleurs, ont résolument fait. Au nom de la vérité et de la justice. En mémoire des innombrables victimes. En hommage à la résistance de tous ces jeunes qui, durant ces 29 ans de dictature, sont généreusement montés au front pour la liberté. Refuser l’inacceptable, c’est faire vivre l’esprit du 7 février.

Le duvaliérisme a été une tragédie pour Haïti! L’impunité ne peut-être le destin d’Haïti! Port-au-Prince, le 7 février 2014 Danièle Magloire Coordonnatrice

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Annexe 7.5.53: La Cour d’appel ordonne un complément d’instruction incluant les collaborateurs de Duvalier

Réseau alternatif haïtien d'information http://www.alterpresse.org

Perspectives Haïti-Justice : La cour d’appel reconnaît la nécessité de juger Jean-Claude Duvalier pour crimes contre l’humanité jeudi 20 février 2014 http://www.alterpresse.org/spip.php?article16030#.UzDH7IWXa6Y

P-au-P, 20 févr. 2014 [AlterPresse] --- La cour d’appel de Port-au-Prince casse l’ordonnance du juge Carvès Jean, qui avait rejeté les poursuites contre l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier pour crimes contre l’humanité. Ce verdict a été rendu, ce jeudi 20 février 2014, par les juges Jean Joseph Lebrun, président de la troisième section à la cour d’appel de Port-auPrince, Durin Duret et Marie Jocelyne Casimir, juges en audience ordinaire, en présence de Florence Mathieu, représentante du ministère public, a observé l’agence en ligne AlterPresse. La cour ordonne, conformément aux dispositions de l’article 19 de la loi du 26 juillet 1979 sur l’appel pénal un supplément d’instruction, et désigne pour ce faire le juge Durin Duret Junior de la cour d’appel de Port-au-Prince. Le juge Duret aura, ainsi, à instruire une nouvelle fois l’affaire en auditionnant tous les plaignants qui n’ont pas été entendus. La cour déclare irrecevable les plaintes de certains plaignants comme, Alix Fils-Aîmé, Adrienne Gilbert, Marie Nicole Guillaume, Albert Larochelle et Vitale Auguste, pour n’avoir pas été interjetées dans le délai légal. Elle exige en même temps l’identification de tous ceux entrant dans la rubrique de consorts, la précision de la situation les inculpés décédés, l’audition à titre de témoins de tous les citoyens cités par les plaignants à l’occasion de leur déposition devant la cour, l’accomplissement de tous actes d’instruction nécessaires, notamment l’identification d’autres témoins éventuels au cours de la nouvelle information.

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Accusé de graves violations des droits humains, notamment de meurtres et d’actes de torture à l’encontre d’opposants politiques, ainsi que de corruption, l’ex-dictateur Jean-Claude Duvalier est l’objet de poursuites pour crimes économiques et crimes contre l’humanité, depuis son retour en Haïti, le 16 janvier 2011, après un exil de 25 ans en France. Par ce verdict de la cour d’appel, les actes reprochés contre Jean-Claude Duvalier constituent des crimes contre l’humanité et sont de par leur caractère, imprescriptibles, rappellent les juges. « De sérieux indices relatifs à la participation indirecte et à la responsabilité pénale de l’inculpé JeanClaude Duvalier sont évidents, pour s’être abstenu de prendre les mesures nécessaires et raisonnables, afin d’empêcher la commission des crimes et prendre les mesures raisonnables de punir les auteurs », avance le juge Jean Joseph Lubrun. Satisfaite de cette décision, la responsable du Collectif contre l’impunité, Danièle Magloire, croit que « ce verdict va aider à réformer le système judiciaire. La cour a montré qu’elle n’ignorait pas les 29 ans de la dictature, ce que le juge Carvès Jean ignorait ». Alix Fils Aimé, l’une des victimes de la dictature, croit que la jeunesse doit être en alerte. « Il ne s’agit pas de ma petite personne et de ce que j’ai souffert. Tout simplement les jeunes Haïtiens doivent être vigilants sur ce dossier pour que plus jamais, il n’y ait de dictature dans le pays ». Robert Duval, autre victime de la dictature, estime que « c’est un grand pas franchi, puisqu’ils vont appeler tous les acolytes de Jean Claude Duvalier qui vont pouvoir être trainés devant la justice ». « C’est une victoire historique pour un pays dans lequel les riches et les puissants ont toujours été audessus de la loi. Si Jean-Claude Duvalier venait à être jugé pour crimes contre l’humanité, ce serait le procès le plus important de l’histoire d’Haïti », affirme pour sa part Reed Brody, conseiller juridique auprès de Human Rights Watch. Toutefois, les avocats de Jean-Claude Duvalier ont annoncé qu’ils porteront l’affaire devant la cour de cassation, qui rend des décisions sans appel possible, pour récuser définitivement la décision de la cour d’appel. [jep kft gp apr 20/02/2014 16:10]

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Annexe 7.5.54: La Cour d’appel casse l’ordonnance du 27 janvier 2012

COMMUNIQUÉ DE PRESSE POUR CIRCULATION IMMÉDIATE

Jean-Claude Duvalier pourrait être poursuivi pour crimes contre l’humanité en Haïti Procès Duvalier : une étape historique pour la lutte contre l’impunité, selon Avocats sans frontières Canada Port-au-Prince, le 20 février 2014 Ŕ Par une décision attendue depuis mai 2013, la Cour d’appel de Portau-Prince a accueilli l’appel de l’ordonnance rendue le 27 janvier 2012 par le juge d’instruction Carvès Jean, laquelle renvoyait l’ex « président à vie » Jean-Claude Duvalier à procès uniquement pour les accusations de crimes économiques et rejetait les accusations de violations des droits humains. La Cour d’appel a conclu que Jean-Claude Duvalier pouvait faire l’objet d’un procès en Haïti non seulement pour les crimes économiques qui lui sont reprochés mais également pour des crimes contre les personnes qui équivalent en droit international à des crimes contre l’humanité. En effet, la Cour d’appel estime que les crimes contre l’humanité, de caractère imprescriptible en droit international, peuvent soutenir une accusation en droit haïtien. La Cour d’appel ordonne donc que l’instruction soit rouverte et prise en charge par un nouveau magistrat, le juge Durin Duret. La Cour a exigé que la poursuite de l’instruction permette d’entendre l’ensemble des plaignants et des personnes inculpées, ainsi que l’identification de nouveaux témoins outre ceux mentionnés dans le mémoire des plaignants. Du même souffle, la Cour précise qu’au terme de son examen du dossier, il existait « de sérieux indices » contre Jean-Claude Duvalier. « La décision marque un tournant historique en reconnaissant haut et fort l’application en Haïti du droit international et l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité », a déclaré maître Pascal Paradis, directeur général d’ASFC. « La Cour d’appel reconnaît qu’Haïti a l’obligation d’enquêter de façon diligente sur les allégations portées par les plaignants ». ASFC tient à souligner le courage et la résilience des plaignants et à féliciter ses partenaires du Collectif contre l’impunité pour cette victoire, laquelle a été accueillie avec « beaucoup d’émotion » par ces derniers. ASFC entend demeurer à leurs côtés et continuer à appuyer le travail de représentation des victimes. Les avocats de Jean-Claude Duvalier ont déjà manifesté leur intention de se pourvoir en appel de cette décision devant la Cour de cassation. « Entre-temps, ASFC se réjouit de cette victoire qui constitue une étape historique pour la lutte contre l’impunité. ASFC souhaite rendre hommage à la justice haïtienne, qui a su par ce jugement démontrer qu’elle pouvait s’acquitter de son rôle en toute indépendance. Nous espérons que cette décision contribuera au renforcement de l’État de droit en Haïti », a continué maître Paradis.

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Annexe 7.5.55 : Le Canada attentif à l’affaire Duvalier comme gage de la gouvernance démocratique et de l’État de droit

http://lenouvelliste.com/ Cour d’appel de Port-au-Prince Jean-Claude Duvalier jugeable pour crime contre l’humanité Le Nouvelliste | Publié le : 20 février 2014 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/127848/Jean-Claude-Duvalier-jugeable-pour-crime-contre-lhumanite.html

[…] Réactions du Chargé d’affaires du Canada en Haïti Duvalier doit répondre devant la justice des nombreuses allégations documentées d’abus. Ce jeudi, en fin d’après-midi, Gilles Rivard, chargé d’affaires du Canada en Haïti, a « salué aujourd’hui une nouvelle étape dans le processus judiciaire visant l’ancien président Jean-Claude Duvalier ». «Après un délai de près d’un an, le Canada est satisfait que la cour d’appel ait enfin rendu aujourd’hui son ordonnance, mais beaucoup de travail reste à faire avant que justice ne soit faite », selon le chargé d’affaires. « Il est certain que cette décision de la cour d’appel, qui ordonne un supplément d’instruction et rétablit les accusations de crime contre l’humanité contre Jean-Claude Duvalier, représente un pas en avant, mais ça n’est qu’une étape, et il faut que le processus judiciaire suive son cours de façon transparente et crédible.», souligne Gilles Rivard. Le Chargé d’affaires a aussi rappelé que « le Canada croit fermement que Jean-Claude Duvalier doit répondre devant la justice des nombreuses allégations documentées d’abus qui auraient eus lieu durant les quinze années où il a été à la tête de l’État haïtien ». Le Canada considère que la gouvernance démocratique et l’État de droit sont des éléments essentiels pour qu’un développement durable et un environnement sécuritaire prennent racine en Haïti. Le cas de l’ancien président Duvalier représente une opportunité de démontrer que ces éléments importants sont présents en Haïti et que l’État haïtien remplit ses responsabilités en fournissant, d’un côté, un système de justice indépendant et efficace à ses citoyens, et, de l’autre, un procès équitable pour les personnes accusées de crime. Roberson Alphonse [email protected]

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Annexe 7.5.56 : Les avocats de Duvalier fulminent contre l’arrêt de la Cour d’appel

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Les avocats de Duvalier rejettent l’arrêt de la cour d’appel http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/128437/Les-avocats-de-Duvalier-rejettent-larret-de-la-cour-dappel.html

Le Nouvelliste | Publié le : 11 mars 2014 Monstruosité juridique, mascarade judiciaire, violation du droit haïtien, tels sont les différents qualificatifs utilisés par les avocats de l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier, mardi, pour parler de l’arrêt de la cour d’appel autorisant les poursuites contre Duvalier. Les avocats, ayant signifié une requête de renvoi pour cause de suspicion à la cour d’appel, entendent saisir la Cour de cassation. Une nouvelle page dans ce qui devient une saga judiciaire.

Quelques semaines après le verdict de la cour d’appel ordonnant les poursuites contre l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier, les avocats de l’ancien président à vie sont montés au créneau et rejettent d’un revers de main cette décision. « C’est un complot contre la personne du président Jean-Claude Duvalier. Cet arrêt n’a absolument rien à voir avec le droit haïtien », a déclaré Me Reynold Georges, avocat de l’ancien dictateur, qui soutient que la cour d’appel a violé tous les principes de droit en prenant cet arrêt. Avant de rencontrer la presse, le cabinet de maître Reynold Georges avait déposé à la cour d’appel une requête en renvoi pour cause de suspicion légitime. Dans cette requête, les avocats de Duvalier mettent en question la partialité des juges de la cour d’appel dans le cadre de cette affaire. Sur ce point, ils critiquent surtout la désignation du juge Durin Duret Jr pour diriger un supplément d’instruction alors que celui-ci aurait déjà pris position sur l’affaire. «Le supplément d’information désiré et ordonné n’est qu’une manœuvre pour masquer la décision qu’ils auront à prendre contre le sieur Jean-Claude Duvalier comme ils l’ont déjà démontré dans leur œuvre, par le fait de désigner un juge de cette composition, Durin Duret Jr, pour faire ce supplément d’instruction dont la conviction est faite pour avoir interrogé les parties au procès, lu l’arrêt avec les CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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deux autres membres de la composition, rejeté les questions les plus pertinentes des avocats requérants et décidé conjointement, ce qui est un acte contraire au principe d’équité et d’impartialité ; que le juge d’instruction instruit avant tout à charge et à décharge », soutiennent les avocats de l’ancien dictateur dans la requête adressée à la cour d’appel mardi matin. Les avocats déclarent avoir reçu le soutien de plusieurs autres membres du barreau de Port-au-Prince qui ont décidé volontairement d’apporter leur soutien à la cause de l’ancien dictateur. Dans la salle du Ritz Kinam où ils intervenaient, on pouvait noter la présence de plusieurs hommes de loi, dont Gérard Gourgue et Osner Févry. Ce dernier a particulièrement appuyé la position des avocats de Jean-Claude Duvalier qu’il estime être du côté du droit. Des sympathisants et des étudiants de l’école de droits des Gonaïves parrainés par l’ancien dictateur étaient présents aussi dans la salle. Sur l’accusation de crime contre l’humanité retenue par la cour d’appel, qui évoque la coutume internationale, les avocats de Jean-Claude Duvalier, soutiennent que le terme n’est pas reconnu par le droit haïtien. Maître Frizto Canton, l’un des avocats de Duvalier, s’en est particulièrement pris aux juges de la cour d’appel sur le point concernant les crimes contre l’humanité. «Que les juges de la cour d’appel me disent ici, quelle loi de la République traite de la notion de crime contre l’humanité. Qu’un juge me donne la preuve d’une convention portant sur le crime contre l’humanité qui a été signé par Haïti et ratifié par le Parlement haïtien pour lui permettre d’entrer dans l’ordonnancement juridique interne », a-t-il martelé, ajoutant que la coutume internationale ne saurait remplacer les lois internes du pays. L’avocat, très amer, a évoqué l’article 276 et suivant de la Constitution haïtienne soutenant que «toute règle internationale, toute convention, accord, sous quelque forme que ce soit, avant d’entrer dans le droit interne doit être sanctionné ou ratifié. «Nous ne disposons ici d’aucune convention ratifiée portant sur les crimes contre l’humanité. En ce sens, je crois que les juges devraient aller réviser leurs copies, si ce n’est pas la malveillance qui a guidé leur esprit », a-t-il indiqué. Les avocats, qui n’excluent pas que des crimes ont eu lieu sous la présidence de Jean-Claude Duvalier, se sont montrés plutôt hostiles aux procédures utilisées par les tribunaux et continuent de défendre le principe de la prescription prévu par la loi dans certains cas. « Les crimes sont réprimés par des lois, et les lois attribuent un délai pour porter plainte. Une fois ce délai passé, vous n’avez plus rien à dire », a argumenté Me Reynold Georges. Les avocats de Jean-Claude Duvalier promettent de porter l’affaire par-devant la Cour de cassation et affirment avoir « récusé les juges de la cour d’appel pour la partialité qu’ils montrent dans le traitement de ce dossier ». « Nous sommes déterminés à aller jusqu’au bout avec eux. Nous allons nous battre contre eux », a soutenu l’avocat Alix Aurélien Jeanty, traitant de monstruosité juridique l’arrêt de la cour d’appel. Louis-Joseph Olivier [email protected]

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Annexe 7.5.57: Analyse du RNDDH du pourvoi de Duvalier contre l’arrêt de la Cour d’appel

Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) www.rnddh.org Dossier Jean-Claude DUVALIER Le RNDDH dénonce le caractère fantaisiste des recours exercés par le Dictateur et ex-Président à vie 26 mars 2014 http://rnddh.org/dossier-jean-claude-duvalier-le-rnddh-d%C3%A9nonce-le-caract%C3%A8re-fantaisiste-desrecours-exerc%C3%A9s-par-le-dictateur-et-ex-pr%C3%A9sident-%C3%A0-vie-mars-2014/

A. Introduction Dans le cadre du dossier opposant le dictateur et ex-Président à vie Jean-Claude DUVALIER à plusieurs victimes de son régime dictatorial, le 20 février 2014, la Cour d'Appel de Port-au-Prince a rendu un arrêt avant-dire droit. Cet arrêt a été attaqué par les avocats du dictateur et plusieurs déclarations publiques ont été réalisées par ces derniers. C'est pourquoi, dans le but d'édifier l'opinion publique nationale et internationale autour de ce dossier, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) estime de son devoir de publier ce rapport qui présente les faits et analyse, au regard de la Loi, de la jurisprudence et de la doctrine, les différentes actions entreprises par les avocats du dictateur et ex-Président à vie.

B. Historique des faits Le 16 janvier 2011, le dictateur et ex-Président à vie, Jean-Claude DUVALIER est rentré en Haïti après vingt-cinq (25) années d’exil. Dès son retour, des victimes de son régime dictatorial ont porté plainte contre lui pour entre autres, exécutions sommaires, disparitions forcées, assassinats, meurtres, bastonnades, harcèlements, persécutions politiques, viols, vols, arrestations arbitraires, tortures, emprisonnements, déportations et enlèvements, des faits répréhensibles, constituant par leur nature et par leur caractère systématique, des crimes contre l'humanité. Le Juge d'instruction Carvès JEAN a été choisi pour mener l'enquête judiciaire. Le 27 janvier 2012, le Magistrat a rendu son ordonnance dont le dispositif est ainsi libellé : « PAR CES MOTIFS, écartons le réquisitoire définitif du Commissaire du Gouvernement, nous, Carvès JEAN, Disons qu’il existe des indices graves et concordants tendant à renvoyer le nommé Jean-Claude DUVALIER au Tribunal Correctionnel pour être jugé pour le délit de détournements de fonds public et déclarons qu’il y a lieu à suivre contre lui, le renvoyons en conséquence au Tribunal Correctionnel pour être jugé conformément aux dispositions des articles 117 et 118 du Code d’Instruction Criminelle. Ordonnons enfin que toutes les pièces du dossier ensemble de la présente ordonnance soient transmises au Commissaire du Gouvernement pour les suites de droit. Donné de nous ... Il est ordonné ... En foi de quoi ... » CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Cette ordonnance est contestée tant par l'inculpé lui-même que par les victimes du régime dictatorial instauré dans le pays de 1971 à 1986. Les 15, 16 et 17 février 2012, l'inculpé Jean-Claude DUVALIER et les plaignants, parties civiles dans l'instance, ont interjeté appel. Le 20 février 2014, soit deux (2) ans plus tard, la Cour d'Appel de Port-au-Prince a rendu un arrêt avant-dire droit dont le dispositif est ainsi conçu : « Par ces Motifs, la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, en la Chambre du Conseil, le Ministère Public entendu, reçoit en la forme l'appel de l'inculpé Jean Claude Duvalier en date du 23 février 2012 et celui des plaignants parties civiles dans l'instance : Michèle Montas, Nicole Magloire, Denise Prophète, Michelle Dorbes Romulus, Manuel Romulus, Volcy Michel, Henri Faustin, Jean Jacques Volaire, Erge Frémont, Robert Duval, Raymond Davius, interjeté par déclaration au greffe du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, respectivement en dates des 15, 16 et 17 février 2012 ; Par contre, déclare irrecevable celui des nommés Alix Fils-Aimé, Adrienne Gilbert, Marie Nicole Guillaume, Albert Larochelle et Vital Auguste pour n'avoir pas été interjeté dans le délai légal ; Dit qu'il a été mal ordonné et bien appelé ; Infirme l'ordonnance querellée ; Reconnait que la notion de crime contre l'humanité fait partie de la Coutume Internationale et que la coutume internationale fait partie du droit interne haïtien. Dit et déclare que les actes reprochés au nommé Jean Claude Duvalier constituent des crimes contre l'humanité et sont, de par leur caractère continu, imprescriptibles et que les dispositions des articles 464, 465 et 466 du CIC invoqués par l'inculpé Jean Claude Duvalier ne sont pas applicables en l'espèce ; Dit que de sérieux indices relatifs à la participation indirecte et à la responsabilité pénale de l'inculpé Jean Claude Duvalier sont évidents pour s'être abstenu de prendre les mesures nécessaires et raisonnables afin d'empêcher la commission des crimes et en punir les auteurs ; Rejette l'exception tirée du principe de la litispendance soulevée par l'inculpé Jean Claude Duvalier parce que non fondée; Rejette les observations de la partie inculpée relatives au dossier du Ministère Public qui se trouve à la Cour de Cassation et ce conformément aux dispositions de l'art. 99, 4e et 5e alinéas du décret du 22 Aout 1995 sur l'organisation judiciaire ; Dit que, relativement aux plaignants régulièrement intervenus dans l'instance et qui n'ont pas été entendus par le Juge d'Instruction, aux inculpés pouvant entrer dans la rubrique "et consorts", aux inculpés décédés et aux témoins éventuels mentionnés par les plaignants à l'occasion de leurs dépositions par devant la Cour, une nouvelle information consistant en : 1o) l'audition de tous les plaignants qui n'ont pas été entendus par le Juge d'Instruction, lesquels sont intervenus dans l'instance par des plaintes formelles produites au Parquet du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince et transmises au Juge d'Instruction avec des réquisitoires supplétifs ; 2o) la convocation et l'interrogatoire de tous les inculpés cités dans les réquisitoires d'informer du Parquet en date des 20 avril 2008 et 18 janvier 2011, l'identification de ceux entrant dans la rubrique "et consorts" et la précision de la situation des inculpes décédés ; 3o) l'audition, à titre de témoins, de tous les citoyens cités par les plaignants à l'occasion de leurs dépositions par devant la Cour, l'accomplissement de tous actes d'instruction si nécessaires notamment, l'identification d'autres témoins éventuels au cours de la nouvelle information, s'avère nécessaire ; Ordonne, conformément aux dispositions de l'article 19 de la loi du 26 juillet 1979 sur l'Appel Pénal, un supplément d'instruction. Désigne, pour ce faire, dans le délai légal, le Juge Durin Duret de la Cour d'Appel de Port-au-Prince. Donné de nous... Il est ordonné, etc. En foi de quoi, etc. »

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C. Contestations de l'ordonnance avant-dire droit par l'inculpé Le dictateur et ex-Président à vie Jean-Claude DUVALIER a décidé d'attaquer l'ordonnance avant-dire droit. Ainsi, ses avocats ont exercé plusieurs recours : 

Le 7 mars 2014, Me Reynold GEORGES, l'un des avocats de Jean-Claude DUVALIER a fait une déclaration en pourvoi contre l’arrêt avant-dire droit de la Cour d’Appel de Port-au-Prince en date du jeudi 20 février 2014.



Dans l'après midi du même jour, soit le 7 mars 2014, dans une déclaration faite au greffe de la Cour d’Appel de Port-au-Prince, le dictateur et ex-Président à vie Jean-Claude DUVALIER, agissant par le biais de ses avocats, a introduit une demande de renvoi par devant une autre Cour d’Appel pour cause de suspicion légitime aux termes de l’article 429 du Code d'Instruction Criminelle (CIC).



Le 14 mars 2014, les avocats du dictateur ont signifié aux parties copie de la requête en date du 10 mars de l’année en cours, adressée aux Président et Juges de la Cour de Cassation de la République contenant les moyens de la demande de dessaisissement et du pourvoi. Et depuis, ils multiplient dans la presse des interventions faisant croire que la Cour d’Appel de Port-au-Prince ne peut plus continuer à instruire l’affaire du seul fait de ces recours. I.

Sur le caractère suspensif de la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime

Les avocats du dictateur prétendent que le seul fait de présenter à la Cour de Cassation de la République, une demande de dessaisissement pour cause de suspicion légitime, dessaisit la Cour d’Appel de Port-au-Prince. Rien n’est plus faux. S’il en était ainsi, ce serait exposer l’instruction criminelle à des longueurs et des entraves insurmontables. Il a été jugé que : « La demande en renvoi pour cause de suspicion légitime n’est pas suspensive de sa nature » (Cassation Française arrêt du 5 mai 1927, Code d’instruction criminelle expliqué, p. 302). Dans le cadre des procédures particulières en règlement des juges et renvoi d’un Tribunal à un autre, le législateur haïtien, allant dans le sens de l’ancienne législation française, prévoit une procédure en deux (2) étapes, selon les articles 414 à 439 du CIC. En effet, compte tenu du caractère sommaire de la demande en renvoi, la Cour peut décider au vu de la requête et sur simples mémoires. Si elle ne le fait pas, elle rend un arrêt de « Soit communiqué ». Cet arrêt transmis au juge récusé, le Magistrat sera tenu de transmettre à la Cour les pièces du dossier avec son avis sur la récusation. C’est à ce moment et à ce moment seulement que le juge d’instruction doit suspendre son instruction. Les articles 433 et 418 du CIC annoté par Menan PIERRE-LOUIS et Patrick PIERRE-LOUIS sont clairs : Article 433: Lorsque le renvoi sera demandé par le prévenu, l'accusé ou la partie civile, et que le tribunal de cassation ne jugera à propos ni d'accueillir ni de rejeter cette demande sur-le-champ, l'arrêt en ordonnera la communication à l'officier chargé du Ministère public près le tribunal ou le juge d'instruction saisi de la connaissance du délit et enjoindra à cet officier de transmettre les pièces avec son avis motivé sur la demande en renvoi. L'arrêt ordonnera de plus, s'il y a lieu, que la communication sera faite à l'autre partie. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Article 418 : L'arrêt de "Soit communiqué" fera mention sommaire des actes d'où naîtra le conflit et fixera, selon la distance des lieux, le délai dans lequel les pièces et les avis motivés seront apportés au greffe. La notification qui sera faite de cet arrêt aux parties, emportera de plein droit sursis au jugement du procès; et en matière criminelle, à la mise en accusation, ou, si elle a déjà été prononcée, à la formation du jury, ou à l'examen mais non aux actes et procédures conservatoires ou d'instruction. La jurisprudence haïtienne va aussi dans le sens de la jurisprudence française en la matière. A titre d'exemple, la Cour de Cassation haïtienne a jugé que : « Ce n’est qu’en présence de l’arrêt de Soit communiqué » prévu par l’article 418 du CIC qu’un tribunal contre lequel une suspension légitime avait été élevée, doit surseoir au jugement du procès dont il est saisi » (Cassation haïtienne, arrêt du 17 novembre 1879, Code d’Instruction Criminelle annoté par Menan PIERRE-LOUIS et Patrick PIERRE-LOUIS, éditions Zémès, p. 132). II. Du fondement du recours Le renvoi d’un Tribunal à un autre est une dérogation extraordinaire aux lois de la compétence. C'est pourquoi, il est universellement admis que la récusation d’un Tribunal doit être basée sur des faits précis, détaillés ou des présomptions graves et concordantes. Or dans la déclaration faite par le dictateur Jean-Claude DUVALIER au greffe de la Cour d’Appel de Portau-Prince, on ne relève pas des faits précis, détaillés ou des présomptions graves et concordantes. Jean-Claude DUVALIER, dans sa requête adressée à la Cour de Cassation, a plutôt présenté des moyens qui, s’ils étaient justifiés, constitueraient plutôt un excès de pouvoir et non une cause de suspicion légitime. Ces passages tirés de la requête du dictateur Jean-Claude DUVALIER suffisent à renseigner : "Le sieur Jean-Claude Duvalier, Président de la République d'Haïti, propriétaire, demeurant et domicilié à Pétion-ville, identifié ..... A l'honneur de vous exposer : [...] Qu'il importe de souligner que la Cour d'appel de Port-au-Prince, par déraisonnement tout à fait inimaginable, a cru pouvoir agir en lieu et place de la cour pénale internationale (CPI), de la cour internationale de justice, de la cour caribéenne de justice, du tribunal international de l'ex Yougoslavie et du tribunal pénal international du Rwanda, les deux derniers, deux tribunaux ad hoc, deux tribunaux d'exception. La Cour d'appel de Port-au-Prince n'a pas du tout la même mission que ces cours et tribunaux de droit international qu'elle ne saurait remplacer en aucun cas et pour aucune raison ; Que les juges de cette composition de la Cour d'appel de Port-au-Prince encore dans leurs raisonnements dénués de sens et de logique juridique par conséquent grotesques, semblent avoir légiférer pour Haïti en lieu et place du pouvoir législatif seule autorité désignée par la Constitution pour faire des lois et pour ratifier les traités et conventions internationaux; [... ] Il convient, à ce stade, de noter que la Cour de Cassation haïtienne autorise les magistrats récusés à ne pas tenir compte des recours non soutenus par des preuves. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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En effet, « S'il est de jurisprudence qu'une récusation totale des membres d'un tribunal équivaut à une suspicion légitime, il n'est pas moins constant que, lorsqu'une partie récuse partiellement ou en entier un tribunal, elle doit présenter ses griefs contre chaque magistrat, afin que le tribunal récusé puisse les connaitre et s'abstenir de juger, s'ils sont fondés sur des faits indéniables. C'est dans la déclaration même faite au greffe, que le récusant doit signaler ses griefs, et ce conformément à l'article 381 du Code de procédure civile. Une simple déclaration faite au greffe qu'on récuse en masse un tribunal avec réserve de soumettre ses moyens à la juridiction supérieure, n'est pas conforme à ce que prescrit l'article 381. Dans ce cas, le tribunal peut valablement passer outre à la récusation et juger l'affaire qui l'avait motivée, dans la pensée qu'elle n'est pas sérieuse.» (Cassation haïtienne, arrêt du 26 décembre 1876, note 6 mise au bas de l’article 429 du CIC annoté par Menan PIERRE-LOUIS et Patrick PIERRE-LOUIS, p134 -135). III. Sur le caractère suspensif des recours en matière pénale soulevé par les avocats de Jean-Claude DUVALIER. Les avocats du dictateur et ex-Président à vie Jean-Claude DUVALIER reprochent aux juges de la Cour d’Appel de Port-au-Prince de ne pas respecter le caractère suspensif des recours en matière pénale, prescrit par l’article 305 du CIC pour avoir décidé de passer outre un recours exercé par leur client contre un premier arrêt-avant dire droit. Cependant, l’article 305 du CIC placé dans la section II du chapitre V traitant de l’examen, du jugement et de l’exécution en matière criminelle prescrit que : « La partie publique, la partie civile, le condamné auront un délai de trois jours francs, à partir du prononcé du jugement pour se pouvoir en cassation par déclaration au greffe du tribunal qui l'a rendu. Ce délai est suspensif. Ces dispositions sont applicables à tous jugements rendus en matière criminelle.» Cet article ne traite nullement des actes d’instruction. Or la Cour d’Appel de Port-au-Prince jugeant en ses attributions d’appel d’ordonnance du Juge d’Instruction applique les règles du Cabinet d’instruction. IV. Sur le Pourvoi en Cassation exercé par le dictateur contre l'arrêt ordonnance avant-dire droit de la Cour L’arrêt-ordonnance de la Cour du 20 février 2014 ordonne un supplément d’information et désigne un Magistrat de la composition pour boucler l’information. Jean-Claude DUVALIER peut-il exercer un pourvoi en Cassation contre cet arrêt ? L’article 21 de la loi du 26 juillet 1979 sur l’Appel Pénal permet d’attaquer en Cassation l’arrêt clôture. Il précise que : « Le recours en Cassation est ouvert contre l'arrêt rendu par la cour sur appel d'une ordonnance du juge d'instruction dans les formes et conditions prévues par la Code d'instruction criminelle. Dans les vingtquatre heures du dépôt de l'ordonnance, le greffier le transmet au commissaire du gouvernement près la cour d'appel. Celui-ci à la réception du dossier est tenu d'envoyer dans ce même délai au greffe de la Cour de Cassation toutes les pièces, après les avoir cotées ainsi que les pièces de la procédure. Le pourvoi est formé à peine de déchéance dans un délai de trois (3) jours, qui court contre le Ministère public, à partir de la date de réception du dossier; contre le prévenu ou la partie civile dans un délai de trois (3) jours à compter du jour où l'ordonnance leur sera signifiée à personne ou à domicile élu ou à domicile réel s'il n'y a pas de domicile élu. CIDH - Audience thématique du 28 mars 2014 Mémoire // Annexes I - Collectif contre l’impunité et ASFC Obstacles à l’accès à la justice rencontrés par les victimes du régime de Jean-Claude Duvalier en Haïti

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Si le prévenu est en état de détention, les significations prévues au paragraphe précédent seront faites dans les quarante-huit (48) heures de la réception du dossier, à peine de prise à partie contre le commissaire du gouvernement. » De plus, l’article 323 du CIC prescrit ce qui suit : « Le recours en cassation contre les jugements préparatoires et d'instruction ne sera ouvert qu'après le jugement définitif. L'exécution volontaire de tels jugements ne pourra, en aucun cas, être opposée comme fin de non-recevoir. La présente disposition ne s'applique point aux jugements rendus sur la compétence. »

D. Conclusions Les dispositions légales, la jurisprudence et la doctrine démontrent que les recours exercés par les avocats du dictateur et ex-Président à vie Jean-Claude DUVALIER sont fantaisistes. De plus, ces derniers, après avoir exercé ces recours, tentent, via la presse, d'influencer l'opinion publique avec pour objectif de faire croire que leurs actions en contestation sont de nature à stopper l'instruction du dossier par la Cour d'Appel de Port-au-Prince. Or, à la lumière de l'analyse présentée dans ce rapport, l’arrêt du 20 février 2014 tombe dans la catégorie des arrêts d’instruction et ne peut être attaqué qu’après l’arrêt de clôture. Et, les Magistrats récusés ont la possibilité de passer outre les recours parce qu'ils ne sont pas soutenus par des preuves irréfutables. Par ailleurs, le RNDDH souligne à l'attention de tous que l'esprit de cet arrêt-ordonnance répond aux aspirations de la population haïtienne et à celles des victimes et de leurs ayant-droit car la société a besoin de savoir ce qui s'est réellement passé. Les proches des disparus ont besoin de savoir comment leur père, leur mère, leurs enfants, leur mari, ont été enlevés pour ne plus jamais retourner chez eux. Les victimes de viols, de vols, d'arrestations et de détentions arbitraires et illégales, de disparitions forcées, d'exécutions sommaires réclament justice. Et, tous ceux qui se sont rendus coupables de ces crimes doivent être punis. En ce sens, le RNDDH rappelle que c'est à la Justice qu'il incombe de chercher et d'expliquer à la population ce qui s'est passé au cours de la dictature instaurée en Haïti de 1971 à 1986. C'est donc pourquoi la population haïtienne ainsi que les victimes attendent qu'une instruction complète soit menée dans le cadre de ce dossier et que les bourreaux, sbires du dictateur et ex-Président à vie, qui œuvraient sous les ordres et avec la bénédiction de ce dernier, soient traduits par devant les instances de jugement pour les crimes commis. Il est donc évident que l'arrêt-ordonnance rendu par la Cour de Cassation en date du 20 février 2014, constitue un pas important vers la recherche de la vérité. Fort de tout cela, le RNDDH encourage vivement la Cour d’Appel de Port-au-Prince à poursuivre son information jusqu'à l’arrêt-ordonnance de clôture.

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