Ressources naturelles stratégiques - Université d'Orléans

18 juin 2015 - 155 mm de Nexter pour le Caesar et l'obus KSTAM (Korean Smart Top-Attack munition) de 120 mm de l'Allemand Diehl ... tantale dans les armes de petit calibre. 14. Christophe-Alexandre ... 19/06/2015. Matériaux stratégiques et armement : à quoi sert le béryllium ? 20. Christophe-Alexandre PAILLARD ...
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Ressources naturelles stratégiques : conséquences pour la France et sa défense Christophe-Alexandre PAILLARD Directeur du domaine « armement et économie de défense », IRSEM Journée « ressources minérales », OSUC 18 juin 2015

Introduction

Propos introductifs

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Propos introductifs Deux points introductifs pour comprendre l’ampleur du défi : •

Les produits industriels de haute ou de moyenne technologie intègrent de plus en plus de composants à base de métaux, en particulier les équipements

militaires. •

Les marchés possèdent des particularités intéressant la défense : nature et structure des marchés; jeu des acteurs économiques et financiers; niveau de

risque pour tel ou tel type de matière; localisation des ressources; maintien de filières industrielles clefs; etc.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Propos introductifs : revenir à Mendeleïev (tableau tiré du Sciences et Vie 1.136 de mai 2012)

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Pour la Défense, qu’est-ce qui est critique ? Qu’est-ce qui est stratégique ? • •







Au-delà des matériaux ou des minerais, le monde de la défense s’intéresse surtout aux métaux. Le caractère stratégique d’un métal est en réalité lié à son importance dans la chaîne de production, à son niveau de rareté et à sa position géographique. Au regard de ces différents critères, sa dimension stratégique est variable dans le temps, selon les applications techniques qui en sont faites, les évolutions de l’offre et les tensions géopolitiques que peuvent connaître ponctuellement des pays producteurs. Si un métal est absolument indispensable à des filières industrielles spécifiques, concentré géographiquement dans une région à haut potentiel géopolitique et faisant l’objet de phénomènes de rareté, le métal est alors considéré comme critique et pas seulement stratégique. C’est le cas pour les métaux utilisés dans les technologies des énergies renouvelables, principalement le lithium pour les batteries électriques ou le néodyme (il est l’un des 17 métaux de la famille des terres rares) pour les éoliennes.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Le stratégique s’applique-t-il à tout le monde ? •

Le caractère stratégique d’un matériau est à la fois large et évolutif.



Les matières stratégiques désignent des minerais (métaux ou autres) qui sont utilisés dans l’industrie pour leurs propriétés intrinsèques. Leur importance dans les processus

industriels de fabrication de produits finis les rend « stratégiques ». •

Pour un pays producteur de matières premières, un minerai est stratégique si son importance dans les exportations du pays rend ce pays dépendant de cette source de revenus. A titre d’exemple, pour le Chili, le cuivre et le lithium sont stratégiques.



De nombreux experts considèrent que 28 substances minérales sont particulièrement stratégiques pour le fonctionnement de l’économie mondiale. On retrouve dans cette catégorie le cuivre, le plomb, le zinc, le platine, l’uranium ou le titane. Mais ce type de

classification ne dit rien en réalité sur l’importance de telle ou telle ressource naturelle. •

Pour l’industrie de défense, par exemple, 31 métaux ont une importance « stratégique » ou « critique ».

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Propos introductifs : tout dépend de l’utilisation dans les technologies •

On peut qualifier de stratégiques les substances rares du point de vue géologique et qui sont en même temps d’une haute importance pour la fabrication de composants nécessaires aux équipements de haute technologie. De nombreux alliages de haute qualité sont fabriqués avec des ressources dites stratégiques et sont utilisés dans des secteurs de pointe comme l’industrie militaire.



Le manganèse est un bon exemple de matière « stratégique ». Pour les Etats-Unis, il est stratégique parce qu’il est indispensable à son industrie et parce qu’ils ne disposent pas de gisements nationaux. Le Gabon est un producteur majeur. L’entreprise française Eramet y est un producteur majeur. Le Gabon et Eramet font donc partie des éléments permettant de qualifier le manganèse de « stratégique ». Autre exemple, le rhénium. Il est indispensable et donc stratégique pour les motoristes américains. Il n’est que faiblement utilisé par Safran pour ses moteurs. Il n’est donc pas « stratégique » pour la France comme il l’est pour les motoristes américains.



Les indices boursiers Reuters CRB ou Dow Jones AIG Commodity index permettent de suivre l’évolution des cours : les aspects « stratégiques » sont évolutifs dans le temps et jouent sur les prix et la « rareté ».

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Plan

I. Matériaux stratégiques et armement. II. Matériaux

stratégiques

et

vulnérabilités

stratégiques : la vision de la Défense.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Première partie

I. Matériaux stratégiques et armement.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Des applications multiples pour les forces

Acier à haute résistance cinétique (tungstène, molybdène), aluminium Aciers haute tolérance, chrome (antioxydant), titane, tantale (parties chaudes), tungstène (munitions) + polymères 19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : les programmes militaires concernés C’est une problématique qui intéresse les industries de défense et les forces armées. Parmi les usages spécifiques des matières stratégiques utilisées dans l’industrie de défense, on peut citer :



Le cobalt qui est utilisé dans les réacteurs et les turbines.



Le cuivre qu’on retrouve dans les torpilles.



Le nickel dans l’électronique.



Le chrome dans les trains d’atterrissage.



L’aluminium dans les structures des avions et des hélicoptères.



Le niobium dans de nombreux alliages avec l’acier, par exemple dans les moteurs d’avions ou d’hélicoptères.



Le manganèse dans l’ensemble de la filière électronique.



Le platine dans les contacts électriques.

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Matériaux stratégiques et armement : le F22 Raptor américain Fuselage : structure et revêtements en titane

39% de titane, 16% d’aluminium

Ailes : nombreux composants en titane.

Fuselage central : revêtements, compartiments 19/06/2015

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Matériaux stratégiques et armement : à quoi sert le tantale dans l’armement ? •

Le tantale est utilisé dans l’élaboration de superalliage comme additif. Ces alliages servent surtout dans des milieux très exigeants thermiquement ou/et chimiquement; ce qui explique son importance pour la création des blindages, en particulier dans les

armements terrestres et dans les protections contre les émissions radioactives (comme le plomb). •

On retrouve du tantale dans les munitions comme les obus SMArt 155 de GIWS (GIWS mbh ou Gesellschaft für Intelligente WirkSysteme mbH est une entreprise allemande conjointe entre Rheinmetall et Diehl BGT Defence), l’obus intelligent anti-char Bonus de 155 mm de Nexter pour le Caesar et l’obus KSTAM (Korean Smart Top-Attack munition) de 120 mm de l’Allemand Diehl développé pour l'armée coréenne.



Le tantale a en effet un coefficient de perforation très élevé, expliquant son emploi dans les obus.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : le tantale dans les armes de petit calibre •









Le coltan est un minerai duquel on extrait le tantale, ensuite usiné pour des produits de haute technologie. Les composants faits à partir de tantale englobent les téléphones portables, les lecteurs MP3, les ordinateurs, les armes sophistiquées de petit calibre, l’industrie spatiale, les écrans plasma, les GPS, etc. Le corner shot est un fusil d’assaut créé par Amos Golan. Créé au début des années 2000 pour les forces spéciales en milieu hostile et confiné, il est utilisé par les Etats-Unis et Israël. Le tantale est intégré à des alliages avec, entre autre, du tungstène. Ces alliages permettent d’éviter une usure trop rapide des pièces liée aux températures et à la corrosion (munitions et déclenchement du feu). L’oxyde de tantale (Ta2O5) est aussi utilisé en couche mince pour les verres spéciaux des appareils de vision à haut indice de réfraction avec une faible dispersion. Mélangé au verre, il diminue les aberrations de vision.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : le tantale est très concentré au Congo



• • •

Le tantale se trouve dans un minerai appelé tantalite et dans des formes plus complexes de minerais qui mélangent des oxydes et du niobium dans le coltan. Le tantale résiste aux très hautes températures et à la corrosion. Le tantale est à 80% meilleur conducteur que le cuivre. Sa concentration au Congo (RDC) dans les mines de coltan en fait une question stratégique de grande importance. 80% se trouve au Kivu.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : production de lithium pour les batteries





La forte concentration du lithium dans le désert d’Atacama rend l’Argentine et le Chili incontournables. La Bolivie, avec 40% des réserves mondiales, ne produit pas de lithium pour des raisons « politiques ».

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : les terres rares et la défense (source : EGE)

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Matériaux stratégiques et armement : où creuse-t-on ? L’Inde pays prometteur ?

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Matériaux stratégiques et armement : JSF et béryllium Le F35 JSF intègre de nombreux composants en alliages cuivre-béryllium : Electro-Optical Targeting System (EOTS)

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Matériaux stratégiques et armement : à quoi sert le béryllium ?

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : le cas du béryllium •

Le béryllium est un élément chimique de symbole Be et de numéro atomique 4. Dans le tableau périodique, il est le premier représentant des métaux alcalino-terreux. Le béryllium est un métal alcalino-terreux d'aspect gris acier. Il est léger, fragile et toxique. Il est plus léger et six fois plus résistant que l’aluminium. Environ 200 tonnes sont produites dans le monde. Il a le point de fusion le plus élevé de tous les métaux légers.



Il est principalement employé comme agent durcissant dans certains alliages, notamment le moldamax, un alliage de cuivre-béryllium utilisé pour la fabrication de moules pour matières plastiques. Le béryllium est également utilisé dans des réacteurs nucléaires, comme composant de céramiques industrielles, en micro-électronique, ainsi qu’en dentisterie. Ses alliages sont à la fois légers et résistants à la chaleur. Ils possèdent un faible coefficient de dilatation. Le béryllium est incorporé dans certains alliages spéciaux pour des matériaux soumis à d’importants frottements thermiques.



Dans la nature, on le trouve principalement sous forme d’oxydes ou d’aluminosilicates complexes appelés béryls, dont les représentants les plus connus sont l’émeraude et l’aigue-marine. On l’exploite surtout à partir silicates, bertrandite Be4Si2O7(OH)2 ou béryl Be3Al2Si6O18. Les principales mines sont aux Etats-Unis (Utah, 88%), en Chine (10%) et au Mozambique (1%). Aucune n'est ouverte en Europe.

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Matériaux stratégiques et armement : 88% de la production mondiale à Spor mountain

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Matériaux stratégiques et armement : l’usinage du béryllium et ATMOSTAT •

Fondée en 1973, ATMOSTAT crée des procédés d’assemblage de « matériaux métalliques en feuille très minces » de titane pour des objets de grande taille, des liners métalliques destinés à des réservoirs haute pression en matériaux composite-carbone.



C’est une entreprise unique en France et en Europe qui usine le béryllium. ATMOSTAT fait partie du groupe ALCEN qui compte 28 PME technologiques de haut niveau dont beaucoup sont soutenues par la DGA à travers ses contrats et des dispositifs de soutien à l’innovation. ATMOSTAT emploie 80 personnes.



Sur le projet ITER de réacteur expérimental de fusion thermonucléaire, ATMOSTAT assure la fabrication de la protection de la chambre à vide et des aimants supraconducteurs. Elle fabrique la paroi démontable positionnée directement face au plasma capable d’encaisser des températures supérieures à 150 millions de degrés Celsius. Le choix du Béryllium a été fait pour ses propriétés physiques exceptionnelles.

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Matériaux stratégiques et armement : les réalisations d’ATMOSTAT Les structures mécano-optique en alliage béryllium/aluminium

Le cœur d’ITER

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : Jean-Yves Le Drian et ATMOSTAT le 5/09/12

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : l’expertise défense Deux exemples concrets d’expertise réalisées : •

Le graphite : le graphite a une large utilisation industrielle, comme le nucléaire, l’aérospatiale, les piles à combustible, les batteries au lithium, le photovoltaïque, les fours réfractaires, la métallurgie, etc. La chaîne d’approvisionnement du graphite naturel est considérée comme peu critique tandis que les procédés de fabrication les plus aboutis du graphite synthétique (élément stratégique) ne sont maîtrisés que par une poignée d’industriels. Ces producteurs français doivent donc être préservés : Imerys/Timcal Carbon mais surtout Mersen (ex CarboneLorraine), qui détient un savoir-faire unique lié au carbone isostatique. En février 2010, le graphite a été classé par l’Union européenne parmi les 14 matières les plus critiques. Le COMES a demandé un rapport public sur ce minéral paru en juillet 2012.



Le lithium : c’est un élément stratégique employé par l’industrie de pointe civile et militaire. Les réserves mondiales sont abondantes mais géographiquement concentrées et exploitées par quelques acteurs argentins, chiliens, australiens, américains, canadiens et chinois. La Chine (dont les besoins en lithium excèdent la production nationale), la Corée du Sud et le Japon ont déjà contracté des accords d’exclusivité avec certains de ces producteurs. En 2013, la prise de contrôle de l’important opérateur minier australien Talison Lithium par le groupe chinois Chengdu Tianqi a changé la donne stratégique. La France doit aboutir à des accords futurs, essentiellement avec le Chili et l’Argentine, où les ressources sont abondantes et faciles à extraire, ainsi qu’avec l'Australie et le Canada.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : les actions financières de la Défense La DGA a engagé les actions suivantes :



RAPID pour « Régime d’Appui pour l’Innovation duale »: il soutient des projets en R&D et en R&T avec de forts potentiels technologiques, à destination des PME et dans les secteurs d’application militaire. Ce programme dispose de 50 M€ en CP en 2014.



ASTRID pour « Accompagnement Spécifique des Travaux de Recherches et d’Innovation

Défense » est ouvert à tous dans les domaines de la R&D. Les projets doivent avoir des applications duales dans des domaines très exploratoires, touchant un niveau élevé de maturité technologique, classés de 1 à 4. Une entreprise doit proposer, dans le cadre d’ASTRID, de travailler avec un laboratoire de recherche ou un institut de recherche pour prétendre obtenir un soutien. •

Pour les niveaux de maturité technologique moins élevés, il existe la « Politique et Objectifs scientifiques » présentant les neuf domaines scientifiques qui intéressent le ministère français de la défense.



Pour des niveaux technologiques plus élevés, il existe un « Plan Stratégique en matière de Recherche et Technologie » de la DGA en R&T.



Tous ces outils servent à la DGA pour les matériaux stratégiques.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et armement : maîtriser les filières industrielles Différents dispositifs existent : •

Le partenariat DGA/Agence nationale de la recherche (ANR) : la DGA cofinance certains programmes de l’ANR qui soutient des projets de recherche fondamentale ou industrielle (sécurité...) dans le cadre d’appels à projets (AAP). La DGA participe à l’expertise et au

financement de certains de ces AAP. •

Les pôles de compétitivité : la DGA est le 2ème contributeur au fonds unique interministériel (FUI) qui subventionne des projets R&D collaboratifs labellisés par un pôle de compétitivité.



Horizon 2020, qui est le 8ème PCRD (Programme-Cadre de Recherche-Développement), est le principal instrument de l’Union européenne pour financer la recherche en Europe. Ce programme pluriannuel aide à organiser et soutenir financièrement la coopération entre universités, centres de recherche et industries - y compris les PME.



L’Agence européenne de défense (AED) a notamment pour objectif de favoriser la recherche, en vue de renforcer le potentiel industriel et technologique européen dans le domaine de la défense. Elle a créé un groupe matériaux. Un appel d’offre européen a été lancé en octobre 2014.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Deuxième partie

II. Matériaux stratégiques et

vulnérabilités stratégiques : la vision de la Défense.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : des débats mondiaux •

La thématique des matériaux stratégiques est devenue clef dans le monde. En 2013, les Etats-Unis ont présenté leur « National Strategic and Critical Minerals Production Act », une proposition de loi qui visait à développer leurs ressources nationales et à accroître leur sécurité d’approvisionnement pour quatre secteurs clefs : défense, énergie, chimie et électronique, comme précisé dans le lien suivant : https://www.govtrack.us/congress/bills/113/hr761/text. Le 18 septembre 2013, la Chambre des Représentants a voté le texte par 246 voix contre 178. La Commission de l’énergie et des ressources naturelles du Sénat a également voté ce texte le 29 octobre 2013. Lisa Murkowski (R-Alaska), Ron Wyden (D-Orégon), Mark Udall (D-Colorado) and Dean Heller (R-Nevada), parmi d’autres, soutenaient ce texte.



Des mesures ont été prises au sein de l’OTAN et de l’UE: la Commission européenne a présenté un projet de règlement de type loi « Dodd Frank » sur les minerais de conflit. La Commission a préparé une nouvelle cartographie des matériaux stratégiques présentée à Athènes le 20 juin 2014. L’OTAN a créé au sein des groupes AVT des équipes d’experts sur « Impact of Scarcity of Materials on Military Structural, Mechanical, Propulsion and Power Systems » (groupe AVT-196), comme le précise le site suivant: http://www.cso.nato.int/Activity_Meta.asp?Act=1851

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : définir les matériaux clefs •

Quatre auteurs américains (E. Graedel, E. M. Harper, N. T. Nassar et Barbara K. Reck) ont présenté une étude sur les pistes alternatives aux matériaux stratégiques, en particulier les métaux utilisés dans notre vie quotidienne. Cette étude est la suivante : « On the materials basis of modern society PNAS 2013 (Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America)”.

Voir : http://www.pnas.org/content/early/2013/11/27/1312752110/suppl/DCSupplemental •

Ils ont conclu que la complexité croissante des matières premières transformées de nos sociétés industrielles en produits industriels haut de gamme nous conduit dans une impasse.

En fait, le besoin de maintenir le même niveau de performance pour les matériaux tout au long de leur cycle de vie est scientifiquement dur à conserver. Plus exactement, préserver des processus industriels constants sur les métaux et leurs alliages, dans un contexte de raréfaction relative croissante des matériaux, est aussi un défi important pour nos sociétés

et notre sécurité. •

En fait, le potentiel de substitution des métaux les uns aux autres est faible et limité, ce qui accroît le besoin ou le sentiment de renforcer notre sécurité d’approvisionnement.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : évaluer le risque minier •





Les Etats-Unis sont de plus en plus dépendants de minerais importés en provenance d’Afrique, d’Asie, d’Australie ou d’Amérique latine pour leurs industries de pointe et de défense. Afin de limiter les risques de rupture de leurs approvisionnements, ils cherchent à mettre en place une stratégie globale de sécurisation de ces approvisionnements en matériaux stratégiques et à moins dépendre des ressources importées de Chine. Le rapport publié en juin 2012 intitulé "Critical Metals & National Security" de l’American Resources Policy Network fait donc le point sur la sécurisation de leurs approvisionnements en matériaux stratégiques pour leurs industries civile et de défense de haute technologie. Il appelle à une plus grande coordination des efforts gouvernementaux américains vis-à-vis de cette question des matières stratégiques. Il propose des mesures concrètes, comme la constitution de stocks stratégiques nationaux, ou le développement d'exploitations minières sur le territoire américain ou dans des pays stratégiquement proches des Etats-Unis. Les inquiétudes des autorités américaines pour leurs approvisionnements en matières stratégiques se sont accrues après l’incident naval du 7 septembre 2010 entre un chalutier chinois et deux garde-côtes japonais autour des îles contestées Diayou (Senkaku en japonais) situées au nord de Taiwan. A la suite de cet incident et en représailles contre l’arraisonnement de son chalutier, la Chine a annoncé qu'elle souhaitait désormais limiter l’exportation de ses terres rares destinées aux industries de pointe, japonaises ou américaines.

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : des répartitions inégales

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le projet américain 113th CONGRESS 1st Session H. R. 761 IN THE SENATE OF THE UNITED STATES September 19, 2013 Received; read twice and referred to the Committee on Energy and Natural Resources AN ACT To require the Secretary of the Interior and the Secretary of Agriculture to more efficiently develop domestic sources of the minerals and mineral materials of strategic and critical importance to United States economic and national security and manufacturing competitiveness. 3.Definitions In this Act: Strategic and critical minerals The term strategic and critical minerals means minerals that are necessary— • for national defense and national security requirements; • for the Nation’s energy infrastructure, including pipelines, refining capacity, electrical power generation and transmission, and renewable energy production; • to support domestic manufacturing, agriculture, housing, telecommunications, healthcare, and transportation infrastructure; or • for the Nation’s economic security and balance of trade. 19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : l’UE réagit en 2008 •

Le 4 novembre 2008, la Commission européenne a proposé de lancer une stratégie qui doit permettre aux entreprises européennes d’accéder aux marchés mondiaux des

minerais de manière ouverte. La Commission européenne a établi une liste exhaustive des matières qu’elle juge stratégiques ou critiques pour l’industrie européenne. •

Le 17 juin 2010, la Commission européenne a publié un rapport qui présente les types de métaux ou ressources naturelles particulièrement nécessaires à l’industrie européenne :

antimoine, béryllium, cobalt, fluorine, gallium, germanium, graphite, indium, magnésium, niobium, platine, terres rares, tantale et tungstène. •

Ce rapport est disponible sur le site suivant : http://ec.europa.eu/enterprise/policies/raw-materials/critical/index_en.htm



Un exemple significatif, le monde produit environ 150 tonnes de gallium par an, dont 83% produits en Chine, très largement utilisé pour fabriquer des panneaux solaires. Les nouvelles technologies consomment 28 tonnes par an. Mais, en 2030, la demande devrait être de 603 tonnes par an, quatre fois la production mondiale actuelle. Une telle évolution est parfaitement irréaliste au vu des réserves connues à travers le monde.

19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : que se passe-t-il en Europe ? •

La Commission européenne a lancé le 11 décembre 2013 la « responsible trading strategy for minerals from conflict zones ».

Voir : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-14-218_en.htm •

L’OTAN a proposé la création d’un « scarcity of strategic materials and implications for NATO’s military capability » le 28 janvier 2014, ajoutant aux travaux engagés depuis 2012 sur l’ « impact of Rare Earth Metal Scarcity on Deployment of Next Generation Electric Motive Power Systems ».

Voir : http://www.act.nato.int/images/stories/budfin/rfi014001.pdf •

Une nouvelle « EU raw materials initiative » a été lancée et présentée le 20 juin 2014 à Athènes.



L’AED a lancé en février 2014 un groupe « raw materials for defence ».



De nombreux séminaires ont été organisés en France. On peut citer le séminaire à l’Assemblée nationale « la France et la guerre des minerais stratégiques » du 13 février 2014 ou la conférence de DII « métaux rares 2014 » le 12 décembre 2013. La création d’une nouvelle compagnie minière française avait été annoncée le 21 février 2014, avec le BRGM et l’APE, dotée de 200 à 400 M€. En réalité, le projet semble abandonné.

19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : les groupes de l’OTAN •

Le groupe de travail de l’OTAN AVT 196 « Impact of Scarcity of Materials on Military Structural, Mechanical, Propulsion and Power Systems » travaille sur les matériaux stratégiques.



Son objectif est de cerner les matériaux les plus clefs : “key strategic materials are those

that are crucial in the manufacture of sophisticated military hardware or components such as airframes, gas turbines, rocket motors, munitions, armor, and electronics. These materials are becoming increasingly scarce. In the worst case this scarcity may result in the non availability of some materials or technologies as the few remaining sources of certain strategic materials lie in the hands of the non-NATO nations. An AVT- ST-001 Specialists’ Team was launched in October 2008 as a direct response to the request of the RTB for presentation at the RTB spring 2009 meeting. This presentation confirmed the risks of scarcity of materials, and listed possible mitigation actions at NATO procurement level. As a consequence an Exploratory Team AVT ET 106 was launched fall 2009 on the same subject. This proposal is a result of that Exploratory Team”. •

Il y a aussi le groupe de travail AVT 231 sur la “scarcity of Rare Earth Materials for Electrical Power Systems”.

19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : à quoi sert le COMES ? •

Le Comité pour les Métaux Stratégiques (COMES) a été créé par le décret du 26 janvier 2011. Il dépend du Ministère de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, et plus particulièrement de la Direction Générale des Entreprises (DGE). Il a pour principale mission d’évaluer la vulnérabilité de l’accès de l’industrie aux métaux stratégiques en mettant en relation les acteurs concernés par ces problématiques.



Les métaux (ou matériaux clefs) sont ceux dont l’importance est significative dans les importations d’un pays, le rendant dépendant de cette ressources pour son économie, ainsi que son approvisionnement. Par exemple certains matériaux stratégiques pour la France sont certaines terres rares (composants pour les téléphones, tablettes et GPS), le lithium (batteries de voitures), l'indium (écrans plats), le graphite (automobiles), etc.



Le COMES est un outil destiné à élaborer une politique ciblée pour répondre aux problèmes posés quant aux matériaux stratégiques. Les axes de réflexion sont : identification et évolution des besoins, évaluation des ressources disponibles, développement écologique et recyclage et enfin la recherche industrielle. Ces missions permettent de couvrir les processus allant de l’analyse des besoins nationaux à la veille stratégique. L’objectif du COMES est d’analyser les besoins actuels, mais surtout de pouvoir se placer dans une dynamique d’anticipation, voire de prévention des crises énergétiques futures. Ce comité permet l’élaboration d’une politique commune concernant ces matériaux ainsi qu’une véritable stratégie, pour limiter les politiques individuelles.



Voir : http://www.entreprises.gouv.fr/a-votre-service/comite-pour-metaux-strategiques

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : l’étude PIPAME •

Le Pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques (PIPAME) réalise des rapports dont l’objectif est d’apporter un éclairage sur l’évolution des principaux acteurs et secteurs économiques en mutation, en s’attachant à faire ressortir les menaces et les opportunités pour les entreprises, l’emploi et les territoires.



La DGE assurait un co-pilotage, avec la DAS et et la DGA : une étude a été réalisée par le cabinet SOFRED Consultants et rendue en mars 2013. Les enjeux économiques des métaux stratégiques pour les filières automobile et aéronautique ont été exposés.



Voir sur Mineral Info : http://www.mineralinfo.fr/actualites/rapport-enjeux-economiquesmetaux-strategiques-filieres-automobile-aeronautique



Qu’en est-il sorti ? Essentiellement une vision actuelle et prospective des sources, une idée des contraintes d’approvisionnement et des recommandations pour les filières.



MAIS : La coopération des industriels n’a pas ou peu été obtenue et le rapport s’est finalement limité à des généralités et pas beaucoup d’action.



Voir : http://www.entreprises.gouv.fr/etudes-et-statistiques/enjeux-economiques-desmetaux-strategiques-pour-filieres-automobile-et-aerona

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Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : la stratégie allemande •

L’Allemagne est la première puissance industrielle d’Europe : elle a des besoins en matières premières et en dérivés de métaux. Il est donc crucial pour l’Allemagne de définir une stratégie pour les matières premières, qui concerne une multiplicité de produits (métaux ou pas). L’Allemagne associe à sa démarche publique les entreprises privées au travers de la Rohstoffallianz : http://www.rohstoffallianz.com/en/



Approvisionnement : en Allemagne, on note une volonté de diversifier les sources de matières premières. L’Allemagne veut favoriser un crédit libre pour le financement contre le risque concernant les matières premières. Elle veut également établir une aide à l’export pour les entreprises allemandes. Elle veut mettre en place un fonds de garantie pour les investissements pour les matières premières. Enfin, elle étudie sérieusement les recherches géologiques pour savoir où sont les réserves disponibles sur son territoire. Son but est de constituer le plus possible des filières complètes sur le plus de matériaux possibles pour réduire sa dépendance.



Economie des matières premières : l’Allemagne souhaite limiter sa dépendance vis-à-vis de l’extérieur en allant vers une diminution de ses besoins. Elle fait porter l’effort sur le recyclage des matériaux. Elle cherche des techniques de production plus efficientes. L’enjeu est de maîtriser la filière avec des « value chains ». Cela lui permettrait de mettre en place une filière technologique et de recherche capable de jouer sur le tableau de l’efficience des chaînes et des méthodes de production.



Mesures structurelles : les Allemands ambitionnent de créer des synergies entre le public et le privé. Ils veulent établir des stratégies plus détaillées au niveau interministériel.

19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le cas brésilien •

La refonte du code minier : le 18 juin 2013, le Brésil a décidé de refondre son code minier. Le projet de texte comporte d’importants changements pour le pays. Parmi eux, citons une

augmentation des redevances imposées pour l’exploitation des ressources naturelles et la modernisation du système d’octroi des droits miniers. La nouvelle proposition relève le taux plafond des redevances de 0,2/3% à 4% et laisse au gouvernement le soin de décider ultérieurement par décret du taux propre à chaque type de minerai.



Le ministère brésilien des mines et de l’énergie avait inscrit cet objectif en mai 2011 dans son plan stratégique des métaux et des minerais intitulé "plano nacional de mineração 2030". L’objet de ce document était triple. Il visait à décrire le contexte économique et stratégique de l’activité des métaux et des minerais à l'échelle mondiale et nationale (entre autre l’offre, la

demande et les exportations brésiliennes de métaux et de minerais); recenser les ressources naturelles présentes sur le territoire brésilien et les capacités brésiliennes à les exploiter (état des réserves, ressources humaines, ressources financières, ressources techniques); définir une politique gouvernementale brésilienne des métaux et des minerais pour les 25 prochaines années et ses conséquences sur l’activité économique et industrielle du Brésil.

19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le Brésil et le niobium •







Le niobium est un métal utilisé pour 89% de sa production mondiale pour la fabrication d'aciers de haute qualité, 9% pour la production de superalliages, en mixant par exemple le niobium et le titane, et 2% pour les applications de supraconductivité. L'adjonction de niobium à l'acier augmente son élasticité et sa résistance aux torsions comme aux températures extrêmes. Le principal producteur mondial de niobium est le Brésil, avec 80% de la production (le Canada est deuxième avec 15%) et 95% des réserves mondiales connues de niobium. Celles-ci sont concentrées sur trois sites : Araxá (état du Minas Gerais), Catalão (état de Goiás) et São Gabriel da Cachoeira (état d'Amazonas) où se déroulent actuellement des campagnes d'exploration géologique. Le premier acteur industriel du secteur est l'entreprise minière brésilienne CBMM (Companhia Brasileira de Metalurgia e Mineração) qui exploite le site d'Araxá. Ce site concentre à lui seul 75% des réserves brésiliennes. Des entreprises coréennes, japonaises et chinoises sont entrées dans le capital de CBMM en 2011. L'entreprise reste toutefois contrôlée par la famille Moreira Salles qui détient 70% du capital. Les besoins en niobium ne cessent de croître dans le monde. La Chine reste le premier marché avec 25% de la consommation mondiale, du fait de la croissance continue de ses besoins en acier inoxydable. Or, le niobium reste un élément clef de la fabrication de nombreux alliages pour les technologies de pointe.

19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le Chili •

Le Chili apparaît comme un des acteurs centraux dans le commerce des minerais, en jouant un rôle significatif dans différents

marchés, en dehors du cuivre, tels que l’arsenic, le bore, le cuivre, l’iode, le lithium, le molybdène, le rhénium, le sélénium et l’argent. Il agit comme un producteur et également comme un détenteur de réserves considérables. •

La production minière chilienne représente 55%, 50% et 20% de la production mondiale

respectivement d’iode, de rhénium et de molybdène. Il a des réserves estimées à 50% du total connu concernant le rhénium. Le Chili est responsable d'environ un tiers de la production mondiale de cuivre. 19/06/2015

Christophe-Alexandre PAILLARD

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le cas du rhénium • •

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19/06/2015

Le rhénium de symbole Re et de numéro atomique 7 est un métal argenté qui résiste bien à la corrosion et a une forte tolérance à la chaleur. Le rhénium a peu d'applications, en raison de sa rareté et des coûts de production élevés (son prix était de 14 000 € le kilogramme en 2010), mais son usage dans l'aéronautique est majeur. On l'extrait habituellement des poussières de molybdène dans les fours industriels, dont il est un sous-produit poudreux de couleur grise, mais le rhénium se retrouve également à l'état de traces dans certains minéraux. La production mondiale est de 50 tonnes par an. Les trois principaux pays producteurs sont le Chili (42% de la production mondiale), les Etats-Unis (17%) et le Kazakhstan (17%). La production de rhénium est utilisée aux trois quarts pour la fabrication de superalliages dans les turbines des moteurs, par exemple dans le moteur d’avion CFM56 (en fait pour les ailettes qui contiennent 3% de rhénium) ou les moteurs des avions de combat F15, F16, F22 Raptor et F35 JSF. La consommation concerne à 28% General Electric, 28% Rolls Royce et 12% Pratt & Whitney. Safran n’en utilise pas pour ses moteurs (M88 du Rafale par exemple).

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : la Bolivie et le lithium •

Le lithium : c’est un élément stratégique employé par l’industrie de pointe civile et militaire. Les réserves mondiales sont abondantes mais géographiquement concentrées et exploitées par quelques acteurs argentins, chiliens, australiens, américains, canadiens et chinois. La Chine

(dont les besoins en lithium excèdent la production nationale), la Corée du Sud et le Japon ont déjà contracté des accords d’exclusivité avec certains de ces producteurs. En 2013, la prise de contrôle de l’important opérateur minier australien Talison Lithium par le groupe chinois Chengdu Tianqi a changé la donne stratégique. La France doit aboutir à des accords futurs, essentiellement avec le Chili et l’Argentine, où les ressources sont abondantes et faciles à extraire, ainsi qu’avec l'Australie et le Canada. •

La Bolivie possède un grand potentiel d’extraction, à ce jour quasi totalement inexploité. Ces ressources sont concentrées dans le Salar de Uyuni, une ancienne mer intérieure devenue un

désert de sel d’une extension de 12.000 km2. De fait, si la production est concentrée en Amérique du Sud, les réserves globales le sont encore plus : 70% se trouvent dans le souscontinent, dont 35% pour la Bolivie, 20% au Chili et 13% en Argentine. La Chine est potentiellement autosuffisante avec 18% des réserves exploitables sur son territoire. La Bolivie deviendra sans doute un acteur majeur du secteur du lithium en raison de ses réserves. 19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : la zone sahélienne et ses mines •

Des campagnes d’exploration minière ont été menées sur l’ensemble de la zone Sahel/Sahara, mais l’insécurité a limité la possibilité d’ouvrir des mines.



Au Mali, tous les projets miniers possibles, dont l’uranium au nord de Gao, ont été abandonnés en raison de mauvaises conditions de sécurité. L’exploitation se concentre donc

autour des sites d’uranium d’Arlit et d’Agadez au Niger d’une part, des sites de fer de Tindouf (Algérie) et de Guelb El Rhein/Zouérate/M’Haoudat (Mauritanie) d’autre part qui sont tous situés à la lisière des frontières avec le Sahara occidental. Il faut ajouter les mines de cuivre et d’or de Guelb Moghrein en Mauritanie.



Pour les sites d’exploitation du fer mauritanien, les principaux intervenants sont l’entreprise mauritanienne SNIM et le Suisse Xstrata. Fin 2010, ce dernier a pris le contrôle de l’Australien Sphere Minerals présent en Mauritanie et a prévu d’investir six milliards de dollars dans la production du fer mauritanien. En Algérie, le groupe Ferphos, entreprise algérienne, exploite les mines de fer, au travers de sa filiale Somifer (société des mines de fer d’Algérie), avec une participation minoritaire du groupe Mittal.



Les sites de production sont éloignés des grandes zones de peuplement et se situent tous en zone saharienne.

19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : ce que sont les terres rares •

Les 17 terres rares sont le scandium (21), l’yttrium (39), le lanthane (57), le cérium (58), le praséodyme (59), le néodyme (60), le prométhium (61), le samarium (62), l’europium (63), le gadolinium (64), le terbium (65), le dysprosium (66), l’holmium (67), l’erbium (68), le thulium (69), l’ytterbium (70) et le lutécium (71). Il y a d’importants gisements possibles au Brésil et en Inde.



En septembre 2010, la Chine a interdit d’exporter des terres rares vers le Japon en réaction à un incident naval entre les deux pays.



La Chine produit 95% de la demande mondiale de ces 17 métaux. Durant des années, le Japon a été le principal acheteur des métaux extraits en Chine. De même, les Etats-Unis dépendent totalement des productions chinoises pour fabriquer leurs aimants en néodyme.



Autre exemple, les systèmes de navigation et les radars de la marine américaine sont fabriqués à partir de terres rares chinoises. Le 28 octobre 2010, la Chine a précisé qu’elle n’utiliserait pas ses terres rares comme monnaie d’échange dans les négociations internationales.

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : La concentration de terres rares

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : les réserves de terres rares

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : le marché des terres rares

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : les flux commerciaux

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : Apple et les terres rares

19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : Chine, terres rares et OMC •

Les Etats-Unis et le Japon ont vivement réagi à l’attitude chinoise de limiter leurs exportations de terres rares, de tungstène et de molybdène. Une action a été engagée devant l’OMC.



En juillet 2011, un panel de l’Organisation mondiale du commerce a jugé que les restrictions à l’exportation de matières premières instituées par la Chine étaient contraires au droit du commerce international, à la suite de plaintes déposées par des chefs d’entreprise américains et mexicains. L’Union européenne s’est félicitée de cette décision de l’OMC.



La Chine avait cependant 60 jours pour faire appel de sa condamnation. En septembre 2011, la Chine a donc fait appel. Elle estimait que sa politique concernant les terres rares visait d’abord à préserver son environnement. Le 31 janvier 2012, la Chine a perdu son appel devant l’OMC sur les restrictions à l’exportation qu’elle impose sur les matières premières. La Chine avait annoncé le 17 février 2012 qu’elle procéderait à une évaluation sérieuse du verdict de l’OMC.



Mais, le 13 mars 2012, les Etats-Unis, l’Union européenne et le Japon ont déposé une plainte devant l’OMC du fait des limitations imposées par la Chine à l’exportation de 17 métaux indispensables à la fabrication des produits de haute technologie, communément appelés « terres rares » et du non-respect de la décision du panel de l’OMC.

19/06/2015

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Matériaux stratégiques et politiques publiques : les conclusions de l’OMC •

Ensuite, l’organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), saisi par la Chine, a confirmé le 7 août 2014 les conclusions présentées par le groupe spécial en mars 2014 : les restrictions à l’exportation imposées par la Chine sur certaines terres rares, le tungstène et le molybdène, sont contraires aux règles de l’OMC.



Selon lui, les droits d’exportation et les contingents fixés par la Chine ne sont justifiés ni au regard de la protection de l’environnement, ni par l’application d’une politique de conservation, puisque la Chine ne s’applique pas elle-même ces limitations. « Un membre de l'OMC peut décider du niveau ou du rythme d'utilisation de ses ressources, mais une fois que les matières premières sont extraites, elles sont soumises aux règles commerciales de l'OMC », explique la Commission européenne.



Pour rappel, la Chine représente 95% de la production mondiale de terres rares.



Le rapport de l’organe d’appel a été adopté sous trente jours par l’organe de règlement des différends de l’OMC.



Maintenant, « la Chine doit se conformer à la décision immédiatement ou dans le délai raisonnable qu’elle peut solliciter pour la mise en œuvre ».



On attend la réponse chinoise.



Voir : http://www.wto.org/english/tratop_e/dispu_e/cases_e/ds431_e.htm

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Conclusions

Que fait-on concrètement en France ?

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Conclusions : les actions engagées depuis 2011 en interministériel •

Juin 2011: création du COMES ou « Comité des matières stratégiques », principalement avec des entreprises privées civiles. Parmi ses membres, on retrouve la DGA et la DAS au sein de ses cinq groupes de travail. Participation du ministère de la défense aux activités du COMES.



Voir le colloque du 16 octobre 2012 : http://www.entreprises.gouv.fr/colloques/colloquemetaux-strategiques-enjeux-et-solutions-pour-entreprises et http://www.entreprises.gouv.fr/secteurs-professionnels/industrie/chimie/metauxstrategiques



Septembre 2011/Avril 2012: étude sur une approche générale des métaux stratégiques pour le ministère de la défense.



Octobre 2012/février 2013: travaux préparatoires au ministère de la défense entre la DAS et la DGA/DS/SASF.



Décembre 2012 : cartographie défense des 31 métaux critiques et stratégiques.



Février 2013 : création d’un premier groupe de travail « défense » et décembre 2013 : création de l’observatoire stratégique des matériaux de défense. Contrat remporté par le cabinet CEIS. Pilotage DAS/DGA jusqu’en septembre 2014. L’IRSEM est désormais impliqué.



Février 2014 : travaux communs ministère de la défense/AED/OTAN. Echanges avec des pays membres : Pays-Bas, Suède, Royaume-Uni.



Printemps 2016 : conférence publique à l’Ecole militaire pour la sortie de l’ouvrage de l’observatoire « géopolitique des matériaux stratégiques » avec l’IRSEM.

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Conclusions : la revue de l’AED du 28 octobre 2014 http://www.eda.europa.eu/info-hub/publications/publication-details/pub/european-defence-matters-issue-6

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Conclusions : Diplomatie de janvier/février 2015 et de juin/juillet 2015

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Fin de la présentation Questions/réponses