Petit à petit, François s’avança plus loin dans les ruelles de plus en plus sombres, jusqu’à apercevoir un quartier beaucoup plus illuminé et bruyant. Lorsqu’il s’engagea dans la petite rue sur la gauche, il faisait déjà noir, les néons de toutes les couleurs éclairaient les nombreux touristes curieux dont certains étaient très intéressés par le show omniprésent se déroulant sous leurs yeux. Des grappes de jeunes filles perchées sur des talons d’une hauteur inhabituelle, court vêtues et aux décolletés généreux invitaient les hommes à passer derrière les tentures rouges, seule barrière entre le dévergondage et la perversité. D’autres, plus loin, attiraient les clients vers les bars le long du trottoir où ils pouvaient consommer des boissons à des prix très démocratiques. L’une d’elles, s’approcha de François et lui indiqua un tabouret libre dans un bar déjà très fréquenté. Après un moment d’hésitation, le jeune homme obéit sans résistance, puis s’installa à l’endroit indiqué. Quelques instants plus tard, une barmaid lui apporta une bière avec un énorme sourire, il suivit la jolie rabatteuse des yeux avec un regard amusé. De son poste d’observation, il pouvait voir les allées et venues de clients frénétiques adeptes du rideau rouge. Proie facile, François fut abordé immédiatement par une fille aux cheveux teints en blond, elle portait une jolie robe rouge et des escarpins de la même couleur. Elle parlait à peine l’anglais ce qui permit à François de s’en débarrasser assez rapidement. Quelques instants plus tard, une autre fille plus jeune s’approcha de lui et lui demanda gentiment, dans un très bon anglais, la permission de s’asseoir. Sans attendre la
réponse, la fille engagea immédiatement la conversation : — C’est la première fois que tu viens à Bangkok, demandat-elle en plongeant ses yeux dans ceux du jeune homme. — Oui, répondit François complètement déstabilisé. — Moi aussi, je ne suis là que depuis une semaine, je travaille dans ce bar, elle pointa le rideau rouge du doigt. Mon œil, pensa François trop sûr de lui. — Je peux prendre un verre avec toi ? Avant que le jeune homme ne dise quoi que ce soit, un serveur déposa une boisson en face de la demoiselle. Elle semblait sensible et presque réservée, malgré son approche directe. C’est son métier, pensa François. Il avait de la compassion pour cette jeune femme. Elle avait un visage de poupée, des traits fins, différente des autres femmes thaïlandaises. Elle lui vanta les charmes des danseuses du bar dont elle faisait partie, mais entre les shows, elle devait jouer le rôle de recruteuse de clients et les inciter à passer le rideau. Elle jouait franc jeu, ils discutèrent encore quelques minutes ensemble jusqu’au moment où un homme plus âgé lui fit signe de rentrer. — Viens avec moi à l’intérieur, dit-elle en se levant. — Non, tu es gentille, je préfère rentrer. — Une autre fois alors, tu viendras me voir. C’est comment ton nom, moi, c’est Britney. — Je m’appelle François.
