CHAPITRE 1
Coups de feu On se gelait le derrière devant le PFK, sur le boulevard Henri-Bourassa. Tout à coup, des coups de feu ont retenti. Bang ! BANG BANG BANG ! Tout le monde s’est mis à courir. Une Mercedes noire est passée à toute vitesse. Je suis tombé, et mon coude a frappé le trottoir. Kamal aussi s’est retrouvé par terre, et il s’est mis à sacrer parce que ses jeans étaient déchirés. Binny, lui, n’a pas bougé. Je pense qu’il était 9
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en état de choc, debout, les yeux dans le vide. Il faisait tellement froid que je pouvais voir son souffle. — À terre, espèce d’imbécile ! lui a ordonné Kamal. Tu veux te faire descendre ou quoi ? Binny n’a rien répondu. Il a baissé les yeux vers nous et a souri comme un dérangé. Comme s’il n’avait pas entendu les coups de feu. Les employés du PFK sont sortis et ont regardé vers le bout de la rue. — Ils tiraient sur quoi ? a demandé un gars court, à la peau foncée, avec un fort accent asiatique. Binny a haussé les épaules, et il a cessé tout à coup de sourire. Il a répondu : — Un homme qui était debout près des magasins. Je me suis levé lentement et j’ai secoué mes vêtements pour enlever la poussière. Puis j’ai
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aidé Kamal à se relever. Il bougonnait encore à cause de ses jeans. Il bougonne tout le temps, Kamal. Il a très mauvais caractère. D’autres personnes sont sorties du resto. Tout le monde essayait de comprendre ce qui s’était passé. Soudain, on a entendu deux autres coups de feu. Au moment où tout le monde se remettait à l’abri, la même voiture noire est repassée, encore à toute vitesse. Je l’ai regardée filer. Au bout de la rue, le conducteur a freiné brusquement. Une des portes arrière s’est ouverte et un homme est sorti de la voiture en courant. Il portait un sac. Il s’est enfui dans une ruelle, du côté de la gare. Vingt secondes plus tard, il est remonté dans la voiture. Alors que des sirènes de police retentissaient au loin, la Mercedes noire a grillé un feu rouge et a disparu. J’ai dit, en entrant dans le PFK : — On se croirait au Far West ! Kamal a haussé les épaules : 11
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— Bof ! S’ils veulent s’entretuer, laisseles faire. Les policiers sont arrivés cinq minutes plus tard. On les a vus fermer la rue autour des magasins. Ils étaient plusieurs, certains avec des chiens, qui sortaient des voitures et des fourgons. Ensuite, ce sont les unités d’intervention armées qui ont débarqué. Je les ai regardées interroger les gens et examiner le sol à la recherche d’indices. J’ai dit à mes amis : — Je me pousse. — Moi aussi, a dit Binny. Pas question que je parle aux bœufs. Je savais qu’il avait un peu de marijuana sur lui. Kamal voulait rester autour, essayer de savoir ce qui se passait. Pendant que Binny et moi, on s’éloignait, il nous a crié : — À plus ! 12
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— Tu coupes à travers le parc ? m’a demandé Binny. J’ai secoué la tête. Je voulais vérifier quelque chose, mais je ne voulais pas qu’il le sache. J’ai décidé de mentir : — Nan… Faut que je passe chez ma sœur Lauren. Une fois Binny parti, j’ai marché vers la ruelle près de la gare, celle où les tireurs avaient jeté quelque chose. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça. Je voulais juste voir ce qu’ils avaient laissé derrière eux. La ruelle était sombre, éclairée seulement par la lune. J’ai fini par trouver un sac à dos noir, caché derrière des poubelles. Il m’a semblé un peu lourd quand je l’ai soulevé. Je l’ai ouvert et j’ai regardé à l’intérieur. C’est à ce moment-là que je l’ai vu. Le gun, un .38.
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