140504 ADEME-I Care-Céréopa-fertilisation azotée-Rapport FINAL

d'approvisionnement alimentaire au niveau français et international. ... facteurs amont de la dépendance à l'énergie, que sont les procédés de fabrication des.
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ANALYSE D’UNE STRATEGIE D’ACTIONS VISANT LA REDUCTION DE LA DEPENDANCE ENERGETIQUE DES EXPLOITATIONS AGRICOLES PAR LA MAITRISE DE LA FERTILISATION AZOTEE

Février 2014 Etude réalisée pour le compte de l’ADEME par I Care Environnement : Boris BAILLY, Benjamin LEVEQUE, Daphné GEORGE et le CEREOPA : Guillaume GASC Coordination technique : Marc BARDINAL Direction Productions et Energies Durables Service Agriculture et Forêts ADEME Angers

Remerciements Nous tenons à remercier particulièrement les membres du comité de pilotage qui ont participé à cette étude : M. Jérôme MOUSSET, M. Antonio BISPO, M. Thomas EGLIN, M. Marc BARDINAL (ADEME), Mme Emma DOUSSET (MAAF-DGPAAT), M. Denis DELCOUR (CGEDD), M. Philippe BALNY (CGAAER), M. Philippe EVEILLARD (COMIFER), M. Jean-Louis PEYRAUD (INRA), Mme Sophie AGASSE (APCA), Mme Marie TOBIAS (Coop de France), M. Antonin VERGEZ (MEDDE-CGEDD), M. Goulven LE BAHERS et M. Alexis de Marguerye (RAD-FN-CIVAM). Nous remercions également les experts sollicités au cours de l’étude : • • • •

Eric MONNIER, EUREVAL, et Stéphane DE CARA, INRA (Experts du consortium) Antoine POUPART, In Vivo Sylvie RECOUS, INRA Jean-Pierre COHAN, Arvalis

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Sommaire Introduction Générale .................................................................................................................................... 5 I.

Déterminants et leviers d’actions ......................................................................................................... 7

a.

Cascade des déterminants .......................................................................................................... 8

b.

Leviers d’action.......................................................................................................................... 10

II.

i.

Principe de l’analyse des leviers d’action .............................................................................. 10

ii.

Synthèse sur l’évaluation ...................................................................................................... 12

iii.

Interactions entre les différents leviers .............................................................................. 133

Mesure « Certificats d’Economies d’Azote » ..................................................................................... 15

a.

Principe du dispositif CEA .......................................................................................................... 15

b. De la pertinence d’une application du dispositif des Certificats d’Economie d’Energie(CEE) à l’azote ................................................................................................................................................ 16 i.

Intérêt du dispositif pour le secteur agricole ........................................................................ 16

ii.

Adaptation de la mesure au secteur agricole........................................................................ 17

c.

Premiers éléments de fonctionnement de la mesure............................................................... 17 i.

Acteurs concernés ................................................................................................................. 17

ii.

Unité de mesure et objectif de réduction ............................................................................. 19

iii.

Administration du dispositif .................................................................................................. 22

iv.

Actions concernées ............................................................................................................... 23

d.

Estimation des impacts de la mesure ........................................................................................ 28 i.

Bénéfices environnementaux ................................................................................................ 28

ii.

Impacts économiques : coûts et gains pour les différents acteurs de la filière .................... 30

e. III.

Conclusion : Analyse prospective sur les points de force et de faiblesse ................................. 33 Mesure Fonds azote et appels à projets ............................................................................................ 34

a.

Principe d’un couplage des dispositifs « fonds azote » et « appels à projets » ........................ 34

b. De la pertinence de la création d’un dispositif d’appels à projets pour la réduction de la dépendance énergétique liée à la fertilisation azotée ...................................................................... 35 i.

Intérêt d’un tel dispositif pour la problématique.................................................................. 35

ii.

Adaptation de la mesure au secteur agricole et compatibilité avec les dispositifs existants 35

c.

Premiers éléments de fonctionnement de la mesure............................................................... 36 i.

Création et alimentation d’un Fonds Azote .......................................................................... 36

ii.

Allocation des moyens du fonds du Fonds Azote selon un mécanisme d’appels à projets .. 39

iii.

Lien avec les leviers d’action identifiés en 1ère phase de l’étude ........................................ 44

d.

Estimation des impacts de la mesure ........................................................................................ 50 i.

Bénéfices environnementaux ................................................................................................ 50

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ii. e. IV.

V.

Impacts économiques : coûts et gains pour les différents acteurs de la filière .................... 51 Conclusion : Analyse prospective sur les points de force et de faiblesse ................................. 53

Stratégie d’action.................................................................................................................................. 54

a.

Synthèse sur les deux mesures analysées ................................................................................. 54

b.

Insertion des mesures CEA et Appel à Projet dans le cadre réglementaire et incitatif actuel.. 55

c.

Articulation entre les mesures CEA et Appel à Projet ............................................................... 56 Conclusion ................................................................................................................................... 57

ANNEXES ...................................................................................................................................................... 58

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Introduction Générale La question de la dépendance des exploitations au coût énergétique des engrais de synthèse a été approfondie et quantifiée dans l’étude Analyse économique de la dépendance de l’agriculture à l’énergie publiée en 2012 par l’ADEME1. Cette analyse a montré qu’en 2010, environ 35% du coût d’un engrais azoté de synthèse (EAS) était majoritairement lié à l’énergie employée pour sa fabrication industrielle. Ceci explique l’impact important de la hausse régulière du prix des énergies fossiles constatée ces dernières décennies sur le coût de la fertilisation minérale. En appliquant ce ratio calculé chaque année aux dépenses moyennes annuelles des exploitations pour l'achat d'engrais2, l’étude a ainsi pu estimer la dépense moyenne des exploitations relative à l'énergie employée pour l'approvisionnement en EAS. Ces dépenses, évaluées sur la période 1990-2008, sont en constante augmentation. En moyenne, la dépendance des exploitations agricoles3 à l’énergie a évolué entre 12 et 14 % entre 1990 et 2010 à l’échelle de la ferme France. La fertilisation minérale pèse lourd dans ce niveau de dépendance, responsable à hauteur d’environ 20 % de sa valeur. Par ailleurs l’étude a estimé que les engrais de synthèse sont le premier poste de charges liées à l’énergie indirecte des exploitations, avant les aliments du bétail. Ces résultats mettent en évidence l’intérêt d’une maîtrise de la consommation des EAS dans le secteur agricole, ce poste de consommation représentant une vulnérabilité économique potentiellement forte dans un contexte d’augmentation des prix de l’énergie4. La différenciation des résultats selon les types d’exploitation a par ailleurs montré que les grandes cultures sont les plus sensibles aux prix de l’énergie, avec un poste engrais contribuant à hauteur de 40 % à la dépendance énergétique totale. On relève toutefois que la consommation d’engrais de synthèse représente un poste significatif de la dépendance énergétique pour la plupart des types d’exploitations, l’élément fertilisant azote représentant toujours la part majoritaire au sein de ce poste. L’ensemble de ces éléments souligne l’enjeu, pour l’ADEME dans le cadre de ses réflexions prospectives, d’une stratégie d’action spécifique à l’échelle nationale visant la réduction de la dépendance énergétique des exploitations agricoles par la maîtrise de la fertilisation azotée. L’analyse d’une telle stratégie est l’objectif de cette étude. Elle a été conduite en étroite synergie avec le comité NPC et de nombreux experts associés au projet. L’étude a en effet pour but d’identifier des pistes d’actions argumentées et chiffrées en se basant sur l’analyse de l’existant : solutions techniques connues et expériences en matière de dispositifs publics en France et à l’étranger, dans le secteur agricole ou dans d’autres domaines (amélioration de l’efficience énergétique notamment). L’approche a été séquentielle, la recherche de mesures publiques les plus pertinentes et efficaces possibles passant par l’analyse préalable des solutions existantes sur le terrain. A chaque étape ont été mis en évidence les enjeux, mécanismes, leviers et freins associés à ces actions. Cette analyse a abouti à l’identification de 15 mesures potentiellement efficaces pour répondre à la problématique de réduction des consommations d’engrais azotés de 1

Etude réalisée par I Care Environnement et le Céréopa pour le compte de l’ADEME, 2012. Analyse économique de la dépendance de l’agriculture à l’énergie - Evaluation, analyse rétrospective depuis 1990 - Scénarios d’évolution à 2020, rapport final, 86p. 2 Les engrais azotés sont les plus utilisés dans les exploitations en France par rapport aux autres engrais de synthèse (plus de 70% des achats en parts de marché en 2009-2010) 3 part des dépenses de fonctionnement (charges variables) liée à leur approvisionnement en énergie de façon directe (consommation sur l’exploitation) et indirecte (via la consommation d’intrants). 4 Les autres engrais de synthèse (P, K) présentent un contenu énergétique beaucoup plus faible que les engrais azotés (8 MJ/kg d’élément nutritif pour le triple superphosphate, 4 pour le chlorure de potassium, contre 41 pour l’urée, en MJ d’énergie finale, soit celle réellement facturée à l’utilisateur pour sa consommation) ; les EAS ont donc le poids le plus fort dans ces résultats.

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synthèse. Au final deux mesures innovantes, inspirées des diverses initiatives qui ont pu être relevées hors secteur agricole français et des échanges menés avec de nombreuses parties prenantes ont été étudiées en détail, ainsi que l’identification des conditions et facteurs clés de succès pour leur mise en œuvre. Une autre caractéristique de cette étude est en effet l’approche collégiale, l’objectif ayant été d’aboutir à des propositions discutées largement dans le cadre du Comité de pilotage créé à cet effet, regroupant l’ensemble des acteurs concernés par le sujet (ministères, organismes de conseil et de développement agricole, organismes économiques, chercheurs, etc.), et partagées au sein du Comité NPC. La liste des membres du comité de pilotage de l’étude et des experts consultés au cours de l’étude est présentée en annexe 6. La stratégie d’action ainsi élaborée doit permettre d’aboutir à des gains significatifs à court et moyen terme (aux horizons 2020-2030), étant donné les évolutions simulées des cours de l’énergie et de la dépendance économique des exploitations associée. La particularité de cette étude est qu’elle cible l’amélioration de la compétitivité des exploitations en synergie avec les enjeux environnementaux : le choix de cette entrée présente l’avantage de ne pas stigmatiser la production agricole, mais d’en faire un maillon de la chaîne d’amélioration continue des pratiques environnementales. Les gains attendus de la stratégie présentée sont donc avant tout économiques (réduction des charges pour les exploitants) ; cependant, les gains espérés sont en réalité multiples et couvrent à la fois les enjeux environnementaux du réchauffement climatique, de la pollution des eaux et de l’érosion de la biodiversité, ainsi que ceux du développement durable intégré des filières et des territoires (réduction des excédents d’azote et des pertes vers les différents compartiments environnementaux, optimisation des transferts d’azote organique, valorisation agronomique des effluents et des déchets organiques, développement des légumineuses, évolution pérenne des pratiques, diversification des assolements et des activités, etc.). Tout l’enjeu de ce dispositif est ainsi d’amorcer dans le secteur agricole la transition énergétique débattue au niveau national, qui vise à faire émerger un nouveau modèle de développement économique fondé sur l’optimisation des modes de production. Ce nouveau modèle nécessite de trouver un équilibre entre les enjeux économiques, énergétiques, environnementaux et agronomiques du secteur, en respectant le maintien d’une productivité agricole compatible avec les objectifs à moyen et long terme d’approvisionnement alimentaire au niveau français et international. Le plan d’actions inclut la fixation d’objectifs, la proposition de modes d’actions politiques et techniques et l’évaluation de ses résultats. Sont notamment mis en regard les coûts et contraintes sous-jacentes à chaque action, avec les bénéfices escomptés en termes économiques, sociétaux (créations d’emplois), environnementaux et sanitaires. Le plan s’accompagne d’une stratégie opérationnelle et détaillée pour son déploiement et un maintien pérenne. Afin de faciliter son acceptabilité, il s’agit de fournir des éléments pour démontrer sa pertinence et de souligner la consultation systématique des différents acteurs impliqués (ministères, fabricants d’engrais, coopératives, etc.) pour la validation des stratégies à déployer. L’étude s’est attachée à mettre à plat les sujets de la manière la plus objective possible, ciblant toujours les faits au regard des enjeux et alimentant les analyses par des informations diversifiant les points de vue et les sources.

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I.

Déterminants et leviers d’actions

L’identification d’une stratégie d’actions visant la réduction de la dépendance énergétique des exploitations agricoles par la maîtrise de la fertilisation azotée nécessite au préalable la compréhension des enjeux et des problématiques adressées sur le terrain. Cette question a fait l’objet des deux premiers niveaux d’analyse adressés dans l’étude, articulée en trois étapes imbriquées : 1. identification des déterminants du niveau de fertilisation azotée minérale en production agricole 2. recensement et évaluation de l’ensemble des leviers d’action permettant d’optimiser la fertilisation azotée minérale 3. analyse des mesures pertinentes pour des profils de consommation spécifiques L’objet de cette première partie est de présenter les résultats des deux premières étapes en décrivant - dans un premier temps les mécanismes qui expliquent les quantités d’engrais azotés de synthèse utilisées sur l’exploitation, - puis en exposant et en analysant l’ensemble des leviers d’action techniques ou organisationnels disponibles à l’échelle de l’exploitation ou à l’échelle supérieure (territoires, filières), à implémenter pour jouer sur les déterminants considérés. A noter que les résultats présentés pour ces deux étapes concernent des périmètres différents : le niveau des « déterminants » s’intéresse au périmètre de l’exploitation, tandis que celui des « leviers d’action » dépasse ce périmètre et peut adresser toute une filière, certaines Orientation Technicoéconomique d’Exploitation (OTEX) ou un territoire, permettant la projection vers l’étape d’analyse des mesures.

Déterminants du niveau de fertilisation azotée minérale en production agricole (profils-types)

Leviers d’action (technique, organisationnel…) permettant de jouer sur le(s) déterminant(s) considéré(s)

Déterminant x

Levier A

Déterminant y

Levier B

Déterminant z

Levier C

Mesures : politiques publiques ou actions collectives (secteur agricole et « benchmark »)

Mesure 1

Mesure 2

Fig. 1. Schéma récapitulatif des interactions entre les 3 niveaux d’analyse, les éléments abordés dans ce document sont encadrés en rouge

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a. Cascade des déterminants Les déterminants sont les différents facteurs explicatifs du niveau de charges dépensées par l’exploitation liées à l’énergie utile à l’approvisionnement en engrais azotés de synthèse (indicateur de la dépendance énergétique des exploitations relative aux EAS). Nous nous intéressons ici tout particulièrement aux mécanismes liés aux étapes de la production agricole, en les priorisant par rapport aux facteurs amont de la dépendance à l’énergie, que sont les procédés de fabrication des engrais azotés de synthèse, les distances parcourues pour l’approvisionnement des fermes, etc. Ces mécanismes sont représentés dans la catégorie « efficience azote de l’exploitation » sur le schéma ci-dessous, qui représente les éléments explicatifs de la dépendance énergétique de l’exploitation relative à l’utilisation d’EAS.

Fig. 2. Schéma des éléments explicatifs de la dépendance énergétique de l’exploitation, relative aux EAS

Une revue bibliographique a permis de répertorier l’ensemble des facteurs de dépendance à l’énergie relative à l’utilisation d’engrais azotés sur l’exploitation. Le type d’exploitation qui a été considéré pour cette étude ne représente pas un système de production particulier, mais constitue un modèle théorique conçu pour intégrer la diversité des systèmes existants et s’y adapter (présence d’ateliers de production animale notamment). Dans ce cadre, les déterminants du niveau de fertilisation azotée minérale sur l’exploitation constituent l’ensemble des éléments de contexte sociologique, économique, et surtout technique qui amènent l’agriculteur à raisonner ses apports (en termes de quantité, forme et date d’application de l’azote). Ils regroupent des mécanismes de calcul inspirés notamment de la méthode du bilan azoté et basés sur l’estimation de l’azote nécessaire à la production (avec mesure de l’azote disponible et détermination des quantités manquantes à apporter) et des mécanismes plus informels, dont l’influence est moins évidente à percevoir, et qui conditionnent indirectement la stratégie de production et donc de fertilisation de l’exploitant. Ces derniers déterminants prennent notamment en compte : - les habitudes de l’agriculteur, - l’influence de la situation socio-économique dans laquelle il évolue.

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L’analyse a finalement mené à la production d’une « cascade de déterminants » répartis en quatre groupes complémentaires, décrivant le raisonnement de l’agriculteur et conduisant à l’apport d’une certaine quantité d’azote minéral et au pilotage de cet apport. On trouve ainsi, - un premier groupe de déterminants contextuels qui conditionnent la stratégie de raisonnement de la production par l’exploitant agricole, - un groupe composé des déterminants des besoins en azote du système de production, - un groupe rassemblant les critères qui jouent sur la disponibilité en azote du système, - et enfin, un dernier groupe comprenant les déterminants qui contrôlent l’adéquation des apports en azote aux besoins. La cascade ainsi obtenue est présentée ci-dessous. Le premier volet du schéma illustre les mécanismes de raisonnement de la fertilisation d’ordre technique, liés à l’influence du contexte microscopique de production, à l’échelle de la parcelle ou de l’exploitation, tandis que le second représente les mécanismes de raisonnement plus informels, liés à l’influence du contexte de production à une échelle plus macroscopique. ... Efficience énergie-azote de l’exploitation (Quantité d'énergie azote consommée par l'exploitation , pour un système de production donné) 5

2 1

Besoin en azote du système de production

Types de cultures et variétés 6

Objectif s de rendement (quantitatif et qualitatif )

12 …par la culture associée 13

Stratégie de raisonnement de la production par l’exploitant agricole

3

7

Disponibilité en azote du système

disponibilité en azote symbiotique…

…par le précédent cultural 14 Teneur du sol en MO

8

disponibilité en azote minéral

15

Cinétique de minéralisation du sol

Arrière ef f et des AO 16 9

4 Adéquation des apports en azote aux besoins

Apports en azote organique 17 10 Apports en azote minéral 11

Pertes d’azote minéral (lessivage et volatilisation)

Apports en ef f luents d’élevage (interne ou plan épandage) Apports en produits organiques autres

18

20

21

Formes d’azote (uréique, NH4+, NO3-) 19

Acceptation du risque (de carence et de verse) Connaissance des besoins au cours de la croissance

22 Maîtrise de la f ertilisation

Modalités d'épandage

Fig. 3. Schéma des mécanismes de raisonnement de la fertilisation d’ordre technique

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Fig. 4. Schéma des mécanismes de raisonnement de la fertilisation d’ordre stratégique et contextuel

b. Leviers d’action i. Principe de l’analyse des leviers d’action La première partie de l’étude d’ « identification d’une stratégie d’actions visant la réduction de la dépendance énergétique des exploitations agricoles par la maîtrise de la fertilisation azotée » a consisté à formaliser les différents déterminants du niveau de dépendance à l’énergie de l’exploitation liée à l’utilisation d’engrais azotés de synthèse. La suite de la démarche, dont les résultats sont présentés ici, a consisté en l’identification de l’ensemble des leviers d’action, pouvant être mis en œuvre à l’échelle de l’exploitation ou à une échelle supérieure, permettant de jouer sur ces déterminants pour aller dans le sens d’une réduction des charges énergétiques liées à la fertilisation. Ces leviers, d’ordre technique, organisationnel, économique, ou encore scientifique, ont tout d’abord été répertoriés et évalués. La synthèse de cette évaluation est présentée en point ii) Organisés en quatre catégories principales selon le type d’action qu’ils représentent : -

optimisation de l’itinéraire technique,

-

gestion de l’azote organique,

-

aide au pilotage de la fertilisation,

-

ou encore création d’un contexte favorable à l’amélioration de la performance énergétique liée à la fertilisation),

Ils ont ensuite chacun fait l’objet de la rédaction d’une « fiche levier » spécifique permettant d’expliciter l’action et son évaluation et d’approfondir certains éléments liés à sa mise en œuvre.

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Ainsi, on y trouve, pour chaque levier : -

une description plus précise de la pratique ou du comportement qu’il sous-tend,

-

la description des acteurs qu’il implique et des systèmes d’exploitation concernés,

-

des précisions chiffrées (quand suffisamment d’informations récentes étaient disponibles pour le faire), sur son efficacité et sa faisabilité

-

ainsi que l’identification des freins à l’élévation des notes de ces critères, couplées à une projection vers les mesures qui pourront potentiellement actionner le levier.

L’évaluation d’autres critères tels que le taux de pénétration du levier dans les exploitations agricoles à l’échelle de la ferme France, ses coûts pour l’agriculteur, ses impacts potentiels sur les différentes filières d’approvisionnement ou de commercialisation liées à la production agricole, et d’autres points sur l’évaluation de ses effets comme la réversibilité, l’aléa, ou encore la temporalité complètent ces informations. Ces éléments doivent permettent de mieux comprendre les tenants et les aboutissants de chaque levier d’action et sont orientés vers la mise en place de mesures publiques qui permettront de développer ces leviers de manière efficace. Les fiches rédigées pour chaque levier sont toutes présentées en annexe 7 de ce document, classées par catégorie de levier. Elles s’appuient chacune sur une bibliographie spécifique présentant en moyenne cinq références, ainsi que sur les données qui ont pu être recueillies au cours des nombreux entretiens bilatéraux réalisés avec les différents experts et acteurs du secteur lors de la phase d’évaluation des leviers. La plupart des en-têtes développés dans les fiches étant explicites, nous définirons ici simplement les notions de réversibilité, d’aléa et de temporalité qui ont été utilisées pour approfondir l’évaluation des effets de chaque levier. La « réversibilité » représente la possibilité de revenir en arrière suite à la mise en œuvre d’un levier, ainsi que la fréquence envisageable de ce changement ; L’ « aléa » représente l’évaluation de l’augmentation de la vulnérabilité du système d’exploitation au risque lié à la variabilité du climat, des prix agricoles, etc., ou au contraire celle de l’amélioration de sa résilience : on se demande ici si le levier va rendre le système plus sensible ou non face aux contexte de variation des facteurs de production ; La « temporalité » représente l’échelle de temps d’observation des effets décrits dans l’évaluation du levier quant à la réduction de la dépendance énergétique des exploitations ou quant aux autres impacts qui auront pu être évoqués. Enfin le niveau de connaissance scientifique actuel (en date d’octobre 2013) a été évalué sur la base d’une notation de 1 = faible connaissance scientifique ou encore à l’état de recherche (quelques essais seulement) à 3 = technique ou levier robuste et documenté

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ii. Synthèse sur l’évaluation Les leviers, d’ordre technique, organisationnel, économique, ou encore scientifique, ont tout d’abord été répertoriés et évalués selon trois principaux critères : • • •

leur efficacité quant à la réduction de la dépendance énergétique liée à l’utilisation d’engrais azotés de synthèse (notion de performance économique) ; leur efficience quant à la valorisation de l’azote apporté (notion de performance technique) ; La faisabilité de leur mise en œuvre.

L‘efficacité est calculée comme le ratio des charges énergétiques contenues dans les engrais utilisés sur l’ensemble des charges variables de l’exploitation. Une note (synthèse biblio et dire d’expert) est attribuée pour le taux de réduction : 1 = 5 %, 2= entre 5 et 20 %, 3 = plus de 20 % de réduction. L’efficience est le ratio de la quantité d’azote valorisé par la culture sur l’ensemble de l’azote apporté au système. Une note (dire d’expert) est attribuée pour le niveau d’efficience apportée par le levier : 1 = assez efficient à 3 = très efficient L’évaluation de la faisabilité se base sur l’estimation qualitative de deux autres sous-critères dont elle est la moyenne : - le niveau de maturité du levier pour le monde agricole (1 = en développement à 3 = diffusion large) - le niveau de complexité de sa mise en œuvre à l’échelle de l’exploitation (1 = difficile à intégrer dans le système à 3 = peut être utilisé en routine) Chaque note, attribuée a priori à partir des résultats de la documentation, a ensuite été corrigée et consolidée à l’issue de la conduite de six échanges bilatéraux avec différents experts. Des graphiques d’analyse représentant à tour l’efficacité et l’efficience des différents leviers en fonction de leur faisabilité ont été produits, permettant de classer ces leviers selon quatre catégories (cf. illustration ci-dessous).

Fig. 5. Groupes de priorisation des leviers selon la matrice efficacité / faisabilité

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Le graphique ci-après synthétise la classification des leviers dans le plan efficacité / faisabilité. Les groupes de leviers sont repérés par couleur - optimisation de l’itinéraire technique - gestion de l’azote organique - aide à la décision et au pilotage - leviers de création d’un contexte favorable Les leviers repérés comme particulièrement efficients dans la gestion du cylce de l’azote et la performance du ratio azote apporté / protéines produites sont surlignés de la même couleur.

Fig. 6. Positionnement des leviers dans la matrice efficacité / faisabilité

iii. Interactions entre les différents leviers Afin de repérer les interactions potentielles et amplifier les effets attendus par la mise en place de mesures, une cartographie des leviers a été réalisée. Quatre niveaux ont été repérés : -

peu ou pas d’interactions (en blanc sur le tableau) interactions à surveiller car elles peuvent en fonction des systèmes et des caractéristiques pédo-climatiques être positives ou négatives (orange) complémentarités intéressantes entre les leviers (vert clair) fortes interactions positives entre les leviers (vert foncé)

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Fig. 7. Interactions entre les leviers d’action

Ainsi pour exemple, le levier « maintien de systèmes polyculture-élevage » (L) est parfaitement complémentaire des leviers autour de « l’insertion de légumineuses, en cultures pures, associées ou en culture intermédiaires » (G, H, I) ainsi qu’avec les leviers de « traitement des effluents » (N, O, P). Par contre, concernant le levier du « travail du sol » (J), en fonction des choix de l’agriculteur, un travail du sol simplifié peut être complémentaire pour la gestion des résidus par enfouissement superficiel, mais au contraire négatif pour la valorisation de lisiers qui resteraient en surface et seraient soumis à un risque de volatilisation plus élevé.

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II.

Mesure « Certificats d’Economies d’Azote » a. Principe du dispositif CEA

En se basant sur le principe des Certificats d’Economies d’Energie (CEE), la mise en place d’un dispositif de Certificats d’Economies d’Azote (CEA) consisterait à : • Fixer sur une période donnée (ex : 3 ans) une obligation globale de réduction de consommation finale d’Engrais Azotés de Synthèse (EAS)5 aux acteurs de la chaîne de valeur (les « obligés », par ex. : producteurs ou/et distributeurs d’EAS), avec pénalité financière en cas de non-atteinte de l’obligation en fin de période ; • Répartir cette obligation sur la base d’une clé à définir (chiffre d’affaires, tonnage vendu…) ; • Définir des « actions standardisées » permettant de générer des réductions de consommation d’EAS chez les agriculteurs (bénéficiaires), pouvant être chiffrées de manière forfaitaire dans une unité et selon un mode à définir. Ces actions permettent de générer des certificats ; • Délivrer des CEA en contrepartie des actions mises en œuvre aux acteurs obligés et à d’autres acteurs éligibles (non soumis à objectif de réduction, mais désignés comme pouvant engendrer des certificats en échange de leurs actions), à hauteur des économies générées. Les vendeurs d’EAS et les éligibles pourraient ainsi développer leur rôle de conseil et d’accompagnement des agriculteurs, qui sont les bénéficiaires finaux des actions.

Le principe du dispositif est résumé ci-dessous :

Fig. 8. Schéma de principe du fonctionnement des CEA

5

L’azote organique ne rentre pas dans le dispositif pour deux raisons : la dépendance énergétique associée est moindre que pour les EAS ; son utilisation est plus difficile à suivre au niveau national.

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b. De la pertinence d’une application du dispositif des Certificats d’Economie d’Energie(CEE) à l’azote i. Intérêt du dispositif pour le secteur agricole L’intérêt du dispositif des CEE (ici des « CEA ») réside dans le fait qu’il permet d’inciter à la diffusion de bonnes pratiques dans un secteur où les solutions techniques existent. Par ailleurs, l’utilisation de la structure économique (relation client-fournisseur entre le vendeur et l’agriculteur) pour la diffusion de ces solutions techniques apparaît pertinente dans la mesure où « l’accès » au consommateur final est relativement difficile pour l’Etat et permet de « mutualiser » une obligation d’intérêt général. De plus, cette mesure permet d’accompagner les acteurs de la chaîne dans la transformation de leur activité vers un métier de service à plus grande portée environnementale et stratégique (« performance azote ») que leur positionnement actuel. A priori ce type de service se développe déjà, et un dispositif de CEA permettrait de stimuler le développement du conseil pour une utilisation raisonnée de l’azote minéral et/ou pour une substitution par d’autres apports (organiques, légumineuses…). L’ingénierie de conseil générée permettrait de compenser financièrement les pertes liées à la baisse des ventes. Le dispositif CEA permet ainsi de toucher un poste de réduction de la consommation d’énergie indirecte dans le secteur agricole, là où le dispositif des CEE ne s’applique que très peu (27 fiches standardisées à l’heure actuelle) et uniquement aux consommations d’énergie directe. Enfin, dans un contexte de tensions sur les crédits publics, un tel dispositif présente le double avantage d‘éviter des aides curatives sur les impacts de surplus azotés et de proposer une alternative aux mécanismes de soutien classique (subventions, aides directes…). Par ailleurs, son caractère coercitif6 est appréhendé de manière beaucoup plus favorable que d’autres dispositifs (ex. : taxe) par les professionnels et permet de mettre en valeur les agriculteurs au travers des bonnes pratiques mises en place. Les autres intérêts « a priori » de ce dispositif sont : • sa contribution possible au développement d’actions collectives par filière ou sur un territoire, démarches avec lesquelles il est compatible. Il pourrait notamment venir appuyer le dispositif des GIEE (groupements d'intérêt économique et écologique) prévu dans le projet de loi d’avenir. • il repose sur un objectif de résultat en termes d’actions. Le dispositif rémunère en effet des actions réellement mises en place et garantit donc la réduction des consommations. L’impact final (en quantité d’azote économisée) des actions générées par le dispositif est estimé ex ante. • son caractère évolutif, avec la possibilité de mise à jour régulière des actions éligibles. Le dispositif laisse la place à la créativité dans les actions proposées et l’adaptation des solutions à la diversité des situations géographiques et de production.

6 Les acteurs dits « obligés » se voient fixer une obligation de résultat : celle-ci porte sur la réalisation effective d’actions d’optimisation de la consommation d’engrais (et non de réduction effective de la consommation, ce qui apparaît trop complexe dans un premier temps, cf. plus loin).

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ii. Adaptation de la mesure au secteur agricole Le principe des CEE apparaît intéressant dans le cadre d’un marché présentant les caractéristiques suivantes : • Segment de consommation diffuse : dans ce cas, qui est précisément celui du marché des EAS, il s’avère plus efficace pour l’Etat de s’appuyer sur les acteurs ayant un lien direct avec le consommateur final (en l’occurrence le vendeur d’engrais), plutôt que d’aborder directement ce segment (plus de 600 000 agriculteurs en France) ; • Actions de réduction de consommation nombreuses et pouvant faire l’objet d’une estimation de gain ex ante : le dispositif s’appuie en effet sur un catalogue évolutif de « bonnes pratiques » présentant un gain unitaire pouvant faire l’objet d’une estimation moyenne. Ces actions doivent être « additionnelles » par rapport à ce qui se produirait de manière tendancielle (l’acteur obligé doit alors prouver son rôle actif et incitatif dans la prise de décision du consommateur final). Comme montré précédemment dans l’étude, de nombreux leviers d’action pour réduire la dépendance des exploitations agricoles aux EAS existent ; ils sont potentiellement candidats à chiffrage et standardisation. Une analyse plus poussée sera menée par la suite pour vérifier cette opportunité (cf. partie suivante). En première analyse, ces critères semblent bien représenter la situation caractérisant l’utilisation des EAS dans le secteur agricole ; l’intérêt d’une analyse approfondie de la mesure est avéré. Nota Bene : la coordination avec les nouveaux dispositifs envisagés (Certificats d’économie de produits phytosanitaires…) doit être abordée rapidement afin d’optimiser le plan de la gouvernance et de rationaliser le coût des actions.

c. Premiers éléments de fonctionnement de la mesure Cette partie a pour objet de dessiner les premiers contours d’un dispositif CEA fonctionnel, en identifiant les différents acteurs à impliquer, proposant un premier chiffrage des objectifs de réduction pouvant être fixés, un mode de répartition de ces objectifs, des premières pistes pour l’organisation administrative et le suivi de ce dispositif. Une première analyse des actions susceptibles d’être éligibles à certificats est également intégrée. i. Acteurs concernés La mise en œuvre du dispositif CEA implique plusieurs catégories d’acteurs7 : • Les obligés doivent réaliser ou faire réaliser des actions de réduction de la consommation d’EAS dans le but d’obtenir des certificats. Les obligés supportent la contrainte via un objectif de réduction fixé8 et payent une pénalité en cas de non atteinte de cet objectif ; • Les éligibles peuvent librement participer au dispositif en déposant des dossiers de demande de certificats d’économie d’azote. Ils peuvent ensuite vendre leurs CEA sur le marché aux obligés. Les éligibles ne sont pas soumis à contrainte ;

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Eléments basés sur la note DRIEE « Certificats d’économies d’énergie (CEE) – Nouvelles dispositions suite à la loi du 12 juillet 2010 dite « loi Grenelle II » et aux textes d’application de la 2ème période du dispositif, juin 2011. 8 Il s’agit d’un objectif de réduction ex ante dans la mesure où pour être en conformité avec leur obligation, les obligés vont devoir faire réaliser des actions par les agriculteurs. A chaque action est associé un gain forfaitaire ; c’est donc l’action qui est « récompensée » et non un gain effectivement constaté.

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Les bénéficiaires, qui profitent des résultats de la mise en œuvre d’actions par les obligés et les éligibles, en termes d’économies d’EAS.

Obligés Le choix de la nature de l’acteur devant supporter l’obligation repose sur plusieurs critères : • Les moyens (techniques, financiers, organisationnels…) dont disposent les acteurs obligés : ces derniers doivent être significatifs, afin d’être en capacité de mettre en place une organisation susceptible d’encourager la mise en œuvre des opérations de réduction ; • La proximité des obligés avec les acteurs consommateurs et la qualité du lien entretenu avec les autres structures influençant les choix techniques des agriculteurs (chambres d’agriculture, instituts techniques, groupements de producteurs, filières aval…) ; • Le nombre d’obligés : un faible nombre d’obligés génère a priori peu de coûts de transaction pour l’Etat (gestion de la mesure : base de données des obligés, suivi des actions pour chacun…). Au-delà le système peut fonctionner via des dispositions particulières telles que le regroupement d’acteurs aux niveaux régional et/ou sectoriel. L’étude de la filière des engrais azotés de synthèse en France, depuis leur fabrication/importation jusqu’à leur utilisation, a permis d’identifier les différents acteurs impliqués et de comprendre leur organisation. On distingue ainsi trois principaux segments dans la chaîne des EAS : • L’importation et la production, incarnées par les industriels et des négociants ; • La distribution, faisant intervenir à la fois des grossistes et des vendeurs finaux ; • L’utilisation, par les agriculteurs. La structuration de la filière est présentée schématiquement ci-dessous :

Fig. 9. Structuration de la filière des EAS en France

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Le comité de pilotage de l’étude a retenu pour hypothèse de travail la sélection des vendeurs finaux9 comme maillon « obligé » du dispositif. Malgré leur nombre relativement élevé, l’argument de la proximité avec les agriculteurs a été prépondérant dans ce choix. Ce choix implique un recensement de ces acteurs qui ne sont pas actuellement tenus de se déclarer auprès de l’administration ; une analyse complémentaire permettant de répartir les vendeurs par volume de vente annuelle devrait également être menée, afin éventuellement de mettre en place un traitement différencié pour les plus petits vendeurs. Eligibles Les éligibles du dispositif doivent si possible représenter un faible nombre d’acteurs, pour éviter l’engorgement administratif lié à la demande de certificats. Ces éligibles ont la capacité de mettre en œuvre des actions d’optimisation de la consommation d’EAS auprès des agriculteurs. Ils doivent donc être proches de ces derniers et bénéficier d’une certaine influence sur leurs choix techniques. Rendre éligible des acteurs qui travaillent dans ce sens, c’est valoriser concrètement leur démarche et les encourager à la poursuivre. Par ailleurs, si la mise en œuvre des actions se fait principalement au niveau de l’exploitation agricole, il est souhaitable de favoriser des démarches collectives10, ce qui permettrait l’agrégation des opérations vers des « fiches action » d’ensemble. Les acteurs désignés comme éligibles devront donc être en mesure de proposer des actions coordonnées. Ainsi, les structures les plus à même de devenir éligibles sont les organismes de conseil et de développement (chambres d’agriculture, groupes de développement…), les organismes économiques tels que les coopératives et les négociants, les groupes d’agriculteurs porteurs d’initiatives comme les Groupements d’Intérêt Economique et Environnemental (GIEE), et les acteurs des filières agroalimentaires de transformation. Ces acteurs pourraient prétendre à l’obtention de certificats notamment à travers le développement de programmes d’accompagnement auprès des agriculteurs. Il faut noter par ailleurs que les obligés peuvent tout à fait être éligibles. On peut également envisager l’éligibilité des industriels français producteurs d’EAS11, au nombre seulement de trois. Le cas échéant, l’implication de ces acteurs prendrait plutôt une forme financière, par des investissements pour la mise en place d’actions standardisées par exemple. ii. Unité de mesure et objectif de réduction Fixation d’objectifs La fixation a priori d’objectifs chiffrés imposables aux obligés dans le cadre d’un dispositif CEA implique tout d’abord la définition d’une unité de compte adaptée à l’évaluation des gains liés aux actions mises en œuvre. Ces actions doivent en effet faire l’objet d’un chiffrage ex ante des économies associées sur la durée de vie de l’action ; l’élaboration de fiches-actions standardisées est

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Catégorie d’acteurs correspondant aux nomenclatures (NAF) G 47.76.Z et G 46.12B (cf. annexe 1 « Classes NAF des métiers de la filière des EAS »). 10 Une des conclusion de la mission présidée par Marion Guillou chargée d'identifier et de capitaliser les bonnes pratiques agroécologiques, qui souligne la nécessité d’une action collective sur le terrain. 11 Expression d’un intérêt à être associé au cours de différents entretiens et propositions écrites (entretien I Care avec Philippe Eveillard, propositions de l’UNIFA pour améliorer l’efficacité de l’azote et réduire la dépendance énergétique indirecte, implication de GPN dans le cercle Ceres, etc.).

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donc nécessaire. Le dispositif ayant pour objectif de réduire la dépendance énergétique des exploitations liée à l’utilisation des EAS, plusieurs options d’unités se présentent : • Kg d’engrais azoté minéral économisé ; • Kg d’azote minéral économisé ; • KJoules d’énergie indirectement contenue dans les engrais azotés économisés ; • « €-énergie » indirectement contenue dans les engrais azotés économisés. L’unité la plus adaptée semble être le kilogramme d’azote minéral économisé ; l’élément azote entre en effet dans le raisonnement des quantités d’engrais apportées par l’agriculteur à la source, et ce critère est utilisé de façon universelle. C’est également cette unité, rapportée à l’hectare, qui est le plus souvent utilisée dans la bibliographie12 pour le chiffrage des bénéfices liés aux actions d’optimisation de la fertilisation. Cette unité est également représentative de l’enjeu énergétique adressé13. L’objectif global de réduction de l’utilisation d’azote par l’emploi d’engrais de synthèse doit être fixé en remplissant deux conditions : • être réaliste au regard des potentiels de réduction ; • être suffisamment ambitieux pour garantir l’efficacité du dispositif. Il s’agit d’un choix déterminant pour le bon fonctionnement de la mesure ; afin d’éviter les effets d’aubaine, l’objectif de réduction fixé doit tenir compte de l’évolution tendancielle des consommations d’azote minéral et aller au-delà. L’analyse des statistiques de l’UNIFA sur l’utilisation d’engrais azotés de synthèse permet de constater une baisse de 24% sur la période 1990-2012 ; cette évolution n’est cependant pas linéaire, le recours à l’azote minéral augmentant certaines années (variations qui s’expliquent en fonction des prix agricoles, et des phénomènes de stockage/déstockage d’engrais liés au climat notamment). Le graphique ci-contre illustre ce phénomène tendanciel. Fig. 10 Données statistiques brutes des livraisons d’engrais sur la période 1990-2012, source des données : UNIFA

D’après ce modèle, le montant de réduction moyen annuel de la dose d’azote livrée14 s’élève à un peu plus de 30 000 tonnes d’azote sur la période 1990-2012. En supposant une période d’obligation du dispositif CEA à 5 ans (période plus longue que pour les CEE, étant donné le caractère plus structurant des actions à mettre en œuvre sur le sujet de l’azote), on peut alors estimer à 150 000 tonnes la quantité d’azote « évitée » dans un scénario tendanciel en France pendant cette période. 12 Ex. : évaluations des résultats de la mise en œuvre d’outils de pilotage de la fertilisation, étude Pellerin, Bamière et al. (2013) sur les mesures visant à réduire les émissions de GES en agriculture. 13 Les travaux menés par I Care et le Céréopa dans le cadre de l’étude ADEME sur la vulnérabilité de l’agriculture aux prix de l’énergie permettent de convertir cette unité en économies d’énergie (Joules ou euros) 14 Cet exercice doit être observé avec prudence ; le coefficient d’ajustement de la régression ne s’élevant qu’à 41%.

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Afin de proposer un objectif suffisamment ambitieux pour accélérer la réduction et éviter les effets d’aubaine, une hypothèse de travail pourrait reposer sur un doublement de cette quantité évitée à horizon 2020 (en supposant un démarrage de la mesure en 2015). Soit la fixation d’un objectif d’économie de 300 000 tonnes d’azote sur une période de 5 ans, quantité correspondant à une baisse d’environ 15% de la quantité d’azote utilisée en 2012. Cet objectif est suggéré ici à titre de scénario indicatif : il faut garder à l’esprit que le montant finalement fixé sur la première période conservera intrinsèquement un caractère expérimental (pour rappel, le dispositif des CEE a été initié avec un objectif relativement faible, permettant aux obligés de s’approprier le système). Il pourra être ajusté sur les périodes suivantes. Contrôle de cohérence de l’objectif proposé On estime la réduction moyenne envisageable liée à la mise en œuvre des leviers d’action analysés précédemment à 15 unités d’azote par hectare (cf. fiches levier). Or les surfaces fertilisables représentent 26 millions d’hectares en 2012. En supposant une mise en œuvre des leviers d’action sur un tiers de cette surface en 5 ans grâce à la mesure CEA, on peut prévoir une économie de 130 000 tonnes d’azote minéral en 5 ans. Ce résultat est cohérent avec l’objectif fixé (+ 150 000 tonnes par rapport au scénario tendanciel).

Répartition de l’obligation L’objectif global d’économies d’azote minéral défini à l’échelle nationale doit être réparti entre les différents obligés et les différentes formes d’azote. En effet, il existe différents types d’engrais azotés de synthèse, qui n’ont pas le même poids dans la consommation nationale, ni le même contenu énergétique. Ainsi, avant d’attribuer aux vendeurs de ces produits une obligation de réduction proportionnelle au volume écoulé, on peut proposer une différenciation de l’objectif de réduction selon les formes d’engrais. Considérant la part actuelle des différentes formes d’engrais azotés dans les volumes totaux d’azote minéral vendus (statistiques de l’UNIFA15) ainsi que leur contenu énergétique (Etude ADEME Analyse de la dépendance économique de l’agriculture à l’énergie, 201216), on obtient :

Ammonitrates Urée Solution azotée

Part dans le volume d’azote livré (moyenne sur 2011-2012) 46 % 13 % 27 %

Autres engrais azotés simples Engrais composés NPK

3% 11%

Type d’engrais azoté

Contenu énergétique fabrication et transport (MJ énergie finale/kg N) 31 41 38 / 16*

* Moyenne Di Ammonium Phosphate (DAP) et Mono Ammonium Phosphate (MAP)

Fig. 11. Tableau de répartition des différentes formes d’EAS dans la consommation d’azote minéral et des consommations énergétiques associées (sources : UNIFA et ADEME, 2012)

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La répartition des ventes est relativement stable depuis les années 2000 (cf. annexe 3) La méthode de calcul du contenu énergétique des différents engrais utilisée dans l’étude ADEME est présentée en annexe 2

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Afin de cibler la mesure sur les produits qui représentent les plus fortes quantités d’azote consommé ainsi que les plus grandes consommations énergétiques, il apparaît judicieux, au vu de ces chiffres, de faire porter l’obligation sur les ventes d’ammonitrates, d’urée, et de solution azotée, qui représentent 86 % des consommations d’azote minéral et une consommation énergétique moyenne d’environ 37 MJ par kilo d’azote acheté. Le risque d’un éventuel report vers les autres types d’engrais azoté est minime car leur usage agronomique n’est pas le même et leur prix souvent plus élevé dans le cas des engrais composés. En croisant la part de volume livré et le contenu énergétique on obtient la répartition de l’obligation suivante : Type d’engrais azoté Ammonitrates Urée Solution azotée Total

Part de l’obligation attribuée

Volume d’azote (tonnes)

37% 111 000 27% 81 000 36% 108 000 100% 300 000 Fig. 12 Tableau de répartition de l’obligation entre les trois formes d’EAS ciblées

Les objectifs différenciés par type d’engrais au niveau national doivent ensuite être répartis entre les différents obligés. Cette répartition peut se faire au prorata de leur part respective sur le marché des différents produits. La condition nécessaire à cette répartition est l’accès aux volumes de vente par produits réalisés par l’ensemble des vendeurs finaux. Ces données pourront être obtenues sur la base d’un régime déclaratif à mettre en place et résulter d’une moyenne sur deux ou trois ans. A l’image des CEE, les obligations pourront ensuite être modifiées de façon marginale en fonction des changements de situation des obligés. Un seuil de ventes pourra également être défini, toutes catégories d’engrais azotés confondues, à partir duquel les obligés se verront attribuer ou non une part de l’obligation. Les vendeurs obligés pourront par ailleurs être autorisés à se regrouper en structures collectives, la somme des obligations individuelles des adhérents à la structure constituant alors une obligation collective à la charge de la structure, qui en assumera la responsabilité à la fin de la période. iii. Administration du dispositif Les obligations prévisionnelles et définitives doivent être notifiées aux entreprises concernées et publiées sur un site internet spécifique. L’Etat doit mettre en place un système de gestion et de contrôle des obligations ainsi que des certificats délivrés. Ce système pourrait par exemple être placé sous l’égide des Ministères de l’Agriculture et de l’Ecologie et géré par une direction en charge du développement des politiques agricoles. De même que pour les CEE, un registre national des certificats d’économie d’azote devra être créé pour inscrire les acteurs engagés, matérialiser les montants d’économies réalisées (comptes individuels), gérer et enregistrer l’ensemble des transactions de certificats et fournir une information publique régulière sur leur prix moyen d'échange. La tenue du registre pourra être déléguée à une société privée par convention sur une durée déterminée, comme c’est le cas pour les CEE.

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A l’échelle locale, la délivrance des certificats incomberait aux préfets de région mais pourra être déléguée aux services régionaux des ministères (Directions Régionales de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt – DRAAF ou Directions Régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement - DREAL). Ces derniers pourraient être épaulés par l’ADEME mais aussi par les agences de l’eau, entre autres agences environnementales pour l’instruction des dossiers, particulièrement sur les aspects techniques. En ce qui concerne la mise en place d’un marché d’échange des certificats, celui-ci pourra s’établir par des échanges de gré à gré (« OTC »17) ou sur une place à créer ; l’intervention de l’Etat sur ce volet du dispositif est minime. Toutefois, l’Etat jouera indirectement un rôle dans la détermination des prix des certificats, à travers la fixation du niveau d’obligations et du montant de la pénalité en cas de non-conformité à l’obligation : le prix des certificats suivra ensuite la loi du marché et variera en fonction de l’offre et de la demande. Ce prix de marché sera notamment borné par le niveau de la pénalité (niveau où il devient plus intéressant pour l’obligé de payer la pénalité que d’acheter des certificats). La délivrance des certificats devra être systématiquement soumise à contrôle des pièces justificatives des actions réalisées ainsi qu’à celui de l’exactitude des calculs d’économies attendues. Cependant, les certificats étant attribués au démarrage de l’action, et pour simplifier le dispositif, il n’est pas prévu de vérifier de façon systématique leur mise en œuvre effective sur le terrain, ni de mesurer les économies effectives d’azote qu’elles engendrent. Ce type de contrôle pourra être mis en place de manière ponctuelle et aléatoire afin de vérifier la réalisation de certaines actions. Un programme de suivi et d’évaluation du dispositif pourra par ailleurs être mis en œuvre en parallèle de son fonctionnement sur la première période (aspects administratifs, coûts, montant des obligations, montant des pénalités…), dans le but d’ajuster son calibrage en vue de nouvelles périodes. iv. Actions concernées Principes généraux L’atteinte des objectifs fixés par le dispositif passe par la mise en œuvre d’actions sur le terrain sous l’influence des acteurs obligés et éligibles. Deux voies sont distinguées pour l’obtention des certificats : • Les fiches d’opérations standardisées s’appliquent préférentiellement aux actions les plus fréquemment mises en œuvre. Elles permettent de faciliter leur montage en définissant au préalable les montants forfaitaires d’économies d’azote minéral qu’elles engendrent ainsi que les conditions d’obtention de certificats liés à leur déploiement (secteur d’application, pièces justificatives à fournir, etc.). • Les programmes d’accompagnement constituent une voie d’obtention de certificats qui s’applique surtout aux actions portées par des opérateurs variés et qui ont une cohérence globale. La comptabilisation des gains effectifs peut être plus délicate en raison du caractère indirect des programmes (par exemple, la participation financière à divers programmes de formation ou d’innovation en faveur de la maîtrise de la fertilisation azotée minérale auprès des exploitants constitue est une forme d’action valorisable sous la forme de ces programmes). Les 17

« Over-The-Counter », en dehors de la place de marché.

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impacts pourront être évalués à dire d’expert et contrôlé au terme d’évaluations générales expost. On peut toutefois également envisager l’attribution de certificats pour des opérations spécifiques qui ne seront formalisées au préalable sous aucune de ces deux voies, en cas de demandeur capable de prouver la pertinence de son action et de l’évaluation des économies qu’elle engendre. Ces opérations, généralement plus complexes, nécessiteront alors la constitution d’un dossier de demande plus approfondi. L’articulation avec la réglementation devra être prise en compte pour chaque action ; les actions devront notamment toutes aller au-delà du réglementaire. Toutes les actions « terrain », qu’elles soient déployées à l’échelle de l’exploitation, du territoire, ou de la filière, d’ordre technique ou organisationnel, sont potentiellement adaptables au dispositif (ex : transport de matière organique, développement de légumineuses,…). Leur éligibilité potentielle à la rédaction de fiche standardisée dépend ensuite de leur capacité à remplir deux conditions : • Possibilité de chiffrer les bénéfices qu’elles engendrent en unités d’azote économisées ; • Existence de moyens de contrôle de leur mise en œuvre (production de justificatifs). Le dispositif intégrera, dès sa mise en œuvre, un pool d’opérations standardisées par des fiches, accessibles à tous les acteurs obligés et éligibles. Ce groupe d’actions prédéfinies et pré-évaluées pour participer à l’objectif de réduction fixé sera ensuite susceptible d’être enrichi par la proposition de nouvelles actions standardisables, de la part de tout acteur intéressé par le dispositif, obligé, éligible, agriculteur etc. C’est cette dimension participative qui favorisera l’implication de groupes d’agriculteurs dans le dispositif : au-delà d’être les bénéficiaires finaux d’actions développées par des acteurs en amont, ils pourront faire partie intégrante de leur élaboration. Les idées de nouvelles fiches pourront par exemple découler d’initiatives de terrain ou de la retranscription d’opérations spécifiques pouvant être standardisées. Ce caractère évolutif du dispositif constitue une de ses forces car il permet de poursuivre un objectif global, via l’adaptation des solutions proposées à la diversité des situations rencontrées. Toute action étant potentiellement adaptée à l’obtention de certificats, la création de fiches d’actions standardisées devra passer par une procédure bien cadrée afin de vérifier leur pertinence et d’estimer leurs gains avant de prononcer leur éligibilité dans le cadre du dispositif. Cette procédure (portée dans le cadre du système les CEE par l’ATEE), doit nécessairement s’appuyer sur des groupes de travail pour instruire les actions. Un schéma de principe illustrant le processus de création de fiches standardisées qui pourra être suivi ainsi que les acteurs susceptibles d’être impliqués aux différentes étapes est présenté ci-dessous :

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Fig. 13. Proposition de schéma de principe de création des fiches standards CEA

Pour être validée, une fiche devra être approuvée par l’ensemble des acteurs responsables de sa rédaction et de son instruction. On regardera notamment l’articulation avec la réglementation, la performance de l’action proposée en termes d’économies d’azote minéral, l’existence de références techniques pour le chiffrage, la pertinence du calcul soumis, la situation de référence par rapport à laquelle l’action est évaluée, le gisement d’économies estimé suite à sa mise en œuvre et son caractère contrôlable. Les preuves de son efficacité, de sa disponibilité et de l’existence d’une marge de progrès réelle devront être apportées pour faire aboutir la fiche. Lien avec les leviers d’action identifiés Lors de l’analyse des leviers d’actions disponibles à l’échelle de l’exploitation, de la filière ou encore du territoire pour réduire la dépendance de l’agriculture aux engrais azotés de synthèse, quatre catégories d’actions ont émergé : 1. Les opérations d’optimisation de l'itinéraire technique qui vont vers une rationalisation de l'utilisation d'EAS, comme l’implantation de légumineuses en cultures pures, associées, ou intermédiaires, l’utilisation de produits minéraux plus efficaces, la gestion des résidus, ou encore l’ajustement de l’objectif de rendement ; 2. Les opérations de gestion de l'azote organique qui vont vers une plus grande substitution des EAS, comme le traitement et la valorisation des effluents et autres produits résiduels organiques, la facilitation des échanges, etc ; 3. Les opérations de développement des techniques et outils d'aide au pilotage de la fertilisation azotée, comme les outils de calcul de la dose prévisionnelle, les outils d’ajustement et les outils d’apports de précision ; 4. Les opérations permettant la création d'un contexte favorable à l'amélioration, au niveau des exploitations, de la performance énergétique globale liée à la fertilisation. Le tableau ci-dessous présente une évaluation de l’application potentielle des types de leviers aux voies standard et programme :

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Fig. 14. Tableau d’évaluation de l’application des leviers aux voies CEA

Les leviers se prêtant a priori le mieux à un tel exercice se trouvent en priorité dans la catégorie des outils d'aide au raisonnement et au pilotage de la fertilisation : • D’une part, le chiffrage des gains associés à ces actions est facilité par le fait qu’une mesure de la dose apportée est intrinsèquement liée à ces outils (pour ceux dispensant des conseils sur les quantités apportées), ou que les machines sont dimensionnées en fonction des pertes qu’elles évitent (pour les épandeurs et le matériel de précision). Il faut noter cependant que l’efficacité des outils dépend de plusieurs facteurs : contexte pédo-climatique, pratiques antérieures de l’agriculteur, … ; • D’autre part, ces outils ont déjà pu être testés et éprouvés, notamment par leurs utilisateurs et leurs concepteurs. Des données existent donc, construites sur la base des retours d’expériences, permettant une évaluation ex ante des gains à attendre de ces actions ; • Enfin, l’encouragement de ces actions passe quasi-exclusivement par une aide à l’investissement. Ce dernier correspondant au prix de l’outil ou du matériel utilisé (et à la formation éventuellement associée), cela simplifie la description et l’évaluation des moyens à mettre en œuvre par l’obligé pour obtenir le certificat associé.

Les leviers d’optimisation de l’itinéraire technique peuvent potentiellement être évalués en termes d’économies unitaires d’engrais azotés de synthèse ; cependant : • Cette évaluation est plus délicate que pour les outils de pilotage (absence d’implication de procédés « mécaniques » ou informatiques) et plus variable d’une exploitation à l’autre (diversité des processus biologiques sous tendus) ; • Leur déploiement n’est pas simplement conditionné par l’attribution de financements ou l’installation de machines, mais également pas un ensemble de freins contextuels et organisationnels qui relèvent du raisonnement de système de production par l’exploitant, du temps de travail nécessaire, des prix du marché et des débouchés disponibles, etc. La rédaction de fiches standardisées pour ces actions constitue une option à analyser plus profondément ; une alternative serait la voie « programme » (promotion, formation et accompagnement de la mise en œuvre des leviers), qui pourraient être initiés par des acteurs tels

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que les chambres d’agriculture, les coopératives voire de petits groupes d’agriculteurs volontaires ou des distributeurs d’engrais. Les actions de substitution de l’azote minéral par l’azote organique se matérialisent surtout par des investissements (dans des unités de traitement, de stockage, de transport…). En revanche les gains associés restent à ce stade difficiles à chiffrer18. Ce type d’action pourrait représenter un « bon candidat » à l’élaboration de fiches standardisées, à condition de mener au préalable une évaluation approfondie des économies d’EAS raisonnablement envisageables, à différencier selon le type d’installation (types de traitement/plateforme de stockage, puissance/capacité, intrants…) et le devenir des produits (catégorie, épandage, transport, vente…). Les leviers participant à la création d'un contexte favorable à l'amélioration de la performance énergétique des exploitations liée à la fertilisation19 présentent des caractéristiques qui les rendent moins adaptables au format standardisé des fiches CEA. En effet, ces derniers ne génèrent pas en eux-mêmes une réduction directe du recours aux engrais minéraux. Le chiffrage standard du gain de ces actions apparait à ce titre délicat et il pourrait alors être envisagé de mettre en place une voie « programme » pour le financement de recherches, de formations et d’innovations allant dans le sens de ces leviers. Eléments de méthode pour le chiffrage des gains associés aux actions Une fois listées les actions pertinentes pour le dispositif, l’étape suivante consiste à quantifier les économies qu’elles engendrent. La méthodologie de calcul devra être élaborée pour chaque action au sein d’un groupe de travail constitué d’experts et s’appuyer sur des données issues d’études de référence. Elle pourra s’inspirer des méthodes de calcul utilisées pour fixer le montant des CEE et devra notamment : • définir la façon la plus détaillée et la plus justifiée possible la situation de référence par rapport à laquelle sera comparée l’action, incluant son niveau de pénétration actuelle et la consommation moyenne d’azote minéral estimée avant sa mise en œuvre ainsi que le socle réglementaire associé ; • définir le potentiel d’économies annuel lié à l’action de façon standardisée ; • définir la durée de vie de l’action ; • calculer le montant d’économies d’azote minéral engendré par l’action unitaire cumulé sur l’ensemble de sa période de déroulement et actualisé, afin d’obtenir un montant final de CEA attribuable pour cette action en kg d’azote « cumac ». Le calcul qui sera employé pour l’actualisation sera le suivant : Montant de CEA en kg N cumac = économie d’azote minéral annuelle * coefficient d’actualisation On pourra considérer un taux d’actualisation de 4 % comme pour l’évaluation des actions du dispositif CEE, soit un coefficient d’actualisation égal à ∑ 1/1  0,04 , n étant la durée de vie de l’action en années en commençant le chiffrage à l’ « année zéro ». Les particularités et difficultés auxquelles l’évaluation pourra être confrontée dans le cas des CEA concernent notamment la variabilité des systèmes d’exploitation et la variété des milieux, générant une forte variation de la « productivité » des actions. 18

Sur ce sujet, voir le rapport de Denis Delcour, Pierre Rathouis (CGEDD), Philippe Balny, Muriel Guillet, François Roussel (CGAAER), « Plan d’action relatif à une meilleure utilisation de l’azote en agriculture », Juin 2013 19 Fiches concernées : « Favoriser les filières d’approvisionnement durable en EAS », « Développer les filières avales de valorisation des pratiques agricoles efficientes en engrais azotés de synthèse »

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Ces difficultés pourront être levées : • En amont, dans la définition du périmètre de l’action considéré (« secteur d’application » dans la fiche), impliquant une différenciation préalable des différents cas ; • En aval, dans le calcul du montant des économies, en proposant différents coefficients dans une même fiche, à décliner selon les situations. Un exemple de fiche CEA est présentée dans l’annexe 4 de ce document. Perspectives du dispositif en termes de fonctionnement Passée la première période « expérimentale », nécessaire à l’ajustement du dispositif, on peut envisager une extension de sa portée pour les périodes suivantes. Les voies à explorer seront les suivantes : • L’élargissement du périmètre des actions éligibles ; • L’augmentation progressive de l’objectif d’économies d’azote ; • L’inclusion progressive de nouveaux obligés, comme les industriels producteurs d’EAS par exemple ; • La graduation des sanctions pour alléger la charge de contrôle ;

d. Estimation des impacts de la mesure Il convient tout d’abord de préciser que les évaluations réalisées ci-après constituent des travaux préliminaires qui devront être affinés20 en fonction des suites données à l’étude ; elles se basent sur l’hypothèse vue plus haut d’une obligation fixée à 300 000 tonnes d’azote sur 5 ans. Il faut par ailleurs prendre en compte deux considérations qui complexifient l’évaluation de l’impact de la mise en place de certificats (d’énergie ou d’azote) : • la réduction effective correspond à l’obligation initiale : on suppose qu’il n’est pas fait recours à la pénalité et que le gain attendu des actions est effectivement constaté sur le terrain ; • la contribution du dispositif à la réduction ne peut être isolée d’autres facteurs externes, jouant également dans les choix de l’agriculteur (prix, autres dispositifs comme par exemple les MAE…). i. Bénéfices environnementaux Consommation d’énergie Les économies d’énergie ont été évaluées en considérant la quantité d’énergie nécessaire à la fabrication et au transport de chaque forme d’engrais azoté évitée (données présentées précédemment issues de l’étude ADEME Analyse de la dépendance économique de l’agriculture à l’énergie, 2012 et dont la méthode de calcul est rappelée en annexe), qu’on applique aux économies d’engrais prévues. Les résultats montrent qu’on peut envisager une baisse de consommation d’énergie finale d'environ 235 000 tonnes équivalent pétrole en 5 ans ce qui représente une réduction d’environ 2% de la consommation énergétique de la ferme France21.

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NB : l’impact énergie / GES / polluants de la mise en place des actions elle-même n’est par exemple pas évalué ici (l’impact peut être non négligeable pour la valorisation de l’azote organique notamment) 21 Consommation énergétique Ferme France = 11 millions de tep, source Prospective Agri Energie 2030

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Type d'engrais azoté

Contenu énergétique (MJ/kg N)

Ammonitrate Urée Solution azotée Autres engrais simples azotés Engrais composés NPK

Economies d'énergie (tep)

31 41 38 37 16

102 000 38 000 74 000 8 000 13 000 235 000 Fig.15 Economies d’énergie finale en tonnes équivalent pétrole liées à la fabrication et au transport des engrais azotés de synthèses économisés (1tep = 41 868 MJ)

Emissions de gaz à effet de serre Les engrais azotés de synthèse sont sources d’émissions de gaz à effet de serre à plusieurs étapes de leur cycle de vie : Fabrication et transport • Emissions de dioxyde de carbone (CO2) du fait de l’utilisation de gaz naturel comme source d’énergie et comme matière première pour la synthèse d’ammoniac (précurseur de toutes les formes d’engrais) • Emissions de protoxyde d’azote (N2O) pour la synthèse d’acide nitrique (précurseur de la forme ammonitrate) • Emissions de CO2 est liée à la consommation de carburants fossiles

Utilisation aux champs • Emissions directes de N2O du fait des processus de nitrification et dénitrification issus des transformations de ces formes d’azote supplémentaires dans le sol • Emissions indirectes de N2O suite à la lixiviation (NO3 ) et à la volatilisation (NH3 et NOx) d’une partie de ces apports, qui se redéposent plus tard et donneront lieu à la formation de ce gaz

Les estimations d’abattement d’émissions de gaz à effet de serre dû à la mise en place du dispositif CEA sont présentées ci-dessous. La méthode et les détails de calcul, présentés en annexe, se basent notamment sur les valeurs issues du guide des facteurs d’émissions pour bilan carbone de l’ADEME (2010) et du guide GES’TIM 201022. Les résultats montrent que le dispositif permettrait d’économiser environ 3 millions de tonnes équivalent CO2 en 5 ans, un peu plus de la moitié de ces gains étant liés aux étapes de fabrication et de transport des engrais23. Cette économie représente 3% du Bilan Carbone de la ferme France24.

22

ADEME, 2010. Guide des facteurs d’émissions version 6.1, chapitre 6 : prise en compte des autres produits entrants : produits servant aux activités agricoles, d’élevage, et agro-alimentaires ; Bilan carbone entreprises et collectivités ; p7. (Données issues du Guide GES’TIM, actualisées avec les Pouvoirs de Réchauffement Globaux de 2006 (CO2 : 1, CH4 : 25, N2O : 298)) ; et Gac A., Deltour L. et al., juin 2010. Guide méthodologique pour l’estimation des impacts des activités agricoles sur l’effet de serre (GES’TIM), version 1.2 ; 156 p ; p 65 à 68 (référence pour le ministère de l’agriculture et l’ADEME, qui fait référence pour le ministère de l’agriculture et l’ADEME) 23 NB : Ce calcul des quantités de GES évitées ne prend pas en compte leur substitution par d’autres formes d’azote (effluents, résidus de culture, etc.) pour lesquelles il existe également des émissions de N2O aux champs. Ainsi, on considère ici que les actions mises en place augmentent l’efficacité de l’azote, permettant de réduire la dose totale d’azote apportée. 24 Emissions de GES Ferme France = 105 millions de tonnes équivalent CO2, source CITEPA

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Fabrication et transport (CO2 et N2O en teqCO2) Ammonitrate Urée Solution azotée Autres engrais simples azotés Engrais composés NPK

857 000 142 000 418 000 48 000 138 000 1 603 000

Utilisation aux champs (N2O émissions directes en teqCO2) 646 000 182 000 379 000 42 000 154 000 1 403 000

Utilisation aux champs (N2O émissions indirectes en teqCO2) 13 000 27 000 38 000 nd 8 000 86 000

Fig. 16 économies potentielles en émissions de GES liées à la mesure CEA

Autres impacts environnementaux En termes de pollution de l’air, l’économie de 300 000 tonnes d’azote permet également une réduction des émissions d’ammoniac estimée à 15 000 tonnes de NH3. Le dispositif CEA est également susceptible de générer des bénéfices environnementaux en termes d’amélioration de la qualité des eaux et de la biodiversité dans les écosystèmes agricoles. Cependant, ces impacts ne sont pas directement corrélés aux quantités d’azote minéral apportées au système et dépendent largement des actions mises en œuvre pour réduire le recours aux engrais azotés de synthèse. Ainsi, la mise en place de Cultures Intermédiaires Pièges A Nitrates (CIPAN) pendant les périodes d’interculture ou l'allongement des rotations en alternant cultures d'hiver et cultures de printemps permettraient de réduire les pertes d’azote par lixiviation, évaluées entre 5 à 10% des apports (source GES’TIM 2010). ii. Impacts économiques : coûts et gains pour les différents acteurs de la filière La baisse des consommations d’azote minéral de synthèse engendrée par la mise en œuvre du dispositif CEA génère des bénéfices économiques mais suscite aussi des coûts, répartis entre les différents acteurs de la filière selon leur implication dans le dispositif et dans la mise en place des actions qu’il encourage. On peut ainsi distinguer différents types d’impacts économiques (en termes de revenus/charges, chiffre d’affaire et emplois), à différents niveaux selon les catégories d’acteurs. Il faut noter qu’il s’agit ici de premières estimations qu’il conviendra d’affiner dans le cadre d’une étude plus détaillée. Agriculteurs Les agriculteurs sont les principaux bénéficiaires du dispositif. En effet, les actions éligibles à certificats promues par les acteurs obligés ou éligibles génèrent des retombées positives à l’échelle des exploitations, l’atteinte des objectifs escomptés s’exprimant en termes de gains d’azote minéral et donc, principalement, d’économies de charges liées à l’achat d’engrais azotés de synthèse. Les économies engendrées par la baisse d’achats d’engrais azotés de synthèse ont pu être comptabilisées à l’échelle nationale grâce aux données des prix d’achat des différentes formes d’engrais azotés (issues de la source de cotation Terre-net25), couplées à celles de leur teneur en azote (issues des fiches techniques de composition de ces différents produits standardisés). Le tableau suivant présente les résultats de l’application de ces données aux économies d’azote issues des différentes formes d’engrais :

25

Source agritel des courtiers agricoles, http://www.terre-net.fr/marche-agricole/engrais/ammonitrate-33-5/a8

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Coût engrais (€/t engrais) Ammonitrate Urée Solution azotée Autres engrais simples N Engrais composés NPK

317 405 270 331 488

Teneur en azote de l'engrais (kgN/t engrais) 335 460 290 362 150

Coût azote des engrais (€/kgN) 0,95 0,88 0,93 0,91 3,25

Quantité d'azote économisée 138 000 39 000 81 000 9 000 33 000

Economies d'engrais (milliers d'€) 131 000 34 000 75 000 8 000 107 000 355 000

Fig. 17 Economies réalisées à l’échelle nationale liées à la réduction d’engrais azotés de synthèse

L’objectif de 300 000 tonnes d’azote minéral économisées en 5 ans permettrait donc une économie à l’échelle nationale de l’ordre de 355 millions d’euros de charges, soit 71 millions d’euros par an, dont 35 % sont des coûts énergétiques. Le dispositif permet ainsi d’augmenter la compétitivité des exploitations en réduisant leur vulnérabilité énergétique. Concernant les coûts liés au dispositif, ceux-ci se traduisent très peu à l’échelle des agriculteurs. En effet, les pertes en termes de productivité liées à la mise en œuvre des leviers d’action au niveau des exploitations sont faibles (cf. analyse des leviers proposés, on considère que les actions sont engagées par les agriculteurs uniquement dans le cas où le rendement et la teneur en protéines sont faiblement impactés), et on suppose qu’elles sont largement couvertes par les économies d’engrais réalisées lorsqu’elles ont lieu. De plus, la structure même du dispositif permet de générer une aide à la mise en œuvre des actions, par les acteurs facilitateurs que constituent les obligés et les éligibles (les actions sont ainsi cofinancées par l’agriculteur lui-même, l’obligé…). Autres bénéficiaires : fournisseurs de solution (conseil, développeurs d’outils, etc.) Le développement d’actions standardisées lié à la mise en œuvre du dispositif CEA permettra également générer des retombées positives sur l’ensemble des acteurs de la filière qui sont impliqués dans la fourniture de ces solutions, le développement d’actions d’économie d’azote influençant directement leur niveau d’activité. Parmi ces acteurs, on s’attend principalement à retrouver des structures de conseil et des instituts techniques et de recherche appliquée, qui sont les « prescripteurs » de solutions techniques, mais aussi, dans une moindre mesure, certaines organisations économiques comme les coopératives. Les bénéfices attendus pour ces acteurs s’expriment principalement en termes de valeur ajoutée et d’emplois pour le secteur. La quantification de ces bénéfices est cependant délicate, le lien entre économies d’azote et chiffre d’affaire dégagé n’étant souvent pas direct, de même que celui entre recettes et génération d’emplois. Afin d’estimer ces bénéfices, il faut donc tout d’abord estimer la répartition susceptible, par types de leviers, des actions qui seront mises en œuvre pour remplir les objectifs du dispositif, puis faire le lien, au cas par cas, entre les économies générées par type d’action, les catégories d’acteurs impactées et la valeur de ces impacts. En se basant sur l’analyse du potentiel d’adaptation de chaque catégorie de leviers à la proposition d’actions standardisées dans le cadre du dispositif CEA faite précédemment, on propose une hypothèse de 50 % des économies d’azote minéral réalisées dans le cadre de ce dispositif grâce au développement de techniques et outils d’aide au pilotage de la fertilisation. On suppose par ailleurs un gain moyen de 15 unités d’azote par hectare pour un coût de service ou d’outil de 10 euros par

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hectare et par an. Le chiffre d’affaires estimé sur 5 ans s’élève avec ces hypothèses à 100 millions d’euros. Obligés = vendeurs finaux Les distributeurs d’engrais sont les obligés du dispositif CEA. Ils financent des actions pour obtenir des certificats (ou payent des pénalités à l’Etat) et les impacts du dispositif sur ces acteurs se traduisent donc en termes de coûts. L’ordre de grandeur de niveau de financement constaté dans le dispositif CEE est de 10%, c’est l’hypothèse retenue ici. Le coût de la réduction du kg d’azote étant de 0,67€ (vu plus haut dans le cadre de la définition du niveau de pénalité), le coût global pour les obligés est évalué à 20 millions d’euros, ce qui correspond, en ordre de grandeur, à 1% du marché de l’azote en France. Pour rappel, le niveau d’obligation fixé en première période dans le dispositif des CEE avait été basé sur une hypothèse d’une contribution des fournisseurs d’énergie équivalant à 0,5% de leur chiffre d’affaire. L’impact de ces pertes sur les emplois du secteur devrait être limité et reste à estimer. Acteurs éligibles Pour les acteurs éligibles, on peut considérer que les impacts du dispositif s’équilibrent, les coûts engagés pour le financement d’actions de réduction du recours l’azote minéral sur le terrain étant normalement compensés par les revenus issus de la vente des certificats obtenus en échange de ces actions aux acteurs obligés. Etat La mise en œuvre du dispositif CEA, au-delà de son impact sur les filières, génèrera également des coûts, à la charge de l’Etat, pour le lancement puis pour l’administration et le contrôle. Ces coûts se traduisent principalement en termes de création d’emplois, pour l’instruction des dossiers de demande de CEA. 15 équivalents temps plein26 sont aujourd’hui nécessaires pour le fonctionnement du dispositif CEE en 2ème période, le coût en ressources devrait être moins élevé pour le dispositif CEA étant donné son périmètre plus restreint. La charge de travail pourrait par ailleurs se rationaliser avec un dispositif de certificat d’économies de produits phytosanitaires.

26

12 ETP au pôle national des CEE, 2 ETP à la DGEC et 1 à 1,5 ETP à l’ADEME pour l’administration du dispositif CEE, information issues d’un entretien avec Cyrielle Borde, coordinatrice CEE à l’ADEME et du Compte-rendu des journées techniques CEE des 18 et 19 septembre 2012. En première période, la charge a probablement été plus élevée (apprentissage) mais la donnée chiffrée n’est pas connue.

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e. Conclusion : Analyse prospective sur les points de force et de faiblesse Après la phase de prédéfinition des mesures, des échanges ont eu lieu avec le comité de pilotage autour des points de force et des points de faiblesse du dispositif. Une liste d’items a été présentée aux membres du comité qui ont été invités à exprimer à l’aide d’un vote leur niveau d’accord ou de désaccord avec ceux-ci. Les items indiqués ci-dessous sont ceux ayant fait l’objet d’un consensus : Forces 1. Les CEA facilitent la pénétration des bonnes pratiques au sein de la filière à travers les obligés 2. Les CEA font évoluer le métier des obligés et des éligibles vers une meilleure prise en compte de la « performance environnementale » 3. Le dispositif est évolutif, tant sur le plafond d’obligations que sur les fiches actions possibles, autorisant une première période « test » 4. Les CEA, en valorisant les efforts environnementaux, présentent une plus grande "acceptabilité" que la contrainte réglementaire 5. Le dispositif permet de renforcer les approches collectives par filière, groupe d’agriculteurs et territoire 6. Les CEA permettent de valoriser le secteur agricole vis-à-vis des tiers 7. Les CEA présentent un faible coût global d'application, mieux réparti entre les acteurs que pour d'autres mesures 8. Le dispositif est ajustable selon les objectifs (simple accompagnement des politiques agricoles ou outil plus coercitif) 9. Les CEA favorisent et valorisent la créativité via la possibilité de créer des fiches standards 10. Les CEA sont compatibles avec les autres mesures existantes dans le domaine énergétique : loi d’avenir (GIEE), plan sur la performance énergétique

Faiblesses 1. La standardisation des leviers d’action est délicate en raison des difficultés à quantifier des gains forfaitaires 2. La mise en œuvre d’un nouveau mécanisme de marché est complexe 3. Le dispositif est difficile à comprendre pour les obligés voire les agriculteurs 4. Les coûts du suivi et du contrôle des actions mises en œuvre au titre du CEA sont potentiellement élevés 5. Les coûts administratifs pour les obligés sont importants 6. Le dispositif est "contournable" par les agriculteurs en capacité d'importer directement leurs engrais

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III.

Mesure Fonds azote et appels à projets a. Principe d’un couplage des dispositifs « fonds azote » et « appels à projets »27

En s’inspirant du principe des appels à projets (AAP) du Fonds Chaleur, créé en 2009 pour contribuer aux objectifs du Paquet européen climat-énergie (contribution des énergies renouvelables à hauteur de 23% des consommations énergétiques d’ici à 2020), la mise en place d’un système d’AAP lié à un Fonds Azote pour encourager l’économie de fertilisants azotés de synthèse permettrait de : • • • •

Fixer, sur une période donnée (ex : 5 ans), un montant forfaitaire d’aides (dénommé « fonds azote ») destiné à financer des projets de réduction de la dépendance énergétique par l’optimisation des pratiques de fertilisation azotée ; Définir, par le biais d’un ou plusieurs cahiers des charges, les types de projets qui seront éligibles aux aides du fonds azote, ainsi que leurs secteurs d’application ; Répartir les aides décidées au niveau national et/ou régional à travers le lancement d’appels à projets entre les plus performants, sur la base de l’instruction des dossiers soumis ; Attribuer les aides pour l’exécution des projets retenus, suite à vérification de leur mise en place et contrôle régulier de leur performance.

Le principe du dispositif est résumé sur le schéma ci-dessous :

Fig. 18. Schéma de principe du fonctionnement de la mesure Fonds Azote / AAP

27

Sur le modèle du Fonds Chaleur et appels à projets BCIAT.

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b. De la pertinence de la création d’un dispositif d’appels à projets pour la réduction de la dépendance énergétique liée à la fertilisation azotée i. Intérêt d’un tel dispositif pour la problématique L’intérêt du dispositif de fonds azote couplé à un système d’appels à projets pour améliorer l’autonomie énergie-azote des exploitations agricoles réside dans le fait qu’il permet conjointement : • D’encourager les actions qui permettent effectivement une meilleure gestion de la fertilisation azotée et notamment augmenter l’efficience de l’azote minéral de synthèse (actions sélectionnées et évaluées sur leur performance) ; • De favoriser des actions collectives de terrain, en privilégiant les projets multi-acteurs sur les territoires et privilégiant les interactions entre l’amont et l’aval des filières, permettant ainsi de lever les freins contextuels au développement de solutions à l’échelle des exploitations ; • De faire émerger la meilleure gouvernance possible pour le développement des différents projets, en impliquant l’ensemble des acteurs concernés dans la chaîne de décision afin d’éviter les éventuels blocages à l’amont et à l’aval ; • De poser des exigences qui sont évolutives et adaptables en fonction des retours d’expérience et des nouveaux enjeux constatés à travers une redéfinition annuelle des cahiers des charges. • De laisser la place à l’innovation en ciblant les AAP sur des projets favorisants des principes émergents ou rencontrant des difficultés structurelles dans leur développement (ex : AAP ciblé sur les filières de gestion collective de l’azote organique). ii. Adaptation de la mesure au secteur agricole et compatibilité avec les dispositifs existants Le financement d’actions sur la base d’appels à projets apparaît être un dispositif pertinent et adapté à la problématique de réduction de la dépendance énergie-azote de synthèse dans le secteur agricole à plusieurs égards : • La problématique de la gestion optimisée du cycle de l’azote est complexe et nécessite de ce fait une approche par projets, permettant de combiner des solutions nombreuses et variées, adaptées à la diversité des situations rencontrées, et permettant la réduction effective de la dépendance énergétique des exploitations liée à la fertilisation utilisant des engrais de synthèse. Or, le dispositif AAP « Energie Azote » serait ouvert sur le plan des actions qu’il permettrait d’encourager, tout en restant ferme sur leur sélection, autrement dit en ne retenant de ces dernières que les plus performantes. • Des actions pour la gestion de la fertilisation azotée de synthèse existent dans le secteur agricole, mais leur mise en œuvre peut se heurter à des freins : o d’ordre contextuel d’une part, matérialisés par des blocages à l’amont et à l’aval sur la chaîne de production (ex. du développement de légumineuses et de la nécessité de développer conjointement la sélection de semences et la valorisation de la production en nutrition humaine ou animale), o et d’ordre économique, d’autre part, matérialisés par les tailles d’investissement requis ou le risque de pertes de rendement ou de qualité liés à un changement de pratiques sur l’exploitation (ex : investissement dans une unité de méthanisation, mais aussi modification de l’assolement et des rotations). Un système d’AAP couplé à un fonds azote constituerait en ce sens une réponse adaptée, le financement par projet permettant d’une part, d’adapter les niveaux d’aides en fonction de la plus ou moins grande facilité de mise en œuvre, y compris

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financière, et, d’autre part, de simplifier la gestion administrative en évitant de devoir mobiliser des dispositifs de financement dédiés à chacune des actions du projet Cependant, un tel dispositif présente aussi certains inconvénients structurels, qui peuvent remettre en question son opportunité s’ils ne sont pas considérés et résolus en amont. Son fonctionnement est basé sur l’existence recettes financières, regroupées sous la forme d’un fonds azote, dédiées au financement des projets. Au vu de la situation des finances publiques actuelle, il faut rechercher des recettes nouvelles ou l’accroissement de recettes existantes, par exemple : o Valorisation de fonds spécifiques : ex. le plan EMAA prévoit un montant de 10 millions € o Redevance pollutions élevage de l’Agence de l’Eau pour des projets expérimentaux de gestion collective de l’azote o Comptes d’affectation spéciale o Redevance azote ou taxe azote28 o Pénalités issues d’un dispositif de Certificats d’Economies d’Azote

NB : Seules les hypothèses de sources de financements seront abordées dans la présente étude. La faisabilité de l’allocation de ces sources devra faire l’objet d’une analyse approfondie ultérieure. En effet, basée sur l’allocation de subventions, la mesure sera nécessairement soumise à encadrement communautaire, comme l’ensemble des aides d’Etat, rendant ainsi obligatoire l’observation d’un ensemble de règles définies au niveau européen et susceptibles de contraindre son application (plafonnement des aides, etc.). Par ailleurs, la compatibilité de la mesure avec les autres dispositifs de soutien existant à l’échelle européenne ou nationale (MAE système, PMBE, PVE, subvention de fonctionnement des GIEE, aides des agences de l’eau, etc.) sera à définir précisément, afin de limiter les effets d’aubaine (ex : non éligibilité de projets bénéficiant déjà du plafond d’aides dans le cadre de ces dispositifs).

c. Premiers éléments de fonctionnement de la mesure Cette partie a pour objet de dessiner les premiers contours d’un dispositif d’appels à projets fonctionnel, en proposant un premier chiffrage des moyens financiers pouvant être alloués, en identifiant les différents acteurs à impliquer et en proposant des premières pistes pour l’organisation administrative et le suivi de ce dispositif, ainsi qu’en menant une première analyse des actions qui seraient susceptibles d’être éligibles à financement, dans l’optique de la conception de cahiers des charges d’appels à projets. Ce dernier point fera, en particulier, le lien avec la phase précédente de l’étude portant sur le recensement et l’évaluation des leviers d’action permettant de réduire la dépendance énergétique des exploitations agricoles. i. Création et alimentation d’un Fonds Azote Méthodologie de fixation des objectifs Afin d’aider au développement d’actions de réduction de la dépendance énergétique par le financement d’une sélection de projets sous forme de subventions, il faut définir au préalable le 28

si création envisagée par la nouvelle loi d’avenir agricole présentée en novembre 2013

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montant global de subventions disponible à cet effet, sur une période donnée. A l’image du fonds chaleur, on peut envisager la dotation du fonds azote sur une période de 5 ans, entre 2015 et 2020 par exemple (en supposant un démarrage de la mesure au 1er janvier 2015). En ce qui concerne le montant alloué, sont présentés ici, à titre d’exemple, deux types de calculs préliminaires pouvant être menés pour établir le niveau de moyens disponibles au financement de ces actions. •



Calcul 1 : basé sur la contribution attendue d’une mesure qui serait couplée à la création du fonds, destinée son alimentation régulière : il s’agit ici d’estimer les revenus envisageables à l’échelle nationale et sur la période considérée d’un dispositif « source » et de fixer sa contribution au financement du fonds azote Calcul 2 : basé sur le recensement a priori du nombre et du volume de projets à subventionner étant entendu un niveau d’aides donné: il s’agit ici d’estimer le coût moyen d’un projet de ce type sur l’ensemble sa durée de vie et de fixer la contribution attendue du dispositif au financement de ce coût

La deuxième méthode implique l’utilisation d’un coût moyen de l’économie d’azote liée à la mise en place d’actions de réduction de la dépendance énergie-azote dans le cadre du dispositif. Etant donné la diversité des types d’action envisageables et leurs durées de vie différentes, il s’avère difficile d’estimer une moyenne de ce coût sur l’ensemble des actions. Il sera alors plus simple de conserver l’approche de définition de moyens financiers, sur laquelle la mesure est intrinsèquement fondée (fonds azote alloué au financement de projets), en se basant plutôt sur un calcul du 1er type. Approfondissement du 1er calcul Afin de fixer une dotation plausible du fonds azote sur une période de 5 ans, il faut au préalable définir les sources de financement envisageables pour ce fonds, ainsi que les revenus qui peuvent en être dégagés. Comme évoqué en introduction, il est souhaitable de coupler une mesure « source » destinée à l’alimentation régulière du fonds azote au dispositif. Plusieurs mesures sources sont envisageables à cet égard, qui seront présentées par la suite. Ici sera proposée, à titre indicatif, la fixation d’un objectif basé sur une mesure de redevance « énergie-azote ». En effet, c’est cette dernière que le comité de pilotage a proposé d’étudier de manière détaillée dans le cadre de cette étude, en tant que mesure pouvant complémenter le dispositif d’appel à projet..

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La redevance azote (encore hypothétique à l’heure actuelle29) qui pourrait alimenter le dispositif peut se dimensionner comme suit, en se basant sur les expériences de taxation de l’azote qui ont été développées dans les pays nordiques dans les années 90, et en les adaptant de manière à prendre en compte les particularités d’une redevance sur une taxe et à pouvoir évaluer des recettes envisageables de façon simple : • •



Prélèvement applicable sur les ventes d’engrais azotés de synthèse (au niveau des distributeurs d’EAS, ou des industriels producteurs d’EAS), cette solution aurait potentiellement une répercussion sur l’augmentation des prix à l’achat pour les agriculteurs ; Montant de la contribution basé sur le prix d’achat d’une unité d’azote minéral, et peu élevé par rapport à ce dernier, le but n’étant pas ici d’introduire un « signal prix » pour réduire la consommation (faible élasticité de la demande au prix), contrairement à la taxation, mais bien de collecter des fonds pour une contribution à la mesure d’appels à projets. 3 scénarios peuvent alors être proposés : o Scénario 1 : 1 % du prix d’achat des engrais (Fourchette basse) o Scénario 2 : 3 % du prix d’achat des engrais30 o Scénario 3 : 5 % du prix d’achat des engrais31 (Fourchette haute) Intégralité des recettes versées au Fonds Azote

On évalue ensuite, sur cette base, les recettes envisageables dans les 3 scénarios de redevance, afin de proposer une indication de montant pour la dotation du Fonds Azote : Calcul du montant du Fonds

Scénario A

Scénario B

Scénario C

1€

1€

1€

2 000 000

2 000 000

2 000 000

Taux de contribution (%)

1%

3%

5%

Montant du Fonds (€/an)

20 M€

60 M€

100 M€

Montant du Fonds sur 5 ans

100 M€

300 M€

500 M€

Coût approché des EAS (€/ kg N minéral) Ventes globales d’EAS (t N minéral/an)

Fig 19. Scénarios de dotation du fonds azote A titre de comparaison des efforts attendus, le bilan du fonds chaleur (4,5 Milliards € par an sur 5 ans pour une facture énergétique de 60 Mds € annuels soit 7,5 %) sur son volet appels à projets « Biomasse Chaleur Industrie Agriculture et Tertiaire », a permis entre 2009 et 2012 de remplacer de 880 ktep par an de consommations d’énergie fossile (soit une économie équivalente d’importation d’énergie estimée à 300 millions € annuels) avec un montant d’aide de 651 millions d’€, soit 740 € d’aide par tep économisées. (cf. partie c.)

29

Au 12 novembre 2013 Montant de taxation le plus faible jamais utilisé, appliqué en Finlande entre 1976 et 1995 31 Taxation moyenne utilisée (taux appliqué en Norvège entre 1990 et 1999, en Suède entre 1985 et 1993) 30

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Identification des sources de financement envisageables Le calcul de la dotation possible du Fonds Azote sur une période de 5 ans proposé ci-dessus s’est basé sur l’hypothèse d’un couplage de cette mesure à la mise en place d’une redevance azote sur les ventes d’EAS (hypothèse la plus simple). D’autres formes de mesures sources sont cependant envisageables pour l’alimentation de ce fonds, qui peuvent être associées les unes aux autres. On peut ainsi suggérer : •

• •

Une redevance azote appliquée, non plus aux ventes d’EAS, mais à leur contenu énergétique (au niveau toujours des distributeurs ou des producteurs), ou encore appliquées aux émissions ou pertes azotées sous diverses formes dans l’environnement (au niveau des exploitations agricoles), avec, par exemple, un calcul d’assiette sur les excédents d’azote dans le sol en fin de campagne32 Une affectation des recettes générées par la perception de pénalités dans le cadre d’une éventuelle mesure d’allocation de quotas carbone aux agriculteurs ou de permis sur l’utilisation d’EAS, leur contenu énergétique, ou encore les pertes azotées engendrées suite à leur utilisation Une affectation d’un certain pourcentage de l’enveloppe budgétaire du ministère de l’agriculture, via la création d’un compte d’affectation spéciale ou la réallocation d’une partie du compte d’affectation spéciale pour le développement agricole et rural (CASDAR). Ce dernier a été crédité sur les 3 dernières années d’une enveloppe avoisinant les 110 millions d’€ par an.

Enfin, on peut envisager un couplage des aides du fonds azote avec d’autres sources d’aides déjà existantes pour le financement de certains projets : combinaison avec des crédits de la Région, du FEDER, du PMBE ou du PPE. NB : Une piste envisagée et qui n’a pas été retenue par le comité de pilotage était l’affectation des recettes générées par la perception de pénalités dans le cadre d’une mesure CEA, payées par les différents obligés en cas de non respect des obligations fixées. En effet on envisage que les obligés remplissent leur obligation et qu’il n’y ait donc pas de pénalités. Enfin, le niveau d’aides alloué au total devra impérativement respecter les règles de l’encadrement communautaire concernant le cumul des aides publiques. ii. Allocation des moyens du fonds du Fonds Azote selon un mécanisme d’appels à projets Les moyens financiers fixés à l’échelle nationale sur une période donnée doivent ensuite être répartis entre différents projets de réduction de la dépendance énergétique via des économies d’intrants azotés, potentiellement candidats à subvention. La méthode la plus adaptée pour opérer cette répartition de façon à promouvoir les projets jugés d’intérêt prioritaire, soit les plus pertinents pour répondre à l’enjeu de réduction de la dépendance énergétique des exploitations (par exemple les plus efficaces en termes d’économies d’azote minéral, les plus efficients en termes de valorisation des aides attribuées, ou encore les plus innovants ou les plus susceptibles d’être suivis et développés par la suite), est le lancement de différents appels à projets orientés selon ces critères. Cette partie a

32 Si sur son principe la création d’une taxe sur les risques de pertes d'azote dans l'environnement, aurait le mérite d’être beaucoup plus juste que la simple taxation sur les achats d’engrais azotés, elle serait toutefois beaucoup plus complexe à mettre en œuvre.

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pour objet la proposition de méthodes d’allocation des fonds disponibles, dans le but de répondre au mieux à l’enjeu adressé. Principe général d’identification, de sélection et d’évaluation des projets éligibles Identification : conformité aux exigences de cahiers des charges A l’image du fonds chaleur, on peut envisager deux types de dispositifs d’AAP : un à l’échelle nationale, et un décliné au niveau régional. • Le dispositif d’appels à projets national pourra concerner les projets de grande envergure, permettant les économies d’EAS grâce à l’organisation des acteurs au sein des filières ou de territoires différents. On envisage par exemple la création de systèmes de transfert des effluents d’une région à l’autre, ou encore le développement d’installations de traitement par compostage avec aération forcée, couplée ou non à des systèmes de récupération de l’azote minéral par stripping ayant des capacités importantes. Cet appel à projets pourra être reconduit de façon annuelle, et adressera préférentiellement des projets non spécifiques, c’est-à-dire susceptibles de concerner une grande partie du territoire national. Il sera orienté en fonction des priorités définies par le gouvernement au niveau national, en matière de types d’actions d’économie d’EAS à promouvoir préférentiellement. • Le dispositif d’appels à projets régionaux, quant à lui, pourra cibler, par la définition de différents cahiers des charges au niveau régional, des projets de plus petite taille, et spécifiques à certains enjeux territoriaux particuliers. Il permettra ainsi, par des préconisations ou critères propres à chacun de ces cahiers, de prendre en compte des spécificités ou volontés régionales. Cette déclinaison régionale doit permettre répondre à la diversité des situations rencontrées en proposant des solutions adaptées à une échelle plus fine. Les appels à projets à ce niveau pourront aussi être lancés sur une base annuelle. Dans les 2 situations d’appels à projets, les cahiers des charges établis pourront à chaque fois concerner un ensemble d’actions variées, regroupées par types, en prenant soin de définir dans chaque cas les critères d’éligibilité et le montant des aides pouvant être associés à ces actions. Pourront par exemple être aidés à la fois : • Des projets impliquant un changement d’itinéraire technique, • L’organisation ou le développement de filières spécifiques, • L’investissement dans du matériel particulier (amélioration des techniques d’épandage, traitement des effluents...), • … En ce qui concerne l’éligibilité de ces actions, les critères discriminants devront être décrits, par catégories de projets, dans les cahiers des charges les proposant. La faisabilité de l’atteinte des économies d’azote envisagées par le projet, ainsi que la proposition d’une méthode de suivi des économies réalisées seront des conditions sine qua none, mais d’autres critères comme les montant d’investissements minimum et maximum du projet, ainsi que le secteur d’application de ce dernier, ou encore le montant maximal d’investissement... Les bénéficiaires éligibles pour la mise en place de ces projets pourront eux aussi être de nature variée, afin de favoriser la mise en place d’actions à plusieurs échelles, au niveau des filières comme des territoires. Ainsi, les agriculteurs pourront déposer des demandes de subventions pour le 40 / 132

développement de projets, tout comme les chambres d’agricultures et les collectivités, les groupements agricoles, ou encore les distributeurs et industriels en amont et en aval de la production (approvisionnement et commercialisation/transformation), comme les coopératives, les fabricants d’engrais, ou les Industries Agro-Alimentaires. Devront en revanche être exclus d’emblée du dispositif d’aide, afin d’éviter les effets d’aubaine, l’ensemble des projets bénéficiant déjà d’une aide, ou faisant déjà l’objet d’une obligation, dans le cadre d’un autre dispositif (exemple : action recevant des certificats dans le cadre d’un dispositif CEA). Sélection : critères de performance et de pertinence Afin d’être considéré pour l’attribution de subventions, chaque projet candidat devra faire l’objet de la constitution d’un dossier de demande d’aides dans le cadre de l’appel à projets, adressé à l’organisme instructeur dans les délais impartis. Le contenu de ces dossiers devra être précisé, pour chaque type d’action, dans une fiche d’instruction à remplir par le porteur de projet, annexée au cahier des charges. Parmi les éléments qui pourront être demandés, se trouvent les caractéristiques générales du projet (lieu de développement, acteurs impliqués, calendrier de réalisation, etc.), ainsi que les critères d’évaluation de sa pertinence dans le cadre de l’appel à projets (respect des conditions d’éligibilité, économies d’azote envisagées, coût de développement, etc.). Dans le cadre d’une enveloppe limitée, les projets respectant les critères d’éligibilité devront ensuite être sélectionnés et départagés sur la base d’autres critères, permettant d’évaluer à la fois leur performance et leur pertinence pour répondre à l’enjeu adressé. Les caractéristiques qui pourraient être considérées à cet effet seraient les suivantes : •

L’efficacité en termes d’économies d’azote minéral (gains potentiels en tonnes d’azote minéral sur la durée de vie du projet)



La performance économique du projet (calcul des ratios :



La performance énergétique du projet (ratio :

€  é   é é €  é ) !"33 é é

€   

ou  é é)

Le jury de sélection devra disposer d’éléments quantitatifs pour apprécier la crédibilité des gains annoncés et comparer la performance des différents projets présentés. •

• •

33

Les projets favorisant le développement d’innovations technologiques ou organisationnelles, permettant la structuration de filières par l’implication d’acteurs variés à plusieurs niveaux, en amont comme en aval de l’exploitation. Ces caractères innovant du projet devront être considérés, mais non primordiaux. En effet des projets non finançables par d’autres fonds, devraient pouvoir être étudiés. Les projets construits autour d’une gouvernance collective à l’échelle d’un territoire (groupement d’agriculteurs, etc.) Les projets susceptibles de favoriser la pénétration d’une solution à moyen terme au sein des pratiques traditionnelles (valeur exemplaire, potentiel de couverture élevé)

TEP : Tonne Equivalent Pétrole, unité de conversion énergétique

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Les projets rapidement opérationnels générant des bénéfices immédiats, ou bien ceux dont les bénéfices seront observables sur le long terme (notamment après la cessation des aides)

Evaluation : méthode de calcul des aides Les aides du Fonds Azote seront attribuées aux projets considérés comme les plus performants sur les aspects techniques, économiques et environnementaux : des lignes directrices pour le calcul de ces aides devront être fournies dans les cahiers des charges d’appels à projets, mais leur montant pourra ensuite être ajusté lors de l’instruction des dossiers candidats. A l’image du fonds chaleur, 2 régimes d’aides pourraient être fixés : •

une aide forfaitaire maximale, définie pour chaque type d’action, qui pourra être attribuée directement pour les projets de petite taille. Les montants forfaitaires d’aide (minimal et maximal) pouvant être alloués à chaque type d’action seront définis au préalable dans les cahiers des charges, estimés par des groupes d’experts à partir des références existantes sur le terrain et dans la bibliographie, sur la base des coûts et gains visiblement engendrés par la mise en œuvre de ces actions de réduction du recours aux EAS.



une aide calculée sur la base de l’analyse économique du projet candidat, pour les projets de plus grande envergure, pouvant être bornée par des seuils d’aide minimal et maximal

Le montant des aides pourra être fixé en

€   é é

par le projet, sur une période donnée

(exemple : 5 ou 10 ans34). C’est cette unité qui paraît en effet la plus appropriée pour répondre à l’enjeu adressé, visant la performance des actions pour réduire la dépendance énergétique des exploitations, car elle permet de soutenir ces actions en fonction de leur efficacité, apportant une aide conditionnée à la quantité d’azote minéral économisée par le projet, plutôt qu’à la valeur de l’investissement qu’il implique. En ce qui concerne la réalisation de l’analyse économique des projets, pour ajuster le niveau d’aide fixé dans les grilles indicatives des cahiers des charges pour chaque action, elle devra s’appuyer sur les critères suivants : •

l’équilibre économique du projet (coûts – bénéfices et rentabilité à terme)



l’efficience des aides publiques (  é é)



€  é

le respect des règles d’encadrement communautaire (fixant un taux d'aide maximal sur l’assiette éligible)

Le niveau optimal d’aide ainsi fixé par le calcul correspondra à un montant d’aides cumulées maximal, qui pourra soit être apporté en totalité par le Fonds Azote, soit en combinaison avec d’autres fonds structurels (cf. partie précédente). 34

Les aides du fonds chaleur (en €/tep d’ENR produite), sont affichées sur une durée de 20 ans, pour des projets d’installation de production d’ENR. Dans le cadre du Fonds Azote, les projets considérés seront a priori moins structurants, peu d’actions nécessitant de tels investissements dans des installations seulement rentables à long terme (ex : installations de méthanisation ou autres installations de traitement des produits résiduels organiques).

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Administration du dispositif et suivi des performances La gestion du Fonds Azote et l’instruction des dossiers de candidature pourra être confiée à un organisme d’Etat ayant une action au niveau national (lancement annuel d’un appel à projets national) et régional (dispositif décentralisé d’appels à projets régionaux). La gestion du fonds par cet organisme au niveau régional pourra se faire en synergie avec les Régions. Les différents jurys d’appels à projets pourront par exemple se réunir 1 à 3 fois dans l’année. Les dossiers de candidatures, quant à eux, pourront être déposés une à plusieurs fois par an de façon progressive, jusqu’à la date butoir fixée par l’organisme gestionnaire ; date à partir de laquelle leur classement sera réalisé. La réalisation préalable d’une étude de faisabilité sera nécessaire à l’instruction des dossiers pour chaque projet soumis. Celle-ci devra réunir l’ensemble des éléments requis dans la fiche d’instruction correspondante, définie pour chaque action dans le cahier des charges. Toute demande d’aide ne pourra ainsi être faite qu’une fois un « avant-projet » défini de manière détaillée. L’instruction des dossiers permettra à l’organisme gestionnaire du fonds de définir le montant de l’aide à apporter aux projets retenus. Cependant, ce niveau de subvention pourra être conditionné à la performance effective du projet, constatée au cours de sa réalisation. On peut ainsi envisager un versement de l’aide en plusieurs paiements35 : • • •

un versement au moment de la signature du contrat avec l’organisme gestionnaire (sur présentation d’une garantie bancaire par les porteurs de projets), un versement au moment du démarrage du projet (réception de matériel acheté, concrétisation des premières transactions entre acteurs, etc.), et le versement du solde sur présentation des résultats effectifs d’économies d’azote minéral permises par le projet (après une certaine durée de fonctionnement, de 1 ou 2 ans par exemple). Le montant du solde36 pourra ainsi être calculé au prorata des économies effectivement réalisées par le projet la première année, par rapport à l'engagement initial du porteur de projet.

L’organisme gestionnaire pourra par ailleurs se réserver le droit de se faire rembourser la totalité des aides versées si les économies moyennes d’azote minéral réalisées sont nettement inférieures (par exemple de 50 %) à l’engagement initial pris sur une première période. Ce conditionnement des aides au suivi des performances (sous réserve de sa faisabilité au nieau de l’encadrement des aides) permettrait d’offrir une garantie supplémentaire à l’efficacité des projets soutenus. Cependant, il nécessiterait la mise en place d’une méthodologie de comptage des économies d’azote minéral réalisées dans le cadre de chaque projet proposé, afin de permettre le suivi de ses performances. Or cette dernière pourra être plus ou moins évidente à réaliser selon les différents types d’action susceptibles d’être encouragées dans le cadre du dispositif, une des raisons étant que certaines d’entre-elles, bien que pertinentes pour répondre à la problématique adressée, n’engendrent pas des gains directement mesurables (structuration d’une filière de commercialisation des légumineuses par exemple). Une certaine vigilance sera donc nécessaire sur ce point, afin de ne pas défavoriser d’emblée, dans le processus de sélection, certains types de projets dont l’intérêt est 35

Ces règles pourraient être adaptées en fonction de la durée de vie du projet. Ainsi, un versement en 3 fois serait plus adaptable à un projet sur 5 ans. 36 Celui-ci est fixé à 20% du versement total pour les actions financées dans le cadre du Fonds chaleur

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avéré, mais dont le chiffrage des gains générés ne peut être proposé ni suivi de façon fiable. Des exigences différentielles pourront ainsi être fixées, en fonction du type de projet candidat et de son échelle de mise en œuvre (exploitation ou filière/territoire). iii. Lien avec les leviers d’action identifiés en 1ère phase de l’étude Lors de l’analyse des leviers d’actions disponibles à l’échelle de l’exploitation, de la filière ou encore du territoire pour réduire la dépendance de l’agriculture aux engrais azotés de synthèse, quatre catégories d’actions ont émergé : • •

• •

Les opérations de gestion de l'azote organique qui tendent à améliorer la complémentarité effluents d’élevage et EAS, comme le traitement et la valorisation des effluents avec d’autres produits résiduels organiques, la facilitation des échanges intra et inter-territoriaux, etc. Les opérations d’optimisation de l'itinéraire technique qui vont vers une rationalisation de l'utilisation d'EAS, comme l’implantation de légumineuses en cultures pures, associées, ou intermédiaires, l’utilisation de produits minéraux plus efficaces, la gestion des résidus, la mise en place de variétés de cultures plus efficientes en azote. Les opérations de développement des techniques et outils d'aide au pilotage de la fertilisation azotée, comme les outils d’aide à la décision pour l’ajustement des apports en cours de végétation, ainsi que les matériels d’épandage de précision ; Les mécanismes permettant la création d'un contexte favorable à l'amélioration, au niveau des exploitations, de la performance énergétique globale liée à la fertilisation.

Parmi l’ensemble des 28 leviers répertoriés, 24 sont potentiellement actionnés par la mesure d’AAP du Fonds Azote. Les leviers concernant le choix de cultures et de variétés cultivées au niveau de l’exploitation, ou encore l’anticipation de la demande en alimentation humaine et animale ne s’actionnent a priori pas par ce biais. Cela s’explique, dans le premier cas, par des actions à caractère très ponctuel, impliquant un processus de décision à petite échelle, ce qui rend le niveau d’influence de financements sur ce type d’action assez faible et, dans le second cas, à l’inverse, par un niveau d’organisation requis à très grande échelle, rendant ce type d’action faiblement maîtrisable par le biais d’appels à projets. Les premiers leviers pourraient être actionnés avec une action collective (groupe semencier privée ou coopérative investissant dans la recherche de variétés plus efficiente sur la transformation de l’azote). Ce bon potentiel de recouvrement des d’actions confirme le caractère ouvert du dispositif d’appels à projets, et permet d’envisager, à première vue, l’encouragement de solutions de toute nature par son biais, permettant ainsi son adaptation à la diversité des situations rencontrées. Cependant, l’encadrement nécessaire des projets recherchés à travers la définition de cahiers des charges d’appels à projets peut, dans les faits, limiter la variété apparente des actions susceptibles d’être encouragées dans le cadre de ce dispositif. En effet, afin de pouvoir rendre une action éligible à subvention, il est nécessaire de pouvoir définir, au préalable, de manière précise et plus ou moins standardisée, ses conditions d’application, ses bénéfices en termes d’unités d’azote minéral économisées, et ses coûts globaux, afin d’estimer, de manière raisonnable, le montant d’aides attribuables qui lui permette d’atteindre l’équilibre financier, tout en étant récompensée à hauteur de ses performances.

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Ainsi, les leviers qui semblent répondre au mieux à ces conditions pour devenir candidats à subventions dans le cadre des appels à projets du Fonds Azote se trouvent en priorité dans la catégorie des actions de complémentarité entre l’azote organique et minéral : •



Ces dernières se concrétisent surtout par des investissements (dans des unités de traitement, de stockage, de transport…), et se déclenchent facilement par l’attribution de financements. Leur coût est facilement estimable ou mesurable (possibilité d’établir une grille de coûts en fonction des différents types d’installations mises en place et de leurs capacités, à travers une étude de marché par exemple). Par ailleurs ces leviers favorisent l’action collective au niveau d’un territoire, en incitant les agriculteurs au regroupement (développement d’installation en commun, logistique et gestion collective, mutualisation des coûts et des risques, partage des bénéfices), ou encore en favorisant la structuration de nouvelles filières (mise en relation de plusieurs acteurs à différents niveaux pour organiser l’approvisionnement puis les débouchés des produits d’une installation, développement des échanges, etc.).

L’organisation collective et intégrée impliquée par ce type de leviers et la disponibilité des données permettant l’évaluation de leur coût de façon standardisée en fait de bons candidats au lancement d’appels à projets allant dans leur sens. En revanche, les économies d’EAS engendrées par ce type d’actions sont difficilement mesurables et vérifiables, en raison notamment de leur caractère indirect. Une étude approfondie sera donc nécessaire sur ce point, permettant de différencier les gains envisageables par type d’installation (types de traitement, présence d’une plateforme logistique, puissance et capacité annuelle de traitement, intrants, etc.) et selon le devenir des produits (catégorie de fertilisant, facilité d’épandage, de transport, prix de vente…). Une autre solution pourra être la détermination d’une économie forfaitaire par type de projet, associée à la détermination d’un crédit qui fera l’objet d’un conditionnement, non pas à l’unité d’azote minéral réellement économisée, mais à un indicateur du niveau de fonctionnement de l’installation subventionnée. La mise en place d’un observatoire national des ressources et échanges d’effluents organiques pourrait accompagner ces démarches par une meilleure connaissance des stocks et flux pour ces produits, relativement mal connue à l’heure actuelle. Des observatoires régionaux existent, mais avec peu de liaisons entre eux. L’UNIFA est en cours de réflexion sur ce dossier ainsi qu’Arvalis et ONIDOL avec le projet Cartofa37.

37

Cartographie dynamique par département des gisements français de biomasse forestière et agricole

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Les leviers d’optimisation de l’itinéraire technique peuvent aussi potentiellement être de bons candidats à la formalisation d’appels à projets dans la mesure où : •



Ils peuvent faire l’objet d’une évaluation en termes d’économies unitaires d’engrais azotés de synthèse a priori et a posteriori (mesure des gains effectifs), bien que cette évaluation soit variable d’une exploitation à l’autre (diversité des processus biologiques sous tendus) et parfois délicate (estimation nécessaire des gains à partir d’une situation de référence à définir). Leur déploiement est conditionné par l’attribution de financements ou l’installation de machines, ou encore par un ensemble de freins contextuels et organisationnels (raisonnement du système de production par l’exploitant, temps de travail nécessaire, prix du marché et débouchés disponibles), qui pourront aussi être en partie levés par une mesure d’appels à projets, dans le cas où ce dernier choisira de favoriser les projets à gouvernance collective ou intégrés dans leur territoire : implication de plusieurs agriculteurs sous forme de « groupes pilotes », permettant la levée des freins sociologiques et organisationnels au niveau des exploitations par exemple, ou encore implication des développeurs à l’amont et des distributeurs à l’aval, afin de lever les freins au changement de pratiques liés aux conditions de marché.

Les leviers se trouvant dans la catégorie du raisonnement et de l'aide au pilotage de la fertilisation sont aussi susceptibles de faire l’objet de subventions dans le cadre de la définition de cahiers des charges d’appels à projets, dans la mesure où ils se prêtent facilement à l’exercice de chiffrage des gains qu’ils engendrent (mesure des gains associée à l’utilisation de ces outils et existence de retours d’expérience), et où les coûts associés à leur mise en œuvre sont précisément mesurables (investissement correspondant au prix de l’outil ou du matériel utilisé), cependant : •





Ces leviers constituent généralement des actions ponctuelles, mises en œuvre à l’échelle d’une exploitation en particulier, ce qui, d’une part, ne favorise pas la conduite de projet collective (un des intérêts du dispositif, qu’il serait donc judicieux d’exploiter en priorité), et qui, par ailleurs, risque d’engendrer des coûts administratifs élevés pour l’instruction des multiples dossiers de candidature qui pourront être soumis en cas éligibilité de ces actions. Les investissements nécessaires à la mise en œuvre de ces leviers sont assez faibles en comparaison à ceux nécessaires pour la mise en place d’installations de traitement ou pour l’organisation de filières, ce qui rend ces derniers finalement peu adaptés au versement de subventions, le montant d’aides optimal associé à chacune de ces actions étant proportionnellement trop faible au regard des coûts d’instruction et de contrôle engendrés par leur sélection (dimensionnement disproportionné du dispositif sur le plan administratif) Les projets qui impliqueront le développement de ce type de leviers seront peu innovants, en raison de la pénétration naturelle progressive de ces solutions dans le monde agricole.

Ainsi, la prononciation de l’éligibilité d’actions appartenant à cette catégorie dans le cadre des appels à projets réalisés, risquerait d’engendrer des inefficacités sur le plan économique et administratif. On peut toutefois envisager de rendre éligible un développement de ces actions sous forme collective (achats d’outils couplé à du conseil ou abonnements en commun pour un outil de télédétection couplé à des mesures de terrain sur un territoire par exemple), afin de rationnaliser les procédures administratives d’instruction pour l’attribution des aides, et d’encourager la gouvernance multiple de ces projets. Ou rendre ce type d’actions obligatoire dans la conduite des projets, ce qui permettrait d’améliorer encore le ratio d’efficacité des projets en optimisant les apports d’azote.

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Enfin, le soutien des leviers participant à la création d'un contexte favorable à l'amélioration de la performance des exploitations pourra toutefois se révéler très intéressant, dans la mesure où il encouragera l’innovation, l’organisation entre différents acteurs et le développement de solutions intégrées à grande échelle. Ces actions sont bien adaptées à l’éligibilité dans le cadre du développement d’un AAP, à la condition de pouvoir résoudre le problème de faisabilité lié à leur nécessaire formalisation dans un cahier des charges. Elles présentent des caractéristiques qui les rendent moins adaptables à l’attribution de subventions régies par un cahier des charges, du fait de la difficulté d’évaluer les gains qu’elles engendrent (souvent indirects), d’établir des limites claires quant aux actions qui pourront être jugées pertinentes (candidatures potentiellement très variées en raison de l’échelle considérée), de définir de façon précise les périmètres d’acteurs qui pourront être concernés dans les différents projets proposés, et, en conséquence, d’évaluer des montants forfaitaires de subventions pour ces actions.

Fig. 20. Tableau d’évaluation de l’application des leviers aux voies AAP

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Illustration de cahier des charges pour des projets gestion collective de l’azote organique A titre d’exemple, on propose ici un modèle de projet qui pourrait être proposé dans le cadre d’un cahier des charges d’appels à projets lié au Fonds azote, portant sur le développement d’installations de gestion de l’azote organique (vers une valorisation sous forme de fertilisants), avec un calcul indicatif du niveau d’aides qui pourrait être alloué au développement de solutions de ce type.

A) Contexte La ressource azote organique issue d’effluents d’élevage est estimée à environ 1,7 Mt en 2010, dont environ 50 % sont excrétés directement au pâturage par les animaux et le reste valorisable par épandage sur les cultures annuelles ou les prairies. Une hétérogénéité spatiale et par culture est observée, 65 % des surfaces fertilisées en France par les effluents organiques étant des surfaces à vocation fourragère (maïs et prairies) en 2011. D’autre part le "gisement" de déchets résiduels organiques (déchets urbains, agro-industriels, verts), riches en azote utilisable par l'agriculture est quant à lui estimé par l'ADEME à environ 180 000 t N/an, soit 2,3 fois les quantités déjà épandues actuellement. Sa valorisation permettrait une économie d'engrais 1 minéraux évaluée à 2 kg N / ha .

B) Conditions d’éligibilité -

-

-

Mise en place d’installations de gestion (manutention et/ou traitement) de produits résiduels organiques (PRO) : effluents d’élevage (fientes, lisiers, fumiers) en mélange ou non avec des déchets organiques (déchets urbains, agro-industriels, verts) : o Unités de méthanisation o Unités de compostage o Unités de traitement autres type séparation de phase, stripping, déshydratation, granulation o Plateformes de stockage et manutention d’effluents Installations agricoles collectives ou individuelles Seuils minimum de capacité et de fonctionnement : o Gestion de 1 500 t PRO / an pour les installations « à la ferme » o Gestion de 10 000 t PRO / an pour les installations collectives et territoriales La mise en place ou le renouvellement ou d’une installation bénéficiant ou ayant déjà bénéficié de crédits de l’ADEME est exclu. Obligation de valorisation à terme des produits organiques gérés par ces installations sous forme de fertilisants.

C) Calcul du niveau d’aide : Exemple pour la mise en place d’une installation de méthanisation -

Seuils de taille des projets et définition des régimes d’aide associés : o Méthaniseurs traitant plus de 1 500 t PRO et jusqu’à 10 000 t PRO : Aide forfaitaire maximum définie par la grille ci-dessous o Méthaniseurs traitant plus de 100 000 t PRO : Aide calculée par l’analyse économique avec un encadrement par la grille ci-dessous.

1

Expertise Scientifique Collective INRA, Pellerin, Bamière et al. (2013), 10 mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre en agriculture

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-

-

€  

2

Grille de calcul du montant des aides affiché en sur 10 ans (on peut considérer que  $  é% é é le traitement d’une tonne de PRO par la technique de méthanisation permet en moyenne l’économie 3 de 4,25 kg d’EAS ) : Prise en charge annuelle de Aide minimale en €/kg EAS Aide maximale en €/kg EAS l’installation économisé (10 ans) économisé (10 ans) 1500 à 5000 t PRO / an

1,5

2

5001 à 10 000 t PRO / an

1

1,5

10 001 à 100 000 t PRO / an

0,5

0,75

Exemples : o Un projet traitant 1 500 t PRO / an bénéficiera d’une aide forfaitaire maximale de 127 500 € (= 2 x 4,25 x 1 500 x 10) o

Un projet traitant 10 000 t PRO / an bénéficiera d’une aide forfaitaire maximale de 740 375 € (= (2 x 4,25 x 5 000 + 1,5 x 4,25 x 5 000) x 10 ) Un projet traitant 80 000 t PRO / an aura une aide minimum de 2 018 750 € (= (1,5 x 4,25 x 5 000 + 1 x 4,25 x 5 000 + 0,5 x 4,25 x 70 000) x 10) et une aide maximum de 2 975 000 € (= (2 x 4,25 x 5 000 + 1,5 x 4,25 x 5 000 + 0,75 x 4,25 x 70 000) x 10 ) selon sa performance économique

D) Critères de sélection spécifiques Seront privilégiés les projets répondant aux caractéristiques suivantes : -

-

Plan d’approvisionnement local Taux maximum de recyclage de matières organiques ne faisant pas encore l’objet d’une valorisation sous forme de fertilisants En cas d’intégration de co-substrats dans les produits entrants, recours minimum à de la biomasse issue de cultures énergétiques (recours uniquement pour l’équilibre du digesteur) Valorisation locale d’une partie des fertilisants produits (ratio à déterminer) ou organisation d’un circuit d’échange standardisé, auquel cas les projets envisageant la constitution de dossiers demandes d’homologation seront appuyés en priorité. Tonnes de CO2 évitées (par les conditions de traitement, de stockage, ou de transport) Rentabilité maximale (critères de TRI, VAN, etc.) Rapidité de mise en service Temps de fonctionnement et taux couverture optimisés Intégration architecturale

2

La méthode de calcul est inspirée de celle qui est utilisée pour l’évaluation des subventions attribuables aux projets de production de chaleur renouvelable par combustion de biomasse dans le cadre du fonds chaleur. Les coefficients d’aide fixés ont été, eux, estimés sur la base de la multiplication des bénéfices nets associés à l’économie d’une unité d’engrais minéral (0,3 €/kg EAS), dans le cadre du respect de subventionnements « classiquement constatés», établis grâce à l’analyse économique de projets de méthanisation de diverses capacités, et considérant une allocation maximale d’aide à hauteur d’environ 40 % de la valeur d’investissement nécessaire au développement de ces projets. 3

Donnée issue de l’analyse économique du fonctionnement de l’unité de méthanisation installée à la ferme du GAEC Oudet (08), qui en traitant 2078 tonnes de produits résiduels organiques chaque année, permet une économie annuelle de 8,5 tonnes d’EAS correspondant à 1 700 €.

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E) Modalités de versement des aides et de suivi des installations

L’aide sera versée en 3 paiements : -

Un versement après signature du contrat avec l’organisme gestionnaire et sur présentation pour les maîtres d'ouvrage d’une caution bancaire correspondant au montant de l'avance ; Un versement à la réception de l'installation; Le versement du solde sur présentation des résultats de prise en charge des PRO de la première année de fonctionnement, sous forme de bilan du plan d'approvisionnement (quantité, type et origine des produits), ainsi que des résultats de leur devenir après l’étape de traitement ou de manutention (plan d’épandage, homologation, distribution/vente, etc.). En cas de possibilité de mesure des quantités d’EAS évitées par la mise en service du projet, ces résultats seront joints aux données de fonctionnement de l’installation. Le montant du solde sera calculé au prorata des résultats de la première année (en termes d’économies d’EAS ou de données brutes du niveau de fonctionnement de l’installation en fonction de la disponibilité de ces informations), par rapport à l'engagement initial du maître d'ouvrage.

d. Estimation des impacts de la mesure i. Bénéfices environnementaux Consommation d’énergie En visant le même ratio de performance

€   é     ’é 

que celui du fonds

chaleur (cf. partie b. i.) comme hypothèse de calcul, on atteindrait une économie significative d’utilisation des principales formes d’engrais vendues en France (Ammonitrate, Urée et Solution Azotée) : Scénario

fonds azote (total 5 ans)

équivalent énergie économisée (ktep total sur 5 ans)

équivalent N minéral économisé (total 5 ans)

A (1 %)

100 M€

135 ktep

102 kt N

B (3 %)

300 M€

407 ktep

307 kt N

C (5 %)

500 M€

678 ktep

511 kt N

Un scénario moyen entre scénario A et scénario B serait le plus réaliste par rapport aux progrès réalisés par les exploitations agricoles françaises qui on réduit leur utilisation de fertilisants azotés de synthèse de 1,5 % soit 30 000 t N / an entre 1990 et 2012 (cf. chapitre b. CEA). Si on prolonge cette tendance à 5 ans on obtient une économie de 150 kt N minéral. En étant ambitieux et en doublant cet objectif, on atteindrait une économie de 300 kt N sur 5 ans. On obtiendrait alors une économie entre 135 et 407 kTEP / an en fixant un montant de fonds azote compris entre 100 et 300 M€ sur 5 ans.

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Emissions de gaz à effet de serre En fonction des projets subventionnés par le fonds azote, les impacts environnementaux seront totalement différents. L’exemple du projet de valorisation agronomique par compostage des fientes de volailles et d’autres effluents d’élevage en Deux Sèvres permet une économie annuelle depuis 8 ans de 40 000 t effluents à 25 unités d’azote organique par tonne de produit. En considérant que ce produit est valorisé à 70 % on attend une économie de 700 t N minéral par an, soit 3 940 t eq CO2 évitées. Le total des émissions directes évitées au stockage de ces effluents, envoyés sur une plateforme avec atmosphère contrôlée pendant 8 jours auxquelles on peut retirer les émissions dues à la construction de la plateforme représente ainsi une économie annuelle de 7 150 t eq CO2. Soit un gain de 11 000 t eq CO2 par an pour un investissement de 1,8 M€ amorti sur 10 ans soit un coût d’abattement de la tonne de CO2 de 16 € / t eq. Autres impacts environnementaux La gestion collective des effluents d’élevage permet aussi d’imaginer une diminution des émissions de NH3 au stockage et à l’épandage par une meilleure prise en compte de technique non émissives. A titre d’exemple, le stockage et compostage intensif de fumiers de volailles peuvent provoquer jusqu'à 77% de pertes d'azote sous forme de NH3. ii. Impacts économiques : coûts et gains pour les différents acteurs de la filière Agriculteurs Les impacts vont être très variables selon les projets mis en place, qui peuvent avoir des répercussions directes ou indirectes sur le revenu de l’exploitant. Dans les cas de soutien aux unités de méthanisation, les répercussions peuvent être directes par la vente d’électricité et de chaleur, la prestation de traitement de déchets (produit pour l’exploitation) et aussi par les économies d’azote minéral liées à l’utilisation du digestat liquide sur une fraction plus importante de la surface épandable en cas de séparation de phase (qui permet de gérer différement les éléments azote et phosphore, ce dernier pouvant être limitant). Dans le cas des plateformes de compostage, la mutualisation des effluents des différents producteurs sur le territoire permettent d’éviter la construction de systèmes de stockage ou de traitement individuels et la valorisation du compost sur les surfaces d’épandages limitrophes ou plus éloignées permet des économies d’engrais azotés minéraux. En face de ces bénéfices, des coûts d’investissement peuvent être parfois importants. A titre d’exemple la plateforme fertil’éveil en Vendée, gérée par 2 coopératives la CAVAC et la Coop l’Eveil, regroupe 150 apporteurs d’effluents organiques pour un total de 43 000 T de produits en excédent sur les zone d’élevages limitrophes. Cela représente à la sortie 40 000 T de compost normé par an, soit 1 000 t d’azote organique exportées vers d’autres exploitations de grandes cultures, maraîchage et viticutlures à l’aide de matériel spécifiques de grande capacité.

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Le coût pour les apporteurs (agriculteurs) est de 2 € / tonne de fumier livré, ajouté à la valorisation et la prestation d’épandage, ceci permet à la plateforme de dégager un chiffre d’affaire de 1,3M€ annuels. Autres bénéficiaires : fournisseurs de solution (conseil, développeurs d’outils, etc.), distributeurs d’engrais Ceux-ci peuvent être potentiellement les plus impactés en étant force de proposition pour les projets, en conduisant les études de faisabilité avant-projet, en mettant à disposition du temps homme pour l’accompagnement des projets (animation territoriale), ou encore en étant acteur dans l’investissements dans les matériels et bâtiments pour les unités de traitement collectif (ex. de la plateforme fertil’Eveil). Ces activités peuvent venir compléter les chiffres d’affaires agrofourniture de certaines sociétés (coopératives ou négoces) et contrebalancer les éventuelles pertes liées à une réduction des ventes de fertilisants azotés de synthèse. Les entreprises uniquement engagées dans la vente d’agrofourniture peuvent également participer par des projets de R&D en collaboration avec les autres acteurs du développement agricole en accompagnant le conseil sur l’optimisation de l’utilisation des engrais minéraux de synthèse et un ajustement plus équilibré de la fertilisation par le développement d’actions de recherchedéveloppement sur les pratiques économes en intrants, la formation professionnelle, la communication, etc. Etat Au-delà du coût lié à la source de financement (à définir dans un panel de solutions), l’impact pour l’Etat dans ce dispositif est essentiellement du temps de personnel qualifié dans une structure gestionnaire du fonds. A titre d’exemple l’ADEME a une dépense de 1 ETP pour 50 dossiers de concrétisation (tous les dossiers hors appels à projets de recherche) annuellement.

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e. Conclusion : Analyse prospective sur les points de force et de faiblesse Après la phase de prédéfinition des mesures, des échanges ont eu lieu avec le comité de pilotage autour des points de force et des points de faiblesse du dispositif. Une liste d’items a été présentée aux membres du comité qui ont été invités à exprimer à l’aide d’un vote leur niveau d’accord ou de désaccord avec ceux-ci (cf. annexes). Les items indiqués ci-dessous ont servi de support à la discussion et apparaissent sous leur formulation définitive : Forces 1. L’appel à projets du fonds azote permet de couvrir une large variété de projets : actions innovantes d’économie d’azote mais aussi des actions classiques nécessitant une nouvelle organisation pour les mettre en œuvre 2. La logique d’appels à projets permet de mieux sélectionner les projets les plus efficaces pour la réduction de la dépendance énergétique par la maîtrise de la fertilisation azotée 3. La logique d’appel à projets permet de mettre en œuvre une grande diversité de solutions complémentaires face au problème complexe de la gestion de l’azote 4. L’appel à projets à travers un cahier des charges ouvert, permet une grande flexibilité dans la mise en œuvre opérationnelle des actions 5. L’appel à projets permet de financer des projets dont on ne connait pas a priori le nombre ni le montant exacts. 6. L’appel à projets offre la possibilité de regroupement des acteurs autour d’actions complémentaires et la création de nouvelles filières car la thématique de maîtrise de la fertilisation azotée touche de nombreux maillons de l’amont agricole. 7. L’appel à projets du fonds azote est potentiellement complémentaire avec les autres appels à projets existants (CASDAR Agro-écologie, REACCTIF, etc.). Cette complémentarité est à inclure dans le cahier des charges.

Faiblesses 1. Les projets financés par le Fonds azote sont parfois complexes supposant des besoins d'expertise importants, donc des temps de traitement des dossiers allongés 2. La fixation du montant global de l’enveloppe du fonds est délicate en raison de la variabilité du type d’investissements et de la durée des projets 3. L'estimation des économies d’EAS potentielles est difficile pour certains types de projets (ex. des projets d’optimisation des usages d’azote organique et minéral) 4. Les aides du Fonds Azote peuvent retirer des ressources aux autres dispositifs d’aides existants 5. Les sources de financement du fonds azote sont difficiles à trouver dans un contexte de tension économique sur les filières et les marchés agricoles

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IV.

Stratégie d’action a. Synthèse sur les deux mesures analysées

Les mesures CEA et Appel à Projet partagent plusieurs caractéristiques : • Objectif de résultat sur des actions à réaliser : les deux mesures ciblent la mise en place d’actions d’économie (de manière plus directe que des dispositifs de sensibilisation ou d’information par exemple). Si elles ne peuvent en revanche pas être directement reliées à des quantités réduites réellement, l’efficacité de ces actions est au cœur des dispositifs (les CEA à travers la définition des fiches standardisés, les Appels à Projet à travers la mise en place de critères liés à l’efficacité) ; • Simplicité des dispositifs dans leur mise en œuvre : si des opérations de suivi et de contrôle sont nécessaires, les deux mesures n’impliquent pas de changements considérables ou de procédures administratives lourdes. Pour les CEA, l’amorçage du dispositif nécessite une implication significative des acteurs : formation des acteurs au fonctionnement, création des fiches… Si le système est simple (en particulier pour le consommateur final), il peut apparaître plus complexe que d’autres, par son caractère innovant ; • Approche « bottom-up » : ce sont les agriculteurs et les acteurs de la filière qui proposent des actions et des projets ; • Amélioration de la connaissance : CEA et Appels à Projet favoriseront la création, le partage et la diffusion des connaissances sur les leviers d’actions azote-énergie ; • Créativité : les deux mesures incitent à innover pour proposer de nouveaux leviers d’action ; • Souplesse : CEA et Appels à Projet peuvent facilement faire l’objet d’ajustements en fonction des premières observations (correction du niveau d’obligation, orientation des cahiers des charges et modification des enveloppes budgétaires pour les Appels à Projet, …). Elles diffèrent par ailleurs sur plusieurs points. • On peut tout d’abord citer le coût pour l’Etat : si la mesure CEA a un coût modéré38 (c’est la filière de distribution qui finance les actions), l’Appel à Projet nécessite la définition d’une enveloppe budgétaire dont les potentielles sources sont évoquées dans la partie consacrée à cette mesure. • Les deux mesures ne font pas l’objet de niveaux de compréhension équivalents : si le principe et le fonctionnement des appels à projet sont bien assimilés par le secteur agricole, le dispositif des certificats d’économie (encore peu diffusés pour le volet énergie dans le secteur) doit faire l’objet d’une certaine pédagogie.

38

Cf. p.20 impacts économiques pour l’Etat

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b. Insertion des mesures CEA et Appel à Projet dans le cadre réglementaire et incitatif actuel Le schéma ci-après présente les mesures d’économie d’azote, les mesures de réduction de la dépendance énergétique et la manière dont les deux mesures innovantes analysées dans le cadre de cette étude pourraient s’insérer.

Fig. 21. Intégration potentielle des 2 mesures dans les mesures ciblées azote et les mesures énergie / climat

La majorité des mesures mentionnées sur ce schéma39 sur les volets énergie et azote concernent directement les agriculteurs ; leur nombre et leur diversité créent un contexte réglementaire et incitatif complexe dans lequel il est parfois difficile de se repérer. Les deux potentielles nouvelles mesures ont l’avantage de ne pas ajouter de complexité à ce système, en effet : •

La mesure CEA n’est pas un dispositif directement applicable aux agriculteurs, c’est une mesure qui « pèse » sur les distributeurs d’engrais. Elle s’appuie sur les dynamiques d’économie existantes en accélérant le mouvement de marché et facilitant la « pénétration de l’innovation » déjà en cours.



Appel à projets : il s’agit d’une mesure visant à mobiliser des consortiums regroupant différents acteurs et favoriser les démarches collectives (pas de focalisation sur l’agriculteur). Il s’agit par ailleurs d’une mesure « volontaire » qui n’impose rien à la profession.

39 ICPE : Installations Classées pour la Protection de l’Environnement, IED : Industrial Emissions Directive AAP : Appel à Projet, MAE : Mesures Agro Environnementales, PMBE : Plan de Modernisation des Bâtiments d’Elevage, PVE : Plan Végétal pour l’Environnement, EMAA : Energie Méthanisation Autonomie Azote

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c. Articulation entre les mesures CEA et Appel à Projet Le schéma ci-après présente l’articulation entre les deux mesures et l’implication potentielle des acteurs de la filière :

Fig. 22. Articulation des mesures CEA et AAP

La nature des deux mesures est différente : l’appel à projets propose des financements, les CEA imposent la réalisation d’actions par les fournisseurs, auprès des agriculteurs. On peut imaginer une mise en place des appels à projets dans un premier temps car le dispositif est plus simple dans sa mise en œuvre et mieux connu et qu’il permet par ailleurs d’être potentiellement à l’origine de la création de fiches CEA. Ces deux mesures doivent permettre de générer à la fois des actions d’économies innovantes et des actions pour lesquelles les retours d’expérience existent déjà mais disposant d’un potentiel de déploiement significatif. Ces actions peuvent par ailleurs être standardisables (condition nécessaire pour la création de fiches de Certificats d’Economie d’Azote) ou complexes (éligibles dans le cadre de la voie programme des CEA ou dans le cadre des appels à projets lorsque les potentiels de gain sont suffisamment robustes). Concernant les acteurs : • Les fabricants d’engrais et les distributeurs sont directement concernés par le dispositif des CEA (les distributeurs en financent même une partie en tant qu’obligés) ; • Le conseil et les instituts sont potentiellement concernés et peuvent être force de proposition sur les actions d’économie ; • Les agriculteurs sont évidemment concernés par les deux mesures dont ils sont les principaux bénéficiaires.

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V.

Conclusion

La réduction de la dépendance énergétique des exploitations agricoles est un enjeu majeur pour le maintien de leurs compétitivités. Les prix des engrais azotés sont très volatils et dépendent du prix du gaz naturel qui rentre pour environ 40% dans le prix des engrais livrés. Ainsi la dépense moyenne des exploitations relative à l’énergie employée pour l’approvisionnement en engrais azoté de synthèse n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Si l’apport d’azote dans les systèmes agricoles constitue un facteur essentiel de productivité, l’amélioration de la situation énergétique des exploitations, nécessite une optimisation de la gestion globale de l’azote pour concilier performance économique et environnementale. Cette étude a confirmé qu’il existe une batterie de leviers d’actions permettant d’améliorer la gestion de l’azote et de réduire cette dépendance énergétique aux engrais azotés de synthèse, tout en garantissant, un niveau de production, en quantité et en qualité, satisfaisant. Les quatre grandes catégories identifiées, concernent l’aide au pilotage de la fertilisation, l’optimisation de l’itinéraire technique, la gestion de l’azote organique, la création d’un contexte favorable à l’amélioration de la performance énergétique. Ces leviers ont pu être hiérarchisés selon leur faisabilité de mise en œuvre et leur efficacité. Certaines actions (ex. : les outils d’aide à la décision) combinant efficacité et faisabilité pourraient être développées rapidement, alors que d’autres, comme le développement de filières avales de valorisation des pratiques agricoles, nécessitent des évolutions plus structurelles nécessitant plus de temps. Ainsi, afin d’accompagner le monde agricole dans cette réduction de dépendance énergétique des exploitations, des dispositifs innovants et complémentaires aux politiques actuelles peuvent être envisagés. Après avoir analysé différents dispositifs, l’étude s’est concentrée sur deux mesures inspirées des politiques énergétiques: les Certificats d’Economie d’Azote et les appels à projets et Fonds azote. Il s’agissait d’analyser les atouts et difficultés d’une adaptation aux spécificités du monde agricole. L’analyse montre que, si des adaptations importantes sont nécessaires, les mécanismes étudiés apportent des innovations importantes dans l’accompagnement des agriculteurs permettant la créativité, la valorisation des innovations faites dans les régions, le renforcement des relations entre agriculteurs et distributeurs et notamment la mise en place d’objectifs de résultats. Les dispositifs analysés reposent sur le principe de démarches volontaires d’agriculteurs souhaitant mettre en place des évolutions. Ils laissent les acteurs professionnels proposer des actions et des projets adaptés à la diversité des exploitations agricoles. L’expérimentation des certificats d’économies de produits phytosanitaires prévue dans le cadre du projet de Loi pour l’Avenir de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Forêt, actuellement en débat, apportera des éléments complémentaires à ces réflexions, notamment dans les synergies envisageables pour l’évolution des systèmes.

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ANNEXES

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Annexe 1 : Classes NAF des métiers de la filière des EAS •

G 46.75Z Commerce de gros (commerce interentreprises) de produits chimiques

Comprend : - le commerce de gros de produits chimiques industriels : aniline, encres d'imprimerie, huiles essentielles, gaz industriels, colles chimiques, matières colorantes, résine synthétique, méthanol, paraffine, parfums et essences, soude, sel industriel, acides et soufre, produits amylacés, etc. - le commerce de gros d'engrais et de produits phytosanitaires http://recherche-naf.insee.fr/SIRENET_ClassesNaf/4675Z.htm



C 20.15Z Fabrication de produits azotés et d'engrais

Comprend : - la fabrication d'engrais : - engrais azotés, phosphatés ou potassiques, simples ou complexes - urée, phosphates naturels bruts et sels de potassium naturels bruts - la fabrication de produits azotés associés : acides nitrique et sulfonitrique, ammoniac, chlorure d'ammonium, carbonates d'ammonium, nitrites et nitrates de potassium http://recherche-naf.insee.fr/SIRENET_ClassesNaf/2015Z.htm



G 47.76Z Commerce de détail de fleurs, plantes, graines, engrais, animaux de compagnie et aliments pour ces animaux en magasin spécialisé

Comprend : - le commerce de détail de fleurs, en pots ou coupées et compositions florales, de plantes et de graines - le commerce de détail de plants, arbres et arbustes - le commerce de détail d'engrais et de produits phytosanitaires http://recherche-naf.insee.fr/SIRENET_ClassesNaf/4776z.htm



G 46.12B Autres intermédiaires du commerce en combustibles, métaux, minéraux et produits chimiques

Comprend : - les activités des intermédiaires du commerce de combustibles, minéraux, métaux et produits chimiques - les activités des intermédiaires du commerce d'engrais http://recherche-naf.insee.fr/SIRENET_ClassesNaf/4612.htm

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Annexe 2 : Méthode de calcul du contenu énergétique des différents EAS utilisée dans l’étude ADEME Analyse de la dépendance économique de l’agriculture à l’énergie, 2012 Le contenu énergétique d’une forme d’engrais (MJ/kg engrais) est obtenu en additionnant les consommations des différentes sources d’énergie qu’il utilise pour sa fabrication et son transport (kg ou Kwh / kg d’engrais) multipliées par le contenu énergétique de chacune de ces sources (PCI en MJ/kg). Afin d’obtenir le contenu énergétique d’un engrais par kg d’élément fertilisant, le résultat précédent est divisé par la part d’élément fertilisant contenu dans l’engrais (ammonitrates : 33,5 % d’azote, urée : 46 % d’azote, et solutions azotées : 29 % d’azote). Les résultats sont ci-dessous : 1) Contenu énergétique des engrais, source GES’TIM 2010 : pour la fabrication à l'usine Quantités d'énergie finale employée :

Gaz naturel

Electricité

Vapeur

Gazole

Type d'engrais

en Kg/Kg de produit

en KWh/Kg de produit

en Kg/Kg de produit

en Kg/Kg de produit

NH3 Europe (précurseur) Urée Europe HNO3 Europe Ammonitrate 33,5 Solution azotée S minerai (précurseur) Acide sulfurique H2SO4 P minerai (précurseur) Acide phosphorique H3PO4 48% Di Ammonium Phosphate Mono Ammonium Phosphate Triple Superphosphate Chlorure de potassium Sulfate de Potassium

0,706 0,400 0,198 0,302 0,278 0,165 0,097 0,050 0,043

0,119 0,074 0,019 0,006 0,016 0,061 0,129 0,060 0,111 0,033 0,032

-

-

-

0,949 0,808 0,584 0,063 1,101 0,360 0,046 0,485 0,472 0,471 0,949 0,203

0,002 0,004 0,003 0,003 0,002 0,004 0,003

pour le transport Transport Transport gazole fioul lourd (camion) (bateau) en L/Kg de produit

en L/Kg de produit

0,0039 0,0059 0,0065 0,0065 0,0049

0,0229 0,0016 0,0016 0,0071

0,0049 0,0049 0,0056 0,0102

0,0304 0,0304 0,0230 0,0012

2) Contenu énergétique des ressources : Ressource énergétique

Unité

PCI

Source

gazole

MJ/kg

42,00

essence

MJ/kg

44,00

Les chiffres clé de l'énergie 2010 (SOeS) Les chiffres clé de l'énergie 2010 (SOeS)

gaz naturel FR

MJ/kg

38,10

Méthode GESTIM

fioul lourd

MJ/kg

40,00

Les chiffres clé de l'énergie 2010 (SOeS)

gazole

kg/litre

0,85

fioul lourd

kg/litre

0,84

Vapeur d’eau

MJ/kg

2,52

Méthode Bilan Carbone V6.1

3) Contenu énergétique des différents engrais : Energie fabrication et intrants

Type d'engrais NH3 Europe (précurseur) Urée Europe HNO3 Europe Ammonitrate 33,5 Solution azotée S minerai (précurseur) Acide sulfurique H2SO4 P minerai (précurseur) Acide phosphorique H3PO4 48% Di Ammonium Phosphate Mono Ammonium Phosphate Triple Superphosphate Chlorure de potassium Sulfate de Potassium

Energie transport Somme énergie finale Transport Transport pour la fabrication et le gazole fioul lourd transport (camion) (bateau)

Gaz naturel

Electricité

Vapeur d'eau

MJ/kg de produit

MJ/kg de produit

MJ/kg de produit

MJ/kg de produit

MJ/kg de produit

MJ/kg de produit

2,391 2,036 1,472 0,159 2,775 0,908 0,116 1,223 1,189 1,186 2,392 0,511

0,084 0,149 0,131 0,144 0,097 0,168 0,144

0,1392 0,2088 0,2321 0,2321 0,1764 0,1764 0,1764 0,1996 0,3643 -

0,7689 0,0544 0,0544 0,2381 1,0229 1,0229 0,7734 0,0408 -

26,899 15,252 7,532 11,523 10,574 6,299 3,685 1,905 1,631

0,428 0,268 0,068 0,023 0,058 0,221 0,465 0,215 0,400 0,119 0,114

-

-

-

Gazole

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MJ/kg de produit

-

27 19 6 10 11 3 1 0 2 9 6 4 3 1

MJ/kg d'élement nutritif

33 41 26 31 38

20 12 8 4 3

Somme énergie primaire pour la fabrication et le transport MJ/kg de produit

MJ/kg d'élement nutritif

42 29

51 63

16 18

47 59

5 4

10 7

Annexe 3 : évolution de la répartition des ventes de formes d’engrais L’évolution de la répartition relative des différentes formes d’engrais azotés simples dans les consommations depuis 1972 est représentée ci-dessous : on constate une certaine stabilisation des proportions depuis les années 2000.

Part des familles d’engrais azotées simples dans les quantités d’azote livrées, Source : UNIFA

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Annexe 4 : Illustration fiche CEA 1 : « Mise en place OAD pour le pilotage de la fertilisation azotée » Un modèle de fiche action avec méthode de chiffrage est ici proposé à titre d’exemple, ce modèle est réalisé pour le levier d’action « développement des outils d’aide à la décision pour le pilotage de la fertilisation ».. Fiche action 1

dispositif CEA

Mise en place d’un OAD pilotage de la fertilisation azotée A) Secteur d’application Secteur grandes cultures (céréales à paille, maïs, colza et betterave). B) Dénomination Diffusion de l’abonnement à un OAD pour le pilotage de la fertilisation azotée en cours de campagne. C) Conditions pour la délivrance de certificat Une attestation de financement doit être délivrée par l’organisme distributeur de l’outil (coopérative, chambre d’agriculture, etc.) à l’obligé ou à l’éligible ayant participé aux frais de diffusion indiquant le montant des frais engagés et celui des unités vendues. D) Durée de vie conventionnelle 1 an. E) Montant des certificats Gain moyen unitaire : 15 kg N / ha (10 kg N/ha sur blé et 20 kg N/ha sur colza, source : CETIOM) Calcul du gain (kg N total) : nombre d’ha concernés x 15 Annexe fiche action Coût pour les acteurs : • Coût du service: environ 10 € / ha / an (sources : Agrapresse et Réussir grandes cultures) Evaluation du potentiel maximum de l’action : • Surfaces en blé, orge d’hiver, colza : 8 003 000 ha (Superficie 2012, source : Agreste, SCEES) • Consommation moyenne d’azote sur ces cultures (non pondérée) : 159 u N/ha (165 u N/ha sur blé tendre, 176 sur blé dur, 165 sur colza et 130 sur orge, source : enquête pratiques culturales Agreste 2006) • Gain moyen en azote lié à la mise en place de l’outil sur l’exploitation : 15 u N/ha soit environ 10 % • Nombre d’hectares couverts par le service en 2012 : 620 000 ha (source : CETIOM) • Pourcentage de surface équipée par le service en 2012 : 7,8% • Potentiel maximum : P = (pourcentage de gains en azote attendus * consommation moyenne d’azote des cultures éligibles)* surfaces potentielles * (1 - part de surface équipée) = (10%*159) * 8 003 000 *(1 – 0,078) = 117 000 t N

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Annexe 5 : les autres mesures évoquées pendant le déroulé de l’étude Catégorie

Nom de la mesure 1.

Révision des statuts réglementaires des effluents et produits résiduels organiques (digestats de méthanisation, boues de STEP) : sous-produits, produits, déchets, etc.

2.

Ecotaxe "énergie azote"

3.

Redevance "énergie azote"

4.

Externalisation du risque lié aux changements de pratiques

Fonds

5.

Création d'un "fonds azote"

Aides directes liées aux politiques agricoles

6.

Création ou modification de Mesures Agro Environnementales

Marché

7.

Marché de permis négociables

Filière

8.

Encouragement de filières (amont et aval) pour orienter les pratiques agricoles

9.

Nouvelles fiches Certificats d'Economie d‘Energie

Procédures d'autorisation administrative

Fiscalité

Couverture des risques

Dispositifs contractuels entre agriculteurs et industriels ou autorité publique engageant à des financements d'actions Contrats avec industriels

10. Création des Certificats d'Economie d'Azote 11. Cahiers des charges d'industriel encourageant les bonnes pratiques agricoles 12. Système de Management de l'énergie

Démarches internes aux entreprises et interentreprises

Formation & Enseignement

13. Contrats de performance énergétique 14. Diagnostics énergétiques des exploitations et plans d'actions 15. énergies indirectes 16. Formations continues et cycles d'enseignement liés aux changements de pratiques

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Annexe 6 : liste des membres du comité de pilotage de l’étude et experts sollicités pour l’étude COMITE DE PILOTAGE : - ADEME Jérôme Mousset, Antonio Bispo, Thomas Eglin et Marc Bardinal - CGEDD : Denis Delcour, Pierre Rathouis - CGAAER : Philippe Balny - COMIFER : Philippe Eveillard - INRA : Jean-Louis Peyraud - COOP de France : Marie Tobias - MEDDE-CGDD : Antonin Vergez - MAAF-DGPAAT : Emma Dousset - APCA : Philippe Touchais, Sophie Agasse - RAD FNCIVAM : Alexis de Marguerye Experts sollicités au cours de l’étude : - In Vivo Antoine Poupart - INRA Sylvie Recous - Arvalis Institut du Végétal Jean-Pierre Cohan Experts du consortium I Care Environnement / Céréopa - INRA Stéphane de Cara - EUREVAL Eric Monnier

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Annexe 7 : fiches leviers d’amélioration

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Optimisation de l'itinéraire technique (vers une meilleure efficacité de l'azote et une efficience accrue des EAS40)

40

Engrais Azotés de Synthèse

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Optimisation de l’itinéraire technique

A. Privilégier un choix de variétés optimisant l'efficience azotée Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Besoin en azote du système de production

Grandes cultures (blé, pomme de terre), Toutes régions

Utilisateurs principalement (le choix se fait au niveau agriculteur)

1) Description Pour certaines espèces (par exemple le blé et la pomme de terre), les besoins en azote peuvent différer selon les variétés. Par exemple pour le blé, les besoins varient de 2.8 à 3.5 unités d’azote par quintal41 Parmi l’ensemble des variétés inscrites au catalogue chaque année, le choix de l’agriculteur pourra donc se faire sur ce critère, mais aussi se porter vers des variétés plus rustiques, qui : •

semées plus tardivement avec une densité réduite permettront de diminuer les besoins d’azote au tallage voire de se passer d’un apport42 ;



supporteront des carences azotées précoces en compensant la baisse de rendement (baisse du nombre d’épis / ha) par plus de grains par épis et des PMG43 plus élevés.

2) Evaluation efficacité / faisabilité • Efficacité : l’efficacité de ce levier est relativement faible. Il faut noter que le raisonnement du choix de variétés est toujours un compromis optimum entre les critères de qualité (taux de protéines, résistance aux maladies,...) et du niveau d’intrants (azote mais aussi pesticides). • Faisabilité : peu de difficultés de mise en œuvre sur l’exploitation, le seul frein pouvant être l’adaptation à des cycles de croissance différents entre variétés et des dates de semis et de récolte décalées. Le principal frein est externe à l’exploitation et concerne l’adaptation des variétés aux débouchés (acceptabilité de la variété par les meuniers pour le blé par exemple). • Moyens de déploiement : Afin d’actionner ce levier, il est nécessaire de travailler avec l’ensemble des maillons de la filière pour valider les variétés qui répondront à l’ensemble des exigences (rendement, qualité). Les mesures économiques et volontaires peuvent pousser ce levier en créant des liens plus forts entre sélectionneurs, distributeurs et transformateurs. Les mesures favorisant le conseil et la formation vers les agriculteurs pour une meilleure connaissance des différentes variétés et de leurs potentiels sont aussi à privilégier. Mesures liées : mesures réglementaires (contraintes de moyens et pratiques), mesures économiques (MAE et soutien aux productions), mesures volontaires (cahier des charges, labels), information / formation. 41

source Arvalis, 2012. Source INRA Rennes (SEM Partners, guide technique blé tendre 2013) 43 Poids de Mille Grains, critère de qualité reflétant le taux de remplissage des grains 42

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3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : Sur les dix premières variétés de blé cultivées en France, soit 50 % des surfaces44 huit ont des besoins égaux à 3,0 unités par quintal, seulement deux ont des besoins à 2,8 unités par quintal. Les recherches commencent seulement sur le colza. Pour le maïs on ne constate pas d’effet variétal (au-delà de la différence fourrage / grain). • Eléments sur les coûts : Les surcoûts en semences sont peu élevés et fonction de la variété choisie (40 q / ha), c'est-à-dire que l’équivalent de 80% de l’azote apporté est utilisé par la culture. La différence avec les 100% est attribuable à une variation du stock d’azote dans le sol (réorganisation microbienne) et à des pertes dans l’air ou dans l’eau. Ce CAU est variable selon les formes d’azote, les cultures et les types de sol. Le CAU de référence est celui de l’ammonitrate statistiquement le plus efficace devant l’urée et la solution azotée qui ont des CAU plus faibles.



Le Keq (coefficient équivalent engrais des effluents organiques) varie lui aussi entre 0,15 (fumiers) et 0,70 (lisiers). Cela signifie que 15% de l’azote contenu dans le produit aura le même effet que l’ammonitrate, engrais de référence. Le reste de l’azote reste sous forme organique ou se trouvera minéralisé puis utilisé par la biomasse microbienne ou encore perdu dans l’air et l’eau. L’augmentation du stock d’azote organique due à des apports fréquents de matière organique entraine à long terme des quantités d’azote minéralisé par le sol plus importantes. (facteur système dans la méthode COMIFER)

• Faisabilité : Les références sont aujourd’hui largement disponibles grâce aux publications d’Arvalis, de l’INRA, de l’UNIFA et reprises dans les guides des GREN dans les zones vulnérables pour l’établissement des plans prévisionnels de fertilisation. • Moyens de déploiement : La recherche doit permettre d’améliorer les connaissances sur les différents coefficients en fonction des types de produits / cultures fertilisées / types de sol et climats afin de valoriser au mieux l’ensemble des solutions de fertilisation azotée disponibles pour l’agriculteur. Mesures liées : information / formation.

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3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : les Outils d’Aide à la Décision intègre ces coefficients, de nombreuses tables sont disponibles pour l’aide au calcul, cependant compte tenu de la complexité des bilans, il reste préférable d’utiliser des outils informatisés. • Eléments sur les coûts : non connu • Impacts filière : Amont : large champ de recherche et développement pour les instituts techniques. • Réversibilité : annuelle (modification du produit) • Aléa : a priori ces solutions permettent de modifier les pratiques en adaptant la dose apportée en fonction des différentes conditions • Temporalité des effets : annuel

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Gestion de l'azote organique complémentarités avec l’azote minéral (vers une plus grande substitution des EAS)

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L. Raisonner le maintien des systèmes polyculture-élevage et leur intégration dans des zones spécialisées grandes cultures

Gestion de l’azote organique

Groupe de déterminants impactés Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés OTEX polyculture-élevage et élevage, Toutes régions

Acteurs impliqués Utilisateurs, prescripteurs, distributeurs

1) Description Plusieurs éléments sont liés à la spécialisation des territoires d’élevage : -

des risques de pertes d’azote plus élevées par la volatilisation de l’ammoniac et au lessivage des nitrates liées aux formes azotée des effluents;

-

une augmentation potentielle des teneurs en Phosphore (notamment en zones d’élevage porcins);

-

une relative dépendance aux protéines importées, même si on observe une tendance à la baisse, en 2012, le soja représente 33 % des protéines consommées par l’ensemble des productions animales contre 38 % en 200657

-

cependant cette réduction de la dépendance n’est pas associée à une augmentation des surfaces en légumineuses. La baisse continue de ces surfaces (1,2 M ha en 40 ans) entraîne une perte annuelle estimable à 200 kt N (assurée avant par fixation symbiotique). Le pois représente seulement 1% des matières premières intégrées dans les aliments en 2012.

Conserver ou développer des systèmes polyculture-élevage permettrait : -

une meilleure fermeture des cycles de l’azote, l’élevage fournit 1730 kt N / an58 par les effluents organiques (dont 70% par les bovins et 10 à 15 % pour les ateliers volailles et porcs) des cycles du carbone et du phosphore, meilleure durabilité des sols, meilleure gestion de la biodiversité ;

-

la réintroduction des légumineuses au sein des rotations (protéagineux ou prairies multiespèces) et ainsi d’améliorer l’autonomie locale des ateliers animaux ; protéique, énergétique et en paille 2) Evaluation efficacité / faisabilité

• Efficacité : bonne pour les ateliers volailles et porcs pour valoriser les échanges entre système végétal et système animal au niveau d’exploitations et de territoires (valorisation des effluents sur grandes cultures et valorisation des protéines et énergie des grandes cultures en alimentation animale). Très intéressante pour les élevages bovins pâturant, où on constate moins de pertes d’azote que dans les systèmes en bâtiment : 57 58

Source : Prospective Aliment - Céréopa Source : NOPOLU 2010 - excrétion totale des animaux dont 55% émise au pâturage (non maitrisée)

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-

La volatilisation du NH3 des effluents sur prairies est inférieure à celle en bâtiments (10 % contre 25%) car les urines s’infiltrent rapidement dans les sols. Il y a donc moins de risque de transfert qu’en bâtiment ou le contact avec l’air est plus important dans la durée. - La place des prairies dans la rotation permet une meilleure valorisation des reliquats au printemps sur la culture suivante. - Les pertes de nitrates sont relativement faibles dans les systèmes avec prairies : 40-60 kg N / ha / an. Cette efficacité est cependant corrélée à l’intégration de légumineuses dans les systèmes, et l‘optimisation des effluents d’élevage pour limiter les pertes et accroître l’azote disponible pour les cultures.

• Faisabilité : La présence ou l’absence d’infrastructures de collecte laitière, d’abattoirs et outils de transformation peuvent fortement limiter l’essor de ces systèmes. Au niveau interne à l’exploitation ce levier d’action implique des changements d’organisation et la mise en œuvre de nouvelles compétences, de moyens humains et la formation initiale. • Moyens de déploiement : soutien de politiques publiques pour repenser équilibres territoriaux et accompagner les changements. Concernant les élevages ruminants, besoin de recherche pour lever les limites de rendements des prairies et des cultures associées avec légumineuses,. Mesures liées : mesures réglementaires (contraintes de moyens et pratiques), mesures économiques (MAE et soutien aux productions), mesures volontaires (cahier des charges, labels), information / formation. 3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : les territoires sont fortement spécialisés à l’échelle France mais aussi de l’Union Européenne (polyculture-élevage = 14 % des territoires de l’Union Européenne). • Eléments sur les coûts : non connu • Impacts filière : des échanges peuvent être envisagés entre les différents maillons des filières animales et végétales. Par exemple en amont : traitement collectifs des lisiers et valorisation des co-produits issus des territoires spécialisés en Grandes Cultures • Réversibilité : quasi-impossible une fois les ateliers et les filières mis en place • Aléa : Accroissement de la résilience des systèmes face aux aléas (autonomie) • Temporalité des effets : long terme, une meilleure gestion des effluents pouvant entraîner une modification des pratiques de fertilisation minérale.

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Gestion de l’azote organique

M. Faciliter les échanges d'effluents d’élevage entre systèmes de production Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Adéquation des apports en azote aux besoins

Toutes OTEX, Régions d’élevage

• Utilisateurs quand l’échange se fait entre agriculteurs • Distributeurs avec les plateformes d’échange des coopératives • Producteurs si transformation de produits organiques

1) Description Il s’agit de faciliter les transferts d’effluents d’élevage vers des systèmes déficitaires en azote organique. Aujourd’hui, les effluents non normalisés peuvent être échangés uniquement dans le cadre de plans d’épandage (échanges de parcelles). Pour sortir du plan d’épandage, les effluents doivent être traités (séparation de la phase solide, séchage ou compostage) pour correspondre à des normes françaises rendues d’application obligatoire. Cette opération peut être réalisée à la ferme (méthanisation agricole, séchage des fientes de volailles) ou en prestation par des coopératives ou fournisseurs d’intrants. La facilitation des échanges peut se faire en modifiant la réglementation pour permettre aux agriculteurs d’exporter leurs déchets, ou en soutenant le marché des effluents normalisés (entre grandes régions spécialisées notamment). Il serait par ailleurs intéressant de créer un observatoire des effluents d’élevage (parallèle aux statistiques régionales de livraisons d’engrais minéral) pour mieux connaître les gisements, les quantités traitées et les types de produits commercialisés sur le territoire, pour mieux cibler les régions prioritaires. 2) Evaluation efficacité / faisabilité • Efficacité : le gisement d’effluents maîtrisables (hors pâturage) est estimé entre 700 et 900 kT d’azote, la part échangeable est aujourd’hui inconnue. • Faisabilité : existe de manière formelle au niveau local dans le cadre de plans d’épandage sans connaissance des volumes et existe aussi sur des échanges entre territoires (Bretagne  Beauce, Vendée ouest  Est et Poitou). Les marges de manœuvre pour l’échange entre deux exploitations restent toutefois très régies par les réglementations. • Pour les filières, la faisabilité est liée à l’essor des technologies de concentration de l’azote, la possibilité de normaliser pour certifier la qualité des produits échangés et la création de plateformes logistiques régionalisées • Moyens de déploiement : Les mesures liées à ce levier sont de plusieurs natures pour permettre de libérer les freins à la faisabilité et pousser à l’investissement dans des filières de traitement et d’échange des effluents. Mesures liées : Révision des procédures d‘autorisations administratives, Fiscalité, Subventions d’investissement, Permis négociable, Encouragement de filières

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3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : Ce levier est déjà existant à l’échelle des transferts d’effluents entre fermes, mais il n’existe pas de données sur les volumes échangés. On estime par exemple à environ 200 kT produits bruts / an qui transitent entre la Bretagne et la Beauce (source UNIFA) • Eléments sur les coûts : -

transferts entre exploitations proches : 0 à 100 € / ha / an (coût de l’épandage + produit)

-

plateformes et sites industriels : 1 M € (investissements très lourds + main d’œuvre et ingénierie de gestion des flux)

• Impacts filière : o

Amont : création de valeur ajoutée lors de mise en place de filière industrielle.

o

Aval : valorisation des démarches dans certains cahiers des charges (AB…)

• Réversibilité : à l’échelle exploitation annuel, à l’échelle filière, pas de retour possible • Aléa : risque technique car minéralisation obligatoire de la fraction organique (donc très lié aux conditions de température et d’humidité des sols) • Temporalité des effets : la réduction de la dépendance énergétique se fait à plus long terme avec les effluents organiques.

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N. Développer les techniques et moyens de compostage des effluents Groupe de déterminants impactés

Gestion de l’azote organique

• •

Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Systèmes d’élevage / Régions d’élevage en priorité

• Utilisateurs (qui pilotent l’épandage), distributeurs (marché de composts normés) • Prescripteurs et incitateurs (accompagnement de la mise en œuvre)

1) Description Le compostage est une technique permettant la transformation des effluents d’élevage avec un bon rapport C/N (fumiers) en un produit humifié, stabilisé et homogène, le compost, par fermentation aérobie. Le procédé de fabrication implique une élévation de la température, maintenue à 50°C pendant un minimum de 6 semaines, et une aération du tas d’effluents par retournements successifs. Cette technique permet de mieux valoriser les effluents d’élevage comme fertilisants car elle réduit leur volume de 50% par rapport au volume initial, elle homogénéise et émiette le produit permettant un épandage plus rapide et de meilleure qualité, et elle élimine les odeurs, permettant un épandage plus proche des habitations. Les doses de compost à apporter sont aussi plus faibles que pour un fumier, entre 10 et 20 tonnes par hectare selon la concentration en éléments fertilisants. Cependant, le compost est un produit organique stable, et présente donc des disponibilités en azote plus faibles qu’un fumier (minéralisation plus lente). Il s’apparente alors à la catégorie des amendements : il permet d’améliorer les caractéristiques du sol (moindre sensibilité à l’érosion, augmentation de la vie microbienne, meilleure capacité de rétention d’eau, etc.) s’il est épandu à intervalles réguliers. En revanche, la minéralisation de cette matière organique compostée sera plus régulière que dans le cas d’un fumier, générant un effet positif sur la fertilisation à long terme, et simplifiant l’ajustement de la fertilisation minérale. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Au sein d’une exploitation, l’efficacité de ce levier sur la réduction de la dépendance aux engrais azotés de synthèse se produit surtout à long terme (amélioration de la structure des sols et minéralisation progressive de l’azote). La quantité d’azote minéralisé par les composts dans l’année de l’apport varie entre 20 et 30 % pour les fumiers de bovins (composition moyenne de 6 à 8 kgN /t), et est un peu plus élevée pour les fumiers de volailles (composition moyenne de 20 kgN /t), en fonction des conditions climatiques et des types de sol. Les années suivantes elle est de 15 à 20%. L’efficacité réside également dans l’amélioration du pilotage de la fertilisation. A l’échelle du territoire, ce levier permet de réduire la dépendance aux engrais azotés de synthèse en facilitant l’exportation de l’azote organique des zones excédentaires vers les zones ayant habituellement recours à ces engrais minéraux. Ainsi, les éleveurs de volailles peuvent exporter 1 000 kilotonnes d’azote organique excédentaires par an en les transformant en produit stable et normé (de composition exacte connue). Par exemple, la coopérative CAVAC en Vendée transforme du fumier de volaille de 115 apporteurs avec la

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plateforme « fertil’éveil » en 33 800 T de produit normé et exportable vers les zones grandes cultures. •

Faisabilité : L’encadrement réglementaire régissant la pratique du compostage (rubrique 2780 des ICPE) impose une certaine organisation qui peut coûter du temps à l’agriculteur (tenue de cahier de compostage, contrôle de la température, constitution d’un dossier ICPE, etc.) et qui peut nécessiter des investissements (aération du tas, évacuation des jus,etc.). De même, si la commercialisation du compost est envisagée, la normalisation (NFU 44051 et NFU 42001) implique d’effectuer des analyses (éléments N, P et K, éléments traces métalliques, analyse microbiologique, etc.) qui peuvent être coûteuses et chronophages. Cependant, cette réglementation favorise aussi le développement de l’utilisation de cette forme d’engrais en fournissant une certaine garantie de qualité et en augmentant la confiance en ces produits.



Moyens de déploiement : Pour encourager le compostage, des mesures permettant de faciliter l’organisation sont donc les plus pertinentes (regroupements entre agriculteurs, mutualisation des moyens, contrats avec industriels et collectivités, facilitation des procédures administratives, développement de la filière, etc.) ainsi qu’un éventuel soutien économique à l’investissement et des mesures de communication. Mesures liées : encouragement de filières, facilitation de procédures administratives, contrats entre agriculteurs, avec industriels et collectivités, subventions d’investissement, conseil, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : Le compostage des effluents, très utilisé en agriculture biologique est également de plus en plus pratiqué en élevage conventionnel. Cette technique ancienne a notamment été réhabilitée grâce à la mécanisation des aérations (réalisées principalement par retournement). Le renforcement des règles et des contrôles concernant les bonnes pratiques de fertilisation dans le cadre de l’éco-conditionnalité des aides est également incitatif pour le développement d’unités de compostage.



Eléments sur les coûts : Le coût d’un chantier de compostage de 800 tonnes de fumier est évalué à 1913 € hors main d’œuvre, mais le surcoût lié à la phase de retournement par rapport à un chantier d’épandage traditionnel de même envergure (coûtant 1610€) est ensuite compensé par l’économie de main d’œuvre liée à la quantité moins importante de produit à épandre (ici 480 tonnes de compost), avec un coût total équivalent pour chacun des deux types de chantiers, d’environ 2700€.



Impacts filière : Ce levier peut entraîner un impact positif sur le développement de filières à plusieurs niveaux : Il permet le développement de filières d’échanges de compost normé, impliquant des vendeurs d’azote, et rendant possible leur association avec des prestataires d’épandage pour la vente de matériel adapté à ce type de produit (par exemple, la plateforme de compostage Fertil’Eveil en Vendée qui s’est associée à des vendeurs d’automoteur) ; Il permet le regroupement d’agriculteurs voire de coopératives pour mettre en commun leurs ressources et développer des plateformes de compostage communes ;

-

-

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-

Il permet la coopération avec les collectivités pour co-valoriser les déchets verts dans le processus de compostage (amélioration du rapport C/N du fumier ou possibilité de composter le lisier).



Réversibilité : Faible en raison des investissements et de l’organisation requis pour le développement de ce levier (structuration de filières).



Aléa : L’apport régulier de compost permet de diminuer l’aléa quant à la quantité d’azote apportée car il rend plus facile le pilotage de la fertilisation, et il permet d’améliorer la stabilité structurale des sols.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier s’observent à long terme à l’échelle d’une exploitation (amélioration de la qualité du sol et minéralisation lente de l’azote) ainsi qu’à l’échelle du territoire (du fait du temps de mise en place et d’organisation de la filière).

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O. Développer les techniques et moyens de méthanisation des effluents

Gestion de l’azote organique

Groupe de déterminants impactés • •

Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Systèmes d’élevage / Régions d’élevage en priorité

• Utilisateurs (qui installent l’unité et pilotent l’épandage) • Prescripteurs et incitateurs (accompagnement de la mise en œuvre d’un projet, évolution de la normalisation du digestat) • Distributeurs (développement d’un marché de digestats)

1) Description La méthanisation des effluents d’élevage est un procédé de dégradation anaérobie de la matière organique qu’ils contiennent se déroulant dans un digesteur thermo-régulé, sous l’action de bactéries méthanogènes. Cette minéralisation conduit, d’une part (2/3 de la matière organique biodégradable), à la production de biogaz composé principalement de méthane (50 à 70%) et de CO2 et valorisable en tant qu’énergie renouvelable sous différentes formes (électricité, chaleur, carburant, gaz naturel), et, d’autre part, à un produit humide riche en matière organique partiellement stabilisée (molécules plus résistantes), appelé « digestat », et susceptible d’être épandu sur des terres agricoles. Lors de la digestion, la teneur en matière sèche diminue (convertie à 50% en biogaz), provoquant une diminution de la quantité de carbone, tandis que l’azote est conservé et minéralisé (réduction en ammonium dissout), ce qui a pour effet de renforcer la teneur en azote total du digestat par rapport aux effluents bruts. Ceci engendre l’augmentation de la valeur fertilisante du digestat par rapport au substrat initial et facilite le pilotage de la fertilisation : on obtient une meilleure disponibilité et une meilleure utilisation de l’azote par les plantes permettant de réduire le recours aux engrais minéraux. En diminuant la quantité de matière organique pour le sol, ce procédé, diminue aussi l’immobilisation de l’azote par les microorganismes et les risques de lixiviation à long terme mais limite les effets résiduels. Cependant, le potentiel d’humification du digestat dans les sols n’est pas altéré par rapport au substrat, les molécules résistantes intervenant dans ce processus étant peu dégradées lors de la digestion. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Le procédé de méthanisation a pour effet de convertir une grande partie de l’azote organique (protéines et urée principalement) en azote minéral sous forme essentiellement ammoniacale (entre 45 et 85 % de l’azote total du digestat). Une étude commanditée par l’ADEME en 2011 sur la valeur agronomique des digestats a montré que les teneurs en azote total varient en moyenne de 16 g/kg MS à 76 g/kg MS selon la nature et le mélange des intrants. Les teneurs les plus élevées sont observées pour des digestats issus de la méthanisation du lisier de porc et des sous produits animaux. A l’opposé, les teneurs les plus faibles sont associées à des digestats issus de la méthanisation de bio-déchets, déchets verts et du lisier-fumier bovin. Les engins agricoles qui épandent du digestat liquide (contenant

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beaucoup d’eau) consomment plus de fuel. Il est impératif que le matériel d’épandage réduise le risque élevé de volatilisation d’ammoniac (injection ou au minimum rampe à pendillards). •

Faisabilité : Le développement d’unités de méthanisation à la ferme est principalement conditionné par leur rentabilité, car celles-ci représentent un investissement important. L’assurance de débouchés intéressants, à la fois pour le biogaz (vente d’électricité, valorisation de la chaleur, etc.) et pour la valorisation du digestat (économies d’engrais de synthèse sur l’exploitation ou séparation de phase/ séchage de la phase solide/ compostage pour vendre un produit normé), de même que la sécurisation de l’approvisionnement du méthaniseur pour l’ajout nécessaire d’autres déchets et la rémunération liée à leur valorisation, constituent donc des données déterminantes. Un projet de méthanisation nécessite aussi l’acquisition de compétences techniques concernant le montage de projet et l’exploitation (choix, préparation et tri des substrats) ainsi qu’un certain nombre de précautions (consignes strictes de sécurité etc.), qui rendent sa mise en œuvre complexe à l’échelle de l’exploitation.



Moyens de déploiement : Pour encourager la méthanisation à la ferme, des dispositifs financiers pour améliorer la rentabilité des projets sont nécessaires tels que des tarifs de rachat d’énergie issue du biogaz ou des subventionnements, ainsi que des mesures de soutien à l’organisation intégrée des filières (approvisionnement des unités en partenariat avec les industries, les collectivités et les agriculteurs), sans oublier l’encouragement du recours au digestat comme fertilisant auprès du monde agricole (conseil et communication pour l’intégration dans le plan d’épandage, innovation et normalisation). Mesures liées : encouragement de filières, facilitation de procédures, contractualisation agriculteurs/industriels/collectivités, subventions d’investissement, normalisation, conseil, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : A la fin 2012, on compte plus de 300 installations de méthanisation en France, dont 90 à la ferme ayant une capacité moyenne de traitement de 7 700 t par an59. Ce développement est faible comparé à d’autres pays en raison notamment de la dépendance aux subventions. Cependant, le nombre d’unités est en augmentation, avec 10 installations en 2008, 40 à la fin 2011 et 70 nouveaux projets par an constatés depuis 2011, en raison notamment de la revalorisation du tarif d’achat de l’électricité issue du biogaz et de la mise en place d’un tarif d’achat du biogaz injecté dans le réseau de gaz naturel cette année-là. Enfin, le plan Energie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA) en faveur du développement de la méthanisation agricole, présenté par le gouvernement début 2013, affiche l’objectif de créer 1 000 installations d’ici 2020, avec une augmentation de 40% du dispositif d’achat d’électricité produite à partir de méthane pour les effluents provenant de l’élevage, un appel à projet pour favoriser le recours au digestat dans les exploitation, ainsi que la simplification des tâches administratives et du raccordement au réseau électrique. Ce dispositif devrait ainsi contribuer à l’augmentation du niveau de pénétration de ce levier.



Eléments sur les coûts : En général, une unité de méthanisation représente un investissement de 5 000 à 6 000 euros par kilowattheure installé, soit entre 1,4 et 1,6 millions d’euros pour une

59

Source : site du MAAF - questions réponses sur le plan EMAA, mars 2013

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puissance moyenne de 200 kilowatts. On estime en général que la rentabilité d’une installation dépend à 20% des subventions fournies par l’ADEME, le Conseil Régional ou l’Union Européenne. • -

Impacts filière : Ce levier impacte positivement le développement de plusieurs filières, simultanément : Les différentes filières de valorisation du biogaz (rachat d’électricité, de gaz naturel, etc.) ; Les filières de valorisation du digestat (échanges, post-traitement, commercialisation éventuelle) ; Les filières d’approvisionnement du méthaniseur (contractualisation avec les collectivités et les industriels pour la co-valorisation des biodéchets ou avec les agriculteurs pour introduire des résidus de culture ou des cultures énergétiques dans le digesteur). Il faudra faire attention toutefois, dans ce dernier cas, à ce que ce débouché ne vienne pas concurrencer les débouchés alimentaires.



Réversibilité : Faible en raison des investissements et de l’organisation de la filière requis pour le développement de ce levier.



Aléa : Le développement de méthaniseurs à la ferme diminue la vulnérabilité économique de l’exploitation en diversifiant l’activité agricole, cependant, la pérennité et le montant de la rémunération sont variables.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier sont rapidement observables au niveau de la parcelle.

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P. Développer les autres techniques et moyens de traitement des effluents Groupe de déterminants impactés

Gestion de l’azote organique

• •

Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Systèmes d’élevage / Régions d’élevage en priorité

• Utilisateurs et distributeurs (installation de l’unité, pilotage de l’épandage, et développement d’un marché des produits) • Prescripteurs et incitateurs (accompagnement de la mise en œuvre d’un projet, évolution de la normalisation)

1) Description Il existe plusieurs procédés de traitements des effluents, bruts ou ayant subi une première transformation par méthanisation, qui permettent d’optimiser leur valeur fertilisante et de faciliter leur utilisation et leur transport : La séparation de phases permet, après digestion ou non, de séparer les effluents entre une fraction solide riche en matière organique stable et en phosphore, et une fraction liquide riche en ammoniac. Elle permet ainsi de disposer, d’une part, d’un produit utilisable comme amendement de fond et plus facilement transportable, et, d’autre part, d’un produit similaire à un engrais azoté liquide, de volume réduit et donc plus facilement stockable, soit d’optimiser les apports, notamment lorsque qu’il existe des contraintes en matière d’épandage. Le stripping est un traitement applicable au digestat de méthanisation permettant de récupérer et de concentrer l'azote des effluents, minéralisé sous forme ammoniacale, dans une solution de nitrate ou de sulfate d'ammonium, facilement transportable et utilisable comme engrais. Le procédé s’organise en une phase de stripping de l’ammoniac volatil dans une colonne d’échange gaz/liquide suivi par une phase d’absorption sur solution d’acide nitrique ou sulfurique. La déshydratation des effluents, des digestats ou des refus de séparation de phase est une technique de résorption qui permet d’obtenir un produit plus facile et moins cher à transporter par rapport à des produits humides. Sur un digestat brut, ce processus implique une concentration de l’ensemble des éléments dans un unique co-produit solide, engendrant une teneur accrue en éléments fertilisants, ce qui le rend assimilable à un engrais. Après séparation de phase, par contre, le taux de capture en éléments fertilisants par déshydratation du refus n’est pas total car une partie des éléments reste dans la fraction liquide, rendant le produit plutôt assimilable à un amendement. Enfin, l’accessibilité à la normalisation, et donc à la commercialisation, est potentiellement envisageable pour ces produits (fractions solides avec 70% de matière sèche). La granulation de lisiers (pour les porcs), après séchage et ajout de compléments minéraux et/ou d’autres fertilisants organiques (processus de mélange, broyage puis granulation), de déjections avicoles, ou encore de fumiers, est une technique qui permet d’obtenir un produit homogène, stabilisé et hygiénisé, de plus grande densité soit plus facilement stockable, transportable et épandable, et pouvant être normalisé et vendu comme fertilisant organique à teneur élevée en éléments N, P et K. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions

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Efficacité : L’efficacité de ce levier réside principalement dans la transformation de la forme de l’engrais organique en un produit concentré plus facilement transportable et échangeable, et dont l’épandage est plus facilement pilotable. Ainsi, l’exportation d’effluents depuis les territoires en excédent est favorisée, permettant la substitution de formes organiques aux engrais azotés de synthèse, tandis qu’au sein même des territoires soumis à contraintes d’épandage, la gestion et la valorisation de l’azote organique se trouvent simplifiées (réduction de volume pour le stockage, transport vers des parcelles éloignées, etc.).



Faisabilité : Le développement de ces procédés de traitement est principalement conditionné par leur coût et leur rentabilité car ils représentent souvent un investissement important. Ainsi, l’assurance de la valeur ajoutée apportée au produit brut ainsi que la conservation d’un prix compétitif autorisant l’ouverture du champ des débouchés sont nécessaires. De plus, le pilotage des installations de traitement, même s’il peut être automatisé, requiert un savoir faire particulier, du temps et des contrôles, ce qui rend complexe la mise en œuvre de ce levier à l’échelle de l’exploitation.



Moyens de déploiement : Pour encourager ces traitements des effluents, un contexte incitatif est nécessaire, à la fois du point de vue économique (subventions d’installation d’unités, jeu sur les primes à l’efficacité énergétique pour la valorisation de chaleur par déshydratation, etc.) ainsi que sur le plan réglementaire (normalisation des produits de traitement, contraintes sur les émissions liées à la gestion effluents d’élevage, etc.). Enfin, le soutien à l’innovation ainsi que l’information, permettant l’amélioration des techniques disponibles et leur accessibilité au plus grand nombre, participeront aussi du développement de ce levier. Mesures liées : subventions d’investissement, plafond d’utilisation d’intrants, facilitation de procédures, normes produits, encouragement de filières, contractualisation agriculteurs/industriels/collectivités, appels à projets, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : Globalement, les procédés décrits ci-dessus sont encore assez innovants et peu démocratisés en France, bien que le contexte réglementaire (plans d’épandage) et l’augmentation de la production d’effluents encouragent leur développement. L’innovation est encore en cours pour mettre ces techniques à disposition du plus grand nombre. Par exemple, des machines à granuler de petite capacité pour les fientes de volailles sont apparues récemment sur le marché, de ce fait, la granulation dès la sortie du poulailler est envisageable. Enfin, les débouchés sont encore limités pour les produits issus de traitements. Par exemple, l’usage de granulés de fientes de volailles est encore cantonné aux cultures spécialisées, ce produit n’étant pas assez compétitif pour un usage courant en grandes cultures compte tenu des frais supplémentaires de transport et de commercialisation qu’il représente. Cependant, l’évolution de la normalisation semble aller dans le sens de l’ouverture des débouchés.

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Eléments sur les coûts : L’installation d’une unité de traitement implique toujours un investissement important. A titre d’exemple, un séparateur de phase peut représenter un investissement de plus de 30 000 € et engendre des frais de maintenance et de fonctionnement importants. L’investissement pour une unité de stripping d’une capacité de 20 000 m3 par an de digestat est de 800 000 € et les coûts de traitement (hors investissement et main d’œuvre) sont relativement élevés : environ 13 € par tonne de digestat. Enfin, le coût global de la granulation de fientes de volailles en unité industrielle, de la collecte jusqu’au produit fini, est de l’ordre de 61 € par tonne.



Impacts filière : Ce levier impacte le développement de filières de valorisation des produits issus du traitement des effluents (échanges, commercialisation éventuelle) ainsi que les filières de développement et d’installation de ces unités de traitement innovantes.



Réversibilité : Faible en raison des investissements et de l’organisation de la filière requis pour le développement de ce levier.



Aléa : Le développement d’unités de traitement des effluents confère plus d’indépendance et de marge de manœuvre à l’exploitation quant à la gestion de ses effluents vis-à-vis de la réglementation (sortie de plan d’épandage de produits devenus commercialisables par exemple) et diversifie l’activité d’un point de vue économique.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier surviennent à long terme, notamment pour le retour sur investissement et la normalisation des produits.

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Q. Mieux valoriser les produits résiduels organiques hors effluents Groupe de déterminants impactés

Gestion de l’azote organique

• •

Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Toutes OTEX et principalement maraîchage, arboriculture, viticulture et céréales / Toutes régions

• Utilisateurs principalement (le choix se fait au niveau agriculteur), • Parties prenantes économiques et sociétales (approvisionnement)

1) Description La meilleure valorisation des produits résiduels organiques hors effluents consiste à recycler des matières considérées comme des déchets afin d’en récupérer l’azote utilisable sous forme d’engrais. Parmi ce gisement de ressources potentiellement substituables à l’utilisation d’azote minéral de synthèse se trouvent des produits résiduels d’origine agricole, comme les résidus de culture ou les déchets d’abattoirs de catégorie 2 et 3, et des déchets d’origine non agricole, comme les déchets d’industries agroalimentaires, les déchets de restauration collective, les biodéchets ménagers, les déchets verts de collectivités, ou encore les boues de stations d’épuration. Ces biodéchets peuvent être valorisés en agriculture après compostage ou méthanisation, ou par association de divers traitements (méthanisation suivie de compostage ou de séparation de phases par exemple, le digestat étant biologiquement moins stable et ayant une plus faible teneur en matière sèche que les produits finaux issus de ces seconds traitements). Les produits ainsi obtenus constituent des sources de matière organique stabilisée. Selon les types de produits organiques obtenus, la minéralisation de l’azote sera plus ou mois rapide et permettra d’améliorer le potentiel fertilisant des sols à plus ou moins long terme. L’autre aspect de ce levier est de favoriser l’augmentation de la valorisation des ressources organiques, par le développement, à la fois de la connaissance du gisement disponible (en termes de quantité et de qualité), et de la circulation de ces matières (échanges informels, et commercialisation). A noter que le traitement permet l’obtention de formes d’engrais plus facilement transportables et épandables que les produits résiduels organiques initiaux, mais qu’une attention toute particulière devra être portée à l’origine de ces derniers pour garantir la qualité agronomique et l’innocuité sanitaire du produit final. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Le gisement de produits organiques utilisable par l'agriculture est estimé à environ 180 000 tonnes d’azote par an, soit 2,3 fois les quantités déjà épandues actuellement pour ce type de produits. L'azote total représente généralement de 1 à 4% de la matière sèche de ces produits résiduaires organiques et le carbone organique total (COT) en représente de 20 à 30% pour les déchets verts et de 25 à 50% pour les ordures ménagères. On peut distinguer, selon les produits, un potentiel fertilisant par la fourniture d’azote à court-terme (critère issu de la combinaison de l’azote total et du rapport C/N) et un potentiel d’entretien à long terme de la fertilité du sol par l’augmentation de la matière organique. Ainsi, le compost de déchets verts est un produit assez pauvre en azote total et très stable, avec un taux de minéralisation faible de ce dernier (5% et

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10% les 1ère et 2nde années), l’apparentant plutôt à la deuxième catégorie. Le compost seul de tonte de gazon et de feuilles et celui de biodéchets ménagers sont un peu plus riches en azote, ce qui leur confère un meilleur potentiel fertilisant, tandis que le compost de boues de station d’épuration possède une valeur fertilisante moyenne mais non négligeable, avec un taux élevé en matière organique et seulement 10% de l’azote utilisable la 1ère année, ce qui l’apparente à un amendement cette année là, mais qui se dégrade rapidement les années suivantes, libérant ainsi les éléments fertilisants. Le compost permet donc une réduction de la quantité d’engrais azotés de synthèse à apporter et l’association de ces apports créé un effet synergique en faveur d’un plus grand prélèvement d’azote par la plante et d’un rendement plus important des cultures. Les digestats, eux, ont globalement une teneur en éléments fertilisants plus élevée et ces derniers sont plus rapidement disponibles. •

Faisabilité : Le principal frein à la valorisation agricole des déchets est constitué par les risques agronomiques, environnementaux et sanitaires liés à leur utilisation et à la faible connaissance de leurs caractéristiques, ce qui altère la confiance des utilisateurs et des consommateurs (risque de contamination des sols, de l'eau ou des produits agricoles par des métaux lourds, des produits chimiques ou encore des pathogènes, et faible connaissance de la valeur fertilisante et de l’effet à long terme de l’utilisation de ces produits). Le coût et l’approvisionnement des installations de traitement peuvent aussi être un facteur limitant, de même que la gestion logistique des produits pour l’épandage et le transport (importants volumes de produits requis du fait de leurs teneurs en azote).



Moyens de déploiement : Pour encourager le développement de ce levier, l’acceptabilité de ces types de fertilisants doit être améliorée par des garanties réglementaires, des contrôles, et des recommandations quant à l'utilisation des déchets et au traitement adapté en fonction de leur nature et de leur destination. Les accords et échanges entre les différents acteurs d’un territoire doivent aussi être facilités, et les investissements partagés ou compensés. Mesures liées : accords entre industriels/collectivités et agriculteurs, révision des statuts réglementaires des produits résiduels organiques, normalisation, facilitation de procédures administratives, assurance qualité, subventions d’investissements, CEA, formation, labels, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : Au XIXème siècle, l'agriculture urbaine et périurbaine utilisait déjà une large part des déchets urbains et des eaux usées pour l'entretien du sol et l'irrigation des cultures. Aujourd'hui, les matières épandues sont issues des filières agroalimentaires voire urbaines : boues de stations d’épurations, ordures ménagères et déchets verts compostés. Actuellement, 78 000 tonnes d’azote issu de produits résiduels organiques sont épandues chaque année en France. A l’échelle de l’Union Européenne à 27, 26 millions de tonnes de produits résiduels organiques ont été récupérées et traitées en 2010, générant 12 millions de tonnes de compost et de digestat, nécessitant pour leur valorisation en agriculture seulement 1,5 % de la superficie agricole (en cas de destination à ce seul débouché et à raison d’un épandage de 10 tonnes par hectare). Le potentiel européen issu de la collecte de ces résidus est estimé à 40 millions de tonnes de produits soit 3,2 % des surfaces agricoles utilisées pour l’épandage.

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Eléments sur les coûts : Les coûts de ce levier sont liés principalement à la logistique (transferts de matières) et aux investissements qu’il implique, ainsi qu’à la faible marge associée au produit recyclé (marge de prix de vente du compost sur le marché agricole d’une valeur de 3€/m3 en Europe en 2000 et incertitude existante sur la valeur du produit).



Impacts filière : Ce levier impacte positivement les filières de valorisation et de commercialisation des produits fertilisants issu du recyclage des produits résiduels organiques. Il permet aussi de développer des interactions entre les différents acteurs au sein d’un territoire, créant ainsi une écologie industrielle où les bénéfices sont partagés (recyclage des déchets et production de fertilisants).



Réversibilité : Faible du fait de l’implantation d’installations de traitement, du développement de filières d’échanges co-dépendantes et de la mise en place d’un marché de valorisation des produits.



Aléa : L’utilisation répétée de composts améliore les propriétés des sols et augmente l’efficacité de prélèvement de l’azote par les cultures.



Temporalité des effets : Les effets s’observent surtout à moyen et long terme car l’azote est surtout sous forme organique et un temps de minéralisation est nécessaire.

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Gestion de l’azote organique

R. Mieux gérer et valoriser les effluents d'élevage Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Adéquation des apports en azote aux besoins

OTEX élevage et polyculture, Régions d’élevage

• Utilisateurs des effluents organiques sur l’exploitation, • Prescripteurs autour du conseil sur la valorisation des effluents

1) Description Il s’agit de promouvoir, auprès du monde agricole, l’intérêt de la fertilisation organique, pour optimiser le recours aux engrais azotés de synthèse. Deux objectifs sont associés à cette démarche : •

La réduction des pertes gazeuses pour augmenter la part d’azote valorisable par les cultures (l’ammoniac représente 30 % de pertes d’azote des fumiers et lisiers et le protoxyde d’azote représente entre 1 % (lisier) et 10 % (fumier) de l’azote perdu). L’ajustement précis des rations, la couverture des fosses, l’application localisée (pendillards) ou par enfouissement (cf. levier U), les techniques de séparation de phase (cf. levier P), le compostage (cf. levier N) sont différentes actions qui peuvent réduire ces pertes.



L’optimisation de la valorisation agronomique de l’azote disponible des effluents. Ici on cherche plus l’amélioration des connaissances sur la biodisponibilité en azote des différents produits, et le développement de l’utilisation d’outils opérationnels de fertilisation. 2) Evaluation efficacité / faisabilité

• Efficacité : Ce levier améliore l’efficacité énergétique, en substituant a priori la fertilisation azotée de synthèse par des unités issues des effluents organiques mieux valorisées. • Faisabilité : La pleine efficacité de ce levier est parfois limitée par les réglementations relatives à l’azote et au phosphore (Directive Nitrates, Réglementation ICPE, etc) . En effet, le facteur limitant d’épandage devient aujourd’hui le respect de la norme Phosphore (100 kg / ha SAU). Les effluents porcins et volailles étant fortement dosés en cet élément, on limite donc les apports d’effluents organiques au maximum des possibilités en P2O5, ce qui limite les quantités d’azote organique et entraîne donc un recours aux éléments minéraux pour équilibrer les besoins des plantes. Au niveau des filières, sa faisabilité est liée à l’essor des technologies de concentration de l’azote, à la possibilité de normaliser pour certifier la qualité des produits échangés et à la création de plateformes logistiques régionalisées. • Moyens de déploiement : La promotion de ce levier peut passer par le soutien de toute action de recherche et développement, communication, information ou formation des agriculteurs sur l’intérêt des effluents d’élevage et sur la valorisation optimisée des éléments fertilisants.

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Mesures liées : Procédures de révision des statuts réglementaires, Redevance pollution (avec obligation d’analyses de la teneur en N organique et efficace des effluents), Couverture des risques environnementaux, Subventions d’investissements (à des systèmes de stockage valorisant la gestion agronomique des effluents), Encouragement de filières de méthanisation, Cahier des charges d’industriels (valorisant l’utilisation d’effluents organiques), Formation (sur la gestion des effluents dans les systèmes polyculture-élevage) 3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : Ce levier est déjà existant à l’échelle des transferts d’effluents entre fermes, d’après les enquêtes pratiques culturales 2006 et 2011, la dose d’azote minéral est systématiquement inférieure sur les parcelles recevant des effluents organiques. L’écart de dose entre les deux types de parcelles atteint en 2006 environ 10 à 20 kg N minéral/ha pour l’orge de printemps, le colza et le maïs fourrage, 30 kg pour le blé tendre, l’orge d’hiver et la betterave et 70 kg pour le maïs grain. En 2011, entre 15 et 20 kg d’N minéral par hectare pour le colza et l’orge de printemps, 24 kg pour le maïs ensilage, environ 30 kilos pour l’orge d’hiver, le blé et la betterave. L’écart reste le plus marqué sur maïs grain avec plus de 50 kg de différence. Ainsi, la prise en compte des apports organiques est d’ores et déjà importante dans la gestion de la dose d’azote minéral, notamment sur maïs grain. Toutefois des gains sont sûrement possibles car la situation a peu évolué depuis 2006. • Eléments sur les coûts : non connu • Impacts filière : Aval : valorisation des démarches dans certains cahiers des charges (AB…) • Réversibilité : Faible en cas d’investissement dans des systèmes de gestion des effluents ou matériel plus technique pour l’épandage. • Aléa : Il existe un risque technique car la minéralisation de la fraction organique est obligatoire et sa cinétique est peu connue (donc très lié aux caractéristiques de l’effluent et aux aléas climatiques). Des travaux de recherche et du transfert de connaissance supplémentaire sont donc nécessaires. • Temporalité des effets : long terme (cycles de l’azote plus long dans les systèmes avec effluents d’élevage).

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Développement le raisonnement et l'aide au pilotage de la fertilisation

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S. Favoriser le calcul de la dose d’azote par le développement et la diffusion d’outils d’aide à la décision pour la réalisation des plans de fumure prévisionnels Groupe de déterminants impactés •

OAD et pilotage



Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Toutes OTEX (à la fois grandes cultures et polycultureélevage) / Toutes régions

Le plan de fumure est mis en œuvre par l’utilisateur, mais l’outil, développé par les distributeurs ou les prescripteurs, est souvent destiné au conseiller terrain (prescripteur)

1) Description Les outils de planification de la fertilisation permettent d’établir un plan programmé sur l’année et sur toute l’exploitation des apports d’azote qui seront réalisés par l’agriculteur. Généralement basés sur la méthode du Bilan Global Azoté (stock d’azote minéral = Entrées – Sorties d’azote du système « Sol-Culture »), ils servent à la réalisation des « plans de fumure prévisionnels », intégrés à la conditionnalité des aides PAC et obligatoires en zones vulnérables. Parmi les principaux outils d’aide à la décision (OAD) pour plan de fumure prévisionnel (PPF) déployés en France on trouve : • Epiclès (d’InVivo), qui est un outil informatisé intégrant toutes les spécificités de l'exploitation (ateliers animaux, analyses de terre, etc.), les caractéristiques régionales (pluviométrie, conditions de minéralisation moyennes, etc.) et prenant également en compte les contraintes logistiques, budgétaires, environnementales et réglementaires de l'agriculteur ; • Planfum (des Chambres d’Agriculture), qui est un logiciel directement utilisable par l’agriculteur, lui fournissant des conseils de fertilisation pour ajuster au mieux ses doses, avec la valorisation des engrais de ferme et l’optimisation des frais liés aux engrais azotés de synthèse. Ces conseils sont établis pour l’azote avec la méthode du bilan et tiennent compte de l'histoire de la parcelle, des résultats d'analyses, etc. ; • AgriMap (d’Isagri, et certifié par Arvalis), qui est un logiciel utilisable directement par l’agriculteur fournissant le plan de fumure prévisionnel à partir de la donnée de la culture choisie, de l’objectif de rendement et du précédent cultural. Il présente l’avantage de pouvoir regrouper plusieurs exploitations et donc de pouvoir s’acheter en CUMA ; • Clé de sol (d’I-Cône), qui calcule les besoins et fournit les conseils pour optimiser les fertilisants minéraux et organiques prévus par l’exploitant, et dont la prise en main se fait par le conseiller. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

60

Efficacité : En ordre de grandeur, ce type d’outil permet d’économiser 10 kg N / ha sur blé et 20 kg N / ha sur colza60, soit respectivement 6 et 12 % des apports. Cependant, un OAD prévisionnel est basé sur des estimations et un ajustement est souvent nécessaire en cours de campagne

Source : communication Arvalis et Cetiom, 2011

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(limite de précision en situation d’élevage par exemple, où il existe une incertitude sur la cinétique de minéralisation réelle de l’azote des effluents). La meilleure prise en compte de l'azote organique dans le calcul du bilan se traduira par ailleurs par une économie d'engrais minéraux de 5 kg d’azote par hectare en moyenne. •

Faisabilité : Ces outils d’aide à la décision présentent l’avantage d’être parfaitement maîtrisés et d’être bien acceptés par le monde agricole. Ils sont, de plus, relativement simples à mettre en œuvre. Le principal frein à leur développement est donc leur coût.



Moyens de déploiement : Afin de développer ce levier, une mise à disposition de façon systématique de l’outil le plus adapté à l’exploitation à moindre coût est à préconiser. Cela peut passer par une mesure de réduction des prix à la source, des financements par des tiers, ou encore une formation des agriculteurs à l’utilisation de ces outils. Mesures liées : conseil/formation, CEA/CEE, renforcement de la réglementation, programmes de recherche et innovation, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : Le calcul prévisionnel de la dose d’azote à apporter est obligatoire en Zone Vulnérable et rentre progressivement dans les mœurs, la réglementation étant incitative (conditionnalité des aides par exemple). De plus, l’apprentissage augmente la zone de confiance en ces outils. Epiclès est le premier OAD prévisionnel en France, utilisé sur 1,7 millions d’hectares et par 12 000 exploitations (proposé par 38 coopératives). Planfum, lui, est utilisé sur 3 000 exploitations environ. Farmstar était développé en 2011 sur 450 000 ha de colza, blé et orge.



Eléments sur les coûts : Le coût pour l’utilisateur est variable selon les outils, mais inférieur à 1000 € par an (de 5 à 10 €/hectare).



Impacts filière : o

A l’amont, le développement de ce levier permet la création de valeur pour les fournisseurs d’OAD et de conseil.

o

Il est en revanche sans effet significatif sur les quantités produites pour l’aval.



Réversibilité : Annuelle.



Aléa : Ce type d’outils présente le risque d’augmenter la dépendance au conseil des agriculteurs. Il améliore la technicité de l’agriculteur qui dispose d’un outil de mesure directe de l’incidence de ses pratiques d’apport.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier s’observent à l’échelle annuelle.

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T. Développer et diffuser l’ajustement des apports d'azote en végétation notamment par les outils d’aide à la décision Groupe de déterminants impactés •

OAD et pilotage



Disponibilité en azote du système Adéquation des apports en azote aux besoins

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Systèmes spécialisés grandes cultures / Toutes régions et en particulier les Zones Vulnérables

Fourniture et encadrement par distributeurs (dont fabricants d’EAS) ou prescripteurs, et mise en œuvre par les utilisateurs. La commercialisation implique également des sociétés privées (ex : Astrium)

1) Description Le pilotage de la dose d’azote au cours de la campagne est basé sur des méthodes et des technologies variées permettant de réaliser un diagnostic de l’état de nutrition azotée du couvert en cours de culture et de disposer des règles de décisions associées pour ajuster à la hausse ou à la baisse la dose d’engrais à apporter. Différents outils d’aide à la décision existent et sont souvent associés au fractionnement de l’apport et à l’utilisation de matériel d’épandage de précision (cf. fiches U et V), ces outils permettent à la fois d’adapter précisément la quantité (totale et des fractions), ainsi que la période d’apport de l’engrais azoté. Dans la plupart des outils, l’état de référence utilisé pour le calcul du conseil est plus ou moins lié à la notion d’Indice de Nutrition Azotée (INN). Les principaux OAD de pilotage actuellement utilisés en France sont : • Ramsès (II) (d’InVivo) et Jubil (d’Arvalis et de l’INRA), qui se basent sur la teneur en nitrates (NO3) du jus de bas de tige pour diagnostiquer les besoins en azote de la culture (dosage par bandelette colorimétrique puis utilisation d’abaques) ; • N Tester (de Yara et d’Arvalis) et SPAD (d’InVivo et de Minolta), qui se basent sur la mesure de la transmittance des feuilles durant la montaison à l’aide d’un appareil à main pour connaître la teneur en chlorophylle corrélée à l’état de nutrition azotée de la plante ; • N Sensor (de Yara et d’Arvalis), qui se base sur la mesure de la réflectance du couvert en continu par proxy-détection avec un appareil embarqué sur le tracteur, permettant ainsi d’ajuster la fertilisation en temps réel ; • GPN Pilot (de GPN), qui se base aussi sur la mesure de la réflectance du couvert végétal, grâce à un boîtier à main fournissant directement le conseil en fertilisation ; • Farmstar (d’Astrium, d’Arvalis et du Cetiom), qui fournit des cartes de préconisations à partir de la mesure de la réflectance du couvert par télédétection (images satellite). 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Ces outils permettent d’ajuster précisément les apports d’azote aux besoins réels de la culture et ainsi d’augmenter l’efficience d’utilisation de cet élément. Ils permettent aussi, le plus souvent, de réaliser des économies d’azote (sauf cas de carence constatée), estimées autour de 10 à 20 euros par hectare. En termes de quantités d’azote utilisées, le service Farmstar affiche une économie de 100 000 tonnes sur 10 ans.

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Faisabilité : Les freins à l’utilisation de ces OAD de pilotage diffèrent selon leur type : certains sont considérés comme coûteux (N sensor, Farmstar), d’autres comme chronophages ou fastidieux à mettre en œuvre (Jubil). De nombreux outils sont déjà disponibles permettant à chaque agriculteur de choisir celui qui lui convient le mieux (selon un équilibre entre le coût et l’investissement personnel requis). Cependant, ces outils, surtout orientés grandes cultures, ne sont pas disponibles pour toutes les exploitations.



Moyens de déploiement : Afin d’actionner ce levier, des mesures permettant un meilleur accès aux outils devront être privilégiées, jouant à la fois sur le coût (subventions, incitations), sur la facilité d’utilisation (accompagnement et formation de l’agriculteur, R&D pour l’amélioration des outils vers un conseil intégré et un faible temps de mise en œuvre), et sur le déploiement des OAD aux régions d’élevage où il existe un bon potentiel de valorisation (programmes de recherche et d’innovation et campagnes d’information sur les outils permettant la mesure de l’azote organique réellement valorisé par la culture). Mesures liées : subventions d’investissement, fonds azote, contrats entre agriculteurs et avec industriels, CEA, conseil/formation, programmes de R&I, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : Le pilotage en végétation est optionnel, contrairement au plan prévisionnel de fumure. En 2006, 20% des exploitations procèdent à une réévaluation de la dose azotée à apporter en cours de végétation et 7% des surfaces seulement font l’objet de la mise en œuvre d’outils de pilotage. Les OAD de pilotage sont par ailleurs surtout déployés dans les systèmes de grandes cultures, étant souvent disponibles uniquement pour le blé (57% des surfaces suivies en 2006), l’orge (32%), la pomme de terre, le maïs (presque pas de surface suivie en 2006), le colza ou encore la betterave. En différenciant le niveau de pénétration selon les outils, Jubil est utilisé sur quelques dizaines de milliers d’hectares, Farmstar sur plus de 600 000 hectares, et environ 150 exploitations sont équipées avec N Sensor contre 2000 pour N Tester.



Eléments sur les coûts : Les coûts pour l’agriculteur sont très variables selon l’OAD choisi : ils varient de 500 € pour Jubil à 15 000 € pour N Sensor en investissement initial, en passant par des coûts intermédiaires comme pout GPN Pilot, à 2800 €.



Impacts filière : A l’amont, le développement de ce levier permet la création de valeur pour les fournisseurs d’OAD et de conseil. Il est en revanche sans effet significatif sur les quantités produites pour l’aval.



Réversibilité : Annuelle pour des OAD comme Jubil ou souscrits à l’année, et plus faible pour les OAD qui impliquent d’investir dans du matériel (N Tester, N Sensor, GPN, etc.).



Aléa : Le pilotage de l’azote en végétation a un impact positif sur l’homogénéité et la valeur des rendements.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier s’observent à l’échelle annuelle.

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OAD et pilotage

U. Diffuser les techniques et outils sur les modalités d'apports d'azote Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Adéquation des apports en azote aux besoins

Toutes OTEX / Toutes régions

Utilisateurs principalement (le choix se fait au niveau agriculteur), et prescripteurs (conseiller technique directement ou via un OAD de pilotage de la fertilisation)

1) Description Il existe différentes pratiques concernant les modalités d’apport d’azote permettant de réduire la dépendance aux engrais azotés de synthèse, notamment en limitant les pertes d’azote dans l’environnement (qui sont des pertes directes en termes de moyens de production mais qui génèrent aussi une incertitude sur la quantité d’azote réellement apportée à la plante, peu compatible avec les règles de la fertilisation raisonnée) : • Le fractionnement des apports d’azote dans le temps (2 ou 3 apports) permet de mieux suivre la cinétique de croissance de la plante (elle-même fonction des aléas climatiques) et ainsi d’adapter les apports à ses besoins réels au cours du temps (besoins mesurés à l’aide d’OAD de pilotage en végétation par exemple, cf. fiche T), sans perdre d’unité d’azote inefficace. L’intérêt réside dans le fait d’apporter la fraction la plus importante d’azote au moment où celui-ci est le mieux valorisé, soit en fin de cycle (forte croissance, montaison, épiaison). Dans cette même logique, retarder les apports, notamment le premier, peut être recommandé (utilisation d’une bande double densité comme indicateur par exemple), en tenant mieux compte notamment des reliquats d’azote minéral en sortie d’hiver pour les cultures d’hiver (blé, orge, colza) par exemple, pouvant suffire à subvenir aux besoins de la culture à cette période. • Optimiser les moyens d’apport d’engrais permet aussi de limiter les pertes d’azote, notamment par volatilisation, et donc de réduire les apports. On peut ainsi préconiser l’enfouissement direct ou rapide des effluents après épandage (lisiers et fumiers), l’injection dans le sol (lisiers), l’épandage localisé (lisiers), au moyen de pendillards par exemple, l’enfouissement localisé de l’engrais minéral solide apporté aux cultures de printemps au moment du semis, l’incorporation des solutions azotées (sur les cultures qui le permettent), de l’urée et du sulfate d’ammoniaque, un apport sous couvert dense, ou encore un apport en absence de vent par temps frais ou avant une légère pluie, voire une légère irrigation après épandage. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Le fractionnement de l’apport d’engrais azoté permet d’augmenter le coefficient réel d’utilisation de l’azote par la plante, et réserver une part importante de l’azote pour la fin de cycle permet de garantir un bon taux de protéines malgré une baisse des apports. Le gain en engrais azotés de synthèse obtenu en retardant le premier apport au printemps sur cultures d’hiver (blé, orge, colza) est estimé à 15 kg d’azote par hectare. L’enfouissement rapide ou l’injection des fumiers et lisiers permettent, eux, de réduire les émissions d’ammoniac (NH3) de 70 à 90% et les techniques d’application localisées pour les lisiers réduisent ces émissions de 25 à 35%. Ainsi, 118 / 132

l'enfouissement des apports organiques réalisé avec un matériel d'épandage à pendillards et broyeurs intégrés permet une économie d’engrais estimée à 7kg d’azote par hectare. L’enfouissement localisé de l’engrais minéral solide au moment du semis des cultures de printemps permet, lui, une économie de 12 kg d’azote par hectare. Cependant, malgré l’efficacité globale de ces pratiques sur la valorisation de l’azote par les plantes et sur la réduction des pertes azotées, la baisse effective de la dépendance aux engrais azotés de synthèse dépend de la prise en compte réelle de ces effets par l’agriculteur dans le calcul du bilan azoté. •

Faisabilité : Les contraintes existantes au fractionnement et à l’optimisation des apports d’azote dans le temps s’expriment en termes de temps de travail supplémentaire et d’organisation pour l’agriculteur, de praticabilité des parcelles, et de délais de mise à disposition de l’azote dans le sol pour la culture. Le développement des techniques d’enfouissement peut lui être contraint par le matériel nécessaire et par son coût.



Moyens de déploiement : Afin de développer et de garantir l’efficacité de ce levier, il faut bien assister les agriculteurs dans sa mise en œuvre, en les conseillant sur les meilleures pratiques à adopter, en communiquant sur les économies d’engrais azotés de synthèse possibles et en facilitant leur accès au matériel d’enfouissement. Des contraintes réglementaires peuvent aussi jouer sur le développement de ce levier (obligation d’enfouissement, etc.). Mesures liées : conseil/formation, obligation de pratiques, subventions d’investissement, fonds azote, MAE, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires



Niveau de pénétration : L’enfouissement immédiat reste peu répandu, obligatoire pour l’ammoniac anhydre jusqu’à son arrêt de commercialisation en 2010, il est fortement conseillé pour les lisiers. Les exploitations soumises à la réglementation ICPE ont l’obligation d’incorporer par le travail du sol les lisiers et fumiers immédiatement à 24 heures après épandage en fonction des produits. En ce qui concerne le fractionnement des apports, l’utilisation d’outils de pilotage de la fertilisation et les contraintes réglementaires existantes comme la tenue de cahiers d’épandage encouragent le développement de ces techniques.



Eléments sur les coûts : L’épandage localisé ou l’enfouissement engendrent des coûts supplémentaires, cependant ceux-ci peuvent être couverts en grande partie ou en totalité par les gains économiques substantiels issus de la réduction des pertes si celle-ci est prise en compte dans le plan de fertilisation.



Impacts filière : Ce levier n’a pas d’impact sur la filière avale de valorisation des produits agricoles en raison de la conservation d’un taux en protéines élevé. L’adaptation des apports d’azote peut en revanche impacter la filière phytosanitaire en amont, car elle limite les risques de verse et donc évite l’utilisation de raccourcisseurs.



Réversibilité : Moyenne si des investissements sont faits dans du matériel d’épandage adapté.



Aléa : Ce levier permet une meilleure maîtrise des risques pour les cultures liés aux conditions climatiques (possibilité d’adaptation des apports en cas de perturbation de la cinétique de croissance), ainsi que la réduction des impacts environnementaux liés à l’utilisation d’intrants azotés (diminution des pertes).

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Temporalité des effets : Les effets de ce levier s’observent à l’échelle annuelle et à long terme (changement de pratiques).

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OAD et pilotage

V. Développer l’agriculture de précision Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Adéquation des apports en azote aux besoins

Toutes OTEX / Toutes régions

Utilisateurs (qui pilotent l’épandage), distributeurs et prescripteurs (développement et diffusion des outils)

1) Description Ce levier regroupe l’ensemble des technologies d’épandage garantissant aux utilisateurs la maîtrise totale de la dose d’azote apportée par hectare, l’uniformité de sa répartition sur l’ensemble de la surface, ainsi que la modulation de la dose épandue selon l’endroit de la parcelle (agriculture de précision au sens propre du terme). On peut ainsi citer le développement d’équipements, qui, couplés à des OAD de pilotage de la fertilisation, permettent de réaliser des apports d’azote différenciés dans la parcelle selon les besoins mesurés des cultures. Par exemple, l’OAD Farmstar (cf. fiche T) peut être couplé à un système de radioguidage par satellite des outils d’épandage. Le développement de matériels d’épandage réguliers fait aussi partie de ce levier (épandage d’une dose constante à vitesse constante ou variable, répartition transversale et longitudinale régulière, facilité d’utilisation, etc.). Par exemple, le développement de la certification « éco-matériel » pour les épandeurs de produits organiques s’appuie sur cette technologie de précision. Enfin, le bon réglage de l’épandeur (selon le tableau d’épandage fourni par le fabricant d’engrais, avec l’utilisation sur l'épandeur d'un dispositif de bordures pour ne pas épandre en dehors du champ, etc.) est nécessaire pour un épandage précis, de même que le choix des conditions de travail (portance du sol, absence de vent, jalonnage préalable des passages, etc.). 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Ce levier permet de réduire efficacement la dépendance énergétique liée à la fertilisation (apports précis, limitation des pertes, machines performantes) et d’atteindre une très bonne efficience de l’azote pour les cultures à travers l’ « agriculture de précision » au sens propre du terme (apports à l’endroit précis où ils seront valorisés). Ainsi, par exemple, le service Farmstar a permis une économie de 100 000 tonnes d’azote sur 10 ans avec un gain de 10 unités d’azote par hectare (pour le blé) à 20 unités d’azote par hectare (pour le colza).



Faisabilité : La mise en œuvre de ce levier dépend essentiellement de l’accès à l’outillage, qui peut représenter un coût élevé pour l’agriculteur. En ce qui concerne la maturité de la technique, de nombreux outils sont maintenant disponibles, mais il existe encore une marge de progrès en termes de recherche, notamment pour le pilotage de l’épandage des fertilisants organiques. Enfin, la mise au point et le réglage du matériel peut nécessiter un certain temps, notamment d’apprentissage, pour l’agriculteur.



Moyens de déploiement : Afin d’actionner ce levier, des mesures de soutien économique à l’investissement doivent être mises en œuvre, sous la forme de subventions associées à des politiques publiques, ou bien sous la forme de financements dans le cadre de contrats privés

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impliquant les producteurs d’azote, les acteurs à l’aval de la filière, ou encore les agriculteurs entre eux. Des normes de matériel permettront aussi le développement de ce levier. Mesures liées : subventions d’investissement, fonds azote, contraintes réglementaires sur le matériel d’exploitation, CEA, contrats avec industriels et entre agriculteurs, etc. 3) Eléments de caractérisation complémentaires •

Niveau de pénétration : Les outils précis d’épandage sont bien répandus pour l’azote minéral mais leurs équivalents sont encore mal développés pour l’azote organique. L’agriculture de précision couplée à des OAD de pilotage fait son chemin (par exemple, Farmstar a été utilisé en 2012 par 13 500 agriculteurs sur près de 620 000 hectares), mais ces services ne couvrent pour l’instant pas tout le territoire, ni toutes les cultures (par exemple, le service Farmstar n’est disponible que pour le blé, l’orge et le colza).



Eléments sur les coûts : L’investissement dans du matériel de précision peut représenter un coût assez important et donc nécessiter de grandes surfaces pour être rentabilisé (environ 3000 hectares pour des appareils traînés de type épandeurs d’engrais pneumatiques à rampe). Par exemple, un appareil équipé d’un dispositif de débit proportionnel à l’avancement (DPA) et d’un système de pesée embarqué pour évaluer l’écoulement de l’engrais coûte de 15 000 à 25 000 € (avec l’équipement spécial type antenne GPS, etc. inclus).



Impacts filière : Le développement de ce levier impactera positivement la filière du machinisme agricole et celle de la distribution des OAD (ventes et innovation).



Réversibilité : Faible en raison des investissements importants requis.



Aléa : L’augmentation de la précision d’épandage diminue l’aléa en termes de rendement (baisse des risques de verse et de carence) et les équipements à commande assistée offrent un meilleur confort de travail.



Temporalité des effets : Les effets de ce levier s’observent à long terme (amélioration de la performance de l’épandage).

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Création d'un contexte favorable à l'amélioration de la performance énergétique liée à la fertilisation

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Contexte favorable

W. Favoriser les filières d'approvisionnement durables en EAS Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Adéquation des apports en azote aux besoins

Toutes OTEX, Toutes régions

Producteurs

1) Description L’origine des produits influe fortement sur le contenu énergétique de ceux-ci (exemple des produits d’importation d’origine Russe ou de Trinidad-et-Tobago produits à partir de gaz naturel, ou d’origine américaine issus de gaz de schistes). Le type de produit joue aussi en fonction de l’énergie demandée pour le process. L’urée demande ainsi 25 % d’énergie de plus que l’ammonitrate pour sa production61.De plus, si on compare l’efficacité de l’azote dans chaque produit, la différence du coût énergique augmente encore : l’ammonitrate serait ainsi 2 fois plus efficace au champ que l’urée ou la solution azotée62. 2) Evaluation efficacité / faisabilité • Efficacité : Pour améliorer l’efficacité au niveau des produits, les producteurs d’engrais se sont engagés dans des investissements lourds depuis 20 ans. D’autres pistes sont aujourd’hui envisagées comme le recours au biogaz plutôt qu’au gaz naturel pour produire l’ammoniac. • Faisabilité : Au niveau des producteurs Français d’engrais azotés, ces éléments sont actuellement en phase de R&D et vont devenir les enjeux de demain pour conserver la compétitivité de la filière. • Moyens de déploiement : Des programmes ambitieux de recherche pourraient être accompagnés ou impulsés par des signaux forts pour une amélioration de l’efficacité énergétique des produits. Mesures liées : mesures économiques (Ecotaxe, fonds azote, Certificats d’Economie d’Azote, Certificats d’Economie d’Energie), mesures volontaires (SME), information / formation (Appels à projets de recherche. 3) Eléments de caractérisation complémentaires • Niveau de pénétration : En cours au niveau de la filière engrais. • Eléments sur les coûts : Il existe peu d’éléments chiffrés sur les coûts de production, mais on peut toutefois faire un point sur l’efficacité énergétique des principales formes d’engrais (sous la forme d’un coût de valorisation de l’énergie) :

61 62

source Gest’im 2010 étude InVivo / GPN, 2011

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Forme d’engrais

kg d’azote / tonne

Prix

Prix

(€ / T juin 2013)

(€ / kg N)

Coût énergétique par unité d’azote (MJ / kg N)

Efficacité énergétique (MJ 63 consommés par € dépensé )

Urée

460

289

0,63

62,91

100 MJ / €

Solution azotée 39

300

202

0,67

58,81

87 MJ / €

Ammonitrate

335

284

0,85

47,47

55 MJ / €

Avec les conditions actuelles de prix, l’ammonitrate est donc deux fois plus efficace que l’urée sur le critère du coût énergétique par euro dépensé. Rappelons que l’urée représente environ 20% des engrais azotés simples livrés contre environ 50 % pour les ammonitrates. • Impacts filière : Historiquement, les unités de production d’engrais azotés en France et en Europe se sont engagées dans la production d’ammonitrate. • Réversibilité : Très faible pour les producteurs d’engrais (investissements trop importants pour mettre en place de nouvelles lignes de production une fois engagés). • Aléa : Non concerné • Temporalité des effets : Non Concerné

63

On considère ici que l’ensemble des coûts (énergie et € sont imputables à la phase de production)

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Contexte favorable

X. Développer les filières avales de valorisation des pratiques agricoles efficientes en engrais azotés de synthèse Groupe de déterminants impactés

Systèmes de production impactés

Acteurs impliqués

Stratégie de raisonnement de la production par l’exploitant agricole

Toutes OTEX / Toutes régions

Distributeurs et incitateurs à l’aval qui créent la demande et commercialisent les produits et utilisateurs (qui mettent en œuvre les pratiques)

1) Description Ce levier qui peut prendre diverses formes est avant tout organisationnel. Il comprend toutes les formes d’implication (engagements, initiatives,…) des maillons de la chaîne à l’aval de la production qui permettent de soutenir la mise en œuvre de pratiques efficientes en engrais azotés de synthèse au niveau de l’exploitation, voire l’implication des agriculteurs eux-mêmes dans la valorisation de cette forme de production. On peut ainsi citer l’organisation des entreprises de collecte et de stockage pour la réception des légumineuses récoltées, la participation des entreprises agroalimentaires dans la création d’une demande en produits regardante sur la forme et la dose d’azote appliquée, ou encore le regroupement d’agriculteurs pour créer des plateformes de vente voire un label visant à valoriser des produits exclusivement issus de pratiques valorisant l’azote de façon efficiente. 2) Efficacité, faisabilité, moyens d’actions •

Efficacité : Ce levier étant un levier facilitateur, son efficacité en termes de réduction du recours aux engrais azotés de synthèse est finalement conditionnée par l’efficacité des autres leviers, plus techniques, qu’il permet de promouvoir au niveau de l’exploitation. Cependant, son efficacité dépendra aussi du nombre d’exploitations qu’il permettra de toucher pour engager ces pratiques, et, plus il y aura d’acteurs impliqués, plus son efficacité sera importante.



Faisabilité : La faisabilité de ce levier est assez faible en raison du temps et de l’organisation qu’il exige entre les différents acteurs de la filière, à différents niveaux, pour structurer cette dernière. Les coûts que cela implique sont aussi à considérer, surtout dans la phase de structuration, notamment en termes d’investissements et de pertes de rentabilité. Un autre frein au développement de ce levier est l’inertie du système des acteurs, dans lequel la prise d’initiative est le facteur limitant.



Moyens de déploiement : Afin d’actionner ce levier, des mesures financières d’accompagnement au changement seront nécessaires, telles que des subventions d’investissement, des appels à projet, ou encore des systèmes assurantiels, ainsi que des mesures volontaires pour promouvoir les accords et l’organisation entre les différents acteurs de la filière, comme des cahiers des charges ou des labels.

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Mesures liées : contrats entre industriels/collectivités et agriculteurs, subventions d’investissement, fonds azote, couverture du risque, CEA, CPE, SME, labellisation, contrainte sur les pratiques etc.

3) Eléments de caractérisation complémentaires •

Niveau de pénétration : Les filières avales de valorisation des pratiques efficientes en engrais azotés de synthèse sont encore peu développées : il existe encore très peu de débouchés valorisant les légumineuses sur le marché, notamment en zones de grandes cultures, et certaines initiatives de terrain et labels spécifiques à la fertilisation ont été développés mais ensuite abandonnés (notamment Ferti-Mieux, mis en place de 1991 à 2002). Il existe cependant d’autres labels incluant cet aspect dans leur cahier des charges (Agriculture Biologique (AB), Demeter, Agriculture Raisonnée etc.), mais parmi de nombreux autres critères, et donc dont la notoriété ne dépend pas du critère « engrais de synthèse », dont la visibilité est plus faible.



Eléments sur les coûts : L’organisation des filières peut représenter des coûts assez importants pour les différents acteurs impliqués, à la fois en termes d’investissements (équipements, transport, etc.), mais aussi en termes de pertes de rentabilité, liées au changement d’organisation et à la période de transition.



Impacts filière : L’organisation des filières par l’aval génère des changements structurels bénéfiques pour les acteurs à l’amont (producteurs valorisant leurs bonnes pratiques, mais aussi prescripteurs adaptant leur conseil et leurs outils), et se répercute sous forme de valeur ajoutée à l’aval (commercialisation des produits).



Réversibilité : Faible en raison de l’implication d’un grand nombre d’acteurs dans la structuration des filières.



Aléa : Un risque existe pour les acteurs impliqués au moment du changement d’organisation et pendant toute la période de transition, mais les agriculteurs voient leurs débouchés plus sécurisés à terme, et ce dans un système global renforcé.



Temporalité des effets : Les effets d’un développement des filières s’observent à long terme en raison du temps d’organisation.

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Annexe 7b : bibliographie fiches leviers d’amélioration • Choix variétal « Guide technique 2013 – variétés de blé tendre » (brochure Sem-Partners). • Choix cultural et assolement « La diversification des assolements en France : intérêts, freins et enjeux. » Analyse n°51. Centre d’études et de prospective. Août 2012. « Réduction des engrais minéraux », fiche de la collection « Agriculture durable et maîtrise de l’énergie ». Brochures des Chambre d’Agriculture de Picardie, ADEME, IDELE. 2012 « Cultiver du colza d’hiver en association avec des plantes de service. Bilan de 3 années de références ». Chambre d’Agriculture de Poitou-Charentes et de Vendée. Décembre 2012. « Est-il possible d’améliorer le rendement et la teneur en protéines du blé en Agriculture Biologique au moyen de cultures intermédiaires ou de cultures associées ? ». E. Justes, L. Bedoussac, L. Prieur in Innovations Agronomiques (2009) 4, 165-176 • Résidus de récolte Description et efficacité : « Pour une bonne gestion des résidus de récolte ». Fiche Ferti-Mieux. Octobre 2004 Effficacité (lixiviation) : « Maîtrise de l’azote dans les agrosystèmes ». Les Colloques n°83, Reims (France) novembre 1996, 271- 286. http://books.google.fr/books?id=j3mhK_T8gkC&pg=PA278&lpg=PA278&dq=technique+enfouissement+des+r%C3%A9sidus+de+r%C3% A9colte+France&source=bl&ots=RDDyTpRqLx&sig=m7lu99rMx2TJJbLgVHx8gWQ9PYU&hl=fr&sa=X& ei=PbiHUamlCKqb0AW66oGwAQ&sqi=2&ved=0CFEQ6AEwBQ#v=onepage&q=technique%20enfouiss ement%20des%20r%C3%A9sidus%20de%20r%C3%A9colte%20France&f=false Pénétration : « Travail du sol et gestion des résidus de culture : enquête sur la gestion agroenvironnementale de 2006 » http://www4.agr.gc.ca/AAFC-AAC/display-afficher.do?id=1350671601177&lang=fra#a7 • CIPAN http://www.chambre-agri63.com/documents/Guide_CIPAN.pdf http://www.lecompa.fr/content/download/51829/443673/version/1/file/CIPAN_ficheWeb.pdf

« Les cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN) et engrais verts : protection de l’environnement et intérêt agronomique ». Destain JP, Reuter V, Goffart JP in Biotechnol. Agron. Soc. Environ. (2010) 14, 73-78 « Les engrais verts en agriculture biologique ». Brochure Association Grandes Cultures d’Aquitaine. Octobre 2012. « Les engrais verts de A à Z ». Livret issu des opérations Agri Mieux Bas-Rhinoises. Mai 2006. « Mesurez les éléments minéraux dans vos couverts. » in Techniques Culturales Simplifiées. n°59. sept/oct 2010. 29-31 « Mieux gérer l’interculture pour un bénéfice agronomique et environnemental : les cultures intermédiaires ».Fiche technique CRA Poitou-Charentes, décembre 2009.

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• Légumineuses « Les légumineuses protéagineuses pour améliorer les bilans environnementaux en grandes cultures : principaux travaux de l’INRA qui ont accompagné la naissance de la filière et les perspectives. » Duc G.1, Jeuffroy M.H in Innovations Agronomiques 12 (2011), p157-180 « Cultiver des associations céréales – protéagineux : Des intérêts agronomiques, économiques et environnementaux à découvrir. » Rapport technique final. Programme coordonné par l’UNIP avec le soutien du CASDAR. Appel à projets 2005 - N° 431 « Comment relancer la production et l’utilisation de protéines végétales françaises à partir de protéagineux et de soja ? » Présentation d’Antoine HENRION, Président de l’UNIP Colloque légumineuses à graines - 21 novembre 2012, Paris « Prairies multi-espèces : intérêt pour sécuriser le système fourrager ». Présentation de Pascale PELLETIER, Réunion Technique Fourrages - Ferme Expérimentale des Borde- 29 novembre 2012. « Nitrogen transfer from forage legumes to nine neighbouring plants in a multi-species grassland ». Karin Pirhofer-Walzl, Jim Rasmussen. in Plant and Soil (2012) 350, 71-84. Chambre d’agriculture du Calvados : observatoire 2010 Méteil et légumineuses fourragères : http://www.webagri14.com/meteil.asp « Mieux gérer l’interculture pour un bénéfice agronomique et environnemental : Légumineuses, commet les utiliser en cultures intermédiaires ».Fiche technique CRA Poitou-Charentes, décembre 2009. « Connaître et maximiser les bénéfices environnementaux liés à l’azote chez les légumineuses, à l’échelle de la culture, de la rotation et de l’exploitation ». Présentation de Françoise Vertès, MarieHélène Jeuffroy, Eric Justes, Pascal Thiébeau, Michael Corson. Carrefours de l’innovation Agronomique 2010. • Travail adapté du sol : Description : « La contribution en azote du sol reliée à la minéralisation de la MO : facteur climatique et régies agricoles influençant les taux de minéralisation de l’azote » http://tel.archivesouvertes.fr/docs/00/50/12/04/PDF/These_JF_VIAN_Travail_du_sol_en_AB_et_microorganismes.pdf Semis direct : http://www.chambres-agriculture-picardie.fr/fileadmin/documents/Oise/publications/plaquettesemis-direct.pdf http://www7.inra.fr/internet/Directions/DIC/ACTUALITES/DOSSIERS/sol/labour04.html « Principaux résultats d’essais sur des activateurs de sols en prairie de fauche ». Présentation Y. Seutin, D. Knoden, dans le cadre d’une opération Fourrages Mieux. Belgique, juin 2012. • Compostage http://www.bas-rhin.chambagri.fr/fileadmin/documents/Environnement-Innovation/agrimieux_2009/cabrhi9050443_compost_4logo_150dpi.pdf Plateforme fertil’>Eveil : http://www.cavacweb.info/press/CPinauguration_FertilEveil.pdf Réglementation : http://www.manche.chambagri.fr/compostage-reglementation.asp Coûts : http://www.univ-lehavre.fr/enseign/fst/projets/compostage/pages/couts.htm http://hmf.enseeiht.fr/travaux/CD0910/bei/beiere/groupe1/node/60#7 « Le compost : un produit à connaître ». Brochure FD CUMA - Chambres d’agriculture Pays de la Loire - IDELE. • Méthanisation

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Plan Energie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA) Journal de l’environnement : http://www.journaldelenvironnement.net/article/le-gouvernementdevoile-son-plan-methanisation,33921 http://www.journaldelenvironnement.net/article/le-foll-veut-faire-exploser-la-methanisationagricole,33548 « Utilisation du digestat comme fertilisant en agriculture », Valbiom « La qualité agronomique des digestats », Orgaterre « Méthanisation agricole », ADEME http://www.afpf-asso.fr/index/action/page/id/33/title/Les-articles/article/1804 « La méthanisation : état des lieux et perspectives de développement ». Les synthèses de FranceAgriMer n°1. Avril 2012. • Autres traitements des effluents : Séparation de phases : http://www.haute-marne.chambagri.fr/kit/batiments-effluents/dossierstechniques-batiments/separateur-de-phase.html Stripping : http://www.naskeo.com/installations_biogaz_digestats_stripping.html BIOGASYL, Retour d’expériences sur l’unité de stripping de l’azote Déshydratation : Méthanisation dans la filière porcine, séparation de phases, séchage et normalisation d’un digestat Rapport final de projet Août 2010 : http://www.ifip.asso.fr/actu/pdf/rencontres08/LEVASSEUR_space_08.pdf Granulation : http://dsenvironnement.pagesperso-orange.fr/sechagelisier.pdf http://www.itavi.asso.fr/elevage/environnement/Traitement%20des%20fientes%20et%20fumiers.p df • Modalités d’apport d’azote : Description :http://www.azote.info/index.php/environnement-et-azote/eviter-les-pertes-parvolatilisation.html http://www.pleinchamp.com/grandes-cultures/actualites/conduite-integree-peut-rimer-avec-tauxde-proteines-du-ble Efficacité : « Les flux d’azote liés aux élevages : Réduire les pertes, rétablir les équilibres. ». Synthèse de l’expertise collective INRA. Janvier 2012. Faisabilité :http://www.azote.info/index.php/fertilisation-raisonnees-et-azote/fractionner-lesapports.html • Agriculture de précision Modulation de la dose apportée : http://www.azote.info/index.php/fertilisation-raisonnees-etazote/fractionner-les-apports.html Farmstar et chiffres : La France agricole n°3463. nov 2012, p.29 Matériel éco épandage : http://www.pleinchamp.com/machinisme/actualites-machinisme/les-premiers-materiels-certifieseco-epandage-pour-fin-2013 Bien régler son épandeur : http://www.azote.info/index.php/fertilisation-raisonnees-et-azote/bienregler-son-epandeur.html http://www.pays-lesneven.fr/vars/fichiers/pub_defaut/BV_Fiches_reglage_materiel_epandage.pdf Coût :http://www.agri72.fr/bibliotheque_pdf/Infos%20Conseils/Machinisme/Materiel%20cultures/E ngrais.pdf

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• OAD pilotage en végétation Jubil : http://www.arvalisinstitutduvegetal.fr/fr/jubil.asp Ramsès: http://www.campagnesetenvironnement.fr/deux-outils-de-reference-pour-une-fertilisation1120.html N Tester : http://www.yara.fr/agriculture/outils-et-services/n-tester/ N Sensor : http://www.yara.fr/agriculture/outils-et-services/n-sensor/ GPN Pilot : http://www.gpn.com/sites/default/files/document/Plaquette%20GPN-pilot.pdf Comparaison des outils et de leur faisabilité : http://www.agriculture-npdc.fr/no_cache/detail-desnouvelles/actualites/conseil-de-saison/archive-actu-focus/actualite//pilotage-de-lazote-envegetation.html?cHash=127faa484128a58669ec23e3773c09da&print=1 « Céréales : tendre vers la dose optimale d’azote grâce aux outils de pilotage ». In Arvalis Cetiom infos. Janvier 2013. • Filières de valorisation avales « Vers une mesure agro-environnementale « systèmes de culture économes en intrants ». Collection Analyses du Centre d’études pour la prospective du Ministère de l’Agriculture. « Etude sur les labels de consommation courante » ADEME 2013 « Projet de filière grandes cultures : plan d’actions ». Chambre d’Agriculture du Centre. Novembre 2011. • Valorisation de produits résiduels hors effluents Catégories de déchets animaux (abattoirs) : http://iutlpa.u-strasbg.fr/pt3c/poster/pt_T/PT_T_annexe_final_A3.pdf « Valorisation agricole des apports organiques contenus dans les déchets urbains : qualités des matières organiques et service écosystémique ». Raport de thèse. http://www.memoireonline.com/05/12/5847/Valorisation-en-agriculture-des-apports-organiquescontenus-dans-les-dechets-urbainsqualite-des-m.html Valeur agronomique de différents composts http://www.apesa.fr/iso_album/valeur_agronomique_composts_1.pdf Coûts, taux de pénétration et efficacité : « Etude de mise en marché en milieu agricole des produits des installations de traitement des matières organiques sur le territoire du Grand Montréal ». http://www.fihoq.qc.ca/medias/D1.1.61B.pdf • Valorisation des effluents Fiche « Réduire le recours aux engrais minéraux de synthèse, en les utilisant mieux et en valorisant plus les ressources organiques, pour réduire les émissions de N2O ». in Rapport expertise collective INRA « Quelle contribution de l’agriculture française à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ? » 2013. « Expertise scientifique collective : flux d’azote en élevage. Mise en oeuvre opérationnelle. » Nathalie Damay, Bertrand Decoopman présentation à l’Assemblée Générale du RMT Fertilisation & Environnement Paris, le 10-11 Janvier 2013

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• Relations zones cultures et zones élevage « Associer productions animales et végétales pour des territoires agricoles performants ». Actes du colloque INRA « Polyculture-Elevage » du 24 octobre 2012 Poitiers. « Les systèmes de polyculture élevage pour bien valoriser l’azote ». Peyraud JL, Cellier P, Delaby L, Dourmad JY, Faverdin P, Morvan T, Vertes F. Présentation aux Carrefours de l’innovation Agronomique. Mercredi 24 octobre 2012 « Optimisation de l’alimentation, de l’assolement et de la fertilisation dans des exploitations céréalières avec porcs Méthodologie et résultats ». O. TEFFÈNE, B. PLOUCHART in Journées Rech. Porcine en France, (1999) 31, 77-84.

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