Besançon, le 28/12/18. Mon cher vieux Je crains bien de te dire les même choses que celles que j’ai écrites ces jours derniers, car j’ai écrit 1 lettre à grand-mère, + 1 à tante Marguerite, 1 à cousine Rosine, + à Tante Laure, à tante Caroline, 1 à Marcelle, 1 à Mlle Vallenjeane ( ?) , 1 à Mlle Bougeurille ( ?) (répétitrice de latin), 1 à Jean Heymann, 1 à Jacques Protard, 1 à Gustave Diébold, 1 à Thérèse Dusart : au total 14 ! J’ai été, il y a 3 jours, voir une représentation au Kursaal, très bien, donné à la cause des prisonniers de guerre expatriés ( ?), en passage à Besançon. Il y avait en particulier des acrobates merveilleux et le film de cinéma représentant l’entrée des Français à Mulhouse. xxx j’ai eu l’honneur de voir le Monsieur, autrement dit Henri Zivy, qui est venu déjeuné à la maison. Il a été épaté de ce que papa ait des cigarettes américaines : lui en avait de soldats américains, par l’intermédiaire de ses soldats. Mais papa n’a qu’à s’adresser au général américain, qui habite près d’ici, au Valdhaon. Et par-dessus le marché, le dimanche 5 Janvier, nous aurons l’honneur d’avoir 2 majors américains à notre table, pour déjeuner, seulement, l’un qui s’appelle Clarke, et l’autre Lemarié. Et toi, ne vois-tu pas d’américains, d’anglais, de italiens, et de nos coloniaux, annamites ou autres ? C’est bien dommage que tu ne sois pas allé en Bochie. Car peu de personnes savent l’allemand comme toi. La dernière lettre que nous avons reçue de Pierre est datée du 20. Le courrier ne va pas très vite ! Je ne t’ai peut-être pas dit que j’ai vu Mignon. Après coup je suis sûr que si. En ce moment, je suis en train de lire la Guerre de 1870 du Lt Cl Rousset, et »Ma Pièce » de Paul Lintier. Connais-tu ces ouvrages ? Le 2ème est très chic, mais triste. Je ne te dis pas mon impression sur le 1er que je viens d’attaquer, car il est en 2 volumes de format 20 à 25 sur 50 à 60, et d’une épaisseur de 550 pages. J’ai de quoi occuper la fin des vacances du Nouvel An. Le livre que tu as envoyé à papa, le fait poiler. Mais il trouve qu’André Spire fait des fautes de français. Une anecdote ou 2 sur la bonne et je termine ma lettre. Etienne a 13 ans Papa nous lisait le passage de Spire sur Barras : nous ne faisions aucun bruit, et la bonne, qui mettait le couvert à côté, a écouté papa lire. Besançon est le dernier poste occupé par son père, Une autre fois, je disais à papa : tu es bien scandalisé, il n’y a pas de quoi, et Victorine qui chaussait maman, le Général Lévy lui a dit. « J’ose pas dire à Mme, on se moquerait de moi : il n’y a que les petits esprits qui se scandalisent, jamais les grands » Pas mal hein, celle-là ! Jean est encore au Bien vite, car je suis pressé, j’achève ma lettre en te souhaitant une bonne année, et je t’embrasse bien 222e Régt d’artillerie, affectueusement : avant de retourner faire sa 2ème année à l’X

Etienne Lévy