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11 juin 2013 - Composante Universitaire : UFR Sciences de la Vie et de l' ..... seulement dans leur aspect appliqué mais également dans le cadre de la ...
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N° Ordre de la thèse : 3032

THESE Présentée devant L’UNIVERSITE DE RENNES 1 Pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE RENNES 1 Mention : BIOLOGIE Par DIANE LEFEBVRE Equipes d’accueils : UMR INRA / ENSAR, Biologie des Organismes et des Populations appliquée à la Protection des Plantes (Bio3P), Le Rheu UMR 6552, Ecologie – Ethologie – Evolution, Université de Rennes 1, Rennes Ecole Doctorale : Vie – Agro – Santé Composante Universitaire : UFR Sciences de la Vie et de l’Environnement

Approvisionnement en pollen et en nectar des colonies de bourdons Bombus terrestris. Ecologie comportementale et modélisation. Implications pour la pollinisation des fleurs de tomate en serre.

Soutenue le 20 juillet 2004 devant la commission d’examen : A. Lenoir J.-C. Verhaeghe S. Le Cun J. Pierre J.-S. Pierre C. Rivault M.H. Pham Delègue

Université de Tours Université Libre de Bruxelles FEREDEC Bretagne INRA, Le Rheu Université de Rennes 1 CNRS, UMR 6552 CNRS

Rapporteur Rapporteur Examinateur Examinateur Examinateur Examinateur Membre invité

Remerciements

Tout d’abord, je tiens remercier chaleureusement Jacqueline et Jean-Sébastien Pierre Pierre, qui m’ont encadrée et conseillée durant ces trois ans. Merci notamment à JeanSébastien de m’avoir fait confiance après mon DEA et de m’avoir offert cette si belle opportunité. Je tiens aussi à remercier vivement Jean-Pierre Masson et David Causeur pour leurs cours particuliers en statistiques et Yannick Outreman pour m’avoir initiée à l’analyse par modèle des risques proportionnels de Cox. Merci à Alain Lenoir et à Jean-Claude Verhaeghe d’avoir accepté d’être rapporteurs de ce manuscrit, à Stéphane Le Cun et Colette Rivault d’avoir accepté d’être membres du jury. Merci aussi à l’ensemble des membres du comité de thèse, dont Pierrick Aupinel et Minh-Hà Pham-Delègue, pour m’avoir écoutée attentivement et conseillée judicieusement lors de mes comités de thèse. Merci beaucoup au personnel des serres, notamment Viviane, Anne et Jo, pour leur bonne humeur mais aussi au personnel du GIE pour leur conseils techniques et leur accueil sympathique, notamment Laurence, Gwénolé et Isabelle, ainsi que Jacqueline qui faisait le lien entre le GIE et les serres, mais aussi à tous les autres. Merci à Louis Rolland pour avoir accepté que je travaille dans sa serre et pour sa gentillesse, ainsi qu’à François Quéré pour m’avoir accueillie dans ses locaux durant près de 6 mois. Un grand merci à l’équipe Bio3P, pour sa convivialité et son ambiance chaleureuse, aussi bien les thésards et les stagiaires que les « Anciens » pour leur bon exemple en termes de travail en équipe. Je n’oublie pas André Mouton et son importante aide technique. Je n’oublie pas non plus l’UMR 6552, en particulier Colette pour ses coups de mains lors de mes arrivées impromptues. Une pensée très émue pour mes quatre aïeuls, disparus à l’approche ou durant cette thèse. Une pensée aussi pour le Monde de La Belette, qui m’a tant apporté … Merci bien sûr à M&M, Francis, J&J, Tonton et … Opale ! Merci de tout cœur aux amis, présents et indispensables, entre autres les Indiens, les personnes de la Lune Rousse, de Beaulieu, de l’IRISA, et plus loin, de Paris mais ceci n’est pas un inventaire. Enfin, merci à toi TT pour ta présence et ton soutient si précieux.

Cette thèse fait partie du Projet Pollinisation, financé par le programme de recherche inter régional Bretagne et Pays de Loire, dans le cadre du Groupement d’Intérêt Scientifique Lutte Biologique et Intégrée.

SOMMAIRE Introduction générale.................................................................................................................. 1 CHAPITRE 1. Etat des connaissances..................................................................................... 10 A/ Le matériel biologique ...................................................................................................... 12 A/ 1. La tomate (Lycopersicon esculentum Mill., Solanaceae)............................................. 12 A/ 2. Le bourdon terrestre (Bombus terrestris, L., Hymenoptera : Apidae) ......................... 14 B/ Le butinage chez les insectes sociaux : analyse dans le cadre de la Théorie de l’Approvisionnement Optimal .............................................................................................. 55 B/ 1. Régulation des déplacements entre ressources au cours du butinage........................... 56 B/ 2. Régulation du butinage par les individus et la colonie................................................. 59 Social bees and Optimal Foraging Theory: a review (Article 1)........................................ 63 CHAPITRE 2. Contexte matériel et méthodologique .............................................................. 92 A/ Le matériel biologique ...................................................................................................... 94 A/ 1. Les bourdons ................................................................................................................ 94 A/ 2. Les tomates................................................................................................................... 96 B/ Dispositifs ........................................................................................................................... 98 B/ 1. Serre de production de tomate ...................................................................................... 98 B/ 2. Dispositif expérimentaux proprement dits ................................................................. 102 C/ Méthodes statistiques utilisées dans ce manuscrit........................................................ 103 C/ 1. Le modèle ................................................................................................................... 103 C/ 2. La statistique............................................................................................................... 104 C/ 3. Le choix d’un modèle................................................................................................. 104 CHAPITRE 3. Etude de l’activité de bourdons à l’entrée des ruches, en serre de production ................................................................................................................................................ 107 1. Matériel et méthodes .......................................................................................................... 109 2. Résultats ............................................................................................................................. 111 3. Discussion .......................................................................................................................... 117

CHAPITRE 4. Disponibilité en fleurs dans la serre de production. Notion de fleur exploitable ................................................................................................................................................ 120 1. Introduction ........................................................................................................................ 121 2. Détermination des types de fleurs exploitées par les bourdons ......................................... 121 3. Dynamique de la masse de fleurs exploitables au cours de la journée............................... 128 4. Discussion, Conclusions..................................................................................................... 134 5. Perspectives........................................................................................................................ 135 CHAPITRE 5. Répartition des bourdons dans la serre de production : analyse dans le cadre de la théorie de la Distribution Libre Idéale ............................................................................... 136 A/ Description et déterminisme de la répartition des bourdons dans la serre ............... 137 B/ Do pollen foraging bumblebees (Bombus terrestris) achieve an Ideal Free Distribution in greenhouses? (Article 2) .................................................................................................. 148 CHAPITRE 6. Déplacements entre fleurs en serre de production et en serre expérimentale 167 A/ Etude en serre de production ......................................................................................... 168 B/ Etude en serre expérimentale sur fleurs de colza ......................................................... 175 C/ Motivational models and bumblebees patch departure rules: a study by Cox’s proportional hazard rate regression (Article 3) ................................................................ 195 CHAPITRE 7. Dérive des colonies et conséquences possibles concernant l’utilisation des bourdons pour la pollinisation sous serre............................................................................... 231 A/ Etude des passages directs d’individus entre colonies adjacentes en serre de production ............................................................................................................................. 234 B/ The drifting in bumblebees (Bombus terrestris): possible consequences for their use in pollination (Article 4) ........................................................................................................... 239 Discussion générale................................................................................................................ 259 Bibliographie (hors auteurs cités dans les articles) ................................................................ 276 Articles et réalisations ............................................................................................................ 286

Introduction générale

Introduction générale

Contexte agronomique ........................................................................................................... 2 Questions soulevées par l’utilisation des bourdons pour la pollinisation en serre................. 4 Contexte scientifique.............................................................................................................. 6 Organisation du manuscrit ..................................................................................................... 7

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Introduction générale

Introduction générale

Contexte agronomique Depuis plusieurs années, les bourdons ont acquis un intérêt commercial, du fait de leur capacité à polliniser des plantes cultivées sous serre, notamment des tomates (Lycopersicon esculentum Miller). Cependant, ce mode de culture, qui limite les contraintes météorologiques pesant sur les plantes, limite aussi l’accès des plantes à la pollinisation naturelle, le vent et les insectes dans le cas de la tomate. Avant d’utiliser des insectes, les producteurs ont assuré la pollinisation de leurs cultures manuellement. Dans le cas de la tomate, ils ont auto-pollinisé les fleurs par hormonage (auxines), ventilation forcée - ces deux techniques pouvant être associées - , ou par vibration manuelle des fleurs (Free, 1993 ; Straver et Plowright, 1991 ; Pressman et al., 1999 ; Vicherat, 2003 ; Hanna, 2004). La vibration des fleurs peut se faire à l’aide de différentes formes de vibreurs électriques ou, plus simplement, en frappant sur les fils soutenant les plantes. Ces modes de pollinisation ne sont pas toujours satisfaisants du fait de leur coût en main d’œuvre et de leur efficacité limitée (Free, 1993 ; Vicherat, 2003). La diminution du recours aux traitements chimiques a progressivement permis l’utilisation des insectes pollinisateurs (Free, 1993 ; Straver et Plowright, 1991). La première étude à ce sujet date, à notre connaissance, des années 50 (Neiswander, 1954 cité par Free, 1993). Le premier insecte utilisé a été principalement l’abeille domestique (Apis mellifera Linnée) : non seulement son rôle dans la pollinisation des plantes est bien connu mais il est probable que des raisons culturelles et historiques soient également intervenues, comme le fait que leur élevage est maîtrisé l’Antiquité. Cependant, cette solution n’est pas toujours satisfaisante. D’une part, les abeilles sont faiblement attirées par certaines cultures qu’elles butinent peu. D’autre part, elles acceptent difficilement le confinement et sortent massivement des serres lorsque des fleurs qui leurs semblent appétentes fleurissent à l’extérieur de celles-ci (Free, 1993 ; Porporato et al., 1995 (poivron) ; Vicherat, 2003 (tomate)). Enfin, les colonies sont importantes (plusieurs milliers d’individus) et peuvent être agressives et difficiles à gérer par des non-spécialistes. Les producteurs se sont alors intéressés à d’autres insectes pollinisateurs, dont les bourdons (genre Bombus). Les premières études à ce sujet sur les plants de tomate datent, à

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Introduction générale notre connaissance, des années 70 (Bin et Sorressi, 1973 et Pincinat et al., 1979 cités par Free, 1993). Leur utilisation a notamment été permise par la mise au point de techniques d’élevage (Pouvreau et Marilleau, 1977). Parmi les diverses espèces de Bombus pouvant être élevées en captivité et acceptant de butiner en milieu confiné, Bombus terrestris est une des espèces présentant les colonies les plus importantes en taille : alors que chez de nombreuses autres espèces, les colonies ne comprennent que 30 à 40 individus, les colonies de B. terrestris peuvent contenir jusqu’à 300 à 400 ouvrières (Pouvreau, 1984). C’est donc cette espèce qui est très majoritairement « produite ». Cependant, d’autres espèces sont également élevées à des fins commerciales, par exemple Bombus impatiens en Amérique du Nord (Straver et Plowright, 1991) et B. hypocrita et B. ignitus au Japon (Asada et Ono, 2000 ; Asada et Ono, 2002), notamment en raison des problèmes écologiques liés aux déplacements d’espèces (Dafni, 1998 ; Hingston et McQuillan, 1998 ; Goulson, 2000b ; Hogendoorn et al., 2000). Suite à ces différentes études de faisabilité, la pollinisation manuelle a été abandonnée au profit de la pollinisation par les bourdons dans de nombreux pays (Espagne, Etats-Unis, France, Israël, Italie, Jordanie, Pays-Bas, Turquie ; Dafni, 1998). Ce type de pollinisation concerne essentiellement les cultures en serre ou en enceinte fermée (concombre, fraise, poivron vert, tomate) mais aussi, dans une moindre mesure, certaines cultures en verger (amande, cerise, prune) (Dafni, 1998). Les bourdons utilisés dans ces systèmes proviennent d’élevages, principalement des Pays-Bas et d’Israël (Dafni, 1998). Outre la production massive d’individus, ces élevages permettent la production de colonies déplaçables d’un endroit à l’autre. En France, on trouve deux producteurs de bourdons, le GIE La Croix et le GTICO. D’un point de vue économique, l’introduction des premières ruches en serres de production (1988) a permis aux producteurs de tomates la vente de grappes de tomates, bon produit marketing du fait de son attractivité pour les consommateurs. Cela n’était pas possible en pollinisation manuelle car l’ensemble des fleurs d’une inflorescence n’était pas parfaitement pollinisé. Une nette augmentation du rendement, du calibre et du poids des fruits ont également été remarqués.

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Introduction générale

Questions

soulevées

par

l’utilisation

des

bourdons

pour

la

pollinisation en serre L’utilisation commerciale des bourdons sous serre, bien que satisfaisante, n’est pas toujours optimale. Elle met en évidence le manque de connaissances actuel sur les bourdons. Elle demande des études précises sur (i) leur comportement de fourragement1, problématique de ce document, (ii) leur biologie et leur cycle biologique, et sur (iii) la comparaison de leur efficacité pollinisatrice et celle d’autres pollinisateurs, comme l’abeille domestique (Apis mellifera), dans les cultures sous abri. Les réponses de ces études2 pourront en retour optimiser l’élevage et l’utilisation des bourdons. Concernant l’utilisation du comportement de fourragement des bourdons pour la pollinisation des fleurs et la production de fruits, il est difficile de doser correctement la densité de bourdons par rapport à la densité de fleurs à polliniser. Suite à une trop faible densité de bourdons, la pollinisation peut être nulle ou insuffisante et les fruits difformes (nombre insuffisant d’ovaires floraux pollinisés). Au contraire, un nombre trop important de bourdons peut induire un surbutinage. Les fleurs risquent alors d’être surexploitées, leurs organes reproducteurs abîmés et les fruits soit perdus, soit déformés (Free, 1993). Dans ces conditions, certains bourdons vibrent les fleurs. Ce comportement, accompagné d'un bourdonnement caractéristique, est une manière pour eux de faciliter le détachement des grains de pollen en secouant les anthères mais cela abîme les fruits (Larfeil, 1998 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Les effets néfastes de ce comportement sont bien connus et très illustratifs sur les cultures de fraises (Bigey et al, 2002). Il semble qu’une conduite appropriée des colonies permette d’éviter ces effets négatifs, notamment un retrait des poches à nectar généralement situées à l’intérieur des ruches (Vaissière, 2001). Notons tout de même que, malgré les problèmes posés par le surbutinage, les producteurs de fraises continuent à utiliser les bourdons car leurs avantages compensent largement leurs désagréments. Les problèmes du surbutinage et du vibrage ne se posent pas en culture de tomates. On peut quand même se demander si le nombre de ruches sous serres est bien adapté, le problème économique immédiat étant alors l’achat d’un trop grand nombre de ruches à l’éleveur de bourdons. Une densité excessive peut pousser les butineuses surnuméraires à sortir des serres 1

Fourragement : l’ensemble des comportements de recherche et de collecte de nourriture. Cette terminologie est issue d’un ancien terme militaire signifiant : aller en terrain ennemi enlever le fourrage (matière végétale servant à l’alimentation des animaux domestiques) (Le Petit Larousse, 1993). 2 Ces trois points sont traités dans le projet Pollinisation, un des programmes de recherche du Groupement d’Intérêt Scientifique inter régional Bretagne & Pays de Loire ayant financé cette thèse.

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Introduction générale (Mexia et al., 2000 ; obs. pers.) mais cela n'affecte pas l’activité pollinisatrice dans la serre (Mexia et al., 2000). Notons que ces sorties peuvent aussi être liées à une différence d’attractivité entre les plantes situées dans la serre et celles situées à l’extérieur (notamment des arbres fruitiers). En effet, une serre en monoculture ne satisfait pas tous les besoins de la colonie, d’autant plus si l’espèce cultivée n’est pas parmi les plus attractives pour les butineuses. Certaines plantes, comme la morelle (Solanum nigrum), placées dans la serre, peuvent aider à contrer ce phénomène (Albano et al., 2000c). Un autre point à améliorer pourrait être la répartition des individus sur la ressource proposée. Effectivement, dans certaines situations, la densité de bourdons diffère selon l’endroit de la serre (Morandin et al., 2001b). Ce problème pourrait être lié à la disposition des ruches dans la serre. Effectivement, la pratique agricole consiste à regrouper les ruches en quelques sites proches les uns des autres, afin de pouvoir y accéder facilement. Si les individus fourragent près de leur ruche, cela peut induire une répartition des individus dans la serre décroissante avec la distance aux nids. Ces regroupements de ruches posent également la question de l’influence de la proximité des ruches entre elles, d’autant plus que les colonies sont disposées les unes sur les autres. La répartition des bourdons dans une serre peut aussi être liée à la disposition de la ressource. Dans les serres où sont cultivées plusieurs variétés de tomates, les bourdons pollinisent parfois préférentiellement certaines variétés aux dépends des autres, qui peuvent même ne pas être butinées du tout. Cela rejoint le problème d’attractivité des fleurs évoqué plus haut. Il faut donc définir avec précision le critère pris en compte par les bourdons lors de leur fourragement pour se répartir sur une ressource, tant au point de vue d’une population, qu’au point de vue d‘un individu. Enfin, les colonies de bourdons, issues d’élevage, sont importées dans les serres de tomate avec des poches à nectar de 1.5l, le raisonnement étant que les fleurs de tomate de fournissant pas de nectar, il faut en fournir aux bourdons pour les empêcher de sortir des serres. Cette disposition est tout à fait artificielle : les ouvrières n’ont alors pas à s’approvisionner en nectar à l’extérieur de la colonie. Cela pourrait avoir plusieurs inconvénients. Le premier serait de modifier la motivation au butinage, y compris pour le pollen, avec pour conséquence une réduction du nombre de sorties de butineuses. Le second pourrait être de modifier la physiologie de la colonie et son taux de croissance. Enfin, le tarissement brutal de la poche pourrait faire basculer les colonies vers la production de sexuées. Tous ces problèmes soulèvent des questions d’ordre scientifique.

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Introduction générale

Contexte scientifique Les différentes questions soulevées dans le contexte agricole seront abordées non seulement dans leur aspect appliqué mais également dans le cadre de la Théorie de l’Approvisionnement Optimal (Optimal Foraging Theory) (voir Chapitre 1). L’étude de ces comportements est rendue complexe par le fait que les bourdons sont des insectes sociaux. Les coûts et bénéfices du processus de fourragement sont donc payés et reçus par des individus différents et les individus consommant les ressources ne sont pas obligatoirement ceux qui les collectent. Il faut donc considérer deux échelles, l’échelle des individus et celle de la colonie, sachant qu’elles s’imbriquent étroitement du fait des comportements de coopération. Enfin, il faut distinguer les individus solitaires, qui butinent pour leur propre compte (les mâles) des individus qui butinent pour la colonie (les reines et les ouvrières). Nous nous intéresserons donc ici uniquement aux femelles. A l’échelle de l’individu, le budget temps alloué à diverses activités est essentiel. Ces activités se répartissent en périodes de résidence dans la colonie et en périodes de sortie. Durant les sorties, le temps d’activité totale se subdivise en temps d’évaluation de chaque fleur suivi d’acceptation ou non, temps de parcours entre inflorescences et entre fleurs dans l’inflorescence, temps de manipulation de la fleur (absorption de nectar, récolte de pollen). L'optimisation individuelle du butinage ne mène pas forcément l'optimisation du butinage de la colonie (elle peut par exemple se faire aux détriments d’un autre individus de la même colonie) et une fourrageuse peut sacrifier son efficacité personnelle (en permettant un transfert d’information par exemple) au bénéfice de l’efficacité collective. Pourtant, dans le cadre de la Théorie de l’Approvisionnement Optimal, la plupart des auteurs considèrent que l’optimisation du budget temps individuel assure un retour maximal d’énergie à la colonie par unité de temps (Ydenberg et Schmid-Hempel, 1994 ; Dechaume et al., 2000). A l’échelle de la colonie, la disponibilité en ouvrières et le mode d’exploration de l’espace par ces dernières revêtent la plus haute importance. On peut considérer la colonie dans son ensemble comme un opérateur qui alloue des unités d’effort à diverses zones de son environnement. A ce niveau, diverses stratégies sont décrites dans la littérature : concentration sur les ressources les plus profitables, balayage systématique et cyclique de l’espace environnant. Ces stratégies sont généralement obtenues par des phénomènes d’auto– organisation c’est-à-dire qu’elles ne sont que la résultante d’interactions inter individuelles assez simples. Enfin on peut faire l’hypothèse qu’il existe une interaction entre colonies lorsqu’elles exploitent des sites proches. La mesure du coût de nourrissage individuel, du

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Introduction générale point de vue de la colonie, n’est alors pas le temps mis par une ouvrière pour se nourrir aux réserves mais le temps mis par les autres ouvrières pour collecter et fournir la même quantité de nourriture. Il faut considérer le temps nécessaire pour reconstituer le stock et pas le temps individuel nécessaire pour régénérer ses propres ressources et séparer l’approvisionnement personnel de l’altruisme (Ydenberg et Schmid-Hempel, 1994).

Organisation du manuscrit Dans ce travail, l’approvisionnement des colonies en pollen et en nectar ne sera pas abordé en tant que facteur nutritionnel ayant des conséquences sur la démographie ou la reproduction mais comme un élément induisant la visite de fleurs et, par conséquent, leur pollinisation. Dans le Chapitre 1 sera fait un état des connaissances scientifiques concernant le matériel biologique utilisé. Tout d’abord, la tomate mais surtout le bourdon : son cycle biologique, sa vie sociale, et son butinage. Ce dernier point sera particulièrement développé et accompagné d’une revue bibliographique du butinage chez les hyménoptères sociaux dans le cadre de la Théorie de l’Approvisionnement Optimal (Article 1). Nous avons fait le choix de consigner dans ce premier chapitre tous les éléments bibliographiques introduisant les études non présentées sous forme d’article (Chapitres 3, 4, 5 (1ère partie), et 6 (1ère partie)). Le Chapitre 2 est consacré aux conditions matérielles et aux méthodes statistiques appliquées. Il nous est apparu nécessaire de récapituler, pour mieux les distinguer, les conditions dans lesquelles ont été faites les différentes études. En effet, une partie d’entre elles a eu lieu en serre de production, avec des possibilités limitées de contrôle du protocole. Il s’agit des études présentées dans les Chapitres 3, 4, 5, et 6 (1ère partie). L’autre partie des études a eu lieu dans des conditions contrôlées et constitue la partie expérimentale proprement dite de ce manuscrit. Il s’agit des Chapitres 6 (2ème partie) et 7. Les chapitres suivants sont consacrés à l’analyse des résultats obtenus, sachant que la thèse comporte des aspect appliqués et des aspects théoriques et que nous sommes partis d’une situation concrète, très peu étudiée. Le problème concret est celui de la pollinisation de la tomate sous serre par le bourdon Bombus terrestris. Il importait donc tout d’abord d’observer la situation existante afin d’en comprendre le fonctionnement et de soulever les points à améliorer éventuellement, ou du moins posant question.

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Introduction générale Tout d’abord, dans le Chapitre 3, nous étudions les rythmes d’activité des colonies de bourdons en serre de production de tomate, en relation avec les conditions météorologiques. Le premier objectif de ce chapitre est de déterminer la proportion d’activité à l’entrée des ruches liée à la collecte de pollen. Effectivement, du fait que les fleurs de tomate produisent exclusivement du pollen et que du nectar est fourni aux colonies, on s’attend à ce que cette activité soit essentiellement tournée vers la collecte de pollen. Le second objectif est de déterminer les moments où l’activité à l’entrée des ruches est la plus importante et donc où il est le plus judicieux d’effectuer des observations comportementales. Pour comprendre le butinage, il faut ensuite définir quelles sont les fleurs exploitées (stades phénologiques) par les bourdons, ainsi que la répartition spatio-temporelle de ces fleurs dans la serre (Chapitre 4). Dans le Chapitre 5, nous étudions la répartition des bourdons dans la serre et l’influence de différents facteurs environnementaux, dont la densité de fleurs, sur cette répartition. A la fin de ce Chapitre, dans l’Article 2, nous expliquons la densité de bourdons dans le cadre de la Distribution Libre Idéale, en considérant la ressource offerte en termes de pollen disponible et plus seulement en termes de fleurs disponibles. L’étude de la répartition des bourdons dans la serre nous a amenés à nous poser des questions concernant les mécanismes de déplacement des bourdons sur une ressource, questions abordées dans le cadre de la Théorie de l’Approvisionnement Optimal dans le Chapitre 6. Nous y considérons tout d’abord la forme des déplacements au sein d’un patchrang, en serre de production et en serre expérimentale. Puis, dans l’Article 3 présenté en fin de chapitre, nous considérons les facteurs pouvant augmenter ou diminuer la tendance au départ d’un bourdon d’un patch alimentaire, d’une part à l’échelle des patchs-inflorescences, d’autre part à l’échelle des patchs-rangs. Enfin, ayant observé des passages d’individus entre colonies adjacentes lors de l’étude présentée dans le Chapitre 3, et ce problème ayant déjà été signalé par les producteurs, nous quantifions ces échanges et accédons en partie aux conséquences de ces échanges, dans l’Article 4 constituant le Chapitre 7. Nous avons également commencé l’étude de l’exploitation de nourrisseurs artificiels en dehors de la ruche. Les résultats obtenus, insuffisamment clairs ou encore en cours d’analyse, ne seront évoqués que très succinctement dans le Chapitre Discussion générale, Conclusions, Chapitre où sont par ailleurs discutés l’ensemble des résultats de ce manuscrit.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Chapitre 1. Etat des connaissances.

A/ LE MATERIEL BIOLOGIQUE ..................................................................................... 12 A/ 1. LA TOMATE (Lycopersicon esculentum Miller, Solanaceae) .............................. 12 A/ 2. LE BOURDON TERRESTRE (Bombus terrestris, L., Hymenoptera : Apidae) . 14 A/ 2.1. Généralités .............................................................................................................. 14 A/ 2.1.1. Répartition géographique .................................................................................. 14 A/ 2.1.2. Taxonomie......................................................................................................... 14 A/ 2.1.3. Morphologie ...................................................................................................... 16 A/ 2.2. Le cycle biologique ................................................................................................. 18 A/ 2.2.1. La phase multiplicatrice : production d’ouvrières............................................. 20 A/ 2.2.2. Le développement des individus ....................................................................... 24 A/ 2.2.3. La phase reproductrice : production d’individus sexués ................................... 29 A/ 2.2.4. La fin de vie de la colonie ................................................................................. 33 A/ 2.3. Les castes et la vie sociale des colonies de bourdons ........................................... 35 A/ 2.3.1. Les castes........................................................................................................... 35 A/ 2.3.2. La vie sociale de la colonie ............................................................................... 39 A/ 2.4. Le butinage.............................................................................................................. 43 A/ 2.4.1. Les besoins alimentaires.................................................................................... 43 A/ 2.4.2. Les capacités requises par les individus pour exploiter les fleurs..................... 44 A/ 2.4.3. Les capacités requises par les individus pour explorer leur environnement ..... 49 A/ 2.4.4. Le rythme quotidien des activités de butinage .................................................. 52 B. LE BUTINAGE CHEZ LES INSECTES SOCIAUX : ANALYSÉ DANS LE CADRE DE LA THÉORIE DE L’APPROVISIONNEMENT OPTIMAL..................................... 55 B/ 1. Régulation des déplacements entre ressources au cours du butinage .................. 56 B/ 2. Régulation du butinage par les individus et la colonie........................................... 59 Social Bees And Optimal Foraging Theory: A Review (Article 1) ................................ 63

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

jeunes inflorescences (portant essentiellement des boutons floraux)

Inflorescence

Inflorescences matures (portant essentiellement des fleurs matures)

Verticille

Vieilles inflorescences (portant des tomates mûres) Tige principale

Figure 1. Structure schématique d’un plant de tomate. La tige principale est subdivisée en « niveaux », les verticilles. A chaque verticille, on peut trouver une ou plusieurs inflorescence(s).

Figure 2. Structure des inflorescences de tomates. Sur les deux photos, on voit bien que la floraison est centrifuge : en bout d’inflorescence, les stades les plus jeunes (les boutons), à la base des inflorescences, les stades les plus âgés (les tomates).

Figure 3. Fleurs de tomates. Les pétales peuvent être plus ou moins (de gauche à droite) en arrière par rapport au cône d’anthères. Sur la photo du milieu, on distingue un brunissement du cône d’anthères dû à une manipulation par les bourdons.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Chapitre 1. Etat des connaissances

A/ LE MATERIEL BIOLOGIQUE A/ 1. LA TOMATE (Lycopersicon esculentum Miller, Solanaceae) Le port naturel des plants de tomate est buissonnant mais les producteurs ne laissent se développer qu’un axe (Fig. 1), voire deux. La croissance se fait par étapes, sur le mode sympodial, système où l'arrêt prématuré d'activité du méristème terminal entraîne le développement d'un bourgeon axillaire. Après la germination et un développement végétatif sur 4 à 5 étages foliaires, le méristème terminal évolue en inflorescence. Un bourgeon axillaire situé juste au-dessous prend la relève. Il produit un rameau, dit « usurpateur », qui repousse la première inflorescence en position latérale. Après avoir formé quelques feuilles, il donne une nouvelle inflorescence. Le mécanisme se répète ainsi de proche en proche (Pouvreau, 1984 ; Vicherat, 2003). Les inflorescences se développent de la même manière que le plant, sur le mode sympodial, formant des cymes de 6 à 12 fleurs. La floraison est centrifuge, se faisant progressivement du centre de l'inflorescence vers la périphérie (Fig. 2). Les fleurs de tomate (Fig. 3) sont hermaphrodites, hypogynes et régulières. La corolle porte six pétales jaunes, le calice six sépales. Les six étamines sont réunies en un tube, le cône d’anthères, entourant le pistil. La réceptivité du stigmate (à son propre pollen ou à un autre) commence au moment où la fleur s’ouvre et dure 4 à 8 jours. Les anthères déhiscent (longitudinalement vers le centre de la fleur) 1 à 2 jours après l’ouverture de la fleur, généralement tôt le matin. Les fleurs ne produisent pas de nectar (Pouvreau, 1984 ; Free, 1993). Le style peut être plus ou moins long que les étamines, en fonction de la variété et de paramètres climatiques, comme la température ou l’humidité (Pouvreau, 1984 ; Free, 1993 ; Vicherat, 2003). La structure des anthères leur permet de vibrer au moindre effleurement et de saupoudrer le stigmate de pollen, notamment lorsque le style est court. L’autopollinisation est favorisée par le port pendant des fleurs et dépend aussi de la variété. La fécondation croisée est possible avant maturation des anthères lorsque le style est plus long que les anthères (Pouvreau, 1984 ; Free, 1993).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Les bourdons, lors de leurs visites aux fleurs de tomate, s’accrochent au cône d’anthères et lui causent des meurtrissures (nécroses) (Bin et Sorressi, 1973 ; Morandin et al., 2001b). Cela laisse des traces et on peut alors reconnaître, voire dénombrer, les fleurs butinées (Van Ravestijn et Van der Sande, 1991). Morandin et al. (2001b et c) ont alors établit une échelle basée sur ces nécroses, comportant 5 niveaux : de 0 (absence de trace) à 5 (nécrose maximale). Cela leur a permit d’étudier le lien entre le niveau de meurtrissure, le nombre de grains de pollen déposés et la production de tomate en quantité et en qualité (Morandin et al., 2001c). Ils montrent que, dès les niveaux 1 et 2, les fleurs sont bien pollinisées : la qualité des fruits obtenus n’augmente plus au-delà de ces niveaux de pollinisation. Cela laisse à penser que la densité des colonies en serre ne doit pas systématiquement être aussi importante qu’on avait pu le penser initialement, à savoir 10 à 15 par ha (Van Ravestijn et Van der Sande, 1991 dans Free, 1993). Morandin et al. (2001 b) considèrent que 2000 voyages de bourdons par ha (comptés au niveau de l’entrée des ruches, comme dans le Chapitre 3) sont largement suffisants pour assurer une bonne pollinisation et que ceci peut être réalisé avec 7 à 15 colonies par ha. Les auteurs soulignent que ces valeurs, qui vont du simple au double, dépendent des conditions de la serre. Notons que la difficulté à déterminer un nombre de colonies à apporter par unité de surface est une question récurrente de la pollinisation entomophile contrôlée, en particulier lorsqu’il s’agit d’opérer en milieu fermé.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

A/ 2. LE BOURDON TERRESTRE (Bombus terrestris, L., Hymenoptera : Apidae) A/ 2.1. Généralités A/ 2.1.1. Répartition géographique Le genre Bombus est constitué d’espèces ubiquistes à fort potentiel adaptatif, très résistantes aux conditions contrastées (Dramstad et Fry, 1994 ; Dafni, 1998 ; Hingston et McQuillan, 1998) et qui peuplent de nombreuses régions du globe, notamment les zones tempérées de l'hémisphère nord (Rasmont, 1983, 1989). Les bourdons s'adaptent particulièrement bien aux régions froides et à l'altitude. Cependant leur aire de répartition dans l'hémisphère sud, qui compte une trentaine d'espèces de Bombus, est nettement inférieure à celle de l'hémisphère nord (environ 220 espèces) (Pouvreau, 1984 ; Rasmont, 1983, 1988, 1989). On n’observe pas de bourdons en Australie. Les seules espèces tropicales vivent en Amérique du sud (Sakagami, 1976). En France, coexistent 34 espèces dont 12 sont considérées comme communes (Pouvreau, 1984).

A/ 2.1.2. Taxonomie Les bourdons terrestres sont des Hyménoptères (du grec, hymen : membrane, pteron : aile) sociaux, appartenant au sous-ordre des Apocrites (le premier segment abdominal est fusionné au thorax, il est suivi d’un étranglement - le pétiole - qui le sépare du reste de l’abdomen). Les Apocrites sont subdivisés en deux sections, les Térébrants (guêpes parasites ou parasitoïdes) et les Aculéates, au sein desquels on trouve notamment les Formicoidea (fourmis), les Vespoidea (guêpes) et les Apoidea (abeilles au sens large, incluant les bourdons). Cette dernière super-famille a pour caractéristique de se nourrir exclusivement de nectar et de pollen et voit coexister autant d'espèces sociales que non sociales (Zahradnik, 1991 ; Bellman, 1999). Elle contient la famille des Apidae, elle-même subdivisée en trois sous-familles d'insectes sociaux : Bombinae, Apinae et Meliponinae dont certaines sont inquilines (espèce vivant dans l’abri d'une autre, ou fixée sur elle, sans se nourrir totalement à ses dépends), comme les Psithyres, qui vivent dans les nids de Bourdons. Dans la sous-famille Bombinae, la systématique du genre Bombus (les bourdons) est très complexe : certaines classifications (Krüger, 1917 dans Goulson, 2000b) distinguent des sections, par exemple celle des Anodontobombus à laquelle est rattaché Bombus terrestris, associées à des modes de 14

Chapitre 1. Etat des connaissances. vie particuliers, « pollen storer » dans le cas de B. terrestris (voir A/ 2.2.1.). De plus, certaines espèces sont morphologiquement très proches, comme Bombus terrestris, B. lucorum et B. hortorum (Fig. 1), ou encore B. muscorum et B. pascuorum. Cette systématique est résumée dans le Tableau 1.

Figure 1. Morphologie de Bombus lucorum femelle (1), B. lucorum mâle (2), B. terrestris reine (3), B. terrestris ouvrière ou mâle (4), et de B. hortorum femelle (5). Tiré de Prys-Jones et Corbet, 1991.

Classe: insectes Sous-classe: Pterygota Ordre: Hymenoptera Sous-ordre: Apocrita Super-famille: Apoidea Famille: Apidae Sous-famille: Bombinae Genre: Bombus (Latreille, 1802) Tableau 1. Systématique simplifiée du genre Bombus (bourdons).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

A/ 2.1.3. Morphologie Le corps très velu des bourdons présente un pattern de couleurs variable selon l’espèce. B. terrestris est noir avec deux bandes de soies jaunes sur le mésothorax et le second tergite de l'abdomen. L'extrémité de l'abdomen est blanche. Comme pour l'ensemble des espèces du genre Bombus, les adultes venant de naître sont gris. Ils n'acquièrent leurs couleurs définitives que quelques heures après leur naissance. Les trois paires de pattes sont entièrement recouvertes de poils, à l'exception de la face externe des tibias (corbiculae, corbicules, ou corbeilles) des pattes postérieures, ce qui permet l’accumulation de pollen par formation active de pelotes. Sur la face interne des tibias et des tarses, les poils sont courts et denses constituant de véritables brosses destinées au nettoyage du corps de l'insecte (PrysJones et Corbet, 1991 ; Pouvreau et Marilleau, 1977 ; Fig. 2). La langue (ou proboscis, Fig. 3) des bourdons leur permet de collecter le nectar par succion. Sa longueur, déterminant le type de fleurs que peut exploiter un individu, est liée à la longueur du corps (Heinrich, 1979) et varie d'une espèce à l'autre. Elle mesure environ 8 mm chez B. terrestris (Pouvreau, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991), qui fait partie des espèces à langue courte, comme B. lucorum (longueur moyenne de la langue : de 7mm - Prys-Jones et Corbet, 1991 - à 8 mm - Pouvreau, 1984). Les femelles peuvent piquer. Du fait que leur dard est lisse, elles peuvent piquer plusieurs fois au cours de leur vie1. Les mâles n’ont pas de dard. La taille des ouvrières varie entre espèces et au sein d'une même espèce. Chez Bombus terrestris, la largeur de la tête varie de 2,5 à 4,5 mm (Cnaani et Hefetz, 1994), la largeur du thorax de 2,3 à 7 mm (Goulson et al., 2002b), et la longueur du corps de 8 à 25 mm. La taille des ouvrières est influencée par les conditions environnementales (saison, biotope) (Sagakami, 1976), notamment par la quantité de nourriture disponible (Sutcliffe et Plowright, 1988). La taille des ouvrières est également influencée par les caractéristiques de leur colonie (son âge et sa taille) et la position qu’elles ont eu dans la colonie lors de leur développement (Sagakami, 1976). Ainsi, on observe souvent une augmentation de la taille entre les générations successives d'ouvrières chez B. terrestris et B. pascuorum (Plowright et Jay, 1968), avec des différences de poids pouvant aller jusqu’à 7 (Cnaani et Hefetz, 1994). Cela n'a pu être montré pour d'autres espèces (Alford, 1975).

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Tout comme les guêpes. Au contraire, la présence de barbes dures sur le dard de l’abeille fait que, lorsqu’elle pique un animal à peau souple, l’aiguillon reste pris dedans. L’abeille meurt après arrachement de son dard et des glandes à venin associées à celui-ci. Notons que l’abeille garde son dard, et reste donc en vie, lorsqu’elle pique un autre insecte à tégument dur, d’où l’aiguillon sort sans difficulté.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Figure 2. A gauche : schéma d’une patte de bourdon. A droite : évolution de la formation d’une pelote de pollen sur la corbicule. Tiré de Pouvreau et Marilleau, 1977.

Figure 3. Schéma de la tête d’un bourdon. Tiré de Pouvreau et Marilleau, 1977.

F: fémur M : mentum Figure 1. Différences morphologiques entre femelles et mâles. Tiré de Prys-Jones et Corbet, 1991. Ti : tibia Pm : prémentum C: corbicule Md : mandibule M: métatarse P. Mx: palpe maxillaire Ta: tarses G: galea G: griffes Pgl : paraglosse Face externe (E) P. L. : palpe labial Gl: glosse Face interne (I)

Antennes : 12 ou 13 segments ?

Segments abdominaux (côté dorsal) : 6 ou 7 ?

Contenu abdominal : capsule génitale ou aiguillon ?

Figure 4. Différences morphologiques entre femelles et mâles. Tiré de Prys-Jones et Corbet, 1991.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Les mâles sont très semblables aux ouvrières. Seul un examen rapproché permet de les en distinguer par la forme des derniers segments de leur abdomen et le contenu de celui-ci, visible par une légère pression : un aiguillon pour les femelles, une capsule génitale (genitalia) pour les mâles. Plus précisément, mâles et femelles possèdent un nombre différent de segments abdominaux (6 pour la femelle, 7 pour le mâle) et antennaires (12 chez la femelle, 13 chez le mâle) (Prys-Jones et Corbet, 1991 ; Fig. 4). La variabilité de taille des mâles est moindre que celle des ouvrières. De plus, leur taille correspond à celle des plus grosses ouvrières (en moyenne 5.63 mm de largeur de thorax, Goulson et al., 2002b). Pourtant aucun auteur ne souligne de différence de taille entre mâles et ouvrières. Cela est probablement lié au fait que les mâles sont produits en fin de vie des colonies, au moment où les ouvrières sont les plus grandes. Les reines adultes de B. terrestris, sont plus grandes que les ouvrières (Röseler, 1969 ; Goulson et al., 2002b). En moyenne, la largeur de leur thorax est de 7.92 mm (Goulson et al., 2000b). Cette différence n’est pas observée pour toutes les espèces de bourdons (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976 ; Pouvreau, 1984). Dans certains cas, les reines de B. terrestris auraient de plus un pattern de couleur spécifique (Heinrich, 1979 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Cela est contredit par Pouvreau (1984) selon lequel les reines ne se distinguent par aucun caractère morphologique externe autre que la taille. Enfin, contrairement aux ouvrières, les reines ont un grand pouvoir d'accumulation des graisses, ce qui les aide à survivre durant l'hiver (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984).

A/ 2.2. Le cycle biologique Le cycle biologique des bourdons est annuel2 et comporte deux phases distinctes : une phase multiplicatrice ou ergonomique durant laquelle la reine fondatrice produit des ouvrières puis une phase reproductrice durant laquelle sont produits des mâles et les nouvelles reines du cycle suivant (Fig. 5). Le déterminisme du passage entre ces deux phases est très complexe. Nous nous y attarderons car l’efficacité pollinisatrice des colonies diffère selon qu’elles sont composées principalement d’ouvrières ou d’individus sexués (une des raisons de l’étude du Chapitre 7).

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Au contraire, les colonies d’abeilles sont pérennes. La fondation d’une nouvelle colonie se fait par essaimage, sans rupture dans la vie de la colonie. Lors de l’essaimage, une partie de la population de la ruche (généralement près de la moitié) émigre avec la vieille reine fondatrice, la pérennité étant assurée par une jeune reine restée au nid et le reste des ouvrières.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Démarrage de la colonie

Développement de la colonie

Fondation d’un nouveau nid

Production continue d’ouvrières

Matériaux de l ’enveloppe du nid

Pot à miel

Ouvrières d’intérieur

Ouvrières d’extérieur

(nourrices, gardiennes, ménagères)

(butineuses)

Outre larvaire couvée par la reine Pot à miel

Couvain

Recherche d ’un site de nidification

Nouvelle Reine fourrageant

Production ponctuelle d’individus sexués

Sortie de diapause des Nouvelles Reines Nouvelles Reines

Mâles

Accouplements

Mort des ouvrières

Entrée en diapause des Nouvelles Reines

Fin de vie de la colonie

Mort des mâles

Figure 5. Cycle de vie d’une colonie de bourdons. Inspiré de Prys-Jones et Corbet, 1991.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

A/ 2.2.1. La phase multiplicatrice : production d’ouvrières Sortie de diapause des reines fondatrices, constitution du nid et fondation de la colonie La fondation d’une nouvelle colonie est le fait d’une unique reine sortant de diapause. La période de sortie de diapause diffère selon les espèces de bourdons. Les reines B. terrestris s'éveillent mi-mars. Après s’être suffisamment nourries durant quelques semaines, elles recherchent un site de nidification à l’abri des intempéries (Pouvreau, 1984). Le choix du site de nidification est lié à l'espèce. Alors que certains bourdons, par exemple B. muscorum ou B. pascuorum, nichent à la surface du sol, sous des touffes d'herbe, de la mousse, ou des broussailles (Pouvreau, 1984), les reines de B. terrestris, comme par exemple celles de B. lapidarius, B. hortorum et B. lucorum, préfèrent construire leur nid dans le sol, à des profondeurs inférieures à 1m. Elles nichent alors volontiers dans des terriers abandonnés de petits rongeurs (Sakagami, 1976 ; Pouvreau, 1984). Un canal mène à ces nids souterrains et des pseudo nids peuvent être construits, par la suite, à l'entrée des nids par les ouvrières. Les entrées peuvent être camouflées par accumulation de matériaux végétaux, ce qui constitue une protection contre l'inondation et différents ennemis (Sagakami, 1976). Au centre du nid, la reine B. terrestris aménage une petite cavité sphérique à une ouverture. Elle pond 6 à 16 œufs sur un stock de pollen et les recouvre d’une enveloppe cireuse (cellule de ponte). Elle construit aussi une cupule cireuse à l'entrée du nid, dans laquelle elle stocke du miel (pot à miel). Elle passe la plupart de son temps à couver ses œufs et quitte son nid de temps en temps pour s'alimenter. Par la suite, les pontes se succèdent et les cellules de ponte, construites selon les besoins, s’accumulent de manière assez désordonnée. Leur orientation est quelconque, la seule contrainte étant que les adultes puissent en sortir (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976 ; Pouvreau et Marilleau, 1977 ; Pouvreau, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991) (Fig. 6). Chez B. terrestris, comme chez les autres « Pollen-Storer »3, le pollen, comme le nectar, est stocké dans des cellules, qui sont, soit d’anciens cocons, qui peuvent être nettoyés, agrandis ou réparés, soit de nouvelles cellules construites pour l’occasion. Certaines cellules, quel que soit leur contenu, reçoivent un couvercle de cire. La cire est utilisée de manière parcimonieuse par les colonies, on peut même parler de recyclage. Lors de la libération de 3

Chez les « Pocket-macker », le pollen est stocké sous forme de petites boules amorphes près des cocons. Elles sont absorbées par ceux-ci lors de la croissance des larves, qui peuvent alors s’en nourrir.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. nouvelles cellules, les anciennes, essentiellement celles près du sol, peuvent être détruites si le nid manque de place (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976 ; Pouvreau, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Une couche de cire peut être observée à la surface du nid (Fig. 6), aussi bien pour les colonies sauvages que pour les colonies élevées en captivité (obs. pers.). Cette couche de cire, recouvrant plus ou moins complètement le nid, aurait une fonction protectrice contre les agressions extérieures, comme l'humidité, la moisissure, la dessiccation, le vent ou les variations de température (Alford, 1975 ; Sagakami, 1976 ; Pouvreau, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Chez plusieurs espèces de bourdons, dont B. terrestris, une reine peut tenter de voler le nid d'une autre reine, de la même espèce (usurpation conspécifique), ou d'une espèce différente (usurpation interspécifique). Dans les deux cas, la tentative se termine par la mort d'une des deux reines. Ce phénomène d’usurpation peut s'expliquer soit par le fait que les nids constituent une réserve alimentaire et une réserve de main d’œuvre, soit par le nombre limité de places disponibles pour fonder un nid (Sakagami, 1976 ; Plowright et Laverty, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991).

Développement de la colonie Le nombre d'ouvrières, initialement faible, augmente rapidement. Les colonies peuvent rester de petite taille, de l’ordre de quelques dizaines d’individus (voir par exemple : Beeckman et Van Stratum, 2000) mais elles peuvent croître davantage, produisant de 100 à 150 individus (Müller et al., 1992 ; Beeckman et Van Stratum, 2000 ; Alaux, 2001 ; Goulson et al., 2002a), voire 400 individus4 (Pouvreau, 1984). Hasselrot (1960) rapporte le cas, rare, d’une colonie de B. terrestris élevée en captivité ayant produit tout au long de sa vie près de 1000 individus. La taille des colonies et la durée de leur cycle de vie sont fonction de l’espèce et de la localisation géographique des nids. Des adaptations spécifiques aux conditions de vie sont observées. Ainsi, dans l'Arctique, les générations d'ouvrières sont réduites en taille et en nombre. Par exemple, les colonies de B. polaris ne produisent qu’une seule génération d'ouvrières afin d'avoir le temps d'élever les sexués pendant la très courte bonne saison. Au 4

La taille des colonies rapportées dans la littérature dépend du moment où l’observation a été faite (après 4 ou 8 semaines de développement pour les auteurs présentés ici) et du mode de dénombrement des individus (nombre cumulé de naissances versus nombre d’individus vivants à un moment donné).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

3 1 2

4 4 5

Figure 6. Colonie de bourdons. Les différentes cellules (pots à miel (1), cellules à couvain (2)) sont disposées les unes sur les autres. Leur disposition et leur orientation sont irrégulières. Le nid, âgé, est partiellement recouvert d’une couverture de pollen (3) et contient de jeunes reines (4), nettement plus grandes que les ouvrières (5).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. contraire, les rares espèces tropicales peuvent produire des colonies très importantes de l’ordre de 2000 individus (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976 ; Heinrich, 1979 ; Pouvreau, 1984 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). La taille des colonies varie aussi au sein des espèces, où l’on observe des variations du nombre d’ouvrières et d’individus sexués produits, mais aussi de durée de vie des colonies et du moment de la « bascule » (moment où les premiers individus sexués sont produits). Un facteur explicatif important est la qualité reproductive de la reine fondatrice. Celle-ci peut être influencée par la diapause (Beeckman et Van Stratum, 2000).

Conditions de vie dans le nid La température des nids est généralement plus élevée que celle de l'air (Brian, 1952 ; Hasselrot, 1960 ; Alford, 1975). Cependant, sa valeur et sa stabilité varient selon les conditions climatiques et la taille des colonies : dans les jeunes colonies peu populeuses et pauvres en ressources, la température n’est pas totalement indépendante de la température ambiante. Dans les colonies aux réserves alimentaires et au nombre d'individus importants, la température est élevée et relativement stable, indépendamment de la température externe (32,5°C à 35,5°C avec des variations maximales de 2,5°C). Dans les colonies en fin de vie, du fait de l'émergence en masse des sexués, les ressources en nectar diminuent drastiquement et sont d'autant plus difficilement renouvelées que les ouvrières sont peu nombreuses. La température chute et redevient fonction de la température externe (Hasselrot, 1960 ; Alford, 1975). Un petit nombre d'ouvrières suffit à réguler la température par des comportements actifs, notamment des mouvements de la cage thoracique associés à une ingestion de nectar. Cependant, un grand nombre d'ouvrières aide à la stabiliser, à la rendre indépendante de la température extérieure (Brian, 1952 ; Hasselrot, 1960 ; Alford, 1975 ; Heinrich, 1979). Lors d'un coup de froid, les ouvrières peuvent faire un bouchon de leur corps à l’entrée du nid et les fourrageuses peuvent rester au nid pour aider à la régulation de la température alors qu'elles seraient capables de sortir pour fourrager (Alford, 1975). La régulation de températures excessivement élevées (36 - 38,5°C) se fait par ventilation (fanning, en anglais) : les individus, qui peuvent se placer au sommet de leur nid, font des mouvements d’ailes (Alford, 1975 ; Hasselrot, 1960). Des trous peuvent également être pratiqués dans le haut du nid pour le ventiler. Ils sont rebouchés lorsque la température décroît. Le rafraîchissement ne

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Chapitre 1. Etat des connaissances. semble pas efficace pour une température de l'air de 40°C (la ventilation fait entrer de l'air chaud) (Hasselrot, 1960). La ventilation permet également de réguler la concentration en CO2. Que ce soit pour réguler la température ou le CO2, le nombre d’individus ventilant augmente avec le stimulus et la proportion d’individus présentant ce comportement est indépendante de la taille des colonies. On observe donc davantage d’individus qui ventilent dans les grandes colonies, qui, de plus, réagissent plus vite à une variation de température ou de la concentration en CO2 (Weidenmüller et al., 2002). L'hygrométrie des nids est de 60% à 70% pour la plupart des espèces de Bombus. Elle est régulée car elle devrait être beaucoup plus élevée du fait de la présence de liquides. Une hygrométrie trop importante provoque des risques de moisissure et donc de mortalité. L'humidité est plus dépendante de l'humidité extérieure dans les colonies peu populeuses que dans les colonies riches en individus, surtout en début et en fin de vie (Hasselrot, 1960 ; Alford, 1975). Les comportements observés pour la régulation de la chaleur, comme les mouvements d'ailes ou l’ouverture / fermeture de trous, servent sans doute aussi à réguler l'humidité (Hasselrot, 1960).

A/ 2.2.2. Le développement des individus Comme chez tous les Hyménoptères, qui sont des holométaboles, les œufs de bourdons subissent une métamorphose complète avant d’atteindre le stade adulte. Quelle que soit leur future caste, les œufs deviennent des larves (cinq stades larvaires) et se métamorphosent en nymphes avant d’atteindre le dernier stade de développement : l'imago ou insecte adulte. Les stades larvaires sont les seuls durant lesquels on observe une croissance par mues (Zahradnik, 1991). Entre la ponte et le stade adulte, la durée totale de développement est de 30 à 32 jours pour les reines, 22 à 25 jours pour les ouvrières, et 26 jours pour les mâles (Röseler, 1970 ; Duchateau et Velthuis, 1988 ; Alaux, 2001 ; Müller et al., 1992). Selon des études assez anciennes, la durée de chaque stade de développement dépend de facteurs écologiques, en particulier du climat : elle est réduite par de chaudes journées et augmentée par le mauvais temps (revue dans Hasselrot, 1960). La température des œufs, larves, et nymphes est influencée par la température du nid mais est également régulée de manière active par les adultes. Ceux-ci incubent les cellules, en

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Chapitre 1. Etat des connaissances. se posant sur ou entre elles et en réalisant des mouvements amples de respiration, des mouvements des muscles des ailes, ou des vibrations de celles-ci (Alford, 1975 ; Hasselrot, 1960 ; Pouvreau, 1984). Ces différents mouvements sont également impliqués dans la régulation de la température corporelle des adultes (Hasselrot, 1960 ; Heinrich, 1979).

Les œufs Au fur et à mesure de la croissance des œufs, les ouvrières agrandissent la cellule de cire les entourant, de manière à ce qu’ils soient toujours protégés par cette enveloppe (Pouvreau, 1984). La température minimale de survie des œufs est de 10°C. Leur température optimale de développement est de 30-32°C (Alford, 1975). Les œufs éclosent après 3 à 4 jours d’incubation (Hasselrot, 1960 ; Duchateau et Velthuis, 1988). Les œufs d’une même cellule éclosent en même temps et les individus issus de ce groupe d’œufs constituent une cohorte ou génération. Ce nom de cohorte est également dû au fait que, au cours du développement du nid, la reine ne pond pas de manière continue mais par vagues successives, constituant ainsi des « cohortes » d’ouvrières. Les deux premières cohortes sont constituées d’un faible nombre d’individus, en général inférieur à dix. Les suivantes sont constituées d’effectifs plus importants. Les pontes sont alors moins regroupées dans le temps et il devient plus difficile de distinguer les cohortes les unes des autres (Free et Butler, 1959).

Les larves La durée des cinq stades larvaires est plus importante pour les larves des individus sexués, en particulier celles des reines. A titre indicatif, les durées moyennes de développement des larves de reines, d’ouvrières et de mâles sont respectivement de 13, 9 et 11 jours (Duchateau et Velthuis, 1988). Cependant, la durée de développement des larves est variable au sein d’une même caste. Elle dépend par exemple de l’âge de la colonie : les larves (d’ouvrières) des première et seconde cohortes subissent un temps de développement plus long (environ 14,5 jours) que celles de la troisième cohorte (environ 11,5 jours) (Ribeiro et al., 1999). Cette différence est expliquée en grande partie par le fait que les premières cohortes sont essentiellement nourries par la reine : des larves nourries exclusivement par la

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Chapitre 1. Etat des connaissances. reine se développent plus lentement (environ 14 jours) que des larves nourries par la reine et des ouvrières (environ 12 jours) (Ribeiro et al., 1999). Selon le mode de nourrissage des larves, on distingue deux ensembles de bourdons : les « pocket makers » (section des Odotonbombus ; Fig. 7) et les « pollen storers » (section des Anodontobombus ; Fig. 8). Bombus terrestris appartient au second groupe (voir A/ 2.1.2., p.14). Chez les pocket makers, les larves restent groupées dans une cellule commune, posée sur un stock initial de pollen. Du pollen est également stocké, sous forme de petites boules amorphes, près de ces cellules. Ces boules sont absorbées par les cellules lors de la croissance des larves, qui peuvent alors s’en nourrir. Chez les pollen storers, le nourrissage des larves évolue au cours de leur développement. Elles commencent par se nourrir du stock initial de pollen dont elles disposent puis, très vite, un nourrissage actif par régurgitation est assuré par les adultes. Pour ce nourrissage, les ouvrières mettent leur tête dans la cellule, restent immobiles un moment, puis contractent leur abdomen (Pendrel et Plowright, 1981 ; Ribeiro et al., 1999), déchargeant une goutte de nourriture sur la partie ventrale de la larve. Dès le début du nourrissage actif par les nourrices, les larves sont nourries individuellement (Ribeiro et al., 1999). Les larves d'une même cellule sont nourries via un ou plusieurs trou(s) ouvert(s) au sommet de la cellule, refermé(s) après le nourrissage. Pour les groupes de larves âgées, ce trou reste ouvert en permanence. Par la suite, les larves ayant subit deux mues supplémentaires ont chacune leur propre cellule (Pendrel et Plowright, 1981 ; Ribeiro et al., 1999). Au niveau de la colonie, le taux de nourrissage des larves est corrélé à la biomasse totale des larves, à la taille des groupes de larves et à la taille des larves (Pendrel et Plowright, 1981). Au niveau individuel, les comportements de nourrissage d’une nourrice sont groupés dans le temps. Celles-ci présentent également une activité d'inspection des cellules : comme pour le nourrissage, elles introduisent leurs antennes, leurs mandibules et la partie avant de leur tête dans le trou mais elles ne présentent pas les fortes contractions de l'abdomen liées à la régurgitation. Cette activité d'inspection pourrait être un nourrissage avorté, servant de contrôle (Pendrel et Plowright, 1981).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Figure 7. Structure schématique d’une cellule à couvain dans un nid de bourdons POCKET MAKERS (par exemple B. pascuorum). La cellule (c), où la reine fondatrice a pondu ses œufs, est disposée sur un amas initial de pollen (p1). Dans cette cellule, les œufs sont devenus des larves (lv). Des boules de pollen (p2 et p3) sont ajoutées au cours de la croissance des larves. Elles seront intégrées dans la loge larvaire au fur et à mesure de sa croissance. Tiré de Pouvreau, 1984.

Figure 8. Structure schématique d’une cellule à couvain dans un nid de bourdons POLLEN STORERS (par exemple B. terrestris). Une femelle nourrit, par régurgitation, les larves situées dans leur cellule larvaire (C) via un trou au sommet de celle-ci. Il s’agit ici de jeunes larves, encore situées dans une cellule commune. Le miel et le pollen sont stockés dans des cellules de stockage indépendantes de la cellule de la loge larvaire. Tiré de Pouvreau, 1984.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Les larves pourraient également jouer un rôle actif dans la régulation de leur nourrissage (Ribeiro et al., 1999) : celles recevant beaucoup de visites d’inspection ne reçoivent pas systématiquement beaucoup de nourriture. Elles sont sans doute capables de refuser ou d’accepter un nourrissage lors des visites d’inspection, par exemple par des mouvements des mandibules et de la tête lorsqu’on leur touche le ventre (Ribeiro et al., 1999). Cependant, malgré ces différents mécanismes, le nourrissage est faiblement régulé au niveau des larves, qui sont physiologiquement adaptées à un manque de nourriture lié à un nourrissage irrégulier (Pendrel et Plowright, 1981). Notons que les cellules contenant des mâles sont pratiquement identiques à celles contenant des ouvrières alors que celles renfermant de jeunes reines sont plus grosses que celles des autres castes (Pouvreau, 1984).

Les nymphes Au moment de la prénymphose, chaque larve cesse de s’alimenter et tisse autour d’elle une cloison de soie. Chaque nymphe est alors isolée dans un cocon bien visible mais, malgré cette restructuration, les cocons d’une même génération restent groupés en amas (Pouvreau et Marilleau, 1977). La durée de la nymphose est globalement identique à celle du développement des larves, à savoir 13 jours pour les reines, 9 pour les ouvrières et 11 pour les mâles (Duchateau et Velthuis, 1988).

Les imagos Les reines peuvent vivre de 12 à 15 mois alors que les ouvrières et les mâles, ne survivant pas à l’hiver, ne vivent que 3 à 5 mois (Pouvreau, 1984). En fonction de la saison et leur activité dans la colonie, les ouvrières peuvent vivre de trois semaines à plus de deux mois, les « ouvrières d'intérieur » vivant plus longtemps que les « ouvrières d’extérieur » (démontré chez Bombus agrorum). La cause principale de la mortalité de ces dernières semble être le mauvais temps, essentiellement le vent (Alford, 1975 ; Brian, 1952). Cette mortalité plus forte est aussi liée à une usure des ailes (Cartar, 1992) réduisant sans doute la manœuvrabilité et pouvant donc affecter les performances de fuite aux prédateurs (Hedenstrom et al., 2001).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

A/ 2.2.3. La phase reproductrice : production d’individus sexués Généralement, la phase reproductrice suit la phase multiplicatrice mais des ouvrières peuvent encore naître lors de cette deuxième phase. Toutes les colonies ne produisent pas de jeunes reines alors que toutes produisent des mâles (Alford, 1975 ; Beeckman, 1998), ce qui conduit à une sex-ratio fortement biaisée en faveur des mâles (Beeckman, 1998). Lorsqu’elles sont produites, les nouvelles reines sont pondues avant les mâles (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984 ; Müller et al., 1992 ; Beeckman, 1998). Cependant, les mâles peuvent émerger avant ou après les nouvelles reines, l’ordre chronologique de ces deux événements variant d’une colonie à l’autre. Cela est en partie lié à la différence de durée de développement entre les castes, les reines ayant en moyenne une durée de développement plus longue de 4 jours par rapport aux mâles (Duchateau et Velthuis, 1988), et au délai entre les deux types de pontes.

Le déterminisme du sexe Les bourdons, comme l’abeille et d’autres espèces d'Hyménoptères, sont haplodiploïdes. Le sexe des individus est déterminé génétiquement par le degré de ploïdie d’un unique locus sexuel multiallélique : les femelles sont diploïdes et hétérozygotes alors que les mâles sont très majoritairement haploïdes et hémizygotes. Il existe de très rares mâles diploïdes homozygotes. Ces individus peuvent atteindre l'âge adulte dans les colonies B. terrestris alors qu’ils sont tués par les ouvrières chez l’abeille. Ils présentent des différences morphologiques (taille corporelle, taille et nombre de spermatozoïdes, taille des testicules) avec les mâles haploïdes. Ils s'accouplent avec succès mais ont une fertilité très faible (Duchateau, 1994 ; Duchateau et al., 1994 dans Duchateau et Mariën, 1995).

Le conflit d’intérêt reine-ouvrières pour la production de mâles Durant la plus grande partie du cycle de vie des colonies, la fonction de reproduction n’est assurée que par la reine. Du fait que les ouvrières s'occupent de sa progéniture (donc de leurs sœurs) sans pondre elles-mêmes, leur comportement peut être qualifié « d'altruiste ». Ce terme a été défini comme suit par Hamilton en 1964 : à titre apparemment gratuit, un individu cède de la nourriture à un congénère, diminuant ainsi sa propre valeur sélective (nombre

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Chapitre 1. Etat des connaissances. d'enfants qui lui survivront) et augmentant les chances de survie ou de reproduction de ce congénère. Le comportement apparemment altruiste des ouvrières de certains hyménoptères eusociaux, comme les bourdons, l’abeille, ou les fourmis, vis-à-vis de leur mère n'est pas trivial : elles pourraient pondre elles aussi ou même quitter la ruche et fonder leur propre colonie. Cette organisation pose également a priori un problème à la théorie de la sélection naturelle: comment ce comportement des ouvrières a-t-il pu être sélectionné et se perpétrer au cours du temps alors que justement elles ne se reproduisent pas? Une première réponse, d’ordre génétique, est apportée par Hamilton (1964). Il propose pour cadre explicatif la théorie de la sélection de parentèle, ou « kin selection theory ». Etant donné que (1) les colonies sont monogynes et monoandres (Estoup et al., 1995) et que (2) les mâles sont haploïdes et les femelles diploïdes, les ouvrières sont sœurs et ont trois quarts de leur génome en commun (la totalité du génome paternel et la moitié du génome maternel). Par contre, elles ne partagent que la moitié de leur génome avec leurs propres filles et fils et un quart de leur génome avec leurs frères. Il semble alors plus avantageux pour les ouvrières de s'occuper de leurs sœurs que de leurs filles et de leurs fils que de leurs frères. S’occuper de ses frères n’est avantageux que pour les ouvrières stériles (Trivers et Hare, 1976), ce qui n’est pas le cas des ouvrières de bourdons. Dès lors, suivant la théorie de la sélection de parentèle, les intérêts des ouvrières et de leur mère sont communs tant que la reine produit des filles. Un conflit d’intérêts surgit lorsque la reine produit des mâles.

Les facteurs déclenchant la production d’individus sexués Le déclenchement de la production d’individus sexués par une colonie de bourdons est un phénomène complexe. Notamment, il faut distinguer les stimuli déclenchant la ponte chez la reine de ceux déclenchant la ponte chez les ouvrières mais ce n’est pas la seule difficulté et, globalement, ce phénomène reste mal connu. Nous évoquons ici successivement les hypothèses concernant le déclenchement des différentes productions d’individus sexués (production de nouvelles reines, de mâles par la reine, et de mâles par les ouvrières) indépendamment les unes des autres. Nous verrons plus loin les interactions et implications sociales de ces trois événements.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. La production de femelles sexuées (jeunes reines) par la reine fondatrice La production de nouvelles reines serait liée à divers facteurs, favorables au nourrissage important que nécessite l’élevage de larves de reines, donc à la « force » de la colonie (Alford, 1975). Sont placées sous ce terme les colonies où les ouvrières sont « suffisamment nombreuses » pour assurer une quantité « suffisante » de réserves et une température stable au nid. Pourtant la taille de la population d'ouvrières au moment de la production des reines est très variable d'un nid de B. terrestris à l'autre et il arrive que des femelles sexuées soient produites par des colonies de taille anormalement petite (8 ouvrières en conditions d’élevage, Odoux, comm. pers.). Afin de quantifier ce « suffisamment nombreuses », Cumber (1949) a émis l'hypothèse que la production des nouvelles reines est annoncée par une variation du ratio suivant : nombre d'ouvrières / nombre de larves d’ouvrières. Ce ratio, normalement inférieur à 1, se rapprocherait de 1 au moment de la production de femelles sexuées et sa valeur influencerait aussi la taille et la quantité des nouvelles reines. L’évaluation de la valeur de ce ratio à l’approche de la production de sexués est rendue difficile par sa dépendance à l'espèce de Bombus considérée et aux conditions environnementales (Alford, 1975 ; Shelly et al., 1991). L’influence de ce ratio est même réfutée pour Bombus terrestris (Shykoff et Müller, 1995). De plus, étant un élément descriptif, la variation de ce ratio ne suffit pas à expliquer le phénomène de production des femelles sexuées. De fait, il semble que ce soit une quantité de nourriture « suffisante » (Beeckman, 1998 ; Reuter et Schwammberger, 1999 ; Pelletier et McNeil, 2003) plus qu’une quantité d’ouvrières « suffisante » qui déclenche la production de femelles sexuées. L'apparition des premiers œufs non fécondés (mâles) pourrait favoriser l’émergence de bonnes conditions pour l'élevage des reines, du fait que les larves de mâles ont des besoins alimentaires inférieurs à ceux des larves de reines (Cumber, 1949). La perte d’un contrôle hormonal par la reine pourrait également être impliquée, soit par arrêt de production d’une hormone, soit par perte de son efficacité. L’hormone en question peut inhiber la capacité des nurses à élever des reines (Röseler, 1970). Plus précisément, elle pourrait inhiber le comportement de nourrissage des larves par les ouvrières (Ribeiro, 1999), l’arrêt de sa production induisant une augmentation du nourrissage des larves. Cette hormone peut aussi inhiber directement la différenciation des larves en reine (Cnaani et al., 2000). Cette perte de contrôle hormonal pourrait être liée à la phase de compétition (voir p.41) et donc avoir un lien avec la socialité de la colonie (Cnaani et al., 2000 ; Alaux, 2001). 31

Chapitre 1. Etat des connaissances. La production de mâles par la reine fondatrice L’ensemble des explications possibles peut être subdivisé en deux ensembles explicatifs non exclusifs, l’un impliquant les décisions de la reine, l’autre impliquant celles des ouvrières. D’un côté, la reine pourrait se mettre à produire des œufs mâles lorsque les œufs diploïdes donnent des reines (Plowright et Plowright, 1990). Dans les colonies ne produisant pas de jeunes reines, la production de mâles par la reine fondatrice n’est pas expliquée. On sait simplement qu’elle n’est pas enclenchée par un stress dû à un trop grand nombre d'ouvrières (Pomeroy et Plowright, 1982 ; Plowright et Plowright, 1990), comme cela avait été suggéré (Alford, 1975 ; Van Honk et Hogeweg, 1981). D’un autre côté, les ouvrières pourraient contrôler la production de mâles par la reine par destruction de ses œufs ou de ses larves (Shykoff et Müller, 1995). Cette destruction peut se faire par oophagie, phénomène connu chez Bombus terrestris (voir Cnaani et al., 2000) mais non observé dans d’autres espèces comme B. pascuorum (Reuter et Schwammberger, 1999). Elle peut aussi se faire par éjection de larves (Müller et al., 1992 ; obs. pers.). Notons que la ponte d'œufs haploïdes par la reine n’est corrélée ni à un comportement particulier des ouvrières ni à leur activité ovarienne (Duchateau, 1989).

La production de mâles par les ouvrières Ici aussi l’ensemble des explications proposées peut être subdivisé en deux ensembles explicatifs non exclusifs, l’un impliquant les décisions de la reine, l’autre impliquant celles des ouvrières. D’un côté, la reine n’inhiberait pas directement l’ovogenèse. Elle n’inhiberait que la ponte. Ce contrôle ne se fait ni par l’intermédiaire de complexes phéromonaux, ni par des interactions agonistiques. Il passerait plutôt par un signal reflétant directement la présence de la reine et de son potentiel de dominance. Il s’agit d’un signal honnête engendrant une auto régulation de l’oviposition des ouvrières (Ratnieks, 1988 ; Bourke, 1993 ; Keller et Nonacs, 1993 ; Alaux, 2001). D’un autre côté, les ouvrières retarderaient le moment de pondre des œufs tant qu’elles possèdent l’information montrant que la ponte convient à leur intérêt du point de vue de la sélection de parentèle. Elles ne commenceraient à pondre que lorsqu’elles détectent la présence d’individus sexués parmi les individus produits par la reine, à l’état de larve, nymphe, ou adulte (Alaux, 2001 ; Bourke et Ratniek, 2001). Dans le cas de la production de 32

Chapitre 1. Etat des connaissances. jeunes reines, la ponte par les ouvrières pourrait être déclenchée par la détection du signal de la reine induisant les larves à se transformer en reines (Bourke et Ratniek, 2001). Il s’agit pour les ouvrières d’une des dernières opportunités pour pondre.

A/ 2.2.4. La fin de vie de la colonie Le départ du nid des jeunes reines Les nouvelles reines B. terrestris quittent le nid 5 jours après leur naissance. Elles peuvent parfois retourner dans leur nid maternel après s’être accouplées et participer aux différentes tâches du nid (Sagakami, 1976). Dans certains cas, notamment si les conditions météorologiques le permettent, les jeunes reines fondent directement une colonie et entament un nouveau cycle. Elles produisent ainsi une seconde génération dans la même saison au lieu d’entrer en diapause (Sagakami, 1976). Ces colonies produisent significativement moins d’ouvrières et plus de reines que les colonies dont les reines ont subi une diapause. Cela ne semble pas être un coût associé à la diapause. Il semble plutôt que la production d’ouvrières soit limitée du fait de l’approche imminente de la mauvaise saison. Quant à la plus grande production de reines, cela peut être une stratégie reproductive liée à la présence des mâles produits par les autres colonies plus précoces (Beeckman et Van Stratum, 2000).

Le départ du nid des mâles Les mâles quittent le nid quelques jours après leur mue imaginale et y retournent rarement (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984). Ils peuvent passer les nuits et les périodes peu clémentes dans des abris (chardons, centaurées), parfois en groupes (Alford, 1975). Durant 3 à 4 semaines, ils butinent pour leur propre compte et s'accouplent. Pour cela, ils peuvent se poster à l'entrée d’une colonie et s'accoupler aux jeunes reines qui sortent, se définir des chemins d'accouplement avec des points d'arrêts, marqués avec les glandes mandibulaires, ou encore se constituer un territoire de vol. De rares accouplements ont été observés à l’intérieur du nid. Le vol peut être interprété comme une sorte d'invitation à l'accouplement (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984). La localisation des femelles par les mâles et le marquage hormonal

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Chapitre 1. Etat des connaissances. de pistes et places par les mâles sont des sujets bien étudiés mais ne seront pas abordés ici (pour plus de détails, voir par exemple Alford 1975, Kindl et al., 1999 ou Pouvreau, 1984).

Les accouplements Les jeunes reines sont susceptibles de s’accoupler avec plusieurs mâles, du moins en captivité (Sagakami, 1976). Cela serait bénéfique pour la reine tant en termes de réduction de charge parasitaire qu’en termes de fitness (Baer, 1999, 2001). Cependant, seul un accouplement est fécond ainsi que l’atteste les données de la biologie moléculaire (Estoup et al., 1995 ; Schmid-Hempel et Schmid-Hempel, 2000). Cela est dû au transfert d’un acide gras dans le tractus génital de la femelle durant l’accouplement (Baer et al., 2001). Ce produit réduit fortement la tendance ultérieure de la jeune reine à copuler (Duvoisin et al., 1999) et réduit le transfert du sperme dans la spermathèque durant au moins 4h après l’accouplement (Sauter et al., 2001). Cela explique pourquoi la probabilité d’accouplement ne dépend pas du comportement pré-copulatoire du mâle et dépend essentiellement du statut reproducteur de la femelle (Sauter et Brown, 2001).

L’entrée en diapause des jeunes reines Les nouvelles reines B. terrestris entrent en diapause au milieu du mois de septembre. Elles sont parmi les plus tardives, certaines espèces, comme B. pratorum ou B. hypnorum commençant leur diapause dès la mi-juillet (Pouvreau, 1984). De manière générale, les reines cherchent un refuge à l'abri de l'ensoleillement direct. Celui-ci pourrait produire un réchauffement du refuge, préjudiciable à leur survie hivernale (Pouvreau, 1984). Elles se trouvent un abri sous la litière ou la mousse, au pied des arbres ou des souches dans les régions boisées. Contrairement à la phase de nidification, elles sont susceptibles de creuser elles-même leur abri dans le sol (Sakagami, 1976). Après leur hibernation, elles assureront seules la fondation d’une nouvelle colonie, utilisant les spermatozoïdes accumulés dans leur spermathèque.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

La mort de la colonie La fin d'une colonie se traduit par une dégradation globale des conditions de vie dans le nid. Les mâles ont quitté le nid et les femelles sexuées restant au nid sont de moins en moins nombreuses. Leur nourrissage par les ouvrières est excessif et leur survie est moins sûre. Le butinage ne se fait plus. Les réserves alimentaires sont de quantité et de qualité moindre. Les risques d'infections par champignons et invasions parasitaires s'accroissent (Alford, 1975). Les dernières femelles du nid somnolent et meurent (Alford, 1975).

A/ 2.3. Les castes et la vie sociale des colonies de bourdons A/ 2.3.1. Les castes Le déterminisme des castes femelles Chaque caste femelle (ouvrière et reine) présente un profil phéromonal distinct. Par exemple, les reines ont un fort taux de biosynthèse d’hormone juvénile et de forts niveaux de cette hormone dans l’hémolymphe par rapport aux ouvrières (Cnaani et al., 2000). La détermination des castes femelles se fait au début du premier stade larvaire : ces larves femelles sont encore indifférenciées durant les 3,5 premiers jours de leur développement larvaire. Tous les œufs peuvent donc donner une reine jusqu'à un certain moment de leur développement (Röseler, 1970). Parmi les explications proximales de la détermination des castes femelles (soit ouvrière, soit reine), on trouve la qualité de la nourriture fournie aux larves mais ceci reste discuté. Ainsi, chez les « pollen storers », comme Bombus terrestris, aucune différence qualitative n’est observée entre les nourritures fournies aux larves de reines et aux larves d’ouvrières, en termes de pollen, protéines et sucre, ce quel que soit l’âge des larves ou le stade de la colonie (Ribeiro, 1999 ; Pereboom, 2000). On n'observe pas de gelée royale ou de nourriture directement à base d'œufs, comme chez l’abeille (Alford, 1975 ; Röseler, 1991 et Plowright et Jay, 1968 dans Shykoff et Müller, 1995). Il arrive parfois que des ouvrières mangent des œufs (oophagie). Des éléments résiduels de ces repas pourraient éventuellement rester dans leur jabot lors du nourrissage des larves mais le nourrissage préférentiel de certaines larves après avoir mangé des œufs n’a pas été démontré, à notre connaissance.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Par contre, des sécrétions glandulaires pourraient être ajoutées lors des régurgitations aux reines. Cela pourrait permettre une croissance plus efficace en évitant une trop grande consommation de pollen, élément peu digeste et peu économique pour la colonie, non seulement en favorisant la digestion (Pereboom, 2000), mais aussi en ajoutant des protéines au régime alimentaire des reines (Ribeiro, 1999). La quantité de nourriture reçue par les reines a aussi été proposée comme facteur explicatif de la détermination des castes femelles. Sachant qu’aucune différence quantitative n’a été observée, en termes de pollen, protéines et sucre, entre les nourritures fournies aux larves de reines et aux larves d’ouvrières (ni même aux mâles), les recherches se sont portées sur la durée de nourrissage et sur sa fréquence. Etant nourries plus longtemps du fait de leur durée de développement plus long, les reines pourraient au total recevoir davantage de nourriture et de sécrétions glandulaires (Ribeiro, 1999). Pour ce qui est de la fréquence de nourrissage, en début de développement, les larves de reines et d’ouvrières sont nourries à la même fréquence. En fin de développement, les larves de reines sont nourries plus fréquemment que celles des ouvrières mais cela n’influence pas leur développement en reine. Notons que tout au long de leur développement, les larves des femelles sont nourries plus fréquemment que celles des mâles (Ribeiro et al., 1999).

Le partage des tâches et des fonctions Tâches et fonctions accomplies par les individus sexués Les individus sexués s’acquittent principalement des fonctions de reproduction. Ainsi, seules les reines s’accouplent et sont à même de produire des œufs femelles, diploïdes. Cependant, les reines, rarement les mâles, peuvent également avoir un autre rôle. Dans les jeunes colonies de bourdons, la reine fondatrice accomplit de nombreuses tâches pour sa progéniture, autant à l'intérieur qu'à l'extérieur du nid. Elle aménage le nid, nourrit les premières larves et les couve, quittant son nid de temps en temps pour fourrager. Au fur et à mesure que sa colonie s'agrandit, la reine ne sort plus et reste à l'abri à l'intérieur du nid, où elle accomplit encore de nombreuses tâches, comme la construction de cellules de ponte, l'oviposition et le scellage des cellules emplies d’œufs (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976 ; voir A/ 2.2.1. p.20). Dans les colonies en fin de vie, l'aide des reines filles peut s'avérer indispensable au développement des autres individus sexués. Elles participent parfois également au butinage

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Chapitre 1. Etat des connaissances. mais, en raison des risques liés aux sorties de nid, cette aide peut s’avérer néfaste pour la production de nouvelles colonies, notamment si ces jeunes reines se sont accouplées. Un critère pouvant pousser les jeunes reines à accomplir des tâches au sein du nid pourrait être un manque d’ouvrières, éventuellement lié à un trop grand nombre de larves (Alford, 1975 ; Allen et al., 1978). Les jeunes mâles peuvent aider à l'incubation des jeunes générations mais globalement, ils participent moins que les jeunes reines aux différentes tâches de la colonie (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984).

Tâches et fonctions accomplies par les ouvrières Fonctions végétatives La seule répartition des tâches relativement durable au sein des nids de bourdons est la répartition entre tâches « d’intérieur » et tâches « d’extérieur » (Simon et al., en prép.). A l’intérieur du nid, les ménagères s’occupent du nettoyage et de la maintenance (construction et réparation de pots à miels), les nourrices, ou nurses, des soins aux larves (alimentation des jeunes et thermorégulation des cellules de ponte par incubation ou fanning), et les gardiennes de la défense du nid. Les ouvrières passent aisément d’une tâche à une autre (O’Donnell et al., 2000 : B. bifarius). A l’extérieur du nid, les butineuses, ou fourrageuses, collectent les ressources alimentaires (nectar et pollen). Chez Bombus terrestris, ces ouvrières représentent environ un tiers de la population du nid (Fonta, 1984 ; Simon et al., en prep.). Bien que certaines ouvrières concentrent leurs efforts à la récolte du nectar (plutôt les petites) ou du pollen (plutôt les grandes) (Brian, 1952 ; O’Donnell et al., 2000), les fourrageuses passent aisément d’un type de collecte à l’autre non seulement entre voyages mais aussi au cours d’un même voyage et aucune division du travail selon l'activité de récolte de pollen ou de nectar n'a pu être mise en évidence (Brian, 1952 ; Free, 1955 ; Alford, 1975 ; Heinrich, 1979 ; Prys-Jones et Corbet, 1991 ; Verhaeghe et al., 1999 ; O’Donnell et al., 2000). Chaque ouvrière serait susceptible d’accomplir successivement ces deux ensembles de tâches en fonction de son âge (polyéthisme d’âge). Effectivement, l'activité de soins aux larves est maximale (beaucoup de larves nourries, sur plusieurs jours) lorsque les ouvrières ont entre 0 et 5 jours, quelle que soit leur taille (Ribeiro et Velthuis, 1997). En vieillissant, elles

accompliraient

ensuite

préférentiellement

les

tâches

d’extérieur.

Cependant,

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Chapitre 1. Etat des connaissances. contrairement aux abeilles, le polyéthisme d’âge n’est pas vraiment vérifié dans la littérature consacrée aux bourdons. Le partage des tâches pourrait alors plutôt être basé sur la taille des ouvrières (alloéthisme). D’un côté, les ouvrières de grande taille sont plus aptes à réguler leur température et à voler par mauvais temps que les butineuses de petite taille (Heinrich, 1979). Elles récoltent plus de pollen et de nectar (Brian, 1952 : B. agrorum ; Goulson et al., 2002b). De plus, les plus grandes ouvrières seraient aptes à diminuer leur temps de recherche de fleurs et augmenter leur taux de fourragement, par rapport aux ouvrières de plus petite taille, du fait de la supériorité de leur système visuel (Spaethe et Chittka, 2001). On observe ainsi que les bourdons de grande taille fourragent plus fréquemment (Free, 1955 ; Goulson et al., 2002b) et plus tôt5 (Brian, 1952 : B. agrorum) que les bourdons de petite taille. D’un autre côté, les petites ouvrières pourraient être plus aptes à se déplacer dans le nid (Brian, 1952 ; Heinrich, 1979). Pourtant le nombre de nouveaux-nés et le nombre de cellules construites par la reine sont plus importants dans les colonies où les nurses sont de grande taille que dans les colonies où les nurses sont de petite taille (Cnaani et Hefetz, 1994). En fait, une grande taille semble être plus avantageuse pour toutes les tâches accomplies pour la colonie (Cnaani et Hefetz, 1994). En particulier, il a été démontré qu’il existait un lien entre la largeur du thorax des ouvrières et la quantité de pollen et de nectar qu’elles récoltent (Goulson et al., 2002b). Un grand nombre d’individus de grande taille pourrait induire de meilleures conditions générales de vie dans le nid alors que la présence de nurses de petite taille risque d’induire un nourrissage sous-optimal des larves, conduisant à un temps de développement accru et à un nombre moindre de nouveaux nés. L'avantage de la variabilité de la taille des ouvrières reste alors à étudier, sachant que la prédation d'une grande ouvrière est plus pénalisante. Finalement, la division du travail ne semble pas strictement basée sur l'âge des individus, ni sur des différences morphologiques. Chaque ouvrière a la capacité d'exercer toutes les tâches et les postes sont interchangeables (Heinrich, 1979). Les nurses, de petite taille, pourraient représenter une réserve à fourrageuses en cas de mort prématurée ou de faible renouvellement des butineuses, ou en cas de forts besoins du nid en ressources alimentaires (Brian, 1952 ; Free, 1955 ; Alford, 1975).

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Notons que l’âge de la première sortie de fourragement des ouvrières décroît avec l’âge de la colonie (O’Donnell et al., 2000 : B. bifarius) or la taille des individus augmente lorsque la colonie vieilli, ce qui peut être à l’origine de l’observation de Brian (1952).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. La division du travail pourrait résulter d’une auto-régulation comportementale des individus aux besoins de leur colonie (Plowright et Laverty, 1984) mais toutes les ouvrières ne réagissent pas de la même manière aux besoins de leur colonie (O’Donnell et al., 2000) : on observe une forte variabilité individuelle de la plasticité et une spécialisation de fait des ouvrières (Plowright et Laverty, 1984). Les jeunes ouvrières ont un comportement plus plastique que leurs aînées. Elles sont plus aptes à sentir les besoins de la colonie et les postes à pourvoir (Alford, 1975). De plus, plus longtemps une ouvrière exerce une tâche, moins probable est son changement d'activité même si elle peut toujours s'adapter aux besoins de sa colonie (Free, 1955 ; Heinrich, 1979). Enfin les ouvrières diffèrent probablement dans leur réponse aux besoins de la colonies, celles se spécialisant sur certaines tâches participant de manière disproportionnée au travail de leur colonie (O’Donnell et al., 2000).

Fonction reproductive : la production de mâles Dans certaines conditions, certaines ouvrières peuvent se mettre à pondre (voir A/ 2.2.3., p.32). Du fait qu’elles ne se sont pas accouplées, ces dernières ne produisent que des œufs haploïdes, dont seront issus des mâles. Les mâles peuvent donc être produits aussi bien par la reine que par les ouvrières.

A/ 2.3.2. La vie sociale de la colonie La hiérarchie entre ouvrières et le droit à la reproduction Outre la catégorisation en castes, il existe une véritable hiérarchie sociale au sein des colonies (Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Ayasse et al., 1995 ; Moskalenko et Shalimov, 1997 ; Alaux, 2001), basée non seulement sur la morphologie des individus (taille, poids, etc.), mais aussi sur des comportements particuliers (communication), et des échanges physiologiques et phéromonaux. Ces deux derniers aspects ne seront pas développés précisément ici. Les ouvrières commencent au plus bas niveau social et ont ensuite l'occasion de monter dans la hiérarchie. Une fois qu'une ouvrière devient dominante et fait partie de « l'élite », elle le reste. Elle a alors des contacts plus fréquents avec les autres individus de la colonie que les autres ouvrières, notamment avec la reine. Elle présente une forte dominance vis-à-vis des nouveaux éléments de « l'élite » (Van Honk et Hogeweg, 1981). Selon les

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Chapitre 1. Etat des connaissances. auteurs, cette classe dominante représente entre 17% (Alaux, 2001) et près de 25% de l’effectif de la colonie (Van Honk et Hogeweg, 1981). Le statut social des ouvrières les plus âgées, issues de la première cohorte, n’est pas clair. Pour certains auteurs (Alaux, 2001), ce sont des individus dominants présentant des ovaires bien développés. Pour d’autres (Van Honk et Hogeweg, 1981), le fait que ces ouvrières semblent moins sensibles aux phéromones de la reine ne signifie rien sur leur niveau dans la hiérarchie. Notons que les catégories sociales décrites ci-dessus (reine, dominantes, subordonnées) ont été observées dans des colonies captives. Concernant les colonies dont les membres sont libres de butiner, les butineuses et les nouveaux-nés semblent extérieurs à cette hiérarchie (Ayasse et al., 1995 ; Moskalenko et Shalimov, 1997). Les différentes catégories sociales ne sont pas basées uniquement sur les comportements individuels d’interactions sociales. Des éléments physiologiques comme l'état des ovaires, la taille du corps et la quantité de graisse ainsi que la quantité et la composition des extraits volatiles produits par les différentes ouvrières sont des facteurs influençant également le statut social (Ayasse et al., 1995 ; Moskalenko et Shalimov, 1997). Les ouvrières dominantes ont des ovaires plus gros et une tendance à avoir un corps gras développé. La quantité absolue de produits volatiles est maximale chez la reine et est plus élevée chez les ouvrières dominantes que chez les subordonnées et encore plus que chez les butineuses et les ouvrières fraîchement écloses. Les profils biochimiques des ouvrières dominantes présentent des points communs avec ceux des reines et des subordonnées mais sont nettement différents de ceux des butineuses et des ouvrières fraîchement écloses. Chaque catégorie sociale possède une particularité biochimique (Ayasse et al., 1995).

La dynamique de la hiérarchie au cours du cycle biologique On l’a vu (A/2.2.3., p.29), chez B. terrestris, la reproduction induit des conflits entre la reine fondatrice et les ouvrières. La hiérarchie entre femelles présente alors une dynamique, parallèle au cycle biologique de la colonie. Cette dynamique est structurée en trois phases, définies en fonction de l’intensité des conflits reine-ouvrières (Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Duchateau, 1989 ; Hefetz et Bloch, 1999) : (1) une phase initiale, eusociale, durant la phase multiplicatrice des colonies, (2) une phase de pré-compétition, (3) une phase de compétition, durant la phase reproductrice des colonies.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Phase eusociale Dans une jeune colonie, la reine fondatrice est la seule femelle reproductrice. Elle est à même d'inhiber le comportement reproducteur des ouvrières, par ses phéromones et des traits comportementaux. Ces éléments agissent sur le taux de production de l'hormone juvénile et le développement ovarien des ouvrières. Sans cette inhibition, les ovaires des ouvrières seraient actifs, quelle que soit la période de l'année. Si cette régulation physiologique ne suffit pas, de véritables conflits sont cependant possibles. De plus, la reine mange tout œuf non royal et récupère le cocon pour ses propres œufs (Alford, 1975 ; Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Hefetz et Bloch, 1999).

Phase de pré-compétition Durant cette période, la dominance de la reine s’amoindrit et le nombre de conflits s’accroît. Toute ouvrière peut se reproduire, la capacité d'inhibition de la reine n'étant plus suffisante et celle des ouvrières dominantes n'étant pas encore établie (Duchateau, 1989 ; Hefetz et Bloch, 1999). La fréquence des comportements agressifs des ouvrières est corrélée à leur génération : les ouvrières issues des premières cohortes sont moins agressives que les dernières-nées. Cela peut s’expliquer par le fait que les ouvrières des premières générations ont plus de travail que celles des générations suivantes. Pour ces dernières, l'ordre de naissance influence le rang hiérarchique. La fréquence des comportements agressifs des ouvrières n'est pas corrélée au développement ovarien des ouvrières (Duchateau, 1989).

Phase de compétition Le début de la phase de compétition est fortement corrélé à l’apparition des premières femelles sexuées adultes (Duchateau, 1989). Cette phase se manifeste par de nombreuses agressions entre reine et ouvrières, des pontes des ouvrières et une oophagie mutuelle (Hefetz et Bloch, 1999). Selon les auteurs, cette phase est soit à l’initiative de la reine, qui cesse la production d'une phéromone inhibitrice (Duchateau, 1989), soit à l’initiative des ouvrières (Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Hefetz et Bloch, 1999). Elle n'est pas liée à la ponte d'œufs mâles par la reine (Duchateau, 1989) et ne semble pas être liée à un déclin de la capacité d'inhibition de la reine : des reines issues de colonies avant / après la phase d'agression sont toutes aptes à 41

Chapitre 1. Etat des connaissances. inhiber le développement hormonal et la production de l'hormone juvénile des ouvrières. Par contre, des ouvrières placées avec une jeune reine non accouplée ou sans reine se reproduisent (Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Hefetz et Bloch, 1999). La première ouvrière pondeuse présente un comportement particulier : elle évite le butinage et persiste dans l'entourage de la reine. A la suite de celle-ci, d'autres ouvrières se mettent à pondre. Leur nombre augmente et elles présentent une agressivité croissante envers la reine et les autres femelles, empêchant ces dernières de pondre. Ces comportements apparaissent plus fréquemment chez les ouvrières de « l’élite » (Van Honk et Hogeweg, 1981) ou au moins chez les ouvrières « d'intérieur » plutôt que chez les fourrageuses (Alford, 1975 ; Sakagami, 1976). Les ouvrières attaquées sont des butineuses ou vont butiner suite à l'attaque (Brian, 1952). Dans plus de la moitié des colonies étudiées, la reine finit par être exclue de la colonie, et, dans tous les cas, son action inhibitrice sur la ponte des ouvrières cesse (Van Honk et Hogeweg, 1981). Cependant, bien qu'elle puisse perdre le contrôle de l'oviposition des ouvrières et des comportements associés, elle ne perd jamais complètement sa dominance et reste dominante dans d'autres hiérarchies comportementales. Pour cela, elle utilise ses phéromones (glandes mandibulaires), des traits comportementaux variés ; elle est grande et forte et possède des ovaires développés et productifs. Ceci est sans doute perçu par les ouvrières car on sait qu'elles sont elles-même capables de distinguer les ouvrières qui peuvent pondre de celles qui ne le peuvent pas (Duchateau, 1989). Après son éviction6, la reine est remplacée par une unique ouvrière, généralement très agressive, en particulier envers les ouvrières ayant des œufs matures dans leurs ovaires. Sa dominance est moins ritualisée, davantage de conflits sont observés (Alford, 1975 ; Van Honk et Hogeweg, 1981 ; Duchateau, 1989). Avant son statut dominant, cette ouvrière, qui n'est pas forcément la première ouvrière de la colonie à pondre, n'est distinguable ni par un trait comportemental ou phénotypique, ni par un développement larvaire particulier. Le comportement de domination ne garantit pas que cette ouvrière deviendra la plus productive (Duchateau, 1989). La hiérarchie, basée sur l'âge et la taille, s'accentue et les femelles de « l'élite » sont à même d'empêcher les autres ouvrières de pondre (Alford, 1975 ; Van Honk et Hogeweg, 1981

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L'inhibition phéromonale du développement ovarien des ouvrières par les reines est moins efficace dans le genre Bombus que pour l'espèce Apis mellifera (Sakagami, 1976). Chez l’abeille, la dominance de la reine est moins conflictuelle en apparence car davantage supportée par les phéromones. Mais son éviction est plus spectaculaire: elle est exclue avec un essaim d'ouvrières.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. ; Duchateau, 1989). Après le départ de la reine, de nombreuses ouvrières parmi les plus vieilles les mieux placées socialement descendent de niveau (Van Honk et Hogeweg, 1981).

A/ 2.4. Le butinage A/ 2.4.1. Les besoins alimentaires A l’état sauvage, les bourdons se nourrissent de pollen et de nectar. Le pollen est fournis par les anthères des fleurs butinées. Le nectar est généralement fournis par les nectaires floraux des plantes butinées. Il peut aussi être collecté sur des nectaires extra-floraux (troncs, tiges, etc.) ainsi que sur des Psyllides et des Aphides, qui produisent du miellat (Alford, 1975). Contrairement aux observations effectuées sur les abeilles, on n'a pas observé de bourdon récoltant de l'eau (Free, 1955 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Les colonies d’élevages sont nourries d’une « pâte pollinique » (mélange de pollen de pelotes d’abeille et d’eau sucrée) et de nectar artificiel. Le nectar constitue la source principale d'énergie des ouvrières pour leurs diverses activités (fourragement, soins aux larves et régulation des conditions de température et d'humidité du nid) et permet ainsi l'accroissement de la colonie (Heinrich, 1979). Il constitue essentiellement une réserve d'eau et de sucres (glucose, fructose, saccharose, maltose). Il contient également, en quantités moindres, des acides aminés, des lipides, et divers composés alimentaires comme des vitamines (Baker et Baker, 1983). Le choix d’une source de nectar (plante ou fleur artificielle ou non) est influencé notamment par l’espèce de bourdon considérée, la viscosité du nectar, ou la composition du nectar en eau, sucres, et cations (Pouvreau, 1974b ; Prys-Jones et Corbet, 1991). Par exemple, pour B. terrestris, B. lapidarius, et B. lucorum, l’ordre de préférence décroissant pour les quatre sucres cités cidessus est le suivant : saccharose, fructose, glucose, maltose. Cependant, la plupart des espèces préfèrent un mélange de trois puis quatre sucres, loin devant les solutions simples (Pouvreau, 1974b). Le nectar est stocké sous la forme d’une sorte de miel, suite à une simplification des sucres en leur composants simples et d'une évaporation de l'eau (20 à 30%). Cependant, la fabrication de ce miel n’est pas due à un processus aussi actif que chez l’abeille domestique (Alford, 1975), chez laquelle notamment l'évaporation de l'eau du miel est beaucoup plus importante. Le pollen est essentiellement consommé par les larves (Brian, 1952 ; Free, 1955 ; Alford, 1975 ; Pendrel et Plowright, 1981). Il constitue principalement une source de

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Chapitre 1. Etat des connaissances. protéines mais fourni également glucides et lipides (Stanley et Linskens, 1974). Comme pour le nectar, les bourdons présentent des préférences pour certains pollens. Par exemple, le pollen de divers arbres fruitiers (Prunus) est nettement plus consommé que le pollen de saule (Salix), lui-même plus consommé que le pollen de pissenlit (Taraxacum) (Poncet, 1999). Ces préférences sont vraisemblablement liées aux taux de protéines de ces pollens, respectivement 27%, 20%, et 17% dans le cas des pollens de Prunus, Salix et Taraxacum (Aupinel et al., 2000). La composition biochimique du pollen intervient probablement également, que ce soit en termes de quantité d'azote, de composition protéique, ou de profil d’acides aminés (Aupinel, 2001, 2002). Quelles qu’en soient les raisons biochimiques, la qualité du pollen influence le développement des colonies, notamment via une influence sur le taux de ponte des reines (ou des ouvrières, selon le type de colonie étudiée), le délai de ponte, le poids moyen des larves, l’oophagie et l’éjection de larves par les ouvrières, ou la production de sexués et leur qualité (Régali et Rasmont, 1995 ; Poncet, 1999 ; Albano et al., 2000c). Par exemple, seul un pourcentage réduit de micro-colonies (3 ouvrières) produit une ouvrière adulte avec des pollens de faible qualité, comme le pollen de pissenlit. Dans les cas où cette ouvrière est obtenue, le développement ultérieur du couvain reste très faible (Aupinel, 2001). La qualité des pollens influence probablement également la qualité des nouvelles reines produites par les colonies.

A/ 2.4.2. Les capacités requises par les individus pour exploiter les fleurs Pour exploiter une fleur (artificielle ou non), source de pollen et / ou de nectar, une butineuse doit être capable de (i) la percevoir (capacités sensorielles), (ii) distinguer si elle est une source profitable ou une source non profitable (capacité discriminative), (iii) voire de mémoriser certaines caractéristiques des types floraux intéressants (capacités cognitives). Enfin, elle doit aussi apprendre à extraire la ressource des fleurs exploitées.

Capacités sensorielles Très peu de travaux ont été réalisés sur l’odorat chez les bourdons, contrairement à l’abeille. Comme chez celle-ci, les odeurs sont perçues via les antennes (Fonta, 1984). Les pattes permettent la perception de composés chimiques non volatiles.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Concernant la vision, comme tous les hyménoptères, les bourdons ont trois ocelles, situés au sommet de leur tête, entre leurs yeux. Ces ocelles captent la lumière polarisée et permettent aux bourdons de s'orienter à l'aube, au crépuscule et par tout temps provoquant une mauvaise luminosité (Heinrich, 1979). Leur tête porte sur les côtés deux yeux composés, formés de nombreuses unités visuelles, les ommatidies, comprenant trois types de récepteurs de couleur. Ces derniers leur permettent de percevoir notamment le jaune, le vert, le bleu et l'ultraviolet mais pas le rouge, qu’ils voient gris (Menzel et Backhaus, 1991). N’ayant pas les mêmes récepteurs que les humains, les bourdons ont une perception des couleurs décalée par rapport à la nôtre. Par exemple, ce que nous voyons jaune peut prendre différentes teintes de vert pour eux, en fonction de la quantité d’UV réfléchie (Lunau et Maier, 1995). La perception des fleurs et de leurs couleurs par les bourdons est influencée notamment par la brillance des couleurs et leur contraste avec les couleurs de second plan (Kevan et al., 1996 ; Goulson, 2000a). Cependant, l’influence du contraste (où l’insecte fait appel à sa capacité de discrimination des couleurs) n’est vraie que pour les fleurs de grande taille. Lorsque les fleurs sont de petite taille, l’animal utilise un autre circuit neuronal, celui de sa capacité de détection du vert (jaune pour les bourdons) (Spaethe et al., 1998 ; Spaethe et Chittka, 2001). La perception des objets de petite taille est influencée par la taille des ouvrières ainsi que par leur vitesse et leur hauteur de vol. Les ouvrières de grande taille possèdent de plus grands yeux, avec plus d’ommatidies et des diamètres de facettes plus grands que les ouvrières de petite taille. Elles sont alors capables de détecter de plus petits objets (qui prennent un plus petit angle de vision) que leurs plus petites consœurs (Spaethe et Chittka, 2001). Une grande vitesse de vol réduit la perception du contraste entre une fleur et le fond visuel, ainsi que la résolution spatiale (Srinivasan et Lehrer, 1985). Aussi, lorsque les fleurs sont petites, les butineuses augmentent l’aire observable au sol en volant significativement plus lentement et plus près du sol (Spaethe et al., 1998 ; Spaethe et Chittka, 2001). L’approche d’une fleur est déclenchée par des facteurs visuels concernant sa corolle. Une fois proche d’une fleur, la butineuse la touche de ses antennes tout en restant en vol. Un atterrissage sur la fleur dépend d’une combinaison de signaux visuels et odorants, essentiellement liés au pollen. Cette stratégie permet d’utiliser au mieux les signaux émis par la zone guide, menant vers le pollen et éventuellement le nectar (Lunau, 1992). Effectivement,

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Chapitre 1. Etat des connaissances. l’entrée des fleurs complexes peut être indiquée par des stries ou des taches rayonnantes et colorées sur les pétales, souvent associées à une odeur marquée (Lunau, 1990 ; Lunau, 1993)

Capacités discriminatives Les bourdons expriment la capacité de discriminer des ressources de profitabilité différente. Lorsqu’ils ont le choix entre des fleurs artificielles offrant ou non du nectar, ils butinent préférentiellement celles offrant du nectar (Heinrich, 1979 ; Chittka et al., 2003). Dans ce sens, lorsque les fleurs de campanule (Campanula rotundifolia) sont fraîches, ils (B. wurflenii et B. sichelii) exploitent préférentiellement les fleurs femelles, offrant nectar et pollen plutôt que les fleurs mâles, n’offrent que du pollen (Cresswell et Robertson, 1994). Ils butinent plus de fleurs dans des plantes (Echium vulgare) ou des inflorescences (Trifolium pratense exploité par B. Fervidus) riches en nectar que dans des plantes ou inflorescences pauvres en nectar (Hartling et Plowright, 1979 ; Pappers et al., 1999). Ils restent plus longtemps dans des plantes (Echium vulgare) riches en nectar ou dans des inflorescences (Brassica napus) riches en nectar et en pollen que dans des plantes ou dans des inflorescences pauvres en ressource (Pappers et al., 1999 ; Lefebvre et al., en prep, voir Chapitre 6). Enfin, le bourdon adapte sa vitesse de vol à la profitabilité des fleurs : lorsque celle-ci augmente, la vitesse diminue (Smithson et McNair, 1997 ; voir Chapitre 6). La capacité de discrimination varie fortement selon les individus (Chittka et al., 2003 ; voir aussi Chapitre 6), qui réalisent un compromis entre une forte acuité de décision et une rapidité dans leur choix (Chittka et al., 2003). Le choix des fleurs en fonction de leur offre en ressource repose en partie sur la capacité des butineuses (B. wurflenii et B. sichelii sur Agapostemon nasutus) à évaluer la disponibilité en pollen via une estimation visuelle avant de se poser sur une fleur (Cresswell et Robertson, 1994). Une estimation visuelle à distance de la disponibilité en nectar est possible sur certaines fleurs tubulaires (montré pour Apis mellifera). Pour les fleurs dont la ressource est cachée, elle peut se faire à distance, par l’odeur éventuellement dégagée par le nectar, ou une fois sur la fleur, avec le proboscis (Goulson et al., 2001).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Préférences innées pour certaines fleurs et préférences acquises par apprentissage associatif Le choix de butineuses naïves parmi plusieurs fleurs repose sur des préférences innées pour certaines caractéristiques florales, notamment la couleur : pour des niveaux de ressource comparables, les bourdons (B. terrestris) préfèrent les fleurs, naturelles ou artificielles, bleues versus jaunes, blanches, ou vertes (Heinrich, 1979 ; Lunau et Maier, 1995 ; Keasar et al., 1997 ; Smithson et McNair, 1997). On ne note pas d’influence de la symétrie des fleurs : les ouvrières inexpérimentées (B. impatiens) n'affichent aucune préférence pour les fleurs symétriques versus asymétriques et pour les fleurs à symétrie bilatérales versus à symétrie radiales, de manière innée (West et Laverty, 1998). Par la suite, le choix des butineuses pour les fleurs est lié à un apprentissage : après des visites à des fleurs artificielles profitables, les bourdons associent la couleur de ces fleurs à une récompense et présentent alors une préférence acquise pour des couleurs apprises. Lorsque la couleur apprise est absente, ils choisissent les couleurs en fonction de leur similitude avec celles apprises si la couleur apprise est absente, ce qui reflète une généralisation des couleurs. Si les couleurs testées sont si différentes qu’aucune généralisation n’est possible, le comportement de choix de couleur n’est pas influencé par les couleurs apprises et reflète des préférences innées (Gumbert, 2000). De même, les bourdons sont capables d’associer une couleur à des fleurs artificielles sans récompense. Cet apprentissage est facilité lorsque celles-ci sont mélangées à des fleurs profitables, plutôt qu’agrégées (Keasar, 2000). Cet apprentissage demande plusieurs heures de fourragement (Hefetz, 1999 ; Keasar, 2000). Lorsque les butineuses (B. impatiens) doivent apprendre à faire la distinction entre une catégorie de fleurs sans ressource et une, deux, ou trois catégories de fleurs profitables ne différant que par la couleur, leur taux d’apprentissage est supérieur pour un petit nombre de types de fleurs intéressantes. Il est probable qu’elles n'apprennent et ne mémorisent des informations que sur les fleurs intéressantes plutôt que de stocker des informations sur l'ensemble des fleurs (Dukas et Real, 1993). Une fois que les butineuses ont associé une couleur différente à deux types de fleurs de profitabilité différente, elles sont capables de s’adapter à une inversion de la situation, où les fleurs les moins profitables reçoivent la couleur des fleurs les plus profitables et inversement (Chittka et Reinhold, 1999).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Les butineuses (B. impatiens) peuvent aussi associer une récompense à une forme de fleur mais leurs performances varient avec la forme de la fleur. Elles ne montrent aucun biais d'apprentissage ou de mémorisation en faveur des fleurs symétriques versus asymétriques. Par contre, elle discriminent mieux les fleurs profitables à symétrie bilatérale versus à symétrie radiale (West et Laverty, 1998). Les bourdons sont également capables d’apprentissage associatif olfactif par conditionnement. Une concentration importante du sucre servant au conditionnement augmente les performances de l’apprentissage. La nature du sucre est indifférente. Après conditionnement à un mélange odorant, aucune ouvrière ne reconnaît les composants du mélange. Cette absence de réponse aux composés simples indique une absence de généralisation qualitative, qui permettrait une réponse rapide à des signaux changeants (Laloi, 1999). De plus, la reconnaissance d’odeurs facilite l’apprentissage d’une discrimination visuelle : l'apprentissage de la distinction entre deux types de plantes (de couleurs différents, remplies ou non de nectar) est facilité par l'ajout d'une odeur versus un apprentissage uniquement visuel, que les plantes avec et sans nectar aient reçu ou non la même odeur. Le second cas donne cependant des résultats plus rapides (Kunze et al., 1999). Une application intéressante est alors un accroissement de la pollinisation de fleurs non profitables. Par exemple, un traitement avec des hormones exocrines de nouveaux-nés (B. terrestris) augmente le nombre de visites à des fleurs de tomate mâle-stérile par des butineuses de la même espèce (Hefetz, 1999). Malgré ces performances, l'odeur ne peut servir à elle seule de signal discriminant (Kunze et al., 1999). Dans certains cas, l’apprentissage survit à la nuit (Chittka et Reinhold, 1999), dans d’autres non (Hefetz, 1999). La persistance de l’apprentissage pourrait dépendre du caractère permettant la discrimination : dans l’expérience de Chittka et Reinhold (1999), la discrimination se fait essentiellement sur une forte différence de couleur alors que, dans l’expérience de Hefetz (1999), elle se fait essentiellement sur la présence / absence de pollen. On observe également de fortes différences de capacité d’apprentissage et de mémorisation selon les individus et leur colonie d’origine mais indépendamment de l’âge des individus. En particulier, les individus montrant les plus grandes vitesses d’apprentissage sont ceux qui s’adaptent le plus vite à un changement de situation et qui mémorisent le mieux la nuit (Chittka et Reinhold, 1999). Notons qu’une discrimination ou un apprentissage imparfaits 48

Chapitre 1. Etat des connaissances. peuvent être interprétés en termes d’échantillonnage de la ressource (Keasar, 2000). Cet aspect du fourragement est abordé dans l’Article 1.

Manipulation des fleurs La récolte de nectar est généralement peu spécialisée : les bourdons apprennent très vite à l'extraire. Même les espèces connues pour être spécialistes ne le sont en fait qu'en termes de récolte de pollen. Celle-ci demande plus d'habileté que la collecte de nectar : il faut retirer une substance poudreuse des anthères, la détacher de son propre corps (en vol ou sur la fleur) et l'engluer pour en faire des paquets à coller sur les corbicules. Les techniques pour réaliser ces opérations varient selon les espèces. Les ouvrières naïves sont initialement très maladroites : elles ne réussissent pas à collecter le pollen, les boules s'abîment ou les charges sont trop lourdes et tombent avant le retour au nid. L'efficacité de la collecte par des ouvrières naïves augmente au cours d'une même journée et sur plusieurs jours consécutifs. Elle s'améliore le premier jour de butinage au cours des voyages successifs. Le lendemain, aux mêmes périodes, donc à des moments où l'offre en pollen est comparable, les charges sont plus lourdes et la capacité d'extraction du pollen des fleurs est meilleure (Schikora et Chittka, 1999). Notons que la vitesse de manipulation des fleurs dépend de leur forme : les ouvrières (B. impatiens) manipulent plus vite des fleurs artificielles symétriques versus asymétriques et des fleurs artificielles à symétrie bilatérale versus à symétrie radiale (West et Laverty, 1998).

A/ 2.4.3. Les capacités requises par les individus pour explorer leur environnement Les « vols de reconnaissance » et la localisation du nid Lors de leurs toutes premières sorties, les bourdons, comme les abeilles, effectuent des vols d’orientation dits « de reconnaissance » (Brian, 1952 ; Alford, 1975 ; Osborne et Riley, 2001). Ils sont le fait non seulement des futures butineuses mais aussi des ouvrières qui ne butineront pas (Brian, 1952) et des reines. Seuls les mâles, qui ne reviendront pas au nid n’en réalisent pas (Alford, 1975).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Lors de ces premiers vols, les bourdons effectuent de larges arcs autour de la colonie (au-delà du champ visuel d’un observateur), suivis par une série de boucles complexes lorsqu’ils veulent occasionnellement atterrir ou prélever du nectar. Ils volent généralement dans les quatre quadrants autour de la colonie durant le premier voyage et visitent ensuite moins de quadrants lors des voyages suivants alors que la trajectoire devient plus longue et plus droite. La vitesse, la distance maximale au nid, et la distance totale parcourue par chaque bourdon augmentent avec l’expérience (Osborne et Riley, 2001). Ces premières opportunités de vol sont un pré-requis pour un retour au nid réussi, par l’acquisition d’un ensemble de repères (Brian, 1952 ; Alford, 1975 ; Osborne et Riley, 2001). Les bourdons tiennent compte des objets proéminents entourant leur nid pour son repérage et les fourrageuses peuvent être perturbées à leur retour au nid si l'environnement a été modifié, par exemple par le vent ou un animal (Alford, 1975). Les vols de reconnaissance offrent aussi la première occasion de collecter de l’information sur l’ensemble des sources de fourragement disponibles (par exemple, localisation des sources de nourriture) et de manipuler des fleurs (Osborne et Riley, 2001).

Capacités d’orientation Sur la ressource, les butineuses s’orientent essentiellement grâce à des repères visuels (Pyke et Cartar, 1992 ; Orth et Waddington, 1997) mais aussi grâce à la lumière solaire (Alford, 1975 ; Pouvreau, 1984) et probablement à des informations d’ordre magnétique (Chittka et al., 1999). Chez l’abeille, les distances sont estimées par la quantité de flux optique généré sur les yeux par les objets du paysage (Sen Sarma et al., 2001). Cette quantité de flux optique étant déterminée par la densité et la distance des objets dans le paysage, il est possible que des paysages différents influencent de manière différente l’estimation de la distance parcourue par une abeille. Ainsi un paysage avec une végétation dense pourrait induire l’abeille à surestimer la distance parcourue alors qu’un paysage pauvre en végétation pourrait l’amener à sousestimer cette même distance (Sen Sarma et al., 2001). Dans ce sens, des abeilles (Apis mellifera et A. florea) en captivité, entraînées à voler dans un tunnel, peuvent être leurrées par des patterns sur les murs latéraux : une succession de bandes verticales noires et blanche pousse de telles abeilles à surestimer la distance qu’elles ont parcouru (Sen Sarma et al., 2001). Chez les bourdons, aucun travail de cet ordre n’a été mené à notre connaissance.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Mode de navigation Le déplacement artificiel de bourdons loin de leur nid et le suivi du chemin emprunté lors de leur retour au nid sont très utiles pour accéder au mode de navigation de ces insectes. Les bourdons savent retourner à leur nid depuis n’importe quel endroit autour du nid, auquel ils auraient été amenés artificiellement et relâchés (Goulson et Stout, 2001 ; Menzel et al., 2001). Il existe cependant une corrélation négative nette entre la distance du nid à laquelle ils ont été relâchés et la probabilité qu’ils ont de retrouver leur nid. La plus grande distance pour laquelle un individu a pu rentrer est de 9,8 km. La distance pour laquelle la plus grande proportion de bourdons est apte à retourner au nid est de 1,1 km (Goulson et Stout, 2001). Cette distance correspond très probablement au rayon de la zone connue par les bourdons car déjà explorée lors du butinage. Effectivement, la zone de fourragement de B. terrestris est de cet ordre : 40 à 80% des butineuses sont observées à une distance comprise entre 500 et 1750m de leur nid (Walther-Hellwig et Frankl, 2000a, b). Notons que la distance de fourragement par rapport au nid diffère selon l'espèce considérée. Par exemple, dans un habitat identique, les ouvrières de B. muscorum butinent essentiellement près de leurs nids (10% d’entre elles sont observées à moins de 500m du nid) et les ouvrières de B. lapidarius butinent à une distance moyenne (de 60 à 80% des butineuses entre 100 à 1500m). Lors de la phase initiale de ces expériences de déplacements d’individus, les bourdons semblent inspecter la localisation et les caractéristiques du site où ils sont lâchés par de multiples retours à ce site. Puis, les vols de retour au nid suivent de préférence des routes droites mais peuvent occasionnellement passer par une station de nourrissage, vers laquelle ils ont été entraîné à aller (Menzel et al., 2001). Le temps mis par les individus ainsi artificiellement déplacés loin de leur nid pour retrouver leur nid est indépendant de la distance au nid, sauf pour les petits trajets (Goulson et Stout, 2001). Ce temps de retour est un peu plus long que celui attendu pour un trajet direct mais beaucoup moins long que le temps requis pour une recherche systématique du nid. Cet élément, associé à la forme des trajets, indique un processus de navigation avec mémoire spatiale, acquise en particulier lors des vols d’orientation depuis le nid (Menzel et al., 2001). Deux sortes de mémoire spatiale peuvent être utilisées pour la navigation en zone connue : la mémoire de routes et la mémoire de carte. La mémoire de routes suppose une association entre des points de repère et des directions de mouvements, une stratégie bien documentée chez les insectes. La mémoire de cartes autorise des décisions de direction vers un but, depuis et vers toute place dans la zone connue, passant par des routes connues ou

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Chapitre 1. Etat des connaissances. nouvelles (Menzel et al., 2001). Ce deuxième type de mémoire, sans doute basé sur des repères visuels et / ou olfactifs et probablement aussi des indices magnétiques et auditifs, a été mis en évidence chez les oiseaux, les mammifères, et les décapodes mais n’a pas été documenté de manière convaincante chez les insectes (Goulson et Stout, 2001). Les bourdons feraient appel à une mémoire spatiale intermédiaire, une mémoire de routes flexible, combinant la mémorisation de la disposition spatiale de quelques points à une association entre des points et une direction de mouvements associée à ces points. Cette forme de mémoire donnerait à l’insecte une idée générale de la topologie de l’environnement, en reliant la position spatiale au moins du nid, du nourrisseur et du site de relâchage à des directions de mouvement entre eux et vers le nid (Menzel et al., 2001). Cette hypothèse est en accord avec les résultats obtenus lors des expériences de déplacement artificiels d’individus, où ceux-ci effectuent de larges cercles aux points où ils sont libérés. Ces cercles constitueraient une recherche systématique de points de repères, eux-même utilisés pour retrouver le nid. Cette hypothèse explique aussi la forme et le temps des trajets observés ainsi que le fait qu’à partir d’une certaine distance au nid aucun individu n’est plus capable de rentrer (Menzel et al., 2001 ; Goulson et Stout, 2001).

A/ 2.4.4. Le rythme quotidien des activités de butinage La description des variations quotidiennes d’activité à l’entrée des ruches varie selon l’espèce végétale exploitée et l’espèce de bourdons considérées. Cette activité, liée au butinage, commence tôt le matin (2 à 3 heures après le levé du soleil) et finit tard le soir, peu avant le coucher du soleil (Hasselrot, 1960 : colonies de B. terrestris, B. lapidarius, et B. hypnorum en milieu cultivé ; Heinrich, 1979). Selon les auteurs, en dehors de ces périodes extrêmes de la journée, l’activité à l’entrée des ruches est : constante au cours de la journée (Heinrich, 1979 : entre 10h et 18h pour B. vosnesenskii en milieu naturel ; Morandin et al., 2001a : entre 6h et 19h30 pour B. impatiens sur Lycopersicon esculentum Miller), plus grande en milieu de journée (Hasselrot, 1960 : B. terrestris et B. lapidarius), ou présente deux pic encadrant une activité plus faible en milieu de journée (Hasselrot, 1960 : B. hypnorum et parfois B. terrestris ; Heinrich, 1979 ; Shelly et al., 1991 : B. pennsylvanicus sonorus ; Verhaeghe et al., 1999 : B. terrestris butinant librement près d’une agglomération ; Mexia et al., 2000). On note également des variations selon qu’on considère la collecte de nectar ou de

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Chapitre 1. Etat des connaissances. pollen, ainsi le nectar semble surtout récolté le matin (Alford, 1975 : B. lucorum, B. sylvarum ; Heinrich, 1979). La cause de ces variations quotidiennes d’activité n’est pas toujours clairement déterminée, qu’il s’agisse de butinage de pollen, de nectar, ou de butinage mixte, et que cette activité soit relevée au niveau des ruches ou au niveau de la ressource. Un rythme d’activité peut avoir une origine intrinsèque (rythme biologique) ou extrinsèque. Dans ce second cas, les variations quotidiennes d’activité à l’entrée des ruches pourraient être liées aux conditions environnementales, qui déterminent (1) la disponibilité en ressource et la facilité de son exploitation, ce en rapport avec (2) les conditions météorologiques. Ainsi des températures relativement élevées associées à une faible hygrométrie facilitent l’extraction du pollen des fleurs (Albano et al., 2001b). Ces variations d’activité pourraient également varier en fonction (3) des besoins de la colonie. Nous développons ces trois points ci-après. En serre de production maraîchère, l’activité à l’entrée des ruches et l’activité de visite aux fleurs (B. terrestris) est ajustée à la période de la journée où on trouve une quantité maximale de nectar (Cucumis melo, Solanum nigrum) ou de pollen (Lycopersicon esculentum) sur les fleurs et, par conséquent, où le butinage est le plus avantageux (Albano et al., 2000c ; Mexia et al., 2000). Pour l’abeille domestique, le lien entre la disponibilité en pollen de fleurs de Cistus salvifolius et l’activité des butineuses sur ces fleurs est tel, qu’une étude heure par heure de la libération de pollen par des fleurs ne fournissant que du pollen en milieu naturel pourrait être faite à travers de simple observations de leur collecte (Nansen & Korie, 2000). Notons cependant que, selon l’espèce végétale exploitée, une forte activité à l’entrée des ruches est plus (B. terrestris et B. lapidarius sur trèfle rouge) ou moins (B. terrestris sur luzerne) associée à une forte activité sur les plantes (Hasselrot, 1960), ce qui est probablement lié à la disponibilité en ressource de ces plantes. De plus, le niveau d’activité à l’entrée du nid n’est pas lié à l’efficacité de la collecte : l'intensité du trafic à l'entrée du nid peut être augmentée dans des conditions de butinage difficiles (par exemple, température basse et / ou humidité importante). Dans ces conditions, les bourdons ont besoin de sortir plus souvent de leur ruche et de visiter plus de fleurs pour obtenir le même résultat. Par contre, leur efficacité pollinisatrice est alors augmentée (Albano et al., 2000b).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Bien que le nombre de butineuses actives soit corrélé à la température de l'air (Comba, 1999), ce qui est généralement le cas des insectes, les bourdons (B. terrestris, B. lapidarius, B. hypnorum) sont moins sensibles que les abeilles aux conditions climatiques défavorables, comme le froid, la pluie ou la grêle. Ainsi, en milieu naturel (désertique), l’activité de butineuses de B. pennsylvanicus sonorus semble indépendante de la température ambiante et de la luminosité (Shelly et al., 1991). En serre de tomates, aucune relation n’a été trouvée entre l’activité des bourdons Bombus impatiens Cresson et la quantité de radiations solaires ou l’humidité de la serre. Seule une légère corrélation avec la température des serres a été notée (Morandin et al., 2001a). Signalons, qu’en serre, la qualité du couvert influence la qualité de la lumière et peut influencer le niveau d’activité des bourdons à l’entrée de leurs ruches de façon considérable. Ainsi, cette activité est beaucoup plus importante dans les serres dont le couvert laisse passer de hauts niveaux d’UV (Morandin et al., 2001a). Pour finir, les besoins de la colonie peuvent expliquer les variations et l’intensité des patterns observés. Ces besoins sont liés à l’état des réserves de la colonie, à la taille de sa population, et à son stade de développement. Par exemple, le pic de butinage de nectar observé le matin pour B. lucorum et B. sylvarum peut être causé par un pic de présence d'adultes pendant la nuit induisant une déplétion du stock (Alford, 1975). De même, la diminution de collecte de pollen en fin de vie de colonie serait due à un besoin accru de nectar, lié à la présence de sexués et au maintien de la température. Elle pourrait aussi être lié à la plus grande quantité de nectar disponible en fin de saison (Hasselrot, 1960) (voir ibidem, Chapitre 3).

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

B. LE BUTINAGE CHEZ LES INSECTES SOCIAUX : ANALYSÉ DANS LE CADRE DE LA THÉORIE DE L’APPROVISIONNEMENT OPTIMAL Se référer à la Théorie de l’Approvisionnement Optimal ou Optimal Foraging Theory (OFT) permet de situer le butinage comme une stratégie alimentaire répondant à un ensemble de règles qui permettent à un individu de maximiser son alimentation et sa reproduction à long terme (sa fitness). Ceci peut se résumer au fait d’acquérir un maximum d’énergie en fournissant un minimum d’efforts au moindre risque vital. Cette notion de rentabilité énergétique est basée sur un élément fondateur de la théorie qui est le Théorème de la Valeur Marginale (Marginal Value Theorem, MVT) de Charnov (1976). L’essentiel des concepts inclus dans cette théorie (sensibilité au risque ou risk sensitivity ; distribution libre idéale ou ideal free distribution ; règle de départ d’un patch ou giving up time), leurs modèles et leurs applications ont été émis et généralement vérifiés chez des vertébrés. En revanche, assez peu de travaux ont été réalisés sur les invertébrés (hormis des Hyménoptères parasitoïdes pour ce qui est de la règle de départ) et encore moins sur des insectes sociaux. Pourtant, le choix de ce type de matériel biologique présente un intérêt tout particulier

car

il

s’agit

de

savoir

comment

l’optimisation

du

comportement

d’approvisionnement peut se réaliser chez des individus qui possèdent des capacités cérébrales plus limitées que des vertébrés, qui ramènent leur approvisionnement au nid pour l’usage des autres (central place forager) et, surtout, pour qui la fitness est indirecte puisque les butineuses ne sont pas amenées à se reproduire mais à s’investir selon une sélection de parentèle. On peut également se poser la question de savoir si l’optimisation de l’approvisionnement est le fait de la colonie dans son ensemble, comme c’est le cas chez l’abeille (auquel cas les mécanismes de régulation seraient intégrés dans l’optimisation), ou bien si l’optimisation au niveau de la colonie n’est que le résultat du simple cumul de comportements optimaux individuels. En effet les colonies de bourdons n’ont rien à voir du point de vue numérique avec celles des abeilles et, de plus, elles sont annuelles et non pérennes. On peut faire l’hypothèse que l’optimisation de l’approvisionnement ne se ferait pas selon des mécanismes aussi élaborés dans les cas des abeilles ou des bourdons. Dans l’étude bibliographique présentée à la fin de ce chapitre, nous abordons le butinage chez les insectes sociaux pollinisateurs dans le contexte de la Théorie de 55

Chapitre 1. Etat des connaissances. l’Approvisionnement Optimal. Cette étude est présentée sous la forme d’un article ayant pour titre « Social bees and optimal foraging: a review” (Article 1). Elle devrait être soumise à Trends in Ecology and Evolution. Nous développons ci-dessous deux aspects traités dans l’article : (i) les mécanismes optimisant l’efficacité individuelle de fourragement par régulation des déplacements entre ressources, afin d’introduire le travail présenté dans le Chapitre 6 (1ère partie), et (ii) les mécanismes optimisant l’efficacité collective de fourragement par régulation de la collecte de ressources, afin de pouvoir discuter de certaines pratiques agronomiques (voir Discussion). Hormis la théorie de la sensibilité au risque, les autres aspects de l’article sont développés dans des chapitres particuliers : la distribution libre idéale dans le Chapitre 5, et la règle de départ dans le Chapitre 6 (2ème partie).

B/ 1. Régulation des déplacements entre ressources au cours du butinage A l’échelle du paysage, les insectes pollinisateurs font face à un environnement discontinu hétérogène, constitué de patchs de fleurs (plantes, champs, etc.) de qualités distinctes. Par contre, dans les patchs, ils font face à un environnement d’une hétérogénéité variable selon que les fleurs diffèrent plus ou moins dans leur offre en ressource, pollen ou nectar. A cette échelle du patch, les pollinisateurs peuvent minimiser l’énergie et le temps alloués à la découverte et à l’exploitation de fleurs profitables, en contrôlant leurs déplacements. Selon la répartition spatiale et temporelle de la ressource dans le patch, les insectes pollinisateurs peuvent adopter diverses stratégies. Ils peuvent choisir de butiner sur des plantes voisines dans un patch tant qu’elles sont profitables. Ils peuvent aussi varier la sinuosité de leurs trajets, selon le modèle de la marche au hasard corrélée. Dans ce modèle, un prédateur minimise la sinuosité de son trajet lorsqu’il recherche une zone de fourragement (mode de recherche extensif). Dès qu’il a trouvé une proie, et donc qu’il est très probablement dans une zone contenant un ensemble de proies, il augmente la sinuosité de son trajet afin de rester au sein de cette zone (mode de recherche intensif). Malgré ces sinuosités, le prédateur peut sortir de la zone favorable. Il peut aussi l'épuiser. Il repasse alors en mode de recherche extensif (Bovet et Benhamou, 1988). Les bourdons (genre Bombus) répondent à ces prédictions. Ils restreignent leur recherche aux alentours d’une fleur lorsqu’elle est profitable en diminuant la distance de vol

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Chapitre 1. Etat des connaissances. entre cette fleur et celle qui sera exploitée ensuite (Heinrich, 1979 ; Keasar et al., 1996) et en ne présentant pas de direction de vol privilégiée (Heinrich, 1979). On peut aussi envisager que la probabilité de découverte (détection) d’une fleur soit influencée par la vitesse de déplacement du fourrageur (Srinivasan et Lehrer, 1985) : après avoir choisi un patch, l’animal peut réduire sa vitesse ce qui lui permettra de détecter correctement les fleurs dans ce patch ; après un temps de recherche sans succès, il devrait reprendre une vitesse élevée. Il existerait alors un compromis entre la distance parcourue (à grande vitesse de déplacement) et la capacité de détection d’un patch ou d’une proie (à faible vitesse de déplacement). Dans ce sens, la capacité de détection des bourdons diffère avec leur vitesse de vol (voir A/2.4.2., p.45). La disposition des fleurs dans un patch influence également de manière assez complexe les déplacements des bourdons sur une ressource, ceci aussi bien en termes de distance entre fleurs exploitées successivement, que de direction globalement présentée au cours de l’exploitation du patch. La distance entre fleurs exploitées diminue lorsque la distance moyenne entre plantes augmente (B. flavifrons et B. bifarius sur plantes de Polemonium foliosissimum : Zimmerman, 1981), lorsque la ressource est agrégée versus disposée de manière régulière (Bombus lapidarius sur plantes de Brassicas napus : Cresswell, 2000), ou lorsque les plantes sont disposées de manière régulière versus de manière aléatoire (B. occidentalis sur fleurs artificielles : Cartar et Real, 1997). La tendance des butineuses à présenter une direction de vol privilégiée est significativement réduite lorsque la distance moyenne entre plantes augmente (Zimmerman, 1981), lorsque la ressource est agrégée versus disposée de manière régulière (Cresswell, 2000), ou lorsque les plantes sont disposées de manière aléatoire versus de manière régulière (Cartar et Real, 1997). Les bourdons font un compromis entre direction et distance entre fleurs. Ils ne changent de direction que quand la fleur est proche et ne demande pas un grand changement par rapport à l’angle d’arrivée (Plowright et Cantin-Plante, 1997). La qualité de la ressource et sa disposition peuvent avoir une action combinée sur la gestion des déplacements des bourdons dans un patch. Par exemple, les distances parcourues entre deux fleurs artificielles par les butineuses d’abeille (Apis mellifera) sont significativement plus longues dans les zones pauvres que dans les zones riches mais 57

Chapitre 1. Etat des connaissances. uniquement pour une distance « suffisante » entre fleurs (Schmid-Hempel et Schmid-Hempel, 1986). Cela est parfaitement en accord avec la Théorie de l’Approvisionnement Optimal selon laquelle un animal optimise son gain énergétique, en minimisant le coût de la collecte (ici le coût des déplacements, lié notamment à la disposition des ressources) et en maximisant le gain (ici en choisissant au mieux les fleurs exploitées). L’efficacité du fourragement peut aussi être augmentée par des comportements permettant d’éviter des fleurs déjà exploitées. Une butineuse peut limiter le nombre de visites à des fleurs qu’elle a déjà exploitées (revisites) en contrôlant ses mouvements et en réalisant des trajets présentant une direction privilégiée. Cependant, si un trajet rectiligne, par opposition à un trajet sinueux, peut conduire à une augmentation de l’efficacité de fourragement en limitant les revisites, il peut aussi conduire à une diminution de l’efficacité de fourragement en favorisant la sortie d’un patch riche. Un compromis est donc nécessaire et l’efficacité de la variation des mouvements dépend de l’environnement considéré (Zimmerman, 1979). Dans un système où la probabilité de revisite des fleurs est très faible, il est plus intéressant pour les butineuses de présenter des directions de butinage aléatoires. C’est ce qui est observé pour les butineuses B. flavifrons lorsqu’elles butinent sur des plantes de Polemonium foliosissimum (Zimmerman, 1979). Au contraire, dans un système où la probabilité de revisite des fleurs est très forte, les butineuses devraient présenter une direction privilégiée. C’est le cas, par exemple, sur les inflorescences en bougies, où le risque de revisite d'une fleur, si on retourne sur la même inflorescence, est de 100% du fait de la disposition des fleurs et du comportement de butinage particulier sur ces inflorescences7. Ce type de butinage, commençant par les fleurs les plus profitables, pourrait donc être une stratégie d’évitement des fleurs déjà butinées (Zimmerman, 1979 ; Heinrich, 1979). On observe que la gestion du nombre de revisites est dépendante de la disposition de la ressource. Le nombre de revisites augmente lorsque la ressource est agrégée versus disposée de manière régulière (Cresswell, 2000) ou lorsque les plantes sont disposées de manière aléatoire (Cartar et Real, 1997). Dans ces deux situations (ressource agrégée ou 7

Ces inflorescences, comme Aconitum columbianum et Delphinium nelsonii, présentent un gradient de nectar décroissant du bas de l'inflorescence vers le haut, inverse à celui du pollen, les fleurs du bas étant les fleurs femelles. Ces dernières sont plus âgées et plus faciles à manipuler car mieux ouverte. En réponse, dans 90% des cas, les bourdons (Bombus spp.) butinent ces inflorescences du bas vers le haut, ignorant environ le tiers des fleurs. L’exploitation particulière de ces inflorescences est bénéfique aussi pour les fleurs (allofécondation), puisque les fleurs femelles d'une inflorescence sont visitées avant les fleurs mâles de cette même inflorescence (Heinrich, 1979).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. disposée de manière aléatoire), les bourdons présentent des trajectoires de plus grande sinuosité. Visiblement dans ces cas, le compromis se fait en faveur de la découverte d’une ressource intéressante plutôt qu’en faveur de l’évitement des revisites. Ce caractère n’est probablement pas assez coûteux pour être contre-sélectionné par rapport au gain apporté par la découverte d’une bonne ressource. Des mécanismes complémentaires, plus simples et moins coûteux pourraient être mis en place comme la capacité à détecter les fleurs récemment visitées, notamment via la reconnaissance de dépôt d’éléments chimiques (odeurs) espèce ou genre-spécifique (pour revue bibliographique, voir Pierre, 2003). La condition permettant la mise en place de ces différents mécanismes est la capacité des bourdons à discriminer deux sources de qualité différente et de présenter une préférence appropriée envers l’une d’elle. La préférence pour une ces deux sources résulte de la capacité de discrimination proprement dite mais aussi de la capacité de mémorisation des différences entre les deux sources, comme nous l’avons vu précédemment (voir ibidem, Chapitre 6 1ère partie).

B/ 2. Régulation du butinage par les individus et la colonie La collecte de ressources destinées à la colonie demande, pour être efficace, un comportement individuel de fourragement adapté à la situation environnementale : choix approprié d’un site de butinage et, au sein de ce site, choix des fleurs en fonction de leur rentabilité ou décision de quitter le site quand la ressource s’épuise. Dans le cas d’un insecte social comme le bourdon, on peut imaginer que ce comportement individuel est régulé en fonction des besoins de la colonie. Au plan individuel, la décision de continuer à collecter une ressource dépend de la nature de cette ressource. Ainsi, la décision des butineuses retournant au nid avec une charge de nectar de continuer à en collecter dépend uniquement du succès de leurs précédents voyages. Par contre, la probabilité pour une butineuse de récolter du pollen est indépendante de ce qui s’est passé lors de voyages précédents (Verhaeghe et al., 1999). Selon ces auteurs, cela pourrait s’expliquer par le fait que le pollen est un facteur limitant mais qu’à l’échelle de la journée c’est une ressource plus dispersée et plus renouvelable que le nectar. Une stratégie stochastique permet alors un approvisionnement régulier. Le nectar est rare et distribué de

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Chapitre 1. Etat des connaissances. manière agrégative (Zimmerman, 1981) et une stratégie d’exploitation de la ressource jusqu’à épuisement est mise en place. Notons qu’il existe toujours une probabilité de changer d’activité, ce qui évite aux butineuses de rester piégées dans une activité (Verhaeghe et al., 1999). Le comportements des fourrageuses peut aussi être modulé par les besoins de leur colonie. Ainsi, les butineuses manipulent différemment les fleurs (naturelles et artificielles) en récoltant dix fois plus de pollen que de nectar en situation de privation de pollen, et inversement en condition de privation de nectar (Plowright et al., 1999 ; Landry et al., 2000). Le choix des espèces florales par les butineuses est aussi affecté. Ainsi lors de privation de pollen, les butineuses (B. impatiens) choisissent préférentiellement les fleurs âgées de Cirsium vulgare, contenant plus de pollen que les jeunes fleurs et visitent davantage des fleurs artificielles contenant nectar et pollen que des fleurs artificielles contenant seulement du nectar (Plowright et al., 1999). On observe aussi davantage de butineuses de pollen sur les fleurs mâles, fournisseuses de pollen, versus butineuses de nectar sur les fleurs femelles, fournisseuses de nectar (Landry et al., 2000). Au niveau de la colonie, la régulation des besoins semble emprunter deux vecteurs de communication : les pots à miel, et peut-être aussi les pot à pollen, et une sorte de communication (danse) primitive. Il est noté de longue date que la décharge des récoltes ne se fait pas au hasard : les butineuses mettent beaucoup de temps à choisir un pot où déposer leur collecte de nectar ou de pollen. Elles visitent de nombreux pots et ne déposent leur récolte que dans très peu d'entre eux. Cela peut être un moyen d'apprécier individuellement les besoins de la colonie (Brian, 1952 ; Alford, 1975 ; Heinrich, 1979). Dans ce sens, l’existence d’une trophallaxie indirecte via ces pots, qui sont visités par tous les adultes de la colonie, a été mise en évidence (Lecomte, 1963). Des expérimentations d’ajout de nectar ont alors été effectuées pour comprendre les mécanismes de régulation mais les résultats de ces expérimentations sont parfois contradictoires. Selon certains auteurs, l’ajout artificiel de nectar dans les pots à miel conduit à une augmentation du temps de résidence au nid des butineuses (Brian, 1952) et à une diminution de l’activité de collecte de nectar (Free, 1955 ; Verhaeghe et al., 1999). Dans ce sens, une étude plus globale (Pelletier et McNeil, 2003) montre que l’ajout conjoint de pollen et de nectar diminue l’activité globale de fourragement. Pour d’autres auteurs (Dornhaus et Chittka, 1999), un tel ajout incite des butineuses à sortir fourrager mais n’en fait pas sortir 60

Chapitre 1. Etat des connaissances. autant que le ferait une seule butineuse. Ces résultats contradictoires pourraient montrer que l’effet de l’ajout dépend de la quantité ajoutée par rapport aux stocks existants avant cet ajout. Un effet seuil peut également être évoqué. Dans ce cas, un ajout de nectar pourrait inciter les butineuses à butiner tant qu’un seuil de ressource donné au sein de la colonie n’est pas atteint. Au contraire, l’ajout d’une quantité de nectar amenant les réserves de la colonie au-delà de ce seuil pourrait inciter les butineuses à rester au nid. De même, l’incidence de tels ajouts de nectar dans les pots à miel sur la collecte du pollen diffère selon les auteurs : diminution pour Verhaeghe et al. (1999), aucun changement pour Free (1955). Seul Verhaeghe et al. (1999) ont menés des expérimentations de retrait de nectar des pots à miel. Leurs résultats montrent que cela n’influence ni la collecte de nectar, ni la collecte de pollen. Au plan appliqué, compte tenu des diverses informations relatives à l’effet des stocks de la colonie sur l’activité de butinage, il est important de souligner que, dans les conditions d’utilisation de bourdons en serre de tomate, voire d’autres cultures, une poche de sirop est disponible en permanence dans les ruches. Cette pratique constitue un écart important à la régulation normale des stocks et on peut se demander quelles en sont les conséquences. Des études sur la conduite des colonies sont actuellement en cours à l’INRA d’Avignon. Parmi les moyens permettant la régulation de l’approvisionnement chez les insectes sociaux, la communication entre individus doit également être prise en compte. Un exemple très connu est la danse des abeilles conduisant au phénomène de recrutement sur la ressource dont la localisation est ainsi désignée. Chez les bourdons, ce comportement n'a pu être observé, ce qui a fait conclure à une absence de communication de sorte que leur butinage est encore souvent considéré comme individuel (Alford, 1975 ; Heinrich, 1979 ; Prys-Jones et Corbet, 1991). En fait, un système de recrutement plus simple que celui des abeilles a été mis en évidence récemment (Dornhaus et Chittka, 1999). De retour au nid, une butineuse ayant trouvé une ressource dépose son nectar puis effectue des courses agitées et étendues dans la colonie en faisant parfois vibrer ses ailes. Suite à ce comportement, l'activité de recherche alimentaire (en cage de vol) augmente significativement. Ce pattern a une composante vibratoire, le « leaving sound », qui incite les ouvrières (probablement les fourrageuses au repos) à sortir. Le « leaving sound » pourrait de plus informer les ouvrières du nid sur la profitabilité du fourragement, son occurrence et sa fréquence étant hautement corrélés à la

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Chapitre 1. Etat des connaissances. concentration en sucre de la ressource et au nombre de fourrageuses ayant trouvé la ressource (Oeynhausen et Kirchner, 2001). Des messages odorants, peut-être phéromonaux, constituent sans doute un signal additionnel incitant les ouvrières à sortir du nid (Dornhaus et al., 1999). De plus, la butineuse de retour de butinage transmettrait par ce moyen des informations odorantes sur l'espèce des fleurs qu’elle a exploitées : les butineuses quittant ensuite le nid préfèrent significativement l'odeur ramenée par la butineuse pourvoyeuse (Dornhaus et Chittka, 1999). Quel que soit le vecteur d’information, aucune localisation géographique ne semble transmise lors de ce type de recrutement (Dornhaus et Chittka, 1999). En conclusion, il apparaît que le butinage est l’objet de régulations tant au niveau individuel qu’au niveau collectif et qu’il existe une interdépendance entre les 2 types de ressources collectées. Les mécanismes de régulation restent encore mal définis et la question se pose également de savoir si le butinage est optimisé chez le bourdon.

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

ARTICLE 1

Social Bees And Optimal Foraging Theory: A Review Pierre J., Dechaume-Montcharmont F.-X., Lefebvre D., Pierre J.-S.

(en préparation)

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Chapitre 1. Etat des connaissances.

Social Bees And Optimal Foraging Theory: A Review PIERRE J.a, DECHAUME-MONTCHARMONT F.-X.b, LEFEBVRE D.a,c, PIERRE J.-S.c a

UMR Bio3P, INRA, domaine de la Motte, 35650 Le Rheu

b

Laboratoire de Neurologie Comparée des Invertébrés, BP23, 91440 Bures-sur-Yvette c

UMR 6552, Ethologie-Evolution-Ecologie, Université de Rennes1-CNRS, Rennes

Introduction Twenty years ago, Behavioural Ecology emerged as a new scientific field bordering Ethology and Population Biology. Behavioural Ecology represented a change in the concept of the role of animal behaviour in relation to evolution and environment. According to this new conception, behaviour, through its ecological function, is considered to be optimized by natural selection. Adaptation of behavioural traits can be measured by various utility functions, the ultimate function being the fitness of their owners. Because of the vital aspect of foraging behaviour, Optimal Foraging Theory (OFT) has played a central role in Behavioural Ecology. This theory was primarily developed from data for birds and, later, for mammals (for a review see Cézilly and Benhamou, 1996). Insects, and social bees in particular, have been studied in the frame of the Optimal Foraging Theory since 1981. Social bees are of special interest for two reasons. First, their foraging activity plays a major role in plant pollination and is therefore economically important; and second, their foraging behaviour has to be considered both at the individual and at the colony levels. This paper presents some key concepts of the Optimal Foraging Theory and their applications to the major pollinating social bees, i.e. honeybees and bumblebees (Hymenoptera: Apoidea, Apidae, resp. Apinae and Bombinae). Basically, some biological traits of social bees must be kept in mind to understand the applications of Optimal Foraging Theory. One of the characteristics of social insects is that they forage, not for their own benefit, but for that of their colonies and they carry their loads back to their nests or hives. Bees are therefore faced with a central-place foraging problem. Another specificity of social insects is that they store reserves that exceed their short-term requirements. Their resources, pollen and nectar, can be collected separately. Allotment of foraging between two resources by an individual is more frequent in honeybees than in bumblebees. Moreover, the goal functions of nectar and pollen collecting are very different. Nectar is stored in the comb for

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Chapitre 1. Etat des connaissances. later consumption by the colony to insure its maintenance. Pollen is mainly used as a protein source for rearing larvae. This distinction between two nutriment resources, one a carbohydrate and the other a protein, is also a specificity that separates Apoids from other well-studied social insects such as ants or wasps. These colonial requirements are quantitatively very important. For example, an average honeybee colony, with 30 000 workers in the summer, consumes 30 kg of pollen and 80 kg of honey per year (Seeley 1985, Winston 1987). Nevertheless, only small proportions of bees of each colony are involved in the foraging process. Foraging ranges are important: foraging trips of honeybees average 2 km, and can reach up to 10 km (Visscher 1982); foraging trips of the bumblebee, Bombus terrestris, average 275 m (Osborne et al., 1999), and 9.8 km at the maximum (Goulson and Stout, 2001). They forage highly variable food sources and individuals as well as colonies must adapt quickly to changes in sources. Another remarkable characteristic of social bees concerns their fitness. Ultimately, fitness should be measured as the expected number of reproductive queens in the offspring, and workers only have inclusive fitness in Hamilton's sense. Moreover, due to the great number of interacting agents, a strong co-operative organization and self-organized patterns of collective activity have to be considered.

Historic of the Marginal Value Theorem (MVT) The origins of the Optimal Foraging Theory are found in MacArthur and Pianka's, (1966) and in Emlen's (1966, 1968) papers. Schoener (1971) provided its first coherent mathematical formulation. However, Charnov (1976) conceived the first decisive deterministic model and used the expression «Optimal Foraging» in the title of his thesis (1973). In Charnov's model, the environment is a mosaic of patches with different profitability levels. These patches belong to m different types, among which a net rate of energy intake (or Rate of Net Energy Intake, RNEI) is defined. Its first derivative, the marginal gain, decreases monotonously during the time spent in the patch. (remettre le schéma,cf figure1) Charnov defined the optimisation problem by setting a constraint: the available temporal horizon of the animal (life-span, length of season or of day, depending on its biological cycle). He concluded that a forager should leave a patch when its marginal gain of energy intake fell below the average expected value for the entire set of environments

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Chapitre 1. Etat des connaissances. (Marginal Value Theorem, MVT). Birds were studied in the first attempts to verify this prediction (Cowie, 1977; Kacelnik et al., 1981). When applied to social bees, verification of Charnov's model required the determination of the RNEI or the marginal gain. In this case, energetic costs are due to handling and probing efforts, flights between flowers and trips to foraging areas. Energetic gains are provided by the quality and quantity of nectar and pollen ingested or collected. Evaluations of the energetic costs of probing and movement were made for bumblebees (Heinrich, 1975; Pyke, 1980) and were later used by other investigators to discuss the foragers' behaviour. Thus Hodges and Wolf (1981) based their studies of nectar gathering by queen B. appositus on Delphinium nelsoni, on Pyke's calculations. They observed that some nectar was left in flowers when standing crops and plant densities were high. They considered that the results were in accordance with Charnov's MVT rule and they showed how too much time spent probing could impair the final energetic budget. Flower handling costs and probing effort were also studied by Harder (1986) and Waddington and Gottlieb (1990). The ergonomy of movement and short flight distances between or within plants have also been investigated many times (Pyke, 1978; Heinrich, 1979; Waddington, 1979, 1980; Zimmerman, 1981; Schmid-Hempel, 1986; Harder, 1990). For instance, Harder (1990) showed that for B. bifarius, collecting pollen on Lupinus cericeus whose standing crop decreases from the top whorl down, the starting position in the inflorescence and flights from flower to flower within the inflorescence were consistent with the most beneficial behaviour. In the 1990s, metabolic rates during nectar foraging were measured in honeybees (Balderrama et al. 1992; Moffat and Nuñez, 1997), but nectar foraging efficiency was discussed more from social (Wolf and Schmid-Hempel, 1990) and motivational points of view than within the strict context of the original MVT. Thus, for Waddington and Gottlieb (1990) the objective was not only to evidence the influence of the balance between handling costs and energy intake on honeybee choice of flower, but also to investigate relationships between real and perceived profitability. Individual honeybees were presented two artificial flowers differing in profitability. The profitability of flowers was controlled by manipulating corolla-tube depth (handling cost) and volume of sucrose solution (energetic gain). Thus, many combinations of pairs of flowers differing in relative profitability were proposed. The results showed that the most profitable flower of a pair was not chosen systematically, and this seemed in contradiction with the theory. To explain the honeybees' behaviour, the authors

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Chapitre 1. Etat des connaissances. evoked relative perception according to Weber-Fechner's law (discrimination depends on the relative difference in profitability, not on profitability itself) and motivation (at very high profitability levels, honeybees were not motivated to choose the best flower). Finally, the authors concluded that perception and motivation must be incorporated into foraging models as first order constraints. Relationships between travel expenditure and energetic efficiency were studied in reference to the Optimal Foraging Theory and especially to central place foraging in two papers. Nuñez (1982), Kacelnik et al.'s (1986), model showed that energetic efficiency (ratio of energy gained per unit of energy spent) was maximized in honeybees, i.e. crop filling increased when nectar flow was higher and travelling longer. Moreover, the model fitted better energetic efficiency than net rate of gain (ratio of energy gained per unit of time) predictions. Cresswell et al. (2000), after Ellington (1990) estimating flight energy expenditure in bumblebees, formulated an economic model explaining the limits of foraging range according to nectar reward.

Further developments of OFT Charnov's model has often been disproved, especially when invertebrates, such as parasitic Hymenoptera, are used as biological models. These falsifications and some violent theoretical criticisms (Pierce and Ollason, 1987) led theoreticians to examine the assumptions of Charnov's model and to relax its most restrictive hypotheses stated in the following list: i) The model is deterministic. The unpredictable character of the environment is not taken into account. Furthermore, the environment is supposed to remain constant over time. ii) Foragers have to be omniscient. They are presumed to have total knowledge of the profitability distribution among patches in their available environment. iii) Foragers are alone, their behaviour is independent of that of others. There is neither competition nor co-operation between foragers. Relaxing each of these assumptions opened three new main research paths. First, the stochastic characteristics of the environment induce animals to gather information from it. This process is similar to a sampling procedure of the environment. Second, when the environment is highly unpredictable and threatens the very survival of individuals, foragers can present «risk sensitive» behaviour. Third, at the population level, competition between

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Chapitre 1. Etat des connaissances. foragers induces them to disperse in the environment following various patterns, the simplest being the «Ideal Free Distribution” (IFD). We review briefly these three aspects that improved the theory and we outline questions related to optimal diets, another popular aspect of OFT, often considered for pollinators.

Sampling theory and departure rule To be efficient, a forager must acquire information when it forages. McNamara and Houston suggested that this information intake simulates Bayesian sampling procedures (McNamara and Houston, 1980, 1985; Houston and McNamara, 1984, 1985, 1988). This means that giving-up rules follow sequential decision procedures where the a priori estimation of probabilities is modified a posteriori by information. Decision to leave would be reached when some criterion is attained and the departure rule is based on this criterion. Total residence time (or giving up time, according to McNair, 1982) becomes a random variable and no longer a constant linked to the profitability of the patch, as in Charnov's earlier model. Pleasants (1989), using Hodges (1985 a, b) data for B. appositus foraging on Delphinium nelsoni, addressed the influence of reward experience on bumblebees' MVT thresholds when reward values for successive items in a patch are correlated. In this study, the patch was an inflorescence of only three flowers with quantities of nectar decreasing from bottom to top. As bumblebees generally move up a stalk, under these conditions, if they followed a “bottom-middle-top” (B-M-T) visit sequence, they would experience the reward gradient of Delphinium nelsoni flowers. In fact, several foraging tactics were observed: visits to one, two or three flowers with different combinations of B, M and T. Some tactics were significantly more frequent and probably more efficient than others. Devising a simulation model, Pleasants showed that the observed leaving decision was explained better by multiple departure thresholds than by a single fixed threshold, as proposed by Hodges. Pleasants' simulation demonstrated that there should be two departure thresholds: one for the first flower visited and another for the second and he pointed out the impact of recent reward experience on the determination of the threshold. This detailed paper illustrated the relevance both of the MVT rules and of past experience as a sampling process. It is worth noting that, in Pleasants' model, short-term memory limited to the last flower visited was sufficient to reach optimality. In species with neural memory of some importance, sampling implies retention of

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Chapitre 1. Etat des connaissances. information. During acquisition of information i.e. during a learning process, an animal's behaviour is necessarily sub-optimal. Optimality can only be reached if acquired information has any value. Stephens (1987, 1993) modelled this concept following its definition by the economist Gould (1974). According to these authors, information has a value only if it modifies behaviour. Remember that acquisition of information implies behavioural plasticity i.e. the ability to use information. Nevertheless, foragers sometimes choose an energetically sub-optimal reward when faced with zero-one probability situations, i.e. to obtain a reward or not (Stephens and Krebs, 1986). Recently, Bélisle and Cresswell (1997) proposed a model to explain the existence of partial preferences to low-value prey types by memory constraints in some predators whose memory span is limited. Reduction of learning performance by bumblebees, under high nectar variance (Real et al., 1990; Dukas and Real, 1993) could be explained by Bélisle and Cresswell's model. Greggers and Menzel (1993) addressed questions concerning the role of learning in sampling processes. They investigated specifically sampling of the environment and use of information with single nectar-gathering honeybees. They used a patch of four feeders providing different combinations of sucrose solution flow rates and spatial arrangements. Choice by honeybees indicated that they used two forms of memory, in agreement with previously described associative learning rules (Rescorla and Wagner, 1972): a short-term memory that was not feeder specific and a feeder-specific long-term memory. Honeybees learned the value of the food source and thus had some expectation of the amount of next intake; they also integrated information received in a given patch. To optimize foraging according to the quantity of reward and reward sequence, they applied both maximization strategy (choose only the best gain/cost ratio) and matching strategy (choose some from the most efficient ratios). Their decisions to stay at a feeder or to shift from one to another followed a definite rule based on the mean reward rate of each feeder. Other studies pointed out the behavioural flexibility of honeybees to contingencies (Demas and Brown, 1995).

Risk sensitivity theory Caraco (1981) introduced the risk sensitivity concept, widely used in economy, into behavioural ecology. Risk sensitivity is often expressed by two opposite strategies: risk-prone individuals choose highly variable resources and risk-averse individuals choose

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Chapitre 1. Etat des connaissances. approximately constant resources. Foragers are said to be risk-indifferent when they show no preference either for variability or for constancy of reward. Risk sensitivity is likely to occur when the function linking net energy gain to fitness is strongly non linear. This function is a step function, for instance, an animal is likely to die if its energy gain over a given period of time drops below a given level. Thus, in Caraco’s seminal experiment, while normally fed Junco were risk-averse, starved birds were likely to become risk-prone. Later, Stephens and Charnov (1982) modelled this result. McNamara and Houston (1992) reviewed the complexity of this theory comprehensively. Basically, risk sensitivity is a behavioural reaction to the variance of the reward and not only to its mean. Actually, because fitness (and inclusive fitness for social organisms) includes reproduction and survival (including predation avoidance, Krebs, 1987; Sibly, 1983), the animal has to choose an optimal mean-variance ratio. Bednekoff (1996), using theoretical models, tried to demonstrate that risk sensitivity foraging for reproduction could differ from risk sensitivity foraging for survival. He concluded that risk-prone strategies could occur when fitness depended on factors other than survival and that animals could switch between options according to their biological situation. This distinction could be of some interest in the case of bumblebees as they present an annual cycle with a multiplication phase (production of workers) and a reproduction phase (production of males and new queens). Colonies normally switch from multiplication to reproduction under several conditions, among which feeding seems to be important. Nevertheless, until now, no risk-sensitivity studies have taken phase of colony into account. Many papers addressed risk sensitivity, under laboratory conditions, with different bumblebee species (Waddington et al., 1981; Real et al., 1982; Harder and Real, 1987; Possingham et al., 1990; Real et al., 1990; Cartar and Dill, 1990; Cartar, 1991; Banschbach and Waddington, 1994; Waddington, 1995), but some experiments also concerned honeybees (Shafir et al., 1999; Fülöp and Menzel, 2000; Shapiro, 2000). The authors provided artificial flowers with sucrose solutions differing in volumes, concentrations or flow rates, with the aim to control mean-variance relationships. Generally speaking, the results were not clearly cut. Perez and Waddington (1996) reviewed risk sensitivity studies and listed experimental methodologies of under five headings: species tested, colony size and social conditions, foraging arena (number and density of feeders), food value manipulated (magnitude and variations of volume and concentration), use of empty flowers to simulate high variance. They suggested that

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Chapitre 1. Etat des connaissances. discrepancies between studies might arise from differences in methodologies. Moreover, some results might be a design artefact. A debate between Real et al (1982), Harder and Real (1987) and Possingham et al. (1990) illustrates some difficulties related to testing and explaining risk sensitivity. In 1982, Real et al. showed that, at constant concentrations, B. pensylvanicus preferred very low variance in volume for a given mean, and therefore were risk-averse. Nevertheless, the insects accepted a higher variation in reward magnitude when mean nectar content was higher or when flowers were clumped. The authors considered a trade-off between mean and variance and sensitivity to spatial characteristics. Furthermore, they explained risk aversion by the nonlinear relationship between nectar volume probed and short-term rate of net energy intake, because of the high cost of a long probing effort (Harder and Real, 1987). Three years later, Possingham et al. (1990) criticized this analysis. They pointed out that the currency used in Harder and Real's model was not long-term energetic intake as it should have been, arguing that in the long-term variability had little effect. Harder and Real (1990) replied that, for bees, the short-term is more adapted as their decision making requires only a few flowers and that they learn very quickly. Other authors also observed risk-averse behaviour in bumblebees (Waddington et al., 1981), but more recent experiments with honeybees and bumblebees showed that these insects were frequently risk-indifferent (Cartar and Dill, 1990; Cartar, 1991; Banschbach and Waddington, 1994; Waddington, 1995; Fülöp and Menzel, 2000). In a comprehensive review of risk theories Kacelnik and Bateson (1996) pointed out that delay before obtaining rewards affects preference: animals are always risk-prone when delay of reward is variable. These authors constructed their approach by considering the strength of associative learning and by discussing the meaning of just noticeable differences (JND) in animals' perception according to Fechner-Weber's law. More recent papers (Shafir et al., 1999; Shapiro et al., 2001), following Couvillon and Bitterman (1991), aimed to demonstrate that risk sensitivity could be restricted to a simple associative learning model based on two postulates: i) the attractiveness of a feeding place is the result of the strength of its association with the reward, this strength increases as a function of reward value (according to Rescorla and Wagner, 1972); ii) discrimination between feeding places is determined by relative associative strength. Shafir et al. (1999), using harnessed honeybees in a proboscis extension conditioning

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Chapitre 1. Etat des connaissances. paradigm, showed that the degree of risk sensitivity depended on characteristics of the reward distributions, especially when reward option included zero reward in the sequence. Fülöp and Menzel (2000) also showed that risk-prone behaviour in honeybees appeared when quantities supplied in each source item included zero rewards. When variability of sources did not include zero rewards, the bees remained risk-indifferent. Cartar and Dill (1990) and Banschbach and Waddington (1995) examined risk sensitivity by manipulating colony reserves (addition or removal) considering that social insects, especially honeybees are numerous and that an individual strategic error would not imperil colony stores and fitness. If this is true, only a noticeable change in colony requirement level (“target value”, Cartar and Dill, 1990) could induce individual modifications in risk sensitivity. As predicted by the theory, bumblebees were shown to be risk-averse to risk-indifferent when reserves were increased and risk-prone to risk-indifferent when reserves where depleted (Cartar and Dill, 1990). Manipulations of honeybee colony stores (honey) had no effect (Banschbach and Waddington, 1995). Beyond the assumption of several authors that risk sensitivity is only the expression of simple associative learning, these experiments, in the laboratory, suggested that energy budgets, physiological status, colony requirements affect, to some extent, risk behaviour and that the insects are able to change their foraging decisions. However, this raises questions of the application of these predictions to the behaviour of these social insects in the field? Possingham (1989) emphasized that sampling is more complicated in the field than under laboratory conditions because resources are renewed and depleted at different rates. Therefore, their distribution and abundance can vary considerably under different conditions and the foraging behaviour exhibited by nectar foragers (systematic collection or not) could induce in turn different modifications of the standing crop. One of the rare studies conducted in the wild (Cartar, 1991) showed that three species of Bombus, whose reserves had been depleted, switched from risk-indifference to riskproneness at the end of the day. These results agree with those of the laboratory experiment with bumblebees described above (Cartar and Dill, 1990). In both situations, the bumblebees' behaviour did not differ greatly from that described initially by Caraco (1981) for Junco hyemalis. It can be hypothesized that reserve depletion for a colony of social insects could be assimilated to starvation for individual birds.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. The Ideal Free Distribution concept and competition Foragers are seldom alone in a patch, in most cases they forage together either cooperatively or competitively. Consequently, composition and abundance of foraging populations could modify individual marginal gain. According to a very simple model, the marginal value could be divided by the number of foragers in a foraging population exploiting the patch. According to Charnov's rule this situation leads foragers to leave a patch in relation to their density and the availability of resources. If foragers are free and ideally omniscient, they should distribute themselves so that they equalize the marginal value among the overall foraging population. Fretwell and Lucas (1970) thus defined Ideal Free Distribution (IFD) and this concept has been verified approximately in several species (Cezilly and Benhamou, 1996). Several authors have suggested that nectar foragers distribute themselves according to an IFD (Heinrich, 1976; Pleasants 1981; Robertson and McNair, 1995). This has been demonstrated empirically and mathematically by Dreisig (1995) in three species of bumblebees foraging freely for nectar in the field on two floral species differing in plant size and nectar production (one at low flower density and with high nectar content per flower, the other at high density and with low nectar content per flower). His results indicated that bumblebees distributed themselves so that they equalized individual gain per flower independently of plant size or nectar production per flower. Their actual distribution fitted Dreisig's computer simulation. This simulation showed that systematic search and, partly, non-random plant-choice by bees (preference for large plants or high nectar production per flower) were sufficient to explain how bumblebees achieve ideal free distribution. Ohashi and Yahara (2002) also developed a theoretical model, taking into account the cost of inter-plant movements at each density, to predict how bumblebees responded to variations both in floral display size (numbers of flowers per plant) and plant density. They found that foragers presented what the authors qualified a “counter-intuitive” behaviour: pollinators preferred to visit larger floral displays because, in that situation, the number of flowers probed per plant was smaller, re-visitation of flowers was avoided and competition between bees was reduced. This was verified in particular when plant density was high. According to these authors, some discrepancy between prediction and field data seemed to be due to the assumption that bees possess complete information on resource distribution, which is not the case. Moreover, in this field experiment competition between insects occurred: other pollinators or wasps caused 12% of the bumblebee departures.

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Chapitre 1. Etat des connaissances. In the field, interference between different insects and their effects on pollinators' spatial distribution are in fact difficult to evaluate. Kunin and Iwasa (1996) proposed a model simulating the complexity of pollinator distribution foraging in arrays of two floral species varying in flower density: the relative numbers of specialist and generalist pollinator species in each situation was discussed in relation to pollination success of rare flowers and the IFD of pollinators. Giurfa (1996), studying the dynamics of landing rates and visiting times in relation to nectar flow rates of artificial flowers, showed that honeybees foraged quicker when reward level was higher. This regulation of behaviour could also explain IFD in the field: the larger the resources, the more abundant foraging insects are.

Mechanisms optimising individual foraging efficiency This section reviews studies on individual foraging behaviour that can be analysed partially in the frame of OFT and that include allusions to this theory to interpret the results. Obviously, choice of available flowers assesses energy gains, whereas handling, searching and long distance flights put a strain on the energy budgets of foragers. Therefore, we reviewed the studies on bumblebees and honeybees that illustrate best these topics.

Reduction of flights Another way to economize energy is to reduce flights between and within plants during foraging bouts. Honeybees and bumblebees are known to confine their foraging to small profitable areas (review in Free, 1993). Movement patterns are not easy to quantify and different methods have been proposed for studies in the field (Krell and Dietz, 1986) and in the laboratory (Waddington, 1979). Except in some cases (Zimmerman, 1979), pollinators do not forage randomly. General tendencies to visit the nearest flower (Levin and Kerster, 1969; Marden and Waddington, 1981), to travel straight ahead (Waddington, 1980; Plowright and Cantin-Plante, 1997) and to hold flight paths (Thomson, 1996), were observed. Flights between plants can be modified by spatial heterogeneity (Plowright and Galen, 1985). For instance, bumblebees show striking site constancy over several days in patchy habitats (Osborne and Williams, 2001). According to the departure rules, flights can be affected by plant density and by reward (Schmid-Hempel 1984, Schmid-Hempel and Schmid-Hempel,

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Chapitre 1. Etat des connaissances. 1986, Ginsberg, 1986). Within a plant, these rules have been verified approximately by bumblebee movements when inflorescences provide a reward gradient from the top whorl to the bottom (Pyke, 1978; Harder, 1990; Kadmon and Shmida 1992). Nevertheless, the difference between lengths of movements inside a foraging area (between and within a plant) and flight (foraging) distances from the nest must be considered (Free, 1993; Saville et al., 1997). Reduction of flight distance from nest to foraging patches and memorization of the best flight paths and of the location of resources with the least random distance, are other ways to decrease (control?) costs. Studies on long distance navigation are numerous, especially in honeybees, and they investigate how bees use landmarks (Gould, 1986; Chittka et al., 1995; Menzel et al., 1996), how they memorize spatial information (Wehner and Menzel, 1990; Collett and Baron, 1995) and how they estimate distance flown (Esch and Burns, 1996). Basically and intuitively, foraging flights are presumed to be adapted to avoid superfluous energy expenditure, but it is very difficult to actually test this hypothesis. Honeybees fly long distances to find resources, whereas bumblebee flight distances are shorter, but not negligible (Osborne, 1999; Walther Hellwig and Frankl, 2000 2000a, b; Goulson and Stout, 2001). Spatial orientation and search for food could also be investigated in terms of optimal path structure (Cody, 1974; Bovet and Benhamou, 1991). Optimal sinuosity of search paths could be questioned in the light of results from the harmonic radar (Capaldi et al., 2000), which allowed measurements of flights over long distances. During orientation flights, foraging bees do not appear to prospect their environment randomly, but adopt straight paths from the hive. This raises the question of how pollinators estimate their flight expenditure and how they regulate their foraging trips. Von Frisch's (1967) earlier energy hypothesis concerning distance flight estimation has not been confirmed for honeybees. In fact, honeybees estimate distance by measuring the amount of optic flow determined by the density and distance of objects in the landscape (Esch and Burns, 1996; Esch et al., 2001). One study answered partly the question of flight expenditure perception in bumblebees: the mode of locomotion (walk or fly) influenced time spent at a nectar feeder, i.e. they remained longer at the feeder after flying (Plowright et al., 1995).

Optimization of choice of available flowers Recognition of nectar-rich flowers by bumblebees and honeybees through remote

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Chapitre 1. Etat des connaissances. perception has been observed in the field (Marden, 1984; Corbet et al., 1984). The use of either deterrent or attractive scent markings by foragers to distinguish recently visited or nectar-rich flowers has been investigated repeatedly over the years (Nuñez, 1967; Free and Williams, 1983; Corbet et al., 1984; Goulson et al., 1998). The unidirectionality of floral colour changes was also supposed to be a cue for foragers to detect modifications in reward status (Lunau, 1996; Weiss and Lamont, 1997). All these activities help avoid waste of time and, even if some may be presumed to have innate components (responses to scent marking signals; innate colour preference: Banschbach, 1994), many experiments have shown that bumblebees and honeybees have important learning abilities. Thus, they change their spontaneous colour preference with experience (Real et al., 1982; Giurfa and Nuñez, 1989), they generalize their knowledge of flower guides to identify rewarding flowers (Dukas and Waser, 1994) and they, albeit imperfectly, memorize rich flower patches over several days (Keasar et al., 1996a). Spatial arrangement of flowers plays a role in improving bees' ability to recognize beneficial patches (Keasar et al., 1996b). Many investigations concerned sensus stricto perception of odours, colours, and shapes, especially in honeybees. They cannot all be cited here, but a review of this literature would help greatly to give an idea of the capacity of visitors to discriminate between flowers. Once a forager has identified a rewarding flower, it often visits similar flower types. This striking behaviour, supposed to improve foraging efficiency, has been described and defined by several authors. Free (1963, 1993) differentiated constancy during a single foraging trip from constancy during consecutive trips and pointed out that generally only pollen constancy was measured by examining pollen loads. Waddington (1983), aiming to analyse causalities of constant foraging, proposed the term 'floral visitation sequence' (FVS). He considered this term appropriate because it described, quantitatively and qualitatively, the sequential visits of a forager (by determining transition probabilities in a Markov chain) and considered both pollen and nectar constancy. He confronted the validity of this approach with two predictive models (Oster and Heinrich, 1976; Waddington and Holden, 1979) in the frame of OFT. He concluded that the sequence of floral visits in any floral area was the result of interactions between a set of foraging rules and the environmental inputs from the patch (diversity of available plant species, differences in floral morphology, plant density, expected caloric reward). Because very high levels of FVS, especially in honeybees, were reported first a long time ago (Bennett, 1883; Bateman, 1951; Free, 1963), the anterior term “flower constancy” was maintained by investigators writing after Waddington (Waser 1986).

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Changes in constancy under varying conditions, concerning, for instance, the spatial distribution of flower types, were observed (Marden and Waddington, 1981; Wells and Wells, 1986) and supported the optimal foraging model. Similar observations were made on bumblebees, although they generally forage less constantly (Laverty, 1980). Oster and Heinrich (1976) developed a model indicating that «majoring» (i.e., specializing on one plant species) and «minoring» (i.e., visiting other species occasionally) are two strategies adapted respectively to constant and to changing reward structures. Experiments investigated why constancy exists. Some authors supposed that it was a consequence of a limited capacity to memorize handling skills (Waser, 1986), and attributed constancy to perceptual and sensori-motor conditioning to floral cues such as odour, colour or morphology (Wilson and Stine, 1996; Chittka and Thomson, 1997). Instead, Chittka (1998) demonstrated that sensori-motor information was seldom lost from long-term memory after reversal training. Other authors advocated that switching between flower types did not involve significantly longer handling times (Laverty, 1994; Gegear and Laverty, 1995) and concluded that this cannot explain flower constancy. Nevertheless, none of these studies, focused on learning, were actually supported by energy calculations of handling.

Mechanisms optimising collective foraging efficiency Pollen and nectar provisioning by bees cannot be reduced to individual detection and exploitation of high profitability patches and to the succession of flights between hive and flowers in these patches. The first reason is that foragers do not collect nectar or pollen for their own consumption. This justifies hypothesizing that their collecting behaviour is modulated by the colony's needs (pollen for larvae rearing, nectar for worker maintenance). This raises the problem of a criterion for foraging decisions: optimality should be calculated in relation to colony state (Wolf and Schmidt-Hempel, 1990). Ydenberg and Schmid-Hempel (1994) have stressed the difficulties related to considering risk sensitivity at the colony level. A colony with a considerable amount of nectar would not behave in the same way as a colony with a depleted stock or with a great quantity of larvae to rear. Literature provides only one demonstration relating colony reserves and bumblebees' risk sensitivity to nectar (Cartar and Dill 1990). Another important feature is that, in a colony, some individuals are pollen foragers, others are nectar foragers and others are both. These two resources are involved in

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Chapitre 1. Etat des connaissances. fitness, but pollen can be considered as a limiting factor for reproduction. Therefore, both foraging types and their components must be studied to understand optimization of foraging in social bees. Some recent studies pointed out differences in collecting behaviour for carbohydrates and for proteinaceous foods. For instance, presence of brood enhances collective foraging for proteinaceous food by ants, whereas individual foraging patterns of recruiting ants differ greatly according to food type (Portha et al., 2001). As honeybees generally exhibit distinct nectar and pollen collections, an increased amount of empty combs induces a higher proportion of nectar foragers and a lower proportion of pollen foragers (Rinderer and Hagstad, 1984). Another study showed that a colony needing pollen increased its proportion of pollen foragers without increasing individual activity (Pernal and Currie 2001). Moreover, latent inhibition in laboratory learning tests differed between pollen and nectar honeybee foragers: nectar foragers performed poorly. This behavioural difference could have genetic components, especially a link with sensitivity to sucrose variations (Chandra et al., 2000; Ferguson et al., 2001) and consequently, specific risk sensitivity to nectar. Verhaeghe et al. (1999) showed that the decision by bumblebees to continue or to stop collecting pollen seemed to be stochastic, whereas nectar collecting was affected by the success of the bee. This suggested a learning process in nectar foraging that is not expressed in pollen foraging. The second reason for considering collective patterns of foraging is related to the organization of tasks and, especially, of the food supply, at the colony level. One of the major difficulties in the study of insect societies is to understand how a colony organizes, coordinates and regulates its collective activities. Task partitioning among foragers is of particular interest and has been studied for a long time (Seeley, 1983). This allows specialist workers, such as foragers, receivers or recruiters, to perform co-operative tasks more efficiently than if tasks were carried out sequentially by non-specialist workers. Long-term regulation of task partitioning relies on genetic and endocrine bases (Robinson and Huang 1998, Pankiw and Page 2001) and on two important behavioural mechanisms: age polyethism in honeybees (Sakagami 1953) and alloethism in bumblebees (Goulson et al., 2002). On the other hand, short-term regulation of task partitioning occurs dynamically in relation to environmental constraints or social interactions and it is performed by numerous and diverse individual workers that use local information and have complete knowledge neither of the environment, nor of the requirements of the colony. Discharging of laden foragers by receivers was studied in particular to understand regulation of colony supplies. Seeley and

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Chapitre 1. Etat des connaissances. Tovey (1994) modelled a search process that fitted empirical data, i.e. the time spend by laden foragers returning to the hive before being discharged by a receiver (queuing delay) informed foragers about their colony's nectar collecting rate and nectar processing capacity. Thus, estimation of optimality during collective foraging must take forager-receiver ratio into account. Deviations of this ratio lead to sub-optimal collective foraging. Moreover, queuing delay could be used as information about the level of foraging activity by successful returning foragers (Anderson and Ratnieks 1999b, Ratnieks and Anderson 1999, Hart and Ratnieks 2001). Other behavioural mechanisms implied in regulation of food collection were explored by Farina (1996). He demonstrated that the outside nectar flow rate was represented quantitatively inside the hive by trophallactic interactions (measured by the frequency of giving and begging contacts between foragers). The activity of receivers increased proportionally to that of foragers (De Marco and Farina, 2001). In addition to trophallaxy, communication between recruiters and potential foragers has been described abundantly and the dance language of honeybees is well known since von Frisch's (1967) famous paper. A honeybee that has discovered a food source can indicate the direction and the distance of the feeding place to its nestmates using the recruitment dance. Since 1967, the role of the dance language in recruitment and orientation of honeybees, and in communication inside the hive has been intensively studied and discussed (Olroyd et al., 1991; Kirchner, 1993; Vadas, 1994). Beyond all controversy, it is known that the location of a resource is not the only parameter transmitted by dance language. Several authors reported that dances could be influenced by the profitability of a source (Waller and Bachman, 1981; Waddington, 1982; Seeley 1986; Seeley et al., 2000; De Marco and Farina, 2001). Moreover the odour of a food source carried by successful foragers by their waxy thoracic hairs could enhance finding food sites. Foragers that had previously been successful after visiting a site with a given odour could then leave the hive and refer to an olfactory template while prospecting (Wenner and Wells 1990, Wenner et al. 1991). Recently, a primitive recruitment was discovered in bumblebees (B. terrestris) (Dornhaus and Chittka, 1999) based on an excitatory system: recruiters run across the nest and bring home the odour of the food, and doing so, they incite their nestmates to forage, but recruits are not informed about the location of the food source, as by honeybee dances. In large colonies, such as honeybee colonies, recruitment appears efficient as it prevents foragers from wasting time searching for food sites. Thus, dance language appears to be a way to economize energy. However, Anderson (2001) pointed out that information

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Chapitre 1. Etat des connaissances. transfer could be costly for the recruiter, who sacrifices its individual efficiency for the benefit of the collective efficiency. For example, foragers have to invest time and energy in recruiting, thereby lowering individual collect of nectar but enhancing the number of nectar foragers and finally increasing the amount of nectar collected. Anderson (1998) and Anderson and Ratnieks (1999b) predicted, from theoretical models, that collective foraging behaviour was regulated by two feedbacks, positively by waggle dances and negatively by trembled dances. This regulation could lead to a nearoptimal allocation of workers among patches of flowers in a fluctuating environment. Finally, optimality could emerge from the non-linear interactions among the agents of the system. Collective choice of the best food source was shown theoretically to emerge from the simple rule of the positive feedback mechanism of recruitment (Camazine and Sneyd 1991, de Vries and Biesmeijer 2002). A sub-optimal forager-receiver ratio could be perceived by a single worker through local information. Thus, a worker could either avoid recruiting inactive workers for the food source by waggle dancing or inhibit the other dancers and activate recruitment of receivers by tremble dancing (Seeley and Towne 1992; Seeley et al. 1996, 1998). Another feedback loop in collective foraging activity is communication among honeybee and bumblebee workers by several vibratory signals. A shaking signal by a honeybee stimulates the foraging activity of other workers (Seeley et al., 1998), and this signal is correlated with food depletion (Nieh, 1998). Bumblebees emit a vibratory signal (leaving sounds), which is related to the sucrose concentration of the feeder. The frequency of this signal spread over the nest, depends both on the number of successful foragers and on the quality of their foraging (Oeynhausen and Kirchner, 2001). All these recent reports falsify the earlier hypotheses on colony integration (Lindauer, 1948; Rinderer, 1983) and of an information centre strategy. Assumption of global knowledge at the colony level now appears unnecessary to explain adjustment of individual behaviour to collective requirements.

Conclusion and prospects The present review covers 188 references related to Optimal Foraging Theory, ranging from 1963 until 2003 (older references are cited only when they revealed biological facts of interest). This proves that the theory and its extensions have been both influential and

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Chapitre 1. Etat des connaissances. beneficial for the study of insect pollination. This is not surprising, as the paradigm has proved its efficiency in several research fields related to animal behaviour. Current research on insect foraging behaviour concerns two groups of Hymenoptera: parasitic and social, namely honeybees and bumblebees, hymenopterans. Despite the fact that these pollinators present a high economical interest for crop production, most of the literature cited addresses fundamental problems. Knowledge of the foraging behaviour of these insects should have provided some elements that could be applied to management of crop pollination. Surprisingly, this practical benefit appears rather poor compared to the investment represented by this research. These consequences should probably take an increasingly important place in the future. On the other hand, this raises the question of what new lights studies of social bees have brought to the foraging theory. These studies appear to have contributed positively from several points of view. First, studies confirmed both individual foraging adjustment to MVT and population adjustment to Ideal Free Distribution. Second, concepts, such as risk sensitivity or patch leaving rules, have been investigated in detail and discussed. Third, the foraging behaviour of these insects proved to obey similar rules to those followed by animals with larger brains such as birds and mammals credited with greater cognitive capacities. This suggests that optimal foraging is regulated efficiently by simple rules. One of the greatest relevance of social bees in optimal foraging studies is their eusociality. This specificity has only recently and slowly been taken into account. Most of the earlier studies considered bees and bumblebees as separate individuals foraging for themselves. Moreover, their co-operative foraging behaviour has not yet been studied in the frame of the social foraging theory, a game theory approach, developed in birds and mammals (Giraldeau and Caraco, 2000). This may be because this approach is not easily transposable to social insects whose sociality is accompanied by strong genetic relationships and high inclusive fitness among nestmates. Two other approaches can be proposed a priori for overcoming these difficulties: the first approach should consider foraging optimality as the result of interactions among workers in a hive and, the second approach should consider the costs and benefits at the colony level, emphasizing eventually conflicts between queen and workers for fitness. Only the first of these two options has been fully developed through the concept of auto-organization that first proved its relevance in social ants. A rich field of association between optimizing theories and auto-organization has been born (Camazine et al. 2001) and should increase in importance in the near future. The favourite model for these

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Chapitre 1. Etat des connaissances. studies is the honeybee (because of its dancing behaviour), with gradual extensions to the bumblebee. Combined studies on honeybees and bumblebees should present a strong comparative interest in this field. The almost complete lack of the second approach is striking compared to the importance of the trophic determination of casts and the haplo-diploid model of social bees. Several authors have discussed the control of regulation of the allocation of resources and conflicts between queen and workers and it is known that pollen and nectar are affected to different needs in colony development. That is why it is necessary to take into account both pollen and nectar foraging in relation to the “interest” of the whole colony. This type of sociobiological approach should grow rapidly.

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89

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

________________________________________________________

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

A/ Le matériel biologique ...................................................................................................... 94 A/ 1. Les bourdons.............................................................................................................. 94 A/ 1.1. Origine et modalités d’élevage............................................................................. 94 A/ 1.2. Bourdons utilisés au cours des études .................................................................. 96 A/ 2. Les tomates................................................................................................................. 98 B/ Dispositifs ........................................................................................................................... 98 B/ 1. Serre de production de tomate ................................................................................. 98 B/ 2. Dispositifs expérimentaux proprement dits .......................................................... 102 C/ Méthodes statistiques utilisées dans ce manuscrit........................................................ 103 C/ 1. Le modèle ................................................................................................................. 103 C/ 2. La statistique............................................................................................................ 104 C/ 3. Le choix d’un modèle .............................................................................................. 104

92

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

1

5

4 2

3

2 Figure 1. Colonie en développement. La reine (1) est nettement plus grande que les ouvrières (2). On distingue nettement des pots à miel (3), des cellules à couvain (4), et des cellules en construction (5).

2

1

4

3

Figure 2. La colonie de bourdons, en fin d’élevage et destinée à la serre, est placée dans une boite en bois (1), recouverte d’un élément de plastique permettant la respiration des bourdons. Elle est placée au-dessus d’une réserve de nectar artificiel (3). Le tout est placé dans une boite (4) permettant une manipulation aisée de la colonie.

Figure 3. Les ouvertures placées sur la ruches permettent de contrôler les mouvements des bourdons. L’une d’elles (à gauche) ne permet que les entrées, l’autre (à droite) permet les entrées et les sorties.

93

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique des études menées en serre de tomate ou en conditions expérimentales

A/ LE MATERIEL BIOLOGIQUE A/ 1. Les bourdons A/ 1.1. Origine et modalités d’élevage Pour l’ensemble des études menées durant les trois d’années de la thèse et présentées dans ce document, les bourdons étudiés provenaient de l’élevage « GIE La Croix », situé à Plougastel-Daoulas, à proximité de Brest dans le Finistère (Bretagne). Cet élevage est structuré en trois phases1 : (1) Fondation des colonies, (2) Développement des colonies, (3) Préparation des colonies pour leur envoi sous serre et, en parallèle, Renouvellement des individus sexués permettant de répéter le cycle et ainsi de reconstituer le cheptel régulièrement. (1) La fondation des colonies est amorcée dans une chambre de mise en ponte, maintenues à 28°C. Les reines sont placées dans de petites boîtes individuelles, où elles se mettent à pondre. Dès la naissance de la première ouvrière, la colonie ainsi amorcée est transférée dans une boîte en bois de plus grande taille (Fig. 2, élément 1), la ruche définitive, pour permettre le développement de la colonie. (2) La phase de développement des colonies (Fig. 1) se déroule dans une seconde chambre, maintenue à 26°C. Elle dure globalement 4 semaines. Les colonies produisant des individus sexués (reines et mâles) sont détruites car elles ne peuvent être vendues pour la pollinisation en serre mais leurs individus sexués sont récupérés pour le renouvellement du cheptel. (3) Les colonies survivantes, ne contenant aucun individu sexué et contenant une soixantaine d’ouvrières, une soixantaine de nymphes, une soixantaine de larves et une dizaine de cellules à œufs sont prêtes à être commercialisées. Elles sont alors placées dans des boîtes en cartons (20cm x 30cm x 40cm de hauteur ; Fig. 2, élément 4) au-dessus d’une réserve de sirop (Fig. 2, élément 3) dans laquelle elles peuvent prélever grâce à un système de 1

En raison de la concurrence à laquelle est soumise la société d’accueil, ne seront décrites ici que les grandes lignes de l’élevage. Les détails de mise en œuvre ne seront pas abordés.

94

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique. capillaires. Deux ouvertures (Fig. 3), qu’on peut fermer, font face à celles de la ruche en bois, pour permettre aux insectes de sortir butiner lorsqu’ils seront sous serre. Les colonies sont ensuite stockées à 17°C, en attendant d’être placées sous serre. En parallèle, les individus sexués sont mis en cages d’accouplement. Les reines sont ensuite récupérées et placées en chambre froide (4°C pendant 12 semaines), afin de simuler une diapause. Elles sont alors placées en chambre de ponte (phase (1)) et le cycle est bouclé. La date de passage de la première à la seconde phase est connue. Elle est notée comme la « semaine de transfert » à l’élevage. A ce moment, toutes les ruches sont au même stade de développement : une reine et sa 1ère ouvrière. Par la suite, cette date est prise en référence pour estimer l’âge des colonies (en semaines). Notons que, étant donné que la vitesse de croissance est propre à chaque ruche, l’âge correspond plus ou moins bien au stade de la ruche et à son activité (voir Chapitres 3 et 7). Par mesure de sécurité, les deux premières étapes se déroulent dans des chambres éclairées en lumière rouge. En effet, les bourdons ne perçoivent pas cette lumière (Menzel et Backhaus, 1991). Cela limite leur capacité de vol et de dispersion dans l’élevage et donc les risques de piqûre. Durant tout le temps passé à l’élevage, les bourdons sont nourris de sirop et d’une pâte de pollen d’abeille mélangée à du sirop. Un des enjeux de l’élevage est une amélioration de ses composantes génétiques, par la sélection des bonnes reines, et environnementales, par un choix judicieux du régime alimentaire ou du temps de diapause, favorisant la croissance et réduisant la mortalité. En particulier, les colonies peuvent être classées schématiquement en deux catégories en fonction de leur durée de vie : cycle court et cycle long (Aupinel, 2001). Les colonies à cycle court (ruches qualifiées de qualité B au GIE) produisent des reines ayant un potentiel reproducteur plus élevé comparé aux reines issues de colonies à cycle long (ruche qualifiées de qualité A au GIE). Par contre, ces dernières produisent tardivement leurs individus sexués et leurs colonies ont donc une durée de vie plus longue en serre, ce qui est recherché par les producteurs, puisque ce sont les ouvrières qui les intéressent. Un compromis serait donc idéal. Cette caractéristique peut être contrôlée en modifiant la population d’ouvrières (ajout(s) contrôlé(s) d’ouvrières). Cette pratique simple et compatible avec une production industrielle permet de fabriquer de façon spécifique des colonies destinées au renouvellement du cheptel reproducteur (Aupinel, 2001).

95

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

A/ 1.2. Bourdons utilisés au cours des études Gestion des apports de bourdons en serre de production Une grande partie des études menées en 2001 et en 2002 a été effectuée dans une serre de production (voir B/ Dispositifs, p. 96). Ces études sont présentées dans les Chapitre 3 (rythmes d’activité), Chapitre 4 (disponibilité en fleurs exploitables), Chapitre 5 (répartition des bourdons dans la serre de production étudiée), et Chapitre 6 (déplacements des bourdons dans un patch). Dans la serre de production étudiée, les ruches de bourdons sont introduites dès que les fleurs des plantes à polliniser apparaissent. Elles sont introduites à l’âge de 4 semaines et leur utilisation ne dépasse généralement pas 9 semaines. Elles sont alors âgées de 13 semaines et sont remplacées par de jeunes colonies de 4 semaines. Du fait que les colonies ne sont pas renouvelées toutes en même temps (notamment en raison d’un taux de développement propre à chaque colonie) et que des ruches sont ajoutées en fonction des besoins en pollinisation, l’âge des colonies présentes en serre à un moment donné est variable. La régulation de la densité de bourdons et de ruches dans la serre est réalisée sur la base de la préconisation suivante2 : mettre 1 ruche par hectare de tomate classique par semaine et 1.5 ruche par hectare de tomate Cerise par semaine. Globalement, 1 à 2 nouvelles ruches sont apportées par semaine. Cet apport est modulé par la surveillance des tâches de nécrose sur les cônes d’anthères, liées à la manipulation des fleurs par les bourdons (voir A/1. p.13). La pratique veut que les colonies soient empilées les unes sur les autres, le plus souvent par groupe de 3, voire 4. Le système de renouvellement fait que les colonies les plus jeunes se trouvent placées au-dessus de la pile alors que la plus ancienne est placée en dessous et enlevée quand cela s’avère nécessaire. Ce système a été modifié en 2003 : les nouvelles ruches étaient disposées à l’emplacement des ruches qu’elles remplaçaient, afin de minimiser les perturbations liées aux changements de ruche (voir Chapitre 7). Dans la serre de production étudiée, 9 à 12 ruches étaient réparties entre trois sites, répartis le long d’une droite médiane à la plus grande longueur de la serre (carrés jaunes de la Fig. 5) et nommés arbitrairement A, B, et C. Le site A était situé à 13.6m des deux autres sites. Les sites B et C étaient distants entre eux de 25.6m. Les ruches du site A étaient

2

Cette préconisation est celle appliquée par le GIE La Croix. Elle peut varier selon les entreprises et les auteurs. Ainsi Van Ravestijn et Van der Sande (1991) (dans Free, 1993) préconisent de mettre de 10 à 15 colonies de bourdons par hectare de serre et Morandin et al. (2001a) préconisent une densité de 7 à 15 colonies par hectare en fonction des conditions en serre.

96

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique. disposées à même le béton à 50cm du sol et leur disposition était variable (empilées ou non). Aux sites B et C, les colonies étaient disposées à environ 1m du sol, les unes sur les autres (en « H.L.M », Fig. 4), et numérotées du bas vers le haut (les « étages »). Dans ces deux sites, des ruches étaient parfois ajoutées au sol, en cas de nécessité.

Figure 4. Disposition des ruches aux sites B et C.

Gestion des apports de bourdons en conditions expérimentales Les études présentées dans le Chapitre 63 (déplacements dans un patch et règles de départ) et le Chapitre 7 (dérive des colonies) ont été menées à l’INRA de Rennes, respectivement en 2002 et 2003. Pour ces deux études, les colonies utilisées provenaient directement de l’élevage. Elles étaient âgées de 4 semaines et leur transport de Brest à Rennes a été effectué par nos soins. Au début des expérimentations, les individus étaient naïfs, provenant directement de l’élevage. Dans l’étude de la dérive, les bourdons étaient ensuite laissé libres de butiner. Dans l’étude de la règle de départ, avant le début des observations, les bourdons étaient habitués à leur nouvel environnement (une chapelle de serre de dimensions : 3m x 7m x 3m de haut) de manière contrôlée (notamment : absence de ressource). Une fois l’expérimentation commencée, les bourdons ne pouvaient butiner que un par un et toute ouvrière ayant réalisé un voyage de butinage était ensuite capturée et remise dans son nid en fin de journée. Du fait

3

Notons que l’étude de la première partie du Chapitre 6 (étude des déplacements dans un patch) fait appel aux données collectées pour la seconde partie de ce Chapitre 6 (étude de règles de départ) ainsi qu’à des données collectées en serre.

97

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique. du temps écoulé entre chaque expérimentation (au moins une nuit), les butineuses pouvaient être considérées comme naïves à chaque nouvelle étape de l’expérimentation. La poche à sirop a été enlevée dans le cas de l’étude de la dérive des colonie pour observer un comportement d’approvisionnement normal car les bourdons n’étaient pas maintenu en milieu confiné. Elle a également été enlevée pour les études sur la règle de départ mais un apport minimal de ressource a été effectué entre les expérimentations de manière à entretenir les besoins alimentaires des butineuses.

A/ 2. Les tomates Les deux années d’études en serre de production (2001 et 2002), deux variétés de tomates étaient cultivées hors sol, une variété de type « Classique » (donnant des tomates de taille habituelle) et une variété de type « Cerise » (donnant des tomates de petite taille). Il ne nous a pas été possible d’avoir les mêmes variétés de tomate classique au cours des 2 années d’étude. La première année, il s’agissait de la variété « Maeva », alors que la seconde année il s’agissait de la variété « Trophy ». Par contre, les deux années d’étude, la variété de tomate Cerise cultivée était la variété « Lulu », variété que nous nommerons dorénavant Cerise. La disposition des variétés dans la serre a également différé entre les deux années d’étude (Fig. 5). Les observations ont eu lieu à des périodes où la production était déjà importante (entre avril et août inclus).

B/ Dispositifs B/ 1. Serre de production de tomate La serre de production (6163m2 ; Fig. 5) est située à Plougastel-Daoulas. C’est une serre fermée dont la régulation de la température et de l’hygrométrie se fait en partie par des ouvrants situés sur les faîtières. Elle est subdivisée en deux zones de surfaces inégales, séparées par un chemin bétonné (en gris sur la Fig. 5) de près de 8m de large. Dans chaque zone, les plants de tomate sont cultivés en rangs (Fig. 6), disposés dans le sens de la longueur de la serre et distants de 1.60m. Dans ces rangs, les plants de tomate sont plantés à 50cm les uns des autres. Ils mesurent plusieurs mètres de long. Leur sommet est 98

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique. attaché à un fil situé à près de 3m du sol. Au fur et à mesure de leur croissance, ce sommet est décalé le long de ce fil. Du fait de la hauteur des plants, une partie des observations a dû se faire sur des chariots de 1.70m de haut (Fig. 7), utilisés pour l’exploitation des plants.

99

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

70,40 m

1 2

1

3

2

3

4

4 63 m

5

ZONE 1bis

ZONE 1

6 7 8 9 10 11 12

5

6

B

C

13

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

A

14

Hall

15

18 m

16

7

17 54 m

ZONE 2

18

9,6 m

19 20 21

Module (6,4m * 4,5 m)

22 23

8

9

4 rangs par module (distance inter rangs = 1,60 m : emplacement des ruches

24 25 32 m

Figure 5. Plan de la serre de production. En 2002, la tomate classique, de variété Maeva, est plantée en ZONE 1 et ZONE 1bis, alors que la tomate Cerise est plantée en ZONE 2. En 2003, la tomate classique, de variété Trophy, est plantée en ZONE 1, alors que la tomate Cerise est plantée en ZONE 1bis et en ZONE 2.

100

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

Figure 6. Les plants de tomates sont disposés en rang dans la serre.

Figure 7. Chariots utilisés pour l’exploitation des plants de tomate. Ils sont indispensables pour observer le comportement de butinage des bourdons, du fait de la hauteur à laquelle se situent les inflorescences de tomate.

101

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

B/ 2. Dispositifs expérimentaux proprement dits Les dispositifs expérimentaux utilisés à l’INRA de Rennes sont les suivants : Etude des déplacements sur un patch-rang et de la règle de départ de patchsrangs et de patchs-inflorescences (Chapitre 6) : une serre compartimentée, contenant deux qualités d’inflorescences de colza, des inflorescences mâle-fertiles et des inflorescences mâlestériles. Etude de la dérive des colonies adjacentes de bourdons (Chapitre 7) : l’environnement naturel. Ces dispositifs sont détaillés dans les Chapitres correspondants.

102

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

C/ Méthodes statistiques utilisées dans ce manuscrit Les modèles statistiques utilisés dans ce manuscrit sont des modèles linéaires et linéaires généralisés classiques. Les modèles de régression et d’analyse de variance (ANOVA) sont mis en œuvre quand les variances résiduelles4 (σ2) peuvent être considérées comme (i) indépendantes, (ii) de même loi Normale - centrée et (iii) ne dépendant pas de conditions expérimentales particulières (les effets des facteurs testés sont additifs). Lorsque ces conditions n’étaient pas respectées, nous avons utilisé des modèles linéaires généralisés (GLIM). Le choix du modèle utilisé s’est fait en tenant compte de la nature de nos variables (comptages, fréquences, survie, …). Nous donnons ici très brièvement le contexte du modèle linéaire généralisé et le vocabulaire employé dans l’analyse de nos résultats.

C/ 1. Le modèle Pour reprendre des notations désormais bien établies, 1.

La variance résiduelle est considérée comme étant une variable aléatoire (Y),

distribuée suivant une loi de distribution de la famille exponentielle. Cette famille contient notamment les distributions suivantes : Normale, Poisson, Binomiale. 2.

Son espérance E(Y) = µ n’est plus systématiquement modélisée par une

fonction linéaire (η = ∑ βj.xj, où les xj sont les variables explicatives de l’expérience et les βj leurs coefficients de régression) mais par une fonction de lien η = g (µ ). La fonction de lien à utiliser dans le GLIM dépend de la nature des données à analyser. Par exemple, parmi les fonctions de lien, on trouve la fonction de lien logit η = ln (µ / (1-µ) et la fonction probit η =

φ-1 (µ) (où φ est la fonction de répartition de la loi normale

centrée réduite), qui sont bien adaptées à l’analyse des fréquences : elles transforment une variable binaire (µ ∈ [0, 1] ) en une variable continue (η ∈ [-∞, +∞] ). Chaque analyse par GLIM demande alors de définir la famille d’erreur décrivant la variance résiduelle et la fonction de lien la linéarisant.

4

Résidu ou erreur : différence entre la valeur observée et la valeur prédite par le modèle.

103

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

C/ 2. La statistique La méthode du Maximum de Vraisemblance est la méthode la plus couramment utilisée pour estimer les paramètres (βj). En particulier, c’est la méthode programmée dans SPlus® (MathSoft, Cambridge, United States), logiciel utilisé pour faire les analyses statistiques de ce manuscrit. La méthode est la suivante : 1.

On calcule la vraisemblance de l’échantillon en utilisant la fonction testée

(fonction de vraisemblance), donc conditionnellement à la loi de la famille d’erreur et aux paramètres du modèle. 2.

On modélise l’échantillon observé par le modèle saturé (autant de paramètres

que de répétitions). 3.

On calcule le rapport de vraisemblance (R) entre le modèle étudié et le modèle

4.

ce qui permet de calculer le maximum de vraisemblance de l’échantillon en

saturé, minimisant la différence (la Déviance, égale à D = -2.ln R ) entre le modèle étudié et le modèle saturé. Sous l’hypothèse nulle mise à l’épreuve, la déviance est distribuée asymptotiquement comme un Χ2 dont le nombre de degrés de liberté dépend du contexte. Notons au passage que ce résultat est général et n’est pas spécifique aux modèles linéaires généralisés.

C/ 3. Le choix d’un modèle Pour faire le choix d’un modèle particulier, dans l’ensemble M des modèles explicatifs (souvent emboîtés) dans lequel on s’est placé, on peut utiliser : 1.

des méthodes ascendantes (partir du modèle nul et ajouter un à un les facteurs

explicatifs, en n’ajoutant que les facteurs significatifs), des méthodes descendantes (partir du modèle saturé et retirer un à un les facteurs explicatifs non significatifs), ou une combinaison de ces deux méthodes. 2.

un critère de choix parcimonieux, par exemple, le plus connu, le Critère

d’Information d’Akaike (AIC). Ce critère, appliqué au modèle Mi, permet d’estimer l’espérance du logarithme de la vraisemblance attachée au modèle Mi. La procédure d’Akaiké consiste à choisir, parmi les modèles Mi, celui qui a le plus petit AIC, amenant à choisir un modèle explicatif parcimonieux dans l’ensemble des modèles envisagés.

104

Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique. La lettre suivante, de Gilles Yoccoz5, illustre très bien les difficultés que peuvent rencontrer des biologistes (entre autres) lorsqu’ils ont à choisir un modèle (au sens sélection d’un ensemble de facteurs explicatifs pour la variable à expliquer étudiée) : « Le problème de la sélection de modèles [...] reste un sujet de discussion très actif dans la communauté statisticienne, et il n'y a pas de consensus simple sur le sujet. En fait, je ne pense pas qu'il puisse y avoir une solution unique, puisque tout dépend 1) des objectifs, et 2) de comment la "réalité" est structurée. Pour le premier point, il faut en particulier mettre en avant le point de vue de la prédiction (quel ensemble de variables donnera la meilleure prédiction [...]), et le point de vue de l'estimation des effets des différentes variables [...]. [...] La qualité de la prédiction (ou de l'estimation) se mesurera en général en terme de biais et de variance (le problème statistique étant de trouver un compromis entre les deux : un monde idéal serait sans biais et sans variance - mais mettrait presque les biométriciens au chômage). De manière générale, un modèle simple est "précisément faux" (biais élevé, variance faible), un modèle compliqué "vaguement correct" (biais faible, variance élevée). A partir de là, il existe maintenant différentes procédures permettant de sélectionner le meilleur modèle, et les procédures les plus utilisées aujourd'hui par les statisticiens dérivent de critères statistiques calculés pour tous les modèles possibles. L'exemple le plus célèbre d’un tel critère est celui d'Akaike (couramment utilise maintenant pour les modèles linéaires généralises). [...] Pour le second aspect, les statisticiens opposent des critères qui supposent que le monde réel dépend d'un petit nombre de variables et ceux qui pensent ... le contraire. Cela a des conséquences en terme de choix des critères : le critère d'Akaike fait partie de la deuxième école, et implique que plus les données sont en grande quantité, plus le modèle retenu sera compliqué. En termes mathématiques, la dimension du modèle retenu tend vers l'infini quand le nombre de données fait de même. D'autres critères au contraire convergeront vers une valeur finie, "vraie" dimension de la réalité. Là encore, cela dépendra de la situation : il me semble raisonnable de penser que, par exemple, l'abondance d'une espèce dépend d'un très grand nombre de facteurs, ayant des importances plus ou moins grandes, mais pour des séries temporelles, le modèle de dynamique sous-jacent peut être de dimension finie (et pas très élevée, par exemple 3 ou 4 : cela ne veut PAS dire que la dynamique ne dépend que de 3 ou 4 variables). »

5

Nigel G. YOCCOZ - Norwegian Institute for Nature Research (NINA) ; Polar Environmental Centre, N-9005 TROMSØ, NORWAY ; lettre on-line : http://pbil.univ-lyon1.fr/ADE-4/adelisthtml/0653.html

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Chapitre 2. Contexte matériel et méthodologique.

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Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches.

Chapitre 3. Activité des bourdons à l’entrée des ruches, en serre de production.

1. Matériel et méthode ......................................................................................................... 109 1.1. Plan d’expérience ........................................................................................................ 109 1.2. Analyse des données ................................................................................................... 110 2. Résultats ............................................................................................................................ 111 2.1. Evolution des paramètres météorologiques et de l’âge moyen des colonies au cours de l’expérimentation ............................................................................................................... 111 2.2. Activité globale ........................................................................................................... 112 2.3. Entrées des individus porteurs de pelotes de pollen.................................................... 113 2.4. Proportion d’entrées dues à des individus porteurs de pelotes de pollen.................... 115 2.5. Entrées des individus non porteurs de pelotes de pollen............................................. 116 3. Discussion.......................................................................................................................... 117

107

Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches.

Chapitre 3. Activité des bourdons à l’entrée des ruches, en serre de production.

Dans cette étude, nous considérons, dans la serre de production, l’activité des bourdons à l’entrée de leurs ruches. Par ce terme, en accord avec Morandin et al. (2001a) ou Albano et al. (2000c), nous entendons l’ensemble des individus entrant et sortant des ruches. Cependant, contrairement à Morandin et al. (2001a), nous pourrons ne pas tenir compte des gardiennes, immobiles à l’entrée, puisque nos observations sont réalisées directement par un observateur et pas par un compteur électronique. Sachant que les tomates ne produisent que du pollen et que du nectar est fourni ad libitum dans les ruches, on s’attend à ce que les bourdons ne sortent de leur ruche que pour récolter du pollen et que par conséquent la proportion d’individus retournant au nid avec des pelotes de pollen soit très proche de 100%. Dans cette étude, nous considérons alors l’activité à l’entrée des ruches sous trois aspects : (1) l’activité globale (ensemble des individus observés à l’entrée des ruches), (2) l’activité liée spécifiquement à la collecte de pollen (individus observés à l’entrée des ruches et porteurs de pelotes de pollen), et (3) l’activité non spécifiquement liée à la collecte de pollen (individus observés à l’entrée des ruches et non porteurs de pelotes de pollen). Notre premier objectif sera de comparer l’activité liée à la collecte de pollen à l’activité globale et à l’activité non spécifiquement liée à la collecte de pollen. Pour cela, nous étudierons l’évolution de chacun de ces trois aspects de l’activité, non seulement au cours de la période d’observation mais aussi au cours de la journée (rythme d’activité journalier des bourdons) et nous tâcherons de déterminer les causes biotiques (notamment : quel lien avec la cinétique quotidienne de la ressource, voir Chapitre 4) ou abiotiques (influence des conditions météorologiques) de ces évolutions. Notre second objectif sera de définir les périodes de la journée où on a le plus de chance d’observer des bourdons fourrageant, afin de faire nos études comportementales concernant le fourragement à ces moments-là.

108

Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches.

1. Matériel et méthode 1.1. Plan d’expérience Les observations se sont déroulées dans la serre de production, durant 8 jours de l’été 2002, les 11, 13, 18, 20, 27, et 28 juin, et les 7 et 15 juillet. Elles ont eu lieu toutes les heures, de 9h à 18h inclus, soit 10 observations par jour et un total de 80 observations. Des observations préliminaires ont été effectuées en 2001 selon la même méthodologie mais sur une période plus courte (les 12 et 13 juillet). Elles ne seront présentées que succinctement ici. Une observation durait 3 x 15 minutes (3 sites ; 15 minutes par site). Une durée de 15 minutes est suffisamment longue pour permettre l’observation d’individus à l’entrée des ruches. Elle est aussi suffisamment courte pour que les 3 sites de la serre soient observés en moins d’une heure, donc de manière à pouvoir effectuer des observations toutes les heures et ce dans des conditions météorologiques semblables. Lors de l’observation d’un site, était compté le nombre d’individus entrant dans les ruches de ce site, ce en précisant l’étage d’entrée de ces individus et la présence ou l’absence de pelotes de pollen sur leurs corbicules. Seules les pelotes bien visibles ont été prises en compte. Les plus petites pelotes, qui ne faisaient que changer la couleur des pattes des butineuses, n’ont pas été comptées car on a considéré qu’elles n’étaient pas représentatives d’une activité de butinage de pollen. Les paramètres suivants, concernant les conditions météorologiques dans la serre, ont également été relevés toutes les heures, parallèlement aux observations : température (°C), hygrométrie relative (%), et luminosité (Watts). Tout au long des observations, huit à neuf ruches étaient disponibles dans la serre de production, 3 dans les sites A et C, 2 à 3 dans le site B (disposition des sites dans la serre de production : voir Fig. 5 du Chapitre 2, p. 98). Dans chaque site, les ruches étaient disposées les unes sur les autres, en « H.L.M ». Chaque ruche pouvait donc en partie être caractérisée par sa position dans la serre, combinaison du site et de sa position dans le site, son « étage ». Du fait de la durée de l’étude (35 jours), l’âge des ruches (en semaines, à partir de la semaine de transfert, où la reine a produit sa première ouvrière, voir § A/ du Chapitre 2, p.92) doit être pris en compte : selon la date d’observation, une même ruche pouvait avoir un âge différent (Tableau 1). Le remplacement des ruches les plus âgées doit aussi être pris en compte (Tableau 1). Lorsqu’une ruche était remplacée par une autre, la nouvelle ruche prenait la position de l’ancienne ruche. Plusieurs colonies pouvaient alors se succéder à une position donnée dans la serre.

109

Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches. Notons que, du fait de la présence d’ouvrants dans les faîtières de la serre, les bourdons étaient libres de sortir de la serre. Tableau 1. Age des colonies, compté en nombre de semaines écoulées depuis la semaine de transfert, où la reine a produit sa première ouvrière, présentes aux 9 positions possibles dans la serre (Position : Site associé à l’étage) et en fonction de la date d’observation. En grisé : colonies arrivées en cours d’étude (correspond à des colonies trop âgées, remplacées par une nouvelle colonie).

Position A1 A2 A3 B1 B2 B3 C1 C2 C3

Semaine 24 11 juin 13 juin 14 14 4 4 5 5 8 8 6 6 11 11 7 7 12 12

Semaine 25 18 juin 20 juin 15 15 5 5 6 6 9 9 7 7 12 12 8 8 13 13

Semaine 26 27 juin 28 juin 16 16 6 6 7 7 10 10 8 8 4 4 13 13 9 9 14 14

Semaine 27 Semaine 29 7 juillet 15 juillet 17 7 7 9 8 10 11 13 9 11 5 7 14 5 10 12 15 5

1.2. Analyse des données Nous avons tout d’abord étudié l’évolution des paramètres météorologiques et de l’âge moyen de l’ensemble des colonies présentes dans la serre au cours de la période d’étude. Pour cela, nous avons numéroté les 8 dates d’observation, en attribuant à chacune d’elles le nombre de jours écoulés depuis le début de l’expérience, le 11 juin. On a donc attribué le numéro 1 à ce premier jour expérimental (11/06), le numéro 3 au deuxième jour expérimental (13/06), etc. Nous avons alors calculé le coefficient de corrélation de Pearson entre les paramètres météorologiques moyens et le chiffre du jour d’observation. Nous avons ensuite étudié l’activité (variable à expliquer), considérée de trois points de vues différents : L’ensemble des entrées (tous les individus, porteurs et non porteurs de pelotes de pollen). Les entrées des individus porteurs de pelotes de pollen, en considérant d’une part les données brutes, d’autre part la proportion que représentent ces entrées avec pelotes de pollen parmi l’ensemble des entrées (en pourcentage). Les entrées des individus non porteurs de pelotes de pollen.

110

Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches. Ces activités (comptages) ont été analysées par un Modèle Linéaire Généralisé (GLIM), de famille d’erreur Poisson et de fonction de lien log. Les facteurs explicatifs pris en compte sont les suivants : Date et Heure1 d’observation, et les 3 facteurs météorologiques. Le Site de la colonie, son Etage, et son Age (introduit comme une variable quantitative) ont également été pris en compte. L’interprétation des facteurs Site et Etage est délicate. Un effet du Site, associé à un effet de l’Etage peut signifier un effet Colonie (en tenant bien compte du fait que la colonie a pu être changée). Cependant, du fait de leur disposition en H.L.M, les colonies des différents étages pouvaient subir des conditions micro-climatiques différentes. En particulier, les ruches des étages supérieurs recevaient beaucoup de lumière à certaines heures, lorsque le soleil était intense, ce qui pouvait avoir une incidence sur la température interne du nid. Un effet de l’étage, surtout l’étage 3, peut donc être attribué à la fois à la colonie et à l’environnement. Lorsqu’ils étaient significatifs, nous avons illustré l’effet des paramètres météorologiques sur l’activité (pour chacun des trois points de vue adoptés : activité globale, individus porteurs de pelotes de pollen – activité brute et proportions-, individus non porteurs de pelotes de pollen) par les coefficients de corrélations de Pearson (80 points : 8 jours, 10 heures par jour). Nous donnerons les moyennes accompagnées de l’écart type de la moyenne (erreur standard ou ES).

2. Résultats 2.1. Evolution des paramètres météorologiques et de l’âge moyen des colonies au cours de l’expérimentation Au cours de l’expérimentation, l’hygrométrie décroît (ρ = - 0.836, ρ6,0.01 = 0.834 ; Fig. 1) alors que la température de la serre et l’intensité lumineuse augmentent (température : ρ = 0.720 ; intensité lumineuse : ρ = 0.720 ; ρ6,0.05 = 0.707). On note, en parallèle, un accroissement de l’Age moyen de l’ensemble des colonies de la serre (ρ = 0.777 ; Fig. 2).

1

L’effet de l’heure est un effet difficile à tester, du fait que ses modalités ne sont pas indépendantes les unes des autres. Cependant, pour l’instant, faute de solution plus satisfaisante, nous avons considéré l’heure comme étant une variable qualitative à 10 modalités. Nous considèrerons alors les résultats concernant l’heure, obtenus dans cette étude, comme étant indicatifs.

111

Chapitre 3. Activité à l’entrée des ruches.

Figure 1. Evolution des paramètres météorologiques au cours de l’étude.

1

0

0

11 /0 6/ 20

Date

02

10

15 /0 7/ 20

2

00 2

20

10 /0 72

3

02

30

02

4

28 /0 6/ 20

40

02

5

27 /0 6/ 20

50

02

6

20 /0 6/ 20

60

02

7

02

70

11 /0 6/ 20 02 13 /0 6/ 20 02 18 /0 6/ 20 02 20 /0 6/ 20 02 27 /0 6/ 20 02 28 /0 6/ 20 02 10 /0 72 00 2 15 /0 7/ 20 02

Age moyen (semaines) Activité totale moyenne (nombre d'individus) Activité liée à la collecte de pollen (nombre d'individus) Activité non liée à la collecte de pollen (nombre d'individus)

8

18 /0 6/ 20

80

9

13 /0 6/ 20

Température (°C) Hygrométrie (%) Intensité lumineuse (Watts)

90

Figure 2. Evolution de l’âge moyen de l’ensemble des colonies de la serre au cours de l’étude. Pour information, sont présentés les niveaux d’activité par date.

Date

2.2. Activité globale Au cours de la période d’observation, a été noté un total de 2776 entrées d’individus, porteurs ou non de pelotes de pollen. En moyenne, l’activité globale à l’entrée des ruches durant 15 minutes est faible : 3.86 ± 0.10 entrées par ruche en 15 minutes. Cette activité globale par ruche et par période d’observation est indépendante de la colonie observée (Fig. 3), que ce soit en termes de Site (GLIM, famille Poisson, lien log ; df = 2, p = 0.268), d’Etage (df = 2, p = 0.264), ou d’Age (df = 1, p = 0.148). L’activité globale varie selon le moment d’observation. Elle augmente à mesure que l’on avance dans la date d’observation (df = 7, p = 0.005 ; Fig. 2) et, au sein des journées d’observation, suit grossièrement une courbe en cloche présentant son maximum vers 13h et ses minimum, parmi les heures d’observation, à 9h et 18h (df = 9, p