Rapport Eco2Fest avril 2019.indd

consommation collaborative comme prendre un taxi, louer un appartement ..... capteurs à enregistrer le débit d'air des personnes atteintes de maladies.
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Festival éco2FEST 2018 Des pratiques collaboratives au coeur de Verdun

COLLECTIF VILLES AUTREMENT 1

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Éditorial Fondé à l’UQÀM, le Collectif Villes Autrement est un réseau de chercheurs et de collaborateurs dédiés à l’étude de courants émergents et de tendances innovatrices en urbanisme et aménagement du territoire. Nous travaillons avec des organisations et entreprises qui expérimentent de nouvelles pratiques, les aidant à structurer et à évaluer leurs projets tout en implantant une stratégie de recherche adaptée à leur besoin.

Jérémy Diaz M.Sc. Candidat au doctorat, chercheur [email protected]

Sylvain Lefebvre Ph.D. Professeur titulaire, chercheur [email protected]

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Vers des territoires contributifs au Québec

Le numérique a généré des formes inédites de solidarité. Au tournant des années 2000, l’alimentation en contenu par les internautes d’un nombre croissant de sites internet entraîne l’émergence de nouvelles formes organisationnelles caractérisées par une indifférenciation des producteurs et des consommateurs des contenus générés. En ligne, des groupes plus ou moins formels d’individus prennent l’initiative de se connecter entre eux pour diverses raisons (pratique, but, cause ou intérêt commun) et décident de mutualiser leurs ressources en s’auto-organisant selon des valeurs et règles qu’ils s’imposent. Concrètement, ces organisations solidaires sont capables de produire des contenus immatériels comme des logiciels et des jeux vidéos, des journaux citoyens ou des applications, mais aussi des contenus physiques tels que des solutions d’ingénierie ou des biens de consommation. Ces communautés productives possèdent donc un fort potentiel social et économique. Plusieurs entreprises l’ont bien compris en soutenant ces communautés.

Bien qu’en retard sur ces nouvelles pratiques, les pouvoirs publics et les collectivités territoriales peuvent également tirer profit de la force d’innovation de ces communautés. Que ce soit à travers l’organisation d’événements, l’offre d’incitatifs financiers ou l’aménagement de lieux pour stimuler et ancrer localement ces communautés. Or, la spatialité de ces organisations est hybride, donc complexe. Elles se situent à la fois sur le plan matériel du territoire et celui virtuel d’Internet. Une meilleure compréhension des mécanismes d’ancrage territorial de ces communautés nous semble utile pour favoriser le développement local de nombreuses municipalités. Durant trois semaines, l’éco2FEST a souhaité rendre visible ces pratiques collaboratives en organisant un événement culturel autour de ces pratiques collaboratives. Ce rapport issu d’une recherche-action de plusieurs semaines pourra donner des idées à celles et ceux qui souhaitent développer ces pratiques au sein de leur territoire au Québec. Jérémy Diaz & Sylvain Lefebvre Collectif Villes Autrement

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Table des matières Éditorial

Mandat

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Aménager un espace religieux excédentaire

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S’organiser pour agir rapidement

25 - 29

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Faire participer le plus grand nombre

31 - 43

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Accélérer les projets

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Profils des festivaliers

45 - 51

53 - 55

Recommandations

Annexes

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59 - 63 7

Mandat Fondé en 2016, le festival éco2FEST souhaite expérimenter les pratiques collaboratives en proposant au public diverses activités telles que des conférences, des projections ou encore des débats. Pour cette édition 2018, le festival a souhaité également - en partenariat avec le réseau Sensorica, offrir un programme d’accompagnement manufacturier et entrepreneurial pour onze porteurs de projet. Depuis sa création, la forme et l’offre du festival ont été modifiées et enrichies sous l’impulsion de ses membres et du territoire au sein duquel se déroulait l’événement. À la différence des autres éditions, la manifestation de 2018 s’est accompagnée d’un aménagement temporaire d’un espace vacant. Ce défi s’est révélé particulièrement difficile à relever du fait des délais de réception des fonds institutionnels.

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Le festival n’a jamais fait l’objet d’une étude approfondie. Pour la troisième édition du festival, Ouishare Québec a fait appel au Collectif Villes Autrement pour fait un bilan des retombées sur la base de ce qu’il a offert et généré pendant les trois semaines. L’objectif général était de constituer une solide base de données sur la fréquentation du public en prenant soin de documenter de manière détaillée les diverses activités du festival (conférences, ateliers participatifs, accompagnement entrepreneurial). Ce rapport présente les résultats d’une recherche-action menée durant plusieurs semaines au sein de l’équipe organisatrice de l’éco2FEST. Ils prennent appui sur quatre sources de collecte de données : 1. une observation participative durant toute la durée du festival 2. des questionnaires auto-administrés (annexe 1) 3. un groupe de discussion avec l’équipe organisatrice réalisée à la fin de l’événement 4. cinq entretiens réalisés auprès des porteurs de projets.

Cinq parties composent cette monographie. La première décrit les choix d’aménagement du presbytère de l’Église Notre-Dame-desSept-Douleurs à Verdun. La seconde expose les forces et les limites de l’organisation collaborative du festival qui s’est inspirée des communautés numériques libres et “open-source”. La troisième revient sur la programmation et la volonté du festival de créer les conditions pour permettre à n’importe quel visiteur de participer activement aux discussions et aux débats qui ont été organisés. Le contenu de quatre des conférences est résumé. La quatrième partie analyse le parcours entrepreneurial proposé par le festival. L’équipe a tenu à proposer des alternatives issues de l’économie collaborative pour développer les projets retenus en amont. Quatre projets sont mis en lumière par la description de leur genèse, leur développement, l’impact du festival et leur perspective. Enfin, la dernière partie expose les caractéristiques des festivaliers qui ont répondu au questionnaire à travers une infographie.

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Aménager un espace religieux excédentaire

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Durant trois semaines, l’éco2FEST s’est déroulé au 4155, rue Wellington, au sein du presbytère de l’église de Notre-Dame des Sept Douleurs. Au pied du monument s’étend la place Wellington, principale artère commerçante de l’arrondissement de Verdun. Depuis 2017, la Ville de Montréal agit pour la réappropriation citoyenne de ce tronçon de rue dans le cadre du programme Rues piétonnes et partagées. À gauche de l’édifice religieux se trouve un parc privé au bout duquel une porte vitrée donne accès sur le presbytère de l’église. C’est à cet endroit que les membres de l’éco2FEST ont choisi de localiser l’entrée publique du festival. L’espace vide, sans réelle utilisation en attendant les travaux de la nouvelle bibliothèque de Verdun, offrait une occasion idéale pour accueillir un public. Intéressé par le projet avec l’accord de la Mairie de Verdun, le personnel de l’église Notre-Dame céda l’espace pour un bail d’un mois. Aménagements temporaires sur la rue Wellington et oriflamme de l’éco2FEST face au métro De l’Église.

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Découverte du presbytère vide L’espace disponible se composait de quatre pièces : une salle de réunion, la cuisine, la salle principale ainsi que trois toilettes. Le défi a été de rendre l’endroit agréable à vivre autour d’un atelier central dédié à la conception et à la fabrication. Face au volume important de la salle, la première étape a été de diviser la superficie en plusieurs espaces en se basant sur les usages souhaités : un espace d’accueil composé d’une entrée, d’un vestiaire et de la zone sanitaire ; un espace de séjour composé d’un canapé, d’une table basse, de deux grandes tables et d’un espace de jeux pour enfants ; un espace de travail et de conférences composé d’une dizaine de tables, d’une estrade et ouvert sur le comptoir de la cuisine et enfin l’atelier composé de plusieurs tables où étaient mis à la disposition des visiteurs des outils et machines. L’aménagement se devait de faciliter la déambulation des visiteurs de l’accueil à l’atelier en passant par les différents espaces de convivialité et de socialisation. Schéma : Plan d’aménagement de la salle Légende : Déambulation

Découverte du presbytère vide

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L’ameublement a constitué la seconde étape de l’aménagement. Le personnel de l’église a mis à la disposition de l’équipe une vingtaine de tables, des chaises et des panneaux d’affichage. Certains membres de l’équipe ont apporté leur propre affaire. Pour le reste, du mobilier a été prêté par Renaissance et l’organisme communautaire Les Petits Frères puis mis à la vente à la fin de l’événement. Le manque de fenêtres combiné à la hauteur du plafond a nécessité l’ornementation des luminaires par des morceaux de tissus récupérés de la faillite d’une usine de textile afin de créer une atmosphère chaleureuse. Une attention particulière a été portée à la signalisation de l’espace. Les panneaux délimitant symboliquement les différentes zones ont été utilisés pour vulgariser les concepts fondamentaux de l’économie collaborative et véhiculer des informations sur les conférences passées. De gauche à droite : l’entrée, le vestiaire, les tables de travail, le séjour, l’atelier et la cuisine.

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«

Un espace comme à la maison, mais hors de chez-soi

J’ai quelques frissons quand je pense que nous avons commencé à imaginer ce qu’allait être le lieu trois semaines avant l’ouverture. La ligne directrice était de favoriser la conversation pour maintenir le plaisir d’être ensemble. Que les visiteurs aient réellement du plaisir à être sur place. Nous avions identifié les formes d’entre-soi qui règnent dans certains espaces de coworking voire des ateliers de fabrication. Nous voulions être réellement inclusifs : toucher le grand public, amener les résidents de Verdun. La qualité de l’ambiance du lieu dépend d’éléments tangibles, mais aussi de l’accueil et de la rétention d’une diversité sociale de personnes qui donnent toute leur importance aux idées et paroles qui circulent de manière diffuse. C’est un équilibre fragile que nous avons pu trouver ponctuellement. En tant que coordinatrice, j’aurais aimé avoir davantage de temps pour réfléchir plus profondément à la façon dont l’espace allait être utilisé. Les besoins de l’équipes, les activités et la programmation, etc. Toutefois, grâce à un mode de fonctionnement quasiment autonome de l’équipe, nous avons réussi à aménager l’espace en seulement trois jours ! Pour être franche, cette gestion a-hiérarchique était nouvelle pour moi. D’autant plus que j’étais la seule à avoir les compétences pour designer l’espace... J’ai eu besoin d’un petit temps d’adaptation surtout lorsqu’il a été question d’anticiper la responsabilité de chacun en cas d’accident - par exemple un décrochage des plaques vitrées de l’atelier. Ceci dit, j’ai pu constater la force d’exécution de cette culture organisationnelle lorsque le temps et l’argent manquent. Chacun a su trouver sa place et je pense que nous avons une base solide de travail pour les années à venir.

Céline

Lors des premières réunions de travail, l’idée maîtresse concluant les échanges est qu’il était nécessaire de permettre et de faciliter une appropriation informelle de l’espace par le public. L’équipe était consciente que l’espace portait en lui un discours que tous savent déchiffrer. L’harmonisation d’ensemble visait donc de créer une esthétique de la récupération pour encourager le visiteur à se déplacer et à rester dans le lieu. Les questionnaires indiquent qu’un festivalier sur cinq est resté plus de 4 heures sur place. La même proportion comptait revenir avant la fermeture de festival. Il ne s’agissait pas là d’axer uniquement les échanges sur la technologie ou des idées complexes, mais de fédérer les habitués en leur donnant envie de revenir. Les repas partagés ont été particulièrement des occasions privilégiées pour donner toute leur importance aux idées et paroles qui circulaient de manière diffuse. Au fil des semaines, nous avons pu constater que plusieurs résidents de Verdun sont venus plusieurs fois dans l’espace et ont commencé à s’approprier le lieu : en utilisant la cuisine pour préparer des repas collectifs, en ajoutant des objets de décoration dans l’espace ou en proposant des informations sur leurs propres activités communautaires.

« Combien de temps avez-vous passé à l’éco2FEST ? »

La création d’une ambiance de qualité fondée sur le partage et l’ouverture représentait la condition sine qua non pour favoriser une appropriation de l’espace pour les visiteurs. Car la volonté de l’équipe n’était pas seulement d’organiser des conférences ou d’installer un espace de travail, mais aussi de proposer un espace gratuit de rencontres où les gens devaient se sentir à l’aise, prendre du plaisir à être sur place et se sentir impliqués et intégrés aux discussions et aux ateliers manuels. Pour ce faire, une grande attention a été mise sur les conditions d’accueil des festivaliers. Durant trois semaines, nous avons pu observer la formation d’échanges ponctuels et informels entre des individus profondément différents qui n’ont pas nécessairement vocation à se croiser. Le salon et la cuisine ont été deux espaces stratégiques qui ont permis l’émergence de ces rencontres inopinées. La forte proportion des répondants affirmant que leur premier motif de fréquentation du festival était de rencontrer des personnes semblent confirmer ces observations. Si les conversations n’étaient pas l’attraction principale du festival, elles devaient amener les individus à prendre conscience qu’ils pourraient expérimenter leurs idées ou leurs projets au sein des conférenciers ou des porteurs de projets dans l’atelier. À la différence des autres espaces, l’ouverture de l’atelier à l’ensemble des festivaliers n’a pas rencontré le succès souhaité du fait de l’absence de la majorité des porteurs de projets. L’atelier a davantage fait office d’espaces de représentation pour montrer au grand public à quoi pouvait ressembler un espace de conception et de fabrication numérique (par exemple : les makerspaces, les Fab Labs ou les hackerspaces). Pourtant, un festivalier sur dix souhaitait réaliser un travail manuel dans l’atelier. Plus encore, 49,1% des répondants au questionnaire affirmaient être porteurs d’une idée, d’un projet de fabrication d’objets qu’ils désiraient développer.

« Pourquoi êtes-vous venus à l’éco2FEST ?»

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Au fil des semaines, nous avons pu constater que plusieurs résidents de Verdun sont venus plusieurs fois dans l’espace et ont commencé à s’approprier le lieu : en utilisant la cuisine pour préparer des repas collectifs, en ajoutant des objets de décoration dans l’espace ou en proposant des informations sur leurs propres activités communautaires. Si les conversations n’étaient pas l’attraction principale du festival, elles devaient amener les individus à prendre conscience qu’ils pourraient expérimenter leurs idées ou leurs projets au sein des conférenciers ou des porteurs de projets dans l’atelier. En dépit de quelques propositions dont le développement d’une remorque solaire, l’ouverture de l’atelier à l’ensemble des festivaliers n’a pas rencontré le succès souhaité du fait de l’absence de la majorité des porteurs de projets et de la difficulté rencontrée pour l’équipe technique d’identifier les personnes qui désiraient expérimenter ou prototyper de manière concrète leurs idées. L’atelier a davantage fait office d’espace vitrine pour montrer au grand public à quoi pouvait ressembler un espace de conception et de fabrication numérique. Pourtant, 49,1% des répondants au questionnaire affirmait être porteurs d’une idée, d’un projet de fabrication d’objets qu’ils désiraient développer.

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Occupation du lieu par les visiteurs et l’équipe de l’éco2FEST

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« S’approvisionner de manière responsable Enfin, l’approvisionnement et la logistique représentaient un ultime défi avant l’ouverture au public. L’éco2FEST a choisi de mettre en œuvre un mode d’approvisionnement qui intègre des critères environnementaux et sociaux aux processus d’achat pour réduire l’impact sur l’environnement et soutenir les organisations locales. Dans cette optique, la réduction, le réemploi, le recyclage, la valorisation et l’élimination des matières résiduelles ont guidé la gestion écologique de l’approvisionnement du festival. Les dons d’excédents alimentaires des épiceries du quartier ont permis tout au long du festival d’offrir gratuitement des repas pour les festivaliers.

J’avais envie de mettre en œuvre les principes d’approvisionnement responsable et de développement durable que j’ai étudié à HEC. L’objectif était de limiter autant que faire se peut notre impact environnemental. Rien avoir à produire ou à acheter en ayant recours à des échanges de services et des partenariats de fournisseurs qui partagent ces valeurs comme Rise ou Vert Pomme. La gestion des matières résiduelles a été particulièrement une réussite !

Préparation des repas dans la cuisine

Grâce aux dons des épiceries de la rue Wellington, nous avons récolté des surplus alimentaires destinés à être jetés. Ils n’avaient pas à amener leur déchet à l’enfouissement et nous on s’approvisionnait localement. On a reçu beaucoup de fruits et de légumes.

Au final, les trois semaines de festival n’ont généré que trois petites panières de déchets non recyclables. Le reste, c’est du compost ou des bouteilles en verre consignées. On n’a pas utilisé de bouteille plastique. De mon point de vue, c’est une réussite parce qu’on a réussi à s’approvisionner localement.

Maria

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S’organiser pour agir rapidement

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Face aux contraintes de temps, de lieu et de ressources, l’éco2FEST s’est doté d’un mode de fonctionnement inspiré des communautés numériques. L’objectif a été de parvenir à s’organiser en un minimum de temps pour accueillir les festivaliers ainsi que tous ceux qui souhaitaient contribuer à l’événement. Plusieurs projets issus du web 2.0 ont fait la démonstration que la production d’un bien immatériel comme un logiciel pouvait se réaliser sans l’intervention d’une entreprise privée ou d’un organisme public. La qualité des réalisations est néanmoins égale sinon supérieure à celle des organisations publiques ou capitalistes. L’une des forces de ces organisations en « réseau » est leur capacité à fédérer rapidement d’autres individus pour réaliser un projet commun. Autrement dit, elle vise à réduire les barrières de l’action pour permettre à n’importe quel individu de s’agréger au projet pour apporter la contribution qu’il aura préalablement choisi d’apporter. C’est l’individu qui s’auto-sélectionne. Il détermine la tâche qu’il se sent capable d’accomplir et il propose ensuite son travail à la communauté. Dans ce processus, tout le monde possède les mêmes droits et les mêmes capacités d’action sur les projets. Les participants ont accès à toutes les données. La coopération doit être libre et non forcée. En dépit des limites de l’organisation qui vont être soulevées plus bas, les réponses aux questionnaires indiquent que le public a été globalement très satisfait de l’organisation du festival. Les niveaux de satisfaction sont élevés : 82,1% de satisfaits sur la localisation, 89,5% de l’accueil, 89,5% de l’ambiance et 77,2% de l’organisation générale.

Forces et limites de l’organisation collaborative durant le festival

Dans la pratique, l’éco2FEST a eu une organisation à mi-chemin entre une structure hiérarchisée traditionnelle et d’une organisation horizontale comme nous l’avons décrite. Un référent a été assigné à chaque cellule de travail, dédiée par exemple à l’aménagement, la communication, la programmation ou à l’incubation, qui pouvait se composer de plusieurs bénévoles. Ces référents possédaient un certain niveau de d’informations et de prise de décision par exemple sur le budget du festival.

« Chez OuiShare nous ne travaillons pas de la même manière que Sensorica qui est une organisation dans laquelle une foule de contributeurs peuvent se regrouper momentanément pour résoudre un problème ou développer une solution technique. Nous avons voulu expérimenter cette gouvernance. Je suis très contente de cet événement, mais j’y vois une limite pour de l’événementiel. Elle fonctionne très bien pour des problèmes d’ingénierie parce que tout le monde possède quasiment la même formation. C’est facile de déterminer que cette personne qui possède un doctorat en robotique va pouvoir travailler sur un projet d’ingénierie. Dans le cas d’une manifestation culturelle comme la nôtre, il faut davantage d’entregent, de compétences interpersonnelles, qui sont difficiles à identifier chez les personnes.

»

« Il y a eu un moment de flottement au début. Certains prenaient des initiatives alors qu’il y avait des référents, puis les gens ont compris l’organisation. Je pense que la structure a finalement réussi à intégrer les nouveaux arrivants pour qu’ils trouvent leur place et sachent où aller.

»

membre de l’éco2FEST

Lors de la discussion en groupe, plusieurs incompréhensions sont apparues entre les leaders de l’éco2FEST et les autres membres de l’équipe. Certains ont fait valoir qu’ils n’avaient pas été prévenus de la nature de l’organisation. D’autres ont soulevé leur malaise avec cette culture du travail lorsque des compétences techniques étaient en jeu comme sur l’aménagement de l’espace et les enjeux de sécurité. En dépit de ces limites, un consensus est apparu sur le fait que l’équipe s’est progressivement organisée en réseau à mesure qu’un fort niveau de confiance et un sentiment d’appartenance commun s’est créé.

membre de l’éco2FEST

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« À l’image des communautés numériques, plusieurs « bassins » d’information avaient été mis en place pour encourager l’implication de l’ensemble du personnel du festival : un dossier complet sur Google drive, une page Internet et un outil de gestion de comptabilisation des heures travaillées. Chacun de ces outils devait permettre aux individus de s’informer avant d’agir. Or, l’équipe n’a pas anticipé les coûts d’appropriation de ces outils numériques et des informations qu’ils contenaient. Plusieurs individus ont souligné les barrières technologiques à l’accès de ces informations en dépit du fait qu’elles étaient mises à disposition de l’ensemble des membres.

Le propre du travail en mode réseau, c’est de donner la possibilité aux gens de se rallier à l’action sans une formation préalable. Parce que toute l’idée du réseau, c’est d’avoir un flux continu de personnes qui arrivent, comprennent rapidement quoi faire, restent présentes un ou deux jours et partent avant d’être remplacées par d’autres contributeurs.

Cette trajectoire nécessite la mise en place d’outils et d’indicateurs pour arriver, comprendre, faire, partir. Créer une équipe est un peu contraire à ce mode de fonctionnement. Or, je constate qu’elle n’a pas été aussi structurante que je l’aurais souhaité parce qu’il y a eu une sous-utilisation des outils numériques et des processus que j’avais mis en place. Par exemple, peu de gens ont utilisé le site web qui n’existait pas uniquement pour donner de l’information, mais aussi pour que chacun édite les pages en y ajoutant de l’information. J’ai communiqué largement, mais les gens n’ont pas suffisamment utilisé ces outils qui devaient les aider à fonctionner en réseau. Au final, ils l’ont quand même fait.

Tiberius

À la fin de l’événement, un autre problème lié aux choix technologiques effectués en amont du festival a émergé. Le système d’enregistrement des heures n’a pas été adapté. En effet, plusieurs problèmes sont survenus pour distinguer les heures travaillées et les heures passées librement sur le site pour plusieurs des membres.

« Il y avait trop d’informations. Ce n’était pas clair. Qu’est-ce qu’on devait faire ? Quels étaient les outils ? Comment pouvait-on les utiliser ?

»

membre de l’éco2FEST

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Faire participer le plus grand nombre

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Prévoir l’imprévu L’émergence d’un monde connecté transforment nos façons de penser. Depuis qu’un grand nombre de connaissances et de savoirs sont disponibles gratuitement sur Internet, l’organisation d’une conférence ne peut plus se limiter à la diffusion d’expertises ou à une simple séance d’informations. Elle doit se concevoir autrement. C’est dans cette perspective que l’éco2FEST a souhaité expérimenter de nouvelles manières d’organiser des conférences. L’objectif est qu’elles soient participatives et fassent émerger une intelligence collective sur des thèmes qui touchent n’importe quel citoyen. Pour tendre vers une intelligence collective – c’est-à-dire la capacité d’un groupe d’individus à faire lui-même le travail intellectuel au lieu de le déléguer à d’autres – l’éco2FEST a organisé plusieurs « disconférences ». Le préfixe « dis » souligne la différence de ces discussions avec une conférence plus classique où un locuteur face à un public transmet et échange des informations.

Agathe

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Une programmation (trop) ambitieuse ? La programmation a été très ambitieuse dans le temps imparti pour la préparer. Durant trois semaines, l’éco2FEST a organisé huit grands débats autour de l’économie collaborative : —— La mobilité ; —— La gouvernance ; —— Les politiques publiques ; —— Les espaces de travail partagé ; —— L’industrie manufacturière ; —— L’agriculture urbaine et la souveraineté alimentaire ; —— L’habitation ; —— La finance, l’assurance et les monnaies complémentaires.

Une disconférence est un événement participatif dont la programmation est construite en fonction des participants. Les thèmes sont programmés, mais le contenu émerge avec l’aide des participants. Bien sûr, le squelette est fourni, mais habillé à mesure que le débat progresse. Pour chaque thème, des lignes directrices sont proposées, mais les discussions sont différentes, évolutives et prennent la couleur des animateurs et des participants. Pour l’éco2FEST, l’animation d’une disconférence est une activité majeure, car elle doit pouvoir faire ressortir des choses claires et précises. Pour cela, il fallait permettre aux gens de parler, de se sentir à l’aise. Globalement nous avons réussi. La première semaine, je trouvais qu’on n’avait pas réussi à extraire des éléments tangibles et structurés des discussions. Pour certains, c’était la première fois qu’ils animaient de cette manière. Ça s’est amélioré au fur et à mesure. Quand je vois qu’une dame de cinquante ans réussit à s’intégrer dans un groupe de discussion au milieu d’ingénieurs et de geeks, à ne pas hésiter à les interpeller, c’est une réussite pour nous. Ça nous indique que nous avons mis en œuvre les conditions suffisantes pour lui permettre de se frayer un chemin là où elle n’aurait pas l’occasion d’aller.

»

Animer l’exploration collective Parmi les répondants, 75,4% était satisfaits de la programmation. Comparativement aux autres questions, la programmation présente le taux le plus bas de satisfaction. Parmi les motifs d’insatisfaction, les festivaliers ont souligné les horaires des conférences en journée et l’absence de clarté dans la communication des thématiques. Tout au long du festival, la programmation a été un objet de tension et d’incompréhension au sein de l’équipe. Selon une des responsables, l’éco2FEST avait le potentiel d’inviter beaucoup plus de participants sur l’ensemble des thématiques comme elle l’avait fait l’édition précédente. Mais encore une fois, la réponse tardive du financement a été un problème. Les personnes approchées n’ont pas pu répondre favorablement du fait des délais très courts. Néanmoins, l’équipe a réussi à convaincre pour chaque «disconférence» un nombre minimal de deux ou trois experts pour alimenter les discussions.

Traditionnellement, l’animateur d’une conférence définit l’objectif commun de la réunion avant de donner la parole. Cette phase cadre la discussion et oriente les débats. Dans le cas de l’éco2FEST, le temps donné à cette étape pouvait être plus long dans la mesure où le format des « disconférences » impliquait la clarification et la formulation d’un objet commun de la part de tous les participants. Nous avons pu observer que la majorité des débats étaient construits en deux temps. Tout d’abord, une phase de divergence où chaque intervenant prenait la parole pour partager le récit d’une expérience ou l’exposé d’un problème. L’animateur veillait à ce que la discussion soit fluide et respectueuse par un code gestuel silencieux où les participants pouvaient appuyer le propos, s’y opposer, répondre directement ou prendre son tour de parole. Puis, les idées pertinentes étaient approfondies par le groupe qui tentait de faire émerger des éléments de consensus sur la thématique ou des points à explorer.

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Règles de partage de la parole «Le langage des signes aide à ce que les réunions se déroulent plus aisément, et les facilitateurs à percevoir l’émergence d’accords. Trois signaux simples suffisent déjà : [Image 1] Lève la main quand tu souhaites contribuer à la discussion de manière générale. [Image 2] Lève les deux mains pour une réponse directe à la discussion actuelle : pour corriger une information erronée ou clarifier un malentendu factuel. Ceci te permet de sauter toute la file; il faut donc l’employer sagement et éviter l’abus ! [Image 3] Applaudissement silencieux : quand tu entends une opinion que tu rejoins, agite tes mains, orientées vers le haut. Ceci économise beaucoup de temps car il n’est pas nécessaire de dire «Je voudrais juste ajouter que je suis d’accord avec X». Les désaccords peuvent se signaler par une agitation des mains, doigts orientés vers le bas. » (Extrait de la trousse d’animation de l’éco2FEST)

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3 Nous avons pu constater que plusieurs animateurs n’étaient pas à l’aise avec ce mode de fonctionnement : que ce soit par inexpérience, par impréparation, par autoritarisme ou simplement par une incapacité de faire respecter les règles de partage de la parole. Ces méthodes d’animations ont créé quelques frustrations parmi les animateurs : « J’aurai voulu quelque chose de plus carré, de plus scientifique. Je me suis senti dépassé pour recadrer la conversation. J’ai juste donné la voix », « j’ai animé une fois, mais il y avait des gens qui n’étaient pas confortables avec ma manière de faire. J’étais trop autoritaire pour eux. C’est difficile de gérer une conversation quand on ne connaît pas le sujet. Je trouvais que c’était beaucoup plus difficile ». La première semaine, peu de contenus constructifs ont pu être dégagés de ces groupes de discussion exploratoire. Progressivement, les animateurs ont assimilé ces règles. Le contenu des discussions s’est amélioré graduellement d’autant plus que le nombre de personnes présentes permettaient aux participants de fabriquer ensemble quelque chose de concret comme des propositions ou des projets futurs et ne pas se limiter à l’échange de discours.

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L’importance de la disposition de la salle La configuration spatiale d’une conférence ou d’une réunion est traditionnellement construite pour favoriser le monopole de l’attention du public sur quelques intervenants qui se positionnent comme des distributeurs d’idées. Ce type de configuration ne favorise pas la confrontation d’idées sur un sujet donné et contraint les auditeurs à une certaine passivité. Du moins en apparence, grâce aux ordinateurs et aux téléphones intelligents, les auditeurs peuvent se connecter en temps réel à d’autres contenus ce qui les détournent un peu plus de la discussion. En clair, ces configurations ne permettent pas de faire émerger de l’intelligence collective à travers une participation élargie des auditeurs.

Lors de la première thématique de l’éco2FEST autour de la mobilité, un panel de quatre intervenants a pris place sur l’estrade. Face à lui, un public d’une soixantaine de personnes avait pris place autour des tables disposées en hémicycle autour de la scène. La configuration spatiale n’a pas toujours permis la participation du public aux discussions. Les prises de parole ont été mobilisées par les conférenciers. Peu d’interventions visaient un échange d’idées ou une invitation à l’action. La majorité des prises de paroles du public était sur le registre de l’interpellation qui défendait des intérêts particuliers.

Après ces premières journées, l’équipe organisatrice a pris conscience de l’enjeu que représentait l’agencement de la salle. Il devait être en adéquation avec l’objectif global d’un événement participatif : la manière dont les participants sont situés les uns par rapport aux autres, par rapport aux orateurs ou encore les animateurs. Les intervenants et le public ne pouvaient plus être tenus à distance. Plusieurs configurations ont alors été mise en place pour permettre d’autres formes d’interactions et mobiliser des savoirs qui ne soient pas seulement de l’expertise ou du savoir scientifique (savoir d’usage, « bon sens » citoyen, savoir professionnel diffus).

1.

1. La configuration en U a permis de prendre des notes, de communiquer entre les personnes et d’écouter plusieurs présentation PowerPoint des intervenants 2. La configuration en rectangle est la disposition qui a fait émergé le plus d’idées et de proposition en positionnant tous les participants sur un pied d’égalité en leur permettant de prendre des notes et de présenter leur document 3. La configuration en rond a, quant à elle, suscité des échanges en créant une atmosphère conviviale entre l’ensemble des participants. En revanche, elle n’a pas permis l’élaboration de contenu, mais davantage l’inclusion des participants à la discussion.

2.

3.

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Récapitulatif de disconférence #1

Arrêtons de demander aux politiciens s’ils aiment l’innovation. Demandez-leur quel est leur niveau de tolérance au bouleversement. S’ils sont honnêtes, il vous répondront : « pas beaucoup ».

Politique Publique

Points à retenir du débat

Quelle est la capacité d’un gouvernement à supporter les changements ?

»

Une très large majorité de Québécois ont recours à des pratiques de consommation collaborative comme prendre un taxi, louer un appartement ou publier un retour critique sur une prestation. Ce thème de discussion souhaitait explorer les relations qu’entretiennent les décideurs politiques à ce phénomène. Le développement de l’économie collaborative interpelle les administrations publiques autant sur le plan de l’innovation et de la croissance économique qu’autour de questions plus sociales liées au droit du travail, à la fiscalité, à l’accès à l’information ou la participation citoyenne aux politiques publiques.

« Le paradoxe est qu’on cherche à faire rentrer l’innovation dans des cases.

« UBER ne partage pas ses données car la négociation n’a pas été correctement faite au moment de sa mise en place dans la ville. La ville de New-York a obligé UBER à partager ses données de géolocalisation s’ils voulaient s’établir en ville, ici non.

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Les premiers échanges ont abordé l’apparente inactivité des décideurs publics au sujet de l’économie collaborative. Est-ce un manque d’adaptation ou un processus normal de l’État visà-vis d’une nouvelle réalité économique dont les contours restent difficiles à cerner. Les entreprises sont toujours en avance sur les gouvernements. Pour qu’ils suivent le rythme ou anticipent les bouleversements à venir, il a été mention d’unités de prospectives pour pallier la disparition récente des unités de veille stratégiques au sein des administrations publiques. Le retard accumulé par le Québec à propos de l’économie collaborative serait une des conséquences de ces suppressions. En attendant, un consensus a émergé sur la nécessité d’ouvrir des canaux de communication entre les entreprises collaboratives et les administrations publiques pour assurer une compréhension mutuelle et leur coopération.

Utiliser les données pour mettre en œuvre les politiques publiques Les récentes possibilités techniques permettent de récolter, d’agréger et d’analyser des quantités énormes de données pour légitimer la mise en œuvre de nouvelles politiques publiques. De nombreux obstacles persistent. Par exemple, en matière de mobilité, plusieurs acteurs publics et privés possèdent de précieuses informations sur le trafic urbain pour soutenir la création d’une ligne de bus ou l’aménagement d’une voie cyclable. Or actuellement, chaque acteur souhaite protéger ses données à des fins différentes qui sont parfois en contradiction avec la volonté politique de créer du bien commun. C’est pourquoi le renforcement et l’exploitation d’une base de « données ouvertes » – c’est-à-dire des données publiées de manière structurée sous licence libre garantissant son libre accès et sa réutilisation par tous sans restrictions techniques, juridiques ou financières – ont émergé comme des priorités récentes des administrations municipales.

La question de la réglementation et de la fiscalité Faut-il ramener les entreprises collaboratives dans les cadres réglementaires existants ou en créer de nouveaux ? L’exemple d’Eva Coop a été plusieurs mentionné pour soutenir le fait que les réglementations actuelles freinent le développement de cette application de co-voiture alors que le gouvernement québécois aurait facilité l’ancrage d’Uber. La situation actuelle ne permettrait pas l’émergence de nouveaux concurrents sur ce marché de la mobilité collaborative. Dans l’état actuel des connaissances, le laissez-faire est de mise. L’adaptation de la réglementation présente de nombreux risques. Les retombées fiscales pourraient ne pas être adaptées d’autant plus que le sujet n’est pas entièrement compris par les administrations publiques.

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Récapitulatif de disconférence #2

Finance, assurance et monnaies complémentaires Les pratiques collaboratives associées aux plateformes numériques bouleversent les modes de financement traditionnel. Que ce soit la façon dont un individu rassemble les capitaux nécessaires à la création d’un projet, la manière dont il se protège contre les risques ou plus largement, ses moyens légaux d’échange, de paiement ou d’épargne. Si le sociofinancement – c’est-à-dire la mise en commun de ressources financières par des individus – s’est largement développé pour encourager des projets d’économie réelle qui ont un impact social, d’autres offres de financement participatif commencent à émerger comme les prêts solidaires, les contreprestations, les prêts avec intérêt (Prêts P2P) ou en actions (Prêts P2B).

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Points à retenir du débat

Le financement participatif : une offre à développer Les frontières entre les entreprises et les organisations à but non lucratif sont de plus en plus floues. Les stratégies de financement mises en place pour assurer la prise en charge et l’accompagnement des promoteurs ne sont pas toujours adaptées au statut juridique de l’organisation ciblée. Par exemple, certaines entreprises peuvent avoir un fort impact social et ne pas avoir accès à certaines aides qui encouragent ces retombées. L’avènement des nouveaux types de financement participatif représente une solution pour ces cas de figure du fait qu’ils apportent des sources de financement utile et complémentaire. L’enjeu soulevé est d’accompagner les organisations en démarrage pour les aider à structurer leur activité tout en s’assurant de l’impact futur de leurs activités. Les participants ont souligné une limite au financement participatif. En effet, le temps de la levée des fonds, les opérations de marketing et l’énergie dépensée par l’organisation sont des coûts sous-estimés la plupart du temps, avant d’être un revenu.

La question du contrôle des crypto-monnaies La confiance dans toute monnaie est primordiale. Pour deux des acteurs présents, la question du contrôle, et donc de la confiance, dans les crypto-monnaies représente un enjeu énorme pour leur utilisation dans leur mode de fonctionnement. Dans le cas des monnaies virtuelles utilisant la technologie blockchain, le contrôle des transactions entre les utilisateurs n’est pas centralisé par un organe, mais distribué. Autrement dit, chaque transaction est cryptée, vérifiée et groupée à intervalles de temps réguliers par un nombre réduit d’usagers de cette technologie. C’est pourquoi un des intervenants soulignait que le contrôle existait. Il est simplement localisé dans un endroit où les organisations ne sont pas habituées à le voir.

Un statut pour les organisations en réseau ? Les organisations comme OuiShare et Sensorica sont des réseaux qui ne fonctionnent ni comme une entreprise ni comme une association. Représentatives de l’économie collaborative, elles ne possèdent pas de conseils d’administration ou encore d’employés stables, mais leurs activités sont réelles et génèrent des revenus. Le problème est l’impossibilité pour ces organisations d’ouvrir un compte en banque parce que leur statut juridique n’existe pas. En conséquence, elles créent une structure annexe (OBNL) pour être reconnues légalement, mais ce statut ne représente pas ce qu’elles sont et ce dont elles ont besoin. C’est pourquoi elles restent invisibles aux yeux des autorités.

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Récapitulatif de disconférence #3

Mobilité

Points à retenir du débat

Utiliser la mobilité pour encourager l’économie locale Pour se différencier des plateformes internationales comme Uber, deux des participants ont souligné leur ambition de réinvestir les retombées financières de leur application directement dans l’économie locale. Par exemple, la plateforme OuiHop souhaite appliquer les principes de l’économie circulaire à la mobilité en payant les conducteurs avec une monnaie virtuelle qu’ils peuvent utiliser auprès des commerçants locaux.

Face aux impératifs économiques et environnementaux, l’apparition des plateformes de solutions de mobilité a offert de nouvelles possibilités pour répondre à une demande croissante de transport. Avec les technologies d’information et de communication, il est désormais plus facile de partager l’usage d’un bien et, parfois, de sa propriété comme une voiture ou un vélo. Cela représente un défi d’adaptation pour les entreprises de l’économie traditionnelle comme les acteurs publics en transport. Dans l’économie collaborative, la valeur se déplace vers la valorisation des interactions au lieu des actifs. Toutefois, cette transition d’un paradigme basé sur la propriété vers un paradigme fondé sur l’usage pourrait mener progressivement vers un usage raisonné et partagé des moyens de transports les plus polluants. Elle pourrait également répondre à des attentes sociales dans des territoires où l’offre en mobilité est insatisfaisante.

« Le co-voiturage utilise le flux de voitures comme un nouveau réseau de transport public dans les zones ou il n’y en a pas assez.

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Pallier les besoins momentanés

Plusieurs besoins ont été identifiés pour expliquer un usage de la voiture : le dernier kilomètre, les travaux, l’absence de services ou encore les horaires. Pour chacune de ces problématiques, les participants ont partagé des solutions collaboratives à moindre coût tels que les transports à la demande connectée, les vélos en libre-service ou le prêt d’automobile entre voisins. Propositions qui devraient être pensées et harmonisées à l’échelle du quartier en supplément des offres métropolitaines de mobilité.

La question des limites des applications

À Verdun, un des projets de partage de remorques en voisins a soulevé deux problèmes majeurs liés à l’utilisation d’un ordinateur ou d’un téléphone intelligent. Premièrement, ces intermédiaires excluent un grand nombre d’usagers potentiels comme les aînés ou les populations défavorisées alors qu’ils sont la cible idéale pour cette économie du partage et de l’entraide. Deuxièmement, les solutions technologiques pour encourager le partage de remorques ne chercheraient pas toujours à être simples d’utilisation, issues d’une fabrication locale et surtout réparables. Pour l’ensemble des projets de l’économie collaborative, un tropisme vers le tout technologique perdure. À l’opposé, le mouvement low tech – proche du Do-It-Yourself – incite les individus à réaliser leurs propres projets en exploitant au maximum les ressources locales dans le respect de leur environnement. Dans le cas du développement d’une application d’autopartage, les défenseurs de la low tech affirment qu’elle peut résoudre des problèmes ponctuels de mobilité, mais en crée de nouveaux plus graves (impacts des ondes électromagnétiques sur la santé, dépendances économiques à des forfaits de téléphonie, exploitation des terres rares et des minéraux liés à la composition du téléphone, etc.).

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Récapitulatif de disconférence #4

Industrie manufacturière Le secteur manufacturier au Québec fait face à plusieurs défis : concurrence des pays émergents, crise des vocations, baisse de la productivité et faible utilisation des technologies. Ainsi, le Québec, est appelé à fabriquer des produits à forte valeur ajoutée, novateurs et concurrentiels pour rester compétitif. Pour ce faire, il s’agira de miser sur des produits de niches, de créer de nouveaux produits et procédés, mais également de proposer de nouveaux services de conception et de fabrication. L’accroissement de l’automatisation et l’intégration de hautes technologies semble incontournable pour ce secteur stratégique. L’éco2FEST a voulu explorer une des avenues possibles pour l’industrie manufacturière : l’innovation ouverte. De plus en plus d’organisations privées et publiques font appel à ce mode de développement pour « capturer » l’intelligence des foules. Concrètement, l’objectif est de s’ouvrir aux idées et talents extérieurs afin de tirer parti de l’expertise, des compétences et des connaissances des citoyens. L’efficacité de ce modèle tient dans la masse critique de personnes participant à l’écriture du code et à la résolution des problèmes posés, mais pose des enjeux de protection intellectuelle collective.

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Points à retenir du débat

Identifier les communautés d’innovation sur le territoire québécois

Nous ne connaissons pas le nombre de communautés d’innovation qui existent sur le territoire québécois. S’il existe plusieurs labels, ce sont des groupes plus ou moins formels d’individus ayant pris l’initiative de se connecter entre eux pour diverses raisons (pratique, but, cause ou intérêt commun). Ils mettent en commun des ressources et des connaissances à un coût et à une échelle auxquels il serait difficile de parvenir dans un système traditionnel de type B2B ou B2C. Concrètement, ces organisations peuvent produire des contenus immatériels (logiciels et jeux vidéos, des blogues de passionnés, des journaux citoyens, des applications), mais de plus en plus des contenus physiques (objets, mobiliers, solutions d’ingénierie, automobiles, etc.).

Comment tirer profit de la force d’innovation de ces communautés pour l’industrie manufacturière ? Les communautés d’innovation peuvent réduire les risques et les coûts de recherche et de développement d’une organisation. Pour ce faire, ces organisations doivent développer une culture interne et de nouvelles pratiques managériales pour interagir avec ces communautés d’innovateurs afin de permettre l’extraction de leur connaissance tout en respectant les valeurs et les règles d’organisation qu’elles se sont données. Concrètement, ces relations peuvent se tisser à travers plusieurs initiatives comme des événements (hackathons, festivals, etc.), des incitatifs financiers (subventions, programmes et supports aux projets), des formations (cours) ou l’ouverture de lieux (incubateur) pour stimuler et ancrer localement les individus.

Propriété intellectuelle et innovation ouverte

Sur cette question complexe, le débat s’est surtout porté sur les questions que se posent les porteurs de projets présents vis-à-vis de l’innovation ouverte. Si l’innovation ouverte recommande d’abaisser les protections, ne peut-elle pas être exploitée par mes concurrents à mon insu? Comment puis-je protéger légalement mon produit contre les imitations si je ne possède pas une protection totale de mon bien ? Comment puis-je protéger mon savoir-faire en partageant l’ensemble de mes processus techniques ? Face à ces questions, la discussion s’est portée sur la capacité de certaines entreprises de constituer un écosystème d’innovation autour de leurs projets développés en open-source. Parce que ces projets ne possèdent pas de barrières légales au partage des informations qu’ils contiennent, mais plutôt à l’usage que les organisations peuvent en faire, ils favorisent l’agrégation de partenaires contribuant à leur développement.

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4

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Accélérer les projets

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Accompagner de nouvelles formes d’entrepreneuriat collaboratif Structuré et géré par deux membres du réseau Sensorica basé à Montréal, l’éco2FEST a proposé un programme d’accompagnement accéléré de projets. Quelques mois avant l’ouverture du festival, un appel à projets a été lancé. Onze projets ont été sélectionnés pour constituer la cohorte de l’édition 2018. Les projets des résidents de Verdun ont été privilégiés pour ancrer territorialement le festival. À la différence des autres offres d’accélération au Québec, la singularité du festival était d’accompagner les porteurs de projets vers des pratiques collaboratives pour développer leur projet en offrant une alternative sur le financement de leur projet, le prototypage de leur objet, la gouvernance de leur projet, la recherche et le développement ou encore la commercialisation.

Nom du projet

Mission du projet

Localisation

Phase de développement

Accélération éco2FEST

Coopérative de Solidarité Abondance Urbaine Solidaire (CAUS)

Sensibiliser les populations vulnérables de Verdun à une alimentation saine et locale et leur donner un accès à des fruits et légumes frais

Montréal, Verdun

Stade de croissance

Aide à la gouvernance de la coopérative, participation à des conférences

Marché Mobile Verdun

Offrir des lieux de vente en fruits et légumes frais et locaux dans Verdun

Verdun

Organisation établie

Présence aux conférences

Grand potager

Renforcer la sécurité alimentaire des résidents de Verdun en rassemblant des acteurs dédiés à l’agriculture urbaine au sein d’un même espace de travail et d’exploitation agraire

Verdun

Organisation établie

Pitch PME Montréal, participation à des conférences

L’Ancre des Jeunes

Lutter contre le décrochage scolaire

Organisation établie

Participation à des conférences

TSchool Montreal

Encourager l’échange de connaissances en organisation des discussions libres

Montréal, Verdun et autres quartiers Montréal, La Petite Patrie

Stade conceptuel

Absent durant l’éco2FEST

Parcours d’accélération proposé aux participants en fonction de leur besoin 1. Organisation et plan d’affaires : aide à la structuration de la gouvernance de l’organisation, de ses valeurs et de la formulation d’un plan d’affaires pour les organisations au stade conceptuel ou qui désirent réorienter leur modèle vers l’économie collaborative comme les plateformes numériques. 2. Pitch de vente : entraînement au pitch de vente d’entreprise collaborative avec présentation powerpoint à l’appui. Sur demande, certaines organisations ont pu présenter leur projet à PME Montréal quelques semaines avant le festival. 3. Atelier : offre d’un accès à un lieu gratuit de travail avec possibilités d’avoir une assistance technique pour concevoir des prototypes virtuels ou matériels. 4. Conférences : rencontre avec d’autres organisations et entrepreneurs lors des conférences pour alimenter la réflexion des porteurs de projets sur les modes de développement en open-source tels que la production collaborative en R&D (crowdsourcing) ou la fabrication sociale (mouvement maker).

Nurse Online

Faciliter la formation continue des infirmières grâce à une plateforme numérique communautaire

Narbonne (France)

Stade conceptuel

Aide à la gouvernance et plan d’affaires, présence à l’atelier, participation à des conférences

Women in mind

Créer des réseaux de solidarité et d’entraide pour les femmes d’un même quartier

Verdun

Stade de croissance

Pitch PME Montréal, absent durant l’éco2FEST

Breathing Games

Rendre accessible et ludique l’éducation en santé respiratoire

Montréal

Stade de croissance

Pitch PME Montréal, prototypage, absent durant l’éco2FEST

Eastman

Stade de croissance

Prototypage, présence aux conférences

Verdun

Stade conceptuel

Présence aux conférences

Montréal

Organisation établie

Absent durant l’éco2FEST

O’Noix

Jeu vidéo santé mentale

5. Sociofinancement : découverte de nouveaux modes de financement participatif de projets grâce à la constitution d’une communauté de contributeurs autour de leurs projets. Sauvons la falaise ! 46

Transformer et exploiter commercialement la noix noire et sa coquille Motiver et outiller les personnes ayant des problèmes de santé mentale sévères et persistantes pour devenir autonomes et avoir une forte confiance en euxmêmes Protéger la falaise St-Jacques

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Présentation de projet sélectionné #1

Présentation de projet sélectionné #2

Nurse Online

Grand potager La genèse du projet Fondée en 2016, Grand Potager souhaitait répondre aux besoins de plusieurs organismes tournés vers l’agriculture urbaine afin de leur donner accès à un espace de travail ainsi qu’à des terrains agraires exploitables. L’idée était de les regrouper en réhabilitant un entrepôt et les serres de Verdun. Au fur et à mesure, un noyau d’acteurs s’est formé autour de notre projet pour animer l’espace, l’ouvrir aux citoyens et mettre en valeur les serres et les berges.

Son développement Durant l’année pilote, Grand Potager a aménagé l’espace, effectué plusieurs réparations et signé les premières adhésions annuelles. Chaque organisme peut prétendre à un ensemble de prestations comme le dépôt d’un projet à la communauté, des heures gratuites dans les espaces de production sur le site ou encore une table à nos événements publics qui attirent entre deux cents et quatre personnes. Présentement, nous sommes autonomes financièrement grâce aux revenus qu’on génère. Cependant, les importantes rénovations qui nous attendent dans les années à venir nous obligent à réfléchir à de nouveaux modèles de gouvernance et de financement de notre projet.

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L’accélération éco2FEST 1. Lia de Grand Potager, était très intéressée par le pitch et la présentation à PME Montréal. L’équipe doit élaborer un plan à plus long terme à cause des rénovations. Elle aurait souhaité avoir un retour de la part des professionnels présents lors du pitch et créer des contacts.

La genèse du projet Infirmière, Céline a constaté les difficultés qu’éprouvaient plusieurs de ses collègues à rattraper leurs retards dans leur métier après de longues périodes d’absence comme une grossesse. Elle a alors eu l’idée de favoriser l’échange de connaissance et de savoir-faire des infirmières en montant des vidéos pédagogiques. S’il existe des vidéos tutoriels pour les infirmières disponibles sur les plateformes grand public comme Yoube, Céline observe qu’elles sont de très faible qualité autant sur la forme que sur le contenu. C’est pourquoi elle s’est progressivement dirigée vers un projet de plateforme communautaire en ligne où chaque contenu serait produit par des infirmières pour les infirmières. Le contenu audio et vidéo serait validé par la communauté des infirmières présentes ainsi que des institutions de formation.

3. Concernant sa présence dans l’atelier, elle regrette son manque de temps et de ressources pour n’avoir pas pu proposer un prototype à développer. Elle souligne la valeur ajoutée que constitue un espace de fabrication numérique pour ses activités en agriculture urbaine.

Son développement Au chômage après un déménagement, Céline a bénéficié d’une formation en gestion des petites entreprises dans la ville de Narbonne en France. Plusieurs mentors lui ont permis de structurer leur projet. La formation finie, elle a repris son travail à l’hôpital de Narbonne tout en continuant son exploration au contact des futurs utilisateurs de sa plateforme. Cette période lui a permis d’approfondir les besoins des infirmières et les obstacles auxquels elles sont confrontées pour continuer à se former de manière continue. Après plusieurs partenariats avec des écoles audiovisuelles et numériques de Montpellier, elle parvient à produire ses premières vidéos. Après avoir travaillé avec la Chambre de Commerces et d’Industrie de Narbonne, elle intègre une pépinière d’entreprise de Narbonne, Nucleum, qui lui proposa de participer à l’éco2FEST édition 2018.

Les perspectives L’équipe va continuer à bonifier son modèle d’affaires et élaborera un plan d’action avant de commencer les démarches pour les rénovations de leur espace.

L’accélération éco2FEST À la fin du festival, Céline nous a confié que l’éco2FEST l’avait aidé sur cinq points : 1. Pour son étude de marché, elle avait envisagé de faire appel à une entreprise basée à Montpellier pour qu’elle l’aide à trouver du

2. Durant l’éco2FEST, elle a participé à deux conférences. Elle s’attendait à échanger son expérience et ses enjeux avec davantage de personnes. Elle aurait aimé approfondir davantage son modèle d’affaires pour y intégrer les coûts des rénovations en explorant des solutions issues des pratiques collaboratives. Cependant, elle a apprécié ses discussions avec les personnes présentes. En particulier, les autres acteurs de Verdun. Elle y voit plusieurs collaborations potentielles avec eux.

financement. Pour ce faire, elle avait envisagé de demander un crédit professionnel auprès de sa banque. Durant l’éco2FEST, elle a pris conscience qu’elle n’avait pas forcément besoin de payer les services d’un intermédiaire pour réaliser son étude de marché. Il lui était possible de réduire ses coûts en commençant par constituer une communauté d’infirmières autour de son projet. Parce qu’elles seront convaincues et passionnées, ces personnes pourront facilement l’aider à constituer une étude de marché solide pour préciser son offre. 2. Sur la gouvernance, Céline a pu explorer les différents systèmes de gouvernance et de répartition de la richesse créée par une plateforme numérique. L’une de ses préoccupations était de réfléchir à la façon dont elle pourra redistribuer la valeur créée par la plateforme tout en assurant son propre salaire et celui de ses collaborateurs. Dans ce service d’échange de compétences, elle envisage de mettre en place des incitatifs financiers pour motiver les utilisateurs de la plateforme de proposer, de créer et de réagir aux contenus. Elle ne souhaite pas tendre vers un modèle économique qui s’ouvre à la publicité ou à la vente de produits pharmaceutiques. Ce système pose la question de la répartition du pouvoir entre les administrateurs de la plateforme et les contributeurs les plus dynamiques. 3. Enfin, le dernier enjeu concerne la propriété intellectuelle du contenu produit par les infirmières sur la plateforme. Durant une des conférences de l’éco2FEST sur les licences ouvertes comme les creative commons, elle a découvert qu’il était possible de permettre une large diffusion de contenu en s’assurant du bon usage de ces vidéos. Les perspectives En rentrant de l’éco2FEST, Céline participera à un salon pour les entrepreneurs comme coach. Elle souhaite y discuter des nouvelles formes d’entrepreneuriat collaboratif qu’elle a découvert durant les trois semaines du festival. Pour la suite, elle pense commencer par créer une communauté de pratique autour de son projet et postulera à un programme d’incubation en économie sociale et solidaire, AlterIncub, à Montpellier qui s’ouvre à ce nouveau type de projet collaboratif.

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Présentation de projet sélectionné #3

Breathing Games

Coop CAUS / Marché Mobile Verdun

La genèse du projet Le projet a été lancé par trois personnes en 2014. Notre interlocuteur, formé en design de jeux, explique que son objectif est à la fois de créer de manière collective des connaissances sur la santé respiratoire tout en rendant ces savoirs ludiques, accessibles et librement adaptables.

La genèse du projet Deux projets sont à l’origine de la coopérative : le marché mobile de Verdun et un système d’aquaponie. Grâce au Programme de développement des coopératives, les deux projets se sont progressivement constitués en coopérative de travailleurs, puis en coopérative solidarité sans but lucratif. À ce jour, la coopérative compte 106 membres dont l’objectif commun est d’inciter les gens à manger localement des produits frais toute l’année.

Son développement Lors de la première année, l’équipe a prototypé un premier jeu de sensibilisation à la fibrokrystique et à l’asthme. Ce «jeu sérieux» devait faciliter la gestion et le traitement des malades par une approche ludique qui facilite l’apprentissage. Par exemple, comprendre les déclenchements de l’asthme ou les manières d’éviter une crise respiratoire. Les premières phases de développement du projet se sont produites lors d’événements dédiés à la création de jeux. Ces jeux sont développés de manière « libre », c’est-à-dire que tout le monde peut contribuer à leur développement. Ces manifestations rassemblaient plusieurs personnes de différents domaines (des cliniciens, des développeurs, des ingénieurs, des designers, etc). Progressivement, plusieurs personnes se sont agrégées à leur projet. Depuis trois ans, l’équipe cherche à lever des fonds de recherche pour continuer leur première pré-étude réalisée à l’hôpital Sainte-Justine. Parallèlement, l’équipe a envisagé de créer des capteurs qui transforment le souffle des malades en données numériques. Depuis 2015, l’équipe collabore avec Sensorica, partenaire de l’atelier de l’éco2FEST, pour l’aider à structurer la gouvernance et le mode de fonctionnement de l’équipe ainsi que pour développer des prototypes. L’équipe a mis en place un processus de comptabilisation des contributions. Chaque fois que quelqu’un contribue bénévolement ou contractuellement à l’avancement du projet, il l’enregistre sur une plateforme. L’idée est de pouvoir tracer les contributions pour rendre visible la participation des personnes et renforcer le sentiment d’appartenance au projet.

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Présentation de projet sélectionné #4

L’accélération éco2FEST Durant les trois semaines, l’équipe de l’éco2FEST poursuit le travail débuté par Sensorica. L’objectif était de les aider à améliorer la capacité des capteurs à enregistrer le débit d’air des personnes atteintes de maladies respiratoires. L’équipe a présenté leur projet à PME Montréal, mais n’a pas pu être présente à l’atelier durant les trois semaines du festival. Le travail a continué en ligne où des membres de Sensorica ont travaillé à développer leur prototype de capteurs.

Les perspectives L’équipe élabore deux études plus importantes début 2019 pour tester quatre jeux auprès des malades et le capteur développé durant l’éco2FEST.

Son développement Pour répondre à sa mission, la coopérative a créé 56 événements, dont 42 marchés fermiers en 2018. La coopérative reçoit annuellement un appui financier de l’arrondissement Verdun, mais espère devenir autonome dans les années qui suivront l’organisation et la vente des produits. L’accélération éco2FEST Si les deux représentantes de la coopérative, Tracey et Nancy, ne savaient pas ce qui les attendait en s’inscrivant à l’éco2FEST, elles en gardent une bonne expérience. 1. Initialement, la perspective de présenter son projet à PME Montréal a motivé leur implication dans le festival. Durant cette présentation, elles affirment avoir eu des retours critiques qui vont leur permettre d’approfondir leur plan d’affaires tout en travaillant conjointement avec la cellule de Sud-Ouest de PME Montréal. 2. Elles n’ont pas passé du temps au sein de l’atelier, mais ont participé et animé plusieurs conférences tout au long des trois semaines. Durant ces moments de discussions, elles ont pu approfondir la nature de leur organisation : « Sommes-nous une organisation collaborative ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Comment utiliser les outils technologiques pour discuter entre nos membres ? Devons-nous être transparents sur l’ensemble de nos activités ? »

3. Pleinement intégrées dans le personnel de l’éco2FEST, Nancy et Tracey voient dans l’organisation de l’éco2FEST et les pratiques collaboratives mises en œuvre, des pistes de réflexion pour leur propre coopérative. Par exemple, les outils technologies utilisés, les modes d’action, la transparence dans les prises de décisions ou l’atmosphère du lieu. Les perspectives Coop CAUS désire continuer à travailler avec les membres de l’éco2FEST pour structurer et financer une partie des activités de l’organisation. Une formation sur les outils technologiques a été prévue. À l’avenir, Tracey voit une occasion de fabriquer des bacs à compost pour la coopérative à moindre coût. Elle souhaiterait apprendre le processus de conception et de fabrication numérique.

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Profil des festivaliers

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FESTIVAL éco2FEST ÉDITION

HOMMES 54,4% FEMMES 43,9% Sans réponse

2018

1,7%

1 PERSONNE SUR 2 EST ACTIVE PROFESSIONNELLEMENT

15,8%

14% 7%

7% 56,2%

TECHNOLOGIE/ INFORMATIQUE AUTRES

AGE MOYEN DES FESTIVALIERS

39 ANS 40,4% ENTRE 25/34 ANS

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68,4%

ONT DÉJÀ VISITÉ UN ATELIER COMME CELUI DE L'éco2FEST

LA MOITIÉ DES RÉPONDANTS ÉTAIENT PORTEURS D'UNE IDÉE, D'UN PROJET DE FABRICATION

REVENU ANNUEL DES FESTIVALIERS 52,6% ENTRE 0 ET 30.000$

ARTISANAT/ART

ÉTAIENT PORTEURS MAIS SEULEMENT

22,8%

$$$

ENTREPREUNARIAT

ORIGINE GÉOGRAPHIQUE

91,2% DE MONTÉAL 26,3% DE VERDUN

Pour vous, l’éco2FEST, c’est quoi ?

89,5%

39,8%

DONT

RECHERCHE/ ENSEIGNEMENT

DES PERSONNES SONT VENUES SEULES

AVAIENT DÉJÀ PARTICIPÉ À UN FESTIVAL AUTOUR L'ÉCONOMIE ET LA FABRICATION PARTICIPATIVE

NIVEAU D'ÉTUDES

BACCALAURÉAT OU MAÎTRISE

15,8% D'ÉTUDIANTS

67,2%

52,6%

RENCONTRER DES PERSONNES

27,1%

ASSISTER À UNE

CONFÉRENCES

ÉMETTENT UNE OPINION POSITIVE SUR L'ACCUEIL DU PUBLIC

56,4% AFFIRMENT VOULOIR REVENIR RÉGULIÈREMENT SI L'éco2FEST DEVENAIT PERMANENT

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Recommandations

1

Mieux comprendre la dimension territoriale de l’économie collaborative

Tout au long de l’éco2FEST, nous avons pu constater que l’économie collaborative est encore mal connue par le plus grand nombre. Il n’a pas toujours été aisé de distinguer certaines pratiques de l’économie collaborative des initiatives de l’économie sociale et solidaire. En juin 2018, un premier travail de clarification de l’état de la situation de l’économie collaborative au Québec a été effectué (GTEC, 2018)1. Cet exercice doit être approfondi et, plus particulièrement, la compréhension du processus de territorialisation de cette économie. En effet, au fil des thèmes, il est apparu que les pratiques collaboratives dépassaient les périmètres administratifs ou politiques définis. Par exemple, les données ouvertes peuvent être partagées par plusieurs acteurs pour créer de la valeur ajoutée à leur organisation. Qui sont les acteurs ? Comment identifier les réseaux de ces acteurs ? Comment encourager ces systèmes d’innovation ? Par quels modes d’action ? Les réponses à ces questions pourront permettre à l’éco2FEST de mieux comprendre les retombées générées par ces pratiques collaboratives et accompagner le phénomène en faisant le lien avec les acteurs traditionnels de l’économie marchande.

2

Repenser le collaboratif au service du développement local

La documentation des pratiques collaboratives mises en œuvre tout au long du festival montre que l’économie collaborative possède un potentiel à exploiter pour repenser la participation et renforcer les coopérations entre les acteurs d’un même territoire. Pour les prochaines éditions, l’éco2FEST doit appuyer cette dimension qui valorise les organisations présentes sur le territoire. Ce travail devrait également être réalisé étroitement avec un renforcement de la finalité concrète du festival, à savoir l’aide aux porteurs de projets. À la question « Pensez-vous que l’arrondissement de Verdun gagnerait à ouvrir un atelier numérique au grand public ? », une majorité des réponses exprime un désir d’accompagnement entrepreneurial grand public. Autrement dit, avoir accès à un espace et des moyens de production pour développer des projets pour et par les résidents de Verdun. Comme les éditions précédentes, la demande reste présente. Pour y répondre, un rapprochement avec de nouveaux partenaires doit être envisagé pour bénéficier de leur expérience afin de renforcer le parcours de l’entrepreneur collaboratif de l’éco2FEST. Reste à savoir comment cette volonté partagée d’avoir accès à ce type d’espace augmentera la puissance d’agir collective des citoyens.

3

Pérenniser et positionner l’éco2FEST comme un acteur incontournable de l’économie collaborative au Québec

L’éco2FEST doit travailler son rayonnement, son importance, sa visibilité dans les temps faibles qui séparent deux éditions pour garantir sa viabilité à moyen terme. Pour ce faire, plusieurs pistes ont été soulevées lors des dernières discussions au contact de l’équipe : (1) amorcer un processus de création de la reconnaissance légale du «réseau» comme statut juridique ; (2) organiser des conférences auprès d’organismes stratégiques autour de l’économie collaborative pour faire valoir le travail effectué lors de l’édition 2018 ; (3) continuer à accompagner les projets accélérés tout en sensibilisant d’autres entrepreneurs sur ces pratiques collaboratives ; (4) assurer sa stabilité financière en réfléchissant un modèle d’affaires qui diminue la dépendance aux financements publics ; (5) renforcer les liens sociaux avec les individus et organismes qui ont contribué à l’organisation du festival.

1 GTEC. (2018). Moderniser et renforcer les politiques publiques et réussir face aux transformations associées à l’économie collaborative (rapport de travail). Récupéré du site du Ministère de l’économie et de l’innovation du Québec : https://www.economie.gouv.qc.ca/fileadmin/contenu/documents_soutien/entrepreneuriat/economie_collaborative/rapport_gtec.pdf

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Annexes

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Annexe 1 Exemple du questionnaire

Avez-vous des remarques, des suggestions ou des critiques ? Collectif Villes autrement

Pensez-vous que l’arrondissement Verdun gagnerait à ouvrir un atelier numérique similaire au grand public ? Pourquoi ?

Les organisateurs du Festival «Éco2FEST» vous souhaitent la bienvenue à cette édition et vous remercient de bien vouloir répondre à ce questionnaire entièrement anonyme. Vous pouvez écrire au dos de ce questionnaire si nécessaire.Vous pourrez le mettre ensuite dans l’urne ou aux bénévoles chargés de le récupérer. Aidez-nous à mieux vous connaître !

Combien de temps avez-vous passé à l’Éco2FEST ?

Aujourd’hui, vous êtes venu à l’Éco2FEST ... seul avec des amis

en couple avec des collègues

Moins d’une heure Entre 1 et 2 heures

en famille autre

Que comptez-vous faire en venant à l’Éco2FEST ? (plusieurs réponses possibles) Apprendre à manipuler les machines Prototyper un objet Demander des conseils techniques Visiter le lieu Assister à une conférence

Travailler sur place Rencontrer des personnes Soumettre un projet Si autre, précisez

Pensez-vous que ce type d’atelier puisse aider les porteurs de projets à déveOui Non Pourquoi ? lopper leur projet ?

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Est-ce la première fois que vous assistez à un événement de ce type (Festival DIY, Maker Faire, autres) ? Non Si oui, lequel ?

Vous êtes ? Vous vivez ?

Un homme Étudiant

Une femme Actif

À Verdun Au Canada

À Montréal À l’étranger

Sans emploi

Retraité

Au Québec

Votre âge ? Votre profession ?

Êtes-vous satisfait ? la localisation de l’événement ? l’accueil ? l’ambiance ? l’organisation générale ? la programmation ?

La journée entière Je compte revenir avant le 23 novembre

L’Éco2FEST, pour vous, c’est quoi ?

Affiche publicitaire Invitation Autre

Êtes-vous porteur d’une idée, d’un projet de fabrication d’objets que vous désirez développer ? Non Si oui, lequel ?

De De De De De

Entre 2 et 4 heures Plus de 4 heures

Avez-vous déjà fréquenté des ateliers dédiés à la conception et à la fabricaNon Si oui, lequel/lesquels ? tion de prototype ?

Comment avez-vous entendu parler de cette édition de l’Éco2FEST ? Proches Internet Réseaux sociaux

Si l’atelier de l’Éco2FEST devient permanent, viendrez-vous régulièrement ? Si oui, à quelle fréquence ?

Oui Oui Oui Oui Oui

Non Non Non Non Non

Ne Ne Ne Ne Ne

sait sait sait sait sait

pas pas pas pas pas

Quel est votre revenu annuel ? 0 - 15 000 15 001 - 35 000 35 001 - 50 000

50 001 - 75 000 75 001 - 100 000 100 000 et +

Votre plus haut diplôme ?

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Annexe 2

Pensez-vous que ce type d’atelier puisse aider les porteurs de projets à développer leur projet ?

Êtes-vous satisfait de l’organisation générale ?

Êtes-vous satisfait de la localisation ?

Êtes-vous satisfait de la programmation ?

Résultats détaillés des réponses du questionnaire Sexe Le public interrogé lors de l’enquête de novembre 2018 (n=57) est composé de 54,4% d’hommes contre 43,9% de femmes et 1,7% n’ont pas souhaité répondre.

Quel est votre domaine d’activités ?

Est-ce la première fois que vous assistez à un événement de ce type (Festival DIY, Maker Faire, autres) ?

Aujourd’hui, vous êtes venu à l’éco2FEST ...

Avez-vous déjà fréquenté des ateliers dédiés à la conception et à la fabrication de prototype ?

Quel est votre âge ?

Quel est votre revenu annuel ?

Que comptez-vous faire en venant à l’éco2FEST ? (plusieurs réponses possibles)

Êtes-vous satisfait de l’accueil ?

Comment avez-vous entendu parler de l’éco2FEST ?

Vous vivez à ?

Êtes-vous satisfait de l’ambiance ?

Quel est votre plus haut niveau d’étude ? Si l’atelier de l’éco2FEST devient permanent, viendriez-vous régulièrement ?

Quel est votre statut professionnel ? Êtes-vous porteurs d’une idée ou d’un projet de fabrication ?

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Remerciements L’équipe de recherche tient à remercier Agathe Lehel, Tiberius Brastaviceanu, Tracey Arial, Céline Dumas, Nancy Snyitar, Maria Lagarde, Laurence Audette-Lagueux, Julie Tremblay, Isabelle Sawyer, Fabrizzio De Barelli, Hadi Shamieh, Alan Chrétien, Karim Slimani, Virginia Brastaviceanu, Bruce Merlo, Pierre-Laurent Salin de l’Étoile, ainsi que tout ceux qui ont contribué à l’organisation du festival.

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68 Design graphique — Marine Cance [email protected]