Symposium sur les taxes à la consommation 2016

1 janv. 2009 - APFF. Symposium sur les taxes à la consommation ─ 2016. Me Jocelyne Mailloux-Martin. Me François Barette. L'Estérel, le 31 mai 2016.
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APFF Symposium sur les taxes à la consommation ─ 2016 Jurisprudence récente

Me Jocelyne Mailloux-Martin Me François Barette L’Estérel, le 31 mai 2016

Décisions : • SNF L.P. c. La Reine, 2016 CCI 12 (CanLII) • Hôpital Santa-Cabrini c. La Reine, 2015 CCI 264 • 7953984 Canada inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCS 1308 ( CanLII) • 2774577 Canada Inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCA 1398 • St-Jacques c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 7293 (Can LII) • Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237 • Gestions Blain inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 9602 (CanLII)

SNF L.P. c. La Reine, 2016 CCI 12 (CanLII)

SNF L.P. c. La Reine, 2016 CCI 12 (CanLII) (« SNF ») 1. Les faits • SNF L.P., la société, est spécialisée dans le recyclage industriel, commercial et résidentiel de métal qu’elle achète de différents fournisseurs et qu’elle vend partout au Canada et ailleurs; • La principale place d’affaires de la société est à Laval; • En 2008, American Iron and Metal Company Inc. (AIM) a fait l’acquisition de SNF devenant une des plus grandes sociétés de recyclage de métal au Canada;

SNF

1. Les faits (suite) • AIM utilise plus de 1 800 fournisseurs; en 2010, son chiffre d’affaires est de près de 2 milliards alors que ses achats sont de 700 millions; • Le métal recyclé provient, notamment, de la production industrielle ou manufacturière, de vielles voitures et produits connexes, de la démolition de bâtiments et d ’objets divers en métal provenant de particuliers; • En 2010, SNF a généré des ventes de 62 millions;

SNF

1. Les faits (suite) • Durant la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2010, la période visée, elle a fait affaires, entre autres, avec douze (12) fournisseurs, détenteurs de numéro d’inscription de taxes en vigueur;

SNF

1. Les faits (suite) • Pour effectuer des fournitures à SNF, les fournisseurs sont tenus d’ ouvrir un compte auprès de la société, afin de remettre une copie étampée par Revenu Québec de la demande d’inscription aux taxes, incluant le numéro d’inscription attribué ainsi que toutes les informations normatives les concernant (adresse, téléphone, la personne ressource et le reste);

SNF

1. Les faits (suite) • Une fois le matériel pesé et après des vérifications de la provenance du métal, la société prépare elle-même une facture à son nom sur des factures remises par les fournisseurs et, procède au paiement en argent comptant incluant les taxes après avoir vérifié la validité des numéros d’inscription;

SNF

1. Les faits (suite) • Suite à un contrôle fiscal, Revenu Québec a refusé les CTI demandés par SNF au montant de 507 329,32 $, a imposé la pénalité de l’article 285 de la LTA et a cotisé les intérêts. La cotisation totalise près de 670 000 $;

SNF

1. Les faits (suite) • Notons que, dans le passé, certains employés de SNF, avaient mis en place et utilisé des sociétés écrans ou prête-noms avant son acquisition par AIM, pour obtenir de fausses factures, permettant à la société de demander, entre autres, des CTI et RTI sans droit; • Ces employés auraient été congédiés et poursuivis en justice par AIM; ainsi, en présence d’un historique de complicité frauduleuse de la part de SNF, la société aurait dû savoir que le même modus operandi se répétait de la part des 12 fournisseurs en litige;

SNF

2. Les questions en litige • La première question formulée par la Cour était celle de savoir jusqu’à quel point l’acquéreur de fournitures ayant versé la TPS et la TVQ à un fournisseur inscrit, mais qui n’est pas le véritable fournisseur, a ou non droit à des CTI, si le présumé fournisseur fait défaut de remettre la taxe perçue au Receveur Général du Canada;

SNF

2. Les questions en litige (suite) • Et, alternativement, si l’acquéreur, dans ces circonstances, n’a pas droit aux CTI réclamés, est-il en droit de recevoir un remboursement pour de la taxe payée par erreur au sens de l’article 261 de la LTA et du paragraphe 296(2.1); • La Cour canadienne de l’impôt a accueilli en partie l’appel de SNF en accordant les CTI demandés pour 10 des 12 fournisseurs en cause en regard de la preuve faite.

SNF

3. La décision A) Revenu Québec a soumis, entre autres : a) que les 12 fournisseurs n’avaient pas les ressources matérielles et humaines pour effectuer les fournitures; b) que le nom de ces fournisseurs apparaissant sur les factures n’était pas celui des véritables fournisseurs en cause; c) que ces fournisseurs étaient des prête-noms et que ceux-ci ne rencontraient pas la définition du terme intermédiaire du sous-paragraphe 3(a) (i) du Règlement;

SNF

3. La décision (suite) • Ainsi, lesdites factures ne rencontraient pas les exigences du paragraphe 169(4) de la LTA et de l’article 3 du Règlement.

SNF

3. La décision (suite) B) SNF a soumis, entre autres : a) que les factures en litige n’étaient pas des factures de complaisance et qu’elle avait effectué l’acquisition des fournitures décrites (ces deux points n’étaient pas en litige); b) que la société avait pris toutes les mesures nécessaires pour bien s’assurer de la validité des numéros d’inscription aux taxes des fournisseurs en cause, qu’elle avait exigé l’ouverture de compte détaillé pour chacun des fournisseurs pour colliger le plus de renseignements les concernant;

SNF

3. La décision (suite) c) que le nom apparaissant aux factures était le nom réel du fournisseur et non pas un prête-nom, une situation bien différente de celle que la société avait vécue auparavant.

SNF

3. La décision (suite) • La Cour a accueilli l’appel de SNF sauf à l’égard des 9 factures d’un des fournisseurs puisque SNF avait omis de colliger des renseignements à son endroit et sur la validité du numéro de taxes utilisé , et, à l’égard d’une seule facture d’un autre fournisseur puisque le numéro d’inscription avait été annulé au moment de l’émission de cette facture. La Cour a maintenu la pénalité de l’article 285 de la LTA quant aux CTI réclamés à l ’égard du fournisseur que SNF avait omis de vérifier;

SNF

3. La décision (suite) • Dans sa démarche, le juge a noté des différences importantes concernant les faits du dossier et ceux résumés dans les décisions des tribunaux supérieurs, notamment, puisqu’en l’instance, les numéros d’inscription apparaissant aux factures étaient bien les numéros attribués et émis aux fournisseurs et dont les factures faisaient état;

SNF

3. La décision (suite) • De plus, comme des efforts raisonnables de vérification avaient été faits par la société, que les factures n’étaient pas des factures de complaisance puisque les services avaient été rendus et que le montant apparaissant aux factures émises fut payé pour ces fournitures taxables, la Cour a conclu que SNF avait droit aux CTI demandés pour la période visée.

SNF

3. La décision (suite) • En ce qui concerne l’argument de la taxe payée par erreur soulevé par SNF relativement aux CTI refusés à l’égard d’un des fournisseurs, la Cour conclut que si les sommes ont été versées par erreur, il s’agit de l’erreur et de la négligence de SNF elle-même, ce qui est un motif suffisant pour la Cour de refuser d’appliquer l’article 261 de la LTA.

SNF

4. Commentaires • Cette décision de première instance souligne l’importance pour un acquéreur de fournitures de se doter de procédures raisonnables de vérification concernant ses fournisseurs et de les appliquer, à savoir, de s’assurer notamment :

SNF

4. Commentaires (suite) a) que le fournisseur possède un numéro enregistrement valide; b) que le numéro existe; c) que le numéro appartienne au fournisseur; d) Et, accessoirement, que les renseignements obtenus soient consignés dans les dossiers de l’acquéreur des fournitures.

SNF

4. Commentaires (suite) • La Cour a souligné qu’il existe des limites dans l’étendue des vérifications que peuvent entreprendre des sociétés pour démontrer qu’elles ont fait preuve de diligence en choisissant leurs fournisseurs, surtout qu’en l’instance, la société, faisait affaires avec un nombre important de fournisseurs;

SNF

4. Commentaires (suite) • La Cour ajoute que les autorités fiscales, dans l’attribution d’un numéro d’enregistrement, ont une part de responsabilité dans le choix de la personne qui devient leur mandataire aux fins de percevoir et de remettre les taxes, d’où l’importance pour elles de procéder à des vérifications sérieuses avant d’émettre ces numéros.

SNF

4. Commentaires (suite) • Le juge a distingué les faits de ce dossier de ceux résumés dans la jurisprudence rendue à l’effet contraire, notamment, par la Cour d’appel fédérale dans Systematix Technology Consultants Inc. c. Canada, 2007 CAF 226 (CanLII) pour donner gain de cause à la société, entre autres, en raison de toutes les vérifications entreprises par cette dernière pour s’assurer de la validité des numéros d’enregistrement aux taxes de ses fournisseurs;

SNF

4. Commentaires (suite) • Il faut noter cependant que la jurisprudence des tribunaux supérieurs ( la CAF dans la décision ci-dessus mentionnée et la Cour d’appel dans GPBR sont d’avis contraire à la présente décision).

Hôpital Santa-Cabrini c. La Reine, 2015 CCI 264

Hôpital Santa-Cabrini c. La Reine, 2015 CCI 264 (« Hôpital SantaCabrini ») 1. Les faits • Durant la période en litige du 14 février 2011 au 24 avril 2012, l’Hôpital Santa-Cabrini, vu la pénurie d’infirmières spécialisées, a contracté avec trois agences de placement pour obtenir le personnel requis pour livrer les soins infirmiers dans certains départements spécifiques de l’Hôpital; • Les agences facturaient l’Hôpital en fonction du nombre d’heures travaillées par les infirmières et des taux horaires convenus;

Hôpital Santa-Cabrini

1. Les faits (suite) • L’Hôpital a présenté ensuite une demande de remboursement de la TPS au motif que la fourniture effectuée par les agences était exonérée; • L’ARQ a refusé la demande de remboursement.

Hôpital Santa-Cabrini

2. Question en litige • S’agissait-il d’une fourniture de services de soins infirmiers exonérée en vertu de l’article 6 de la partie II de l’annexe V de la LTA : « 6. La fourniture de services de soins rendus à un particulier par un infirmier ou une infirmière autorisé […], si les services sont rendus dans le cadre de la relation infirmier-patient. »

Hôpital Santa-Cabrini

3. Décision • La CCI décide que les agences ne fournissent que les droits suivants à l’Hôpital : – le droit d’exiger pour un temps le travail des infirmières « louées » par les agences; – le droit d’exercer une direction et un contrôle sur ce travail. • Ces droits sont des biens incorporels et non des services; • Il n’y a donc pas de services au sens de l’article 6 de la partie II de l’annexe V de la LTA;

Hôpital Santa-Cabrini

3. Décision (suite) • Subsidiairement, la CCI conclut aussi que la fourniture faite par les agences n’est pas exonérée parce qu’il ne s’agit pas de services de soins; • Selon la CCI, il s’agit plutôt d’une fourniture de louage de personnel; • L’appel de l’Hôpital a donc été rejeté mais sans dépens.

Hôpital Santa-Cabrini

4. Commentaires • La qualification de la fourniture en litige comme étant une fourniture de « louage de personnel » soulève la question fondamentale de savoir s’il est possible de louer une personne ou du personnel? • On peut certainement louer les services d’une personne mais avec grand égard, on ne peut pas louer une personne, ni payer un loyer pour l’utiliser. Un contrat de « location de personne » serait très probablement contraire à l’ordre public.

Hôpital Santa-Cabrini

4. Commentaires (suite) • Ne s’agit-il pas ici d’un contrat de louage de services, plutôt que d’un contrat de fourniture de droit d’exiger le travail des infirmières et de droit de supervision et de contrôle de leur travail? • L’Hôpital en a appelé de la décision de la CCI; • L’appel sera entendu par la Cour d’appel fédérale le 22 juin 2016.

7953984 Canada inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCS 1308 ( CanLII)

7953984 Canada inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCS 1308 ( CanLII) (« 7953984 ») 1. Les faits • La demanderesse, en 2014, a présenté à la Cour supérieure une Requête introductive en contrôle judiciaire, en nullité et en jugement déclaratoire concernant les obligations et droits de l’Agence du Revenu du Québec d’enquêter à l’extérieur du territoire québécois selon l’Entente fédérale-provinciale et la Constitution, ci-après la Requête;

7953984

1. Les faits (suite) • Les défendeurs ( dont l’Agence du Revenu du Canada) et les mis-en- cause ont présenté en réponse une Requête en demandant le rejet de la Requête de 793984 au motif que la Requête relève de la compétence exclusive de la Cour canadienne de l’impôt;

7953984

1. Les faits (suite) • Les faits ayant donné ouverture à ce recours sont les suivants : la société exploite une entreprise de vêtements à Montréal. Elle reçoit en mars 2014 un projet de cotisation de Revenu Québec par lequel des rajustements de l’ordre de plus de 912, 352$ seront apportés pour la période comprise entre le 1er décembre 2011 au 28 février 2013;

7953984

1. Les faits (suite) • Les rajustements apportés avaient trait aux CTI réclamés initialement par la société qui lui étaient maintenant refusés en vertu des paragraphes 169(1) et (4) de la LTA, et à la pénalité de l’article 285 pour négligence flagrante;

7953984

1. Les faits (suite) • Ces rajustements portaient sur les factures de deux (2) sous-traitants dont les places d’affaires était situées en Ontario; • Selon Revenu Québec, les sous-traitants n’avaient pas les capacités matérielles et humaines pour rendre les services facturés;

7953984

1. Les faits (suite) • Dans sa Requête, la demanderesse demandait donc à la Cour de déclarer ultra vires la vérification faite par les autorités fiscales provinciales parce qu’elle concernait des biens situés hors du Québec, des revenus générés hors du Québec ou des opérations commerciales qui avaient eu lieu hors du Québec ce qui était, selon la demanderesse , contraire à la Constitution et à l’Entente fédérale-provinciale concernant la TPS et le Protocole d’entente;

7953984

1. Les faits (suite) • La demanderesse exposait que sa Requête que la Cour supérieure avait la compétence pour entendre les litiges visant la Constitution et les ententes intergouvernementales alors que cette compétence n’était pas attribuée à la Cour canadienne de l’impôt;

7953984

1. Les faits (suite) • Quant aux défendeurs et aux mis-en-cause (notamment le Procureur général du Québec), leur position était que la Cour supérieure n’avait pas juridiction, puisque, notamment, la demanderesse tentait de contourner le processus d’appel de cotisation dont la juridiction exclusive appartient à la CCI en cette matière en vertu de l’article 12.1 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt;

7953984

1. Les faits (suite) • Il était également soumis que le litige visait plutôt l’assujettissement fiscal de la société en ce que la demanderesse contestait directement les motifs de la cotisation éventuelle et, que le débat constitutionnel, si la demanderesse décidait de le soulever, pouvait être entendu par la CCI.

7953984

2. La décision • La Cour s’est d’abord penchée sur la nature de la demande pour déterminer sa compétence à entendre le recours;

7953984

2. La décision (suite) • La Cour souligne que même si la société vise à faire déclarer les vérifications effectuées par Revenu Québec ultra vires de la Constitution, de l’Entente et du Protocole et qu’elle assortit son recours d’une demande réclamant une ordonnance afin que les vérifications extraterritoriales cessent, la question de fonds vise réellement l’annulation du projet de cotisation. La société recherche que les CTI lui soient accordés et cette question relève du domaine de l’assujettissement fiscal; • La Cour décline donc juridiction.

7953984

3. Commentaires • Le recours de la demanderesse qui visait à empêcher les autorités fiscales d’émettre des cotisations est assez inusité et original; • Le recours était aussi prématuré puisque la LTA prévoit des mécanismes d’opposition et d’appel pour contester les cotisations émises devant un tribunal qui a juridiction exclusive en la matière, soit la CCI;

7953984

3. Commentaires (suite) • Par ailleurs, il peut arriver à l’occasion que des contribuables s’adressent à la Cour supérieure en matière fiscale, notamment pour obtenir une rectification, un jugement déclaratoire, une révision judiciaire, un contrôle judiciaire ou une action en dommages-intérêts pour abus de pouvoirs puisqu’en vertu de l’article 31 du Code de procédure civile, la Cour supérieure, tribunal de droit commun, a compétence quant à toute demande qui n’est pas attribuée à un autre tribunal.

2774577 Canada Inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCA 1398 (« 2774577 ») 1. Les faits • L’appelante exploitait une entreprise d’abattage de volailles; • Un de ses fournisseurs, M. Fontaine, était un attrapeur de poulets; • En septembre 1994, M. Fontaine s’était inscrit aux fins de la TVQ; • En décembre 1994, le numéro d’inscription de M. Fontaine en TVQ a été annulé;

2774577

1. Les faits (suite) • En février 1999, M. Fontaine a transmis à l’appelante son numéro d’inscription de TVQ annulé de 1994, quand l’appelante a commencé à utiliser ses services; • L’appelante n’a effectué aucune vérification du numéro d’inscription de M. Fontaine entre 1999 et 2006 (par. 24 et 27 du jugement); • Pendant la période en litige d’avril 2012 à mai 2016, l’appelante a réclamé des RTI à l’égard des fournitures de M. Fontaine;

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1. Les faits (suite) • Le 19 juillet 2006, l’ARQ a cotisé l’appelante pour la période en litige, en lui refusant les RTI réclamés à l’égard de M. Fontaine, parce que ce dernier n’avait pas de numéro d’inscription valide; • La Cour du Québec a rejetté l’appel de la contribuable. Cette dernière en appelé.

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2. Question en litige • L’appelante a-t-elle satisfait aux exigences des articles 201, 407 et 415 de la LTVQ?

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3. Décision • Au procès en Cour du Québec et devant la Cour d’appel, l’appelante a invoqué des informations recueillies sur le site internet de l’ARQ, principalement à la veille du procès et durant le procès, démontrant que le numéro d’inscription de TVQ de M. Fontaine était soit « inactif », « inexistant » ou « invalide »;

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3. Décision (suite) • L’appelante a plaidé que cette information était confondante et susceptible de l’induire en erreur; • La Cour d’appel a rejeté l’argument de l’appelante parce que cette dernière n’avait fait aucune vérification du numéro de TVQ de M. Fontaine pendant la période en litige.

2774577

4. Commentaires • Comme le note la Cour d’appel, au paragraphe 31 de son jugement : « Les mots ont un sens, même en droit fiscal. »; • Comme le numéro d’inscription de TVQ de M. Fontaine était inactif, inexistant ou invalide, on pouvait difficilement prétendre que ce numéro était actif, existant ou valide, sans autre forme de vérification;

2774577

4. Commentaires (suite) • Le passage suivant du paragraphe 32 de la décision de la Cour d’appel quant aux obligations de l’ARQ vaut la peine d’être noté et trouvera sans doute application dans d’autres affaires :

2774577

« Il tombe également sous le sens que l’intimée, un service public, a l’obligation de mettre en place un système efficace et d’accès facile afin de rendre largement disponibles les renseignements qui sont exigés des contribuables lorsqu’ils réclament un remboursement en vertu de la LTVQ et du Règlement. Et il est tout aussi certain que se camper dans une attitude soupçonneuse ou chicanière de fermier général n’est de nature ni à promouvoir ni à entretenir l’honnêteté ou la loyauté du plus grand nombre des contribuables, conditions pourtant essentielles au bon fonctionnement d’un système fiscal reposant sur l’autocotisation. Mais le dossier tel qu’il est constitué ne permet pas d’en dire plus sur cet aspect des choses. » (Soulignements ajoutés)

St-Jacques c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 7293 (Can LII)

St-Jacques c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 7293 (Can LII) (« St-Jacques ») 1. Les faits • M. St-Jacques en appelle de deux (2) cotisations, l’une établie en TVQ pour la taxe de vente perçue et non remise et, l’autre en impôt, pour des déductions à la source non remises par la société 7668112 Canada Inc., faisant affaires sous le nom BMS Équipements, à titre d’administrateur de la société; • BMS a été incorporée en 2010 en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions et, est immatriculée au Québec; • BMS exerce des activités économiques, soit la location de machines Interact;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • La preuve est à l’effet que le requérant était, en tout temps pertinent, membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec depuis mai 2012; et, il détenait depuis 1981 le titre de CMA; • Après avoir exercé sa profession dans la fonction publique pendant 30 ans, le requérant décide d ’offrir ses services comptables à une clientèle externe qu’il dessert de son domicile. Il exploite également une entreprise dans le domaine de la construction;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • En 2010, il accepte d’aider le couple Brunet dans le but de démarrer l’entreprise BMS. Il savait que l’un des conjoints avait eu dans le passé des difficultés financières et qu’il a des dettes envers les Agences du revenu; • En octobre 2010, BMS est incorporée par M. St-Jacques qui détient 50% des actions dans le capital social de la société, l’autre 50% est détenu par la conjointe du couple Brunet; le nom de M. Brunet n’apparait pas;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • Seule madame Brunet apparaît comme administratrice au Registre d’Industrie Canada et au Registre des entreprises du Québec. Cette information demeurera inchangée jusqu’à la dissolution de la société alors qu’au registre du Québec, elle sera modifiée deux fois; • Dans la lettre d’intention de cotiser l’administrateur ainsi que dans deux correspondances qu’il adresse à Revenu Québec, le requérant indique n’avoir jamais été administrateur de BMS;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • Cependant, en mars 2011, le requérant produit au Registre québécois, une déclaration modificative non signée ,dans laquelle son nom est ajouté comme administrateur et président; • En septembre 2011, une autre modification fait état du retrait du requérant comme administrateur, celui-ci ayant démissionné le 1er août 2011;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • Cette lettre de démission indique que le requérant démissionne s’il est considéré comme administrateur par tout organisme; • La question devant la Cour était celle de déterminer si M. St-Jacques était administrateur de la société pendant les périodes en litige, soit jusqu’au 7 février 2012 puisque celui-ci alléguait avoir démissionné de ses fonctions le 1er août 2011;

St-Jacques

1. Les faits (suite) • Subsidiairement, M. St-Jacques a soumis que s’il se voyait attribuer le statut d’administrateur, il devait bénéficier de la défense de diligence raisonnable puisque, selon ses prétentions, il n’avait pas eu connaissance des omissions de la société et qu’il n’aurait pas été en mesure d’y remédier;

St-Jacques

2. La décision • D’entrée de jeu, la Cour souligne que la présomption du Ministre a été renversée, vu l’avis de démission du requérant et, que le fardeau de preuve repose sur Revenu Québec pour justifier les cotisations;

St-Jacques

2. La décision (suite) • Or, la preuve administrée a permis au juge de conclure en la qualité du requérant comme administrateur en tout temps pertinent, en ce que le requérant a déclaré au registre des entreprises québécois en mars 2011 être administrateur de BMS. Même avant de procéder à cette inscription, le requérant a déclaré en 2010 à la Banque CIBC détenir le titre de président et de secrétaire de BMS; en juin 2011, le requérant signe une demande d’inscription aux taxes à titre de président et, par la suite ,il signe un bordereau de paiement pour Revenu Québec et un chèque pour la période de déclaration de juin 2011;

St-Jacques

2. La décision (suite) • De plus, en juillet 2011, par l’entremise de sa société de construction, prête 15 000$ à BMS sans que le requérant puisse expliquer pourquoi; • Par la suite, le requérant apprend que l’un des chèques transmis à Revenu Québec est retourné pour insuffisance de fonds;

St-Jacques

2. La décision (suite) • Le requérant prépare, alors, sa lettre de démission datée du 1er août 2011 et la vente de ses actions, puis, il a fait rétroagir cette démission au mois de mars 2011, tel qu’indiqué à la déclaration modificative de septembre 2011; • En outre, les 2 employées de BMS ont confirmé que le requérant avait agi, dans les faits, comme administrateur jusqu’à la fermeture de BMS en 2013 en ce qu’il avait accès au compte bancaire de l’entreprise et que rien dans les faits n’avait changé;

St-Jacques

2. La décision (suite) • Pour ce qui est de la défense de diligence raisonnable, le juge a conclu que ce moyen ne pouvait être retenu puisque le requérant, qui avait admis connaître les lois fiscales et les obligations incombant à un administrateur, se serait empressé de cacher son implication en tant qu’administrateur en faisant rétroagir, notamment, la date de sa démission au lieu de voir à mettre en place un système de contrôle pour prévenir les défauts subséquents de paiement, d’autant plus que le requérant était membre en règle de l’Ordre des CMA et qu’il possédait une expérience dans l’administration d’entreprises;

St-Jacques

2. La décision (suite) • Les cotisations ont donc été maintenues.

St-Jacques

3. Commentaires • Les faits de ce dossier font voir l’Importance accordée par la Cour à la crédibilité des témoins. En l’instance, le récit du requérant ne concordait pas avec la preuve documentaire produite et les explications données étaient insatisfaisantes.

St-Jacques

3. Commentaires (suite) • D’ailleurs, le juge (paragraphe 65 de la décision) indique qu’il aurait été beaucoup plus simple que le requérant ait admis son statut d’administrateur jusqu’en août 2011 et, qu’il explique les motifs de sa démission et de la vente de ses actions à cause du comportement de M. Brunet, lequel refusait de faire les remises, malgré ses recommandations. • Pour le juge, le requérant en tentant de couvrir ses traces par l’utilisation des différentes manœuvres, a eu pour effet d’affaiblir sa propre crédibilité.

Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237

Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237 (« Stamatopoulos ») 1. Les faits • Le demandeur exploitait une entreprise dans le domaine du vêtement; • Lorsque le demandeur rencontrait un sous-traitant pour la première fois, il lui demandait la preuve du certificat d’enregistrement en TPS et TVQ; • Par la suite, avant de conclure une entente avec un soustraitant, le demandeur vérifiait les numéros de taxes (TPS et TVQ) du sous-traitant afin de s’assurer qu’ils étaient en vigueur;

Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237 (« Stamatopoulos ») 1. Les faits (suite) • Par la cotisation pour la période en litige du 2 mars 2006 au 31 août 2009, l’ARQ a refusé au demandeur ses RTI à l’égard des transactions effectuées avec 36 sous-traitants faisant des travaux de couture et de confection de vêtements; • Essentiellement, l’ARQ a prétendu que les factures soumises par le demandeur étaient fausses parce que les fournitures de services avaient été acquises d’autres fournisseurs que ceux indiqués sur ces factures;

Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237 (« Stamatopoulos ») 1. Les faits (suite) • L’ARQ a reconnu que les biens et services à l’origine des RTI réclamés avait été fournis au demandeur dans le cadre de ses activités commerciales.

Stamatopoulos c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 13237 (« Stamatopoulos ») 2. Question en litige • Il s’agissait de déterminer l’étendue des obligations du demandeur, eu égard à ce qu’il doit vérifier ou valider auprès des sous-traitants afin de pouvoir réclamer les RTI, dans la foulée de la décision GPBR de la Cour d’appel du Québec (2015 QCCA 1402).

Stamatopoulos

3. La décision • Après avoir entendu 28 témoins au procès, dont 9 pour le contribuable et 19 pour l’ARQ (8 sous-traitants et 11 vérificateurs), M. le juge Bourgeois de la Cour du Québec a rendu un jugement très étoffé accueillant l’appel du demandeur. • La Cour du Québec a conclu que le devoir de vérification du demandeur pour respecter les exigences légales et réglementaires prescrites se limitait à vérifier l’existence légale du fournisseur, que le numéro de taxe soit valide, en vigueur et attribué à ce fournisseur et que les renseignements prescrits devant apparaitre sur les factures soient bons. (par. 146 et 203)

Stamatopoulos

3. La décision (suite) • La Cour du Québec a conclu que ce devoir de vérification du demandeur n’incluait pas de s’assurer que les soustraitants dont les noms apparaissent sur les factures se sont acquittés eux-mêmes ou non de faire le travail, ou encore de s’enquérir auprès de ces sous-traitants de l’identité exacte des individus ou des personnes qui ont travaillé pour ou en lieu et place du sous-traitant.

Stamatopoulos

3. La décision (suite) • À propos de la gestion du risque effectuée par l’ARQ, la Cour souligne que:  Des fraudeurs, c’est-à-dire des administrateurs « de facto », inconnus, qui géraient secrètement les sous-traitants, ont été capables d’opérer pendant un certain temps avant que l’ARQ retire aux sous-traitants en question les numéros d’enregistrement de TVQ;  Le fait que les sous-traitants ne respectaient pas leurs obligations fiscales, était une information confidentielle que seul le gouvernement détenait;

Stamatopoulos

3. La décision (suite)  En aucun temps l’ARQ n’a avisé le demandeur, en temps opportun, que les sous-traitants avec qui il faisait affaires représentaient un risque;  Pendant toute la période, l’ARQ continuait de maintenir en vigueur les numéros de taxe, et ce, même si les sous-traitants étaient des délinquants fiscaux;  L’administration fiscale, qui détenait ces informations (confidentielles) depuis longtemps, a fait défaut de gérer son propre risque.

Stamatopoulos

4. Commentaires • La décision contient aussi de nombreux autres passages intéressants relativement:  Au fardeau de preuve (par. 81 à 91, 157 à 159)  Aux hypothèses factuelles concernant les tiers (par. 92 à 101, 171)  Aux conditions d’admissibilité pour pouvoir réclamer des RTI (par. 102 à 108)

Stamatopoulos

4. Commentaires (suite)  Aux formulaires VDZ et aux mesures pour combattre l’évasion fiscale dans l’industrie du vêtement (par. 111 à 119)  À la décision GPBR (par. 134 à 151)  Aux règles de preuve (par. 165, 166, 169) • Revenu Québec a porté la décision en appel.

Gestions Blain inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 9602 (CanLII)

Gestions Blain inc. c. Agence du revenu du Québec, 2015 QCCQ 9602 (CanLII) (« Gestions Blain ») 1. Les faits • Alain Blain, machiniste, est seul actionnaire de Gestions Blain • En 1996, celui-ci fonde la société Usinage Express inc., laquelle se spécialise dans l’usinage des pièces mécaniques; • Il est actionnaire, à part égale avec son beau-frère; • L’une de ses clientes, la société Gonderflex, devient actionnaire en 2003; chacun détient alors 33% des actions;

Gestions Blain

1. Les faits • En 2004, le beau-frère vend ses actions à Gonderflex. Malgré les promesses de ce dernier faites à Blain que la répartition des actions serait à part égale, le président de Gonderflex détiendra deux tiers des actions; • En 2008, Blain décide de vendre ses actions dont la valeur, après évaluation, est de 300 400 $; • Blain devait recevoir 100 000 $ à la signature du contrat, 140 000 $ vers la fin novembre 2008 et 60 000 $ en biens divers;

Gestions Blain

1. Les faits • A la signature du contrat le 4 novembre 2008, Blain reçoit le montant de 100 000 $ plus les biens;

Gestions Blain

1. Les faits (suite) • La requérante faisait face à un besoin d’obtenir le solde du prix de vente pour démarrer une nouvelle entreprise; la société Gonderflex suggère que Gestions Blain lui fournisse quatre (4) factures totalisant 138 850$ avant taxes et 156 726$ après TPS et TVQ pour apparemment des commissions en lien avec de la vente d’équipements à diverses clientes de Gonderflex; les paiements de ces factures par chèques sont déposés au compte bancaire de Gestions Blain en 2008 et, la somme représente le solde du prix de vente attendu;

Gestions Blain

1. Les faits (suite) • Après consultation avec son comptable, celui-ci l’informe qu’il n’aurait pas dû émettre ces factures et lui suggère d’émettre des notes de crédit pour les annuler; • N’ayant reçu aucun accusé-réception, Gestions Blain n’a pas remboursé les montants de taxes perçues sur ces factures; • Alain Blain déclare la somme de 300 000$ à titre de gain en capital dans sa déclaration de revenus pour l’année 2008; et Gestions Blain ne déclare aucun revenu;

Gestions Blain

1. Les faits (suite) • Suite à un contrôle fiscal en 2011 chez Gonderflex, les RTI réclamés sur ces factures ont été refusés puisque, notamment, le numéro de taxes de gestions Blain était invalide;

Gestions Blain

1. Les faits (suite) • Revenu Québec constate que Gestions Blain a omis de remettre les montants de la taxe perçue et cotise Gestions Blain pour des revenus se chiffrant à 138 850 $ et, émet une cotisation à M. Blain pour le montant de 156 727 $ à titre d’avantage à un actionnaire en vertu de l’article 111 de la Loi sur les impôts malgré les explications de Blain;

Gestions Blain

2. La décision • Le juge détermine que Revenu Québec devait établir les cotisations en litige selon la situation réelle des parties et en fonction de la relation juridique véritable entre les parties; • La Cour indique que dans leur rôle de cotiseur, les autorités fiscales ont l’obligation d’établir les cotisations en fonction des transactions réelles qui sont intervenues de bonne foi et non pas sur des états financiers erronés;

Gestions Blain

2. La décision • En l’instance, la situation a été expliquée par les différents témoins, lesquels n’ont pas été contredits, et dont les témoignages étaient crédibles; • Pour la Cour, les parties n’avaient pas voulu tromper les autorités fiscales même si techniquement les factures en cause étaient des factures fausses, les services n’ayant pas été rendus; • Le juge a donc annulé les cotisations.

Gestions Blain

3. Commentaires • Le juge s’est-il bien dirigé en droit en tenant compte de la réalité économique de l’opération plutôt que de s’en tenir strictement aux effets juridiques de la transaction apparente? • Souvent, cette ligne de démarcation peut être assez ténue lors d’un contrôle fiscal;

Gestions Blain

3. Commentaires • Soulignons, qu’en l’instance, la preuve non contredite et crédible a démontré que les parties au litige n’avaient pas posé de gestes pour profiter d’une situation fiscale qui les auraient avantagées. Dans ces situations, le ministère aurait été probablement fondé de cotiser la situation apparente (voir entre autres, l’arrêt de la Cour d’appel dans Dussault-Zaidi 1996 CanLII 5880 (QC CA)).