UN CERTAIN REGARD Muguette Jacquaint, femme politique

« Une société se bâtit avec ceux qui la font »

On reconnaît immédiatement sa voix rauque et son assurance. Quand elle arrive dans le hall de la Maison de la citoyenneté, elle est saluée de toutes parts. Ici, tout le monde connaît Muguette ! Devenue suppléante de Jack Ralite en 1977, puis élue député en 1981, elle est réputée pour sa ténacité. « Très tôt, j’ai fait l’expérience de l’injustice. La première dont je me souviens, c’est quand j’ai dû abandonner mes études à 15 ans, car mon père estimait que le mariage suffirait à mon bonheur. Ça a été ma première lutte. Il était hors de question de me laisser dicter mon destin ! J’ai donc commencé à travailler au siège social des chaussures André, avenue de Flandre, tout en me payant mère. J’avais besoin de me battre pour des études de comptabilité. Quelques mes droits. Surtout qu’en tant qu’ouvrière, années plus tard, j’ai intégré l’entreprise j’étais doublement touchée par les inéSonolor. Le salaire était dérisoire, mais galités. Les femmes à l’usine subissaient j’ai toujours tenu à travailler, même avec des humiliations en plus des cadences deux enfants en bas âge. Dans la vie, il rapides. Face à cette réalité, on ne peut ne faut dépendre de pas rester sans rien personne, pas même faire. » de son mari. » C’est ainsi qu’au prinCette indépendance, L’usine m’a permis temps 68, Muguette elle l’a aussi gagnée de faire de la politique et ses camarades de grâce à son engaSonolor participent avec la tête sur les épaules. » gement. Dès l’adoà la plus grande lescence, Muguette grève de l’histoire rentre à l’Union des de France. L’usine jeunes filles de France, puis aux Vaillants, est bloquée pendant trois semaines. pour intégrer le parti communiste en Grâce à une détermination collective et 1958. Au fil des années, elle consacre à la solidarité des salariés de Rateau, de plus en plus de temps à son activité Satam ou Norton, la lutte débouche sur militante. « J’adore mes enfants mais je une hausse de 30 % des revenus ainsi n’ai jamais pu me limiter à mon rôle de que sur une amélioration significative

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Virginie Salot

« Une député atypique », telle a toujours été la réputation de Muguette Jacquaint. Après vingt-deux ans de carrière parlementaire, cette Albertivillarienne de souche est aujourd’hui à la retraite. Elle revient sur sa vie d’engagement tout en posant un regard bienveillant sur la jeunesse. Portrait d’une femme de toutes les luttes.

des conditions de travail. Une cohésion ouvrière qui l’a marquée durant toute sa carrière. « Avoir connu l’usine m’a permis de faire de la politique avec la tête sur les épaules et d’être au plus proche des gens. Je savais de quoi je parlais ! Ce n’était pas forcément bien vu, surtout qu’à cette époque il n’y avait que 5 % de femmes à l’Assemblée nationale. Mais je suis restée fidèle à mes idées. » Cette enfant d’Aubervilliers a su mettre ses convictions individuelles au service du collectif et son action au sein du PCF est régulièrement saluée. Mais Muguette est aussi une grande féministe qui s’est battue pour soutenir l’autonomie des femmes. Elle a notamment défendu la liberté des femmes à disposer de leur corps, et particulièrement soutenu le remboursement de l’IVG. L’égalité des salaires et la parité font également

Directeur de la publication : Gilles Poux Directrice de la communication : Pascale Fournier Conception éditoriale et graphique : Anatome Rédactrice en chef : Pascale Fournier Rédactrice en chef adjointe : Mariam Diop Rédactrice web : Marie-Hélène Ferbours Rédaction : Philippe Caro, Virginie Duchesne,

Célia Houdremont, Isabelle Meurisse Secrétaire de rédaction : Stéphanie Arc Photographe : Virginie Salot Maquette : Farid Mahiedine Photo de couverture : Archives municipales Photo de couverture Sortir : Virginie Salot Ont collaboré à ce numéro : Thierry Ardouin, Fabrice Gaboriau

partie de ses luttes. À une époque où le statut des femmes se limitait au rôle de mère, ces revendications n’étaient pas évidentes. Voilà onze ans qu’elle a quitté le Parlement, mais ça ne l’empêche pas de continuer la lutte. Elle met un point d’honneur à encourager la jeunesse. « Maintenant, il est temps de passer le flambeau. Le combat est loin d’être gagné ! Ce n’est pas normal qu’en 2018 les inégalités salariales entre femmes et hommes subsistent. Ce n’est pas non plus normal que certaines personnes dorment sous les ponts alors que d’autres ont des milliards d’euros à la banque. Les jeunes doivent prendre part aux décisions et se battre pour leurs idées. Une société se bâtit avec ceux qui la font, rien n’est écrit d’avance. » Voilà qui est dit. = Célia Houdremont

Vous pouvez envoyer un courriel à une personne de la rédaction  : prenom.nom @ville-la-courneuve.fr Impression : Public Imprim Publicité : Médias & publicité A. Brasero : 01 49 46 29 46 Ce numéro a été imprimé à 18 000 exemplaires.

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