OBÉSITÉ ET GROSSESSE

soit la dérivation gastrique Roux-en-Y. Il est important de connaître le type d'intervention qu'a subi la patiente, car les complications ne sont pas les mêmes.
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C O N T I N U E

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OBÉSITÉ ET GROSSESSE UNE SURCHARGE DE COMPLICATIONS ! Mme Auger se présente pour sa première visite de grossesse. Son indice de masse corporelle est de 34, malgré une perte de quinze livres depuis sa dernière grossesse. Déçue de son poids, elle est surtout inquiète pour l’accouchement, se souvenant encore du premier (hypertension de grossesse, déclenchement du travail pendant des heures) qui s’est finalement terminé par une césarienne. Elle espère bien éviter que la même histoire ne se reproduise. Que lui conseillez-vous ? Véronique Fournier

VRAI

FAUX

1.

Une femme obèse devrait prendre entre 7 kg et 12 kg durant la grossesse.

(

(

2.

Une perte de poids en cours de grossesse chez une patiente obèse diminue le risque de complications obstétricales.

(

(

3.

L’exercice est plus efficace que l’alimentation pour éviter un gain de poids excessif pendant la grossesse.

(

(

4.

Une diminution de poids entre les grossesses permet d’augmenter le taux de succès d’un accouchement vaginal après césarienne.

(

(

5.

Les patientes obèses sont plus susceptibles de subir un déclenchement artificiel du travail.

(

(

6.

Les patientes obèses ont un premier et un deuxième stade du travail plus long.

(

(

7.

L’obésité maternelle augmente le risque d’obésité infantile.

(

(

8.

La chirurgie bariatrique de type malabsorption est associée à des bébés de petit poids pour l’âge gestationnel.

(

(

9.

Un délai de deux ans entre la chirurgie bariatrique et la conception est suggéré afin de diminuer les risques de complications chez la mère et le fœtus.

(

(

La Dre Véronique Fournier, omnipraticienne, exerce au Département de périnatalité et à l’UMF de l’Hôpital Charles-Le Moyne. Elle est professeure adjointe au Département de médecine de famille et de médecine d’urgence de l’Université de Sherbrooke. lemedecinduquebec.org

35

TABLEAU I

COMPLICATIONS ASSOCIÉES À L’OBÉSITÉ PENDANT LA GROSSESSE1

Chez la mère h Infertilité h Avortement spontané h Trouble hypertensif de la grossesse h Diabète de grossesse h Apnée du sommeil h Complications anesthésiques h Césarienne h Hémorragie post-partum h Thrombo-embolie veineuse h Infection des plaies et endométrite Chez le fœtus h Malformation congénitale h Macrosomie h Prématurité h Admission aux soins intensifs néonataux h Mortinaissance et mortalité néonatale h Obésité infantile et risque de maladies chroniques

1. UNE FEMME OBÈSE DEVRAIT PRENDRE ENTRE 7 KG ET 12 KG DURANT LA GROSSESSE. FAUX. Des recommandations sur le gain de poids idéal pendant la grossesse ont été créées par l’Institute of Medicine afin de réduire les complications chez la mère et le fœtus (tableau I1). Le gain de poids varie en fonction de l’indice de masse corporelle (IMC), qui doit être déterminé à la première visite de suivi de grossesse (tableau II2). Un gain de poids de 5 kg à 9 kg est recommandé chez les patientes obèses. Selon une étude canadienne, les patientes sont peu conseillées sur le gain de poids idéal pendant la grossesse et sur les risques associés à un gain de poids inapproprié3. Il n’y a malheureusement pas encore de lignes directrices sur le gain de poids optimal selon l’importance de l’obésité en raison du manque de données. Santé Canada a créé un diagramme qui permet au praticien et à la patiente de repérer rapidement un gain de poids inadéquat (figure 12).

2. UNE PERTE DE POIDS PENDANT LA GROSSESSE CHEZ UNE PATIENTE OBÈSE DIMINUE LE RISQUE DE COMPLICATIONS OBSTÉTRICALES. FAUX. Les données actuelles sur un gain de poids insuffisant ou sur la perte de poids chez une patiente enceinte obèse sont controversées. Même si une diminution des taux de césarienne non planifiée, de bébés de gros poids pour l’âge gestationnel et d’hypertension de la grossesse est observée, on note également une augmentation des taux de bébés de petit poids pour l’âge gestationnel et d’accouchements prématurés4.

36

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TABLEAU II

IMC avant la grossesse

GAIN DE POIDS RECOMMANDÉ PENDANT LA GROSSESSE SELON L’IMC Gain de poids moyen pendant le 2e et le 3e trimestre

Gain de poids total

Kg/sem

Lb/sem

Kg

Lb

, 18,5

0,5

1

12,5 – 18

28 – 40

18,5 – 24,9

0,4

1

11,5 – 16

25 – 35

25 – 29,9

0,3

0,6

7 – 11,5

15 – 25

> 30

0,2

0,5

5–9

11 – 20

Source : Santé Canada. Lignes directrices sur la nutrition pendant la grossesse à l’intention des professionnels de la santé : gain de poids pendant la grossesse. Ottawa : Santé Canada. 2010. Reproduction autorisée.

Lorsque les patientes obèses sont divisées par classe d’obésité, les obèses de classe III (IMC . 40) semblent bénéficier d’une légère perte de poids (moins de 5 kg) sans accroître le risque de bébés de petits poids5. À l’heure actuelle, l’American Congress of Obstetricians and Gynecologists (ACOG)6 et Santé Canada2 recommandent de conserver un gain de poids de 5 kg à 9 kg pendant la grossesse, peu importe le degré d’obésité, étant donné le peu de données sur les conséquences à long terme. La prudence s’impose lorsqu’une patiente obèse n’atteint pas les cibles. Un suivi de la croissance fœtale au troisième trimestre devrait être envisagé jusqu’à ce que plus d’études nous confirment les risques selon les classes d’obésité.

3. L’EXERCICE EST PLUS EFFICACE QUE L’ALIMENTATION POUR ÉVITER UN GAIN DE POIDS EXCESSIF PENDANT LA GROSSESSE. FAUX. L’alimentation, l’exercice et les changements d’habitude de vie sont les principales stratégies disponibles pour éviter un gain de poids excessif et diminuer les complications obstétricales. La plupart des essais à répartition aléatoire n’ont pas réussi à montrer que les interventions diminuent les complications obstétricales chez la mère et le fœtus. Cependant, les essais étaient de petite taille et de faible qualité méthodologique. Une revue Cochrane a évalué le recours à des interventions telles que l’alimentation, l’exercice ou une association des deux par rapport à un groupe témoin. Elle a révélé une diminution de 20 % du gain de poids excessif pendant la grossesse dans le groupe ayant adopté les interventions, mais aucune réduction des complications obstétricales7. Dans une autre étude à répartition aléatoire, l’étude LIMIT, les femmes enceintes devaient suivre plusieurs interventions (alimentation, exercice et stratégies comportementales). Les femmes du groupe expérimental ont eu 18 % moins d’enfants souffrant de macro-

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Gain de poids

FIGURE 1 Kg 23 22 21 20 19 18 17 16 15 14 13 12 11 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 -1 -2 -3

Lb 51 48 46 44 42 40 37 35 33 31 29 26 24 22 20 18 15 13 11 9 7 4 2 0 -2 -4 -6

C O N T I N U E

//

SUIVI DU GAIN DE POIDS SELON L’IMC PENDANT LA GROSSESSE

2

4

6

8

10

12

14

16

18

20

22

24

26

28

30

32

34

36

38

40

Semaines de grossesse

Légende

IMC avant la grossesse

Intervalle de gain de poids total recommandé

, 18,5

12,5 kg – 18 kg (28 lb – 40 lb)

18,5 – 24,9

11,5 kg – 16 kg (25 lb – 35 lb)

25,0 – 29,9

7 kg – 11,5 kg (15 lb – 25 lb)

> 30

5 kg – 9 kg (11 lb – 20 lb)

Source : Santé Canada. Lignes directrices sur la nutrition pendant la grossesse à l’intention des professionnels de la santé : gain de poids pendant la grossesse. Ottawa : Santé Canada. 2010. Reproduction autorisée.

somie (poids . 4000 g), le nombre de patients à traiter (NNT) étant de 28. Une diminution significative des enfants pesant plus de 4500 g (NNT : 66)8 a aussi été notée.

une augmentation de l’effort cardiovasculaire causée par le gain de poids, une crainte de nuire au bébé, une diminution de l’estime corporelle et le manque de soutien du milieu médical.

Dans une autre revue systématique, les stratégies diététiques étaient plus efficaces que l’exercice pour réduire le gain de poids pendant la grossesse6. Dans la plupart des études, l’exercice n’a pas apporté d’avantages aux femmes enceintes obèses en raison d’une faible participation au programme d’activité physique. Dans une étude sur l’effet de l’exercice sur vélo stationnaire à la maison et sur la surveillance de la fréquence cardiaque, aucune différence n’a été constatée en ce qui a trait aux problèmes obstétricaux et périnatals. Par contre, le taux de participation aux séances d’exercices n’était que de 33 %9. Plusieurs raisons expliquent cette faible participation : les changements physiologiques de la grossesse,

Au Canada, des lignes directrices guident les patientes enceintes qui veulent faire de l’exercice physique en toute sécurité. Les professionnels de la santé peuvent déterminer les patientes ayant des contre-indications à l’exercice avec l’outil X-AAP pour les femmes enceintes à l’hyperlien suivant : www.csep.ca/ cmfiles/publications/parq/x-aapenceintes.pdf.

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Les femmes enceintes obèses et sédentaires devraient commencer par une activité aérobique à une intensité de 20 % à 39 % de leur capacité aérobie maximale10. Cette intensité est considérée comme moins difficile à maintenir et décourage moins les patientes sédentaires, tout en apportant des bien-

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CIBLES DE FRÉQUENCE CARDIAQUE SÛRE PENDANT L’EXERCICE CHEZ LA FEMME ENCEINTE

TABLEAU III

PRESCRIPTION D’ACTIVITÉS PHYSIQUES PENDANT LA GROSSESSE11

TABLEAU IV

Viser trois ou quatre séances par semaine

h

Âge de la mère

Condition physique ou IMC

Fréquence cardiaque visée (battements par minute)

, 20 ans



140 – 155

20 – 29 ans

Peu active

129 – 144

Active

135 – 150

En bonne forme physique

145 – 160

IMC . 25 kg/m

102 – 124

Peu active

128 – 144

Active

130 – 145

2

30 – 39 ans

En bonne forme physique

140 – 156

IMC . 25 kg/m

101 – 120

2

Source : Société canadienne de physiologie de l’exercice. X-AAP pour les femmes enceintes Évaluation médicale de l’aptitude à l’activité physique. Ottawa : la Société ; 2015. 4 p. Reproduction autorisée.

faits. Des zones de fréquence cardiaque sûres ont été établies (tableaux III10 et IV11).

4. UNE DIMINUTION DU POIDS ENTRE LES GROSSESSES PERMET D’AUGMENTER LE TAUX DE SUCCÈS D’UN ACCOUCHEMENT VAGINAL APRÈS CÉSARIENNE. VRAI.

38

Commencer par des séances de 25 minutes et augmenter de 2 minutes par semaine jusqu’à 40 minutes

h

Viser les cibles cardiaques selon l’âge ou la condition physique ou effectuer le test de la conversation : l’intensité de l’activité est trop élevée si la patiente n’est pas en mesure de parler pendant l’exercice

h

RELATION LINÉAIRE ENTRE L’IMC AVANT LA GROSSESSE, LE TAUX D’ÉCHEC D’UN AVAC ET LE TAUX DE RUPTURE UTÉRINE12

TABLEAU V

IMC

Taux échec de l’AVAC* (%)

Taux de déhiscence de l’utérus ou de rupture utérine (%)

19,8 – 24,9

15

0,9

30 – 39,9

30

1,4

. 40

39

2,1

*AVAC : ac­couchement vaginal après césarienne

5. LES PATIENTES OBÈSES SONT PLUS SUSCEPTIBLES DE SUBIR UN DÉCLENCHEMENT ARTIFICIEL DU TRAVAIL. VRAI.

L’obésité diminue grandement les chances de réussir un ac­couchement vaginal après césarienne (AVAC) et augmente les risques de morbidités maternelles et fœtales. Les patientes atteintes d’obésité morbide (IMC . 40) qui tentent un AVAC ont, comparativement à celles qui subissent une césarienne planifiée, cinq fois plus de risque de subir une rupture ou une déhiscence de l’utérus (tableau V12). De plus, leurs bébés ont cinq fois plus de risque de lésions néonatales, comme des fractures ou une atteinte du plexus brachial12.

L’obésité double le risque de déclenchement artificiel du travail même après un ajustement des complications anténatales. Il existe une relation linéaire entre le risque de déclenchement artificiel du travail et l’IMC. L’obésité maternelle seule n’est pas une indication de déclenchement du travail6. Le taux accru d’échec de cette intervention chez les patientes obèses augmente le taux de césarienne dans une population déjà à risque (figure 214).

Une étude de cohorte rétrospective menée aux États-Unis a révélé qu’une diminution de l’IMC entre les grossesses augmentait le taux de réussite de l’AVAC. Une perte de poids de seulement un point d’IMC (1 kg/m2), qui équivaut à environ six livres, augmente les chances de réussite de l’AVAC de 24 % comparativement au maintien du poids13. De plus, une réduction d’au moins deux points d’IMC entre les grossesses diminue de 40 % le risque d’avoir un bébé de gros poids pour l’âge gestationnel. La période post-partum est le moment idéal pour encourager les femmes à perdre du poids puisqu’une faible diminution du poids avant une future grossesse a un effet positif sur les problèmes obstétricaux.

Il existe aussi une association entre l’obésité et le post-datisme. Selon l’hypothèse principale, le calcul de l’âge gestationnel à partir de la date des dernières menstruations surestime l’âge véritable du fœtus chez ces patientes qui sont souvent oligoovulatoires. Des études récentes appuient cette hypothèse, car il existe une grande disparité entre l’âge gestationnel estimé en fonction de la date des dernières menstruations et l’âge gestationnel à l’échographie de datation. La SOGC recommande une échographie de datation précoce chez toutes les patientes au premier trimestre1. Dans les milieux où les ressources sont limitées, les patientes obèses devraient être priorisées afin d’obtenir une datation précise de la grossesse et de diminuer

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RISQUE RELATIF DE CÉSARIENNE D’URGENCE SELON L’IMC AVANT LA GROSSESSE

Risque relatif (IC à 95 %)

FIGURE 2 6

//

BILAN NUTRITIONNEL SUGGÉRÉ APRÈS UNE CHIRURGIE BARIATRIQUE PENDANT LE SUIVI DE GROSSESSE18

Premier trimestre* h Formule sanguine h Fer et ferritine h Vitamine B 12 h Acide folique h Calcium h Vitamine D

5 4 3 2 1 0

TABLEAU VI

C O N T I N U E

* Bilan à répéter tous les trimestres, sauf pour l’acide folique

5 18,

5– 18,

,9 24

25



,9 29

,9 34

– 30 IMC

35



,9 39

.

40

Risque relatif des femmes norvégiennes entre 1999 et 2008 ajusté selon le gain de poids pendant la grossesse, l’âge de la mère, la parité, le tabagisme Source : Morken NH, Klungsoyr K, Magnus P et coll. Pre-pregnant body mass index, gestational weight gain and the risk of operative delivery. Acta Obstet Gynecol Scand 2013 ; 92 (7) : 809-15. Reproduction autorisée.

le risque de déclenchement du travail. De plus, selon une seconde hypothèse, une élévation du taux d’œstrogènes chez les patientes obèses pourrait aussi interférer avec le déclenchement spontané du travail.

6. LES PATIENTES OBÈSES ONT UN PREMIER ET UN DEUXIÈME STADE DU TRAVAIL PLUS LONG. FAUX. Les femmes obèses ont un premier stade actif plus long que les femmes de poids normal. La dilatation se fait plus lentement, surtout entre 4 cm et 6 cm, autant chez les nullipares que chez les multipares15. Par contre, l’augmentation de l’IMC n’est pas associée à une prolongation du deuxième stade6. Par conséquent, avant d’envisager une césarienne, il faut être plus patient pendant le premier stade chez les patientes obèses qui présentent un arrêt de progression sans complications pour le fœtus.

7. L’OBÉSITÉ MATERNELLE AUGMENTE LE RISQUE D’OBÉSITÉ INFANTILE. VRAI. Le risque de macrosomie des enfants nés de mères obèses est doublé. Le taux de bébés de gros poids pour l’âge gestationnel augmente de manière proportionnelle à l’IMC. Le bébé a alors un pourcentage de masse adipeuse plus élevé et un risque d’obésité dans l’enfance deux fois plus important ainsi qu’un risque accru de syndrome métabolique6. L’augmentation persiste même après l’ajustement pour le diabète de grossesse et le gain de poids pendant la grossesse. Les influences postnatales sont des facteurs de confusion qui limitent l’interprétation des résultats. Les enfants nés d’une mère ayant subi une chirurgie bariatrique avaient moins de risque d’être gros

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pour leur âge gestationnel et de souffrir d’obésité que leurs frères et sœurs nés avant la perte de poids. L’obésité n’augmente pas les risques de dystocie de l’épaule, mais la macrosomie (dont le taux est élevé chez les patientes obèses) constitue un facteur de risque. Le praticien devrait toujours être prêt pour cette complication, car le poids de naissance est souvent inconnu.

8. LA CHIRURGIE BARIATRIQUE DE TYPE MALABSORPTION EST ASSOCIÉE À DES BÉBÉS DE PETIT POIDS POUR L’ÂGE GESTATIONNEL. VRAI. La chirurgie bariatrique est une option efficace pour la perte de poids. Elle est indiquée chez les patientes dont l’IMC dépasse 40 ou encore 35 en présence de maladies comorbides. Il existe plusieurs types de chirurgie bariatrique : h l’intervention restrictive : anneau gastrique, gastrectomie verticale ; h l’intervention de type malabsorption : dérivation biliopancréatique ; h l’intervention combinée : association des deux premières, soit la dérivation gastrique Roux-en-Y. Il est important de connaître le type d’intervention qu’a subi la patiente, car les complications ne sont pas les mêmes. Ainsi, plusieurs études montrent une diminution des risques de diabète de grossesse, de troubles hypertensifs liés à la grossesse et de bébé de gros poids pour l’âge gestationnel, peu importe le type d’intervention effectuée. Par contre, les données sont plus contradictoires quant au retard de croissance intrautérin et aux bébés de petit poids pour l’âge gestationnel. Deux études de cohorte récentes ont montré un risque doublé de bébés de petit poids pour l’âge gestationnel après une intervention bariatrique de malabsorption, mais sans augmentation du risque pour les in­ter­ventions restrictives16,17. L’hypothèse est que la chirurgie bariatrique de malabsorption cause une perte rapide du poids et entraîne des carences provoquées par la malabsorption.

39

9. UN DÉLAI DE DEUX ANS EST SUGGÉRÉ ENTRE LA CHIRURGIE BARIATRIQUE ET LA CONCEPTION AFIN DE DIMINUER LES RISQUES DE COMPLICATIONS CHEZ LA MÈRE ET LE FŒTUS. FAUX. L’ACOG recommande un délai de douze à dix-huit mois entre la chirurgie bariatrique et la conception18. Ce délai permettrait d’optimiser la perte de poids et de diminuer l’exposition du fœtus aux carences nutritionnelles possibles après une telle intervention. Cependant, les études comparant le délai entre l’intervention et la conception n’ont révélé aucune différence quant au taux de complications obstétricales. Les femmes qui conçoivent avant ce délai peuvent donc être rassurées.

CE QUE VOUS DEVEZ RETENIR Les complications obstétricales augmentent de manière proportionnelle à l’IMC. h Une faible perte de poids entre les grossesses peut réduire le taux de complications obstétricales. h L’obésité maternelle augmente le risque d’obésité infantile, ce qui crée un cercle vicieux au long terme et augmente la proportion de patientes à risque. h

BIBLIOGRAPHIE Peu importe le délai et le type d’intervention, une surveillance des apports nutritionnels ainsi qu’un suivi de la croissance fœtale au troisième trimestre sont recommandés. Une consultation en nutrition de même que des bilans sanguins permettent d’éliminer les carences nutritionnelles. Le tableau VI18 indique le bilan nutritionnel suggéré par l’ACOG pendant la grossesse après une chirurgie bariatrique. La prise d’une multivitamine prénatale ainsi que l’ajout d’un supplément de vitamine B12 et de calcium suffisent chez ces patientes. La découverte d’une carence doit être corrigée et surveillée chaque mois jusqu’à sa disparition. La prescription de carbonate de calcium est préférable à celle de citrate de calcium, car l’absorption du carbonate dépend moins de l’acidité gastrique. Il est important d’offrir un supplément de thiamine aux patientes ayant une dérivation gastrique et qui souffre d’hyperémèse ou de tout autre problème occasionnant des vomissements afin d’éviter une encéphalopathie de Wernicke. De plus, un apport en vitamine A ne devrait pas dépasser 5000 unités internationales par jour afin d’éviter un syndrome d’embryopathie rétinoïque.

RETOUR SUR L’AMORCE Mme Auger revient pour sa visite post-natale. Elle est très contente de ne pas avoir souffert d’hypertension de grossesse ni d’avoir subi un déclenchement artificiel du travail. Elle est surtout très fière d’avoir réussi son AVAC grâce aux quinze li­vres qu’elle avait perdues avant sa grossesse. Elle compte d’ail­ leurs reprendre l’exercice dès maintenant si vous l’autorisez. // Date de réception : le 19 décembre 2016 Date d’acceptation : le 23 janvier 2017 La Dre Véronique Fournier est instructeur pour le programme GESTA pour la SOGC depuis janvier 2016.

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