Un pèlerinage africain sur l'évangélisme

la raison de cette croissance phénoménale du christianisme en Afrique. ... pense qu'Alexandrie reçut le christianisme à Rome.8 Ceci aurait pu se produire ...
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Un pèlerinage africain sur l'évangélisme Une étude historique des diverses démarches d'évangélisme en Afrique (de 100 à 2000 de notre ère)

par Dr. John Wesley Zwomunondiita Kurewa

Ressources de discipleship: Afrique

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UN PELERINAGE AFRICAIN SUR L'EVANGELISME Une étude historique des diverses démarches d'évangélisme en Afrique (de 100 à 2000 de notre ère) Droits d'auteur © 2011 Discipleship Resources International : Afrique Tous droits réservés. Il est interdit de reproduire toute partie de ce livre sous quelque forme que ce soit, sauf sous forme de courtes citations intégrées dans des articles ou revues critiques sans permission préalable écrite de l’éditeur. Pour de plus amples renseignements, contacter Discipleship Resources Afrique par écrit au 1908 Grand Avenue, Nashville, TN 37212. Ressources de discipleship: Africa™ et les logos de conception sont des marques déposées de Discipleship Resources®, un ministère du General Board of Discipleship®. Tous droits réservés. Sauf indication contraire, toutes les citations des écritures saintes proviennent de la Version française de Louis Segond, 1910. Tous droits internationaux réservés.

Première impression : 2011 DONNEES DE CATALOGAGE AVANT PUBLICATION DE LA BIBLIOTHEQUE DU CONGRES ISBN 978-0-88177-603-4

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Table des matières Préface Chapitre 1 : L'évangélisation de l'Égypte L'origine du christianisme L'évangélisation d'Alexandrie Le christianisme le long de la Vallée du Nil L'église copte La conquête arabe de l'Égypte Synthèse Chapitre 2 : L'évangélisation de l'Afrique du Nord Les chefs nord-africains à l'époque du Nouveau Testament L'origine du christianisme Les grandes figures du christianisme La conquête arabe de l'Afrique du Nord Synthèse Chapitre 3 : L'évangélisation de l'Éthiopie La civilisation méroïtique L'origine du christianisme en Éthiopie Frumence et Édésius Les neuf saints de Syrie La tradition salomonique L'islam en Éthiopie Synthèse Chapitre 4 : L'évangélisation du Royaume du Kongo Le christianisme en Afrique de l’Ouest Le christianisme au Royaume du Kongo Le christianisme pour la traite des esclaves Synthèse Chapitre 5 : La ruée européenne sur l'Afrique La traite des esclaves et l'esclavage Les explorateurs européens sur le Continent Les colons et la répartition des terres Synthèse Chapitre 6 : L'évangélisation du reste de l'Afrique sub-saharienne La formation de sociétés missionnaires Les suppositions des missionnaires sur l'Afrique Diverses confessions évangélisent le Continent

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Synthèse Chapitre 7 : L'évangélisation à la manière de l’Église Méthodiste Unie Le mouvement de réveil méthodiste en Grande-Bretagne Le méthodisme en Amérique et l'évangélisme L'évangélisation de l'Afrique L'évangélisation à la manière Méthodiste Unie africaine Synthèse Notes

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Préface

En 1970, David Barrett, qui avait servi en Afrique de l’Est depuis 1957 auprès de la Société missionnaire de l'Église et était à l'époque secrétaire à la recherche rattaché à l'unité de recherche œcuménique basée à Nairobi, Kenya, prédisait qu'il y aurait sur le continent africain environ 351 millions de chrétiens au total d'ici l'an 2000 (une augmentation de 46 pour-cent).1 À l'orée du XXIème siècle, un certain nombre de dirigeants de l'église ont réitéré l'impact de la croissance phénoménale du christianisme en Afrique, en Asie, et en Amérique latine. Andrew Walls, en particulier, un ancien missionnaire en Sierra Leone, maintenant professeur émérite à l'Université d'Édimbourg, a déclaré : « La croissance des chrétiens dans le monde en développement a déplacé le centre de gravité démographique de l'église du Nord et de l'Ouest vers le Sud et l'Est (Amérique latine, Afrique et Asie). »2 Parallèlement, dans son discours d'ouverture de la Huitième Assemblée à Harare, Konrad Raiser, Secrétaire général du Conseil mondial des églises, déclare aussi, « D'ici la première partie du XXIème siècle, l'Afrique promet d'être le continent ayant la plus grande population chrétienne. »3 Ces prédictions sur la communauté chrétienne incluent toutes les versions du christianisme en Afrique : protestants, catholiques romains, orthodoxes, coptes, initiative africaine, et pentecôtistes. Bien qu'il ait de nombreuses raisons à la croissance phénoménale de l'église en Afrique, deux raisons ressortent ici pour nos fins. Tout d'abord, et il faut absolument le souligner, de temps immémoriaux, la religion africaine a enseigné la croyance en Un Seul Dieu, contrairement aux opinions des premiers missionnaires sur ce continent qui qualifièrent les peuples africains de païens. Il existe de nombreux chrétiens africains, y

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compris des prédicateurs, qui soutiennent encore aujourd'hui que le peuple africain n'avait aucune connaissance de Dieu jusqu'à ce que des missionnaires viennent des pays occidentaux. Mais nos ancêtres connaissaient quelque chose du divin : ils croyaient profondément que Dieu avait créé le ciel, la terre et tout ce qui s'y trouve. Ils croyaient en particulier que Dieu avait créé l'humanité. L'Afrique était donc comme la bonne terre dans la parabole du semeur de Jésus dans laquelle la graine de l'évangile tomba, germa aisément, grandit et produisit des récoltes, se multipliant par trente, soixante ou même cent (Marc 4:8). C'est parce que tout le continent croyait en Dieu que le christianisme trouva une terre fertile en Afrique. Deuxièmement, les églises d'Afrique considèrent l'évangélisme comme le cœur vivant du ministère de mission totale de l'église sur ce continent. S'il y a une chose qui rassemble les églises d'Afrique, c'est croire au pouvoir et à la pratique du ministère d'évangélisme -- partager Jésus Christ avec autrui et communiquer toute l'histoire des bénédictions gracieuses de Dieu sur l'humanité, offrir un pouvoir transformateur pour une nouvelle existence et permettre aux gens de réaliser qu'ils sont neufs dans le Christ. C'est la raison de cette croissance phénoménale du christianisme en Afrique. Il existe néanmoins un troisième facteur important intervenant dans les initiatives qui ont voulu semer le christianisme et le faire croître dans diverses régions d'Afrique au fil des siècles, et c'est ceci : le christianisme s'est épanoui là où les communautés chrétiennes, une fois créées, avaient le courage de contextualiser la nouvelle foi à leur culture et à leur style de vie africains. Ces communautés de foi purent établir de solides fondements pour elles-mêmes et adopter leur nouvelle foi en Jésus Christ à leur propre

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manière. C'est pour cette raison qu’elles purent résister aux pressions internes et externes qui provoquèrent l'effondrement d'autres communautés chrétiennes. L'objectif de ce livre est d'explorer ces thèmes tout en offrant un survol historique des démarches évangélistes qui furent utilisées par les premières communautés chrétiennes dans les divers pays et régions d'Afrique. À cette exploration s’ajoute l'espoir que leur histoire nous enseignera leurs circonstances, leurs réussites et leurs échecs. Cet examen critique des démarches d'évangélisme employées par les générations antérieures de chrétiens y compris les Méthodistes, est plus qu'un exercice académique ; les ministères des générations de chrétiens passées servent de miroir aux communautés de foi actuelles. Leurs réussites et leurs apports considérables nous permettent d'acquérir la nouvelle vision et le nouveau courage exigés pour construire et poursuivre nos ministères d'évangélisme. Leurs erreurs ou leurs échecs nous mettent en garde et nous conseillent de rechercher les options pertinentes.

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Chapitre 1 L'évangélisation de l'Égypte À l’époque du Nouveau Testament, Alexandrie était la ville d'Égypte la plus importante et la deuxième ville majeure de l'Empire romain. Fondée par Alexandre le Grand en 331 avant l'ère du Christ (AEC), elle était située près du delta du Nil. Avec son Musée, sa Grande Bibliothèque et ses vestibules et ses jardins, elle était la capitale culturelle du monde hellénique.4 Un quart de sa population était juive et, selon la légende, c’est là que soixante-douze érudits juifs auraient fait la première traduction de la Bible hébraïque en grec, créant ainsi la Septante.

L'origine du christianisme Nous n'avons aucune information claire sur les débuts du christianisme en Égypte. On rapporte que Clément d'Alexandrie (né aux environs de 150 EC) avait attesté que Marc l'évangéliste, fonda l'église d'Alexandrie.5 Cette opinion trouva le soutien d'Eusèbe (260 - 339 EC), l'historien des débuts de l'église de Césarée. Eusèbe cite Marc comme le premier à partir pour l'Égypte et à prêcher l'évangile qu'il avait écrit et à être le premier à établir des églises à Alexandrie.6 L'Église copte s'attache particulièrement à cette tradition ancienne. Elle va même plus loin et déclare que l'Apôtre Pierre et Marc prêchèrent à Alexandrie en 42 EC.7 Le chapitre 18:24-28 des Actes rapporte la visite d'Appollos, un lettré d'Alexandrie, à Éphèse où il entra en contact avec Priscilla et Aquila vers 49 - 52 EC (d'après les voyages de Paul). Mais Hans Lietzmann souligne que nous ne savons pas si

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Appollos devint chrétien à Alexandrie ou ailleurs. Sinon, ceci aurait été un indice important permettant de déterminer la présence du christianisme à Alexandrie. Lietzmann pense qu'Alexandrie reçut le christianisme à Rome.8 Ceci aurait pu se produire pendant la première partie du IIème siècle ou pendant le règne de l'empereur Hadrien (117 - 128 EC) lorsque deux vénérables professeurs chrétiens du nom de Basilides et Valentin étaient à Alexandrie. Plus tard, Valentin vint s'établir à Rome et réussit presque à devenir pape. Les deux professeurs appartenaient au mouvement gnostique9 un mouvement qui pensait posséder la connaissance secrète (gnosis) de la délivrance. Chadwick souligne que pendant cette période du deuxième siècle, époque à laquelle l'église de Rome avait des difficultés avec les Marcionites et les Valentines, elle envoya également une mission pour permettre d'implanter le christianisme orthodoxe10 à Alexandrie.11 Vers le milieu du IIème siècle, Pantène émerge comme chef du christianisme alexandrin. C'est le premier représentant du christianisme orthodoxe connu pour avoir été en Égypte.12 Il est également connu comme un évangéliste13 voyageant partout pour prêcher l'évangile. Eusèbe décrit ces évangélistes comme des disciples dont les cœurs étaient enchantés par la parole de Dieu, avec une passion ardente pour une philosophie ou foi véritable et nouvelle. De tels évangélistes quittèrent leur foyer et leur vie pour faire le travail d'évangélisation. Leur ambition était de prêcher à ceux qui n'avaient pas encore entendu le message de Jésus Christ et de leur distribuer des exemplaires de l'évangile déjà en circulation. Les évangélistes finissaient souvent par prêcher dans des pays étrangers où ils rassemblaient les convertis et où ils confiaient les nouveaux disciples aux pasteurs ; ou bien ils nommaient des pasteurs s'il n'y en avait aucun pour s'occuper des nouvelles brebis.14

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L'évangélisation d'Alexandrie Pantène, un professeur éminent empreint de philosophie stoïcienne, était également un fervent évangéliste, comme nous l'avons déjà mentionné. On dit qu’« il montrait un tel enthousiasme sincère pour la parole divine qu'il fut nommé pour prêcher l'évangile du Christ aux peuples de l'Asie et qu'il alla aussi loin que l'Inde »15 où on rapporte qu'il avait découvert que l'Évangile de Mathieu circulait déjà. Pantène établit l'École catéchétique à Alexandrie pendant la deuxième moitié du IIème siècle. L'Égypte de ce siècle était un foyer de gnosticisme dont certains des professeurs éminents comme Basilides et Valentin enseignaient dans la ville. La mission de Pantène était de présenter une orthodoxie intellectuellement viable à la population d'Alexandrie.16 Pantène, Clément d'Alexandrie et Origène se succédèrent à la tête de l'école dans cet ordre. L'École catéchétique avait un double objectif. Tout d'abord, elle instruisait les candidats qui voulaient adhérer à l'église. Les enseignants de l'école savaient qu'un évangélisme efficace s'accompagnait d'une éducation chrétienne pour que la foi des convertis puisse acquérir une maturité chrétienne. Deuxièmement, l'École catéchétique entretenait une réflexion théologique et philosophique avancée avec ceux qui voulaient cette démarche. Frend suggère que Pantène et Clément d'Alexandrie étaient deux chefs qui décidèrent d'eux-mêmes d'évangéliser les membres de l'aristocratie d'Alexandrie et de substituer un christianisme orthodoxe au gnosticisme des professeurs égyptiens.17 Origène, qui succéda à Clément aux environs de 202 EC, décida très jeune de ne pas poursuivre d'études de philosophie pour se concentrer sur la foi chrétienne. À sa surprise,

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certains païens vinrent le trouver, désireux d'entendre la parole de Dieu et de la comparer aux philosophies helléniques. Il se trouve que l'une de ces personnes était Heraclas, un philosophe, qui devint plus tard Évêque d'Alexandrie.18 L'instruction que les membres de l'église recevaient à l'École catéchétique visait à la compréhension des doctrines et des écritures saintes chrétiennes orthodoxes comme l'Ancien Testament ainsi que les mémoires des apôtres qui circulaient dans des villes comme Alexandrie. L'école servait également ceux qui souhaitaient s'engager dans une réflexion théologique sur la foi chrétienne dans le contexte des philosophies helléniques de l'époque. C'est ce que nous considérerions une éducation théologique ou séminariste. Il n'est pas étonnant que l'école ait produit de grands dirigeants comme Pantène, Clément et Origène. Clément d'Alexandrie était né de parents non chrétiens probablement à Athènes aux environs de 150 EC. Ayant été converti quand il était adulte, Clément suivit un long pèlerinage spirituel. Après avoir consulté de nombreux professeurs, il s'installa en Égypte pour suivre les enseignements de Pantène19 qu'il décrit comme une « véritable abeille sicilienne ».20 Clément devient le successeur de Pantène vers 190 EC. L'apport principal de Clément était d'enseigner aux croyants chrétiens de ne pas rejeter les méthodes philosophiques de leur culture et leurs formes de pensée pour pouvoir être chrétien. Il aidait plutôt ses élèves à utiliser leur richesse culturelle et philosophique pour interpréter la foi chrétienne pour eux-mêmes. Clément est connu pour avoir adopté l'idée que la philosophie grecque était d'origine divine.21 Comme Paul, qui avait parlé de la loi de Moïse comme d'un paidagogos (gardien, maître d'école, garant de la discipline ou tuteur) jusqu'à la venue du Christ, Clément attribuait un rôle semblable à la philosophie grecque.

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Même si la philosophie grecque ne comprend pas entièrement la vérité, et si, de plus, elle n'a pas la solidité lui permettant de répondre au commandement du Seigneur, elle prépare au moins la voie pour l'enseignement qui est royal dans le sens le plus élevé du terme, en le rendant prêt à recevoir la vérité (Storm., I 80)... Telle qu'elle était, la philosophie grecque offrait à l'âme l'épuration et la formation préliminaires, nécessaires pour recevoir la foi, fondement sur lequel la vérité construit l'édifice de la connaissance. (Storm., VII, 20)22

Clément d'Alexandrie est un bon exemple d'un grand penseur chrétien qui s'efforça d'utiliser sa connaissance de la philosophie pour interpréter la foi chrétienne, en particulier pour ceux issus d'une culture hellénique et philosophique, chose courante à Alexandrie à cette époque. Il montra aux nouveaux convertis qu'il n'était pas nécessaire de s'exiler de leur historique culturel pour être chrétiens. Mais, en 202 - 203 EC, sous Septime Sévère, les persécutions à Alexandrie mènent à l'arrestation des juifs et des chrétiens. Après la fuite de Clément d'Alexandrie, on choisit Origène, qui avait à l'époque moins de dix-huit ans, pour succéder à Clément à la tête de l'école catéchétique. Le père d'Origène, Léonidès, qui s'était converti au christianisme juste quelques années avant sa mort, fut enchanté d'instruire son fils sur les saintes écritures. Mais Leonidès est arrêté et meurt martyrisé pendant la persécution de Sévère. Origène veut également s'offrir en martyr et l'aurait fait si sa mère n'avait pas réussi à cacher ses vêtements. Il avait, dit-on « un zèle intense au-delà de son âge ».23 En tant que professeur,

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et en particulier comme interprète de la Bible (Ancien Testament), Origène contribua énormément à établir les liens entre foi chrétienne et étude de la philosophie grecque, bien qu'il ait choisi l'allégorie comme méthode d'interprétation. Bien qu'enseignant laïc, un grand nombre d'évêques de l'église lui accordaient un grand respect pour son érudition, et l'invitaient à mener des études de la Bible et à interpréter la foi chrétienne dans leurs églises. Chef de l'École catéchétique, c'est lui qui assigna l'enseignement des élèves moins mûrs à un assistant prénommé Héraclas,24 mentionné un peu plus haut. Origène est considéré comme le dernier grand maître (dans l'ordre des maîtres charismatiques qui furent universellement reçus par l'église) dans l'histoire et la vie de l'église des premiers jours. Origène eut probablement le plus grand impact sur l'église universelle en tant que maître et théologien biblique de son époque. Il eut un tel impact sur ses élèves que plusieurs moururent martyrisés. Potamiène, étudiante martyrisée après avoir été torturée, souffrit un supplice horrible aux mains d'un juge nommé Aquila qui la menaça de la livrer aux gladiateurs.25 Potamiène n'abandonna cependant pas sa foi en le Christ. Après que le juge eût prononcé sa sentence, Basilide, un soldat, lui montra de la compassion et la protégea contre les hommes qui l'entouraient. Il lui saisit le bras et la conduisit à son exécution. Potamiène accepta la compassion de Basilide et l'encouragea. Elle lui dit que lorsqu'elle ne serait plus, « elle intercéderait auprès de son Seigneur pour lui et que peu de temps s'écoulerait avant qu'elle ne le récompense pour tout ce qu'il avait fait pour elle ».26 Elle fut alors exécutée. Quelques jours plus tard, les autres soldats compagnons de Basilide lui demandèrent de prêter serment, ce qu'il refusa parce qu'il était chrétien. Lorsque ses proches lui demandèrent la raison d'un comportement si étonnant, il expliqua que trois

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jours après son martyr, Potamiène lui était apparu pendant la nuit et avait placé une couronne sur sa tête. Elle lui dit qu'elle avait prié le Seigneur pour lui et qu'elle avait obtenu sa demande et qu'avant longtemps le Seigneur le placerait près d'elle. Après avoir entendu ce message, Basilide fut baptisé. Il fut décapité le jour suivant. On dit que « beaucoup d'autres citoyens d'Alexandrie acceptèrent les enseignements du Christ en un corps, comme Potamiène leur était apparue en rêve et les avait appelés. »27

Le christianisme le long de la Vallée du Nil Le christianisme alexandrin s'étendit le long de la vallée du Nil vers les royaumes de Nubie et de Makourie, une partie du Soudan actuel, et vers le royaume d'Alwa, une partie de l'Éthiopie actuelle. Il peut être utile de comprendre un peu les exploitations agricoles sur les rives du Nil. La désertification28 de la région du Sahara à partir de 3000 AEC environ provoqua le mouvement et l'implantation des populations sahariennes sur les rives du Nil. En amont, son delta et sa vallée consistaient en l'une des terres les plus riches du continent pour l'agriculture. Même avant la désertification de cette région, les Égyptiens étaient considérés comme des fermiers -- les fermiers les plus anciens. Les archéologues ont découvert de petites composites sur les rives de la plaine inondable indiquant qu'à une époque ancienne, les gens pêchaient le poisson-chat dans le Nil. Ces égyptiens plantaient aussi du blé, de l'orge et d'autres céréales dans des bassins de réception du Nil et ils gardaient des moutons et des chèvres. On trouvait donc une concentration de la population d'Égypte le long de la Vallée du Nil avec des villes, des petits bourgs et des villages.

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À partir du milieu du IIIème siècle, on observe en Égypte un mouvement de masse qui se détourne des anciennes religions pour le christianisme.29 Ce mouvement doit avoir débuté avec la propagation du christianisme d'Alexandrie le long de la vallée du Nil comme nous l'avons mentionné. À Alexandrie, la population parlait principalement le grec, et c'est la langue qu'utilise le christianisme pour communiquer. Nous avons noté que les chefs tels que Clément d'Alexandrie et Origène utilisaient la philosophie grecque dans leur cursus à l'École catéchétique pour enseigner l'évangile aux personnes parlant cette langue et venant de cette culture. Mais à mesure que le christianisme remonte le long de la vallée du Nil, il arrive aux Coptes. Le mot Copte fait référence à une langue égyptienne ancienne et les égyptiens indigènes étaient connus sous le nom de Coptes. Le christianisme trouve moyen de passer d'une population parlant grec à Alexandrie à une population parlant copte en amont de la vallée du Nil. L'église donnait à la population de la littérature écrite dans la langue de tous les jours,30 c'est-à-dire, en langue copte. Du troisième au dixième siècle, la langue copte comporte quatre dialectes parlés. Le Nouveau Testament fut traduit dans chacun des quatre dialectes et la langue est toujours utilisée dans la liturgie de l'Église copte aujourd'hui.31 La traduction des Écritures en des langues non grecques ou en langue copte joua sans aucun doute un rôle pour asseoir les fondements d'une église égyptienne indigène (copte)32 ; c'était un moyen d’indigéniser l'église d'Égypte dans la vallée du Nil. Il n'est donc pas étonnant que les populations aient reçu le christianisme avec grand enthousiasme. Il y aurait cependant pu avoir d'autres raisons poussant les populations à se tourner vers le christianisme. Une possibilité, déjà notée, est la persécution qui aurait pu

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attirer les gens au Christ plutôt qu'à Osiris.33 Le courage des chrétiens martyrisés était un témoignage très fort des convertis pour le Christ. Une autre raison était le rôle de la religion officielle dans la souffrance des paysans. Par exemple, les temples étaient associés à des taxes forcées. En outre, les femmes jouèrent un rôle essentiel dans l'évangélisation des foyers à la foi chrétienne.34 Vers le milieu du IIIème siècle, le christianisme en Égypte prend un nouveau virage. La vie ascétique ou ascétisme35 s'épanouit dans le désert oriental de l'Égypte. La persécution du peuple par des empereurs tels que Dèce (249 - 251 EC) et Dioclétien (284 - 311 EC) est brutale. Un grand nombre de martyrs souffrirent atrocement jusqu'au point où « les bourreaux étaient épuisés et les haches usées ».36 Ceux qui s'enfuirent dans le désert devinrent « les gens du désert ». Il y avait plusieurs raisons d'aller dans le désert. Certains fuyaient le fardeau intolérable du fisc impérial, d'autres craignaient la persécution. D'autres encore cherchaient Dieu et l'idéal de la perfection chrétienne dans le désert.37 C'est ce qui encouragea l'esprit d'ascétisme et mena à la création des monastères dans le désert égyptien. Le désert se parsema de moines et d'ermites. Paul de Thèbes fut le premier ermite dans le désert, aux environs de 250 EC.38 On rapporte qu'ayant quitté sa ville natale pour le désert au moment des persécutions, Paul découvrit les trésors de silence que recèle le désert et ne revint jamais.39 De même, un dimanche matin en 217 EC, un homme prénommé Antoine entendit une voix qui disait : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi. » (Mat. 19:21). Après avoir mis de côté des provisions pour sa sœur, Antoine partit dans le désert où il resta et vécu de travaux manuels. Il créa ce qui est considéré comme le premier monastère de l'histoire de l'Église

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chrétienne. Aux environs de 310 EC, un autre jeune homme égyptien nommé Pacôme fut converti et baptisé. Il avait déjà commencé à pratiquer l'ascétisme avant d'être baptisé. À Tabennisi, aux environs de 320 EC, Pacôme entend une voix qui lui dit : « Reste ici, et bâtis un monastère car beaucoup viendront à toi et deviendront moines. »40 En effet, de plus en plus de gens vinrent à lui des villes dans le désert. Ils s'appuyaient sur le concept d'autosuffisance qui les mena à faire du travail manuel. Ils faisaient pousser leurs propres fruits et légumes dans des jardins, faisaient des paniers et des matelas, nourrissaient les pauvres qui erraient dans le désert, envoyaient de la nourriture dans les prisons et nourrissaient les pauvres d'Alexandrie.41 L'institution des monastères s'étendit dans toute l'église des pays orientaux tels que la Palestine et la Syrie, et dans les pays occidentaux tels que l'Italie, entre autres. L'Europe et le reste du monde doivent être reconnaissants à Antoine et Pacôme pour les universités, les écoles et les hôpitaux. Ils ont été créés par le système de monastères provenant du christianisme égyptien qui était très innovant.42 C'est en adoptant les monastères que l'église égyptienne indigénisa le christianisme.

L'Église copte Nous avons déjà noté que le christianisme s'étendait plus au sud, d'Alexandrie jusque dans la vallée du Nil. Il se trouve qu'au IVème siècle, l'église, à l'ouest comme à l'est, était embrouillée dans une controverse théologique concernant la nature du Christ que les chrétiens appelaient Dieu dans leur culte. Le développement christologique reconnaissant le Christ comme Dieu exigeait une clarification immédiate de la relation entre Dieu le Père et Dieu le Fils. Cette controverse divisa gravement l'Église, en

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particulier en Orient. Certains théologiens adoptèrent la position qu'il était impossible au Christ, en tant que Fils, d'être l'égal de Dieu ou coéternel avec le Père, et qu'on ne pouvait donc pas l'appeler Dieu. Les détracteurs avançaient que si Jésus Christ n'était ni l'égal ni coéternel et n'était pas Dieu, dans ce cas, notre salut ne venait pas de Dieu mais d'un être humain, ce qui signifiait que l'affirmation du salut par Jésus Christ était fausse. Deux membres du clergé d'Alexandrie furent les acteurs de la polémique. Arius, un ancien, adopta la première position et Anasthasie, un diacre, adopta la seconde. En 325 EC, face à ce désaccord profond, l'Empereur Constantin décide de convoquer le Concile de Nicée. La décision de Nicée, ultérieurement finalisée au Concile de Chalcédoine (451 EC), déclara que le Christ est « vrai Dieu et en même temps, vrai homme. » 43 Essentiellement, le Concile résolut que, dans le Christ, il y avait deux natures complètes : l'une divine et l'autre humaine. L'église égyptienne et la majeure partie de l'Église d'Orient ne furent pas satisfaites de la décision Chalcédoine. Elles soutenaient que la nature divine du Christ avait été compromise et n'acceptèrent pas cette christologie. Celles qui s'opposèrent à la décision Chalcédoine enseignèrent le monophysitisme, une christologie affirmant qu'il n'y avait qu'une seule nature dominante de Jésus après l'Incarnation et qu'elle était divine.44 Progressivement, se dessina une prise de conscience nationaliste copte, opposée aux Grecs de Constantinople et aux Grecs Melkites orthodoxes d'Alexandrie. Le schisme ou scission se produisit vers la moitié du Vème siècle lorsque l'église d'Égypte eut deux patriarches, l'un, copte, qui représentait le christianisme monophysite et l'autre, un patriarche melkite représentant le christianisme orthodoxe.45

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La conquête arabe de l'Égypte Pendant ce temps, les Arabes entamaient déjà leur conquête de la Syrie, de l'Irak, et de la Perse en janvier 640 ; l'Égypte, toujours sous le contrôle des forces byzantines, devient leur cible suivante. En 641, les Arabes contrôlent l'Égypte. Alexandrie se révolte en 645 mais est reprise en 646. Au sud, la Nubie signe toutefois un traité de paix en échange d'un paiement qui lui permet de survivre comme royaume chrétien (Église copte) jusqu'au XIIIème siècle.46

Synthèse L'église d'Afrique actuelle pourrait tirer des leçons du christianisme égyptien de l'époque, du premier au septième siècle. Tout d'abord, le christianisme alexandrin a été modelé sur la méthode d'évangélisme de la Grande Commission de Matthieu (voir Matt. 28:19-20). L'église d'Alexandrie faisait des disciples chrétiens en utilisant deux éléments : (a) elle évangélisait et baptisait les convertis ; (b) elle enseignait la foi chrétienne aux convertis pour qu'ils puissent la comprendre par le biais de l'École catéchétique (éducation théologique). Deuxièmement, l'église du christianisme alexandrin qui se trouvait dans une population parlant grec adopta des programmes répondant aux besoins de la population. Elle créa l'École catéchétique pour fournir une éducation théologique aux deux groupes dans l'église : (a) à ceux qui cherchaient à comprendre les doctrines et écritures chrétiennes (Ancien Testament, plus les mémoires des apôtres dont les écrits circulaient dans les grandes villes comme Alexandrie) et (b) à ceux qui cherchaient une réflexion

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théologique sur la foi chrétienne dans le contexte des philosophies helléniques du temps. Cette dernière était ce que nous considérerions aujourd'hui une éducation théologique ou de séminaire. Troisièmement, l'église d'Afrique actuelle peut tirer des leçons du fait que l'École catéchétique d'Alexandrie offrait une éducation théologique à toute l'église, et pas seulement à un groupe choisi. L'église africaine hérita de ses mentors missionnaires une compréhension de l'éducation théologique, visant principalement ceux qui poursuivent des études pour entrer dans les ordres. Toutefois, l'éducation théologique est la connaissance que l'église toute entière -- le corps du Christ -- comprend comme sa foi et qu'elle doit prodiguer aux dirigeants comme aux membres. Toute l'église exige une éducation théologique. Quatrièmement, le christianisme alexandrin reconnut que la pensée hellénique et la philosophie grecque faisaient partie intégrante de la culture par laquelle on devait communiquer le Christ et la foi chrétienne. L'École catéchétique, par exemple, ne condamna pas son patrimoine culturel et ses formes de pensée philosophique ; elle n'exigea pas non plus des convertis qu'ils rejettent leur culture pour devenir chrétiens. Elle utilisa plutôt le milieu philosophique prédominant pour communiquer l'évangile et expliquer comment le Christ, dans la vie réelle, répond la vérité que leurs philosophies connaissaient déjà en général. Clément d'Alexandrie, par exemple, adopta la philosophie grecque, en dépit du fait qu'il ait pu souligner ses limites. Il lui attribuait le même rôle que Paul attribuait à la loi de Moïse, le rôle d'un paidagogos (gardien, maître d'école, disciplinaire, ou tuteur) jusqu'à la venue du Christ (voir Gal. 3:24-25).

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Par opposition, du XIXème siècle à nos jours, le christianisme en Afrique a rejeté la culture africaine comme culture non chrétienne. Les chefs de l'église africaine, en particulier les chefs des églises établies par les missionnaires, dénoncent certains piliers des structures culturelles africaines tels que l'institution du n'anga, renommé pour son service médicinal et de guérison dans la société africaine. L'ironie de tout ceci est qu'aujourd'hui, les nations africaines se servent de la médecine traditionnelle de Chine et d'Inde pour traiter des gens qui souffrent de paludisme ou d'autres maladies. N'y a-t-il pas de leçon à tirer de tout cela ? Si le christianisme acceptait l'institution du n'anga, cette institution pourrait certainement se racheter avec le soutien de nos nombreux médecins africains, formés scientifiquement, ainsi qu'avec les efforts des gouvernements africains pour qu'elle intègre les services de santé de nos pays. Comme par le passé, on pourrait enseigner aux gens -- même par le biais de l'église -- les caractéristiques des bons herboristes et des guérisseurs traditionnels. Cinquièmement, l'église égyptienne a pu contextualiser la foi chrétienne à sa situation géo-sociale. Dans le sud et dans la vallée du Nil, l'église s'est adaptée au patrimoine culturel des populations en utilisant la langue copte et en offrant de la documentation dans la langue vernaculaire de ces populations. Ailleurs, le christianisme égyptien s'est adapté aux conditions désertiques dans lesquelles vivent les populations comme les « gens du désert » qui avaient fui le fardeau fiscal des villes ou la persécution. C'est la source de la vie chrétienne monastique dans le désert égyptien, un phénomène qui se propagea aux églises de l'Est et de l'Ouest. Sixièmement, le christianisme alexandrin eut de nombreux martyrs. On se rappelle d'Origène pour avoir préparé les jeunes gens à faire face au martyre sans avoir

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peur et pour en faire un témoignage au Christ. Bien sûr, le martyre ne devrait pas être recherché ou souffert pour soi-même. Aujourd'hui, on ne semble associer les martyrs qu'avec les chrétiens du passé. Cependant l'histoire de nombre de nos nations africaines même à l'ère post-indépendance ne manque pas de martyrs. L'église africaine reconnaît un grand nombre de martyrs ainsi que des missionnaires martyrs dans l'histoire universelle de l'église, mais nous ne pouvons pas oublier les martyrs récents, dont certains sont loin de nous être inconnus et qui sont morts pour leur foi et par amour de leur peuple. Les églises devraient célébrer leur vie, écrire leur biographie, et enseigner aux jeunes disciples le témoignage de tels martyrs par l'éducation chrétienne. Par dessus tout, à l'exemple d'Origène d'Alexandrie, le christianisme doit continuer à enseigner et à préparer ses adeptes à une vie sans peur et victorieuse prenant exemple sur le Christ plutôt que sur le martyre.

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Chapitre 2 L'évangélisation de l'Afrique du Nord L'Afrique du Nord chrétienne du Ier au VIIème siècle couvrait la région côtière nord des pays nord-africains qui représentent aujourd'hui la Libye, la Tunisie, l'Algérie et le Maroc. On pense que l'Afrique du Nord devint une plaque tournante du christianisme jusqu'au VIIème siècle de l'ère chrétienne. L'arrière plan historique de ces pays est que dès 1110 avant l'ère chrétienne, les Phéniciens du Levant (la région est de la méditerranée, comprenant tous les pays bordant la mer entre la Grèce et l'Égypte) créent des comptoirs de commerce au Maroc. Les Phéniciens s'intéressent à l'or, à l'argent, et à l'étain provenant des mines de la chaîne de l'Atlas. L'afflux des Phéniciens vers l'Afrique du Nord mène à la création de Carthage (notre Tunis moderne) en 814 AEC qui, au fil du temps, devient une plateforme commerciale. Au IIIème siècle AEC, Rome est la puissance de l'époque et son conflit avec Carthage provoque trois guerres, la première de 264 à 261 et la seconde de 209 à 206, dont l'issue favorise Rome. La troisième Guerre Punique entre 201 et 146 AEC que Rome lance contre les Berbères conduit à la destruction de Carthage. En dépit d'une résistance locale qui dure pendant quelques temps, Auguste occupe l'Afrique du Nord en 25 de l'ère chrétienne.47 Après la conquête de Carthage par les Romains en 146 AEC, la côte méditerranéenne de l'Afrique est connue sous le nom d'Afrique du Nord romaine. Les Romains reconstruisent une nouvelle Carthage sur le site même de l'ancienne ville et créent de nouvelles provinces : la Mauritanie, la Numidie (Algérie du Nord), la

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Cyrénaïque et l'Afrique en Tunisie « qui prit son nom de l'emplacement Afri et donna son nom au continent ».48 Dans cette région, Rome s'empare de territoires berbères49 et les morcèle pour les donner aux soldats romains ou aux autres Italiens qui voulaient bien devenir propriétaires terriens en Afrique du Nord, comme colons. C'est de l'Afrique du Nord que Rome fait venir les animaux sauvages des jeux du cirque ainsi que ses fournitures agricoles. C'est ce qui amène à la création de villes splendides dont les ruines témoignent encore de théâtres, de bains, de temples, de marchés, et de rues pavées -- preuve de la richesse dont jouissaient les propriétaires terriens de la région. Les citoyens de la région, colons et Berbères, étaient des citoyens romains. En effet, de nombreux peuples autochtones de l'Afrique du Nord, tels que les Berbères, qui voulaient une mobilité sociale dans le monde romain, optèrent pour cette solution.50 Le développement du christianisme nord-africain doit être compris dans le contexte du gouvernement romain de la région. Pendant l'occupation romaine de l'Afrique du Nord, les pays mentionnés ci-dessus s'appelaient Cyrénaïque, Afrique, Numidie, et Mauritanie. Au Ier siècle, le christianisme avait atteint la Libye (Cyrénaïque), au IIème siècle, la Tunisie (Afrique) et dès le IVème siècle, l'Algérie (Numidie) et la Mauritanie (Maroc).

Les chefs nord-africains à l'époque du Nouveau Testament Un élément remarquable de notre étude de l'histoire de l'église des premiers jours est que les Africains d'Afrique du Nord furent l'un des peuples à l'avant du mouvement chrétien depuis son origine. Les exemples suivants servent d'illustration :

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Tout d'abord, nous apprenons qu'un homme du nom de Simon, père d'Alexandre et de Rufus, originaire de Cyrène, une ville libyenne importante, avait été forcé à porter la croix de Jésus de Nazareth à l'endroit de sa crucifixion (Marc 15:21). Il existait une grande population juive en Libye et il est possible que Simon n'ait pas été seulement un Berbère mais aussi un Juif. Simon, avec d'autres Juifs de Libye, était peut-être à Jérusalem à ce moment-là pour célébrer le Festival de la Pâque juive. (Est-il possible que Simon ait été l'un des Juifs de Cyrène dont il est question dans Actes 6:9 ?). Une personne condamnée à mort était souvent forcée à porter sa propre croix jusqu'au le lieu de sa crucifixion. Jésus, affaibli par le fouet et le manque de sommeil de la nuit précédente, ne pouvait pas porter sa croix. Simon vint au secours de Jésus. On se demande pourquoi il est dit que Simon avait été forcé à porter la croix de son Jésus. Si nous revenons à ce que relate l'Ancien Testament environ six cent ans auparavant, nous trouvons une situation semblable lorsque le prophète divin Jérémie est au désespoir. Il est jeté dans une citerne, un puits sec, pour avoir dit au Roi Sédécias une vérité qu'il ne voulait pas entendre (Jér. 37:16ff). C'est cependant un Cushite (un Africain), Ebed-Melech, un officiel du palais royal qui vient au secours de Jérémie et le tire de la citerne où il devait périr (Jér. 38:7ff). Ebed-Melech fit ce que son grand cœur lui dictait ! Relier cet épisode de Jérémie et d'Ebed-Melech, un Cushite, à celui de Jésus de Nazareth et de Simon, un Berbère, pose la question suivante : Simon, forcé à porter la croix de Jésus de Nazareth, était-il un Africain qui connaissait probablement ce qu'EbedMelech avait fait pour le prophète Jérémie ? Ou, aurait-il pu être influencé par Jésus qui racontait des histoires sur le Bon Samaritain (Luc 10:30ff) ? Il aurait été utile d'entendre ce que Simon pensait de son rôle lorsqu'il porta la croix.

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Deuxièmement, les Libyens qui craignaient Dieu se trouvaient à Jérusalem le jour de la Pentecôte, le 28 mai 30 EC, et furent témoins de la bénédiction de l'Esprit-Saint, et de la naissance de l'Église de Jésus Christ (voir Actes 2:10). Troisièmement, lorsque les persécutions éclatèrent contre l'église de Jérusalem après la lapidation de Stéphane, ce qui entraîna la dispersion de tous sauf des apôtres, Luc fait mention d'hommes de Chypre et de Cyrène (Libye). Ces hommes se rendirent à Antioche et furent les premiers à prêcher la bonne nouvelle à propos du Seigneur Jésus aux Grecs (Actes 11:20). Quatrièmement, Luc fait une autre référence à ces hommes de Libye qui étaient prophètes et enseignants dans une église d'Antioche. C'étaient Siméon appelé Niger et Lucius de Cyrène ainsi que Barnabas, Paul et Manahen. Certains lettrés spéculent que le même Simon mentionné par Marc et Luc (Luc 23:26) aurait pu être le Siméon appelé Niger que nous retrouvons maintenant à Antioche.51 Le nom Niger suggère également qu'il n'était pas seulement Libyen mais aussi Berbère.52 Quel témoin il aurait pu être ! Simon, un Berbère ou un Africain, portant la croix de son Maître, Jésus, jusqu'au lieu de sa crucifixion sur le Mont Calvaire. Écrivant aux saints de Rome, Paul a dû être poussé à envoyer ses salutations à Rufus, le fils de Simon (Rom. 16:13). Cinquièmement, Victor I, le premier Pape africain (189-199) qui succéda à St Éleuthère en tant qu'Évêque de Rome, était nord-africain. Victor est connu pour la controverse de Pâques. Les églises orientales célébraient Pâques à différents moments. Il put harmoniser cette célébration et magnifier l'autorité du Saint-Siège en menaçant d'excommunier ceux qui ne se plieraient pas à la célébration au moment convenu par le

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reste des églises.53 Ce pourrait être la raison pour laquelle certains érudits le considèrent comme le premier Pape.54

Origine du christianisme Bien que nous ayons un grand nombre de preuves indiquant que les chrétiens de Libye en Palestine, à Antioche et à Rome avaient un esprit missionnaire, nous ne savons toujours pas qui amena le christianisme en Afrique du Nord. On pourrait spéculer que le christianisme atteint l'Afrique du Nord à la fois par Rome vers le sud et par l'Égypte de l'ouest.55 L'histoire chrétienne connue de l'église libyenne commence de manière dramatique en 180 EC avec le martyre de douze chrétiens (cinq femmes et sept hommes) du petit village de Scilli, près de Carthage :

L'un portait son sac, « des livres et des lettres de Paul, un homme juste ». L'aimable proconsul romain qui présida à leur procès ne souhaitait pas leur mort. Il souligna que lui aussi, était un homme religieux et suggéra qu'ils prennent 30 jours de réflexion mais les martyrs de Scilli n'eurent pas besoin de temps pour réfléchir : « Aujourd'hui, nous sommes martyrs au paradis. Rendons grâce à Dieu. » Les mots résonnent à travers l'histoire du christianisme nord africain dominé par une passion du martyre. La passion des saints et la félicité est l'un des documents émouvants qui nous reste des premiers siècles de l'Église. Perpétua est l'une des quatre premières femmes chrétiennes dans le monde antique dont les écrits ont survécu. La plus grande partie du texte dans le journal qu'elle

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tint en prison était « ...écrit de sa main et suivant ses propres perceptions. Elle était membre d'une famille prospère, avait vingt-deux ans, mariée avec un petit bébé. Son père était païen et le journal décrit ses tentatives désespérées pour sauver son enfant bien-aimée de la mort qu'elle avait acceptée. Elle fut martyrisée avec d'autres [après avoir refusé d'offrir un sacrifice aux dieux romains], parmi eux Saturus et son amie, l'esclave Félicité, également mère d'un nouveau-né ».56

Sur la manière dont elles furent suppliciées :

Vibia Perpétua et son amie servante, Félicité... furent amenées dans l'arène où des hommes chrétiens étaient déchiquetés par des animaux en spectacle public. Les femmes furent dénudées de leurs vêtements mais lorsque la foule fut offensée que les autorités les exposent nues, Vibia et Félicité furent données à un taureau qui fut libéré dans l'arène. Le taureau les jeta à terre et blessa les femmes mais ne les tua pas ; on ordonna alors à des gladiateurs de les achever à l'épée. Ce supplice eut lieu le 2 février 20357

Selon les dires, Vibia Perpétua aurait laissé un patrimoine de principes dans la tradition de l'église nord-africaine. Toutes les réponses qu'elle fit à ses persécuteurs furent attribuées à la présence de l'Esprit-Saint. Par exemple, elle témoigna du fait que son baptême était un baptême dans la mort du Christ et qu'elle ne demandait rien d'autre des

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eaux du baptême que la souffrance de la chair. Elle déclara avoir des visions du Paradis et avoir conversé avec le Seigneur, tout ceci lui donnant le courage de faire face à la souffrance de la mort dans l'amphithéâtre.58

Les grands chefs du christianisme Tertullien partage avec nous certains enseignements sur la force et la souffrance causées par la persécution de l'église en Afrique du Nord pendant la première partie du IIIème siècle. Tertullien était issu d'une famille romaine païenne à Carthage aux environs de 160 et il mourut après 220 EC. Il fut éduqué à Rome, dans la rhétorique et le droit et on présume qu'il se convertit au christianisme vers 207 EC. Désillusionné par les autorités de l'église, il parla en faveur du Montanisme.59 C'était un catéchète et père de l'église carthaginoise -- l'un des rebelles-nés de l'histoire. Selon les dires, il aurait réussi à se révolter contre la vie chaotique militaire de la maison de son père puis se révolta contre l'absence de but de la culture provinciale romaine. En tant que chrétien, il se révolta contre le manque de discipline et la complaisance de l'église de Rome et de Carthage puis finalement contre le Montanisme, une secte qu'il avait rejointe pendant longtemps.60 Tertullien est le premier chrétien important à écrire en latin. Il est considéré comme le père du christianisme latin et le fondateur de la théologie occidentale. C'est lui qui utilisa en premier le terme latin trinitas, qui veut dire trinité -- Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit. Il écrivit plus de trente œuvres, qui sont catégorisées en trois groupes principaux : les œuvres apologétiques, les œuvres dogmatiques/anti-hérétiques et les œuvres pratiques. Dans la plus célèbre de ses œuvres apologétiques, simplement

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intitulée Apologie, Tertullien argumente avec finesse contre l'injustice de condamner les croyants uniquement parce qu'ils étaient chrétiens. Comme Tertullien l'écrit dans son Apologie 37 :

Nous ne sommes que d'hier et nous avons rempli toutes vos places -villes, îles, forts, marchés, même les camps, tribus, compagnies, palais, sénat, [et] forum. Nous ne vous avons rien laissé sauf les temples de vos dieux.61

Le christianisme en Afrique du Nord continua à s'étendre. À la fin du IIème siècle, Carthage avait un évêque puissant, Aggripinus, qui convoqua le Concile des évêques nord-africains en 220 EC pour débattre du sujet de rebaptiser ceux qui avaient été baptisés par des hérétiques. Le Concile convint que le nouveau baptême était une mesure de réconciliation dans la vie de l'église.62 Au cours du IIIème siècle, l'église de Libye avait atteint la côte atlantique avec des centaines d'églises. Toute cette expansion du christianisme en Afrique du Nord eut lieu en dépit de la persécution des chrétiens. Dans Apologie 50, Tertullien écrit :

Votre cruauté (contre nous) ne vous profite pas, même si elle est exquise. Elle tente plutôt les gens de notre secte. Plus vous nous éradiquez, plus nos nombres grandirons. Le sang des chrétiens est la graine (de l'église)... L'obstination que vous critiquez nous enseigne.63

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Tertullien fait montre d'un sarcasme splendide dans lequel il représente le Seigneur au jour du Jugement Dernier disant que « bien qu'il ait confié l'Évangile une fois pour toute aux Apôtres, il avait réfléchi et avait apporté certains changements pour s'adapter aux hérétiques... ».64 Cyprien Caecilianus était un autre chef important de l'église d'Afrique du Nord. Issu d’une famille païenne affluente, il enseigna la rhétorique à Carthage et se convertit au christianisme en 245 - 246 EC. Voici une déclaration de sa conversion :

J'étais moi-même enchevêtré et contraint par ces mêmes erreurs de ma vie antérieure auxquelles je croyais impossible d’échapper... Mais lorsque les taches de ma vie antérieure furent lavées par l'eau de la naissance (baptême)... et que la deuxième naissance m'eut restauré de telle sorte qu'elle me conserve comme un homme nouveau...ce qui m'avait semblé difficile auparavant me paraissait alors facile.65

Cyprien écrit deux livres importants. Dans The Lapsed (La Chute), Cyprien argumente que les chrétiens ayant chuté pendant cette période de persécution devaient être réadmis après une période de pénitence. Dans son second livre, On the Unity of the Church (Sur l'unité de l'Église), Cyprien souligne que l'église ne peut pas, de sa vraie nature, être divisée, que l'unité de l'église est un fait. Il déclare qu'il est impossible de diviser l'église, seulement de la quitter. Mais la vision de Cyprien pour l'unité de l'Église était centrée sur les évêques : « Vous devriez savoir que l'évêque est dans l'église et que l'église est dans l'évêque. Si quelqu'un n'est pas avec l'évêque, il n'est pas avec l'église. »66

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La persécution des chrétiens en Afrique du Nord s'intensifia, particulièrement au milieu du IIIème siècle par deux empereurs ; leurs persécutions sont connues sous le nom de persécution décienne (249 - 251) et valérienne (253 - 259). Le fondement de la persécution était un édit impérial exigeant que tous les citoyens fassent des sacrifices aux dieux romains. Pour les chrétiens, obéir à cet édit revenait à de l'idolâtrie. Ils choisirent plutôt le martyre. Cyprien, qui avait servi en qualité d'évêque de Carthage pendant environ dix ans, souffrit le martyre pendant la persécution de Valérien en 258.67 De nouveau, après un temps de paix, la persécution de Dioclétien commença et dura de 303 à 313. On ordonna aux chrétiens de remettre leurs copies des écritures et leurs églises furent incendiées. Aurélius Augustinus (Augustin), l'évêque d'Hippone, est considéré comme le plus grand théologien chrétien depuis l'Apôtre Paul. Né à Thagaste, en Algérie moderne, d'un père païen et d'une mère chrétienne, Monica, en 354, Augustin étudie la philosophie à Carthage, mais revient plus tard au manichéisme, une religion perse ayant deux principes ou dieux ultimes -- la Lumière et les Ténèbres. En tant que candidat au baptême, il avait étudié l'Ancien Testament, qu'il considérait comme non spirituel. En 384, il est nommé professeur de rhétorique à Milan où il commence à lire certains auteurs néo-platoniques. À Milan, Augustin se rend aux sermons d'Ambrose, qui réconcilie Ancien Testament et spiritualité platonique. Intellectuellement, il devient convaincu de la véracité du christianisme mais trouve l'idée de célibat un obstacle. Déchiré entre deux voies, il se précipite un jour dans le jardin où il avait entendu la voix d'un enfant qui implorait « Prends et lis ». Augustin ouvre l'épître de Paul aux Romains à 13:13-14.

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Marchons honnêtement, comme en plein jour, loin des excès et de l'ivrognerie, de la luxure et de l'impudicité, des querelles et des jalousies. Mais revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ, et n'ayez pas soin de la chair pour en satisfaire les convoitises.

Augustin nous dit que lorsqu'il termina de lire le passage, « la lumière de la confiance inonda mon cœur et toutes les ténèbres du doute s'évanouirent ».68 Il fut baptisé par Ambrose à la Pâque suivante. Il revient en Afrique en 288 et part dans un monastère. En 391, alors qu'il visite Hippone, il est vu et est ordonné prêtre de force. Lorsque l'évêque d'Hippone meurt en 396, Augustin lui succède jusqu'à sa mort en 430. Augustin est connu pour ses nombreux accomplissements. Par exemple, il composa des chansons populaires, lutta contre le Donatisme, et développa la doctrine de l'église invisible. Il promut la validité des sacrements même administrés par des donatistes. Dans sa lutte contre le Pélagianisme, Augustin comprit la foi comme un don de dieu, l'œuvre de la grâce. Il défendait le concept que « la raison cherche à comprendre ce que la foi croit », et expliqua la doctrine de la Trinité plus clairement que quiconque avant lui. Après la chute de Rome aux barbares en 410 EC, Augustin écrit The City of God (La ville de Dieu) entre 413 et 427, un livre dans lequel il argumente contre l'accusation que le désastre sans précédent de la chute de Rome était la faute du christianisme, que les dieux païens étaient en colère parce qu'ils n'étaient pas adorés. La réponse d'Augustin est que les dieux païens ne donnent rien et que, de plus, le

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christianisme n'offre aucune réussite temporelle ou de ce monde, mais une paix intérieure et une destinée éternelle. Le deuxième Concile de l'église réuni à Carthage en 397 EC pour résoudre le canon du Nouveau Testament sous l'égide d'Augustin, Évêque d'Hippone, approuve les vingt-sept livres du Nouveau Testament tels que nous les connaissons aujourd'hui qui deviennent canoniques. Ceci montre à quel point Carthage était devenue importante et par dessus tout le rôle que l'église d'Afrique du Nord joua dans l'histoire de l'église à ses débuts.

La conquête arabe de l'Afrique du Nord La conquête arabe de l'Afrique du Nord se déroule entre les VIIème et VIIIème siècles, en partie parce que Rome était tombée aux mains des Barbares en 410 et en partie de par le conflit interne au sein de la région romaine d'Afrique du Nord. La chute de Rome signifia que le règne romain sur le monde connu venait à sa fin. Rome avait perdu son emprise sur son empire mondial. Les Arabes qui avaient attendu dans le désert firent une alliance de raid et de violence avec les Berbères. Ils capturent non seulement l'Afrique du Nord du point de vue politique, mais leur conquête met fin à une ère de christianisme vieille de sept à huit siècles dans la région. Les Arabes traversent aussi la Méditerranée pour faire également des raids en Espagne. devient la religion de l'Afrique du Nord.

Synthèse

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Progressivement, l'Islam

Il est possible de faire plusieurs observations sur l'église en Afrique du Nord. Tout d'abord, le christianisme nord-africain est marqué par sa solide participation à l'origine du christianisme. La liste inclut : Simon, qui porta la croix de Jésus ; les Libyens qui furent présents à Jérusalem le jour de la Pentecôte ; les Libyens et les Chypriotes qui furent les premiers à prêcher l'évangile aux Grecs ; les Libyens qui côtoyèrent Barnabas et Paul en tant que prophètes et professeurs à Antioche, et Victor, l'évêque de Rome (189 - 199). Les chefs de l'église africaine aujourd'hui, non moins que par le passé, doivent participer aux réunions œcuméniques de l'église et contribuer au discernement de l'église en ce qui concerne la mission de Dieu et prendre part à son ministère de mission mondiale et d'évangélisme. Deuxièmement, l'église d'Afrique du Nord s'étendait à plusieurs villages berbères et « chaque ville, et presque chaque village avait son évêque ».69 Nous observons un phénomène semblable en Afrique aujourd'hui où le christianisme se répand dans les zones urbaines comme rurales. Tous les dix ans, les évêques des églises principales se multiplient, tout comme le nombre d'évêques des églises d'Initiative africaine et des églises pentecôtistes. Cette multiplication par deux du nombre d'évêques pourrait être un bon signe de la croissance de l'église mais elle pourrait aussi être un mauvais signe de nombreuses scissions provenant de luttes pour le pouvoir. Troisièmement, l'église d'Afrique du Nord était l'église des martyrs. N'oublions pas le dévouement de Perpétua, de Saturus et de son amie Félicité l'esclave, de Cyprien l'évêque de Carthage et de bien d'autres. Le christianisme d'Afrique du Nord était probablement marqué par le martyre, une question que nous avons discutée sous le christianisme à Alexandrie.

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Quatrièmement, l'église d'Afrique du Nord a produit certains des grands chefs de l'église universelle, comme Tertullien, Cyprien, Augustin pour n'en citer que quelques uns. L'une des caractéristiques les plus intéressantes à propos de ces chefs est leur témoignage personnel sur la manière dont ils commencèrent leur vie chrétienne. En outre, il est important de noter la désillusion de Tertullien, tout d'abord vis-à-vis du christianisme orthodoxe puis du Montanisme. Il semble que dans nos églises d’aujourd’hui un certain nombre de gens soient désillusionnés par le christianisme orthodoxe. C'est pour cette raison que certains changent leur loyauté et passent d'une confession à une autre, alors que d'autres quittent les églises principales pour les églises d'Initiative africaine ou pentecôtistes. Les raisons de leur départ peuvent être multiples : les églises principales sont trop occidentalisées, trop froides sur le plan spirituel, manquent de mettre l'accent sur les dons spirituels (et donc bien des membres vont voir les soi-disant « prophètes ») ou s'en tiennent à une liturgie qui est complètement étrangère. Cinquièmement, les églises nord-africaines étaient probablement les premières églises au monde à parler latin. De nouveau, il est possible que les premières traductions des écritures en latin aient été faites en Afrique du Nord. Les grands chefs chrétiens latins, comme Tertullien (de 160 à 220 environ) et Cyprien (de 200 à 258) produisirent une splendide littérature latine, plus tard surpassée par les exploits d'Augustin d'Hippone (354 - 430).70 L'église d'Afrique du Nord était cependant absolument latinisée dans la mesure où elle abandonna les langues indigènes et produisit de grands chefs tels Augustin, un Berbère libyen qui grandit à trois cents kilomètres de la mer, fut éduqué à Carthage et « ne parlait aucune autre langue que le latin ».71 Roland Bainton observe que

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l'abandon des anciens éléments puniques et berbères dans l'église par l'Afrique du Nord aurait pu mener le peuple indigène non seulement à rejeter Rome en tant que puissance colonisatrice, mais aussi le christianisme qui y était associé.72 On espère seulement qu'après avoir été colonisés par les Britanniques, les Français et les Portugais, l'église d'Afrique ne continuera pas à promouvoir les cultures coloniales seules ; nous devons également promouvoir nos langues et nos formes de pensées vernaculaires. Les études des cultures africaines, de la religion africaine et des langues vernaculaires sont des sources riches des formes de pensées africaines, de ses proverbes et de ses idiomes. Le christianisme en Afrique sub-saharienne doit être déseuropéanisé et désaméricanisé, en particulier s'agissant de la liturgie, des styles de prédication et de l'administration de l'église.

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Chapitre 3 L'évangélisation de l'Éthiopie Le territoire de l'Éthiopie est un royaume montagneux connu par le passé sous le nom d'Abyssinie. Il est considéré comme la nation africaine indépendante la plus ancienne, son indépendance remontant aux temps bibliques.73 L'Éthiopie est mentionnée dans plusieurs textes bibliques sous le nom de Kusch.

La civilisation méroïtique Il est important de relever que toute la région sud de l'Égypte était connue sous le nom Kusch ou Éthiopie. Ceci signifie que l'eunuque ou le ministre des finances identifié comme Éthiopien dans les Actes des Apôtres 8:27-28 pourrait en fait être venu du royaume de Méroé dans ce qui est le Soudan du Nord actuel. Méroé prospère de 300 AEC jusqu'en 350 EC, lorsque le royaume grandissant d'Axoum en Éthiopie le conquière finalement. Les fondements de la motivation et de l'état d'esprit de la civilisation méroïtique étaient ceux de l'Égypte ancienne. Les rois se faisaient appeler rois de la Haute et de la Basse Égypte et les dieux égyptiens étaient adorés dans les temples de Méroé, leurs rois vivant la vie de la haute prêtrise des pharaons égyptiens. Ils dirigeaient leur peuple durant les cérémonies de la semence et des récoltes. À la fin du Ier siècle de l'ère chrétienne, la civilisation méroïtique était déjà sur le déclin.74 Mais, l'explication cidessus ne devrait pas éliminer la possibilité que l'eunuque soit venu d'Axoum qui était la puissance montante en Éthiopie.

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L'origine du christianisme en Éthiopie L'histoire du jour de la Pentecôte note la présence de ressortissants de la Libye et de l'Égypte, pays africains, à Jérusalem (Actes 2:10). Mais Sindima cite Jean Chrysostome et son homélie de l'Épiphanie, disant « l'Éthiopien comprit aussi »,75 ce qui indique que des Éthiopiens étaient aussi présents à Jérusalem le jour de la Pentecôte. Nous n'avons néanmoins pas d'information sur ceux qui vinrent d'Égypte et de Libye, pour savoir si ce sont ceux qui rapportèrent le christianisme en Éthiopie. La tradition veut que ce soit les apôtres Mathieu et Thomas qui prêchèrent l'évangile en Éthiopie et que Mathieu soit martyrisé en Éthiopie.76 L'exactitude de la tradition voulant que Mathieu et Thomas aient prêché en Éthiopie est à débattre. Luc, un compagnon et collègue de Paul, auteur de l'Évangile selon Saint Luc et des Actes des Apôtres dans les années 70 ou 80 EC, s'avère être le premier historien des premiers jours de l'église. Il était natif d'Antioche et médecin (Col. 4:14). De Luc, on disait qu'il « était mort célibataire et sans enfant en Boétie à l'âge de quatre-vingt-quatre ans ».77 Il laissa à l'Afrique une très belle histoire, riche d'informations sur l'un des premiers chrétiens africains à être baptisé -- un eunuque éthiopien, officiel de la cour de la reine d'Éthiopie, ministre des finances chargé de tout son trésor (Actes 8:27). L'eunuque, un homme « craignant Dieu »78 suivant l'expression de Luc, reçut le baptême de Philippe l'évangéliste qui revenait de Jérusalem où il était allé prier et passait par la Samarie pour repartir vers l'Éthiopie (Actes 8:26-40). L'histoire de l'Éthiopien suggère qu’il est possible que le christianisme ait atteint l'Afrique au Ier siècle. Eusèbe soutient cette opinion et argumente qu'il en fut ainsi pour

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accomplir la prophétie : « L'Éthiopie étendra sa main vers Dieu » (Ps. 68:31).79 On cite Origène (185 - 254) qui aurait déclaré : « Il n'est pas dit que l'Évangile a été prêché à tous les Éthiopiens, en particulier à ceux qui vivent au-delà du fleuve »,80 impliquant que le christianisme était en effet prêché en Éthiopie pendant ou avant cette époque. Toutes ces références confirment le fait historique que des communautés chrétiennes auraient pu être fondées en Éthiopie et en particulier à Axoum, dès le premier et le second siècle EC.

Frumence et Édésius Dans les temps anciens, les marchants itinérants ou les élèves en quête d'un maître traversaient communément les frontières pour se rendre d'un pays à l'autre. Les archives connues sur l'évangélisation de l'Éthiopie sont donc associées à un jeune homme syrien, Frumence, au début du IVème siècle. L'histoire veut qu'un marchant syrien, ou un philosophe chrétien de Tyr, nommé Mérope, s’en vint par la Mer Rouge au cours d'une expédition d'exploration, probablement vers l'Inde. Mérope était accompagné de ses deux jeunes neveux syriens, Édésius et Frumence. Sur le chemin du retour, leur navire s'arrêta dans un port éthiopien pour s'approvisionner en eau et tout l'équipage fut massacré. Seuls les deux jeunes hommes survécurent. Il se peut qu'ils aient été épargnés vu leur très jeune âge ou purement par la providence de Dieu. Les deux jeunes hommes furent amenés au Roi d'Éthiopie, Ella Amida, à Axoum, la capitale éthiopienne de l'époque. Le roi semble s'être pris d'affection pour les deux jeunes hommes et leur accorda sa confiance. Il fit d'Édésius son échanson et de Frumence son gardien des archives ou son administrateur des finances. Ayant été saisi du désir d'avoir des renseignements sur les chrétiens qui vivaient dans les environs, et d'établir une communauté chrétienne, Frumence reçut la

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permission d'explorer et de propager la nouvelle foi. Il commença à mener des services du culte et put amener un grand nombre de gens à la foi chrétienne. Le roi mourut laissant Ezana, le prince héritier, encore en bas âge. Frumence agit en qualité de régent et put également mener le prince au Christ. Lorsque le prince fut en âge de reprendre son héritage, les deux Syriens demandèrent la permission de retourner chez eux en Syrie. Le prince leur accorda la permission. Ils descendirent le Nil et en atteignant l'Égypte, Frumence décida de contacter l'évêque Athanase. Édésius retourna à Tyr, laissant Frumence à Alexandrie. Frumence avait contacté l'évêque Athanase car il voulait le supplier d'envoyer des missionnaires à Axoum où il avait trouvé que le peuple était prêt à recevoir la nouvelle foi ; il voulait également lui faire part de l'existence et des besoins de l'église dans la capitale éthiopienne. Athanase le reçut chaleureusement et convint que le besoin était urgent. Réalisant que Frumence parlait déjà couramment la langue du peuple d'Éthiopie, il ordonna et consacra Frumence premier Abuna ou évêque de l'église orthodoxe éthiopienne. Athanase le renvoya à Axoum en 330 EC accompagné de quelques missionnaires.81 Selon les dires, la propagation de l'évangile grâce aux prédications de Frumence connut un certain succès car il toucha non seulement les Abyssiniens mais aussi les Blemmyes et les Nubiens.82 La tradition veut que « Frumence, avec une intuition pleine de zèle, traduisit le Nouveau Testament en Éthiopique ou Ge'ez (Guèze) ».83 Plus tard, Frumence fut appelé Abba Salama, Père de la lumière84 et également Abuna Salama, Évêque de la paix. Un autre groupe de moines égyptiens fut envoyé en Éthiopie aux environs de 480 EC.85

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À partir de l'époque d'Athanase, le Patriarche d'Alexandrie nomma tous les Abunas de l'église éthiopienne qui se succédèrent mais la pratique prit fin au XXème siècle. De plus, tous les Abunas étant nommés par Alexandrie, ils étaient donc de l'église copte et de nationalité égyptienne. En octobre 1951, Debra Libanos, un primat éthiopien, fut intronisé premier Abuna éthiopien au Caire.86

Les neuf saints de Syrie Les IVème et Vème siècles furent caractérisés par des controverses en matière de christologie qui eurent un effet nocif sur un bon nombre d'églises, en particulier dans la région orientale de l'Empire romain. L'église occidentale de l'empire romain était en faveur de l'enseignement de la nature duelle de Jésus Christ -- une nature divine et une nature humaine. L'église orientale, qui avait une orientation hellénique, favorisait une christologie qui déclarait que les natures divines et humaines du Christ fusionnaient en une seule nature à sa naissance. Nous avons déjà noté que lorsque le Conseil œcuménique de Chalcédon (en 451) décida en faveur de l'ouest, cette décision jeta les communautés chrétiennes dans le chaos. Suivant leur persuasion christologique, nous avons noté plus haut que les églises orientales adoptèrent une christologie connue sous le nom de monophysisme. Ces controverses christologiques de longue date eurent un grand impact sur les relations entre les régions et les communautés chrétiennes, les évêques s'accusant les uns les autres, et plusieurs d'entre eux perdant leur siège, bien que certains les aient retrouvés. Selon les dires, il existerait une lettre de l'empereur arien Constantin au Roi d'Axoum le priant

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instamment d'obtenir son évêque de sources ariennes plutôt que d'Athanase « qui est coupable de dix mille crimes ».87 En effet, des missionnaires syriens dont l'Éthiopie se souvient comme des Neuf Saints arrivèrent durant le Vème siècle de notre ère. Ils établirent des monastères et traduisirent la Bible en Ge'ez à partir d'une version de la Septante utilisée par le Patriarcat d'Antioche. Il est possible, mais ce n'est pas certain, qu'ils aient été monophysites, fuyant probablement les conséquences de la décision de Chalcédon. C’est à partir de ce momentlà que l'Église éthiopienne épousa la cause monophysite avec une conviction passionnée. L'influence de Byzance (Constantinople) sur le christianisme éthiopien fut de plus en plus marquée.88

La tradition salomonique La maison royale d'Éthiopie fut fondée sur la supposition qu'elle descendait de Ménélik, le fils de Salomon et de la Reine de Saba. L'histoire raconte qu'après la visite de la Reine de Saba à Salomon, dès son retour dans son pays, elle lui donna un fils, Ménélik. Le fils grandit et se fit appeler Ménélik I d'Axoum. Selon les dires, Ménélik serait revenu à Jérusalem, aurait pris l'Arche et l'aurait ramenée en Éthiopie à son propre peuple. De là, commence la dynastie de Ménélik, car on retrouve ensuite Ménélik II. Au fils du temps, la tradition « salomonique devient le symbole principal de l'Éthiopie chrétienne, la pierre angulaire de son sens de l'identité nationale. »89 Cette relation entre le christianisme éthiopien et la tradition salomonique apporte des pratiques juives sinon hébraïques, tout au moins non diluées par les formes de pensée hellénique, dans la vie et plus particulièrement dans la liturgie de l'église éthiopienne.90

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Dès le IXème siècle de notre ère, le déclin d'Axoum s'amorce. Au cours du XIIème siècle, l'Éthiopie réalise de grandes réussites religieuses, sous l'égide de la dynastie Zagwe, originaire de l'Éthiopie centrale. Son roi, Lalibela, fait construire dix églises taillées dans le roc, méritant de faire partie des merveilles du monde. Plus tard, la dynastie est remise en question pour « n’être pas de la pure lignée salomonide -- qui ne descend pas de Ménélik, un fils de Salomon et de la Reine de Saba qui soi-disant fonda la maison royale d'Éthiopie. »91 Selon ce qui est rapporté, l'Éthiopie devint un pays d'églises et de bâtiments religieux. Un style d'architecture et de culte religieux éthiopien bien distinct évolua, encore évident de nos jours. L'architecture des bâtiments religieux de village est ronde ou octogonale avec un toit d'herbe conique. Les chants et les tambours marquent le culte dans les sanctuaires ronds. La nature unique du christianisme éthiopien, bien que considérée par beaucoup comme secrète et mystérieuse, est ce qui la rend unique.

L'islam en Éthiopie La conquête musulmane en Égypte au cours du VIIème siècle sépare la communauté chrétienne d'Éthiopie, non seulement de l'Égypte mais aussi du reste du monde chrétien. Le christianisme éthiopien est plongé dans un profond isolement. Cependant, grâce aux avant-postes montagneux de l'Éthiopie, l'Islam ne pourra jamais supplanter efficacement la culture chrétienne en dépit de ses nombreuses tentatives.92 Au temps de la conquête arabe en Égypte et en Afrique du Nord, l'Éthiopie maintient ses liens avec le monde extérieur de deux manières : l’une est grâce au monastère éthiopien à Jérusalem qui reste un lieu de pèlerinage important pour les moines pieux d'Éthiopie et

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l’autre est le Patriarche copte d'Alexandrie qui continue à nommer l’Abuna de l'Église éthiopienne. Au cours de l'histoire, les chrétiens et les musulmans d'Éthiopie convinrent de ne pas se combattre. Ceci permit à l'église éthiopienne de maintenir son indépendance, sa culture, son identité et sa foi.

Synthèse Voici quelques observations sur la manière dont l'Éthiopie fut évangélisée et comment le christianisme éthiopien se développa. Tout d'abord, les histoires de l'eunuque qui fut ministre des finances d'Éthiopie, et de Mathieu et Thomas, qui prêchèrent en Éthiopie, forgent un lien intéressant entre le christianisme éthiopien et les débuts de l'église de Jérusalem. Deuxièmement, le christianisme éthiopien fut influencé par un certain nombre de facteurs : (a) À l'origine, le christianisme d'Alexandrie l'influença puis l'église copte d'Égypte qui continua à nommer l'Abuna pour l'église orthodoxe éthiopienne jusqu'au XXème siècle. (b) L'influence syrienne fut aussi assez forte y compris Frumence, le premier Abuna et les Neuf Saints de Syrie qui établirent des monastères et traduisirent les Écritures en Guèze. (c) La preuve de l'influence arabe est évidente dans la langue de l'Éthiopie ancienne, le Guèze, qui est toujours la langue liturgique de l'Église orthodoxe éthiopienne, dérivée de l'ancienne langue serbe de l'Arabie méridionale. (d) La maison royale d'Éthiopie fut fondée sur la supposition qu'elle descendait de Ménélik, le fils de Salomon et de la Reine de Saba.

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Troisièmement, il est remarquable que l'Église orthodoxe éthiopienne ne semble pas avoir exercé d'influence directe externe, « ni avoir pris part à aucune expansion de la foi chrétienne sur le reste du continent ».93 Quatrièmement, la nation éthiopienne et l'église orthodoxe éthiopienne exercèrent une influence « mystérieuse » en dépit du fait que l'Église éthiopienne n'est pas une église évangélique. Le fait que l'Église orthodoxe éthiopienne ait absorbé toutes ces influences diverses provenant de sources différentes et, source de fierté, que le pays n'ait pas été colonisé permit à l'église de créer son propre genre de christianisme et même de formuler son propre type de liturgie et d'architecture religieuse. Isichei indique : « L'Éthiopie chrétienne, comme la communauté copte, n'est pas du tout un terrain de mission ; c'est une église ancienne et totalement africanisée qui aurait fourni les précédents les plus utiles pour les autres chrétiens africains s'ils étaient entrés en contact avec elle. » 94 Au début des années 20, les missionnaires occidentaux en Afrique sub-saharienne craignaient l'empiètement de l'Islam sur le sud et craignaient le type de christianisme éthiopien que certains de leurs auteurs qualifiaient d'éthiopianisme. Maintenant que nous avons de plus en plus de contacts avec le christianisme éthiopien, que nous connaissons leurs églises taillées dans la roche et leurs formes rondes ou octogonales, nous pouvons voir tout ce que les autres églises peuvent apprendre de l'Éthiopie. Nos bâtiments religieux doivent s'éloigner du style architectural de type basilique romaine, parfois si étrange dans les villages africains composés de maisons rondes. Les maisons rondes sont belles, elles aussi. Le campus d'Africa University est très beau et arrangé en un demi-cercle pour refléter ce design, la Chapelle de l'université ainsi conçue en forme d'octogone au bout du demi-cercle.

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Cinquièmement, le christianisme éthiopien doit être compris sous l'angle de la religion africaine où la religion est conçue comme une manière de vivre sans faire de prosélytisme.95 Ceci explique son manque de zèle ou de mission évangélique dans les autres régions d'Afrique. Quoi qu'il en soit, à partir du début du XXème siècle, l'histoire de l'église éthiopienne et des éthiopiens en tant que peuple a suscité une prise de conscience politique et inspiré une lutte pour la libération, d'où les missionnaires créant le mot éthiopianisme. C'est ce qui mena au bourgeonnement des églises indépendantes, en particulier en Afrique du Sud, et au désir d'un rattachement au continent par les Noirs de la Diaspora, par exemple, les Rastafariens qui furent inspirés par Haïlé Sélassié. Il n'est pas étonnant qu'Addis Abeba soit devenue le siège de l'Organisation de l'Unité Africaine (de 1963 à 2002) et qu'elle soit maintenant le siège de l'Union Africaine depuis 2002.

Chapitre 4 L'évangélisation du Royaume du Kongo L'Afrique sub-saharienne resta inconnue en Europe jusqu'au XVème siècle de notre ère, lorsque Henri, un prince portugais, connu sous le nom de Henri le Navigateur (1394 1460), ouvrit la voie. Il s'intéressait à la mer et construisit donc un petit château et une tour près d'un lieu appelé Sagres, sur la côte sud du Portugal. Il invita dans son château une multitude d'explorateurs, de cartographes, de géographes et de capitaines au long cours venant de toute l'Europe pour étudier et échanger idées et informations.96 Henri entama l'exploration de l'Afrique. Il eut tout d'abord le désir de découvrir la puissance réelle des Maures qui avaient conquis l'Espagne et le Portugal au VIIIème siècle

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de notre ère. Son objectif plus large pour promouvoir la découverte de l'Afrique avait cinq visées : (a) étendre la connaissance géographique ; (b) étendre le commerce portugais ; (c) découvrir la vraie puissance des Maures97; (d) voir s'il pourrait trouver un prince chrétien qui pourrait devenir un allié contre les Maures ; (e) et finalement, « augmenter la foi de notre Seigneur Jésus Christ et lui amener toutes les âmes qui devraient être sauvées ».98 Les gens d'Henri entrèrent dans Ceuta,99 une ville qui se trouve maintenant au Maroc. Il utilisa Ceuta comme tremplin d'où il partit en expédition plus loin sur la côte d'Afrique de l’Ouest. En 1482, les Portugais arrivaient à Elmina, au Ghana. Au Nigeria, le Roi du Bénin reçut des missionnaires du Portugal, non parce qu'il voulait des missionnaires mais des armes. Et donc, six ans plus tard, le Roi du Bénin était baptisé.

Le christianisme en Afrique de l’Ouest En 1655, les Frères espagnols se rendent au Bénin et en Sierra Léone. Un certain Père Barrerius convertit un chef de la Sierra Leone au christianisme au début du XVIIème siècle. Pour que le chef puisse être baptisé, il devait divorcer de toutes ses femmes sauf une. Il fut baptisé et reçut le nom de Philippe, d'après Philippe II d'Espagne. Bien que les catholiques romains aient voulu évangéliser le peuple de la côte ouest de l'Afrique, leur travail ne dura pas. La motivation pour la conversion fut incapable de produire de changement de vie permanent chez les convertis. Jusqu'en 1617, les catholiques romains poursuivent des activités chrétiennes en Afrique de l’Ouest. Mais en 1618, les protestants commencent à arriver en Afrique de l’Ouest, tout d'abord les anglais qui construisent deux forts le long de la côte, un en

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Gambie et un autre à Cormantine, sur la Côte d'Or la même année. Les Néerlandais entrent en Côte d'Or en 1637 et capturent les forts portugais le long de la côte y compris Elmina. Plus tard, les Français, les Danois, les Suédois et les Brandebourgeois s'établissent également sur la côte. Ils construisent leurs forts pour servir le bien-être commercial et spirituel des occupants. Chaque fort comporte un aumônier pour prendre soin du bien-être spirituel des Européens. L'aumônier joue un rôle essentiel dans la vie quotidienne du fort et occupe une position élevée -- toujours proche du gouverneur ou du directeur général. A cette époque, il était difficile d'établir le christianisme en Afrique de l’Ouest. Les Néerlandais, les Danois, et les Anglais renvoyaient des jeunes ouest-africains dans leur pays natal européen pour qu'ils étudient et qu'ils reviennent en tant que prêtres dans leurs églises respectives. Parfois les résultats n'étaient pas bons ; certains n'arrivaient pas à se réajuster ; d'autres oubliaient même leur langue natale. La vie immorale des Européens d'Afrique de l’Ouest qui professaient en même temps une foi chrétienne, créa un obstacle supplémentaire. Finalement, en dépit de leurs efforts pour introduire le christianisme en Afrique de l’Ouest, ces groupes n'établirent aucun poste de mission permanent.100 Au XIIIème siècle, le Portugal et l'Espagne émergent comme deux des plus puissantes nations, et luttent pour le contrôle des nouvelles terres qui sont découvertes par les Européens. En 1493, le Pape émet la Bulle de Démarcation, qui proclame que toutes les terres à l'ouest de la ligne qui passe par les Açores appartiennent à l'Espagne alors que toutes les nouvelles découvertes à l'est doivent devenir la propriété de droit du Portugal.101 La division des nouvelles terres entre les deux puissances s'inscrit au

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lendemain de la traversée de plusieurs explorateurs pour découvrir ces nouvelles terres. Grâce aux efforts des marins du Prince Henri le Navigateur, Bartholomé Diaz (1450 1500) peut passer la pointe sud de l'Afrique en 1486.102 Vasco de Gama (1469 - 1524) suit avec une autre exploration et atteint le Cap de Bonne Espérance en 1497.103 Les puissances occidentales lançaient souvent simultanément expansion politique et évangélisation. Dans ces explorations des côtes de l'Afrique, les prêtres accompagnaient les expéditions et servaient d'aumôniers auprès des nouvelles colonies commerciales et de missionnaires auprès des peuples africains voisins.104

Le christianisme au Royaume du Kongo En 1482, les Portugais entrent en contact avec l'un des Royaumes Bantu les plus puissants d'Afrique, le Royaume du Kongo.105 Le nom du roi était Manikongo, et « sa capitale M'banza-kongo, le moderne São Salvador en Angola du Nord. »106 L'objectif du Portugal en venant en Afrique de l’Ouest était d’apporter le christianisme et une civilisation plus élevée ou une « civilisation chrétienne » à l'Afrique. Pour parvenir à leurs fins, les autorités gouvernementales portugaises travaillèrent main dans la main avec l'église. Les prêtres portugais entrèrent dans plusieurs villages et bâtirent des églises et des écoles. En fait, ce fut dans la partie centrale de l'Afrique de l’Ouest que « les premières vraies tentatives de contrôle colonial furent menées par la conversion au christianisme et l'établissement du Royaume comme vassal de la couronne portugaise ».107 Donc, en 1490, le Portugal envoie au Royaume du Kongo des missionnaires composés de constructeurs, de menuisiers et bien d'autres ayant des aptitudes diverses.108 Manikongo lui-même et plusieurs de ses chefs et membres de sa famille se convertissent

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et sont baptisés. La capitale est reconstruite en pierre. De nombreux jeunes sont envoyés en Europe pour les éduquer. On raconte que bien que les premiers convertis n'aient peutêtre pas été très sérieux à propos de leur nouvelle foi, Nzinga Mbemba, baptisé en 1491 sous le nom d'Alfonso,109 accède au trône en 1505 et règne avec détermination en tant que roi chrétien jusqu'à sa mort en 1543 et il aurait reconstitué son royaume sur le modèle des royaumes d'Europe de l'ouest si ce n'est pour la question de la traite des esclaves. Mais les rois Kongo ne savaient pas que les Portugais avaient un motif caché au delà de la conversion de l'Afrique de l’Ouest au christianisme ! Les Portugais prévoyaient de « changer les Noirs à l'image de l'homme blanc -- un processus ... qui fit que les Noirs rejetèrent leur culture et en eurent honte comme d'eux-mêmes ».110 Ce système était compris dans bien des milieux comme assimilado -- « une mission civilisatrice». Même en 1950, quatre siècles après le début de la mission civilisatrice, moins d'un pour-cent des Africains d'Angola pouvaient recevoir le statut de citoyen dans leur propre pays.111 En fait, le système visait actuellement à christianiser et à civiliser l'Africain. La plupart des missionnaires d'Europe, d'Amérique, d'Australie, de Nouvelle-Zélande et d'autres pays utilisèrent cette démarche, sous une forme ou une autre, pour évangéliser l'Afrique subsaharienne. Les différences sont une question de degré.

Le christianisme pour la traite des esclaves Par ce processus en deux étapes, christianiser et civiliser les Africains, le plan des Portugais pour le Kongo utilisa des missionnaires pour ouvrir la voie en travaillant « sur les rois puis sur leurs conseillers ». C'est ce qui créa une atmosphère propice à l'introduction de Pères Jésuites comme conseillers du roi, l'un d'entre eux fonctionnant

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même comme premier ministre.112 Les rois prenaient maintenant des décisions sans référer les questions à leurs conseillers traditionnels. Le résultat fut que les rois avaient tendance à devenir des monarques absolus aux mains des Portugais blancs. De plus, « l'idée de royauté de droit divin fut promue par l'onction et le couronnement des rois par les évêques portugais ». Les rois régnaient maintenant en « fils de l'Église » choisis par décret divin pour la servir. Ceci signifiait servir les Portugais en répondant à leurs exigences -- toujours faites sous forme de suggestions amicales par des frères qui étaient « égaux dans le Christ ».113 Les rois Kongolais perdirent donc de plus en plus le contact avec leur culture et leur tradition ainsi qu'avec leur peuple. Bon nombre d'entre eux, comme Alvares, Dom Pedros, Diogos, furent connus sous le nom de « Portugais noirs ».114 Chancellor Williams écrit : « Ils perdirent leur histoire, alors ils moururent. » C'est l'une des tragédies du christianisme africain. Lorsqu’Alfonso devient roi, il est finalement clair que le plan des Portugais était de faire des Africains des esclaves et non pas des chrétiens. Certains des jeunes hommes africains furent envoyés au Portugal pour étudier. Le fils d'Alfonso, Henrique, après treize ans d'études au Portugal, retourna au Kongo en tant qu'évêque, pas évêque du Kongo cependant, mais en tant qu'évêque titulaire d'une province musulmane d'Afrique du Nord. Lorsqu’il fut marginalisé par le clergé portugais, il tomba dans une dépression profonde et tomba malade. Henrique repartit pour l'Europe en 1529 et mourut pendant son voyage de retour vers 1530.115 Il ne fait aucun doute que les rois africains et le peuple du Kongo commencèrent par croire que les Portugais les introduisaient à une vie meilleure. Alfonso envoya des demandes au Portugal « pour ce que nous appellerions maintenant une assistance au

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développement, et des maçons, "deux médecins et deux apothicaires et un chirurgien", et bien d'autres choses furent envoyées. »116 Mais le Portugal a besoin d'esclaves pour ses plantations au Brésil. Au départ, Alfonso est prêt à payer ses importations par des esclaves, jusqu'à ce qu'il réalise que le prix est trop élevé.117 Pour les colons portugais, cependant, il n'y a pas de point de retour ; Alfonso doit continuer à fournir des esclaves. Alfonso réalise que les Portugais étaient venus dans son pays plus pour les esclaves que pour introduire la nouvelle religion et pour apporter une vie meilleure à son peuple. Certain des membres du clergé portugais « participèrent au commerce, y compris à la traite des esclaves, et étaient souvent en conflit les uns avec les autres ».118 Afonso écrit au Portugal pour se plaindre :

...notre pays est en train d'être complètement dépeuplé et Votre Altesse ne devrait pas convenir à cette norme sauf comme à votre service. Et pour l'éviter, notre besoin n’est pas plus grand que quelques prêtres et quelques personnes pour enseigner dans les écoles et pas d'autres biens de (vos) Royaumes que du vin et de la farine pour les saints sacrements.119

Toutes ces plaintes tombent dans l'oreille d'un sourd. En fait, à l'instigation d'un frère, un groupe de Portugais tente d'assassiner Afonso durant la messe de Pâques de 1540.120 En dépit de ces tentatives, Afonso reste chrétien.121 Il régnera jusqu'à sa mort en 1543.122 Finalement, l'intensité des efforts portugais pour capturer le peuple africain et en faire des esclaves pour leurs plantations au Brésil a pour effet de faire échouer leurs

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efforts pour implanter le christianisme au Royaume du Kongo. A partir de ce moment-là, les Kongolais doivent lutter contre la force croissante de cette culture étrangère qui avait été introduite dans leur pays. Bien que le Kongo soit devenu un siège en 1596, le roi du Portugal nommant un évêque portugais, peu de Kongolais furent ordonnés.123 La situation avait complètement changé : les rois Kongolais pensaient que le Portugal les avait trahis. Pour rendre les choses encore pires, des forces venant de Luanda, en Angola, envahirent le Royaume du Kongo. Ce fut la fin des efforts portugais pour évangéliser l'Afrique.

Synthèse Plusieurs observations découlent de la tentative portugaise visant à amener le christianisme et une civilisation plus élevée ou « civilisation chrétienne » au centre de l'Afrique de l’Ouest. Tout d'abord, les efforts des Portugais pour amener le christianisme au Royaume du Kongo au XVème siècle de notre ère se transforment en une entreprise de traite des esclaves. C'est une thématique souvent citée par certains politiciens africains qui choisissent de s’élever contre l'église ou contre les missionnaires. Les chrétiens, en particulier nos chefs chrétiens, doivent comprendre que l'abus portugais du christianisme au Royaume du Kongo au XVème siècle est un fait. Un fait répété autre part plus tard, à différents degrés. Toutefois, la critique des missionnaires ne devrait pas être trop généralisée. Deuxièmement, le christianisme portugais au Royaume du Kongo utilisa et souligna le concept de conversion pour signifier Européanisation ou Portugalisation des

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Africains, c'est-à-dire faire que les chrétiens africains abandonnent leur culture africaine et adoptent la manière de vivre portugaise. Ce processus était connu sous le terme d'assimilado, un déni de l'indigénisation. Il faut cependant noter que non seulement les Portugais mais aussi les missionnaires des autres traditions religieuses ne comprirent pas la théologie de Paul de « la liberté que nous avons en le Christ Jésus » (Gal. 2:4) et qu’ils agirent également en « judaïsateurs ». L'une des conséquences fut que les convertis africains qui choisirent des noms européens ou américains comme noms vernaculaires furent condamnés. Reconnaissons que ceci n'était pas seulement un problème limité aux missionnaires qui sont tous morts depuis longtemps, mais que bon nombre d'entre nous, dirigeants de l'église d'aujourd'hui, nous ne pouvons pas nous débarrasser entièrement de la mentalité missionnaire. Un prédicateur raconte l'histoire d'un fermier dont le bétail refusait de manger de l'herbe brune et sèche à la fin de la saison des pluies après avoir été habitué à déguster de l'herbe verte. Le fermier fit donc porter des lunettes de couleur verte au bétail, ce qui leur fit voir des objets verts une fois de plus. Lorsqu’il plaça la même herbe brune et sèche devant les bêtes, il vit à son grand soulagement qu'elles commencèrent à manger parce que l'herbe paraissait verte. Il nous appartient à nous, dirigeants africains, de retirer les lunettes de missionnaires du XVIII et XIXème siècles et de voir l'église en Afrique avec des yeux africains. Troisièmement, pendant cette époque difficile, certains prophètes femmes émergèrent pour essayer de contextualiser le christianisme portugais au centre de l'Afrique de l’Ouest. Deux de ces femmes étaient Appolonia Mafuta et Vira Kimpa. Cette dernière était une jeune femme baptisée sous le nom de Béatrice qui prétendait être

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le médium de St. Antoine. Elle appartenait à la noblesse et avait été une n'anga, c'est-àdire une guérisseuse traditionnelle, herboriste et devineresse. Elle enseignait que Jésus était né dans la capitale du Kongo et qu'il était noir. Elle fut brûlée au bûcher pour hérésie en 1706 à l'âge de vingt ans.124 La plus âgée, Appolonia Mafuta, qui soutint le ministère de Vita Kimpaher, essayait de comprendre Jésus Christ dans le contexte africain. Elle eut le courage de retirer les lunettes vertes occidentales et d'entamer le processus d'examen de son Maître en tant qu'Africaine avec un regard africain.

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Chapitre 5 La ruée européenne sur l'Afrique Avant l'époque où les sociétés missionnaires envoyaient des missionnaires pour évangéliser l'Afrique à partir du XIXème siècle, d'autres groupes d'origine européenne étaient déjà venus en Afrique -- trafiquants d'esclaves, explorateurs et colons. Bien que ces groupes d'européens soient arrivés indépendamment et séparément, dans un sens, ils étaient tous liés, car la venue d'un groupe ouvrit la porte aux autres. On pourrait dire que la ruée coloniale sur l'Afrique fit que certaines sociétés missionnaires se joignirent à la caravane. Il faut toutefois comprendre la séparation ainsi que la relation entre ces groupes européens, et particulièrement leur relation aux groupes de missionnaires. En outre, il faut aussi comprendre leur rôle et l'impact qu'ils eurent sur la vie africaine, parce que l'évangélisation du reste de l'Afrique sub-saharienne se déroula dans ce contexte historique et transitionnel.

La traite des esclaves et l'esclavage Dès le départ, soyons clair : avant la venue des européens, certaines parties de l'Afrique pratiquaient déjà l'esclavage des prisonniers de guerre. Dans certaines communautés africaines, on tuait les guerriers d'un groupe ethnique vaincu mais on intégrait souvent les innocents. Les femmes du groupe conquis étaient souvent prises en mariage et les jeunes étaient incorporés dans le groupe ethnique des vainqueurs. Ce qui fut nouveau après l'arrivée des européens, ce fut l'introduction de bandes d'alliés africains 57

formés et armés pour faire la guerre aux peuples des villages avoisinants -- brûlant leurs maisons et les capturant pour choisir ceux qui seraient exportés en tant qu'esclaves. La traite des esclaves commença et prospéra dans les pays de la côte de l'Afrique de l’Ouest. On dit que ce sont les Hollandais qui avaient chassé les Portugais du Ghana en 1642 qui furent les pionniers de l'exportation d'esclaves africains du Ghana.125 Les autres nations européennes suivirent. La France au Sénégal-Gambie, la Grande-Bretagne au Ghana et dans le Delta du Niger, et bien sûr les Portugais au Kongo et au Mozambique. Les marchants d'esclaves européens achetaient des esclaves auprès des chefs africains qui vivaient près de la côte et qui avaient acquis un certain goût pour les importations européennes telles que le tissu, les pacotilles et les métaux, les alcools et les armes à feu.126 Oliver et Page estiment qu'à la fin du XVIème siècle, 275 000 avaient traversé les mers. Au XVIIème siècle, le chiffre monte à 1 340 000 ; au XVIIIème siècle, 6 050 000 et 11 900 000 au XIXème siècle.127 Au chapitre 4, nous avons discuté de la manière dont les Portugais du XVème siècle avaient opté pour la traite des esclaves plutôt que pour l'évangélisation du Royaume de Kongo. Le Portugal et l'Espagne, les deux superpuissances de l'époque, avaient tenté d'utiliser les Amérindiens comme ouvriers au Nouveau Monde, mais ils n'avaient pas trouvé le système satisfaisant. En 1517, Charles I d'Espagne (Charles V, Saint Empereur Romain) « ignorant la désapprobation papale, accorde des lettres de patente aux colons espagnols pour l'importation d'esclaves africains dans les îles des caraïbes (Cuba, Haïti, Porto Rico, entre autres) et plus tard sur le continent ».128 Au Brésil, où la cane à sucre et le café étaient cultivés, les Portugais commencent avec

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quelques esclaves africains, un ruisseau qui se transforme bientôt en torrent. Ce fut un navire hollandais qui, le premier, exporta des esclaves dans l'état de Virginie, en Amérique du Nord. Là, la traite des esclaves fut plus lente : environ 2 000 esclaves en Virginie en 1681, 59 000 en 1714 et 263 000 en 1754. Après l'introduction du coton dans les états du sud des États-Unis, on comptait 4,5 million d'esclaves en 1860.129 Pour fournir les îles de la Caraïbe et le continent américain en esclaves, le reste de l'Europe participe à la traite. Liverpool, Bristol et d'autres ports occidentaux dominent ce commerce130 et se développe ce que l'on appelle le commerce triangulaire de l'Atlantique.

Aux ports européens de la Côte des esclaves de la Guinée arrivaient alcool, armes, marchandises et pacotille avec lesquels les capitaines de navires achetaient les esclaves qui étaient ensuite transportés de l'autre côté de l'océan, « empaquetés » étroitement et cruellement : près de 20% mourraient pendant la traversée. Aux Amériques, les navires faisaient le plein de rhum, de tabac et d'autres produits locaux. 131

En Amérique du Nord, comme sur le Cap de l'Afrique du Sud, pour une théologie calviniste pervertie, les immigrés blancs sont synonymes d’Israélites et les esclaves noirs synonymes de Canaanites, « bûcherons et porteurs d'eau ». Les historiens estiment qu'avant le début du XIXème siècle, un nombre plus important d'Africains avaient traversé l'Atlantique que de colons européens, et que l'Amérique ne comptait pas moins de quinze millions d'esclaves.132

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À mesure que la population est de plus en plus mise au fait des horreurs de la traite des esclaves et de l'esclavage, le mouvement antiesclavagiste se développe. Il se trouve que les églises protestantes de l'Allemagne, de la Grande Bretagne et des colonies américaines (maintenant les États-Unis) vivaient un réveil évangélique. Ces réveils soulignaient la nécessité d’une conversion personnelle au Christ, chose qui provoqua un changement au sein des églises elles-mêmes. La conscientisation du mouvement évangélique et des Quakers (ou Société religieuse des amis) s’opère vis-à-vis de l'esclavage. On a le sentiment que la conscience morale qui s'éveille au sein du mouvement évangélique donne le jour au mouvement et à la croisade antiesclavagiste. Le mouvement évangélique donne aussi lieu aux efforts des missionnaires protestants. L'un des plus grands changements qui s'opère entre 1750 et 1850 est une évolution qui passe de l'acceptation et du soutien à l'esclavage à des attaques verbales, légales et militaires de l'esclavage. La première étape de ce vaste changement au sein du christianisme occidental coïncide au réveil moral des Quakers d'Amérique. En 1688, la société Quaker de Germantown, en Pennsylvanie, organise la première protestation. Mais c'est John Woolman (1720 - 1772) et d'autres avec lui qui organisent et diffusent des informations exactes sur l'esclavage. C'est ce qui permet à la population de réaliser ce qui se passe et d'effectuer un changement. Dès 1761, tous les Quakers qui participent au commerce des esclaves sont mis au banc (excommuniés) de la Société. L'un des convertis à l'anti-esclavagisme les plus importants est John Wesley, le prédicateur évangélique anglais. En 1772, il lit un livre écrit par un Quaker américain, devient anti-esclavagiste et prêche continuellement contre l'esclavage. En GrandeBretagne, une lutte politique fait rage pour éradiquer l'esclavage et le commerce des

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esclaves. Cette lutte s'accompagne d'un effort philanthropique visant à construire quelque chose de mieux que le commerce des esclaves en Afrique. Un groupe d'évangélistes britanniques appelés la Secte Clapham est très active dans cet effort. Après l'affranchissement des esclaves en Grande-Bretagne, un mouvement naît qui vise à renvoyer les esclaves en Afrique. C'est le début de la colonisation de la Sierra Leone à partir de la Grande-Bretagne et plus tard du Liberia à partir de l'Amérique. L'idée de la colonie de Sierra Leone n'était pas entièrement humanitaire. Pour la plupart des gens, c'était un moyen pour la Grande-Bretagne de se débarrasser des indésirables, comme les anciens esclaves noirs. Mais l'influence de certains chrétiens se fait ressentir dans la direction que prend cette entreprise. Dès 1834, l'esclavage est aboli dans l'empire britannique. Les anciens esclaves de la Grande Bretagne et de ses colonies sont réimplantés en Sierra Leone et beaucoup de ceux qui viennent d'Amérique le sont au Liberia. Remarquons enfin que la Ligue des Nations, créée en 1920, proscrit l'esclavage, comme le firent les Nations Unies créées en 1945.133

Les explorateurs européens sur le Continent Après les trafiquants d'esclaves, ce sont les explorateurs européens qui composent le second groupe de cette ruée européenne sur l'Afrique. Le cœur du continent africain est toujours une énigme pour les Européens. À partir du quinzième siècle, quelques navires européens avaient navigué le long de la côte et autour de l'Afrique, en particulier autour du Cap de Bonne Espérance, venant de l'est ou allant vers l'est, mais sans jamais pénétrer sur le continent à proprement parler. Les capitaines des navires négriers restaient souvent

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sur la côte pendant que d'autres pénétraient vers l'intérieur pour vandaliser et capturer les esclaves pour eux. Eux non plus ne pénétraient jamais dans les forêts d'Afrique. Au départ, les explorateurs européens explorent les fleuves africains, avec un intérêt particulier sur la découverte de leur source et la direction vers laquelle ils coulent vers l'océan. Ces explorateurs anglais, français et allemands commencent à pénétrer dans les forêts africaines. L'Association pour la Promotion de la Découverte des Parties Intérieures de l'Afrique (connue communément sous le nom d'Association Africaine), fondée en 1788, avait une association homologue en France, l'Expédition d'Égypte de Napoléon (1798 - 1801).134 Mais les archives d'expéditions d'exploration précédentes étaient venues de sources portugaises. Ramusio’s Delle Navigationi e Viaggi de Giovanni Battista (Venise, 1550) décrit une ambassade portugaise en Éthiopie en 1520. En outre, un Dominicain portugais nommé Joao de los Santos, dans son Éthiopie Orientale (1607) dépasse le titre de son livre en offrant une brillante cartographie de la côte est de l'Afrique allant aussi loin que le Mozambique. « Par contraste, deux écrivains français ultérieurs, Guillaume Delisle (1675–1726) et Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville (1697–1782), font preuve d'une ignorance profonde qui fait couler le Niger vers l'est à partir du Lac Tchad ».135 Des sociétés géographiques ou scientifiques comme l'Association Africaine parrainaient souvent des explorateurs individuels, y compris des personnalités voulant faire des missions pour augmenter leur connaissance de l'Afrique. Ces sociétés citaient leur intérêt dans ces expéditions : (a) attaquer le commerce des esclaves, (b) chercher à introduire un commerce légitime, et (c) chercher à introduire le christianisme. Parmi les fleuves, lacs et montagnes qu'ils explorèrent, on peut citer ceux-ci :

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Le Nil. James Bruce, un Écossais, se rend en Éthiopie en 1768 « et vit la source du Nil Bleu ».136 Dans le processus, il fut accueilli « dans la capitale éthiopienne de Gondar ou dans celle du Royaume Funj à Sennar sur le Nil Bleu ».137 Le Haut Niger. L'Association Africaine finança l'exploration du périple de Mungo Park sur le Haut Niger entre 1795 et 1797. Park revint au même endroit entre 1805 et 1806.138 Il est important de noter que Sir Joseph Banks et Sir John Barrow réussirent à faire germer l'idée au sein du gouvernement britannique que l'exploration était une dépense officielle légitime. C'est aux frais du gouvernement britannique que Park revient en Afrique pour descendre presque entièrement le cours du Niger en 1806, que Denham et Clapperton explorent Bornu et Hausaland après avoir traversé le Sahara de Tripoli entre 1823 et 1825, que les frères Landen tracent le cours du bas Niger jusqu'à la mer en 1830, et que le grand explorateur allemand Heinrich Barth entreprend ses explorations méticuleuses du Soudan central et occidental entre 1850 et 1855.139 Le Kilimandjaro et le Mt. Kenya. Entre 1847 et 1849, deux membres allemands de la Société Missionnaire de l'Église (CMS), Johann Ludwig Krapt et Johannes Rebmann, sont les premiers Européens « à voir les cimes enneigées du Kilimandjaro et du Mont Kenya ».140 L'objectif principal des périples de Krapt et de Rebmann est de nature missionnaire comme le sont les premiers voyages de David Livingstone.141 Le Lac Tchad. L'explorateur allemand Gerhard Rohlts explore le Sahara de l'Afrique du Nord en long et en large, une exploration élargie plus tard par d'autres Allemands, « en particulier Gustav Nachtigal, qui, entre 1870 et 1874 explora le Soudan entre le Lac Tchad et le Nil ».142

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Le Monomotapa. Entre 1860 et 1872, Karl Mauch est le premier Européen des temps modernes à explorer la région des anciens Monomotapas au Zimbabwe. Le Fleuve Gambie. Gaspard-Théodore Mollien, un officier naval français, visite Futa Jallon à dos d'âne lorsqu'il voit la source du Gambie et d'autres fleuves en 1818.143 Les chutes de Victoria. Entre 1853 et 1856, le missionnaire David Livingstone s'achemine par voie terrestre du sud vers les Chutes de Victoria et « de là, vers l'ouest vers Luanda et vers l'est de nouveau jusqu'à l'embouchure du Zambèze ».144 Ayant publié ses voyages sous le titre Missionary Travels and Researches, Livingstone « suscita l'enthousiasme de l'Angleterre victorienne pour ouvrir ce côté du continent au christianisme et au commerce ».145 L'Association Africaine, devenue à l'époque la puissante Royal Geographical Society recevant une subvention du gouvernement, soutient les voyages de Livingstone.146 C'est la même société qui parraine l'exploration du Zambèze par Livingstone entre 1859 et 1864, exploration au cours de laquelle il voit le Lac Malawi. Devenu riche par la vente de son livre, il s'autofinance pour explorer « le cours supérieur du Congo entre 1867 et 1873 ».147 Le travail de Livingstone est popularisé par la visite de H. M. Stanley, un journaliste parti d'Amérique pour retrouver Livingstone au cœur de l'Afrique. Et Stanley de prononcer sa célèbre phrase, « Dr. Livingstone, je présume ».148 Le Lac Tanganyika et Victoria Nyanza. Burton et Speke se rendent au Lac Tanganyika en 1858 et Speke et Grant au Lac Victoria Nyanza et descendent le Nil entre 1867 et 1874. La Royal Geographical Society les parraine tous.149 Le Congo. Le travail de H. M. Stanley a un impact énorme en Europe et en Amérique. Le roi Léopold des Belges s'intéresse au Congo. Il est facile de comprendre

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comment christianisme et colonialisme ont pénétré en Afrique main dans la main. Par exemple, en tant que missionnaire et géographe, le but de David Livingstone était de faciliter l'essor du commerce pour ouvrir la voie au christianisme en Afrique. Pour la Conférence Géographique Internationale de Bruxelles de 1884, l'objectif était de planter le drapeau de la civilisation sur le sol de l'Afrique centrale pour combattre la traite des esclaves.

Les colons et la répartition de la terre L'exploration de l'intérieur de l'Afrique au cours du XIXème siècle mena éventuellement à une ruée européenne pour coloniser l'Afrique. La première puissance européenne à se précipiter sur l'Afrique est le Roi Léopold II qui ne représente pas tant la Belgique que son propre intérêt. Ayant accédé au trône en 1865, il encourage l'exploration de l'Afrique centrale. Dès 1876, il fonde une chaîne de comptoirs commerciaux et scientifiques allant de Zanzibar à l'Atlantique. « Les comptoirs devaient avoir des garnisons et devaient servir de bases d'où attaquer le commerce des esclaves et protéger les missions chrétiennes. »150 Les deux premières explorations pénètrent par l'Afrique de l’Est en 1878 et 1879 et s'attachent aux postes de missions des Pères Blancs à Tabora et au Lac Tanganyika. 151 Profitant du voyage de H. M. Stanley qui descend le fleuve Congo en 1877, le Roi Léopold utilise celui-ci pour lui ouvrir le Congo en 1879. Il opère un transport fluvial de l'embouchure du Congo vers la ville actuelle de Kisangani, à plus de 1 600 kilomètres. Il prépare « la reconnaissance internationale de son règne sur toute la région du bassin du Congo ».152 Son intention réelle était de développer le bassin du Congo « comme une zone d'échange commercial libre sous son "régime international"

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plutôt que de le laisser tomber entre les mains d'autres rivaux nationaux.153 Beaucoup pensent que Léopold, bien plus que tout autre chef d'état, créa cette course aux colonies.154 L'Allemagne est la seconde puissance à pénétrer en Afrique entre 1883 et 1885. Les Allemands vont vers le sud-ouest de l'Afrique, Togoland, le Cameroun et l'Afrique de l’Est. La Grande-Bretagne est déjà en Afrique dès 1879 -- en Gambie, en Sierra Leone, en Côte d'Or, à Lagos et à la Colonie du Cap. La France est aussi en Afrique dès 1879 -en Algérie, au Sénégal, au Gabon et en Afrique de l’Est. Le Portugal, la puissance coloniale la plus ancienne en Afrique, était en Angola et au Mozambique en 1879. Il est important de comprendre le rôle des Français et des Britanniques dans cette ruée sur l'Afrique. « En 1881, le contrôle financier Anglo-français se désintègre devant la révolte de l'armée nationale, menée par l'un de ses officiers égyptiens le plus ancien, Urabi Pasha. »155 Pour réprimer la révolte, les Britanniques et les Français prévoient d'agir de concert. La veille de l'attaque, quelque chose empêche les Français de rejoindre les Britanniques. La Grande-Bretagne réprime donc la révolte seule et occupe l'Égypte jusqu'à ce qu'elle devienne un protectorat en 1914. Après avoir réprimé la révolte, les Britanniques refusent de permettre à la France d'entrer et cette dernière tourne alors son attention vers l'Afrique de l’Ouest, encourageant ainsi un esprit de compétition. À partir de ce moment-là, il existe le sentiment général parmi toutes les puissances européennes qu'elles devraient contrôler un morceau de l'Afrique. Et c'est ainsi qu'elles épuisèrent les ressources naturelles de notre mère l'Afrique pour le développement de leurs propres capitales. C'est cette ruée vers l'Afrique entre puissances européennes qui mena à la Conférence de Berlin en décembre 1884.

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L'Éthiopie est le seul pays africain qui ne subit aucune occupation par une puissance européenne.

Synthèse Quelles sont nos observations quant à la venue des trois groupes européens en Afrique ? Tout d'abord, les événements liés à la traite des esclaves et à l'esclavage ainsi qu'à la colonisation de l'Afrique sont des événements historiques qui ont créé un traumatisme chez les peuples africains. Ce traumatisme eut un impact non seulement sur les victimes immédiates de la traite des esclaves mais également sur ceux qui échappèrent à ce commerce et sur les descendants de ces victimes qui vivent maintenant dans la Diaspora africaine.156 Les personnes qui ont souffert et celles qui ont blessé d'autres personnes même sans en avoir l'intention trouvent souvent un moyen de se réunir, de se réconcilier et d'aller de l'avant. L'histoire de Joseph et de ses frères est utile : « Vous aviez médité de me faire du mal : Dieu l'a changé en bien, pour accomplir ce qui arrive aujourd'hui, pour sauver la vie à un peuple nombreux. » (Gen. 50:20). Aujourd'hui, à African University, les étudiants et le personnel prennent tout le mois de février pour célébrer avec ceux de la Diaspora et pour commémorer l'Histoire Noire des Africains de la Diaspora. Quelle opportunité glorieuse pour promouvoir une réunion globale ! Deuxièmement, inspirés par des chefs de la Diaspora Africaine, un mouvement se dessina non seulement pour vaincre le colonialisme mais aussi pour reconnaître l'unité de tous les peuples du continent africain. Les voix de penseurs tels que Marcus Garvey et W. E. B. DuBois, ainsi que les idées venant des réunions panafricaines furent importantes.

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L'une de ces réunions qui se tint en 1945 à Manchester, en Angleterre, réunion à laquelle participèrent des dirigeants africains du continent comme George Padmore, Kwame Nkrumach et Jomo Kenyatta, devint un jalon important. L'Afrique est maintenant confrontée à une nouvelle ère -- une ère post-coloniale avec de nouveaux ennemis. Personne n'aurait pu mieux décrire cette nouvelle ère post-coloniale que ne le fit le Premier Ministre Robert Gabriel Mugabe le 18 avril 1980, le jour de l'indépendance du Zimbabwe. Dans un message invitant la nouvelle nation à un esprit de réconciliation, il déclare :

Devenir un nouveau peuple exige que nous soyons constructifs, progressistes et que nous regardions pour toujours vers l'avenir, car nous ne pouvons pas nous permettre d'être des hommes d'hier... Notre nouvelle nation exige que chacun d'entre nous soit un nouvel homme avec un nouvel esprit, un nouveau cœur et une nouvelle âme qui doit unir et non diviser. C'est l'essence humaine qui doit former le cœur de notre changement politique et de notre indépendance nationale. Si hier je t'ai combattu en tant qu'ennemi, tu es aujourd'hui devenu un ami et un allié ayant le même intérêt national.

Ce discours d'investiture du Premier ministre du Zimbabwe d'alors marqua la fin de l'ancienne ère coloniale et l'aube d'une nouvelle ère. Troisièmement, dans l'Afrique post-indépendance, il reste encore à quelques unes de nos nations d'offrir paix et développement à leurs citoyens. Ces pays ont plutôt

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perpétué les expériences traumatiques de la torture et de la brutalité en utilisant la police et l'armée. Ces gouvernements n'ont pas le respect de l'état de droit. De tels régimes ont créé des armées très équipées comme si la guerre avec les puissances coloniales n'était pas terminée. À un symposium réuni par les Conférences des Églises de Toute l'Afrique (AACC), la déclaration du corps collectif de l'église observe que le coût de la création et de l'entretien de ces armées africaines est si élevé, un acte qui a plongé notre peuple dans la pauvreté, que ces nations « n'ont pas combattu les vrais ennemis de l'Afrique : la pauvreté, l'insécurité, la famine et l'analphabétisme ».157 Le symposium poursuit en déclarant que la pratique d'actes barbares qui se produisent actuellement durant les interrogations « ou dans les enceintes des prisons, que ce soit des matraquages, des chocs électriques, une isolation en solitaire dans des cellules avec des serpents, des bêtes ou des insectes dangereux et la détention de personnes normales avec des détenus ayant des troubles mentaux...»158 réduit la dignité non seulement de la victime mais également de son bourreau. Le résultat est que de plus en plus, les jeunes ayant des aptitudes quittent leur pays pour trouver de plus verts pâturages. Les nations africaines sont de nouveau gravement spoliées de leurs corps sains et de leurs jeunes hommes et femmes qualifiés, cette fois-ci non pas par la traite des esclaves mais par des régimes éhontés. Et un très grand nombre de jeunes gens africains sans qualifications se transforment en des bandes de voleurs dans leurs propres sociétés. Il appartient à l'église de continuer à communiquer le message que chaque être humain est créé à l'image de Dieu et que la dignité humaine doit être préservée -- que tous les êtres humains, sans discrimination aucune, doivent jouir de leurs droits humains fondamentaux. Notre message aux dirigeants de tels régimes barbares est que dans la

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mesure où certains dirigeants africains ont souffert terriblement dans les prisons coloniales, nous devons enseigner à nos anciens maîtres qu'il est possible de traiter ses opposants politiques de manière humaine. Oh Afrique ! « Mais que la droiture soit comme un courant d'eau, Et la justice comme un torrent qui jamais ne tarit. » (Amos 5:24).

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Chapitre 6 L'évangélisation du reste de l’Afrique sub-saharienne L'évangélisation de l'Afrique sub-saharienne par les églises protestantes provient d'un certain nombre de facteurs en Europe et plus tard en Amérique du Nord. Tout d'abord, il y eut la montée de la piété évangélique en Europe et en Amérique. Le mot piété fait référence à la foi et au comportement personnel (voir 1 Tim. 5:4, LS) « qui inclut le repentir et la prière et la pratique de l'amour chrétien ».159 La piété est une dévotion personnelle envers Dieu, les pratiques et devoirs religieux d'une personne. Le piétisme est donc un « système qui souligne l'idéal de dévotion de la religion ».160 Simplement dit, le piétisme est la religion du cœur. Lorsque le christianisme acquit le statut de religion d'état au quatrième siècle, permettant ainsi à un plus grand nombre de gens de rejoindre l'église sans avoir peur de persécution, et une plus grande influence séculaire dans la vie de l'église,161 certains chrétiens réagirent en développant un style de vie ascétique ou monastique -- un style de piétisme dans le désert et le monastère. Cette vie ascétique ou monastique relevait de la pratique d'auto-déni : le choix de quitter une vie dans le monde et de suivre le Christ en compagnie de gens de même esprit.162 De même, de 1650 à 1800, une nouvelle société séculariste émerge en Europe et en Amérique « dans laquelle la religion n'est qu'un intérêt parmi tant d'autres ».163 Comme prélude à cette période, l'Europe avait été plongée dans une guerre de religion, la Guerre de Trente Ans (1618 - 1648) entre l'Église romaine et les Luthériens. Selon les dires, environ dix millions d'Allemands furent tués sur les 71

seize millions que comptait la population.164 À l'issue de trente ans de guerre, personne ne savait plus vraiment la raison des combats. C'est de cette expérience de souffrance vécue par les gens ordinaires qui rodaient dans les forêts comme des animaux, mangeant de l'herbe, et parfois ayant même recours au cannibalisme qu'« au lendemain de cette lutte, naquit le piétisme, une réforme évangélique vigoureuse ».165 Philip Jakob Spener et August Hermann Frankle sont deux des personnalités les plus importantes du piétisme évangélique en Allemagne. Spener (1635 - 1705) naquit treize ans avant la fin de la Guerre de Trente Ans. Il en connaissait les résultats dévastateurs, et aspirait à un changement. Réalisant combien il serait difficile d'obtenir une réforme en passant par l'Église d'état luthérienne formalisée, Spener organise de petits groupes qu'il rencontre chez lui pour lire la Bible, prier et discuter.166 Outre une étude directe de la Bible, il promeut le concept qu'un bon sentiment dans le cœur est même encore plus important que de connaître la doctrine pure.167 August Frankle (1663 - 1727) crée un groupe d'étude piétiste à l'Université de Leipzig en 1689. C'est le disciple le plus célèbre de Spener. Se heurtant à l'opposition, Frankle quitte l'Université de Leipzig et intègre la nouvelle Université de Halle. Il inclut le piétisme dans le cursus d'enseignement, enseigne aux étudiants et place plus de deux cents pasteurs chaque année dans l'Église allemande. Il voit aussi la misère des pauvres et y réagit. Il accomplit énormément : (a) L'Église protestante d'Allemagne s'attache pasteurs et laïcs pleins de zèle. (b) L'étude de la Bible devient une pratique commune de groupe comme une pratique personnelle. (c) Une plus grande sincérité dans la dévotion. (d) Le service social s'étend, à commencer par Frankle qui crée la célèbre Maison des Orphelins à Halle en 1698. Bon nombre de ces enfants deviennent des membres du

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clergé, des missionnaires et des professionnels de diverses sortes, et certains sont envoyés dans les colonies, comme l'Amérique. (e) Enfin, les pasteurs de Halle créent un nouveau sérieux sur la foi et la pratique chrétiennes.168 L'émergence des Moraves est un deuxième facteur à l'œuvre dans l'évangélisation de l'Afrique sub-saharienne par l'église protestante. Vers 1722, les protestants de langue allemande de la Moravie cherchent refuge en Saxonie. Le Comte Zinzendorf leur permet de créer un village sur ses terres à Hernhut espérant qu'ils deviennent une communauté piétiste au sein de l'église luthérienne. En 1727, il était devenu le chef spirituel du groupe et leur piété évangélique trouve son expression dans un mysticisme, des chants et une liturgie axés sur le Christ. 169 C'était un groupe de soldats du Christ pleins de zèle et engagés au sein de l'Église luthérienne. Ils élèvent leurs enfants et les forment au sein de leur communauté, séparés de la supervision parentale, comme dans la Maison des orphelins de Halle. La vie dans leurs villages ressemble à une vie monastique. Devant l'opposition grandissante de l'Église luthérienne orthodoxe, les Moraves deviennent une nouvelle église dont la concentration sur les missions est inégalée par les autres groupes protestants du XVIIIème siècle.170 Ils envoient des missionnaires aux Antilles en 1732 et au Groenland en 1733 ; en 1735, Spangenberg mène un groupe dans l'état de Géorgie en Amérique. D'autres missionnaires moraves partent au Ghana, en Égypte, en Afrique du Sud et au Labrador.171 Un troisième facteur est le Réveil évangélique qui touche à la fois l'Europe et l'Amérique et dans lequel est enraciné le mouvement missionnaire de l'Église Catholique.172 Le soi-disant Premier Réveil Évangélique ou Réveil évangélique commença en Europe. En fait, selon Stephen Neil, la combinaison de ce réveil et des

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forces religieuses de « haute piété anglicane, les traditions mystiques, le piétisme de Halle et d'Hernhut... menèrent à John Wesley et au mouvement méthodiste en GrandeBretagne ».173 Ce réveil toucha de nombreux pays en Europe : l'Allemagne, la France, et la Norvège au XIXème siècle et Genève dans les années 1830.174 Du point de vue intellectuel, la nature de la période allant jusqu'au XVIIIème siècle représente le Siècle des lumières. La philosophie newtonienne mena à l'exaltation de la raison seule.175 Le déisme était la thématique théologique principale ; les gens devaient se contenter d'un Dieu lointain qui ne semblait pas se préoccuper d'eux ou qui n'intervenait pas. Entre autres détracteurs vigoureux du déisme, on retrouve William Law, auteur du livre A serious Call to a Devout and Holy Life (Un appel sérieux à une vie de dévotion et de sainteté) écrit en 1728, qui eut une influence profonde sur John Wesley ; on retrouve aussi Isaac Watts (1678 - 1748), congrégationaliste et fondateur de l'hymnologie anglaise moderne.176 De plus, pendant cette même période, les sociétés religieuses étaient courantes. La plus ancienne était formée par un « groupe de jeunes hommes à Londres aux environs de 1678, pour prier, lire les Écritures, cultiver la vie religieuse, recevoir fréquemment la communion, aider les pauvres, les soldats, les marins, et les prisonniers et encourager la prédication ».177 On dit que dès 1700, il y avait près d'une centaine de sociétés rien qu'à Londres.178 Un grand nombre des membres du clergé de l'époque considérait ces sociétés religieuses comme trop « enthousiastes » et gardaient leur distance. Samuel Wesley forme une société religieuse à Epworth en 1702.179 À cette époque, de grandes personnalités émergent en tant qu'évangélistes. Parmi elles, George Whitefield (1714 - 1770) que certains considèrent comme le premier et le

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plus grand évangéliste des temps modernes. C'était en effet un homme « dont la prêche émouvait des milliers, en Angleterre comme dans l'Amérique coloniale, lorsque son étonnante éloquence dynamisa le Grand Réveil, aux environs de 1740 ».180 Whitefield croyait en la prédestination, que seuls les élus seraient sauvés. John Wesley (1703 1791), un contemporain de Whitefield, prêchait que « le salut est possible pour tous »181 et pas seulement pour les élus. John Wesley soutenait énormément le piétisme évangélique anglais. C'est cependant Whitefield qui encourage Wesley à prêcher en plein air. De ce fait, à la mort de Wesley, la Société Méthodiste comptait 80 000 membres, et environ 1300 prédicateurs locaux itinérants en Angleterre, ainsi que 60 000 membres et deux cents prédicateurs en Amérique.182 À une époque où la spiritualité semblait de nouveau s s’éteindre en Angleterre, « en 1858, le second Réveil évangélique traversa l'Atlantique, de l'Amérique vers la Grande Bretagne ».183 Dans l'Amérique de cette époque, les évangélistes les plus importants étaient Peter Cartwright (1785 - 1872), Charles Finney (1792 - 1875), Dwight L. Moody (1837 - 1899) entre autres. En Grande-Bretagne, il s’agissait de William Booth (1829 1912) et de Henry Drummond (1851 - 97).184

La formation de sociétés missionnaires De cet esprit de renouveau qui avait touché les églises d'Europe, de GrandeBretagne et d'Amérique au XVIIIème siècle, la plupart des églises créèrent des sociétés missionnaires et des conseils.185 Les baptistes anglais créent les premières sociétés missionnaires en 1792 suivis de la Société Missionnaire de Londres (LMS), créée en 1795 avec l'objectif louable de prêcher l'évangile aux païens sans être liés à une forme

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particulière d'ordre ni de gouvernement religieux. En fait, la LMS devient rapidement l'instance du corps congrégationaliste anglais. La Société missionnaire de l'Église évangélique anglicane, créée en 1799 est un exemple d'une autre société, avec la Société Biblique Étrangère et Britannique, qui offre un exemple remarquable de coopération entre églises, ayant un comité dont la moitié sont des anglicans et l’autre moitié sont des religieux libres (Free churchmen) en 1804. L'Amérique fait son entrée sur la liste en 1810, avec le Conseil américain des Commissaires des missions étrangères, principalement congrégationalistes, et en 1814, avec le Conseil missionnaire baptiste américain. L'Allemagne forme sa première société missionnaire en 1824, la Société de Berlin ; la Suisse, un peu plus tôt en 1815 avec la Mission de Bâle ; le Danemark en 1821, la France en 1822, la Suède en 1835 et la Norvège en 1842.186 La Société Missionnaire de l'Église épiscopale méthodiste (maintenant l'Église Méthodiste Unie) est formée en 1819.187 Certaines sociétés missionnaires envoyaient des gens en Afrique non seulement pour entreprendre un travail missionnaire, mais aussi pour fonder leur type d'église. L'Église luthérienne est probablement la première église missionnaire protestante à faire cela en Afrique, car Heyling de Luebeck travaille en Abyssinie de 1634 à 1636. En 1662, les luthériens envoient des pasteurs du Danemark pour faire un travail de mission au Ghana. Les Moraves y sont en 1726 et travaillent souvent par le biais d'autres églises, comme les églises luthériennes. Le Méthodisme atteint l'Afrique par le biais des esclaves affranchis. Les anciens esclaves arrivent en Sierra Leone de l'Angleterre, de la Jamaïque, et de la Nouvelle Écosse entre 1787 et 1791, et au Liberia de l'Amérique en 1822. La présence des presbytériens américains remonte aux années 1833, au Liberia, au Gabon et

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au Kongo. En 1867, les presbytériens entrent au Natal et, aux environs de 1874, les presbytériens écossais entrent au Malawi.188 Bien d'autres églises suivront plus tard et de nos jours, elles continuent à venir en Afrique.

Les suppositions des missionnaires sur l'Afrique Alors que les puissances européennes se ruent sur les terres africaines, un processus que les colons légalisèrent par la Loi de Berlin en 1885, les missionnaires, quant à eux, signent aussi des accords de courtoisie qui reviennent presque à ce que des sociétés missionnaires se joignent à cette ruée sur les terres africaines. Le résultat est que chaque société missionnaire finit par avoir un territoire dans lequel elle doit développer une œuvre missionnaire, ce qui ne laissait à la population aucune option lui permettant de choisir quel genre d'église confessionnelle elle souhaitait. Elle devait accepter la confession qui lui était assignée dans sa région. Les missionnaires qui vinrent en Afrique fonctionnaient sur un certain nombre de suppositions. Ils croyaient que l'Afrique était un « continent noir » qui ne pouvait être fier de rien. Pour eux, l'Afrique était un continent qui n'avait ni histoire, ni philosophie, ni culture, ni religion en soi. Au début du XXème siècle, John Taylor, missionnaire de l'Église épiscopale méthodiste dans ce qui était alors la Rhodésie du sud, écrit :

Les peuples de ces terres d'Afrique sont primitifs et désolants... S'il existe une race de gens sur terre représentée par le Lazare de l'histoire de l'homme riche, ou « celui qui a été dérobé » dans l'histoire du bon Samaritain, c'est bien l'homme noir d'Afrique et ses deux cents millions de

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frères et de sœurs. L'impuissance humaine est le langage divin le plus fort pour ceux à qui Il a accordé richesse, éducation et pouvoir. Quelle quantité de vie, de littérature, d'histoire, d'au moins quelque chose de beau et de vrai dans leur vie religieuse, de philosophie et de génie ont les autres peuples de la terre. Mais tout ceci manque en Afrique. 189

Un missionnaire méthodiste britannique en Afrique de l’Ouest écrit sur l'allocation des missionnaires :

Ce n'est pas un reflet sur le peu d'hommes qui servent maintenant en Afrique que, dans l'ensemble, ceux ayant eu une vie A. I. à Lloyds sont partis pour l'Afrique et ceux ayant un premier à Oxford ou à Cambridge sont partis pour l'est.190

Les missionnaires de cette ère ne considérèrent jamais l'Afrique sur un pied d’égalité. Certains présumèrent que l'Africain ne pensait pas. Selon les dires, Dom Toedosio Clemente de Gouveira, qui, dans les années 1940 devint l'archevêque de Maputo et, plus tard, fut nommé Cardinal par le Pape, déclara « L'autochtone est paresseux, de nature et par le climat... Et nous devons considérer que l'autochtone est, en général, un enfant bien qu'il ait un corps d'homme. Il pense et raisonne comme un enfant... ».191 Nous avons le cas contraire avec Muti Sikobele du Mozambique, un contemporain de John Taylor et peut-être aussi de Dom Toedosio Clemente de Gouveira.

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Sikobele était l'un des premiers pasteurs africains de l'Église méthodiste épiscopale, un prédicateur et un chef plein de talent. Frustré par l'attitude des missionnaires envers les Africains, Sikobele quitta son circuit de l'Église épiscopale Méthodiste et fonda sa propre église. En 1918, Sikobele écrit une lettre au Secrétaire du Conseil, Frank North, à New York pour déposer une plainte contre les missionnaires. T. A. Beethem résume :

Il avait « démissionné de son travail avec les missionnaires Terril et Keys ». Il essaya aussi d'expliquer pourquoi il avait dû prendre cette décision. Il accusait Terril et Keys de ne pas laisser les Africains travailler librement. «... Ils n’ont aucune fraternité avec les autochtones... Lorsque l'évêque vient, ils ne nous laissent pas la liberté d'être avec lui ni de lui parler... ».192

Considérant son plan d'action au Mozambique, Sikobele comprit qu'il n'y avait aucune fraternité entre les missionnaires blancs et les prédicateurs africains. Il comprenait parfaitement ce qui se passait. Lorsque l'évêque des missionnaires blancs rendait visite à leur conférence, les partenaires africains ne pouvaient ni voir l'évêque ni lui parler. De plus, voici un chef africain qui a le courage d'écrire à New York, au Secrétaire de la Société missionnaire, et de lui dire ouvertement et honnêtement la raison pour laquelle il a quitté l'Église épiscopale méthodiste pour créer sa propre église. Il s’agit d'un dirigeant africain de l'église en 1918. Dire qu'un Africain pense comme un enfant pourrait être une indication que les missionnaires, eux aussi, avaient du mal à comprendre les Africains.

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Les missionnaires percevaient également les peuples africains comme des païens ayant grand besoin de conversion et comme des barbares ayant grand besoin de civilisation occidentale. Les premiers prédicateurs, évangélistes ou catéchistes africains furent donc considérés comme des assistants. Un examen plus soutenu de l'origine historique d'un grand nombre des églises locales dans les zones rurales montre que les pasteurs africains prêchaient et implantaient ces églises. S’il est vrai que ces pionniers africains de la propagation de l'évangile se rendaient dans les villages et dans les villes d'Afrique pour prêcher l'évangile et implanter des églises parmi leur propre peuple, ce sont eux qui avaient besoin des missionnaires comme assistants et pas le contraire. On a le sens que missionnaires et colons collaboraient sur certaines questions concernant les peuples africains. Par exemple, les missionnaires et les colons partageaient un intérêt commun : l'éradication de tout ce qui était considéré comme africain, que ce soit en perception ou en pratique. Les coutumes et les traditions africaines étaient considérées barbares et maléfiques. De telles pratiques devaient être annihilées, supplantées par des coutumes occidentales ou des coutumes chrétiennes « civilisées ». En majeure partie, alors que les colons parlaient de civiliser des barbares, les missionnaires parlaient de convertir les païens qui ne connaissaient pas le Dieu vrai et vivant. Les colons comme les missionnaires se refusaient à croire que les peuples africains de l'Afrique sub-saharienne avaient un passé ou leur propre manière de penser. Harvey Sindima cite Tom Colvin, un missionnaire écossais, qui écrit :

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Trop souvent, c'était l'Église qui annihilait l'ancienne société croyant faussement qu'une forme complètement nouvelle de société devait être construite pour pouvoir être chrétienne.193

Évangéliser les Africains devait donc commencer par rendre les nouveaux convertis étrangers à leur propre pays -- forçant les chrétiens africains à renier leur passé, leur culture, et leur manière de penser. Ils devaient également admettre qu'ils ne connaissaient pas Dieu. Ce genre de pensée est parfois reflété dans le genre d'hymnes qui sont toujours chantés dans nos églises le dimanche. Quoi qu'il en soit, en tant qu'église africaine moderne, il nous appartient de considérer certains de ces points qui se sont produits comme des accidents de l'histoire. Il y a toujours le présent, qui nous permet de nous élever et d'aller de l'avant, et nous pouvons le faire en apprenant au contact de Paul qui parla de la « liberté que nous avons en Jésus Christ » (Gal. 2:4) ou de « la vérité de l'Évangile » (Gal. 2:14), ce qui signifie que les Gentils n'avaient pas besoin de devenir Juifs pour être chrétiens. Nous savons maintenant que nous n'avons pas besoin de suivre le culte ou de chanter comme les Américains, les Britanniques, les Belges, les Français, les Allemands ou les Portugais pour prouver que nous sommes chrétiens. Le temps est venu de promouvoir une musique accompagnée de tambours, et d'autres instruments musicaux sur lesquels les chrétiens africains peuvent poser les mains.

Diverses confessions évangélisent le Continent

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Examinons certains des points positifs du processus d'évangélisation et de transformation de l'Afrique. En dépit de tous les points négatifs que nous pouvons souligner sur les missionnaires, la chose la plus importante est que l'Afrique reçut Jésus Christ que le continent ne connaissait pas. Et jusqu'à aujourd’hui, le christianisme continue de s'épanouir par la prédication de celui qui a été crucifié et est ressuscité d'entre les morts. Le Christ est devenu le symbole de l'espoir et de la victoire dans la vie des peuples africains. Comment a-t-il été communiqué au peuple africain ? Tout d'abord, l'évangélisme devint un point central au cœur de l'église africaine. Les diverses églises des nations étrangères vinrent en Afrique pour proclamer Jésus Christ, baptiser les convertis et implanter des églises locales. Pour autant que le peuple africain revendique une certaine connaissance de Dieu, en particulier en tant que Créateur, il n'avait aucune connaissance de son fils, Jésus Christ. La direction du message chrétien était donc de connaître Dieu dans le Christ par la puissance de l'Esprit-Saint. Pendant longtemps, ce message évangélique de la connaissance de Dieu occupa une place centrale dans la proclamation évangélique de l'Église. Encore aujourd'hui, s'il existe une thématique pouvant rassembler un grand nombre d'églises en Afrique, c'est le ministère de l'évangélisation. L'évangile de Jésus Christ devait être partagé ou communiqué par tous les moyens ou méthodes pertinents à la situation. On fit des disciples, et on en fait encore aujourd'hui, par le biais du baptême et de l'enseignement ou de l'encouragement des convertis. Les efforts d'évangélisation de l'Afrique se sont servis de plusieurs méthodes. L'une des méthodes adoptée le plus souvent a été l'évangélisation de masse. Elle revêt différentes formes suivant la tradition et l'historique théologique d'une confession. C'est

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ce qui incita les églises à appeler l'évangélisation de masse par des noms différents, tels que réunion évangélique de masse, mission évangélique de masse, mission de prédication, campagne de croisade, évangélisation-marathon et réunion de réveil. Cette démarche d'évangélisation a été utilisée par presque toutes les confessions en Afrique, chacune à leur manière. Deuxièmement, pour évangéliser l'Afrique, les églises principales réalisèrent l'importance de l'éducation. L'accent mis sur l'éducation est apparent par le nombre d'établissements d'enseignement que chaque confession créa en Afrique. Le Professeur T. O. Ranger nous rappelle le slogan des catholiques romains « Qui possède les écoles possèdera l'Afrique » ; avec les protestants, c'était « Utiliser l'école pour construire l'église. » 194 De ce fait, depuis une centaine d'années, un grand nombre de grands dirigeants nationaux, au gouvernement comme dans la société civile, sont passés entre les mains de l'église. Il est maintenant bien connu que les Églises Initiées Africaines (African Initiated Churches ou AIC) décidèrent d'abord de former des dirigeants africains au niveau universitaire. C'est ce qu'elles firent en se joignant aux Africains de la Diaspora, en particulier les églises afro-américaines. Ce sont les institutions afro-américaines les premières qui fournirent le soutien financier permettant aux Africains de recevoir une éducation dans les collèges et universités afro-américains au vingtième siècle. Selon Harvey Sindima, les exemples de tels bénéficiaires sont nombreux et importants. James Emman Kwegyir Aggrey du Ghana, que la population connaît bien sous le surnom « Aggrey d'Afrique » a suivi des études au Livingstone College en Caroline du Nord, aux États-Unis, grâce à l'évêque de l'église Épiscopale Méthodiste Africaine de Zion en 1902.

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Nmamdi Azikiwe, le premier président du Nigeria indépendant étudia à Tuskegee Institute en Alabama, aux États-Unis. Le premier président du Ghana, Kwame Nkrumah, qui mena son pays à l'indépendance en 1957, et qui en fit le premier pays à émerger du régime colonial britannique, étudia à Lincoln University, en Pennsylvanie, aux ÉtatsUnis. Avant lui, A. B. Xuma et J. R. Rathebe d'Afrique du Sud, ainsi que John Chilembwe et Daniel Malebu du Malawi, tous faisant des carrières politiques, bénéficièrent de bourses arrangées par le biais des églises afro-américaines. Ce fut également le cas de Hastings Banda, qui, au début des années 60 devint le premier Premier Ministre et président du Malawi.195 Au Zimbabwe, Obadiah Manjengwa reçoit une bourse pour étudier au Livingstone College à la fin des années 1940. À l'issue de ses études et d'un retour sans cérémonie dans son pays, il s'inscrit au Collège théologique Hartzell, et rencontre une résistance. C'est seulement après un délai d'un à deux ans qu'il est admis à être membre de la conférence. La difficulté de former des dirigeants religieux au niveau universitaire créa une nouvelle réalité pour l'Église Méthodiste en Afrique dans les années 50. La Conférence du Liberia possédait les contacts lui permettant d'envoyer ses dirigeants poursuivre des études supérieures en Amérique. Mais dans la Conférence centrale africaine (y compris l'Angola, le Congo, l'Afrique de l’Est lusophone et la Rhodésie du Sud), Peter Shaumba fut le premier membre du clergé africain à recevoir un diplôme universitaire, à Pain College aux États-Unis. Onema Fama, le premier ressortissant congolais à servir en qualité d'évêque au Congo, reçut son diplôme de Morningside College. Mathew Wakatama fut le premier ressortissant zimbabwéen à recevoir un Mastère -- de l'Université de Londres. De même, Elish Mutasa, un médecin du Zimbabwe, reçut son

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diplôme de l'Université d'Édimbourg ; Amon et Susana Dangarembwa reçurent leurs diplômes de Mastère de l'Université de Londres, tout comme Davidson Sadza, un médecin. Abel Tendekai Muzorewa, premier pasteur zimbabwéen à recevoir un diplôme universitaire et un Mastère de Scarritt College, fut le premier citoyen à servir en tant qu'évêque au Zimbabwe. Emilio de Carvalho qui étudia au Brésil puis reçut des mastères aux États-Unis de l'Université de Northwestern et du séminaire théologique de Garrett, devint le premier ressortissant angolais à servir en qualité d'évêque en Angola. Tous ces dirigeants, et bien d'autres encore qui les suivirent, reçurent une formation en GrandeBretagne, en Amérique, et au Brésil, dans les années 50 et 60. Diverses confessions en Afrique offraient et offrent toujours à l’heure actuelle de telles opportunités à de jeunes dirigeants africains. Troisièmement, l'évangélisation s'opéra par le biais des soins médicaux. Comme pour l'éducation, les soins médicaux, y compris la guérison des maladies et le soulagement de la douleur est la volonté de Dieu pour chaque personne. Dans certains postes de mission, de nombreuses confessions créèrent des hôpitaux qui, pour certains, devinrent des centres médicaux réputés grâce aux services qu'ils offraient aux communautés environnantes. Le service de certains des médecins missionnaires dans les hôpitaux de mission fit que leurs noms devinrent très familiers dans les foyers. Il est possible que certains chrétiens aient la vision erronée que la création de cliniques et d’hôpitaux d'église est simplement un moyen d'entrer en contact avec la population et de l'évangéliser, mais une lecture plus correcte de cette situation nous force à voir que les soins médicaux ne sont pas seulement un moyen d'amener les gens au Christ mais aussi de prendre soin de tout le peuple de Dieu, comme le fit le Christ ; c'est un moyen de

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prendre soin de toute la personne et de soulager la souffrance causée par la maladie. Que les soins médicaux soient bien ou mal interprétés, de manière inhérente, ils furent un moyen d'évangéliser certaines personnes. À ce jour, certains des hôpitaux les plus importants et les plus performants dans les pays africains restent les hôpitaux d'église établis par les premiers missionnaires. Quatrièmement, beaucoup ont entendu l'évangile grâce à la montée des Églises d'Initiative Africaine. A l'origine, appelées Églises indépendantes africaines, les Églises d'Initiative Africaine sont créées vers les années 1920. Leur montée commença à poser des problèmes pour les soi-disant églises traditionnelles. Bien que certaines de ces AIC aient été créées et menées par certains individus ayant fait l'objet de mesures disciplinaires des églises traditionnelles ou par des individus frustrés d'une manière quelconque, en général, ces personnes étaient motivées par le fait que les grandes églises traditionnelles avaient éradiqué la culture africaine -- que ces églises avaient rendu les chrétiens africains étrangers à leur propre culture et à leur propre peuple. Malheureusement, durant cette époque, nombreux sont les missionnaires qui ne voient pas cet aspect et qui interprètent plutôt la situation comme influencée par l'Éthiopianisme, comme nous en avons discuté plus haut. Ces églises qui se sont séparées, principalement des églises missionnaires, sont dispersées dans toute l'Afrique -- en Afrique de l’Ouest, en Afrique de l’Est, centrale et australe. Cinquièmement, l'évangélisation s'effectua par le biais du ministère urbain. Dans les années 60 et au début des années 70, les églises africaines prirent conscience de la croissance rapide des villes africaines. Cette croissance phénoménale était principalement le résultat de l'indépendance politique à laquelle étaient parvenus un grand nombre de

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pays. Les villes attiraient les populations des régions rurales car elles étaient devenues des phares d'espoir pour l'emploi, l'éducation des enfants et pour une meilleure qualité de vie en général. Les églises promouvaient des programmes œcuméniques et confessionnels connus sous le nom de mission industrielle de l'église (et autres noms semblables) - pour permettre aux églises des villes de pouvoir gérer les nouvelles difficultés urbaines. La réponse vis-à-vis de ce nouveau ministère fut énorme au vu de la croissance des communautés chrétiennes dans les villes africaines. Tout à coup, les meilleurs pasteurs qui, d'habitude, étaient nommés à des postes de mission, étaient maintenant nommés dans les grandes églises urbaines. Beaucoup reçurent une formation par le biais d'ateliers sur les ministères urbains organisés par les efforts confessionnels et interconfessionnels. Les pouvoirs ecclésiaux passèrent rapidement des centres de mission aux églises urbaines. Sixièmement, l'évangile a été communiqué par la montée des églises pentecôtistes et des églises « rattachées aux missions » en Afrique. Paul Gifford rapporte une enquête nationale de la Commission sur l'évangélisme du Ghana en 1986-87 et refaite en 1993. Une comparaison des deux enquêtes est très révélatrice :

Les AIC [Églises Indépendantes Africaines] sont en grande difficulté [en d'autres termes sur le déclin] ; les grandes églises traditionnelles sont statiques si elles ne sont pas en diminution [en d'autres termes, un bon nombre étaient sur le déclin, juste quelques unes augmentaient] ; et il existe une croissance importante au sein des nouvelles églises

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pentecôtistes et « rattachées aux missions » [en d'autres termes, un pourcentage massif de croissance des chrétiens se trouve là].196

Voici certaines des raisons pour une telle croissance des chrétiens au sein des églises pentecôtistes : (a) Ils prennent le ministère de l'évangélisme au sérieux. (b) Dans leur culte, ils allient des éléments du culte chrétien et du culte contemporain. (c) Ils mettent l'accent sur la dîme. (d) Ils mettent l'accent sur le ministère de la délivrance. (e) Ils mettent l'accent sur le message de succès et de prospérité.197 Un bon exemple d'une église rattachée à une mission est la Nouvelle église apostolique de Zambie. Selon Gifford, « Le 1er janvier 1982, elle comportait 194 195 membres ; au 30 juin 1994, 704 838 ; et en juin 1996, 793 934, une augmentation de 409% en quatorze ans. »198 Le contexte historique de l'église est qu'elle fut créée en Grande Bretagne au XIXème siècle avec une structure de douze apôtres. Elle pénètre en Rhodésie du Nord en 1928 puis elle s'étend progressivement jusqu'aux années 1980, époque à laquelle elle « augmenta énormément ».199 Il existe plusieurs raisons à sa croissance rapide. La première, selon Gifford, « c'est le professionnalisme. Les bâtiments, les meubles, les véhicules, et le matériel témoignent tous de cela. Son siège est bien plus impressionnant que les bureaux du Conseil chrétien ou du Secrétariat catholique... au milieu des années 90 tous les dossiers étaient saisis sur ordinateur... les sermons faits pour le soir et le matin... La littérature est préparée dans cinq langues différentes de la Zambie... Un magazine en couleur, Our Family (Notre famille), est produit en Afrique du Sud et amené par camion pour une large distribution en Zambie. C'est une opération impressionnante d'efficacité. »200 Le

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professionnalisme est aussi exprimé par la musique, et la « musique est liée à l'évangélisation qui est poursuivie de manière imaginative ». 201 Entre autres raisons, on peut citer le fait que les fonds proviennent de l'étranger. L'église organise des séminaires et des ateliers fréquents pour sa population, elle a un budget de secours pour ses propres membres202, ainsi que des secours alimentaires et de vêtements. Il n'existe pas d'enseignement théologique officiel pour leurs pasteurs mais, en revanche, il existe un énorme potentiel pour obtenir des fonctions officielles, et une belle hiérarchie le long de laquelle les aspirants peuvent progresser. »203 L'église a des liens avec les congrégations à l'étranger où elles envoient leurs apôtres pour avoir une formation plus approfondie. Il existe plusieurs de ces églises ou congrégations dans les grandes villes d'Afrique, et elles ont eu un impact dans la communauté et dans les communautés limitrophes du lieu où elles sont situées. C'est ainsi que des chrétiens sont ajoutés au corps du Christ dans bon nombre de ces églises rattachées aux missions.

Synthèse Tout d'abord, même si les colons et les premiers missionnaires présumèrent qu'il n'existait aucun type de civilisation en Afrique et que les peuples africains n'avaient aucune connaissance de Dieu, il appartient à l'église d'Afrique actuelle de montrer que les Africains ont toujours eu des notions de Dieu, et qu'ils Le connaissent maintenant plus clairement grâce à Jésus Christ. Il lui appartient aussi de montrer que les peuples africains avaient leur propre type de civilisation, en partie caractérisée par les anciens « états soudaniques » de l'histoire africaine.

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Deuxièmement, les églises d’Afrique ont conservé les méthodes fondamentales d'évangélisation de l'Afrique -- évangélisation, éducation, et soins médicaux entre autres façons de faire. Henry Venn, secrétaire de CMS de 1841 jusqu'à sa mort en janvier 1873, exprima sa vision missionnaire avec une métaphore d'échafaudage et de bâtiment. Il doit y avoir une grande différence, dit-il, entre le rôle de la mission et celui de l'église qui a émergé. Il considère que le rôle de la mission est un rôle de construction et d'échafaudage dans un bâtiment. L'échafaudage est utilisé pour permettre la construction puis les constructeurs l'enlèvent et s'en vont. Le missionnaire n'est pas un pasteur résident mais un évangéliste. Comme un échafaudage, il/elle construit puis part. L'église donc est le bâtiment qui reste et qui grandit et prospère en fonction de ses propres dons. Il croyait que l'église en Afrique devait être une « église africaine », non pas une copie de l'Église anglicane sur le sol africain. Il était convaincu que les caractéristiques spéciales des Africains feraient de leur église une église africaine. Il pensait aussi que le but de l'église, ce même but vers lequel il avait aspiré en tant que missionnaire, était une église africaine qui s'auto-propagerait, s'autogouvernerait et s'autofinancerait. C’est un objectif qui doit toujours être réalisé et qui est réalisé par certaines églises en Afrique. Troisièmement, la croissance des chrétiens dans les églises pentecôtistes a beaucoup à nous apprendre. Alors que les grandes églises traditionnelles ont tendance à critiquer ce qui se passe dans les églises pentecôtistes, un grand nombre de nos églises pratiquent les mêmes méthodes. Il est donc important de pouvoir discerner les caractéristiques que nous adoptons dans notre démarche à l'évangélisation. (a) Être né de nouveau. Les églises pentecôtistes prennent l'évangélisme au sérieux, mais elles mettent souvent l'accent sur les expériences d'être né de nouveau et de

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parler dans d'autres langues, preuves de l'Esprit-Saint dans la vie d'un chrétien. L'évangélisme de l'Église Méthodiste Unie souligne aussi que l'appel à être né de nouveau est une naissance spirituelle divine. Toutefois, comme la plupart des groupes traditionnels, nous appelons à une renaissance spirituelle qui n'est pas simplement un événement ponctuel mais fait partie d’un processus de transformation en un disciple chrétien et de cheminement vers une maturité chrétienne, processus de toute une vie. (b) Le professionnalisme. Le ministère mené avec professionnalisme et excellence est important ; il sert à glorifier Dieu. Mais l'évangélisme n'est ni une performance ni un ministère professionnalisé ; il n'est pas non plus limité à certains bureaux de l'église. Au contraire, l'évangélisme appartient à tout le peuple de Dieu qui connaît et aime le Christ. (c) Culte plein de dynamisme. Là où les églises pentecôtistes allient des éléments du culte chrétien traditionnel et du culte contemporain, les grandes églises traditionnelles en Afrique ont beaucoup à apprendre au profit de leurs congrégations. Il n'y a aucune raison pour que les églises traditionnelles en Afrique prient et chantent comme si elles étaient des églises d’Europe, de Grande-Bretagne, ou d’Amérique du Nord. (d) La discipline de la dîme. Les églises pentecôtistes insistent énormément sur la pratique du don par la dîme. Lorsque je servais de secrétaire au Parlement du Zimbabwe dans les années 80, un pasteur pentecôtiste vint me voir dans mon bureau. La dîme étant la pratique pentecôtiste, il exigeait de connaître le salaire des employés du Parlement qui étaient membres de son église. Naturellement, je l'informai que les salaires étaient une question confidentielle entre l'employé et l'employeur et que je ne répondrais pas à sa demande. Une reprise de la pratique de la dîme s’est cependant opérée dans certaines des églises traditionnelles en Afrique. Certaines églises déclarent même que les membres de

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l'église qui ne donnent pas la dîme ne seront pas nommés à des positions de direction dans l'église. La pratique de la dîme doit être ravivée, mais lorsqu’elle devient un mandat légal ou lorsqu'elle est le seul point de référence qui permet d'évaluer la valeur chrétienne des membres, alors quelque chose va très mal. Nous devons nous souvenir que la leçon que Paul tira sur l'esprit du don dont il fut témoin dans les églises macédoniennes ne relevait pas de la légalité mais de la gratitude : « ... Ils ont, je l'atteste, donné volontairement selon leurs moyens, et même au-delà de leurs moyens, » (2 Cor. 8:3). (e) Délivrance. Les églises pentecôtistes offrent un ministère de la délivrance du mal, un ministère où toute l'église de Jésus Christ accepte Jésus Christ et offre. Jésus a délivré l'humanité du péché, de la mort et du mal, et il a envoyé ses disciples pour faire la même chose (Marc 3:15). En outre, Jésus enseigna à ses disciples de prier « délivre-nous du mal » (Mat. 6:13, LS). Nos églises ont besoin d'une théologie et d'un ministère de la délivrance des puissances qui détruisent leur vie : les démons, les troubles et les difficultés, l'alcool, la maladie, la peur et les innombrables dangers. (f) Réussite et prospérité. L'évangile de la réussite et de la prospérité est attirant pour beaucoup en Afrique aujourd'hui pour des raisons évidentes. La pauvreté continue de régner et de menacer les gens innocents en dépit du fait que les pays africains ont obtenu une indépendance politique à partir des années 60. Les églises africaines ne peuvent cependant pas se permettre de perdre de vue l’essentiel du message de Jésus : le royaume de Dieu. C'est le message de Jésus à propos du royaume de Dieu (Jean 3:3) qui inspira le renouveau spirituel de ses disciples et leur engagement à aimer Dieu totalement et à servir l'humanité (Marc 12:29 - 31). Ce message contenait également la promesse,

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pas nécessairement de réussite et de prospérité, mais d'une vie abondante ou d'une vie vécue pleinement (Jean 10:10). L'évangélisme dans son aspect le plus positif cherche donc à familiariser les gens à l'évangile de Jésus Christ « pour les mener à l'accepter, et les guider dans leur croissance vers la plénitude de leur vie. »204 En fin de compte, la difficulté pour les grandes églises traditionnelles, les églises initiées africaines, et les églises pentecôtistes et rattachées aux missions en Afrique n'est pas tant le nombre de leurs adhérents aujourd'hui, mais de savoir ce qu'il reste de leur « échafaudage » missionnaire, ou en d’autres termes, à quel point l'église qui reste debout, et qui prospère sur le sol africain ressemble à l'image de l'Afrique. Cette époque de l'Afrique ressemble à la vision partagée par Jean sur l'île de Patmos, quand il parla de la ville céleste qui n'avait plus de temple car le Dieu Tout-Puissant et l'agneau étaient devenus son temple. Jean poursuit :

« La ville n'a besoin ni du soleil ni de la lune pour l'éclairer ; car la gloire de Dieu l'éclaire, et l'agneau est son flambeau. Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre y apporteront leur gloire. » (Apo. 21:22– 24)

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Chapitre 7 L’évangélisation à la manière de l'Église Méthodiste Unie Après notre revue générale des diverses approches d'évangélisation de l'Église Africaine, en commençant par les communautés chrétiennes d’Égypte, de Libye, d’Afrique du Nord, d’Éthiopie, du Royaume du Kongo, et le reste des confessions sub-sahariennes de l'Église Africaine, nous posons la question suivante : Quel fut le rôle de l'Église Méthodiste Unie (EMU) dans toute cette histoire d'évangélisation de l'Afrique ? Plus particulièrement, quelle est l'approche de l'EMU en matière d'évangélisme sur le continent africain et comment l'EMU a-t-elle participé à l'évangélisation de l'Afrique ? L'EMU en Afrique a vingt-et-une conférences annuelles, quatre conférences provisionnelles, et une conférence missionnaire. Ces conférences sont situées en Afrique de l’Ouest, en Afrique centre-ouest, en Afrique australe, et en Afrique de l’Est — organisées sous trois conférences centrales de l'EMU, c'est-à-dire, la Conférence Centrale d'Afrique (1920), la Conférence Centrale de l'Afrique de l’Ouest (1980), et la Conférence Centrale du Congo (1988). Ce développement reflète une expansion phénoménale du Méthodisme Uni en Afrique avec une histoire de 188 ans au Liberia et un peu moins de 136 ans dans le reste de l'Afrique. Au vu de l'immensité du continent, les conférences annuelles ont été établies dans des circonstances sociopolitiques et culturelles variées. Toutefois, en dépit de ces différences contextuelles, la manière dont

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de l’EMU a mené l’évangélisation en Afrique reste la même, une manière qui trouve son origine dans une rationnelle et un pragmatisme théologiques que nous avons en commun. Quels sont cette raison théologique et ce pragmatisme sous-jacents que nous partageons, qui motivent et guident la méthode d'évangélisation de l'EMU? Pour les découvrir, nous devons retracer l'histoire du mouvement de Réveil méthodiste en Amérique, et en Grande Bretagne et remonter jusqu'au fondateur du mouvement méthodiste, John Wesley lui-même. Nous le faisons non pas parce que nous voulons créer des copies du méthodisme américain ou du méthodisme britannique, mais parce que c'est son patrimoine historique et théologique qui nous a influencés en tant que Méthodistes Unis en Afrique. En explorant la genèse et l'évolution des méthodes d'évangélisation de l'Église Méthodiste Unie qui ont été pratiquées en Afrique, nous sommes plus aptes à identifier et à comprendre la manière africaine distincte dont s'est servie l'EMU pour évangéliser l'Afrique.

Le mouvement de réveil méthodiste en Grande Bretagne C'est George Whitefield (1714- 1770), un pasteur de l'Église d'Angleterre qui lança le Réveil méthodiste. Juste avant Pâques 1735, George Whitefield vit une expérience évangélique qu'il décrira plus tard comme une nouvelle naissance.205 Après avoir entendu que Wesley avait trouvé la paix de l'esprit le 24 mai 1738, Whitefield lui écrit pour lui demander de venir l'aider dans son travail à Bristol où il avait déjà prêché à de grandes foules. Wesley n'accepte pas immédiatement l'invitation de Whitefield. Il se rend plutôt dans la colonie moravienne de Zinzendorf à Herrnhut en Allemagne. De retour en Angleterre, Wesley passe du temps avec une société religieuse de membres de

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l'église d'Angleterre à Fetter Lane à Londres -- une société religieuse qui était déjà familiarisée avec les idées de Wesley, en particulier ses nouvelles idées sur la puissance de la foi salvatrice en tant que portail à la sainteté. En fait, cette société « marqua une transition entre la société religieuse établie de l'époque et le nouveau type de société qui naquit de la propre expérience de Wesley et de sa prédication. » 206 De nouveau, Whitefield invite encore instamment John Wesley à venir à Bristol. Wesley émet des doutes sur toute l'affaire, en particulier s’agissant de participer à ce qu'il considère comme une démarche non traditionnelle de l'évangélisme qui inclut « la prédication sur le terrain ». Wesley accepte cependant l'invitation. Au cours de leur prédication, Whitefield et Wesley sont surpris de découvrir qu'autant de gens sont venus entendre Wesley que Whitefield. Rupert Davies rapporte que « la prédication [de Wesley] était plus percutante »,207 des gens pleurent tout haut, clament et tremblent violemment de tout leur corps.208 Les convertis de Wesley n'avaient jamais vécu une telle expérience, y compris à Bristol. Pour autant que Wesley avait tout d’abord pensé que sauver des âmes en dehors de bâtiments religieux était presque un pêché, lui et ses prédicateurs reprendront la méthode de prédication sur le terrain qu'il apprend auprès de Whitefield pour proclamer l'évangile dans toute l'Angleterre.209 Le message de Wesley pour le mouvement de réveil est différent. Whitefield prêchait la prédestination, c’est-à-dire que Dieu avait sauvé peu de gens, appelés les élus, au salut par Jésus Christ, et qu'il prédestinait la majorité de l'humanité à la damnation. Le but de cette évangélisation est donc de rassembler en le Christ les élus prédestinés au salut.210 À l’inverse, le message de John Wesley est que la volonté de Dieu est que tous les peuples soient sauvés et que Jésus Christ est mort pour le salut de tous.211 En d'autres

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termes, Whitefield soulignait la prédestination, et la grâce pour les élus alors que Wesley soulignait « la grâce de Dieu pour tous » trouvée dans le fils de Dieu, Jésus Christ. Philip Watson, un théologien méthodiste britannique, résume le message wesleyen de la grâce divine comme suit :

(a) Tous les hommes doivent être sauvés. Pourquoi ? Parce que tous les hommes sont pécheurs. Tous les hommes sont ou des pécheurs complaisants, comme le fils prodigue ou des pécheurs arrogants comme son frère aîné ou bien, comme la plupart d'entre nous, ils sont un peu des deux. Ou, comme le dit Paul, « Il n'y a point de distinction. Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu...» (Rom. 3:22–23).212

(b) « Tous les hommes peuvent être sauvés. Comment peuvent-ils l'être ? Une seule réponse est possible : par Jésus Christ. »213 Il en est ainsi parce que le Christ est mort pour nous tous. Savoir que le Christ était mort, non seulement pour les élus mais pour tous, est un message qui interpela beaucoup de gens. « Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle » (Jean 3:16).

(c) Tous les hommes peuvent savoir qu'ils sont sauvés. Remarquez ici que Wesley dit « peuvent » savoir, non pas qu'ils « doivent » savoir. Il ne soutient pas qu'un homme peut être sauvé seulement s’il sait, comme si savoir et être certain étaient une condition du salut. Ce qu'il soutient, c'est

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que chaque personne sauvée peut avoir connaissance de son salut et il est souhaitable qu'elle le sache. Nous n'avons pas le droit de dire qu'une personne qui n'est pas sure n'est donc pas sauvée, mais nous avons le droit de lui dire qu'elle peut être sure et de lui recommander et de l'aider à trouver cette certitude.214 (d) Tous les hommes peuvent être sauvés parfaitement. Le travail de salut ne s’achève pas à la conversion, c'est-à-dire avec la justification, l'adoption, la nouvelle naissance ou même avec la certitude. Celles-ci ne sont que le point de départ, insiste Wesley, pour une « entière sanctification » ou une « perfection chrétienne ». La sanctification signifie rendre saint, et, du point de vue de Wesley, comme nous l'avons vu, la sainteté n'est rien d'autre que l'amour, l'amour de Dieu, de tout notre cœur et de toute notre âme et de tout notre esprit et de toute notre force, pour répondre à l'amour qu'il nous a montré en le Christ ; et c'est l'amour envers autrui « comme envers nous-mêmes », qui nous fait traiter notre voisin de la manière dont Dieu en Jésus Christ nous a traités, lui montrant le même esprit d'amour.215

Quelle était la structure de l'organisation du mouvement de réveil méthodiste ? John Wesley adopte une structure pragmatique qui soutient l’objectif du mouvement. S'il eu jamais une déclaration de mission du mouvement de réveil méthodiste, ce peut être la réponse de Wesley à la question soulevée par huit dirigeants méthodistes qui le rencontrèrent à Londres en juin 1744 :

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Que pouvons-nous raisonnablement croire être le dessein de Dieu pour qu'il lève des Prédicateurs appelés Méthodistes ? Non pas pour former une nouvelle secte, mais pour réformer la nation, particulièrement l'Église, et pour diffuser la sainteté des écritures sur le pays.216

Progressivement, le Réveil méthodiste commença tout d’abord à prendre racine à Bristol où John Wesley avait été invité par Whitefield, puis à Londres, Newcastle, et dans le reste de l'Angleterre, du Pays de Galle, de l'Écosse et de l'Irlande. L'Évêque Kenneth Carder écrit que Wesley considérait sa prédication évangélique comme « le moyen principal par lequel les convertis sont réunis dans un culte chrétien et encouragés dans la foi et la vie sainte. »217 Wesley adopte donc une structure d'organisation pragmatique comportant les caractéristiques suivantes et visant à encourager : (a) Les sociétés méthodistes, les membres de ces sociétés étaient tout simplement ceux qui « avaient le désir de fuir la colère à venir » (Mat. 3:8; Luc 3:7). Les sociétés méthodistes servaient de forum pour proclamer l'évangile et pour encourager l’engagement des gens à suivre le Christ. (b) Les réunions de classe qui, au départ, sont un moyen de rassembler des gens et de lever des fonds pour reconstruire une Nouvelle Salle pour la Société à Bristol, se transforment en une unité des adhérents de la Société (12 membres). Les classes deviennent la base de petits groupes d'encouragement chrétien pour une nouvelle naissance et une foi salvatrice, « les sites de formation des dirigeants laïcs, un instrument puissant de l'évangélisme. »218 La formation des laïcs pour qu'ils prêchent, enseignent et

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dirigent la diffusion de l'évangile était le génie du Réveil méthodiste du dix-huitième siècle. (c) Les Bandes représentaient des groupes plus petits (de 3 à 5 membres) « dans lesquelles les sphères plus hautes de la vie chrétienne pouvaient être explorées »219 pour « ceux qui avaient fait l'expérience de la nouvelle naissance et qui avançaient vers la perfection chrétienne. »220 Lorsque Wesley est informé que certains méthodistes passent du temps à prier et à louer Dieu pendant les réunions du soir à Kingswood, il cherche un moyen de les guider à l’aide des bandes pour deux raisons. Il voulait les aider à grandir « dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur Jésus Christ »221 et il voulait aussi les empêcher de tomber dans « une étroitesse d'esprit, un zèle partisan, un sentiment d'être restreint dans nos propres entrailles ; cette misérable bigoterie qui rend tant de gens si peu prêts à croire que le travail de Dieu est parmi nous ».222 Il y avait donc des bandes d'hommes et des bandes de femmes, des bandes de gens mariés et des bandes de gens célibataires.223 Pour Wesley et les Gens qu'on appelle Méthodistes, l'évangélisme, c'était prêcher Jésus Christ au sein des sociétés méthodistes, enseigner et former des convertis par le biais de réunions de classe pour qu'ils puissent grandir dans la grâce et la connaissance de notre Seigneur Jésus Christ par la prière et l'étude de la Bible. C'était aussi intégrer dans des bandes ceux qui avaient eu l'expérience de la nouvelle naissance pour qu’ils s’apportent un soutien mutuel sur le cheminement de la perfection chrétienne. Quelles étaient les doctrines sous-tendant le mouvement de réveil des Gens qu'on appelle Méthodistes ? Alors que les doctrines classiques telles que la trinité, l'incarnation, le repentir et l'église étaient présupposées dans le travail et les écrits de John Wesley,224

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certaines doctrines étaient souvent considérées par Wesley comme les doctrines fondamentales des Gens qu'on appelle Méthodistes, c'est-à-dire « ceux qui adorent Dieu en esprit et en vérité ».225 John Wesley écrit : « Nos doctrines principales, qui englobent tout le reste sont au nombre de trois : ce sont celles du repentir, de la foi et de la sainteté. Nous considérons la première de celles-ci comme le perron de la religion ; la suivante, la porte et la troisième, la religion elle-même. »226 Wesley souligne les sous-chapitres suivants sous chacune de ces doctrines. Le repentir : L'image de Dieu en l'homme, la chute de l'homme, l'homme naturel, la grâce prévenante, qui provoque le repentir. La foi : la signification de la foi, la justification, la nouvelle naissance ou la naissance spirituelle et un sens de la certitude. La sainteté ou sanctification : la perfection dans l'amour de Dieu, pour Wesley, le but de celle-ci étant résumé dans le commandement de Jésus : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force. » (Marc 12:29-31) Wesley croyait qu'un tel amour menait à une sainteté personnelle et à une sainteté sociale par la pratique d'œuvres de piété et de miséricorde. Une telle sainteté étant un don de l'Esprit-Saint, et la sainteté ou sanctification étant la volonté de Dieu pour nous, John Wesley soutenait que la doctrine de la sainteté n'encourage pas nécessairement le danger « d'enthousiasme » ou de religion charismatique.

Le méthodisme en Amérique et l'évangélisme Le Méthodisme Uni Africain est l’enfant du Méthodisme Américain. La manière dont nous comprenons l'évangélisme a toujours été modelée par notre lien à l'Église

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Méthodiste Unie d'Amérique. En tant que tel, le Méthodisme Uni Africain doit comprendre les facteurs historiques qui ont influencé le Méthodisme Uni Américain. Outre ce que le Méthodisme américain a hérité de l'Angleterre, le Méthodisme américain comporte trois attributs typiques qui ont eu un impact sur l'évangélisme au sein du Méthodisme Uni Africain, plus particulièrement, l'évangélisation de la frontière de l’Ouest américain, les réunions de camp et le mouvement de sainteté. L'évangélisation de l'Ouest américain. Au début de l'histoire américaine, une « cabine » était une petite maison, construite simplement et grossièrement sur une propriété privée, où le propriétaire était éloigné des villes déjà établies et des villes en pleine expansion. Les cabines offraient également un abri aux voyageurs, en particulier ceux qui partaient s'installer vers l'Ouest. Entre 1810 et 1820, l'Amérique voit arriver des vagues de gens qui migrent vers l'ouest et qui cherchent souvent ces cabines pour se reposer ou simplement passer une nuit ou deux en toute sécurité, protégés contre tout danger d'attaque.227 Sur cette nouvelle frontière, les pasteurs presbytériens qui allaient dans les communautés frontalières étaient souvent engagés comme maîtres d'école grâce à leur éducation. La plupart des premiers prédicateurs baptistes étaient des agriculteurs qui avaient émigrés en Amérique. Les prédicateurs méthodistes qui étaient simplement envoyés à la frontière par les évêques n'avaient ni rattachés à une institution communautaire ni à une exploitation agricole. Ils étaient libres d'ouvrir de nouveaux territoires pour propager la nouvelle de l'Évangile.228 Murray Leiffer, ancien professeur de déontologie sociale et de sociologie au Séminaire théologique de Garrett, décrit le prédicateur méthodiste itinérant du début du XIXème siècle comme motivé par deux

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facteurs : « une vocation distincte et divine » et « un désir de mener les hommes à une expérience religieuse personnelle ».229 Mais, dit-il, par comparaison à leurs collègues plus anciens, les prédicateurs méthodistes plus jeunes accordaient une plus grande importance à des motivations telles qu'« une croyance que le christianisme offre la solution aux problèmes politiques et sociaux d'un monde désorganisé ».230 Ce sont donc ces prédicateurs itinérants qui adoptèrent les cabines frontalières comme stratégie de leur entreprise d'évangélisation et c'est ainsi qu'ils purent ouvrir de nouveaux territoires qui se transformèrent en des circuits méthodistes. Ces prédicateurs frontaliers itinérants qui étaient aussi connus sous le nom de pasteurs itinérants, jouissaient rarement du privilège des presbytères et il leur fallait des mois pour faire le tour de leur circuit. Ils participaient aussi très souvent aux réunions de camp quand ils allaient de place en place. Cela faisait partie de l'évangélisme des premières années du Méthodisme en Amérique. Réunions de camp. Lee et Sweet soulignent dès le départ que « la réunion de camp n'a jamais été une institution méthodiste autorisée ».

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Mais les Méthodistes en

Amérique participaient énormément à ces réunions. L'histoire du Méthodisme américain indique que la première réunion de camp en Amérique qui se déroula au Kentucky au début du XIXème siècle fut une réunion interconfessionnelle. Ces réunions de camp étaient associées à l'Église méthodiste parce qu'elles étaient très utilisées par les 232

méthodistes eux-mêmes.

Certains des dirigeants importants de l'église méthodiste

jouèrent un rôle prépondérant dans l'histoire et le développement de ces réunions en Amérique. Elles semblaient être une institution naturelle et caractéristique de la vie frontalière où les gens ressentaient le besoin de se rassembler au moins une fois par an. Puisque les méthodistes étaient une église importante à la frontière, les réunions de camp

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semblèrent faire partie de l'institution méthodiste. Elles créèrent un climat propice à l'évangélisation de par leur attrait social, en partie, et de par le besoin qu'avaient les gens de se réunir. De ce fait, les premiers missionnaires méthodistes venant des États-Unis témoignaient souvent dans les églises africaines qu'ils avaient rencontré le Christ à des réunions de camp au pays. Le mouvement de sainteté. John Wesley enseignait que les chrétiens devraient aimer Dieu parfaitement. De nouveau, Lee et Sweet déclarent : « les doctrines de sainteté et de perfectionnisme qui ont été soulignées dans les débuts du méthodisme ; elles furent de moins en moins soulignées dans l'Amérique prospère de l'après Guerre de Sécession [1865]. »233 Thomas Langford l'indique différemment mais sans être en désaccord.

Après l'époque de Wesley, la prédication méthodiste continua à mettre l'accent sur l'amour parfait pour Dieu comme expression culminante de la vie chrétienne. Mais on accordait au terme ‘perfection chrétienne’ une importance différente et des interprétations divergentes. Parfois, essayer de convertir avait tendance à éclipser l'enseignement de la pleine maturité chrétienne. L'interprétation théologique de la sanctification totale variait aussi.234

Langford poursuit en disant que dans les années 1830, certains membres de l'église menèrent une recherche intensifiée sur la sainteté personnelle, recherche qui cherchait ce que l'on appelait la « deuxième bénédiction ». Dès les années 1850, le clergé et les laïcs de nombreuses confessions sont tellement attirés par l'idée de sainteté qu'en

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1867, « l'Association nationale de réunions de camp pour la promotion de la sainteté est créée ».235 Pour autant que le mouvement de sainteté ait été interconfessionnel, « à sa création, il était essentiellement méthodiste et distinctement américain » (bien qu'il ait migré outre-Atlantique) ».236 Les chefs du mouvement continuèrent d'être méthodistes avec des personnalités aussi connues que John S. Inskip et Phoebe Palmer. Phoebe Palmer était la femme d'un médecin de New York qui devint un des chefs de file du mouvement.237 « Vers la fin du XIXème siècle, un groupe appelé les Come-outers commença à appeler à une scission des églises qui suivaient le concept de non-sainteté et dans les dernières décennies du XIXème siècle, un certain nombre de ces groupes créèrent une existence indépendante en tant que confessions. »238 Il existait des tensions au sein des églises, y compris des églises méthodistes, chaque groupe revendiquant qu'il suivait plus fidèlement la position théologique de John Wesley en matière de sanctification. La thématique essentielle de la controverse relevait des moyens et de l'expérience de la sanctification. Certains la considéraient comme une croissance chrétienne continue alors que d'autres la considéraient comme instantanée ou comme relevant de deux expériences distinctes : la conversion suivie dans le temps par le baptême de l'Esprit-Saint, signe de la sanctification complète.239 Bien que Wesley ait utilisé plusieurs termes pour décrire la nouvelle étape de la vie -- perfection, sainteté, sanctification complète, amour parfait, et salut total,240 il définit « la perfection chrétienne » comme aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toutes ses forces, et aimer son voisin comme soi-même (Marc 12:29-31). Pour répondre à la question de savoir qui est parfait, John Wesley

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souligne que c'était celui en qui est « l'esprit qui est dans Christ » et qui « marche comme marche Christ », un homme « qui a les mains propres et le cœur pur », ou qui est « lavé de toute la saleté de la chair et de l'esprit » ou en qui il n'existe « pas d'occasion de trébucher » et qui, de ce fait « ne commet aucun péché ».241 La théologie de John Wesley était christocentrique (axée sur le Christ). Il n'utilisait pas le langage pentecôtiste de la seconde bénédiction pour définir la perfection ou la sanctification chrétienne. L'une de ses citations préférées de Paul est : « Moi-même je regarde toutes choses comme une perte, à cause de l'excellence de la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur,...oubliant ce qui est en arrière et me portant vers ce qui est en avant, je cours vers le but, pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus Christ » (Phil. 3:8; 13-14). La perfection chrétienne pour John Wesley était de grandir dans la grâce en Jésus Christ par la puissance et le conseil de l'Esprit-Saint. Il est important de savoir que « l’ensemble des interprètes de l'Église épiscopale méthodiste insistait sur la croissance en la grâce et avait tendance à douter de la validité de deux événements distincts dans l'expérience chrétienne. »242 De ce fait, Langford écrit :

Une déclaration adoptée par la Conférence générale de l'Église épiscopale méthodiste, du sud, en 1894 affirme la doctrine de la sanctification mais déplore l'idée de deux événements distincts dans l'expérience du salut, la tendance à distinguer des classes de chrétiens et le séparatisme. En 1896, l'Église épiscopale méthodiste (du nord) exprime une position semblable.243

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Bien des chefs de file de la Sainteté pensèrent qu'ils ne pouvaient pas rester et ils se séparèrent donc des deux églises. 244 Langford poursuit en disant que la croissance du mouvement fut impressionnante et qu'elle s'est poursuivie dans la vie protestante, à tel point qu' « en 1971, plus de cent cinquante confessions de Sainteté et d'autres groupes étaient membres de l'Association de sainteté chrétienne, successeur de l'Association nationale des réunions de camp ». 245 Les plus importantes de ces églises aujourd'hui sont l'Armée du salut, l'Église du Nazaréen, l'Église wesleyenne et l'Église méthodiste libre. Parmi les personnalités qui jouèrent un rôle prépondérant dans le mouvement de la Sainteté au milieu du XIXème siècle, on peut citer Charles Finney, un évangéliste congrégationaliste américain, et William Arthur, un méthodiste britannique.246 Certains des groupes incluaient à l'époque les Assemblées de Dieu, les Églises de Dieu, et les églises pentecôtistes et de Sainteté, qui avaient le plus grand nombre de membres.247 Lorsque nous considérons la croissance si rapide du Pentecôtisme sur le continent africain, n'oublions jamais que la concentration théologique du Méthodisme est christocentrique (axée sur le Christ), alors que le Pentecôtisme est pneumatocentrique (axé sur l'Esprit-Saint). N'oublions pas également que John Wesley associe le baptême de l'Esprit-Saint à la conversion et pas à une deuxième bénédiction.

L'évangélisation de l'Afrique L'Église Méthodiste Unie arriva tout d'abord en Afrique par le Libéria, en tant qu'Église épiscopale méthodiste. D'anciens esclaves américains affranchis et revenus au Libéria en 1822 l'introduisirent. Parmi le premier groupe à arriver dans ce pays en 1822

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se trouvait Daniel Coker, un pasteur de l'Église épiscopale méthodiste africaine. Avant de revenir dans son pays natal africain, Daniel Coker organisa ceux qui étaient méthodistes en une Société. Leur arrivée sur le sol libérien marqua l'introduction du Méthodisme américain au Libéria et en Afrique. Daniel était le fils d'une mère blanche, Susan, et d'un père esclave dans le Maryland, les deux parents travaillant pour le même maître. Daniel absorba les rudiments d'une éducation puis « dans sa jeunesse, s'enfuit de chez son maître pour aller à New York. »248 C'est là qu'il devient Méthodiste et qu’il est ordonné diacre par Asbury, s'étant révélé un prédicateur puissant. En 1801, Daniel s'établit à Baltimore où Michael Coate, un ancien de l'Église épiscopale méthodiste l'aide à racheter sa liberté.249 Daniel ne travaille pas à plein temps comme prédicateur mais comme enseignant. C'est à Baltimore, alors qu'il est à l'église, qu'il ressent les affres de la ségrégation dans la vie de l'Église épiscopale méthodiste. Il travaille de concert avec Richard Allen (1760-1831), le chef du mouvement Noir à Philadelphie. Éventuellement, Daniel se sépare pour former l'Église épiscopale méthodiste africaine en 1816. L'ambition de Daniel Coker était de repartir en Afrique comme missionnaire, un rêve enfin réalisé quand il arrive au Libéria avec une Société épiscopalienne méthodiste organisée. Les Conférences centrales africaines reconnaissent et acceptent le rôle de meneur de Daniel Coker qui lança « l'un des mouvements spirituels les plus formidables sur le continent africain »250 et le considèrent comme le père du Méthodisme épiscopalien en Afrique.

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La propagation du Méthodisme épiscopalien de l'Amérique à l'Afrique, devenu l'Église Méthodiste Unie d'Afrique, prit tout d'abord racine dans trois zones : au Libéria, au Congo et au Zimbabwe. La Conférence annuelle libérienne. La première Église Méthodiste Unie (Église épiscopale méthodiste) missionnaire de l'Afrique arriva au Libéria en 1833.251 À la Conférence générale qui se déroula à Philadelphie en mai 1832, les Évêques McKendree, Hedding et Soule approuvèrent le premier méthodiste missionnaire en Afrique, Melville Cox.252 Cox n'était pas en bonne santé. Comprenant sa propre situation, Cox demanda à son ami à l'Université wesleyenne :

« Si je meurs en Afrique, tu dois venir et écrire mon épitaphe. - Je viendrai, répondit son ami, mais qu'écrirai-je ? - Écris, répondit-il, que mille tombent avant que d'abandonner l'Afrique.253

En février 1833, Cox arrive au Libéria. L'Afrique est donc le premier champ missionnaire pour l'Église Méthodiste Unie et Cox le premier missionnaire de la Société Méthodiste. Il investit toute son énergie à organiser l'Église épiscopale Méthodiste libérienne en menant un certain nombre de conférences qui adoptent les Articles de la Religion et les Règles générales, suivant « en général, la discipline morale de l'Église épiscopale méthodiste aux États-Unis d'Amérique. »254 Le 21 juillet 1833, six mois après son arrivée au Libéria, Melville Cox rend l'âme.

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Un missionnaire médecin, le Dr. Goshen, arrivé au Libéria en 1836, rendit un témoignage chrétien important par son service médical. En 1858, l'Évêque Francis Burns, un prédicateur afro-américain d'Amérique, devient le premier missionnaire évêque de l'Afrique jusqu'à sa mort en 1863.255 La Conférence de mission libérienne devient la Conférence annuelle libérienne en 1868.256 Elle était administrée de l'Amérique, car elle faisait partie du système de Conférence centrale Noire, un système divisé racialement aux États-Unis. L'Évêque John Roberts succède à Francis Burns (1866-75).257 Ni l'un ni l'autre ne résidait en Afrique. La Conférence de mission du Congo. William Taylor fut élu premier évêque missionnaire résident pour l'Afrique en 1884. Il fut alors chargé de la supervision de la Conférence de mission du Libéria ainsi que des œuvres méthodistes en dehors du pays. Le travail d'évangélisation et de mission de l'Église Méthodiste Unie en Afrique était connu sous le nom de Conférence de mission du Congo de l'Église épiscopale méthodiste et ce travail fut crédité à l'évêque Taylor. Avant son élection à l'épiscopat, Taylor avait déjà acquis une réputation mondiale d'évangéliste, il voyageait pour des campagnes de prédication et établissait des missions autonomes en Amérique du Sud, en Australie et en Inde. Il se rendait aussi à la Colonie du Cap et Natal,258 en Afrique du Sud, pour des missions évangéliques bien que nous n'ayons aucun rapport indiquant qu'il ait implanté des missions en Afrique du Sud. Dans les autres pays mentionnés ci-dessus, Taylor, l'évangéliste, crée ces missions sans la participation du Comité général méthodiste des missions. Il utilise l'argent qu'il reçoit des réunions de camps du mouvement de sainteté pour envoyer des missionnaires. Prônant l'idée de missions autonomes, il attend des missionnaires envoyés dans ces

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missions qu'ils soient indépendants et autonomes. Ces missionnaires reçoivent rarement un salaire ou tout autre don. De ce fait, nombreux sont ceux qui souffrent ou même meurent par manque de soins médicaux. En 1882, le Comité général des missions « refuse le droit à Taylor ou à tout autre personne autre que ses mandataires réguliers [du Comité] d'organiser les églises Méthodistes du Nord en dehors des États-Unis ».259 Cette mesure mène à la fermeture des missions de Taylor en Amérique du Sud. Les missionnaires qui avaient été envoyés là sous son égide sont rappelés. Mais le Comité général des missions ne « dissout pas la Conférence de l'Inde australe, construite par les efforts de Taylor en 1880 ».260 Un an après son élection de 1885 en tant que missionnaire résidant, l'Évêque Taylor ouvre plusieurs postes de missions en Angola et au Congo. En 1890, il ouvre un autre poste à Inhambane, au Mozambique. Tout ce travail de l'Église épiscopale méthodiste en Afrique, en dehors du Libéria, est connu sous le nom de Conférence de mission du Congo de l'Église épiscopale Méthodiste. En mai 1900, à Chicago, la Conférence générale de l'Église Méthodiste prit les mesures suivantes en ce qui concerne la Conférence de mission du Congo :

Dans le cas de la Conférence de mission du Congo, elle sera divisée en deux Conférences de mission comme suit : (a) La Conférence de Mission d'Afrique centrale de l'Est inclura le travail en Afrique de l’Est au sud de l'équateur. (b) La Conférence de Mission d'Afrique centrale de l'Ouest inclura le travail en Afrique de l’Ouest au sud de l'équateur. (Disc., 1900, p. 260)261

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Zimbabwe. C’est l'Évêque Joseph Crane Hartzell, successeur de l'Évêque Taylor en 1896, qui introduit l'Église épiscopale méthodiste en Rhodésie du sud lorsqu'il s'assure d'un vaste terrain à Vieux Mutare, un ancien site de la ville de Mutare, en 1898. Le travail de mission en Rhodésie influe à son tour sur la propagation de l'église dans le sud du Congo par le biais d'une couple missionnaire, les Springer. Springer et sa femme, d'anciens missionnaires en Rhodésie, arrivent au camp de la mine de cuivre de Kansanshi, le 18 juillet 1910. Herman Heinkel, un autre collègue ancien missionnaire en Rhodésie, rejoint les Springer.262 Ils commencent leur travail parmi le peuple Lunda du Sud du Congo dans deux postes de mission, Musumba (Kapanga) et Kambove. Deux Africains, Jacob Maweni et Kayeka Mutembo, rejoignent les missionnaires. Kayeka Mutembo, le fils d'un ancien chef dans le Congo sud avait été enlevé, enfant, par les trafiquants d'esclaves africains de l'Angola. Ayant été dans une mission d'internat américaine et converti au christianisme pendant qu'il était en Angola, Mutembo prie pour qu'un missionnaire soit envoyé à son peuple, le peuple Lunda. La venue de Springer et de sa femme en tant que missionnaires parmi les Lunda est une réponse à la prière de Kayeka Mutembo. L'Évêque Lambuth et John Wesley Gilbert de l'Église épiscopale méthodiste, Sud, contactent Chef Wembo-Nyama au Congo Central en février 1912.263 Deux ans plus tard, le 12 février 1914, ils ouvrent la mission Wembo-Nyama.264 L'Évêque Hartzell est aussi chargé de la mise en œuvre de la résolution de la Conférence générale de 1900 à Chicago qui crée deux conférences de missions à partir de la Conférence de mission du Congo. La conférence de mission d'Afrique centrale de l'Est

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qui inclut le travail au Mozambique et au Zimbabwe est créée à St Andrews, Mutare, à sa première session en 1901. Au fil des ans, le Méthodisme prospère non seulement au sein des zones mentionnées ci-dessus mais aussi dans les pays avoisinants comme le Malawi, la Zambie et l'Afrique du Sud. Le Méthodisme se trouve maintenant en Afrique de l’Est où nous avons la Conférence annuelle de l'Afrique de l’Est, qui comprend le Burundi, le Kenya, le Rwanda, le Soudan, la Tanzanie et l'Ouganda, et en Afrique de l’Ouest, le Méthodisme n'est plus confiné au Libéria. Grâce à la création de l'Église Méthodiste Unie par la fusion de l'Église Méthodiste et de l'Église Unie des Frères évangéliques en 1968, nous avons maintenant la Conférence annuelle du Nigéria, et la Conférence Annuelle de la Sierra Léone, qui font toutes deux partie de l'Église Méthodiste Unie. Le Méthodisme Uni s'est depuis lors étendu à d'autres pays d'Afrique de l’Ouest tels que la Côte d'Ivoire, et le Cameroun entre autres. Ce travail merveilleux d'évangélisme par les Méthodistes Unis sur le Continent mena à l'organisation des trois Conférences centrales -- la Conférence Centrale d'Afrique fondée en 1920, la Conférence centrale d'Afrique centre-ouest fondée en 1980 et la Conférence centrale du Congo fondée en 1988. Ces trois conférences centrales représentent à elles seules vingt-et-unes conférences annuelles, une conférence provisionnelle et une conférence missionnaire au moment où j'écris ces mots.

L'évangélisation à la manière Méthodiste Unie africaine La question qui se pose à nous est de savoir quelles sont les approches utilisées par l'Église Méthodiste Unie en Afrique en matière d'évangélisme pour transformer

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l'Afrique et qu'elle devienne un continent de plus en plus chrétien. Après tout, tout autour de nous, on trouve des indices indiquant qu'en ce XXIème siècle, l'Afrique est devenue le lieu de l'une des plus grandes communautés chrétienne au monde. Ceci étant le cas, quelles approches à l'évangélisme les églises Méthodistes Unies africaines utilisent-elles pour témoigner intégralement, pour construire l'église et élargir la présence chrétienne sur le continent ? Avant de nommer ces points communs, rappelons la diversité étonnante au sein de laquelle nous observons et nous explorons ces approches communes à l'évangélisme. Nous avons déjà souligné que, vue l'immensité du continent africain, une série de facteurs géographiques, culturels et contextuels influent sur les trois conférences centrales régionales du Méthodisme Uni. Il est clair qu'il ne peut y avoir d'approche unique au ministère de l'évangélisme dans toutes ces situations. Dans les chapitres précédents, nous avons exposé les diverses influences historiques du Réveil méthodiste en Grande Bretagne et le patrimoine américain des réunions de camp et du mouvement de sainteté. Nous pouvons voir en quoi tous ces facteurs ont influencé l'Église Méthodiste Unie en Afrique et la manière dont nous abordons l'évangélisme en Afrique. Il existe également diverses influences internationales. La base historique du Méthodisme Uni Africain vient clairement de l'Amérique, même faussement identifié parfois comme Église Méthodiste américaine! Mais pourtant, les missionnaires méthodistes unis sont venus en Afrique d'un certain nombre d’autres pays, y compris la Grande Bretagne, l'Allemagne, et la Scandinavie.

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Cette diversité de groupes qui envoyaient des missionnaires amena de ce fait une diversité théologique. Les conférences annuelles en Afrique ont reçu des missionnaires ayant des opinions divergentes telles que la sanctification. Comme nous l'avons vu plus haut, certains adoptèrent la position officielle de l'église, affirmant la croissance en l'amour chrétien tout en déplorant l'idée de deux événements distincts dans l'expérience du salut. D'autres, influencés par le mouvement de sainteté, soulignèrent l'importance d'une conversion, et d’une seconde bénédiction, dans laquelle on reçoit l'Esprit-Saint. Dieu merci, John Wesley fit preuve de tolérance à l'égard de certains de ses proches associés qui parlaient de seconde bénédiction ! La position de Wesley ne changea jamais. Il associait recevoir l'Esprit-Saint à une conversion continue, pas une seconde bénédiction. En termes généraux, il se peut que la diversité n'ait pas eu d'effet adverse sur les membres ordinaires de l'église en Afrique ainsi que sur les nombreux pasteurs qui étaient moins au courant des diverses orientations théologiques à l'œuvre. On peut néanmoins observer la diversité théologique, non seulement d'un missionnaire à l'autre, mais aussi d'une conférence annuelle à l'autre en fonction du groupe missionnaire le plus influent pour ouvrir ces conférences annuelles africaines. La diversité riche et parfois préoccupante décrite ici -- culturelle, historique, et théologique -- est ce dont ont hérité les conférences annuelles africaines. Ceci a eu un impact sur notre compréhension et notre pratique de l'évangélisme. Toutefois, puisque les conférences annuelles africaines partagent un patrimoine historique et théologique, il est possible d’observer et de soulever des points communs importants qui caractérisent la manière dont l'Église Méthodiste Unie évangélise l’Afrique.

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La prédication dominicale. L'évangélisme au sein de l'Église Méthodiste Unie en Afrique est ancré dans la prédication dominicale. L'histoire du Méthodisme Uni africain nous enseigne que le culte dominical présente une bonne occasion pour la prédication évangélique. Un prédicateur méthodiste uni africain, qu'il soit membre du clergé ordonné ou prédicateur laïc, reconnaît l'opportunité de la proclamation de l'évangile qui accompagne le service du culte dominical régulier. Il ou elle est conscient du fait que chaque congrégation est comme le champ que Jésus décrit dans la parabole du blé et des mauvaises herbes -- chaque congrégation est constituée des deux qui poussent toujours ensemble (Mat. 13:24-30). Les prédicateurs africains savent, comme Wesley, que chaque congrégation inclut des gens qui sont « des pécheurs complaisants comme le Fils prodigue, ou de pécheurs arrogants comme le Frère aîné ou bien comme la plupart d'entre nous, ils sont un peu des deux ». 265 Cette compréhension de la nature humaine et de l'église motive le prédicateur à aborder la chaire en voulant persuader hommes et femmes à promettre leur vie au Christ et à continuer leur croissance spirituelle en Lui. Pour certains pasteurs, la congrégation s'est avérée être le sol le plus fertile pour la prédication évangéliste qui mène à la vie abondante -- où les gens commencent à réaliser le potentiel de leur vie, et finissent par servir Dieu et la société d'une manière ou d'une autre. Une prédication évangéliste efficace souligne souvent les grandes promesses de l'évangile, comme celle-ci : « Demandez, et l'on vous donnera; cherchez, et vous trouverez; frappez, et l'on vous ouvrira. » (Mat. 7:7). « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. » (Mat. 11:28).

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« Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi. » (Apoc. 3:20) Les prédicateurs africains sont heureux de reprendre chaque dimanche la tache de proclamer de telles promesses bibliques qui louent le Christ, pendant que ceux qui souffrent trouvent simultanément une guérison quand ils répondent à l'évangile de Jésus Christ. Permettez-moi de partager mon point de vue personnel. J'envie un pasteur qui monte dans la même chaire chaque dimanche, qui prêche et qui s'attarde sur les promesses bibliques divines faites à sa congrégation. Dans la mesure où la prédication exige un travail ardu par la planification, elle est tout autant gratifiante pour la congrégation que pour le prédicateur. J'ai toujours été convaincu qu'être un tel pasteur est la meilleure nomination qu'un membre du clergé ordonné méthodiste uni puisse recevoir. Par exemple, en congé de mon poste à Africa University pendant les mois de juin et de juillet 2010, je décidai de travailler dans mon jardin plus que je ne l'avais fait auparavant. Pendant ces soixante-et-un jours où je me trouvai à la maison, pas un jour ne se passa sans que j'aille dans mon jardin, parfois deux ou trois fois dans la même journée. Je semai les graines et transplantai les pousses. Je m'assurai que les pousses étaient arrosées, que les massifs étaient recouverts de paillis. À maintes reprises, je me retrouvai à prendre soin de chaque plant de légumes individuellement, tuant les vers que je trouvais près des plantes, appliquant toutes sortes de pesticides pour que les plantes puissent grandir correctement et pour que je récolte des légumes pour la famille. Je ne pouvais m'empêcher de penser qu'un pasteur-évangéliste ressemble au jardinier -- quelqu'un qui connaît sa congrégation et sa communauté ; qui se déplace parmi eux, qui écoute leur

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problèmes, leurs craintes et leurs aspirations, qui va là où les paroissiens vivent et qui s'assied parmi eux (voir Ézé. 3:15) pour les comprendre. C'est une démarche comme celle-ci qui conduit les pasteurs à devenir de grands prédicateurs et pasteurs-évangélistes dans leurs congrégations. De tels pasteurs-évangélistes ont émergé maintes et maintes fois dans les conférences annuelles africaines. Ces pasteurs ne dépendent pas des évangélistes itinérants (évangélistes de conférence ou de district) parce qu'ils peuvent faire le travail. La focalisation sur la formation de disciples. Le Méthodisme uni africain nous enseigne un évangélisme qui présente le Christ aux gens, puis qui encourage les convertis en s'occupant d'eux et en leur apprenant à comprendre la nouvelle foi à laquelle ils ont été appelés. Accepter Jésus Christ ne doit pas se limiter à un engagement verbal initial ; la foi en le Christ signifie « poursuivre la croissance des personnes en tant que membres de l'église, c'est-à-dire de la communauté qui croit, rachète, adore et apprend ».266 Pour continuer à progresser vers la concrétisation de la foi en une vie ressemblant à celle de Jésus Christ, les membres doivent à la fois croire et servir Christ. Il semble que ce soit la volonté de Jésus lorsqu'il donna la mission à ses onze disciples en Galilée, « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. » (Mat. 28:19–20). Évidemment, les mots clés concernant la formation de disciples dans ce texte sont baptiser et enseigner. Le baptême présume que l'évangile a été entendu ou communiqué et que l'individu y croit maintenant. (Rom. 10:14). L'étape suivante est que cette personne reçoive un enseignement lui permettant d’apprécier pleinement la signification de l'évangile, la transformation qu'il apporte et le mode de vie qu'il implique.

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Lorsque l'Église Méthodiste Unie fut introduire en Afrique, l'une des difficultés auxquelles elle dut faire face était l'analphabétisme. On convertissait des personnes illettrées au christianisme mais comment alors pouvaient-elles s'épanouir et devenir des chrétiens matures sans pouvoir lire la Bible ni la littérature chrétienne ? La Bible fut le premier livre dans lequel de nombreux Chrétiens africains apprirent à lire. Certains des premiers chrétiens africains vivaient une vie chrétienne dans laquelle ils ne lisaient pas d'autre livre chez eux que la Bible. Ma propre mère, convertie au christianisme quand elle était encore enfant et décédée en 1999 à l'âge de 105 ans, était une de ces personnes. Lorsque son âge l'empêcha d'aller travailler dans les champs, lire la Bible devint sa joie quotidienne (voir Ps. 1:2). Dans les premières années du Méthodisme, la lutte contre l'analphabétisme fut l'une des raisons pour lesquelles on créa des postes de missions sur tout le continent, et pourquoi ces missions devinrent l'endroit le plus propice pour faire des disciples. Nos postes de mission continuent aujourd'hui à être le meilleur lieu d'évangélisation. C'est là que des milliers de jeunes passent leurs années formatives dans un environnement chrétien. Quelle opportunité s'offre à l'église d'avoir un impact décisif et persuasif sur la vie des jeunes, pour qu'ils puissent à leur tour influer sur l'avenir de l'Afrique ! Il est possible que le défi à relever pour nos postes de mission ne soit plus l'analphabétisme. Nos pasteurs et nos enseignants se concentrent plutôt sur la formation de disciples chrétiens, en s'assurant que les jeunes savent qu'ils sont appelés au Christ pour servir, et qu'être un disciple chrétien, c'est accepter le Christ et aspirer à recevoir les meilleures notes de la classe. Arias et Johnson écrivent « Les disciples ne sont pas nés, ils sont faits, et ceci exige toute une vie sans espoir de remise de diplôme ! » 267 L'Église

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Méthodiste Unie en Afrique -- dans les postes de mission, dans les zones rurales et particulièrement dans les zones urbaines -- applique maintenant la méthode mathéenne de formation des disciples, transformant l'Afrique par l'évangélisation et l'éducation chrétienne. Les réunions de réveil. L'église en Afrique a foi que les réunions de réveil sont un moyen d'évangéliser. Les églises sont propulsées par une série de réveils. Au Zimbabwe, on attend de chaque circuit qu'il organise quatre réunions de réveil par an. En outre, ces réunions de réveil se déroulent au niveau des districts et au-delà de ce niveau. Un certain nombre de conférences africaines ont conservé des dossiers historiques concernant la pratique des réunions de réveil dans leurs histoires. Selon l'expérience d'Alf Helgesson, un ancien missionnaire au Mozambique, aux débuts du protestantisme dans la région de Maputo, l'Église épiscopale méthodiste et d'autres groupes protestants étaient en petit nombre, c'est pour cette raison qu'elles travaillaient en étroite collaboration entre elles et avec l'Église catholique romaine qui était proche du gouvernement portugais. Ce qui se passait au sein de la communauté de l'une des églises protestantes avait donc un impact sur toutes les autres. Helgesson écrit :

Nous nous souvenons que même avant l’arrivée du couple Wilcox [peutêtre l'un des missionnaires] à Inhambane, les premières approches du travail missionnaire protestant avaient pris forme à Delagoa Bay où Lourenco Marques acquérait alors de l'importance. Yosefa Mhalamhala, l'avant-garde de la mission presbytérienne suisse dans cette région, s'était installée à Ricatla, à trente kilomètres au nord de Lourenco Marques,

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prêchant avec enthousiasme en dépit des soupçons des autorités portugaises. L’année 1885 marqua l'explosion d'un grand réveil spirituel. Deux autres années s'écoulèrent avant que les premiers missionnaires suisses s'installent dans la région de Lourenco Marques. Ce furent le Rév. Paul Berthoud et sa femme qui arrivèrent à Ricatla avec trois évangélistes Tsonga du Transvaal et leur famille le 9 juillet 1887. Le réveil s'était déjà propagé dans toute la région et les missionnaires étaient à même d'utiliser ce mouvement vivant qui se produisait et qui avait aussi influencé les Tsonga très actifs à Lourenco Marques. L'un d’eux était Jim Ximungana. Il s'était enrichi en vendant de l'alcool mais était maintenant un évangéliste, prêchant l'évangile et témoignant de sa conversion radicale.268

Il existe aussi des exemples de réveils non documentés qui se déroulèrent dans plusieurs des conférences annuelles mais qui ne furent pas remarqués, en particulier s'ils étaient menés par des prédicateurs africains. Alf Helgesson écrit à propos de la prédication de réveil de Tizora Navess, dont il fut mis au courant par le fils de ce dernier. Tizora Navess était l'un des pasteurs-enseignants africains au Mozambique.

Son fils, le Rév. Nataniel Navess se rappelle de l'absence de son père pendant plusieurs mois entre 1916 et 1917, allant même jusqu'au Transvaal. Lorsqu'il revint chez lui, il relatait des histoires de grandes foules se réunissant pour écouter le pasteur Tizora prêcher « sur Moïse et

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Dieu qui avait libéré le peuple d'Israël. » De toute évidence, un réveil était dans l'air, et peut-être avec une saveur politique.269

En dépit de tout cela, Tizora Navess ne fut pas ordonné. Mais, « à la Conférence annuelle de 1917, on rapporte qu’une multitude d'enfants et d'adultes, comme jamais auparavant, s’étaient faits baptisés depuis la Conférence annuelle précédente ».270 Il est impossible de parler de l'Église Méthodiste et de ses efforts d'évangélisation au Zimbabwe sans mentionner le Réveil de 1918. Ce réveil au Zimbabwe commença à la mission du Vieux Mutare en juin 1918, dix-sept ans après l'organisation de la Conférence de mission de l'Afrique de l’Est en 1901. Certains d'entre nous ont eu la chance de voir, de parler et même de s’entretenir avec les témoins visuels de ce réveil. L'impression qu'on a de ces entrevues et particulièrement des rapports qui sont enregistrés dans les Comptes-rendus de conférences de mission de Rhodésie 1919 est que l'Esprit-Saint raviva la Conférence missionnaire vieille de dix-sept ans de manière extraordinaire. Par exemple, voici certains des propos des témoins du Réveil de 1918 au Zimbabwe. (a) Le Comité sur les Résolutions rapporta une reconnaissance du Réveil de la manière suivante :

Puisque Dieu a si gracieusement répondu aux prières des missionnaires, des chrétiens natifs et de l'église au pays, prières qui sont montées vers Lui pour l'Afrique, nos cœurs sont remplis de gratitude envers Lui pour le

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réveil qui a touché notre travail à partir du mois de juin dernier et qui a rempli presque tous les cœurs.271

(b) Les surintendants de district rapportèrent :

Tout comme ceci devrait être, l'année dernière a été sans aucun doute notre meilleure année. De nouvelles grandes valeurs spirituelles ont été réalisées. Chaque centre a été secoué par un souffle spirituel nouveau jusqu'à ce que les païens aient vu une grande lumière et senti la présence d'une nouvelle puissance.272

(c) Un autre rapport sur l'impact du réveil vint du Comité sur la condition de l'église, qui déclare :

En juin dernier, l'un de nos enseignants natifs reçut un baptême -- une Pentecôte. Nous ne sommes pas impressionnés par la gymnastique que certains firent mais un grand nombre de nos hommes s'enflammèrent lorsqu'un lourd fardeau à porter pour leur peuple. 273

Le réveil de 1918 eut un impact sur la conférence annuelle. Il toucha à la fois les missionnaires et les pasteurs-enseignants africains et fut ressentie par toute la conférence ; il y eut un grand nombre de convertis et un bon nombre de jeunes hommes répondirent à

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l'appel de Dieu pour le ministère ordonné. Il influença les habitudes des gens pour leurs dons à l'église, et leur permit ainsi qu’à l'église de réaliser leur potentiel. Un autre réveil eu lieu dans le centre du Congo. En février 1912, l'Évêque Lambuth et John Wesley Gilbert atteignent Chef Wembo-Nyama au Centre du Congo et sont reçus avec enthousiasme.274 L'évêque ouvre la Mission Wembo-Nyama le 12 février 1914. La concentration de la mission porte sur quatre points : (a) l'aspect industriel, (b) l'éducation, (c) l'aspect médical, (d) l'évangélisme.275 En décembre 1931, les missionnaires invitent Gilbert Ridout du Kentucky à mener un réveil à la Mission de Wembo-Nyama. Ce réveil attire les foules de près comme de loin. Un grand nombre des membres du clergé et des laïcs reçurent le pouvoir et le baptême de l'Esprit-Saint.276 L'un des résultats mémorables fut que le nombre de prédicateurs Atetera (une ethnie) en 1935 passa de quarante-deux à 165 et que les membres de l'église passèrent de 635 à 5026.277 Il n'est pas surprenant que le réveil spirituel et les réunions évangélistes de masse soient devenus un modèle et une pratique courants de l'évangélisme pratiqué par l'UMC en République démocratique du Congo. De telles renaissances historiques ont eu lieu dans la plupart des conférences annuelles des Méthodistes Unis en Afrique, ce qui a poussé les conférences annuelles à considérer les réunions de réveil comme une méthode importante d'évangélisme. Samuel Dzobo, un ancien de la Conférence annuelle du Zimbabwe, composa une dissertation pour son Mastère d'études théologiques en évangélisme pendant son séjour à Africa Université dans lequel il commente la manière dont les Méthodistes Unis considèrent leur relation au réveil spirituel.

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Ce sont des événements importants sur le calendrier d'une congrégation méthodiste. Chaque église locale ou charge locale aura un minimum de quatre réunions de réveil organisées par les jeunes, les femmes, les hommes et le comité d'évangélisation pour l'église locale. Le district aura également un minimum de quatre réunions de réveil. La conférence a en général trois réunions de réveil mais les réunions des femmes ou les conventions dominent de par le grand nombre de gens qui y assistent.278

Il poursuit :

La réussite des réunions de réveil a contribué à la raison pour laquelle la hiérarchie du clergé et des laïcs définit l'évangélisme en relation avec le réveil. Le réveil à Mutare est lié à l'histoire du réveil de 1918 parce que, de ce réveil de 1918, l'église s'est élargie avec des Africains qui prêchèrent l'évangile à leurs propres villages et communautés. 279

Toutes les conférences annuelles de l'Église Méthodiste Unie en Afrique ont tendance à utiliser les termes réveil et évangélisme de manière interchangeable de par le rôle important que jouèrent les réunions de réveil. Grâce aux réveils qui sont faits à tous les niveaux -- église locale, district, et conférence -- l'évangile atteint les non-croyants et ceux qui ont cessé de croire. Réunions de classe. L'évangélisme au sein de l'UMC en Afrique utilise les réunions de classe pour relier l'évangélisme à l'éducation chrétienne. Ici, évangélisme et

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éducation chrétienne vont de pair. Nous avons déjà remarqué qu'avec le Mouvement de réveil en Grande Bretagne, les réunions de classe se sont transformées en une unité d'adhésion à une société (des classes de 12 membres), « le terrain de formation de chefs laïcs, un instrument puissant de l'évangélisme ».280 Ce sont dans les réunions de classe que les première et seconde générations de Méthodistes africains furent introduites au catéchisme. À part la Bible, le petit livre du catéchisme était le seul document utilisé dans les réunions de classe. Bien qu'il ait ses limites, le catéchisme était efficace ; les parents chrétiens en achetaient même des exemplaires pour pouvoir enseigner à leurs enfants chez eux. Encore aujourd'hui les réunions de classe sont l’axe principal par lequel les églises UMC de toute l'Afrique répondent au besoin des membres de l’église de mieux comprendre la foi chrétienne, la Bible et ce qui est essentiel et non essentiel dans le cheminement chrétien. Elles servent de terrain de formation non seulement pour les membres de l'église mais aussi pour la mission dans la communauté et dans la société dans son ensemble. En Angola, par exemple, les réunions de classe ont joué un rôle important pour véhiculer l'évangélisme. Elles sont organisées pendant la semaine dans des petits bâtiments, dans des lieux proches des membres de l'église. Le dimanche, elles se déroulent dans le bâtiment central de l'église. La nature évangélique de ces réunions de classe est telle qu'elles se transforment parfois en congrégations. Au Zimbabwe, une variation sur la réunion de classe qu'on appelle section fut créée et les remplaça. Ce nouveau phénomène commença dans les années 70. Les Révérends Zebediah Marewangepo, alors pasteur de l'Église Méthodiste Unie St. Mark de Highfield, Harare, et Isaac Mapipi Mawokomatanda, alors pasteur de l'Église

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Méthodiste Unie St. Timothy de Mabvuku, Harare, jouèrent un rôle essentiel dans cette transition. Les sections sont comme des classes mais elles sont organisées géographiquement suivant l'endroit où les membres résident. Le nombre de membres dans une section va en général de dix à vingt, en fonction de la concentration des membres dans une zone géographique particulière. Dans les grandes congrégations, le nombre de personnes dans une section peut aller jusqu'à trente ou plus. L'axe de concentration principal de ces réunions de section, c'est l'évangélisme et l'enseignement. Les membres des sections se rencontrent chez eux pendant la semaine pour prier et enseigner. Ils peuvent aussi se rencontrer chez des voisins qui les invitent à avoir des réunions de prière. De ce fait, bien des gens deviennent membres de l'église par le ministère d'évangélisation des réunions de section. C'est aussi par le biais des réunions de section, comme pour les réunions de classe, que les chrétiens se rendent compte de leur potentiel en tant que disciples et des dons que Dieu leur a accordé pour servir leurs églises et leurs communautés. Les camps de réfugiés. L'évangélisme en Afrique de l’Est s'est épanoui grâce aux camps de réfugiés dans les années 1990, époque à laquelle l'évangélisme prit la forme de travail de secours. Jean Ntahoturi, un ancien de la Conférence annuelle de l'Afrique de l’Est qui étudia en vue d’un diplôme MTS en évangélisme à Africa University, est l'auteur d'une dissertation écrite sous ma supervision sur l'expansion de l'UMC en Afrique de l’Est, dissertation dans laquelle il évalue comment l'évangélisme se propagea dans les zones de conflit où une grande partie de la population était réfugiée. Ntahoturi assimile les résultats du conflit dans la région des Grands Lacs, en particulier après le génocide du Rwanda en 1994, à la persécution qui suivit la lapidation d'Étienne à Jérusalem, et

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provoqua la fuite des Chrétiens de la ville.281 De même, selon Ntahoturi, toute la région des Grands Lacs était déstabilisée et les gens se sont enfuis dans les pays voisins pour y trouver refuge comme dans l'est du Congo, au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie. Cette déstabilisation remonte à 1972,282 et c'est une indication de la durée pendant laquelle les gens de cette région ont vécu dans des camps de réfugiés. Ceci signifie que les enfants nés dans des camps de réfugiés auraient pu y vivre pendant vingt ans ou plus sans connaître leur terre natale. La déstabilisation de la région des Grands Lacs créa non seulement une crise humanitaire mais offrit à l'UMC (ainsi qu'à d'autres groupes religieux) l'opportunité de répandre la grâce du Christ par le travail de secours et d'assistance parmi les réfugiés. Le rayonnement des méthodistes unis s'étendit du Burundi et du Rwanda à d'autres pays limitrophes. Ntahoturi indique la manière dont l'église s'étendit : Ferdinand David Egessa prit contact avec le Rév. Solomon Muwanga, un Ougandais qui avait participé à la fondation de l'UMC en Ouganda, pour lui permettre d'établir l'église dans la province ouest du Kenya en 1993. À Tabora, en Tanzanie, à mesure que les réfugiés commencèrent à arriver en 1972 et à Kigoma et Kagera en 1994, l'UMC commença à faire des témoins au sein des camps de réfugiés. L'église fit aussi ressentir son témoignage au sein de la population rwandaise qui s'était enfuie dans l’est du Congo. En 2001, une église UMC de 8500 membres fut créée dans un autre camp de réfugiés appelé Mtabila. La situation permit à l'UMC de s'étendre jusqu'à 15000 membres.283 Ntahoturi, qui travailla dans certains de ces camps de réfugiés pendant une longue absence d'Africa University, rapporta une conversation avec un certain nombre de convertis à l'UMC qui parlèrent de leur engagement au Christ

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et de leur découverte de la Bible. Ils rapportèrent comment l'étude de la Bible leur avait donné du courage, une vision positive de la vie et avait renforcé leurs familles, qui, dans certains cas avaient été complètement démantelées et dont certains membres avaient disparu. A la fin des années 90, le travail d'évangélisation de l'UMC s'étendait au Burundi, au Kenya, au Rwanda, au Soudan et à l'Ouganda -- tous coordonnés par la Conférence annuelle du Burundi, qui changea son nom à Conférence annuelle de l'Afrique de l’Est en 1998, forte de 15 districts.284 On ne peut s'empêcher de penser à tous ces gens dans les camps, partout en Afrique, qui ne sont pas juste des numéros mais des êtres humains qui souffrent. L'église est parmi eux, comme le sel et la lumière, et elle continue à témoigner qu'Emmanuel, Dieu est parmi nous. L’évangélisation de masse. Les méthodistes unis ont utilisé plusieurs méthodes d'évangélisme de masse en Afrique, qui, outre les réunions de camp, incluent les conventions, les campagnes, les campagnes extérieures, les marathons, les galas musicaux et missions de prédication. Le degré auquel les conférences annuelles ont utilisé ces diverses méthodes d'évangélisme dépend de leur situation. Les Principes sociaux. L'UMC en Afrique rend témoignage au Christ par son engagement envers ses Principes sociaux. Dès le départ, l'UMC en Afrique enseigna que l'évangile est à la fois personnel et social. Cette manière de comprendre l'évangile remonte au Méthodisme aux États-Unis et en Angleterre et à John Wesley lui-même qui, au XVIIIème siècle avait écrit : « Le christianisme est tout d'abord essentiellement une religion sociale ; et la transformer en une religion solitaire, c'est la détruire. »285 Cette compréhension holistique de l'évangile conduit John Wesley et les premiers pasteurs

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méthodistes à remplir vigoureusement le ministère auprès des pauvres, des prisonniers, des esclaves, des enfants des pauvres qui avaient besoin d'éducation et des autres victimes des maux sociaux. La Conférence annuelle de Rhodésie dans les années 60 et 70 (dans ce qui est maintenant la Zone épiscopale du Zimbabwe) organisa des Comités chrétiens de préoccupation sociale dans chaque circuit ecclésial pour trouver des solutions chrétiennes à des problèmes sociaux aggravés par la tension politique raciale. Les comités diffusèrent le message de l'action sociale chrétienne, poussant les chrétiens individuels et l'église à tous les niveaux à être des acteurs dans l'arène politique de la vie. Alors que les comités encourageaient les membres à s'associer au parti ou mouvement politique de leur choix, ils conseillaient aux églises d'éviter de soutenir un parti politique quelconque. On encourageait plutôt les églises à soutenir les principes sociaux chrétiens qui inspirent le genre humain et promeuvent le bien-être commun de tous, tout en condamnant les pratiques politiques qui sapent la dignité de l'homme.286 Le courage avec lequel l'UMC déclarait la vérité de la situation politique était si percutant que lorsque la Conférence Annuelle de Rhodésie était en session, le public faisait attention. Les gens attendaient d'entendre un message d'espoir, que les journaux ou l'Umbow, le journal de la conférence, publiaient habituellement. C'était la méthode choisie par l'UMC pour proclamer l'évangile. La conséquence fut que bien des gens s'associèrent à l'UMC. La même chose se passa dans d'autres pays où les conditions politiques appelaient le témoignage de l'UMC. Le Méthodisme Uni se porte bien sur le continent africain. Aujourd'hui, il est fier de ses vingt-et-une conférences annuelles, quatre conférences provisionnelles et une

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conférence missionnaire. Nous avons parlé auparavant du fait que faire des disciples chrétiens était le point central de l'axe du Méthodisme Uni africain sur le continent, ses deux bras étant l'évangélisme et l'éducation. En 1988, la Conférence générale de l'UMC approuva la création d'Africa University -- une université pour toute l'Afrique qui ouvrit ses portes en mars 1992. Sa déclaration de mission est la suivante :

L'éducation est le moyen fondamental permettant de répondre aux besoins individuels et au développement personnel, de réaliser les objectifs de la société et de faire progresser la culture et l'économie. La mission d'Africa University est d'offrir une éducation supérieure de grande qualité, d'encourager les étudiants à suivre des valeurs chrétiennes, et d'aider les nations de l'Afrique à réaliser leurs objectifs éducatifs et professionnels. Africa University jouera un rôle essentiel dans l'éducation des nouveaux dirigeants des nations africaines.

Bien qu'Africa University n'ait commencé qu'avec deux facultés, elle a maintenant six facultés et un institut. Agriculture et ressources naturelles, Éducation, Sciences de la santé, Humanités et sciences sociales, Gestion et administration, Théologie et un Institut de la Paix, du leadership et de la gouvernance. La création d'Africa University fut un pas énorme dans l'évangélisation de l'Afrique par l'UMC.

Synthèse

131

Ces commentaires de synthèse soulignent trois facteurs importants en ce qui concerne l'évangélisme de l'UMC en Afrique. Premièrement, l'évangélisme est au cœur de l'UMC et de sa mission en Afrique. Les conférences annuelles avec leurs districts et leurs circuits et/ou leurs églises locales ont toujours fait des efforts pour créer un esprit évangéliste au sein des membres. Sous l'égide des pasteurs, les églises prêtent leur assistance à la planification et à la promotion de services de prédication évangélistes pour toutes les occasions, qu'elles soient pratiques ou non pratiques, de saison ou hors saison (voir 2. Tim. 4:2). Pour créer cet esprit et cette conscientisation évangéliste, certaines églises locales offrent la communion en se rendant chez les personnes invalides. Elles offrent des visites de courtoisie qui leur permettent de mener les membres inactifs à la communauté de rédemption et de mener le ministère auprès des personnes âgées et des personnes confinées. Elles tracent de nouvelles frontières pour atteindre de nouvelles personnes au nom du Christ. Deuxièmement, les réunions de réveil sont l'une des méthodes d'évangélisation les plus plébiscitées en Afrique par les conférences annuelles de l'UMC. Que les méthodistes unis en Afrique soient simplement attachés aux réunions de réveil parce qu'elles sont le legs d'un mouvement de réveil, ces réunions sont un moyen efficace de grâce par lesquelles un grand nombre de gens s'engagent au Christ. Rassembler un grand nombre de chrétiens au nom du Christ s'avère être un moyen puissant de témoigner pour le Christ. Les méthodistes unis laissent leurs demeures en grand nombre, voyagent un jour ou deux pour se rendre dans ces grandes réunions où il peut y avoir cinq milles personnes qui peuvent rester trois à cinq jours. Les membres de l'église y trouvent une force spirituelle et nombreux sont les nouveaux convertis qui trouvent la foi.

132

Troisièmement, au début du XXIème siècle, les conférences annuelles de l'UMC en Afrique adoptèrent le concept mathéen de formation de disciples comme thème de leur évangélisme. Ce thème est basé sur le texte, « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde. » (Mat. 28:19–20). Selon Mathieu, le mode d'évangélisme qui vise à faire des disciples représente le mandat remis à chaque congrégation d'aller dans chaque communauté et dans chaque nation pour faire des disciples. Le mandat reçu n'est pas de faire des disciples de quelques personnes mais de faire des disciples de tous (Mat. 28:19), de les baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et de leur enseigner la fois chrétienne. Aucun évangéliste n'est en meilleure position pour parvenir à la méthode mathéenne de formation de disciples que le pasteur. Il ou elle peut évangéliser la communauté et guider les programmes d'éducation chrétienne pour les divers groupes d'âge de la congrégation de telle sorte que tous puissent s’acheminer vers une maturité chrétienne et la réalisation de leur potentiel. De là, la déclaration d'Arias et de Johnson : « Les disciples ne sont pas nés, ils sont faits, et ceci exige toute une vie sans espoir de remise de diplôme... l'évangélisme sans la formation de disciples n'est pas de l'évangélisme dans le sens du Nouveau Testament, conformément à la Grande Commission. »287 Chose intéressante, deux diplômés de la Faculté de Théologie d’Africa University en 2009 ont présenté des thèses dont les recherches ont été faites séparément et dans deux communautés différentes de l'Église Méthodiste Unie et leurs conclusions ont été très semblables en ce qui concerne l'évangélisme. Joe Samalenge, de la République

133

Démocratique du Congo, a présenté sa thèse sur « La pertinence des méthodes d'évangélisation utilisées dans l'Église Méthodiste Unie dans le District du Mutare (Zimbabwe) : Une étude de cas du circuit Hilltop », pour laquelle il mena des entretiens. En réponse à la question de sa recherche : « Comment êtes-vous devenu membre de l'UMC Hilltop ?», le plus grand pourcentage de répondants (29,33 pour-cent) étaient nés et avaient été élevés dans l'UMC à Hilltop. Les pourcentages les plus faibles indiquaient les réveils de circuits et les campagnes.288 De même, Paul Mazumba du Zimbabwe, dans « Une critique des méthodes d'évangélisme utilisées par l'UMC à Harare : Une étude de cas du District central d'Harare » demanda aux laïcs de ce District d'indiquer par laquelle des trois manières ils étaient devenus membres. Mazumba rapporta qu'environ 75 pourcent, le pourcentage le plus important, avaient indiqué qu'ils avaient été élevés dans une famille méthodiste.289 Les conclusions de ces deux thèses nous indiquent que la méthode d'évangélisation consistant à former des disciples s'avère l'une des meilleures démarches pour évangéliser. L'UMC doit continuer à insister sur le lien entre vulgarisation évangéliste et éducation chrétienne, les deux allant main dans la main dans nos églises locales. L'objectif de l'évangélisme n'est pas que les gens prennent simplement un engagement envers le Christ ; c'est que les gens deviennent de vrais disciples, ce sont ces convertis qui en apprennent plus sur toute la foi chrétienne, en particulier sur le Christ lui-même dans le contexte d'une communauté chrétienne. C'est le Christ qui a dit « Je suis venu pour qu'ils aient la vie, et qu'ils l'aient dans toute sa plénitude ». (Jean 10:10)

134

Notes 1

David B. Barrett, « AD 2000: 350 Million Christians in Africa,» (L'an 2000 : 350 millions de chrétiens en

Afrique) The International Review of Missions (La Revue internationale des missions), Vol. LIX, No. 233 (Janvier 1970), 47. 2

Christianity Today (Le christianisme aujourd'hui) (13 juillet 1998), 22.

3

The General Secretary’s Report to the Eighth Assembly of the World Council of Churches (Le rapport du

secrétaire général à la huitième assemblée du Conseil mondial des églises), Harare, Zimbabwe, 3–4 décembre 1998. 4

Dictionnaire de la Bible de l'Interprète A-D, 79.

5

Henry Chadwick, The Early Church (La première église) (New York : Penguin Books, 1971), 64.

6

Eusèbe, The History of the Church from Christ to Constantine (L'histoire de l'Église du Christ à

Constantin), Livre 2:16 (New York : Penguin Books, 1983), 89. 7

G. S. P. Freeman-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel atlas de l'histoire africaine)

(New York : Simon & Schuster, 1991), 52. 8

Ibid., 133.

9

John Ernest Leonard Oulton et Henry Chadwick, Alexandrian Christianity (Christianisme alexandrin)

(Philadelphie : The Westminster Press, 1954), 16. 10

Correct ou conforme aux croyances habituelles.

11

Chadwick, The Early Church (La première église), 64.

12

Tony Lane, The Lion Concise Book of Christian Thought (Sydney : A Lion Book, 1984), 20.

13

Dictionnaire de la Bible de l'Interprète , Vol. E-J, (Nashville : Abingdon Press, 1962), 181.

14

Eusèbe, The History of the Church from Christ to Constantine (L'histoire de l'Église du Christ à

Constantin),148. 15

Ibid., 213.

16

Ibid.

17

W. H. C. Frend, The Early Church (La première église) (Philadelphie : J. B. Lippincott, 1966), 94.

135

18

Eusèbe, The History of the Church from Christ to Constantine (L'histoire de l'Église du Christ à

Constantin),242. 19

J. Stevenson, ed., A New Eusebius (Un nouvel Eusèbe) (Londres : S.P.C.K), 398.

20

John Ernest Leonard Oulton et Henry Chadwick, Alexandrian Christianity (Christianisme alexandrin)

(Philadelphie : The Westminster Press, 1954), 16. 21

Ibid.,19.

22

Ibid., 21.

23

Ibid., 171.

24

Ibid., 173.

25

Des gens payés pour tuer et se battre dans les anciennes arènes romaines.

26

Ibid., 245.

27

Ibid., 245.

28

assèchement

29

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 26.

30

Latourette, A History of Christianity (Un historique du christianisme), éd. rév., 250.

31

Browning, A Dictionary of the Bible (Un dictionnaire de la Bible), 77.

32

Kenneth Scott Latourette, A History of Christianity (Un historique du christianisme) (New York : Harper

and Row, 1953), 77. 33 34 35

L'ancien dieu égyptien des enfers et juge des morts Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 26f. Une vie religieuse d'abnégation

36

Ibid., 27.

37

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 28.

38

Ibid., 26.

39

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 28.

40

Ibid.

41

Ibid., 28.

42

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 26.

136

43

Tillich, A History of Christian Thought (Un historique de la pensée chrétienne), 86.

44

Van A. Harvey, A Handbook of Theological Terms (Un lexique de termes théologiques) (New York :

Macmillan, 1964), 154. 45

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 36.

46

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 38.

47

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 20.

48

Elizabeth Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 34.

49

Les peuples indigènes de l'Afrique du Nord, à l'ouest du Nil.

50

Ibid.

51

William Barclay, The Acts of the Apostles (Les actes des Apôtres), éd. rév. (Philadelphie : Westminster

Press, 1976), 98. 52

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de la rédemption), 6.

53

Ibid., 22.

54

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 15.

55

Stephen Neil, A History of Christian Missions (Une histoire des missions chrétiennes) (New York :

Penguin Books, 1964), 37.

56

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 34.

57

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de la rédemption), 7.

58

W. H. C. Frend, The Early Church (La première église) (New York: J. B. Lippincott, 1966), 92.

59

Tony Lane, The Lion Concise Book of Christian Thought (Sydney : A Lion Book, 1984), 17f.

60

Fred, The Early Church (La première église), 92.

61

Tony Lane, The Lion Concise Book of Christian Thought (Le livre du lion concis sur la pensée

chrétienne), 18. 62

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de rédemption), 7.

63

Lane, The Lion Concise Book of Christian Thought, 18.

64

Fred, The Early Church (La première église), 92.

65

Lane, The Lion Concise Book of Christian Thought, 25.

137

66

Ibid., 26.

67

Ibid., 25.

68

Ibid., 40.

69

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 37.

70

Neill, A History of Christian Missions (Un historique des missions chrétiennes), 37.

71

Ibid.

72

Roland H. Bainton, Christendom (Christianisme), Vol. I (New York : Harper and Row, 1966), 114.

73

Encyclopédie illustrée, Vol. 6 (New York : Illustrated World Encyclopedia, 1971), 1866.

74

Ronald Oliver et J. D. Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique) (Penguin Books,

1990), 28. 75

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de la rédemption), 3.

76

Ibid., 34.

77

G. B. Caird, Saint Luke (Penguin Books, 1968), 16.

78

Un terme que Luc utilise pour faire référence à ceux qui cherchaient la spiritualité parmi les Gentils

attirés par les croyances des Juifs mais qui n'étaient pas totalement convertis. Voir les Actes 13:16 et 13:26. 79

Eusèbe, The History of the Church from Christ to Constantine (L'histoire de l'Église du Christ à

Constantin), (New York : Dorset Press, 1984), 74. 80

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de la rédemption), 33.

81

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 28.

82

Noble, The Redemption of Africa (La rédemption de l'Afrique), 27.

83

Ibid.

84

Elizabeth Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique) (Grand

Rapids : William B. Eerdmans, 1995), p. 33. 85

Willison Walker, A History of the Christian Church (Une histoire de l'église chrétienne) (New York :

Charles Scribner’s Sons, 1959), 144. 86

Andrian Hastings, A History of African Christianity (Une histoire du christianisme africain) 1950–1975

(Cambridge : Cambridge University Press, 1979), 38. 87

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 33.

138

88

Ibid., 31.

89

Ibid., 49.

90

Ibid.

91

« Le christianisme éthiopien : Une histoire de l'église chrétienne en Éthiopie »

(http:www.bethel/letnie/EthiopiaHomepage.html) 3ff. 92

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 36.

93

Beetham, Christianity and the New Africa (Le christianisme et la nouvelle Afrique), 7.

94

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 51.

95

Sindima, Drums of Redemption (Tambours de la rédemption), 40.

96

Illustrated World Encyclopedia (Encyclopédie du monde illustrée), Vol. 8, (New York : Illustrated World

Encyclopedia, 1971), 2551. 97 98

Un Maure est un membre du peuple musulman d'ascendance arabe et berbère vivant en Afrique du Nord. G. S. P. Freeman-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel atlas de l'histoire africaine)

(New York : Simon & Schuster, 1991), 66. 99

J. Kofi Agheti, West African Church History (Histoire de l'Église Ouest Africaine) (Leiden : E. J. Brill,

1986), 3. 100

Ibid., 3ff.

101

T. Walter Wallbank et Alastair M. Taylor, Civilization Past and Present (Civilisation passée et

présente), Vol. I, 4ème éd. (Chicago : Scott Foresman and Company, 1960), 558. 102

Ibid., 557.

103

Ibid., 557.

104

T. A. Beetham, Christianity and the New Africa (Le christianisme et la Nouvelle Afrique) (London : Pall

Mall Press, 1967), 7f. 105

Roland Oliver et J. D. Fage, A Short History of Africa (Penguin Books, 1990), 106.

106

Ibid.

107

G. S. P. Freeman-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel atlas de l'histoire africaine)

(New York : Simon & Schuster, 1991), 66. 108

Oliver et Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique), 107.

139

109

Ibid.

110

Chancellor Williams, The Destruction of Black Civilization (La destruction de la civilisation noire)

(Chicago : Third World Press, 1987), 247. 111

Angola: A Symposium View of a Revolt (Angola : Une vision symposium d'une révolte) (London :

Oxford University Press, 1962), 50. 112

Ibid.

113

Ibid.

114

Ibid.

115

Isichei, A History of Christianity in Africa (Un historique du christianisme en Afrique), 66.

116

Ibid., 64.

117

Ibid.

118

Ibid., 66.

119

Ibid.

120

Ibid., 65.

121

Ibid., 66.

122

Ibid., 64.

123

Ibid., 66.

124

Ibid., 66.

125

Oliver et Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique), 101.

126

Ibid., 103.

127

Ibid.

128

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 82.

129

Ibid.

130

Ibid., 92.

131

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 82.

132

Ibid.

133

Illustrated World Encyclopedia (Encyclopédie du monde illustrée), 13, 4335.

134

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 92.

140

135 136

Ibid., 92. Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 92.

137

Oliver et Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique), 120.

138

Ibid., 121.

139

Ibid., 121.

140

Ibid., 121.

141

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 92.

142

Ibid., 121.

143

Freemann-Grenville, The New Atlas of African History (Le nouvel Atlas de l'histoire africaine), 92.

144

Oliver et Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique), 122.

145

Ibid., 122f.

146

Ibid., 123.

147

Ibid., 123.

148

Ibid., 123.

149

Ibid., 123.

150

Oliver et Fage, A Short History of Africa (Une courte histoire de l'Afrique), 160.

151

Ibid., 161.

152

Ibid.

153

Ibid.

154

Ibid.

155

Ibid., 161f.

156

La Diaspora africaine fait référence à la dispersion des Africains et de leurs descendants dans le monde

entier, tout d'abord à cause de l'esclavage puis plus tard à la recherche d'une éducation. 157

Problems and Promises of Africa (Problèmes et promesses de l'Afrique) (Nairobi : AACC, 1993), 34.

158

Ibid., 32.

159

W. R. F. Browning, A Dictionary of the Bible (Un dictionnaire de la Bible) (Oxford : Oxford University

Press, 1996), 295. 160

Ibid.

141

161

John Wesley Zwomunondiita Kurewa, Preaching and Cultural Identity (La prédication et l'identité

culturelle) (Nashville : Abingdon Press, 2000), 61. 162

Ibid.

163

Clyde L. Manschreck, A History of Christianity (Une histoire du christianisme) (Englewood, New

Jersey : Prentice-Hall, 1964), 263. 164

Ibid., 264.

165

Ibid., 263.

166

Ibid., 263.

167

Ibid., 268.

168

Ibid., 268.

169

Ibid., 269.

170

Ibid., 269.

171

Ibid.

172

Stephen Neil, A History of Christian Missions (Une histoire des missions chrétiennes) (New York :

Penguin Books, 1964), 251. 173

Ibid.

174

Ibid.

175

Walter Phelps Hall, Robert Greenhalgh Albion, et Jennie Barnes Pope, A History of England and the

Empire-Commonwealth (Une histoire de l'Angleterre et de l'Empire du Commonweath), 4ème éd. (Boston : Ginn and Company, 1961), 353. 176

Willison Walker, A History of the Christian Church (Une histoire de l'église chrétienne). éd. rév. (New

York : Charles Scribner’s Sons, 1959), 455. 177

Ibid.

178

Ibid.

179

Ibid.

180

Ibid.

181

Ibid., 269.

182

Ibid., 270.

142

183

Neill, A History of Christian Missions (Un historique des missions chrétiennes), 25.

184

Manschreck, A History of Christianity (Une histoire du christianisme), 413ff.

185

Neill, A History of Christian Missions (Un historique des missions chrétiennes), 252.

186

Ibid., 252.

187

Umphrey Lee et William Warren Sweet, A Short History of Methodism (Nashville: Abingdon Press,

1954), 65. 188

Frederic Perry Noble, The Redemption of Africa (La rédemption de l'Afrique) (Chicago : Fleming H.

Revell, 1899), 286. 189

MRMC (1919), 33f.

190

T. A. Beetham, Christianity and the New Africa (Le christianisme et la Nouvelle Afrique) (London : Pall

Mall Press, 1967), 12. 191

Ibid., 270.

192

Ibid., 205.

193

Harvey J. Sindima, Drums of Redemption (Tambour de la rédemption) (London : Praeger, 1999), 102.

194

T. O. Ranger, State and Church in Southern Rhodesia, 1919–1939 (L'état et l'Église en Rhodésie du

Sud, 1919-1939) (Salisbury : The Central Africa Historical Association, 1958), 7. 195 196

Harvey J. Sindima, Drums of Redemption (Tambour de la rédemption), 75f. Paul Gifford, African Christianity (Christianisme africain) (Bloomington : Oxford University Press,

1998), 769. 197

John W. Z. Kurewa, « Evangelism and Church Growth in Africa, » article non publié, 2008,14ff.

198

Gifford, African Christianity (Christianisme africain), 184.

199

Ibid., 185.

200

Ibid.

201

Ibid., 186.

202

Ibid.

203 204 205

Ibid. Alva I. Cox, Christian Education in the Church Today (Nashville: Graded Press, 1965), 34. Rupert E. Davies, Methodism (Penguin Books, 1963), 65.

143

206

Ibid., 68.

207

Ibid., 68.

208

Ibid., 69f.

209

Ibid.

210

Ibid., 86.

211

Philip S. Watson, The Message of the Wesleys (Le message des Wesley) (New York : Macmillan, 1964),

39. 212

Philip S. Watson, The Message of the Wesleys (Le message des Wesley) (New York :

213

Ibid., 38.

214

Ibid., 40.

215

Ibid., 43.

216

The Works of John Wesley (Les oeuvres de John Wesley), Vol. VIII, 275.

217

James C. Logan, Theology and Evangelism in the Wesleyan Heritage (Théologie et évangélisme dans le

patrimoine wesleyen) (Nashville : Kingswood Books, 1994), 82. 218

Rupert E. Davies, Methodism, 73.

219

Ibid., 74.

220

Ibid.

221

The Works of John Wesley (Les oeuvres de John Wesley), Vol. VIII, 256.

222

Ibid.

223

Ibid.

224

Philip S. Watson, The Message of the Wesleys (Le message des Wesley), 34.

225

Wesley’s Works (Les oeuvres de Wesley), Vol. VIII, 472.

226

Ibid.

227

Umphrey Lee et William Warren Sweet, A Short History of Methodism (Une courte histoire du

Méthodisme) (Nashville : Abingdon Press, 1956), 53. 228

Ibid., 54.

229

R. Shelddon Duecker and Alan K. Waltz, eds., Tension in the Connection (Tension dans la connexion)

(Nashville : 1983), 37.

144

230 231

Ibid. Ibid., 60.

232

Ibid.

233

Gordon S. Wakefield, Methodist Spirituality (Spiritualité méthodiste) (London : Epworth Press, 1999),

43. 234 235 236 237 238 239

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240

Williams, John Wesley’s Theology Today (La théologie de John Wesley aujourd'hui), 183.

241

The Works of John Wesley (Les oeuvres de John Wesley), Vol. XI, 384.

242

Ibid.

243

Langford, Practical Divinity (Divinité pratique), 117f.

244

Ibid., 117f.

245

Ibid., 118.

246

Ibid., 118.

247

Lee et Sweet, A Short History of Methodism (Une courte histoire du Méthodisme) , 75f.

248

Ibid., 66.

249

Ibid.

250

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251

Umphrey Lee et William Warren Sweet, A Short History of Methodism (Une courte histoire du

Méthodisme) (1956), 68. 252

Barclay, Early American Methodism (Les débuts du Méthodisme américain), 329f.

253

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254

Barclay, Early American Methodism (Les débuts du Méthodisme américain), 330.

255

Noble, The Redemption of Africa (La rédemption de l'Afrique), 305.

145

256

Ibid.

257

Ibid.

258

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259

Ibid., 610.

260

Ibid.

261

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262

Copplestone, History of Methodist Missions (Histoire des missions méthodistes), Vol. IV (1973), 93.

263

Michael Kasongo, History of the Methodist Church in Central Congo (Histoire de l'Église méthodiste

dans le centre du Congo (1998), 7. 264

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265

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Alva I. Cox, Christian Education in the Church Today (L'enseignement chrétien dans l'église moderne)

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Abingdon Press, 1992), 20. 268

Alf Helgesson, Church, State and People in Mozambique (L'Église, l'état et le peuple au Mozambique),

59. 269

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270

Ibid.

271

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272

Ibid., 28.

273

Ibid., 37.

274

Michael Kasongo, History of the Methodist Church in Central Congo (Histoire de l'Église méthodiste

dans le centre du Congo (1998), 7. 275

Ibid., 10ff.

276

Ibid., 37.

277

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146

278

Samuel Dzobo, « Une histoire et théologie de l'Évangélisme : Une évaluation de la manière dont le

clergé et les laïcs contribuent au ministère », dissertation non publiée, Africa University, (2006), 83. 279

Ibid., 84.

280

Davies, Ibid., 73.

281

Jean Ntahoturi, “Evangelistic Challenge to a Church in a Conflict-Ridden Region: An Assessment of the

Evangelistic Mission of The United Methodist Church in Burundi (1962–2002),” unpublished dissertation (2004), 80. 282

Ibid., 1.

283

Ibid., 80ff.

284

Ibid., 85.

285

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286

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annuelle de Rhodésie de l'Église Méthodiste) (1964), 87ff. 287

Arias et Johnson, The Great Commission (La Grande Commission), 20.

288

La thèse de Joe Samalenge, de la République Démocratique du Congo, sur « La pertinence des

méthodes d'évangélisation utilisées dans l'Église Méthodiste Unie dans le District du Mutare : Une étude de cas du circuit de Hilltop » , thèse non publiée (année académique 2009–2010 ), 31f. 289

Paul Mazumba, «Une critique des méthodes d'évangélisme utilisées par l'UMC à Harare : une étude de

cas du district central d'Harare », thèse non publiée (avril 2010), 34.

147