Avis du Conseil national des droits de l'Homme sur le projet de loi N ...

Vu la demande d'avis sur le projet de loi N° 31-13 relatif au droit d'accès à l'information formulée le 29 juillet 2016 par le Président de la Chambre des ...
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Avis du Conseil national des droits de l’Homme sur le projet de loi N° 31-13 relatif au droit d’accès à l’information Introduction 1 . Vu la demande d’avis sur le projet de loi N° 31-13 relatif au droit d’accès à l’information formulée le 29 juillet 2016 par le Président de la Chambre des conseillers et adressée au Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) conformément aux dispositions de l’article 16 du Dahir 1.11.19 du 1er mars 2011 portant création du CNDH et à l’article 282 du Règlement intérieur de la Chambre des conseillers ; 2 . Conformément au 2ème alinéa de l’article 25 du Dahir 1.11.19 du 1er mars 2011 portant création du CNDH, le Conseil contribue « au renforcement de la construction démocratique par le biais de la promotion du dialogue sociétal pluriel et le perfectionnement de tous les moyens et mécanismes appropriés à cet effet » ; 3 . Conformément à l’article 13 du Dahir portant création du CNDH, le Conseil « examine et étudie l’harmonisation des textes législatifs et réglementaires en vigueur avec les conventions internationales relatives aux droits de l’Homme et au droit international humanitaire que le Royaume a ratifiées ou auxquelles il a adhéré, ainsi qu’à la lumière des observations finales et des recommandations émises par les instances onusiennes concernant les rapports qui leur sont présentés par le gouvernement » ; 4 . Conscient de l’impact important de l’adoption de la loi visée à l’article 27 de la Constitution sur la protection, la consécration et la promotion du droit d’accès à l’information ; le CNDH, qui accompagne par ses propositions le processus d’élaboration des lois relatives aux droits de l’Homme, accorde un intérêt particulier et légitime aux formes d’organisation légale du droit d’accès à l’information. Cet intérêt est également fondé et motivé par «l’approche basée sur les droits de l’Homme» mentionnée explicitement dans l’exposé des motifs du Dahir portant création du Conseil. 5 . Les propositions contenues dans ce mémorandum relatif au droit d’accès à l’information ont été élaborées du point de vue des normes internationales des droits de l’Homme sur la liberté d’information, en particulier les références normatives et les déclarations pertinentes sur le plan national et international. Le CNDH a également réalisé une étude comparative portant sur de nombreux textes juridiques régissant le droit d’accès à l’information dans plusieurs pays démocratiques, afin que ses propositions se rapprochent des bonnes pratiques en vigueur dans ces pays. Le CNDH a suivi l’évolution du processus d’élaboration du projet de loi relatif au droit d’accès à l’information, depuis la publication de sa première version mise en ligne sur le site du Secrétariat général du gouvernement (du 26 mars au 25 avril 2013). 1

La première version a fait l’objet d’un mémorandum du Conseil présenté par son Secrétaire général lors du Colloque national sur le droit d’accès à l’information tenu le 13 juin 2013. Le CNDH a ensuite analysé la deuxième version de l’avant-projet de loi, présentée au Conseil de gouvernement du 1er août 2013 et celle du projet de loi publiée le 25 avril 2014 et adoptée au Conseil de gouvernement du 31 juillet 2014. Le présent mémorandum a pour objet la version du projet de loi jointe à la demande d’avis telle qu’adoptée par la Chambre des représentants le 20 juillet 2016. 5 . Les références suivantes ont été prises en compte dans l’élaboration de ce mémorandum :  La Constitution, notamment son préambule et ses articles 27, 30 et 34 ;  La Déclaration universelle des droits de l’Homme, notamment l’article 19 ;  Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, notamment les alinéas 2 et 3 de l’article 19, tel que commenté par l’Observation générale N° 34 du Comité des droits de l’Homme et à la lumière de l’Observation générale N° 31 dudit Comité sur la nature de l’engagement juridique auquel sont tenus les Etats membres du Pacte, notamment le paragraphe 6 de l’Observation précitée4 ;  La Convention sur les droits des personnes en situation de handicap, notamment les articles 9 et 21 ;  La Convention des Nations unies sur la lutte contre la corruption, notamment les articles 10 et 13 ;  La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, notamment son article 18.  La Déclaration des Nations unies sur le progrès et le développement dans le domaine social conformément à la résolution 2542 (D-24) de l’Assemblée générale des Nations unies du 11 décembre 1969 ;  La Déclaration des Nations unies sur l’usage du progrès scientifique et technologique au service de la paix et le bien de l’humanité, adoptée conformément à la résolution 3304 (D-30) de l’Assemblée générale des Nations unies, du 10 novembre 1975 ;  La Déclaration des Nations unies sur le millénaire ;  La Déclaration sur le droit d’accès aux informations qui a été adoptée à la clôture du Colloque organisé par l’UNESCO et la Faculté de la presse, Université de Queensland (Brisbane, Australie) les 2 et 3 mai 2010 à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse. Par ailleurs, le CNDH s’est inspiré des rapports des Rapporteurs spéciaux sur la liberté d’opinion et d’expression, notamment en ce qui concerne les aspects suivants :     

Les principes de régulation juridique du droit d’accès à l’information ; Le droit d’accès à l’information comme droit autonome ; La nature des obligations des Etats en matière de mise en œuvre de ce droit ; Les principes de publication proactive ; La définition des restrictions légitimes et conformes au droit international des droits de l’Homme.

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De plus, le CNDH a pris en considération les recommandations de l’Instance Equité et Réconciliation, dont notamment : - La recommandation mentionnée dans la première partie relative aux garanties constitutionnelles en vue de la protection des droits de l’Homme ; - La recommandation N° 1 du sous-paragraphe 8.1 consacrée à la responsabilité du gouvernement en matière de sécurité ; - La recommandation N° 2 de la partie 8.4 relative au contrôle national des politiques et des interventions sécuritaires ; - la recommandation N° 2 i relative au contrôle régional et local des opérations de sécurité et de la préservation de l’ordre. Le CNDH a aussi élaboré une étude comparative portant sur plusieurs textes juridiques qui régissent le droit d’accès à l’information, à savoir :  La loi britannique de la liberté d’information, parue en 2000 ;  La loi fédérale suisse relative au principe de transparence dans l’administration, publiée le 17 décembre 2004, telle qu’elle a été complétée et modifiée par la loi du 1er janvier 2009 ;  La loi française N° 78-753 du 17 juillet 1978 portant sur diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public ainsi que diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal ;  La loi américaine N° 5 U.S.C §522 sur la liberté d’information14, telle qu’elle a été modifiée et complétée en 2007 et en 2009 ;  La loi canadienne N° ch.A-1 (1985) L.R.C sur l’accès à l’information de 1985. Le CNDH a également examiné la loi type pour l’Afrique sur l’accès à l’information, publiée par la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples. Le CNDH s’est, par ailleurs, référé aux conclusions du séminaire international sur le droit d’accès à l’information organisé par le CNDH les 21 et 22 septembre 2012. 6 . Les recommandations du CNDH relatives au projet de loi sur le droit d’accès à l’information peuvent être argumentées comme suit. Argument 1 : Le CNDH rappelle que le paragraphe 2 de l’article 27 de la Constitution doit être lu en rapport avec le paragraphe 3 des articles 30 et 34 du même texte fondamental. Argument 2 : Le CNDH rappelle le processus d’adhésion du Maroc au « Partenariat pour un gouvernement transparent (Open government partnership) » qui préconise l’élaboration d’une feuille de route basée sur des principes et objectifs de la Déclaration du gouvernement ouvert, adoptée en septembre 2011 par les Etats parties à cette initiative, qui se sont engagés à accroître la disponibilité de l’information sur l’activité gouvernementale, à renforcer la participation de la société civile, à garantir les standards les plus élevés en matière d’intégrité professionnelle au sein de l’administration et à élargir le champ d’accès aux nouvelles technologies pour l’ouverture et la reddition des comptes. Argument 3 : Le CNDH rappelle le lien entre les dispositions du projet de loi sur l’accès à l’information et les autres dispositions juridiques régissant ce droit. Nous pouvons citer par exemple les dispositions des articles 3 à 14 de la loi 31.80 qui régit la protection du consommateur et les dispositions relatives à l’information du consommateur. S’inscrit dans la 3

même logique l’article 18 du Dahir N° 1-58-008 publié le 24 février 1958 portant statut général de la fonction publique tel qu’il a été modifié et complété.

Argument 4 : Le CNDH rappelle ses recommandations relatives à certains types d’information devant faire l’objet d’une publication proactive à l’instar des résultats détaillés des échéances électorales par bureau de vote. 7 . Les recommandations du CNDH relatives au projet de loi sur le droit d’accès à l’information sont présentées ci-après. 7 – 1 . Concernant l’article 1er : Le CNDH recommande que l’article 1er du projet de loi sur le droit à l’information soit renforcé en faisant référence :  Aux dispositions des articles 30 et 34 de la Constitution ;  Aux dispositions des articles 9 et 21 de la Convention relative aux droits des personnes en situation de handicap ;  Aux engagements du Maroc dans le cadre de l’initiative « Partenariat pour le gouvernement ouvert ». S’agissant des objectifs de cette loi, l’article devrait mettre en exergue l’encouragement des investissements, l’appui à la recherche scientifique, le développement de la presse d’investigation et le renforcement du rôle de la société civile dans le cadre de la démocratie participative. 7 – 2 . Concernant les définitions (article 2 a) et les instances obligées de fournir l’information (article 2 b) : Le CNDH estime qu’il faut définir les concepts de manière précise en cohérence avec les objectifs du projet de loi afin d’assurer l’accès à l’information. Le projet de loi doit préciser en outre le statut des institutions et entreprises privées chargées de mission du service public, quelle que soit la forme de réalisation de cette mission (gestion déléguée, concession, partenariat public/ privé) comme étant des entités couvertes par le champ d’application de cet article, dans les limites des missions du service public assurées par ces institutions et entreprises. Le CNDH estime important d’inclure les associations ayant le statut d’utilité publique et celles qui bénéficient en vertu de la loi de fonds publics dans le champ d’application de cet article. Le CNDH recommande que la loi attribue à la Commission nationale du droit d’accès à l’information (qui pourrait être attachée au Médiateur), la possibilité en cas de besoin, d’élargir le spectre des instances concernées par la mise en œuvre de la loi. 7 – 3 . Concernant les personnes concernées par le droit d’accès à l’information (articles 3 et 4)

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Le CNDH, qui opte pour une lecture systémique de la Constitution, rappelle que l’article 27 de la Constitution qui consacre le droit d’accès à l’information 1 doit être lu à la lumière du troisième alinéa de l’article 30 qui prévoit que « les ressortissants étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes et citoyens marocains conformément à la loi ». Partant de cette lecture, le CNDH propose d’élargir la portée du droit d’accès à l’information en faisant référence au Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans son article 19, où le terme « personne » est utilisé pour consacrer le droit d’accès à l’information. Aussi, la Déclaration universelle des droits de l’Homme utilise dans son article 19 le terme « individu » pour énoncer le même droit. Il est évident que l’utilisation de ces différentes désignations des personnes concernées par le droit d’accès à l’information permet l’intégration des personnes physiques et morales, des citoyens marocains et des ressortissants étrangers résidant régulièrement au Maroc. Il est à signaler qu’une étude du droit comparé en la matière a permis d’identifier deux stratégies de définition juridique des personnes concernées par le droit d’accès à l’information : la première consacre dans la loi le droit d’accès à l’information au profit des étrangers résidant régulièrement sur le territoire national (la loi canadienne dans son article 4), alors que la deuxième stratégie utilise le concept d’« individu » pour désigner les titulaires de ce droit (les lois américaine (paragraphe 552), française (article 1), britannique (article 1), suisse (article 6), ainsi que la loi-type africaine (principes généraux a). Sur la base de ce qui précède, le CNDH recommande que la loi comprenne des dispositions prohibant toute forme de discrimination dans le traitement des demandes d’accès à l’information, que ce soit pour cause d’handicap ou d’identité du demandeur d’information. La loi doit stipuler également qu’il n’est pas permis de poser des contraintes de justification de la demande aux demandeurs. 7 – 4 . Concernant les mesures de publication proactive (article 10) Conscient que la liste des informations objet d’une publication proactive est limitée, le CNDH estime par conséquent qu’il serait utile de l’élargir pour inclure à titre non exhaustif :  Les résultats détaillés des élections par bureau de vote ; o Les informations relatives aux caractères public ou privé des réunions des instances gouvernementales et législatives, en précisant, si besoin, la procédure pour suivre les travaux de celles-ci et, dans le cas des réunions tenues à huisclos, les modalités d’obtention des conclusions si nécessaire ;  Les informations sur la qualité de l’environnement et les études d’impact ;  Les rapports et études réalisés au profit de l’administration publique ou financées par cette dernière, y compris les travaux de recherches réalisées dans le cadre universitaire, les statistiques et les marchés publics programmés ou conclus ainsi que leurs bénéficiaires ;  L’intégralité de l’appui public accordé par l’Etat ou par les collectivités territoriales aux tiers ;  Les études de faisabilité des projets ;

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 Un rapport annuel rendu public par chaque institution visée par la loi sur les types et le nombre de demandes d’informations reçues, celles qui ont été satisfaites et celles qui sont rejetées. Le Conseil recommande aussi que soit stipulée la nécessité de publier les informations à titre proactif dès qu’elles sont prêtes, et de les mettre à jour régulièrement, de façon lisible et exploitable, quel que soit leur support. Dans tous les cas, le CNDH estime qu’il serait judicieux de confier à la Commission nationale du droit d’accès à l’information (à créer selon le CNDH auprès du Médiateur), la responsabilité de définir un régime modèle de publication proactive de l’information que toutes les instances concernées par l’application de la loi doivent adopter. Ce régime peut être élaboré en concertation avec ces instances. 7 – 5 . Concernant la procédure d’obtention des informations (articles 14-21) Le CNDH recommande de simplifier la procédure de demande d’information et son contenu. Il devrait être possible de la déposer auprès de l’institution concernée ou bien de l’envoyer par poste ou par courrier électronique, comme il devrait être possible de la déposer par le demandeur lui même ou son représentant légal. La loi devrait également rendre obligatoire la réception des demandes de la part des personnes ne pouvant les écrire et le cas échéant leur rédaction par les institutions concernées. Le CNDH recommande que les informations présentées soient lisibles et exploitables, quel que soit leur support, qu’elles soient présentées en fonction de la demande dans l’une des deux langues officielles du pays, et en cas de besoin, en langage des signes ou bien par les moyens de communication améliorée et alternative (augmentative and alternative communication) pour les personne en situation de handicap. Le CNDH recommande également de mentionner la possibilité de répondre à la demande d’information dans l’une des langues étrangères les plus utilisées au niveau national, sur la base de la demande en informant l’intéressé à l’avance du coût supplémentaire dû à ce choix. Ceci ne devrait pas porter atteinte au principe du coût raisonnable et minimal. Afin de protéger les droits des demandeurs d’information notamment en cas de présentation d’une plainte à la Commission nationale du droit d’accès à l’information, (que le CNDH propose son maintien selon la formule prévue dans la deuxième version de l’avant projet de loi), le CNDH propose de considérer le non-respect des délais de réponse stipulés comme un refus de répondre à la demande. Ce retard ouvre la possibilité de porter plainte devant ladite commission, et le cas échéant devant les juridictions administratives. Le CNDH propose que la définition du coût de reproduction de l’information adopte clairement le principe du coût raisonnable de minimal. Le CNDH recommande également de permettre aux demandeurs de recevoir l’information sous la forme qu’ils souhaitent. L’institution destinataire de la demande devrait respecter ce choix, sauf en cas de force majeure (exemple : quand la réponse à la demande peut provoquer l’altération des documents).

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Dans ce sens, le Conseil recommande de s’inspirer des dispositions de la loi type africaine sur l’accès à l’information stipulant, dans son article 21, les moyens d’accéder à l’information. 7 – 6 . Concernant les frais d’accès à l’information (article 5) Tout en rappelant l’importance de stipuler la possibilité d’accéder à l’information gratuitement, le CNDH insiste sur la nécessité de définir clairement dans le texte de loi les cas de gratuité et les types de demandeurs pouvant en bénéficier. Le CNDH estime que dans tous les cas, les personnes à faible revenu, les journalistes et les organisations non gouvernementales peuvent être exonérées des frais de reproduction de l’information.

7 – 7 . Concernant les restrictions relatives au droit d’accès à l’information (articles 7, 8 et 9) Le Conseil estime, que l’on peut distinguer entre différentes formes de restrictions qu’il convient de définir de manière précise. Ainsi, si le paragraphe 2 de l’article 27 de la Constitution a défini les restrictions principales au droit d’accès à l’information, il convient de rappeler que la jurisprudence constitutionnelle nationale a considéré comme inconstitutionnelles certaines dispositions du règlement intérieur de la Chambre des représentants qui se contentent de rappeler les dispositions constitutionnelles sans préciser leur portée. Le CNDH constate que l’article 7, alinéas 1, 2 et 3 et l’article 9 du projet de loi se contentent de rappeler les restrictions suivantes sans définir leur portée à savoir : les informations se rapportant à la défense nationale, à la sécurité intérieure et extérieure de l’Etat, à la vie privée, aux données personnelles, ainsi qu’aux informations susceptibles de porter atteinte aux libertés et droits fondamentaux consacrés par la Constitution. L’alinéa 2 de l’article 7 élargit la liste des restrictions au droit d’accès à l’information en visant notamment les informations dont la divulgation est susceptible de porter atteinte aux relations avec d’autres Etats ou organisations, aux politiques monétaires, économiques et financières de l’Etat, aux droits à la propriété industrielle, aux droits d’auteur et aux droits voisins, etc. A cet égard, une des solutions possibles consiste à reformuler des restrictions relatives à la défense nationale, la sécurité interne et extérieure de l’Etat est de se référer aux articles 192 et 193 du Code pénal, afin de les harmoniser du point de vue des informations dont la divulgation est considérée comme une infraction à la loi pénale, et les restrictions y relatives. A ce titre, le CNDH propose de s’inspirer de la loi type africaine afin de définir de manière précise les restrictions relatives à ces deux types d’information. Cette loi stipule «qu’un responsable à l’information peut refuser l’accès à l’information lorsqu’autoriser l’accès causerait un préjudice substantiel à la sécurité ou la défense de l’Etat. (2) Pour les besoins de cette section, sécurité ou défense de l’Etat signifie :

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(a) les tactiques ou stratégies ou exercices ou opérations militaires entreprises en préparation d’hostilités ou en rapport avec la détection, la prévention, la suppression ou la limitation d’activités subversives ou hostiles ; (b) l’intelligence concernant : • La défense de l’Etat ; • La détection, la prévention, la suppression ou la limitation d’activités subversives ou hostiles ; (c) les méthodes de, et les équipements scientifiques ou techniques pour l’évaluation ou la gestion des informations mentionnées au paragraphe (b) ; (d) l’identité d’une source confidentielle ; ou (e) les quantités, caractéristiques, capacités, vulnérabilités ou déploiement de toute chose en cours de conception, de développement, de production ou de considération pour être utilisée comme armes ou tout autres équipements, y compris des armes nucléaires. (3) Pour les besoins de cette section, activités subversives ou action hostile signifie : (a) une attaque contre l’Etat par un élément étranger.» Concernant les informations dont la divulgation pourrait compromettre les relations extérieures marocaines, le CNDH propose de définir les restrictions y afférentes et de stipuler la confidentialité de certaines informations sur la base de critères, notamment le fait que cette confidentialité soit protégée par le droit international. Ces restrictions s’appliquent également dans le cas où ces informations concernent les positions prises par l’Etat, par d’autres Etats ou par des organisations internationales dans le cadre de négociations internationales en cours ou à venir, ou bien dans le cas de correspondances diplomatiques. Dans le même sens, la loi britannique relative à la liberté de l’information dans ses articles 24, 27 et 35 peut aider à l’élaboration d’une définition juridique plus précise des restrictions relatives à la sécurité nationale, les relations internationales et l’élaboration des politiques gouvernementales. Enfin, le CNDH rappelle la nécessité d’introduire une disposition juridique qui encadre ces restrictions, à savoir de rappeler la règle générale de l’aspect limité et défini des restrictions. La mise en œuvre de cette recommandation permettra de limiter le pouvoir des instances concernées dans la définition des restrictions. Elle permettra en outre de répondre au but de l’Observation générale N° 34 du Comité des droits de l’Homme qui prévoit que « les mesures restrictives doivent être conformes au principe de la proportionnalité ; elles doivent être appropriées pour remplir leur fonction de protection, elles doivent constituer le moyen le moins perturbateur parmi ceux qui pourraient permettre d’obtenir le résultat recherché et elles doivent être proportionnées à l’intérêt à protéger (…). Le principe de la proportionnalité doit être respecté non seulement dans la loi qui institue les restrictions, mais également par les autorités administratives et judiciaires chargées de l’application de la loi » Elle contribuera enfin à la définition de la portée du secret professionnel prévu dans l’article 18 du Code de la fonction publique, tout en précisant le champ d’application de l’article 446 du Code pénal. De manière générale, le CNDH considère que toute restriction doit répondre aux normes du droit international des droits de l’Homme. Le refus de réponse à une demande d’information n’est pas justifié, à moins que l’administration concernée ne prouve que : 8

 L’information concerne un intérêt légitime reconnu par la loi ;  La divulgation de l’information pourrait causer un préjudice réel à cet intérêt (le test de préjudice) ;  Le préjudice l’emporte sur l’intérêt général dans sa divulgation (la primauté de l’intérêt général). Le CNDH recommande de soumettre toutes les exceptions prévues par les articles 7, 8 et 9 à un test de préjudice et d’introduire la primauté de l’intérêt public, en accord avec les termes suggérés dans la loi type sur l’accès à l’information pour les Etats-membres de l’Union africaine. 7 – 8 . Concernant l’insatisfaction du demandeur de l’information (articles 19, 20 et 21) Le projet de loi énonce que dans le cas où le demandeur n’est pas satisfait du traitement de sa demande, celui-ci peut déposer une plainte auprès du Président de l’institution concernée comme premier recours et auprès du Médiateur comme second recours. Cependant, le projet de loi ne prévoit aucune raison de cette insatisfaction, ce qui pourrait générer un nombre important de plaintes, provoquant ainsi une lourde charge de travail non nécessaire pour le chargé de l’information ou la Commission. Pour éviter cette situation, le CNDH propose que l’article 20 définisse de manière exacte les raisons qui pourraient provoquer l’insatisfaction du demandeur :      

Une motivation insuffisante du refus de l’information ; Une prolongation du délai de réponse qui excède celle prévue par la loi (30 jours) ; La suppression d’une partie de l’information demandée ; Les droits perçus pour la communication des renseignements sont exorbitants ; La communication de l’information sous condition, par exemple l’interdiction de réutilisation ou de diffusion ;  La communication des informations sous une forme (support ou langue) autre que celle demandée. 7 – 9 . Concernant la Commission nationale du droit d’accès à l’information (titre 5) Le CNDH a constaté que la première et deuxième version du projet de loi ont prévu au titre (N° 6) la création de la Commission nationale du droit d’accès à l’information. La troisième version a supprimé les dispositions relatives à cette Commission en confiant ses attributions au Médiateur. Mais le projet de loi tel qu’adopté par la Chambre des représentants a confirmé la création de ladite Commission tout en édictant son mode organisationnel et en lui attribuant d’importantes prérogatives (articles 22 à 26). Le CNDH se félicite de l’institution de cette Commission dont la présidence est confiée au Président de la la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel. Le CNDH recommande que la composition de cette commission prenne en compte les objectifs contenus dans l’article 19 de la Constitution sur la parité entre les hommes et les femmes, et que les institutions visées par la loi n’en fassent pas partie pour éviter tout conflit d’intérêt. 9

D’un point de vue comparé, l’article 20 de la loi française peut être une source d’inspiration à cet égard, qui donne à la commission chargée de garantir le droit d’accès aux documents administratifs la qualité d’autorité administrative indépendante. S’agissant de la situation juridique des membres de la commission, le CNDH propose de se référer au statut juridique des membres de la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel prévue prévu par la loi 09.08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel. Enfin, le CNDH recommande au législateur de prendre en compte la distinction et la complémentarité entre la nature administrative du mécanisme de doléance mis en place par la Commission nationale de garantie du droit d’accès à l’information et la nature judiciaire du recours à la justice administrative compétente.

7 – 10 . Les Sanctions (articles 27, 28 et 29) Le CNDH estime que toute personne, y compris un fonctionnaire, qui dénonce ou divulgue dans l’intérêt public et de bonne foi, des actes répréhensibles de destruction, falsification, modification ou dissimulation d’un document, devrait être protégé par la loi sur la protection des victimes, des témoins, des experts et des dénonciateurs. A cet effet, le CNDH propose de reformuler l’article 27 de manière à établir un lien entre la sanction prévue dans cet article et l’intention de violer les dispositions de la loi d’accès à l’information. L’article 67.1 de la loi canadienne relative à l’accès à l’information peut être une source d’inspiration à cet égard, car il établit un lien entre la violation des dispositions de cette loi et l’intention du contrevenant à entraver l’exercice du droit d’accès à l’information. 7 – 11 . Les dispositions finales (art. 30) Le CNDH propose l’ajout d’un article sur la priorité de la loi relative au droit d’accès à l’information en tant que législation générale appliquée en matière d’accès à l’information. Dans le même sens, le CNDH rappelle que parmi les lois actuellement en vigueur qui devraient être harmonisées avec la loi sur l’accès à l’information, figurent : - La loi sur les archives ; - La loi sur le droit des consommateurs ; - Le Code électoral, en particulier sur le financement des campagnes électorales des partis politiques : - La loi 09.08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel.

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