réforme de l'asile - Fédération des acteurs de la solidarité

que l'on sécurise la frontière entre la France et la Grande-. Bretagne. ... La Sicile et la Calabre, qui sont les régions les plus pauvres de l'Italie, ...... accélérée, ce n'est pas l'ancienne procédure prioritaire. Les ..... enfants naissent, ils sont à l'école, et si les gens se débrouillent, ..... non pas des CDI d'ingénieurs diplômés mais.
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JOURNÉE D’ÉTUDE NATIONALE

RÉFORME DE L’ASILE Jeudi 10 septembre 2015 à Marseille

Les actes

SOMMAIRE DISCOURS D’OUVERTURE

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• Rose-Marie SERGENT, Présidente de la FNARS PACA Corse DOM • Louis GALLOIS, Président de la FNARS • Michel VAUZELLE, Président du conseil régional PACA • Bernard CAZENEUVE, ministre de l’Intérieur

CE QUE VA CHANGER LA RÉFORME

« LE DROIT D’ASILE N’EST PAS UNIQUEMENT UNE AFFAIRE TECHNIQUE, DE PROFESSIONNELS, DE TEXTES LÉGISLATIFS, DE CIRCULAIRES, C’EST UN CHALLENGE QUE NOUS DEVONS TOUS RELEVER. »

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Extrait du discours de Louis Gallois,

• 1 La procédure d’asile • 2 Les conditions d’accueil • 3 Le contenu de la protection • 4 Les dispositifs expérimentaux d’accompagnement au retour pour les déboutés

TABLE RONDE

Président de la FNARS

« 

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« POURQUOI UN NOUVEAU MODÈLE DE L’ASILE ? »

Présidente de la FNARS PACA Corse DOM

TABLE RONDE

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LE RÔLE DES ACTEURS DANS LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME

RÉFLEXIONS ISSUES DES ATELIERS

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• 1 Le premier accueil • 2 L’hébergement des demandeurs d’asile • 3 Le droit à l’accompagnement et la prise en compte de la vulnérabilité des demandeurs d’asile • 4 L’accompagnement et l’hébergement des déboutés • 5 L’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale

58 PROPOSITIONS POUR UNE MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME DE L’ASILE RESPECTUEUSE DES DROITS DES PERSONNES

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Photos © Julien Gourvenec

La journée d’étude nationale sur la réforme de l’asile s’est tenue le 10 septembre 2015 à La Villa Méditerranée, à Marseille. Les 350 participants ont pu découvrir ou redécouvrir ce bâtiment imaginé par l’architecte Italien Stefano Boeri et situé à quelques mètres du MuCEM. L’intégralité des retranscriptions des discours et des tables rondes est disponible sur le site internet de la FNARS. Seul le prononcé fait foi.

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Extrait du discours de Rose-Marie Sergent,

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« 

[…] « La FNARS PACA Corse DOM est heureuse de vous accueillir à l’occasion de cette journée nationale sur le droit d’asile. En effet, nous ne pouvons manquer de noter la force du symbole : cette journée se déroule à Marseille, une ville qui s’est construite sur l’accueil au fil des siècles. Notre association régionale est particulièrement sensible au sujet car les publics demandeurs d’asile, mais aussi bénéficiaires de la protection internationale et migrants, sont présents dans les services de toutes les associations adhérentes. Cette région PACA est l’une des régions d’arrivée les plus importantes avec deux plateformes importantes à Nice et à Marseille. De plus, je suis persuadée que dans cette salle, vraisemblablement pour un certain nombre d’entre nous, dans nos racines, il y a quelqu’un qui, un jour, quelque part, a demandé accueil et protection. Le droit d’asile n’est pas uniquement une affaire technique, de professionnels, de textes législatifs, de circulaires, c’est un challenge que nous devons tous relever. C’est un sujet qui nous concerne tous d’un point de vue éthique. La question qui se pose est la suivante : comment, avec cette nouvelle réforme du droit d’asile, pouvonsnous assurer nos missions en respectant nos valeurs d’humanité ? » […]

[…] « Quand nous avons décidé cette journée de travail sur l’asile, nous ne nous doutions pas que l’actualité nous rattraperait, et que ce drame bouleverserait l’Europe, car il s’agit bien d’un drame. Des dizaines de milliers de femmes, d’hommes, d’enfants fuyant les guerres, les dictatures, les persécutions, frappent aux portes de l’Europe au péril de leur vie. Quelle réponse apportonsnous ? En fait, parlons clair, l’honneur de l’Europe est en jeu. Soit nous sommes un continent vieillissant, racorni, apeuré, égoïste, qui se replie sur lui-même ignorant le drame, soit nous prenons ce drame à bras-le-corps, nous exprimons nos valeurs humanistes, j’allais dire citoyennes, notre optimisme, parce qu’il en faut, notre confiance, et nous accueillons non seulement avec dignité, mais avec chaleur, ceux que la violence et la misère poussent vers nous. L’objet de cette journée, c’est d’abord d’exprimer ce choix sans ambiguïté, sans tourner autour du pot, c’est ensuite de décliner des « À TRAVERS CETTE actions concrètes, ambitieuses que ce choix impose QUESTION DE pour la France et pour l’Europe, pour l’État, pour les L’ASILE, C’EST, NOUS collectivités locales et pour les associations. Un LE SENTONS, NOTRE effort important additionnel, car il ne peut se faire AVENIR, NOTRE au détriment d’autres publics, va être nécessaire MODÈLE SOCIAL, pour accueillir, héberger et accompagner dignement NOTRE IDÉE DE LA ces populations dans la durée. Ne nous le cachons RÉPUBLIQUE QUE pas. Nous en précisions les contours à travers notre NOUS DESSINONS.. » plateforme de 43 propositions qui sera déclinée cet après-midi et débattue en ateliers. Nous devrons nous demander si la réforme de l’asile, votée par le Parlement le 29 juillet dernier, sur laquelle nous nous sommes d’ailleurs déjà exprimés, Monsieur le ministre, en relevant des éléments positifs mais également en souhaitant que de nouvelles avancées aient lieu, donne les moyens à la hauteur des enjeux liés à l’afflux des demandeurs d’asile. Nous sommes tous en fait, collectivement et individuellement, face à nos responsabilités. À travers cette question de l’asile, c’est, nous le sentons, notre avenir, notre modèle social, notre idée de la République que nous dessinons. Nous voulons une République ouverte, solidaire, accueillante, généreuse et qui change son regard sur les migrants au-delà de l’émotion du moment. Même si l’émotion légitime aide à des prises de conscience et relève les capacités de générosité de nombre de nos compatriotes. Nous sommes au pied du mur, le droit d’asile est au cœur de tout cela. » […]

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« OUI, IL FAUT UN MÉCANISME SOLIDAIRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS ENTRE LES DIFFÉRENTS PAYS DE L’UNION EUROPÉENNE. »

« ICI, NOUS VOULONS DIRE QUE NOUS NE DEMANDONS PAS SES PAPIERS À QUELQU’UN QUI EST TRAIN DE COULER ET DE SE NOYER . »

Extraits du discours de Michel Vauzelle,

Président de la région PACA

« 

[…] « Nous sommes tous méditerranéens, j’ai lancé ce slogan avec les présidents des régions méditerranéennes lorsque je suis allé dire la solidarité de la région PACA avec la Sicile. La Sicile et la Calabre, qui sont les régions les plus pauvres de l’Italie, et qui accueillent depuis trois ans sans faiblir les migrants et les réfugiés, il en est de même pour la Grèce. […] J’ai adressé un appel, comme vous, Monsieur le ministre, à tous les maires de la région pour savoir sur qui nous pouvions compter pour héberger les réfugiés dans les centres de vacances inoccupés, mettre en place aussi, avec l’Université d’Aix-Marseille, un programme d’aide aux étudiants syriens qui doivent être accueillis dans notre région, l’affectation d’une enveloppe de la région, dans cette période où l’argent est rare, pour aider les communes et les personnes ou les associations qui, dans la région, auront besoin de cette aide pour mieux accueillir ceux qui en ont besoin. […] J’ai lancé un appel à la Commission européenne parce que je pense qu’il doit y avoir une réflexion sur la réaffectation des fonds qui ne sont pas consommés dans la politique de voisinage, la politique méditerranéenne de l’Europe et qui risquent, n’ayant pas été consommés, de repartir vers les États alors que ces fonds étaient affectés à la Méditerranée et qu’ils doivent aider aussi bien la rive Nord pour l’accueil que la rive Sud pour les problèmes de transit qui se posent. La mise en place enfin d’un numéro de secours, car beaucoup de citoyens se demandent à qui s’adresser lorsqu’ils veulent faire un geste convenable par rapport à la détresse des réfugiés. […] Ici, nous voulons dire que nous ne demandons pas ses papiers à quelqu’un qui est train de couler et de se noyer ». […]

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Extraits du discours de Bernard Cazeneuve,

Ministre de l’Intérieur

« 

[…] « Je voudrais commencer par vous rendre hommage, non pas pour vous faire plaisir, mais parce que je vous vois sur le terrain partout où les difficultés se trouvent qui conduisent mon ministère à intervenir, partout. […] Il y a à Calais des hommes et des femmes qui veulent, parce que leur destin a été brisé par les persécutions, passer en Angleterre. Parce que l’Angleterre leur a été proposée et vendue, je dis vendue parce que l’on sait le trafic auquel se livrent les filières de la traite des êtres humains, comme un eldorado. Ils sont là à Calais en nombre, 3 000, 3 500, cela dépend des jours et cela dépend aussi de ce que nous faisons nous-mêmes, pour essayer de passer en Angleterre. Et j’ai souhaité que l’on change la politique de la France à Calais. Je le dis à tous ceux qui expliquent que nous sommes en train de faire un nouveau Sangatte, et qui ne sont pas allés à Calais depuis des mois et des années. […] […] Je veux à Calais une autre politique, quelle est cette

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autre politique ? Oui, il faut que l’on décourage les passeurs de faire leur trafic, et par conséquent, j’ai souhaité que l’on sécurise la frontière entre la France et la GrandeBretagne. Parce que si nous ne le faisons pas, nous envoyons le signal à ceux qui sont les acteurs de la traite des êtres humains qu’ils peuvent continuer leur trafic en toute impunité. […] Ce combat-là n’est pas un combat que la France peut mener seule, ce n’est pas un combat que la France doit mener seule, c’est un combat que la France doit mener avec ses partenaires de l’Union européenne, de façon résolue, en articulant les actions des forces de police mais aussi l’action de nos services de renseignement, en travaillant avec Europol et Interpol, parce que ces acteurs-là sont des acteurs du drame qui se vit en Méditerranée. […] […] Oui, il faut un mécanisme solidaire d’accueil des réfugiés entre les différents pays de l’Union européenne. […] J’entends sur ces sujets européens, et sur la notion même de réfugiés, des choses qui me heurtent, et sur lesquelles je veux vous dire quelle est la position du gouver-

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nement français. Clairement et sans ambigüité. D’abord lorsque l’on est réfugié, et lorsque l’on relève du statut de réfugié, et cela n’est pas une chose nouvelle, cela nous renvoie aux temps longs de l’histoire de notre pays, et au dialogue profond que notre pays entretient avec les valeurs qu’il porte et qui le portent depuis si longtemps, je pense notamment à 1793, à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen par laquelle la France affirmait que quiconque est persécuté dans son pays, en raison de l’aspiration qui est la sienne des libertés, doit pouvoir être accueilli dans ce pays libre qu’est la France. Et en Syrie, pour être aussi le ministre de la lutte contre la terrorisme, je vois les exactions monstrueuses de Daech, et je vois les exactions monstrueuses du régime de Bachar El Assad, et parmi ceux qui sont persécutés, il y a des enfants, il y a des femmes, il y a des familles en situation de vulnérabilité de toute religion, de toute région, de toute conviction. Et la France s’honoreraitelle, ses territoires, ses élus, ses responsables gouvernementaux, si, alors qu’il y a une telle puissance des images et des drames, nous décidions d’accueillir les uns parce qu’ils ont telle religion, et pas les autres. Comme s’il n’y avait dans notre pays, pour des raisons qui tiennent à

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son histoire et à ses combats, une vocation qui est la seule qui vaille et la seule qu’on ne devrait pas abandonner, d’accueillir tous ceux qui sont dans cette situation de persécution d’où qu’ils viennent, quoi qu’ils pensent, quelle que soit leur religion, dès lors qu’ils ont été à ce point martyrisés et persécutés. Donc nous accueillons tous ceux qui doivent être accueillis en raison de ces persécutions et qui relèvent du statut de réfugié en Europe. Il y a une deuxième chose que je voudrais vous dire : il n’y a pas d’un côté les réfugiés de guerre et les autres : il y a des réfugiés. Quelle aurait été l’image de la France si, au moment de la guerre d’Espagne, nous avions dit : ce sont des réfugiés de guerre, nous les accueillons, mais après ils doivent repartir ? Qui sait combien de temps durera la guerre en Syrie ou en Irak ? Et ceux que nous aurons accueillis parce qu’ils auront subi ces persécutions, qui auront peut-être fait leur vie ici parce que nous aurons su les intégrer, qui auront pu nourrir des affections, des amitiés, qui auront créé une famille, dans le temps long de l’histoire de notre pays, si un jour la guerre est terminée, nous les renverrons ? Mais quelle est cette conception du statut de réfugié ? Les réfugiés ont un statut qui un et indivisible. La notion de réfugié n’est pas une notion négociable. Ce n’est pas une notion avec laquelle on peut jouer, ce n’est pas une notion que l’on peut diviser. Lorsqu’il y a de tels drames humanitaires, lorsqu’il y a une telle réalité, on ne négocie pas avec les principes, on ne négocie pas avec les valeurs. On ne cherche pas sur les sujets les plus essentiels qui renvoient aux combats les plus fondamentaux de l’humanité à faire des concessions à ce que sont les principes, parce qu’il peut y avoir quelques mois après que les principes doivent être énoncés avec force, des élections qui se profilent, et on a beau être ministre de l’Intérieur, regarder en face les réalités, on ne les regarde jamais dans l’abandon des principes. La troisième chose que je voulais vous dire c’est qu’il n’y a pas de déferlement des migrants en France, ce n’est pas la réalité des chiffres, et ça n’est pas la réalité que connaît notre pays. […] L’immigration en France chaque année, et depuis des années, ne représente pas plus que 0,3% de la population française totale. L’an dernier, alors qu’il y avait une pression migratoire considérable aux portes de l’Europe, la demande d’asile en France a diminué de 2,34%. Non pas parce que nous avons voulu accueillir moins de demandeurs d’asile, nous voulons en accueillir autant qu’il faudra en accueillir compte tenu du contexte, je m’expliquerai sur cela tout à l’heure, mais parce que la France est un pays de transit, elle n’est pas un pays de destination. Et cette année, il en est de même, non pas que la demande diminue mais elle est égale. Et donc, il est faux de dire, je le dis solennellement devant vous et je le dirai indéfiniment parce que la vérité ça compte, que notre

pays est un pays de destination, qu’il y aurait des hordes de migrants qui seraient aux portes de notre pays, et que nous ne pourrions pas faire face à la situation. Il peut toujours y avoir des difficultés, il nous faut nous préparer à les affronter mais ne le faisons pas dans la manipulation des statistiques, dans les approximations et dans les amalgames. […] […] Face aux problèmes européens, aux défis européens auxquels nous sommes confrontés, nous ajusterons les dispositifs, en très étroite liaison avec vous. Le plan de 11 000 places pour les migrants se met en œuvre de façon efficace, nous travaillons là aussi en interministériel pour pouvoir créer des conditions d’accueil supplémentaires, les maires sont appelés à contribution pour offrir des capacités de logement. Je suis convaincu que si nous sommes capables d’agir ensemble face à ce défi en articulant nos volontés, nos moyens, en n’étant pas dans la suspicion les uns à l’égard des autres mais dans la détermination à agir ensemble alors nous parviendrons à relever bien des défis, ensemble. Et je veux prendre l’engagement devant vous, et j’en parlerai samedi aux maires, et je reviendrai vers vous pour des discussions approfondies sur ces enjeux que nous saurons mettre, à la fois à l’OFPRA, à l’OFII, dans les préfectures, et en termes de conditions d’hébergement, de places d’hébergement, que le dispositif sera à la hauteur de l’enjeu, parce que je veux que la France soit à la hauteur de cette échéance qui se présente à nous et qui ne doit pas être perçue comme un écheveau de contraintes et de difficultés, mais au contraire comme une formidable occasion d’apporter la démonstration de ce que nous sommes. Nous travaillons d’arrache-pied en interministériel pour annoncer des décisions, financer des engagements, et revenir vers vous, en étant, encore une fois, à vos côtés dans le défi.

« L’IMMIGRATION EN FRANCE CHAQUE ANNÉE, ET DEPUIS DES ANNÉES, NE REPRÉSENTE PAS PLUS QUE 0,3 % DE LA POPULATION FRANÇAISE TOTALE. »

« 

Je voudrais conclure en vous disant quelques mots sur la relation entre vous et mon ministère : c’est une relation subtile, intéressante, à regarder et à vivre, et riche. Là aussi, je ne prendrais pas de précautions : il m’arrive, lorsque je vous rencontre, et cela m’oblige et me donne un devoir supplémentaire, de ressentir chez vous un peu de méfiance. Parce que le ministre de l’Intérieur qui parle de l’asile avec ses convictions et ses valeurs est aussi le ministre de l’ordre public. Par conséquent, il m’arrive, et je l’assume parce que c’est aussi mon devoir et que j’estime que c’est nécessaire, parfois de devoir prendre des décisions, y compris concernant des étrangers qui sont en situation irrégulière dans notre pays, qui font l’objet de vos interrogations, et parfois de votre contestation. Mais moi j’estime, et là aussi la franchise m’oblige à vous le dire, que tout ce que je viens de vous dire sur les réfugiés, sur l’immigration, sur notre engagement

n’est pas soutenable, si, après que la procédure d’asile a eu lieu, les déboutés du droit d’asile ont tous vocation à demeurer sur le territoire national. Ça, ce n’est pas possible. Pas simplement parce que je suis ministre de l’Intérieur, mais tout simplement parce que ce n’est pas soutenable. Et je comprends qu’étant à la fois ministre de l’asile et le ministre de la lutte contre l’immigration irrégulière, ou le ministre de la reconduite à la frontière des déboutés du droit d’asile, cela puisse compliquer nos relations. Mais je voudrais que nous surmontions cette méfiance, parce que d’abord on peut être ministre de l’Intérieur avoir des convictions, un engagement, une sincérité, vouloir la partager avec des acteurs associatifs qu’on respecte pour leur engagement, et des travailleurs sociaux dont on sait que sans eux on ne pourrait rien faire, et le ministère de l’Intérieur ne pourrait rien faire sans vous, donc j’ai besoin de vous, n’en déduisez pas que vous pourrez tout obtenir de moi. Mais j’ai besoin de vous et je sais le travail que vous faites et je veux lui rendre hommage. Nous sommes face à un défi considérable, ce défi, il est l’un des plus grands défis des dernières décennies que l’humanité ait affronté : on ne surmonte pas des défis avec des méfiances, on surmonte des défis avec une énergie partagée, avec une sincérité, avec une transparence dans les relations, avec des contraintes, des ambitions, une volonté que l’on met sur la table et que l’on essaie de partager ensemble avec aussi une capacité de dépasser les postures institutionnelles ou habituelles pour dire essayons ensemble de faire au mieux pour ceux qui souffrent. » […]

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CE QUE VA CHANGER LA RÉFORME

« LA DOMICILIATION DES DEMANDEURS D’ASILE N’EST PLUS UNE EXIGENCE POUR L’ENREGISTREMENT DE LA DEMANDE D’ASILE. »

La loi relative à la réforme du droit d’asile a été définitivement adoptée le 29 juillet 2015. La réforme induit de nombreuses évolutions sur la procédure d’asile, les conditions d’accueil, le contenu de la protection et les dispositifs d’accompagnement au retour pour les déboutés. Cependant, toutes les dispositions de la loi ne peuvent pas être explicitées ici, dans la mesure où beaucoup d’éléments devront être précisés par voie réglementaire. De la même manière, les dispositions relatives à l’éloignement des déboutés du droit d’asile relèvent en grande partie du projet de loi relatif à l’immigration, toujours en cours de discussion au Parlement.

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LA PROCÉDURE D’ASILE Le premier accueil des demandeurs d’asile La loi impose l’enregistrement d’une demande d’asile dans un délai réduit à 3 jours ouvrés après la manifestation d’intention de demander l’asile. Ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsque, sur un territoire, un nombre élevé d’étrangers demandent l’asile simultanément. Les demandeurs d’asile se verront orientés vers des « plateformes de pré-accueil », où l’entretien doit avoir lieu le jour où le demandeur d’asile se présente, pour enregistrer des informations administratives et donner un rendez-vous dans les 48h auprès du nouveau « guichet unique » territorialement compétent. Un document sur la demande d’asile réalisé par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) est alors remis à la personne. Ces plateformes de pré-accueil, prestataires de l’OFII, seront réparties dans 63 départements.

L’enregistrement de la demande d’asile au guichet unique et le droit au maintien sur le territoire français Le guichet unique est un lieu physique composé de représentants de l’OFII et de la préfecture. Le demandeur d’asile procédera dans un premier temps à l’enregistrement de sa demande à la préfecture, après la prise d’empreintes et la vérification de l’État responsable de la demande d’asile. Sauf si la personne relève de la procédure DUBLIN, le dossier OFPRA lui est remis ainsi qu’une attestation de demande d’asile valant autorisation provisoire de séjour. Il existe 6 situations où cette attestation peut être refusée ou retirée, notamment en cas de décision de clôture par l’OFPRA ou de demande de réexamen. Cette attestation est renouvelée jusqu’à la décision définitive de la demande, y compris pendant un recours éventuel devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Aucun éloignement du territoire français ne peut avoir lieu pendant ce délai. Le recours est donc suspensif. Le demandeur d’asile est alors orienté vers l’OFII, qui sera dorénavant en charge d’évaluer ses besoins particuliers en matière d’accueil, de lui proposer une solution d’hébergement stable en prenant en compte sa situation de vulnérabilité.

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Les nouveaux types de procédure d’asile : procédure normale et procédure accélérée La procédure sera accélérée (et non plus prioritaire) pour des demandes de réexamen, les demandeurs d’asile originaires de pays sûrs, la présentation de faux documents d’identité ou dissimulation, les questions soulevées par le demandeurs sans pertinence au regard de la demande d’asile, les déclarations incohérentes et contradictoires, les refus de prise d’empreintes, la non présentation de la demande d’asile dans les 120 jours suivant son entrée en France, la menace à l’ordre public et lorsqu’une demande d’asile est présentée dans l’unique intention de faire échec à une mesure d’éloignement. Dans le cas des procédures accélérées, l’OFPRA statue plus rapidement sur la demande et les recours contre sa décision devant la CNDA sont examinés par un juge unique (au lieu de trois en cas de procédure normale). Les décisions sont rendues dans un délai de 5 semaines (au lieu de 5 mois pour la procédure normale). À l’exception des demandes de réexamen, tous les demandeurs d’asile, quel que soit le type de procédure, accélérée ou normale, peuvent être orientés vers un lieu d’hébergement (CADA ou hébergement d’urgence).

La domiciliation des demandeurs d’asile

L’examen de la demande d’asile à l’OFPRA : l’examen prioritaire, l’entretien et la présence du tiers Dans certaines situations, l’OFPRA peut examiner une demande en priorité. Ce sera notamment le cas des demandeurs d’asile vulnérables identifiés comme ayant des besoins particuliers en matière d’accueil ou présentant des demandes manifestement fondées. La loi prévoit désormais la possibilité pour le demandeur d’asile d’être accompagné, lors de son entretien, soit par un avocat soit par un représentant d’une association spécialisée. Les modalités d’habilitation des associations seront définies par décret. Les associations qui n’ont pas ces spécialisations pour objet dans leurs statuts associatifs ne pourront donc pas candidater comme tiers à l’entretien. Aucune prise en charge financière n’est prévue par la loi (pas de possibilité de solliciter l’aide juridictionnelle pour les avocats).

La clôture d’une demande d’asile La loi instaure une nouvelle procédure de clôture de la demande dans différentes hypothèses, notamment celle où la personne « n’a pas informé l’OFPRA, dans un délai raisonnable, de son lieu de résidence ou de son adresse et ne peut être contactée pour le suivi de la procédure ». L’accès à la domiciliation est donc essentiel. Dans ces hypothèses, l’OFPRA « suspend » la procédure pendant un délai de 9 mois. Si la personne se manifeste pour reprendre l’instruction de sa demande, la procédure reprend là où elle s’est arrêtée. Passé ce délai de 9 mois, la décision de clôture est définitive et la nouvelle demande est considérée comme une demande de réexamen.

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La domiciliation des demandeurs d’asile n’est plus une exigence pour l’enregistrement de la demande d’asile. Pour garantir au demandeur d’asile le suivi de la procédure (réception des convocations, notamment), un droit à la domiciliation est cependant consacré par la loi. Plusieurs situations peuvent se présenter : • Si le demandeur d’asile se voit proposer au guichet unique une orientation vers un CADA ou un hébergement stable (AT-SA, hébergement spécialisé) : il sera domicilié dans ce lieu d’hébergement. • Si le demandeur d’asile ne bénéficie d’aucun hébergement ou si l’hébergement proposé n’est pas suffisamment « stable » pour garantir la réception de son courrier, il pourra élire domicile auprès d’une personne morale avec laquelle une convention aura été conclue pour chaque département, mission notamment assurée par les plateformes d’accompagnement des demandeurs d’asile. En tout état de cause, les demandeurs d’asile sans domicile peuvent bénéficier également de la domiciliation généraliste (DALO) et élire domicile auprès d’une association agréée ou d’un CCAS dans le cadre du droit commun pour l’ensemble de leurs autres droits non liés à leur demande d’asile(CMU, scolarisation…).

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LES CONDITIONS D’ACCUEIL La loi prévoit deux nouveaux outils de programmation en termes d’hébergement et d’accompagnement des demandeurs d’asile : un schéma national d’accueil et des schémas régionaux. Le schéma national d’accueil fixe la répartition des places d’hébergement destinées aux demandeurs d’asile sur le territoire national et il est arrêté par le ministre de l’Intérieur après avis des ministres en charge des Affaires sociales et du Logement. Les schémas régionaux, établis par le préfet de région, fixent quant à eux « les orientations en matière de répartition des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asiles pour la région ». Ils présentent également le dispositif régional d’enregistrement des demandes d’asile et le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’asile. Ces schémas sont utilisés dans le cadre de l’orientation directive vers des places d’hébergement des demandeurs d’asile par l’OFII. La loi ne précise pas les organismes participant à l’élaboration de ces schémas.

L’orientation directive des demandeurs d’asile Les demandeurs d’asile dont la demande a été enregistrée par la préfecture au guichet unique sont orientés vers l’OFII pour un entretien individuel. Cet entretien poursuit deux objectifs : déterminer les besoins du demandeur d’asile en matière d’accueil en prenant en compte sa situation de vulnérabilité et proposer un hébergement en tenant compte de ses besoins […] et des capacités d’hébergement disponibles. L’OFII proposera alors un hébergement aussi bien dans le lieu d’arrivée du demandeur d’asile que dans une autre région. Il s’agit donc d’une simple obligation de moyen à la charge de l’OFII, compte tenu des places disponibles. Si le demandeur d’asile accepte l’orientation vers l’hébergement proposé par l’OFII. Il est alors redirigé par la plateforme pour organiser son départ. Il touche l’allocation pour demandeur d’asile. Si le demandeur d’asile accepte les conditions d’accueil mais que l’OFII, faute de places disponibles, ne propose pas d’hébergement, il est redirigé vers la plateforme d’accompagnement pour être accompagné sur son dossier de demande d’asile, à charge pour le dispositif généraliste d’accueillir le demandeur d’asile en attendant qu’une place se libère dans le dispositif national d’accueil (DNA). Il perçoit l’allocation pour demandeur d’asile. Enfin, si le demandeur d’asile refuse l’orientation ou abandonne ultérieurement le lieu d’hébergement proposé par l’OFII, il ne pourra ni bénéficier d’une orientation en CHRS (urgence ou insertion), ni d’une orientation

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« LES CONDITIONS MATÉRIELLES D’ACCUEIL SONT PROPOSÉES PAR L’OFII ET COUVRENT L’HÉBERGEMENT ET UNE ALLOCATION FINANCIÈRE. » vers les établissements relevant du régime de la déclaration (établissements recevant des subventions et accueillant des adultes), ni bénéficier de la réglementation du droit au logement opposable (DALO ou DAHO). Il ne pourra pas non plus percevoir l’allocation pour demandeur d’asile (ADA). La loi prévoit cependant que les principes de l’urgence sociale doivent s’appliquer. Les modalités d’application restent floues. Seul un hébergement à l’hôtel risque d’être proposé aux demandeurs d’asile qui auront refusé l’offre, ou qui auront abandonné leur lieu d’hébergement, en contradiction avec les orientations nationales de la réduction du recours aux nuitées hôtelières.

L’impact de la réforme sur le 115 et le SIAO Pour faire appliquer le principe de l’orientation directive et ses incidences sur l’accueil inconditionnel, l’OFII transmettra aux SIAO une liste des demandeurs d’asile qui auront refusé l’offre d’hébergement. A charge pour les SIAO de ne leur proposer qu’une solution d’hébergement à l’hôtel en cas de situation de détresse. Cette brèche dans l’accueil inconditionnel sera difficilement praticable dans la mesure où les 115/SIAO sont soumis au principe de l’anonymat et que les appels aux 115 sont déclaratifs. Ils ne relèvent pas de leurs missions de faire le tri entre les personnes mais d’apprécier la situation de détresse des individus. Les modalités de transmissions d’informations entre l’OFII et le SIAO seront définies par décret.

Le retrait, la suspension et le refus des conditions matérielles d’accueil Les conditions matérielles d’accueil sont proposées par l’OFII et couvrent l’hébergement et une allocation financière. Elles peuvent être suspendues si le demandeur d’asile a abandonné son lieu d’hébergement ; ne s’est pas présenté aux autorités ; n’a pas répondu aux demandes d’informations ; ou ne s’est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d’asile. Dans le cas de suspension, le demandeur d’asile peut solliciter de nouveau l’OFII pour bénéficier des conditions matérielles d’accueil. Elles peuvent lui être retirées si le demandeur d’asile a dissimulé ses ressources financières, a fourni de fausses informations sur sa situation familiale, a eu un comportement violent ou un manquement grave au règlement de fonctionnement du lieu d’hébergement où il a été orienté. Enfin, elles peuvent être refusées si le demandeur d’asile sollicite le réexamen de sa demande d’asile ou n’a pas sollicité l’asile dans les 120 jours à compter de son arrivée en France, sauf motif légitime.

L’hébergement et l’accompagnement des demandeurs d’asile La loi renforce les missions de l’OFII qui doit coordonner la gestion de l’hébergement des demandeurs d’asile (CADA et Hébergement d’urgence pour demandeur d’asile [HUDA]). Elle garantit également un hébergement et un accompagnement social et administratif aux demandeurs d’asile qui auront accepté l’offre d’orientation. La loi propose deux types d’hébergement pour demandeurs d’asile : le CADA dont le statut et les missions évoluent (en attente de texte d’application) ; ou les lieux d’hébergement subventionnés par le ministère de l’Intérieur (BOP 303). Ces derniers lieux d’hébergement ne reprennent pas la terminologie d’hébergement d’urgence (HUDA) mais y sont néanmoins rattachés juridiquement. Les demandeurs d’asile hébergés dans ces lieux d’hébergement bénéficient d’un accompagnement social et administratif. Le modèle AT-SA, dispositif national géré par ADOMA mais étendu par appel à projets à d’autres opérateurs, se distingue du CADA (notamment sur le coût à la place et le taux d’encadrement) mais propose néanmoins

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un accompagnement aux demandeurs d’asile hébergés. Il rentre dans la catégorie de l’HUDA. L’HUDA recouvre donc non seulement des hébergements « stables » proposant un accompagnement aux demandeurs d’asile (AT-SA ou centres d’hébergement spécialisés) mais également des places d’hôtel. Concernant l’hôtel, les personnes seront orientées vers la plateforme d’accompagnement pour la suite de leur demande d’asile. Les gestionnaires de ces lieux d’hébergement sont soumis à certaines obligations : déclarer dans un logiciel partagé avec l’OFII des places disponibles, et alerter l’OFII en cas d’absence injustifiée et prolongée des personnes ainsi qu’en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement de fonctionnement. Ces situations peuvent justifier la suspension ou la fin de l’hébergement. Les lieux d’hébergement (CADA ou HUDA) peuvent demander une participation financière aux demandeurs d’asile aux frais d’accueil et d’hébergement, en fonction de leurs ressources.

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L’évolution des missions des plateformes d’accueil pour demandeurs d’asile (PADA) Les missions des PADA sont reconnues par la loi. L’OFII peut ainsi leur déléguer par convention certaines prestations d’accueil, d’informations et d’accompagnement social et administratif. Deux évolutions majeures sont à noter : • Elles relèvent du marché public et non plus de la subvention. (Elles sont donc prestataires de l’OFII dans l’accueil et l’accompagnement des demandeurs d’asile) • La convention conclue avec l’OFII les exonère de la demande de fonds européens (FAMI). Leurs missions comportent deux types de prestations : des prestations de pré-accueil des demandeurs d’asile en amont du guichet unique et des prestations d’accompagnement social et administratif des demandeurs d’asile qui n’auront pas été orientés vers un hébergement stable par l’OFII.

L’allocation pour demandeur d’asile

L’expulsion des lieux d’hébergement

L’Allocation temporaire d’attente (ATA) se transforme en Allocation pour demandeur d’asile (ADA) et est versée à tous les demandeurs d’asile, sauf à Mayotte, qui ont accepté la proposition d’hébergement de l’OFII. L’Allocation mensuelle de subsistance (anciennement versée en CADA) disparait. L’ADA est directement gérée et versée par l’OFII et non plus par Pôle emploi. Les gestionnaires de CADA ne versent plus l’ADA, laquelle est déduite de la dotation globale de fonctionnement (DGF) versée aux établissements. Les frais de siège étant calculés sur le montant de la DGF, ils seront diminués d’autant. Les modalités de versement ainsi que son montant seront fixés par décret. Son montant sera variable puisqu’il prendra en compte la situation familiale, les ressources, le mode d’hébergement, et, le cas échéant, les prestations offertes par le lieu d’hébergement du demandeur d’asile.

Les déboutés et les personnes qui ont obtenu une protection internationale ne peuvent se maintenir dans les lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile. Les délais de maintien dans ces lieux seront fixés par décret. Pour accélérer les procédures d’expulsion des personnes « en présence indues » des lieux d’hébergement (CADA et HUDA), la loi prévoit que celles-ci ne seront plus portées devant le tribunal d’instance mais devant le tribunal administratif selon une procédure en référé « mesure-utile ». Cette procédure sera également possible pour les demandeurs d’asile qui ont un comportement violent ou commettent des manquements graves au règlement du lieu d’hébergement. Ces procédures sont engagées par l’autorité administrative compétente et non par le gestionnaire du lieu d’hébergement.

L’évolution du modèle CADA Le CADA est maintenu dans le code de l’action sociale et des familles mais la loi lui retire beaucoup de ses spécificités : • Il n’est plus soumis à l’aide sociale, qui garantit un certain nombre de principes de l’intervention sociale ; • La loi maintient cependant l’obligation du financement de ces structures par l’État. Une convention simple ou un CPOM est conclu entre le CADA et le préfet de département; • Il n’est plus soumis à la procédure d’appel à projet; • Les décisions d’admission, de sortie et de transfert du CADA sont prises par l’OFII et non plus par le gestionnaire du CADA. Celui-ci est simplement consulté par l’OFII avant l’orientation. Le préfet de département peut s’opposer à l’orientation pour des raisons d’ordre public ;

• L’OFII est en charge du contrôle de la présence dans les lieux d’hébergement des demandeurs d’asile (ainsi que dans l’HUDA) ; • Il n’est plus soumis qu’à une seule évaluation interne et deux évaluations externes pendant la durée de l’autorisation administrative (15 ans) ; • Il n’existe pas à Mayotte (seul l’hébergement d’urgence est proposé). Le CADA accueille les demandeurs d’asile quel que soit le type de procédure devant l’OFPRA (normale ou accélérée) à l’exception des demandeurs d’asile placés sous procédure DUBLIN et ceux qui sollicitent le réexamen de leur demande. Les places CADA sont comptabilisées dans le décompte des logements sociaux pour l’application de la loi SRU.

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Le droit du travail des demandeurs d’asile Le droit au travail des demandeurs d’asile est inscrit dans la loi. L’accès au marché du travail pourra être autorisé si l’OFPRA n’a pas statué dans un délai de 9 mois à compter de l’introduction de leur demande d’asile (au lieu d’un an avant la réforme). L’autorité administrative pourra toujours opposer la situation de l’emploi en France pour refuser l’autorisation de travail au demandeur d’asile. Ce n’est que si le demandeur d’asile accède au marché du travail qu’il pourra bénéficier des actions de formations professionnelles continues.

Le nouveau rôle de l’OFII sur l’évolution de la vulnérabilité La loi oblige à tenir compte des situations de vulnérabilité (définies par la loi) pour adapter les conditions d’accueil aux besoins des demandeurs d’asile. L’OFII est en charge de s’entretenir individuellement avec chaque demandeur d’asile pour identifier ces situations de vulnérabilité. Cet entretien sera réalisé lors du passage au guichet unique mais les acteurs de l’hébergement et de l’accompagnement des demandeurs d’asile sont en charge, pendant toute la procédure d’asile, d’informer l’OFII et l’OFPRA de certaines vulnérabilités ou de leur évolution pour que ces derniers adaptent les conditions d’accueil et de procédure. L’OFII informe le demandeur d’asile de la possibilité de bénéficier d’un examen de santé gratuit par la CPAM (dans le cadre du droit commun).

Les demandes d’asile placées sous procédure « Dublin » La loi transpose le règlement Dublin III dans le CESEDA. Lorsque l’examen de la demande d’asile relève d’un autre État membre, les demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin se voient remettre une attestation de demande d’asile valant autorisation provisoire de séjour, renouvelable jusqu’au transfert effectif vers l’État responsable de leur demande. Ils ne peuvent être orientés en CADA. Ils peuvent cependant être assignés à résidence pour une période de 6 mois renouvelable « aux fins de mise en œuvre de la procédure de détermination de l’État responsable […] et du traitement rapide et du suivi efficace de cette demande ». La loi ne précise pas les lieux d’assignation à résidence. Les personnes placées sous procédure DUBLIN peuvent donc être assignées dans des structures d’hébergement. Elles bénéficient de l’allocation pour demandeur d’asile jusqu’à leur transfert effectif vers l’État responsable de leur demande.

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« LA LOI RAPPELLE LE DROIT À L’ACCOMPAGNEMENT PERSONNALISÉ POUR L’ACCÈS À L’EMPLOI ET AU LOGEMENT DES PERSONNES PROTÉGÉES. »

LE CONTENU DE LA PROTECTION La convention nationale d’accompagnement La loi rappelle le droit à l’accompagnement personnalisé pour l’accès à l’emploi et au logement des personnes protégées. Pour ce faire, une convention nationale est conclue entre l’OFII, en charge de l’intégration des étrangers, les collectivités territoriales et les autres personnes morales concernées (Pôle emploi, bailleurs sociaux, CNAM, CNAF, associations…) afin de prévoir les modalités d’organisation de ce droit. Cette disposition reprend une disposition existante qui n’était pas mise en œuvre sur les territoires. Cette convention n’est pas obligatoire à l’égard des personnes morales non volontaires et il n’est pas prévu dans la loi une déclinaison territoriale de cette convention.

Les centres provisoires d’hébergement (CPH) Les CPH sont maintenus dans le statut CHRS. La loi définit leurs missions, celles « d’assurer l’accueil, l’hébergement ainsi que l’accompagnement linguistique, social, professionnel et juridique des personnes qu’ils hébergent, en vue de leur intégration ». Cependant, la loi leur attribue également une mission de coordination des actions

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d’intégration des bénéficiaires d’une protection dans le département. Un appel à projets national de 500 nouvelles places CPH est lancé pour une ouverture d’ici le 31 décembre 2015, passant à 1 583 places au niveau national. Comme les CADA, la loi prévoit une orientation nationale par l’OFII, seul responsable des décisions d’admission, de sortie et de changement du centre, après consultation du directeur du centre. Le coût unitaire doit tendre vers 25 euros par jour par personne d’ici 2017. Une convention type sera définie par décret. L’articulation avec le dispositif généraliste d’hébergement, notamment les SIAO, n’est pas évoquée.

Les nouvelles situations d’accès à la protection La loi reconnait que les aspects liés au genre et à l’orientation sexuelle sont dument pris en considération aux fins de la reconnaissance de l’appartenance à un certain groupe social (pour l’accès au statut de réfugié). Elle reconnaît également que, parmi les atteintes graves permettant d’être protégé au titre de la protection subsidiaire, l’exécution (et non plus uniquement la peine de mort qui implique une condamnation pénale) est prise en considération.

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Les titres de séjours Pour accélérer l’intégration et éviter les ruptures de droits, la loi prévoit que dans les 8 jours à compter de la décision d’accorder l’asile, l’étranger protégé (réfugié ou bénéficiaire de la protection subsidiaire) est mis en possession d’un récépissé de demande de titre de séjour d’une durée de 6 mois renouvelable l’autorisant à travailler.

La réunification familiale La loi simplifie la procédure de réunification familiale des réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire. Elle consacre notamment que les parents d’enfants mineurs non mariés protégés peuvent rejoindre leurs enfants au titre de la réunification familiale. Mais aussi que la réunification familiale n’est pas soumise à des conditions de durée préalable de séjour régulier, de ressources ou de logement. La loi prévoit enfin que les éléments de possession d’état, en l’absence d’acte de l’état civil ou de doute sur leur authenticité, peuvent permettre de justifier l’identité des personnes.

Extraits du discours de Thierry Tuot,

Conseiller d’État, grand témoin de la matinée

« 

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LES DISPOSITIFS EXPÉRIMENTAUX D’ACCOMPAGNEMENT AU RETOUR POUR LES DÉBOUTÉS L’obligation à quitter le territoire français (OQTF) « déboutés »

Centres expérimentaux d’aide au retour (circulaire du 23 juillet 2015)

Alors que l’OQTF n’était qu’une simple faculté pour les préfectures, la loi automatise la délivrance de l’OQTF pour les déboutés du droit d’asile. Il s’agit de la seule disposition concernant l’éloignement du territoire français des déboutés dans la loi asile. En revanche, un ensemble d’autres dispositions relèvent du projet de loi relatif aux étrangers en France en cours de discussion au Parlement.

Les centres « dédiés » au retour des étrangers en situation irrégulière ne sont pas introduits dans la loi mais seront consacrés par des appels à projets expérimentaux dont les missions seront d’accueillir les étrangers en situation irrégulière (déboutés ou non) pour les héberger et les accompagner en leur proposant des aides au retour et à la réinsertion. Les personnes seront assignées à résidence au sein de ces centres expérimentaux. Il s’agira dans ces centres gérés par l’OFII de « rechercher les conditions de l’adhésion des intéressés dans le cadre d’une pédagogie active ». Faute de retour volontaire, le retour contraint sera mis en œuvre.

Clarification de la possibilité de déposer un autre titre pendant la demande d’asile Les préfectures peuvent accepter le dépôt d’un titre de séjour pendant la demande d’asile dans la mesure où l’OQTF « spécialement motivée sur le rejet de la demande d’asile » ne peut être prise « qu’après la vérification que l’étranger ne soit pas titulaire d’un autre titre de séjour en cours de validité ».

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Je suis très honoré d’être parmi vous parce que la vie du technocrate est assez éloignée de l’action sociale, et je suis heureux de pouvoir témoigner de la continuité qui doit pouvoir exister entre le droit, dont nous allons sans doute un peu parler et les réalités sociales, qui sont des nôtres. […] Nous ne parlons pas de questions de sécurité, je le redis même si le ministre de l’Intérieur était là, nous parlons de questions d’humanité, il ne s’agit pas d’avoir une posture défensive pour réagir à une marée humaine qui nous échappe, il s’agit simplement de savoir quelles sont les valeurs que nous défendons, la question est de morale et pas de confort. La deuxième question de principe, c’est que nous devons, avant tout, faire un effort collectif d’intelligence, nous ne sommes pas confrontés à un mouvement tectonique qui nous échappe ; une sorte de mouvement géologique multiséculaire qui revient régulièrement avec comme le dit la presse des marées humaines auxquelles nous devons faire face, il s’agit de personnes, d’individus, et tout ce qui se passe à une explication. Malheureusement les pouvoirs publics ont très largement renoncé à soutenir l’effort de recherche en la matière, et c’est l’une des exigences que nous devrions partager, c’est la nécessité de remettre en place, le plus tôt possible, grâce aux quelques vaillants chercheurs qui existent encore, une stratégie nationale de recherche pour comprendre, prévoir, expliquer les mouvements migratoires, leur nature, leur impact sur les sociétés, la façon dont celles-ci s’adaptent et les explications à l’intégration ou au défaut d’intégration. Nous manquons cruellement, en France, plus généralement en Europe, de cette intelligence collective, elle devrait toujours précéder l’action, même en cas d’urgence. La troisième remarque que je voudrais faire, c’est que nous ne parlons pas d’une politique isolée qui serait celle de l’asile, nous parlons d’une politique qui est celle de la construction de la Nation, la définition de nos frontières, de ce que c’est que d’être un Français ou un Européen, et de comment nous continuons à y agréger, comme nous le faisons avec succès depuis des siècles, des personnes que nous continuons à qualifier d’étrangers même lorsqu’elles ne le sont plus. Il y a une continuité entre l’asile, l’immigration et l’intégration, et c’est une question, qui est d’abord une question sociale, et pas, encore une fois, une question de sécurité ou d’économie. Mais cette politique-là, elle est totalement inséparable d’une politique sociale d’ensemble. […] Nous ne pouvons pas conduire une politique pour l’intégration et les réfugiés si nous ne construisons pas simultanément la politique sociale nécessaire. Garder cette vue d’ensemble globale est impératif, et on ne peut pas couper les problèmes en morceaux. Car chacun des morceaux commencera à protester en se retournant vers nous. Et on le voit déjà aujourd’hui dans la crise d’urgence, la crédibilité de notre discours vis-à-vis des réfugiés dépend aussi de la crédibilité de nos politiques sociales envers les catégories les plus modestes, les exclues ou les plus défavorisées. À partir de là, et pour revenir au débat qui nous occupe aujourd’hui, celui de la politique d’asile et de sa réforme, je voudrais que les

« IL Y A UNE CONTINUITÉ ENTRE L’ASILE, L’IMMIGRATION ET L’INTÉGRATION, ET C’EST UNE QUESTION, QUI EST D’ABORD UNE QUESTION SOCIALE, ET PAS, ENCORE UNE FOIS, UNE QUESTION DE SÉCURITÉ OU D’ÉCONOMIE. » éclairages que les différents participants vont donner nous permettent là aussi de dépasser le pur horizon législatif, technique français. Nous ne devons pas oublier que si l’asile existe, ce n’est pas parce que la loi française le prévoit, c’est parce que la morale publique des Nations après la deuxième guerre mondiale, honteuses de leur comportement dans les années 30, a construit une convention internationale qui nous oblige. C’est celle-là que nous appliquons et que nous devons appliquer ensemble, d’où la présence parmi nous du représentant du HCR. Est-ce que cette convention est encore un outil suffisamment moderne, est-ce qu’elle traite convenablement les problèmes que nous rencontrons aujourd’hui ? On voit bien qu’elle atteint ses limites, qu’elle est marquée historiquement, elle devrait sans doute faire l’objet d’une modernisation. Comment y parvenir ? Je ne rêve pas d’un consensus entre les 200 États de l’ONU en la matière, mais nous pourrions quand même ensemble travailler à une amélioration du contenu même de la convention pour l’adapter aux réalités d’aujourd’hui. Nous devons penser à l’échelle européenne, nous n’avons toujours pas surmonté la contradiction qui fait que l’asile est une question d’État, et seulement d’État, alors que l’Europe n’en est pas un. Et que, du coup, elle n’a pu aborder la question que sous l’angle de la gestion du cheptel des immigrés, pardon de prendre ce terme, mais pour bien montrer que la gestion des stocks n’est pas tout à fait à la hauteur du problème à la fois moral, philosophique et politique qui est le nôtre. Devons-nous aller vers plus d’intégration européenne ? Devons-nous consacrer le choix du pays comme un élément fondamental de l’asile ? Devons-nous vraiment maintenir l’utopie destructrice des accords de Dublin, avec les effets ravageurs qu’ils ont sur l’exercice effectif du droit d’asile ? Cela fait partie des questions que, je l’espère, nous pourront aborder. […] Et puis enfin, ce sont, vous le savez mieux que personne, des experts de l’intervention sociale qui doivent intervenir. Comment travailler à leur statut, à leur rôle, à leur implication, à leur formation, à la généralisation de leur présence ? Ce sont autant de questions que nos deux tables rondes permettront d’aborder. »

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TABLE RONDE

« POURQUOI UN NOUVEAU MODÈLE DE L’ASILE ? » REGARDS CROISÉS SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME

LES IMPACTS DE LA RÉFORME Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France […] Si je dois retenir deux choses de cette réforme, c’est d’abord la création de places de CADA. Il nous faut pouvoir accueillir tous les demandeurs, et les accueillir dans de bonnes conditions d’accompagnement, et l’un des axes fondamentaux de la réforme, c’est la possibilité de créer des places […] mais, en plus, de progressivement généraliser le modèle du CADA, qui est celui qui offre un accompagnement aux demandeurs d’asile. Le deuxième axe de la réforme, c’est la réduction des délais, c’està-dire la possibilité qui doit être donnée aux personnes d’obtenir le statut beaucoup plus rapidement que ce n’est le cas aujourd’hui.

Philippe Leclerc,

Représentant du HCR en France […] Aujourd’hui, l’équation qu’il faut résoudre, c’est une politique d’asile des États européens, et notamment de la France, qui soit à la fois juste et efficace. Je crois que la réponse de la réforme qui est proposée - on verra comment elle est appliquée - présente toutes les garanties nécessaires pour que la procédure soit efficace, avec les garanties qui s’y attachent, ce qui n’était pas le cas et ce qui n’est toujours pas le cas aujourd’hui en France, et qui explique en grande partie que beaucoup de demandeurs d’asile ne viennent pas vers la France. […]

Louis Gallois,

Président de la FNARS

L’amélioration majeure, c’est l’accélération de la procédure, dès lors qu’elle est bien gérée, c’est-à-dire qu’elle ne se traduit pas par un examen qui serait un peu léger des dossiers. Il faut laisser aux migrants le temps de préparer leurs dossiers, ce n’est pas toujours facile, parce qu’ils se rappellent leur passé, qu’ils doivent être capables de le traduire concrètement. Donc il faut laisser le temps aux associations de les préparer à cela. […]

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LE PRÉ-ACCUEIL ET L’ACCOMPAGNEMENT DES DEMANDEURS D’ASILE Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France Le constat de l’inégalité dans les conditions d’accueil des demandeurs d’asile, c’était un des constats qui est à l’origine de la réforme, un des axes du diagnostic partagé sur les difficultés de notre système d’asile, dans le cadre de la concertation nationale sur l’asile qui a eu lieu en 2013. Les demandeurs d’asile qui bénéficient d’un accompagnement en CADA ont beaucoup plus de chances que les demandeurs d’asile qui ne bénéficient pas du même niveau d’accompagnement d’obtenir le statut. S’agissant des plateformes d’accueil des demandeurs d’asile (PADA), […] on est parvenu à la conclusion que non seulement elles avaient toujours un rôle à jouer, mais qu’il fallait en prévoir l’intervention de manière systématique. C’est ce que prévoit aujourd’hui la réforme. C’est-à-dire que, partout, des guichets uniques seront mis en place adossés à la nouvelle procédure. Il faut qu’intervienne un pré-accueil associatif, c’est un facteur de réussite de la procédure, c’est aussi un facteur de célérité, même si c’est contre-intuitif. […] En revanche, il a fallu redéfinir l’intervention de ces plateformes d’accueil, et redéfinir le contenu des prestations qu’elles doivent offrir et il a fallu le faire dans un contexte où l’entrée dans la procédure doit être considérablement accélérée. Donc, peut-être pouvez-vous avoir le sentiment que l’intervention du pré-accueil associatif est insuffisamment riche, c’est lié à la volonté que nous avons de permettre en trois jours le passage du pré-accueil au guichet unique, mais il faut replacer cette réalité dans l’ensemble de la procédure, et se dire que nous voulons renforcer l’accompagnement dans les stades ultérieurs de la procédure, et notamment au travers de la généralisation de l’accompagnement en CADA. On a voulu systématiser le pré-accueil associatif, on en a redéfini le champ, mais dans un cadre où l’accompagnement est re-réparti tout au long de la procédure.

Philippe Leclerc,

Thierry Tuot,

Représentant du HCR en France

Conseiller d’État, grand témoin de la matinée

Je souscris également à la célérité de la procédure qui doit répondre à la situation et faire que la procédure d’asile soit efficace, mais, avec la nouvelle loi, les raisons, les motifs qui permettent à l’État de faire passer en procédure accélérée les demandeurs d’asile, peuvent être estimés peut-être à 40 % des demandes d’asile qui seront être traitées de cette manière, c’est-à-dire avec des délais particulièrement courts. […] Concernant les 24 000 personnes qui arriveront jusqu’en 2016 en France et auront été déterminées comme ayant un besoin manifeste de protection, nous pensons que ces personnes devront être très rapidement reconnues réfugiés ou obtenir la protection subsidiaire. L’un des défis de cette loi, c’est de faire en sorte très rapidement que ces demandes manifestement fondées puissent être traitées de manière très rapide et obtenir une protection internationale très vite.

[…] Il ne faut pas se tromper de combat, je rejoins ce qui a été dit sur la rapidité, la procédure accélérée, c’est la meilleure protection du réfugié. […] La contrepartie, c’est que nous fassions tous collectivement, pouvoirs publics, associations, universités, un effort très important sur la documentation publique garantie fiable. Nous manquons terriblement, pour établir les dossiers, de références communes entre l’administration, l’OFPRA, la CNDA, le Conseil d’État à la fin. Si nous lancions un programme national de recherche qui permettrait de labelliser des sites d’informations fiables, dans lesquels nous saurions que tout ce qui est dit comme informations est contrôlé, présente des garanties académiques et peut donc être utilisé par les avocats, par les demandeurs, par l’OFPRA, nous franchirions un pas très important. J’ai également déjà eu l’occasion de faire une autre proposition au HCR qui me paraît utile, c’est que nous travaillions, même si c’est à plus long terme, sur le droit des réfugiés à une identité numérique. Le plus souvent, quand on vient d’un pays lointain, la première chose que font les dictateurs ou les persécuteurs, c’est de brûler et de détruire toutes les traces, les preuves, l’identité, les titres de propriété, les affaires familiales, les correspondances. Si nous pouvions garantir collectivement au plan mondial aux réfugiés […] de pouvoir placer dans un « cloud » du HCR, un certain nombre d’éléments essentiels nécessaires - l’identité, la filiation, les dates de naissance, l’engagement dans un contrat, les titres de propriété - nous leur donnerions un droit exceptionnel de pouvoir établir ce qui aujourd’hui, nous paraît à tort ou à raison, quand le récit de vie nous est fait, quelque chose qui n’est pas très crédible, pas croyable. Ça ne coûte pas grand-chose, c’est accessible, on pourrait l’expérimenter facilement dans quelques pays, et ce serait là aussi je crois un progrès assez considérable.

Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France Je voulais réagir sur la procédure prioritaire, la procédure accélérée. Il est vrai que le législateur a voulu se donner toutes les possibilités de recourir à la procédure accélérée mais à cela il y a deux tempéraments. D’abord, le premier élément, c’est que la procédure accélérée, ce n’est pas l’ancienne procédure prioritaire. Les conditions d’accueil seront les mêmes pour l’ensemble des demandeurs qu’ils soient en procédure accélérée ou pas. Et surtout, c’est que l’OFPRA aura toujours la possibilité de replacer en procédure normale quelqu’un qui aura été placée en procédure accélérée. C’est-àdire que l’on fera bien davantage du cas par cas. […]

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LE SYSTÈME D’ORIENTATION DIRECTIF Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France

Louis Gallois,

Président de la FNARS

Il y a une polémique en Europe sur ce qu’on appelle les pays sûrs et les pays pas sûrs. Pour bénéficier du droit d’asile, vous devez venir d’une zone, où effectivement il se passe des choses qui s’apparentent à de la persécution ou de la violence. La définition des pays sûrs ne fait pas l’objet d’un accord au niveau européen. Je rappelle qu’actuellement pour les demandeurs d’asile, la première des nations concernées, c’est le Kosovo, la deuxième, c’est la République démocratique du Congo et la troisième, c’est la Tchétchénie et les micro-pays qui l’entourent. Des pays sur lesquels la notion de persécution n’est pas évidente. […] Les jugements sont extrêmement compliqués, et ne peuvent être faits que sur une base individuelle, c’est pour cela qu’il faut un peu de temps pour le faire. D’autant plus que les archives manquent. Il faut du temps, ce sera beaucoup plus facilement effectivement avec les Syriens, parce que je crois qu’on va déclarer toute personne ayant un passeport syrien comme un réfugié potentiel, ce qui me paraît normal et devrait accélérer les choses.

Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France Je vais apporter une précision sur les pays d’origine sûrs, simplement que la nouvelle loi adopte une nouvelle définition de la notion de pays d’origine sûrs qui va amener l’OFPRA à revoir la liste. Elle le fera dès que possible. Les règles de vote au sein du conseil d’administration de l’OFPRA pour déterminer la liste des pays d’origine sûrs ont été aussi modifiées, avec la possibilité pour les personnalités qualifiées de pouvoir participer au vote. Troisième et dernière précision, la Commission européenne a présenté hier la proposition d’une liste européenne de pays d’origine sûrs, qui constituerait un socle minimal auquel les États membres pourraient rajouter d’autres pays d’origine sûrs s’ils le souhaitent, mais qui constituerait ce socle minimal. Quand on est ressortissant d’un pays d’origine sûr, ça veut simplement dire qu’on est placé dans une procédure accélérée nouvelle, avec la possibilité de déclassement et de replacement en procédure normale.

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[…] Le principe de l’hébergement directif, c’est un principe qui a rassemblé au-delà des positions institutionnelles des uns et des autres, mais qui a suscité aussi un certain nombre de réticences. […] Comment ça va se passer en pratique ? Il va y avoir une étude des besoins de la personne. On ne considérera que la personne ou la famille n’a refusé un hébergement que si on a été en mesure de lui en proposer un qui correspondait à ses besoins, tels qu’évalués par l’OFII, qui a reçu cette mission d’évaluer la vulnérabilité. Tout cela ne se fera pas de manière mécanique, brutale, automatique, sans examen de la situation des personnes. Bien entendu, on ne considérera qu’il y a refus de la proposition des conditions matérielles d’accueil qu’au terme d’un dialogue avec la personne et d’une évaluation de sa situation. […]

Louis Gallois,

Président de la FNARS

Sur l’accueil directif, on peut comprendre la logique qui est que tout le monde ne doit pas aller en Seine-Saint-Denis. Il n’en reste pas moins que les personnes qui arrivent sont paumées, et qu’elles cherchent à se rapprocher de personnes de la même communauté, et que ce rapprochement a des aspects parfaitement légitimes dont il faut tenir compte. Donc nous souhaitons qu’il y ait un vrai dialogue pour que ces personnes puissent exprimer leurs besoins et qu’ils soient satisfaits autant que possible. Sur le nombre de places, c’est clair, nous voulons des places de CADA. Pourquoi des places de CADA ? Parce que quelqu’un qui est en CADA, il est accompagné, il est suivi et il a beaucoup plus de chances d’obtenir son statut de réfugié. Non pas parce qu’il y a une filière particulière, mais parce que son dossier est véritablement instruit. Il y a 26 000 places de CADA en France, il y a 36 % des demandeurs d’asile qui y ont accès. Je pense que c’est le doublement de places de CADA qu’il faut prévoir. […] Je sais bien que pour l’État c’est plus coûteux, parce que le prix de la journée CADA est plus élevé que les solutions un peu au rabais que l’on propose. Mais il est clair que, pour nous, c’est la solution qui permet aux réfugiés de véritablement extérioriser leurs droits.

Thierry Tuot,

Conseiller d’État, Grand témoin de la matinée […] Ça n’est pas parce que l’urgence nous asphyxie qu’il ne faut pas penser au long terme. On a des outils dans le code de l’urbanisme qui permettent, dans les collectivités territoriales, de faire de l’expérimentation et de déboucler les normes de construction. On pourrait très facilement les étendre pour déboucler aussi les normes de construction du code de l’habitation. […] On peut faire des choses intelligentes, confortables, sûres, massives qui pourraient être acceptées par les collectivités territoriales, à condition qu’on ne dise pas « nous allons créer un petit camp de réfugiés à l’intérieur de votre belle commune qui n’en connaissait pas » mais « nous créons un dispositif de logement d’urgence sociale, qui est inspiré d’abord par la justice parce que l’hébergement directif, c’est d’abord une mesure de justice sociale ». […] Il faut avoir une politique maitrisée d’implantation territoriale de l’ensemble des réfugiés, et il faut élargir le parc que nous construisons à du logement d’urgence, et il faut le faire dans un plan massif dans lequel nous nous affranchissons des contraintes réglementaires, en accord avec les collectivités territoriales qui le veulent si c’est possible, sans leur accord si c’est nécessaire, de façon à répartir sur tout le territoire.

Philippe Leclerc,

Représentant du HCR en France Je souscris également au modèle CADA qu’on observe tous les jours et qui a fait ses preuves. […] Il faut aussi faire en sorte que le logement social pour les réfugiés soit immédiatement disponible ou très rapidement. Car, encore une fois, les 24 000 personnes qui arriveront, ce sont des Syriens, le taux de reconnaissance du statut de réfugié ou de protection subsidiaire par l’OFPRA pour les Syriens est de 96 %. […] Lorsqu’ils arrivent en Turquie, Liban, Jordanie, ils sont immédiatement des réfugiés pour le HCR. À moins, seule question et qui se pose de plus en plus, d’appliquer la clause d’exclusion pour ceux qui auraient pu commettre des crimes graves contre l’humanité ou crimes de guerre. Et c’est important d’avoir dans le dispositif, notamment à la sortie de la Syrie, des précautions pour identifier ces personnes. […] La procédure d’asile sera la plus rapide possible mais il faut prévoir non seulement le CADA, qui est pour les demandeurs d’asile, mais le logement pérenne pour faciliter l’intégration de ces personnes qui sont des réfugiés et qui ont vocation à rester longtemps en France. […] Donc c’est très important d’avoir ce logement social pérenne très bientôt pour les réfugiés qui arriveront.

« LA PROBLÉMATIQUE DU LOGEMENT SE POSE POUR TOUS LES RÉFUGIÉS, CE N’EST PAS UNE PROBLÉMATIQUE SEULEMENT POUR LES SYRIENS, LES IRAKIENS OU LES ERYTHRÉENS. »

Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France […] La problématique du logement se pose pour tous les réfugiés, ce n’est pas une problématique seulement pour les Syriens, les Irakiens ou les Erythréens. Pour avoir de la fluidité dans notre dispositif, pour favoriser l’intégration des réfugiés, il nous faut dégager des marges du côté du logement social. C’est sans doute plus simple à mettre en place pour des personnes dont on sait d’emblée qu’elles ont vocation à obtenir le statut. Ces derniers jours, il y a eu la manifestation de la disponibilité de certaines collectivités à accueillir des réfugiés et des demandeurs d’asile d’une manière un peu plus massive que ce que l’on avait connu auparavant, il y a là une opportunité pour le système de l’asile de pouvoir créer davantage de places de CADA, davantage de logements sociaux pour les réfugiés. Il convient de mettre tout cela en relation : les initiatives des maires avec les personnes qui gèrent les CADA, qui opèrent du logement social. La mission qui a été confiée au préfet Kléber Arhoul, c’est précisément celle-là, c’est-à-dire de recueillir des offres et les mettre en relation avec des acteurs que vous êtes, les acteurs, notamment associatifs, doivent être pleinement associés à cette démarche, parce que les maires ne vont pas se transformer en gestionnaires de CADA, et donc on aura besoin des acteurs de l’accompagnement social, des gestionnaires de CADA dans ce processus, il faut en tirer partie.

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« J’AJOUTE JUSTE QU’IL Y A 40 % DE DEMANDES D’ASILE QUI SONT ACCEPTÉES EN ALLEMAGNE, 20 % EN FRANCE. ». LES DÉBOUTÉS DU DROIT D’ASILE Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France Le texte asile, il est sur l’asile. La volonté qui a été celle du gouvernement tout au long de la procédure parlementaire, c’est de dire un débouté du droit d’asile, en règle générale, pas toujours, c’est bien souvent un étranger en situation irrégulière, il n’y a pas de raisons de le traiter différemment qu’un autre étranger en situation irrégulière. […]

Thierry Tuot,

Conseiller d’État, grand témoin de la matinée

Louis Gallois,

Président de la FNARS

Le CADA, ce ne sont pas des murs. Le CADA, c’est l’accueil des demandeurs d’asile dans des structures où ils sont accompagnés selon des modalités qui sont prévues et qui justifient le prix de journée. […] Cet afflux de réfugiés conduit à découvrir des mines, que nous n’avions pas explorées jusqu’à présent, de disponibilités. Je pense que l’on peut très rapidement créer des places de CADA, il faut évidemment, dans le dialogue avec les associations, que les associations puissent mettre en place les structures d’accompagnement, ce qui suppose évidemment qu’elles reçoivent les prix de journée qui sont ceux des CADA. Deuxième remarque, strictement personnelle, je ne crois pas au chiffre de 24 000. Il y a deux millions de réfugiés syriens en Turquie, il y a un million au Liban, un million en Jordanie, et nous, ce serait 24 000 ? Je pense qu’il y a une disproportion. 800 000 en Allemagne, et 24 000 chez nous ? Non, je pense que ce sera beaucoup plus et qu’il faut s’y mettre maintenant, tout de suite et dans l’urgence. Ceci doit être fait avec des crédits additionnels. Je ne voudrais pas que l’on prenne sur les budgets des plus pauvres pour accueillir d’autres personnes qui sont dans la grande difficulté. C’est de l’addition, pas de la substitution. […] Je ne suis pas en train de dire qu’il faut faire exploser les dépenses publiques. Mais cela suppose que des priorités soient données, et nous avons toujours dit à la FNARS que la priorité elle est pour les plus démunis.

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[…] Aussi longtemps qu’on n’aura pas fait un aggiornamento collectif, dans la population et au niveau politique pour accepter qu’il y a des immigrés qui rentrent - c’est normal, c’est légitime, c’est souhaitable, c’est souvent moralement bienvenu - et expliquer pourquoi ils ne rentrent pas tous, […] nous continuerons à patiner sur la reconduite à la frontière. Alors la loi sur l’asile a deux mérites, en allant vite, on se donne plus de chances de reconduire, et en traitant bien, on se donne aussi plus de chances de reconduire. On peut espérer que l’asile cessera d’être le premier pourvoyeur de clandestins en France. Puisque vous savez, que grosso modo, le volume de clandestins est à peu près égal au volume de déboutés du droit d’asile, ce qui n’est pas par hasard. Quand vous laissez les gens trois ans à attendre une décision, les enfants naissent, ils sont à l’école, et si les gens se débrouillent, ils sont arrêtés une fois, deux fois et la troisième fois, au bout de cinq ans, on leur donne des papiers. C’est bien pour ça que j’ai proposé qu’on commence par le faire, plutôt que d’attendre cinq ans, au moins on économiserait le temps de contrôle policier. Mettons-nous d’accord d’abord sur l’observation des réalités, si les flux migratoires existent, c’est parce que nous en sommes les coauteurs, je ne cherche pas à dire que l’on est responsable ou coupable, ce n’est pas par hasard que les gens viennent chez nous, on les a colonisé, ils parlent notre langue, ils viennent ici. On leur donne une vitre, il regarde devant, on serait à leur place, on voudrait rentrer aussi. En plus, on fait des murailles, les murailles c’est fait pour être franchies. Quand on les a passées, ça empêche de repartir. Ouvrons des portes, quand on ouvre des portes, ça a l’immense avantage que ça se franchira dans les deux sens. […]

Pierre-Antoine Molina,

Philippe Leclerc,

Directeur général des étrangers en France

Représentant du HCR en France

Si l’on considère que les déboutés du droit d’asile ont vocation à rester sur le territoire, quelle que soit leur situation, à ce moment-là, il n’y a pas de soutenabilité du système de l’asile, ce n’est pas là simplement une question de moyens, c’est qu’il serait incompréhensible qu’on accorde un traitement différencié aux demandeurs d’asile et que l’on mette en place les dispositifs d’accueil, si, au final, le résultat est le même pour tous. Il me semble donc que les déboutés du droit d’asile, sauf s’ils ont vocation à avoir un droit au séjour à un autre titre, ce qui est possible, ont vocation à quitter le territoire. […]

Le système d’asile et la convention de Genève, et toutes les directives qui ont cherché à la mettre en œuvre depuis, c’est un bien très précieux, et l’intégrité du système de l’asile, c’est aussi un bien que l’on doit protéger. […]

Louis Gallois,

Président de la FNARS

D’abord sur l’assignation à résidence qui est prévu dans la loi, ce n’est pas quelque chose qui nous enchante dans les centres d’hébergement parce que nous devenons coresponsables de cette assignation à résidence, ce qui n’est pas du tout notre rôle. Nous sommes attachés à l’accueil inconditionnel dans les centres d’hébergement, c’est pour nous une pierre fondatrice des valeurs de la FNARS. Deuxièmement, les travailleurs sociaux n’ont pas vocation à devenir des auxiliaires de justice. Cela n’est pas à eux de veiller à ce que cette assignation à résidence soit respectée. Et troisièmement, l’assignation à résidence, c’est bien joli, mais dès que les gens sont assignés à résidence, ils s’en vont, ils vont ailleurs. Et ils vont où ? Dans les squats, dans des lieux où ils savent qu’on ne pourra pas aller les chercher, donc cette assignation à résidence est une affaire délicate. J’ajoute que nous ne voulons pas que la police rentre dans les centres d’hébergement, sauf s’il y a une décision du juge. Sur les déboutés, quelle est la situation ? Je prends l’année 2014 : 60 000 demandeurs d’asile, 15 à 18 000 demandes acceptées, 5 000 retours au pays organisés, cela veut dire qu’à peu près 35 000 à 40 000 personnes restent sur le territoire national. Que fait-on de ces personnes ? On peut toujours dire, ils ont vocation à rentrer dans leur pays, on est incapable d’organiser ce retour. […] Le résultat est là, les déboutés actuellement embolisent les structures d’hébergement pour une raison simple, c’est qu’ils n’ont le droit ni au logement, ni au travail. […] Nous considérons que passer un certain temps, il faut donner à ces déboutés le droit de travailler et de se loger. Parce que sinon ils sont dans les centres d’hébergement ou dans des squats, et comme ils ne peuvent pas travailler, ils sont soit des assistés complets, soit ils vivent de mendicité, vivent de trafic ou de travail au noir. Et ça concerne 40 000 personnes par an, ce n’est pas rien.

Louis Gallois,

Président de la FNARS

J’ajoute juste qu’il y a 40 % de demandes d’asile qui sont acceptées en Allemagne, 20 % en France. On peut se poser la question.

Philippe Leclerc,

Représentant du HCR en France Je voudrais simplement commenter que le taux de protection n’est pas un instrument de comparaison si facile à amener. Aujourd’hui, ceux qui demandent l’asile en France, sont très différents de ceux qui demandent l’asile en Allemagne. Ce sont essentiellement des Syriens, si on continue à avoir plus de Syriens qui viennent, très naturellement, il va augmenter et rejoindre celui de l’Allemagne. C’est l’un des travers du système de l’asile français, sa longueur, qui fait qu’aussi des personnes, qui n’ont aucune autre possibilité d’arriver en France, entrent à travers cette ouverture, la seule ouverture, à part le regroupement familial, qui existe en France pour le faire. […]

Pierre-Antoine Molina,

Directeur général des étrangers en France […] Il n’est pas question de remettre en cause l’accueil inconditionnel, il n’est pas question de demander aux personnes qui gèrent des centres d’hébergement d’être auxiliaires de justice ou de police. Les services de police n’ont vocation à intervenir là où il y a hébergement que dans les conditions qui régissent la protection du domicile, puisqu’il s’agit en règle générale de domicile. Par contre, sur l’assignation à résidence, on ne peut pas à la fois dire qu’il ne faut pas faire de rétention, la France en fait beaucoup trop, et dire il ne faut pas faire de l’assignation à résidence parce que ce n’est pas efficace. […] À un moment donné, si on partage le constat qu’il faut quitter le territoire, parce qu’elles n’y ont pas le droit au séjour, il faut aussi s’interroger sur les moyens, dans le respect du droit, de la dignité qui permettent de s’en assurer.

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TABLE RONDE

LE RÔLE DES ACTEURS DANS LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME CONSÉQUENCES POUR LES PERSONNES, LE TRAVAIL SOCIAL, LES ASSOCIATIONS

Yannick Imbert,

Drecteur général de l’OFII

LE PARCOURS DES DEMANDEURS D’ASILE Marie Paindorge,

LA NOTION DE VULNÉRABILITÉ

Yannick Imbert,

Directrice du pôle asile du Centre d’action sociale protestant

Directeur général de l’OFII

[…] Une personne qui souhaite solliciter la protection en France doit être reçue sous trois jours par une plateforme associative, ou en tout cas déléguée sous format d’appel d’offres, pour être orientée auprès des préfectures pour sa demande d’admission au séjour où il y aura un guichet unique préfecture/OFII. À l’issue de ce temps, les personnes devraient être orientées vers un hébergement dédié, et s’il n’y a pas suffisamment de places d’hébergement dédié, être orientées vers un accompagnement en plateforme. Ça, c’est le schéma, et on l’a tous compris, je crois que la loi adoptée dans ses principes ne pose pas de difficultés, ni dans ses objectifs, mais plutôt sur comment atteindre ces objectifs. Je dirais que ce qu’on constate, c’est que pendant ce délai extrêmement court durant lequel on reçoit […] aucun temps d’accompagnement n’est prévu. Aucun temps social. Effectivement, la question, c’est qu’il faut que la personne remplisse son dossier d’admission au séjour pour qu’elle aille voir l’administration française. Néanmoins cette personne, avant d’être un demandeur d’asile, c’est un être humain. […] Le délai de trois jours est extrêmement ambitieux, il est à l’avantage des demandeurs d’asile, et là, je crois qu’on a un objectif commun, sous réserve que ce délai puisse parfois être rallongé pour des questions sociales.

Sur l’accompagnement ou l’absence d’accompagnement sur le pré-accueil, il me semble qu’il faut lever une ambiguïté, personne ne conteste la nécessité de cet accompagnement. La question, c’est finalement à quel moment il doit se produire, la position qui a été précisée par le gouvernement est de considérer que plus vite les délais étaient tenus, plus vite les gens entraient en procédure, plus vite leur droit était reconnu, et plus vite on pouvait enclencher précisément à la fois les conditions matérielles d’accueil évidemment, et donc l’accompagnement. […] Sur la question des délais, juste une indication, on est passé d’un mois et demi de délai en moyenne nationalement à 12,7 jours pour être très précis. Donc l’objectif de trois jours au 1er novembre, il nous semble tout à fait tenable. Après, vous avez raison sur deux points. D’abord, la situation est très disparate selon les régions, les flux ne sont pas totalement comparables, mais on note que même dans des régions où il y a des flux très importants, ces progrès dans les délais sont en train de se produire, donc c’est une première dimension. La deuxième, qu’on ne maitrise pas plus vous que nous, c’est l’augmentation de la parallèle des flux. Mais on a monté un système où on a formaté les guichets uniques […] qui en fonction de la réalité des flux va se réadapter. […]

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Sophie Pélgliasco,

Directrice de cabinet du directeur général de l’OFPRA À l’OFPRA, nous avons bénéficié de 50 recrutements d’officiers de protection instructeurs qui sont chargés d’examiner les demandes d’asile. C’est peut-être une des mesures phares qui va nous aider à traiter les demandes d’asile dans le cadre de la nouvelle loi. On a également fait toute une réforme interne à l’OFPRA, elle a débuté en mai 2013, on a essayé de rationaliser au maximum nos procédures internes pour pouvoir traiter plus efficacement, dans le respect effectivement d’un examen particulier et de qualité de la demande d’asile, des demandes toujours plus nombreuses. […]

[…] La vulnérabilité que l’on va dépister ou diagnostiquer, c’est celle qui consiste à orienter le mieux possible le demandeur d’asile dans son hébergement. […] [Les agents de l’OFII] ne sont pas des travailleurs sociaux au sens : pas de prise en compte individualisée et personnalisée des situations, puisque nous sommes essentiellement une plateforme d’accueil et d’orientation. Mais nous avons fait en sorte de former nos agents à autre chose que de remplir des cases dans un formulaire. Donc il y aura un vrai audit. Nous allons consacrer de trois quarts d’heure à une heure et demie à écouter le demandeur d’asile et faire en sorte, dans la difficulté des capacités d’accueil, qu’on ne mette pas quelqu’un à 450 kilomètres d’un centre de dialyse, s’il a besoin d’être dialysé toutes les trois semaines, qu’on ne mette pas dans une chambre ou dans deux chambres, une famille avec quatre enfants. Alors ça va être compliqué, mais je rappelle qu’on nous donne les moyens dans la loi. [..] C’est l’OFII qui devient le gestionnaire de l’hébergement des demandeurs d’asile en France. […] Quand on verra qu’une région sous-utilise sa capacité d’accueil, on prendra la main et on affectera, mais vous aurez compris que ça n’a pas de caractère bureaucratique et automatique, on utilisera et on optimisera le parc. On va faire en sorte, de mieux héberger et de manière plus adaptée. Dernier élément, on parle du guichet unique, mais il y a un back-office de la réforme de l’asile : un demandeur d’asile dont la situation va se modifier - composition familiale, état de santé, ou toute autre raison - pourra venir dans les directions territoriales de l’OFII pour demander éventuellement une modification de son hébergement. C’est en cela que le dialogue avec les associations sera important. […]

« LA VULNÉRABILITÉ QUE L’ON VA DÉPISTER OU DIAGNOSTIQUER, C’EST CELLE QUI CONSISTE À ORIENTER LE MIEUX POSSIBLE LE DEMANDEUR D’ASILE DANS SON HÉBERGEMENT. »

Marie Paindorge,

Directrice du pôle asile du Centre d’action sociale protestant Le problème du mot vulnérabilité, c’est qu’en fonction du métier de chacun, on y met une définition, et que malheureusement au moment de la concertation sur la réforme de l’asile je crois que nous n’avons pas complètement abouti sur la question d’une définition commune de la vulnérabilité. […] La vulnérabilité, au sens que nous connaissons en plateforme ou en CADA, est plutôt une vulnérabilité, que moi je qualifie de sociale, mais elle n’engage que moi qui avec cette notion de Monsieur bat Madame, Madame maltraite les enfants, il y a une défaillance éducative, il y a un problème de santé, etc. Cette notion-là, en CADA, il n’y a pas de souci, c’est-à-dire qu’une personne qui est orientée au bout de trois jours en CADA, l’accompagnement va se mettre en place. Néanmoins, il y a des choses qui se voient avant trois jours, et que d’avoir le temps de les identifier avant, c’est aussi prévenir ce qui peut se passer après. Mais

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la prévention en France, on n’est jamais très fort, jusqu’à présent. Ensuite, le temps que les hébergements puissent sortir de terre, il y a la possibilité pour les personnes d’être réorientées après le guichet unique en plateforme qui relève d’un cahier des charges dans lequel il y a un certain nombre de prestations qui sont de l’ordre de l’accès aux droits mais pas dans la lecture que moi j’en ai faite d’accompagnement social sur les questions que je viens d’évoquer. Donc, aujourd’hui, il y a un gap à ce niveau-là qui n’est peut-être que transitoire, le temps que l’hébergement soit complètement disponible pour l’ensemble des demandeurs d’asile quelle que soit leur situation. En tous les cas pour ces personnes qui sont suivies en dehors de tout type d’hébergement, leur défi va être quand même gros, ça va être de pouvoir faire leurs démarches dans des délais qui sont courts, et tant mieux, avec une priorité qui va être de se mettre un toit sur la tête, et avec des difficultés sociales souvent importantes. Et là, c’est un peu à deux vitesses.

JOURNÉE D ’É T UDE NATIONAL E RÉFORME DE L’A SIL E

« JE SUIS ASSEZ D’ACCORD SUR LE CONSTAT GÉNÉRAL DE LA NON-VALORISATION DES MÉTIERS SOCIAUX DANS LA FONCTION PUBLIQUE. » Katya Julienne,

Directrice adjointe de la Direction générale de la cohésion sociale

Yannick Imbert,

Directeur général de l’OFII

Je comprends les craintes, mais pardon de le dire ainsi pour aller vite, c’est ignorer la réalité du métier de l’OFII, je veux dire nous ne prétendons pas être les spécialistes de ces questions-là, que vous êtes parce que c’est votre métier. Pour autant, le dépistage des situations manifestement compliquées, on les connaît déjà à l’OFII, lorsqu’on reçoit, puisque nous avons des auditeurs sur le premier accueil. […] Alors vous dire qu’on les dépiste aussi bien et aussi régulièrement, il n’y a pas de polémique, ce n’est pas mon propos mais à l’inverse, on ne passe pas à travers ces choses, c’est-à-dire qu’on a une sensibilité. […] Nos agents sont issus pour certains de ce que l’on appelle la filière sociale, mais globalement sont des agents qui, un jour, ont candidaté pour rentrer dans un organisme chargé de politiques sociales, et non pas de politique au sens de ministère de l’Intérieur. Et ça, ça reste très profondément ancré dans nos personnels. […] Dernier élément, je rappelle que le législateur a introduit la possibilité que l’administration ne puisse pas refuser des entretiens séparés, s’il y a une demande.

[…] Il me semble que la question de l’accompagnement des demandeurs d’asile, c’est à la fois un accompagnement spécifique, et ça a été évoqué en CADA pour renforcer leur chance d’accès à un statut, mais c’est aussi un accompagnement qui a des dimensions qui sont communes à d’autres types de publics, notamment celui que vous évoquez sur l’accès aux soins. Le rapport du Samusocial montrait bien que la question de l’accès aux soins, en l’espèce c’était en Ile-de-France, se pose pour des publics de ce type là mais pour d’autres aussi, et d’ailleurs le sujet a été explicitement traité dans le cadre du plan de réduction des nuitées hôtelières. […] La question du renforcement de l’accompagnement social est aussi traitée puisque nous avons renforcé les moyens donnés à la Croix-Rouge pour améliorer l’accompagnement social de ces familles. Et, enfin, une autre dimension, c’est l’accès à l’aide alimentaire qui a été également traitée, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que nous avons à progresser, et des efforts sont déjà mis en œuvre, sur l’aspect interministériel pour l’accès aux soins et à tout un tas de prestations pour ce public comme pour les autres, et à la fois au plan national puisqu’il y a des actions que nous pouvons mettre en œuvre au plan national, je pense par exemple à l’accélération de l’ouverture des droits pour les réfugiés, puisque ce sont des choses que la CNAF met en œuvre via les CAF, et ensuite nous avons aussi à nous adapter au plan local parce que nous savons aussi que les difficultés qui ont été évoquées en Ilede-France ne se retrouvent pas dans toutes les régions. […]

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Thierry Tuot,

Conseiller d’État, grand témoin de la matinée Avant les crédits, avant les normes, la principale ressource que nous avons c’est la ressource humaine, et nous n’avons pas collectivement encore réfléchi à la façon d’investir dans son développement et dans sa pérennisation. […] Il n’y a pas d’école nationale supérieure de l’ingénierie sociale qui devrait attirer l’élite de la jeunesse française, et nous n’avons à aucun niveau les capacités de formation de l’État pour valoriser et développer les compétences d’ingénierie sociale. […] Pourquoi ne pas créer enfin une filière qui permettrait le partage d’expérience, la formation en commun, et puis des étapes de carrière où l’on pourrait passer de l’OFPRA à l’Éducation nationale, de là à des ministères sociaux, de là à l’urbanisme ou au logement, en essayant de valoriser le savoir-faire ? Alors que quand quelqu’un quitte la filière, épuisé, aujourd’hui, il s’arrête là et nous perdons une expertise. Il en va de même dans le secteur associatif, on sait bien que l’urgence à laquelle vous êtes confrontés va vous conduire à développer non pas des CDI d’ingénieurs diplômés mais de l’emploi aidé et précaire. Comme si pour l’action sociale, on pouvait toujours prendre ce qu’il vient au passage en bricolant un peu, alors que nous avons besoin de statuts, de formations, de partage d’expériences, de positionnements sur des conventions collectives et là aussi il me semble que notamment les organisations syndicales pourraient réfléchir collectivement à cela. Enfin, rappelons que le devoir d’intégration et d’accueil c’est celui de la société entière, il nous faut des interprètes à l’hôpital, comment penser qu’on va accéder à la santé quand on ne parle pas la langue ? Il faut pouvoir accéder à la justice, il n’y a plus d’associations qui font d’interprétariat dans la justice au profit des demandeurs d’asile, ou en règle générale des immigrés. Il faut passer le permis de conduire, quels sont les formateurs qui parlent une deuxième langue ? Il faudrait que nous ayons une réflexion collective, et surtout une stratégie nationale de développement et d’investissement dans les ressources humaines, dont, sans doute, vos associations ou établissements seraient à l’avant-garde mais qui doit être partagée avec l’ensemble des acteurs sociaux.

Yannick Imbert,

Directeur général de l’OFII

Je suis assez d’accord sur le constat général de la non-valorisation des métiers sociaux dans la fonction publique. Ce que je peux indiquer, c’est qu’à la faveur de la réforme de l’asile, on essaie modestement de s’inscrire dans cette dynamique-là. J’indique que pour la mise en place des guichets uniques la formation des personnels de la préfecture et de l’OFII s’est faite de manière homogène, ils ont été formés ensemble parce qu’à l’avenir ce n’est pas de savoir si c’est un agent de la préfecture qui fait ceci ou un agent de l’OFII qui fait cela, il y a un guichet unique, il faut que cela devienne transparent. […] Cette professionnalisation est vraiment un axe essentiel pour nous et c’est en lien direct avec ce que l’on évoquait sur la vulnérabilité, quand on ne sait pas faire quelque chose, il faut se donner des moyens nouveaux. C’est ainsi qu’à l’OFII, à la fois pour ces questions de vulnérabilité et puis pour l’autre aspect de procédure des étrangers malades, nous avons créé un pôle santé qui n’existait pas. […] Nous mettons en place un réseau de médecins coordonnateurs pour homogénéiser les procédures, on fait en sorte de former et professionnaliser. […]

Sophie Pélgliasco,

Directrice de cabinet du directeur général de l’OFPRA […] En ce qui concerne l’OFPRA, il s’agit de détecter des vulnérabilités qui sont liées au motif de la demande d’asile. Ce que je trouve intéressant, c’est qu’il y a des mesures de transmission d’informations qui sont prévues dans la loi, c’est-à-dire que l’OFII transmet les vulnérabilités qu’il a détectées à l’OFPRA, avec l’accord du demandeur d’asile. En retour, une fois que l’OFPRA a examiné la demande, il peut transmettre les vulnérabilités qu’il a détectées, avec l’accord du demandeur d’asile, à l’OFII. Chacun détecte les vulnérabilités qu’il peut et ensuite il y a une coordination, pour que chacun puisse les utiliser dans l’optique de répondre aux besoins particuliers des demandeurs d’asile, des réfugiés, des protégés internationaux. […]

LA PARTICIPATION D’UN TIERS LORS DE L’ENTRETIEN À L’OFPRA Sophie Pélgliasco,

Directrice de cabinet du directeur général de l’OFPRA […] Pour nous, c’est une très bonne chose la présence du tiers en entretien, on a tendance à penser quand même qu’en renforçant la phase administrative d’une demande d’asile on va renforcer le système, c’est-à-dire qu’on a un taux d’annulation par la CNDA qui est encore trop élevé à mon sens, même si maintenant l’OFPRA accorde plus de protection que la CNDA, il n’empêche qu’il faut renforcer la phase administrative. Quand je dis renforcer la phase administrative, ça veut dire, par l’intermédiaire du tiers, c’est-à-dire que le tiers va aider aussi à ce que l’entretien produise ses effets, et il va aider également à l’octroi d’une protection par le biais de l’identification d’un besoin de protection. […]

Thierry Tuot,

Conseiller d’État, grand témoin de la matinée C’est très problématique la présence du tiers, parce qu’il faut être honnête, pour les fonctionnaires qui conduisent les entretiens, avec beaucoup d’impartialité, de compétence et de professionnalisme, c’est extraordinairement lourd, et il ne faut pas idéaliser, les accompagnants ne sont pas toujours à même de bien comprendre ce qu’il est en train de se passer. […] Il va falloir se préoccuper au sein du tissu associatif, comme dans les barreaux qui ont un énorme effort à faire, de la professionnalisation des accompagnants. […]

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Pour conclure, je voudrais insister sur le fait que nous avons deux responsabilités historiques, et que l’histoire jurera notre génération. La mienne est celle qui, pour la première fois depuis vingt siècles, n’a jamais risqué de mourir au combat, ou un front, ou de voir l’un de ses proches y mourir. Il faut mesurer la chance extraordinaire que nous avons et l’histoire jugera ce que nous avons fait de ce confort vis-à-vis du reste du monde. […] Ce qui veut dire aussi que nous avons un devoir de pédagogie et que nous ne pouvons pas avancer armés de nos certitudes sur l’exercice de nos compétences militantes, professionnelles, associatives ou institutionnelles. Nous devons comprendre les réticences, les incompréhensions, les oppositions et les surmonter en faisant ensemble une pédagogie, c’est pour ça que j’appelais à un effort collectif d’intelligence académique de ce qui se passe, pour aider la classe politique, l’opinion, les medias à comprendre ce qui se passe, nous devons en être les ambassadeurs. Enfin, il faut toujours le rappeler, nous ne travaillons pas sur un micro-sujet social isolé, nous travaillons sur la fine pointe d’un dispositif qui est la promotion de ce que nous croyons être la juste nation française, ça n’est pas un problème isolé, nous ne devons pas ignorer les problèmes sociaux de toute nature. Les pouvoirs publics doivent maintenir, et maintiennent effectivement, des politiques sociales globales. Tout se tient, nous ne pouvons pas isoler les damnés et les pauvres les uns des autres, il faut que nous continuions à avoir une approche collective, cela n’exclut pas la spécialisation, mais il faut que nous gardions cette vue d’ensemble qui est une vue proprement politique.

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RÉFLEXION ISSUES DES ATELIERS THÉMATIQUE 1

THÉMATIQUE 2

LE PREMIER ACCUEIL

« Entre le rendez-vous à la plateforme et celui au guichet unique, il se passe 3 jours. Ça a l’air court 3 jours mais si on ne peut pas manger et que l’on dort à la rue, ça peut être très long… », dit un participant.

Le contexte posé par la réforme Les demandeurs d’asile seront orientés par l’ensemble des acteurs vers des « plates-formes de pré-accueil », faisant elles-mêmes partie de plates-formes d’accueil et d’accompagnement pour demandeurs d’asile qui auront pour mission d’aider à l’enregistrement de la demande d’asile. • Ces plates-formes de pré-accueil seront réparties, selon une estimation d’arrivée de demandeurs d’asile, dans 63 départements. • L’enregistrement d’une demande d’asile se fait dans un délai réduit à trois jours ouvrés après la manifestation d’intention de demander l’asile à cette plate-forme de pré-accueil (Ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsque, sur un territoire, un nombre élevé d’étrangers demandent l’asile simultanément). L’entretien doit avoir lieu le jour où le demandeur d’asile se présente à la plate-forme pour enregistrer des informations administratives et donner un rendez-vous dans les 48h auprès du nouveau « guichet unique » territorialement compétent. Un document sur la demande d’asile réalisé par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration est remis à la personne. • A ce stade d’entretien, aucun accompagnement social n’est prévu ni aucune recherche ou orientation vers un centre d’hébergement ne sont proposées pour les personnes sans solution. La question des frais de déplacement des demandeurs d’asile pour se rendre au rendez-vous au guichet unique n’est pas évoquée non plus. • Les plates-formes deviennent prestataires de l’OFII et leurs missions sont encadrées par un cahier des charges. On passe d’une logique de partenaire (subvention) à celle de prestataire (marché public).

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En amont de la journée organisée le 10 septembre 2015 à Marseille, la FNARS avait rédigé 43 propositions, présentées à la presse et aux partenaires. Durant une bonne partie de l’après-midi du 10 septembre, 10 groupes de 40 personnes ont travaillé sur 5 thématiques. En fin de journée, 5 rapporteurs ont présenté les recommandations issues de ces travaux, dans le but d’enrichir ensuite les propositions finales de la FNARS sur la réforme de d’asile.

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Les questions débattues par les participants aux ateliers de la thématique 1 • Quel rôle pour les associations dans le premier accueil des demandeurs d’asile ? Quelle plus-value apportent les associations dans l’accueil des demandeurs d’asile par rapport à l’OFII ? • Que penser d’un référentiel commun sur l’accueil et l’accompagnement des demandeurs d’asile ? Quels points de vigilance à avoir sur ce référentiel ? • Quel type d’articulation (OFII, Préfecture, DDCS, acteurs de la santé, Associations spécialisées sur la demande d’asile, association généraliste..). Que peut-on envisager pour défendre un accueil digne et de qualité ? • Comment réinstaurer un rapport de partenariat et non de simple exécutant avec les autorités publiques dans le premier accueil des demandeurs d’asile ?

LES RECOMMANDATIONS DES PARTICIPANTS AUX ATELIERS DE LA THÉMATIQUE 1 • Demander une réflexion sur les moyens d’accompagnement, de prise en charge et d’hébergement des personnes entre leur arrivée sur le territoire et le rendez-vous avec le guichet unique • Renforcer le cadre organisationnel de l’accueil pour une meilleure qualité et une plus grande accessibilité • Développer les lieux de pré-accueil et de guichets uniques sur l’ensemble du territoire dans une triple logique de proximité, d’humanisation de la procédure et dans le respect des délais de premier accueil • Étendre les capacités de domiciliation associative

L’HÉBERGEMENT DES DEMANDEURS D’ASILE « La DDCS nous a demandé de faire cohabiter des gens qui ne se connaissent pas dans une même chambre ou des appartements, avec des enfants, des familles, des personnes isolées, des adolescents, parfois de sexes différents : comment défendre un accueil digne dans ces conditions ? Les gens refusent et c’est normal : comment réagiriez-vous dans ces conditions ? », dit un participant.

Le contexte posé par la réforme La loi garantit un hébergement pour l’ensemble des demandeurs d’asile qui auront accepté le principe de l’orientation directive (cœur de la réforme). Les demandeurs d’asile en procédure de réexamen en sont cependant exclus. La loi parle de lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile qui comprennent : • les CADA, • les autres lieux d’hébergement financés sous le BOP 303 (crédits du ministère en charge de l’asile) : il s’agit des HUDA et des dispositifs tels que l’AT-SA.

Les questions débattues par les participants aux ateliers de la thématique 2 • Que penser d’une déconnection de l’hébergement et de l’accompagnement des demandeurs d’asile ? • Comment garantir un accueil digne à l’ensemble des demandeurs d’asile ? Quelle organisation territoriale doit être mise en place pour assurer cette obligation communautaire ? Avec quels acteurs ? • Quel lien les acteurs de l’hébergement généralistes entretiennent-ils avec les acteurs de l’hébergement spécialisés pour les demandeurs d’asile ? Quels sont les partenariats mis en place ? • Que penser du CADA rural ? • Comment adapter l’hébergement aux situations de vulnérabilité et à leur évolution?

LES RECOMMANDATIONS DES PARTICIPANTS AUX ATELIERS DE LA THÉMATIQUE 2 • Développer un référentiel de l’accueil digne des demandeurs d’asile, appuyé sur une analyse objectivée des coûts à usage interne du réseau (quel coût à la place pour quelle qualité d’accueil ?) • Se coordonner avec les acteurs du territoire pour couvrir les besoins des demandeurs d’asile (alimentation, transport, accès aux soins) • Porter la demande de programmation de places CADA à 40 000 • Prévoir également une programmation de moyens d’accompagnement permettant de prendre en charge la souffrance psychique

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THÉMATIQUE 4 L’ACCOMPAGNEMENT ET L’HÉBERGEMENT DES DÉBOUTÉS THÉMATIQUE 3 LE DROIT À L’ACCOMPAGNEMENT ET LA PRISE EN COMPTE DE LA VULNÉRABILITÉ DES DEMANDEURS D’ASILE « (…) Les demandeurs d’asile ne sont pas tous vulnérables et n’ont pas tous envie d’être appréhendés comme vulnérables. Il y a une sorte de résilience chez les demandeurs d’asile et il n’est pas judicieux de dire que par définition un demandeurs d’asile doit être dit “vulnérable” »., dit un participant.

Le contexte posé par la réforme La loi introduit deux éléments fondamentaux qui n’existaient pas auparavant : • l’accompagnement social et administratif de tous les demandeurs d’asile quel que soit son lieu d’hébergement, • l’obligation pour l’OFII et l’OFPRA de prendre en compte la vulnérabilité des demandeurs d’asile pour adapter les conditions d’accueil (OFII) et de procédure (OFPRA).

Les questions débattues par les participants aux ateliers de la thématique 3 • Que penser d’un référentiel commun sur l’accueil et l’accompagnement des demandeurs d’asile ? Quels points de vigilances à avoir sur ce référentiel ? • Doit-on encore parler de vulnérabilité ? Que proposer d’autres comme terminologie ? • Quel est le rôle des associations dans l’évaluation de la vulnérabilité ? Quelle articulation avec l’OFII et avec l’OFPRA pour être certain que la vulnérabilité soit prise en compte et qu’une réponse soit apportée ? • Comment garantir un maillage territorial de l’accompagnement des demandeurs d’asile prenant en compte les situations de vulnérabilité?

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LES RECOMMANDATIONS DES PARTICIPANTS AUX ATELIERS DE LA THÉMATIQUE 3 • Respecter une égalité de traitement quelle que soit la demande, avec un droit à l’accompagnement identique en CADA pour tous les demandeurs d’asile • Renforcer la place des associations dans la détection de cette vulnérabilité, en formant par exemple les travailleurs sociaux dans l’aide au récit • Développer des équipes pluridisciplinaires mobiles composées de travailleurs sociaux, de juristes et de professionnels de santé • Prendre en compte la situation d’errance dans les critères de vulnérabilité

« Le travail social, ce n’est pas contribuer au contrôle social », dit un participant.

Le contexte posé par la réforme La loi portant réforme du droit d’asile propose peu de dispositions spécifiques sur les déboutés. Un autre projet de loi sur le séjour des étrangers en France, en cours de discussion à l’Assemblée, précisera les mesures d’éloignement concernant les déboutés. • Le développement des assignations à résidence (le placement en centre de rétention administratif devant être utilisé de manière plus exceptionnel). Ces placements peuvent avoir lieu au sein des centres d’hébergement (CHRS, CHU) ou à l’hôtel. • La promotion des aides aux retours dans toutes les structures accueillant les migrants (circulaire Plan migrant du 23 juillet 2015), • Les centres « dédiés » au retour des étrangers en situation irrégulière seront consacrés par des appels à projets expérimentaux dont les missions seront d’accueillir les étrangers en situation irrégulière (déboutés ou non) pour les héberger et les accompagner en leur proposant des aides au retour et à la réinsertion. Les personnes seront assignées à résidence au sein de ces centres expérimentaux. Il s’agira dans ces centres gérés par l’OFII de « rechercher les conditions de l’adhésion des intéressés dans le cadre d’une pédagogie active ». Faute de retour volontaire, le retour contraint sera mis en œuvre. Les opérateurs de l’hébergement seront sollicités pour une contractualisation avec l’OFII . • L’expérimentation prévoit une identification des personnes en séjour irrégulier par « l’OFII, la DDCS et les acteurs locaux ou opérateurs concernés ». • Une expulsion des lieux d’hébergement par le préfet (CADA et centre d’hébergement pour demandeurs d’asile) selon une procédure accélérée devant le tribunal administratif (référé « mesureutile ») sans garantie d’une proposition d’orientation adaptée. • L’interpellation des personnes au domicile, y compris au sein des centres d’hébergement. • La loi clarifie la possibilité pour les préfectures d’accepter le dépôt d’un titre de séjour pendant la demande d’asile dans la mesure où l’OQTF « spécialement motivée sur le rejet de la demande d’asile » ne peut être prise qu’après la vérification que l’étranger ne soit pas titulaire d’un autre titre de séjour en cours de validité.

Les questions débattues par les participants aux ateliers de la thématique 4 • Quel rôle du travail social à l’égard des déboutés ? Les participants partagent-ils la vision de la FNARS sur le libre choix des personnes : le choix de partir ou le choix de rester ? • Le travail social se résume-t-il à l’ouverture des droits ? • Quelles missions du travail social dans les centres dédiés pour les personnes en situations irrégulières ? Les participants partagent-ils la vision de la FNARS sur la gestion de ces centres (incompatibilité entre les missions de travail social et du respect du choix de la personne et les missions de contraintes dans l’éloignement forcé) ? • Quelle préconisation pour respecter effectivement l’accueil inconditionnel ? • Quelle place de l’aide au retour dans l’accompagnement des déboutés ?

LES RECOMMANDATIONS DES PARTICIPANTS AUX ATELIERS DE LA THÉMATIQUE 4 • Prévoir des moyens supplémentaires pour accueillir les déboutés en CADA au-delà des 30 jours • Une régularisation de masse est nécessaire pour « désemboliser » le système de veille sociale et permettre l’ouverture de droits et la possibilité de travailler • Mettre en place des temps d’information dans les CHRS sur les statuts de demandeurs d’asile et de déboutés

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THÉMATIQUE 5 L’INTÉGRATION DES BÉNÉFICIAIRES D’UNE PROTECTION INTERNATIONALE « Il faut penser le demandeur d’asile comme un potentiel réfugié et non comme un potentiel débouté », dit un participant.

Le contexte posé par la réforme La loi portant réforme du droit d’asile ne propose pas un réel bouleversement de la politique d’intégration à l’égard des réfugiés. Il s’agit du « parent pauvre » de la réforme, à l’image des discussions de la concertation nationale. Cependant, un certain nombre de nouveauté peuvent être présentées : DES SIMPLIFICATIONS POUR L’ACCÈS AUX DROITS • La mise en place d'un récépissé de demande de titre de séjour d’une durée de 6 mois renouvelable avec autorisation de travail délivré dans les 8 jours de la notification du statut de réfugié (jusque-là, on était à un récépissé de 3 mois, source de ruptures dans l’accès aux droits) • L'assouplissement des conditions pour bénéficier du regroupement familial pour les réfugiés pour : - préciser que les éléments de possession d’état peuvent permettre de justifier l’identité des personnes en l’absence d’acte de l’état civil ou de doute sur leur authenticité (simplification de la preuve du lien familial). - préciser que les parents sont bien éligibles pour rejoindre leurs enfants mineurs qui ont obtenu le statut de réfugié. Cependant, pour les frères et sœurs, ils sont soumis aux conditions de ressources et de logement pour bénéficier du regroupement familial. • La mise en place d’une convention nationale d’accompagnement personnalisé pour l’accès au logement et à l’emploi : cette convention a pour objectif de coordonner l’ensemble des acteurs en charge de l’intégration des réfugiés sur le volet emploi et logement et de prévoir les modalités d’organisation de cet accompagnement. Cette disposition n’est cependant pas une nouveauté car cette convention existait déjà dans le CESEDA mais n’était pas mise en œuvre. Cette convention n’est pas obligatoire à l’égard des personnes morales non volontaires et il n’est pas prévu dans la loi une déclinaison territoriale de cette convention (demandée par la FNARS).

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UNE MODIFICATION DES MISSIONS DES CENTRES PROVISOIRES D’HÉBERGEMENT (CPH) QUI ACCUEILLENT LES RÉFUGIÉS. A TRAVERS : • Le maintien des CPH dans le statut CHRS mais la loi crée un dispositif spécifique. • La définition de leur missions : celles d’assurer l’accueil, l’hébergement ainsi que l’accompagnement linguistique, social, professionnel et juridique des personnes qu’ils hébergent, en vue de leur intégration et une mission de coordination des actions d’intégration des bénéficiaires d’une protection dans le département. • Comme les CADA, la loi prévoit une orientation nationale par l’OFII, seul responsable des décisions d’admission, de sortie et de changement de centre, après consultation du directeur du centre.

Les questions débattues par les participants aux ateliers de la thématique 5 • Quel serait selon vous une politique ambitieuse à l’égard des réfugiés ? Quels acteurs devraient nécessairement y participer et selon quelles modalités d’articulation ? • Quelles simplifications dans l’accès aux droits du public réfugié ? • Quel rôle de l’OFPRA dans l’intégration du public réfugié ? • Quelle amélioration dans le fonctionnement de l’OFII pourrionsnous préconiser pour favoriser l’intégration des réfugiés ? • Comment envisager une déclinaison de la convention nationale pour l’accompagnement à l’accès à l’emploi et au logement ? • Comment améliorer l’accès au droit commun des réfugiés ? • Comment mieux faire connaitre les problématiques des réfugiés ? • Quelle place des CPH dans ce paysage ?

LES RECOMMANDATIONS DES PARTICIPANTS AUX ATELIERS DE LA THÉMATIQUE 5 • Assurer la continuité de l’accompagnement, éviter les ruptures lors du passage d’un dispositif à un autre (CPH/ALT/bail glissant/colocation/location) • Créer des instances de coordination par territoire • Créer des accueils de jour pour les réfugiés avec accès à l’information, accès aux droits, espaces de rencontres

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PROPOSITIONS POUR UNE MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME DE L’ASILE RESPECTUEUSE DES DROITS DES PERSONNES La loi portant réforme de l’asile a été définitivement adoptée par le parlement le 29 juillet dernier. La FNARS s’est fortement impliquée, depuis 2013, dans les débats organisés sur la réforme et a été force de propositions, via notamment des amendements, lors des discussions parlementaires.

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PROPOSITIONS POUR UNE MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME DE L’ASILE RESPECTUEUSE DES DROITS DES PERSONNES

LE PREMIER ACCUEIL DES DEMANDEURS D’ASILE DOIT ÊTRE LE REFLET DES VALEURS DE SOLIDARITÉ ET DE FRATERNITÉ, DANS LE RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX DES PERSONNES LA FNARS PRÉCONISE :

Nous passons aujourd’hui à l’étape de mise en œuvre de la réforme. Pour cela, la FNARS formule 58 préconisations, à l’intention des pouvoirs publics et des associations du réseau, pour que cette politique de l’asile soit respectueuse des droits fondamentaux en matière d’accueil, du droit à l’hébergement et à l’accompagnement des personnes qui sollicitent la protection de la France. Un demandeur d’asile est une personne qui fuit son pays d’origine car sa vie et sa sécurité, ou celles de ses proches y sont menacées, quand il n’a pas déjà subi des persécutions. Face au drame vécu par les migrants qui demandent une protection au sein de l’Union européenne, notre responsabilité est d’accueillir, dans la dignité, les personnes qui sollicitent l’asile en France et d’examiner, avec toutes les garanties d’un État de droit, leur demande de protection, puis de favoriser l’intégration de ceux qui ont été reconnus réfugiés. Garanti par la Constitution et les engagements internationaux de la France, le droit d’asile ne peut être confondu avec une politique conjoncturelle de gestion des flux migratoires. Tous les demandeurs d’asile, à partir du moment où ils en font la demande, doivent avoir accès aux mêmes

conditions d’accueil et d’accompagnement et doivent être considérés comme des réfugiés potentiels. Or actuellement, la France compte 22 800 demandeurs d’asile sans solution d’hébergement. Les textes internationaux et les directives européennes relatifs au droit d’asile fixent des normes applicables à l’ensemble des demandeurs d’asile, sans distinction des procédures ou des situations de vulnérabilité. Certaines populations migrantes présentes sur le territoire ne sollicitent pas l’asile en France, ou ont été déboutées de ce droit. La FNARS réaffirme que le respect de l’accueil inconditionnel dans l’hébergement de toute personne en situation de détresse sociale doit être notre ligne de conduite et qu’il ne peut être demandé aux associations de solidarité de faire le tri entre les personnes en grande difficulté sur les territoires. Ce principe, qui conjugue solidarité et non-discrimination, doit s’appliquer pour tout demandeur d’asile et plus largement pour les personnes les plus exclues de notre système de solidarité et de protection sociale. Les politiques menées ne doivent pas conduire à une concurrence entre les publics, hébergeant et accompagnant les uns au détriment des autres. L’accueil et l’accompagnement des demandeurs d’asile, des réfugiés et des

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migrants par les adhérents de la FNARS doit respecter ces principes de déontologie du travail social, sans stigmatisation ni discrimination. Enfin, si l’asile reste principalement une compétence des États membres de l’Union européenne, l’amélioration des conditions d’accueil et d’accompagnement des personnes passe par le respect par les États membres de leurs engagements internationaux, par une solidarité plus forte entre eux et par la mise en cohérence des politiques d’asile à l’échelle de l’Union européenne. L’organisation d’une conférence européenne de consensus sur l’accueil des migrants, proposée par la FNARS, permettrait d’avancer dans ce sens en dépassant les réticences nationales. A ce titre, à Calais, il faut sortir les migrants de la situation indigne dans laquelle ils se trouvent : l’hébergement, l’alimentation, l’accompagnement sont des prestations essentielles qui doivent leur être offertes. Leur proposer un hébergement dans un autre territoire peut être une solution à condition toutefois que les personnes y consentent en toute connaissance de cause, que les acteurs sur les territoires concernés s’organisent collectivement en lien avec les SIAO et qu'ils mobilisent des solutions d’hébergement dignes.

À l’égard des pouvoirs publics 1. D’élaborer un « référentiel de l’accueil et de l’accompagnement des demandeurs d’asile », en co-construction avec l’ensemble des acteurs concernés (notamment des associations, demandeurs d’asile…), couvrant l’ensemble des prestations nécessaires pour répondre aux besoins des demandeurs d’asile, depuis le premier accueil jusqu’à l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale, et intégrant une approche globale de l’accompagnement. Ce référentiel peut être utilisé par les associations pour mettre en œuvre les mesures d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile et par les pouvoirs publics pour décliner les schémas régionaux de l’accueil des demandeurs d’asile. 2. De donner à l’OFII et aux préfets les moyens d’un pilotage à l’échelon territorial du guichet unique assurant : • l’articulation entre les 63 plateformes et les 34 antennes de guichet unique ; • une coordination effective des acteurs du premier accueil, qu’ils soient spécialisés sur la demande d’asile ou non (notamment les acteurs de la veille sociale et de la santé).

3. De garantir la présence d’intervenants sociaux au stade du premier accueil pour prendre en compte les problématiques sociales des demandeurs d’asile dès leur arrivée, avec des moyens en personnels, permettant de réaliser effectivement les missions des plateformes. Le savoir-faire des intervenants sociaux en matière d’évaluation sociale et d’accompagnement est gage d’une orientation plus adaptée des personnes. 4. De privilégier des modes de financements et de contractualisation entre l’État et les associations qui permettent de : • développer des réponses adaptées à la diversité et à l’évolution des besoins des demandeurs d’asile : • préserver une relation partenariale entre les pouvoirs publics et les associations ; • garantir des moyens suffisants pour assurer les missions d’accueil et d’accompagnement ; • garantir l’autonomie des associations visà-vis du pouvoir de contrôle et de régulation de l’OFII. 5. De garantir des moyens adéquats aux associations chargées des plateformes pour leur permettre d’organiser l’orientation vers le guichet unique dans le délai de 3 jours, conformément aux obligations communautaires qui relèvent de la seule responsabilité de l’État. 6. D’étendre et de diversifier les lieux de domiciliation associative sur les territoires pour une couverture territoriale suffisante permettant à l’ensemble des demandeurs d’asile de pouvoir effectivement se domicilier pour l’ouverture de leurs droits, en lien avec les schémas départementaux de la domiciliation.

d’offre des plateformes pour demandeurs d’asile, y compris par mutualisation de moyens et de compétences. 8. Que les associations soient force de proposition pour impulser une coordination entre les organismes en charge du premier accueil des demandeurs d’asile et les acteurs concernés par l’hébergement et l’accompagnement des demandeurs d’asile (le 115/SIAO, les CADA…), notamment à travers la conclusion de conventions de partenariats (ex. : SIAO/PADA).

L’HÉBERGEMENT DES DEMANDEURS D’ASILE, UN DROIT ET UNE LIBERTÉ FONDAMENTALE LA FNARS PRÉCONISE :

À l’égard des pouvoirs publics

À l’égard du réseau FNARS

9. D’adopter une première loi de programmation de 20 000 places d’hébergement d’ici à 2017, privilégiant le modèle CADA, en réduisant le recours à l’hôtel, pour accueillir les demandeurs d’asile sans solution d’hébergement. Cette loi de programmation devra être évaluée et redimensionnée pour prendre en compte l’ensemble des besoins.

7. Que les associations élaborent et mettent en œuvre collectivement des réponses adaptées aux besoins sur les territoires et soient ainsi force de proposition à l’égard des pouvoirs publics. Les associations pourraient intégrer dans ce cadre un accompagnement social, administratif et juridique dans les réponses aux appels

10. De tenir compte du taux d’équipement du territoire d’accueil (places CADA déjà existantes, écoles, hôpitaux, transports…) dans la répartition des places d’hébergement des demandeurs d’asile, pour favoriser l’instauration d’un lien social avec l’environnement, l’accès aux droits et aux services publics.

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11. De garantir le respect des principes de l’urgence sociale pour les demandeurs d’asile qui n’auraient pas accès immédiatement au dispositif national d’accueil et pour ceux qui en seraient exclus. 12. De préserver la place des associations ancrées territorialement qui ont un savoir-faire sur l’hébergement et l’accompagnement des demandeurs d’asile, assurant ainsi une diversité associative. 13. D’orienter l’ensemble des demandeurs d’asile en prenant en compte leur situation sanitaire et familiale et de prévoir des voies de recours pour les demandeurs d’asile en cas de refus de l’orientation proposée ou de non prise en compte de la vulnérabilité dans la proposition, notamment à travers la mise en place d’une commission indépendante pour leur permettre de contester une offre qui ne serait pas adaptée et leur proposer une nouvelle orientation Les éléments retenus par l’OFII, notamment pour apprécier la vulnérabilité de chaque demandeur d’asile et l’orienter doivent pouvoir être contestés le cas échéant, ce qui implique leur pleine transparence et l’accès des demandeurs d’asile à ces informations. 14. De prendre en compte, en cours de procédure, l’évolution de la situation des demandeurs d’asile pour adapter l’hébergement et l’accompagnement, aussi bien pour ceux qui ont eu une place d’hébergement que pour ceux qui ont refusé, à leur arrivée, une orientation directive. Il s’agit de leur permettre d’accéder de nouveau au dispositif national d’accueil (DNA) lorsqu’ils se trouvent en situation de détresse. Pour ces derniers, l’enjeu est d’éviter les situations d’errance, le recours au 115 et l’orientation en hôtel en cas « d’échec » de l’orientation directive. 15. D’articuler les schémas régionaux de l’accueil pour demandeurs d’asile avec un ensemble d’outils de programmation, notamment les schémas départementaux de la domiciliation et les programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS).

À l’égard du réseau FNARS 16. De créer des lieux de veille et de suivi de la réforme qui auraient une double mission : • de repérer les dysfonctionnements dans la mise en œuvre de la réforme par les acteurs (associations spécialisées ou non sur l’asile/OFII/DDCS…) et les bonnes pratiques. Il s’agit d’établir un état des lieux régulier, sur la base d’indicateurs élaborés par la FNARS, pour alimenter le comité national consultatif de la réforme de l’asile auquel participe la FNARS ; • d’être un lieu d’échanges au sein des FNARS régionales afin d'outiller et de construire une parole collective pour les associations adhérentes leur permettant d’alerter et d’être forces de propositions à l’égard des pouvoirs publics sur les territoires (appel à projet, non-respect de l’accueil inconditionnel, commandes de l’État sur la mise en œuvre de prestations…). 17. De refuser de développer des places d’hébergement dont les modalités ne permettent pas de garantir un accueil digne (notamment pour les familles), un accompagnement social, administratif et juridique satisfaisant aux demandeurs d’asile. 18. De coopérer pour élaborer et mettre en œuvre collectivement des réponses adaptées aux besoins sur les territoires et être ainsi force de proposition à l’égard des pouvoirs publics. Par exemple par des réponses communes et concertées dans les appels à projets, appels d’offre. 19. De se coordonner avec les acteurs du territoire (associatifs et publics) pour couvrir les besoins des demandeurs d’asile, notamment sur l’alimentation, les transports, l’accès aux soins… et contribuer à garantir ainsi les principes liés à l’hébergement d’urgence, notamment pour les personnes ayant refusé l’orientation directive et hébergées à l’hôtel. 20. De développer des modes d'hébergements alternatifs et de recours à hôtel, sous forme de places CADA et de façon complémentaire de places d’hébergement

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diffus dans le parc social avec possibilité d’évolution du statut d’occupation le cas échéant. 21. De promouvoir le travail social collectif, non pour répondre à la contrainte budgétaire mais comme une modalité d’intervention porteuse de sens. 22. De respecter les règles sur le traitement et la transmission de données à caractère personnel aux pouvoirs publics régies par la loi informatique et liberté du 6 janvier 1978 et le code de l’action sociale et des familles.

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DE PRENDRE EN COMPTE LA VULNÉRABILITÉ SOCIALE ET LES SITUATIONS D’ERRANCE OU DE REMISE À LA RUE DES DEMANDEURS D’ASILE COMME UNE VULNÉRABILITÉ À PART ENTIÈRE.

ainsi le rôle des intervenants sociaux au sein des associations dans l’évaluation de la vulnérabilité.

LE DROIT À L’ACCOMPAGNEMENT ET À LA PRISE EN COMPTE DE LA VULNÉRABILITÉ DES DEMANDEURS D’ASILE LA FNARS PRÉCONISE

À l’égard des pouvoirs publics 23. De garantir un hébergement et un accompagnement adaptés pour chaque demandeur d’asile durant le temps nécessaire, ce droit ne pouvant être réservé aux seules personnes « vulnérables » visées dans la loi. 24. De prendre en compte la vulnérabilité sociale et les situations d’errance ou de remise à la rue des demandeurs d’asile comme une vulnérabilité à part entière. Il est également essentiel de reconnaitre

25. D’associer pleinement à l’élaboration du schéma national et des schémas régionaux l’ensemble des acteurs concernés par l’accompagnement des demandeurs d’asile dans une approche interministérielle et pluridisciplinaire (social, sanitaire, demandeurs d’asile…). Ces schémas doivent garantir une meilleure répartition territoriale de l’offre d’accompagnement. 26. De mobiliser, au niveau local, les institutions (école, CPAM, CAF…) et un ensemble d’acteurs (notamment les professionnels de santé) pour favoriser au quotidien l’insertion des demandeurs d’asile dans leur environnement et faciliter ainsi le rôle du travail social. 27. De donner des moyens financiers et humains aux établissements et services pour assurer leur mission d’accompagnement qui ne peuvent se réduire à l’ouverture de droits sociaux. 28. D’élaborer un « référentiel de l’accueil et de l’accompagnement des demandeurs d’asile », en co-construction avec l’ensemble des acteurs concernés (associations, demandeurs d’asile…), intégrant une approche globale de l’accompagnement.

29. Des financements doivent permettre d’intégrer à la fois des interprètes et l’apprentissage de la langue française dans le cadre d’une approche globale de l’accompagnement pour favoriser l’accès aux droits et l’intégration. 30. D’intensifier les partenariats entre les associations, l’OFII et l’OFPRA pour que les situations de vulnérabilité et leur évolution soient effectivement prises en compte et que les réponses aux demandeurs d’asile soient adaptées en conséquence tant du point de vue de l’orientation que de la procédure. 31. De simplifier les procédures pour permettre un accès effectif au marché du travail des demandeurs d’asile et aux formations professionnelles au bout de 9 mois de présence sur le territoire. 32. De développer et organiser, sur les territoires une offre adaptée et un accès effectif aux soins notamment psychologiques, pour l’ensemble des demandeurs d’asil. Pour cela, il faut favoriser la formation des professionnels de santé sur les spécificités culturelles et l’exil, et la coopération entre les acteurs du sanitaire et du social. 33. De reconnaitre la mission d’intégration des lieux d’hébergement des demandeurs d’asile en considérant les personnes comme de potentiels réfugiés et non comme de potentiels déboutés.

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À l’égard du réseau FNARS 34. De créer les conditions favorables à l’évaluation de la vulnérabilité : un lieu accessible et adapté permettant le respect de la confidentialité, le recours à de l’interprétariat professionnel, une organisation octroyant aux équipes le temps nécessaire pour repérer la vulnérabilité… 35. De proposer systématiquement un accompagnement social aux demandeurs, quel que soit le lieu d’hébergement, le cas échéant en s’organisant collectivement sur les territoires entre associations. 36. Quel que soit le dispositif (115, hébergement d’urgence, accueil de jour…), nouer des partenariats avec la plateforme d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile pour s’assurer que tout demandeur d’asile en situation de vulnérabilité soit identifié et que l’OFII et l’OFPRA en soient bien informés pour une adaptation des conditions d’accueil et de procédure. 37. D’outiller et former les travailleurs sociaux (professionnels de l’asile ou non) au droit d’asile notamment à l’aide au récit ; mettre en place des espaces d’échanges et de supervision pour les salariés.

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L’HÉBERGEMENT ET L’ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNES DÉBOUTÉES DU DROIT D’ASILE LA FNARS PRÉCONISE

À l’égard des pouvoirs publics 38. Rendre effectif le respect des principes d’inconditionnalité et de continuité de l’accueil, dans les centres d’hébergement d’urgence et dans les CHRS, à l’égard des personnes déboutées de leur demande d’asile. Cela suppose un renforcement significatif des capacités d’hébergement de droit commun, notamment pour les familles, en alternative à l’hôtel et des moyens d’accompagnement. L’accueil en centre d’hébergement et la durée de séjour ne doivent dépendre que de la situation de détresse et des besoins des personnes. Ils ne peuvent être conditionnés au statut administratif des personnes. 39. D’anticiper les sorties des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, en lien avec les schémas régionaux de l’accueil des demandeurs d’asile, en organisant la coordination entre le dispositif national d’accueil pour les demandeurs d’asile et le dispositif d’hébergement et de veille sociale généraliste. L'objectif est d'éviter les remises à la rue ou le recours massif à l’hôtel. Cette recommandation concerne en particulier les territoires sur lesquels vont être ouvertes des places pour demandeurs d’asile qui, à la fin de la procédure, auront besoin d’un hébergement. 40. De développer et d’accélérer les régularisations, notamment à titre humanitaire, telles que prévues par la circulaire de 2012, des personnes et familles déboutées dont le retour est impossible afin de leur permettre de sortir de la précarité (autorisation de travail, sortie de l’hébergement par l’accès à un logement).

41. Dans le cadre des procédures d’expulsion des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, de garantir le respect des droits fondamentaux des personnes, notamment celui d’une orientation vers une structure d’hébergement. 42. De renforcer les moyens financiers et humains de l’OFII dédiés à l’accompagnement au retour des déboutés, pour garantir que les personnes, hébergées ou non, aient bien l’information sur les mesures d’aide au retour existantes. 43. De garantir une équité des pratiques préfectorales en matière de droit au séjour.

À l’égard du réseau FNARS 44. Que les associations de solidarité refusent la gestion des centres dédiés pour le public débouté. Leurs missions seraient incompatibles avec celles du travail social. Plus globalement nous devons nous opposer à toute instrumentalisation des travailleurs sociaux qui les conduirait à assurer une mission de contrôle à l’égard des migrants. 45. D'être vigilant à ce qu’aucune interpellation dans une structure d’hébergement ne soit effectuée sans l’autorisation d’un juge. 46. De légitimer et de promouvoir le travail social et l’accompagnement à l’égard des personnes déboutées ; pour cela, garantir un accompagnement inconditionnel en formant les équipes à l’accompagnement de ces personnes et organiser des temps d’analyse de pratiques. 47. De respecter les règles sur le traitement et la transmission de données à caractère personnel aux pouvoirs publics régies par la loi informatique et liberté du 6 janvier 1978 et le code de l’action sociale et des familles. Réaffirmer que les missions du travail social ne peuvent être confondues avec une mission de contrôle social. 48. Accompagner les personnes déboutées dans l’accès à leurs droits et reconnaitre leurs compétences.

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L’INSERTION DES BÉNÉFICIAIRES D’UNE PROTECTION INTERNATIONALE LA FNARS PRÉCONISE

À l’égard des pouvoirs publics 49. L’élaboration collective d’une convention nationale sur l’intégration des réfugiés et sa déclinaison territoriale allant au-delà d’un accompagnement à l’accès au logement et à l’emploi; il s’agit notamment de simplifier les démarches d’ouvertures des droits sociaux et d’harmoniser les pratiques des institutions publiques à l’égard des réfugiés (préfectures, bailleurs sociaux, CPAM, CAF…). Cette convention nationale devrait être animée et pilotée par les services de l’État. Elle doit favoriser la coordination des acteurs en charge de l’intégration et permettre des temps d’échanges réguliers entre associations et services publics pour faciliter l’ouverture des droits. 50. De faire évoluer la législation pour permettre une reconnaissance des compétences et des diplômes des réfugiés, avec le cas échéant une évaluation et une mise à niveau, et faciliter ainsi leur accès à l’emploi et leur intégration. 51. Allouer les moyens financiers nécéssaires pour permettre l’apprentissage de la langue française en vue de favoriser l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale, et, ce, en complément des formations linguistiques conduites par l’OFII. 52. De développer l’offre de soins en santé mentale à l’égard de personnes victimes de tortures, de traitements inhumains et dégradants ou de violence politique et intégrer ce volet dans les futurs conseils territoriaux de santé mentale.

53. Proposer un accompagnement à toute personne signant un contrat d’accueil et d’intégration, pour favoriser son intégration dans la société ; 54. D’adopter une loi de programmation de places en centres provisoires d’hébergement pour les bénéficiaires d’une protection internationale afin d'héberger et accompagner les réfugiés les plus vulnérables. 55. De donner les moyens financiers aux CPH afin d’assurer leur mission de coordination des actions d’intégration sur un territoire prévues par la loi.

À l’égard du réseau FNARS 56. De mettre en œuvre des mesures d’accompagnement social global, en développant notamment l’accompagnement social « hors les murs » des personnes réfugiées et en allant au-delà de l’accompagnement à l’accès au logement ou à l’emploi, et en se rapprochant, le cas échéant, d’un ensemble d’acteurs compétents (professionnels de la santé, de la famille, de la petite enfance…).

57. En lien avec le SIAO, de contribuer à organiser la continuité du parcours des bénéficiaires d’une protection (sur les aspects accompagnement, hébergement, logement, santé…), en priorisant l’accès direct au logement afin d'éviter les ruptures liées au passage d’un dispositif à l’autre.

58. De se rapprocher collectivement des collectivités locales pour proposer l’appui des associations (notamment sur l’accompagnement et l’orientation) aux citoyens qui hébergent des demandeurs d’asile et des réfugiés.

La FNARS portera ces préconisations au sein du comité national consultatif de la réforme de l’asile. Elle favorisera la mise en place de comités de suivi régionaux avec l’ensemble des acteurs intéressés afin de suivre la mise en œuvre de la réforme du droit d’asile sur les territoires et d'en corriger localement les difficultés d’application ou de valoriser les bonnes pratiques. La fédération continuera à alerter et à interpeller les pouvoirs publics sur des dysfonctionnements repérés préjudiciables à la garantie du droit d’asile. Elle soutiendra les associations afin qu'elles contribuent à la mise en œuvre de la réforme dans le respect des principes et des règles éthiques de l’action sociale. Elle poursuivra ses missions d’accompagnement des associations dans les réponses aux appels à projets et appels d’offre en favorisant la coopération et les démarches collectives entre adhérents, et elle sera vigilante à ce que la réforme intègre des réponses de qualité en lien avec les principes et valeurs défendues par la FNARS.

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JOURNÉE D’ÉTUDE NATIONALE

REFORME DE L’ASILE JEUDI 10 SEPTEMBRE 2015 VILLA MÉDITERRANÉE - MARSEILLE

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